Vous êtes sur la page 1sur 5

Alvin Langdon Coburn et la photographie picturale

La «Toile d'araignée» («Spider Webs») a été crée par Alvin Coburn en 1907, et a été
publiée durant l`année prochaine dans «Camera Work», le journal de photographie proposé par
Alfred Stieglitz, entre 1903 et 1917, à New York. Gravures étaient produites pour la publication
d`après les négatifs originaux des photographes, quand c`était possible, ou quelquefois d`après
des impressions originales. Si la gravure venait d`un négatif, le fait était précisé dans la légende
accompagnant l`image, et donc elle était considérée comme une impression initiale. De toute
façon, la “Toile d`araignée” a été décrite comme un “demi-ton”, le résultat d`un processus a
travers lequel la gradation des nuances dans une image est rendue par, premièrement, la
photographier a travers un écran, pour séparer les tons dans des points étroitement espacés, puis
par utiliser l`impression obtenue pour produire une plaque de métal, en photo˗gravure, et
finalement en utilisant la plaque pour reproduire l`image originale par la typographie.

Les années 1906 – 1912 ont été appelées «la période symboliste» de Coburn, quand il a
commence de présenter ses expositions individuelles a la Royal Photographic Society de
Londres, accompagnées des catalogues préfacés par George Bernard Shaw, et a la Liverpool
Amateur Photographic Association. En même temps, il avait commencé d`étudier la
photogravure a la  London County Council School of Photo-Engraving. C`est a ce temps la qu`il
a photographié un de ses portraits les plus fameux, celui de Bernard Shaw en posant comme “Le
Penseur” de Rodin.

Il voyage a Paris, où il découvre le procédé des autochromes de Steichen, qu`il apprend,


lui aussi. Il revient en Amérique, pour photographier la collection d`art oriental de Charles Lang
Freer, et devient captivé par le style «exotique» des artistes de l`Est, qui commence de
l`influencer dans sa pensée, comme dans sa photographie. Il continue ses voyages avec une visite
à Dublin, ou il prend de photos portraites de W. B. Yeats et George Moore. En Amérique, en
1910, il photographie Le Grand Canyon et le Parc National Yosemite. En 1912 il retourne a New
York, où il crée quelques unes de ses plus célèbres photos du point de vue contreplongée, et
aussi son plus connu paysage photographique intitulé «La Pieuvre». 
«La toile d'araignée» aurait hésité entre une nature morte et une marine si elle avait été
une peinture, car elle représente trois voiliers de dimensions diverses, dans la rade du port de
Liverpool, leurs réflexions dans l`eau et, au fond face et droite, des figures qui semblent être
celles de quelques bâtiments. Néanmoins, les accents de l`image tombent sur les mats et
l`installation des voiles serrées des navires, d`autant que sur leur reflets dans la mer, qui donnent
en vérité l`impression de composer une toile d'araignée. Les couleurs restent dans une gradation
du blanc, par des gris perle lumineux, jusqu`aux noirs, mais quelquefois créent l`impression du
bleu, spécialement dans quelques espaces ombragés de l`eau.

La symétrie de l`image est organisée sur une diagonale qui vient du coin haut gauche vers
le coin bas droit, ce qui est aussi la direction de la lumière. Tous les objets proprement dits sont
dans la moitie droite haute de la photographie, tendis que la part gauche basse est occupée
uniquement par la Mer d`Irlande et les réflexions respectives des mats et des cordes des voiles.
La focalisation est plus précise sur le voilier du milieu, et sur celui auquel il est presque collé, en
droite, mais de ce deuxième on peut voir seulement la partie gauche de la coque et, de nouveau,
un mat et des cordes de voile. Aussi en bout face, où ils se rencontrent à peu près, on peut
distinguer la moitié du corps d`une petite barque, perpendiculaire sur le voilier du milieu, qui
marque le passage vers la partie-fond, beaucoup plus flou, de l`image.

On peut éventuellement aussi parler d`une distribution en trois plans des formes
représentées, le premier constitué uniquement du miroir de la mer et des reflets des parts
supérieures des navires, le deuxième révélant le voilier du milieu et la coque de l`autre, plus
grand, et un bâtiment plutôt deviné sur la terre, jusqu`a la petite barque, ainsi que l`arrière plan,
composé du troisième voilier, flou comme dans un brouillard; ce troisième voilier est vu presque
jusqu’au bout des mats, donc dans une représentation intégrale, et ces sont les réflexions en eau
de ses installations de cordes qui occupent la plupart de la partie gauche-face de la photographie.
Tout au fond, sur ce qui semble être une autre part de la terre, on peut deviner encore quelque
chose qui rappelle des cheminées sur les toits de certaines constructions, décrits sur un ciel gris,
mais pas nuageux.

La peinture à la quelle cette photo renvoie le plus c`est probablement une marine
d`Eugène Boudin, qui représente trois navires et une petite barque dans le port de Deauville, et
qui se trouve au musée de Le Havre. Les voiliers sont encore reflétés dans l`eau, mais ils sont
figurés en entiers, et occupent l`espace central du tableau, son deuxième plan (le premier étant
toujours occupé par la mer), comme des véritables liens entre l`eau d`au-dessous et le ciel de
haut. La barque, qui est bien séparée des grands navires, entre en cadre de la partie droite de la
toile, aussi vue en moitié, mais cette fois-ci avec un personnage au bord. La ligne de la terre est
plus basse que dans la photographie de Coburn, et le seul bâtiment qu`on peut y distinguer est
une maison minuscule, entourées de trois arbres. En plus, il y a évidemment ici des couleurs,
mais la palette est très discrète, on peut remarquer surtout quelques bruns pour le bord de la mer,
et la seule véritable tache de rouge, bleu foncé et blanc pur, qui sont les étendards des bouts des
mats. Pour le reste, les tons mis en jeu sont toujours les blancs - gris jusqu`au noir et les bleus
pals, soutenus par la lumière et les ombres.

Eugène Boudin est par excellence un peintre marin, exercé en matière de rendu de tout ce
qui est lié à la mer et à ses côtés. Il peint spécialement de nombreux tableaux décrivant la vie des
pêcheurs sur les ports et les marchés, ainsi que celle des familles bourgeoises du XIXe siècle sur
les plages de Normandie. L'importance du ciel et des effets atmosphériques dans ses peintures lui
vaut d'être surnommé le « roi des ciels » par l`artiste français Camille Corot et le « peintre des
beautés météorologiques » par Charles Baudelaire. Ce peintre des paysages donne en effet une
grande importance au soleil, aux nuages, au ciel et à leurs effets changeants sur le paysage en
mouvement.

On suppose, même sans penser a la maitrise de l`artiste, le plus souvent, que le but, la
signification première d`une marine, c`est une ouverture envers l`infini, envers les espaces
lointaines d`autres mondes, différents, plus beaux que celui où on se trouve; l`image de la mer
renvoie à une intériorité de l`âme, qui est la même pour tous, mais de la quelle on s`égare
continuellement, a cause des soucis de l`existence matérielle, quotidienne. Les voiliers, aussi,
sont différents des bateaux aux vapeurs. Ils sont le moyen de voyager des navigateurs de tous les
temps, ils ont porté Ulysse et Christophe Colomb, ils ont conquis les océans et ont fait du monde
un univers connu, ont établi des liens entre des êtres humains complètement différents et, donc,
entre des espaces de pensée divergents.
La toile de Boudin rappelle tout cela, et aussi le fait du retour à la maison. Le cadrage du
tableau est envers le bord de la mer, pas envers le large de la mer. La composition inclue une
barque qui revient au port, et les navires sont ancrés dans la rade. La petite maison est aussi le
signe du foyer, de la famille, de la paix du voyageur qui a regagné son pays ou sa demeure. Ce
qui est tout à fait différent de la suggestion que crée la photographie de Coburn.

Cette «Toile d'araignée» donne un peu l`impression d`un voyage sans fin ou sans but; la
terre est si brouillardée qu`on presque doute son existence. Ou, si elle existe vraiment, cela n`a
pas totalement l`air d`un endroit où on veut arriver… ou on peut arriver. Aucun personnage
n`apparait dans l`image. C`est un peut comme si le paysage était intérieur, dans un cœur, et pas
extérieur, dans l`univers matériel. La petite barque parait aussi s`éloigner du bord, et pas revenir
au foyer, comme le symbole de quelque action quotidienne de Sisyphe. Les grands voiliers
semblent signifier des grands systèmes de pensée, mythologiques ou philosophiques ou
sociologiques, peu importe, qu`on utilise pour naviguer un étrange océan des moments vécus,
qu`on ne sait pas comment harmoniser et comment comprendre. Ce qu`on voit le mieux dans la
photographie, c`est la réflexion des cordages des voiles des navires dans la surface de la mer, et
le titre de l`œuvre insiste sur cet aspect. L`homme, ou l`européen spécialement, se trouve dans la
piège instrumentale de sa quête éternelle, dans un voyage presque désespéré vers une Ithaque
rêvée, de laquelle on a peut-être oubliée l`essence, ou dont on doute la vie même…

Si, dans l`âge de la photographie picturale, ce nouveau art essayait de se conquérir un


statut comme tel, a partir des valeurs esthétiques, plutôt que de la reproduction exacte de la
réalité ambiante, cela semble certain que Alvin Coburn a mis dans ses photos pas seulement la
qualité impressionniste d`arrêter le moment sans l`interrompre, mais aussi une richesse de
significations que la peinture même ne réclamait peut-être pas.

Ioana Tataru, No. 15606052

ERASMUS FAD TIMISOARA, Histoire et théorie des arts

Histoire de la photographie moderne, 1910 - 1980

Décembre 2015

Vous aimerez peut-être aussi