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Frère Claude. Les couvertures de Paris-Match. In: Communications, 1, 1961. pp. 194-201;
doi : https://doi.org/10.3406/comm.1961.926
https://www.persee.fr/doc/comm_0588-8018_1961_num_1_1_926
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Les couvertures de Paris-Match
569 — 5 mars Margaret d'Angleterre photographiée par son fiancé.
570 — 12 mars Tremblement de terre d'Agadir.
571 — 19 mars Krouchtchev : voyage en France ajourné.
572 — 26 mars Madame Nina Khrouchtcheva.
573 — 2 avr. Présenté par sa maman : Andrew d'Angleterre.
574 — 9 avr. La nouvelle « Gigi ».
575 — 16 avr. De Gaulle et Elizabeth d'Angleterre (au 2e plan : Mme de Gaulle
et Philip d'Edimbourg).
576 — 23 avr. Eric Peugeot, le petit kidnappé de Saint Cloud."
577 — 30 avr. Tony Armstrong Jones.
578 — 7 mai Margaret d'Angleterre (peinture).
579 — 14 mai Mariage de Margaret d'Angleterre.
580 — 21 mai Danièle Darrieux.
581 — 28 mai Jeanne Moreau et son fils convalescent.
582 — 4 juin Brigitte Bardot.
583 — 11 juin Sophia Loren.
584 — 18 juin Margaret d'Angleterre et Tony en voyage de noces.
585 — 25 juin Lollobrigida, son mari et son fils s'installent au Canada.
586 — 2 juil. De Gaulle-F. Abbas : négociations ?
587 — 9 juil. Dominique Claudel « fiancée » de Victor-Emmanuel de Savoie ?
588 — 16 juil. Annette et Nathalie Vadim.
589 — 23 juil. Au Congo la chasse aux Blancs.
590 — 30 juil. Diane de France épouse le duc de Wurtemberg.
591 — 6 août Sacha Distel à Saint-Topez.
592 — 13 août Jeanne Moreau symbolisant le Verseau (zodiaque).
593 — 20 août Annouschka « fiancée » de Karim Aga Khan.
594 — 27 août Francis Powers, le pilote américain, à la veille de l'ouverture de
son procès à Moscou.
595 — 3 sept. Ouverture des Jeux olympiques à Rome (flamme olympique).
596 — 10 sept. Les dieux du stade (un sauteur : Don Bragg).
597 — 17 sept. Paola de Liège, presque reine.
598 — 24 sept. Fabiola de Mora-Aragon, future reine des Belges.
599 — 1 oct. Fiançailles Baudouin-Fabiola à Ciergnon.
600 — 8 oct. Cheval Charlottesville, favori du sweepstake.
601 — 15 oct La reine de Siam à Paris.
602 — 22 oct. Farah Diba à l'heure de son destin (va-t-elle donner à l'Iran
l'héritier qu'il attend ?).
603 — 29 oct. Fabiola de Mora-Aragon chez elle.
604 — 5 nov. Le berceau de l'héritier d'Iran.
605 — 12 nov. Le prince Reza-Cyrus d'Iran.
606 — 19 nov. Les Kennedy (Jack, Jacqueline et Caroline).
607 — 26 nov. Clark Gable (mort de).
608 — 4 déc. Les Jones (Tony et Margaret) font bande à part.
609 — 10 déc. Elizabeth Taylor.
610 — 17 déc. Fabiola par le peintre Pasqualini.
611 — 24 déc. Mariage Baudouin de Belgique-Fabiola de Mora.
612 — 31 déc. Famille royale d'Iran (Shah, Farah Diba, Reza).
Quel visage a donc eu, pour Paris-Match, l'année 1960 ? Tout d'abord, si
l'on peut dire, visage humain.
En effet, sur 52 des 53 couvertures, figure au moins un personnage humain,
qu'il soit célèbre, ou anonyme comme lorsqu'il s'agit d'un événement de portée
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1. Parmi les personnages représentés, le pourcentage est de 57,97 % pour les femmes,
pour les hommes de 42,03 %. Ceci nous semble plutôt être l'effet du hasard que relever
d'un dessein délibéré.
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nymes, dont la valeur bien sûr symbolique ne nous fait cependant pas oublier
les grands absents : Lumumba ou M. H.
Et si, d'autre part, nous saisissons aisément la raison pour laquelle Caryl
Chessman ne figure pas en couverture alors que, à notre avis, son exécution
dépasse en importance les amours de Margaret, nous pouvons nous demander
pourquoi la convalescence du fils de Jeanne Moreau prime l'échec de la
Conférence au sommet, pourquoi l'installation de Lollobridgida au Canada estompe les
troubles politiques au Japon, pourquoi le vol des bijoux de Sophia Loren relègue
au deuxième plan la mort de Boris Pasternarok. Pour plusieurs raisons dont les
lecteurs ne nous donnent pas la moindre :
Vivent les Princesses : Comme bon nombre de vos lectrices je suis très heureuse de
voir les familles royales, les princesses, mais ne mettez pas trop en valeur leurs divorces.
Faites ressortir ce qui est bien. Et merci pour Fabiola. Quel couple sans histoire, sans
scandale ! Quelle fraîcheur ! Qu'on en est heureux !...
Nous sommes toujours heureux de voir la reine Elizabeth et les détails de sa vie
m'intéressent beaucoup. Margaret aussi. Continuez ! (Mme Arkly, Caen, Match n° 622).
Il est certain que tous les lecteurs ne partagent pas cet avis. Les lettres
« contre » les familles royales et les vedettes sont aussi nombreuses :
Trop de rois : ... le succès crée des obligations. Je reproche trop de place aux familles
princières, au « rois » des affaires dont on cherche en vain comment ils contribuent au
bonheur des hommes, et pas assez de place aux modestes qui font vraiment la grandeur
et l'honneur de l'humanité (J. R. adjoint au maire de R.).
Certes. Mais que proposent ces lecteurs afin de varier les sujets ?
« Deux numéros dont la couverture n'est pas consacrée à une vedette quelconque.
Un troisième numéro illustré par le portrait d'un sportif, voilà qui met une heureuse
diversité dans vos couvertures (Emery, Argenteuil, Match 622).
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de Lisieux. Par contre, silence quasi total quant aux articles politiques
pauvrement illustrés.
Il faut noter à cet égard que, d'après une enquête privée, 20 % des lecteurs
ne consacrent à Paris-Match qu'une demi-heure hebdomadaire et 49 % moins
de deux heures, ce qui ne leur donne pas le temps matériel de déchiffrer
intégralement le magazine (d'après la même enquête quatre heures sont nécessaires).
Nous pouvons donc en conclure que ces lecteurs se limitent essentiellement
aux reportages photographiques et ne font que parcourir, quand ils ne les sautent
pas purement et simplement, les articles de fond. Les sujets « légers », les
informations qui peuvent se transmettre par l'entremise d'une ou plusieurs photos
(un accident lors d'une course automobile, le petit somme de M. Kennedy dans
l'avion qui le ramène à Washington, le regard de Margaret au nouveau-né)
ont donc toutes les chances d'être privilégiés, par Match. De .plus, leur brièveté
permet aussi leur accumulation dans un même numéro contrairement aux textes
longs, denses et parfois indigestes qui tentent de faire le point de la situation
politique. Un autre lecteur règle d'ailleurs lui-même la question du choix des
sujets :
« Trop de B.B. ? Pas assez de princesses ou vice-versa ? On demande à un journal
l'actualité. Votre tirage doit tout de même prouver que vous ne faites pas faussé route. »
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deux de moins de trente ans (3 %). Enfin, neuf enfants (huit garçons et une fille)
viennent encore accentuer le caractère de jeunesse inhérent à Paris-Match.
Dans la même optique nous pouvons noter que les sexagénaires ne sont pas
présentés en tant que « personnes âgées » mais en tant que « sages » (de Gaulle),
ou en tant qu! « éternellement jeunes » (Clark Gable).
De toute façon, quel que soit l'âge du personnage, son aspect physique est
toujours avenant, soit par la régularité de ses traits comme c'est le cas pour les
vedettes du spectacle, soit par la noblesse de son maintien comme c'est le cas
pour les rois, reines ou princes, soit encore par la vive personnalité qui se dégage
de tout son être comme c'est le cas pour les grands politiques (de Gaulle). Ses
vêtements sont toujours de bon ton, somptueux quand les circonstances l'exigent
(mariage princier, réception officielle), parfois très simples (les Khrouchtchev),
mais jamais négligés. Pas de clochards, pas de mines patibulaires à ce pinacle
qu'est la couverture de 'Paris-Match, mais des êtres séduisants, exceptionnels,
des héros... Naturellement, ces êtres exceptionnels ne peuvent, en fin de compte,
vivre une vie vulgaire. Et- voici que Paris-Match, de grand magazine
d'actualités, se mue en quelque journal du cœur féminin pour nous conter « Cendrillon »
ou « Riquet à la Houppe ».
Il était une fois un roi triste dans un pays brumeux. Rien ne pouvait le faire
sourire. Jusqu'au jour où il rencontra une fille du soleil. Ils se marièrent... Cinq
couvertures nous exposent l'affaire en détail a) la fiancée, la nouvelle Astrid,
Dona Fabiola de Mora y Aragon ; b) les fiançailles à la bonne franquette et le
sourire de Baudouin ; c) le flash-back : la douce fiancée nous emmène dans le
palais de son enfance ; d) le portrait pour la galerie de Laeken ; e) la consécration,
la happy end, le mariage en grande pompe.
Il était une fois — il ne s'agit ici que d'une historiette, vu sa pauvreté en
rebondissements — une fille de roi (détrôné, mais qu'importe) qui tomba amoureuse
d'un beau jeune homme. Elle dit : « Je l'épouserai, même s'il est roturier. »
Par chance, c'était le duc de Wurtemberg. Aussi Diane de France convola-t-elle
sans tarder, avec, sur son voile de mariée, le diadème historique (une couverture).
Il était une fois une princesse mélancolique dans le « fog » et les Highlands.
Sa sœur, la terrible reine, avait brisé une fois son cœur au profit du devoir.
Mais l'amour repassa sous les traits d'un photographe. Lassée, la sœur céda.
Et la princesse Margaret épousa Cendrillon. En cinq couvertures.: a) Margaret
et. son secret (l'amour) ; b) le secret : Cendrillon-Tony ; c) « S.A.R. la princesse
Margaret d'Angleterre », portrait pour Buckingham ; d) la mariée ; e) Honey
Moon.
Il était une fois un empereur dont le chagrin était de n'avoir point de fils.
Il se morfondait dans son palais des Mille et une Nuits. Ses émissaires fouillèrent
le monde afin de lui ramener une épouse. Enfin, à Paris, ils découvrirent une jeune
fille dotée de toutes les qualités. Le shah l'épousa sans tarder et elle lui donna
aussitôt l'héritier espéré. Cinq couvertures : a) le mariage ; b) l'attente ; c) le
berceau ; d) la victoire : le petit prince ; e) portrait de famille.
Nous pourrions continuer longtemps. Il reste les romans de Victor- Emmanuel
de Savoie et Dominique Claudel, de Don Juan et Maria- Gabriella, les gestations
de Fabiola et Margaret, etc.
Le même phénomène se produit en ce qui concerne les vedettes du spectacle.
Nous pouvons raconter de la même façon le mariage de Brigitte Bardot et de
Jacques Charrier, la naissance de leur fils Nicolas, les fiançailles de Sacha Distel,
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