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Dunod | « Psychothérapies »
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ISBN 9782100737802
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/pratique-de-la-psychotherapie-emdr---page-455.htm
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Dolores Mosquera
Jim Knipe
(Shapiro, 2001).
Approcher les troubles narcissiques par la thérapie EMDR part de l’hypothèse que ce trouble est
basé sur des expériences difficiles et préjudiciables vécues dans la petite enfance : soit des événe-
ments traumatiques identifiables et spécifiques (Afifi et al., 2011), soit la situation plus courante de
« traumatismes par omission » - la situation d’un enfant qui, de façon répétée, est frustré dans ses
besoins d’attachement et d’éducation (Cohen et al., 2014). Nous partons du principe que, pour
l’individu adulte narcissique, les deux types de trauma ont joué un rôle, non seulement par la création
de mémoires dysfonctionnellement stockées à partir d’événements stressants, mais aussi d’autres
éléments traumatiques stockés dysfonctionnellement (Éléments Dysfonctionnellement Stockés – EDS,
Gonzalez et Mosquera, 2012, Mosquera et Knipe, 2015). Il s’agit par exemple de défenses psycho-
logiques et souvent de dissociation (c’est-à-dire un manque d’accès pleinement conscient entre des
états de soi/des réseaux de souvenirs fonctionnant séparément).
456 P RATIQUE DE LA PSYCHOTHÉRAPIE EMDR
L’utilisation des procédures EMDR peut s’avérer difficile lorsqu’on travaille avec des structures
de personnalité complexes caractérisées par des schémas défensifs rigides et des états du Moi
séparés. Les parties de la personnalité peuvent fonctionner très séparément et ne disposent
peut-être pas d’un accès pleinement conscient entre elles. Elles ont peut-être aussi des
difficultés à atteindre la pleine « réalisation » (van der Hart et al., 2006, 2010) de la manière
dont le présent est séparé et différent du passé (Kernberg et al., 2000). L’échec de la réalisa-
tion peut rendre plus probables les projections erronées sur d’autres personnes, et entraîner
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des problèmes relationnels importants, y compris dans les relations avec un thérapeute. Le
thérapeute doit se montrer vigilant face à ces distorsions lorsqu’elles surviennent dans la
relation thérapeutique.
Objectif de la thérapie
L’investissement dans une image excessivement positive peut dominer le sens de Soi d’une
personne, ou simplement être un état d’esprit qui survient, à des degrés variables, dans
certaines circonstances spécifiques. Que l’investissement soit important ou restreint, il peut
progressivement s’effectuer un glissement dans la thérapie, passant de l’investissement
émotionnel dans le « Faux Self » à l’acceptation d’être simplement un « Soi authentique. »
L’illusion est abandonnée, et le deuil s’accompagne d’une compensation : un sentiment accru
d’ancrage et de cohérence avec Soi, ainsi qu’une ouverture vers des relations authentiques
avec autrui. Une personne peut finalement accepter : « Je ne suis pas merveilleux(se), et
en fait, ça me convient, et je suis soulagé(e) de savoir que je ne suis pas horrible. Cela me
convient d’être seulement qui je suis. » C’est gratifiant pour l’individu de découvrir la simple
permission d’être humain, et d’être conscient de l’humanité des autres. Avec ces patients, la
thérapie est par nécessité lente et progressive.
Cibles initiales
d’une certaine manière. Par exemple, le thérapeute peut affirmer : « Je peux comprendre
que, lorsque cela survenait, c’était très contrariant. Pouvez-vous m’en dire plus sur vos
sentiments en réaction à cela ? » En adéquation avec cette approche, un thérapeute EMDR
pourrait suggérer que le ciblage commence avec des événements qui contiennent des per-
turbations plus accessibles, ceux que le patient peut facilement identifier comme négatifs et
personnellement problématiques, tels que les déclencheurs actuels ou les événements récents.
Une blessure narcissique récente (c’est-à-dire un événement qui a sévèrement ébranlé le
« Faux Self » déformé et exagérément positif du client) peut s’avérer une cible très largement
accessible, contenant des sentiments d’humiliation, une colère impuissante ou d’autres effets
négatifs. Cette situation pourrait offrir une excellente opportunité de présenter au patient les
procédures de traitement EMDR et expliquer les avantages de cette approche thérapeutique.
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Nombre de ces situations apparaissent habituellement lors de la présentation initiale d’une
personne avec une structure narcissique. En effet, l’égocentrisme irréaliste, l’autosatisfaction
et le sentiment que tout est dû ont tendance à provoquer des réponses négatives de la part
des autres. Cette auto-idéalisation irréaliste, survenant à un degré plus ou moins élevé, risque
à terme de se terminer en humiliation - un « crash avec la réalité. »
Petit à petit, le patient présentant des traits narcissiques parvient à voir et ressentir
l’importance de l’empathie envers les autres, et pourquoi ce ressenti est la clé de relations
satisfaisantes et réussies avec les autres personnes. Parallèlement, le patient peut également
connaître une modification de la définition même de soi, en faveur d’une perception de
lui-même plus réaliste et équilibrée. Un patient a déclaré : « Je me rends compte maintenant
que je ne suis pas si bien, et que je ne suis pas si mal ! »
Cibler des événements positifs initiaux qui ont créé une auto-idéalisation
Une fois que le patient peut commencer à avoir ce type de ressenti conscient, il est alors
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possible d’entrouvrir la porte, de revenir en arrière et de cibler spécifiquement les événements
positifs qui ont été à l’origine de l’auto-idéalisation. Il s’agit alors de cibler plus spécifique-
ment les affects positifs associés à ces événements. Voici quelques exemples : des souvenirs
d’un parent qui se montre encourageant ; des situations actuelles au cours desquelles l’in-
dividu a satisfait un besoin obsessionnel de gagner l’admiration des parents dans le monde
d’aujourd’hui ; ou un moment au cours duquel le patient a su gagner l’admiration d’autres
personnes. Typiquement, ces exemples étant ciblés, le caractère défensif de l’auto-idéalisation
apparaîtra plus clairement. Un concept de soi excessivement positif peut apparaître comme
une manière de s’éloigner d’une douleur émotionnelle liée à des événements traumatiques
ou à de la négligence. Il s’agit alors d’une stratégie pour ne pas ressentir les effets négatifs.
Réciproquement, il peut être utile d’identifier et de cibler les moments du passé où il y a eu des
blessures narcissiques - quelque chose est survenu qui a rendu le concept de soi narcissique
intenable - et la personne s’est sentie humiliée ou déshonorée, au moins pour une courte
période, jusqu’à ce que le concept de soi de perfection soit restauré. Ce sont là des exemples
où il s’agit de cibler des souvenirs ayant un affect positif stockés de manière dysfonctionnelle.
Des souvenirs qui forment ensuite le fondement des défenses d’idéalisation empêchant tout
accès aux souvenirs à valence négative de violence ou de non implication parentale. Une fois
que l’alliance est solide et que le patient a développé un meilleur sentiment de maîtrise en
lie avec le traitement de souvenirs inconfortables, alors il est possible de poursuivre avec le
retraitement du trauma des souvenirs centraux (Mosquera, 2012).
Les scénarios du futur doivent être utilisés pour compléter l’approche en trois temps et conso-
lider les résultats obtenus après le traitement des souvenirs du passé et des déclencheurs du
présent.
Traiter les troubles narcissiques par la thérapie EMDR 459
Phase 1 de la thérapie EMDR avec des individus narcissiques :
anamnèse
Pendant la phase 1, il sera nécessaire de mettre en place un lien thérapeutique solide grâce
à une compréhension répétée, juste et empathique de la part du thérapeute. Il faut que le
patient soit convaincu que : « Son thérapeute comprend vraiment les choses, qu’il comprenne
qui il est ! » Masterson (1981) décrit la nécessité que le thérapeute « renvoie le reflet de la
vulnérabilité narcissique » particulièrement dans la première partie du traitement. Le rôle
du thérapeute est d’aider le patient narcissique à développer sa curiosité et savoir pourquoi
les autres réagissent souvent de manière négative, et ainsi commencer à entrapercevoir que
son concept de soi surdimensionné est irréaliste et trompeur. En abordant avec le patient les
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notions de supériorité et le sentiment que tout lui est dû, il est important que le thérapeute
utilise des mots qui entrent en résonance avec la vulnérabilité sous-jacente et les défenses
d’auto-idéalisation du patient. Il faut alors s’assurer que des sentiments de honte ou d’at-
taque ne surgissent pas (Mosquera, 2012). Le « Faux Self » légitime et supérieur du patient
(Winnicot, 1960), bien que semblant solide et robuste, est généralement très fragile, comme
un fin vernis recouvrant des sentiments de vide et souvent un énorme doute de soi-même.
Le patient peut apparaître « grossier », en ne montrant aucune conscience des effets de ce
qu’il dit de négatif sur les autres personnes. Lors des premières séances, il est probablement
préférable que le thérapeute évite de répondre à cette grossièreté par des interprétations
prématurées. Dans certains cas, même les attaques verbales sur le thérapeute peuvent s’en
tenir à une réponse minimale - ces attaques peuvent être un « test » inconsciemment motivé
visant à déterminer si le thérapeute est capable de maintenir son estime de soi face à des
attaques (le client a besoin de savoir que le thérapeute dispose d’un sens de soi suffisamment
résilient). Il se peut que le patient soit surpris par la résilience du thérapeute - une résilience
qui peut contraster nettement avec les réponses et les retours habituels dont il fait l’objet.
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Durant la phase 2 de la thérapie EMDR, le praticien doit éviter de formuler des phrases qui
impliquent que le patient aurait besoin d’une stabilisation prolongée. Cela pourrait mener à
l’activation des défenses et interférer avec le traitement.
La phase de préparation constitue un processus long qui consiste à démanteler les nombreuses
couches défensives caractéristiques des patients avec une structure narcissique. La psychoé-
ducation est souvent très utile pour décrire comment les défenses peuvent se développer
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pendant l’enfance en réaction à un environnement difficile. Les défenses s’expliquent comme
une tentative d’aider le Moi du patient, et non comme un défaut ou une faiblesse personnels.
Les traumas anciens peuvent être identifiés, mais étant donné la fragilité de la personnalité
initiale du patient, il convient de ne pas commencer avec les événements les plus négatifs
ou les plus chargés émotionnellement. Il faut en effet faire tomber de nombreux murs avant
d’en arriver là. (Mosquera, 2012).
La psychoéducation et la réflexion collaborative, tout comme la reformulation des problèmes
et de l’histoire du client, sont nécessaires avant d’identifier les souvenirs dysfonctionnellement
stockés qui alimentent la structure narcissique.
La stimulation bilatérale peut être utilisée en phase 2 pour améliorer les interventions et
traiter des cibles non traumatiques, telles que les défenses ou les problèmes relationnels. À ce
stade, le principal souci est de ne pas se méprendre sur la sécurité, la stabilité et le contrôle
apparents du patient. Il s’agit aussi de ne pas surestimer sa capacité de résilience. Sa fragilité
cachée peut être élevée, et le patient peut décompenser par le retraitement de défenses qui
lui sont encore nécessaires au maintien d’un sentiment de stabilité et de contrôle.
Stratégies de stabilisation
Mosquera, 2012 ; Mosquera et Gonzalez, 2014), ne doivent pas être utilisées tant que le
patient n’est pas capable de progresser par une pensée réfléchie et atteindre un sens de
soi plus réaliste. Lorsque le patient s’améliore dans l’évaluation juste et objective de ses
problèmes, des ressources nouvelles et plus à même de l’aider et de prendre soin de lui.
Le travail sur les défenses (Knipe, 1998, 2005, 2014) ciblant des souvenirs d’affects positifs
liés au « Faux Self » peut être utile pour un patient qui est devenu conscient de la nature
trompeuse de l’idéalisation déformée de soi. Par exemple, un homme de 31 ans était bouleversé
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par la crainte que sa petite amie avec qui il vivait, ne soit pas suffisamment impressionnée
par l’importance de ses revenus. Parfois, lorsqu’elle affirmait que le niveau de ses revenus
n’était pas une chose importante pour elle, il se sentait mal à l’aise, il interprétait cela comme
un signe qu’elle ne l’aimait pas. Au cours de la psychothérapie, le patient a identifié des
souvenirs très spécifiques, notamment sur la manière dont ses parents lui avaient transmis
le message selon lequel accumuler de l’argent synonyme de valeur. Ce message lui avait en
outre été transmis dans un contexte où ses parents ne se montraient pas impliqués à son
égard, où en même temps il recevait d’eux d’intenses critiques. Il avait ainsi appris que « le
moyen d’être relié aux autres était de gagner beaucoup d’argent, et ainsi être considéré
comme ayant de la valeur. « Si ma puissance économique n’est pas reconnue, cela signifie
que l’autre personne est indifférente à mon égard. » Il fut donc été utile de cibler avec lui le
sentiment positif associé à un souvenir spécifique. Un événement au cours duquel il avait
annoncé à ses parents son salaire élevé. L’affect positif de ce souvenir, initialement un « 10 »
(sur une échelle de 0 à 10), a diminué après des séries répétées de stimulations bilatérales
(SBA) Ce travail fit également émergé de nombreuses images de solitude pendant l’enfance.
Celles-ci ont également été ciblées dans la prise en charge EMDR (protocole standard, phases
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3 à 7). Cette approche (appelée la méthode du niveau d’affect positif - Level of Positive
Affect method, LOPA ; Knipe, 1998, 2014) ne doit être utilisée chez ces patients qu’après
l’instauration d’une relation thérapeutique suffisamment soutenante, car elle implique un
niveau élevé de révélation de soi de la part du client. Un thérapeute expérimenté pourrait
penser : « Est-ce une bonne idée... de réduire la force d’une défense psychologique ? Est-ce
que le patient ne risque-t-il pas de devenir encore plus vulnérable face aux souvenirs et aux
sentiments post-traumatiques dérangeants ? » Nous avons découvert qu’habituellement ce
n’était pas le cas. Quand les origines du « Faux Self » idéalisé du patient sont ciblées, dans le
contexte d’une relation thérapeutique solidement établie, la force de la défense narcissique
tend à diminuer, ainsi que (en parallèle), l’intensité du matériel traumatique sous-jacent. Ce
matériel peut être ciblé en toute sécurité à l’aide des procédures EMDR standard utilisées
pour les souvenirs difficiles.
462 P RATIQUE DE LA PSYCHOTHÉRAPIE EMDR
L’idéalisation peut concerner soi-même ou autrui. Par exemple, une patiente s’est retrouvée
en danger en raison de son attitude d’idéalisation de son petit ami qui avait été violent avec
elle. Bien que pour ces raisons, il se trouvait en prison pour l’avoir presque tuée, elle restait
dans le déni de la situation et « s’accrochait » aux souvenirs de moments idéalisés qu’elle
avait passés avec lui. En ciblant dans la prise en charge les meilleurs moments idéalisés, elle
fut paradoxalement capable de prendre conscience de la situation de danger dans laquelle
elle se trouvait.
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de sévères fragmentations peuvent se former dans la structure de la personnalité (Bennett,
2006 ; van der Hart et al., 2006/2010 ; Afifi et al., 2011 ; Mosquera, 2012 ; Lyons-Ruth et al.,
2006). Il peut survenir une séparation amnésique entre l’État du Moi idéalisé et positif, et
d’autres États du Moi qui détiennent les souvenirs de solitude et d’abandon ou de violences.
Comprendre que le patient narcissique possède des parties ou des États du Moi différents (par
exemple un « Faux Self » grandiose, un enfant vulnérable, une partie protectrice agressive)
peut aider le thérapeute à appréhender la structure sous-jacente et à planifier ses inter-
ventions. Il est possible que le patient accède consciemment à ces parties, ou revive des
souvenirs qui les activent. Si cela est le cas, et que le patient est en mesure de se sentir dans
une sécurité émotionnelle suffisante avec le thérapeute, alors ces souvenirs peuvent être
ciblés à l’aide des procédures EMDR standard. L’ordre des cibles abordées doit être évalué en
fonction des besoins actuels du patient en matière de sécurité et de stabilité émotionnelle,
ainsi que des objectifs thérapeutiques préalablement négociés. Mais s’il s’agit d’un trouble
dissociatif comorbide – c’est-à-dire une histoire d’attachement désorganisée dans l’enfance
et une séparation dissociative entre des parties de personnalité - le traitement devra être
poursuivi par une « approche plus progressive » du travail avec les phobies dissociatives et
les parties du système interne (van der Hart et al., 2013 ; Gonzalez et Mosquera, 2012).
Phase 3 : évaluation
Il peut être utile de permettre au patient d’exprimer ses CN sur les autres avant de demander
une CN autoréférencée. Il peut aussi être utile d’accepter des cognitions comme : « Cela me
dérange encore. » C’est là une cognition modérée comparée aux autres CN, mais la plupart des
personnes avec des troubles narcissiques peuvent l’accepter (Knipe, 1998). Dans ce cas, la
cognition positive (CP) peut également être très modérée et devenir : « Cela ne me dérange
plus. » En ce qui concerne les CP, il faut être particulièrement attentif à ne pas accepter une
cognition idéalisée telle que « Je suis le meilleur » ou « Je suis supérieur. » Lors de cette
phase, il faut avoir conscience que les réponses du patient peuvent provenir de la partie du
patient qui porte la perturbation, tandis que l’autre provient du « Faux Self » idéalisé. Par
exemple, un patient peut identifier un souvenir dérangeant, accompagné d’une CN : « Cela me
dérange vraiment ! » Puis le client peut attribuer à une CP associée : « Cela ne me dérange
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pas du tout », avec un score de Validité des cognitions (VoC) de « 7 » !
Phase 4 : désensibilisation
Les praticiens doivent également garder à l’esprit que selon le modèle TAI, nous espérons que
les sets de SBA conduiront peu à peu à connecter le patient à de l’information adaptative.
Ce qui ne signifie pas que ces associations seront toujours vécues comme positives. Par
exemple, un patient ayant une défense égocentrique consistant à rejeter la faute sur les
autres peut devenir de plus en plus conscient de ses torts et de sa responsabilité personnelle
lors des événements difficiles. Par exemple : « Je suis coupable » est plus adaptatif que « les
autres sont la cause de mon problème » dans des situations où en fait, le patient a une
part de responsabilité dans ce qui est arrivé. Le processus peut ressembler à un « traitement
inversé » partant du positif (idéalisé) au négatif (réaliste). Paradoxalement, de nombreux
patients se sentent soulagés lorsque ce glissement s’opère : ils se débarrassent alors de
l’obligation de devoir toujours être spécial et impressionnant aux yeux des autres. Cette
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possibilité explique pourquoi une alliance thérapeutique solide et basée sur la confiance est si
importante lorsqu’on travaille avec des patients présentant des caractéristiques narcissiques.
Si la thérapie se déroule de manière utile et adéquate, le patient révélera nécessairement de
la fragilité et de la vulnérabilité. Le thérapeute doit veiller à éviter des mots qui risqueraient
de sous-entendre des sentiments de honte. Si le patient doit se désinvestir de son « Faux
Self » idéalisé, cela doit se faire à un rythme qui doit être le sien et qu’il peut tolérer.
Parfois, les thérapeutes peuvent avoir besoin de jouer un rôle plus actif afin de garantir que
toutes les émotions soient incluses dans la phase de désensibilisation. Par exemple, dans
l’histoire du patient, la peur ou la tristesse peuvent ne pas avoir été permises. Le patient
n’avait que l’autorisation d’être un enfant parfait-idéalisé, sans les sentiments ou d’autres
comportements que ses parents n’auraient pas tolérés. Le thérapeute peut introduire des
464 P RATIQUE DE LA PSYCHOTHÉRAPIE EMDR
tissages tels que « accordez-vous le droit de ressentir TOUS vos sentiments » ou « laissez-les
sortir, c’est bien. »
Phase 5 : installation
Certains patients rencontrent des problèmes pour chercher une CP car ils pensent à tort qu’ils
ont besoin d’être convaincus par cette affirmation avant de commencer le retraitement EMDR.
À ces patients, le thérapeute peut répondre : « Je ne m’attends pas à ce que votre affirmation
ait un score (VoC) élevé dès le début de ce travail. Si votre score est de 1, 2 ou 3, cela signifie
simplement que nous sommes sur la bonne voie. »
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Dans certains cas, cette phase peut être compliquée car les clients ayant souffert d’environ-
nements négligents ou traumatiques précoces peuvent manquer de réseaux positifs réalistes
auxquels se relier. D’autres n’ont pas l’expérience d’affects positifs partagés avec les personnes
qui se sont occupées d’eux pendant l’enfance. Ils peuvent donc se sentir perturbés par des
affirmations de soi positives à cause du manque de tolérance envers les affects positifs (Leeds,
2009). Ces patients peuvent simplement ne pas se sentir familiers avec l’empathie, parce que
de telles expériences ne font pas partie de leur histoire personnelle. Pire, de tels sentiments
envers les autres pouvaient par le passé être punis ou ignorés.
Un « moment pédagogique » important survient souvent au cours de la phase 5 lorsque le
patient se met à réaliser qu’une CP de supériorité ou de sentiment que tout lui est dû n’est en
fait pas réaliste ou tenable. À ce stade, le thérapeute peut suggérer une CP plus appropriée.
Par exemple, au lieu d’une CP défensive : « Je suis intouchable/incassable », le thérapeute
peut suggérer une CP plus réaliste : « Je sais me protéger moi-même. »
Au cours de la phase 6, il semble qu’il y ait moins de variations par rapport au protocole
habituel. Certains patients avec des traits narcissiques ont appris à dissocier certaines sen-
sations corporelles. Après les premières phases du protocole EMDR, ces derniers peuvent
se révéler plus ouverts et plus conscients. Par exemple, après la phase 4 et la phase 5, un
patient peut signaler plus de tension physique, de fatigue ou de faim (si la dissociation de la
faim faisait partie du « Faux Self » initial, comme cela peut parfois arriver chez les patients
anorexiques). Le thérapeute doit être conscient que ces sensations physiques sont peut-être
les manifestations d’éventuels nouveaux d’informations traumatiques qui s’ouvrent. Il faut
alors s’assurer que le patient est capable de contenir correctement toute informations qui
émergent avant de finir la séance.
Traiter les troubles narcissiques par la thérapie EMDR 465
Phase 7 : clôture
Il est souvent préférable de laisser une cible incomplète, et terminer une séance avec une
clôture appropriée et sûre, plutôt que de trop insister. Certaines cibles - tant les souvenirs
d’auto-idéalisation que les souvenirs de traumas ou de négligences - peuvent nécessiter
plusieurs séances. Outre les procédures de clôture habituelles, qui visent à apaiser des
tensions, il est recommandé de poser des questions spécifiques telles que : « Qu’est-ce que
vous avez compris ici, aujourd’hui, et qui peut vous aider ? » ou « Vous êtes sur le point de
partir aujourd’hui, de quoi aimeriez-vous absolument vous souvenir - quelque chose qui vous
serait vraiment utile ? »
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Phase 8 : réévaluation
Le patient présentant au départ une structure narcissique peut avoir besoin de temps et
des séances supplémentaires afin de consolider ce qu’il a appris ou découvert pendant les
séances consacrées au traitement des souvenirs. En une séance, le patient peut être capable
de développer une compréhension claire de la manière dont l’image excessivement positive
et idéalisée qu’il avait de lui-même représentait un problème pour atteindre ses objectifs. Par
ailleurs, le patient peut rencontrer un désinvestissement émotionnel par rapport au besoin
d’être supérieur ou au sentiment que tout lui est dû. Néanmoins, entre les séances, ces
patients peuvent revenir à des voies défensives ancrées depuis longtemps, dans leurs manières
d’être en relation avec autrui et de s’idéaliser. Il peut être nécessaire, à travers un nombre
de séances important, d’identifier et de cibler des événements supplémentaires qui sont à
l’origine ou à la base d’une auto-idéalisation inadéquate. Il peut s’agir de souvenirs variés :
Où à l’âge de 7 ans, l’enfant est dorloté ;
Où à l’âge de 9 ans il a des performances supérieures par rapport à un frère ou une sœur ;
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Le patient peut fournir différents aspects sur lesquels travailler, mais il est important de ne
pas s’égarer. Certains cas peuvent évoluer lentement, particulièrement ceux qui n’ont jamais
été en thérapie auparavant, et par conséquent, risquent, dans un premier temps, de ne pas
disposer d’une vraie identité centrale. Au fil du temps, tandis que nous retirons les armures et
les couches défensives, une forte conscience de « Voilà qui je suis vraiment ! » peut émerger.
Ces patients peuvent avoir besoin d’un travail de reconstruction après les séances de traite-
ment, où ils apprendront à regarder à l’intérieur de soi, reconnaître qui ils sont vraiment, et
comment fonctionner avec cette nouvelle compréhension qu’ils ont d’eux-mêmes. Lorsque ces
patients entrent en contact avec leur vrai soi, qu’ils n’ont plus leurs structures défensives
et pas encore de vraie identité, ils peuvent sentir leur état empirer. Il peut y avoir une
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période, après l’affaiblissement des défenses du « Faux Self », au cours de laquelle le patient
expérimente des sentiments de vide et d’absence de sens. Dans ces cas, il est très important
que le thérapeute aide le patient à comprendre que ces sentiments sont des vestiges post-
traumatiques d’abandons précoces pendant l’enfance et qu’ils sont généralement dénués de
réalité actuelle. Pendant cette partie de la thérapie, quand certains problèmes centraux sont
traités, il devient pertinent d’installer des patterns de prise en charge de soi qui deviendront
des référents utiles à reconstruire une nouvelle manière d’entrer en lien avec le vrai « soi. »
Le protocole de Développement et d’Installation de Ressources (DIR) peut être utile pour
créer et/ou renforcer les aspects adaptatifs et sains de la personnalité (par exemple, un
engagement empathique avec les autres). Il est essentiel que le thérapeute identifie et
apprécie les changements positifs du patient, et qu’il articule cette reconnaissance positive
avec le travail du difficile renoncement aux défenses anciennes ainsi qu’avec le ciblage plus
direct de souvenirs plus perturbants encore.
Une structure narcissique peut être la conséquence d’une conception de soi déformée et exagérément
idéalisée, qui en retour est le fruit de situations précoces nombreuses et différentes, dues à des
louanges excessives et une surprotection. Par ailleurs, cette conception de soi idéalisée est liée au
besoin de créer des défenses psychologiques afin d’empêcher la pleine émergence de souvenirs de
négligences et de violences sévères. Pour qu’un processus de thérapie EMDR efficace se mette en
place, il est nécessaire de comprendre le cheminement spécifique que chaque patient a du suivre
depuis la prime enfance jusqu’à sa vie d’adulte actuelle.
Un traitement efficace des troubles narcissiques implique : de faire activement écho à la conception
de soi du patient et la manière dont il perçoit le problème qui se présente ; d’ engendrer l’autoré-
flexion chez le patient pendant la phase de préparation ; d’identifier les nombreux évitements et les
impasses possibles, qui peuvent résulter d’une suractivation des défenses ; d’identifier et de traiter
les expériences fondamentales de non-soutien, négligences et traumatismes anciens qui peuvent
initialement avoir été dissimulées (c.-à-d. dont l’accès conscient a été bloqué) par les défenses ;
d’identifier et de corriger empathiquement les perceptions déformées que le patient a du thérapeute ;
et d’éviter des réactions contre-transférentielles non-thérapeutiques qui peuvent survenir chez le
thérapeute.
Traiter les troubles narcissiques par la thérapie EMDR 467
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