Vous êtes sur la page 1sur 16

Communications

Le sujet de l'oubli selon Freud


Monsieur Paul-Laurent Assoun

Citer ce document / Cite this document :

Assoun Paul-Laurent. Le sujet de l'oubli selon Freud. In: Communications, 49, 1989. La mémoire et l'oubli. pp. 97-111;

doi : https://doi.org/10.3406/comm.1989.1740

https://www.persee.fr/doc/comm_0588-8018_1989_num_49_1_1740

Fichier pdf généré le 10/05/2018


Paul-Laurent Assoun

Le sujet de l'oubli

selon Freud

Qu'est-ce que la psychanalyse peut penser sous le terme


d'« oubli » ? Au seul énoncé de la question, on peut s'aviser d'un
événement qui s'est opéré de façon aussi décisive que mystérieuse : le
« savoir de l'inconscient », en ordonnant la psyché autour d'une
logique du refoulement, semble interdire désormais de méditer sur la
« mémoire ». Comme si la mémoire, cette « faculté » des vieilles
psychologies sur laquelle continue de tisser obstinément le sens
commun, avait perdu de sa fraîcheur. Par une espèce de comble, la
psychanalyse, tout entière mobilisée aux fins de restaurer la force du
passé où se joue le destin du sujet, nous aurait, au sens le plus
littéral, fait perdre la mémoire (entendons : celle qu'on croyait nôtre).
Voire : elle a, par une révolution subtile, déplacé la position du
sujet envers sa fabrique mnésique. Telle est la mémoire
postfreudienne qu'elle s'ordonne à une logique qui, déniant ses
puissances d'antan, lui restitue des pouvoirs neufs. Or, c'est précisément
l'oubli, ce « trou de mémoire » - à entendre dans son effrayante litté-
ralité -, qui peut nous donner vue sur cette mutation.
D'une part, la psychanalyse a mis en soupçon, comme
irrémédiablement, cette assertion tranquille : « J'ai oublié ! » Quelle naïveté
de se présenter comme victime d'un oubli, raté fonctionnel, alors que
notre savoir des puissances inconscientes corrige immédiatement : ce
« manque ■» dans le procès de remémoration revendique un sens
propre qui pour ainsi dire ôte le droit à l'oubli. A cet oubli, en effet, il
y a une cause : le sujet inconscient est tel qu'il oublie en connaissance
de cause - fût-ce dans l'insu -, ce qui dissout l'oubli dans un «
pourquoi » qui le renvoie au refoulement - qui lui fait perdre sa pureté
autant que sa simplicité...
Mais, d'autre part, l'oubli doit être redécouvert dans sa fraîcheur
propre en quelque sorte. Il y a bien là un événement, qui met le sujet
en rapport avec ces « oubliettes » dont le refoulement, tout en don-

97
Paul-Laurent Assoun

nant la clé, n'épuise pas le cachet propre. Comprenons qu'il y a bien


un sujet de l'oubli, transparaissant en ce moment de vertige où il
s'absente de cette part de soi peut-être la plus chère, qu'il met
momentanément hors jeu, se mettant par là même en jeu.
C'est ce moment qu'il s'agit de cerner, sans céder à quelque
nostalgie d'une mémoire préfreudienne, mais sans céder non plus sur cette
exigence de saisir ce moment de l'oubli. Ce sujet de l'oubli n'est
autre, en effet, que le sujet inconscient - dont Freud nous aide à faire
la théorie. Encore convient-il d'en saisir l'incidence propre.

L'objet de Voubli.

L'oubli se donne comme un véritable défi dont Freud prend acte


explicitement :

Aucune théorie psychologique n'a été capable de rendre compte du


phénomène du souvenir et de l'oubli dans leur cohérence \

II faut bien entendre ce qui est dit ici : le « souvenir » et


l'« oublier » doivent être pensés dans leur cohérence (Zusammen-
hang), comme deux faces d'un même « phénomène ». Il s'agit de
s'arracher à la conception de l'oubli comme simple privation de
souvenir : il faut parvenir à une pensée complète de ce phénomène
composite. L'oublier, moment de vérité du souvenir - en ce sens, il
faut lui conserver son caractère verbal qui en indique le caractère
d'acte (Leistung) -, en exprime donc de façon privilégiée le mystère
(Ràtsel) :

Peut-être l'oubli est-il devenu aujourd'hui plus mystérieux que le


souvenir depuis que l'étude du rêve et des phénomènes
pathologiques nous a appris que ce que nous estimons oublié depuis
longtemps peut réapparaître subitement dans la conscience.

C'est donc la logique fraîchement découverte du rêve et du


symptôme qui oblige de revenir à l'oubli, non pour en normaliser le statut,
mais pour en expérimenter plus radicalement le « mystère », résistant
mais non insondable. Or, il s'annonce par un paradoxe : ce qui est
mystérieux dans l'oubli, c'est qu'il n'est jamais réellement réussi. Si
ce qu'on croit perdu dans les oubliettes de l'âme peut resurgir à l'im-
proviste, c'est que l'oubli est en soi un problème. Que doit être
l'oubli pour tolérer un tel retour ?
C'est ce moment du revenant - vérité du refoulé - qui commande

98
Le sujet de l'oubli selon Freud

de réinterroger l'oubli. La « perte » de mémoire révèle sa vérité


psychologique, tel le fantôme, au moment du retour inopiné sur la scène
de la conscience.
Telle est la méthode que nous suggère Freud : aborder l'oubli dans
l'après-coup de son ratage (relatif). Le vrai problème n'est pas que
l'oubli puisse survenir - cela même est le cœur du mystère -, c'est
que, s'étant produit, il tolère la percée, particulièrement nette et
brutale, de l'objet oublié.
Freud ouvre par là une interrogation neuve, relative à Yobjet de
l'oubli. Que ce dernier puisse successivement manquer et
réapparaître conduit à penser une séquence qui « intrique » intimement la
remémo ration et une sorte de « démémoration ». Ainsi,
contrairement à ce qu'on pourrait penser, Freud ne se hâte pas d'expliquer
l'oubli par le refoulement : il l'affronte dans l'élément de son mystère
et montre comment la logique du refoulement peut s'y révéler (donc
en rendre compte en dernière analyse).
Il nous faut nous exposer en quelque sorte à cette temporalité de
l'oubli pour en expérimenter le sens propre. Si le refoulement est
bien une fois pour toutes la « pierre de touche » de la psychanalyse, il
n'en résorbe pas la complexité : l'oubli ne s'« explique » pas
purement et simplement par le refoulement, bien que celui-ci s'y réfracte
nécessairement. Il nous faut donc pointer cet événement dans sa
densité propre, celui que Freud désigne par le terme de Vergesslichkeit.
Nous l'aborderons par sa forme la plus vive et la plus dénudée,
celle de l'événement qui saisit le locuteur à l'improviste :

II concerne de préférence l'usage de noms propres - nomina


propria - et se manifeste de la manière suivante : au beau milieu
d'une conversation l'on se voit contraint d'avouer à son partenaire
que l'on ne peut trouver un nom dont on voulait justement se
vir

Le sujet, qui l'a « sur le bout de la langue », ne peut le « mettre »


dans son énoncé. C'est par ce malaise quasi physique, accompagné
d'« une pénible et évidente agitation, semblable à celle des
aphasiques moteurs », que se manifeste la prise de l'oublié. Tel est donc
l'oubli qu'il dérange simultanément le langage et le corps. Le « trou »
qu'il y fait se compense par les « efforts successifs » et anarchiques
pour en venir à bout.
Il manifeste cette force quelque peu démoniaque qui contrecarre
l'effort d'attention le plus obstiné. De plus, il semble échapper à lui-
même : « au lieu du nom recherché, un autre nom se présente
aussitôt, que l'on reconnaît comme faux et que l'on rejette », car il est

99
Paul-Laurent Assoun

insupportable. Il faut coûte que coûte tenter de dire. Il y a plus


pervers encore : le nom oublié laisse quelque chose de lui-même. Preuve
que l'oubli, loin d'être perte sèche, laisse entrevoir, telle une comète,
une trace : on trouve dans sa mémoire, au lieu d'un nom de
remplacement, une lettre ou une syllabe « que l'on reconnaît comme
élément faisant partie du nom recherché 3 ». Cette initiale (B), c'est
l'ironie vivante du nom oublié : alors même qu'il manque, il fait
encore trop signe vers lui-même. Ce B est à la fois trop et trop peu : il
manifeste qu'il y a bien un objet de l'oubli - quelque chose qu'il faut
retrouver - tout en l'évoquant de façon dérisoire : « Ça m'échappe »,
mais pas suffisamment pour que «je » puisse m en absenter. Là
commence le drame de l'oubli.
L'oubli est ainsi inséparable de cette petite dramaturgie en trois
actes : une entrave du discours - de la nomination -, un moment de
malaise compensé par un piétinement - celui où le sujet se trouve
face à cet inconcevable objet vide ; enfin, le retour proprement
obscène de l'objet condamné à l'oubli - tant il manifeste une autre scène
qui oblige le sujet de l'oubli à un comportement quelque peu
obscène, en tout cas intempestif.
Il n'est pas fortuit que ce petit drame comporte une signification
sociale, comme tout le registre de cette « psycho-pathologie de la vie
quotidienne » auquel il appartient : il a en effet un témoin, le
partenaire du dialogue interrompu. C'est parce qu'on était en train de dire
que l'oubli est intervenu, interrompant la communication. Il n'est
pas non plus insignifiant que ce partenaire-témoin s'avère
particulièrement indifférent au trouble, voire à la transe qui secoue son
partenaire oublieux. C'est que ce malaise ne touche que l'intéressé,
qui s en veut d'oublier et veut du même coup sauver la
communication, en en réparant la fêlure.
L'intéressé sent bien qu'entre lui et son destinataire s'est
interposé, tel un fantôme, cet objet de l'oubli qui parasite le transfert de
l'information en cours. Retrouver le nom, surmonter l'oubli, c'est
pouvoir l'adresser enfin à l'Autre, qui, s'en étant distrait depuis belle
lurette, le reçoit en plein front comme une jaculation obscène (un
« cri »). N'est-ce pas le comble et l'ironie de tout ce petit drame, que
le sujet de l'oubli soit obligé de payer tribut, à un moment ou un
autre, à cet obscène qui l'assiège - et qu'il triomphe d'avoir
surmonté -, alors même que c'est le refoulé qui joue avec sa
mémoire ?...
A cette ironie, on riposte par une contre-ironie appropriée : on
décide d'oublier la trace, d'endiguer le malaise par lequel s'inscrit la
chose oubliée. On en connaît l'effet fréquent : « Après un laps de

100
Le sujet de l'oubli selon Freud

temps, le nom recherché vous " traverse " (schiesst) alors


brusquement. » La chose oubliée fait retour, avec la même violence
d'intrusion par laquelle elle s'était échappée, ce qui s'inscrit dans la «
victime » par une jaculation expressive : « on ne peut s'empêcher de le
crier ».
Que s'est-il donc passé, qui se manifeste par un scénario si précis ?
De quoi s'alarme le sujet, quelle est cette petite hystérie à laquelle il
donne lieu ?
Freud le désigne par des périphrases significatives : il y a eu «
faiblesse de mémoire » (Gedâchtnisschwàche) ou « défaillance de
souvenir » (Erinnerungsausfall), ce qui indique que quelque chose est à
l'œuvre - un certain « facteur psychique » qui « répugnait à
reproduire quelque chose pouvant délier du déplaisir ou dans un second
temps [tant le sujet voit loin] amener du déplaisir 4 ». C'est cela même
qui entrave la « reviviscence » (Wiederbringung) d'une « impression ».
C'est là la « part du refoulement » que le trouble fonctionnel de
mémoire doit acquitter - ce qui d'ailleurs l'arrache à la représentation
fonctionnelle. Il n'y a d'oubli que s'il y a « raté inconscient de mise en
place (unbewusste Verstecken) ' ». Freud retrouve les métaphores
locales des plus anciennes théories de la mémoire depuis Platon 6 :
mais si le sujet met la main à côté du souvenir, c'est bien qu'est à
l'œuvre une tendance volitive (Willenstendenz).
L'oubli (Vergessen) travaille donc pour le refoulement (Verdrân-
gen) : mais c'en est le moment proprement diabolique, celui de
l'obstacle (diabolon). Moment de déliaison du nœud symbolique entre le
nom et la chose, qui fait que le sujet se cabre. Activité symptoma-
tique qui montre un inconscient en quelque sorte à découvert. Il faut
se demander ce que ce petit drame de la « vie quotidienne » - qui a
son inconscient - révèle de l'être névrotique.

La mémoire névrotique.

Le névrosé peut-il être considéré comme doté d'une bonne


mémoire ou comme « oublieux » ?
Pour répondre à cette question sans nuances, il convient de partir
du premier récit. Or,

ce premier récit (Erzâhlung) est comparable à un courant non


navigable, dont le lit est tantôt obstrué par des rochers, tantôt
divisé et rendu impraticable (untiefj par des bancs de sable 7.

101
Paul-Laurent Assoun

Par cette métaphore précise, Freud trouve le moyen de suggérer


l'idée d'un flux entravé. Telle est la mémoire névrotique qu'elle ne
cesse de canoter sur ses propres obstacles. Cela se manifeste par un
fait majeur : la trame chronologique est systématiquement élimée.
Le moment de vérité de cette mémoire lacunaire est celui où il
s'agit justement de raconter. On rencontre alors ce genre de souvenirs
qui « se trouvent pour ainsi dire au premier stade du refoulement »,
ce qui fait qu'ils se montrent « chargés de doute ». Le sujet en donne
ainsi au moins deux versions, comme si sa mémoire hésitait. C'est ce
« doute » (Zweifel) qui est voué à « être plus tard remplacé par un
oubli (Vergessen) ou un faux souvenir (Fehlerinnern) ». Voici donc
surgi le moment de l'oubli : celui-ci n'est pas l'interruption sèche
d'une mémoire acquise. C'est somme toute une métamorphose déjà
secondaire. Dès le premier récit, le refoulement s'est mis au travail, il
a abîmé les souvenirs : le mieux qu'on puisse faire est de repérer des
souvenirs fraîchement touchés par le refoulement - ce qui s'inscrit
dans le sujet par un doute d'un genre spécial. C'est pour mettre fin à
ce doute - hésitation entre le récit et le mensonge - que le sujet se
décide pour ainsi dire... à oublier.
On le voit, l'oubli n'a rien de spontané ni d'automatique : c'est un
certain destin - le plus fréquent - d'une représentation revendiquée
par le refoulement. Oublier, c'est donc certes céder au refoulement,
mais comme moyen d'échapper au doute, ce poison que le refoulé a
déjà introduit dans la représentation.
L'oubli s'instaure ainsi dans l'après-coup d'un récit impossible :
c'est en effet faute de pouvoir (se) raconter que le sujet choisit l'oubli.
L'oubli n'est donc pas exactement le contraire du souvenir : c'est le
destin d'un récit impossible du souvenir. On aurait tort d'en faire
une conséquence mécanique du refoulement, car c'est un hommage,
et des plus courants, au refoulement. Mais le sujet se jette dans
l'oubli, à un certain moment et non sans lutte, faute d'avoir pu faire
entrer le souvenir dans un texte. Aussi signe-t-il un rapport
douloureux à son texte.
Ce n'est pas parce qu'il a perdu la mémoire qu'il ne peut raconter :
c'est parce qu'il a déjà expérimenté en quelque sorte la difficulté de
raconter qu'il devient « oublieux ».
Relevons de plus que l'oubli restitue une sorte de sécurité : tant
que le sujet tentait de raconter, il le faisait dans le doute. C'est dès
lors qu'il a oublié qu'il n'a plus à douter de rien... Ainsi s'ouvre le
cercle par lequel l'oubli va renforcer le refoulement - qui lui-même
multiplie les raisons d'oublier... C'est cette « boucle » de rétroaction
qui semble essentielle pour penser une véritable « faculté d'oubli ». Il

102
Le sujet de l'oubli selon Freud

faut en effet au sujet en butte au refoulement se rendre apte à oublier


pour surmonter le malaise du récit tronqué. Aussi bien est-ce cette
faculté d'oubli, alliée à la résistance, que l'analyste-interprète va
devoir contrecarrer en tentant de reconstruire le récit8. A tout le
moins faut-il rappeler que, de ce récit, la reconstruction suppose qu'il
ait, à un moment donné, commencé. C'est en cours de récit que
l'oubli a surgi : le trouble de mémoire (amnésique) est une défaillance
narrative.
L'effet majeur de cette déformation est l'interpolation des
événements qui falsifie la diachronie biographique. Il faut bien entendre la
remarque de Freud :

cet ordre chronologique est [...] toujours l'élément le plus


vulnérable des souvenirs et celui qui subit le premier l'effet du
refoulement \

Plus encore que le contenu des événements, c'est l'ordre de la


consecution qui en est altéré de façon privilégiée. Cette liberté
inconsciente prise par le sujet avec l'écriture (graphie) de sa vie
manifeste que Y opération d'oubli traduit cette distorsion du rapport du
sujet à sa mémoire.
On comprend que cette falsification puisse aller de pair avec une
hypervivacité de certains événements dont la signification est
pourtant altérée par son transit dans la séquence qui l'inclut. En bref, ce
que cette mémoire névrotique met au jour, c'est un véritable sujet de
l'oubli, qui advient au lieu de cet impossible oubli.

Le sujet de l'oubli : le «faux souvenir ».

Nous nous retrouvons au cœur de la contradiction que la


psychanalyse permet de désigner. D'une part, le sujet du symptôme a trop
bonne mémoire, il tient trop fortement à l'objet de son refoulement
pour que l'oubli soit réussi. D'autre part, il y a bien une absence qui
s'inscrit dans le continuum psychique par une véritable brisure.
Comment puis-je oublier, sans que mon refoulé m'oublie ? C'est ce
point de scission du sujet et de l'objet de l'oubli que nous touchons
du doigt.
Ce qui nous permet le mieux de nous en approcher, c'est ce
phénomène que nous avons rencontré plus haut comme un destin en
quelque sorte cousin de l'oubli : pour échapper au vertige qui le saisit face
aux effets du refoulement sur son souvenir, le sujet recourt alterna-

103
Paul-Laurent Assoun

tivement à l'oubli et au « faux souvenir ». Celui-ci est bien plus


qu'un souvenir imparfait ou tronqué, c'est un souvenir erroné
produit positivement par le sujet pour faire pièce au refoulement. On
produirait un souvenir faux (Fehlerinnerung) comme on produit un
acte manqué (Fehlleistung). C'est en réfléchissant sur les conditions
de possibilité de cet étrange raté de la mémoire que nous éclairerons
la dynamique inconsciente qui sous-tend l'oubli. La « fausse
réminiscence » suit l'oubli comme son ombre. C'est en quelque sorte dans
cette ombre portée de l'oubli que se révèle sa signification
inconsciente.
L'effet d'auto-illusionnement inhérent au faux souvenir culmine
dans l'illusion du « déjà raconté » surgi en cours de traitement
psychanalytique l(). On aurait tort de considérer ce phénomène comme
une simple difficulté technique ou comme un incident curieux de
parcours. C'est l'un des moments de vérité du lien du sujet à sa
mémoire inconsciente.
Cette « fausse reconnaissance » du souvenir se manifeste chez
l'analysant par cette conviction inébranlable d'avoir déjà raconté un
souvenir. Le locuteur assortit son récit d'un constat : « Mais je vous ai
déjà raconté ça. » Cela serait insignifiant si l'analyste, lui, n'était sûr
« de n'avoir jamais jusque-là entendu cette histoire (Erzàhlung) n ».
Voilà, remarquons-le, deux mémoires aux prises. Certes, comme le
rappelle Freud avec humour, « un tel sentiment de conviction de la
fidélité de sa mémoire n*a, c'est bien connu, aucune valeur
objective ». Toutefois, l'analyste tablant sur ce sentiment de la nouveauté
de ce qu'il entend doit supposer sa mémoire suffisamment fiable
(comme un instrument de travail éprouvé et familier) et il doit
supposer que le sujet, de bonne foi, est en proie à une illusion mnésique.
Une fois encore, le trouble mnésique troue le récit : mais il
s'assortit d'un déni remarquable. Le sujet s'est créé de toutes pièces un
souvenir de récit, « fétiche mnésique » dont il défend la véracité avec une
« opiniâtreté » symptomatique. En voici un qui est prêt à « jurer ses
grands dieux » qu'il a déjà raconté, tant il est muré dans son illusion
- proprement paramnésique - d'avoir déjà dit. On remarquera le
contraste avec le malaise de l'oublieux évoqué plus haut : celui-ci
éprouve le manque charnellement, celui-là affirme en quelque sorte
ne manquer de rien. C'est, cette fois, du témoin (en l'occurrence
l'analyste, l'homme de la mémoire) que lui vient l'objection : « Vous
avez oublié, vous êtes un oublieur ! »
Si l'intéressé se cabre, en toute bonne foi, contre cette imputation,
c'est que, conformément au cadre général du déjà-vu, il se reconnaît
dans la situation psychique correspondante. Il est le lieu d'une

104
Le sujet de l'oubli selon Freud

« conviction » inébranlable et croissante qu'il est sage, en


conséquence, de ne pas contrarier. Mais il faut aussi, surmontant cette
illusion, atteindre le point déterminant d'où elle puisse se dénouer. Il lui
faut parvenir, une fois « revenu » de cette lubie, à articuler la
question - adressée à lui-même autant qu'à son interlocuteur : « Pourquoi
donc étais-je persuadé de vous avoir déjà raconté cette histoire ' ? »
C'est alors le lien avec tel autre souvenir-écran qui permet de
comprendre que l'enjeu en est un refoulé qui dédouble littéralement
le sujet. C'est parce qu'il y a quelque chose qui s'est déjà passé que le
sujet se voit imposer cette fatalité de dédoublement.
Rien n'est plus propre à signer la levée de l'illusion, aux yeux de
Freud, que la profération de la formule qui suit la révélation de
l'incident refoulé : « II me semble l'avoir toujours su 13. » C'est comme si
le sujet s'adressait, du fond de sa mémoire - de son origine désirante,
en quelque sorte - la reconnaissance de sa continuité. Ainsi passe-t-il
de la dénégation de l'oubli à une position d'où le lien de l'oubli et de
la mémoire infaillible lui devient visible. C'est justement parce qu'en
lui « ça a toujours su » qu'il pouvait croire oublier ! On le voit, une
telle formule, en forme de paradoxe, mérite une réflexion quant à ce
que l'oubli révèle de la logique du sujet inconscient, empêtré dans
une temporalité qu'il dénie. Il lui faut, étrangement, annuler le
temps qu'il lui a fallu pour oublier et rejoindre ce point de savoir
absolu, oubli de l'oubli...

L'inoubliable.

Nous sommes par ce cheminement renvoyés au paradoxe suprême


de l'oubli au plan inconscient. L'oubli se détache sur le fond d'un
inoubliable. Mieux : l'oublier est la manière la plus symptomatique,
c'est-à-dire la plus authentique - tant le symptôme est en
psychanalyse vecteur de vérité-, pour un sujet, de pratiquer son inoubliable. On
oublie en effet le plus symptomatiquement ce qui a rapport à
l'inoubliable le plus existentiel - le plus précieux et le plus inavouable.
Pour penser la signification et la portée de l'oubli, dans cette
perspective, c'est donc l'aptitude de cet « inoubliable » à se perpétuer
qu'il convient d'interroger. Freud l'exprime comme le « problème » -
qu'il n'est pas loin d'évoquer comme un mystère - de « la
conservation dans le psychique » (Erhaltung im Psychischen) 14. S'il peut
affirmer qu'un tel problème, si « séduisant et important », n'a jusqu'à
présent jamais été réellement traité, c'est qu'il va au-delà (ou mieux,
en deçà) du problème classique de la mémoire - qui a donné lieu à

105
Paul-Laurent Assoun

une si abondante littérature philosophique et psychologique. Freud


suggère ainsi que ces théories se donnent d'emblée la mémoire, sans
se mettre en face de cette question par laquelle la psychanalyse - par
la voie reconstituée plus haut - peut oser se laisser fasciner : par quel
effet quelque chose est-il conservé au point de faire trace dans la
psyché ? C'est en examinant ce qui peut être dit de cette remanence que
l'on peut avoir vue, en écho, sur la nature de l'oubli.
C'est que l'expérience de l'inconscient nous a fait revenir d'une
erreur fatale aux yeux de Freud, celle d'un oubli comme «
destruction de la trace mnésique » (Zerstôrung der Gedâchtnisspur) - à
entendre matériellement comme trace-souvenir - qui reviendrait à
un « anéantissement » (Vernichtung). Il faut donc en tirer la
conséquence radicale, énoncée avec la force d'une loi : « dans la vie
psychique, ce qui a été une fois formé ne peut périr » (im Seelenleben
nichts, was einmal gebildet wurde, untergehen kann).
Autrement dit, il ne s'agit pas de s'installer dans cette semi-idée
que telle représentation est plus ou moins oubliée, donc plus ou
moins maintenue : il s'agit bien plutôt de poser un véritable principe
de conservation de la matière psychique. Rien ne se perd ni ne se crée
dans la Seelenleben. L'oubli n'est donc pas un simple raté de la
mécanique mémorisante ou un demi-souvenir : il s'inscrit dans ce
continuum psychéique : si en effet « tout demeure conservé d'une façon ou
d'une autre », cela signifie que tout est susceptible « de réapparaître
dans certaines conditions appropriées, par exemple au cours d'une
régression suffisante ». Cette remarque doit bien être entendue à la
lueur du processus reconstitué de la dramaturgie de l'oubli : le
moment de vérité en est paradoxalement le retour inopiné et
fracassant de l'objet-de-Poubli sur la scène de la conscience. Si tout est
conservé, n'importe quoi peut a tout moment - on insistera sur la
dimension d'urgence du scénario - se phénoménaliser (zum Vors-
chein brengen) à nouveau.
Pour comprendre comment l'oubli a été possible, il faut donc
comprendre comment il peut ainsi s'accommoder d'une remanence
de la trace mnésique. ,
Celle-ci donne lieu chez Freud à une ample métaphore
archéologique, à rapprocher de ce qui est chez lui l'objet d'une véritable
fascination, celle de la « Ville éternelle » - périphrase appliquée à Rome
qui prend toute sa signification dans le contexte qui nous intéresse -,
d'une capitale de la Mémoire. Celle-ci, par sa stratification de ruines
qui manifeste, telles des archives, toute une histoire, exhibe un
véritable « mode de conservation du passé ld ». Le plus étonnant est que
« rien de ce qui s'est produit » en cet espace ne s'est totalement

106
Le sujet de l'oubli selon Freud

perdu, en sorte que, « à côté de la dernière phase de développement,


toutes les phases antérieures continuent d'exister ». Il nous faut là en
quelque sorte visionner ce que Freud cherche à penser comme la
temporalité même de l'expérience analytique : un espace homogène
creusé par la temporalité historique qui s'y inscrit selon une diachro-
nie qui ne détruit pas l'objet mais P« étage ». Bref, un véritable
espace-temps archéologique qui livre une « image mobile de
l'éternité 16 », en sa matérialité même. Ce qu'illustre a fortiori Jérusalem,
la Ville-Mémoire taillée à même le passé d'un peuple.
Tel est aussi le « passé psychique » : il se donne comme un présent
qui contient in absentia l'intégralité de sa mémoire. Freud n'exclut
certes pas que, dans un processus, les étapes antérieures ne soient
susceptibles de s'éroder et de se perdre, ou n'y soient plus
identifiables : comment l'embryon serait-il encore visible dans l'adulte ?
Mais, justement, c'est le propre de la psyché de donner lieu à cette
extraordinaire cumulation. C'est pourquoi il s'accroche à cette idée
avec l'obstination dont il sait faire preuve quand l'expérience
analytique impose une récurrence déterminante :

Peut-être allons-nous trop loin en formulant cette hypothèse.


Peut-être devons-nous nous contenter d'affirmer que le passé (Ver-
gangenheit) peut être conservé dans la vie psychique, ne doit pas
nécessairement être détruit. Il est certes possible que dans le
psychique beaucoup de choses anciennes - normalement ou même
exceptionnellement - soient si effacées ou résorbées (verwischt oder
aufgezehrt) qu'elles ne puissent plus être restaurées ou revécues
par un événement ou que cette conservation soit liée en général à
certaines conditions favorables. C'est possible, mais nous n'en
savons rien. Nous devons nous borner à formuler que la
conservation du passé dans la vie psychique est plutôt une règle qu'une
étrange exception l?.

Freud ne fait pas là que tourner en rond : il pointe un mouvement


tendanciel précis : la psyché tend à la conservation. Rien n'est moins
« oublieux » qu'une « âme » ! Et tel est l'inconscient qu'il ne renonce
jamais à rien totalement et qu'il est susceptible à tout moment de
revenir à une position abandonnée : la régression est alors
transgression du présent par le passé.

Voubli et le bloc magique.

On trouve heureusement une « sortie » hors de ce cercle vicieux


grâce à ce que Freud théorise ailleurs de la fonction proprement

107
Paul-Laurent Assoun

magique de la mémoire. C'est qu'il s'agit, sans disposer des


ressources de quelque théorie de rintentionnalité ni des facilités d'une
théorie des facultés, de rendre compte de ces deux caractères
opposés : d'une part, la perdurance des traces mnésiques, d'autre part, la
plasticité du système de reproduction. La mémoire inconsciente
désigne justement cette double possibilité chronique de s'absenter,
par un jeu des plus déliés, et de s'enkyster, par une pesanteur des
plus décidées. L'oubli est en dernière analyse à situer dans cet entre-
deux déroutant, entre l'inertie de l'« impression » (Eindruck) et la
labilité de la mémoire. Si ma mémoire est si peu « fiable », je suis sûr
en revanche de ne jamais échapper tout à fait à la mémoire de mon
« refoulé ».
Que ne disposé-je d'un de ces Wunderblokken, « blocs magiques »
ou aide-mémoire, à la technologie suffisamment élaborée à l'époque
de Freud pour suppléer aux défaillances de la mémoire, mais encore
suffisamment frustres pour alimenter la fascination de l'entendement
magique ? Ce n'est pas un hasard si c'est par de pareilles
considérations que Freud introduit l'article l8 consacré à cet instrument. Mais
c'est en méditant sur cet objet que Freud en fait un véritable objet
métapsychologique. C'est, autrement dit, en réfléchissant sur cet
aide-mémoire que Freud en fait la figuration la plus concrète de ce
système psychique qui contient la mémoire ! N'y a-t-il pas là un
symbole du fait que l'accès le plus viable à ce mystère de la mémoire
est fourni par cette espèce de fétiche destiné à conjurer les trous de
mémoire ?
Or, l'effet magique de cet appareil est essentiellement lié à sa
structure duelle qui fait matériellement métaphore, aux yeux de
Freud, à la dualité systémique préconscient-conscient / inconscient
(Pcs-Cs/Ics). Ces deux éléments sont en rapport intime d'adhérence
et en relation fonctionnelle de désadhérence. Ne tient-on pas là en
quelque sorte de visu le dispositif qui combine la fixité et la durabi-
lité de la trace à la possibilité chronique de l'effacement ? On touche
là le point où mémoire et lecture deviennent indépartageables,
comme rapport du sujet à son texte [ .
On a vue par là même sur ce ballet proprement magique par lequel
le sujet peut s'absenter de la « chose » qui lui tient le plus à cœur sans
que celle-ci s'évapore : il suffit d'un décollement ou d'un recollement
pour que sujet et objet se déplacent l'un par rapport à l'autre. Dans
les avatars de la mémoire oublieuse retracés plus haut, c'est ceci qui
serait à déchiffrer : une fonction qui consiste à « reproduire » de
l'intérieur l'écriture une fois qu'elle s'est effacée 20. Fonction si magique
en effet que le bloc en question « serait véritablement magique, nous

108
Le sujet de l'oubli selon Freud

dit Freud, s'il pouvait, comme notre mémoire, s'acquitter de cette


fonction21. »
On voit où l'on aboutit en suivant la suggestion d'une fonction
plus magique que nature : si la mémoire est cette aptitude de
réitération de l'écriture effacée, son effet n'est jamais si visible que dans ce
moment d'effacement de l'écriture que l'oubli signe en quelque sorte
de la façon la plus matérielle. On voit du même coup l'inflexion qu'il
imprime à la problématique du souvenir et de l'oubli : celui-ci ne
surgit pas comme la dysfonction d'une faculté, mais comme le
moment de vérité du rapport du sujet à son propre texte psychique.
On en perçoit l'effet dans ce moment rare mais privilégié que
Freud évoque au bout du processus de remémoration analytique. Il
nous faut bien entendre l'évocation de ce « phénomène » qui traduit
en quelque sorte une inversion de l'oubli mettant le sujet face à la
« chose » 22 à laquelle il faisait écran :

Ce qui m'a frappé dans quelques analyses, c'est que la


communication d'une construction manifestement pertinente provoquait chez
les analysés un phénomène surprenant et d'abord
incompréhensible. Ils sentaient émerger des souvenirs très vivaces, qu'ils
qualifiaient d'« excessivement nets » ; ils retrouvaient cependant, non
pas l'événement même qui était le contenu de la construction,
mais des détails voisins de ce contenu, par exemple, avec une
extrême précision, les visages des personnes qui y figuraient ou les
pièces dans lesquelles quelque chose de semblable aurait pu se
passer 2'\..

Il faut y voir une « poussée vers le haut » du refoulé qui amène à la


conscience, par la stimulation de la « construction », des « traces
mnésiques significatives ».
« Souvenirs », certes, mais dont le caractère « hyperévident » (ûber-
deutlich) les apparente à de véritables « hallucinations ». Cela traduit
cette logique inversée de l'oubli : il n'y a pas seulement réactivation
du souvenir, mais retour du refoulé jusqu'au seuil de la perception, en
sorte que Freud y voit le retour d'un « morceau de vérité
historique 2 ». Moment proprement psychotique, où le sujet se voit en
quelque sorte nez à nez avec cet « objet de l'oubli » qu'il cesse
d'oublier, ce qui fait qu'il se présente hic et nunc, comme un véritable
percept. De même que le sujet est entré dans le refoulement par le
refoulement de la « scène primitive 2o », de même il se trouve en
position de l'habiter à nouveau : bref, il lui semble voir la chose. Non
seulement « ça lui revient », mais il y retourne : cette hyperesthésie à
la fois matérielle et mystique, Freud veut y voir la garantie d'un

109
Paul-Laurent Assoun

accès à la vraie mémoire, celle de l'Événement, proton pseudos où


tout a commencé.
En ce sens, la psychanalyse n'aura rien fait d'autre que sonder
inlassablement l'inconscient comme ce qui rend sujet... à l'oubli -
hommage paradoxal à la part de soi proprement inoubliable. Elle lui
commande en conséquence d'advenir au lieu même où l'oubli s'est
formé, sans espoir en ce fleuve du Léthé, qui, en le lavant une fois
pour toutes du souvenir, le guérirait de tout rapport au désir...

Paul-Laurent Assoun

NOTES

1 . On trouve cette formule en introduction au chapitre 7 de la Psychopathologie de la vie


quotidienne consacré à « L'oubli d'impressions et de projets » (Gesammelte Werke, t. IV,
p. 148 ; trad, fr., Payot, p. 173). Nous retraduisons les textes cités quand le besoin s'en fait
sentir.
2. C'est dans un article précurseur, publié en 1898, que Freud a abordé le plus crûment
la question (« Sur le mécanisme psychique de l'oubli », GW, I, p. 1 ; traduit in Résultats,
Idées, Problèmes, PUF, t. I, p. 99). Les thèses en sont reprises dans le premier chapitre de la
Psychopathologie qui s'y réfère explicitement.
3. Ibid., p. 517 ; trad, fr., p. 99-100.
4. Ibid., p. 525 ; trad, fr., p. 105.
5. Ibid, p. 527 ; trad, fr., p. 106.
6. Cf. Platon : l'âme est comparée à une volière : croyant mettre la main sur l'un des
oiseaux, c'est l'autre qu'on saisit...
7. Fragment d'une analyse d'hystérie (Dora), section I, GW, V, p. 171 ; trad. fr. in Cinq
Psychanalyses, PUF, p. 8.
8. Cf. sur cette thématique l'écrit Constructions en analyse (1938). Nous avons étudié,
dans Freud et Wittgenstein (PUF, 1988, p. 44-71) ce que ce processus révèle du sujet
inconscient comme mémoire en construction.
9. Op. cit., p. 173 ; trad, fr., p. 9.
10. Sur la fausse reconnaissance («Déjà raconté») pendant le travail psychanalytique
(1914), GW, X ; trad. fr. in La Technique psychanalytique, PUF.
11. Op. cit., GW,X.
12. Op. cit., p. 116. L'exemple est l'hallucination du doigt coupé chez l'Homme aux
loups.
13. Op. cit., p. 120.
14. Ce développement se trouve dans la première section de Malaise dans la civilisation
{GW, XIV, p. 426 sq. ; trad, fr., PUF, p. 11 sq.).
15. Trad, h., op. cit., p. 13.
16. Selon la définition platonicienne du temps (Timée).
17. Malaise dans la civilisation, trad, fr., p. 15.
18. Note sur le « Bloc-notes magique » (1925), traduit in Résultats, Idées, problèmes, PUF,
t. II, p. 119 sq. Rappelons la constitution de cet appareil, dans la description de Freud
même : « Le bloc-notes magique est un tableau fait d'un morceau de résine ou cire foncé
encadré de papier ; il est recouvert d'une feuille mince et translucide qui est fixée à son bord
supérieur et libre à son bord inférieur. Cette feuille [...] comporte elle-même deux couches

110
Le sujet de l'oubli selon Freud

qui peuvent être séparées Tune de l'autre sauf à leurs bords transversaux. La couche
supérieure est un feuillet de celluloïd transparent et l'inférieure est faite de papier ciré mince et
donc translucide... Pour se servir de ce bloc-notes magique, on écrit sur le feuillet de
celluloïd de la feuille qui recouvre le tableau de cire » (p. 121).
19. Voir sur ce point complexe notre analyse « Eléments d'une métapsychologie du lire »,
in « La lecture », Nouvelle Revue de psychanalyse, 37, printemps 1988, p. 129 sq., et en
particulier « Le Lesen, opérateur magique », p. 130-132.
20. Op. cit., p. 123.
21. Ibid., souligné par nous.
22. Sur la connotation de ce terme dans le contexte de la présente problématique, nous
renvoyons à notre mise au point dans « C'est, donc, la chose, toujours », in « La chose
sexuelle », Nouvelle Revue de psychanalyse, 29, 1984.
23. « Constructions dans l'analyse », trad. fr. in Idées, Résultats, Problèmes, t. II, p. 278.
24. Op. cit., p. 279.
25. Sur l'ensemble de la problématique de YUrszene, nous renvoyons à notre ouvrage
L'Entendement freudien. Logos et Anankè, Gallimard, 1984, p. 142 $q.

Vous aimerez peut-être aussi