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RIMRAP Maraîchage

Accompagner la transition agroécologique


de coopératives féminines en Mauritanie
COPCO

Récolte de tomates dans une coopérative féminine à Sélibabi, appuyée par le projet. Crédit : RIMRAP COPCO / MLK

Chiffres-clés
 755 femmes
 12 coopératives équipées, 8
accompagnées techniquement le long
du projet.
 5,49 ha cultivés (dont 2,64 ha de
maraichage et 2,85 ha de cultures
fourragères marafalfa) avec une surface
moyenne de 0,7 ha par coopérative
accompagnée.
 Coopératives féminines en activité
depuis 3 à 20 ans

La faible pluviométrie enregistrée sur l’ensemble du En 2021, ces 12 coopératives ont été équipées en
territoire national pour l’hivernage 2020 a entrainé matériel horticole et en infrastructures de base
une soudure précoce dans le sud-est du pays. (système d'exhaure et clôture) par les ONG
partenaires du projet (Adicor, GRADD et Au
Pour pallier les défis en termes de sécurité Secours). Huit ont reçu un appui technique sur le
alimentaire et contribuer à la résilience locale, le long terme en vue d'améliorer leurs pratiques, de la
projet de « Renforcement institutionnel en préparation du sol àla récolte, pour une production
Mauritanie vers la résilience agricole et pastorale agroécologique.
Covid post Covid » (RIMRAP/ COPCO), financé par
l’Union européenne et mis en œuvre par l’IRAM, est Grace à leur engagement et à l’accompagnement
à l’initiative d’un soutien technique et matériel au duprojet, les femmes de ces huit coopératives ont
niveau de douze coopératives maraîchères pu mener à bien la campagne maraichère 2021. Ce
réparties entre leHodh El Garbi, le Hodh el Chergui, bulletin reprend le déroulement de cette
l’Assaba et le Guidimakha. campagne, le bilan de la production, les enjeux et
les succès de ces coopératives.
Diversité de la production
Les cultures maraichères pratiquées par les coopératives
bénéficiaires du projet dans le sud-est de la Mauritanie
sont choisies par les membres de chaquecoopérative en
fonction des exigences pédoclimatiques (sol, climat,
disponibilité de l’eau), despréférences alimentaires, de la
résistance contre les ennemis des cultures et de la
demande des marchés.

La production maraichère cumulée des huit coopératives


suivies par le projet est dominée par l’oignon qui
représente 79% de la surface cultivée totale(production
totale estimée à 54,9 tonnes) puis la tomate avec 7%, la
carotte, l’aubergine, choux, la betterave, le navet et
laitue qui représentent ensemble 13% de la production.

Les coopératives d’El Aioun, Djikké et Saabely dans la


Wilaya de Guidimakha, produisent 90% de la production
totale. Ceci s’explique par le nombre important
d’adhérents actifs dans les coopératives citées, la
superficieemblavée, la qualité des sols et la disponibilité
de l’eau.
Répartition de la production par spéculation
(surfaces cultivées)

Période de la production
La plupart des coopératives ont démarré la campagne maraichère début novembre avec la distribution des
semences du projet. Certaines coopératives avaientdémarré début octobre, comme El Aioune à Sélibaby avec
la laitue, le navet et les oignons, ou encore celle de Rahma Zamala à Kiffa avec les aubergines.

Les coopératives ont fait la campagne maraichère en deux saisons (cf. calendrier cultural ci-dessus) :
• La saison froide, de mi-octobre à mi-mars ;
• La contre-saison, de mi-mars à fin septembre.

Les coopératives qui ont accès à l'eau tout au long de l'année (source fleuve ou forage) arrivent à produire
jusqu'au mois de septembre avec des spéculations adaptées à la période comme le piment, le gombo et
l’aubergine. Cependant, les essais de production en contre saison d’autres spéculations comme la tomate
ont échoué à cause de la chaleur et du vent (l’harmatan), malgré les dispositions prises pour y faire face
(moustiquaire notamment).
Vers l’intensification agroécologique :
Points clés de l’accompagnement technique des coopératives

1. Economiser et valoriser les semences


• Semis direct
Le semis direct consiste à semer les graines après la préparation du sol
(aménagement et délimitation du terrain, planage, fumure de fond,
etc.). Le semis direct peut se faire à la volée ou en ligne. Dans le cadre
de notre accompagnement, les semis directs ont été faits en ligne afin
de faciliter certaines opérations d’entretien (sarclage, binage et
désherbage, éclaircissage). Ce type de semis a été pratiqué pour les
carottes, navets et betteraves.

Au total 41,8Kg de semences • Le semis en poquet


certifiées issues de maisons agréées Le semis en poquet consiste à déposer 3 à 5 graines à intervalles
ont été distribuées aux coopératives réguliers (entre 40 et 50 cm). Cette technique assure un espacement
féminines bénéficiaires. Le type de identique entre tous les plants, ce qui facilite le désherbage et la
spéculation est choisi par lees rationalisation de l’eau. Les coopératives utilisent le semis en poquet
bénéficiaires ; la quantité distribuée pour les tomates, les choux, les aubergines et le poivron.
est déterminée en fonction de la
surface à cultiver et du mode de • Semis en pépinière
semis (direct et en pépinière) pour Il s'agit de faire des semis dont les plants ont vocation à être repiqués
chaque spéculation. ailleurs, ultérieurement. Cette technique permet de semer de nombreux
légumes sur un petit espace pour ensuite les repiquer. Elle permet de
Plusieurs types de semis sont créer un espace plus favorable dans un espace réduit pour les plants.
pratiqués par les coopératives en Cette technique est utilisée pour les tomates, l’aubergine, le piment
fonction de la spéculation à semer. et laitue.

Production de semences

Durant cette campagne les coopératives de Wompou et Moulissimo,


ont produit des semences de laitue, un premier pas vers l’autonomie
semencière des coopératives pour les prochaines campagnes.

2. Economiser l’eau
Pour assurer l’accès à l’eau, les coopératives
ont bénéficié d’un appui matériel. En fonction
des besoins de la coopérative, il s’est agi de 2
motopompes pour pomper l’eau du fleuve vers
les bassines de réception dans les parcelles
(pour les coopératives proches du fleuve) et
l’équipement de 6 points d’eau avec des
systèmes de pompage solaire (pour celles qui
s’alimentent en eau partir des eaux
souterraines).

Des bassins de réception ont été construits


pour permettre l’irrigation (par gravité ou par
système californien) et l’arrosage manuel.

Sur les sols limoneux ou argileux, les coopératives pratiquent le repiquage des spéculations comme tomates, choux,
aubergines, avec un intervalle de 0,4 m en évitant les planches pour que l’apport d’eau soit localisé afin de mieux gérer
la ressource.

Durant la contre saison où la disponibilité de l’eau est faible, d’autres techniques ont été adoptées par les coopératives
pour économiser l’eau : la réduction des superficies exploitées, les techniques de cultures intercalaires pour couvrir le
sol et la culture de spéculations à faible besoins en eau comme le gombo.
3. Gérer l’enherbement

Pour la lutte contre les adventices, plusieurs techniques sont


pratiquées par les coopératives :

• Sarclage : une technique qui consiste à ameublir le sol et à couper


les herbes indésirables présentes dans une culture.
• Le binage : Cette technique n'a pas seulement pour objet de
détruire les mauvaises herbes ; son principal but est de rendre
le sol perméable à l'air et aux rosées.
• Le paillage : une technique qui consiste à étendre sur le sol un
matériau organique qui va, à plus ou moins long terme, se
décomposer.

4. Limiter la pression des maladies et des ravageurs


Plusieurs techniques de luttes contre les
ennemis des cultures ont été pratiquées.

* L’utilisation des solutions de feuilles


de neem comme biopesticide.

* La mise en place de moustiquaires


(hors période de pollinisation) : les
moustiquaires sont recommandées dans
le cadre de protection des cultures
(pépinières) contre certains insectes
(sautereaux). Grace à leur transparence,
les plantes profitent de la lumière, de l’air
et se développent correctement.

* Les associations et rotations de cuture : l’association culturale consiste à repiquer des spéculations ayant un cycle
très court (précoce) à l’intérieur des autres spéculations dont le cycle est long. C’est le cas de laitue repiquée à
l’intérieur des planches d’oignons et de choux. Pour la rotation, il a été recommandé aux coopératives de ne pas
maintenir la même succession de spéculations sur la même superficie chaque année ou deux ans de suite.Cette rotation
obéit à des règles par rapport à la famille des légumes, sachant que les plantes n’utilisent pas toutes les mêmes
éléments nutritifs du sol. Exemple de rotation : salade (feuilles) — haricot (légumineuse) qui améliore le sol ; carotte
(racine) — tomate (fruit) ; betterave (racine) — piment (fruit).

5. Gérer la fertilité des sols

Pour assurer la fertilité des sols sans le recours aux engrais chimiques, les coopératives ont pratiqué des techniques
biologiques en utilisant les produits locaux. Il s’agit essentiellement du compostage.

Ce processus de transformation (décomposition) de


matières organiques d’origine végétale et animale en
présence d’eau et d’air conduit à l’obtention du
compost, humus stable utilisé comme matière
fertilisante. C’est un processus de fermentation qui
peut s’effectuer toute l’année dans des conditions
contrôlées de température et d’humidité.

L’objectif est d’améliorer la fertilité du sol à partir de


fertilisants organiques disponibles localement, rendre
les éléments nutritifs facilement disponibles pour la
plante, ce qui lui permet une croissance vigoureuse et
une bonne résistance aux ravageurs et maladies.
Cette technique a permis aux coopératives de
valoriser la fumure organique.
Modalités de l’accompagnement

Tout au long de la campagne, huit coopératives


ont bénéficié d’un accompagnement technique
assuré par trois conseillers locaux. Leurs visites
hebdomadaires sur chacun des sites ont permis
d’accompagner les pratiques des membres et de
répondre à leurs interrogations, en abordant
notamment des points comme :

* L’itinéraire cultural et la technique


d’éclaircissage
* La valorisation de la consommation des
légumes par des démonstrations culinaires
* L’intérêt de l’adoption du règle-ment intérieur
de la coopérative

Au-delà de cet appui régulier, des formations ponctuelles ont été organisées :

 Techniques de séchage, de transformation et de conservation des légumes


Cette formation visait à doter les coopératives d’un savoir-faire et des compétences technique en matière de
conservation et de transformation des produits maraichers, nécessaires pour contribuer à la réduction des pertes des
produits maraichers.

 Fabrication de fertilisant liquide


Les membres des coopératives ont bénéficié d’une formation sur les techniques de réalisation du biol, fertilisant orga-
nique liquide, préparé à base de fumier frais de vache, de sucre, de lait frais, de cendres, de légumineuses fraîches et
de levures.

 Fabrication de biopesticides
Cette fabrication des biopesticides à base du Neem a été réalisée au profit des coopératives maraichères et utilisée
dans les traitements curatifs et préventifs au niveau des coopératives d’après les conseillers agricoles.

 Gestion administrative et financière


Le projet a mis en place un ensemble d’outils pour les accompagnateurs afin d’appuyer les coopératives dans leur gestion
quotidienne (cahier d’adhésion, livre de caisse, Inventaire du matériel et intrant, Registre des dettes, des ventes,de
récolte). Il s’agit ici de trouver l’équilibre pour chaque coopérative en fonction de son habitude de gestion et pousser
un peu les bonnes pratiques sans mettre en place des choses décontextualisées afin de s’assurer de l’appropriation par
les membres en dehors des exigences du projet.

Ifra Diop, accompagnant technique


pour le RIMRAP COPCO, auprès des
coopératives au Guidimakha :

« Au-delà des semences, le principal intérêt


qui ressort clairement après la récolte de
février-mars, c’est la formation, l’appui
technique, autant dans la phase pré-
productrice, que post-productrice.
Pour la phase de préproduction, il a fallu les
convaincre que l’engrais naturel était aussi
efficace, avec moins d’effets négatifs, que
l’engrais chimique.

Elles sont convaincues depuis quelques semaines ! (rires) Surtout en constatant que leurs productions ont
globalement augmenté au niveau de toutes les semences ! Une production importante dont une partie
pouvait pourrir auparavant ; mais elles développent avec cet appui des capacités de conservation de leurs
légumes notamment. »
Mise en semis de pépinière à Disky-2.

L’eau revient souvent comme la préoccupation majeure des


coopératives maraîchères appuyées. A Disky-2, 2 puits sont actifs, 2
autres en finalisation, avec un système d’exhaure.

Récolte à Moussilomo, dans le Guidimakha.


Les femmes de la coopérative de Disky-2, dans l’Assaba.

Le 4ème puits en finalisation à Disky-2. A « Djikké » dans le Guidimakha.


PERSPECTIVES
Grace à une prolongation du contrat de financement, le projet pourra financer l’appui à huit nouveaux sites
qui sont en phase d’identification avec les Ministères de l’Agriculture et de l’Elevage. Ils seront au nombre
de 2 par région. La poursuite de l’accompagnement des sites actuels est en cours de discussion afin
d’identifier précisément les besoins adaptés à chaque site.

Diariatou Coulibaly, présidente de la coopérative de « Djikké » à Wompou au Guidimakha :


« Avant cet appui technique, nous ignorions par exemple les différents types de semis selon les légumes à planter. Aujourd’hui je
sais que la profondeur des semis est importante, cruciale même, pouvant aller de graines à la surface, à 5mm ou 3 cm de profondeur
selon le plant en préparation.

Ce sont de « petites actions » qui demandent beaucoup de rigueur et dont on voit immédiatement les conséquences : notre
dernière campagne est très satisfaisante à nos yeux, dans le sens où tous les membres de la coopérative ont pu avoir des oignons,
destomates et des carottes, dans des proportions plus importantes que durant les précédentes récoltes. Ils ont ainsi pu en vendre
davantage et générer plus d’argent pour d’autres postes de dépenses à pourvoir dans leurs foyers.

Mais nous avons encore des progrès à faire notamment dans la fabrication d’engrais naturels ; avant la formation, nous mettions de
l’engrais chimique sur nos légumes. La dernière campagne est 100% bio en ce sens ! »

* Tout ce travail a été rendu possible par les ONG partenaires (ADICOR, GRADD, AU SECOURS) qui ont pu à
temps réaliser les infrastructures de base (Exhaure, clôture) et la distribution du matériel horticole pour les différents
sites bénéficiaires du projet RIMRAP-COPCO pour le bon déroulement de la campagne maraichère.

** Document réalisé avec le soutien financier de l’Union européenne, cependant son contenu n’engage pas sa
responsabilité.

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