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2017 | pages 73 à 91
ISBN 9782847698626
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/puissances-de-la-norme---page-73.htm
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marchandises : une approche exploratoire
Pour Boiral (2012) alors que des études conduisent à des conclusions
équivoques, la norme ISO 9001 a bien une influence positive sur
les opérations internes (e.g. la productivité, la réduction des déchets,
etc.) et externes (e.g. la satisfaction client, les livraisons).
Les recherches sur la norme ISO 9001 focalisent rarement sur le
salarié opérationnel. Le salarié opérationnel ne décide pas de l’adop-
tion de la norme et n’en est pas un spécialiste, mais il doit l’intégrer
dans son travail. Il vit la norme au quotidien en fonction du manage-
ment. Les conséquences de la norme ISO 9001 sur les salariés opé-
rationnelles sont peu étudiées. D’autre part, les travaux académiques
s’intéressent le plus souvent au moment de la certification. Or, la
certification n’est qu’une étape dans une démarche ISO 9001. La
littérature ne met pas suffisamment l’accent sur le fonctionnement
quotidien de la norme ISO 9001 (i.e. du SMQ). Ces deux constats
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peuvent se résumer en une question : quelle est l’influence de la
norme ISO 9001 sur l’attitude des salariés ? Les études sur la norme
ISO 9001 dans l’industrie sont largement représentées dans la lit-
térature. Bien que de plus en plus d’entreprises de service soient
certifiées ISO 9001, les travaux académiques sur la norme ISO 9001
sont moins nombreux dans ce secteur d’activité. Cette situation est
particulièrement représentative du secteur du transport. La recherche
porte sur le transport routier de marchandises1 (TRM).
Pour Boiral (2012), la diversité des perceptions dans l’organi-
sation, l’influence de l’utilité de la norme, la mobilisation des em-
ployés, etc., restent des thèmes sous-exploités par la littérature. Cet
article vise à prolonger la littérature sur la norme ISO 9001 en abor-
dant l’influence de la norme sur les salariés opérationnels.
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Ivanauskiené et Urbonavičius (2003) identifient les principales
motivations à l’adoption de la norme dans le transport routier de
marchandises. La volonté d’améliorer la cohérence des fonctions
dans l’organisation et d’accroître l’efficience, et l’amélioration
de la qualité du produit/service constituent les deux principales
motivations internes. Le renforcement de la compétitivité et le
maintien et l’augmentation des parts de marché constituent les deux
principales motivations externes. Selon les auteurs, l’amélioration
du management, l’amélioration de la qualité de la prestation ou
la réduction des plaintes clients sont quelques-uns des avantages
(internes et externes) perçus de la norme ISO 9001.
Indépendamment de ses inconvénients récurrents (e.g. caractère
bureaucratique, rigidification de l’organisation), la littérature sou-
ligne les apports du management de la qualité dans les organisations
de transport routier de marchandises (Figure 4.1). Le management
de la qualité améliore les aspects opérationnels des organisations
tels que les opérations logistiques (Chankova, 2006), il favorise la
sécurisation de l’exploitation (e.g. maintien de l’activité et obtention
de nouveaux marchés) et de l’emploi dans le transport routier de
marchandises ce qui, en retour, améliore le climat social (Jakomin et
Smerdu, 1997), il favorise la confiance entre l’organisation de trans-
port routier de marchandises et le client (Biencourt, 1996), il amé-
liore les relations et leur longévité avec les principaux fournisseurs
de la chaîne logistique globale (Dowalatshahi, 2011), il améliore
les procédures managériales (Ivanauskiené et Urbonavičius, 2003),
2 Jusqu’en 1986 en France, le transport routier de marchandises était soumis au contingentement de
licences de transport (abrogé par décret du 14 mars 1986) et prévoyait un tarif minimum obligatoire
au kilomètre (abrogé par ordonnance du 1er décembre 1986).
76 n PUISSANCES DE LA NORME
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vision du métier (e.g. perte d’indépendance), associé à une certaine
liberté. La perception de la norme est donc une question importante.
L’article explore la façon dont les salariés opérationnels d’une orga-
nisation de transport routier de marchandises perçoivent la norme
ISO 9001. La littérature propose un corpus théorique riche pour ap-
préhender la norme et la manière dont elle s’approprie.
Figure 4.1 : Les apports du management de la qualité aux organisations
de transport routier de marchandises
PERCEPTION DE LA NORME DE MANAGEMENT... n 77
La littérature soutient la conceptualisation de la norme à partir de Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Rouen - - 83.115.31.89 - 30/03/2020 10:58 - © EMS Editions
trois dispositifs.
1) La norme est un dispositif de coordination et de régulation
qui favorise la qualité et la performance. La norme porte des règles,
des techniques, des modèles (Benezech, 1996) qui coordonnent et
régulent l’organisation. Par exemple, la maîtrise statistique des pro-
cédés permet d’encadrer le processus de production pour garantir un
niveau de qualité et de performance. Au travers de sa certification, la
norme permet d’identifier l’organisation soucieuse de la qualité. La
certification permet de réduire l’asymétrie d’information (Benezech,
1996 ; Burlaud et Zarlowski, 2003) entre un client et son fournisseur
et facilite la contractualisation. À ce niveau, la norme réduit les coûts
de transaction (Burlaud et Zarlowski, 2003).
2) La norme est un dispositif d’apprentissage et d’innovation qui
permet la gestion de la connaissance organisationnelle. La norme est
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volontaire. Sa mise en conformité n’est pas obligatoire. Sans impo-
ser de mode de réalisation, la norme fixe un seuil minimum de qua-
lité à atteindre. La norme ISO 9001 est une norme générique, appli-
cable dans toutes les organisations, quelles que soient leurs activités.
La norme ISO 9001 prend la forme d’un SMQ établi en coopération
avec les salariés. Le SMQ prend en compte les spécificités de chaque
organisation. La norme suppose un droit à la traduction lié à l’usage
des acteurs et à leurs intérêts (Igalens et Penan, 1994 ; Benezech,
1996). Elle offre des marges d’interprétation. Cette situation per-
met de conclure à une flexibilité d’interprétation de la norme. Pour
Naveh et Marcus (2004), le lien entre la norme ISO 9001 et l’amé-
lioration de la performance dépend de l’assimilation de la norme. La
liberté d’interprétation de la norme conditionne l’appropriation et
la perception de la norme par les salariés. En retour, l’appropriation
et la perception de la norme influencent leur attitude. La littérature
offre un riche corpus théorique pour appréhender l’appropriation de
la norme.
L’appropriation renvoie à un processus par lequel un usage prévu
d’un outil va se trouver rejeté, modifié ou approuvé par l’utilisateur :
« l’appropriation fait référence à la mise en usage, aux pratiques, au
quotidien des acteurs de terrain » (Martineau, 2009, p. 64). Sur la
base des travaux de la structuration3 et de la régulation conjointe4, De
Vaujany (2006) propose une perspective triple de l’appropriation, où
3 Suivant cette théorie, l’appropriation de la norme dépend de sa structure (i.e. du SMQ) que les
salariés créent et reproduisent. Le SMQ contraint les actions des salariés qui, en retour, modifient
son usage. Il s’agit d’une boucle récursive.
4 Suivant cette théorie, l’appropriation de la norme résulte du compromis entre la régulation de
contrôle (i.e. le management décide de la mise en œuvre de la norme ISO qui s’impose aux em-
ployés) et la régulation autonome (i.e. les employés s’approprient la norme selon les règles de leur
groupe social).
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de sa promotion et de sa légitimation en mobilisant les symboles, les
croyances, les idéologies).
La norme ISO 9001 est un instrument de travail pour le salarié, dès
lors qu’il en conçoit une utilisation. Par exemple, la norme ISO 9001
peut être un instrument d’amélioration de la qualité tout autant qu’un
instrument de contrôle de l’activité. À ce niveau, la norme existe
parce que le salarié voit à travers elle une utilisation. La compré-
hension de l’usage de la norme passe donc par le point de vue des
utilisateurs, ce qui ouvre la voie aux travaux sur l’utilité perçue.
Davis (1989) propose la perspective de l’acceptation (modèle
TAM5) pour expliquer les déterminants individuels de l’adoption et
de l’utilisation d’outils de l’information. Le modèle TAM met en
avant le rôle de l’utilité et de la facilité d’utilisation perçues dans
l’adoption d’outils. Selon ce modèle, les variables d’action qui dé-
terminent l’utilisation d’une technologie par un individu sont : l’uti-
lité perçue (la norme va améliorer la performance au travail) et la
facilité d’utilisation perçue (les efforts seront moindres pour utiliser
la norme). Plus tard, d’autres travaux vont enrichir ce modèle : en
montrant les principales forces qui sous-tendent les jugements de
l’utilité perçue (i.e. un processus d’influence sociale et un processus
cognitif ; Venkatesh et Davis en 2000 avec le TAM 2) et en mettant
en relief les déterminants de l’acceptation (i.e. la performance at-
tendue, l’effort attendu, l’influence sociale et les conditions facili-
tantes ; Venkatesh et alii en 2003 avec le TAM 3, dans le cadre de
leur théorie unifiée d’acceptation et d’utilisation de la technologie).
La motivation est un élément essentiel de la théorie unifiée d’accep-
5
Technology Acceptance Model.
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tule que la motivation intrinsèque est une variable médiatrice de l’ef-
fet des facteurs externes sur le comportement des employés. À ce
niveau, la manière dont le salarié s’approprie la norme détermine son
engagement dans celle-ci. Dans ce cas, l’appropriation est fonction
de la reconnaissance que le salarié trouve dans la norme elle-même,
renforcé dans cette situation par l’entreprise, notamment par un feed-
back positif6.
Si certaines études mettent en évidence un lien entre le manage-
ment de la qualité et l’attitude des salariés (Hill, 1993 ; Rees, 1995 ;
Jain, 2010), elles ne portent que sur certaines dimensions de la qua-
lité (e.g. le leadership, la responsabilisation des employés, la parti-
cipation aux cercles qualité) et elles n’appréhendent que certaines
variables (e.g. motivation, satisfaction).
Notre cadre d’analyse théorique constitue une grille de lecture
potentielle pour appréhender l’attitude au travail des salariés (état
affectif, comportement, croyance) du fait de la norme (Figure 4.3).
Le modèle de recherche invite à creuser la perception de la norme,
les déterminants de son appropriation (utilité et facilité d’utilisation
perçues ; motivations intrinsèque et extrinsèque) et les attitudes au
travail qui en découle. L’étude porte sur une entreprise de transport
routier de marchandises.
6 À la différence d’une reconnaissance financière qui tend à diminuer la motivation intrinsèque
(Deci, 1971).
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3. Cadre méthodologique
Année de
Fonction Genre Statut
naissance
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Secrétaire général Homme 1967 Cadre (supérieur)
4. Résultats et discussion
Dans le cas étudié, presque tous les répondants ont une opinion
favorable de la norme, par exemple : « la situation serait moins posi-
PERCEPTION DE LA NORME DE MANAGEMENT... n 83
tive s’il n’y avait pas la norme » ; « la norme amène du positif dans
l’entreprise. On gagne en qualité de service et ça a un impact positif
sur les autres clients ». À ce niveau, deux perceptions différentes de
la norme apparaissent. Un agent, le technicien et le cadre interprètent
la norme comme un ensemble de procédures obligatoires (e.g. « à
partir du moment où on est dans la norme, ça oblige à faire un
travail que l’on n’aurait pas fait tout de suite », cadre). Le caractère
obligatoire de la norme peut même être perçu comme une obligation
légale : « je pense qu’il y a un aspect réglementaire à la norme »
(technicien). Différemment, le cadre supérieur interprète la norme
comme un guide d’action volontaire (e.g. « on fait le choix d’utili-
ser la norme comme outil de management, d’organisation au sein
du groupe »). La perception de la norme comme une obligation
renvoie principalement à la perspective rationnelle de l’appropria-
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tion (e.g. « la norme permet de structurer et d’organiser l’entre-
prise » ; « la norme, c’est des recommandations pour assurer l’in-
tégrité de la marchandise »). La perception de la norme comme une
obligation renvoie également à la perspective psycho-cognitive (e.g.
« la norme elle apprend des choses », un agent). La perception de la
norme comme un guide d’action volontaire renvoie exclusivement
à la perspective symbolique et identitaire (e.g. « la norme c’est
un prétexte, un alibi sur lequel on s’appuie pour faire avancer les
choses », cadre supérieur). Si presque tous les répondants ont une
opinion favorable de la norme, une personne a clairement exprimé
une opinion défavorable : « la norme, ça sert strictement à rien, c’est
de la blague ». Cette troisième perception de la norme contraste avec
le point de vue majoritaire favorable. À ce niveau, la seule attitude au
travail influencée est l’« indifférence ».
Par ailleurs, l’utilité perçue de la norme est mise en évidence par
l’étude pour expliquer l’appropriation de la norme : « la norme c’est
une aide » (un agent) ; « c’est vraiment une aide, c’est un appui
la structure de la norme » (cadre). Enfin, les résultats mettent en
évidence la motivation intrinsèque (e.g. « ça ferait mon affaire si la
norme était plus pointue pour avancer dans un esprit qualité », un
agent) et la motivation extrinsèque (e.g. « les exploitants sont obligés
de respecter la norme, par exemple ils doivent désormais s’arranger
pour qu’il n’y ait plus de retard dans le planning lié au passage aux
mines des véhicules », un agent).
Selon les résultats de l’étude, quatre facteurs influencent la per-
ception de la norme ISO 9001: le management (e.g. « aujourd’hui
les différentes directions s’appuient sur la qualité pour améliorer
leurs systèmes », cadre supérieur), les valeurs initiales du travail (e.g.
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« on a tous envie que les choses se fassent mieux, que l’on commu-
nique plus et que les choses soient faites de façon plus rigoureuse »,
cadre), les caractéristiques personnelles (e.g. « moi je travaille tou-
jours avec un esprit d’équipe, quand je fais quelque chose je me dis
que cela pourrait arranger tel collègue ou tel autre », un agent) et la
contribution à la mise en œuvre de la norme (e.g. « j’ai été sollicité
pour réaliser des procédures du SMQ, j’ai également participé à
des audits », un agent). Par définition, le management décide de la
mise en œuvre de la norme, promeut et encadre son fonctionnement
quotidien. Les résultats confirment le rôle du management. Toutefois,
l’étude souligne l’importance de la variable communication du
management. Cette variable ressort nettement des verbatim des
répondants (e.g. « la norme ne fait pas forcément plus communiquer,
en fait c’est un problème interne, notre communication interne est
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très en retard », un agent). Dans le cas de la perception défavorable
de la norme ISO 9001, le répondant semble stigmatiser l’action du
management au travers de la norme (e.g. « bien que l’on soit certifié
ISO 9001, on n’arrive pas à faire grand-chose parce qu’il faut at-
tendre l’accord de plusieurs chefs »). Les valeurs initiales du travail
renvoient à la manière dont les répondants conçoivent le travail. Les
caractéristiques personnelles se réfèrent aux spécificités des indivi-
dus. Les résultats mettent en évidence un lien d’influence entre les
valeurs initiales au travail et les caractéristiques personnelles, avec la
perception de la norme. Celles-ci sont liées à l’individu et résultent
de son éducation, de ses expériences antérieures et de ses points de
vue sur les choses. La variable contribution à la mise en place de
la norme est reliée à un seul individu. L’étude montre un lien d’in-
fluence exprimé par l’ensemble des répondants entre le management
et la perception de la norme ISO 9001. Le management confirme
son importance dans la perception de la norme et à travers lui, la
communication joue un rôle prépondérant pour promouvoir l’amé-
lioration continue. La liberté d’interprétation de la norme ISO 9001
s’entend, autant pour la lecture de la norme par le responsable de sa
mise en œuvre dans l’organisme, que pour l’individu qui la reçoit au
travers du SMQ. Ainsi, la liberté d’interprétation doit s’appréhender
à l’aune des cadres théoriques qui expliquent, outre les différentes
perspectives d’appropriation de la norme, que l’individu agit sous
influence ou à dessein, débouchant sur l’expression de multiples at-
titudes. Loin de se plier à la norme et de dépendre exclusivement
de l’influence du management dans son interprétation, l’individu va,
par exemple, interpréter la norme en fonction du point de vue de
son groupe social, ou alors il va interpréter la norme en fonction des
objectifs personnels qu’il souhaite atteindre et pour lesquels il déve-
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cien) ;
–– la performance (e.g. « on est nécessairement plus performance
du fait des informations que l’on reçoit et du fait que l’on est
impliqué », technicien) ;
–– l’implication (e.g. « la norme c’est favorable à l’implication, à
l’engagement », technicien) ;
–– la fierté (e.g. « dans la mesure où la norme permet de faire les
choses d’une meilleure façon, ça rend fier », cadre) ;
–– la gratification (e.g. « la norme c’est gratifiant », cadre) ;
–– le moral (e.g. « la norme ce n’est pas un médicament mais à
partir du moment où on l’aborde de façon positive, c’est moteur
et ça agit sur le moral », cadre supérieur) ;
–– l’accomplissement (e.g. « je pense que la norme peut influencer
l’épanouissement, l’accomplissement », technicien) ;
–– la motivation (e.g. « la norme est un cadre qui me motive »,
technicien) ;
–– la satisfaction (e.g. « oui, ça me rend plus satisfait la norme »,
cadre) ;
–– le travail en équipe (e.g. « la norme permet de travailler en
équipe et les gens qui ont cet esprit, c’est comme une équipe de
foot, on part tous dans le même sens », agent) ;
–– la confiance (e.g. « il y a nécessairement une partie de la
confiance dans le travail qui vient de la norme », technicien) ;
7
Organizational Citizenship Behaviours.
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norme) présentent des attitudes distinctes. Toutefois, beaucoup d’at-
titudes sont communes aux deux perceptions favorables de la norme.
La figure 4.4 schématise la carte cognitive collective des répondants.
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Au contraire, ils soulignent un problème interne de communication
relié au management. Ce résultat relativise l’étude de Dowalatshahi
(2011) au sujet de l’influence de la norme sur la communication. Le
répondant ayant une vision défavorable de la norme semble stigma-
tiser le management au travers de la norme. Ceci peut expliquer ses
observations sur la communication du management : « la norme ça
ne m’incite pas à communiquer […] ce n’est pas la norme qui dé-
courage le métier, ce sont les gens ». Cependant, un autre répondant
ayant une vision favorable de la norme pointe également un problème
à ce niveau : « on a un panneau d’affichage et l’informatique em-
barquée pour être informé mais c’est de l’information de service
et non sur la qualité ». En toute logique, les salariés opérationnels
qui sont presqu’exclusivement sur les routes hors de l’entreprise, ne
perçoivent pas la communication relative au SMQ.
De façon majoritaire, les attitudes présentant un lien avec la per-
ception de la norme sont positives. Cependant un répondant sou-
ligne la lourdeur de la norme (« comme tous ces systèmes, la norme
ISO 9001 est un peu lourde et ce n’est pas souple, d’autant plus que
dans les entreprises de transport on est habitué à travailler avec
beaucoup de souplesse », cadre), confirmant la littérature sur la
rigidification de l’organisation par la norme. Les résultats montrent
que des variables autres que d’attitude présentent un lien d’influence
avec la perception de la norme. Pour une part, il s’agit de variables
qui ont été démontrées par la littérature (e.g. argument commercial,
confiance du client). Pour une autre part, il s’agit de variables peu
étudiées par la littérature : apprentissage, convergence des efforts,
sécurité dans l’entreprise et aide à la stratégie d’entreprise. Pour un
agent, la norme ISO 9001 perçue a une influence sur l’apprentis-
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externe ». Finalement, l’ensemble du cadre d’analyse théorique
mobilisé soutient bien les résultats obtenus. Il valide notre séquence
selon laquelle le management influence la perception de la norme
ISO 9001 qui à son tour, influence les attitudes au travail.
Conclusion
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