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L'ESPACE CEDEAO
Mbissane NGOM
Mbissane NGOM1
1 Introduction
2 Une politique de la concurrence dédiée…
2.1 … au service de l’intégration régionale
2.1.1 La constitution d’un marché commun régional
2.1.2 Un marché commun complexe
2.2 … pour le développement économique
2.2.1 La centralité de la politique de concurrence
2.2.2 La tentation d’un développement extraverti
3 Un droit de la concurrence éprouvé
3.1 La concurrence normative
3.1.1 Une cohabitation normative perfectible
3.1.2 Des règles de la concurrence parfois divergentes
3.2 Une architecture institutionnelle non hiérarchisée
3.2.1 Un contrôle institutionnel diversifié
3.2.2 Une unité de méthode
Summary
1 INTRODUCTION
L’ouverture à la concurrence est devenue aujourd’hui une exigence fondamentale et
conditionne à bien des égards le développement économique. Les expériences des
pays du Sud-Est asiatique le démontrent à suffisance. Certes, parfois, ce dévelop-
pement à marche forcée s’est fait au détriment du respect des droits de l’Homme.
Mais il reste que les progrès économiques réalisés par ces « dragons » peuvent ins-
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2. Les États membres sont aujourd’hui au nombre de 15 : le Bénin, le Burkina Faso, le Cap-Vert,
la Côte d’Ivoire, la Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée-Bissau, le Liberia, le Mali, le Niger,
le Nigeria, le Sénégal, la Sierra Leone et le Togo. La CEDEAO, c’est aujourd’hui 290 millions
d’habitants/consommateurs.
Intégration régionale et politique de la concurrence dans l’espace CEDEAO 335
3. L’une des raisons est peut-être la diversité des régimes juridiques qui existaient dans les différents
États membres. Créée dans un contexte de guerre froide, la CEDEAO comptait en son sein des
pays communistes, des pays socialistes et des pays de régime plus ou moins capitaliste.
4. CEDEAO, Cadre Régional de Politique de Concurrence, mars 2007, disponible sur : http://www.
ecowas.int/publications/fr/actes_add_commerce/1.Cadre_Regional_Politique_Concurrence_
CEDEAO-final-P.pdf.
5. Ibid., p. 1.
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6. J.-L. Aubert, Introduction au droit et thèmes fondamentaux du droit civil, Paris, Armand Colin,
collection U, 2004, avant-propos.
Intégration régionale et politique de la concurrence dans l’espace CEDEAO 337
10. Au demeurant, il faut noter que le processus historique de constitution de l’État a une influence sur
l’importance du rôle de celui-ci dans l’économie. Par ailleurs, l’Allemagne est l’exemple parfait
de l’État dans lequel une économie sociale de marché s’est développée avec des rôles importants
pour l’État et les entreprises. V. F. Bilger, La pensée économique libérale dans l’Allemagne
contemporaine, Paris, LGDJ, 1964 ; P. Commun (dir.), L’ordolibéralisme allemand: aux sources
de l’Économie sociale de marché, CIRAC, 2003.
11. M.M. Mohamed Salah, « La problématique du droit économique dans les pays du Sud », RIDE,
n° 1-1998, p. 21.
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CEDEAO même si, dans la réalité, cette politique semble destinée à l’attraction des
investisseurs étrangers.
membres. Mais elle ne présente un intérêt que si un tissu dense de PME existe dans
les différents pays. De ce point de vue, des programmes ont été élaborés par les
instances communautaires. Mais leur traduction juridique et leur mise en œuvre dans
les États membres font particulièrement défaut. Il serait souhaitable qu’un équilibre
efficace soit trouvé entre la nécessité de garantir la concurrence et l’impérieuse
exigence de protection des entreprises de la zone. L’absence de ce cadre juridique
équilibré explique l’importance considérable du commerce informel transfrontalier
qui nourrit la fraude et la contrebande. De sorte qu’une bonne partie des échanges
commerciaux entre les États membres de la CEDEAO n’est pas prise en compte
dans les statistiques officielles.
La politique de la concurrence de la CEDEAO trouve sa traduction juridique
dans deux actes additionnels portant réglementation de la concurrence et mise en
place d’un organe régional chargé du contrôle de son respect. Cette législation de la
concurrence doit cependant être mise en œuvre dans un contexte difficile.
13. Le pr. Alioune Sall retrace avec brio l’historique du regroupement des États en Afrique de l’Ouest
en mettant en perspective les différents objectifs poursuivis par les initiateurs de ce processus au
cours de l’histoire. Voir Les mutations de l’intégration des États en Afrique de l’Ouest. Une approche
institutionnelle, Paris, L’Harmattan, coll. Études africaines, 2006.
14. C’est le cas du Comité permanent Inter-États de Lutte contre la Sécheresse dans le Sahel (CILSS).
15. Tel est le cas de l’Organisation pour la Mise en Valeur du Fleuve Sénégal (OMVS) et de l’Organi-
sation pour la Mise en Valeur du Fleuve Gambie (OMVG).
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Toutefois, des différences notables peuvent être constatées dans les définitions
des notions utilisées, différences qui peuvent avoir des conséquences majeures dans
le contrôle de l’activité économique. Nous prendrons quelques exemples pour mettre
en évidence ce risque.
Le premier est relatif au rôle différent que l’on fait jouer, dans les deux ordres
normatifs, à l’affectation du commerce entre les États membres. Alors que dans la
législation UEMOA il n’y est fait référence que dans la directive n° 04/2002 relative
à la coopération entre la Commission et les structures nationales de la concurrence
pour le contrôle des pratiques anticoncurrentielles, cette exigence de l’affectation
des échanges entre les États membres apparaît dans le droit CEDEAO comme une
condition d’applicabilité. Autrement dit, alors que l’UEMOA fait le choix d’une uni-
fication du droit de la concurrence, avec la substitution d’une législation unique aux
différentes législations nationales, la CEDEAO fait le choix de la double barrière, en
maintenant des législations nationales applicables aux pratiques anticoncurrentielles
à dimension nationale. Cette diversité de choix n’est pas sans conséquence dès lors
que certains États membres appartiennent à la CEDEAO et à l’UEMOA, et que,
dans le cadre de cette dernière appartenance, leur droit national de la concurrence
est neutralisé par la législation UEMOA. Pour ces pays, la question de la détermi-
nation du rôle de l’exigence de l’affectation des échanges commerciaux entre États
membres va se poser. La réponse déterminera soit l’applicabilité du droit CEDEAO
soit la compétence de la Commission de l’UEMOA.
Par ailleurs, en considérant l’interdiction de l’abus de position dominante, il
faut constater que la CEDEAO a une conception sinon incompréhensible du moins
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activités dont l’objet porte sur « les questions relatives au travail, notamment les
activités des employés visant à protéger légitimement leurs intérêts » et « les accords
de négociations collectives conclus entre les employeurs et les employés aux fins
de fixer les termes et modalités de service ». Le constat est donc que la législation
de la CEDEAO tient mieux compte des exigences du droit du travail par rapport au
droit de la concurrence.