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française
Synchronie - diachronie
• On peut étudier la langue selon deux dimensions
temporelles:
• Synchronie (la langue à un moment donné, avec ses différences
dialectales, langue des jeunes, langue populaire, spécialisée, etc.)
VARIATION
• Diachronie (comparaison et évolution entre deux «états»
synchroniques de la langue) CHANGEMENT
Diachronie
• Situation de diglossie: les élites utilisent un latin que les masses populaires ne comprennent plus
(langue haute, à cause de sa prononciation, entre autres); le peuple parle une langue désormais très
différente (langue basse ou « vernaculaire »). Dans les faits, la population ne comprenait plus le
discours de l'Église ni celui du pouvoir royal.
Concile de Tours (813)
• Constatant la difficulté pour le peuple de comprendre
la Parole de Dieu et, plus encore, la prédication des
prêtres, les différents chapîtres monastiques et le
concile des évêques ordonnèrent de prêcher en langue
romane
• […] ut easdem omelias quisque aperte transferre studeat
rusticam Romanam linguam aut Theodiscam, quo facilius
cuncti possint intellegere quae dicuntur (Tours, canon 17)
• Trad.: Et que chacun s’efforce de transposer clairement
lesdites homélies en langue romane rustique ou en tudesque,
afin que tous puissent plus facilement comprendre ce qui est
dit
• Rustique: « des illettrés » ou « des campagnes »
• On considère que c’est la date de naissance du français
(proto-français)
Les Serments de Strasbourg (842)
• Charlemagne meurt en 814, son fils, Louis le Pieux, meurt en 840
• Ses petits-fils se disputèrent l'Empire: Lothaire (795-855), Pépin
(803-838) et Louis (805-976), puis tardivement, d'un second lit,
Charles (823-877)
• Division territoriale en trois « bandes », ratifiée par le traité de
Verdun, en 843.
• En attendant, Charles le Chauve et Louis le Germanique
scellèrent une alliance contre leur frère aîné, Lothaire, par les
Serments de Strasbourg (842).
• Serment prêté en présence et dans la langue des soldats de
l’autre
• Le texte est contenu dans l’œuvre latine de Nithard (cousin de ces
trois princes)
• Premier témoignage écrit en protofrançais
• L’écriture est modelée sur le latin (le roman ne s’écrivait pas à
l’époque, il fallait inventer une graphie)
Texte 1:
Texte 2: Texte 6:
latin classique Texte 3:
latin populaire français contemporain
(ler siècle) roman original (842)
(VIIe siècle) Pour l'amour de Dieu et pour le salut
Per Dei amorem et per christiani po Pro deo amur et pro christian poblo et
Por deo amore et por chrestyano poblo et commun du peuple chrétien et le nôtre,
puli et nostram commumem salutem, nostro commun saluament d'ist di en
nostro comune salvamento de esto die en à partir de ce jour, autant que Dieu
ab hac die, quantum Deus scire et avant, in quant Deus savir et podir me
avante en quanto Deos sabere et podere me m'en donne le savoir et le pouvoir, je
posse mihi dat, servabo hunc meum dunat, si salvarai eo cist meon fradre
donat, sic salvarayo eo eccesto meon fradre soutiendrai mon frère Charles de mon
fratrem Carolum, et ope mea et in Karlo, et in aiudha et in cadhuna cosa, si
Karlo, et en ayuda et en caduna causa, sic aide et en toute chose, comme on doit
quacumque re, ut quilibet fratrem cum om per dreit son fradra salvar dift, in
qomo omo per drecto son fradre salvare justement soutenir son frère, à
suum servare jure debet, dummodo o quid il mi altresi fazet et ab
devet, en o qued illi me altrosic fatsyat, et ab condition qu'il m'en fasse autant, et je
mihiidem faciat et cum Clotario nullam Ludhernulplaid nunquam prindraiqui
Ludero nullo plagdo nonqua prendrayo, qui ne prendrai jamais aucun arrangement
unquam pactionem faclam, quæ mea meon vol cist meon fradre Karle in damno
meon volo eccesto meon fradre Karlo en avec Lothaire, qui, à ma volonté, soit au
voluntate huic meo fratri Carolo sit.
damno seat. détriment de mon dit frère Charles.
damno sit.
Traité de Verdun (843)
• Le traité divisa le royaume de Charlemagne en trois États:
• Charles II (dit «le Chauve»): la Francie occidentale (ce qui
deviendra la France)
• Louis Ier (dit «le Germanique»): la Francie orientale ou Germanie
• Lothaire Ier: la Francie médiane à l'est du Rhône, c'est-à-dire la
Lotharingie (dont le nom se transformera plus tard en Lorraine),
ainsi que la couronne impériale
• Charles II fut le premier «roi de France» (843-877) — il parlait le
francique rhénan —, mais son règne fut marqué par les premières
incursions des Vikings/Normands (856-861).
• Après la mort de Lothaire (855): guerres de conquête entre France et
Germanie et démembrement c’est à cette époque que remonte
l’invasion des Vikings, devenus les Normands
• 987 : fin de la dinastie des Carolingiens
• Hugues Capet, duc de France (Paris et ses environs), est élu roi (987-
996)
Autres documents du proto-
français
• Gloses de Reichenau (VIIIe siècle): ce n’est pas un
texte mais un glossaire traduisant en langue
vulgaire les termes difficiles de la Vulgate
• Cantilène de Sainte Eulalie (882): hymne retraçant
la vie d’une martyre chrétienne: premier texte
littéraire en roman
• Sermon sur Jonas (Fragment de Valenciennes 938-
952) partiellement rédigé en proto-français
Cantilène de Sainte Eulalie
1. Buona pulcelle fut Eulalia ;
2. Bel avret corps, bellezour anima.
3. Voldrent la veintre li Deo inimi ;
4. Voldrent la faire diavle servir.
5. Elle non eskoltet les mals conselliers,
6. qu'elle Deo raniet chi maent sus en ciel.
7. Ne por or ned argent ne paramenz,
8. Por manatce, regiel, ne preiement,
9. Neule cose non la povret omque pleier
10. La polle sempre non amast lo Deo menestier ;
11. Et por o fut presentede Maximiien,
12. Chi rex eret a cels dis sovre pagiens .
13. El li enortet, dont lei nonq chielt,
14. Qued elle fuiet lo nom chritiien.
15.Ell' ent adunet lo suon element.
16. Melz sostiendreiet les empedemetz
17. Qu'elle perdese sa virginitet.
18. Por o s'furet morte a grand honestet.
19. Enz en l'fou la getterent, com arde tost.
20. Elle colpes non avret, por o no s'coist.
21. Aczo no s'voldret condreidre li rex pagiens ;
22. Ad une spede li roveret tolir lo chief. 1. Eulalie était une bonne jeune fille ;
23. La domnizelle celle kose non contredist, 2. Son corps était beau, son âme plus belle encore.
24. Volt lo seule lazsier, si ruovet Krist. 3. Les ennemis de Dieu voulurent la vaincre,
25. In figure de colomb volat a ciel. 4. Et lui faire servir le Diable.
26. Tuit oram que por nos degnet preier, 5. [Mais] elle n'écoutait pas les mauvais conseillers
27. Qued avuiset de nos Christus mercit 6. [Qui voulaient] qu'elle renie Dieu qui demeure au ciel.
28. Post la mort, et a lui nos laist venir 7. Ni pour de l'or, ni pour de l'argent ou des parures,
29. Par souue clementia. 8. Ni pour des menaces, des caresses ou des prières,
9. Nulle chose ne pouvait forcer (plier)
10. La fille à toujours n'aimer le service de Dieu.
11. Et pour cela, elle fut présentée à Maximien,
12. Qui était en ces jours-là le roi des païens,
13. Il l'exhorte, sans qu'elle y prête attention
14. [à ce] Qu'elle fuie le nom chrétien.
15. Elle en rassemble ses forces.
16. Mieux [valût ?] qu'elle soutînt les tortures,
17. Qu'elle ne perdît sa virginité.
18. Pour cela elle mourrait en grand honneur.
19. Ils la jetèrent dans le feu pour qu'elle y brûle.
20. Elle était sans pêché et pour cela ne brûla pas.
21. À cela, le roi païen ne voulut croire,
22. Avec une épée, il ordonna de lui trancher la tête.
23. La demoiselle ne contredit pas cela,
24. Et accepta de quitter ce monde, si le Christ l'ordonnait.
25. Sous la forme d'une colombe, elle monta au ciel.
26. Tous prions que pour nous [elle ?] daigne prier,
27. Que le Christ nous ait en sa pitié,
28. Après la mort, et qu'à lui il nous laisse venir
29. Par sa clémence.
Sermon sur Jonas
Périodisation du français
• Ve-IXe siècle: gallo-roman ou protofrançais
• IXe-XIIIe siècle: Ancien français
• XIVe-XVe siècle: moyen français
• XVIe-XVIIIe siècle: français classique
• Fin XVIIIe-aujourd’hui: français moderne
Ancien français
IXe-XIIIe siècle
Quelques traits de l’ancien
français
• Des poèmes tels que la Vie de Saint Léger (Xe
siècle), la Vie de Saint Alexis (XIe siècle) ou la
Chanson de Roland (XIe siècle) montrent déjà une
langue à l’identité bien définie
• Présence d’une déclinaison à deux cas (Cas Sujet et
Cas Régime): principalement pour les noms
masculins
Les articles
Numération
• Nombres de 1 à 16: système romain
• 17, 18, 19: formation populaire (dix+sept, dix+huit,
dix+neuf)
• Noms des dizaines: les formes latines (viginti, triginta,
quadraginta etc.) sont concurrencées par le système
vicésimal des Normands (XIIe siècle). On retiendra la
forme quatre-vingts, tandis que soixante-dix et quatre-
vingt dix sont des formes populaires (60+10, 80+10).
• Les formes septante, huitante et nonante seront encore
longtemps en concurrence dans de nombreuses régions
Verbes
• Création du futur et du conditionnel à partir de
formes du latin populaire
• Futur latin : cantabo, -is…> l’érosion phonétique efface
le morphème temporel
• Refection avec l’infinitif + des formes du verbe habeo:
cantare habeo> cantaraio>chanterai
• De même, pour le conditionnel: cantare habebam>
cantara(v)a(m)> chanterois> chanterais
• De nombreux changements de conjugaison
• Ex. IR: aveuglir, colorir, sangloutir, toussir
Phrase: l’ordre V2
• Ordre relativement libre du latin (fonctions grammaticales
marquées par les terminaisons des mots: désinences
flexionnelles), avec verbe souvent à la fin
• Ordre plus rigide des langues romanes, qui n’ont plus de
déclinaison syntaxe positionnelle – ordre SVO
• Influence probable des langues germaniques sur le français
place rigide pour le verbe (2eme position)
• Si la phrase commence par un mot autre que le sujet, celui-
ci se place après le verbe
• EX. des Serments de Strasbourg: SI SALVARAI EO cist meon fradre
Karlo (de même, je viendrai en secours de mon frère Charles)
• Ex. De la Vie de Saint Alexis: BONS FUT LI SECLES al tens ancïenur
(Le monde fut bon au temps passé)
Prononciation
• Grande abondance de sons non fonctionnels: ils vont se
réduire progressivement
• 33 voyelles (aujourd’hui: 16):
• de nombreuses voyelles et diphtongues nasales
• Toutes les lettres sont prononcées beaucoup de diphtongues et
triphtongues (aujoud’hui, p. ex EAU [ɔ], en a.fr. [eaw])
• Palatalisation des consonnes C, G, J et Z
• Cire [tsirə], place [platsə]
• Riche [ritchə], chief [thcijef]
• Argile [ardjilə], jambe [djambə]
• Marz [marts], raizon [raidzon], treize [treidzə]
• Disparition (y compris dans la graphie) des h aspirés initiaux
(ils seront réintroduits pour marquer l’étymologie ou pour
bloquer la liaison)
Des Carolingiens aux Capétiens
• A l’époque des Carolingiens, le système féodal se répand: le roi lie
les vassaux par la concession de fiefs
• Base très locale
• Fermeture de la communauté
• Développement de dialectes autonomes
• Pouvoir royal très limité le français est en réalité le francien (dialecte
de l’île de France)
• 987: Louis V, dernier roi carolingien, meurt sans héritier direct
élection d’un nouveau roi
• Hugues Capet (surnom dû à la «chape»), comte de Paris
• Il est encore «roi des Francs», mais c’est le premier qui parle la langue
romane et pas le francique
• Avec lui, la transmission du pouvoir est héréditaire et non plus élective
• Il essaie de rétablir le pouvoir royal sur le territoire
• Il fixe son siège à Paris (avant, les rois se déplaçaient)
• Il faudra attendre 1119 pour qu’un roi (le Capétien Louis VI le
Gros) se déclare «roi de France» (dans une lettre adressée au
pape)
Le français en Angleterre
• Liens importants des Normands avec l’Angleterre (commerces)
• 1002: Emma, la fille du duc de Normandie, est mariée au roi
d’Angleterre
• 1066: A la mort du roi Edouard le Confesseur, Guillaume le Conquérant
revendique la couronne d’Angleterre batailles
• 1066: bataille de Hastings (environ 7000 hommes et 1400 navires):
Guillaume gagne la bataille et tue le roi Harold II le duc de
Normandie et roi d’Angleterre est plus puissant que le roi de France
• Cour et langue française:
• 20000 Normands s’installent en Angleterre
• Toute l’élite est remplacée par des Normands
• Le franco-normand (ou anglo-normand) devient la langue de l’administration,
de la loi et de la justice
• Le français se répand même chez l’aristocratie
• 1152: Henri II épouse Aliénor d’Aquitaine: plus vaste territoire européen
• 1259: Henri III d’Angleterre renonce à la Normandie séparation
progressive des deux langues (anglais et français)
Exemples du remplacement de mots
du vieil anglais par des mots français
• vieil anglais ea « rivière » (vieux norrois ā) ≠ anglais river, emprunt à
l'anglo-normand rivere, variante de l'ancien français riviere
• vieil anglais earm « pauvre » (allemand arm) ≠ anglais poor, emprunt à
l'anglo-normand pore (normand paur, dialectal pour)
• vieil anglais ierfe « héritage » (allemand Erbe) ≠ anglais heritage,
emprunt à l'anglo-normand ou à l'ancien français heritage
• vieil anglais lyft « air » (allemand Luft) ≠ anglais air, emprunt à l'anglo-
normand air
• vieil anglais hæleð / helið « héros » (allemand Held) ≠ anglais hero
emprunt au moyen français hero, heroes ou directement au latin heros
• vieil anglais here-toga « chef, général » (allemand Herzog « duc ») ≠
anglais chief, general, (duke), emprunts à l'anglo-normand ou à l'ancien
français
• vieil anglais ðeod, ðiod « peuple, nation, tribu » (allemand deut-sch),
folc, même sens (allemand Volk) ≠ anglais people, nation, tribe
Diffusion progressive du français
• A partir du XIIe siècle, production littéraire
abondante: chansons de geste, chansons de
trouvère, fabliaux, contes, ouvrages historiques,
biographies de saints, traductions de la Bible
• Vers la fin du XIIIe siècle, Louis IX (Saint Louis)
élargit son pouvoir territorial grâce à ses victoires
militaires les fonctionnaires sont bilingues
(français – patois) agents de diffusion du français
• Sous Philippe le Bel (neveu de Louis IX),
l’administration de la justice se fait en français
La France à la mort de Louis IX
(1270)
Production littéraire de l’ancien
français
• Littérature courtoise, produite par les jongleurs (troubadours et
trouvères) (les « lais »): Marie de France (années 1160-1180).
• Chanson de geste: Chrétien de Troyes (années 1160-1180): Lancelot ou
le Chevalier de la charrette, Yvain ou le Chevalier au lion.
• Tristan et Iseut (l’une des premières versions est celle de Béroul, vers
1180). Au XIIIe siècle, versions en prose (1230)
• Roman de Renart (1174-1250): contes (parodie de la chanson de geste
et des romans courtois)
• Fabliaux
• Littérature historique: Geoffroy de Villehardouin (La conquête de
Constantinople, 1207-1213); Jean de Joinville (Livre des saintes paroles
et bons faits de notre saint roi Louis)
• Rutebeuf (deuxième moitié du XIIIe siècle): abandon de la poésie
courtoise et évolution vers une poésie réaliste (son successeur le plus
connu sera Villon, au siècle suivant)
Moyen français
XIVe-XVe siècle
Guerre de Cent Ans et Peste
• XIV et XV siècle sont une période obscure pour la
France, à cause des guerres et des maladies
• 1328: Charles IV (dernier des Capétiens) meurt sans
héritier. Le roi d'Angleterre (Edouard III) prétend lui
succéder au trône de France, mais Philippe VI de Valois
(qui régna de 1328 à 1350) fut préféré par les princes
français (1337).
• Commence alors la guerre de Cent Ans (1337-1453), qui
suscite des conflits innombrables épisode de Jeanne
d’Arc (libération d’Orléans, 1429)
• Ravages dans les campagnes famine, peste
• La séparation de France et d’Angleterre aboutit à établir
l’anglais en Angleterre, le français en France
Le français se répand
• Pendant cette période, où les dialectes sont très forts, le
français se répand, porté par les opérations militaires, qui
favorisent le brassage des populations et des troupes, y
compris au Sud.
• 1490: Charles VIII émet une ordonnance imposant le
français dans les tribunaux
• 1539: François Ier, dans l’ordonnance de Villers-Cotterêts,
rendra l’emploi du français obligatoire dans toute
l’administration et la justice (éviction du latin administratif)
• L’enseignement universitaire à la Sorbonne exerce une
influence très forte sur les élites européennes (la moitié des
étudiants viennent de l’étranger)
• Double bilinguisme: latin-français (classes dominantes) et
français-patois (peuple)
Changements dans la langue
• Réduction des diphtongues et triphtongues voyelles simples
• L’orthographe, quant à elle, se complique et a tendance à garder
la trace des anciennes prononciations
• oiseau, peau, fou, fleur, cœur, saoul
• On introduit le h à l’initiale pour distinguer U et V (huitre vs vitre; huis
vs vis)
• Introduction de la cédille
• Accents sur les voyelles (^, ˊ, ˋ)
• Perte de la déclinaison et fixation de l’ordre SVO
• Diffusion du pronom ON comme substitut de NOUS
• Régularisation de la conjugaison
• Latinisation de la langue (surtout pour les disciplines
scientifiques): à côté des mots existants, on emprunte un grand
nombre de latinismes savants (on calcule qu’à l’époque,
seulement 2% de la population pouvait lire)
La Renaissance
Débuts du français classique
XVI siècle
Guerres d’Italie, Réforme,
découvertes
• Pendant une soixantaine d’années (1494-1559), se déroulent
plusieurs batailles entre la France (François Ier) et l’empire
germanique (Charles V).
• Italomanie: l’Italie, bien en avance par rapport à la France,
influence l’art, l’architecture, la science, l’art militaire…
• Catherine de Médicis épouse Henri II (1533) et fait venir de
nombreux intellectuels italiens. Elle continue d’exercer son
influence pendant sa régence et le gouvernement de ses fils
• La réforme se base sur l’accès aux Écritures en langue nationale
(vs église catholique qui utilise le latin) les Calvinistes et les
Huguenots font la promotion du français comme langue du culte
guerres de religion (1562-1598; édit de Nantes, 1598)
• Explorations: François Ier envoie Jacques Cartier pour fonder un
empire colonial découverte du Canada (1534), mais pas
d’implantation jusqu’au siècle suivant
François I er (1515-1547)
• Il poursuit les guerres d’Italie, promeut les explorations en
Amérique et réprime la réforme protestante
• 1539: ordonnance de Villers-Cotterêts rendant le français
langue juridique, administrative et judiciaire
• 1530: fondation du Collège Royal (qui deviendra le Collège
de France): enseignement en français de nombreux
intellectuels et écrivains (Guillaume Budé, Robert Estienne)
• 1538: fondation de l’Imprimerie Nationale – diffusion des
œuvres en français (face à l’interdiction de l’Eglise qui
n’admettait que le latin)
• Il protège les hommes de lettres (Clément Marot, Claude
Chappuys). Sa soeur, Marguerite de Navarre, écrit
l’Heptaméron et protège à son tour Rabelais
• Mécène: il fait venir Léonard de Vinci
Ordonnance de Villers-Cotterêts
• 110. Que les arretz soient clers et • [110. Afin qu'il n'y ait cause de
entendibles et afin qu'il n'y ayt cause douter sur l'intelligence des arrêts
de doubter sur l'intelligence desdictz de nos cours souveraines, nous
Arretz, nous voullons et ordonnons voulons et ordonnons qu'ils
qu'ilz soient faictz et escriptz si soient faits et écrits si clairement,
clerement qu'il n'y ayt ne puisse qu'il n'y ait ni puisse avoir
avoir aulcune ambiguite ou ambiguïté ou incertitude, ni lieu à
incertitude, ne lieu a en demander demander interprétation.
interpretacion.
• 111. Nous voulons que doresenavant • 111. Nous voulons donc que
tous arretz, ensemble toutes aultres dorénavant tous arrêts, et
procedeures, soient de noz courtz ensemble toutes autres
souveraines ou aultres subalternes procédures, soient de nos cours
et inferieures, soient de registres, souveraines ou autres
enquestes, contractz, commisions, subalternes et inférieures, soient
sentences, testamens et aultres des registres, enquêtes, contrats,
quelzconques actes et exploictz de testaments et autres quelconques
justice ou qui en deppendent, soient actes et exploits de justice ou qui
prononcez, enregistrez et delivrez en dépendent, soient prononcés,
aux parties en langaige maternel enregistrés et délivrés aux parties
francoys et non aultrement. en langage maternel françoys et
non autrement.]
Du Bellay et la Pléïade
• 1549: Du Bellay publie La Deffence et Illustration de la
Langue Francoyse
• Paru 10 ans après l’ordonnance de Villers-Cotterêts
(reconnaissance envers François Ier qui a fondé le Collège de
France et une bibliothèque royale)
• Défense du français comme langue de la littérature
• Nécessité d’introduire de nouveaux mots, mais en les
adaptant au français
• Possibilité d’égaler les Anciens par l’imitation de leurs formes
littéraires
• Avec d’autres poètes (dont Ronsard, le fondateur), il fait
partie de la Pléiade (1553), mouvement poétique visant
à rendre le français autonome du latin, afin de le
répandre.
Défense et illustration de la
langue française
• Et qui voudra de bien près y regarder, trouvera que notre langue française n'est
si pauvre qu'elle ne puisse rendre fidèlement ce qu'elle emprunte des autres ; si
infertile qu'elle ne puisse produire de soi quelque fruit de bonne invention, au
moyen de l'industrie et diligence des cultivateurs d'icelle, si quelques-uns se
trouvent tant amis de leur pays et d'eux-mêmes qu'ils s'y veuillent employer.
Mais à qui, après Dieu, rendrons-nous grâces d'un tel bénéfice, sinon à notre feu
bon roi et père François premier de ce nom, et de toutes vertus ? Je dis premier,
d'autant qu'il a en son noble royaume premièrement restitué tous les bons arts
et sciences en leur ancienne dignité : et si a notre langage, auparavant scabreux
et mal poli, rendu élégant, et sinon tant copieux qu'il pourra bien être, pour le
moins fidèle interprète de tous les autres. Et qu'ainsi soit, philosophes,
historiens, médecins, poètes, orateurs grecs et latins, ont appris à parler
français. Que dirai-je des Hébreux ? Les saintes lettres donnent ample
témoignage de ce que je dis. Je laisserai en cet endroit les superstitieuses
raisons de ceux oui soutiennent que les mystères de la théologie ne doivent être
découverts, et quasi comme profanés en langage vulgaire, et ce que vont
alléguant ceux qui sont d'opinion contraire. Car cette disputation n'est propre à
ce que j'ai entrepris, qui est seulement de montrer que notre langue n'a point
eu à sa naissance les dieux et les astres si ennemis, qu'elle ne puisse un jour
parvenir au point d'excellence et de perfection aussi bien que les autres,
attendu que toutes sciences se peuvent fidèlement et copieusement traiter en
icelle, comme on peut voir en si grand nombre de livres grecs et latins, voire
bien italiens, espagnols et autres traduits en français par maintes excellentes
plumes de notre temps.
Lexicographes et Grammairiens
1539: Robert Estienne publie le Dictionnaire Francois latin contenant les motz et manieres de
parler françois tournez en latin (9000 mots français, chacun suivi d'une définition en latin; la
seconde édition passera à 13 000 entrées).
1530: John Palsgrave publie Lesclaircissement de la langue françoyse (en anglais).
Précédemment, les grammairiens écrivaient en latin.
Il introduit la terminologie française: adjectif, conjonction, adverbe, conjugaison, terminaison,
etc.
1550: Louis Meigret: Tretté de la grammaire francoeze, fet par Louis Meigret Lionoes.
Première grammaire en français. Tentative d’introduire une orthographe phonétique
(symboles nouveaux). Meigret est le premier à utiliser les adjectifs français et française (au
lieu de françois/françoise) pour désigner la langue.
1578: Honorat Rambaud publie La Declaration des Abus que l'on commet en escrivant Et le
moyen de les euiter, & de représenter nayuement les paroles: ce que iamais homme n'a faict,
où il propose à son tour une réforme de l’orthographe basée sur les sons prononcés (24
nouvelles lettres, alphabet de 52 lettres). – Peu d’influence. On préfère garder une
orthographe étymologique, dont l’avantage c’est qu’elle est immuable
1562: Gramere de Pierre de la Ramée (Petrus Ramus), sous la forme d’un dialogue
pédagogique entre un maître et son élève. Il a proposé des réformes grammaticales avec la
distinction de la lettre u et de la lettre v (confondues à cette époque), ainsi que des trois «e» :
e, é (accent aigu) et è (accent grave).
Page de la
grammaire
d’Honorat
Rambaud
Accueil de mots nouveaux
• Les mots nouveaux sont surtout des italianismes (on en
compte plus de 8000 à l’époque)
• Riz, porcelaine, galerie, trafic, brigand, police, arsenal,
escrime, banque, cavalier, infanterie, violon, ballet, ombrelle,
Pommade, balcon, gondole, sorbet, sérénade, appartement,
opéra, coupole, violoncelle, piano, mandoline
• Il y a aussi des mots issus des découvertes des colonies
• Pépite, mélasse, nègre, savane, cannibale, chocolat, tabac,
caramel, sieste, cigare, tomate, aubergine, cacahuète, maïs,
cacao, ananas, mandarine, avocat, coyote, abricot, pastille,
vanille
• Parallèlement, il y a une grande vogue des latinismes,
avec la création de «doublets» savants de mots
populaires
Ecrivains
• C’est à partir de cette époque qu’il y a une
production importante en français
• Poésie: Pierre de Ronsard, Clément Marot, Joachym
Du Bellay, François Malherbe
• Prose: François Rabelais, Michel de Montaigne
Le Grand Siècle
Français Classique
XVIIe siècle
Le pouvoir royal
• Henri IV (1553-1610): Absolutisme royal (1589-1610)
• 1598: Edit de Nantes, donnant la liberté de culte aux
protestants et mettant un terme aux guerres de religion
• 1601-1643 : Louis XIII avec le cardinal de Richelieu pour
principal ministre (1610-1640: Régence de Marie de
Médicis) renforcement de l’autorité royale (monarchie
absolue)
• 1638-1715: Louis XIV (Roi-Soleil), (1643-1651: Régence
d’Anne d’Autriche) – Ministre Cardinal Mazarin, puis Colbert
expansion territoriale en France et à l’extérieur
• Imposition du français dans les actes officiels et comme
langue de l’école
• Très grand prestige de l’armée mais puissance navale
modeste (45 bateaux à la mort du roi)
L’Académie française et la
standardisation de la langue
• 1634: Richelieu crée l’Académie française (sur le modèle de l’Accademia
della Crusca)
• Sa mission (assignée par lettres patentes de Louis XIII): travailler à
« donner des règles certaines à notre langue et à la rendre pure,
éloquente et capable de traiter les arts et les sciences »
• Instrument: faire un dictionnaire, une grammaire, une rhétorique et une
poétique
• le Dictionnaire de l'Académie française (première édition publiée en
1694) – 17500 entrées
• Le dictionnaire va retenir ou rejeter les mots de la langue et fournir ainsi
un « standard » normatif à diffuser
• Français « idéal », pas de description du français réel peu suivi
• Temps de composition très long: la neuvième édition, commencée en
1986, est actuellement arrivée à la lettre S
• La Grammaire de l’Académie française ne sera publiée qu’en 1935
Dictionnaire de l’Académie 1694
• Préface
C'est dans cet estat [de perfection] où la Langue
Françoise se trouve aujourd'huy qu'a esté composé ce
Dictionnaire; & pour la representer dans ce mesme estat,
l'Académie a jugé qu'elle ne devoit pas y mettre les vieux
mots qui sont entierement hors d'usage, ni les termes des
Arts & des Sciences qui entrent rarement dans le
Discours; Elle s'est retranchée à la Langue commune,
telle qu'elle est dans le commerce ordinaire des
honnestes gens, & telle que les Orateurs & les Poëtes
l'employent; Ce qui comprend tout ce qui peut servir à la
Noblesse & à l'Elegance du discours."
Avant l’Académie: Jean Nicot
• Thresor de la langue françoyse tant
ancienne que moderne, auquel entre
autres choses sont les mots propres
de marine, venerie et fauconnerie
(1606) de Jean Nicot et Aimar de
Ranconnet
• Premier dictionnaire entièrement en
français (sans passer par le latin)
• Classement des mots par familles et
non par ordre alphabétique
• Etiquettes d’usage données par des
phrases entières (non pas « vulg. »
mais « sonne toujours mal
[beuverie]»)
• Indications sur le «bon usage»
Autres lexicographes
• 1680: Dictionnaire françois contenant les mots et les choses,
publié à Genève par César-Pierre Richelet (1626-1698) –
environ 20 500 entrées. Il admet les mots bas (populaires)
• 1690: Dictionnaire universel d'Antoine Furetière (1619-
1688), publié aux Pays-Bas, à La Haye.
• Ce dictionnaire comprend les termes dialectaux, les mots «bas» et
les termes scientifiques.
• Précurseur: ouvrage de type encyclopédique (articles parfois très
longs)
• 45000 mots, considéré comme le meilleur dictionnaire du XVIIe
siècle
• Il inspira les rédacteurs de l’Encyclopédie
• 1704: Dictionnaire Universel François & Latin dit de Trévoux
Dictionnaire de Richelet 1680
• Avertissement
J'ai fait un Dictionnaire François afin de rendre quelque service aux
honnêtes gens qui aiment notre Langue. Pour cela j'ai lu nos plus excellens
Auteurs, & tous ceux qui ont écrit des Arts avec réputation. J'ai composé
mon livre de leurs mots les plus-reçus, aussi-bien que de leurs expressions
les plus-belles. […]
En faveur des Etrangers, on a ajouté aux mots, & aux phrases des bons
Ecrivains le genre de chaque nom avec la terminaison féminine des
adjectifs, & l'on en a donné des exemples. On a expliqué les diverses
significations d'un même mot, […]
Pour rendre l'ouvrage encore plus-utile, on y fait entrer les termes
ordinaires des Arts, & presque toutes les remarques qui jusques ici ont été
faites sur la Langue. On montre le diférent usage des mots, leur aplication
dans les divers stiles, & la maniere dont on les doit prononcer lorsqu'ils ne
se prononcent pas comme ils s'écrivent.
Dictionnaire de Furetière (1690
posthume)
• Préface
Mais pour Mr. Furetiere, il ne s'est pas proposé les termes
du beau langage, ou du stile à la mode, plus que les
autres. Il ne les a fait entrer dans sa Compilation que
comme des parties du tout qu'il avoit enfermé dans son
dessein. De sorte que le langage commun n'est icy qu'en
qualité d'accessoire. C'est dans les termes affectez aux
Arts, aux Sciences, et aux professions, que consiste le
principal. Outre cela, l'Auteur a declaré publiquement,
qu'il ne pretendoit rien à la fonction speciale et
essentielle de Messieurs de l'Academie; Qu'il ne donnoit
son Dictionaire que comme provisionnel, […] et qu'il ne
pretendoit rien decider sur la langue.
• Furetière, Préface du
Dictionnaire
Les Grammairiens
• Le XVIIe siècle est le siècle des «Remarqueurs» (>100): des auteurs qui font de
la grammaire sous forme de «remarques» sur des points spécifiques, litigieux.
Ouvrages peu systématiques, à la différence des grammaires structurées
• Notion de «bon usage»: on sélectionne un usage (celui de la cour) et on le
propose comme modèle pour tous les Français visée normative
• Claude Fabre de Vaugelas (1585-1659), publia en 1647 les Remarques sur la
langue française
• Considéré comme le grammairien le plus important de l’époque, c’est lui qui a introduit la
notion de bon usage:
• « Le mauvais se forme du plus grand nombre de personnes, qui presque en toutes
choses n'est pas le meilleur, et le bon au contraire est composé non pas de la
pluralité, mais de l'élite des voix, et c'est véritablement celui que l'on nomme le
maître des langues. Voici donc comment on définit le bon usage : c'est la façon de
parler de la plus saine partie de la Cour. »
• 1660: Grammaire de Port-Royal (Antoine Arnault et Claude Lancelot:
Grammaire générale et raisonnée contenant les fondemens de l'art de
parler, expliqués d'une manière claire et naturelle). Grammaire élaborée à
l’intérieur du courant janséniste à l’usage des jeunes. Il s’agit d’une grammaire
philosophique, qui aura beaucoup d’influence sur Chomsky, au XXe siècle
Vaugelas, Remarques
Grammaire de Port-Royal 1660
La préciosité
• Mouvement artistique / mode littéraire qui a introduit des changements dans la
langue
• Origine: des rencontres de dames dans leur chambre à coucher, puis dans des
salons, pour discuter, lire des poèmes etc.
• Moquées par Molière dans Les Précieuses ridicules (1659)
• Lexique: chasse aux mots «bas» (sonorités ou sens désagréables, vulgaires etc.)
et introduction de néologismes ou de périphrases métaphoriques «nobles»
• Expressions qui ont subsisté: châtier la langue (la surveiller), billet doux (message
d’amour), le mot me manque (ne pas savoir quoi dire), être brouillé avec quelqu’un
(fâché), avoir de l’esprit (humour), briller dans la conversation (trouver de bons mots),
féliciter qqn., enthousiasmer, incontestable, furieusement (très), s’encanailler, pommade,
…
• Expressions abandonnées: « le conseiller des grâces » (miroir), « le visage de l’âme »
(discours), « donner dans l’amour permis » (se marier), « les miroirs de l'âme » (yeux),
importamment (de manière importante)
• Orthographe: simplifications retenues par l’Académie (suppression de lettres
non prononcées, réduction des graphèmes pour un même phonème)
• P. ex. autheurs auteurs ; respondre répondre, aisné aîné
Le français classique
• Simplification de la langue
• Lexique appauvri
• Langue raffinée, élégante
• Ordre rigoureux et strict imposé par la Cour, ordre
social, formes de politesse dans la conversation et dans
la correspondance
• Mots nobles vs mots populaires, réalistes; interdiction
des proverbes dans les textes littéraires
• Exclusion des termes techniques, des mots de la
science
• Vocabulaire de l’honnête homme : précision
sémantique
Changements instables
• Langue écrite: assez semblable au français actuel (les textes nous
sont directement accessibles sans traduction)
• Beaucoup de lettres non prononcées (vostre votre, maistre
maître, mesme même, je dist je dis…). Distinction
inexistante entre V et U. V au début du mot (VNE – VNIS – VIN), U
à l’intérieur (NOUS DEUONS, ESCRIUAIN)
• Prononciation aristocratique vs populaire:
• chute des consonnes finales (aristocratique): mouchoi, plaisi, couri,
ifaut, i(l)s ont [izont], not(r) [not] (mouchoir, plaisir, courir, il faut, ils ont,
notre [notre])
• Suppression du «e» dans des mots comme désir, désert, secret
(prononcés [dzir], [dzèr], [skrè])
• prononciation de l'ancienne diphtongue oi (prononcé [we] ou [wɛ]):
moi [mwe], toi, [twe], roi [rwe], croire [krwɛr], boire [bwɛr], François
[franswɛ] (prénom et nom de peuple). Imparfait et conditionnel en OI,
prononcé [wɛ]: je faisois, tu dirois, ils venoient…)
• Dans le cas de OI, le peuple était déjà passé à la prononciation [wa]
Progression lente du français
• «Français du roy»: 1% de la population
• 99% d’analphabètes – éducation réservée aux riches. L’église
dispense l’enseignement du catéchisme en patois
• Catégories de locuteurs:
• Francisants: individus ayant une connaissance active de l'une des
variantes du français populaire (français du peuple), marqué de
provincialismes, d'expressions argotiques et d'archaïsmes: Centre à
Paris et dans la région environnante, employés dans la plupart des
villes du Nord.
• Semi-patoisants: locuteurs du patois avec une connaissance passive
du français populaire. Principalement dans les régions d'oïl du nord
de la France (Normandie, Champagne, Picardie, Loire, Poitou,
Bourgogne). Population urbaine ou périurbaine (pas à la
campagne). Dans les régions d'oc, bonne compétence passive mais
mauvaise compétence active, même chez les notables.
• Patoisants: locuteurs unilingues, sans compétence passive ou active
du français: population rurale
• Témoignage de Racine
(lettre à Lafontaine,
11 novembre 1661)
Autres changements
• Unification de la prononciation:
• Prononciation claire et nette
• Code basé sur la pronociation de Paris
• Dénasalisation des voyelles devant consonne nasale (ex.
Homme)
• -ill- commence à etre prononcé [j] (ex. fille) dans la
petite bourgeoisie parisienne
• l’Académie fixe certains mots (ex.
Formage/fromage; matelas/materas,
corbeau/courbeau; arroser/arrouser)
Le français hors d’Europe
• Implantation du français en Amérique du Nord
(Nouvelle France), aux Antilles, dans l’Océan Indien, en
Afrique
• 4. Y trouve-t-on des mots dérivés du celtique, du grec, du latin, et en général des langues anciennes et modernes ?
• 5. A-t-il une affinité marquée avec le français, avec le dialecte des contrées voisines, avec celui de certains lieux éloignés, où des émigrants, des colons de votre contrée sont allés anciennement s'établir ?
• 6. En quoi s'éloigne-t-il le plus de l'idiome national ? N'est-ce pas spécialement pour les noms des plantes, des maladies, les termes des arts et métiers, des instruments aratoires, des diverses espèces de
grains, du commerce et du droit coutumier ? On désirerait avoir cette nomenclature.
• 8. Pour quels genres de choses, d'occupations, de passions, ce patois est-il plus abondant ?
• 9. A-t-il beaucoup de mots pour exprimer les nuances des idées et les objets intellectuels ?
• 10. A-t-il beaucoup de termes contraires à la pudeur ? Ce que l'on doit en inférer relativement à la pureté ou à la corruption des mœurs ?
• 11. A-t-il beaucoup de jurements et d'expressions particulières aux grands mouvements de colère ?
• 12. Trouve-t-on dans ce patois des termes, des locutions très-énergiques, et même qui manquent à l'idiome français ?
• 14. Quel est le caractère de la prononciation ? Est-elle gutturale, sifflante, douce, peu ou fortement accentuée ?
• 15. L'écriture de ce patois a-t-elle des traits, des caractères autres que le français ?
• 22. Trouve-t-on des inscriptions patoises dans les églises, les cimetières, les places publiques, etc. ?
• 23. Avez-vous des ouvrages en patois imprimés ou manuscrits, anciens ou modernes, comme droit coutumier, actes publics, chroniques, prières, sermons, livres ascétiques, cantiques, chansons, almanachs,
poésie, traductions, etc. ?
• 26. Avez-vous beaucoup de proverbes patois particuliers à votre dialecte et à votre contrée ?
• 27. Quelle est l'influence respective du patois sur les mœurs et de celles-ci sur votre dialecte ?
• 28. Remarque-t-on qu'il se rapproche insensiblement de l'idiome français, que certains mots disparaissent, et depuis quand ?
• 31. Dans les écoles de campagne, l'enseignement se fait-il en français ? Les livres sont-ils uniformes ?
• 33. Outre l'art de lire, d'écrire, de chiffrer et le catéchisme, enseigne-t-on autre chose dans ces écoles ?
Extrait du Rapport de Grégoire
La féodalité, qui vint ensuite morceler ce beau pays, y conserva soigneusement
cette disparité d'idiomes comme un moyen de reconnaître, de ressaisir les serfs
fugitifs et de river leurs chaînes. Actuellement encore, l'étendue territoriale où
certains patois sont usités, est déterminée par les limites de l'ancienne domination
féodale. C'est ce qui explique la presque identité des patois de Bouillon et de
Nancy, qui sont à 40 lieues de distance et qui furent jadis soumis aux mêmes
tyrans ; tandis que le dialecte de Metz, situé à quelques lieues de Nancy, en diffère
beaucoup, parce que, pendant plusieurs siècles, le pays Messin, organisé dans une
forme républicaine, fut en guerre continuelle avec la Lorraine.
Il n'y a qu'environ quinze départements de l'intérieur où la langue française soit
exclusivement parlée ; encore y éprouve-t-elle des altérations sensibles, soit dans
la prononciation, soit par l'emploi des termes impropres et surannés, surtout vers
Sancerre, où l'on retrouve une partie des expressions de Rabelais, Amyot et
Montaigne.
Nous n'avons plus de provinces, et nous avons encore environ trente patois qui
en rappellent les noms.
Dans certains cantons de la Suisse, celui qui veut se marier doit préalablement
justifier qu'il a son habit militaire, son fusil et son sabre. En consacrant chez nous
cet usage, pourquoi les futurs époux ne seraient-ils pas soumis à prouver qu'ils
savent lire, écrire et parler la langue nationale ?
La terreur linguistique
• 1793: suppression des Académies (Académie française,
Académie de peinture et sculpture, Académie des
inscriptions et belles-lettres, Académie des sciences,
Académie de musique, Académie d'architecture). Elles
seront réunies, en 1794, dans l’Institut de France
• 20 juillet 1794: loi linguistique. La période de la Terreur
(1793-94), avec ses exécutions de masse, essaie également
d’imposer l’usage du français par la force, et de punir les
fonctionnaires qui ne respecteraient pas cette loi (prison +
destitution)
• La destitution de Robespierre suspendra cette loi qui n’aura
qu’un effet modeste
• Il faudra attendre la scolarisation de masse pour que le
français se répande
Loi linguistique du 2 thermidor, an
II
Article 1er
À compter du jour de la publication de la présente loi, nul acte public ne pourra, dans
quelque partie que ce soit du territoire de la République, être écrit qu'en langue française.
Article 2
Après le mois qui suivra la publication de la présente loi, il ne pourra être enregistré aucun
acte, même sous seing privé, s'il n'est écrit en langue française.
Article 3
Tout fonctionnaire ou officier public, tout agent du Gouvernement qui, à dater du jour de
la publication de la présente loi, dressera, écrira ou souscrira, dans l'exercice de ses
fonctions, des procès-verbaux, jugements, contrats ou autres actes généralement
quelconques conçus en idiomes ou langues autres que la française, sera traduit devant le
tribunal de police correctionnelle de sa résidence, condamné à six mois
d'emprisonnement, et destitué.
Article 4
La même peine aura lieu contre tout receveur du droit d'enregistrement qui, après le mois
de la publication de la présente loi, enregistrera des actes, même sous seing privé, écrits
en idiomes ou langues autres que le français.
Innovations dans la langue
• Phonétique: OI passe de [we] à [wa]
• Il y a surtout des innovations lexicales (vocabulaire révolutionnaire)
• Calendrier révolutionnaire remplaçant le calendrier grégorien, considéré comme
trop religieux: 12 mois de 30 jours (3 décades de 10 jours à la place des semaines) à
partir du 22 septembre 1792 (fin de l’Ancien Régime) jusqu’au Ier janvier 1806
(abolition)
• Mois: Germinal, Florial, Prairial, Messidor, Thermidor, Fructidor, Vendémiaire,
Brumaire, Frimaire, Nivôse, Pluviôse, Ventôse
• Décades: primidi, duodi, tridi, quartidi, quintidi, sextidi, septidi, octidi, nonidi, décadi
• Vocabulaire des institutions liées à la révolution: Assemblée nationale, contre-
révolutionnaire, antipatriotisme, anti-aristocratique, patriotiquement, concordat,
convention, anticonstitutionnaire, antipopulaire, pacte républicain, sans-culottes
• Poids et Mesures: c’est la révolution qui lance la recherche d’un système de mesure
universel (Responsable: Lavoisier; mesure du méridien: Delambre): mètre, litre,
gramme
• Tutoiement révolutionnaire (abolition du vouvoiement de politesse)
• Toponymes (ex. Montmartre – Mont Marat; Versailles – Berceau de la liberté)
• Noms propres : Brutus, Marat, Messidor, Rose, Horace
L’école
• La nécessité de renouveler et d’étendre la scolarisation aux
masses se fait ressentir de plus en plus: en 1794, plusieurs
décrets fixent l’obligation de l’enseignement primaire
• création de 24000 écoles sur le territoire français
• Instituteurs à choisir parmi les patriotes (exclusion du clergé et des
nobles)
• ils sont en nombre insuffisant
• mal payés
• souvent maîtrisant mal le français
• Création de l’ «école normale» pour la formation des maîtres et des
règles à utiliser partout en France
• Réalisée pendant 4 mois et pour 1500 élèves en 1795: insuccès relatif
(l’expérience n’est pas répétée). Ecole Normale Supérieure
• Fonction d’appartenance de la langue (appartenance à la
nation et facilité dans la gestion de l’armée formée de
conscrits de toute la France).
Sous Napoléon (1799-1815)
• Après le coup d’état de Napoléon (1799), il y a un retour aux règles
anciennes (conservatisme)
• Il fait un Concordat avec l’Eglise, à qui il rend ses propriétés. Il lui confie
les écoles, par souci d’économie) retour du latin
• le français progressa néanmoins en France
• très grande centralisation
• guerres qui entraînèrent d'immenses brassages de population.
• enquête impériale (1810) montre que 25 départements sur 130 n'utilisaient que
le français
• Hors de France: discrédit du français à cause des conquêtes
impérialistes de Napoléon
• développement des nationalismes étrangers
• Français utilisé dans les traités de paix et les milieux scientifiques.
• Création d’organismes chargés de veiller sur la langue: l'Institut de
France, le Conseil grammatical, l'Athénée de la langue française, etc.
• l'Académie française fut reconstituée en 1803 au sein de l'Institut de
France
Le français sous la Restauration
• L’attitude conservatrice se confirme sous la Restauration (1815-1830)
• En 1830, la monarchie de juillet (Louis-Philippe) introduit des principes plus
libéraux
• 1833: Loi Guizot sur l’enseignement: chaque département doit se doter d’une
école normale et chaque commune d’une école pour les garçons (non
obligatoire). L’école se répand (on passe de 10000 à 23000 et l’analphabétisme
recule de 50% à 39%)
• Après la très conservatrice Grammaire des grammaires, ou analyse raisonnée
des meilleurs traités sur la grammaire française (1811), par Charles-Pierre
Girault-Duvivier reprenant les manuels existants, l’école de Guizot (et celle de
Jules Ferry) utiliseront la grammaire normative de Noël et Chapsal (François-
Joseph-Michel Noël et Charles-Pierre Chapsal, Grammaire française, 1823 – plus
de 80 éditions jusqu’à la fin du siècle) + orthographe de l’Académie Française
• La langue se fige dans une forme qui comprend un très grand nombre
d’exceptions la grammaire et l’orthographe sont indispensable pour obtenir
un emploi public : la langue devient l’objet des concours.
• La norme est dictée par la langue de Paris, qui se répand grâce aux journaux.
• Anglophobie (1829) contre l’hégémonie grandissante de l’anglais
• Introduction de néologismes (domaines des sciences naturelles, physique,
chimie, médecine + naissance de nouvelles sciences, avec leur lexique:
l'archéologie, la paléontologie, l'ethnographie, la zoologie, la linguistique, etc.)
Les lois Ferry (1881-1882)
• 1863: enquête du ministre de l'Instruction publique, Victor
Duruy 7,5 millions (sur 38) ignorent le français
• Idéologie de lutte contre les patois (« tuer le breton »)
• 1881-1882: Lois Jules Ferry (ministre de l’éducation
nationale) rendant l’enseignement primaire laïc, gratuit et
obligatoire.
• Il veut surtout s’opposer à l’église et répandre l’idéal républicain
• Les patois sont pourchassés à travers la délation et des punitions
• Le « signal » est la technique la plus répandue: il s’agit d’un objet
qui est donné à l’enfant qui emploie un mot de patois à l’école.
Celui qui a le « signal » à la fin de la journée sera puni. Les autres
enfants vérifient dans le dictionnaire
• Le latin est également supprimé en faveur du français
• A partir de ce moment, il y aura un grand nombre de lois sur
la langue (gestion juridique)
Les dictionnaires du XIXe siècle
• Développement d’une activité intense vers le milieu du siècle
• Apparition d’entreprises économiques fondées sur la publication
d’ouvrages lexicographiques et didactiques: Hachette (1826) et Larousse
(1852)
• Forte influence de la pensée positiviste méthodes «scientifiques»
dans l’élaboration des dictionnaires
• Pierre Larousse:
• Nouveau dictionnaire de la langue française (1856)
• Grand Dictionnaire Universel du XIXe siècle (1866-1877)
• (Petit Larousse: à partir de 1905)
• Émile Littré:
• Dictionnaire de la langue française (conçu en 1841, publié entre 1863 et 1872):
dictionnaire étymologique, historique et grammatical
• « Je n'ai prétendu à rien de moindre qu'à donner une monographie de chaque mot, c'est-
à-dire un article où tout ce qu'on sait sur chaque mot quant à son origine, à sa forme, à sa
signification et à son emploi, fût présenté au lecteur. Cela n'avait pas encore été fait. (p.
xxxviii) ».
• Académie Française: sixième et septième édition (1835; 1878)
• Hatzfeld – Darmesteter: Dictionnaire général de la langue française du
commencement du XVIIe siècle à nos jours (1895-1900): dictionnaire
historique - philologique
Second empire colonial
• A partir de 1830, la France se tourne vers l’Afrique
• 1830: prise d’Alger et conquête de l’Algérie
• Pendant cette décennie, les bases de l’empire sont
jetées:
• Afrique noire (Golfe de Guinée à partir de 1838-1842)
• Océan indien: Madagascar (à partir de 1839), Mayotte
(protectorat à partir de 1841)
• Îles du Pacifique (annexion des îles Marquises en 1842;
signature d’un traité de protectorat avec le royaume de Tahiti
en 1843)
• Pour l’Indochine, il faudra attendre les années 1860
• 1884: Conférence de Berlin, fixant les règles du
développement colonial des grandes puissances
européennes
L’Afrique française
• Trois blocs distincts:
• Le Maghreb (pays riverains de la méditerranée):
Algérie, Maroc, Tunisie
• L’Afrique-Occidentale française (Pays sahéliens et
riverains de l’Atlantique et du golfe de Guinée):
Mauritanie, Sénégal, République soudanaise (actuel
Mali), Guinée, Niger, Haute-Volta (actuel Burkina Faso),
Dahomey (actuel Bénin), Togo, Côte d'Ivoire
• L’Afrique-Equatoriale française (sub-sahéliens): Gabon,
Moyen-Congo (dont une partie correspond au Gabon,
une autre à l'actuelle République du Congo), Tchad et
Oubangui-Chari (devenu la République centrafricaine).
L’Afrique française
Le XXe siècle
• 1919: Traité de Versailles: fin du français comme langue diplomatique
• 1946: La Société des Nations devient l’ONU (Organisation des Nations
Unies). Le français y est voté comme langue de travail à côté de l’anglais,
à une seule voix de majorité
• Déferlement de l’anglais en France
• 1944 : débarquement en Normandie
• 1947 : plan Marshall
• Années 1950-1960: modèles de la culture pop anglophone (musique, films)
• Anglicismes et idéologie (franglais: Le livre d’Etiemble Parlez-vous franglais?
paraît en 1964)
• Importance croissante des médias pour la diffusion du français
• Radio (1920 environ)
• Télévision introduite en 1935 (expérimentale) et développée après la guerre:
démocratisée dans les années 1970
• 1951: Loi Deixonne qui autorise pour la première fois l’enseignement
des langues régionales à l’école (basque, breton, catalan, occitan)
Contrôle des pouvoirs publics sur
le français
• Réformes de l’orthographe:
• arrêté Leygues du 26 février 1901 (simplification de la syntaxe –
accord du participe passé)
• arrêté Haby du 28 décembre 1976 (tolérances grammaticales et
orthographiques)
• Rectifications du 6 décembre 1990.
• 1975: Loi Bas-Lauriol sur l’usage du français dans la
communication commerciale et sur la terminologie
• 1994: Loi Toubon (enrichissement, usage et défense de la
langue; le français sera inscrit dans la Constitution comme
langue de la République)
• Commission générale de terminologie (COGETER) et
commissions ministérielles pour la proposition de termes de
spécialité français au lieu des anglicismes correspondants)