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BONHEUR AU TRAVAIL : LES TROIS CONDITIONS DE LA RÉUSSITE

Yvan Barel, Sandrine Frémeaux

HEC Montréal | « Gestion »

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2016/2 Vol. 41 | pages 82 à 84
ISSN 0701-0028
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https://www.cairn.info/revue-gestion-2016-2-page-82.htm
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Pour citer cet article :


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Yvan Barel, Sandrine Frémeaux« Bonheur au travail : les trois conditions de la
réussite », Gestion 2016/2 (Vol. 41), p. 82-84.
DOI 10.3917/riges.412.0082
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Management

Bonheur
au travail

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les trois conditions
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82 I
de la réussite

Après avoir tant entendu parler de souffrance au travail (stress, épuisement


professionnel, etc.), voici que le bonheur au travail est aujourd’hui à l’honneur.
En débarrassant notamment les employés des lourdeurs bureaucratiques, des
entreprises dites libérées souhaitent réconcilier bonheur et travail. Certaines d’entre
illustrations : ISTOCK

elles, par exemple Harley-Davidson ou Zappos, ont tenté l’expérience et en ont tiré
trois grands principes dont vous pouvez vous inspirer.
Yvan Barel et Sandrine Frémeaux

GESTION VOLUME 41 No 2 été 2016


Management

1
Comment ces entreprises y sont-elles parve-
nues ? En partant d’une vision positive de l’être privilégier la
humain selon laquelle l’homme est bon. Selon le
psychologue Douglas McGregor, il « est motivé par
nature ». Il a seulement besoin d’un environne-
subsidiarité à la délégation
La vision traditionnelle de la délégation s’inscrit
Yvan Barel
est enseignant-chercheur
ment favorable pour s’exprimer et agir. C’est pour- dans une perspective purement descendante. au Laboratoire d’économie
et de management de
quoi l’entreprise libérée cherche à supprimer tout Chaque niveau hiérarchique s’arroge les respon- Nantes-Atlantique (LEMNA)
ce qui enferme et contraint : les organigrammes sabilités qui l’intéressent et laisse le reste aux de l’Université de Nantes,
alambiqués, les descriptifs de poste sclérosants niveaux inférieurs. Le dispositif à retenir dans en France.
et les procédures inutiles sont autant de disposi- le cadre de l’entreprise libérée serait plus proche Sandrine Frémeaux

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est professeure à l’Audencia
tifs qui reposent sur une vision pessimiste de la du principe de subsidiarité, qui part de la base et Business School en France.
nature humaine. Quand on cherche excessivement non du sommet. Ce sont alors les travailleurs sur
à contrôler l’homme, on finit par le démotiver. le terrain qui gèrent ce qui se passe à leur niveau,
D’après un sondage Gallup réalisé dans le monde sans avoir à en référer à un supérieur. Ils ne font
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en 2011-2012, seulement 13 % des salariés sont plus dans la simple exécution à l’intérieur d’un
mobilisés et heureux de se rendre au travail. Les périmètre restreint. Ils gagnent en polyvalence
87 % restants sont non mobilisés, voire active- et en responsabilité, « déléguant » à leur supé-
ment démobilisés. rieur les tâches qui sollicitent des compétences
Quel gâchis humain ! Dans les démarches de différentes des leurs.
libération d’une entreprise, on cherche précisé- Un certain nombre de dirigeants libérateurs se
ment à se débarrasser du poids des procédures et targuent ainsi de chercher à « en faire aussi peu
de la hiérarchie paralysante pour que l’énergie des que possible ». Gare aux malentendus ! Avec ce I 83
hommes soit non pas accaparée par l’alimentation genre de déclaration, ils veulent témoigner de la
du système mais tournée vers l’essentiel : la satis- centralité de l’activité du personnel de terrain.
faction du client. Le maître-mot est « confiance ». Ils cherchent à désacraliser la fonction du diri-
Les salariés sont libres et responsables d’entre- geant, non pas pour la rabaisser ou la diminuer
prendre les actions qu’ils estiment les meilleures mais pour la rendre plus humaine. Ils ne sont
pour l’entreprise. Afin de favoriser les initiatives pas au-dessus des salariés : ils sont avec eux.
et le travail collaboratif, l’entreprise libérée adopte
une forme d’organisation aplatie et cellulaire. Des
sortes de mini-entreprises internes fonctionnant
de manière autonome sont constituées avec, à leur
tête, un leader généralement élu par le groupe.
Ces leaders ainsi que le dirigeant sont invités à
ne pas se réfugier derrière des signes artificiels
de pouvoir : pas de décisions imposées, pas de
voitures de fonction, pas de titres ronflants…
Des entreprises – encore très peu nombreuses,
disons-le – ont mis en œuvre ce type d’organi-
sation révolutionnaire, par exemple Harley-
Davidson, Zappos, Sun Hydraulics, USAA et W. L.
Gore & Associates aux États-Unis, FAVI (Fonderie
et Ateliers du Vimeu) et Chrono Flex en France,
etc. De plus en plus d’entreprises cherchent à
relever le défi. Mais certaines d’entre elles se
contentent de s’autoproclamer sur la voie de
la libération sans que l’idée soit partagée par
tous les membres de l’organisation. Pour que
le miracle ne tourne pas au mirage, le dirigeant
doit respecter quelques idées clés.

revuegestion.ca
Management

2 3
accompagner affirmer son autorité
et arbitrer
Le processus de libération n’est pas toujours facile,
au lieu de s’effacer
Le modèle de l’entreprise libérée véhicule parfois
en particulier pour les gestionnaires intermé- le fantasme du patron fantôme qui observe les
diaires qui sont invités à repenser la place qui choses de loin. Or, l’autorité qui élève et fait gran-
pourrait être la leur dans cette nouvelle organi- dir doit être non pas anéantie mais au contraire
sation. Quelles sont mes compétences ? Quelles renforcée. Plutôt que d’accomplir un retrait, le
sont mes aspirations ? Comment puis-je les mettre dirigeant de l’entreprise libérée se surinvestit, du
au service du projet commun ? Le piège, pour le moins au moment du démarrage de l’aventure.

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dirigeant visant la libération, serait d’exclure Il entre dans la complexité du travail, donne des
ceux dont les emplois intermédiaires ont perdu orientations claires et précises, assure l’entretien
en légitimité. Ce processus d’exclusion serait une de la culture interne. Alors, oui, en définitive, le
totale ineptie. Le chemin de la libération passe dirigeant d’une entreprise libérée n’est pas ce genre
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par une volonté clairement affichée du dirigeant de gestionnaire qui court dans tous les sens, tel
de ne laisser personne au bord du chemin. Les un pompier qui doit éteindre un feu. Parce qu’il
gestionnaires intermédiaires peuvent exercer un montre le cap, parce qu’il fait confiance, parce qu’il
nouveau rôle en devenant des accompagnateurs donne le pouvoir d’agir, le dirigeant ne tombe pas
ou en étant réaffectés à des postes transversaux en dans le piège du suractivisme. Pour autant, il n’est
émergence touchant par exemple à la responsabi- pas en retrait. Son énergie se concentre moins
lité sociale des entreprises, à l’innovation et à la sur le contrôle quotidien des actions que sur les
84 I mutation numérique. La fonction d’accompagne- orientations et les valeurs.
ment devient centrale. Mais les gestionnaires ne
sont pas seulement des facilitateurs. La libération L’entreprise libérée : un modèle
n’est compatible avec une dynamique communau- risqué, un travail sur soi
taire que s’ils continuent à arbitrer les conflits de Il ne s’agit pas de donner un peu plus d’autonomie,
personnes et de travail ainsi qu’à sanctionner les de faire participer un peu plus, d’accorder un peu
abus commis par ceux qui ne jouent pas le jeu. plus de souplesse de fonctionnement. Le chemin
de la libération induit un bouleversement radical
des mentalités et des rapports aux autres qui exige
à la fois du temps et une action simultanée sur
toutes les composantes de l’entreprise. Pour cette
raison, la libération de l’entreprise est exigeante !
Elle est d’autant plus exigeante que tout est à
inventer. Il n’y a pas de modèle, seulement une
idée fondatrice selon laquelle l’homme est bon.
Cela peut s’avérer frustrant pour les dirigeants
qui voudraient des solutions clés en main afin
de surfer sur la vague de l’entreprise libérée. En
vérité, tout est à construire conjointement avec
les salariés. Et le socle fondateur est l’abandon
de l’ego du dirigeant et des gestionnaires et, en
même temps, l’affirmation de leur autorité, car il
n’y a pas de liberté sans repères ni orientations.
Le chemin est long et le résultat n’est jamais
acquis. Parler d’entreprise libérée est un rac-
illustrations : ISTOCK

courci sémantique qui peut laisser penser qu’il


s’agit d’un état qui, une fois atteint, perdure de
manière quasi mécanique. Il semble plus juste
de parler de chemin de libération…

GESTION VOLUME 41 No 2 été 2016

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