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20/09/2021 16:33 Jeu vidéo et science-fiction >> de mode texte en code texte 

ReS Futurae
Revue d’études sur la science-fiction

12 | 2018

Science-fiction et jeu vidéo


Jeux vidéo et science-fiction

Jeu vidéo et science-fiction >> de


mode texte en code texte 
Estelle Dalleu
https://doi.org/10.4000/resf.1680

Résumés
Français English
La science-fiction est une problématique relativement peu abordée dans le champ des études
vidéoludiques, comme s’il allait de soi que montrer une science mise en fiction faisait écho à ce
qui constitue intrinsèquement le jeu vidéo  : des technologies mises à l’épreuve de mondes
fictionnels – et inversement. Jeu vidéo et science-fiction nouent cependant des liens singuliers,
comme lorsqu’il s’agit, par exemple, de représentations entièrement fondées sur le mode texte. À
la fois outil narratif et de gameplay, le mode texte consiste essentiellement en une mise en abyme
qui positionne le joueur devant une rétroaction textuelle le mettant aux prises d’un dialogue
scriptural avec un ordinateur : ce que réalise le personnage jouable in game n’est pas autre chose
que ce que le joueur effectue lui-même, c’est-à-dire interagir avec une machine… une entité avec
qui s’élabore une connexion qui pose les soubassements de la construction science-fictionnelle du
jeu vidéo. Le mode texte, présent dès les premières expériences vidéoludiques, et qui perdure
jusque dans les jeux vidéo les plus contemporains, ouvre la voie vers ce qui travaille au plus
profond la relation entre l’humain et la machine informatique : l’intelligence artificielle.

The science-fiction issue is relatively unaddressed in the field of video game studies, as if it was
obvious that to showing science put into fiction echoed what the video game is intrinsically  :
technologies set on test by fictional worlds - and vice versa. Video games and science-fiction,
however, have unique links, for example in representations based entirely on the text mode. As
both a narrative and a gameplay tool, the text mode consists in its essence in a mise-en-abyme :
the player is set in front of a textual feedback that installs them in a scriptural dialogue with a
computer. What the playable character does in game is nothing else than what players do
themselves, that is to say interacting with a machine — an entity with which a connection is
developed which lays the foundations of the science-fiction construction of the video game. The
text mode, present from the first video game experiences, and which continues in the most
contemporary video games, paves the way to what works deeply in the relationship between the
human and the computer machine : the artificial intelligence.

Entrées d’index
Mots-clés : jeu vidéo, mode texte, intelligence artificielle (IA), code informatique, réflexivité

https://journals.openedition.org/resf/1680#text 1/10
20/09/2021 16:33 Jeu vidéo et science-fiction >> de mode texte en code texte 

Keywords: video games, text mode, artificial intelligence (AI), computer code, reflexivity

Texte intégral

> Entr
1 La science-fiction s’immisce régulièrement au cœur du jeu vidéo et pourtant elle ne
s’y présente pas en tant que genre. En effet, le jeu vidéo bouscule les notions génériques
établies jusqu’ici par la littérature ou le cinéma  et s’arrange plus facilement d’autres
classifications : action, aventure, stratégie, réflexion, en vue à la première personne, en
mode texte, stratégie en temps réel, serious game [« jeu sérieux »], de plateforme, etc.
Ainsi, on n’y voit guère le terme de science-fiction, alors même que celle-ci
s’expérimente régulièrement au sein de tous les genres vidéoludiques, du jeu vidéo
d’action au serious game. Un paradoxe s’ouvre donc ici : si la science-fiction est bel et
bien présente dans le monde du jeu vidéo, comment se fait-il qu’on lui porte aussi peu
d’intérêt et que son activité éditoriale soit aussi faible1 ? Irait-il de soi que montrer une
science mise en fiction ferait écho à ce qui constitue intrinsèquement le jeu vidéo : des
technologies mises à l’épreuve de mondes fictionnels – et inversement ?
2 Parmi la pléthore de jeux vidéo qui mobilisent la science-fiction, il est une manière de
représenter qui consiste à faire usage de la textualité. Le jeu vidéo textuel procède d’une
mise en abyme où la rétroaction textuelle du joueur est mise en écho in game2. Le
scriptural, à la fois outil narratif et de gameplay, élabore un dialogue avec un
ordinateur, plus exactement une intelligence artificielle, qui pose les soubassements
science-fictionnels du jeu vidéo.
3 On ne fera pas ici une histoire du jeu vidéo en mode texte, car la recherche nord-
américaine a commencé à le faire depuis quelques années, en mettant ses résultats en
libre-accès3. En revanche, on s’intéressera à quatre faisceaux qui modèlent ce champ
vidéoludique et qui font cohabiter de manière singulière le mode texte et la science-
fiction : un ancrage au cœur des prémices de l’informatique ; l’intelligence artificielle en
regard des agents conversationnels ; les propriétés méta-vidéoludiques ; les formes de
survivance du mode texte science-fictionnel dans les créations plus contemporaines. 

> azertyuiopqsdfghjklmwxcvbn
4 Le premier jeu vidéo programmé sur ordinateur, Spacewar, en date de 1962, est
ancré dans la science-fiction :

Graphiquement, l’image radar est détournée pour figurer l’imaginaire de la


littérature de science-fiction dont se nourrissent les hackers, et en particulier l’un
des créateurs de Spacewar ! [sic], Steve Russell, imprégné des romans de science-
fiction d‘Edward Elmer Smith et dont, selon ses dires, il venait d’achever le Cycle
du Fulgur (Lensman series)(Dalleu, 2016).

5 Si Spacewar fait dire à Mathieu Triclot que

[…] le vaisseau spatial possède un avantage considérable sur les elfes, orcs et
autres créatures de même acabit, celui de ne pas habiter de forêts ou de grottes,
mais un espace dont la principale caractéristique est le vide, ce qui est loin d’être
une qualité négligeable en termes graphiques. Il est en effet impossible de trouver
un lieu qui exige moins de puissance de calcul (Triclot, 2011, p. 112),

6 on remarquera toutefois que le vide spatial se déploiera davantage sur les bornes
d’arcade et que du côté de l’ordinateur émerge un autre mode de représentation de la
science-fiction, qui nécessite également assez peu de puissance de calcul : le jeu vidéo
textuel. Il s’agit d’un jeu vidéo dont l’interaction ne s’effectue qu’au travers d’une
interface en mode texte4 formée d’un dialogue entre le joueur et l’ordinateur.

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7 Le jeu vidéo en mode texte appelle immédiatement quelques précisions


terminologiques. La langue française peut utiliser les termes de jeu vidéo en mode
texte, de fiction interactive, d’aventure textuelle ou d’aventure en mode texte. Tous ces
termes proviennent de l’anglais (Text-based Game, Interactive Fiction, Text
Adventure, Text Mode) et c’est le studio de développement américain Infocom à la fin
des années 1970 et début des années 1980, qui a été à l’origine de l’appellation de
«  fiction interactive  »5. Le souhait d’Infocom était de rompre avec les jeux vidéo en
mode texte qui existaient jusque-là en mettant l’accent sur la dimension littéraire de
leurs propres créations, et, plus particulièrement, en développant toute une série
d’expériences vidéoludiques dans la veine des gamebooks6 et des jeux de rôle Dungeons
& Dragons. Les nombreuses fictions interactives qu’Infocom développera entre 1979 et
1989 seront baignées dans la Fantasy, et celles-ci font oublier qu’un autre genre les
côtoie, d’importance égale, qui est celui de la science-fiction7.
8 Fantasy et science-fiction sont ainsi les deux catégories les plus présentes dès les
premiers des jeux vidéo en mode texte. Elles héritent d’un système de jeu déjà présent
dans le jeu de rôle papier, qui fait alterner une exploration par la navigation et l’entrée
dans des pièces ou des arènes. S’il existe une filiation certaine entre l’un des premiers
jeux vidéo d’aventure en mode texte, Colossal Cave Adventure de William Crowther8, et
le genre Role Playing Game (RPG), ce qu’analyse clairement Raphaël Lucas (Lucas,
2014, p.  72-74, p.  77, p.  203-204), les jeux vidéo de science-fiction se détachent
progressivement des conventions du RPG et se caractérisent progressivement par une
appropriation plus spécifique du mode texte. Tout d’abord, la science-fiction ne donne
pas lieu à un genre en tant que tel : elle reste un style pouvant apparaître dans d’autres
genres ou capable de côtoyer d’autres styles. Ensuite, alors que les dialogues du RPG
tendront à faire oublier l’existence de la machine pour que s’incarne davantage un
maître de jeu, un personnage jouable ou non jouable, la science-fiction s’oriente vers
une hyper-présence de l’intelligence artificielle. Enfin, même si l’entité avec laquelle le
joueur interagit a fréquemment un statut ambivalent dans la science-fiction – où même
derrière un personnage clairement nommé se cache une intelligence artificielle –, elle
fait de l’intelligence artificielle un personnage à part entière dont la présence
omnisciente ne peut échapper au joueur.
9 D’une certaine manière, le jeu vidéo textuel de science-fiction serait sans cesse en
train de mettre au travail la question du «  jeu de l’imitation  », ou test de Turing
(Turing, 1950), du nom d’Alan Turing, l’un des pères fondateurs de l’architecture de
l’ordinateur. Dans un mouvement réflexif, le joueur est alors mis dans la position d’une
quête dialoguée par l’écrit (le même procédé que celui mis en place dans le test de
Turing), où la rétroaction avec la machine consiste à déterminer l’identité de
l’interlocuteur. Juste retour des choses, puisqu’on remarquera que l’article de Turing
fait «  usage d’occurrences toutes liées au champ lexical du jeu  : “joueur” (“player”),
“jeu” (“game”), “stratégie” (“strategy”) » (Dalleu, 2016). Ainsi, le jeu vidéo de science-
fiction aurait davantage à partager avec l’histoire de l’informatique plutôt qu’avec une
simple généalogie du jeu vidéo. Ce «  jeu de l’imitation  » vidéoludique est de toute
évidence un simulacre, car l’on sait pertinemment qu’il s’agit d’un dialogue avec un
ordinateur. Cependant, in game, il est question de positionner le joueur devant ce qui
se révèle être l’un des grands enjeux de la science, l’intelligence artificielle.
10 On aimerait rappeler ici que « le test imaginé et décrit par Turing en 1950 ne visait
pas […] à distinguer ou confondre humain et machine, mais à déterminer s’il convenait,
ou non, d’attribuer à une machine la qualité de “pensante” » (Olivier Rey, 2016, p. 19).
La question de l’intelligence artificielle est prégnante dans le cadre de la création
vidéoludique, mais on comprendra qu’elle le soit encore davantage dans un jeu vidéo de
science-fiction en mode texte, lorsque aucun élément graphique ne peut dessiner une
appartenance de lieu, d’époque, de genre, etc., et lorsque c’est immédiatement – dans le
sens d’ab ovo – une communication d’écrit à écrit, de pensée à pensée, qui s’établit.
Pour le dire autrement, le jeu vidéo cherche généralement à faire oublier la présence de
l’intelligence artificielle à des fins d’immersion, au contraire du jeu vidéo textuel de
science-fiction où l’immersion ne passe que par la relation qui s’établit entre le joueur
et l’intelligence artificielle.

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11 La question de l’agent conversationnel, où le clavier et l’écran font office d’interfaces


humain-machine, a débuté avec l’un des premiers programmes informatiques
d’intelligence artificielle, ELIZA9, et s’est poursuivie avec SHRDLU10. La recherche
informatique n’est cependant pas la seule à s’intéresser à cette problématique,
puisqu’elle est aussi au fondement du jeu vidéo en mode texte. Ce qui fait le succès des
fictions interactives d’Infocom, ça n’est pas seulement, pour l’époque, la qualité de son
analyseur syntaxique, c’est également parce que derrière la fondation de ce studio se
trouvent d’anciens étudiants en informatique du MIT, capables de développer les outils
nécessaires aux interactions humain-machine. On trouve donc à la source des jeux
vidéo en mode texte une science informatique se mettant au service d’un imaginaire
fictionnel.
12 Les conversations qui se déroulent dans les premiers jeux vidéo en mode texte sont
rudimentaires et reposent globalement sur le fait d’émettre des ordres par le biais de
verbes à l’impératif (par exemple en saisissant sur le clavier «  go north  », ou plus
simplement «  north  » ou la lettre «  n  » pour indiquer le souhait de se diriger vers le
nord)  ; effectuer des actions («  take […]  », pour se saisir d’un quelconque objet
disponible dans l’environnement) ; enfin, consulter son inventaire (la saisie de la lettre
«  i  » est la plupart du temps suffisante). En retour aux actions écrites par le joueur,
l’intelligence artificielle s’adresse directement à celui-ci (« you », « toi ») soit par une
description de l’environnement, souvent de manière très précise et qui modélise un
espace-temps en utilisant tout le langage propre à la science-fiction11 ; soit en donnant
le résultat des actions émises par le joueur (réussite, réajustement, recommencement
de l’action)  ; soit en indiquant qu’elle ne comprend pas ce que le joueur a écrit. Cet
archétype conversationnel, commun aux studios Infocom, Level  912 et à d’autres,
emploie un langage naturel assez peu élaboré, où l’analyseur syntaxique se contente de
reconnaître des mots-clés au sein de la saisie du joueur.
13 En faisant un bond dans le temps d’une quarantaine d’années, on ne peut que
constater les progrès de l’intelligence artificielle, en particulier dans sa capacité à se
saisir du langage naturel. Un jeu vidéo de science-fiction comme Event[0]13 se compose
d’une rétroaction textuelle constituée de phrases entières et non plus seulement
assortie d’un fonctionnement par mots-clés. Le langage y est plus subtil, parfois même
caustique, et il arrive que Kaizen – l’intelligence artificielle du vaisseau spatial auquel
on accède via des terminaux – émette une fin de non-recevoir aux requêtes du joueur
s’il n’y met pas les formes («  s’il te plaît  », «  merci  », etc.). Dans tous les cas, que le
langage soit des plus naturels ou pas, ce qu’emmène singulièrement avec lui le jeu vidéo
textuel de science-fiction c’est une immersion de nature réflexive. Le joueur, en ajustant
son propre langage, teste jusque dans ses moindres retranchements les capacités à
converser avec les machines et met sans cesse à l’épreuve la qualité pensante d’une
intelligence artificielle.

> Méta(s)
14 Emmanuel Corno, game designer d’Event[0], explique que l’intelligence artificielle
développée pour leur jeu vidéo semble de prime abord plutôt sophistiquée, mais qu’en
réalité se glisse un « effet horoscope »14, plus connu sous le nom d’effet Barnum, et qui
consiste à faire usage de phrases généralistes où tout un chacun peut s’identifier. Cet
effet participe pour une bonne part à la suspension d’incrédulité du côté du joueur,
certes, mais un autre enjeu, plus profond, tient d’une caractéristique du jeu vidéo de
science-fiction en mode texte. Ce dernier appelle un au-delà de la vue à la première
personne, ou vue subjective, et forme une vue méta-subjective, que l’on entend ici en
tant qu’hyper-subjectivité où le joueur est de façon concomitante être et actant. L’avatar
est mis en veille devant l’atténuation de la frontière entre in game et out game. Ce que
réalise au clavier le joueur out game est ce qu’il réalise en miroir in game, c’est-à-dire
établir une communication directe avec une intelligence artificielle. Des éléments
intradiégétiques comme l’inscription immédiate à l’écran du texte saisi par le joueur –
et dont la police rappelle celle d’une invite de commande –, la vue de la console avec le

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son du clavier, le curseur présent à l’écran, etc., renforcent une forme


d’indifférenciation : après tout, et quoi que l’on fasse avec un ordinateur (jouer ou une
quelconque autre activité), on est toujours dans le cadre d’une boucle informationnelle
aux prises avec une intelligence artificielle. Le joueur ne fait donc pas qu’évoluer dans
un simple environnement de jeu vidéo, il est plongé dans une métaphysique des
machines, interrogeant la nature de l’être avec qui il rétroagit.
15 Il arrive que certains dispositifs fassent oublier le caractère méta-subjectif des jeux
textuels de science-fiction. En particulier lorsque le textuel se mêle à des éléments
graphiques et, plus encore, lorsqu’il y a présence d’un avatar, faisant revenir le point de
vue aux plus classiques première et troisième personne. C’est le cas de The Talos
Principle15, un jeu vidéo de science-fiction qui fait alterner réflexion (puzzle game) et
exploration avec des séquences où l’on accède à des terminaux. Ces derniers engagent
une rétroaction textuelle où apparaissent en amorce en bas de l’écran les mains du
personnage que l’on incarne, qui est un androïde16. Si l’avatar reprend ses droits ici et
s’il ne s’agit pas uniquement d’un jeu vidéo textuel – on ne saisit pas directement du
texte à l’écran mais l’on procède à l’ouverture de fichiers dont on va faire la lecture, ou
bien l’on choisit une proposition parmi plusieurs –, il n’en reste pas moins que le mode
texte conserve encore toutes ses potentialités. Tout d’abord, le textuel porte la narration
du jeu  : l’avatar-androïde découvre l’histoire d’une humanité disparue à travers les
multiples fragments écrits accessibles via les terminaux. Ensuite on constate la
présence d’un langage tout à fait hétérogène qui parsème les divers textes, et qui se
révèle lié au domaine informatique  : le système hexadécimal17. Enfin, à diverses
reprises le mode textuel propose de jouer à des imitations des premiers jeux vidéo
textuels. Il s’agit ici très clairement de caractéristiques qui transcendent les modalités
textuelles du jeu vidéo. Un métadiscours se met en place, où une intelligence artificielle
renoue avec une humanité qui elle-même interagissait avec une intelligence artificielle.
C’est également une forme d’historicité de la relation entre l’homme et la machine. Le
joueur se voit en effet plongé dans une situation l’amenant à envisager des évènements
à travers des loggings [«  enregistrements  »]. L’idée d’archivage n’a pas valeur que
narrative et immersive, elle contribue à ce que le joueur pense la relation humain-
machine en regard d’un historique. Le mode texte n’est donc pas qu’un outil de
gameplay, purement fonctionnel, il participe d’un champ qui met en dialogue, parfois
de manière conflictuelle, passé, présent et futur.
16 Avec Sethian18, il semble que l’on quitte le jeu vidéo textuel. De science-fiction, il l’est
assurément, puisqu’il place le joueur dans le rôle d’un archéologue du futur dans un
environnement où se trouvait le peuple sethianais. Le seul moyen qui permet alors de
découvrir l’histoire de cette civilisation  est d’apprendre son langage par le biais d’un
ordinateur. Le jeu vidéo se compose d’une seule et unique interface où le dialogue
textuel va consister à mobiliser des talents en linguistique pour réussir à converser avec
l’intelligence artificielle. Il ne s’agit pas à proprement parler d’un jeu en mode texte
puisqu’on ne saisit pas du texte alphabétique au clavier mais que l’on clique sur des
symboles dont la structure linguistique se rapprocherait des idéogrammes19. Derrière
un propos assez simple, l’apprentissage d’une langue, Sethian est un jeu vidéo qui
mobilise un certain degré de connaissances. Outre qu’il s’inspire de la langue chinoise
ou du langage des signes, un élément ressort particulièrement  : les symboles
convoquent en fait des figures géométriques, en puisant par exemple dans les
mathématiques euclidiennes. Ce jeu vidéo explore la textualité sous un autre angle, un
métalangage renvoyant aux mathématiques, en somme à ce qui permet de révéler du
texte sur un écran d’ordinateur. Le langage codé est ici un support de réflexion à ce qui
constitue le langage machine. Ainsi, le jeu vidéo textuel de science-fiction n’est pas
qu’information  : il devient traduction. Sethian en appelle au hors-champ du texte
littéraire, un hors-texte informatique fait de chiffres et de calculs.

> Impécr

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17 Vers la fin des années 1980, les jeux vidéo textuels cèdent leur place petit à petit à
ceux composés d’environnements graphiques, sans toutefois disparaître pleinement
puisqu’aujourd’hui ils sont encore nombreux à être développés, en particulier du côté
du jeu vidéo indépendant. Jusqu’alors affichés en plein écran, ils vont continuer à
persister en ce que l’on pourrait nommer un mode fenêtré et vont s’épanouir
pleinement, plus spécifiquement, dans le style de la science-fiction. L’interface de
rétroaction textuelle s’organise soit par un passage provisoire en mode plein écran, par
l’ouverture d’une fenêtre ou bien par l’apparition d’un écran d’ordinateur à l’écran.
Cette dernière méthode, une mise en scène de l’écran d’ordinateur dans le cadre de
l’interface de l’ordinateur même du joueur, tend bien souvent à reproduire l’habillage
des écrans – et des claviers – d’ordinateurs des années 1980.
18 Une occurrence visuelle prend sa source dans la gamme des micro-ordinateurs
Commodore. Digital  : A Love Story20, par exemple, reproduit l’interface du
Commodore Amiga 500 de la fin des années 1980. Ici, l’environnement graphique
soutient la mécanique de conversation, elle-même inspirée du Bulletin Board System
(BBS)21. Le propos du jeu vidéo, dédié à la survie d’intelligences artificielles, aborde des
questions comme leur autoréplication, leur interaction verbale ou leur socialisation. Le
style visuel vintage incarne à sa manière une nouvelle métaphysique des machines, qui
consiste à avancer dans le passé autant que dans le futur. Le textuel prend une autre
dimension dans la narration environnementale, une modalité rétrofuturiste, typique de
la science-fiction, qui participe d’un trouble spatio-temporel.
19 Les jeux vidéo de hacking sont probablement ceux qui emmènent la textualité vers
l’expression de sa plus grande radicalité. La toile de fond de ce type de jeux vidéo est
bien souvent la même, où le joueur incarne un hacker aux prises d’un système
complotiste impliquant des multinationales. Hacker, technologies de l’information,
réseaux informatiques, futur proche, intelligence artificielle, implications politiques… :
tous ces éléments mis ensemble dessinent un courant de la science-fiction
correspondant au cyberpunk. Si quelques expériences vidéoludiques perpétuent le
dispositif des jeux vidéo des années 1970 et 1980 (on songe à Cypher22, qui se
revendique pleinement de la fiction interactive), la plupart des jeux vidéo ayant pour
thématique le hacking proposent une tout autre forme de navigation, qui ne s’effectue
plus dans les environnements types de la science-fiction (vaisseau spatial, planète, etc.),
mais prend place dans les mondes plus abstraits des réseaux informatiques.
20 La plupart du temps, l’écran de jeu se divise en plusieurs cellules ou fenêtres
positionnées les unes à côté des autres, où chacune est dédiée à une fonction précise :
état de l’ordinateur, affichage de la carte du réseau informatique à infiltrer, affichage du
résultat des actions, etc. Une fenêtre retient l’attention, qui est la console de
commande, appelée aussi Terminal. Cette fenêtre, lieu de rétroaction entre l’ordinateur
in game et le joueur, permet des entrées textuelles en invite de commande, rappelant
DOS ou UNIX. Un jeu vidéo comme Hacknet23 va jusqu’à faire usage du mot « shell »24,
spécifique aux systèmes UNIX. Ces jeux vidéo, et on ne peut les citer tous ici25, font état
d’une écriture aux prises avec une résurgence du code. La textualité se détache de sa
part littéraire pour se nouer avec les signes du code informatique propres aux invites de
commande. Le joueur est placé dans l’exacte position d’un hacker et, même s’il s’agit
encore une fois d’un simulacre, il n’en reste pas moins que le joueur non accoutumé à
l’écriture informatique se verra plus facilement mis en difficulté. C’est en tout cas un
monde parallèle qui prend naissance, qui tient du langage des machines, et qui renvoie
la plupart du temps à un univers dystopique où la non-maîtrise de ce langage
empêcherait de mener à bien le propos du jeu vidéo, c’est-à-dire une capacité à lutter
politiquement.
21 On aurait pu croire à une disparition progressive du mode texte avec l’avènement des
jeux vidéo graphiques. Il continue pourtant de s’infiltrer, en particulier dans les mini-
jeux de hacking. Il y a ici un basculement d’un état à un autre : l’écran se modifie pour
renouer avec une forme connue et reconnaissable, celle du mode texte, devenant espace
de hack. Enter the Matrix26, jeu vidéo de science-fiction, est à ce propos
paradigmatique. Dans l’écran du menu se trouve une section intitulée « Hacking » où le
joueur est convié à faire usage du mode texte, avec une saisie qui rappelle l’invite de
commande en système DOS. Le hack d’Enter the Matrix ne se contente pas d’être un
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mini-jeu permettant au joueur de poursuivre son aventure par le déverrouillage de


secteurs ou l’accès à des informations, il a une incidence directe sur le jeu vidéo en en
modifiant les propriétés internes. Si l’on repère ici une similitude avec l’usage des codes
de triche (cheats codes), l’intention, qu’elle soit visuelle ou du gameplay, reste adossée
au mode texte comme objet côtoyant le langage machine.
22 Ces diverses modalités textuelles invitent à penser à une inversion de l’obfuscation27.
Si, dans la plupart des cas, le jeu vidéo en mode texte tente de s’approcher au plus près
du langage naturel et arrive parfois à camoufler, par quelque subterfuge, les failles de
l’intelligence artificielle, il se dévoile ici une obfuscation du langage naturel par le
langage codé. Les jeux vidéo de hacking mettent en scène un langage naturel hacké par
le code, faisant passage du mode texte vers le code texte.

> Échap
23 Dans le cadre de la recherche informatique, imaginer, il y a une cinquantaine
d’années, ce qu’allait devenir l’intelligence artificielle, avec les agents conversationnels
contemporains que sont les assistants personnels intelligents comme SIRI ou
CORTANA ou bien les réseaux de neurones artificiels, relevait probablement de la
science-fiction. Le trait commun entre la recherche informatique et le jeu vidéo textuel
de science-fiction est de s’emparer de manière égale de la problématique de
l’intelligence artificielle, en mettant en place un dispositif où l’imaginaire peut avoir
lieu. La frontière est visiblement ténue entre recherche informatique et recherche
vidéoludique quant à ce qu’est ou devrait être une intelligence artificielle.
24 Le jeu vidéo de science-fiction en mode texte, même s’il retranscrit en apparence les
stéréotypes de la science-fiction, s’émancipe cependant très vite de ces conventions en
faisant qu’une discussion avec les machines incarne principalement un discours sur les
machines. Le mode texte figure à la perfection ce qui constitue un soubassement de la
science-fiction  : le rapport de l’humain à la technologie, l’interrogation sur soi et la
nature de l’autre. L’intelligence artificielle reste pour l’heure une construction humaine.
Que notre relation à celle-ci soit empathique, conflictuelle ou faillible, elle en dit avant
tout beaucoup de l’humain. Le jeu vidéo de science-fiction en mode texte est
probablement l’un des rares endroits à permettre à une aussi large audience d’accéder
frontalement à ce qu’est, fondamentalement, le façonnage d’une altérité.

Bibliographie
Dalleu Estelle, «  [Formes contemporaines de l’imaginaire informatique] >> hacking > < jeu
vidéo  », in Komodo, 2016, URL  : http://komodo21.fr/formes-contemporaines-de-limaginaire-
informatique-hacking-jeu-video.
Dossier « De Space Invaders à Mass Effect : la science-fiction dans le jeu vidéo », in JV Culture
jeu vidéo, N° 39, mars 2017, p. 28-41, mars 2017, N° 39.
Grandjean Guillaume, « “In space no one can hear you type”. Nouveaux visages de l’intelligence
artificielle de jeu vidéo autour du jeu Event [0]  », in In Game, séminaire de l’École Normale
Supérieure, Paris, 9 janvier 2017, https://www.youtube.com/watch ?v =sVZdYCV43P4
Jackson-Mead Kevin et Wheeler J. Robinson, IF Theory Reader, version 2 d’avril 2011, ouvrage
disponible librement au téléchargement sur Internet au format PDF,
http://www.lulu.com/items/volume_69/10228000/10228464/4/print/IFTheoryBookv2.pdf.
Lucas Raphaël, L’histoire du RPG. Passés, présents et futurs, Toulouse  : Pix’n Love Éditions,
2014.
Paloque-Bergès Camille, Poétique des codes sur le réseau informatique, Paris  : Éditions des
archives contemporaines, 2009.
Rey Olivier, «  Prince et princesse, 0 et 1. Note sur la résistance du signifiant et ambiance
binaire  », in Cormerais Franck, Gilbert Jacques Athanase, Études digitales, Paris  : Classiques
Garnier, 2016 – 1, n° 1, p. 19-23.
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Triclot Mathieu, Philosophie des jeux vidéo, Paris  : Éditions La Découverte, Label «  Zones  »,
2011.

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Tringham Neal, Science Fiction Video Games, Boca Raton : CRC Press, 2015.
Turing Alan, « Computing Machinery and Intelligence », 1950, article disponible en anglais sur
Internet, http://phil415.pbworks.com/f/TuringComputing.pdf.

DOI : 10.1093/mind/LIX.236.433

Jeux vidéo
Colossal Cave Adventure, jeu réalisé par William Crowther sur PDP-10 et diffusé sur le réseau
ARPAnet, années 70.
Cypher, développeur et éditeur : Cabrera Brothers, 2012, plateformes : PC Windows, MAC OS X,
https://www.cabrerabrothers.com/cypher.php.
Digital : A Love Story, développé par Christine Love, 2010, plateformes : PC Windows et Linux,
Mac OS X, http://scoutshonour.com/digital.
Enter the Matrix, développeur  : Shiny Entertainment, éditeur  : Atari, 2003, plateformes  : PC
Windows, GameCube, PlayStation 2, Xbox.
Event[0], développé par Ocelot Society, 2016, PC Windows et Mac OS X,
http://event0game.com.
Hacker Evolution, développé et édité par Exosyphen Studios, 2007, plateformes : PC Windows et
Linux, Mac OS X, http://www.exosyphen.com.
Hacknet, développeur  : Team Fractal Alligator, éditeur  : Surprise Attack Games, 2015,
plateformes : PC Windows et Linux, Mac OS X, http://www.hacknet-os.com.
Sethian, développé par Grant Kuning, Duang  ! Games, 2016, plateformes  : PC, Mac.
https://sethiangame.com.
The Talos Principle, développé par Croteam, distribué par Devolver Digital, plateformes  : PC
Windows et linux, Mac (2014)  ; Android, PlayStation 4 (2015),
http://www.croteam.com/talosprinciple.
Wander, Peter Langston, 1974.

Notes
1 Pour l’heure, un seul ouvrage, en langue anglaise, est entièrement consacré à la question : Neal
Tringham, Science Fiction Video Games, Boca Raton, CRC Press, 2015. Rares sont les autres lieux
qui s’attachent à évoquer de manière complète la relation entre la science-fiction et le jeu vidéo.
Une exception, le magazine JV Culture Jeu vidéo, mars 2017, N°39, p. 28-41, qui lui consacre un
dossier intitulé « La science-fiction dans le jeu vidéo ».
2 [NdE] « In game » désigne l’implication du joueur dans le cadre du jeu (actions modélisées par
l’intermédiaire de l’interface ludique), par contraste avec « out game », qui désigne les activités
physiques concrètes (appuyer sur des boutons, observer, écouter…).
3 À ce sujet on consultera l’ouvrage IF Theory Reader, édité par Kevin Jackson-Mead et J.
Robinson Wheeler, version 2 d’avril 2011, disponible librement au téléchargement sur Internet au
format PDF  :
http://www.lulu.com/items/volume_69/10228000/10228464/4/print/IFTheoryBookv2.pdf
[consulté le 11 novembre 2018]. Par ailleurs, un documentaire intitulé Get Lamp
(http://www.getlamp.com/), réalisé par Jason Scott en 2010, est entièrement consacré à la
fiction interactive. Le réalisateur a mis à disposition, en consultation libre, sur le site Internet
Archive la totalité des interviews réalisées pour ce documentaire  :
https://archive.org/details/getlamp-interviews?and[]=mediatype%3A%22movies%22 [consulté
le 11 novembre 2018], par ailleurs, Jason Scott est l’auteur d’un site Internet entièrement
consacré à l’histoire et à l’archivage du mode texte : http://textfiles.com.[consulté le 11 novembre
2018].
4 En anglais : Textual User Interface (TUI), qui se démarque tout d’abord de l’interface en ligne
de commande, mais aussi du GUI, ou Graphical User Interface, qui, lui, fait usage d’un
environnement graphique à base d’icônes, de fenêtres, de menus.
5 À ce propos, on utilisera les termes de jeu vidéo textuel plutôt que fiction interactive, pour la
simple raison qu’aujourd’hui la fiction interactive qualifie un genre vidéoludique qui n’a pas
nécessairement de caractéristiques textuelles.
6 Plus connus en France sous le nom « livres dont vous êtes le héros ».
7 On n’oubliera pas de citer ici un autre studio réputé pour le développement de fiction
interactive, l’anglais Level 9, qui ferma ses portes en 1991. Pour en savoir davantage, consulter le
site Internet The Level 9 Memorial : http://l9memorial.if-legends.org/html/home.html [consulté
le 11 novembre 2018].

https://journals.openedition.org/resf/1680#text 8/10
20/09/2021 16:33 Jeu vidéo et science-fiction >> de mode texte en code texte 
8 On rencontre également pour ce jeu vidéo les noms d’Advent ou de Colossal Cave. William
Crowther, alors membre de l’équipe de développement d’ARPAnet, réalise ce jeu vidéo au début
des années 1970 sur un PDP-10 d’ARPAnet et le diffuse au sein de ce réseau naissant. Passionné
par la spéléologie et Dungeons & Dragons, Crowther imagine un jeu vidéo prenant place dans les
interconnexions de grottes souterraines. Récemment, Ant, auteur du blog Retroactive Fiction, a
fait part de sa découverte d’un jeu vidéo en mode texte qui serait antérieur à celui de Crowther,
du nom de Wander (https://ahopeful.wordpress.com/2015/04/22/wander-1974-a-lost-
mainframe-game-is-found). Cette trouvaille met en évidence la difficulté qui consiste à travailler
sur un pan d’une histoire informatique où nombre de jeux vidéo ont disparu.
9 Ce programme a été élaboré par Joseph Weizenbaum, professeur d’informatique au MIT, au
milieu des années 1960, et met en place un système de conversation écrite entre un être humain
et une intelligence artificielle qui prend le rôle d’un psychanalyste.
10 Ce programme, dédié à la compréhension du langage naturel par une intelligence artificielle, a
été développé à la fin des années 1960 par Terry Winograd au laboratoire d’intelligence
artificielle du MIT.
11 Par exemple, dans le jeu vidéo textuel Planetfall (développé et édité par Infocom, 1983, multi-
plateformes), on y trouve les termes «  ship  », «  control room  », «  interstellar  », «  pod  »,
« intergalactic standard time ».
12 Les fictions interactives d’Infocom peuvent, pour certaines, se jouer aujourd’hui sur PC en
utilisant un émulateur. Elles ont également fait l’objet de nombreuses compilations, éditées pour
la plupart par le studio qui allait racheter Infocom à la fin des années 1980, Activision. Le
récapitulatif de ces compilations est disponible sur le site Internet Moby Games  :
http://www.mobygames.com/game-group/infocom-compilations [consulté le 11 novembre
2018]. Citons ici quelques titres de jeux vidéo de science-fiction : pour Infocom, Starcross (1982),
Suspended (1983), The Hitchhiker's Guide to the Galaxy (1984), A Mind Forever Voyaging
(1985), Leather Goddesses of Phobos (1986)  ; pour Level 9, la série Silicon Dreams avec
Snowball (1983), Return to Eden (1984), The Worm in Paradise (1985).
13 Jeu développé par Ocelot Society, 2016, PC Windows et Mac OS X.
14 Conférence filmée de l’École Normale Supérieure en date du 9 janvier 2017 dans le cadre du
séminaire InGame, «  “In space no one can hear you type”. Nouveaux visages de l’intelligence
artificielle de jeu vidéo autour du jeu Event [0]  », https://www.youtube.com/watch?
v=sVZdYCV43P4 [consulté le 11 novembre 2018].
15 Développé par Croteam, distribué par Devolver Digital, plateformes  : PC Windows et linux,
Mac (2014) ; Android, PlayStation 4 (2015).
16 Le jeu se joue de manière globale à la première personne, c’est en tout cas le point de vue par
défaut, mais il reste modifiable à tout moment pour passer en vue à la troisième personne. En ne
prêtant pas attention à la fonctionnalité laissée par les concepteurs de passer de la première à la
troisième personne, on débutera le jeu en première personne et on découvrira avec surprise, lors
du premier contact avec une console, que l’on endosse le personnage d’un androïde.
17 Un joueur de The Talos Principle s’est occupé à convertir le système hexadécimal en texte
naturel : https://pastebin.com/JCsgGYxT [consulté le 11 novembre 2018].
18 Développé par Grant Kuning, Duang! Games, 2016, plateformes : PC, Mac.
19 Par un clic droit de la souris on ouvre un journal de bord qui permet l’apprentissage pas à pas
du langage sethianais. Une fois arrivé à un certain niveau du jeu vidéo, un dictionnaire devient
disponible et permet par un clic droit d’accéder à la signification de chacun des symboles.
20 Développé par Christine Love, 2010, plateformes  : PC Windows et Linux, Mac OS X,
http://scoutshonour.com/digital [consulté le 11 novembre 2018].
21 Le Bulletin Board System consiste, à la fin des années 1970, à faire usage des ordinateurs
comme serveurs et de les relier par le biais des lignes téléphoniques pour échanger des messages,
des fichiers, etc. L’arrivée de l’Internet public mettra fin à ce système. Certains voient dans les
forums de discussion un prolongement du BBS.
22 Développeur et éditeur : Cabrera Brothers, 2012, plateformes : PC Windows, MAC OS X.
23 Développeur : Team Fractal Alligator, éditeur : Surprise Attack Games, 2015, plateformes : PC
Windows et Linux, Mac OS X, http://www.hacknet-os.com [consulté le 11 novembre 2018].
24 Pour comprendre de manière générale en quoi consiste le Shell, consulter la page Internet
suivante  : http://www.commentcamarche.net/contents/1144-systemes-unix-le-shell [consulté le
11 novembre 2018]. Pour une présentation un peu plus technique, voir  :
http://www.tuteurs.ens.fr/unix/shell/ [consulté le 11 novembre 2018].
25 À part, peut-être, un autre exemple paradigmatique : Hacker Evolution, développé et édité par
Exosyphen Studios, 2007, plateformes : PC Windows et Linux, Mac OS X.
26 Développeur  : Shiny Entertainment, éditeur  : Atari, 2003, plateformes  : PC Windows,
GameCube, PlayStation 2, Xbox.
27 Camille Paloque-Bergès, dans Poétique des codes sur le réseau informatique, Éditions des
archives contemporaines, Paris, 2009, p. 63, donne une assez bonne définition du terme : « Cette
stylisation de l’ambigu par le formel prend le nom, en anglais, d’obfuscation. Cette manipulation

https://journals.openedition.org/resf/1680#text 9/10
20/09/2021 16:33 Jeu vidéo et science-fiction >> de mode texte en code texte 
du code consiste à rendre l’écriture du programme illisible pour le compagnon programmeur –
mais évidemment pas pour l’ordinateur. […] Bien que l’expression ait pu être traduite par “code
impénétrable” en français, j’ai choisi de conserver le terme original, sous la forme de l’anglicisme
“obfuscation”  : en anglais il suppose l’obscurcissement aussi bien que l’offuscation,
rapprochement de valeurs esthétiques et morales intéressant à conserver ».

Pour citer cet article


Référence électronique
Estelle Dalleu, « Jeu vidéo et science-fiction >> de mode texte en code texte  », ReS Futurae [En
ligne], 12 | 2018, mis en ligne le 19 décembre 2018, consulté le 20 septembre 2021. URL :
http://journals.openedition.org/resf/1680 ; DOI : https://doi.org/10.4000/resf.1680

Auteur
Estelle Dalleu
Estelle Dalleu est Docteure en Arts - Études cinématographiques ; elle est chargée
d’enseignement à la Faculté des Arts et membre de l’EA 3402 – Approches Contemporaines de
la Création et de la Réflexion Artistiques de l’Université de Strasbourg ; elle est également issue
du monde professionnel du jeu vidéo. Son principal objet de recherche académique s’intéresse à
l’esthétique et à l’histoire du jeu vidéo. Elle a organisé en 2015 des journées d’études
consacrées aux singularités du jeu vidéo, et elle participe à des colloques et des publications en
lien avec cette problématique de recherche (pour la revue Komodo 21 : « [Formes
contemporaines de l’imaginaire informatique] >> hacking > < jeu vidéo »
[http://komodo21.fr/formes-contemporaines-de-limaginaire-informatique-hacking-jeu-video];
« Kara : métadiscours vidéoludique autour de l’androïde » contribuera prochainement à l’ouvrage
Animé/Anima : Robots, marionnettes, automates sur scène et à l’écran [Éditions Lettres
modernes Minard] ; « De quelques circonvolutions vidéoludiques : cercle, spirale et boucle », est
à paraître dans Circonvolution(s). Monographie d’un mouvement du cinéma).

https://journals.openedition.org/resf/1680#text 10/10

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