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La performance opérationnelle des systèmes de transport

collectif : pour une analyse microscopique des conditions


d’exploitation
Benoît Oillo
Dans Transports urbains 2021/1 (N° 138), pages 34 à 40
Éditions Groupement pour l'Étude des Transports Urbains Modernes
ISSN 0397-6521
DOI 10.3917/turb.138.0034
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La performance opérationnelle
BENOIT OILLO
Docteur en transport –

des systèmes de transport


Université Paris Est

RÉSUMÉ collectif : pour une analyse


microscopique des conditions
La performance
relative à l’exploitation
ou performance

d’exploitation
opérationnelle des
systèmes de transport
collectifs en milieu
urbain occupe une place
importante aussi bien
pour les usagers que Introduction
pour les opérateurs
de mobilité. En effet, La mesure de la performance du transport col- ou plus généralement collectif, à conduire le
cette approche de la lectif permet la mise en œuvre d’un processus cours d’une action vers l’atteinte d’un objectif
d’amélioration continue du service aussi bien ou devant lui permettre d’en évaluer le résultat.
performance englobe
pour les opérateurs que pour la clientèle.
notamment des De plus, l’utilisation d’un indicateur doit être
indicateurs traditionnels Le domaine du transport collectif en milieu associée aux éléments ayant un impact sur ce-
tels que la vitesse urbain dispose de différentes approches d’éva- lui-ci : les inducteurs. Addouche et al. (2005)
commerciale ou encore luation de la performance. Dans la pratique, on définissent un inducteur comme un facteur qui
la ponctualité/régularité. constate que la performance est multidimension- influe sur la performance d’une activité ou de
Un service rapide et nelle et ne prend du sens que dans le contexte tout un processus. Enfin, les résultats obtenus
fiable correspond à un dans lequel il est employé. (Salgado, 2013). Par par les indicateurs doivent être comparés à des
service qualitatif pour conséquent, la performance doit être définie normes fixes ou à des performances passées
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les usagers et garantit en vue d’être mesurée. Il paraît souhaitable de (Eboli et Mazzulla, 2012).
une maîtrise des coûts se rattacher à une définition particulière de la
performance pour ensuite choisir sa mesure Ce texte s’articule en cinq parties. Dans un pre-
pour l’opérateur. Cet
(Gauzente, 2000). mier temps, nous présentons quelques références
article propose une abordant le sujet de la performance du transport
vue d’ensemble des Certaines définitions nécessitent la mise en collectif. Ensuite, nous définirons la performance
différentes approches œuvre de solutions de mesures plus ou moins dite « opérationnelle ». Cette définition sera
de la performance praticables. La réalité des données et informa- accompagnée d’une description méthodolo-
du transport collectif tions disponibles vient contraindre la démarche gique qui repose sur le recueil et le traitement
en s’attardant plus de mesure. de données réelles de temps de parcours. Nous
particulièrement terminerons par une présentation de quelques
sur celle dite La mesure de la performance doit être associée résultats de désagrégation des temps de parcours
opérationnelle en à des indicateurs. Bonnafous et al. (2011) défi- au travers de trois cas d’étude correspondant
proposant une approche nissent un indicateur de performance comme une à trois types de TCSP différents, à savoir un
information devant aider un acteur, individuel BHNS, un tramway et un métro.
complémentaire qui
recourt à l’analyse
microscopique
des conditions
1. La performance du transport collectif :
d’exploitation. Cette une pluralité d’approches
démonstration repose
sur trois cas d’étude tous 1.1. La performance du service (AMF) ont publié un document regroupant
rattachés à la catégorie une liste d’indicateurs de performance (IGD et
TCSP. L’article discute Les différentes approches de la performance du AMF, 2008). Ce document a pour objectif de
de cette approche transport collectif se focalisent sur des critères mettre à la disposition des collectivités un outil
complémentaire afin variés tels que le la disponibilité du service, le de pilotage permettant de comparer l’évolution
confort, la propreté, la sûreté/sécurité, les tarifs, du service de transport public dans le temps
de l’enrichir et de
l’information voyageur, le service à la clientèle et avec d’autres réseaux. Cette approche de la
proposer un ensemble ou encore l’impact environnemental. Certaines performance correspond à une vision relative-
d’indicateurs normalisés de ces approches sont mesurées par des données ment large intégrant les notions précédemment
permettant ainsi quantitatives et d’autres par des mesures subjec- citées.
une classification du tives comme les sondages ou les enquêtes de type
niveau de performance « client mystère » (Eboli et Mazzulla, 2012). 1.2. La performance économique
des systèmes de
transport collectif. En 2008, l’Institut de la Gestion Déléguée Il existe des classifications d’indicateurs de per-
(IGD) et l’Association des Maires de France formance économique qui gravitent autour du

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rapport entre les ressources utilisées associées utilisés sont la vitesse commerciale, la ponctua-
à leur coût et à la production réalisée. On peut lité et la régularité du service.
citer par exemple Carter et Lomax (1992) ou
encore Vuchic (2007) qui listent des indica- L’analyse du temps de parcours et de ses déter-
teurs traditionnels de coût d’exploitation, coût minants fait également l’objet de recherches.
par kilomètre, coût par voyage… Ce rapport El-Geneidy et al. (2007) proposent un modèle
entre le capital « ressources » et la production de régression pour estimer le temps de parcours
peut également se définir comme une efficience d’un bus en exploitation en fonction de plusieurs
productive. déterminants comme par exemple les distances
inter-stations, le nombre de carrefours signalisés
Baumstark et al. (2005) distinguent une deu- et le nombre de passagers.
xième efficience qui met l’accent sur l’usage de
cette production (mesurée le plus souvent par À l’aide également d’un modèle de régression,
le taux d’utilisation, défini comme le nombre Leclerc et al. (2019) mesurent l’incidence de la
de voyages par véhicule-km). Cet indicateur configuration de différentes lignes de tramway
est largement utilisé par les opérateurs de sur la vitesse commerciale et sa variabilité. Cette
mobilité. étude propose de caractériser les inter-stations
selon une codification du SRMTG.
1.3. La performance de l’exploitation
ou performance opérationnelle De manière générale, les mesures de la perfor-
mance de l’exploitation reposent sur l’utilisation
Il existe également d’autres approches plus tech- de données de type AVL (Automated Vehicle
niques qui traitent de l’exploitation des systèmes Locators) et sont parfois accompagnées de don-
de transport. Les indicateurs traditionnellement nées APC (Automatic Passagers Counting).

2. La mesure de la performance opérationnelle


2.1 Une approche complémentaire plus longtemps pour permettre l’écoulement d’un
flux de voyageurs également plus important.
L’exploitation d’un système de transport exige
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de mettre en mouvement des mobiles avec des Dès lors, il est intéressant d’analyser les différents
caractéristiques propres (avec ou sans conduc- « temps » relatifs aux différents « états » des mo-
teurs) sur un itinéraire possédant lui aussi des biles sur leur itinéraire respectif. Cette analyse,
caractéristiques particulières. Les caractéris- qui correspond à une étude microscopique des
tiques relatives à un mobile peuvent être par conditions d’exploitation, a pour but de mieux
exemple ses dimensions, sa capacité ou encore comprendre le fonctionnement du système de
sa puissance d’accélération. Les caractéristiques transport et ses conditions d’exploitation et donc
relatives à l’itinéraire peuvent être la longueur d’appréhender la performance opérationnelle.
des inter-stations, le coefficient de sinuosité ou
encore la présence ou non de points spécifiques Nous définissons la performance opérationnelle
entre les stations. comme la recherche d’optimisation du niveau
fonctionnel du système de transport à l’aide
Lorsque les mobiles circulent sur leur itiné- de la désagrégation du temps de parcours afin
raire, ces derniers présentent une succession de d’identifier ses différentes composantes. Les
différents « états ». Les mobiles se déplacent, composantes du temps de parcours peuvent être
s’immobilisent entre les stations, s’immobilisent répertoriées selon leur degré d’« utilité » à l’ex-
en station et ouvrent leurs portes pour permettre ploitation. Certaines composantes peuvent être
le flux des voyageurs. On peut facilement ima- considérées comme « productives » et d’autres
giner qu’en fonction du type de mobile et de comme « improductives ».
l’itinéraire, les différents états varient dans leur
nature et leur proportion. On peut également Les composantes qui ne sont pas nécessaires au
imaginer que pour un même itinéraire, les dif- fonctionnement de l’exploitation (composantes
férents états de mobiles possédant les mêmes improductives), telles que les immobilisations
caractéristiques varient en fonction des heures entre les stations doivent être réduites au plus
de la journée (figure 1). près de zéro. La réduction de ces composantes
permet d’éliminer une éventuelle source de
En effet, l’activité urbaine, notamment la cir- variabilité, de diminuer le temps de parcours
culation des biens et des personnes, peut agir et donc d’augmenter la vitesse commerciale.
directement sur les conditions d’exploitation
des systèmes et donc sur les différents états des Les composantes nécessaires au fonctionne-
mobiles. Par exemple, les mobiles d’un système ment de l’exploitation (composantes produc-
de transport de surface circulant sur un itinéraire tives) telles que le déplacement des mobiles,
non protégé rencontrent des temps d’immobili- les temps en station avec les portes ouvertes ou
sation et de ralentissement plus importants lors fermées doivent être optimisées. L’optimisation
des périodes de pointe. Toujours pendant ces de ces composantes permet de conditionner le
heures de pointe, les mobiles ouvrent leurs portes niveau de variabilité. On peut imaginer que

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Comme nous l’avons spécifié, lors d’une course
les mobiles présentent différents états, à savoir
soit une action de déplacement soit une action
d’immobilisation. Ces différents états corres-
pondent à un temps spécifique qui est inclus
dans le temps de parcours. Nous proposons
ci-dessous une terminologie pour l’ensemble
des composantes du temps de parcours.

––Le temps de parcours (Temps de Parcours :


TP)
Cette composante correspond à la durée entre
la dernière fermeture de porte à la station de
départ et la dernière fermeture de porte à la
station d’arrivée.

––Le temps de roulage inter-stations (Temps


de Roulage : TR)
Cette composante correspond à la durée entre le
début du déplacement et la fin du déplacement
du mobile entre deux stations. Si plusieurs sé-
quences de déplacement se succèdent, alors le
temps de roulage total doit correspondre à la
cette optimisation permette, dans certains cas, somme des séquences de déplacement.
FIGURE 1. Des épisodes de de diminuer le temps de parcours et donc d’aug-
congestion inopinée (comme ici menter la vitesse commerciale. ––Le temps d’échange des passagers à chaque
dans le centre d’Amiens du fait
station (Echange Passagers : EP)
de travaux sur la bande réser-
vée aux autobus) peuvent affec- 2.2. Les données Cette composante correspond à la durée entre
ter la performance des trans- la première ouverture et la dernière fermeture
ports publics (photo P. Zembri). Les données de type AVL permettent, dans la des portes du mobile. Si plusieurs séquences
majorité des cas, de recueillir le temps de par- d’ouverture et fermeture se succèdent au niveau
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cours à l’échelle d’une inter-station. En fonction d’une station, alors le temps d’échange passagers
des caractéristiques de la solution utilisée, un total doit correspondre à la somme des séquences
niveau de désagrégation de la donnée de temps d’ouverture (figure 2).
de parcours est plus ou moins réalisable.
––Le temps d’attente en station pour chaque
Pour mesurer la performance opérationnelle station portes fermées (Attente en Station :
telle que nous la définissons, il est nécessaire AS)
de disposer d’une donnée de temps de parcours Cette composante correspond à la durée entre
désagrégée selon une terminologie définie. Par le début de l’immobilisation et la fin de l’im-
conséquent, nous proposons d’utiliser un autre mobilisation du mobile en station avec la tota-
type de données. Cette donnée peut être recueil- lité des portes fermées. Si plusieurs séquences
lie soit par des équipements embarqués dans les d’immobilisation se succèdent au niveau d’une
mobiles, soit par des équipements directement station, alors le temps d’attente en station total
doit correspondre à la somme des séquences
d’immobilisation.
Les composantes du temps de parcours sont répertoriées
selon leur degré d’« utilité » à l’exploitation. ––Le temps d’attente inter-stations aux feux
(Attente aux feux : AF)
Cette composante correspond à la durée entre
intégrés à l’infrastructure permettant la circu- le début de l’immobilisation et la fin de l’im-
lation des mobiles. Ces deux types de données mobilisation du mobile au niveau d’un feu. Si
font le lien entre les éléments fonctionnels et or- plusieurs séquences d’immobilisation se suc-
ganiques du système. Pour notre démonstration, cèdent au niveau d’un feu, alors le temps d’attente
nous utilisons des données issues d’une part du au feu total doit correspondre à la somme des
système de recueil DIALEXIS et d’autre part séquences d’immobilisation.
de la base de données EAS de Siemens.
––Le temps d’attente inter-stations aux points
2.3. La qualification des composantes singuliers (Attente aux points : AP)
du temps de parcours Cette composante correspond à la durée entre
le début de l’immobilisation et la fin de l’im-
Selon l’UITP (1988), le temps de parcours cor- mobilisation des mobiles au niveau d’un point
respond au « temps nécessaire à l’exécution d’une singulier. Nous entendons par point singulier
mission, applicable aux différents moments de la un caractère spécifique de l’itinéraire de type
journée, de la semaine et de l’année. Le temps rond-point, aiguille, signal de manœuvre…
de parcours d’une course est le temps nécessaire Si plusieurs séquences d’immobilisation se
à l’exécution de cette course ». succèdent au niveau du point singulier, alors

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le temps d’attente total doit correspondre à la
somme des séquences d’immobilisation.

––Le temps d’attente inter-stations hors points


(Attente en ligne : AL)
Cette composante correspond à la durée entre
le début de l’immobilisation et la fin de l’im-
mobilisation des mobiles sans point singulier.
Si plusieurs séquences d’immobilisation se
succèdent sans point singulier, alors le temps
d’attente en ligne total doit correspondre à la
somme des séquences d’immobilisation.

Par conséquent, nous proposons la formule


suivante :

TP = TR + EP + AS + AF + AP + AL

2.4. Les premiers indicateurs


retenus
Pour cette présentation des résultats, nous rete-
nons les indicateurs de performance opération- parcours est déterminé dans un contexte d’in-
nelle traditionnels que sont la vitesse commer- variabilité de chaque composante. FIGURE 2. Le temps
d’échanges passagers en sta-
ciale et le coefficient de variation du temps de
tion peut être variable selon
parcours. À cela nous ajoutons les parts relatives Ces indicateurs sont disponibles à l’échelle de le niveau de fréquentation.
des composantes, leur niveau de variabilité et l’itinéraire complet, pour certaines inter-stations Tramway de la ligne 3 de Bâle
leur niveau d’impact sur la variabilité du temps remarquables, pour l’ensemble de la journée et à l’arrêt St-Alban Tor (photo
de parcours. Le niveau d’impact sur le temps de pour les heures de pointe matin et soir. P. Zembri).
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3. Les résultats des différents cas d’étude
La mise en œuvre d’une analyse microscopique 30 stations, a un tracé assez sinueux. La ligne 1
des conditions d’exploitation pour trois TCSP relie le centre commercial et de loisirs Odysseum
différents doit être considérée comme une com- (partie Est de la ville) à la Mosson (partie Ouest
paraison inter-systèmes. de la ville) en traversant le centre-ville notamment
via les stations Gare Saint-Roch et Comédie.
Nous présentons ci-dessous uniquement des La ligne s’inscrit aujourd’hui dans un réseau de
résultats des indicateurs pour l’ensemble de tramway maillé qui possède de nombreux croise-
l’itinéraire. Nous donnerons quelques ordres ments de lignes et troncs communs. En 2014, ce
de grandeur des mêmes indicateurs à l’échelle système connaissait une fréquentation d’environ
d’une inter-station pour les systèmes de surface. 130 000 voyageurs jour en semaine scolaire avec
un ratio voisin de 19 voyageurs/km-véhicule.
3.1 Les cas d’étude La vitesse commerciale était de 18 km/h.

Les données ont été recueillies sur la ligne 4 La ligne A du métro de Toulouse est une diamé-
de BNHS de la ville de Nantes, la ligne 1 du trale d’environ 12 kilomètres reliant les parties
tramway de Montpellier et la ligne A du métro Nord-Est et Sud-Ouest de la ville et composée
automatique de type GoA41 de Toulouse. Toutes de 18 stations. La ligne débute sur le territoire
les mesures correspondent à l’année 2014 pour de la commune de Balma au niveau d’un centre
des jours de semaine scolaire. commercial (partie Nord de la ville). En 2014, ce
système connaissait une fréquentation d’environ
La ligne 4 de Nantes est une radiale de 7 km 196 000 voyageurs jour en semaine scolaire avec
comprenant 15 stations. Elle relie la cathédrale un ratio de 15 voyageurs/km-véhicule environ.
Saint-Pierre de Nantes à la Porte de Vertou au La vitesse commerciale était de 31 km/h.
sud-est de l’agglomération près du périphérique.
Lors de mesures effectuées en 2014, ce sys- 3.2 Les résultats des indicateurs
tème connaissait une fréquentation supérieure à
36 000 voyageurs jour en semaine scolaire avec Nous présentons ci-après les résultats des indi-
un ratio proche de 12 voyageurs/km-véhicule. La cateurs retenus pour l’ensemble des itinéraires
vitesse commerciale était de 21 km/h (figure 3). de chaque système. 1. L’UITP a défini quatre niveaux
d’automatisation pour les transports
La ligne 1 de tramway de Montpellier est une La première représentation graphique permet de guidés (Grades of Automation, GoA) qui
sont les suivants : GoA1, GoA2, GoA3
ligne diamétrale avec un itinéraire d’environ vérifier l’éventuelle hiérarchisation des systèmes et GoA4. Le niveau d’automatisation
15,8 kilomètres. Cette ligne, comprenant au travers de la vitesse et de la variabilité générale GoA4 est le plus élevé.

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Le graphique suivant (figure 5) permet de
constater que les composantes les plus impor-
tantes du temps de parcours sont le temps de
roulage et le temps nécessaire à l’échange des
passagers. Ces composantes peuvent également
être caractérisées comme « productives » car
nécessaires à l’exploitation. Le temps d’immo-
bilisation entre les stations est inexistant pour le
métro et très faible pour les systèmes de surface.
Le temps de parcours du tramway et le BHNS
intègrent la composante d’attente aux feux. La
faible part des composantes attente aux points
et attente en ligne est en relation avec la notion
de TCSP.

Un graphique (figure 6) permet de comparer les


niveaux de variabilité des composantes entre les
différents systèmes. Pour le métro, les compo-
santes attentes aux points, aux feux et en ligne
n’existent pas. De manière générale, les com-
posantes du métro sont plus stables que celles
du tramway. Les niveaux de variabilité les plus
importants concernent le BHNS. La composante
du temps de parcours. Si le coefficient de varia- principale, le temps de roulage, est la plus stable
FIGURE 3. La ligne 4 de tion classe les systèmes de manière logique et pour les trois systèmes. L’échange passagers et
Nantes ou Busway se carac- intuitive, la vitesse commerciale donne un classe- l’attente en station sont plus variables notamment
térise par une bonne vitesse
ment différent. Pour les deux systèmes de surface, pour les systèmes de surface. Les autres com-
commerciale mais aussi par une
charge élevée, ce qui a amené à cette vitesse doit être contextualisée, notamment posantes improductives montrent des niveaux
remplacer le matériel d’origine au travers de la sinuosité de la ligne. En effet, de variabilité élevés. Cela s’explique en partie
(vu ici à Porte de Vertou) par contrairement à la ligne de BHNS, l’itinéraire par de nombreuses valeurs à zéro dans les séries
des bi-articulés plus capaci- de la ligne de tramway étudiée est très sinueux. statistiques.
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taires (photo P. Zembri).

FIGURE 4. Coefficient de
variation du temps de parcours
et vitesse commerciale par
système.

FIGURE 5. Part relative des


composantes du temps de par-
cours pas système (en %).

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Le dernier graphique (figure 7) permet de visua-
liser l’impact d’une composante sur le temps de
parcours dès lors que cette dernière est invariable.
Lorsque certaines composantes deviennent in-
variables, alors le coefficient de variation du
temps de parcours diminue (valeur négative).
On constate que les composantes ayant un im-
pact fort indépendamment des systèmes sont
le temps de roulage et le l’échange passagers.
L’échange passagers est la composante la plus
impactante pour le métro et le BHNS. À l’échelle
de l’itinéraire complet, les composantes impro-
ductives ont un impact mineur sur la variabilité
du temps de parcours. On remarque également
une augmentation de la variabilité du temps
de parcours du système métro dès lors que la
composante attente en station est invariable.
Cela est probablement dû à l’autorégulation du
système métro GoA4.

3.3. Les résultats des indicateurs


à l’échelle de certaines inter-
stations remarquables
À l’échelle de l’inter-station, les résultats de ces
indicateurs montrent des valeurs très différentes.
La variabilité du temps de parcours peut avoi-
siner 30 % pour les systèmes de surface et les
parts relatives des composantes improductives
peuvent être supérieures à 15 % avec un niveau
de variabilité élevé. Par conséquent, les com-
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posantes les plus impactantes sur la variabilité
du temps de parcours et la vitesse commerciale
peuvent être des composantes improductives.

Nous avons également observé que la part de


l’échange passagers pouvait être supérieure à
30 % avec des niveaux de variabilité élevés. avec des praticiens, les différents inducteurs de
Cette situation n’est pas observée à l’échelle la performance opérationnelle. FIGURE 6. Coefficient de varia-
tion par composante et par
de l’itinéraire.
système.
Cette cartographie des inducteurs de la per-
3.4. Proposition d’inducteurs formance opérationnelle est organisée est trois
de la performance opérationnelle parties. La première regroupe tous les éléments
organiques du système, la deuxième les éléments FIGURE 7. Impact des com-
Nous proposons de lister, au travers de nos ré- fonctionnels et la troisième enfin l’interface posantes sur la variabilité du
sultats, d’observations terrain et de discussions voyageur. temps de parcours (variation
du coefficient de variabilité du
temps de parcours global).
Conclusion
Cette analyse microscopique inter-systèmes per- l’environnement du système de transport et son
met de constater qu’à l’échelle de l’itinéraire niveau de performance opérationnelle.
complet, la part relative des composantes du
temps de parcours est sensiblement identique La mobilisation d’autres analyses microscopiques
indépendamment des systèmes. Le temps de relatives à l’itinéraire complet devrait permettre de
roulage et l’échange passagers sont des compo- vérifier la hiérarchie des niveaux de performance
santes majeures et également les plus impactantes des systèmes et donc de proposer des normes pour
sur le temps de parcours. Toujours à la même les indicateurs retenus. Cela s’applique pour des
échelle, les composantes improductives sont comparaisons inter- et intra-système. La finalité
mineures et impactent peu le temps de parcours recherchée pourrait reposer sur la mise à disposi-
global. tion d’un cadre permettant de qualifier la bonne
ou la mauvaise performance d’un système.
À l’échelle de l’inter-station, nous avons pu ob-
server des situations très différentes. Les compo- En ce qui concerne l’échelle de l’inter-station,
santes improductives peuvent devenir majeures chaque cas doit être contextualisé et comparé
et donc fortement impacter le temps de parcours. à des mesures de même type (intra-système
Ce constat permet de faire un lien précis entre par exemple) ou passées (ante/post) afin de

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déterminer ou non les éventuelles progressions La prise en compte de cette performance du
FIGURE 8. Proposition de des différents indicateurs retenus. transport collectif devrait permettre d’une part
classification des inducteurs de
d’améliorer les systèmes existants au travers de
la performance opérationnelle.
La mesure de performance opérationnelle à l’aide la planification de l’exploitation et des aména-
de l’analyse microscopique s’applique également gements de l’aspect organique du système et
au système non TCSP qui représente une part d’autre part la prise en compte d’éléments pour
importante de l’offre actuellement proposée par l’évolution et la création de nouveaux systèmes
les opérateurs. de transport collectif.

Références
Addouche, S., Dafaoui, E. M. et El Mhamedi, Gauzente, C. (2000). «Mesurer la perfor-
A. (2005). Identification des relations entre in- mance des entreprises en l’absence d’indica-
ducteurs et indicateurs de performance des pro- teurs objectifs : quelle validité ? Analyse de la
cessus d’entreprise. Conception et Production pertinence de certains indicateurs ». Finance
Intégrées. Casablanca (Maroc), 17 p. Contrôle Stratégie, vol. 3, n° 2, pp. 145-165.
Baumstark, L., Ménard, C., Roy, W. et Yvrande- IGD et AMF (2008). Charte des services publics
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40 Transports urbains n° 138 (avril 2021)

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