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QUELLES RELATIONS ENTRE MANAGEMENT DES RISQUES

INDUSTRIELS ET RSE ?

Raymond Bou Nader, Delphine van Hoorebeke

De Boeck Supérieur | « Projectics / Proyéctica / Projectique »

2020/1 n°25 | pages 9 à 25


ISSN 2031-9703
© De Boeck Supérieur | Téléchargé le 07/11/2021 sur www.cairn.info par Salaheddine AIT BELHADJ (IP: 41.249.205.102)

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ISBN 9782807393868
DOI 10.3917/proj.025.0009
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-projectique-2020-1-page-9.htm
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Quelles relations entre management des risques industriels et RSE ?

QUELLES RELATIONS ENTRE


MANAGEMENT DES RISQUES
INDUSTRIELS ET RSE ?
Raymond Bou Nader
Université Saint Joseph Beyrouth, Institut de Gestion des Entreprises

Delphine van Hoorebeke


Université de Toulon
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d’autre part, en utilisant le risque dans les entre-
RÉ SUM É des techniques de statis- prises. Notre recherche
tique. C’est dans ce der- met l’accent sur le mana-
Notre article consiste nier cas que la contribution gement et les pratiques
à étudier la pratique principale de cet article a de l’entreprise en termes
actuelle de la RSE dans le été réalisée. Ainsi, cette de gestion du risque, afin
contexte des compagnies recherche a permis de de mieux gérer par la RSE
libanaises à caractère percevoir la RSE comme les impacts sociaux, envi-
industriel, et à examiner étant plus qu’un simple ronnementaux, et com-
la relation entre les pra- outil de marketing et de munautaires de leurs
tiques RSE d’une part et le relations publiques mais activités.
management des risques aussi un vrai outil influant

Mots-clés : RSE, management du risque, modélisation statistique

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RAYMOND BOU NADER, DELPHINE VAN HOOREBEKE

techniques. It is in the lat- base in this field in the


ABSTRACT ter that the main contri- Lebanese context, focus-
bution of this article has ing on the management
The aim of our article is to been made. This research and practices of the com-
study the current practice has made it possible to pany in terms of risk man-
of CSR in the context of the perceive CSR as more than agement, in order to better
Lebanese industrial com- just a marketing and pub- manage the social, envi-
panies and to examine the lic relations tool but also a ronmental, and commu-
relationship between CSR real tool influencing risk in nity based activities by
practices and risk man- companies. Our research CSR.
agement, using statistical broadens the knowledge

Keywords: CSR, risk management, statistical modeling


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INTRODUCTION
La Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) a été présente au sein des
sociétés depuis longtemps, mais elle est toujours perçue et considérée comme
un ensemble d’activités adoptées pour améliorer l’image d’une entreprise, et
donc comme des activités supplémentaires de relations publiques. En outre, il
semble que l’intérêt porté à la RSE est toujours cyclique et marginal et que la
RSE elle-même constitue un instrument pour améliorer l’image altérée d’une
organisation ou une sorte de prolongement de ses activités de marketing. De
plus, les pratiques de RSE sont souvent évaluées de manière simplifiée et
superficielle lorsque les déclarations des chefs d’entreprise et la présence
formelle de systèmes de gestion de l’environnement sont par exemple équi-
valentes et cohérentes avec les activités réelles de la RSE (Bondy, et al., 2008).
En conséquence, notre connaissance de la mesure dans laquelle les pratiques
de RSE ont pénétré le tissu du comportement commercial et industriel est
encore embryonnaire. Afin d’améliorer notre compréhension de l’influence
de la RSE sur les pratiques industrielles et commerciales, la recherche doit
se concentrer sur les politiques et les activités spécifiques par lesquelles les
gestionnaires tentent de mettre en œuvre un engagement théorique vis-à-vis
des objectifs sociaux, environnementaux et économiques (Wood, 2010). Voilà
pourquoi il est difficile de démontrer de façon tranchante que la RSE est un
élément essentiel dans la gestion de l’organisation, qu’elle joue un rôle par-
ticulier dans sa stratégie, et qu’elle affecte le bon fonctionnement de l’orga-
nisation.
Cependant, on ne peut pas contester les relations d’interdépendance
mutuelles entre la RSE et la gestion des risques. La RSE montre comment
éviter les risques (ou les minimiser), ce qui constitue en soi l’objet de la ges-
tion des risques (Gladys, 2007).
Ainsi, on doit souligner que la RSE englobe non seulement des activités
liées à la réduction de la probabilité du risque (par exemple la perte de répu-
tation, baisse des ventes) ou leurs conséquences. Elle constitue notamment

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un élément essentiel de la gestion d’une entreprise, selon plusieurs obser-


vations. Cette idée est certainement liée au fait que la RSE n’est plus perçue
comme une réaction à une situation spécifique, mais comme un instrument
servant à atténuer les risques ; ce qui présente, à son tour, un élément impor-
tant de la gestion de l’entreprise. Nous pouvons, donc, envisager et poser l’hy-
pothèse centrale que la RSE constitue un élément essentiel du processus
de la gestion des risques, ce qui implique l’identification des risques appro-
priés, la définition de leur influence et les moyens de réduire la probabilité des
risques et leurs conséquences.
Notre problématique repose ainsi sur la façon de manager la combinai-
son de ces deux systèmes complexes. Cette dernière ne serait satisfaisante
si elle n’interrogeait pas à la fois l’intérêt et la limite d’un tel outil de mesure
pour pourvoir, tant que faire se peut, à une combinaison opérante et ration-
nelle dans un système de décisions complexes, même si, selon Smith et Irwin
(2006), la plupart des normes générales relatives à la gestion des risques ren-
contrés au sein de l’industrie, représente une dimension rationnelle et linéaire.
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En cela, pour y répondre, une première partie réalise une revue de litté-
rature composée d’un chapitre sur les liens entre la RSE et la gestion des
risques et d’un chapitre qui interroge sur les effets de la RSE sur la gestion des
risques. Cette première partie montre les nombreuses contradictions issues
des résultats obtenus par les études antérieures et nous conduit à poser nos
hypothèses pour satisfaire à notre objectif de modéliser une combinaison des
deux concepts. Suite à une analyse quantitative réalisée auprès de 160 sala-
riés d’entreprises libanaises, le modèle obtenu est discuté à propos de ses
avantages et inconvénients. Enfin, les limites, apports et voies de recherche
sont présentés en conclusion.

LA RSE ET LA GESTION DU RISQUE


Si vous essayez de trouver des connexions et des interdépendances entre la
RSE et la gestion des risques sans avoir recours à une analyse approfondie, il
semble que ces deux concepts sont bien écartés l’un de l’autre et n’ont presque
rien en commun. Cependant, l’un des objectifs de la RSE est de minimiser l’in-
fluence négative, qui peut être perçue à la lumière du risque, en ayant recours
aux moyens utilisés dans un processus de gestion des risques. La gestion du
risque tel quel, n’est pas un processus unifié. Son établissement dépend en
grande partie du risque auquel il s’associe. De même, le risque selon la RSE
doit être géré à l’aide d’instruments appropriés, car ce sont généralement des
risques opérationnels ou non financiers et de réputation ou d’image. Les rai-
sons pour lesquelles les entreprises décident de gérer les risques dans le
domaine de la RSE sont liées directement à leur volonté d’améliorer l’image
et maintenir la bonne réputation (Bebbington 2004).
Néanmoins, en se basant sur les domaines de la responsabilité sociale
identifiés par la norme ISO 26000, on peut dénoter les risques auxquels ils
sont associés. Ces domaines comprennent (PKN, 2010) : la structure de l’or-
ganisation, les droits de l’homme, les relations de travail, la protection de la

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RAYMOND BOU NADER, DELPHINE VAN HOOREBEKE

nature, les pratiques honnêtes du marché, les relations avec les clients, l’en-
gagement social.
Il est également à noter que la RSE constitue une conséquence de nom-
breux facteurs affectant l’activité de l’entreprise sur les plans suivants
(Rubicka, 2011) :
Économique : par exemple la façon de gérer la valeur de l’entreprise, la
politique d’investissement, la politique de rémunération, la gestion des rela-
tions avec les fournisseurs et les clients,… Environnemental : par exemple
la disponibilité des ressources, les catastrophes écologiques, les modifica-
tions des réglementations juridiques sur la protection de la nature, les échecs,
les moyens de production, la longueur de la chaîne d’approvisionnement,…
Juridique : par exemple la présence de règlements et l’étanchéité du système
juridique, Culturel : par exemple le système de valeurs et le comportement
adopté par les membres d’une organisation, Personnel : par exemple l’ap-
proche individuelle adoptée face aux problèmes de l’organisation.
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Il est ainsi perceptible qu’en analysant le risque et la RSE, il faut accor-
der une attention particulière au dialogue avec les parties prenantes les plus
importantes, et cela rend ce processus différent de ceux de gestion d’autres
types de risques. La bonne mise en place d’une stratégie de dialogue qui com-
prend une certaine mise en forme et une évaluation appropriée des attentes
permet de soutenir le processus de gestion des risques et d’accroître son effi-
cacité. Lorsqu’il s’agit de la RSE, les parties prenantes sont des « porteuses de
risques », et peuvent être des parties prenantes volontaires (des investisseurs
par exemple) ou des parties prenantes involontaires, qui ne sont pas nécessai-
rement en relation avec l’organisation par leur propre choix (Clarkson, 1994).
En récapitulant les connections et les dépendances entre la RSE et la ges-
tion des risques, il convient d’essayer de définir « le rôle de la RSE dans la ges-
tion des risques ».
En référence à la RSE, la gestion des risques doit être envisagée comme
une stratégie, une politique, ou des processus visant à aborder les facteurs
éthiques, sociaux et environnementaux potentiels. Or, en influençant les par-
ties prenantes, ces facteurs sont au désavantage de l’organisation (Wisser,
2007). Dans un tel contexte, la RSE est, selon nous, l’un des principaux moyens
de la gestion des risques des facteurs sociaux et de leur influence sur l’aspect
financier d’une organisation.
Chaque processus de gestion des risques repose sur un cadre défini et sur
une méthodologie établie. La gestion des risques RSE peut être beaucoup plus
efficacement mise en œuvre en existant déjà dans le processus de gestion des
risques d’une société. Cela n’influencera pas uniquement la réduction de pro-
babilité de risque, mais sera aussi un signe positif pour toutes les parties pre-
nantes (Gladys, 2007).
Deux approches existent : l’approche descendante et l’approche ascen-
dante. Dans l’approche descendante, les contrats internationaux (en particulier
sur le domaine des droits de l’homme et de la protection de l’environnement
naturel), le droit national et d’autres règlements auxquels les organisations
doivent se conformer, sont des facteurs qui décident de prêter attention à la

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RSE dans la gestion des risques. Une telle approche est particulièrement sou-
haitable pour les organisations dont les activités sont en relation étroite avec
ces facteurs. L’approche ascendante est plus adéquate pour les organisations
où le facteur principal est l’engagement des parties prenantes (Gladys, 2007).
Dans ce cadre, la RSE a plusieurs effets sur la gestion des risques.

EFFET DE LA RESPONSABILITÉ
SOCIALE DES ENTREPRISES
SUR LE MANGEMENT DU RISQUE
La littérature de la RSE suggère trois arguments théoriques qui pourraient
expliquer comment elle influence le risque d’une entreprise : le concept d’at-
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ténuation des risques, les modèles théoriques reliant la RSE aux rendements
attendus et le concept du surinvestissement (Godfrey, 2005). Les deux pre-
miers arguments prédisent une relation négative entre la responsabilité
sociale des entreprises, et le risque, tandis que l’argument de surinvestisse-
ment prédit une relation positive.
La vue d’atténuation des risques (un argument de gestion des risques
basé sur la théorie des parties prenantes) prédit que la RSE est négativement
liée au risque de l’entreprise. Plus précisément, cet argument suggère que
lorsque les investissements en RSE sont plus élevés, cela peut générer du
capital moral ou de la bonne volonté parmi les parties prenantes qui offrent
une protection semblable à une assurance qui réduit l’exposition au risque
d’une entreprise, c’est-à-dire préserve plutôt que génère des performances
financières (Godfrey, 2005 ; Godfrey et al., 2009). Ce capital moral crée des
richesses relationnelles sous différentes formes parmi les différents groupes
d’intervenants, par exemple, l’engagement affectif chez les employés, la légi-
timité entre les communautés et les régulateurs, la confiance entre les four-
nisseurs et les partenaires, la crédibilité et la marque accrue des clients en
plus d’une grande attractivité pour les investisseurs (Godfrey, 2005). Le point
clé est que ce capital moral a de la valeur car il dispose des parties prenantes
pour tenir des croyances sur l’entreprise qui influencent leurs comportements
envers l’entreprise (Luo et Bhattacharya, 2009).
Ainsi, « le capital moral fondé sur la RSE crée de la valeur si cela aide les
parties prenantes à attribuer l’événement négatif à la maltraitance managé-
riale plutôt qu’à la malveillance et à modérer leurs réactions en conséquence »
(Godfrey et al., 2009, p. 425). Les entreprises ayant des stratégies RSE plus
élaborées auront un capital moral plus élevé qui se traduira par une évalua-
tion plus favorable de l’entreprise aux yeux de divers groupes d’intervenants
(par exemple, les consommateurs, les employés et les investisseurs. Les par-
ties prenantes imposeront alors des sanctions moins sévères à l’entreprise
disposant d’un capital moral plus élevé dans le cas d’événements négatifs.
En outre, des stratégies RSE bien développées aident à morceler les chocs
négatifs (événements) du reste de l’organisation (Bansal et Clelland, 2004),

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RAYMOND BOU NADER, DELPHINE VAN HOOREBEKE

protéger son image publique, libérer la pression réglementaire et isoler l’en-


treprise de l’examen minutieux (Luo et Bhattacharya, 2009).
Conformément à cet argument, Godfrey et al. (2009) trouvent, en utilisant
une méthodologie d’étude d’événement, qu’une mesure de le RSE combinant
les forces de deux dimensions (communauté et diversité) est positivement liée
aux rendements anormaux cumulatifs juridiques / réglementaires négatifs
contre les entreprises. En outre, le niveau d’investissement dans la RSE peut
réduire ou augmenter les risques financiers et opérationnels (McGuire et al.,
1988) et / ou les risques associés aux problèmes sociaux (El Ghoul et al., 2011).
Sharfman et Fernando (2008) soutiennent que la gestion des risques des pro-
blèmes sociaux ou environnementaux est théoriquement synonyme de la ges-
tion stratégique des risques. Par exemple, les investissements de la RSE (les
émissions et la réduction de la pollution) réduisent les risques d’une entre-
prise de dangers connus et inconnus et, par conséquent, réduisent le nombre
de prestataires potentiels sur les flux de trésorerie d’une entreprise (amendes
potentielles, des compensations, des règlements, des coûts de conformité
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– coûts en cas d’accidents environnementaux ou de problèmes associés à
de mauvaises conditions de travail). Les entreprises ayant une performance
sociale plus faible ne peuvent faire face à plusieurs risques (par exemple,
dommages à l’image de marque et à la réputation, baisse de la reconnais-
sance favorable des investisseurs).
Les modèles théoriques de la relation entre la RSE et les rendements
attendus (Heinkel et al., 2007) suggèrent également que la RSE est négati-
vement liée au risque de l’entreprise. Ces modèles supposent des diffé-
rences dans les préférences des investisseurs qui peuvent conduire à des
prix du marché du capital segmentés basés sur la RSE. Plus précisément,
les investisseurs traditionnels prennent des décisions d’investissement fon-
dées uniquement sur des critères financiers (retours anticipés et l’accès à la
consommation globale qu’ils fournissent) tandis que les investisseurs socia-
lement responsables prennent des décisions d’investissement en fonction de
critères financiers et non financiers comme la RSE. Dans le domaine du mar-
ché financier, et contrairement aux investisseurs traditionnels, les investis-
seurs socialement responsables obtiennent une utilité supplémentaire pour
détenir des titres choisis en fonction de la performance sociale parce qu’ils
ont des goûts pour des actifs qui ne sont pas uniquement liés aux rendements
(Fama et French, 2007). Le modèle de Merton (1987) prévoit que le risque
d’une entreprise est négativement lié à la taille de la base d’investisseurs de
cette entreprise, c’est-à-dire le nombre de ses actionnaires. À son tour, cela
suggère une relation négative entre la RSE et le risque de l’entreprise, car
une RSE plus élaborée devrait augmenter la base des investisseurs. Lee et
Faff (2009) soutiennent que le modèle de Merton (1987) est cohérent avec l’ar-
gument selon lequel les risques liés à la gestion des risques et à la trans-
parence associée à performance sociale sont évalués par les investisseurs.
Contrairement aux arguments susmentionnés, la vision du surinvestissement
(un argument d’opportunité managériale basée sur la théorie de l’agence)
suggère une relation positive entre la RSE et le risque de l’entreprise en rai-
son du retranchement managérial (comme dans notre cas le management
des risques). Par exemple, les gérants peuvent choisir d’améliorer le score
de la performance sociale de leur entreprise au détriment des actionnaires

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en investissant massivement dans les activités de RSE afin de construire leur


réputation personnelle en tant que bons citoyens sociaux (Barnea et Rubin,
2010) ou pour générer un soutien social et environnemental afin de réduire la
probabilité de leur remplacement dans une période future (Cespa et Cestone,
2007). Surroca et Tribo (2008) fournissent des données empiriques suggérant
que la performance sociale d’une entreprise pourrait faire partie de la straté-
gie de retransmission d’un gestionnaire. Ils constatent également que la com-
binaison de stratégies de retranchement et d’une RSE plus élevée a des effets
négatifs sur les performances financières. Malgré ces résultats contradic-
toires, notre objectif est de fournir un modèle combinatoire d’aide à la prise de
décision en RSE et gestion des risques. Si pour la création de ce modèle notre
postulat de base repose sur le fait que la RSE favorise non seulement la ges-
tion des risques, mais qu’elle en est indissociable, notre démarche empirique
tend à révéler les conditions de sa pertinence. Ainsi, une première étape est
de valider les hypothèses concernant cette combinaison statistique en se fon-
dant sur un certain cloisonnement et classification des éléments à prendre en
compte lors de décisions. À ce sujet, Remenyi et al. (1998) suggèrent que seuls
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les phénomènes observables peuvent fournir des données crédibles. Mais, en
considération de la prise de décision complexe, de ses paradoxes et limita-
tions, une seconde étape a pour objectif de réaliser une réflexion sur l’usage
exclusif de cet outil dans le cadre de ces décisions complexes. Popper (1959) a
soutenu que la connaissance scientifique est la connaissance la plus robuste,
bien qu’il ne s’agisse toujours pas d’une représentation vraie du monde réel :
« il n’y a pas une méthode logique d’avoir de nouvelles idées, la découverte
contient un élément irrationnel ou une intuition créative » (Popper, 1959,
p. 24). Une question générale se dessine : comment manager la combinaison
de ces deux systèmes complexes ? Un outil de mesure combiné est-il valide et
suffit-il ?

Les hypothèses de la recherche


Pour y répondre, plusieurs hypothèses sont établies. Les trois premières
tendent à tester l’intérêt et la possibilité de combiner nos deux types de
décisions complexes, gestion du risque et RSE. Ces hypothèses portent
sur la validité statistique à réaliser cette combinaison parce que des
liens significatifs existent dans l’échantillon étudié.
La première hypothèse tend à démontrer qu’il existe une corrélation
entre les critères sociaux de la RSE : la variable « la RSE au sein de
l’entreprise » et les critères du risque : « les risques dans l’entreprise »,
« le traitement du risque » et « le management des risques ».
H1 : Les critères sociaux de la RSE sont liés aux critères du risque.
Pour l’hypothèse 2, nous essayons de prouver qu’il existe une relation
entre les obstacles qui peuvent freiner l’application des stratégies RSE
dans l’entreprise : la variable « les obstacles de la RSE » et les critères
du risque : « les risques dans l’entreprise », « le traitement du risque »,
« le management des risques ».
H2 : il existe un lien entre les obstacles RSE et les critères du risque.

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RAYMOND BOU NADER, DELPHINE VAN HOOREBEKE

La troisième hypothèse, cherche à prouver qu’il existe une relation


entre les activités environnementales RSE réalisées par l’entreprise :
la variable « les activités environnementales RSE » et les critères du
risque : « les risques dans l’entreprise », « le traitement du risque » et
« le management des risques ».
H3 : il existe un lien entre les activités environnementales RSE et les
critères du risque.
La dernière hypothèse a pour objectif de tester les conditions nécessaires
à la pertinence d’un modèle combinatoire. Cette hypothèse tend, ainsi,
à tester les liens de cause à effet multiples suivants : Le « Management
du risque », en fonction des composantes RSE, la variable « la RSE au
sein de l’entreprise », la variable : « activités environnementales RSE »,
la variable « les activités communautaires RSE » et la variable « la
motivation des employés » comme variables explicatives.
H4 : le modèle combinatoire RSE/ Management des risques n’apporte
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une aide pertinente que dans la mesure où l’entreprise concernée a
su analyser chaque question en termes de performance mais aussi
d’importance.

MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Mode de collecte des données, échantillon
analysé et méthode d’échantillonnage
Afin de tester nos hypothèses de recherche, nous avons administré un ques-
tionnaire aux employés des compagnies à caractère industriels Libanaises
qui réalisent des stratégies RSE. Cette enquête a été menée majoritaire-
ment en ligne en utilisant la plateforme « Surveymonkey » et près de 10 % des
enquêtes ont été faites en face à face. Notre échantillon de 160 enquêtés est
principalement formé des employés en lien direct ou indirect avec les entre-
prises à caractère industriel, plus que 60 % des répondants de notre question-
naire sont des employés des entreprises dont l’activité principale est dans la
construction, cimenterie, transport aérien, production alimentaire, industrie
de papier… à noter que ces entreprises sont des PME ou de grandes entre-
prises (40 % des répondants travaillent dans des PME et le reste dans de
grandes entreprises). Vu la taille très réduite des entreprises industrielles au
Liban, (aux alentours de 8 % selon la Banque mondiale en 2013), vu la sensibi-
lité de notre sujet, et pour compléter notre échantillon nous avons eu recours
aux employés en lien avec l’entreprise à caractère industriel, c’est-à-dire
dans notre cas, qui travaillent directement ou indirectement avec les compa-
gnies industrielles au Liban comme les assurances (35 % de notre échantillon)
par exemple. Et les 5 % restant de notre échantillon étaient des employés de

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Quelles relations entre management des risques industriels et RSE ?

grandes compagnies dont le mode de travail comporte des risques (compagnie


au port de Beyrouth, opérateurs télécommunication). À noter que les entre-
prises industrielles, les assurances, les réassurances et les autres grandes
compagnies sont des entités ayant des stratégies RSE et investissant en RSE.
En ce qui concerne la méthode d’échantillonnage, comme le souligne Hussey
& Hussey (1997), une attention particulière est accordée à l’équilibre entre le
pouvoir analytique et prédictif tiré de l’analyse statistique avec les problèmes
de représentativité des échantillons, et les erreurs de mesure. Selon Bernard
Py (2013) nous sommes dans le cas des sondages probabilistes et en parti-
culier le sondage aléatoire simple : « si la population de référence est com-
plète, et parfaitement connue » et « quand on connaît la liste exhaustive des
individus qui composent la population et elle est considérée comme exacte et
fiable » (les statistiques sans formule mathématique P 19).

Questionnaire 
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Dans la construction du questionnaire de notre recherche, il faut noter que les
échelles utilisées ont été adaptées au contexte Libanais à partir des travaux
de Harvett (2013) en ce qui concerne la partie management des risques et
Sweeney (2009) pour la partie RSE. Le questionnaire a été conçu pour recueil-
lir des informations sur les relations probables entre la RSE et les risques
dans les entreprises industrielles, sur la façon dont les entreprises appliquent
ces normes RSE et sur le contexte dans lequel cette mise en œuvre a lieu.
Notre questionnaire final est composé de 25 questions (ou items), y compris
des questions demandant des informations personnelles sur l’enquêté (par
exemple les années d’expérience, le niveau d’éducation etc.), des questions
demandant des informations sur le mode d’emploi de la RSE et du manage-
ment des risques dans l’entreprise, des questions fermées à choix simple, des
questions fermées à choix multiples (cf. annexe).

Les variables étudiées


Les variables dépendantes
Vu la problématique initiale de notre recherche : la gestion des risques indus-
triels par la RSE, il est évident que toutes les variables qui représentent le
risque et qui répondent à nos hypothèses sont considérées comme variables
dépendantes en particulier : l’analyse du risque, le management du risque, la
réduction du risque, le risque dans l’entreprise.
Afin de mieux interpréter les valeurs des questions 7 et questions 9 nous
les avons recodées (Un accès suffisant aux services médicaux, une préven-
tion des risques majeurs, une surveillance et une protection du lieu de travail,
protection physique pour réduire la probabilité du risque). En fait, les items de
ces deux questions suivent une échelle de Likert allant de 1 à 3 (Dukes, 2005)
(1 = indiffèrent, 2 = Acceptable, 3 = Excellent). D’après ces modalités nous
remarquons que l’échelle est croissante, par exemple à la question : « si votre
entreprise est compétente en ce qui concerne une prévention des risques

proyéctica / projectics / projectique – n° 25 17


RAYMOND BOU NADER, DELPHINE VAN HOOREBEKE

majeurs (comme l’incendie par exemple) » la réponse « 1 ou indifférente »


veut dire que l’entreprise est bien risquée et la réponse « 3 ou Excellente »
veut dire que le risque est bien géré ou bien même le risque n’existe pas. Pour
pouvoir mesurer le risque avec une échelle allant dans la même direction que
les autres questions, il faut que le score le plus haut soit lié à la meilleure ges-
tion du risque et pour le risque minime que le plus petit score soit lié à la mau-
vaise gestion de risque, d’où le recodage suivant : 1-Grand risque (mauvaise
gestion), 2-Risque moyen (gestion moyenne) ; 3-Risque très Faible (excellente
gestion), d’où la création de nouveaux items recodés dans les questions Q7 et
Q9 (Q7_R et Q9_R).

Les variables indépendantes


Les variables indépendantes de notre étude sont les composantes RSE de
notre questionnaire, comme : les questions concernant la RSE au sein de
l’entreprise, les questions en rapport avec les Activités RSE- Environnement,
les questions concernant les Activités RSE – Communauté, Attraction, moti-
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vation et rétention des employés par les stratégies RSE des entreprises,
connaissance de le RSE, activité principale de l’entreprise. Afin de mieux
interpréter les résultats en relation avec les variables indépendantes liées
à la RSE nous avons utilisés des questions demandant des réponses sur des
échelles de mesure de Likert (par exemple, 1 à 5 = non satisfait à très satis-
fait).

Condensation des informations


Notre enquête comporte plusieurs parties ou dimensions, formée par plu-
sieurs items ou sous-questions, ces variables sont regroupées par une ana-
lyse factorielle exploratoire (AFE) (Field, 2009 ; Leech et al., 2008 ; Pallant,
2005 ; Tabachnick & Fidell, 2007). Selon Hair et al., (1998) le but ultime de
l’analyse factorielle est de construire des échelles qui permettront de mesu-
rer des construits latents. Une dimension ou composante doit comprendre au
minimum trois items. (Raubenheimer, 2004).

RÉSULTATS
La validité et la fiabilité des échelles
de mesures
Pour évaluer la validité et la cohérence interne de toutes les échelles utili-
sées, nous avons réalisé des analyses factorielles exploratoires (AFE) et un
test alpha de Cronbach a été appliqué à toutes les échelles (Tabachnick &
Fidell, 2007) sur le logiciel IBM SPSS 24. Toutes les échelles ont présenté des
alphas supérieurs au seuil acceptable de 0.70, ce qui indique une bonne cohé-
rence interne des éléments de l’enquête (Nunnally, 1978). Même dans le cas

18 projectique / projectics / proyéctica – n° 25


Quelles relations entre management des risques industriels et RSE ?

où la valeur alpha de Cronbach était inférieure à 0.70 (0.69), elle était supé-
rieure à 0,60 permettant de poursuivre l’analyse (Leech et al., 2008).

Les hypothèses
H1 : Les critères sociaux de la RSE sont liés aux critères du risque.

Tout d’abord, nous avons testé la normalité des variables à l’aide du test de
Kolmogorov-Smirnov (KS) qui a fourni des p < 0.01 pour les quatre variables en
questions. Pour cette raison, et pour trouver des relations probables entre les
variables, nous avons choisi le test de dépendance de Spearman. Les corréla-
tions obtenues avec la variable RSE au sein de l’entreprise sont les suivantes :
Management du risque/RSE ρ = 0.457 (p < 0.001), traitement du risque dans
l’entreprise, ρ = 0.477 (p < 0.001) et Risque dans l’entreprise/RSE, ρ = -0.527
(p < 0.001). H1 est validée.
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H2 : il existe un lien entre les obstacles RSE et les critères du risque.

La normalité des variables à l’aide du test de Kolmogorov-Smirnov (KS) a


fourni des p < 0.01 pour les quatre variables en questions. Cela nous a permis
de réaliser le test de dépendance Spearman. Nous remarquons qu’il existe une
indépendance entre « les obstacles RSE » et « le management des risques »
(p = 0.313 > 0.05). De même entre « les obstacles RSE » et le traitement des
risques dans l’entreprise (p = 0.265 > 0.05), puis entre « les obstacles RSE » et
le risque dans l’entreprise (p = 0.352 > 0.05). H2 est validée.

H3 : il existe un lien entre les activités environnementales RSE et les


critères du risque.

Après avoir vérifié la normalité avec le test de Kolmogorov-Smirnov (KS)


qui a fourni des p < 0.01 pour les quatre variables en questions, nous les
avons corrélées. Nous remarquons qu’il existe une dépendance entre les acti-
vités environnementales RSE de l’entreprise et le management des risques
(ρ = 0.425, p < 0.01). Il s’agit d’une corrélation positive moyenne, ce qui signifie
que les activités environnementales RSE de l’entreprise varient dans le même
sens que le management des risques. Ainsi, quand les activités environne-
mentales RSE augmentent le management des risques industriels, le traite-
ment des risques (ρ = 0.477, p < 0.01) augmentent et vice versa. À l’inverse s’il
existe une dépendance entre la RSE au sein de l’entreprise et le risque dans
l’entreprise (ρ = -0.527, p < 0.01), nous remarquons que c’est une corrélation
négative. À chaque fois que les activités environnementales RSE augmentent
dans l’entreprise, les risques liés aux activités de l’entreprise diminuent. H3
est validée.

H4 : le modèle combinatoire RSE/ Management des risques n’apporte


une aide pertinente que dans la mesure où l’entreprise concernée a su
analyser chaque question en termes de performance mais aussi d’im-
portance.

proyéctica / projectics / projectique – n° 25 19


RAYMOND BOU NADER, DELPHINE VAN HOOREBEKE

En premier lieu, notre échantillon vérifie les conditions de Tabachnik et


Fidel (2003). Nous traitons 4 variables indépendantes, la taille de notre échan-
tillon (n = 160), n ≥ 104 + m, avec n étant le nombre minimal de participants, et
m le nombre de variables indépendantes (condition vérifiée). Ensuite, nous lan-
çons la procédure de régression linéaire multiple pour l’examen des résidus.
Le tableau de diagnostics des observations (tableau 1), montre que les obser-
vations 21,40 et 220 n’appartiennent pas à l’intervalle [–3 ; +3] concernant la
variation des variances des termes d’erreurs avec des scores respectifs de
–3.03, –3.67, –3.62. Après l’élimination de ces trois observations, nous pour-
suivons la procédure. Nous remarquons que le modèle de régression « pas
à pas » a exclu la variable (motivation des employés) du modèle, et que les
trois variables prises en compte expliquent 35 % du management des risques
industriels. Le tableau d’Anova atteste que le modèle est significatif (p < 0.01).
Concernant le test de colinéarité, les tolérances et les facteurs d’inflation de la
variance (VIF) sont dans les limites recommandées (tolérance > 0.3 et VIF < 3),
ce qui est un signe de qualité du modèle. À noter que le graphique de réparti-
tion de résidus par rapport à une distribution normale, et l’histogramme des
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résidus standardisés attestent de la normalité de la distribution des résidus.

Coefficients non Coefficients Statistiques


standardisés standardisés de colinéarité
Modèle t Sig.
Ecart
B Bêta Tolérance VIF
standard
1 (Constante) 2.222 .234 9.515 .000
Activités RSE–
.492 .064 .523 7.670 .000 1.000 1.000
Environnement
2 (Constante) 1.628 .267 6.090 .000
Activités RSE–
.311 .076 .331 4.106 .000 .651 1.535
Environnement
La RSE au sein
.353 .088 .325 4.031 .000 .651 1.535
de l’entreprise
3 (Constante) 1.494 .272 5.496 .000
Activités RSE–
.255 .080 .271 3.200 .002 .577 1.732
Environnement
La RSE au sein
.275 .094 .253 2.912 .004 .550 1.819
de l’entreprise
Activités RSE–
.184 .087 .180 2.103 .037 .568 1.760
Communauté

a. Variable dépendante : Combien votre entreprise accorde une importance: Au


management du risque
Tableau 1. Modèle de régression linéaire « MDR » en fonction
des composantes RSE

En résumé, vu que nous avons vérifié toutes les conditions de la régression


linéaire multiple, nous pouvons affirmer que la relation entre le management
du risque d’une part et les composantes RSE : la variable « la RSE au sein de
l’entreprise » la variable « les activités environnementales RSE » la variable

20 projectique / projectics / proyéctica – n° 25


Quelles relations entre management des risques industriels et RSE ?

« les activités communautaires RSE » d’autre part est modérée (0.601). La


RSE au sein de l’entreprise, les activités environnementales RSE et les acti-
vités communautaires RSE expliquent globalement 37.3 % des variations du
management des risques. Chacun des trois prédicteurs, sur notre échantillon
influence positivement le management des risques. Le coefficient de régres-
sion associé à la RSE au sein de l’entreprise (0.275) statistiquement significatif
(t = 2.912, p < 0.01), le coefficient de régression associé aux activités environ-
nementales RSE (0.255) statistiquement significatif (t = 3.2, p < 0.01) et enfin le
coefficient de régression associé aux activités communautaires RSE (0.184),
également statistiquement significatif (t = 2.621, p < 0.05) le montrent. De sur-
croit, les coefficients de régression Beta standardisés montrent également
que les activités environnementales RSE, β = 0.271 sont plus discriminantes
que la RSE au sein de l’entreprise β = 0.253 et que les activités communau-
taires RSE, β = 0.180. Dans ce cas, l’équation du modèle de régression linéaire
multiple formant notre modèle combinatoire RSE / Management des risques
se présente comme suit :
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Management du risque = 0.255 × AE + 0.275 × RSEE + 0.184 × AC + 1.494
RSEE : RSE au sein de l’entreprise
AE : Activités environnementales RSE
AC : Activités communautaires RSE

DISCUSSION
Notre étude a pu montrer les relations existantes entre la gestion des risques
et la RSE. Nos trois premières hypothèses ont mis en exergue des relations
significatives entre les critères sociaux de la RSE, les obstacles RSE et les
activités environnementales RSE et les critères du risque. Ces premières rela-
tions ont permis la modélisation statistique de la combinaison entre la RSE et
la gestion du risque. Ce modèle peut s’avérer un outil indispensable pour une
gestion des différents critères de risque en considération d’indicateurs de res-
ponsabilité sociale au sein des organisations. Il permet, ainsi, à l’entreprise de
prendre en compte à la fois les différents facteurs que composent les aspects
environnementaux, sociaux et économiques défendus par la RSE et les dif-
férents facteurs de risques définis par de nombreux modèles de gestion des
risques organisationnels. L’objectif de cette modélisation est de montrer que
les deux concepts sont bien liés entre eux et qu’une opérationnalisation de la
RSE peut être effectuée en ‘cogestion’ avec la gestion des risques.
En cela, il peut être assumé que le management de ces deux systèmes
complexes peut reposer sur un outil de mesure. Cet outil forme un apport cer-
tain au management de systèmes complexes.
Néanmoins, si les prises de décisions s’en trouvent facilitées en gestion
du risque et RSE, dans notre cas, elles restent soumises à l’incertitude liée
à la complexité. En cela, un outil de mesure combiné resterait un outil d’aide
à la prise de décision par un cloisonnement des éléments à considérer. S’il
peut s’avérer indispensable, cet outil ne saurait s’affranchir des limites de la

proyéctica / projectics / projectique – n° 25 21


RAYMOND BOU NADER, DELPHINE VAN HOOREBEKE

raison, des contradictions et des paradoxes de la prise de décision lors du


choix de l’importance donnée à chaque item. Cette décision du choix à don-
ner n’est pas mesurable en l’état. La faiblesse de telles approches à traiter la
complexité et l’irrationalité est exprimée par plusieurs chercheurs (Smith &
Irwin, 2006). Les normes en vigueur n’échappent pas aux critiques d’Atkinson
(2006) qui mettent l’accent sur la nécessité de progresser vers un « paradigme
de gestion de l’incertitude ».
Cette même idée est également soutenue par Atkinson (2006) qui appuient
le fait que l’incertitude ne facilite pas la considération des aspects de varia-
bilité liés à l’imprécision et le manque d’informations. Meyer, Loch & Pitch
(2002) affirment qu’il faut fournir dès le début des informations suffisantes qui
servent d’exemple au « langage rigoureux » qui permet au manager d’organi-
sation d’évaluer l’exactitude de ces informations.
C’est en effet, ici, l’humain qui devra œuvrer seul dans ce choix. Si l’impact
peut ne pas avoir beaucoup de conséquences, il peut être l’objet d’un certain
opportunisme à diffuser une image plus favorable ou à limiter des freins per-
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çus de la RSE. Selon l’étude1 réalisée par l’Observatoire du développement
international (2016-2017), 48 % des entreprises ne se sentent pas désavan-
tagées par les normes RSE d’un point de vue social, un peu plus d’un point
de vue économique et monétaire. Pourtant, nos résultats montrent que notre
modèle ne peut prendre en compte la motivation des salariés. Cette motivation
ne serait pas en lien de cause à effet avec les variables RSE et management
du risque. Cela indiquerait que chercher à manager de façon responsable la
motivation des salariés ne se satisferait pas d’un management des risques et
de critères RSE. C’est, à nouveau, la complexité des systèmes qui prend place.
Manager les risques selon des indicateurs RSE peut étayer les décisions prag-
matiques organisationnelles, non les décisions liées aux relations humaines
qu’impose un management responsable de terrain.

CONCLUSION
Notre étude comporte de nombreux apports tant académiques que managé-
riaux. L’étude réalisée a su combiner les indicateurs RSE selon Harvett (2013)
et le modèle de gestion du risque de Sweeney (2009). Le modèle combinatoire
obtenu représente un apport tant académique que managérial. D’un point de
vue académique, il s’agit d’une avancée dans le domaine de la RSE. À notre
connaissance, les liens démontrés entre les indicateurs RSE et les critères de
gestion des risques n’avaient jamais été testés. De la même façon, ce type de
modèle combinatoire n’a jamais été conçu. D’un point de vue managérial, un
tel modèle est apparenté à un outil pratique de management de la RSE. Si le
respect des indicateurs RSE peut être guidé au travers de la norme SA 21000,
il ne peut être certifié. Ce manquement peut pénaliser l’attention portée à la
RSE par les entreprises. Grâce au modèle combinatoire RSE / Management

1. http://www.bretagne-solidarite-internationale.org/mediastore/11/21965_1_FR_original.
pdf

22 projectique / projectics / proyéctica – n° 25


Quelles relations entre management des risques industriels et RSE ?

des risques, les organisations, notamment celles soumises à des risques


industriels, bénéficient d’un outil de gestion qui peut s’avérer essentiel à
l’égard porté à la RSE. Cette étude a malheureusement quelques limites.
Certaines de ces limites reposent sur l’échantillon étudié. Les salariés inter-
rogés ne sont pas issus d’une même catégorie d’entreprises (fonction de leur
taille, activité notamment). Le terrain étudié ne permet, quant à lui, pas de
généraliser les résultats obtenus. Une autre limite concerne l’analyse même
de l’étude. Afin de pouvoir construire un modèle combinatoire, les analyses
statistiques fondées sur un questionnaire ont été réalisées. Il est fort probable
qu’une analyse qualitative préalable aurait permis d’approfondir les résultats
obtenus. En cela nos résultats ouvrent à des voies de recherche multiples,
telles qu’une recherche action sur l’applicabilité du modèle combinatoire ou
encore sur son effet dans la prise de décision en système complexe.

RÉFÉRENCES
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Raymond BOU NADER est statisticien. Il est maître de conférences à l’université


Saint Joseph de Beyrouth, où il intervient dans les cours de statistiques et d’analyses
des données quantitatives. Il est consultant statisticien au centre de recherches
et de développement pédagogies(CRDP), ministère de l’éducation au Liban, ainsi
que statisticien affilié au laboratoire IAPS de l’université de Toulon (France).
raymond.bounader@usj.edu.lb

24 projectique / projectics / proyéctica – n° 25


Quelles relations entre management des risques industriels et RSE ?

Delphine VAN HOOREBEKE : Après avoir été professeur adjoint à l’université


de Montréal, elle est, à présent, Maître de conférences, habilitée à diriger les
recherches à l’université de Toulon. Chercheur rattachée au CERGAM Toulon
(centre de recherche en gestion rattaché au CERGAM de l’université d’Aix-
Marseille) et au Cirano (centre de recherche interdisciplinaire de Montréal),
ses écrits portent sur le management des émotions et des comportements en
entreprise et leur lien avec la prise de décision, notamment dans le cadre de la
RSE et du développement durable.
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proyéctica / projectics / projectique – n° 25 25

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