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L'INTERNATIONALISATION

Un défi pour les compétences de l'équipe dirigeante d'une P.M.E.


François Pantin

HEC Montréal | Gestion


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2006/1 - Vol. 31

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pages 77 87

ISSN 0701-0028

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http://www.cairn.info/revue-gestion-2006-1-page-77.htm
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Pour citer cet article :


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Pantin François, L'internationalisation Un défi pour les compétences de l'équipe dirigeante d'une P.M.E.,
Gestion, 2006/1 Vol. 31, p. 77-87. DOI : 10.3917/riges.311.0077
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DOSSIER L’internationalisation des entreprises : défis, contextes et expériences 77

L’internationalisation :
un défi pour les compétences
de l’équipe dirigeante d’une P.M.E.
François Pantin
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Si l’émergence de puissantes entre- Les auteurs
prises multinationales constitue une
évidente manifestation du phénomène François Pantin est docteur en sciences de gestion à l’IAE de Caen Basse-Normandie,
de l’internationalisation, cette stratégie Centre de recherche Caen Innovation Marché Entreprise (CIME).
vaut également pour les P.M.E. En effet,
avec la mondialisation de l’économie, la

DOSSIER
capacité de ces entreprises à dévelop- pective d’enrichissement des travaux mettra la construction de ce processus
per leurs activités hors de leurs fron- antérieurs, cette recherche propose de stratégique (Castanias et Helfat, 2001).
tières nationales est devenue un enjeu mobiliser l’approche par les ressources. Cette recherche s’interroge dès lors
fondamental (Hébert, 2002). Selon cette approche, le processus sur le rôle des compétences de l’équipe
La dimension internationale consti- d’expansion des entreprises dépend dirigeante dans la conduite du proces-
tue donc aujourd’hui une réalité s’im- non seulement des ressources à leur dis- sus d’internationalisation. Dans cette
posant à tous, et les pratiques obser- position, mais également et surtout de perspective, nous mettrons en évidence
vées montrent que de plus en plus de l’exploitation qui en est faite, les seules l’apport et les limites des travaux trai-
firmes de taille petite ou moyenne ressources ne pouvant rendre compte tant du processus d’internationalisa-
conçoivent leur développement hors du potentiel interne de l’entreprise tion et indiquerons dans quelle mesure
de leurs frontières nationales. À titre (Reynaud et Simon, 2004). Cette théo- l’approche par les ressources peut enri-
d’illustration de ces propos, la France rie replace donc au cœur de la réflexion chir la compréhension de ce processus.
compte 110 000 P.M.E. exportatrices sur les processus d’expansion le com- Le choix de notre objet de recherche
qui réalisent 32 % des ventes à l’étran- portement de l’entreprise et des entre- justifié et la méthodologie déterminée
ger (le total des exportations s’établis- preneurs. Ces derniers, définis comme par la suite, notre réflexion sera appro-
sant à environ 500 milliards d’euros). des individus spécialisés dans la prise fondie par l’étude longitudinale du
En outre, le taux d’exportation moyen de décisions relatives à la coordination processus d’internationalisation d’une
des P.M.E. industrielles (moins de 500 des ressources, représentent en effet P.M.E., de son équipe dirigeante et de
salariés) s’élève à environ 15 % (Alary- un acteur important dans le processus ses compétences en action.
Grall, 2003). Dès lors, au regard de la d’expansion des firmes, et en particu-
place croissante qu’occupent ces entre- lier dans le processus d’internationali-
prises à l’étranger, il convient d’intégrer sation face auquel ils sont considérés
cette population dans la réflexion sur comme une variable clé (Miesenböck, Pour une compréhension
le processus d’expansion géographique 1988). Cependant, une telle stratégie de enrichie du processus
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des firmes. pénétration des marchés étrangers ne d’internationalisation


Les travaux traitant du processus peut être conduite par le seul dirigeant,
d’internationalisation sont riches et compte tenu de la multiplicité des pro- Divers travaux théoriques et empi-
nombreux et leur apport est indéniable. blèmes (commerciaux, financiers, juri- riques ont tenté de conceptualiser
Toutefois, de nombreuses recherches diques, etc.) à résoudre et de la com- depuis les 30 dernières années le pro-
en soulignent les limites (Leonidou et plexité qui en découle. Il faut donc cessus par lequel les entreprises amor-
Katsikeas, 1996) et plaident aujourd’hui envisager l’internationalisation comme cent, développent et soutiennent leur
en faveur de nouvelles études pou- un processus collectif porté par une engagement dans le domaine inter-
vant enrichir la compréhension de ce équipe (Leconte et Forgues, 2000) qui, national. Nous présenterons l’apport
processus. Se situant dans cette pers- sur la base de ses compétences, per- et les limites de certains des travaux
78 les plus fréquemment invoqués et les Par ailleurs, les seules activités exporta- Même si ces limites n’invalident pas
plus représentatifs (Andersen, 1993), à trices sont étudiées dans les différents l’ensemble de ces travaux par ailleurs
savoir le modèle Uppsala et les modèles travaux relatifs au processus d’inter- largement admis, elles impliquent la
Innovation. Nous montrerons ensuite nationalisation. Or, si les modalités de nécessité de les nuancer, voire de les
dans quelle mesure l’approche basée pénétration des marchés étrangers qui compléter. Dans cette perspective,
sur les ressources et les compétences s’offrent aux entreprises sont plus nom- nous mobilisons l’approche basée sur
peut enrichir ces travaux. breuses (importation, filiale conjointe, les ressources, qui s’attache à l’organi-
etc.), il est impossible de «passer sous sation et au fonctionnement interne de
L’apport et les limites des modèles silence les conséquences sur le proces- l’entreprise (en particulier les processus
Uppsala et Innovation sus d’internationalisation d’autres opé- de management) comme source des
rations menées au sein de l’entreprise, processus d’expansion des firmes, et
La plupart des premiers travaux telles que l’expansion domestique, qui paraît pouvoir enrichir ces travaux
empiriques traitant du processus l’innovation-produit, voire la diversi- sur le comportement international des
d’internationalisation des entreprises fication du portefeuille» (Ageron et entreprises. Cette approche permet en
trouvent leurs fondements dans la théo- Huault, 2002 : 44). Cette critique trouve effet de s’interroger non seulement sur
rie behavioriste ou «comportementale» un écho en particulier dans les P.M.E. le «pourquoi», mais également sur le
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de la firme (Cyert et March, 1963), con- qui font face au choix stratégique du «comment» du développement d’une
sidérant l’internationalisation comme partage de leurs ressources entre le entreprise hors de ses frontières natio-
le produit d’une série de décisions marché national et les marchés étran- nales, et considère explicitement le rôle
incrémentielles ( Johanson et Vahlne, gers (Dalli, 1994). En outre, ces modè- du management dans la conduite de ce
1977). Parmi l’ensemble de ces travaux1, les semblent sous de nombreux rap- processus stratégique (Van Den Bosch
deux voies d’analyse peuvent être rele- ports trop déterministes dans le choix et Van Wijk, 2001).
vées (Gankema et al., 2000) : le modèle tant des pays d’exportation (des pays
Uppsala ( Johanson et Wiedersheim- psychologiquement proches aux pays Pour un positionnement théorique
Paul, 1975; Johanson et Vahlne, 1977) et psychologiquement plus éloignés) que dans l’approche par les ressources
les modèles Innovation (notamment les
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des modalités de pénétration des mar-


travaux de Bilkey et Tesar, 1977). Les écrits de Penrose (1959)2 mar-
chés étrangers (d’un engagement léger
Un apport majeur de ces modè- quent les origines de l’approche basée
et flexible à un engagement de plus en
les est la mise en évidence d’un pro- sur les ressources. Depuis cette date,
plus massif et irréversible). À ces criti-
cessus d’internationalisation évolutif nombre d’écrits se réclamant des tra-
ques vient également s’ajouter celle de
comportant des étapes ou stades que vaux de Penrose sont apparus, consti-
l’unité d’analyse la plus souvent retenue,
l’entreprise franchit successivement. Le tuant aujourd’hui un véritable corpus
la plupart des travaux se concentrant
caractère graduel de ce processus est théorique, l’approche par les ressources,
sur de grandes firmes (Gankema et al.,
principalement attribué au manque de où il est possible de distinguer différents
2000) et/ou envisageant le comporte-
connaissances de la firme et à l’incerti- courants3 (Koenig, 1999) : l’approche
tude associée à la décision concernant ment des P.M.E. face à l’étranger comme fondée sur les ressources (resource-
l’internationalisation. Même s’il existe étant seulement réactif et non proactif. based view) (Wernerfelt, 1984; Barney,
des différences entre ces travaux quant De plus, il faut souligner qu’on ne prend 1986, 1991), la théorie des compétences
au nombre, à la nature et au contenu de pas en considération la dimension tem- fondamentales4 (Hamel et Prahalad,
ces étapes, tous se rejoignent quant à porelle dans les analyses. Même s’il est 1990), la théorie des capacités dynami-
l’idée selon laquelle le processus d’inter- reconnu que le processus d’internatio- ques (Teece et al., 1997) et l’école évolu-
nationalisation de l’entreprise peut être nalisation est «profondément dynami- tionniste (Nelson et Winter, 1982).
divisé en trois phases : le pré-engage- que et doté d’une forte temporalité, les La nature de notre recherche nous
ment (activité nationale), la phase ini- premiers modèles apparaissent plutôt amène à focaliser notre attention sur
tiale (exportations sporadiques sous statiques et décontextualisés» (Ageron le courant des ressources dynamiques5,
différentes formes) et la phase avancée et Huault, 2002 : 44). Enfin, mention- qui intègre la théorie des compétences
( formes plus engagées d’internationali- nons que ces travaux, et en particulier fondamentales et la théorie des capa-
sation) (Leonidou et Katsikeas, 1996). le modèle Uppsala, n’explicitent pas cités dynamiques. En effet, ce courant
Malgré la contribution manifeste de les raisons et les conditions du passage inscrit son analyse dans une perspec-
ces modèles et les nombreux travaux d’un stade à un autre dans le processus tive dynamique, l’histoire façonnant
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qui y adhèrent, il ne faut pas pour autant (Andersen, 1993). En effet, les auteurs indéniablement le devenir des ressour-
croire qu’ils sont exempts de limites ne discutent jamais des facteurs pou- ces et des compétences de l’entreprise,
(Gankema et al., 2000). Ainsi, parmi les vant influencer ce processus d’expan- et donc de la firme elle-même. La prise
principales critiques formulées à leur sion géographique, considérant que «le en considération de cette dimension
égard, nous pouvons d’abord souligner processus d’internationalisation, une temporelle dans l’analyse est d’autant
que de nombreux travaux viennent fois qu’il est annoncé, tend à fonction- plus cruciale que nous étudions le pro-
aujourd’hui relativiser, voire infirmer, ner sans égard au fait que des décisions cessus d’internationalisation, qui, rap-
l’hypothèse d’un processus séquentiel stratégiques soient prises ou non» pelons-le, est profondément dynami-
aux étapes successives et bien distinc- (Johanson et Vahlne, 1990 : 12, traduc- que. Par ailleurs, selon cette approche,
tes (Sullivan et Bauerschmidt, 1990). tion libre). «une défaillance en ressources ne con-
duit pas systématiquement l’entreprise (Tarondeau, 1998 : 100). La compétence à organiser les activités de l’entreprise, 79
à la perte et inversement des moyens peut se définir comme l’aptitude de à découvrir les occasions d’affaires et à
illimités ne constituent pas un moyen l’entreprise à coordonner durablement en tirer profit, à négocier, à affirmer une
infaillible pour se prémunir de l’échec» l’utilisation de ses actifs dans le but d’at- position dans un réseau d’affaires, etc. Si
(Mechin, 2001 : 98). L’enjeu pour l’entre- teindre ses objectifs (Sanchez, 2000). La ces compétences de l’équipe dirigeante
prise (et sa direction) se situe donc performance des firmes n’est donc pas contribuent au changement stratégi-
dans la mobilisation et la coordination seulement fonction des ressources qui que au sein de l’entreprise (Chandler et
des ressources, permettant de dégager sont en leur possession. Si la qualité et Hanks, 1994; Sanchez et al., 1996), elles
un avantage concurrentiel (Hamel et le type de ressources constituent une ne peuvent être considérées comme
Prahalad, 1990), et non dans sa seule condition nécessaire à ce que la firme ayant toutes le même poids et le même
dotation en ressources uniques. Cette sera en mesure d’effectuer, ils ne sont rôle dans ce processus de changement.
idée est d’autant plus intéressante que en aucun cas une condition suffisante. Ainsi, à l’instar de Hamel et Prahalad
nous inscrivons notre raisonnement L’essentiel se situe dans la manière (1995), il nous apparaît pertinent de
dans le cadre des P.M.E. dont on men- dont l’entreprise, et plus précisément distinguer les compétences nécessaires
tionne souvent leur handicap quant à sa direction, optimise la coordination des compétences différenciatrices (ou
la taille et aux ressources. Le courant entre les ressources. En effet, les usages stratégiques ou fondamentales).
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des ressources dynamiques offre ainsi potentiels, et donc la valeur d’une res- Il existe en effet des compétences
la possibilité de dépasser cette idée, source d’une entreprise, dépendent de essentielles pour pénétrer un marché
idée par ailleurs déjà réfutée face au fait la manière dont son équipe dirigeante la étranger (par exemple, la connais-
international (Wolff et Pett, 2000). combine, la coordonne et l’utilise avec sance des particularités réglementaires
En résumé, ce courant situe sa d’autres ressources (Sanchez, 2000). d’un pays étranger) sans que celles-ci
réflexion dans un cadre dynamique et Dès 1959, Penrose souligne le rôle soient pour autant synonymes d’avan-
s’attache aux fondements de l’avantage crucial joué par l’équipe dirigeante et tage concurrentiel. Elles constituent le
concurrentiel de la firme en privilégiant ses compétences. L’auteur montre en minimum requis sans lequel les entre-
les compétences, concept central que effet que la croissance de la firme se prises ne peuvent prétendre pénétrer
nous délimiterons à présent. trouve à la fois encouragée et limitée un marché étranger. Par ailleurs, Hamel

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par le processus véritablement dyna- et Prahalad (1990, 1995) envisagent
Définition de la compétence mique et interactif qui apparaît lors- des compétences qu’ils qualifient de
que l’équipe dirigeante recherche le différenciatrices et qui correspondent
Les ressources peuvent être enten- meilleur usage possible des ressources à un savoir-faire en action. Selon eux,
dues comme les actifs de base qui inter- dont elle dispose. ces compétences fournissent un accès
viennent dans le processus global de Cette conception de l’avantage potentiel à une grande variété de mar-
production de biens ou de services de concurrentiel, insistant sur les flux de chés, contribuent de manière impor-
l’entreprise. La nature d’une ressource services produits par les ressources, tante à la valeur perçue par les clients
repose principalement sur son caractère met en exergue le rôle décisif joué par du produit final et sont difficiles à
matériel ou immatériel. La stratégie est l’équipe dirigeante et ses compétences imiter par les entreprises concurrentes
souvent envisagée comme étant arti- de gestion qui se révèlent dans l’ac- en ce sens qu’elles s’inscrivent dans une
culée autour des ressources de la firme tion. En effet, les processus de manage- dynamique amorcée et construite par
(Collis, 1991). Cette idée se retrouve ment, suivant les compétences de ges- l’ensemble de l’équipe dirigeante.
dans les travaux traitant du processus tion mises en œuvre, détermineront la Le processus d’expansion géogra-
d’internationalisation des entreprises. manière dont les menaces et les occa- phique place l’équipe dirigeante devant
Ainsi, selon le modèle Uppsala, l’entre- sions seront formellement appréhen- de nombreux problèmes et risques
prise tentera tout d’abord de pénétrer dées (Sanchez, 2000). Le processus stra- (industriels, commerciaux, financiers,
les marchés étrangers en utilisant des tégique de l’entreprise se construit donc humains, etc.) auxquels elle doit faire
modes d’entrée qui économiseront ses à partir de ces compétences rares, peu face. Dès lors, au-delà de la nécessaire
ressources (tels que l’exportation à tra- transférables et difficilement imitables détermination des compétences de
vers un agent), puis elle s’engagera pro- (Castanias et Helfat, 2001), et non sur l’équipe dirigeante qui sont en œuvre
gressivement dans des modes d’entrée le monopole d’une ressource difficile dans le processus stratégique et dont
nécessitant des ressources de plus en à pérenniser dans un environnement elles sont indissociables, il est primor-
plus importantes (tels que l’installation concurrentiel de plus en plus turbulent dial de comprendre leur rôle dans la
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d’une filiale de distribution à l’étran- (Tarondeau, 1998), en particulier face à conduite de ce processus, et en parti-
ger). la mondialisation de l’économie. culier du processus d’internationalisa-
Toutefois, de la notion de ressource, Un certain nombre d’auteurs tion de la firme sur lequel nous nous
il nous faut passer à la notion de com- (Chandler et Jansen, 1992; Belley et al., concentrons. À la lumière du courant
pétence puisque «aucun objet n’est en 1996) se sont attachés à relever les dif- des ressources dynamiques mobilisé,
soi une ressource. Il le devient par la férentes compétences de l’équipe diri- nous envisageons donc la stratégie
grâce des processus qui le mobilisent geante influençant le processus d’ex- d’internationalisation de l’entreprise,
et le mettent en relation avec d’autres pansion des entreprises. Celles-ci se sa richesse et sa conduite comme étant
objets-ressources. […] Combiner des réfèrent aux capacités à élaborer une dépendantes des membres de l’équipe
ressources exige des compétences» stratégie d’entreprise, à coordonner et dirigeante et de leurs compétences, qui
80 permettent d’amorcer et de construire sance et des compétences nécessaires, «comment et pourquoi», telle que nous
ce processus stratégique (Castanias et en particulier dans le cadre de la con- l’avons formulée : l’expérience, l’étude
Helfat, 2001). Dans cette perspective, duite d’un processus d’internationa- historique et l’étude de cas. En outre, en
nous avons réalisé une étude longitu- lisation décrit par Hamel et Prahalad faisant appel aux critères du degré de
dinale approfondie d’une P.M.E. indus- (1990) comme complexifiant l’ensemble contrôle des événements étudiés et du
trielle ayant suivi un processus d’inter- des tâches de gestion. Ainsi, on constate degré de contemporanéité de ces évé-
nationalisation «complet» (de l’absence que le dirigeant s’entoure d’une équipe nements, il apparaît pertinent d’opter
totale d’activité internationale jusqu’à de cadres très engagés. pour l’étude de cas.
l’implantation d’une filiale à l’étranger) Pour mener notre étude empiri- Par ailleurs, le fait de s’intéresser aux
afin d’analyser et de comprendre les que, nous avons sélectionné une P.M.E. processus qui sous-tendent un quel-
actions de son équipe dirigeante sur ce aux caractéristiques marquées, un cas conque phénomène implique nécessai-
processus. «typique». Cette entreprise industrielle rement l’introduction d’une dimension
française commence son histoire en temporelle dans la recherche. L’étude
1958 avec le rachat par le père de l’ac- du processus d’internationalisation,
tuel dirigeant d’un laboratoire phar- sur lequel notre recherche porte, exige
Des choix méthodologiques : maceutique créé en 1904. L’entreprise, qu’on adopte une perspective dynami-
l’étude longitudinale d’une
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familiale et indépendante, emploie 470 que et nous amène donc à privilégier
P.M.E. industrielle française personnes et réalisait en 2002 un chif- une recherche longitudinale. À ce con-
fre d’affaires de 90 millions d’euros. Les texte d’internationalisation dans lequel
Le choix d’une P.M.E. pour objet de activités du groupe, qui évolue dans un cette recherche s’inscrit et qui vient jus-
recherche environnement très concurrentiel, sont tifier une telle démarche, ajoutons que
structurées autour de trois pôles : un la «compétence» est une notion contin-
Le choix de réaliser une étude ayant pôle pharmaceutique (constituant le gente (elle n’a de sens que par rapport à
pour seul objet de recherche la P.M.E. volet le plus important de l’activité du l’action et au but que poursuit l’action)
est motivé par différents arguments. groupe), un pôle cosmétique et un pôle et dynamique (elle s’inscrit et se cons-
Tout d’abord, ces entreprises occupent façonnage (pour le conditionnement et truit dans l’histoire de l’entreprise).
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une place importante (quant à l’em- la fabrication de produits du groupe, Afin de mener à bien notre étude
ploi, par exemple) dans la plupart des mais également d’autres laboratoires empirique, et comme le préconise
économies et représentent dès lors pharmaceutiques ou sociétés cosmé- Eisenhardt (1989), nous avons combiné
une unité d’analyse intéressante. Par tiques). L’entreprise, qui a entrepris en plusieurs méthodes de production de
ailleurs, ces entreprises, en raison de 1974 ses premières exportations direc- données. En effet, nous avons eu recours
leur taille «humaine», constituent un tes à destination de la Belgique, est à des sources de données secondaires
objet de recherche où les phénomènes aujourd’hui présente dans plus de 75 telles que des plaquettes commercia-
sont plus facilement repérables et lisi- pays, notamment à travers quatre filia- les de présentation de la société et des
bles, et permettent donc plus aisément les (en Belgique, à Hongkong, aux États- documents financiers. Par ailleurs, nous
de faire apparaître concrètement, aux Unis et en Italie) et ses partenaires avons réalisé lors de nos visites dans les
yeux de l’observateur, ce qui est caché, étrangers. Elle réalise environ 25 % de différentes installations (production,
difficile à saisir et à interpréter dans son chiffre d’affaires à l’étranger, dont la administration, service export) de la
les organisations de grande dimension moitié dans des exportations. société un certain nombre d’observa-
(Marchesnay, 1993). Enfin, si le nombre tions. Enfin, la collecte de données a
de travaux traitant de l’internationali- L’étude de cas privilégiée comme également été réalisée au moyen de 15
sation de grandes firmes est important, stratégie d’accès au réel entretiens6 semi-directifs, in situ, de 90
nous devons reconnaître un manque à 120 minutes auprès de l’ensemble des
de recherches approfondies dans ce L’objectif de cette recherche est de membres de l’équipe dirigeante asso-
domaine dans la catégorie des P.M.E. comprendre le rôle des compétences de ciés au processus d’internationalisa-
(Gankema et al., 2000). l’équipe dirigeante dans la conduite du tion (le président-directeur général, le
Soulignons que ces entreprises sont processus d’internationalisation, autre- directeur général, le directeur export,
dirigées par une personne pivot, et qu’il ment dit de comprendre comment ces la secrétaire générale du pôle cosméti-
existe une étroite connexion entre les compétences influent sur le processus que, le secrétaire général du pôle phar-
qualités individuelles de cet entrepre- d’expansion géographique. Yin (1989) maceutique, le directeur juridique, le
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neur et le succès économique de l’entre- propose une grille de lecture des diffé- directeur financier, le directeur mar-
prise (Miesenböck, 1988). Néanmoins, rentes stratégies d’accès au réel (expé- keting et communication, le directeur
même si le rôle du dirigeant se révèle rience, étude statistique, étude d’archi- filiale Asie et le directeur commercial)7.
prépondérant dans l’élaboration et la ves, étude historique et étude de cas) Ces entretiens se sont déroulés sur une
mise en œuvre de la stratégie, il ne faut permettant de sélectionner la stratégie période de 24 mois allant de décembre
pas pour autant imaginer que celui-ci la plus adaptée, notamment au regard 2002 à novembre 2004. L’ensemble des
agit seul (Allali, 2002). Dans la conduite des questions de recherche posées. données récoltées a ensuite été recoupé
du changement stratégique, le partage Selon l’auteur, seules trois stratégies dans un processus de triangulation.
du pouvoir devient en effet une quasi- de recherche permettent d’envisa- Cette démarche avait pour objectif de
nécessité compte tenu de la connais- ger une question de recherche de type répondre à la question de la validité
de la collecte de données à partir d’en- s’effectue exclusivement sur le territoire combler plus vite et en totalité les atten- 81
tretiens rétrospectifs (Yin, 1989), et en national. Cette activité permettra ainsi tes de ses clients. La seconde moitié des
particulier du risque de la rationalisa- à l’entreprise, dirigée par le père de l’ac- années 1980 est également marquée par
tion a posteriori par nos interlocuteurs tuel dirigeant et employant moins de la création d’un service export.
du processus d’internationalisation de 20 salariés, de réaliser un chiffre d’af- Le stade 3, de 1991 à 1999, voit l’entre-
l’entreprise. faires en 1973 de 2 millions de francs prise accélérer sa pénétration des mar-
(soit environ 300 000 euros). Toutefois, chés étrangers. Cette accélération se
durant la période considérée, on cons- manifeste par la création en 1992 d’une
tate que le développement commercial coentreprise (joint venture) tripartite
L’étude longitudinale du de l’entreprise reste limité. avec des partenaires chinois et hong-
processus d’internationalisation Le stade 2, qui s’étend de 1974 à kongais avec pour objectifs la produc-
d’une P.M.E. industrielle 1990, est la période des premiers pas tion et la distribution d’un produit cos-
française de l’entreprise sur les marchés étran- métique à Hongkong, en Corée du Sud
gers. C’est en effet en 1974 que celle-ci, et en Chine. Cette filiale conjointe fait
La présentation des résultats de sous l’impulsion de l’actuel dirigeant suite à quelques exportations dans la
notre étude et leur analyse se feront ici (à cette époque responsable commer- zone Asie (et notamment à Taiwan) au
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en deux temps. Nous nous attacherons cial depuis une année), réalise ses pre- début des années 1990 et permet ainsi
à décrire le processus d’internationa- mières exportations vers la Belgique, de pénétrer indirectement des pays
lisation suivi par l’entreprise étudiée, pays géographiquement et psychologi- géographiquement et psychologique-
puis à comprendre le rôle des compé- quement proche. Cette pénétration du ment plus distants. Poursuivant sa logi-
tences de l’équipe dirigeante dans la marché belge prend la forme de quel- que de développement international,
conduite de ce processus. ques exportations directes de produits l’entreprise effectue ses premiers inves-
standard du catalogue à destination tissements directs en 1995 en créant en
Un processus d’internationalisation d’officines. Ces premières expériences Belgique une filiale de distribution de
séquentiel réussies se poursuivent par des exporta- produits cosmétiques et pharmaceu-
tions directes ou à l’aide d’agents ou de tiques, ainsi qu’une filiale de représen-

DOSSIER
L’analyse de l’ensemble des données distributeurs locaux (suivant les occa- tation au Canada (qui fermera en 1998
recueillies, en nous focalisant sur les sions trouvées par l’actuel dirigeant au pour des raisons que nous évoquerons
dimensions des pays visés et des moda- cours de ses déplacements à l’étranger). dans la seconde partie de notre ana-
lités de pénétration des marchés étran- Toutefois, l’entreprise devient rapide- lyse). De plus, continuant sa pénétration
gers, nous a permis de relever quatre ment limitée, notamment sur le plan du marché asiatique, le groupe décide
stades dans le processus d’internatio- de ses capacités productives, et ne peut d’abandonner la coentreprise et de créer
nalisation de l’entreprise étudiée de sa répondre à l’ensemble des commandes une filiale à Hongkong avec pour objec-
création en 1958 jusqu’à l’année 20038 qui lui sont adressées. Afin d’assurer son tifs sa représentation dans cette zone de
(schéma 1). développement global, elle acquiert en même que la mise en route d’importa-
Le stade 1, de 1958 à 1973, qui cor- 1986 deux entreprises parapharmaceu- tions (de nombreux produits de cette
respond au développement de l’activité tique et cosmétique, ce qui lui permet zone sont utilisés dans la fabrication de
(organisée durant la période autour d’accroître ses capacités de production la société). Même si l’entreprise, durant
d’un seul produit pharmaceutique), et son catalogue de produits, et ainsi de cette période, pénètre plus activement

SCHÉMA 1 – Quatre stades dans le processus d’internationalisation de 1958 à 2003

1958 1973-1974 1990-1991 1999-2000 2003

Stade 1 : Stade 2 : Stade 3 : Stade 4 :


Stades

activité exclusivement premiers pas sur accélération de nouvel horizon sur


Gestion, volume 31, numéro 1, printemps 2006

nationale les marchés étrangers l’internationalisation les marchés étrangers

Quelques pays 60 pays visés majoritai- 75 pays visés avec pour


Pays visés

Aucun francophones ou proches rement francophones ou nouvelle cible les pays


géographiquement géographiquemnet proches non francophones

Exportations directes, à travers Exportations (en majorité), Exportations, deux filiales


Modalités

Aucune des agents et à travers des une filiale de vente, une de vente, deux filiales de
distributeurs locaux filiale de représentation représentation
82 des marchés étrangers éloignés psy- omettre d’intégrer dans l’analyse du Le stade 1. S’appuyant sur les
chologiquement et géographiquement, développement international de l’entre- seules compétences techniques du
il n’en demeure pas moins que la plus prise celle de son développement global dirigeant et sur sa capacité à gérer
grande partie du chiffre d’affaires de (Leonidou et Katsikeas, 1996), en parti- l’entreprise, cette période se carac-
l’exportation (plus de 60 %) est réalisée culier au sein d’une P.M.E. faisant face à térise par une activité exclusivement
dans les pays francophones et/ou pro- la question du partage de ses ressour- nationale. Malgré un outil industriel
ches géographiquement. ces entre son marché intérieur et ses performant, l’entreprise connaît au
Le stade 4, qui commence en 2000, marchés étrangers (Dalli, 1994). Enfin, début des années 1970 quelques diffi-
est marqué par l’adoption par l’entre- il semble que l’engagement interna- cultés commerciales. Souhaitant relan-
prise d’une nouvelle stratégie de péné- tional de cette entreprise a pour ori- cer commercialement la société, mais
tration des marchés étrangers avec la gine son actuel dirigeant et non des conscient qu’il ne détient pas les com-
création d’une filiale de représentation sollicitations externes (par exemple, pétences nécessaires à un tel dévelop-
aux États-Unis en 2002 et d’une filiale de une commande venant de l’étranger, pement (capacité à négocier, capacité à
distribution en Italie en 2003 (permet- comme le suggèrent Bilkey et Tesar, construire un réseau relationnel, etc.),
tant à l’entreprise de mieux maîtriser 1977). L’internationalisation de cette le père de l’actuel dirigeant engage son
sa politique en matière d’exportation); entreprise s’inscrit dans une démarche fils en tant que responsable commercial
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elle fait aussi des exportations dans proactive, même si les modalités rete- en 1973. Ce dernier, outre sa formation
des pays non francophones et/ou plus nues pour pénétrer certains marchés commerciale universitaire, a effectué,
distants (comme la Pologne, la Russie, par la suite relèvent également d’occa- un an auparavant, une année de stage
l’Allemagne, l’Espagne ou le Portugal). sions se présentant lors de voyages d’af- en tant que représentant commercial
L’ensemble de ces développements, faires à l’étranger. La démarche suivie dans un laboratoire pharmaceutique en
tant sur le plan international que sur le résulte ainsi d’un mélange de réflexion Grande-Bretagne. Cette expérience lui
plan national, permet à l’entreprise de stratégique, d’action stratégique et a permis d’acquérir la connaissance du
réaliser en 2003 un chiffre d’affaires de d’occasions (Johanson et Vahlne, 1990). secteur pharmaceutique et du métier,
108 millions d’euros, dont plus de 25 % Si ces résultats viennent nuancer de même qu’une expérience internatio-
à l’étranger (avec 70 % des ventes de nale importante.
DOSSIER

les travaux portant sur le processus


certains produits cosmétiques qui ont d’internationalisation des entreprises Le stade 2. Dès son arrivée, l’actuel
lieu dans des pays étrangers). à l’exemple d’autres recherches9, notre dirigeant chargé du développement
En résumé, il apparaît que la démar- analyse doit à présent être enrichie commercial désire que l’entreprise ne
che d’internationalisation suivie par reste pas «franco-française», ayant
par l’étude de la dynamique d’inter-
la P.M.E. étudiée relève d’un processus conscience qu’«il existe un monde
nationalisation de cette entreprise et
séquentiel, aux étapes successives et après la France» (extrait d’entretien
du rôle de l’équipe dirigeante et de ses
distinctes, allant de pays psychologi- avec le P.D.G.). S’appuyant sur l’expé-
compétences dans cette dynamique.
quement proches à des pays psycholo- rience antérieure et la volonté de l’ac-
Notre objectif est donc de trouver les
giquement plus éloignés. Le processus tuel dirigeant, l’entreprise réalise dès
compétences de l’équipe dirigeante en
suivi par cette entreprise correspond 1974 ses premières exportations vers
action au cours du processus d’expan-
à celui qui a été mis en évidence par le marché belge, poursuivies par des
sion géographique du cas étudié et de
l’école nordique d’Uppsala ou les exportations à destination des départe-
comprendre leur rôle dans la conduite
modèles Innovation, et plus généra- ments et territoires d’outre-mer (DOM-
de ce processus.
lement par les travaux de Leonidou TOM) et de quelques pays africains
et Katsikeas (1996) distinguant trois francophones. Toutefois, des problèmes
phases au cours de ce processus. Cette Les compétences de l’équipe liés aux capacités de l’actuel dirigeant à
étude ne nous permet donc pas, comme dirigeante en action et leurs rôles gérer l’ensemble des développements
l’ont fait d’autres travaux, de remettre dans la conduite du processus commerciaux devenus de plus en plus
en cause l’idée d’un processus évolutif d’internationalisation complexes tant sur le plan national que
comportant des étapes que l’entreprise sur le plan international (du fait de la
franchit successivement. Notre représentation graphique disponibilité et des connaissances des
Cependant, différents éléments (schéma 2) met en évidence les inter- marchés nécessaires) apparaissent
nous amènent à nuancer les travaux actions entre l’évolution du proces- rapidement. L’actuel dirigeant engage
traitant du processus d’internationa- sus d’internationalisation et celle de à la fin des années 1970 un responsa-
Gestion, volume 31, numéro 1, printemps 2006

lisation. En effet, notre analyse nous l’équipe dirigeante de l’entreprise. Ce ble commercial chargé uniquement
permet d’avancer, à l’instar d’Ageron schéma est un résumé de ce qui s’est du développement national, ce qui lui
et Huault (2002), que l’étude des seules passé dans le cas. Cette étape intermé- permet de déléguer des responsabili-
activités exportatrices ne peut offrir diaire de représentation graphique doit tés et donc d’être plus disponible pour
une représentation fidèle du processus donc être enrichie d’explications pour gérer les développements internatio-
d’expansion géographique. Il faut non chacun des stades relevés dans le pro- naux. Par ailleurs, la structure de l’en-
seulement envisager les autres modali- cessus d’internationalisation afin qu’on treprise est enrichie par l’embauche
tés possibles ( filiale conjointe ou déte- puisse établir le lien existant entre en 1985 d’un pharmacien responsable
nue à 100 %, filiale de représentation ou ce processus et les compétences de (aujourd’hui directeur général), ce qui
de vente, etc.), mais également ne pas l’équipe dirigeante. apporte des compétences techniques
SCHÉMA 2 – Conduite du processus d’internationalisation (de 1958 à 2003) par l’équipe dirigeante 83
Marché, production, difficultés Équipe dirigeante Internationalisation 1958

– 1958 :

vement nationale
création de l’entreprise par

activité exclusi-
le père de l’actuel dirigeant

Stade 1 :
Outil industriel performant
mais manque de débouchés
commerciaux
1973 :
+ embauche de l’actuel dirgeant x 1974 :
comme responsable commercial premières exportations
vers la Belgique

Poursuite des exportations vers

premiers pas sur les marchés étrangers


les départements et territoires
d’outre-mer et quelques pays
Difficulté à répondre à
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africains francophones
l’ensemble des commandes (France
et étranger) et à gérer l’ensemble

Stade 2 :
des développements commerciaux
+ Embauche d’un directeur
+ commercial responsable pour
la France, d’un pharmacien +
1986 : responsable et création
rachat de deux sociétés d’un service export
(pharmaceutique et cosmétique) +

DOSSIER
Volonté de pénétrer les machés
asiatiques du fait des produits + 1991 : + 1991 :
cosmétiques de la société embauche d’un responsable premières exportations
export pour la zone Asie vers l’Asie (Taiwan)

accélération de l’internationalisation
Difficulté à pénétrer plus 1992 :
activement les marchés création d’une entreprise avec des
asiatiques partenaires chinois et hongkongais

Stade 3 :
Volonté de mieux maîtriser ++
1995-1996 :
sa politique d’exportation
création d’une filiale en Belgique,
1996 : au Canada et à Hongkong
responsable export nommé à la
Manque de connaissance direction de la filiale à Hongkong
des particularités des marchés –
étrangers
+ 1998-1999 :
embauche d’un directeur export,
d’un directeur marketing, +
d’un directeur juridique et
2000 : ++ d’un directeur financier
les marchés étrangers
nouvel horizon sur

volonté de changer de stratégie


Gestion, volume 31, numéro 1, printemps 2006

d’exportation (plus de filiales


Stade 4 :

pour une meilleure maîtrise et x 2002-2003 :


plus de pays non francophones création d’une filiale aux États-Unis
et en Italie et pénétration plus
importante de marchés
non francophones et/ou éloignés

Effet d’un événement sur un autre (positif [+], négatif [-], accélérateur [++], réorienteur [x]) 2003
Situations de difficultés importantes ou d’échecs au cours du processus d’internationalisation
84 fortes destinées à compenser le départ été assez pris en considération lors du fond les particularités du marché local)
prévu en 1987 du père de l’actuel diri- lancement de la filiale, et du fait qu’un de même qu’à la réalisation d’expor-
geant. Enfin, toujours à cette période, directeur local de filiale était jugé tations en plus grand nombre vers des
le dirigeant décide de la création d’un «insuffisamment dynamique commer- pays non francophones représentant
service export permettant le regrou- cialement et ne s’inscrivant pas dans à ce jour 50 % du chiffre d’affaires en
pement de compétences dédiées aux l’esprit du groupe» (extrait d’entretien matière d’exportations.
seuls marchés étrangers et l’élargis- avec la secrétaire générale). Ces échecs L’étude de cette P.M.E. et de son pro-
sement des capacités de l’entreprise à sont liés à «des erreurs plutôt prati- cessus d’internationalisation montre
organiser et à coordonner ses activités ques et qui probablement auraient pu donc un processus stratégique dont les
au-delà des frontières nationales. être évitées. À la base, nous étions une modalités (exportations, importations,
Le stade 3. Au début des années petite entreprise et notre dirigeant pou- filiales), les objectifs (pays visés et res-
1990, le dirigeant prend conscience du vait encore arriver à chapeauter l’inté- sources engagées) et la dynamique sont
fait que les exportations ne peuvent à gralité de ce qui se passait. Mais compte fortement dépendants de l’équipe diri-
elles seules offrir une croissance inter- tenu des évolutions et des besoins […] geante en place et de ses compétences10.
nationale suffisante pour l’entreprise, il lui fallait ajouter des pôles de compé- Les activités internationales s’appuient
dont l’essentiel des activités se déroule tences dans différents domaines d’acti- sur des dirigeants qui partagent la
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toujours sur le territoire national. vité» (extrait d’entretien avec le direc- volonté de développer l’entreprise au-
Compte tenu de son activité cosméti- teur administratif et financier). Ainsi, delà du territoire national et qui s’enga-
que, le dirigeant décide de pénétrer plus sachant que le dirigeant ne détient pas gent fortement, ainsi que sur des acteurs
activement le marché asiatique dont l’ensemble des compétences (régle- extérieurs à cette équipe (responsables
il a mesuré le fort potentiel, notam- mentaires, commerciales, financières, locaux des filiales, cabinets de conseil11)
ment après que le nouveau responsable disponibilité, etc.) nécessaires au déve- qui sont mobilisés lorsque les compé-
export de la zone Asie engagé en 1991 loppement national et international, tences internes sont insuffisantes ou
eut mis en place quelques exporta- lui et son équipe décident d’enrichir la inexistantes. Toutefois, on constate des
tions vers Taiwan. Face au risque d’un structure entre 1998 et 1999 d’un direc- actions à des niveaux différents au cours
engagement plus actif sur ces marchés teur export, d’un directeur marketing, du processus d’internationalisation, ces
DOSSIER

(en ce qui a trait aux investissements), d’un directeur juridique et d’un direc- actions révélant les compétences utili-
l’équipe dirigeante en place (le P.D.G., le teur financier. Ces personnes, qui ont sées et leurs rôles dans la conduite de ce
directeur général, le secrétaire général, une formation supérieure et disposent processus (tableau 1).
le directeur commercial et le respon- d’une expérience notable dans leur À l’instar de Hamel et Prahalad
sable export de la zone Asie) privilégie domaine d’intervention, sont intégrées (1990, 1995), cette étude nous amène
la création en 1992 d’une coentreprise à l’équipe dirigeante, lui permettant à proposer une distinction entre deux
tripartite avec des partenaires chinois ainsi de «combler certaines de ses lacu- types de compétences aux rôles dis-
et hongkongais possédant la connais- nes» et d’«apporter des compétences tincts au cours du processus d’inter-
sance des particularités (culturelles, complémentaires tout en sachant qu’el- nationalisation, soit des compétences
réglementaires, commerciales, etc.) les vont coûter de l’argent à la société stratégiques, qui amorcent et cons-
des marchés locaux dont ne dispose pendant six mois ou un an, le temps de truisent le processus d’internationali-
pas l’entreprise. Afin de poursuivre son l’adaptation» (extrait d’entretien avec le sation, et des compétences opération-
développement sur les marchés étran- P.D.G.). nelles, sur lesquelles s’appuie la mise en
gers, l’équipe dirigeante, qui cherche Le stade 4. Après ce temps d’adapta- œuvre de changements.
à mieux maîtriser sa stratégie, crée en tion nécessaire à la découverte de l’en- Les compétences stratégiques, qui
1995 une filiale de vente en Belgique en treprise et à l’acquisition des compéten- se réfèrent à la volonté, à la vision, etc.,
s’appuyant notamment sur un direc- ces liées au secteur pharmaceutique et permettent un accès potentiel à une
teur commercial belge (qui connaît cosmétique, l’équipe dirigeante modifie grande variété de marchés (proches
les conditions commerciales locales), sa stratégie avec les objectifs de péné- psychologiquement comme la Belgique,
ainsi qu’une filiale de représentation trer plus encore les marchés non fran- ou plus éloignés comme Hongkong),
à Hongkong en 1996 (dirigée sur place cophones et de mieux maîtriser sa poli- contribuent de manière importante à
par le responsable export de la zone tique d’exportation. Ces réorientations la valeur perçue par les clients du pro-
Asie). Ces succès ne doivent toutefois stratégiques, amorcées par le dirigeant duit final et sont difficiles à imiter par
pas masquer des échecs importants à et le directeur export et s’appuyant sur les entreprises concurrentes car elles
Gestion, volume 31, numéro 1, printemps 2006

l’étranger durant cette période. Ainsi, l’ensemble de l’équipe dirigeante, abou- relèvent d’une dynamique amorcée et
pour des raisons liées à la méconnais- tissent à la création en 2002 d’une filiale construite par l’ensemble de l’équipe
sance de la réglementation belge sur les de représentation aux États-Unis et dirigeante (Hamel et Prahalad, 1990;
produits cosmétiques, l’entreprise subit en 2003 d’une filiale de vente en Italie Van Den Bosch et Van Wijk, 2001).
un redressement fiscal relativement (ces filiales sont supervisées respecti- Par ailleurs, les compétences opé-
important en 1998. À cela s’ajoute la vement par la secrétaire générale et le rationnelles (capacité à gérer les opé-
même année la fermeture d’une filiale directeur export qui ont une parfaite rations internationales au jour le jour,
de représentation au Canada (créée en connaissance de l’entreprise et des pro- connaissance des particularités des
1995) du fait de problèmes réglemen- duits, et sont gérées sur place par des pays, etc.) sont également essentiel-
taires et commerciaux qui n’ont pas responsables locaux qui connaissent à les à la bonne conduite du processus
TABLEAU 1 – Les acteurs du processus d’internationalisation, leurs compétences en action et leurs rôles 85
Acteurs du processus Actions sur le processus
Compétences en action Rôle
d’internationalisation d’internationalisation
Président-directeur général Conception et élaboration Volonté, capacité à déléguer, capacité à prendre des Stratégique
de la stratégie risques, capacité à construire et à gérer un réseau rela-
tionnel, capacité à définir les objectifs internationaux,
Directeur export, directeur général, Élaboration et mise en
capacité à avoir une idée claire des développements
Équipe dirigeante

secrétaire générale du pôle application de la stratégie


internationaux, capacité à coordonner et à organiser
cosmétique
les activités sur le terrain international
Directeur commercial, directeur Soutien de la mise en appli- Capacité à mettre en œuvre et à gérer les opérations Opérationnel
filiale Asie, directeur financier, cation de la stratégie internationales au jour le jour (sur les plans financier,
directeur marketing, directeur juridique, commercial, logistique, etc.)
juridique et secrétaire général du
pôle pharmaceutique
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Responsables locaux des filiales, Conseil Connaissance des particularités commerciales, régle-
externes
Acteurs

cabinets de conseil mentaires, culturelles, etc., du pays visé

d’expansion géographique. En effet, point de vue théorique, les résultats tionnelles, il est possible de cerner les
sans ce minimum nécessaire, l’équipe obtenus enrichissent les travaux anté- raisons des succès ou des échecs que
dirigeante a du mal à amener son rieurs sur l’internationalisation en fai- connaît cette P.M.E. au cours de son
entreprise sur des marchés étrangers sant ressortir le déroulement complet processus d’internationalisation. Nous

DOSSIER
(l’exemple du redressement fiscal de la du processus d’internationalisation avons en effet souligné que des dysfonc-
filiale belge), voire y échoue (l’exemple d’un type d’entreprises, la P.M.E., sou- tionnements dans la stratégie de péné-
de la filiale canadienne). Pour autant, la vent mis à l’écart des réflexions sur ce tration de certains marchés étrangers
seule détention des compétences opé- phénomène, et en étudiant l’ensem- (belge et canadien) trouvent leur ori-
rationnelles ne saurait être suffisante ble des modalités auxquelles peuvent gine dans l’absence (partielle ou totale)
pour diriger le changement stratégique. recourir ces entreprises. Par ailleurs, un des compétences dites opérationnelles
En effet, ces compétences, qui peuvent autre apport tient à l’introduction de la (la méconnaissance des particularités
être facilement acquises par l’intermé- dimension temporelle dans l’analyse si réglementaires d’un pays, par exemple).
diaire d’acteurs extérieurs et/ou de for- souvent omise par les travaux appré- En outre, nous avons précisé les diffé-
mations, et qui sont donc facilement hendant le processus d’internationali- rentes compétences que l’équipe diri-
imitables par les entreprises concur- sation. De plus, nous avons mis en exer- geante doit autant que possible détenir,
rentes, ne peuvent amorcer et cons- gue le fait qu’en recourant à l’approche ou mobiliser à travers des acteurs exté-
truire un avantage concurrentiel sur les fondée sur les ressources, et en parti- rieurs, lorsqu’elle souhaite s’engager
marchés étrangers. Celles-ci ne peuvent culier au courant des ressources dyna- sur les marchés étrangers.
donc être qualifiées de stratégiques; on miques, il est possible de comprendre Toutefois, nous devons souligner
doit plutôt les considérer comme un le cheminement suivi par une P.M.E. certaines limites de cette étude, limites
support indispensable pour relever (quant aux modalités, à la dynamique, qui ouvrent autant de voies de recher-
avec succès le défi de la pénétration des aux pays visés) à l’étranger et de révéler che. Tout d’abord, notre recherche s’ap-
marchés étrangers. les raisons et les conditions du passage puie sur une étude de cas unique, qui
Cette recherche met donc en évi- d’un stade à un autre au cours du pro- devra être prolongée par l’étude d’autres
dence le fait que la conduite du proces- cessus. P.M.E. engagées dans un processus
sus d’internationalisation est largement Sur le plan de la gestion, cette d’internationalisation, ce qui nous per-
soumise à des compétences stratégi- recherche apporte des éléments de mettra d’approfondir nos résultats au
ques, de même qu’opérationnelles, de compréhension des facteurs qui per- regard de cette population d’entrepri-
Gestion, volume 31, numéro 1, printemps 2006

l’équipe dirigeante qui joue un rôle cen- mettent d’élaborer et de mettre en ses. Par ailleurs, cette recherche a été
tral, actif et déterminant (Leconte et œuvre le processus d’expansion géogra- menée dans le cadre d’une entreprise
Forgues, 2000). phique des P.M.E., et incite à considérer familiale, et il serait intéressant d’ana-
tout particulièrement les compétences lyser plus en profondeur l’incidence de
des équipes dirigeantes et leur évo- cette structure de propriété sur le por-
lution puisque de celles-ci dépend le tefeuille de compétences, son évolution
Conclusion développement de ces entreprises hors et la conduite du processus d’expansion
de leurs frontières nationales. D’autre géographique. Dans cette perspective,
La présente recherche comporte part, en distinguant les compétences il faudrait envisager l’étude de P.M.E.
un certain nombre d’implications. Du stratégiques et les compétences opéra- non familiales et comparer les com-
86 portements en matière d’internationa- Références
Hamel, G., Prahalad, C.K., La conquête du futur,
InterÉditions, 1995.
lisation et de constitution de l’équipe Hébert, L., «Stratégies internationales et développement
dirigeante. Enfin, ces prolongements Ageron, B., Huault, I., «Complexité du processus d’inter-
d’un leadership mondial», Gestion, vol. 27, no 1, prin-
devront tenir compte, plus encore que nationalisation de la P.M.E. : vers un enrichissement
temps 2002, p. 78-85.
de l’analyse behavioriste», Management interna-
ne l’a fait la présente étude, de l’envi- tional, vol. 6, no 2, 2002, p. 43-53. Johanson, J., Vahlne, J.E., «The internationalization pro-
ronnement concurrentiel dans lequel cess of the firm: A model of knowledge develop-
Alary-Grall, L., Pijaudier-Cabot, F., Willot, D., «Conquérir ment and increasing foreign market commitments»,
évoluent les entreprises. les marchés étrangers», Industries, no 88, août 2003, Journal of International Business Studies, vol. 8, no 1,
p. 11-19. 1977, p. 23-32.
Notes Allali, B., «Vision des dirigeants et internationalisation Johanson, J., Vahlne, J.E., «The mechanism of interna-
des P.M.E. : ébauche d’un cadre conceptuel», Actes tionalization», International Marketing Review, vol. 7,
1. Pour une présentation plus détaillée des modèles du 6e Congrès international francophone sur la P.M.E., no 4, 1990, p. 11-24.
d’internationalisation, le lecteur peut consulter l’arti- HEC Montréal, octobre 2002.
Johanson, J., Wiedersheim-Paul, F., «The international-
cle de synthèse de Leonidou et Katsikeas (1996) ou Andersen, O., «On the internationalization process of firms: ization of the firm: Four Swedish cases», Journal of
les travaux de Pantin (2005). A critical analysis», Journal of International Business Management Studies, vol. 12, no 3, 1975, p. 305-322.
2. Il est à noter que les travaux traitant du processus Studies, vol. 24, no 2, 1993, p. 209-231.
Koenig, G. (dir.), «Les ressources au principe de la straté-
d’internationalisation, et en particulier le modèle Barney, J., «Strategic factor markets: Expectations, luck, gie», dans De nouvelles théories pour gérer l’entreprise
Uppsala, font appel aux écrits de Penrose (1959) pour and business strategy», Management Science, vol. 32, du XXIe siècle, Economica, 1999, p. 199-239.
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introduire la question centrale de l’apprentissage. no 10, 1986, p. 1231-1241.
Dans la pensée penrosienne, il est en effet impossi- Leconte, P., Forgues, B., «Les dirigeants face à la gestion
Barney, J., «Firm resources and sustained competitive des compétences», Revue Française de Gestion, no 127,
ble de dissocier le processus de croissance de la firme advantage», Journal of Management, vol. 17, no 1,
de ses expériences et connaissances. Cette idée se 2000, p. 119-130.
1991, p. 99-120.
retrouve dans les modèles relatifs au processus d’inter- Leonidou, L.C., Katsikeas, C.S., «The export development
Belley, J., Dussault, L., Lorrain, J., «Les compétences des process: An integrative review of empirical models»,
nationalisation, le caractère graduel de ce processus
entrepreneurs : élaboration et validation d’un ques- Journal of International Business Studies, vol. 27, no 3,
pouvant en partie être attribué au manque de con-
tionnaire (QCE)», Actes du IVe Congrès international 1996, p. 517-551.
naissances de la firme.
francophone sur la P.M.E., Universités de Metz et
3. Pour une présentation détaillée des différents cou- Nancy, 1996. Marchesnay, M., «P.M.E., stratégie et recherche», Revue
rants se réclamant de l’approche par les ressources, se Française de Gestion, no 95, septembre-octobre 1993,
Bilkey, W.J., Tesar, G., «An attempted integration of the p. 70-76.
reporter à l’article de Koenig (1999). Pour une appro-
literature on the export behaviour of firms», Journal
DOSSIER

che détaillée du courant des ressources dynamiques Mechin, A., La capacité urbaine d’attraction et d’ancrage
of International Business Studies, vol. 9, no 1, 1977,
et du concept de «compétence», consulter la recher- des établissements: une approche par les ressources
p. 33-46.
che de Pantin (2005). dynamiques, thèse de doctorat en sciences de ges-
Castanias, R.P., Helfat, C.E., «The managerial rents tion, IAE de Caen Basse-Normandie, Université de
4. La dénomination «concurrence basée sur les compé-
model: Theory and empirical analysis», Journal of Caen, 2001.
tences» (competence-based competition) a été propo-
Management, vol. 27, 2001, p. 661-678.
sée par Hamel et Heene (1994). Miesenböck, K.J., «Small business and exporting: A litera-
Chandler, G.N., Hanks, S.H., «Founder competence, ture review», International Small Business Journal,
5. À l’instar de Mechin (2001), nous reprenons l’appella-
the environment, and venture performance», vol. 6, no 1, 1988, p. 42-61.
tion générique utilisée par Durand (1997), «le courant
Entrepreneurship Theory and Practice, vol. 20, no 3,
émergent des ressources dynamiques», pour désigner Nelson, R.R., Winter, S.G., An Evolutionary Theory of
1994, p. 77-89.
les courants théoriques s’attachant à la connaissance, Economic Change, Belknap Press, 1982.
aux capacités et aux compétences. Chandler, G.N., Jansen, E., «The founder’s self-assessed
Oviatt, B.M., McDougall, P.P., «Toward a theory of interna-
competence and venture performance», Journal of
6. Certains interlocuteurs (le P.D.G., le directeur export, tional new ventures», Journal of International Business
Business Venturing, vol. 7, 1992, p. 223-236.
la secrétaire générale du pôle cosmétique, le direc- Studies, vol. 25, no 1, 1994, p. 45-64.
teur marketing et communication) ont été rencontrés Collis, D., «A resource-based analysis of global competi-
Pantin, F., Le rôle des compétences de l’équipe dirigeante
à plusieurs reprises. Par ailleurs, chaque entretien a tion: The case of the bearings industry», Strategic
dans la conduite du processus d’internationalisation :
été enregistré et retranscrit afin qu’aucune donnée Management Journal, vol. 12, 1991, p. 46-68.
étude de trois moyennes entreprises françaises, thèse
ne soit perdue, et a ensuite fait l’objet d’un codage et Cyert, R.M., March, J.G., A Behavioral Theory of the Firm, de doctorat en sciences de gestion, IAE de Caen Basse-
d’un découpage par thème. Prentice-Hall, 1963. Normandie, Université de Caen, 2005.
7. Ces membres de l’équipe dirigeante (le P.D.G., le direc- Dalli, D., «The exporting process: The evolution of small Penrose, E.T., The Theory of the Growth of the Firm, John
teur général, le directeur export, la secrétaire géné- and medium-sized firms toward internationaliza- Wiley & Sons, 1959; traduction française : Facteurs,
rale du pôle cosmétique, le secrétaire général du pôle tion», Advances in International Marketing, vol. 6, no 8, conditions et mécanismes de la croissance de
pharmaceutique, le directeur juridique, le directeur 1994, p. 85-110. l’entreprise, Éditions Hommes et Techniques, 1963.
financier, le directeur marketing et communication, Durand, R., Management des ressources et performance Reynaud, E., Simon, E., «Les secrets d’un bon domaine.
le directeur de la filiale Asie, le directeur commercial) des firmes. Une étude des entreprises manufacturières Une explication par les compétences centrales»,
engagés dans la stratégie d’internationalisation ont françaises (1993-1996), thèse de doctorat en sciences Revue Française de Gestion, vol. 30, no 149, 2004,
été identifiés à la suite de notre premier entretien de gestion, HEC Paris, 1997. p. 101-116.
avec le P.D.G. en décembre 2002. Eisenhardt, K.M., «Building theories from case study Sanchez, R., «Une comparaison des approches de la res-
8. Afin de faciliter l’analyse et de pouvoir prendre un cer- research», Academy of Management Review, vol. 10,
Gestion, volume 31, numéro 1, printemps 2006

source, des capacités dynamiques, et de la compé-


tain recul par rapport aux données collectées, nous 1989, p. 532-550. tence : une contribution à la théorie du management
avons choisi de borner notre étude de la création de Gankema, H.G.J., Snuif, H.R., Zwart, P.S., «The interna- stratégique», dans Quélin, B., Arrègle, J.L. (dir.), Le
l’entreprise en 1958 jusqu’à l’année 2003. tionalization process of small and medium-sized management stratégique des compétences, Ellipses,
9. Voir Andersen (1993), Oviatt et McDougall (1994), enterprises: An evaluation of stage theory», Journal 2000, p. 55-81.
Ageron et Huault (2002). of Small Business Management, vol. 38, no 4, 2000, Sanchez, R., Heene, A., Thomas, H. (dir.), «Introduction:
10. Voir Penrose (1959), Sanchez (2000), Castanias et p. 15-27. Towards the theory and practice of competence-based
Helfat (2001). Hamel, G., Heene, A. (dir.), Competence-based Competition, competition», dans Dynamics of Competence-based
11. À titre d’illustration, le directeur juridique, qui ne con- John Wiley & Sons, 1994. Competition: Theory and Practice in the New Strategic
naissait pas les particularités du droit des sociétés ita- Hamel, G., Prahalad, C.K., «The core competence of the Management, Elsevier Pergamon, 1996, p. 1-35.
lien, s’est appuyé sur un cabinet juridique italien pour corporation», Harvard Business Review, vol. 68, mai- Sullivan, D., Bauerschmidt, A., «Incremental internation-
le montage de la filiale italienne. juin 1990, p. 79-91. alization: A test of Johanson and Vahlne’s thesis»,
Management International Review, vol. 30, no 1, 1990, 87
p. 19-30.
Tarondeau, J.C., Le management des savoirs, PUF, «Que
sais-je?», 1998.
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Strategic Management Journal, vol. 5, 1984, p. 171-
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An examination of export competitive patterns,
firm size, and export performance», Journal of Small
Document téléchargé depuis www.cairn.info - EHESS - DOMINIQUE JOSIE - 82.246.77.45 - 23/02/2014 01h50. © HEC Montréal

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Business Management, vol. 38, no 2, 2000, p. 35-47.
Yin, R., Case Study Research, Design and Methods, Sage
Publications, 1989.

DOSSIER
Gestion, volume 31, numéro 1, printemps 2006

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