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Pierre Jacquemot
Sciences Po Paris
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1. Expression indienne (les moindre kilo d’acier. 80 % des vigueur entre 1974 et 1994 et qui
éléphants blancs sont dans la matières premières (fer et charbon) fixaient en dérogation des règles du
tradition hindouiste ou bouddhiste se trouvent pourtant à moins de GATT des quotas d’exportations, par
des offrandes prestigieuses que les soixante kilomètres du site. Des pays et par produits, variables dans le
princes de l’Inde se faisaient entre pannes à répétition, des changements temps en fonction de la croissance
eux), très en vogue en Afrique pour de responsables, un manque de des pays en développement, a eu un
désigner les réalisations somptuaires, volonté politique au regard de l’argent effet asphyxiant. Il a exposé toutes les
surdimensionnées, soutenues par les dépensé, ont fait tomber Ajaokuta entreprises textiles africaines à la
pouvoirs publics et dont l’exploitation dans l’oubli. Périodiquement, on concurrence des pays asiatiques à
devient un fardeau financier. On évoque une reprise de la production, faibles coûts de production,
pense par exemple à l’immense après quarante années d’attente. entraînant une chute drastique de la
complexe sidérurgique d’Ajaokuta au 2. Parmi les mesures qui part de l’industrie du textile et de
Nigeria d’un coût de huit milliards de amplifièrent la désindustrialisation, le l’habillement dans le PIB de pays tels
dollars, construit en 1979 avec démantèlement progressif de que l’Égypte, le Lesotho, le Maroc,
l’URSS, mais qui n’a jamais livré le l’Arrangement multifibres (AMF), en Maurice, le Sénégal et la Tunisie.
du poisson ou celle du textile 2 . Les usines de Dakar fermèrent les unes après
les autres. Madagascar incarne sans doute le mieux l’échec industriel avec de
fréquents changements d’orientation de la politique économique, de la voie
socialiste des années 1970, à la libéralisation avec des zones économiques spé-
ciales ouvertes aux investisseurs étrangers, suivie d’une longue crise politique
depuis le fin des années 2000 qui laisse la Grande Île exsangue. Au sud du
Sahara, seuls l’Afrique du Sud et le Zimbabwe disposaient de complexes miné-
ralo-industriels issus de l’investissement de la rente dans des filières de biens
d’équipement et de consommation finale : extraction minière et organisation
y avaient structuré les espaces. Aujourd’hui, même si les bases industrielles
(aciers, aluminium, chimie, industries mécaniques, textile-habillement, agroa-
limentaire) restent incomplètes et peu compétitives parce que longtemps proté-
gées, la capacité de production sud-africaine est unique sur le continent et pèse
environ pour près de la moitié de la valeur ajoutée industrielle subsaharienne.
L’incohérence et l’échec consécutif des politiques menées dans les pays
africains justifièrent en partie la dureté des programmes d’ajustement structurel
à partir de 1980. L’évaluation des systèmes de soutien à l’industrie mit en évidence
une complexité et un désordre des mécanismes de subvention et de protection :
interventions contradictoires ou instables, effets pervers des protections en esca-
lier sur la production nationale d’intrants, absence de coordination dans l’organi-
sation des filières… Progressivement, les objectifs affichés par les premiers plans
de développement (l’emploi formel, l’aménagement du territoire, l’intégration
nationale notamment) ont laissé la place à d’autres logiques, plus puissantes et
aussi plus pernicieuses, celle de la perpétuation de la rente étatique improductive
3. Un pays est situé à la frontière recherche étrangers. Au fur et à production, deviennent la principale
technologique lorsque ses centres de mesure que l’on se rapproche de la source de la croissance économique.
recherche sont en situation de « faire frontière technologique, les
avancer » la science, et ne sont pas « innovations » autonomes et de
occupés à rattraper un retard qu’ils rupture, à fort impact en
auraient par rapport aux centres de transformation des processus de
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Source : calculs de l'auteur, à partir des données de la Banque mondiale. La production manufacturière exclut du secteur industriel au sens large les
industries extractives (mines, carrières, hydrocarbures), la construction, l'électricité, le gaz et l'eau.
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1981 2017
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Algérie
Afrique du Sud
Zambie
Nigeria
Égypte
Tunisie
Maroc
Cameroun
Zimbabwe
Maurice
Kenya
Madagascar
Sénégal
Éthiopie
Ghana
Côte d'Ivoire
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4. Une chaîne de valeur l’infrastructure du commerce méthode musclée a été plus récente,
internationale (global value chain) international, et leur analyse révèle avec la suspension du Rwanda de la
désigne l’ensemble des activités des flux transfrontaliers et processus liste des bénéficiaires de l’African
productives réalisées en différents de production et d’échange Growth Opportunity Act (AGOA), une
lieux géographiques de la planète intermédiaires qui sont dissimulés loi américaine qui permet d’établir
pour amener un produit ou un service par les statistiques se référant des relations de libres échanges
du stade de sa conception au stade uniquement au commerce des commerciaux entre les États-Unis et
de sa livraison au consommateur produits finaux (Bair, 2010). certains pays africains (source :
final. Pour de nombreux produits, la 5. En 2016, le Kenya, l’Ouganda, la EcofinHebdo, n° 34, juin 2018).
fourniture de matières premières, la Tanzanie et le Rwanda ont pris la 6. En phase de hauts cours
fabrication des pièces, l’assemblage, décision de suspendre mondiaux, l’augmentation des
le marketing et la livraison des progressivement les importations de recettes se traduit par une entrée
produits finis ont lieu dans différents seconde main en provenance des massive de devises et par une hausse
pays. Ces activités fractionnées États-Unis. Une mesure qui visait à des dépenses publiques impliquant
spatialement regroupent les protéger la petite industrie de de fortes importations. Les facilités
différents maillons de la chaîne : la confection locale. Mais la réaction financières poussent à la fuite en
R&D, la conception, la production, la américaine a été vive. L’argument avant et favorisent les projets de
commercialisation, la distribution, la était que le marché de la friperie en grande taille. Il s’ensuit une
vente au détail, et parfois même la Afrique de l’Est soutient le pouvoir appréciation du taux de change, une
gestion et le recyclage des déchets. d’achat des ménages, donne plus de forte inflation et une baisse de la
Les filiales sont des segments 355 000 emplois, avec des revenus compétitivité du secteur des biens
essentiels dans la mesure où elles globaux de 230 millions de dollars, échangeables. Le système des prix et
approvisionnent d’autres marchés qui permettent de nourrir plus de de change conduit à des distorsions
voisins et fournissent des produits 1,5 million de personnes. Face à cela, dans les rendements du capital par
intermédiaires à d’autres sociétés le Kenya, qui pèse pour les deux tiers secteur conduisant à des affectations
affiliées à la firme dont elles font dans le volume des marchandises malencontreuses des gains de la
partie. Les CVM peuvent être vendues par l’Afrique de l’Est aux rente vers des branches non
considérées comme constituant États-Unis, a tout de suite capitulé. La virtuellement rentables.
tile devenue, au fil du temps, exsangue, étranglée par les importations mas-
sives d’Asie et le trafic de friperie 5 . Alors que la région comptait quarante-cinq
usines dans les années 1980, on ne dénombre plus que dix unités, et la plupart
tournent à moins de 50 % de leur capacité.
La modeste capacité de parvenir à une transformation industrielle est
un trait commun parmi les pays ayant des taux d’exportation de ressources
naturelles élevés. « Il existe une relation négative très forte entre la dépen-
dance d’un pays à l’égard des produits primaires et le niveau de contribution
de la transformation structurelle à la croissance. Les pays qui se spécialisent
dans des produits primaires sont nettement désavantagés » (Macmillan et al.,
2014, p. 25). C’est largement la résultante de la difficulté à gérer la volatilité
des f lux de recettes publiques, mais aussi du « syndrome hollandais » 6 . La
mobilisation des rentes, minières et pétrolières, dans des fonds de dévelop-
pement pour les générations futures est supposée permettre de lutter contre
cette sournoise « malédiction » des matières premières. Une dizaine de pays
(Angola, Gabon, Ghana, Guinée équatoriale, Nigeria, Mauritanie, Sao Tomé-
et-Principe, Soudan, Tchad) ont créé un fonds d’investissement public pour
rentabiliser l’excédent de leurs revenus pétroliers et miniers et déclencher la
diversification agricole et manufacturière. Les faillites sont légion (Azizi et al.,
2016). Le Botswana, avec son diamant et son fonds (Pula Fund) créé en 1994,
est le seul pays africain que l’on peut citer pour sa bonne gestion de ses matières
premières et de son fonds de développement. L’un des problèmes rencontrés,
notamment en Angola, au Gabon et au Tchad, tient au fait que ces fonds sont
gérés hors budget, entraînant une perte de contrôle de la situation budgétaire
Des avantages très relatifs. Le salaire mensuel moyen d’un travailleur éthio-
pien qualifié était égal en 2016 à seulement 25 % de celui de son homologue en
Chine et 50 % de celui de son homologue au Vietnam. Pour un travailleur non
qualifié, ces rapports étaient de 18 % avec la Chine et 45 % avec le Vietnam.
Étendre ces comparaisons pour inclure les coûts non salariaux du travail,
qui sont élevés et en augmentation en Chine, mais encore faibles en Afrique,
accroît – toutes choses égales par ailleurs – le potentiel de délocalisation de
la production de l’industrie légère dans quelques économies africaines (Jaidi,
Martin, 2018). Les écarts de coûts de cet ordre incitent logiquement les entre-
prises chinoises à délocaliser certaines de leurs activités manufacturières, en
particulier en Éthiopie. Le phénomène est néanmoins d’ampleur limitée. Les
coûts de la main-d’œuvre doivent être comparés à sa productivité et mis en
perspective avec d’autres facteurs (Balchin et al., 2016). L’observation est géné-
Si l’on en croit le World Economic Forum (2016), les entraves que ren-
contrent les pays africains pour s’introduire dans les CVM sont, dans l’ordre de
gravité décroissante : l’accès difficile au financement et l’absence de marchés des
capitaux, les coûts élevés de transport, le mauvais environnement des affaires,
l’insuffisance des infrastructures dans les télécommunications, le transport, le
stockage et l’énergie, la bureaucratie inefficiente, la fiscalité lourde et instable,
la modeste qualification de la main-d’œuvre. D’autres obstacles existent.
Des chaînes de valeur sous contrôle. Les CVM dans lesquelles l’Afrique est
insérée ont deux caractéristiques, pour reprendre les concepts devenus clas-
siques de Gereffi (1995) : 1) elles sont « dominées par les acheteurs » (buyer-
driven chains) ; 2) leur gouvernance est « captive et hiérarchique » plutôt que
« modulaire et relationnelle » (UNECA, 2015). Dans les industries comme
celles des biens de consommation à forte intensité de main-d’œuvre (agroa-
limentaire, habillement, chaussure), la chaîne de valeur est déterminée par la
conception, le marketing et la promotion des marques des entreprises chefs
7. Les chaînes dominées par les premières entreprises du continent de Vodacom), les BTP (Wilson Bayly,
producteurs sont quant à elles plus de 180 millions de dollars de Murray) avec l’Égypte, les mines
caractéristiques des industries à forte chiffre d’affaires, cent soixante-neuf (Anglo American, AngloGold Ashanti),
intensité de capital et de technologie, étaient sud-africaines, et quarante- la distribution (ShopRite, Spar,
comme l’industrie automobile et trois sur les cent premières (source : Massmart) et les transports (Transnat,
aéronautique, où les barrières à Jeune Afrique, hors-série n° 48, 2018). Supergroup) avec l’Égypte et
l’entrée sont élevées. Elles sont les premières dans l’Éthiopie. Seul le secteur des
8. Les groupes d’Afrique du Sud l’agro-industrie (Bidfood, Tiger hydrocarbures lui échappe (Engen,
occupent une place dominante dans le Brands, les boissons Miller, Distell), devancé par Sonatrach d’Algérie et
capitalisme africain. Sur les cinq cents les télécommunications (MTN, Sonangol d’Angola).
9. Ce résultat est toutefois inverse demande croissante de produits finis sein de la région, et en intégrant les
pour les secteurs qui accordent une au niveau local pour bâtir des chaînes entreprises locales à un système
place importante aux tâches de production régionales centrées logistique régional qui sera
cognitives non répétitives (secteurs sur les spécificités de la demande et progressivement optimisé. Une fois
de l’électronique et des machines des modes de consommation locaux les CVR établies, leurs produits finaux
notamment) mais ils sont peu et qui ne subissent pas la contrainte pourront également être exportés
représentés en Afrique (Brynjolfsson, des normes et règles existant au sein ailleurs dans le monde, notamment
Mitchell, Rock, 2018). des CVM. « Bien que moins vers d’autres marchés en
10. Le développement de chaînes de dynamiques que le rattachement aux développement, ce qui permettra
valeur régionales (CVR) repose sur CVM, en raison de la taille plus ensuite de consolider et d’améliorer
un système de production restreinte des marchés finaux, ces le processus en vue de son
comparable à celui des CVM au CVR sont susceptibles d’encourager rattachement ultérieur aux CVM »
niveau mondial, mais différent en ceci une industrialisation durable en (ICTSD, Passerelles, vol. XVII, n° 9,
qu’il se limite à l’échelle d’un améliorant l’intégration, la 29 novembre 2016).
territoire. L’objectif est d’exploiter la productivité et la division du travail au
L’horizon est le moyen terme, variable entre 2020 et 2030. Les plans
déclinent tous les mêmes thèmes : augmentation du taux de transformation des
ressources naturelles, diversification et sortie de la « malédiction » du pétrole,
libération des potentialités de l’entrepreneuriat et parfois préservation des éco-
systèmes11. À l’examen, beaucoup de ces plans se révèlent peu nourris en amont
par l’analyse des processus sociaux, avec certes des priorités mais sans que
11. Le Maroc est assurément le plus constitue un fonds doté de principal producteur africain, illustre
volontariste. Le Plan d’accélération 2,2 milliards de dollars afin de le potentiel de ce secteur. On compte
industrielle 2014-2020 (PAI) a pour combler les lacunes en matière de dans le pays cent cinquante
objectif de porter à 23 % la développement industriel. Le Maroc a équipementiers. Le Plan d’action
contribution de l’industrie au PIB d’ici attiré des IDE dans de nouvelles pour la politique industrielle
2020, et de créer 500 000 emplois. Il activités exportatrices pour profiter 2016-2019 stipule que le contenu
s’appuie sur les « sept métiers de sa proximité géographique avec local doit atteindre 70 % ou plus pour
mondiaux » du Maroc : aéronautique, les marchés de l’Union européenne, les modèles de grande
automobile, équipement électrique, des accords commerciaux existants consommation, et 40 à 50 % pour les
agro-industrie, textile, cuir et activités et de sa stabilité politique. L’industrie modèles de petite série. La
offshore. Le PAI envisage la création automobile est devenue le premier production automobile est également
de vingt et une nouvelles zones secteur exportateur du pays depuis en plein essor au Maroc, en Algérie.
industrielles (dont la Cité 2014. L’Égypte compte quinze usines de
Mohammed VI Tanger Tech, réalisée 12. Les politiques industrielles montage visant le marché intérieur.
avec le groupe chinois Haite de encouragent souvent le L’Éthiopie et le Kenya deviennent
Chengdu) qui s’ajouteront aux développement de l’industrie également des pays dotés d’unités de
vingt-cinq déjà aménagées. Il automobile. L’Afrique du Sud, montage automobile.
que le secteur des véhicules automobiles12 est lourdement pénalisé par l’étroi-
tesse du marché tandis que le secteur du textile et de l’habillement manque de
personnel qualifié et de capacités pour gérer sa filière. La production de produits
pharmaceutiques est contrariée par les délais d’homologation et la fragmen-
tation des réglementations. Celle des industries agroalimentaires est entravée
par une impossibilité de monter en échelle à cause de la taille des exploitations
qui empêche la rationalisation et la mécanisation (SADC/OCDE, 2017).
13. Voir dans ce numéro, notre australe, et cette proportion devrait chaînes de valeur, notamment pour
Repère : « Vers une industrialisation augmenter rapidement pour atteindre un grand nombre de PME intervenant
verte vertueuse ? ». 30 à 50 % en 2040 (Tschirley et al., dans le transport, le stockage des
14. Les supermarchés alimentaires 2014). Cette transformation des aliments, leur traitement et le
se multiplient dans les villes africaines achats de denrées alimentaires commerce de gros.
et détiennent désormais 10 % du présente des perspectives nouvelles
marché de détail en Afrique de l’Est et mais aussi des risques pour les
15. Une analyse réalisée par le 16. Voir à ce sujet Cantens et indues de l’ordre de 450 dollars.
CIRAD et Afristat sur la base de Raballand (2017) pour une étude des À l’est, entre Mombasa et Kigali,
trente-six enquêtes nationales sur la pratiques et stratégies douanières un camion rencontrera quarante-sept
consommation des ménages donne dans les situations de conflit et de barrages routiers. Au sud,
des résultats probants ; elle met en post-conflit dans six pays : Tchad, il attendra en moyenne trente-six
évidence la vitalité des filières Mali, Soudan, Tunisie, Libye et heures à la frontière entre le
agroalimentaires locales en réponse République centrafricaine. Zimbabwe et l’Afrique du Sud
à une consommation urbaine tournée 17. À l’ouest, un camion transportant (Mo Ibrahim Foundation,
avant tout vers les produits locaux des céréales de Koutiala à Dakar www.moibrahimfoundation.org).
(Bricas et al., 2016). devra passer des dizaines de
contrôles, avec des sollicitations
18. Lancée en 1995, la Spatial inhérent dans des emplacements secteur privé dans des régions avec
development initiative (SDI) est une spatiaux spécifiques en Afrique du un fort potentiel de croissance
stratégie à court terme Sud. Le programme utilise des économique.
d’investissements ayant pour but ressources publiques afin de
d’ouvrir le potentiel économique promouvoir l’investissement du
Bejaïa
Alger Annaba
Tanger Radès Port-Saïd
Casablanca
Alexandrie
Safi Damiette
Nouadhibou Port-Soudan
Agadez
Khartoum
Dakar N’Djamena
Niamey
Bamako Nyala Djibouti
Ouagadougou
Cotonou
Conakry
Juba
San Pedro
Abidjan Bangui
Lagos Yaoundé
Tema Lomé Kampala
Douala
Libreville Kisangani Nairobi
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Kigali
Axes de transport transafricains Pointe- Bujumbura Mombasa
Route bitumée Noire
Dodoma
Route non revêtue Dar es-Salaam
Principaux projets de corridors Luanda Kolwesi
en cours de développement Lubumbashi
Lobito
Ndola Lilongwe
Ouvrages (ports, aéroports, Nacala
points de passage frontaliers) Lusaka
en cours de construction (PIDA) Harare Toamasina
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Si beaucoup reste à faire en matière d’infrastructures de transport, la croissance et l’amélioration des « corridors »
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transafricains sont indéniables. D’abord construits comme des dispositifs logistiques (corridors de transport), ils sont
désormais envisagés comme des projets structurants à l’échelle régionale (corridors de développement). L’accent reste
toutefois souvent davantage porté sur l’objectif de fluidification des échanges (volumes transportés, facilitations
douanières et administratives, qualité des infrastructures) plutôt que sur les effets d’entraînement et les capacités à
innerver les territoires traversés.
les villes du Cap, de Lagos et de Nairobi sont devenues des pôles de start-up
mondiales, surtout dans la technologie financière. Maurice est cité pour ses
services financiers et son tourisme haut de gamme, tirant parti de sa stabilité
politique et de son faible niveau de corruption. Le Botswana, les Seychelles,
Djibouti et le Lesotho, où la part des services dans le PIB a atteint plus de 60 %,
aussi. Le Cap-Vert entend également devenir une plate-forme pour les services
de réparation maritime. Mais, comme pour les autres cas, il s’agit d’une situa-
tion atypique, concernant des pays à très faible population, difficilement trans-
posable dans un autre contexte, et peu de cas sont suffisamment documentés
pour construire un vrai modèle alternatif.
Conclusion
Pour terminer, laissons parler les prévisionnistes. Le continent africain pour-
rait doubler sa production manufacturière en dix ans pour la porter en valeur à
mille milliards de dollars, stimulant la productivité globale et créant de la sorte
entre six et quatorze millions d’emplois stables. Ce développement supposerait
une croissance générale de l’ordre de 6 % par an. Les trois quarts de cette crois-
sance seraient tirés par la demande africaine et la substitution aux importa-
tions de biens manufacturés, mieux que dans les autres économies émergentes
(McKinsey, 2016).
Comment ne pas céder à cet enthousiasme communicatif ? L’indus
trialisation tardive de l’Afrique ouvrirait des possibilités de « raccourcis » vers
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