Vous êtes sur la page 1sur 162

DEDICACE

Je dédie à tous les membres de ma famille nucléaire ainsi qu’à ma grande


famille ce travail de recherche. Leurs soutiens et leurs prières m’ont permis de
réaliser cette œuvre si importante.

1
SOMMAIRE
DEDICACE………………………………………………………………………1

SOMMAIRE……………………………………………………………………...2

REMERCIEMENTS…………………………………………………………......4

SIGLES ET ABREVIATIONS………………………………………………......5

INTRODUCTION……………………………………………………………..…7

PREMIERE PARTIE : LA MISE EN PLACE D’UNE

ECONOMIE COTONNIERE EN PAYS TAGBANA

(1905-1924)……………………………………………………………………...27

CHAPITRE I : DES FACTEURS FAVORABLES A LA MISE EN

PLACE D’UNE ECONOMIE COTONNIERE………………………………….30

CHAPITRE II : LA CREATION DES PREMIERS CHAMPS

COLLECTIFS DE COTON……………………………………………………...41

CHAPITRE III : L’INTRODUCTION DU MATERIEL INDUSTRIEL……….66

DEUXIEME PARTIE : LA PROSPERITE ET LA DECADENCE DE


L’ECONOMIE COTONNIERE EN PAYS TAGBANA (1924-1946).............83

CHAPITRE IV: LA PROSPERITE DE L’ECONOMIE COTONNIERE............85

CHAPITRE V : LA DECADENCE DE L’ECONOMIE COTONNIERE……….95

CHAPITRE VI : L’INFUENCE DE LA DEUXIEME GUERRE MONDIALE..106

2
TROISIEME PARTIE : L’IMPACT DE L’ECONOMIE COTONIERE

EN PAYS TAGBANA ………………………………………............................110

CHAPITRE VII : LES CONSEQUENCES AU NIVEAU ECONOMIQUE…...112

CHAPITRE VIII : LES CONSEQUENCES AU NIVEAU SOCIAL…………...119

CONCLUSION ..................................................................................................132

ANNEXE……………………………………………………………………….136

ENTRETIEN…………………………………………………………………..141

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE...................................................................142

TABLE DES ILLUSTRATIONS……………………………………………..157

TABLE DES MATIERES………………………………………………….….159

3
REMERCIEMENTS

A Monsieur Latte Egue Jean-Michel, professeur titulaire d’histoire des


économies et des civilisations à l’université Alassane Ouattara de Bouaké et
Directeur du centre de formation continue,
A tous les enseignants chercheurs de la faculté d’histoire de l’université
Alassane Ouattara de Bouaké,

A Monsieur Coulibaly Kolo, chef de canton de Katiola,


A Monsieur Gouanou Albert , ex Directeur général de l’hôtel hambol de
Katiola,
A Monsieur Yomi Roger , planteur a Biantouo 1 dans la Sous- Préfecture
de Zouan-Hounien,
A Madame Zieuga Monwakeu Odette, ménagère à Biantouo dans la Sous-
préfecture Zouan-Hounien ,
Avec une mention spéciale à :
Madame Yomi née Ban Wokapeu Adèle , institutrice à l’école primaire
public de Konankaha 1 dans la circonscription de l’enseignement préscolaire et
primaire de Katiola sans oublier nos enfants : Yomi Uriel, Yomi Paul Arthur et
Yomi Joseph Armel et Yomi Rebecca.

4
SIGLES ET ABREVIATIONS

ACC : Association Cotonnière Coloniale.

ANADER : Agence Nationale d’Appui au Développement Rurale.

ANRCI : Archive Nationale de la République de Côte d’Ivoire.

AOF : Afrique Occidentale Française.

BIT : Bureau International du Travail.

C
CERAP : Centre de Recherches et d’Actions pour la Paix.
CIDT : Compagnie Ivoirienne pour le développement du Textile.

CNA : Chambre Nationale d’Agriculture.

CNRA : Centre National de Recherches Agronomiques.

ERG : Entreprises Robert Gonfreville

FAO : Fond des Nations Unies pour l’alimentation.

FIT : Front Intertropical.


G

GERDAT : Groupement d’Etude et de Recherche pour le Développement de


l’Agronomie Tropicale.

5
I

INADES : Institut National pour le Développement Economique et Social.

IRCT : Institut de recherche du Coton et des Textiles Exotiques.


O

ORSTOM : Office de la Recherche Scientifique et Technique d’Outre-Mer.

UCEF : Union Cotonnière de l’Empire Français.

SDN : Société Des Nations.

6
INTRODUCTION

7
I.JUSTIFICATION DU SUJET

1. Définition et intérêt du sujet


Les principaux thèmes de notre sujet sont : l’économie cotonnière, le pays
Tagouana que nous allons définir :
L’économie est d’une manière générale l’ensemble des activités d’une
collectivité humaine, relative à la production, à la distribution et à la consommation
des richesses ; mais ici, elle concerne particulièrement le coton.
Le pays Tagbana que l’on peut appeler aussi cercle Tagouana est l’une des
entités administratives crées par l’administration coloniale avec deux subdivisions
(Dabakala et Darakolondougou). Le chef-lieu du cercle fut Dabakala. Les ethnies
qui composent ce lopin de terre et ce jusqu’à ce jour sont les Tagouana, les Djimini-
djamala, les Sénoufo et de populations allochtones et allogènes. Les Etats d’Afrique
noire ont généralement conservé comme langue officielle celle de l’ancienne
puissance coloniale.
Par ailleurs, le désintérêt de la plus part des historiens qui se penchent sur le
passé de l’Afrique dès les premières heures de la colonisation paraît à première vue
justifiée d’une part, sur le plan africain, par l’absence d’évènement « saillant » et
d’autre part, sur le plan européen par le premier conflit mondial, qui monopolisait
toute l’attention de l’opinion publique.

Au vue de cette explication, nous sommes tentés de comprendre le mécanisme


de la mainmise de la métropole sur les colonies dont la Côte d’Ivoire à travers des
systèmes d’exploitation.

Dans cette logique, nous prîmes un thème sur un pan de l’histoire de la Côte
d’Ivoire dans ledit système et singulièrement dans la région du hambol qui fut en
1912 dans le cercle de Kong avant de devenir plus tard un cercle à part entière
s’appelant ainsi le cercle Tagouana.

Il s’agit de l’économie cotonnière dans le pays tagouana de 1905 à 1946.


Notons que le pays Tagouana à l’époque coloniale était composé du « Sénoufo du
Sud » avec deux grands compartiments ethniques à savoir le « pays » Tagouana

8
allant de Katiola à Tafiré et le « pays » Djimini-djamali focalisé dans la zone de
Dabakala.

La culture du coton est pratiquée par les populations du pays Tagouana depuis
la période précoloniale à l’instar des autres peuples du nord ivoirien. Mais sa culture
à grande échelle fut imposée par le pouvoir colonial dans la première décennie du
XXème dans le but de satisfaire la demande des industries métropolitaines et de
mettre à la disposition de celle-ci du coton à bon marché.

La présente étude est une esquisse d’un pan de l’histoire de ladite zone, en
Côte d’Ivoire (Afrique de l’ouest). Elle a été réalisée à partir de deux types de
sources : les sources écrites et orales.

Les champs collectifs sont des champs crées par des groupes de personnes sous
l’impulsion de la métropole. L’obligation est faite de façon générale aux
populations des colonies de faire des travaux à motricité humaine pour la
satisfaction des besoins de la métropole. Ainsi les champs de coton ont été faits de
façon obligatoire. Pour être encore plus explicite sur la question notifions que les
sources écrites ont été collectées à Katiola, à Abidjan, à Bouaké. Certaines de ces
sources écrites ont été obtenues à partir des ouvrages étudiant le grand groupe
Sénoufo.

Un intérêt se dégage donc : montrer aux populations ivoiriennes et mieux du


monde entier l’évolution de l’économie cotonnière dans le pays Tagouana pendant
la période coloniale.

2. Les motivations

Les raisons personnelles de nos recherches sur l’économie cotonnière dans le


cercle Tagouana sont nombreuses. En effet cette zone longtemps rattachée au cercle
de Kong a connu, elle aussi, les abus de la colonisation dus à l’instauration des
champs collectifs. Au moment où le sud était matérialisé par les cultures café, du
cacao, du palmier à huile, de coco ; le grand Nord savanicole et plus
particulièrement le pays Tagouana s’est vu imposé la culture du coton. Cette zone

9
est devenue une région à part entière aujourd’hui et est traversée par le chemin de
fer mais conservant tout de même l’ancienne route commerciale du Soudan. Par
ailleurs, il est plus que motivant pour un originaire de l’ouest montagneux de faire
des recherches sur l’économie cotonnière dans ledit cercle. Cette zone peuplée par
les ethnies Tagouana, Mangoro et des Malinké fait partie du pays sénoufo sans
oublier une forte population allochtone.

En plus des motivations personnelles, celles dites scientifiques ne sont pas à


proscrire. En effet au niveau scientifique, il faut signaler que l’économie cotonnière
dans le secteur de Katiola à l’époque coloniale est peu connue des contemporains.
Très peu de travaux d’historiens y ont été consacrés. Par conséquent nous voulons
apporter notre contribution à la connaissance de la mise en place de l’économie
cotonnière dans le cercle Tagouana.

3. Justification des bornes chronologiques

Selon l’historien burkinabé Joseph Ki Zerbo, cité par le professeur


Godjé Sekré Alphonse à travers sa thèse de Doctorat unique,

« C’est à travers le temps que l’homme fait son histoire et l’historien qui veut
remonter le passé sans repère chronologique ressemble au voyageur qui parcourt
dans une voiture sans compteur une piste sans borne kilométriques »1

Par conséquent, dans cette logique et pour mieux cerner le contexte historique
de notre étude, nous avons retenu la période de 1905 à 1946.

En effet l’année 1905 est une date impérieuse dans la mise en œuvre de la
politique d’imposition en Côte d’Ivoire et surtout en pays Tagbana. Les premiers
essais des champs de coton ont lieu en cette année-là à Dabakala2 en tant que chef-
lieu de cercle, en plus de ceux effectués dans la même année dans les cercles de

1
- S.A, GBODJE, 2005, évolution économique de Bouaké : De l’économie précoloniale à
l’économie de marché (1858-1939) ; Thèse de Doctorat unique d’Histoire Contemporaine,
Université de Cocody, p.24
2
- H.Y D’ALEPE, 1979, une économie de transition : La Côte d’Ivoire de 1893 à 1919, Paris,
Université, Paris VII, thèse de doctorat 3eme cycle, Histoire, p223.

10
Kong et de Bouaké. Mais signalons que c’est véritablement en 1898 que les français
prennent possession du pays Tagbana. En 1905 Il va s’en suivre un régime de
réquisition quelques années plus tard par l’instauration des « champs de coton du
commandant ». Dès le début de la période coloniale, les cultivateurs ne produisaient
pas assez de coton fibres pour les besoin de l’industrie textile française. Les
nombreuses tentatives des administrateurs coloniaux pour intensifier la culture du
coton n’ont presque jamais donné des résultats satisfaisants.

Comme le stipule un adage judéo-chrétien, chaque chose a un début et une fin.


Cela dit, toute vie a donc une fin. La culture du coton à l’époque coloniale dans le
pays Tagouana n’a pas échappé à cette loi du temps. Démarré au début du XXème,
la culture du coton imposée par le système colonial s’arrête en 1946 et précisément
le 11 avril. La loi sur l’interdiction du travail forcé dans les territoires d’outre-mer
n’a pas été initiée par un français, il ne faut donc pas leur en demander plus. Elle
est le fruit du combat d’un planteur ivoirien, élu député en octobre 1945 à
l’assemblée constituante, il s’agit de feu Félix Houphouët Boigny qui en fut
l’initiateur et le rapporteur.

En un mot, la mise en relief des bornes chronologiques par une définition


expressive et explicite a permis de situer notre thème dans le temps avec pour repère
des faits historiques majeurs qui émaillent l’histoire économique de la Côte d’Ivoire
moderne. Il importe dès maintenant de préciser le cadre géographique du sujet.

4. Cadre géographique

Il s’agit de circonscrire chronologiquement les faits historiques dans un espace


géographique. Si notre zone d’étude est le cercle Tagbana à travers l’économie
cotonnière, il faut cependant signaler que l’espace de production du coton est la
grande zone savanicole dont fait partie le pays Tagbana. En témoigne cette carte-ci.

11
Carte no 1 :

12
Le milieu physique et humain a joué un rôle important dans l’histoire du
cercle Tagouana3 dont un pan fait l’objet de notre étude. Longtemps rattaché au
cercle de Kong, il a été détaché par une décision de l’administration coloniale. La
situation de cet espace administratif, en effet, explique l’extraordinaire brassage
culturel que l’on y observe, et ses différents sites manifestés par les départements
de Katiola, Dabakala et Niankara sont les principaux facteurs de son peuplement.

La majorité des éléments constitutifs de sa population actuelle résulte des


acteurs de son histoire et la configuration de son habitat est l’image des vicissitudes
qu’il a connues depuis sa création à travers ce cercle composé de subdivision, de
cantons et de villages.

Le rôle administratif, politique et économique4 que joue cette zone dans la


Côte d’Ivoire moderne n’est que le prolongement de celui qu’elle a exercé au cours
de son expérience historique. La région d’une façon générale jouit d’un climat de
type sub-soudanais qui comporte quatre saisons, dont deux saisons de pluie (du
mois de mars à celui de juin et du mois de septembre à octobre). Celles-ci sont
entrecoupées de deux saisons sèches qui s’étalent de novembre à février et de juillet
à août. La pluviométrie annuelle oscille entre 1100mm et 1200mm avec une
température moyenne autour de 27oC.

Elle compte aussi une institution de formation et d’éducation féminine située


au chef-lieu, l’un des 90 centres de cette nature existant dans le pays avec pour
objectif de permettre aux femmes analphabètes, aux jeunes filles non scolarisées ou
déscolarisées, aux femmes agricultrices de trouver une opportunité pour le
développement d’aptitudes nouvelles permettant leur insertion ou leur
autonomisation. À cela il faut ajouter des établissements primaires, secondaires
publics ou privés et des établissements techniques. Cette zone est aujourd’hui la
région du Hambol.

3
- T.F Ouattara, Côte d’Ivoire Katiola des origines à nos jours, p.11
4
- T.F Ouattara, idem, p.11

13
Carte no2 : Le cercle Tagouana dans la Côte d’Ivoire coloniale

Source : T. Ouattara, Katiola, Côte d’Ivoire, Katiola des origines à nos jours, p117.

Ce cercle était limité au Nord par le cercle de Kong, au Sud par le cercle du
Baoulé, à l’Est par le cercle de Bondoukou et à l’Ouest par le cercle du
Worodougou. La végétation de notre zone d’étude est d’une part la savane arbustive
en allant vers le nord et la savane arborée vers les limites du sud et de l’est. Les
savanes arborées et les forêts galeries prédominent dans le climat baouléen. Ces
forêts selon Tiona Ouattara sont «parsemées de bosquets ou d’autres arbres comme
le rônier ; les fleuves et les cours d’eau sont les lieux privilégiés des forêts
galerie »5.On note également les îlots de forêts sur les plateaux. C’est le cas de la
colline du Hambol de Katiola. La connaissance de cet environnement est importante
en ce sens qu’il a favorisé l’implantation humaine.

5
Tiona OUATTARA 1998, Côte d’ivoire, Katiola des origines à nos jours, Abidjan, NEI, p15

14
Notre étude sur l’économie cotonnière dans le cercle Tagbana couvre un
canevas bien précis. Ainsi, Le travail va se faire de 1905 à 1946. Les champs
collectifs dont est tiré le thème sur l’économie cotonnière n’était pas seulement
l’apanage des populations ivoiriennes. Ils se faisaient à l’échelle du continent
africain. En Côte d’Ivoire ils furent institués en 19126.

Par la traversée du chemin de fer, la construction des ponts, la création de


grands champs de sésame, de coton et de sisal, le passage de la route commerciale
du Soudan et j’en passe, Le cercle Tagouana a subi aussi les affres de cette
colonisation.

II - Etat de la question

Avant d’aller en profondeur dans nos recherches, et pour mener à bien nos
travaux afin d’aboutir à la manifestation de la vérité eu égard à notre thème, nous
avons d’emblée eu recours à certains ouvrages contemporains. En effet, concernant
l’étude historique et spatiale de la Côte d’ivoire dont l’instauration des champs
collectifs, de nombreuses études ont été réalisées. Malheureusement, ces travaux
n’ont abordé la notion de l’économie cotonnière en pays Tagouana que de façon
partielle. A titre d’exemple :

Ouattara Tiona Ferdinand dans son œuvre intitulée Côte d’Ivoire,


Katiola, des origines à nos jours mettant en relief l’évolution politique,
administrative, socioculturelle et même ethnique le démontre d’ailleurs. C’est une
œuvre généralisant, qui malgré qu’elle parle de l’évolution de la cité de Katiola,
chef-lieu actuel de la région de Hambol n’a pas fait cas des champs collectifs dans
ladite zone.

Mieux, l’auteur dans son étude a manqué de souligner la notion de l’économie


cotonnière dans la région. Par ailleurs, le mécanisme de la mise en place de
l’économie cotonnière, un pan du système de travail forcé qui bouleversa la vie des

6
- ANRCI, 1RR 63, Situation de la culture du coton en Côte d’Ivoire de 1912 à 1924.

15
populations africaine ne fut pas mise à jour même de façon suscinte à l’époque
coloniale.

Les œuvres dont celles d’Amon D’Aby : La Côte d’Ivoire dans la cité

africaine ; La Côte d’ivoire par les textes de Simon Pierre Ekanza illustrent
bel et bien cette étude liminaire générale sur l’économie, mais précisément de
l’économie cotonnière en pays Tagouana.

HERBEL, DENIS, La compétitivité du coton ivoirien, 1996,195p. Il fait


une étude générale de la qualité du coton ivoirien comparativement à celle des
autres pays producteurs de la sous-région. L’accent ici est mis sur la production, la
vente, le traitement, l’exportation et bien d’autres aspects encore. C’est une œuvre
de généralisation.

Thomas .J. Basset, dans son ouvrage intitulé Le coton des paysans (Côte
d’Ivoire 1880-1999), une révolution agricole quant à lui parle effectivement du
coton ivoirien. Il montre dans cette œuvre la situation précoloniale du nord de la
Côte d’ivoire à partir du choc des empires.

Abordant même le travail cotonnier au nord, il s’est plus focalisé dans la zone
de Korhogo avec le village de kitiali pris de temps à autre comme exemple. Il fait
même la carte postale de ladite ville. Il parle du coton dans le nord avec un seul
compartiment exploité qui est Korhogo. Mention n’est pas faite à en point douter
des zones de Ferké, Odienné…mieux de Katiola qui fait l’objet de notre étude.

A cela s’ajoute le mémoire de fin de cycle dont le thème est « Le contrôle


interne dans la circulation de la matière première coton dans les usines UTEXI »,
présenté par Kouamé Lydie inscrite en MSTCF et sous l’encadrement du Docteur
en gestion ALLA Koua, avec pour maître de stage M. Kouamé Raymond,
contrôleur de gestion, auditeur interne dans ladite usine.

16
Pour parvenir à des résultats, il importe de dégager la problématique
indispensable à la compréhension d’ensemble. Dès lors, après avoir fait l’état de la
question, étalons-le contenu de ladite problématique.

III – PROBLEMATIQUE

Avec la crise de l’économie caoutchoutière et oléagineuse, l’administration


coloniale veut axer le développement de l’économique de la Côte d’Ivoire sur
l’agriculture. Les principales cultures d’exportation choisies sont entre autre le
cacaoyer, le caféier pour la zone forestière et le cotonnier pour les zones de savanes.

Dans les régions de savane et notamment dans le pays tagbana, la culture du


cotonnier est connue par les populations depuis des siècles. Mais elle était une
culture secondaire. De ce fait, on est emmené à se poser de nombreuses questions.

Comment l’économie cotonnière va-t-elle évoluer dans le pays Tagouana ?


Quelles sont les stratégies mises en œuvre par le pouvoir colonial pour la
développer dans le cercle Tagouana ? Quelle est l’influence de l’économie
cotonnière dans le cercle pays Tagouana ?

1-Objectif général

Ce mémoire veut montrer l’évolution de l’économie cotonnière dans le cercle


Tagbana ou en pays Tagbana.

De cet objectif général, on dégage les objectifs spécifiques suivants :

2- Objectifs spécifiques

Mettre en exergue les raisons de la mise en place de l’économie cotonnière

dans le cercle Tagouana.


Montrer l’organisation de cette économie cotonnière.
Présenter les conditions de travail dans les champs collectifs de coton.
Analyser le rôle du pouvoir colonial dans l’instauration de l’économie
cotonnière dans le cercle Tagbana.

17
Montrer l’évolution de la production cotonnière dans le cercle Tagouana.
Faire ressortir les effets de la crise de l’économie cotonnière dans le cercle
Tagbana.
3-Hypothèses de travail

Nous élaborons des hypothèses suivantes pour atteindre nos objectifs.

- La satisfaction des besoins des industries textiles métropolitaines en coton fibre.

- La recherche de la capacité des populations Tagouana à persévérer au travail et


à y tenir longtemps par les colons car selon eux c’est une population paresseuse.

- La maîtrise des conditions climatiques pour injecter des variétés de coton à


rendement élevé.

- La valorisation certaine des variétés locales de coton déjà connues des


Tagouana.

Par conséquent, pour la réussite de cette étude, nous faisons appel à une
méthodologie appropriée.

IV – METHODOLOGIE

Pour la réussite de notre travail de recherche, nous avons suivi une démarche.
Cette dernière se scinde en différentes étapes. Durant la première, nous avons ciblé
tous les documents et informations relatifs à la mise en place du coton en Côte
d’Ivoire. La moisson est passable car nous avons eu moins de textes écrits, quelques
sources orales et des archives ont été retrouvées. Ces données ont été collectées
dans différents villages et le chef-lieu de la zone en plusieurs lieux.

1. Les sources

La quête de documentation en rapport avec notre sujet d’étude nous a conduits


vers plusieurs lieux publics et privés contenant des informations.

Bouaké, Abidjan et Katiola sont les trois champs de nos différentes recherches.

18
a. Les sources d’archives

Les sources écrites collectées sont composées des travaux réalisés par les
Ministères de l’Etat, des documents privés octroyés par des intellectuels, des
archives catholiques 7 , des archives nationales de Côte d’Ivoire. La collecte des
sources dans notre zone d’étude ne s’est pas faite sans difficultés.

En effet la situation socio politique du pays a été un handicap sérieux dans


l’acquisition de ces sources. La zone d’étude étant sous contrôle de la rébellion, la
plupart des archives municipales et préfectorales ont été détruites.

Dans les administrations, même réhabilitées, il n’existe pas de documents


susceptibles d’aider l’historien. Nous nous sommes contentés des archives
catholiques et toute autre source écrite notamment les archives nationales.

La collecte des archives nationales s’est effectuée à Abidjan. Les techniciens


ont pu mettre à notre disposition des documents originaux, des manuscrits
dactylographiés ou non, des Monographies et des microfilms.

Les fonds d’Archives Nationales de Côte d’Ivoire(ANCI) sont constitués pour


la plupart de lettres, de télégrammes échangés entre le ministre des colonies, le
gouverneur et les commandants de cercle, de rapports de tournées, de décrets.

Pour notre étude, nous avons consulté les séries suivantes :

La série D (administration générale) révèle la subordination de l’autorité


coutumière aux Français. Cette série permet d’avoir des informations sur les
successions des chefs Tagbana à l’époque coloniale.

Nous avons pu consulter les dossiers suivants de cette série :


* 2DD 86 cercles des Tagouana. Inspection de Dabakala. Rapports de tournées
1922-1925.
* 2DD 121 cercles des Tagouanas. Décisions et correspondances relatives à la
limite de la circonscription de Katiola 1913-1916/1922-1929.

7
Archives collectées à la cathédrale sainte Jeanne d’arc de Katiola et dans d’autres églises de la
région.

19
* 6DD 20 cercles des Tagouanas. Rendement des impôts dans le cercle des
Tagouanas, 1918, XVIII-9-391.

La série E (affaires politiques)

Dans cette série, nous avons consulté les dossiers suivants :


*1EE184 cercle des Tagouana Rapport mensuel.
*1EE184(2) Rapport de fin de gestion sur la situation d’ensemble du cercle
1918.
*2EE Affaires indigènes.
*1EE25(3) cercle de Kong. Rapports des tournées 1910-1912.
*1EE36 cercle du Baoulé nord
*3EE affaires musulmanes.
*3EE2(10) cercle des Tagouanas. Rapport sur l’islam dans le cercle, 1914.
Ces dossiers ont permis de collecter des informations sur l’installation de la
colonisation dans le Nord de la côte d’Ivoire de même que les actions menées pour
diriger et exploiter la région des Tagbana. D’autres éléments importants portant sur
l’organisation administrative, les conquêtes de Samory Touré, les coutumes
tagbana, l’esclavage des Tagbana en pays baoulé ont été livrés dans cette série.

La série H (santé) fait non seulement l’inventaire des maladies endémiques


mais éclaire davantage sur les dispositions prises par l’administration pour
solutionner le problème de l’hygiène et de la salubrité dans la colonie.

La série K (travaux publics) a été utile pour appréhender le poids et les


conséquences de la réalisation des travaux publics sur les populations ivoiriennes.
Il s’agit entre autre du tracé des routes, du chemin de fer.

Les dossiers suivants de cette série ont été consultés :


* 5KK chemin de fer et voies Decauvilles.
* 5KK 32 Côte d’Ivoire, Correspondances relatives à l’exploitation du chemin
de fer de la Côte d’Ivoire, 1922-1928.
*5KK 66 Résumés, croquis schématiques indiquant l’avancement des travaux,
1923, Côte d’Ivoire.

20
*5KK 83 Côte d’Ivoire, Correspondance relative au prolongement du chemin
de fer au nord de Bouaké (1923-1924).
*5KK 86 Côte d’Ivoire. Rapports semestriels sur le chemin de fer en Côte
d’Ivoire, 1924-1926.
Enfin la série M (justice) informe sur la pratique et le fonctionnement de la
justice indigène.

La série Q (affaires économiques) ébauche les potentialités économiques des


cercles. Elle permet de se rendre compte du désintérêt des Tagbana au commerce.

Le dossier 1QQ101 : Rapports sur la situation économique et commerciale


des cercles 1916-1918 permet de savoir les bouleversements occasionnés par
l’économie monétaire en pays tagbana. L’impact de l’impôt sur les populations
tagbana est aussi mentionné dans les archives.

La série R (affaires agricoles) fournit des informations sur les produits


agricoles du cercle de Kong notamment le coton qui a été la culture de rente
développée en pays Tagbana.

Au total, les archives de par leur diversité sont d’une importance dans
l’élaboration de notre étude. Elles fournissent des informations très utiles. La
collecte s’est faite sous forme de prises de notes au plateau assortie de la mise en
forme à la maison.

Ces informations ont permis d’avoir une connaissance plus approfondie sur
l’économie cotonnière en pays Tagbana. Pour les traiter nous avons procédé par un
regroupement pour sélectionner l’essentiel. Il faut signaler que nous avons
rencontré d’énormes difficultés dans la collecte des informations. Il s’agit entre
autre du vieillissement avancé des documents consultés aux archives nationales de
Côte d’Ivoire, le retard que nous avons accusé pour arriver sur le lieu de la
recherche. A cela s’ajoute le transport exorbitant dans le district d’Abidjan. Par
ailleurs les informations recueillies sur le Net sont assez généralisantes en ce qui
concerne le sujet de l’économie cotonnière en pays Tagbana.

Après les sources d’archives, jetons un regard sur les sources orales.

21
b. Sources orales

De par leur occupation ou autre statut, les personnes interviewées ont plus ou
moins vu, participé, ou eu des témoignages, à des degrés divers concernant
l’économie cotonnière dans le cercle Tagouana. Pour l’observateur averti, ces
sources offrent d’énormes avantages. En effet, elles rendent plus vivants les
ouvrages déjà consultés et se présentent à en point douter comme de véritables
compléments d’informations. Car, dans certains cas, à travers les sources orales
nous avons obtenu des détails non contenus dans les documents écrits et archives
consultées. Pour obtenir une bonne documentation orale, nous avons ciblé des
personnes ressources en fonction des critères suivants :

La première catégorie regroupe les personnes ayant un poste de responsabilité


telles que des chefs de village et de canton. La deuxième vague regroupe des
témoins oculaires ou interposés, mieux les enfants ou petits-enfants des témoins
oculaires.

Dans nos enquêtes nous nous sommes servis d’un appareil pour
l’enregistrement des interlocuteurs. Et c’est dans l’application enregistrement que
nous avons stocké les propos de nos interlocuteurs. Lors des séances d’entretien,
nous prénoms des notes pour nous permettre de nous retrouver plus facilement au
moment de réécouter ces enregistrements. Ces prises de notes ont lieu sur des piles
de fiches. Sur les premières pages, sont mentionnées les informations sur l’identité
(nom et prénoms) de l’interviewé, le lieu et l’heure de l’entretien.

Pour passer au peigne fin tous les contours de notre sujet, nous avons appliqué
l’entretien non directif et semi directif. Ces entretiens ont tous été individuels. De
façon pratique, dès le premier contact, nous remettons en général, à la personne
ressource, une fiche contenant notre thème d’étude et une série de questionnaires
variant d’une catégorie à une autre. Au prochain rendez- vous, nous procédons à
l’enregistrement des propos de l’interlocuteur. Dans des cas, et surtout avec des
personnes ne sachant lire et écrire, nous évoquons le thème et laissons le soin aux
interlocuteurs de dire tout ce qu’ils savent et ce en présence d’un témoin. Ces

22
entretiens se sont déroulés en grande partie à Katiola, dans quelques-uns des
villages environnants et à Fronan.

Dans la première catégorie, nous avons échangé avec les chefs de canton de
Katiola et de Fronan qui ont des liens avec des défuntes personnes supposées avoir
participé à la culture de ces champs de coton. Avec eux, nous avons utilisé
l’entretien semi-directif. Nous leur avons soumis une série de questions en leur
laissant la latitude de répondre. Toutefois, de temps à autre, nous prenons le soin de
les orienter pour demeurer dans le contexte de notre champ d’étude et éviter des
digressions. En somme, ils nous ont fourni des informations importantes portant sur
la réalité de la culture du coton dans le cercle Tgouana à l’époque coloniale surtout.
Ces données portent également des éclaircis sur les techniques culturales,
commerciales et de transport et sans oublier des difficultés inhérentes. La création
d’une industrie cotonnière et l’impact de l’économie cotonnière dans ladite zone
n’ont pas aussi été oubliés.

Dans la catégorie des personnes ne sachant lire et écrire, nous avons fait appel
aux interprètes locaux maîtrisant plus ou moins les langues tagouana, dyoula,
mangoro. Elles ont relaté les impacts au niveau économique et social surtout de
cette pratique forcée de ladite culture. Au cours de nos enquêtes, nous avons été
confrontés à un problème récurrent. En effet ces sources orales n’ont pu mettre à
notre disposition des photos et autres preuves confirmant les données verbales
fournies.

Par ailleurs notons que notre documentation orale comporte à en point douter
des faiblesses. Par endroit, les témoignages recueillis furent vagues et imprécis. Il
y a eu beaucoup d’imprécisions sur les dates des évènements qui jonchent la culture
du coton dans le cercle Tagouana à l’époque coloniale. Malgré cela, nous n’avons
jamais été affectés outre mesure par le découragement. D’ailleurs notre
détermination à poursuivre notre recherche afin d’aboutir à un résultat probant était
notre crédo en notre fort intérieur. Ainsi l’étape suivante fut l’exploitation de toute
notre documentation.

23
Dès lors signalons que l’exploitation de notre documentation s’est déroulée en
trois grandes étapes. D’abord la collecte des données d’intérêt pour le sujet, ensuite
le regroupement par thème et la finalité est consacrée à la rédaction.

D’abord, la première étape manifestée par la collecte des informations, a


consisté à rechercher et à lire les documents, et à prendre sous forme de note, toutes
les informations en rapport avec la vie liée à l’instauration des champs collectifs,
plus particulièrement les champs de coton du commandant dans le cercle Tagouana.
Dans cette prise de note, nous avons pris soin de mentionner les références des
documents. Il s’agit de l’auteur, du titre de la date, du lieu de publication, du nombre
de pages de la page de prise de note et la bibliographie. Ce processus a conduit à
l’obtention des données nécessaires à notre étude et à l’élaboration de notre
bibliographie.

Le deuxième compartiment de notre travail a consisté à dégager les thèmes


développés dans les notes prises.

c. Les bibliothèques

A Bouaké, le site du centre culturel Jacques Aka, situé au quartier commerce


non loin du cinéma capitole, a constitué la première étape de notre parcours. Nos
recherches dans ces locaux ont été moins satisfaisantes. En effet, ce centre a subi
les affres de la guerre qu’a connue la Côte d’Ivoire depuis le 19 Septembre 2002,
tous les documents ont été pillés et la tentative de reconstitution de son contenu a
débuté et continue de se faire. Bon nombre de documents ont été déjà été classés
par discipline mais beaucoup d’œuvres restent à terre et à même le sol, certains
ouvrages se trouvent aussi dans des cartons et surtout au premier étage. Ces
ouvrages nécessitent un entretien car la poussière est leur apanage. Malgré cela,
nous avons eu quelques rudiments d’information dans des ouvrages.

Nous avons eu des informations à la bibliothèque de l’Université Alassane


Ouattara, sans oublier celles recueillies au CERAP qui est le Centre de Recherche
et d’Action pour la Paix à Abidjan.

24
Le regroupement des thèmes identiques forme la dernière étape de notre
technique d’exploitation. Il a eu pour avantage la formation des parties, des sous
parties, des chapitres et leurs contenus. Ceci a abouti à configurer le plan après une
bonne analyse.

V. PLAN

Pour mieux cerner et maîtriser les contours et le mécanisme de l’économie


cotonnière dans le cercle Tagouana de 1905 à 1946, nous avons bâti notre travail
autour trois grandes parties. Ces parties s’enchaînent des évènements les plus
anciens aux faits les plus récents à partir d’une chronologie bien ordonnée. En effet,
à chaque partie correspond une période reflétant un canevas spécifique dans
l’évolution des activités liées à la culture du coton.
La première partie présente les conditions pour la mise en place de l’économie
cotonnière dans le cercle Tagouana de 1905 à 1924. Pour nous, ici il s’agit de mettre
en lumière les facteurs de la mise en place de cette économie. Cela passe par une
analyse Profonde des facteurs naturels qui ont milité en faveur de sa pratique dans
ce cercle sans oublier la création des premiers champs collectifs de coton. 1905 est
l’année relative aux champs d’essais de coton dans la subdivision de Dabakala dans
le cercle Tagbana8.

Dans la seconde partie qui s’étend de 1924 à 1946, nous ouvrons une lucarne
en faisant un gros plan sur la prospérité et la décadence de l’économie cotonnière.
L’an 1924 est l’année de la restructuration du travail cotonnier sur instruction de
gil’administration coloniale. Cependant, à l’intérieur de ce canevas se signale des
des années importantes. A titre d’exemple, 1909 marque l’ouverture officielle de la
station cotonnière de Dabakala ; et quant à l’année 19149, elle marque l’expansion
progressive de ladite industrie en pays Tagbana. . L’an 1946 marque l’abolition du

8
- ANCI, 1RR65, Correspondance relative aux champs d’essais de coton dans les cercles de
Korhogo, Ferké, Dimbokro, Bouaké, Daloa, Dabakala, N’zi-comoé et le cercle des Gouro.
9
- ANCI, 1RR62, Correspondance et rapports relatifs à la culture du coton et à l’usine cotonnière
de bouaké.

25
travail forcé sur proposition de feu Félix Houphouët Boigny, alors député au
parlement français.

La dernière partie, qui constitue d’ailleurs la troisième partie met en lumière


l’impact de l’économie cotonnière sur les populations du pays Tagbana.

26
PREMIERE PARTIE
LA MISE EN PLACE
D’UNE ECONOMIE COTONNIERE EN PAYS
TAGBANA (1905-1924)

27
Après la mainmise totale de la métropole sur la colonie, elle chercha à la mettre
en valeur. Ce système supposa un lourd contrôle douanier. La colonie n’a aucune
existence propre, elle n’intéresse que si son économie est complémentaire de celle
de la métropole. Et justement, à propos de cette économie, la métropole a mis en
place des systèmes d’exploitation en vue de tirer profit de la terre conquise tels les
champs collectifs. Un aspect de ce système, à savoir l’économie cotonnière est prise
comme exemple pour en étayer le fonctionnement. Cette première partie va
s’articuler sur les conditions pour la mise en place d’une économie cotonnière en
pays Tagbana de 190510 à 1924. Dès lors, des facteurs naturels favorables à la mise
en place d’une économie cotonnière et la création des premiers champs collectifs
de coton dans la zone sont mis en relief.

L’an 1912 marque effectivement le début de l’instauration des champs


collectifs, avec pour objectif principal la paye de l’impôt de Capitation11 par les
indigènes. Mais rappelons bien avant cette année-là, que c’est véritablement
vers la fin de 1898 12 que les français pénétrèrent l’espace des Tagbana avec
l’intention de s’y établir. L’an 1914 marque l’étalage du système industriel dans
tout le cercle. L’occupation spatiale de l’ethnie Tabgana de nos jours n’est pas à
proscrire. Et c’est certainement le mot « tagbana » qui prédomina dans l’esprit du
colonisateur pour donner le nom : cercle Tagbana à la région, à l’époque coloniale.
En ce moment donc, il couvrait en plus du pays Tagbana, le pays Djimini dans la
subdivision de Dabakala.

10
- Les premiers essais des variétés réalisés dans le cercle de Dabakala en 1905 se sont soldés par
un échec. CF. H. YAYA D’ALEPE, 1979, Une économie de transition : La Côte d’Ivoire de 1893
à 1919, Paris, université, Paris VII, thèse de doctorat 3ème cycle, histoire, p.223.
11
- C’est un impôt payé par tête.
12
- TOURE TIGBE, Les Tagbana et le monde extérieur du XVe siècle à 1960 : Mutation et
résistance, p78.

28
CHAPITRE I : DES FACTEURS FAVORABLES A LA MISE EN
PLACE D’UNE ECONOMIE COTONNIERE

Le cotonnier est une plante dont la productivité dépend de plusieurs


exigences. Il s’agit des facteurs naturels que sont le climat et le sol qui, dans notre

29
CHAPITRE I : DES FACTEURS FAVORABLES A LA MISE EN PLACE
D’UNE ECONOMIE COTONNIERE

Le cotonnier est une plante dont la productivité dépend de plusieurs exigences.


Il s’agit des facteurs naturels que sont le climat et le sol qui, dans notre zone d’étude
sont propices à sa culture. Par ailleurs, les populations étaient déjà habituées à la
culture du coton

I. Des facteurs naturels favorables à la culture du coton

Le cotonnier est une plante faisant partie des produits pérennes de la Côte
d’Ivoire. Sa culture nécessite des facteurs primordiaux. Il s’agit du climat et du sol ;
ceux du nord ivoirien lui sied à en point douter.

1 : Un climat favorable à la culture du coton

Située dans le carré constitué par le 4e et le 11e degré de latitude Nord et par
le 2e et le 9e degré de longitude Ouest, la Côte d’Ivoire présente deux zones
climatiques principales en correspondance avec les deux types de paysages
rencontrés : savane et forêt claire au nord, forêt dense et humide au sud.

Le climat du sud de la Côte d’Ivoire se caractérise par l’existence de deux


saisons des pluies : la plus intense et la plus longue présente un maximum en juin,
la plus courte est centrée sur octobre. Elles sont séparées par la petite saison sèche
qui part du mois d’août à celui de septembre. La grande saison sèche dure en
moyenne de 3 à 5 mois.

Le climat du nord de la Côte d’Ivoire dont une partie fait partie de notre zone
d’étude, ne présente qu’une seule saison des pluies ayant son maximum en août.
L’unique saison sèche dure 6 à 8 mois et son intensité augmente assez régulièrement
avec la latitude entre le 8e et le 11e degré de la latitude nord. Le régime
pluviométrique du cercle Tagouana tombe sous l’influence de deux régimes de
précipitation principaux. La zone est caractérisée par le régime pluviométrique
soudano-guinéen caractérisée par une seule saison des pluies de mai à octobre et
une saison sèche de novembre à avril.

30
La plus grande partie de la zone faisant l’objet de notre étude appartient à la
ceinture végétale de savane sub-soudanaise, à l’intérieur de la partie méridionale de
la zone, la ceinture de savane guinéenne. La savane boisée commence environ au
8e parallèle de la latitude nord, bien que l’on rencontre moins de parties boisées en
avance vers le nord. L’influence de l’homme a particulièrement porté atteinte à la
zone dense de Katiola, où s’est produit la transition de la savane boisée à la savane.
On trouve des forêts naturelles le long des cours d’eau sur des plateaux et près des
villages, dans « les bois sacrés 13».

Dans le système agricole, la notion du climat est à connaître, mieux à maîtriser


dans la perspective du démarrage des travaux champêtres. En effet, les éléments
constitutifs du climat que sont la pluie, la température et le vent sont des
déterminants dans le mécanisme de production culturale. Les paysans en sont
conscients.

La zone de notre étude jouit d’un climat de type sub-soudanais qui comporte
quatre saisons, dont deux saisons allant de mars à juin et de septembre à octobre.
Elles sont entrecoupées de deux saisons sèches qui s’étalent de novembre à février
et de juillet à août. La pluviométrie oscille entre 1100mm et 1200mm avec une
température moyenne autour de 27oc.

13
- Les bois sacrés sont des zones de forêt choisies par les populations locales en vue d’y faire des
rites initiatiques.

31
Tableau no1 : La précipitation pendant la période antérieure à
l’ensemencement et pendant la saison de croissance du coton pour divers
centre de la Côte d’Ivoire.

Date Période antérieure à Saison du coton 150


Stations d’ensemencement l’ensemencement du jours après
du coton 1er mars à la date de l’ensemencement
l’ensemencement

Minimum Moyen Minimum Moyen

Du 20/6 au 5/7 19,2mm 292,2mm 65,2mm 623,9mm


Tafiré

Du 15/7 au 55,6mm 483,4mm 64,6mm 428,7mm


Katiola 30/7

Du 15/7 au 40,2mm 400,1mm 73,8mm 515,4mm


Dabakala 30/7

Source : Développement de la production cotonnière en C.I, Tome 1et 2, janvier


1969, RCI, MINISTERE DE L’AGRICULTURE, Romuald O Bouchy ; 1965 :
Coton fibre tropicale 20 no3.

Le coton a besoin en moyenne de 700mm 14 de pluie par an pour un


accroissement normal pouvant permettre d’atteindre une production optimale. A
l’époque coloniale, ce quota fut presqu’atteint de façon sensible durant bon nombre
d’années. Ces chiffres 15 qui suivent l’attestent à en point douter : En 1915 :
771,2mm de pluie sont tombés dans le cercle ; en 1921 : 1.164,4mm de pluie sont
tombés dans le cercle ; en 1923 : 1.151,3mm de pluie sont tombés. De ce constat
chiffré, on peut sans risque de se tromper dire que la pluviométrie était bonne en
pays Tagbana à l’époque coloniale pour la culture du coton. La durée du cycle est
d’environ six mois.

14
- ANCI, 1QQ92, Rapport sur la situation économique, commerciale générale du cercle tagouana.
15
- ANCI, 1QQ283, Rapport économique de la subdivision de Dabakala, donné par M.J Blanchard,
le chef de la subdivision.

32
Il faut cependant signaler que déjà en 1934, dans le deuxième semestre, les
conditions climatiques et notamment la mauvaise répartition des pluies avait
anéantie pour une bonne part les efforts des populations. Ainsi les précipitations16
se présentent comme suit : Juillet (166 mm), Août (205 mm), Septembre (177 mm),
Octobre (120 mm), Novembre (1 mm), Décembre (néant) Et aussi en 1935, la
campagne n’a pas été aussi mauvaise comme craint dans les débuts. Par ailleurs une
sécheresse exceptionnelle avait en effet arrêté la floraison dès le mois d’octobre et
aucune précipitation atmosphérique ne s’était produite pendant les trois derniers
mois de l’année. Ainsi, on a enregistré au niveau pluviométrique 497mm17 pendant
le premier semestre de ladite année.

Graphique : L’évapotranspiration potentielle(EPT) en mm/mois.

2000 1 La légende

1753
111111 1=Katiola
1500 1642
1572

1000

111111111111111111111111111111111111111111111111111111111 2=Dabakala

500

138
146
159
153
145
119
10296115
136
134
129 146
153
165
157
147
127
10998117
142
143
138 152
156
170
164
160
142
121
113
127
152
153
143
0 J F M A M2 J2 J3 A2 S O N D T/an
KATIOLA DABAKALA TAFIRE
3=Tafire

1 2 3

Cette évapotranspiration est la symbiose entre le sol et la nature donnant une


coloration à l’atmosphère qui consolide l’état climatique. Ainsi, dans le cercle
Tagbana, la quantité correspond à la culture du coton car il pleut assez bien.

16
-ANCI, 1QQ269, Rapport économique de 1935.
17
- ANCI, 1QQ269, Idem.

33
2 : Un sol favorable à la culture du coton

L’évaluation des terres dans le cercle Tagbana permet de connaître d’avantage


l’état de fertilité des sols dans le cadre du diagnostic du rendement de la culture
cotonnière. Les facteurs pédologiques caractérisés par une multitude de sol que
sont : les sols bruns eutrophes hydromophes, les sols ferrugineux tropicaux lessivés
concrétionnés, les sols ferrugineux appauvris, les sols ferrugineux tropicaux
appauvris hydromophes, les sols ferrugineux lessivés indurés18.

Les sols ferralitiques et les sols hydromophes sont soumis à une forte
dégradation, les sols ferrugineux tropicaux lessivés concrétionnés de versant sont
aptes pour la culture du coton ; les sols ferrugineux tropicaux appauvris, les sols
ferrugineux lessivés concrétionnés de sommets et les sols ferralitiques sont
modérément aptes pour la culture du coton. En revanche, les sols ferrugineux
appauvris hydromophes, les sols bruns eutrophes de bas de versant, les sols
ferrugineux appauvris sont marginalement inaptes pour la culture du coton. Par
ailleurs les sols ferrugineux lessivés concrétionnés indurés de sommet, les sols
hydromophes de bas de versant sont de façon générale inaptes pour la culture du
coton19.

Ainsi, l’assiette pédologique peut participer à la limitation de la production et


l’obtention de bonnes récoltes. Par ailleurs, les caractéristiques physicochimiques
des sols ne sont pas suffisamment prises en compte souvent dans la culture du coton
par les acteurs de la filière. Mais elles présentent une meilleure aptitude et participe
à l’obtention de bon rendements dans quelques arrondissements du paysage agraire.

Les aptitudes culturales et forestières des sols de la Côte d’Ivoire se


manifestent par quatre compartiments liant effectivement les trois notions que sont :
la végétation, le climat et le sol. Les principales aptitudes culturales et forestières
sont déterminées dans chaque zone pour les cultures vivrières, les cultures

18
- Les cinq catégories de sol selon le directeur régional des mines et de l’énergie de la région du
hambol.
19
-Mémoire Online, Marlène Michozounnou, Université d’Abomey-calavi-Bénin, Master II 2011.

34
arbustives et l’arboriculture fruitière, les cultures industrielles et le reboisement.
Indépendamment des zones écologiques, les propriétés physiques des sols
interviennent pour définir :

D’une part, des zones favorables à la mise en culture, dans lesquelles les
propriétés physiques sont, soit : bonnes (sols profonds ou pas, ou peu
gravillonnaires) ; médiocres à moyennes (sols profonds gravillonnaires).

En un mot, le sol et le climat du cercle Tagouana conviennent à la culture du


coton, à condition de garder sous contrôle le tableau d’ensemble des insectes
parasitaires. Cette partie est soumise aux régimes des deux saisons de pluies ; les
précipitations moyennes pendant les périodes de croissance du coton ne sont qu’à
peine suffisantes pour faire face aux besoins théoriques en eau pour cette culture.
L’écoulement a pour effet que la culture dépend donc en partie de l’humidité
emmagasinée dans le profil du sol avant de semer le coton. Dans cette zone, il est
possible de pratiquer sur la même terre une culture à maturation précoce rapide
comme celle du maïs avant de semer le coton. Ceci peut avoir pour effet de réduire
l’humidité du sol disposé pour la culture cotonnière qui sera pratiquée ensuite. Dans
la pointe nord du cercle, et précisément dans le secteur de Tafiré, la culture du coton
n’est pas propice.

Tableau no2 : Les principaux caractères du climat, de la végétation et du sol


du cercle Tagouana

Principaux
caractères
Zone sub soudanaise

Végétation Secteur mésophile (savane arborée et herbeuse)

Climat 1 saison de pluies, la précipitation comprise entre 1000


et 1600 mm.

Sol Ferralitique, moyennement désaturé et ferrugineux.

Source : MINISTERE DE L’AGRICULTURE, Le développement de la production


cotonnière en Côte d’Ivoire. Tome 1 et 2, janvier 1962, p.379

35
En effet, il fait partie de la zone de transition située entre les zones soumises
au régime des deux saisons de pluies et celle n’ayant qu’une seule saison humide
s’étant le long des zones : Bako-Morendo-Gra Tsso-Dikodougou-Tafiré 20 . Cette
zone est exposée au danger d’un manque de pluie en juillet et en août.

Ici la culture du cotonnier est vraisemblablement plus aléatoire qu’ailleurs


dans la région, Pour ce motif, il ne conviendrait pas d’encourager l’augmentation
de la superficie des cultures cotonnières dans ladite zone, sauf s’il est manifesté
qu’une quantité d’humidité suffisante peut être emmagasinée dans le profil du sol
afin de combler les lacunes en cas de sécheresse ou en cas de périodes de
précipitations marginales. Dès lors, il est recommandé de procéder à des études
supplémentaires concernant la météorologie et les usages de consommation en vue
de réparer toutes les zones à risque de mauvaises récoltes à cause de la variation
pluviométrique d’une année à une autre.

La fertilité des sols favorables à la mise en culture de la côte d’Ivoire


subsoudanaise est déterminée essentiellement par leurs propriétés en particulier par
leur profondeur et leur texture21. A cet effet, on a : les sols typiques rajeunis et les
sols bruns ; les sols remaniés smodaux issus de granites ou de schistes ; les sols
typiques modaux remaniés et appauvris issus de granites ; les sols remaniés ou
typiques rajeunis et sols bruns issus de roches basiques.

La culture des plantes vivrières et du coton sur les sols ferralitiques typiques
très possibles, bien que la pluviométrie annuelle diminue, mais celle-ci est
concentrée en une seule saison des pluies et suffit au développement des plantes.

20
- Ministère de l’agriculture, Développement de la production cotonnière en C.I, Tome 1 et 2,
janvier 1969.
21
- La capacité de rétention d’eau du sol.

36
II : Une population habituée à la culture du coton

La culture du cotonnier existait chez les Tagbana avant la colonisation. Il


semble que le coton se soit diffusé en Afrique de l’ouest entre les XVIe et XVIIIe
siècles22 au moment de la traite négrière.

1 : La population Tagbana et la culture du coton avant la colonisation

Les premiers colons qui ont débarqué à l’intérieur de la Côte d’Ivoire ont
découvert que la culture est pratiquée par les populations du nord de la colonie23.
Le premier explorateur à explorer le nord de l’actuelle Côte d’Ivoire est René
Caillié en 1830. Parti de la Sierra-Léone en 1827, il visite la région de Sambatikila
et de Timbé avant d’entrer chez les senoufo au sud de Tengréla. Dans son récit de
voyage, René Caillié a livré de précieuses informations sur la vie économique des
peuples visités, notamment les Mandingues appelés généralement Dioula et les
Bambara24. Il écrit :

« Les Bambaras de cette partie de l’Afrique (…) cultivent un peu de coton qu’ils
échangent avec les Mandingues, contre du sel. J’ai vu dans quelques-uns de leurs
villages, des métiers de tisserands : mais ils ne font que très peu de toile ; à peine
en ont-ils pour se vêtir ».

Dans le petit village de Teme, René Caillié indique également que la filature
et la teinture sont réservées aux femmes et les hommes s’occupent du tissage. Il
constate aussi qu’à Tengréla, grand centre commercial de l’époque, les nombreuses
caravanes venues d’horizons divers, échangent du sel contre les cotonnades et des
noix de kola25. Mais, René Caillié ne donne aucune information sur les différentes

22
- TOURE TIEGBE, Les Tagbana et le monde extérieur du XVe siècle à 1960 : Mutations et
résistances. P225.
23
- La culture du coton pratiquée par les populations du nord de la Côte d’Ivoire depuis les temps
anciens, constat fait par les premiers colons dont René caillié qui y ont séjourné à l’époque coloniale.
24
- Le terme Bambara est utilisé pour désigner les peuples idolâtres situés au sud du peuple
Mandingue. Ici, il s’agirait probablement des Sénoufo. Mais le terme sénoufo n’apparaît qu’en 1892
sous la plume du capitaine Louis Gustave Binger lors de son voyage.
25
- R. Caillié, 1830, Idem, p.87.

37
variétés de coton cultivées ainsi que les méthodes culturales dans les régions de
l’actuelle Côte d’Ivoire qu’il a visitées.

Soixante ans plus tard, le capitaine Louis Gustave Binger visite les régions de
Tengréla et de Niellé entre janvier et février 1888. Au cours de cette mission
d’exploration, le capitaine Binger fait le même constat que son prédécesseur. Il est
tout de même très impressionné par le savoir-faire de la population de Dioumanténé
situé non loin de Tengréla dans la culture du cotonnier, du tissage et de la teinture.
Il écrit à cet effet :

« Les Mandé-dioula qui sont fixés ici font tisser par leurs captifs de la
cotonnade blanche rayée de bleu analogue à ceux de Fourou, dans le village où
j’ai campé, il y a dix-sept métier en activité. Le coton se cultive ici, il y des champs
partout, mais je n’ai vu nulle part d’indigo ».26

Il constate aussi au cours de son séjour à Togola que les femmes font la
cueillette du coton chaque matin. Mais la culture et le filage sont réservés aux
esclaves mâles. Après son interdiction d’entrée à Niellé, Binger séjourne dans le
village de Léra où il découvre sur le marché 600 kg de coton (31foufous de 20 kg)27.

« Le succès de ce pays repose sur l’agriculture », tel fut l’adage du père


fondateur de la Côte d’Ivoire feu Félix Houphouët Boigny dans les premières
heures de sa prise de pouvoir. Les populations ivoiriennes l’ont très tôt compris,
mieux elles étaient en avance sur le père fondateur de la nation. D’ailleurs plus de
40% de la population vivent dans les campagnes et les populations du cercle
Tagouana ne se dérobèrent pas à la règle. Pendant la période coloniale, à l’instar de
toute la population ivoirienne, celle du cercle Tagouana avait un besoin primordial
et surtout existentiel à satisfaire, à savoir se nourrir et nourrir les différents membres
de la communauté et conserver une partie pour les cérémonies festives, de
funérailles et d’initiation. Les cultures vivrières prisées dans cette zones furent les

26
- L. G. Binger, 1892, Du Niger au golfe de Guinée par le pays de Kong et le Mossi (1887-1889,
tome I, Paris, imprimerie laure, p.229.
27
- Idem, p.250.

38
céréales (le maïs, le mil et dans une moindre mesure le sorgho dans le nord dudit
cercle) sans omettre la culture du riz dans la partie Est chez les Djimini-Djamala à
Dabakala, zone d’ailleurs réputée à outrance pour la culture d’igname qui se
cultivait aussi dans tout l’espace géographique du cercle.

2. Le tissage traditionnel, une activité bien connue des Tagbana

Depuis longtemps le coton, produit de cueillette des régions du centre et du


nord de la Côte d’Ivoire, était utilisé par les artisans Tagbana 28 aussi pour les
besoins locaux à partir des tissages traditionnels, alors la fibre était exclusivement
tissée par les femmes, ou tout au moins par les tisserands. En effet, par les
techniques traditionnelles, les artisans Tagbana arrivaient à confectionner des
bandes de tissu dont le collage donnait des tissus. Ces tissus servaient aux
cérémonies funèbres à partir des linceuls, et même pour des habillements ordinaires,
des mariages, des baptêmes et bien d’autres encore.

Les femmes étaient spécialisées aussi dans l’art du tissage traditionnel, mieux
avec du matériel rudimentaire. En témoigne la photo ci-contre.

28
- Le coton est un produit connu par les artisans Tagbana depuis des temps reculés.

39
Photo no 1 : Le filage du coton

Source : BASSET(J.T), Le coton des paysans en Côte d’Ivoire, une révolution


agricole (1888-1999), page 91.

Cette photo ci-dessus confirme bien que la femme du nord savanicole en


général et du pays Tagbana en particulier connaissait le tissage du coton. Elle est
positionnée sur un tabouret traditionnel, un pied tendu par devant et l’autre plié par
derrière pour son équilibre. Dans cette position confortable, elle commence à faire
ressortir les fils du coton à partir de la fibre.

40
CHAPITRE II : LA CREATION DES PREMIERS CHAMPS COLLECTIFS

Les atouts, surtout naturels de la Côte d’Ivoire, ont emmené les autorités
métropolitaines à favoriser la pratique de la culture du coton pour compenser
l’économie du caoutchouc en faillite. Par conséquent, allons-y à la connaissance
des facteurs et moyens de production. A cela s’ajoute la méthode de culture qui est
sans nul doute, le point de départ de la pratique de la culture cotonnière.

I : Les facteurs et moyens de production

La mise en place des champs collectifs s’est faite par la volonté manifeste du
colonisateur. Mais il est à noter aussi des facteurs parallèles véritables sur lesquels
s’est basée la puissance métropolitaine.

1 : L’échec de l’introduction des variétés étrangères de coton et le recours aux


espèces locales.

L’idée de promouvoir le développement des variétés locales de coton est due


à l’échec des essais d’introduction des espèces étrangères29 en Côte d’Ivoire. Le but
de ces essais est de déterminer les variétés les mieux adaptées aux conditions
climatiques et pédologiques des savanes du centre et du nord de la Côte d’Ivoire.
Les échecs enregistrés sont dus soit au manque d’entretien des semis, soit à
l’inadaptation des variétés aux conditions climatiques. En outre, il faut ajouter
l’incompétence technique des agents chargés de l’encadrement des opérations et la
volonté de l’administration coloniale de vouloir imposer à tout prix les variétés
étrangères, sans tenir compte des conditions climatiques locales. Jusqu’à la fin de
l’année 1908, la politique cotonnière de l’administration coloniale se résume à ses
différents essais. Mais aucun d’eux n’a connu aucun succès. Pour se faire, une
révision de sa politique cotonnière s’impose à l’ensemble de la colonie ivoirienne.

Ainsi, l’administration coloniale veut désormais s’appuyer sur les variétés


locales de coton. Un véritable plan cotonnier a été élaboré dont les principaux points
sont l’enquête préliminaire sur les caractéristiques des variétés locales, la sélection

29
-Dans les cercles du Baoulé, on pouvait généralement avoir dans le même champ le gossypium
barbadense, le coton à graine vêtue et le gossypium peruvianum.

41
des meilleurs plants locaux et la diffusion de leur culture. Le circulaire no 2309 du
25 octobre 1908 du gouverneur Gabriel Angoulvant demande aux administrateurs
de cercles et aux chefs de subdivision de recueillir les meilleurs échantillons des
différent types de fibres et de les accompagner de renseignements sur les périodes
et le mode de semi30. Le sous-inspecteur Farrenc réalise les premières études par
croisement des différentes espèces locales. Dans son rapport, il écrit :

«Nous disposons des races cotonnières adaptées aux conditions des milieux
locaux, impropres pour le moment, à la culture industriel. C’est donc vers
l’amélioration des qualités de ces races que nous devrons tendre.

Un caractère des races locales qui se développe remarquablement dans ces


conditions favorables est la fécondité (…). Nous devrons en tirer parti, ainsi que
toutes les autres aptitudes favorables»31.

Pour mieux connaître les caractéristiques des variétés locales, 19 sacs et


ballots de coton égrené ont été envoyé dans les laboratoires de l’Association
Cotonnière Coloniale en France le 26 mars 1909. Après les analyses, le directeur
de l’école pratique du Havre annonce que trois de ces différents échantillons
disposent des qualités requises pour être traitées par les usines en France. Dans son
analyse, il préconise aussi l’étude approfondie des différences espèces locales pour
déterminer celle ayant un meilleur rendement de production à l’hectare. Cette
mission a été confiée en 1910 à Roland de Ravel, agent des affaires indigènes et
ancien stagiaire de l’école pratique du Havre et à Raymond, agent de l’Association
Cotonnière Coloniale.

Il ressort au terme de leurs études que le coton à graine et isolé connu sous le
nom local de guessé bla ou coton femelle, cultivé dans le Baoulé et le N’zi-comoé
pourrait offrir plus de satisfaction aux industries cotonnières de la France. En effet,

30
-ANCI, 1RR 57, Cabinet du Gouverneur, Circulaire no 2309 adressée aux administrateurs des
cercles de Bouaké, Dimbokro, Séguéla, Daloa, Bouaflé, Man, Odienné, Korogho, Dabakaala,
Abengourou(pour Bondoukou), 25 octobre 1908.
31
- ANCI, 1RR 84, Cabinet du Gouverneur : Instructions, Correspondances et Rapports relatifs à la
culture du coton, du manioc, du caoutchouc et de l’igname : 1911-1914.

42
il produit un beau coton dont les fibres ont une longueur de 28 à 30mm et un
rendement à l’égrenage de 33%. Sa diffusion à grande échelle est alors
recommandée et encouragée par l’administration coloniale. Des expériences de
cultures réalisées Par Auguste Chevalier de 1911 à 1917 dans la zone de Bouaké
ont permis de conclure que la culture sur billons à faible écartement est la meilleure
méthode de culture32.

En outre, d’autres variétés de coton étaient cultivées par les populations


ivoiriennes. Au nord de la Côte d’Ivoire, le cotonnier à graine vêtue produit un
coton très blanc, mais une fibre courte de 22 à 24mm et un très faible rendement à
l’égrenage qui est de 24%.

2 : L’imposition du paiement de l’impôt de capitation en numéraire, un


facteur important pour la création de plantations collectives.

L’impôt de capitation est un système imposé par la métropole après la


conquête, pour emmener les colonisés à contribuer au financement des activités de
la vie quotidienne. Mais ici, la préservation des intérêts économiques, politiques et
sociaux des colonisateurs étaient en première ligne.

En effet, après la conquête, l’autorité coloniale élabora un vaste programme


d’exploitation et de mise en valeur des colonies. Ce programme suivait, cependant
une logique particulière qui plaça, en première ligne, les intérêts économiques,
politiques et sociaux de la métropole. L’idéal pour ces derniers, étaient d’exploiter
et de s’accaparer, avec le minimum de charges financières, sinon gratuitement,
toutes les ressources des colonies. Signalons-le, l’assujettissement maintient les
colonies dans la subordination étroite à la métropole qui les exploite à son profit, et
sans tenir compte de leurs aspirations, et leur impose le régime le plus conforme à
ses intérêts.

C’est pourquoi les colonies ne devaient rien coûter à la métropole. Au nom de


ce principe, le pouvoir colonial institua l’impôt de capitation, c’est-à-dire par tête
ou impôt personnel, qui était une forme de contribution obligatoire que les peuples

- H.YAYA D’ALEPE, 1979, Une économie de transition : La Côte d’Ivoire de 1893 à 1919, Paris,
32

Université, Paris VII, thèse de doctorat, 3e cycle, Histoire, p.326.

43
colonisés devaient verser au colonisateur, pour assurer le financement de leur
domination. Etabli au Sénégal pour la première fois par décret impérial du 4 août
1860, promulgué le 5 août 1861. L’impôt personnel constitua un précieux outil
devant permettre la réalisation de l’ambitieux programme de mise en valeur que la
France avait entrepris dans son empire colonial. L’établissement de l’impôt de
capitation rejoignait l’axiome fondamental de la doctrine coloniale française en
matière financière : « dominer, exploiter, mais à moindre coût ».

Cette conception des rapports économiques de la France avec ses colonies


africaines fut dévoilée au grand jour, à partir de 1892, avec la mise en place des
budgets locaux des colonies qui furent alimentés par le produit des redevances,
impôts ou contributions que les conventions passées avec les chefs permettaient de
percevoir. Par ces mesures, les colonies devaient assurer tous les moyens financiers,
matériels et humains pour la mise en place de l’infrastructure coloniale33.

Cette vision des finances coloniales atteint son paroxysme avec la loi de
finances du 13 avril 1900, au terme de laquelle les colonies devaient désormais
assurer par leurs propres moyens et leurs revenus intrinsèques, le financement total
de leur outillage économique et infrastructurel que l’exploitation de leurs ressources
et leur mise en valeur allaient inéluctablement entraîner. Cette loi, surtout à son
article 33 consacra le principe de l’autonomie financière des colonies. Chaque
région devait ainsi mobiliser ses ressources pour participer aux objectifs du
colonisateur. Ce denier supprima les subventions jusque-là accordées aux colonies
dans leur budget.

Dans cette logique, la colonie apparaît comme une entité devant répondre, au
mieux et en tout temps, à sa vocation, de support financier de la métropole, quel
qu’en soit le coût social pour les indigènes. Ainsi donc, l’impôt, qu’il soit sous
forme de capitation ou de taxes indirectes ou de prestations, dont le travail forcé,

33
- ANCI, 1EE 184(3/4), Cercle des Tagbana, Rapport des 3e et 4e trimestre 1918

44
constituait un instrument précieux d’exploitation et de domination au service de la
cause coloniale34.

L’exemple du cercle Tagbana, à travers ses subdivisions de Dabakala et de


Darakolondougou est véritablement patent. En effet, les rôles primitifs en 1922 des
subdivisions de Dabakala et de Darakolondougou étaient perçus à la date du 20
janvier. Cette opération n’a donné lieu à aucun incident. Etant liquidé dès le début
de l’année, les contribuables pourront vaquer à leurs affaires pendant les autres mois
de l’année. Le montant par subdivision se présentait comme ci : 141.944F pour
Darakolondougou et 168.924F pour Dabakala. D’où un total de 310.868F35.

Mieux, l’impôt de capitation fait partie du système d’exploitation des


ressources humaines, surtout Tagbana par les Français. Les populations ont été ainsi
mises à contribution dans la production des cultures devant servir la métropole dont
le coton. Elles ont ainsi été sollicitées par l’administration coloniale. La loi des
finances du 13 Avril 1900 en France indiquait le principe de l’autonomie financière
de chaque colonie. En fait, la colonie devrait se satisfaire et faire face à ses
dépenses36.

Conscients de cette réalité, les administrateurs français de la colonie de Côte


d’Ivoire s’investissent dans la recherche de stratégies pour la mobilisation de fonds.
C’est donc en raison que ceux mandatés dans la région des Tagbana imposèrent les
cultures commerciales. L’exploitation de ces cultures permettrait d’obtenir des
ressources financières. Par ailleurs, ces administrateurs développèrent les marchés
du commandant afin de générer des fonds à travers les taxes de place.

Toutes ces entrées financières étaient en réalité insuffisantes pour le


financement des projets de développement. C’est dans le cadre de la recherche de
sources de financement additionnel que l’arrêté local du 14 Mai 1901 du

34
- Cheik Diouf, « Fiscalité et domination coloniale : l’exemple du Sine : 1859-1940 », 1976, p34
35
- ANCI, 1EE 184 (4/8), Rapport trimestriel du commandant de cercle installé à Dabakala en date
du 21-03-1922 sur la perception de l’impôt de capitation.
36
- René Pierre ANOUMA, 1975, L’impôt de capitation en Côte d’Ivoire de 1901 à 1908 : Modalité
et implication d’un instrument de politique et d’économie coloniale, in annale de l’université
d’Abidjan, série I, Histoire, tome, PP. 121-139.

45
gouverneur Clozel établit un impôt de capitation sur les « indigènes » de la colonie
de Côte d’Ivoire.

René Pierre Anouma nous informe sur les conditions et les différentes
modalités de cet impôt. « Cette contribution est due pour chaque habitant indigène,
homme, femme et enfant âgé de plus de 10 ans (…) le montant de la contribution
s’élève à 2,50 francs par an, quel que soit le rôle ou l’âge de l’assujetti (…)

L’article 4 prévoit aussi des versements en nature par exemple : l’or, l’voire,
le caoutchouc et tout produit du cru de la colonie ayant un écoulement facile dans
le commerce 37».

Cet impôt était obligatoire et le refus de paiement pouvait entraîner des


sanctions, voire l’emprisonnement car faut-il le souligner le décret du 6 Août 1901
créa des tribunaux indigènes. L’autorisation était donnée aux colons de déterminer
la nature de la punition. A cet effet, tout administrateur pouvait sans jugement,
infliger jusqu’à quinze jours de prison et une amende d’un montant variable à tous
ceux qui lui désobéissaient. Il fallait payer l’impôt à tout prix.

Le contribuable ivoirien était dès lors, la clé de voûte de toute l’entreprise


coloniale car de lui, dépendait la mise en exécution des programmes de
développement. C’est ainsi que le gouverneur Angoulvant, en voulant entreprendre
des investissements, fut obligé d’augmenter l’impôt en 1909. La contribution passa
de 2,50F/an à 4,50F/an38.

L’impôt de capitation devait faire pénétrer les Tagbana dans les mœurs et
l’usage de la monnaie française et impulser en même temps la politique d’obligation
de cultures commerciales. En effet, le paiement de l’impôt de capitation39 se faisait
uniquement en monnaie française afin de fournir à l’administration coloniale les
moyens financiers nécessaires pour mettre en valeur le territoire des Tagbana.

37
- René Pierre ANOUMA, Op.cit., pp 121-139.
38
- Idem.
39
- L’impôt de capitation était un impôt payé par tout individu âgé de plus dix ans. On comptait tous
les membres ayant cet âge dans chaque famille. C’est pourquoi on le dénommait aussi impôt par
tête.

46
L’impôt de capitation détournait ainsi les populations tagbana des monnaies
anciennes. Les français permirent alors de payer l’impôt en cauris à raison de 480
le franc or ; cet échange inégal avait pour but d’épuiser rapidement les stocks de
cauris et implanter la monnaie française.

Pour ce qui concerne les cultures commerciales, les Tagbana furent obligés
d’augmenter les superficies de coton et de maïs afin de pouvoir se procurer l’argent
nécessaire à l’impôt. Jean Canale exprime cela en ces termes : « Pour se procurer
l’argent nécessaire à la capitation (payable pour tous les adultes, hommes et
femmes), le chef de la famille patriarcale se voyait obliger de consacrer une partie
des champs familiaux à des produits marchands, c’est-à-dire en règle générale des
produits exportables 40 ». En 1934, l’impôt payé par le cercle Tagbana était de
491.560 Francs pour le compte du budget local41.

Passant donc du stade d’autosubsistance à l’agriculture d’exploitation, les


Tagbana furent encore obligés de travailler davantage. Ces efforts ne furent pas
vains parce que les rapports des administrateurs font état du paiement régulier de
l’impôt et de l’évolution des cultures commerciales : « Les chefs de canton et de
village ont donné toute satisfaction ; les ordres donnés, les instructions et les
conseils ont été suivis par une population laborieuse et faisant preuve d’un esprit
commercial (…).

Le chef de canton du Fourougoula, chef de Darakolondougou, Kéira


Coulibaly a reçu en fin Mars de monsieur le gouverneur à son passage la médaille
d’honneur qui lui a été récemment décernée par Mr le Ministre des colonies :

Jean SURET CANALE, 1964, Afrique noire occidentale et centrale, tome 2, l’ère coloniale
40 -

(1900-1945), Paris éditions sociales, P79

- ANCI, 1QQ 265 à 268, Rapport économique du cercle tagbana du deuxième semestre de l’année
41

1934.

47
Deux fusils d’honneur ont été remis aux chefs de canton de Katiola et du
Katiara. Ces récompenses justement méritées par l’activité et le dévouement de ces
chefs indigènes42».

3 : La pression comme moyen de production

Pendant les premières années de la colonisation dans le cercle Tagouana en


Côte d’Ivoire, entre 1908 et 1912, le caoutchouc de cueillette (landolphia
heudolotti) constituait le principal produit d’exportation. Devant l’effondrement du
commerce du caoutchouc en Afrique de l’ouest en 1913 ; les autorités coloniales
voulurent encourager une autre culture de rente. Dès 1908, le ministre des colonies
manifesta un certain désir optimiste envers l’avenir du coton dans les nouvelles
colonies françaises d’Afrique de l’ouest.

Dans une lettre ouverte au gouverneur général de l’Afrique Occidentale


Française (AOF), il déclarait que le coton et le caoutchouc « devraient être les
principales sources de richesse » dans les régions qui englobaient le nord de la Côte
d’Ivoire. Le gouverneur Gabriel Angoulvant avait déjà décidé en 1908, première
année de son séjour de huit ans, que le coton pourrait remplacer le caoutchouc. Son
optimisme se basait en partie sur les rapports des botanistes et des administrateurs
coloniaux à propos de la culture du coton par les paysans. Par exemple Maurice
Delafosse, le premier administrateur civil de la région de Korhogo, avait fait
état « de plantations de coton relativement étendues » lors d’une tournée dans la
région de Guiembé.

Le gouverneur Angoulvant avait été contacté par les agents de l’Association


Cotonnière Coloniale (ACC) dont la mission était d’encourager le développement
du coton dans les colonies françaises pour l’industrie textile soit moins dépendante
des importations du coton américain. L’ACC fut créé en 1902 par les entreprises
textiles françaises pour encourager le coton dans les colonies d’Outre-Mer et
principalement en Afrique de l’ouest43.

42
- ANCI : IEE 184 (3/4), subdivision de Darakolondougou, Rapport économique de1917.
43
-J.T BASSET, Le coton de paysans, une révolution agricole, (Côte d’Ivoire 1880_1999), p93.

48
Après avoir rencontré les représentants de l’ACC, le gouverneur Angoulvant
ordonna au service de l’agriculture de chaque cercle d’étudier la culture du coton
indigène et sa commercialisation. Il donna à ses administrateurs et agents les
instructions suivantes : « sélectionner les meilleurs espèces indigènes, démontre
aux indigènes la supériorité des rendements pour l’égrenage de l’outillage
européen, développer les cultures au-delà des besoins locaux, de façon à faire
baisser les prix, jusque-là restés trop élevés pour l’exportation. »44.

Célèbre pour son mépris des cultures indigènes, Angoulvant pensait que les
méthodes de culture scientifique devaient être imposées en Côte d’Ivoire. Il eut
comme objectif la monoculture du coton qui permettrait aux gardes cercles de
délimiter plus facilement les champs de coton et de mieux surveiller le travail.

Dans ce grand moule du système des champs collectifs, le cercle Tagbana a


subi d’énorme pression pour l’exportation du coton. En effet, au moment où le débat
sur le prix du coton se poursuivait, les contraintes administratives furent accentuées
pour augmenter la production. A partir de 1925, de nouvelles mesures modifièrent
profondément la production et les échanges dans les régions cotonnières. Dès lors,
sur l’initiative du gouverneur général Carde à Dakar, du gouverneur Lipalud en
Côte d’Ivoire et sous le contrôle du nouveau service des textiles, des quotas de
production furent fixés pour chaque cercle. Par conséquent, on demanda à chaque
village de doubler la surface du champ de coton45. Les chefs reçurent également des
primes pour augmenter la qualité et la quantité de coton. Le montant de la capitation
est fixé à 7,50F par imposable, soit plus du prélèvement des prélèvements de 1913.

L’instauration des champs de coton a eu des effets négatifs sur les habitants du
cercle Tagbana. Cet impact s’est fait ressentir à travers la production et
l’écoulement sans oublier l’accentuation de la pression coloniale. Le
développement de la culture de ces différentes espèces de coton suscite l’opposition

44
- J.B BASSET, OP.CIT, p93.
45
- ANCI, 67a, 1925 et 64b, 1925-27, Rapport relatif à la situation agricole et économique dans le
cercle des Tagouana, 1898-1934.

49
des pays qui sont plus habitués aux cultures vivrières. Devant cette situation, le
pouvoir colonial n’hésite pas à recourir à l’usage de la force.

Convaincu que le développement de la colonie ne peut se faire sans l’apport


des populations ivoiriennes, le lieutenant-gouverneur Gabriel Angoulvant estime
qu’il faut les contraindre à produire le coton. Il écrit à cet effet dans sa note
circulaire du 21 avril 1912 qu’« il n’y a pour l’indigène l’obligation stricte de
cultiver le coton et le soin d’assurer cette mesure revient aux commandants de
cercles »46. Cette circulaire entraîne la création des champs collectifs de coton ou
« champ du commandant » dans les villages. Dans ces champs, travaillent les
paysans d’une même famille ou d’un même village sous la surveillance des gardes
de cercle, de tirailleurs ou de moniteurs.

Les moyens employés sont les brimades et aussi l’instauration de l’impôt de


capitation obligatoire. La création des champs collectifs introduit quelques
mutations dans l’économie cotonnière en pays Tagbana. Par conséquent, le
cotonnier qui se cultive en association avec les cultures vivrières sur les terres
choisies par les paysans eux-mêmes, se fait désormais en monoculture sous la
supervision de l’administration coloniale qui contrôle minutieusement toutes les
opérations de culture et de récolte. Elle détermine et délimite la superficie à cultiver
par un groupe de personnes bien déterminées47. En 1916, il est imposé à chaque
contribuable de cultiver 0,08 hectares ; en 1918, cette superficie atteint 0,10
hectares. L’année suivante, c’est-à-dire en 1919, l’administrateur Palanque, tablant
sur un rendement de 125kg/ha, impose aux villageois du cercle du Baoulé nord avec
une incidence de la même envergure dans le cercle Tagbana un hectare de coton
pour 50F d’impôt, soit 4 à 5 imposables.

Au début, l’administrateur colonial laisse les paysans à choisir le site à


défricher, faire des butes et y planter le coton. Une fois, les graines semées, il s’en

46
-« Circulaire no38 du 21 avril 1912 du gouverneur général concernant le développement des
cultures industrielles ; en particulier le coton », in journal officiel de la Côte d’Ivoire, 04 mai 1912,
p.248.
47
-J.SURET-CANALE, 1964, Afrique noire occidentale et centrale, tome II : l’ère coloniale, Paris,
éditions spéciale, p.292.

50
suit un contrôle régulier des techniques culturales. Les gardes de cercle et les agents
de vulgarisation du service de l’agriculture se rendre dans les villages pour
apprendre aux paysans à démarier, à désherber, et après la récolte, à brûler les tiges
du cotonnier. S’ils ne sont pas satisfaits de la qualité des travaux effectués, ils les
obligent à les reprendrei. Aucune erreur, aussi minime soit-elle n’est tolérée. Les
récalcitrants sont fouettés en public.

Par exemple, à Dabakala, l’administrateur Chartier fait enfermer des jeunes


dans une case avant de les fouetter sans limite de coups pour avoir apporté des
quantités très insuffisantes de coton. Parfois, ce sont des chefs de lignage et, de
famille ou de village qui sont frappés par des gardes de cercle. Ces chefs ont aussi
pour mission de collecter l’argent obtenu par les paysans pour payer l’impôt de
capitation. Pour accroître la production, l’administrateur impose la culture du coton
dans les localités très éloignées du chemin du chemin de fer.

La mise en œuvre de cette répression a entraîné l’accroissement de la


production totale de coton. Elle est passée de 120 tonnes en 1912 à 376 tonnes en
1913. En 1914, la production a connu une légère baisse et atteint 227 tonnes48. La
période de 1914 à 1917 se caractérise par l’accroissement de la production qui est
passé de 227 tonnes à 1515 tonnes. Mais la hausse de la production en 1915 doit
être nuancée car une partie de la production du coton en 1914 a été égrenée avec
six mois de retard 49 . De 1916 à 1917, elle progresse de 31% puis elle baisse
brutalement de 61%.

Le cercle du Baoulé est la principale zone de production de coton. En effet, sa


production est passée de 110 tonnes en 1913 à 668 tonnes en 1917 avant de chuter
brutalement en 1918 à 320 tonnes. En 1917, toute la production fut réquisitionnée
pour la défense nationale50. Cette recette est appréciable pour un cercle peuplée ;

48
- J.T BASSET, 2002, Op.cit, p278.
49
- ANCI, 1QQ14, Correspondance envers les administrateurs de cercle au sujet de la réquisition
des adjudications et de l’expédition du coton et du kapok en France pour la défense nationale, 1916-
1917.
50
- D.C DOMERGUE, 1974, Là C’ôte d’Ivoire de 1912 à 1920. L’influence de la deuxième guerre
mondiale sur l’évolution économique et sociale, Université de Toulouse le Mirail, Thèse de doctorat
3e cycle, Histoire, p.484.

51
elle constitue un apport important pour le budget local car les dépenses de
souveraineté de la façon suivante : 3 fonctionnaires européens et de gestion n’en
absorbe pas plus du 1/3 dans le cercle-même. Le nécessaire encaissé est affecté pour
la presque totalité, aux besoins de la circonscription militaire de Bouna-Lobi.

On a remarqué cette fois que les indigènes ont apporté plus d’écus et de pièces
blanches que d’ordinaire et ce dans une proportion d’une unité de valeur argent. En
1921, cette proportion avait été évaluée à 1/13,5. Cette constatation sera maintenue
dans les rapports économiques. En 1935, l’impôt payé par les populations du cercle
Tagbana se levait à 492.820F51.

En somme, la perception de l’impôt s’est déroulée normalement au strict


respect de la règle, en vertu de laquelle, dans les pays Tagbana, Dioula et Djimini,
la e fixe se perçoit au début de l’année dans l’intérêt-même des contribuables, qui
se trouvent ainsi libérés du plus « claire » de leur obligation fiscale.
L’administration y trouvait son avantage car son activité s’est rapportée sans effort
.sur le terrain52.

II : La méthode de culture du coton

L’obtention du produit brut cotonnier suit tout un processus qu’il faut observer
avec soin. Il est basé sur un moule que l’on peut appeler la méthode de culture. Elle
comprend à cet effet l’occupation de l’espace et la technique culturale.

1 : L’occupation de l’espace

La classification va être plus spécifique. En effet chevalier pensa avoir trouvé


quatre espèces différentes de cotonniers :

Le gossypium herbaceum L. qu’il qualifia de l’espèce la plus anciennement


connue des indigènes.

51
- ANCI, 1QQ269, Rapport économique no164 du cercle Tagbana.
52
- ANCI, 1EE 184 (4/8), Op.cit.

52
Le gossypium barbadense L. introduite au soudan français entre 1896 et 1897
par les soins des commandants de cercles qui les ont reparties entre les chefs des
principaux villages.
Le gossypium religiosum L. Qui est une espèce très robuste qu’on retrouve
parfois au Sénégal près de la côte.
Le gossypium punctatum qui une variété africaine très vigoureuse du
gossypium hirsutum L. qui est l’espèce la plus répandue sur toute l’étendue du
territoire sénégalais et du Soudan.
Mais par la suite des, il découvrit que trois espèces après sans doute de
nombreuses recherches : le gossypium herbaceum de l’Ancien monde, le
gossypium barbadense et le gossypium hirsutum du Nouveau monde. Dans le nord,
la variété cultivée était le « Babo », appartenant à l’espèce barbadense. Moins que
le local, il contient tout de même du puntatum, mais pas de « Brasilienne ». La fibre
est jaunâtre, courte (15/16) d’inch, le rendement à l’égrenage est de 30 à 31%53.
La réussite de la culture cotonnière est sous la dépendance de facteurs
écologiques, techniques et économiques. En effet tout part du choix du terrain ; pour
se faire la latitude est laissée aux indigènes de choisir des terrains. Qu’elles soient
des terres à cultures vivrières, nouvellement défrichées ; la surface à cultiver leur
sont imposées, pas de plantations dans les régions de grandes forêts, à cause de la
trop forte humidité et provoquer aussi le déboisement. La production du coton est
intimement liée à une maîtrise et à une bonne occupation de l’espace. Elle s’est
développée en plusieurs étapes et a finalement permis l’instauration de la première
révolution agricole dans le vaste monde sénoufo prouvant tout de même son intérêt.
La femme en Afrique de façon générale et plus particulièrement en Afrique
subsaharienne est la mère au foyer. Elle est la « détentrice » et la donatrice de la
vie. Auprès de l’homme, elle accomplit les tâches ménagères. Sa contribution aux
activités champêtres, mieux agricoles est de taille. D’où sa signalisation.
Nonobstant sa participation aux activés agricoles, la femme du cercle Tagouana est

53
- MNISTERE DE L’AGRICULTURE de CI, Développement de la production cotonnière, Tome
1 et 2, janvier 1969, Rendement du coton Babo à l’égrenage.

53
la première conseillère de son mari au foyer54, elle n’a pas droit à la parole en public
et ne la prend que sur ordre du chef et ce après l’avoir demandée étant à genou
flexion. Dans cette zone, foncièrement traditionaliste et plus ou moins
conservatrice, la femme ne peut être chef de famille, de quartier, de village, mieux
chef de canton. Le rôle de la femme dans la culture cotonnière est d’une importance
capitale dans la mesure où elle concerne une frange de la population longtemps
négligée.

En parlant de femme ici, nous faisons allusion à la femme du grand nord


ivoirien en général et en particulier de la femme Tagouana à l’époque coloniale ;
donc femmes rurales. Dans le grand moule du travail agricole, et selon les
statistiques, elles représentèrent 80% avec un intéressement plus ou moins par la
valeur traditionnelle55. En majorité, on les retrouva dans les grandes plantations au
niveau de toutes les activités liées à l’agriculture depuis les plantations jusqu’à la
récolte, au convoyage, au séchage, à la conservation et à la vente. Les 20% des
travaux restant revinrent aux hommes qui en sont les plus grands bénéficiaires. A
ce stade, on constate que les hommes font souvent semblant de négliger le travail
féminin en vue d’éviter la rémunération. La mise du travail femmes dans
l’agriculture coïncide en à point douter une fois de plus avec la colonisation, le fruit
de leur labeur devrait permettre de développer les cultures d’exportation et de
subsistance. Dès lors elles s’intéressèrent assez aux cultures vivrières.

Pendant la période coloniale, les cultivateurs du cercle Tagouana ne


produisaient pas assez de coton fibre pour les besoins de l’industrie textile française.
C’est un thème récurrent de l’histoire cotonnière en Côte d’Ivoire. Les nombreuses
tentatives des administrateurs coloniaux pour intensifier la culture du coton n’ont
jamais donné des résultats satisfaisants. Les colonies africaines n’ont fourni que 1à

54
- Entretien réalisé le samedi 19 décembre 2015, avec le chef de canton de Fronan, M. Tiémoko
Coulibaly, maire de ladite ville (1995-2010).
55
- J.T BASSET, Le coton des paysans, une révolution agricole en Côte d’Ivoire, (1898-1999), p.19

54
3% des fibres de coton nécessaires à la métropole pendant presque trois décennies
et demie56.

Selon l’époque les autorités mentionnaient un certain nombre de facteurs pour


expliquer ces résultats décevants : variétés à faible rendement, ravageurs du coton,
prix bas, concurrence des cultures vivrières, résistance des paysans à la culture
forcée. L’existence d’un marché parallèle de coton qui alimentait un artisanat local
de tissage était particulièrement frustrant pour l’administrateur. Ce marché local
était un obstacle direct à la fourniture de matière première pour l’industrie textile
de la métropole et pour l’exportation de cotonnades vers les colonies. Cette
utilisation locale de coton était un « problème » âprement discuté au sein des
autorités coloniales.

Certains cherchaient à supprimer l’artisanat local, alors que d’autres le


défendaient ; mais tous s’accordaient à dire que pour augmenter les exportations, il
fallait satisfaire d’abord les besoins locaux, le maintien du libre- échange impliquait
que la production de coton devait être augmentée substantiellement pour satisfaire
à la fois les besoins des marchés locaux et ceux d’exportation. Par conséquent, les
politiques cotonnières visaient à encourager les planteurs à produire plus de coton.
Les archives montrent que cet objectif fut atteint mais rarement à des niveaux jugés
satisfaisants. Les administrateurs locaux ont à plusieurs reprises eu recours à la
force pour obtenir plus de coton. Cependant, des contentieux entre administrateurs
à propos du caractère approprié, moral et légal de la culture forcé du coton ont
abouti à une application inégale et à des politiques changeantes.

L’occupation spatiale au niveau de la culture du coton dans le cercle de notre


étude se manifeste aussi par la préparation du terrain. Il s’agit ici du défrichement,
du travail du sol par buttes ou billons. Les indigènes sont habitués par routine.
Aucune modification n’est à apporter à la pratique des semis et à leur époque. Dans
les différents compartiments du cercle, à savoir avoir pour les subdivisions, de
Dabakala, de Darakolondougou et les autres petites localités qui s’agglutinent

56
- J.T BASSET, Op.cit.p19.

55
autour de ces subdivisions, la végétation plus tardive peut avoir pour résultat de
rendre la culture bimensuelle57. Dans les champs où la levée aura été mauvaise, il
faudra un second ensemencement destiné à combler.

L’administration procéda souvent par des recrutements des travailleurs pour


faire le travail. Ainsi, l’employeur était soit du service public, un particulier ou des
sociétés. A cet effet, l’administrateur Lacoste a recruté 60 travailleurs dont 10 pour
une durée de 6 mois et 50 pour une durée de 3 mois. L’administrateur léger quant à
lui a recruté pour 2 mois 25 travailleurs. Soit un total de 85 58 . Le numéro du
télégramme autorisant le recrutement est 159 AE du 22 juillet 1934.

Dans le système d’occupation spatiale, le coton peut être utilisé comme une
culture intercalaire ou une culture unique dans des champs. Ainsi, à la fin du dernier
trimestre, 10.000 ha de coton de la variété Barbadence ont été faits comme culture
intercalaire et 132 ha de la variété Ichan ont été faits comme culture unique 193459.
En 1935 aussi, 5000ha et 7000ha de coton ont été respectivement fait en culture
intercalaire et culture unique60.

2. Les techniques culturales

Le mode de culture du coton en pays Tagbana est sensiblement le même dans


le grand nord lointain et dans le centre. Il s’agit du système traditionnel qui associe
le coton à une plante vivrière : maïs, igname, manioc ou riz, avec des rendements
toujours inférieurs à 100kg/ha. La culture du coton est presque toujours considérée
comme secondaire par rapport à la plante vivrière. Les graines sont mises en terre
quand les autres travaux sont terminés, si bien qu’aucune date de semis précoce ne
peut être respectée. Par la suite, les seuls soins apportés à la culture sont ceux exigés

57
- 1RR 41, Correspondance no32 du 31janvier 1918 du lieutenant-gouverneur de la colonie aux
administrateurs des cercles de Bouaké, N’zi-Comoé, Ouorodougou, Tagouana et Kong sur la
conduite à tenir pour la prochaine campagne cotonnière.
58
- ANCI, 1QQ 265 à 268 Rapport économique du deuxième semestre du cercle tagbana pour
l’année 1934
59
- ANCI, idem.
60
- ANCI, 1 QQ269, Rapport économique de 1935.

56
par la plante vivrière. La densité est généralement faible, aucun ressemis n’est fait,
il n’y a pas de démariage et pas de protection sanitaire.

Dans de telles conditions de culture mixte, il était indispensable d’avoir une


catégorie de coton à croissance vigoureuse et dont la floraison ne soit pas très
groupée. L’espèce barbadense en était indiquée.

Le parasitisme et la concurrence des plantes vivrières sont des facteurs


s’opposant à l’établissement d’une véritable culture cotonnière à l’époque
coloniale. La culture cotonnière, pratiquée de longues années, n’avait jamais fait
l’objet de mesures sanitaires, en particulier, l’arrachage des plants n’était pratiqué
que très superficiellement. La saison sèche n’était ni assez rude, ni assez longue
pour stopper la végétation de coton barbadense ; les ravageurs pouvaient aisément
se multiplier sur les champs laissés à l'abandon.

Depuis son introduction en Côte d’Ivoire, le coton avait toujours été considéré
par les cultivateurs comme un élément d’appoint et traité comme tel, c’est-à-dire
comme un produit de cueillette61. Cette position prise vis-à-vis de la culture du
coton était due des raisons humaines et techniques.

L’opération de semis consiste à déposer dans le sol des graines qui, en


germant, donnent des cotonniers porteurs de la récolte. C’est donc une opération
primordiale qui obéit à un certain nombre de critères :

La date de semis,

Le nombre de plantes par unité de surface62,

Le mode de semi et la profondeur d’enfouissement,

La quantité de graine à utiliser.

La date de semis est déterminée par deux facteurs, à savoir la température et


l’humidité. La grande majorité de la production mondiale se situe dans

61
- MINISTERE DE L’AGRICULTURE de la Côte d’Ivoire, idem, page10.
62
- Parry. G, Le coton et ses produits, p85, la densité.

57
l’hémisphère nord dont une part importante en climat tempéré et chaud. On peut
situer les dates de semis des pays tempérés de l’hémisphère nord dans le laps de
temps compris entre le 15 février et le mois de mai ; des pays tropicaux en juin et
juillet. Cependant, il faut se rappeler que le déclenchement de la germination est un
phénomène irréversible qui se poursuit quelles que soient les conditions
atmosphériques ultérieures. Le choix de la date de semis doit donc être fait en
dehors des risques de retour du froid ou de la sécheresse si l’on veut s’affranchir
des ressémis tardifs et coûteux.

La densité culturale, le nombre de plants de cotonniers que l’on décide de


conserver par unité de surface. Le terme de « stand 63 » désigne le nombre de
cotonniers présents réellement lors de la récolte. L’idéal est donc d’avoir
un « stand » qui correspond à la densité, au cours du développement, il y a toujours
des facteurs défavorables (accidents, maladies, ravageurs) qui font diminuer la
densité. La densité est fonction de l’écartement entre les lignes de cotonniers et de
l’espacement entre les plantes sur ces lignes. Les écartements sont généralement les
premières composantes de la production à être étudiés. Les interactions densité-
milieu étant très nombreuses, les écartements doivent évoluer pour s’adapter aux
techniques culturales ou variétés nouvelles.

Le semis, opération importante, s’exécute soit à la main, soit mécaniquement.


Cependant, dans le cercle Tagouana, c’est le semis à la main qui fut utilisé à
outrance. Dès lors, le travailleur creuse des poquets, sortes de trous de trois à cinq
centimètres de profondeur, dans lesquels il dispose les semences. Il recouvre ensuite
celle-ci de terre pulvérulente non tassée. En agriculture actuelle, le semis s’effectue
presque toujours en ligne, sinon, il n’y a aucune possibilité de mécanisation
ultérieure. Les poquets sont disposés régulièrement sur cette ligne en se servant
d’étalon64.

63
- Idem, p85, le nombre de cotonniers présents réellement sur le terrain au moment de la récolte.
64
- Ibidem, p86, la tige, le bois ou la main dont se sert l’agriculture pour faire des poquets.

58
Le nombre de graines par poquet ne peut être fixé à priori car il dépend de la
qualité des semences utilisées et des conditions du sol. On peut le situer
raisonnablement entre cinq et six graines dans des cas extrêmes. Ceci correspond à
environ 25 kg de semence à l’hectare pour une faculté germinative de 80%65. En
semis manuel, l’agriculteur a tendance à augmenter le nombre de graines au poquet
afin de s’assurer contre une mauvaise germination. Les inconvénients de cette
pratique sont nombreux :

Le démariage est plus long, donc plus onéreux ;

L’enchevêtrement des racines est tel dans les poquets que les pieds restant
après ont une reprise difficile ;

Les risques de « fonte de semis » sont très élevés ;

Les plantules en majorité chétives sont sans ressource contre leurs ennemis et
les difficultés de culture ;

Le coût des semences à l’hectare est élevé.

Une bonne récolte dépend de l’entretien de la culture. Par conséquent les


entretiens culturaux sont variés dans le monde avec les pratiques générales à toutes
les cultures : le remplacement des plantes manquantes, le démariage et le binage
ainsi que le désherbage. Le cotonnier est très sensible, en particulier à son jeune
âge, aux conditions favorables de développement. Les entretiens culturaux exécutés
dans de bonnes conditions sont un gage de bon rendement.

Le remplacement des plants manquants consiste à ressemer les parties du


champ où les plantules sont absentes sans chercher la cause. Elle doit se faire dès
que possible pour réduire les différences d’âge des cotonniers. En pays tropical on
devrait pouvoir remplacer les plantules une dizaine de jours après les premières
germinations. Le démariage, lui, consiste à ne conserver en culture que le nombre
de plantes nécessaire à une bonne production. En semis en poquet, on arrache

65
- Parry. G, Op.cit., p85.

59
systématiquement toutes les plantes indésirables pour n’en conserver un ou deux.
On garde de préférence les plus vigoureuses et les mieux développées.

Le binage, le désherbage, le sarclage66 ont à n’en point douter le même rôle.


En effet, il s’agit d’ameublir le sol et d’éliminer les mauvaises herbes. Sans tenir
pour négligeable le fait d’aérer superficiellement le sol, l’élimination des plantes
adventices reste l’opération la plus importante au regard de l’incidence qu’elle peut
avoir sur la production.

Le sarclage est une opération culturale d’entretien d’une importance


primordiale. De nombreuses expériences ont prouvé que les phénomènes de
nuisance de la flore adventiste commencent très tôt dans la culture cotonnière. Il est
donc nécessaire d’envisager les premiers binages-sarclages conjointement avec le
démariage. Le nombre de sarclage ultérieur par contre sera lié au potentiel
productif, à l’état de ’enherbement de la culture propre jusqu’au moment où le
cotonnier deviendra véritablement dominant de toute la flore adventice.

Le désherbage se faisait généralement à la binette ou à la houe entre les lignes


et sur les billons, et à la main sur la ligne du cotonnier. L’écartement interpelant de
20 à 30 cm quand il est possible facilite le désherbage. Le désherbage mécanique
ne fut pas à l’ordre du jour en ce moment-là.

Les maladies du cotonnier sont : le ver rose de la capsule, la chenille du coton


attaquant les feuilles, les hémiptères qui pullulent dès l’ouverture des capsules et
s’attaquent aux graines et tachent de jaune les fibres. Mais les attaques les plus
sérieuses sont dues aux maladies cryptogamiques. Contre ces maladies, il a été
préconisé les semis tardifs, autant qu’il est possible de les obtenir et l’échange des
graines de semences avec une bonne suivie67.

66
-L’ensemble des techniques permettant de rendre la terre plus molle en enlevant les mauvaises
herbes.
67
- ANRCI, 1RR62, les maladies du cotonnier.

60
Photo no 2: La récolte manuelle du coton

Source: htt// www. Abcburkina.net / index.php

Dans le système de production cotonnière, il existe deux types de récolte : il


s’agit des récoltes manuelle et mécanique. Pendant la période coloniale, la récolte
manuelle prit le pas ; d’ailleurs le vent de la révolution industrielle qui s’étala en
Europe au XIXe siècle n’a pour le moins qu’on puisse dire pas atteint l’Afrique.

Cela dit, la récolte manuelle consiste à faire passer entre les lignes de
cotonniers une main-d’œuvre qui cueille le coton mûr et le dépose dans les
récipients qu’elle transporte avec elle. Ceux-ci permettent de récolter séparément le
coton blanc et propre et le coton tâché par des insectes, des maladies ou de la terre.
Pour se faire les travailleurs s’emparent, à la main, du coton graine qui dépasse
largement la capsule sèche et exerce une traction qui sépare le coton-brut de la
plante. Ils doivent éviter de le souiller des débris végétaux et particulièrement des
petites particules de bractées ou feuilles, difficiles à séparer manuellement ou
mécaniquement à l’usine d’égrenage. En outre, le coton brut étant dans de
nombreux pays estimé suivant son aspect. L’agriculteur a tout intérêt à présenter à
l’acheteur un produit de propreté irréprochable.

La récolte manuelle a lieu suivant deux modalités variables selon le pays ou


l’époque : récolte à la tâche ou récolte à la journée. Dans le premier cas, le prix du
kilogramme de coton récolté est établi d’un commun accord entre l’agriculteur et
le récolteur. C’est la pratique la plus utilisée car elle ne demande aucune
surveillance sinon celle de contrôler la propreté de la récolte. La récolte à la journée

61
est généralement utilisée au début et en fin de récolte lorsque celle-ci n’est pas assez
abondante pour permettre à un ouvrier de dépasser son salaire journalier.

Le nombre de cueillettes dépend du potentiel productif du champ et de la main


d’œuvre dont on dispose. Cependant on doit préciser que la fibre ne conserve une
qualité irréprochable que durant trois semaines environ après la déhiscence de la
capsule. Passé ce délai, sous l’effet conjugué du vent, de la pluie, du parasitisme, la
fibre perd de son lustre, de sa brillance et le classement ultérieur s’en trouve
diminué. Dans les cas extrêmes, la fibre peut perdre jusqu’à un ou deux grades.
Enfin la persistance trop longue sur le champ avant la récolte peut avoir un effet
néfaste sur la graine, donc la faculté germinative, la qualité de l’huile et la valeur
des tourtereaux aux farines.

Lorsque la main d’œuvre a terminé sa journée, le coton est pesé sur le champ
et très souvent conservé en tas pour permettre de le sécher ultérieurement au soleil.
Dans les régions les plus humides, le séchage a lieu sur les claies ; l’humidité
apportée par la rosée du matin doit être éliminée. Un ouvrier cueille 20 à 80 kg68 de
coton-graine par jour. Le mélange de feuilles avec le coton-graine est inévitable
quel que soit le mode de récolte. Il faut envisager le tri, c'est-à-dire enlever ces
feuilles indésirables.

Le coton est une culture très imposante et capricieuse. Ainsi, sa pratique sur
un espace géographique donné demande assez de volonté, de rigueur, de patience
et de courage.

Les plants de coton 69 dans un champ, un mois après les semis. Ici, l’on
remarque des feuilles assez verdâtres. C’est la preuve d’une pluviométrie
abondante. Ainsi, la culture du cotonnier sans risque de se tromper demande
beaucoup d’eau. Pour mûrir, le fruit a besoin de soleil et de chaleur. Il y a beaucoup
de sortes de cotonniers. Avant de faire de grandes plantations, on essaie différentes

68
-Parry G, Op.cit., la quantité de coton-graine cueillie par un ouvrier par jour de façon manuelle.
69
-Duval J.L, Le coton, brochure appartenant à la collection « de la langue à la civilisation
française. » p.24, les plants de coton un mois après la semis.

62
graines. On garde leurs graines en choisissant les graines de coton qui donnent la
meilleure récolte. On les garde pour les futures cultures.

Avant les pluies, le planteur va choisir un bon terrain. Le cotonnier ne poussera


pas bien sûr :

La terre déjà fatiguée, qui a donné beaucoup de coton et beaucoup de mil.

La terre où il y a trop de sable.

Le sol trop humide.

Dès cet instant, le cultivateur cherche d’autre place plus propice, à savoir un
bon terrain. Quelle en sont donc ses qualités ? Ainsi :

Dans la brousse les herbes sont hautes, les plantes peuvent bien pousser ce
champ a porté du mil pendant un an, il peut nourrir des cotonniers.

Cette terre semble profonde et riche, la racine du cotonnier peut à cet effet allé
loin avec une tige belle et des fruits à l’avenir nombreux.

Pour la préparation du terrain, le moniteur70 doit aider et donner des conseils,


il plante un piquet d’un champ et dessine quatre côtés avec sa corde. La plantation
a la forme d’un carré et est nommé « corde ». La spécificité du champ est très nette :
quand le côté fait 50 m, il faut quatre cordes pour un hectare. Quand le côté mesure
60 m, il faut à peu près trois cordes pour un hectare. Quand le côté mesure 70m, on
compte deux cordes pour faire un hectare71. Le terrain choisi doit par conséquent
faire l’objet d’une préparation. Le cultivateur débrousse le terrain : il enlève les
hautes herbes et les vieilles tiges.

Il coupe les petits arbres. Le champ étant bien nettoyé, il faut bien labourer le
sol avec la houe. Après quelques bonnes pluies, le sol est prêt à recevoir les graines.
Les cultivateurs adultes et responsables dessinent des lignes avec une corde et des
piquets. Entre deux lignes, on compte quatre mains ou on fait un pas. Le moniteur

70
-Duval J.L Op.cit, p17, brochure appartenant à la collection « de la langue à la civilisation
française. », l’homme qui donne aux autres les techniques d’un travail dans un domaine bien précis.
71
- Idem, un hectare est égal à un carré de 100 m de côté.

63
peut donner un bâton pour bien mesurer. A partir de ce moment, la creusée des trous
commence. Les semailles prennent forme avec la mise en terre de cinq ou six
graines par trou. Le trou est refermé de terre avec un pied. Avec 10 kilos de coton,
l’agriculteur peut semer une corde carrée de 60 m de côté.

Il pleut, les plantes sortent et grandissent. Mais le cultivateur doit être plus
proche de son champ car sa survie dépend de la réussite totale et véritable de son
champ d’où sa proximité. Dès lors, une semaine après avoir semé le cultivateur va
regarder son champ. Beaucoup de petites plantes sortent de la terre, sur quelques,
elles manquent. Par conséquent, il faut remplacer les graines mortes. Deux ou trois
semaines plus tard les cotonniers portent de petites feuilles. Quatre ou cinq pieds se
serrent au milieu de l’herbe. Là, il y a un choix à faire. Alors le planteur choisit un
ou deux des plus beaux devant rester. Avec une main il tient la terre, de l’autre main
il arrache les petits cotonniers en trop. Il sarcle bien et enlève toutes les mauvaise
herbes, il désherbe son champ, il couvre de terre les pieds qui restent. En ce moment
on dit que le cultivateur butte les plantes. Par ailleurs chaque ligne de cotonniers
prend la forme d’un billon.

La pluie tombe assez. Un mois plus tard, on sarcle une deuxième fois. Souvent
la pluie a entraîné le sol, on voit un peu les racines, il faut encore butter les
cotonniers. Un mois passe, le paysan sarcle une troisième fois. Les cotonniers ont
grandi. Ils portent de petites fleurs. Avec courage, le cultivateur nettoie son champ
sans peur des insectes ennemis. Les plantes sont bien « soignées », elles promettent
donc une bonne récolte.

La pluie ne tombe plus ; le soleil est chaud, c’est la saison sèche. Le paysan
pense à la récolte, il regarde sa plantation, les cotonniers portent des fleurs, des
fruits verts, des fruits mûrs. Déjà quelques capsules72 s’ouvrent et laisse sortir des
fibres blanches. De ce fait, les agriculteurs du cercle Tagouana prirent conscience

72
- J. L. Duval, Le coton, brochure appartenant à la collection « De la langue à la civilisation
française », page33, les fruits qui portent les fibres de coton et qui s’ouvrent après la maturation.

64
très tôt pour s’y accommoder. Par conséquent, l’utilisation de l’espace pour la
culture du coton suit le processus- ci :

1-La délimitation du champ

2-Le dessouchage

-Le nettoyage du champ

3-Le labour

4-Le hersage

5-Le semi

6-Le démariage (sarclage à main)

7-Le sarclage

8-Le rebutage

10-La récolte

11-Le marché du coton

12-L’entretien du matériel

La rotation culturale en tant que technique de culture se pratiqua elle aussi à


l’époque coloniale dans le cercle Tagouana. Pour mieux comprendre cette notion,
il faut signaler que la rotation culturale est l’alternance de différentes végétations
sur un même sol. Elle est jamais synonyme d’assolement alors que jusqu’au XVIIIe
siècle, ce dernier terme avait un sens beaucoup plus restreint et précis puisqu’il
définissait

L’organisation obligatoire des rotations sur un même territoire divisées en


différents parties suivant le type d’assolement imposé (biennale, triennale…). La
rotation culturale donc sera prise ici comme la succession des cultures sur un même
sol, le cotonnier étant l’une de ces végétations.

65
CHAPITRE III : L’INTRODUCTION DU MATERIEL INDUSTRIEL

La puissance métropolitaine, ayant été convaincue que le coton pouvait bien


pousser en pays Tagbana décida de l’installation d’une unité industrielle. Cela passe
par l’arrivage du matériel industriel pour la transformation du coton.

I : Les reformes

Pour aboutir à des résultats probants, des usines vont donc être mises en place
à l’échelle du cercle de façon progressive.

1 : L’arrivage du matériel industriel

Le système usinier est l’une des phases importantes dans la pratique de toute
culture, surtout les cultures pérennes. Le coton ne se dérobe pas à la règle à l’époque
coloniale en pays Tagbana. La transformation artisanale du coton était l’œuvre des
populations locales avant un début de modernisation européenne.

Photo no3: Une égreneuse manuelle en activité

Source : BASSET (T. J), 2002, Le coton des paysans. Une révolution agricole
(Côte d’Ivoire 1880-1999), Paris, IRD, édition, page 99.

66
Photo n 4 : Le plan de la station cotonnière de Dabakala dans le cercle Tagbana

Source : ANCI, 1QQ92, cercle des Tagouana, Rapport du 23 septembre 1921.

67
Cette station comprenait du haut vers le bas sur la photo : un atelier, un
portique de pesage, un magasin, un hangar, une gîte d’étape. Le champ se trouvant
à droite de la station. Cette station était non loin de la route de Bouaké. Au niveau
du matériel de travail, la station comportait deux presses moreux et quatre
égreneuses73. En 1920, elle a rapporté 749.200Frrancs CFA.

La dernière se manifesta par l’arrivée des égreneuses en provenance d’Europe.


Par ailleurs, pour permettre le développement de l’économie cotonnière, il faut
signaler de prime abord que l’administration coloniale décide d’installer des usines
d’égrenage pour une première transformation de la production de coton. Cette
mission fut confiée à l’Association Cotonnière Coloniale. Cette structure fit un don
de 8 égreneuses et quatre machines à scies à la colonie de Côte d’Ivoire en
novembre 1909. Le cercle Tagbana a reçu une machine envoyée à Dabakala 74 ,
dénotant ainsi l’ouverture de la première industrie de coton dans ledit cercle.

2 : L’installation des usines dans le cercle

L’administration coloniale, consciente du fait que le pays Tagbana produirait


du coton, multiplia les installations industrielles. Ainsi, suite à la correspondance
du gouverneur général de l’AOF du 29 juillet 1914, le cercle Tagbana a reçu 2
presses à coton. Une presse fut transférée à Darakolondougou et une autre à
Tafiré 75 . Ces presses à coton ont pour rôles principales : premièrement, la
séparation des fibres des graines ; deuxièmement, la séparation des fibres des
poussières et des impuretés.

II : La transformation et la commercialisation du coton

Le coton qui provient des champs ne s’utilise pas automatiquement dès sa


sortie de son lieu de production. Par conséquent, il faut l’entretenir pour en sortir

73
- ANCI, 1QQ92, cercle des Tagouana, Situation économique et commerciale.
74
- ANCI, 1RR 62, Cabinet du gouverneur, Correspondance et Rapports relatifs à la culture du
coton et à l’usine cotonnière de Bouaké (1910-1924).
75
- ANCI, 1RR62, Idem.

68
une bonne qualité. C’est cette transformation qui se fait dans les usines avant sa
commercialisation

1 : La transformation artisanale du coton

Le coton, après sa sortie de brousse subit une transformation avant sa


commercialisation pour son utilisation tout azimut. La transformation artisanale
dans le cercle Tagouana était donc l’œuvre des populations locales avant un début
de modernisation européenne. Le secteur artisanale fut en point douter le concurrent
majeur de la métropole en matière de culture cotonnière à l’époque coloniale. Les
populations locales avaient une connaissance du coton, vu ses produits dérivés
utilisés dans la vie quotidienne desdites populations. Il s’agit des mariages, des
baptêmes, des funérailles.

Les Tagbana se livraient en grand à l’industrie du tissage, ils préfèrent donc


garder une certaine quantité de coton pour eux-mêmes que d’aller le porter à la
station de dabakala76.

76
- ANCI, 1RR62, op.cit.

69
Photo no 5: Le pagne tissé localement dans le cercle Tagouana.

Source : ANRCI, 1RR61, Cabinet du Gouverneur, Circulaires et correspondances


au sujet du développement de la culture du coton, 1913-1925.

Source : ANRCI, 1RR57, Situation de la colonie, campagne coton.

2 : La transformation industrielle du coton

La transformation se fit à partir des égreneuses en provenance d’Europe et


installées par la métropole dans le cercle. Par ailleurs, pour permettre le
développement de l’économie cotonnière, il faut signaler de prime abord que
l’administration coloniale décide d’installer des usines d’égrenage pour une
première transformation de la production du coton. Cette mission fut confiée à
l’Association Cotonnière Coloniale. Il existe quatre zones d’usines en Côte
d’Ivoire 77: Boundiali, Korhogo, Mankono et Bouaké. Au niveau de la zone d’usine

77 : ANCI, 1RR57, Situation de la colonie, campagne coton.

70
de Bouaké, la CFDT (la compagnie Française pour le Développement des Textiles)
posséda en propre à Bouaké deux usines ; l’une ancienne, ex-CITEX, d’une
capacité de 8000 tonnes, dotée d’une installation de stockage de coton-graine,
pourrait être utilisée durant tout le mois de juin. Ainsi, les capacités totales des
usines de Bouaké s’élevèrent à 24.000 tonnes.

Photo no6 : une presse à coton

Source : ANCI, 1RR57a, Cabinet du gouverneur, Circulaire no 2309 adressée


aux administrateurs des cercles de Bouaké, Dimbokro, Daloa, Man, Dabakala,
Korhogo ( pour Bondoukou, 25 octobre 1908.

71
L’installation de ces usines a été possible grâce à l’apport financier et matériel
de l’administration coloniale. En effet, elle a assuré les frais d’installation, de
transport, de réparation du matériel dans la colonie, d’édification et d’exploitation
de l’usine. Elle supporte la moitié du traitement salarial de l’agent de l’Association
Cotonnière Coloniale en poste à Bouaké. Le total de ces apports s’élève à20000 F78.
En plus de ces principales usines, l’administration coloniale installe des stations
cotonnières dans les autres chefs-lieux de cercle ou de subdivisions des zones
cotonnières dépourvues d’usines à Korogho, Mankono, Séguéla, Daloa, Vavoua
Bondoukou et à Zuenoula.

Tableau no3: Caractéristiques des usines d’égrenage de coton à l’époque


cooniale

Situation géographique Date de mise en activité


de l’usine Matériels
-3 égreneuses de 60 scies
- 1 presse hydraulique
Bouaké - 1 machine à vapeur de 25 1913
CV
- 1 moteur de 14 H.P
- 2 égreneuses de 60 scies
- 1 presse hydraulique
Dimbokro 1917
- 1machine à vapeur de 20
CV
-1 égreneuse de 60 scies
-2 presses à main
Yamoussoukro 1917
-1 moteur à pétrole de 12 CV

Sources : -1RR 61 CABINET DU GOUVERNEUR, Correspondance relative aux


matériaux d’égrenage et à l’achat du coton dans le N’zi-Comoé, 1912-1930.

-1RR 62 CERCLE DU BAOULE, Correspondance relative à l’usine d’égrenage


Bouaké, 1912, 1915, 1916 et 1917.

Bien avant le travail artisanal du coton, il faut signaler que les premières
années de la colonisation furent manifestées par l’exploitation du caoutchouc
sauvage à travers la cueillette. Après la récolte du coton, l’industrie artisanale se

- 1RR 57 CABINET DU GOUVERNEUR, Rapport de la station cotonnière de Bouaké 1911 –


78

1914.

72
mettait en branle. En effet, le filage était l’œuvre des femmes, Elles tissaient à
outrance pendant la journée et confectionnaient de longues et nombreuses files.
Avant d’arriver véritablement à l’étape de la filature, les femmes procèdent à
l’extraction des graines79.

Quant à l’exploitation moderne, à savoir dans les usines ; une observation de


taille est à faire. En effet dans les limites du cercle du Baoulé –Nord, il n’existe pas
encore de centre d’égrenage proprement dit dans le cercle Tagouana. Néanmoins 1
égreneuse à scie et 3 à rouleaux à main, ainsi qu’une presse en cours de montage
sont réunies à Dabakala80. Elles n’ont encore été utilisées que par les indigènes que
pour leurs propres besoins personnels.

Le matériel portatif dans le cercle de Korhogo est plus important. Face à cela,
le récent voyage du gouverneur dans le nord de la colonie de Côte d’ivoire l’a
amené à la construction dans un avenir très proche dans la région de Dabakala
d’usine semblable à celle de Bouaké. Mais le transport des machines à vapeur et de
presse hydraulique ne se fera pas sans grande difficultés, Il faudra peut-être attendre
l’arrivée des rails à proximité de Katiola, Tafiré pour effectuer ces installations.

A l’époque coloniale, le système de transformation du coton dans les zones


de production était presque le même. Dans le cercle Tagouana, la transformation
artisanale ou traditionnelle fut le quotidien des populations locales. Les Tagouana
se livraient en grand à l’industrie du tissage, ils préfèrent donc garder une certaine
quantité de coton pour eux, plutôt que d’aller le porter à la station de Dabakala

3 : La commercialisation du coton

L’activité commerciale était orientée sur la vente et l’achat des produits


agricoles 81 car tous les produits d’échanges provenaient en grande partie de
l’agriculture. Le Tagbana n’avait d’autre souci que celui de sa subsistance et les

79
- (J.T) BASSET, Le coton des paysans (Côte d’Ivoire), page91, la technique de filature du coton.
80
- ANCI, 1QQ179, Rapport sur la culture du coton en Côte d’Ivoire.
81
- ANCI, 1QQ 265-268, Rapport économique du cercle Tagbana pour le 2 e semestre 1934.

73
efforts qu’il développait pour l’assurer se résumaient au strict minimum de ses
besoins quotidiens.

Les échanges n’avaient qu’une importance extrêmement limitée. Néanmoins,


le coton se vendait dans les centres urbains. L’exemple de Bouaké est patent.
Bouaké est le chef-lieu du cercle du Baoulé-Nord et fait limite avec le cercle
Tagouana 82 un peu plus au Nord à 45km. Les populations locales du cercle
Tagouana avaient une connaissance parfaite du coton. Si les productions n’étaient
pas aussi vastes à l’époque précoloniale, elles vont s’accroître pendant la période
coloniale. Mais le peu de coton produit localement était orienté à la satisfaction du
marché local, c’est-à-dire l’artisanat auquel lesdites populations étaient habituées.

Après la production, il faut penser à la vente du produit cotonnier. Ceci


demande la mise en relief des moyens et voies de transport pour la
commercialisation. Ce sont presqu’en général les populations locales dudit cercle
qui sont en amont et en aval du travail cotonnier. Le transport est matérialisé par le
portage du coton par les hommes vers les lieux de vente à des centaines de
kilomètres, sur leurs têtes.

Deux principales grandes voies, au-delà des petites voies secondaires


permettent de relier le cercle Tagouana au cercle du Baoulé-Nord dont le chef-lieu
est Bouaké. La principale usine s’y trouve. Ainsi, le chef-lieu du cercle Tagouana
en 1912 est Dabakala avec deux postes, à savoir Dabakala et Darakolondougou.
Ces deux points situés sur les deux grandes voix commerciales traversent
parallèlement le cercle à 100 kilomètres de distance pour aboutir à Bouaké et le
reliant au Haut-Sénégal-Niger (lobi, Bobo Dioulasso, Sikasso, Bougouni et
Bamako) par Kong, Tafiré et Korogho.

Dabakala commande une région très étendue et est sur l’axe Lobi, Bouaké,
Bobodioulasso par Kong.Darakolondogou est quant à lui sur l’axe de transit d’une
très grande importance (route Soudan occidental par sikasso, Bobodioulasso, Tafiré
et korogho). Le chemin de fer traverse toute la subdivision de Darakolondougou.

82
- ANCI, 1QQ 265, XIII-29-(2/3) 1935, Rapport économique 164 du cercle Tagbana.

74
Elle est la plus importante productrice se relevant du désastre causé par l’invasion
de Samory. Lorsque le rail atteindra le cercle Tagouana, Dabakala deviendra un
poste secondaire et chef-lieu sera Kanagonnon situé à 10 km environ à l’Est de
Darakolondougou sur un plateau salubre et superbe ; l’un des plus beaux points de
toute la haute Côte d’Ivoire. Pour se faire, les bâtiments de Dabakala sont suffisants,
de même que ceux de Darakolondougou qu’il faut bien conserver et entretenir.

Il a été convenu avec le chef de canton Kctéya Coulibaly qui a construit


gratuitement les bâtiments de ce poste, sauf le logement du chef de ce poste
reviendrait au village de Darakolondougou. Le poste de Darakolondougou, bien que
provisoire est absolument indispensable pour assurer l’impulsion économique et
surtout pour assurer la surveillance de la grande route Bouaké –Soudan très
fréquentée. En 1917, à cause de ce poste de Darakolondougou, le cercle a fourni le
plus fort tonnage de grain de tout le cercle pour les besoins de la défense nationale83.

Photo no7 : Les porteurs de coton prêts pour le voyage

Source : BASSET (T. J), 2002, Le coton des paysans. Une révolution agricole
(Côte d’Ivoire 1880-1999), Paris, IRD édition, page 105.

83
-ANCI, 1EE 184, Op. cit.

75
Comme le dit un adage populaire « après la pluie, le beau temps ». Dès lors,
l’idée principale et tout à fait légitime qui anime les planteurs où tout au plus les
agriculteurs est le profit mettant en place le marché parallèle de coton. Ainsi dans
ce corps de métier, les producteurs de coton après un travail laborieux pensent au
marché, c'est-à-dire la vente afin de satisfaire leurs besoins existentiels. Le
système de marché se mit donc en place. Dans chaque gros village, on fait plusieurs
marchés84. Les silos sont construits loin des cases.

Photo no 8 : Le marché de coton à Tiébissou vers 1915

Source : BASSET (T. J), 2002, Le coton des paysans. Une révolution agricole (Côte
d’Ivoire 1880-1999), Paris, IRD édition, page 95.

Les villageois transportent avec de grands paniers en attendant la date du


marché. Attention, une flamme peut mettre le feu et brûler toute la récolte.

84
- Duval J.L, Le coton, page 37, le système de commercialisation du coton après la production dans
les villages.

76
L’acheteur arrive, il installe une bascule. Il pèse les paniers pleins, enlève le poids
des paniers vides et calcule le prix.

Mais le système le plus récurent dans ce commerce fut le marché parallèle du


coton. La concurrence entre les commerçants indigènes et les maisons de commerce
européennes dans l’achat du coton local était une préoccupation continuelle des
administrateurs et des représentants de l’industrie textile de la métropole. Les
autorités ont reconnu l’importance des marchés cotonniers locaux en 1913 lorsque
le prix officiel du coton graine a été aligné sur les prix régionaux85. Pour détourner
le coton qui approvisionnait les tisserands dioulas et baoulé. L’Etat s’efforça, mis
en vain, de supprimer l’artisanat textile indigène. Pour ce faire il essaya de limiter
l’utilisation des égreneuses manuelles de coton par les commerçants dioula. En
1915, le chef service de l’agriculture donna sans ambiguïté la position officielle :
« si nous cherchons à développer la culture du coton86, c’est en vue d’alimenter un
commerce d’exportation d’une matière première tout en facilitant l’importation des
tissus d’Europe.

D’où la nécessité d’habituer dès maintenant l’indigène à porter son coton au


commerce, afin d’aboutir à une suppression graduelle du tissage local. Le but des
appareils portatifs est précisément la préparation sur place du coton brut, sous une
forme qui rend le transport économique. Il ne faudrait donc pas que les indigènes
s’habituent à les utiliser uniquement à préparer du coton qu’ils revendent aux
tisserands. Les égreneuses pourront, au contraire, être mises à la disposition des
exportateurs européens ou indigènes sur les centres d’achat de la voie ferrée ».

Les archives ne disent pas si le service de l’agriculture a mis en œuvre cette


politique, ni comment les planteurs locaux et les marchands ont réagi. Par contre,
la demande en coton par les marchands locaux a considérablement augmenté
pendant la première guerre mondiale. Une reprise du tissage local intervint en 1917

85
- ANCI, 1 RR 63 a, 1913, la préoccupation véritable des administrateurs sur la concurrence entre
les commerçants indigènes et les maisons de commerce européen.
J.T BASSET, op.cit., page 99.
86
- ANCI, 1 RR 63 m, 1915, la probable technique mise en place pour empêcher les indigènes à
vendre leur production cotonnière sur le marché parallèle.

77
parce que les prix des tissus locaux avaient triplé. La toile européenne qui se vendait
à deux francs se vendait à six francs. La demande de toile fabriquée localement était
si importante que les tisserands payaient un franc par kilo la fibre de coton dans les
villages alors que les maisons de commerce offrait 0,3 francs par kilo à de grandes
distances du point de production. Ces prix élevés et les distances plus courtes
rendaient les marchés locaux plus avantageux pour les producteurs de coton.

Dans un rapport sur les raisons de la forte baisse des ventes de coton aux
maisons de commerce entre 1916 et 1917, le gouverneur Raphaël Antonetti 87
observait que le renouveau de l’artisanat semblait logique dans les circonstances :
« la défense fait aux producteurs de conserver un tant soit peu de leur récolte fut
surtout néfaste ; elle équivalait à tuer une industrie localement prospère et qu’il
aurait fallu, au contraire, encourager »

En réponse au rapport du gouverneur Antonetti, le gouverneur Angoulvant


retira son désir de supprimer l’artisanat local indigène : « Je ne partage pas votre
avis au sujet des encouragements à donner à la confection des pagnes par les
tisserands indigènes, bien au contraire. Ces petits artisans passent un temps
considérables pour confectionner une quantité d’étoffes insignifiante et Le marché
parallèle du coton s’est développé en Côte d’Ivoire pendant une bonne partie des
années 1920 et 1930.

Les données de l’ACC concernant les exportations de coton étaient fiables,


mais les administrateurs ne pouvaient qu’estimer les quantités de coton vendues sur
les marchés locaux. En se basant sur les densités de population et les niveaux de
consommation supposés, les chiffres de ventes locales constituent les meilleures
estimations. D’après ces données, on évalue à 37% du total de la production
cotonnière écoulée localement. Ces pourcentages étaient plus élevés lorsque le prix
des cotonnades européennes augmentait et quand la demande en cotonnades
indigènes stimulait les ventes locales.

87
- J. T BASSET, op.cit., page 100, gouverneur général de l’AOF à propos de la chute de l’industrie
locale cotonnière dans un rapport.

78
Les populations étant déjà habitués au coton et au tissage artisanal avaient leur
système de commercialisation qui faisait partie de leurs mœurs. Avec la
colonisation et ses principes onéreux, elles ne pouvaient se dérober au système du
marché parallèle qui les faisait vivre. L’objectif de l’imposition de la culture du
coton est de permettre à la population de payer l’impôt de capitation. A titre
d’exemple, en 1922, le cercle Tagouana a payé 310.868F comme impôt de
capitation en 1922 (141.944F pour la subdivision de Darakolondougou et 168.924F
pour la subdivision de Dabakala)88.

Le coton de la subdivision de Darakolondougou et des cantons Sud de


Dabakala est envoyé à Bouaké où il est vendu et transformé par l’usine cotonnière
principale. Celui des cantons Nord et Centre de la subdivision de Dabakala est
depuis 1916 acheté et traité sur place par l’usine secondaire. Il est revendu ou
réquisitionné à Bouaké en balles de 30 kilos prêtes pour l’exportation en France.
Malheureusement l’usine de Dabakala vient d’être incendiée et il a lieu de la
reconstituer, car le coton brut, étant donné son faible prix ne supporte pas de
portage. L’usine de Dabakala a traité en 1917, la production de la subdivision de
Kong, et elle doit en 1918 recevoir celles des cantons du cercle de Bondoukou les
plus rapprochés du chef-lieu du cercle Tagouana.

Le coton a procuré une ressource incontestable aux indigènes, mais les


maladies cryptogamiques s’étendent de plus en plus sur les cotonniers en fin
d’hivernage ; et l’on peut se demander si le climat du cercle convient parfaitement
à cette culture. Le prix payé aux indigènes est égal ou supérieur au prix local, et ce
produit est l’un de ceux qu’il faut le plus pousser. Dès lors, il n’y a pas à craindre
de mévente, étant donné que la métropole en a besoin en tout temps. Il y a lieu pour
les cantons Diamala et les villages Dyoula de diminuer leurs fournitures de coton
pour les usines proportionnellement au reste du pays, car les indigènes de ces
régions fabriquent des pagnes de renommé donnant lieu à un commerce très
important avec les zones sylvestre et forestière.

88
- ANCI, 1EE 184(4/8), Idem.

79
La subdivision de Dabakala fut le véritable lieu de transit du cercle en ce qui
concerne tous les produits de commerce en général mais en particulier du coton.
Ainsi, de ce centre de transit, 4 tonnes de coton furent exportées en 1913 ; 30 tonnes
en 114 ; 60 tonnes en 191589. Ce qui dénote une augmentation sensible de cette
culture si l’on considère que les indigènes en ont utilisé de grosses quantités pour
la fabrication des tissus du pays et que les grandes agglomérations dioula du
District de Kong comptant de nombreux tisserands venant se ravitailler en coton à
Dabakala. Par ailleurs, des dispositions sont prises en ce moment-là pour faire
fonctionner une petite unité d’égrenage avec des machines en compte au cercle90.

L’exportation du coton non égrené n’a pas nui au commerce local des pagnes
indigènes toujours très florissant ; 117 cartes de circulation représentant 8 tonnes
de pagnes et de fil ont été livrées aux Dioula installés dans le pays de Dabakala ;
des tissus ont aussi été écoulés en pays Baoulé dans la zone sylvestre et sur la côte.

Dabakala, le chef-lieu de l’une des subdivisions du cercle fut un lieu


névralgique du mouvement de colportage du coton, surtout en 1923 et ce dans
presque toutes les directions du pays. En témoigne le tableau qui suit.

Le commerce européen participait aux différentes transactions par l’achat de


nombreux produits dont le coton. Ainsi, le relevé des produits achetés par le
commerce européen se présente comme suit pour quatre années successives à titre
d’exemple. Dans la subdivision de Darakolondougou, 289 tonnes de coton ont été
vendues à Bouaké par les indigènes du district en 1915. Les charges contrôlées au
passage surtout à la descente s’élèvent à 144. Au niveau du contrôle de transit, la
subdivision a reçu 1017 pagnes, 92pagnes Djimini et 169 robes91.

Au premier semestre 1919, la situation économique de la subdivision de


Darakolondougou fut satisfaisante. Les indigènes ont été laissés libres de choisir

89
- ANCI, 1QQ92, Rapport économique du cercle Tagbana pour la campagne 1914-1915.
90
- ANCI, 1QQ92, Rapport économique du cercle Tagbana pour la campagne 1915-1915.
91
- ANCI, 1QQ92, colonie de la Côte d’Ivoire, cercle des Tagbana, Rapport sur la situation
économique, commerciale, générale du cercle, des subdivisions de Dabakala et de
Darakolondougou

80
eux-mêmes leurs acheteurs, bénéficiant ainsi de la concurrence qui s’est faite entre
les maisons de commerce de Bouaké. Le transit de Darakolondougou était toujours
très important entre Koroko(Korhogo) et le Soudan.

Soit au total 22498 charges dont 847pour les pagnes. Afin d’avoir un aperçu
des mouvements de transit dans la subdivision, un pointage des caravanes de toutes
sortes a été entrepris à partir du premier février 1921. Même si ce travail de
statistique n’est précis, il est cependant susceptible de fournir des renseignements
intéressants sur la période du premier Février à fin juin. Il a été donc constaté 1116
caravanes de coton et 2084 caravanes de tissu. La moyenne des charges de coton
en provenance de Koroko (Korhogo) passant par Darakolondougou est de 410 et
247 charges92 en ce qui concerne les pagnes indigènes.

Les charges en provenance de Darakolondougou pour bouaké s’élèvent à 129


pour le coton et 219 pour les pagnes indigènes dans le premier trimestre de l’année
1919.

Tableau no4: Le mouvement de colportage des tissus indigènes enregistré à


Dabakala pendant le quatrième trimestre de l’année 1923.

Nature Origine Destination poids Unités

Tissus Cercle Tagbana Cercle de


indigènes l’Indénié 260 kg 796

Tissus Cercle Tagbana Cercle des 260 Kg 460


indigènes Lagunes

Tissus Cercle Tagbana Cercle Lahou 260Kg 223


indigènes

Tissus Cercle Tagbana Cercle Baoulé 260 Kg 462


indigènes

Tissus Cercle Tagbana Cercle 260 62


indigènes du N’zi Comoé

92
- ANCI, 1QQ92, Idem.

81
Tissus Cercle Tagbana Cercle 260 63
indigènes d’Assinie

Tissus Cercle Tagbana Cercle de 260 15


indigènes L’Agnébie

Tissus Cercle Tagbana Cercle des 260 250


indigènes Lagunes

Tissus Cercle Tagbana Cercle de 260 50


indigènes l’Indénié

Tissus Cercle Tagbana Cercle du 260 271


indigènes Baoulé

Source : ANCI, 1QQ92, Cercle des Tagbana, subdivision de Darakolondougou :


situation économique et commerciale de Darakolondougou en 1923.

Pendant le deuxième semestre de 1919, la subdivision de Darakolondougou a


exporté 9093 tonnes de coton et un grand effort fut fait par les indigènes pour que
l’exportation postérieure puisse atteindre un chiffre plus élevé.

Tableau no5 : Relevé des produits achetés par le commerce européen de 1920
à 1923 à Dabakala.

Nature des
produits 1920 1921 1922 1923

Coton 29547,5Kg 6537Kg 3598,5Kg 586Kg

Source : ANRCI, 1QQ92, Cercle des Tagbana, subdivision de Darakolondougou :


situation économique et commerciale de Darakolondougou en 1923.

En 1922, deux maisons de commerce ont fermé leurs portes à cause de la crise
économique. Il s’est agi de l’Afrique Française installée à Katiola et la Société
Commerciale et Industrielle de la Côte d’Afrique installée à Dabakala94.

93
- ANCI, 1QQ92, Rapport économique du cercle pour la campagne 1914-1915.
94
- ANCI, 1QQ92, Idem.

82
DEUXIEME PARTIE
LA PROSPERITE ET LA DECADENCE DE
L’ECONOMIE COTONNIERE EN PAYS
TAGBANA (1924-1946)

83
Le pays Tagbana à l’instar des autres cercles de la Côte d’Ivoire à l’époque
coloniale n’a pas échappé au système forcé pour la mise en place des cultures
industrielles dans le seul but de satisfaire les besoins métropolitains. Au moment
où le sud se voyait imposé l’économie de plantation à travers le café et le cacao, le
nord savanicole et mieux le pays Tagbana était orienté vers la culture forcée du
coton. Après donc le constat des facteurs naturels furentt identifiés favorables à la
mise en place d’une économie cotonnière (1905-1924).

A partir de 1924, l’administration coloniale engage une restructuration de


l’économie cotonnière en prenant des nouvelles mesures plus répressive. En outre,
elle installa le service des textiles dont les missions principales sont la sélection des
meilleures variétés de cotonniers. La formation des moniteurs et la mise en place
des meilleurs procédés de culture. Ces mesures entraînent une hausse de la
production. Mais la deuxième guerre mondiale plonge l’économie cotonnière dans
une nouvelle crise.

Par conséquent, mettons en relief la prospérité et la décadence de cette


économie cotonnière en pays Tagnana dans cette deuxième articulation de notre
travail.

84
CHAPITRE IV : LA PROSPERITE DE L’ECONOMIE COTONNIERE EN
PAYS TAGBANA

Le produit cotonnier dans son système de confection fait appel aux notions que
sont la production, la transformation et la commercialisation. Ainsi, le planteur le
cultivait de façon secondaire. La production va néanmoins prendre de l’ampleur
avec l’implication de la métropole à l’époque coloniale.

I : La production

La production de coton dans le canevas de notre temps d’étude, c’est-à-dire


de 1905 à 1946 fut presque faible ; d’où une modestie à observer au niveau des
chiffres de la production à mettre en relief.

1 : une production modeste de coton

Le coton avait déjà été introduit en Côte d’Ivoire depuis de nombreuses


années, mais la production était très faible. Pendant les années 1930 ; 1934 ; 1938 et
1942, elle rapproche ou dépasse 6000 tonnes de graine. En 1931 ; 1932 ; 1939 ;
1940 ; 1943, elle s’effondre ; cependant elle remonte légèrement après 1946.

En ce qui concerne singulièrement le cercle Tagbana, la production de fibre


brute de coton se présente comme suit à titre d’exemple pour un certain nombre
d’année : 1912(5 tonnes) ; 1913(10 tonnes) ; 1914(46 tonnes) ; 1915(136tonnes) ;
1916(170 tonnes) ; 1917(70 tonnes) ; 1918(210 tonnes).95En 1934, la production
était de 313 tonnes ; 1935(295 tonnes)96.

La production de coton pour la subdivision de Dabakala se présente comme


suit à titre d’exemple : 1920(29,547tonnes); 1921(6,537 tonnes) ; 1922(3,598
tonnes ; 1923(5,96 tonnes)97.

95
- ANCI, 1RR62, colonie de Côte d’Ivoire, cabinet du Gouverneur, Correspondances et Rapports
relatifs à la culture du coton et à l’usine cotonnière de Bouaké, 1910-1924.
96
- ANCI, 1QQ269, Rapport économique de 1935
97
- ANCI, 1QQ92, Rapport économique de 1915 à 1923

85
La production de coton de la subdivision de Darakolondougou fut groupée de
1915 à 1923 et estimée à 33 tonnes. Cette quantité a été vendue à l’usine de
Bouaké98.

2 : Le prix du coton

Un regard optimiste ou pessimiste de l’expression de la valeur dans le prix.


Cette représentation tire parti de la présence du terme « prix » dans la formule « prix
de production » et prend sa source dans le texte du capital lui-même. Les
populations du cercle Tagouana avaient une connaissance de la notion du prix
depuis même l’époque précoloniale. Avant l’apparition de l’espèce monnaie, les
relations, surtout commerciales se faisaient par le système de troc. Pour ce qui
concerne le prix du coton, c’est l’acheteur qui le fixe ; ce qui paraît paradoxale. A
l’époque coloniale, les relations commerciales entre les cercles Tagouana et du
Baoulé-Nord étaient assez accentuées à presque tous les niveaux : transport, prix,
productions…Ainsi, en ce qui concerne les prix, signalons que 1912 à 1918, ils
voltigeaient entre 0,30f à 0,35f Bouaké et 0,20f à 0,30f à Dabakala, chef-lieu du
cercle Tagouana99.

Le but de l’arrivée du chemin de fer de la Côte d’Ivoire à Bouaké depuis


septembre 1912, a été de faire gagner de l’argent aux indigènes du cercle, de les
enrichir et de les faire participer au développement et à la prospérité de la nouvelle
place commerciale. Objectif : Faire descendre les produits locaux au chef-lieu du
Baoulé-Nord. Il s’agit, en plus du coton, du mil, du sorgho, de l’arachide, du karité
et bien d’autres encore. Ainsi dans ce corps de métier, les producteurs de coton
après un travail laborieux pensent au marché, c'est-à-dire la vente afin de satisfaire
leurs besoins existentiels. Le système de marché se mit donc en place. Dans chaque
gros village, on fait plusieurs marchés100. Les silos sont construits loin des cases.
Les villageois transportent avec de grands paniers en attendant la date du marché.

98
-ANCI, 1QQ92, Idem
99
- 1EE 184, Op.cit.
100
- J .l. Duval, Le coton, page 37, le système de commercialisation du coton après la production
dans les villages.

86
Attention, une flamme peut mettre le feu et brûler toute la récolte. L’acheteur arrive,
il installe une bascule. Il pèse les paniers pleins, enlève le poids des paniers vides
et calcule le prix.

Mais le système le plus récurent dans ce commerce fut le marché parallèle du


coton. La concurrence entre les commerçants indigènes et les maisons de commerce
européennes dans l’achat du coton local était une préoccupation continuelle des
administrateurs et des représentants de l’industrie textile de la métropole. Les
autorités ont reconnu l’importance des marchés cotonniers locaux en 1913 lorsque
le prix officiel du coton graine a été aligné sur les prix régionaux101. Pour détourner
le coton qui approvisionnait les tisserands dioulas et baoulé. L’Etat s’efforça, mis
en vain, de supprimer l’artisanat textile indigène.

Pour ce faire il essaya de limiter l’utilisation des égreneuses manuelles de


coton par les commerçants dioula. En 1915, le chef service de l’agriculture donna
sans ambiguïté la position officielle : « si nous cherchons à développer la culture
du coton, c’est en vue d’alimenter un commerce d’exportation d’une matière
première tout en facilitant l’importation des tissus d’Europe.

D’où la nécessité d’habituer dès maintenant l’indigène à porter son coton au


commerce, afin d’aboutir à une suppression graduelle du tissage local. Le but des
appareils portatifs est précisément la préparation sur place du coton brut, sous une
forme qui rend le transport économique.

Il ne faudrait donc pas que les indigènes s’habituent à les utiliser uniquement
à préparer du coton qu’ils revendent aux tisserands. Les égreneuses pourront, au
contraire, être mises à la disposition des exportateurs européens ou indigènes sur
les centres d’achat de la voie ferrée ».102

101
- ANCI, 1 RR 63 a, 1913, la préoccupation véritable des administrateurs sur la concurrence entre
les commerçants indigènes et les maisons de commerce européen.
102
- ANCI, 1RR 63, la préoccupation véritable des administrateurs sur la concurrence entre les
commerçants indigènes et les maisons de commerce européen.

87
Les archives ne disent pas si le service de l’agriculture a mis en œuvre cette
politique, ni comment les planteurs locaux et les marchands ont réagi. Par contre,
la demande en coton par les marchands locaux a considérablement augmenté
pendant la première guerre mondiale. Une reprise du tissage local intervint en 1917
parce que les prix des tissus locaux avaient triplé. La toile européenne qui se vendait
à deux francs se vendait à six francs. La demande de toile fabriquée localement était
si importante que les tisserands payaient un franc par kilo la fibre de coton dans les
villages alors que les maisons de commerce offrait 0,3 francs par kilo à de grandes
distances du point de production. Ces prix élevés et les 103distances plus courtes
rendaient les marchés locaux plus avantageux pour les producteurs de coton.

Dans un rapport sur les raisons de la forte baisse des ventes de coton aux
maisons de commerce entre 1916 et 1917, le gouverneur Raphaël Antonetti
observait que le renouveau de l’artisanat semblait logique dans les circonstances :
« la défense fait aux producteurs de conserver un tant soit peu de leur récolte fut
surtout néfaste ; elle équivalait à tuer une industrie localement prospère et qu’il
aurait fallu, au contraire, encourager ». En réponse au rapport du gouverneur
Antonetti, le gouverneur Angoulvant retira son désir de supprimer l’artisanat local
indigène : « Je ne partage pas votre avis au sujet des encouragements à donner à la
confection des pagnes par les tisserands indigènes, bien au contraire.

Ces petits artisans passent un temps considérables pour confectionner une


quantité d’étoffes insignifiante et Le marché parallèle du coton s’est développé en
Côte d’Ivoire pendant une bonne partie des années 1920 et 1930. Les données de
l’ACC concernant les exportations de coton étaient fiables, mais les administrateurs
ne pouvaient qu’estimer les quantités de coton vendues sur les marchés locaux. En
se basant sur les densités de population et les niveaux de consommation supposés,
les chiffres de ventes locales constituent les meilleures estimations104.

104
- ANCI 1RR63, Situation de la culture du coton en Côte d’Ivoire, 1912-1924.

88
D’après ces données, on évalue à 37% du total de la production cotonnière
écoulée localement. Ces pourcentages étaient plus élevés lorsque le prix des
cotonnades européennes augmentait et quand la demande en cotonnades indigènes
stimulait les ventes locales. Les populations étant déjà habitués au coton et au
tissage artisanal avaient leur système de commercialisation qui faisait partie de leurs
mœurs. Avec la colonisation et ses principes onéreux, elles ne pouvaient se dérober
au système du marché parallèle qui les faisait vivre.

L’objectif de l’imposition de la culture du coton est de permettre à la


population de payer l’impôt de capitation. A titre d’exemple, en 1922, le cercle
Tagouana a payé 310.868F comme impôt de capitation en 1922 (141.944F pour la
subdivision de Darakolondougou et 168.924F pour la subdivision de Dabakala).105

D’une façon générale, à lire les auteurs traitant de la « transformation », on


retient l’idée que le passage « valeur en prix de production » équivaut purement et
simplement au passage « valeur-prix ». Par conséquent, la métamorphose de la
valeur en prix de production contiendrait donc toute la richesse ou toute la
complexité selon que l’on jette sur le processus un regard optimiste ou pessimiste
de l’expression de la valeur dans le prix. Cette représentation tire parti de la
présence du terme « prix » dans la formule « prix de production » et prend sa source
dans le texte du capital lui-même.

Les populations du cercle Tagouana avaient une connaissance de la notion du


prix depuis même l’époque précoloniale. Avant l’apparition de l’espèce monnaie,
les relations, surtout commerciales se faisaient par le système de troc. Pour ce qui
concerne le prix du coton, c’est l’acheteur qui le fixe ; ce qui paraît paradoxale. A
l’époque coloniale, les relations commerciales entre les cercles Tagouana et du
Baoulé-Nord étaient assez accentuées à presque tous les niveaux : transport, prix,
productions…Ainsi, en ce qui concerne les prix, signalons que 1912 à 1918, ils

105
- ANCI, 1EE 184(4/8), Rapport no 292 de l’administrateur du cercle Tagouana, au gouverneur
de la colonie de la colonie de Côte d’Ivoire sur la situation politique et économique du cercle
Tagouana, en 1918.

89
voltigeaient entre 0,30f à 0,35f Bouaké et 0,20f à 0,30f à Dabakala, chef-lieu du
cercle Tagouana106. En 1920, le coton non décortiqué se vendait de 0,90Francs à
1,50francs le kilo, le tas de coton graines de moins de 500g se vendait à 25Francs,
le coton filé se vendait en fuse aux de 200g à environ 25Francs le kilo107. En
1934, le coton se vendait sur toute la saison à 0,50Francs 108 le kilo. En 1935, le
coton se vendait à 0,70francs le kilo dans la subdivision de Dabakala et à
0,80Francs109 le kilo dans la subdivision de Katiola.

En ce qui concerne singulièrement le cercle Tagbana, la production de fibre


brute de coton se présente comme suit à titre d’exemple pour un certain nombre
d’années : 1912(5 tonnes) ; 1913(10 tonnes) ; 1914(46 tonnes) ; 1915(136 tonnes).

II : La relance de l’économie cotonnière

Après la première guerre mondiale et la crise économique de 1920,


l’administration coloniale a pris des mesures plus vigoureuses pour relancer
l’économie cotonnière en Côte d’Ivoire.

1 : L’accroissement de la production

Le bilan de la relance de l’économie cotonnière se manifesta par


l’accroissement de la production. Toute chose pour voir la trajectoire évolutive
souhaitée par la puissance métropolitaine. La production est passée de 1256 tonnes
en 1924 à 6819 tonnes en 1930 et à 11220 tonnes en 1938. Le triage des graines
instaurées par le service des textiles a entraîné une augmentation du rendement brut
à l’égrenage. Dans le Baoulé nord, le rendement moyen à l’égrenage observé à
l’usine de Bouaké en 1925 est 30,66%. En 1929 elle atteint 33,35%, soit un gain
d’environ 3%110. Ce gain traduit une amélioration de la variété cultivée. Par ailleurs,
l’on note aussi une hausse du rendement de la production.

106
- 1EE 184, Op. Cit
107
- ANCI, 1QQ92, Rapport économique du premier trimestre 1920.
108
- ANCI, 1QQ265 à 268, Rapport économique de 1934.
109
- ANCI, 1QQ 269, Rapport économique de 1935.
110
- ANCI, 1QQ 269, Idem.

90
En outre, avant la création du service des textiles, le rendement de la
production à l’hectare variait entre 70 et 80 kg dans le cercle Tagbana. Ce faible
rendement s’explique par les mauvais procédés de culture, notamment l’absence
d’engrais et le trop espacement entre les plants. Mais les nouveaux procédés de
cultures imposés par le service des textiles ont permis d’atteindre un rendement de
110kg ou même 200kg de coton à l’hectare. Dans les fermes agricoles, il est de
300kg à l’hectare111. Aussi, cette hausse de rendement est due à l’introduction de
variétés étrangères plus productives en côte d’Ivoire.

Photo no 9 : Les laboratoires de l’IRCT à Bouaké

Source : MINISTERE DE L’AGRICULTURE, Le développement de la production


cotonnière en C.I, Tome 1 et 2, janvier 1969, page 1.

111
- ANCI, 1QQ269, Ibidem

91
Photo no 10 : La serre de l’IRCT à Bouaké

Source : MINISTERE DE L4AGRICULTURE, Développement de la production


cotonnière en C.I, Tome 1 et 2, janvier 1969, page1.

L’Institut de recherche du Coton et des Textiles (IRCT) était un institut de


recherche ayant trois principales missions :

a) La recherche scientifique appliquée : ainsi dans le domaine de l’agronomie


des fibres, il fallait faire progresser les connaissances sur la culture des
plantes textiles en pays chauds ; apporter aux producteurs des techniques
leur permettant de répondre aux besoin de l’industrie en qualité et de leur
économie propre en quantité, contrôler l’application de ces techniques.
b) La coopération technique : il s’agit d’apporter aux Etats et organismes
demandeurs, les techniques mises au point pour la recherche et de former
les stagiaires ou les recycler.

92
c) Participer à l’enseignement : c’est à divers niveaux dans son domaine de
compétence en France et dans tous les pays où l’IRCT est représenté.

Par ailleurs, il faut noter que cet institut fut installé en Côte d’Ivoire en 1946.
La station de Bouaké qui fut en son temps l’une des plus importantes et des mieux
outillés du réseau IRCT abritait quatre départements de recherche (phytosanitaire,
phytotechnique, physiologique et agronomique).

Avant la création des usines, l’Association Cotonnière Coloniale a distribué


douze (12) égreneuses à bras de treize scies dont huit (8) en 1909112 et quatre (4) en
1910. Après cette série de distribution d’égreneuses à bras, l’Association
Cotonnière Coloniale installe la première et la plus importante usine d’égreneuse à
Bouaké en 1911. Jusqu’en 1920,

La Côte d’Ivoire ne dispose que de trois usines d’égrenage dont les


caractéristiques sont consignées dans le tableau ci-dessous. Elles assurent
l’égrenage er le pressage des balles. En réalité, les graines représentent les 2/3 de la
masse totale. Par ailleurs, il faut noter que cet institut fut installé en Côte d’Ivoire
en 1946. La station de Bouaké qui fut en son temps l’une des plus importantes et
des mieux outillés du réseau IRCT abritait quatre départements de recherche
(phytosanitaire, phytotechnique, physiologique et agronomique).

Avant la création des usines, l’Association Cotonnière Coloniale a distribué


douze (12) égreneuses à bras de treize scies dont huit (8) en 1909113 et quatre (4) en
1910. Après cette série de distribution d’égreneuses à bras, l’Association
Cotonnière Coloniale installe la première et la plus importante usine d’égreneuse à
Bouaké en 1911. Jusqu’en 1920,

112
- Les huit égreneuses à bras de treize Scies ont été distribuées dans les postes de Toumodi,
Ouossou, Bouaké et Béoumi. CF GOUVERNEMENT GENERAL DE L’AOF, 1910, Rapport
d’ensemble annuel 1909, Paris, Emile Larose, p.141.
113
- Les huit égreneuses à bras de treize Scies ont été distribuées dans les postes de Toumodi,
Ouossou, Bouaké et Béoumi. CF GOUVERNEMENT GENERAL DE L’AOF, 1910, Rapport
d’ensemble annuel 1909, Paris, Emile Larose, p.141.

93
la Côte d’Ivoire ne dispose que de trois usines d’égrenage dont les caractéristiques
sont consignées dans le tableau ci-dessous. Elles assurent l’égrenage er le pressage
des balles. En réalité, les graines représentent les 2/3 de la masse totale.

2 : L’amélioration du niveau de vie des populations

Le coton était une plante dont la culture fut connue par les populations
Taggbana avant la colonisation. Cependant, avec l’arrivée de la métropole, les
travaux liés à cette culture vont changer de visage à partir d’une réorganisation
venue de la puissance métropolitaine. Dès lors les populations vont sentir une
amélioration de leur condition de vie.

Les populations du cercle Tagouana, bien que connaissant le coton même à


l’époque coloniale, se sont vues imposées sa pratique avec le système de la
colonisation. C’est le « champ de coton du coton ». En en outre, en ce temps-là cette
culture de rentre ne fut pas la base vitale de la vie desdites populations, car elles
étaient plus focalisées sur les cultures nourricières, à savoir les cultures vivrières.
Par ailleurs l’économie cotonnière a contribué un tant soit peu au relèvement de la
vie de la population.

Les sommes reçues de la vente du coton avaient plusieurs orientations. En


effet, pendant les funérailles, les linceuls sont achetés ; un comité pour
l’organisation des funérailles, est mis en place pour la cause ; toute la communauté
est mobilisée à cet effet. Ce système se manifesta à travers toutes les mailles de la
vie sociale, à savoir les mariages, les baptêmes, les initiatiques et bien d’autres et
bien d’autres encore114. Avec les revenus cotonniers, l’on assista à un début de
construction de maisons modernes faites en dure.

114
-Entretien réalisé avec Coulibaly Issoufou, notable à la chefferie de Fronan, le samedi 19-12-2015
sur la culture du coton.

94
CHAPITRE V : LA DECADENCE DE L’ECONPMIE COTONNIERE EN
PAYS TAGBANA

La période 1942-1946 a marqué à la fois l’apogée et le creux des exportations


cotonnières de la Côte d’Ivoire à l’époque coloniale. La variété Ishan est désormais
introduite dans la plus grande partie des régions de savane du centre et du nord.

I : La manifestation de la décadence

L’économie cotonnière, à l’époque coloniale qui connut une bonne prouesse


s’est vu décliner avec le temps. Dès lors, la chute de la production va s’accentuer.
Mais à cela, les nouveaux administrateurs une attitude toute particulière.

1 : La chute de la production

La régression, mieux la chute de la production cotonnière après 1942, a une


explication toute simple. En effet cette diminution est due à l’augmentation du
recrutement des travailleurs, à l’imposition de la culture des céréales pour le
ravitaillement de la France en guerre, et surtout les problèmes parasitaires. En 1944,
les dégâts imputables au seul vers rose ont été évalués à 2000 tonnes de coton brute.
L’année suivante, le service de l’agriculture estime le taux moyen des dégâts causés
par les parasites entre 14 et 27% de la production115.

A cela il faut ajouter l’effondrement des prix d’achat du coton à cause de la


deuxième guerre mondiale. En effet, au cours de la campagne 1944-1945, un
hectare de coton rapporte au maximum 450F à 500F, soit entre 3F et 3,33F/kg ;
alors que l’hectare d’igname rapporte 8000F et le tabac entre 8000F et 1000F116.
Les exportations de coton et les importations de tissus européens se sont effondrées.
Les exportations de coton-fibre passe de 1530 tonnes à en 1944 à 500 tonnes à 1946
et 60 tonnes en 1947. Les tissus européens de plus en plus rares sur le marché
ivoirien.

115
- J.T BASSET, Le coton des paysans, une révolution agricole en Côte d’Ivoire (1898-1999), p113.
116
- Idem. P.113.

95
2 : L’opposition de la population à la culture industrielle du coton

Pendant les premières heures de la colonisation dans le cercle Tagouana en


Côte d’Ivoire, entre 1908 et 1912, le caoutchouc de cueillette constituait le principal
produit d’exportation. Devant l’effondrement du commerce du caoutchouc en
Afrique de l’Ouest, les autorités coloniales voulurent encourager une production de
rente. Dès 1908, le ministre des colonies manifesta un certain désir optimiste envers
l’avenir du coton dans les nouvelles colonies françaises d’Afrique de l’ouest.

Dans une lettre ouverte au gouverneur Général de l’Afrique Occidentale


Française (AOF), il déclarait que le coton et le caoutchouc « devraient être les
principales sources de richesse »117 dans les régions qui englobaient le nord de la
Côte d’Ivoire. Le Gouverneur Gabriel Angoulvant avait déjà décidé en 1908,
première année de son séjour de huit ans, que le coton pourrait remplacer le
caoutchouc. Son optimisme est fondé en partie sur les rapports des botanistes et des
administrateurs coloniaux à propos de la culture du coton par les paysans. Par
exemple, Maurice Delafosse, le premier administrateur civil de la région de
korhogo, avait fait état « de plantations de coton relativement étendues » lors d’une
tournée en 1907 dans la région de Guiembé118.

Le gouverneur Angoulvant avait été contacté par les agents de l’Association


Cotonnière Coloniale (ACC) dont la mission était d’encourager le développement
du coton dans les colonies française pour que l’industrie textile soit moins
dépendante des importations du coton américain. L’ACC fut créé en 1902 par les
entreprises textiles françaises pour encourager le développement du coton dans les
colonies d’outre-mer et principalement en Afrique de l’ouest. Après avoir rencontré
les représentants de l’ACC, le gouverneur Angoulvant ordonna au service de
l’agriculture de chaque cercle d’étudier la culture du coton indigène et sa
commercialisation. Ses instructions furent les suivantes : « sélectionner les
meilleures espèces indigènes, démontre aux indigène la supériorité des rendements

117
- J. T BASSET, Le coton des pays, une révolution agricole en Côte d’Ivoire (1898-1909) p90.
118
- J.T BASSET, Idem, page 90.

96
pour l’égrenage de l’outillage européen, développer les cultures au-delà des besoins
locaux, de façon à faire baisser les prix, jusque-là restés trop élevés pour
l’exportation119.

Célèbre pour son mépris des cultures indigènes, Angoulvant pensait que les
méthodes de culture scientifique devaient être imposées en Côte d’Ivoire. Il eut
comme objectif, la monoculture du coton qui permettrait aux gardes de cercle de
délimiter plus facilement les champs de coton et de mieux surveiller le travail.

Cette corvée imposée aux populations indigènes va susciter une résistance


certaine chez lesdites populations. En effet, l’intensification des réquisitions de
l’Etat sous forme de denrées, de coton, de tirailleurs et de main d’œuvre n’eut pas
sans doute une amplification de la résistance. Ainsi dans le rapport politique et
économique du poste de Korhogo en novembre 1915, le commandant du cercle
écrivait que « certains chefs sont opposés à la force d’inertie120 », à ses ordres. Il
constatât que la résistance vint des chefs qui crurent « posséder » les gens que le
gouvernement colonial leur permit d’administrer. De plus « les chefs de familles,
avec plus de raisons cette fois pensent que nous diminuons le leur force de
production en leur enlevant les instruments de travail ».

Les populations procédaient souvent au boycott des semences distribuées par


l’administration. En témoignent les propos de l’administrateur J. Blanchard et je
cite : « il serait vain d’espérer obtenir un résultat rapide et probant par la
distribution des semences, ou des démonstrations de de nouvelles graines » 121
vulgarisation trop dispersées :

Il m’a été rapporté sous la foi du serment que les dernières graines
sélectionnées qui furent distribuées il y a peu de temps ont jetées dans les fossés ;
ailleurs, on m’a affirmé avec instance que l’on n’avait pas besoin

119
- J. T BASSET, Op.cit, page93.
120
-ANCI, 1EE 79 (b), opposition farouche des paysans à l’action des différents chefs contre les
ordres du gouverneur dans le cadre du travail.
121
- ANCI, 1QQ283, Rapport économique annuel, subdivision de Dabakala, premier semestre 1935.

97
D’une façon générale l’opposition de la population se faisait sous plusieurs
angles. Ainsi de façon tactique, les populations fuyaient vers les zones forestières.
Elles s’opposèrent farouchement aux gardes cercles en les molestant dans les
champs. Pire encore, les Tagbana se disant autochtones, refusaient catégoriquement
de faire des champs de coton, quitte à aller en prison.

De ce fait, pour vaincre la résistance des paysans face à la culture forcée, l’Etat
prit trois mesures. La première consistait à offrir des prix intéressants aux
producteurs de façon à les inciter à augmenter leurs productions pour satisfaire le
marché. Le gouverneur général Joost Van Vollenhoven122 exprima ce raisonnement
dans une lettre ouverte au gouverneur de l’AOF : l’indigène de l’AOF n’est pas
autrement fait que le reste de l’humanité. Il est venu offrir son travail chaque fois
qu’on lui a offert des prix rémunérateurs. Par contre, il s’est refusé à se travailler
chaque fois qu’il estimait son salaire insuffisant. On a pu dire sans exagération, que
le rendement des récoltes en AOF, était fonction, non au climat, mais à des prix
payés à la récolte précédente.

Contrairement à ce discours valorisant la rationalité paysanne, les producteurs


de coton étaient rarement rémunérés pour leur travail. L’argent obtenu
habituellement par la vente de coton allait aux chefs de canton et de villages. Si des
prix plus élevés devaient inciter à la production, on aurait dû payer les producteurs
individuellement. Mais l’utilisation des chefs comme intermédiaires de la
monoculture perpétuait la pratique des champs collectifs et des paiements aux chefs
de cantons et de villages. Ainsi, les relations de producteurs en vigueur exigeaient
que les marchands de l’Etat suivent une deuxième voie qui avait fait des preuves :
inciter les chefs à intensifier la production agricole en leur offrant des crédits, des
primes et des commissions.

Une troisième manière d’augmenter la production consistait à accentuer la


coercition. Exiger que les producteurs augmentent la surface cultivée, devienne une

-ANCI, 1 RR 14, le gouverneur général de l’AOF s’exprimant ainsi pour changer la donne de
122

production de coton, face à la résistance de la population, à travers un courrier.

98
pratique courante. Cependant, l’extension de la surface cultivée en coton ne
garantissait pas une augmentation de la production. Une Fois ensemencés, les
champs étaient délaissés. Dès lors l’Etat devrait renforcer ses contrôles de
l’agriculture paysanne. Un rapport de 1918 sur la culture du coton en Côte
d’Ivoire123, révèle le degré du contrôle exercé par l’Etat sur l’organisation de la
culture forcée du coton : C’est un travail continuel que font les administrateurs, car
non seulement, il faut obliger les indigènes à défricher, à semer, mais il faut tenir la
main de l’entretien des champs à la récolte et enfin former les convois pour les lieux
de vente. C’était la tâche des gardes de cercle et des agents des agents de
vulgarisation du service de l’agriculture, de suivre la culture et de la contrôler.

Les autorités coloniales furent satisfaites des résultats de leurs efforts. Le chef
de service de l’agriculture H.L Eroïde, se plaisait à résumer ce qu’il considérait être
à l’origine de l’augmentation des exportations de coton. « Nulle en 1912, la
production est passée à 94 tonnes en 1915 ; 357 tonnes en 1916 et 540 tonnes en
1917124… » Ce résultat est entièrement l’œuvre de l’administrateur local. C’est lui
qui, en obligeant les indigènes à étendre leur culture, en organisant l’achat de leur
coton, son égrenage et son pressage, a provoqué les récoltes suffisantes et leur mise
sous une forme convenable.

Les administrateurs de haut rang estimaient jouer un rôle important pour briser
ce qu’ils considéraient comme un cercle vicieux , l’industrie cotonnière hésitait à
investir dans l’égrenage et le transport, à moins d’être sûr d’avoir des quantités
suffisantes de coton à des prix assez bas pour faire des bénéfices. Ils ne pensaient
que « seul un organe puissant et désintéressé125 » tel que l’Etat colonial pouvait
briser ce cercle vicieux en permettant la création des ressources nouvelles dans des
régions manquant de produits exportables et la commercialisation d’une matière
première dont l’industrie textile de la métropole avait besoin.

123
-ANCI, 1RR63, Situation de la culture du coton en Côte d’Ivoire (1912-1924).
124
- J.T BASSET, Le coton des paysans, une révolution agricole (1898-1909), page 97.
125
- J.T BASSET, Idem, page97.

99
Le coton à l’époque coloniale avait un prix fixé par la métropole au mépris de
la considération humaine. Les administrateurs en faisaient à leur guise. Le prix au
kilogramme de coton était évolutif, mais très lent. D’où la résistance de la
population indigène Tagouana.

La culture du coton dans le cercle Tagouna a connu une évolution comme


toutes les autres cultures pérennes. Le volume de production était évolutif. Soit au
rabais, soit en augmentation. Le système de commercialisation se faisait localement
et régionalement. Les deux voix principales parallèles des subdivisions de Dabakala
et de Darakolondougou furent empruntées pour l’écoulement des produits, surtout
Bouaké, le chef-lieu du Baoulé-Nord. Les prix étaient toujours en défaveur des
paysans indigènes qui fournissaient le plus gros des efforts.

L’intensification des réquisitions de l’Etat eut sans doute une certaine


résistance de la part de la population locale. Dans le rapport politique et économique
du poste de Korhogo en novembre 1915, le commandant du cercle écrivait que
« certains chefs sont opposés à la force d’inertie126 », à ses ordres. Il constatât que
la résistance vint des chefs qui crurent « posséder » les gens que gouvernement
colonial leur permit d’administrer. De plus, « les chefs de familles, avec plus de
raisons cette fois pensent que nous diminuons leur force de production en leur
enlevant les instruments de travail ».

De ce fait, pour vaincre la résistance des paysans face à la culture forcée, l’Etat
pris trois mesures. La première consistait à offrir des prix intéressants aux
producteurs de façon à les inciter à augmenter leurs productions pour satisfaire le
marché. Le gouverneur général Joost Van Vollenhoven127 exprima ce raisonnement
dans une lettre au gouverneur de l’AOF : l’indigène de l’AOF n’est pas autrement
fait que le reste de l’humanité. Il est venu offrir son travail et ses produits chaque
fois qu’on lui a offert des prix rémunérateurs. Par contre, il s’est refusé à travailler

126
- ANCI, 1EE 79(b), Opposition farouche des paysans à l’action des différents chefs contre les
ordres du gouverneur dans le cadre du travail.
127
- ANCI, 1RR14, le gouverneur général de l’AOF s’exprimait ainsi pour changer la donne de
production de coton face à la résistance des populations à travers un courrier.

100
chaque fois qu’il estimait son salaire insuffisant. On a pu dire, sans exagération, que
le rendement des récoltes en AOF était fonction, non au climat, mais à des prix
payés à la récolte précédente.

Les administrateurs de haut rang estimaient jouer un rôle important pour briser
ce qu’ils considéraient comme un cercle vicieux », l’industrie cotonnière hésitant à
investir dans l’égrenage et le transport, à moins d’être sûr d’avoir des quantités
suffisantes de coton à des prix assez bas pour faire des bénéfices. Ils pensaient que
« seul un organe puissant et désintéressé » tel que l’Etat colonial pouvait briser ce
cercle vicieux en permettant la création de ressources nouvelles dans des régions
manquant de produits exportables et la commercialisation d’une matière première
don l’industrie textile de la métropole avait grand besoin.

Le coton, à l’époque coloniale avait un prix fixé par la métropole au mépris de


la considération humaine. Les administrateurs en faisaient en leur guise. Le prix au
kilogramme de coton était évolutif, mais très lent. D’où la résistance de la
population indigène Tagouana.

La culture du coton dans le cercle Tagouana a connu une évolution comme


toutes les autres cultures pérennes. Le volume de production était évolutif. Soit au
rabais, soit en augmentation. Le système de commercialisation se faisait localement
et régionalement. Les deux voies principales parallèles des subdivisions de
Darakolondougou et de Dabakala furent assez emprunter pour l’écoulement des
produits, surtout Bouaké, le chef-lieu du Baoulé-Nord. Les prix étaient toujours en
défaveur des paysans indigènes qui fournissaient le plus gros des efforts.

II : Le marché parallèle de coton

Les populations du cercle Tagbana connaissaient très bien l’importance du coton


bien avant l’arrivée de la puissance métropolitaine. Elles vont se livrer à un système
de commerce parallèle de coton.

101
1 : Les facteurs de la persistance du marché parallèle

Comme le dit un adage populaire « après la pluie le beau temps ». Dès lors,
l’idée principale et tout à fait légitime qui anime les planteurs où tout au plus les
agriculteurs est le profit. Ainsi dans ce corps de métier, les producteurs de coton,
après un travail laborieux pensent au marché, c’est-à-dire la vente afin de satisfaire
leurs besoins existentiels. Le système se mit en place. Dans chaque gros village, on
fait plusieurs marchés128. Les silos sont construits loin des cases. Les villageois
transportent la production dans de gros paniers en attendant la date du marché.

Attention, une flamme peut mettre le feu et brûler toute la récolte. L’acheteur
arrive, il installe une bascule. Il pèse les paniers pleins, enlève le poids des paniers
vides et calcule le prix.

Mais le système le plus récurent fut ce marché parallèle du coton. La


concurrence entre les commerçants indigènes et les maisons de commerce européen
dans l’achat du coton local était une préoccupation continuelle des administrateurs
et des représentants de l’industrie textile de la métropole. Les autorités ont reconnu
l’importance des marchés cotonniers locaux en 19913 lorsque le prix du coton
graine a été aligné sur les prix régionaux 129 . Pour détourner le coton qui
approvisionnait Dioula et Baoulé, l’Etat s’efforça, mais en vain de supprimer
l’artisanat textile indigène.

Pour se faire, il essaya de limiter l’utilisation des égreneuses manuelles de


coton par les commerçants Dioula. En 1915, le chef de service de l’agriculture
donna sans ambiguïté la position officielle : « si nous cherchons à développer la
culture du coton, c’est en vue d’alimenter un commerce d’exportation d’une
matière première tout en facilitant l’importation des tissus d’Europe. D’où la
nécessité d’habituer dès maintenant l’indigène à porter son coton au commerce,
afin d’aboutir à une supression graduelle du tissage local. Le but des appareils

128
- J .l. DUVAL, Le coton, p37, le système de commercialisation du coton après la production dans
les villages.
129
ANCI, 1RR63a, 1913, la préoccupation véritable des administrateurs sur la concurrence entre les
commerçants indigènes et les maisons de commerce européen.

102
portatifs est précisément la préparation sur place du coton brut, sous une forme qui
rend le transport économique.

Il ne faudrait donc pas que les indigènes s’habituent à les utiliser uniquement
à préparer du coton qu’ils revendent aux tisserands. Les égreneuses pourront, au
contraire, être mises à la disposition des exportations européens où indigènes sur
les centres d’achat de la voie ferrée »130.

Les archives ne disent pas si le service de l’agriculture a mis en œuvre cette


politique, ni comment les planteurs locaux et les marchands ont réagi. Par contre,
la demande en coton par les marchands a considérablement augmenté pendant la
première guerre mondiale. Une reprise du tissage local intervint en 1917 parce les
prix des tissus locaux avaient triplé. La toile européenne qui se vendait à 2F se
vendit à 6F. La demande de toile fabriquée localement était si importante que les
tisserands payaient 1F/kg la fibre de coton dans les villages alors que les maisons
de commerce offraient 0,3F/kg à de grandes distances du point de production. Ces
prix élevés et les distances plus courtes rendaient les marchés locaux plus
avantageux pour les producteurs de coton.

Dans un rapport sur les raisons de la forte baisse des ventes de coton aux
maisons de commerce entre 1916 et 1917, le gouverneur Raphaël Anttoneti 131
observait que le renouveau de l’artisanat semblait logique dans les circonstances :
« la défense faite aux producteurs de conserver un tant soit peu de leur récolte fut
néfaste ; elle équivalait à tuer une industrie localement prospère, et qu’il aurait fallu
encourager ». En réponse au rapport du gouverneur Anttoneti, le gouverneur
Angoulvant retira son désir de supprimer l’artisanat local indigène : « je ne partage
pas votre avis au sujet des encouragements à donner à la confection des pagnes par
les tisserands indigènes, bien au contraire. Ces petits artisans passent un temps
considérable pour confectionner une quantité d’étoffes insignifiante et le marché
parallèle de coton s’est développé en Côte d’Ivoire pendant une bonne partie des

130
- ANCI, 1RR63a, Op.cit.
131
- T.J BASSET. Op.cit. p100.

103
années 1920 et 1930. Les données de l’ACC concernant les exportations de coton
étaient fiables, les administrateurs ne pouvaient qu’estimer les quantités de coton
vendues sur les marchés locaux. En se basant sur les densités de population et les
niveaux de consommation supposés. Les chiffres de ventes locales constituent les
meilleures estimations. D’après ces données, on évalue à 37% du total de la
production cotonnière écoulée localement.

Ces pourcentages étant plus élevés lorsque le prix des cotonnades européennes
augmentait et quand la demande en cotonnades indigènes stimulait les ventes
locales. Les populations étaient déjà habituées au coton et au tissage artisanal,
avaient leur système de commercialisation qui faisait partie de leurs mœurs. Avec
la colonisation et ses principes onéreux, elles ne pouvaient que se dérober au
système du marché parallèle qui les faisait vivre. L’objectif de l’imposition de la
culture du coton est de permettre à la population de payer l’impôt de capitation. A
titre d’exemple, en 1922, le cercle Tagbana a payé 310.870F comme impôt de
capitation. En 1922, les subdivisions de Daracolondougou et de Dabakala ont
respectivement payé 141.944F et 168.924F132.

2 : La lutte contre le secteur artisanal dans le cercle Tagbana

Le secteur artisanal fut à en point douter le concurrent majeur de la métropole


en matière de la culture cotonnière à l’époque coloniale. Les populations locales
avaient une connaissance du coton, vu ces produits dérivés utilisés dans la vie
quotidienne desdites populations comme les mariages, les baptêmes, les
funérailles…Cette concurrence était assez tendue. Pour tromper la vigilance des
colons, le marché parallèle conduit par les indigènes se faisait aisément. Il fallait
donc lutter contre ce secteur artisanal.

132
- ANCI, 1EE184 (4/8), Op.cit.

104
Les trois grandes zones de production, fermes et industries cotonnières en Côte
d’Ivoire en 1929 133 se présentèrent comme suit :La zone 1 est une zone de
cotonniers à graines vêtues (le gossypium punctatum). On les localisait à Odienné,
Ferkessédougou, Bondoukou et Korhogo. La zone 2 est celle de cotonniers à
graines lisses (le gossypium barbadense) qu’on localisa Dabakala, Séguéla,
Bouaké, Dimbokro et Touba. Quant à la zone 3, c’est la zone de cotonniers à graines
vêtues (le gossypium peruvianum qu’on trouva à Man et Bouaflé.

Au niveau de la ferme de Bouaké, Les études portent sur les variétés locales,
le gossypium barbadense, le gossypium peruvianum et les variétés importés Allen,
Ishan, et haïtienne. Au niveau de la ferme de Bouaké, Les études portent sur les
variétés locales, le gossypium barbadense, le gossypium peruvianum et les variétés
importés Allen, Ishan, et haïtienne134. Au niveau de la ferme de Bouaké, Les études
portent sur les variétés locales, le gossypium barbadense, le gossypium peruvianum
et les variétés importés Allen, Ishan, et haïtienne 135 . Au niveau de la ferme de
Bouaké, Les études portent sur les variétés locales, le gossypium barbadense, le
gossypium peruvianum et les variétés importés Allen, Ishan, et haïtienne136.

Au niveau du système de culture, le gouverneur Lapalud recommande, dans


sa circulaire du 29 mars 1926, la culture du cotonnier en association avec les plantes
vivrières. S’appuyant sur les analyses du docteur Forbes de la mission des textiles,
il indique que cette association des cultures est bénéfique au cotonnier. En effet,
non seulement, elle assure au paysan une double récolte, mais elle est aussi un
moyen de lutter contre les maladies parasitaires car les parasites attaquent de
préférence les ignames. En plus, le pouvoir colonial veut accroître le volume des
exportations en créant les marchés régionaux de commercialisation qui sont aussi
appelés les foires du coton.

133
- F.HIEM DE BALSAC (dir), 1929, Coton et culture cotonnière, volume IV, fascicule 3, Paris,
secrétariat du comitén, p.215
134
- ANCI, 1RR 7, colonie de Côte d’Ivoire, Correspondance et Rapport adressés au gouverneur au
sujet de la culture du coton et de la station cotonnière de Bouaké (1911-1914).
135
- ANCI, 1RR 7, Idem.
136
- ANCI, 1RR 7, Ibidem.

105
CHAPITRE VI : L’INFLUENCE DE LA DEUXIEME

GUERRE MONDIALE SUR L’ECONOMIE COTONNIERE

La production cotonnière qui avait pris son envol à partir d’une restructuration
de l’administration coloniale, va prendre un « coup ». Il s’agit de la deuxième crise
mondiale qui est la guerre de 1939 à 1945. Cette crise va avoir une sur la cultture
et la production du coton.

I : Le recrutement des Tagbana pour la guerre

La population Tagbana a contribué à la guerre par le recrutement d’hommes


valides.nc Ils ont donc été incorporé.

1 : La contribution des Tagbana à l’effort de guerre

.L’incorporation des Tagbana dans les contingents des tirailleurs


sénégalais

Malgré sa faible population relevant des atrocités commises par Samory Touré
et aussi des réquisitions régulières pour les travaux forcés, le peuple tagbana ne fut
pas épargné des recrutements des tirailleurs sénégalais pour la défense française.

Ils participèrent dans une grande proportion à toutes les souscriptions faites
pour diverses œuvres depuis le début de la guerre. Leur sollicitude fut constante de
même que leur dévouement. Ce rapport suivant le signifie :

« Le cercle des Tagbana a participé d’une façon très effective au recrutement des
tirailleurs demandés depuis la déclaration de la guerre. D’Avril 1913 à janvier 1917, cinq
cent (500) jeunes gens ont été incorporés. Ce qui donne une moyenne de 14 soldats pour
1000 imposables. Les déserteurs ont été rares137 ».

Déjà très éprouvé, le peuple tagbana sortit davantage meurtri de la première


guerre mondiale. Beaucoup de soldats étaient revenus mutilés et beaucoup aussi

137 ANCI : 1EE 184 (4/4) Rapport 1918

106
moururent. Ce désastre accentua le sous-développement de la région. Sensible à
cette réalité, un colon interpella les administrateurs :

« Le cercle des Tagbana déjà pauvre en hommes ne saurait être indéfiniment mis à
contribution eu égard à ses antécédents historiques. Certes les populations si dévouées de
ce pays ont apporté leur contingent, sinon avec enthousiasme, du moins avec une bonne
volonté évidente. 150 000 hommes demandés en février 1918 138».

Malgré cette interpellation, les Tagbana furent encore sollicités pendant la


deuxième guerre mondiale. Faute de statistiques existantes, nous ne sommes pas à
mesure d’indiquer des chiffres.

Au-delà des décès enregistrés pendant ces guerres, l’on peut aussi parler de
l’insécurité qu’elles engendraient dans la région des Tagbana. Les propos suivants
expriment aisément cela :

« Au village de Lafonkaha où se tient un marché journalier et à Nandiéplekaha tout


proche où a lieu un très important marché hebdomadaire, il est urgent de prendre des
mesures sérieuses pour laisser la liberté de vente aux habitants de ces régions, venus là
pour y commercer.

J’ai vu moi-même, à plusieurs reprises des tirailleurs en costumes extravagants


porteurs de fouets ou de cannes, fendre la foule de vendeurs comme en pays conquis. Il
m’a été signalé également que des pensionnaires venant de Bouaké dévalisent littéralement
les gens de Katiola et les Nafanas de passage 139».

Les populations vivaient dans la psychose de peur permanente.


L’administration coloniale tenta de résoudre ce problème en intégrant la plupart de
ces tirailleurs dans l’entreprise de filature de Bouaké : Etablissement Robert
Gonfreville (E.R.G).

De là, nous pouvons affirmer qu’après l’expulsion de Samory Touré, les


Français de la colonie de Côte d’Ivoire devinrent les maîtres incontestés du
territoire des Tagbana. Profitant de la docilité du peuple tagbana, ils instaurèrent de

138ANCI
: 1 EE (4/3) Rapport 1918, 184
139
ANCI : 1 EE 184 (4/4) Rapport 1918

107
nouveaux ordres politiques et surtout économiques, avec par exemple l’économie
cotonnière, qui firent véritablement souffrir les Tagbana sur divers plans.

2 : Le dépeuplement du pays Tagbana

Les champs collectifs imposés par la métropole ne fut pas seulement le fait du
cercle Tagbana. Cela s’est fait sur tout le territoire ivoirien. Les cultures pratiquées
furent en fonction du climat et de la végétation. Ainsi, le sud s’est vu imposé les
cultures du café, du cacao, de l’hévéa, du palmier à huile et bien d’autres encore.
Le nord, quant à lui était consacré à la culture du coton presque.

Les populations du nord en général et celles du cercle Tagbana en particulier


sont descendues au sud pour travailler dans les zones forestières. Cependant, cela
ne s’est pas fait par le leur volonté réelle. Ce fut l’œuvre une fois de la métropole.
Le gouverneur Lapalud intensifia également le recrutement d’hommes dans le nord
pour travailler dans les régions forestières. Un petit nombre de femmes furent aussi
recrutées comme cuisinières pour les équipes de manœuvres. Ce fut la pire
expérience du travail forcé vécu par les femmes140.

Le déplacement des populations, du nord vers le sud pour travailler dans les
champs collectifs de café, de cacao… a causé d’énormes désagréments. En effet,
l’on a assisté à la dislocation de la famille nucléaire de façon temporelle ou
indéfinie, sans retour. A cela s’ajoutent des maladies graves aboutissant parfois à
la mort. La diminution de la population du cercle fut l’une des causes aussi de la
diminution production de coton, car les bras valides sont allés prêter main forte au
sud. Par ailleurs, au niveau local, les populations ont fui les brimades, à travers les
chicottes des gardes de cercle qui surveillent les champs et les contrôlent pour se
cacher loin dans la brousse.

II : L’abandon partiel de la culture de la culture

La crise de l’économie cotonnière est aussi à son abandon partiel. Le mépris


des indigènes et l’attitude des nouveaux administrateurs en sont les fondamentaux.

140
- J.T BASSET, Op.cit. p104.a

108
1 : Le mépris des indigènes

La crise de l’économie cotonnière est en partie due à l’attitude des populations


locales par rapport à l’homme blanc. Le traumatisme causé par le comportement de
l’homme blanc a créé un sentiment de peur chez les populations. En effet,
l’exploitation de la colonie a mis en rude contribution toutes les populations dont
celle du cercle Tagbana. Les gardes de cercle chargés de la surveillance des champs
frappèrent sévèrement les personnes qui entretenaient mal leurs champs. La
colonisation abusait énormément par le système du travail forcé dans bon nombre
de compartiments. Les indigènes faisaient les champs tout au profit des colons.

Les populations du cercle Tagbana ont tellement subi les affres de la


colonisation à travers les champs collectifs de coton, que l’homme « blanc » est
devenu « un monstre à visage humain » pour eux. Alors s’installe une haine à son
égard. Les populations n’ont pas supporté le système des champs collectifs de
coton. La société en avait été totalement atteinte 141 . Par conséquent, l’on peut
affirmer aisément que la fuite tout azimut des populations de notre zone étude a
contribué tout aussi à la baisse de la production du coton.

2 : L’attitude des nouveaux administrateurs.

La répugnance des nouveaux administrateurs à imposer la culture du coton a


contribué à la récession. Les partisans de la France libre conduit par Charles de
Gaulle considèrent la culture forcée du coton comme incompatible avec leur
conception de plus grande démocratie et d’assimilation des colonies africaines. Le
chef du service de l’agriculture et le gouverneur André Latrille sont opposés à la
culture forcée du coton. Malgré les appels de la chambre de commerce pour
ressusciter le service des textiles en 1945, aucune initiative n’a été prise par
l’administration coloniale. L’abolition du travail forcé en avril 1946 marque
officiellement la fin des travaux des « champs du commandant ».

141
- Les champs collectifs sont les champs imposés par les colons à un groupe de personnes indigènes
en vue d’une plus grande production.

109
TROISIEME PARTIE
L’IMPACT DE L’ECONOMIE COTONNIERE
EN PAYS TAGBANA

110
La mise en place de l’économie cotonnière en pays Tagbana a certainement
créé des désagréments au sein de la population locale. S’il est vrai que les
populations du cercle Tagbana connaissaient le coton en tant que plante utile dans
la satisfaction d’une part de leurs besoins à l’époque précoloniale ; d’autre part, sa
culture imposée aux populations de notre zone d’étude à l’époque coloniale ne s’est
pas fait laisser de conséquences.

Dès lors, nous sommes emmenés de mettre en relief dans cette ultime partie,
l’impact de la culture forcée du coton en pays Tagbana. Pour se faire, deux chapitres
sont à élucider : il s’agit des conséquences au niveau économique et social.

111
CHPITRE VII : LES CONSEQUENCES AU NIVEAU ECONOMIQUE

Les conséquences de l’imposition de la culture du coton ne se sont pas fait


attendre. On peut le notifier sans par la diminution de la production et les effets de
la deuxième guerre mondiale.

I : L’impact sur la quantité de coton produite

Les chiffres sur la production du coton vont dégringoler tant au plan national
ainsi qu’à l’échelle du pays Tagbana. Cette diminution et les effets collatéraux de
la deuxième guerre mondiale furent les fondamentaux de cet impact.

1. La diminution de la production

Les conséquences dans le cercle sont pluridimensionnelles. En effet, les


paysans n’ont plus le courage de faire la culture du coton, par conséquent son
abandon était le mieux indiqué. D’ailleurs, le cercle Tagouana n’a pas échappé à la
deuxième crise de l’économie cotonnière en Côte d’Ivoire. La période de 1938 à
1947 marque à la fois la prospérité et la crise de l’économie cotonnière en Côte
d’Ivoire. Par conséquent, avec l’introduction de la variété Ishan dans toutes les
régions de savane, la production avait atteint un record de 11220 tonnes de fibre
de coton dont 7814 tonnes vendues aux usines d’égrenage. Les cercles de Bouaké,
de Séguéla et de Dabakala ont produit 6640 tonnes au cours de cette année 1938.
Les exportations de coton fibre ont atteint également un record de 2892 tonnes la
même année.

2. La dégradation de la production

Mais après 1938, l’économie cotonnière se dégrade. En effet, dès le départ à


la retraite du chef de service des textiles à la fin de l’année 1938, les mesures de
contrôle de la qualité des graines de la variété Ishan ne sont plus appliquées
rigoureusement. Alors, la production s’effondra rapidement les années suivantes
pour atteindre son plus bas niveau en 1946. Les conséquences liées à la guerre sont
plus nombreuses. En effet, après 1944, la production et les exportations de coton
chutèrent rapidement. De 6134 tonnes entre 1941 et 1942, la production de Coton

112
tomba à 56 tonnes en 1946. Comme la guerre en Europe coupait la France
momentanément de ces colonies, les importations et les exportations étaient nulles.
Le représentant de la chambre de Bouaké énumérait d’autres raisons à la chute de
la production : la baisse du prix du coton, les prix toujours élevés des denrées
alimentaires de base, les ponctions de main d’œuvre agricole s’ajoutant à
l’augmentation des travailleurs et aux réquisitions des céréales et les problèmes
parasitaires142.

On a estimé alors qu’un hectare d’igname était 40 à 50 fois plus rentable qu’un
hectare de coton. Dans ce contexte de concurrence entre les cultures vivrières et le
coton, « il est très improbable que la culture du coton, même avec une augmentation
maximum de rendement en poids puisse devenir une culture faite autrement que
sous la contrainte administrative, à laquelle beaucoup d’administrateurs répugnent
au fond d’eux-mêmes ». La répugnance des nouveaux administrateurs de cercle à
imposer le coton contribua également en grande partie à la récession.

Les partisans de la France libre conduit par Charles de Gaulle considéraient la


culture forcée du coton comme incompatible avec leur conception de plus grande
démocratie et d’assimilation des colonies africaines 143 . Enfin, la chute des
exportations de coton fut également la conséquence d’une reprise la guerre de du
tissage artisanale. Les difficultés du transport maritime entraînèrent une pénurie de
tissus importés dans les colonies.

Par conséquent, la toile locale devint prisée et très demandée. Les commerçants
Dioula payèrent un kilo de coton le double, et même le triple du prix pratiqué à
l’exportation. Dans le rapport du service de l’agriculture, en 1944, les prix du
marché local étaient quatre fois élevés que celui à l’exportation. Moins de la moitié
du coton produit dans les cercles de Bouaké et de Dabakala étaient vendue sur les
marchés offiels. Le pouvoir des gardes de cercle avait considérablement diminué.

142
- J. T BASSET, Le coton des paysans, une révolution agricole en Côte d’Ivoire (1898-1999), page
118.
143
- J.T BASSET, idem, page 118.

113
Ils pouvaient seulement fournir des paniers aux planteurs espérant que cela les
inciterait à livre leur coton sur le marché pour l’exportation.

L’instauration des champs de coton a eu des effets négatifs sur les habitants
du cercle Tagouana. Cet impact s’est fait ressentir à travers la production et
l’écoulement sans oublier l’accentuation de la pression coloniale.

II : La persistance du paiement de l’impôt

L’obligation est faite à toute la population de la colonie de Côte d’Ivoire de


payer l’impôt. Le cercle Tagbana en a fait les frais dans cette même logique par la
continuité du paiement de cet impôt.

1 : La continuité de l’impôt

A l’époque coloniale, le pouvoir de la puissance métropolitaine était certain


et méprisant à l’égard des indigènes. Pour mieux comprendre ce que représentait
les chefs pour autorités françaises, citons la circulaire de 1917 du gouverneur
général Van Vollenhoven : « Les chefs n’ont aucun pouvoir propre, d’aucune
espèce, car il n’y a pas deux autorités dans le cercle, il n’y en a qu’une seule. Le
chef indigène n’est qu’un instrument, un auxiliaire ».144 Les budgets locaux étaient
alimentés par des impôts directs.

Le cercle Tagbana avec ses deux subdivisions que sont Dabakala et


Darakolondougou furent déterminant dans le paiement des impôts de façon
rectiligne. L’impôt s’appliquait à tous. L’administration coloniale s’appuie donc sur
les notables et les chefs locaux qui facilitent la perception de l’impôt et le
recrutement de la main-d’œuvre acculée au travail forcé 145 . La main d’œuvre
corvéable peut être mise à la disposition planteurs dans les « champs
du commandant ». D’une façon général, les populations colonisées ont été victime
de spoliation. Le contribuable ivoirien était dès lors, la clé de voûte de toute

144
- ANCI, 1QQ 92, cercle des Tagbana, subdivision de Darakolondougou : Situation économique
et commerciale de Darakolondougou des années 1915,1919-1921 et 1923.
145
- Dictionnaire d’histoire économique, de 1800 à nos jours, les grandes puissances, les grands
thèmes, édition hatier, Paris, 1987, 638 pages.

114
l’entreprise coloniale car de lui, dépendait la mise à exécution des programmes de
développement. L’impôt de capitation devrait faire pénétrer les Tagbana dans les
mœurs et l’usage de la monnaie française et impulser en même temps la politique
d’obligation de cultures commerciales146.

Bouaké est le chef-lieu du Baoulé-Nord et fait limite avec le cercle Tagouana


un peu plus au nord à 45km. Les populations locales dudit cercle avaient une
connaissance parfaite du coton. Si les productions n’étaient pas aussi vastes à
l’époque précoloniale, elles vont s’accroître pendant la période coloniale. Mais le
peu de coton produit localement était orienté à la satisfaction du marché local.
C’est-à-dire l’artisanat auquel lesdites populations étaient habituées.

Aussi dans ce grand moule de l’économie cotonnière, le pays Tagbana a subi


d’énormes pressions pour l’exportation de coton. En effet, au moment où le débat
sur le prix d’achat du coton se poursuivait, les contraintes administratives furent
accentuées pour augmenter la production. A partir de 1925, de nouvelles mesures
modifièrent profondément la production et les échanges dans les régions
cotonnières. Dès lors, sur l’initiative du gouverneur général Carde à Dakar et de
Lipalud, gouverneur de la colonie de Côte d’Ivoire, et sous le contrôle du nouveau
service des textiles, des quotas de production furent fixés pour chaque cercle. Ainsi,
il fut demandé aux villages de doubler la surface de leur production cotonnière147.
Les chefs reçurent également des primes pour augmenter la qualité et la quantité de
coton. Le montant de la capitation à 7,50 francs par imposable, soit plus du
prélèvement de 1913.

2 : L’obligation continue du paiement de l’impôt

L’histoire s’est toujours préoccupée de connaître l’homme dans son milieu,


de montrer son organisation économique ; c’est-à-dire son mode de production et
de ses échanges. Ainsi, l’activité économique a toujours été au centre de la vie de

146
- L’impôt de capitation était un impôt payé par tout individu âgé de plus de 10 ans. On comptait
tous les membres ayant cet âge dans chaque famille. C’est pourquoi on le dénommait aussi impôt
par tête.
147
- ANCI, 67a, 1925 et 67b, 1925-27. Rapport économique et commercial dans les cercles Tagbana
et de Bassam.

115
l’homme parce que l’économie a pour mission de satisfaire les besoins vitaux de
l’être humain. En un améliorer sa condition de vie.

L’agriculture à ce stade constitue l’élément principal dans la vie du monde.


Le système métropolitain a bouleversé dans une moindre mesure l’agriculture
ivoirienne. Le maïs, le sorgho et le mil sont les céréales cultivées en pays Tagbana
avec une ascendance du maïs. A cela s’ajoutent les tubercules que sont l’igname, le
manioc, la patate et le tarot. Mais les deux derniers ne furent pas trop prisés par les
populations locales. Leurs cultures étaient presque inexistantes et la zone de notre
étude fait partie du secteur agricole148.

Après avoir mis en œuvre un mécanisme pour accroître la production et


installer les usines, l’administration coloniale doit ainsi lutter contre la vente du
coton aux tisserands ivoiriens. Pour ce faire, il faut contraindre les paysans à livrer
leur production aux stations d’égrenage. Le chef du service de l’agriculture écrit en
1915 :

« Si nous cherchons à développer la culture du coton, c’est en vue d’alimenter


un commerce d’exportation d’une matière première tout en facilitant l’importation
des tissus d’Europe.

D’où la nécessité d’habituer dès maintenant l’indigène à porter son coton au


commerce, afin d’aboutir à la suppression graduelle du tissage local »149.

A cet effet chaque imposable mâle doit fournir au moins 25 kg de coton. Pour
atteindre ce volume, certains paysans sont obligés d’en acheter dans d’autres
villages. Le 21 octobre 1916, le chef de poste de Yamoussoukro envoie un état
nominatif des paysans qui ont effectivement acheté 1420 kg de coton pour 355F150

148
- ROUGERIE.G, l’encyclopédie générale de la Côte d’Ivoire, tome II : l’Etat et l’économie,
Abidjan, NEA, p587.
149
- ANCI, 1RR 63, COLONIE DE CÔTE D’IVOIRE, Rapport de tournée de L. Leraid, chef du
service de l’agriculture, 15 mars 1915.
150
- H. YAYAT D’ALEPE, 1979, une économie de transition : la Côte d’Ivoire de 1893 à 1919,
Paris, Université, Paris VII, thèse de doctorat 3 eme cycle.

116
dans le village de Toumanié. Une interdiction formelle est faite aux paysans d’en
conserver la moindre partie de leur production pour leurs besoins personnels151.

Des contrôles sont parfois organisés dans les villages pour vérifier si toute la
production du coton a été vendue aux maisons de commerce. En cas de découverte
de coton non vendu, celui-ci est réquisitionné gratuitement. En1918, l’inspecteur
Kair mentionne dans son rapport le cas de Coffi Angoua du village d’Akafoukro
dans le cercle du Baoulé qui a été dépossédé de sa réserve de coton qu’il a caché
dans sa case. Mais l’inspecteur Kair qualifie cette interdiction faite aux paysans
d’abus de pouvoir. Il en est de même pour le gouverneur Raphael Antonetti qui
estime que cette décision d’interdiction « équivaut à tuer complétement une
industrie locale (l’artisanat) particulièrement prospère et qu’il fallut, au contraire
encourager »152

Mais sur le terrain, la mise en œuvre de cette politique de réquisition est


confrontée à certaines difficultés. On peut noter par exemple, le problème de
distance du lieu de production au marché. Dans le cercle de Korhogo, les porteur
doivent acheminer le coton sur la tête en parcourant parfois plus de 200 km jusqu’en
1920. En outre, les prix d’achat du coton proposé par les maisons de commerce sont
assez faibles. Non seulement il est fixé en 1916-1917 à 0,116F/kg de coton brut,
soit 0,35F/kg de coton fibre, mais aussi, une partie de la récolte est retenue par les
maisons de commerce en garantie des pertes qui pourraient subvenir au cours du
magasinage ou de la manutention. Le prix d’achat du coton-fibre n’est pas uniforme
dans l’ensemble des cercle producteurs. Dans certaines localités, il est acheté à
0,25F/kg. En 1913, l’Association Cotonnière Coloniale avait fixé le prix d’achat du
coton brut à 0,40/kg.

Cette mesure n’a pas permis la disparition du tissage traditionnel. Les raisons
de cet échec sont nombreuses.tt En effet, à cause de la guerre mondiale, les prix des

151
- ANSOM CÔTE D’IVOIRE, Rapport de l’inspecteur Kair sur le cercle du Baoulé, 26 mars 1919,
cité par H. YAYA D’ALEPE, 1979, Idem.
152
- ANCI, 1RR 63 CABINET DU GOUVERNEUR, Rapport du gouverneur Antonetti sur la
situation de la culture du coton, 31 juillet 1918.

117
tissus importés ont triplé en passant de 2F en 1915 à 6Fen 1916, puis à 9F en
1918, et enfin à 80F en 1920. Cette situation profite à l'artisanat, car les populations
se détournent des tissus européens et se ruent sur les pagnes locaux. En outre la
reprise du tissage à partir de 1917 est dû au fait que les tisserands achètent le coton-
fibre à un prix bien meilleur que les maisons de commerce, soit 1F/kg. Ils
parviennent alors à détourner une grande partie de la production du coton.

118
CHAPITRE VIII : LES CONSEQUENCES AU NIVEAU SOCIAL

La société Tagbana a été véritablement affectée par l’imposition de la culture


forcée du coton. Dans ce chapitre, le mouvement de la population et les autres effets
sociaux consécutifs à cet état de fait vont être élucidés.

I : Le déplacement de la population

Pour échapper parfois aux abus de l’administration coloniale, les Tagbana se


déplacèrent pour trouver refuge ailleurs ; soit à l’intérieur du cercle ou dans un autre
cercle. Le déplacement des populations s’est fait généralement du Nord vers le Sud.

1 : Le mouvement de la population

Le Sud de la Côte d’Ivoire était l’orientation privilégiée pour le déplacement


des Tagbana. Les champs collectifs imposés par la métropole ne fut pas seulement
le fait du cercle Tagouana. Cela s’est fait sur tout le territoire ivoirien. Les cultures
pratiquées furent fonction du climat et de la végétation. Ainsi, le Sud s’est vu
imposé les cultures du café, du cacao, de l’hévéa, du palmier à huile et bien d’autres
encore. Le Nord quant à lui était consacré à la culture du coton presque. Les
populations du Nord en général et celles du cercle Tagbana en particulier sont
descendues pour travailler dans les zones forestières. Cependant, cela ne s’est pas
fait par leur propre volonté. Ce fut une fois de plus l’œuvre de la métropole. Cette
carte-ci-dessous en est la parfaite illustration.

Malgré son impopularité, les abus et les injustices, l’impôt fut maintenu durant
toute la période coloniale. Toujours à la recherche de sources de financement, les
administrateurs coloniaux mirent de nouveau à contribution la population Tagbana
en leur imposant des prestations comme le portage, les prestations publiques
obligatoires…Dès qu’ils étaient repérés, ils fuyaient plus loin parce que condamnés
à une vie d’errance. Dès lors, ils émigrèrent vers le sud et le sud-est pour louer leurs
services à des planteurs. Le retour leur fut difficile même après l’abolition du travail
forcé en 1946.

119
Carte no :

Le gouverneur Lapalud intensifia également le recrutement d’hommes dans


le Nord pour aller travailler dans les régions forestières. Un petit nombre de femmes
furent aussi recrutées comme cuisinières pour les équipes de manœuvres. Ce fut la
pire expérience du travail forcée par les femmes153.

L’exploitation des Tagbana par le biais de l’impôt s’exprima aussi


physiquement. En effet, la perception de l’impôt s’accompagnait d’actes violents et
arbitraires. Les miliciens molestaient et imposaient arbitrairement des su

153
- T. TIEGBE, Les Tagbana et le monde extérieur du XVe siècle à 1960 : mutations et résistancc
page

120
2 : La perte identitaire des Tagbana par le recensement de la population

En vue de parvenir à la maîtrise des imposables tagbana, les administrateurs


coloniaux du cercle des Tagbana procédaient à des recensements de la population
de leur zone d’influence. Le rapport suivant fait état de cette opération coloniale :

« Tout le cercle des Tagouanas a été recensé entièrement, nominativement pour la


seconde fois depuis 1912. Les résultats obtenus ont été excellents. L’augmentation
d’imposables constatée a été de 3799 sur le recensement antérieur.

Elle est due en partie au retour d’autochtones ayant émigré en pays Agni et baoulé
lors de l’invasion de Samory et ayant récemment regagné leur pays d’origine154 ».

Ce recensement devrait également permettre de recueillir les informations


économiques, ethnographiques, historiques, politiques, et religieuses sur le peuple
Tagbana.

Cette opération de recensement ne pouvait être faite par les seuls colons
français ; ceux-ci recrutaient des interprètes qui n’avaient aucune liaison culturelle
avec les Tagbana. Largaton Ouattara disait à ce propos que : « l’interprète est un
cadre local reconnu. Sa fonction est de traduire le langage du colonisateur ou du
colonisé. En pays sénoufo, les premiers interprètes ont dû être de langue Mandé
Bambara que certains senoufo comprenaient155».

Ces interprètes furent à l’origine de l’effritement identitaire du peuple tagbana


à cause des maladresses notables dans la transcription des noms de localités et de
personnes en pays Tagbana. Tiona Ouattara signifie cette situation dans les propos
suivants : « Pour mieux connaître les zones, les Français se sont faits aider par les
interprètes et les guides qui étaient pour la plupart d’origine jula. Par conséquent,
l’influence linguistique mandé s’est matérialisée à travers les toponymes, les noms
et prénoms de personnes, les noms génériques et l’histoire culturelle156».

154
1EE 184 Cercle des Tagouanas. Rapport 1917
155
Largaton OUATTARA, 1971-1972, L’implantation de l’administration française en pays senoufo
(1898-1914), Paris (Panthéon Sorbonne), 202 pages p.105
156
T.F OUATTARA, Op.cit, p.561

121
C’est en cela que Nièkèrèkaha devint Niakaramandougou. Darakokaha devint
également Darakolondougou. Par ailleurs, le recensement de la population imposé
par le colon entraîna la faillite de ‘’l’âme’’ culturelle tagbana.

D’abord, les patronymes tagbana disparurent au profit des noms mandé.


Comme le signifiait Largaton Ouattara, la plupart des interprètes de la zone étant
des Dioula, ils profitèrent de cette aubaine pour diffuser leur culture en officialisant
leurs noms dans la région. Charles Valy Tuho ne dit pas autre chose quand il
affirme :

« Apparemment, le principe des changements de nom suggérés ou imposés aux


sénoufo par ces conseillers occultes et les marabouts, reposait sur l’idée d’une certaine
équivalence entre les noms sénoufo et les noms mandé par l’intermédiaire de
l’éponyme(…)

Il ne s’agit que d’une équivalence sur le plan conceptuel puisque dans la réalité, la
relation est asymétrique et non réversible157 ».

Ainsi un Horo devrait s’appeler Coulibaly mais jamais l’inverse. Ensuite,


l’autorité de l’oncle disparaissait. En effet, dans la société tagbana, l’enfant
appartenait à sa famille maternelle. De la sorte, un enfant issu d’un père Hili et
d’une mère Thio était de facto Thio. Les Français qui affiliaient l’enfant au père,
bouleversèrent l’ordre culturel ancien des Tagbana en obligeant les enfants à porter
le patronyme de leur géniteur. Cela ne se fit pas sans conséquences dans la société
tagbana. On assista à une hétérogénéité de noms pour les enfants du même géniteur.
Certains faisaient inscrire le patronyme du père par les interprètes quand d’autres
se reconnaissaient dans celui de la famille maternelle.

C’est donc à raison que Mylène affirme que : « Ne connaissant rien des
coutumes et de la mentalité de ceux qu’ils prétendent administrer, les nouveaux
venus ne cessent de commettre des bévues158 ».

Enfin, le recensement qui aboutit à l’établissement d’actes de naissance, de


jugements supplétifs, de cartes d’identité, était une action contraire à la culture

157
Charles Valy TUHO, 1984, J’ai changé de Nom… Pourquoi?, Abidjan, NEA, P.53
158
R. MYLENE, Op.cit, p.32

122
Tagbana. En effet, chez les Tagbana, le père de la famille représentait tous ses
membres. Avaient-ils besoin de se faire identifier individuellement en dehors de la
famille ? Apparemment, cela ne présentait aucune utilité pour les Tagbana. Mais
dans leur volonté de transposer forcément leur culture chez les Tagbana, les colons
français durent recourir à des sanctions disciplinaires afin d’obliger le peuple à
s’accommoder à leurs mœurs.

Comme on le voit, les Tagbana perdirent leur authenticité culturelle au profit


des Français en se soumettant au recensement. A la suite de cette opération, une
pour travailler dans les champs collectifs surtout de café, de cacao… a causé
d’énormes désagréments. En effet l’on a assisté à la dislocation de la famille
nucléaire de façon temporelle où indéfinie, sans retour. A cela s’ajoutent des
maladies graves aboutissant parfois à la mort. La diminution de la population du
cercle en est une des conséquences. Par ailleurs, au niveau local, les populations ont
fui les brimades de l’administration, à travers les chicottes des gardes de cercle qui
surveillent les champs et les contrôlent pour se cacher loin dans la brousse.

II : Le Tagbana face à l’homme blanc et la fin du travail forcé

Les populations tagbana ont été marquées à vie eu égard au traumatisme provoqué
par la métropole à travers le rôle joué par les gardes cercles sur instruction des
commandants de cercle.

1 : La conception de l’homme blanc selon les Tagbana

La peur et le dédain véritables de l’homme blanc étaient aussi les effets


collatéraux de l’économie cotonnière à cette époque coloniale.

Le traumatisme causé par le comportement de l’homme blanc a créé un


sentiment de peur chez les populations. En effet, l’exploitation de la colonie a mis
en rude contribution toutes les populations ivoiriennes et surtout celle du pays
Tagbana en matière cotonnière. Les gardes de cercle chargés de la surveillance des
champs frappaient ceux qui entretenaient mal leurs champs. La colonisation abusait
énormément par le système du travail forcé dans bon nombre de compartiments.
Les indigènes faisaient des champs de coton au profit de la métropole.

123
Le pays Tagabana a tellement subi les affres de la colonisation à travers les
champs collectifs de coton, que l’homme « blanc » est devenu un « monstre à
visage humain » pour lui. Alors s’installe une haine sans merci et un rejet à son
égard.

Les populations n’ont pas supporté le système des champs collectifs de coton.
La société en avait été véritablement atteinte. En témoigne le déplacement massif
desdites populations du Nord vers le Sud pour les autres champs collectifs de café,
de cacao… Ce qui leur donna un autre visage comportemental face au blanc.

En lisant-même certains rapports, l’on pourrait être amené à croire que


l’impôt de capitation n’entraîna pas de conséquences négatives chez les Tagbana.
Et pourtant la réalité fut différente. En effet, si la majorité des Tagbana
s’acquittaient de leurs impôts, d’autres n’y parvenaient pas. Les vieillards et
certains jeunes étaient incapables de payer l’impôt à cause de leur âge ou de leur
handicap physique. Il y avait également le problème du nombre trop élevé des
imposables pour certaines familles159.

Ces Tagbana vivaient alors dans la psychose permanente car convaincus d’être
humiliés publiquement par les auxiliaires coloniaux. Ainsi dès qu’apparaissait une
chéchia rouge ou un casque blanc 160 , c’était le signal de la débandade vers la
brousse.

Cette troisième partie, d’ailleurs, qui est la dernière de ce travail, nous a permis
de montrer les effets collatéraux de la culture du coton sur les populations Tagbana.
Mieux l’impact de cette économie cotonnière sur lesdites populations. A partir de
1910 les prestations dégénèrent en travail forcé. En effet de nombreuses entreprises
installées dans la région des Tagbana ou en basse Côte d’Ivoire avaient entamé
des travaux agricoles importants.

159
- Ces familles comportaient le plus souvent beaucoup de filles que de garçons. Or la réalité montre
que de telles familles ne pouvaient avoir de grands champs pouvant leur permettre de payer l’impôt.
160
- Les gardes cercle portaient soit une chéchia rouge, soit un casque blanc. On les identifiait à
travers ces insignes.

124
Ne trouvant pas sur place la main d’œuvre dans cette zone, ces particuliers se
la procuraient à bon marché dans les régions du Nord par l’entremise des
administrateurs. Pierre Kipré exprime cela.« sans produit susceptible de soutenir
les exportations vers la métropole, les populations de la zone des savanes sont ainsi
en position d’être les plus sollicitées pour constituer l’essentiel de la main d’œuvre
des plantations de café, cacao et des chantiers d’exploitation forestière de plus en
plus nombreux depuis les années 1910 161».

La région des Tagbana ne resta pas en marge de ce recrutement massif.


Beaucoup de Tagbana furent réquisitionnés et convoyés dans les zones forestières
pour prêter leur force de travail aux exploitants agricoles venus d’Europe. Ils y
passaient six voire huit mois hors de leur contrée dans des conditions extrêmement
difficiles.

Réquisitionnés par milliers et conduits au poste de recrutement, enchaînés,


ces travailleurs débutaient leur calvaire par le voyage. Il s’effectuait à pieds jusqu’à
la destination estimée parfois à plus de 400 kilomètres. On les rencontrait à Tiassalé,
à Grand Bassam dans les exploitations privées (Voir carte 6). Cette carte indique
les localités de la colonie de Côte d’Ivoire où la main d’œuvre tagbana était
convoyée. Elles se situent au Sud et à l’Ouest. Sans moyens de déplacement, nous
pouvons nous rendre déjà compte des difficultés endurées pour atteindre ces
localités. Nous n’avons pas pu obtenir un fond de carte de cette période. C’est
pourquoi certaines dénominations ne collent pas au temps. Il s’agit surtout des pays
limitrophes de la colonie.

On enregistrait beaucoup de malades et de morts non pas à cause des durs travaux
mais surtout à cause du dépaysement et du traitement inhumain qu’ils subissaient avec
leurs employeurs.

Concernant le dépaysement, il faut souligner que les Tagbana étaient semi


sédentaires. Ils se déplaçaient seulement pour rechercher des terres plus fertiles et

161- KIPRE.P, 1992, Histoire de la Côte d’Ivoire, Abidjan, Edition AMI, 111p

125
laisser les anciennes en jachère. D’ailleurs cela se passait rarement. Et voilà que les
colons français les séparaient de leurs familles et de leur environnement. L’adaptation
était difficile surtout au niveau alimentaire.

Dans ces localités, les Tagbana étaient astreints aux travaux forcés tels que le
transport des outils et des matériaux de construction, la coupure du bois, la construction.

Le menu qui leur était présenté quotidiennement était très différent de leurs
habitudes alimentaires. Certains s’abstenaient et d’autres faisaient un effort de
s’adapter et eurent des dégoûts pour certains aliments. A cela s’ajoutait la nostalgie
des parents ; d’où les chagrins permanents qui occasionnaient des suicides, des
maladies et des morts162.

A propos du traitement des employeurs, il était des plus inhumains. Les abus se
résumaient selon Catherine Vidrovitch et H. Moniot, à l’insuffisance de rations, à la
prolongation illicite de l’engagement, aux châtiments corporels, aux équipements
sanitaires inexistants

Les salaires pratiqués étaient fixés à « 2,50F par jour pour un engagement égal ou
inférieur à 6 mois ; 3F pour plus de 6 mois. La ration alimentaire en plus du salaire
est fixée à 2F par jour. Les femmes touchent 1,50 F à 2F par jour 163».

Mais très souvent, en complicité avec des administrateurs, certains employeurs


‘’oubliaient’’ d’honorer le salaire des six 6 mois de labeur. Les travailleurs les plus
chanceux faisaient valoir leur droit au pécule chez leurs chefs. Le pécule était une
rétention d’argent c’est-à-dire la moitié du salaire qui était perçue à la fin du contrat.
Rares étaient les travailleurs qui percevaient ce pécule.

Comme on le constate, les travailleurs menaient une vie difficile dans les
exploitations agricoles. Jean Noël Loucou affirme à propos que

162
- Entretien avec Kolo Touré à Katiola le 16 avril 2017
163-
KIPRE. P, Op.cit, p 112

126
« Le travail forcé soumet l’autochtone à toute une série de corvées qui en
font un sujet taillable et corvéable à souhait. Les prestations qu’il doit accomplir
consistent en journées de travail gratuit d’une durée maximum de douze jours.
Dans la pratique ce maximum est minimum164».

Mais les corvéables tagbana ne pouvaient malheureusement fuir ces


traitements pour deux raisons essentielles. D’abord, les recrutés ne maîtrisant pas
leurs zones d’accueil, il était alors quasiment impossible pour eux de se déplacer
loin de leur lieu de travail. Ensuite, la loi indiquait que tout déserteur s’exposait à
la prison pour vagabondage. Ces conditions de travail et de recrutement de la main
d’œuvre furent critiquées par Maret, inspecteur des affaires administratives de la
colonie. Ainsi dans son rapport officiel de 1931, il affirmait que « l’administration
de Côte d’Ivoire a transformé cette colonie en un bagne odieux 165».

Malgré ces critiques et aussi la politique libérale du Gouverneur Latrille


entreprise depuis 1943, les Tagbana subirent ces travaux forcés jusqu’à leur
abolition en 1946. Les populations tagbana furent marquées psychologiquement de
manière indélébile. Aucun vieillard ne peut vous fournir des faits passés sans parler
des travaux forcés.

C’est le cas de Koné Nanion qui s’exprimait ainsi :

« Les rapports entre les N’Dalan et les Français ont été contradictoires. Ils
avaient sauvé nos populations des atrocités de Samory Touré mais en même temps,
ils les soumirent à des travaux pénibles.

164-LOUCOU
J.N, 1986, Histoire de la Côte d’Ivoire tome1 : la formation des peuples, Abidjan,
CEDA, p61
164
-Administrateur Maret cité par Pierre KIPRE, 2005, Op.cit, p.166

127
Il fallait tracer des routes avec des dabas, couper du bois de chauffe pour le
train. Et pire, des commis noirs, très méchants leur rendaient la vie difficile. Je
peux citer Moussa et Zigla. Nos parents passaient 10 à6 mois hors de leurs villages.

C’est ce qu’on appelait le Kalowôrô .Moi-même qui te parle, j’ai pratiqué le


Kalowôrô à Grand Bassam. Beaucoup d’amis et de frères sont morts pendant ces
travaux166 ».

Le même traditionniste nous informait que les populations tagbana désiraient


être retenues dans les sisaléraies Leger et Dechaneau à Katiola et Tafiré. Dans ces
chantiers de « Baga 167 », les Tagbana se trouvaient non seulement dans leur
environnement mais aussi ils avaient la chance d’être visités par les parents. La
proximité des corvéables avec leur environnement était effectivement un facteur
stimulant. « dans la plupart des cas, les corvéables séparés de leur famille, de leur
village, de leurs coutumes, pour accomplir ces travaux puisqu’on ne prend pas en
considération leur origine lorsqu’il s’agit de désigner qui fera quoi, vivent dans
des conditions physiques et morales déplorables et souffrent en particulier d’être
éloignés de chez eux quand leur présence est particulièrement indispensable soit
sur le plan des occupations agricoles saisonnières, soit sur le plan rituel (initiation
par exemple). Ces corvées n’eussent pas provoqué tant de drames si elles s’étaient
accomplies à proximité du village des corvéables168».

Mylene Remy exprime son désarroi sur l’éloignement des corvéables de leur
environnement familial :

En ne tenant pas compte de cette réalité, les colons provoquaient des moments
de disette en raison du net recul de la production vivrière. Le recul de la production
était causé par les absences prolongées des bras valides et aussi par les fuites pour
échapper au recrutement.

166Entretien réalisé le 13 Avril 2016 de 10h 20 à 12h22mn avec koné Nanion François, chef du
village
de N’Danan.
167
’Baga’’ était le nom que les Tagbana utilisaient pour désigner la culture de sisal. Pour le moment,
nous ignorons l’origine de ce nom.
168
R. MYLENE, La Côte d’Ivoire, Paris, les éditions J.A, p.32

128
Nous pouvons donc affirmer sans nous tromper que les Tagbana souffrirent de
l’impôt de capitation, du portage bref, des travaux forcés. Nous nous rendons
compte également qu’à travers les travaux forcés, Les Tagbana sentirent
énormément l’exploitation coloniale. Mais il n’en fut pas moins pour leur
participation aux guerres mondiales.

Malgré sa faible population relevant des atrocités commises par Samory


Touré et aussi des réquisitions régulières pour les travaux forcés, le peuple tagbana
ne fut pas épargné des recrutements des tirailleurs sénégalais pour la défense
française.

Ils participèrent dans une grande proportion à toutes les souscriptions faites
pour diverses œuvres depuis le début de la guerre. Leur sollicitude fut constante de
même que leur dévouement. Ce rapport suivant le signifie :

« Le cercle des Tagbana a participé d’une façon très effective au recrutement


des tirailleurs demandés depuis la déclaration de la guerre. D’Avril 1913 à janvier
1917, cinq cent (500) jeunes gens ont été incorporés. Ce qui donne une moyenne
de 14 soldats pour 1000 imposables. Les déserteurs ont été rares169 ».

Déjà très éprouvé, le peuple tagbana sortit davantage meurtri de la première


guerre mondiale. Beaucoup de soldats étaient revenus mutilés et beaucoup aussi
moururent. Ce désastre accentua le sous-développement de la région. Sensible à
cette réalité, un colon interpella les administrateurs :

« Le cercle des Tagbana déjà pauvre en hommes ne saurait être indéfiniment mis à
contribution eu égard à ses antécédents historiques. Certes les populations si dévouées de ce
pays ont apporté leur contingent, sinon avec enthousiasme, du moins avec une bonne volonté
évidente. 150 000 hommes demandés en février 1918 170».

Malgré cette interpellation, les Tagbana furent encore sollicités pendant la


deuxième guerre mondiale. Faute de statistiques existantes, nous ne sommes pas à
mesure d’indiquer des chiffres. Au-delà des décès enregistrés pendant ces guerres,

169
ANCI : 1EE 184 (4/4) Rapport politique et économique du cercle des Tagbana en1918.
170ANCI,
1 EE (4/3) Rapport de fin de gestion no 292 de l’administrateur du cercle des Tagbana au
gouverneur de la Côte d’Ivoire 1918, 184

129
l’on peut aussi parler de l’insécurité qu’elles engendraient dans la région des
Tagbana.

2 : L’abolition du travail forcé

De la fin du XIXe siècle à la seconde guerre mondiale, le travail forcé a été


général sur le continent africain. Tous les colonisateurs l’ont imposé. Un
phénomène dont on imagine mal l’ampleur171. Dans ce cadre, la France mis en place
un système d’exploitation. Par exemple l’instauration des champs du commandant
dont le coton. L’économie cotonnière a été ainsi installée dans le cercle Tagbana.
Dans le canevas de notre champ d’étude allant de 1905 à 1946 elle a connu de
nombreuses péripéties.

En France, de plus en plus de personnes réclament la suppression du travail


forcé. Dans son discours à Brazzaville, en 1944, le général de gaulle en avait promis
la suppression ; mais ce n’est que le 5 avril 1946, que la proposition de loi
d’Houphouët Boigny est adoptée sans débat à l’assemblée constituante française.
La suppression du travail forcé devenait officielle avec la promulgation de la loi
no46-645 du 11 avril portant abolition du travail forcé, appelée « loi Houphouët
Boigny ».Cette proposition de loi172 se présent comme suit :

Article premier : Le travail forcé ou obligatoire est interdit de façon absolue


dans les territoires d’outre-mer.

Article 2 : Tous moyens ou procédés de contrainte directe ou indirecte au fin


d’embaucher ou de maintenir sur les lieux du travail un individu non consentant
feront l’objet d’un texte répressif prévoyant des sanctions correctionnelles.

Article 3 : La présente loi abolit tout décret et règlement antérieur sur la


réquisition de la main d’œuvre, à quelque titre que ce soit173.

171
- Propos recueillis par la journaliste Sévérine Nikel dans une interview réalisée avec l’historien
de la RDC Elikia M’bokolo en octobre 2005.
172
- ANCI, 6DD4, loi Houphouët Boigny abolissant le Travail forcé.
173
- ANCI, 6DD4, op.cit.

130
Avec l’abolition du travail forcé en 1946, sur proposition du député Félix
Houphouët Boigny, alors député à l’assemblée constituante française, l’économie
cotonnière prit une dégringolade.

131
CONCLUSION

132
Le temps de la colonisation fut un moment capital pour tout le continent
africain, du moins, aucun lopin de terre n’a été épargné. Du Nord au Sud ; de l’Est
à l’Ouest, les anglais, les français et les portugais, pour ne citer que ceux-là, ont
envahi le continent. Le congrès de Berlin a emplifié cet état de fait proclamant la
balkanisation de l’Afrique. Dès lors chaque conquérant s’en est allé avec ses
moyens et méthodes pour avoir une assise véritable sur sa part du butin. Les
colonisations donnent naissance à des formes de travail spécifiques qu’on appela le
« travail forcé ».

Celui-ci apparaît dans les années 1800 pour être progressivement légalisé au
cours des deux décennies suivantes. Le canevas de 1880 à 1908 correspond au
premier âge colonial marquant la conquête de l’espace colonial. C’est donc le
moment où les Etats occidentaux et des particuliers commencent à confisquer des
terres aux africains, s’accompagnant parfois et partout d’un grand nombre de
violences et de massacres.

C’est dans ce grand mouvement que naquit le système de divisions territoriales


en cercle après l’occupation totale des terres par la métropole, telle la France qui
colonisa la Côte d’Ivoire. Ce pays fut subdivisé en plusieurs cercles et sa population
soumise à plusieurs types de travaux à elle imposée par la puissance colonisatrice.
C’est dans ce cadre que nous avons pris l’objet de notre étude à travers le sujet
intitulé l’économie cotonnière en pays Tagouana de 1905 à 1946.

Pour cette étude, nous argumentions sur trois grandes parties : La première
articulation est axée sur la mise en place de l’économie cotonnière dans le cercle
Tagouana de 1905 à 1924. A ce niveau, les sous parties sont axés sur les facteurs
naturels favorables à la mise en place de l’économie cotonnière et la création des
premiers champs collectifs de coton.

133
La deuxième partie est orientée sur la prospérité et la décadence de l’économie
cotonnière de 1924 à 1946.

Le dernier compartiment de notre étude se manifeste par l’impact de


l’économie cotonnière en pays Tagbana. Ici, les conséquences au niveau
économique et celles concernant le volet social sont évoqués comme sous parties.

Même si les sources, qu’elles soient orales ou écrites ne s’accordent pas sur la
pratique de la culture du coton comme une culture de base à l’origine pour aboutir
à une économie cotonnière véritable, il est vraisemblable que le coton était connu
par les populations du cercle Tagbana et mieux son importance n’était point à
négliger.

Ces Sénoufo étaient dispersés sur un territoire s’étendant de


Niakaramandougou jusqu’à la ville actuelle de Tiébissou. Ils avaient choisi de
s’établir sur cet espace grâce à la bonne qualité de la terre par rapport à la partie
septentrionale du territoire Sénoufo. Leur appellation « Tagbana » serait une
transformation linguistique de « Trakpannan » qui signifiait « terre fertile » chez
ces populations Sénoufo. Autrement dit, ces populations Sénoufo furent
dénommées « Tagbana » pour s’être installées sur des terres fertiles.

Devenus Tagbana, ils s’adonnèrent principalement à l’agriculture mais aussi


de façon subsidiaire à l’élevage et à l’artisanat. Ils pratiquaient tous, le système
matrilinéaire. Ainsi le pouvoir politique était toujours exercé par les hommes et la
succession se faisait d’oncle maternel à neveu. De la sorte, les Tagbana ne purent
mettre en place un pouvoir central dépassant les sphères villageoises. L’autorité
politique reconnue était le chef du village. Celui-ci était assisté dans sa tâche par un
conseil d’anciens. En plus du respect des autorités coutumières, les Tagbana
renforcèrent leur cohésion par l’observance des alliances patronymiques au nombre
de six(06) : Hié, Thio, Hli ou Hili, Nkongon, Hala et Horo174.

174
-TOURE .T, les Tagbana et le monde extérieur du XVe siècle à 1960 : mutations et
résist ances, p276, les alliances patronymiques tagbana.

134
La cristallisation fut facilitée par le climat, la géographie (zone savanicole
dans sa grande partie) propice à la culture du coton. La population évolua
sensiblement, rendant la zone moins dangereuse. La poterie connut un
perfectionnement grâce aux femmes Mangoro.

En définitive, l’étude nous a permis de découvrir que le pays Tagbana, à


travers sa population est rattaché au travail de la terre. L’économie cotonnière, de
par tous ses compartiments, mis en exergue dans le déroulé de notre argumentaire
l’atteste bel et bien.

135
A N N E X E S

136
Annexe 1: La carte réorganisée du cercle Tagouana de 1914-1920.

Source : ANRCI, 1EE 184 (4/5), Cercle des Tagouana, rapport des 1ers, 2e et 3e
trimestres 1920.

137
ANNEXE 2 : La réorganisation du cercle Tagouana en fonction de la
pénétration du rail

Source : ANRCI, 1EE 184 (4/5), Cercle des Tagouana, rapport des 1ers, 2e et 3e
trimestres 1920.

138
ANNEXE 3: la liste des chefs de subdivision de Katiola (1924-1943)

Date de prise
de service
Nom et prénoms Grades et corps Fin du séjour

Cazalas Commis des 1924 1924


services civils

Jean Canal Commis des 1924 1925


services civils

Edmond Bruat Commis des 1929 1929


services civils

Bernard Cayron Commis des 1929 1930


services civils

Maillier Commis des 1930 1933


services civils

Maurice Burger Administrateur 1933 1934


adjoint

Raoul Administrateur 1934 1934


adjoint

Jean Rogues Administrateur 1934 1936


adjoint

Grangenois Administrateur 1936 1937


Maurille adjoint

Pierre Gribelin Administrateur 1937 1938


adjoint

Jean Henri Note Administrateur 1938 1939


adloint

Marcoin Administrateur 1939 1939


adjoint

Charles Administrateur 1939 1940


Baumester adjoint

139
Jean Henri Not Administrateur 1940 1942
adjoint

Louis Barthes Administrateur 1942 1943


ajoint

Albert Aubert Aministrateur 1943 1943


adjoint

Source : Ouattara (T.F), 1998, Côte d’Ivoire, Katiola, Des origines à nos jours,
NEI Abidjan.

140
ENTRETIEN

A : Entretien réalisé avec monsieur Coulibaly Issoufou, notable à la chefferie de


Souroukaha (Fronan).

1 : Papa, est-ce que vous avez fait les champs de coton au temps des blancs
qu’on appelait communément les colons ?

Réponse : Merci « mon fils », nous avons fait des champs de coton. Mais ce fut
dans le cadre des travaux forcés. Chaque famille avait sa superficie à rendre en
coton ; c’était obligatoire et on était surveillé par les gardes de cercle qui faisaient
des contrôles réguliers.

2 : Comment se faisait le transport et la vente ?

Réponse : Après la cueillette manuelle, le coton est mis en tas sous des tentes
traditionnelles. Plusieurs jours de récoltes sont faits avant de l’envoyer au village.
Les sacs ou les paniers sont remplis de coton et le transport se faisait sur la tête vers
le village. Les acheteurs venaient au village, à défaut, on convoyait le coton sur
Bouaké à pied.

En ce qui concerne le prix, j’ai un peu oublié.

B : Entretien réalisé avec monsieur Coulibaly Tiémoko, le chef de canton de


Fronan.

3 : chef, est-ce que vous vous rappelez des travaux forcés ?

Réponse : Oui, j’ai moi-même participé aux travaux forcés. Nous avons fait des
champs, des routes et bien d’autres travaux.

4 : Concernant les champs, avez-vous fait du coton ?

Réponse : Nous avons fait des champs de coton. Mais ils se faisaient par famille et
sur des espaces bien délimités. Les gardes de cercle passaient pour des contrôles de
façon périodique. J’ai participé au champ de coton de Fronan dans le village de
Daracokaha à 8km en allant vers le nord.

141
SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE

A – SOURCES
1. Sources orales
Les sources orales furent collectées à Katiola, à Timbé à Fronan et dans
quelques villages environnants (Kationon II, Koffisiokaha, kanangonon,
Daracokaha, Tiengala, Naplékaha, logbonou) auprès des informateurs composés
de Tagouana, de Dioula et de Mangoro ; de femmes et d’hommes, de jeunes et de
vieux, de lettrés et d’illettrés, de chrétiens, de musulmans et d’animistes.

- COULIBALY Issoufou, notable dans la chefferie de Souroukaha à Fronan, petit


fils du défunt chef de canton Pékorognan nommé TCHEYA. Il est né vers 1942.
Entretien réalisé le 25 août 2016 à son domicile à Fronan de 16 heures 10 mn à 19
heures à propos de l’agriculture cotonnière pendant les travaux forcé.

- COULIBALY Tiémoko, maire de la commune de Fronan de 1995 à 2010. Il est


l’actuel chef de canton de Fronan et est le premier à être intronisé comme tel, mais
choisi auparavant par TCHEYA avant sa mort. Interview réalisée le samedi 19
décembre 2015 à son domicile à Fronan de 10 heures 20 mn à 12 heures 30 mn sur
la culture du coton à l’époque coloniale.

- KOLO Touré, directeur du complexe d’éducation télévisuelle de Bouaké de 1969


à 1982, actuellement chef de canton de Katiola. Entretien réalisé les 16 et 17
décembre 2015 à son domicile sis au quartier Nagnankaha de ladite ville de 19
heures à 20 heures 30 mn sur « les champs du commandant ». Il a 73 ans.

- KOUAME Kouadio Benoît, cadre de vulgarisation au siège de la CIDT à


Bouaké. Il est né le 1er janvier 1958 à Yamoussoukro, précisément dans le village
de Ténikro. Entretien réalisé le mercredi 20 avril 2016 sur l’époque cotonnière
antérieure à la naissance de la CIDT dans son bureau au siège de ladite entreprise à
Ahougnanssou, non loin du campus1 de l’Université Alassane de 8 heures 00 mn à
11heures 20 mn.

142
- N’GUESSAN Franck, juriste à la centrale syndicale UGTCI, à Abidjan. Il nous
a reçus au domicile du chef de canton à Fronan le 20 décembre 2015 de 8 heures
00 mn à 10 heures 5mn. Il était accompagné de madame N’GUESSAN Kati
Solange, informaticienne dans une structure privée à Abidjan.

- OUATTARA Konandi, cultivateur habitant au quartier mangorosso de Katiola.


Cet entretien a lieu le mercredi 20 décembre 2015 au domicile de l’un de ses cousins
proches de 19 heures à 21 heures. Il a 53 ans.

2. Archives Nationales de Côte d’Ivoire :

Série B : Correspondances générales

1BB 608 : Télégrammes Kong-Baoulé 1901

1BB 619 : Télégrammes Kong 1902

1BB 65 : Télégrammes chemin de fer et port 1908

Série DD : Administration Générale

1DD 8 : Colonie de la Côte d’Ivoire, cabinet du gouverneur, instructions générales


de Monsieur DELAFOSSE concernant le commandement des administrateurs des
cercles 1905-1907.

1DD 23(18) : Colonie de la Côte d’Ivoire. Cabinet du gouverneur, 3e bureau lettre


de l’administrateur général et des affaires économiques à messieurs les
administrateurs commandants de cercle de Dimbokro, Bouaké, Dabakala, Korhogo
et Séguéla au sujet du riz rouge, 1924.

1DD 35 : Notes mensuelles sur la situation politique et agricole de la Côte d’Ivoire


pour le bulletin de l’agence économique, 1925-1926

1DD 36 : Copie du rapport du Ministre des colonies au président de la République,


suivi du projet de décret a/s de la construction du chemin de fer de la Côte d’Ivoire
et de l’évolution des travaux à effectuer, 1922

143
1DD 45 : Colonie de la Côte d’Ivoire. Cabinet di gouverneur, tournée de Monsieur
le gouverneur général en Côte d’Ivoire, 1909-1913

1DD 49 : Colonie de la Côte d’Ivoire, cabinet du gouverneur, tournée du


Lieutenant-Gouverneur général dans les cercles de Dabakala- Baouké, Korhogo,
Ouéllé, Aboisso, 1900-1913.

1DD 1610 : Rapports de tournées effectuées par l’administrateur du cercle de


Kong 1909-1913.

2DD 8 : Colonie de la Côte d’Ivoire, cabinet du gouverneur. Correspondance au


sujet du commerce et de la colonisation à la Côte d’Ivoire. Notice à l’usage des
émigrants 1906-1910.

2DD 66 : Colonie de la Côte d’Ivoire. Cercle du nord et du haut Sassandra. Rapport


d’inspection dans les cercles du nord et du Haut Sassandra, programme des
tournées d’inspection dans les cercles du nord 1910, 1916, 1919, 1925.

2DD 86 : Cercle des Tagouanas. Inspection de Dabakala. Rapport des tournées


1922-1925.

2DD 111 : Note sur la géologie et les ressources minières de la Côte d’Ivoire, 1908

2DD 112 : Dossier relatif à l’organisation et à la réorganisation des circonscriptions


administratives de la Côte d’ Ivoire, 1908

2DD (121) : Colonie de la Côte d’Ivoire. Décisions et correspondances relatives à


la limite de la circonscription de Katiola 1913, 1916, 1922,1929.

4DD 286 : Colonie de la Côte d’Ivoire. Premier bureau affaires politiques. Fiches
signalétiques des chefs indigènes, 1921

4DD 26(5) : Statistiques des cultures faites par les indigènes, 1917.

5DD (1) XXII-9-1 : Recensement dans le cercle du Baoulé-Circonscription de


Bouaké 1912.

5DD 6 : Colonie de la Côte d’Ivoire, cabinet du gouverneur. Correspondance au


sujet de la répression de la fraude sur les produits agricoles 1904,1905, 1907-1917.

144
5DD 7 XII-13-2002 : Dénombrement général de la population.Principaux cercle
(1912). Recensement par cercle (1912). Instruction et correspondance 1912.

6DD4 : Colonie de la Côte d’Ivoire, cercle de Kong, projet de rôle d’impôts de


capitation pour l’année 1904.

6DD (28) : Colonie de la Côte d’Ivoire. Rôle nominatif de l’impôt, des prestations
dans les cercles de l’Agneby-Lagunes-Tagouanas et Lahou

Série EE : Politique générale

1EE 3, 1931-1932 : Rapports trimestriels des cercles IV – 50/5 carton 3323. Cercle
de Baoulé, 4e trimestre 1932

1EE (5) : Colonie de la Côte d’Ivoire. Rapport sur un projet de réorganisation


administrative de la Côte d’Ivoire, 1908.

1EE 5(15) : Colonie de la Côte d’Ivoire, Rapports trimestriels d’ensemble (1er


trimestre) 1923.

1EE 6(1) : Colonie de la Côte d’Ivoire. Rapports mensuels d’ensemble, 1904-1906.

1EE 7(2) : Pacification de la Côte d’Ivoire (1908-1910).

1EE 9(1) : Mission Braulot (mission chez Samory) 1894-1896.

1EE 9 (4) : Lettre du gouverneur de la colonie adressée à Monsieur le Ministre des


colonies de Paris 23 Avril 1898

1EE 9(7) : Colonie de Côte d’Ivoire, dossiers relatifs à la lutte contre Samory1984-
1898.

1EE 25(3): Cercle de Kong. Rapports des tournées 1910-1912.

1EE 28(1):Cercle du Bouaké-Mission de Bouaké, 1896.

1EE 28 (1) : Cercle du baoulé. Mission du Baoulé ! Notes sur le Baoulé Août 1896.

1EE 28(1) : Cercle du Baoulé-Renseignement sur le cercle de Bouaké 1903

1EE 29(1,2): Région de Bouaké, Rapport d’ensemble 1902-1903-1905.

145
1EE 29(2): Rapports trimestriels 1913-1914-1920-1925.

1EE 29(3) : Note sur la politique suivie dans le cercle du Baoulé, 1903

1EE 35: Cercle de Bouaké. Opérations militaires dans le Baoulé. Comptes rendus
d’opérations et correspondances, 1904

1EE 36(2/1): Poste de Bouaké. Rapports du troisième trimestre, 1916-1922.

1EE 38(1/7): Colonie de Côte d’Ivoire. Région du cercle du Baoulé-Nord.


Circonscription au poste de Kouadio Koffi. Rapport mensuel du mois de décembre
1908, 13 feuilles.

1EE 75(3):Cercle de Kong. Rapport de tournées 1911-1912. Rapport politique. 47e


trimestre 1921.

1EE 75(4):Cercle de Kong. Circonscription de Dabakala. Rapport de tournées dans


le Tagouana-sud. Septembre 1903.

1EE 184(2) : Cercle des Tagouanas. Rapport de fin de gestion sur lasituation
d’ensemble du cercle 1918

2EE 8 : Cercle des Tagbana. Affaires politiques et indigènes. Fiches signalétiques


des chefs indigènes 1913-1918

Côte d’Ivoire : Cercle des Tagouana. Monographie enregistrement des coutumes


indigènes du cercle des Tagbana. Octobre 1916(sans côte)

- Colonie de Côte d’Ivoire. Rapport sur la race Sénoufo-1922 en exécution de la


circulaire N°86B-M du 27 Mars 1922

- Colonie de Côte d’Ivoire. Coutumier du cercle de Kong.

-Coutumes – Sénoufo - M.F DELMOTTE, Administrateur des colonies 1919


Monographie du cercle de Kong 1911.

2EE10:Cercle de Kong. Situation numérique des villages de liberté, 19021904.


Correspondance relative au recrutement de porteurs, 1903.

2EE 12:Cercle de Kong, 1903, Rapport sur les familles indigènes qui ont quitté le
pays de Kong après le passage des bandes de Samory Touré.

146
2EE 12(14) : Colonie de Côte d’Ivoire. Colonie du gouverneur, 1910,
Correspondance reçue au sujet de la sécurité sur la circulation, sur la voie ferrée.

2EE 1(3): Cercle de Kong. Note circulaire du commandant de cercle aux


commandants de circonscription et chefs de poste au sujet de la politique indigènes,
1903.

2EE 1(4) : Colonie de la Côte d’Ivoire. Cabinet du Gouverneur, circulaire relative


aux affaires indigènes, 1906-1907

2EE 14(1) : Esclavage ou traite des noirs, 1904-1919

2EE 14(3) : Colonie de la Côte d’Ivoire. Affaires politiques, Rapports sur


l’esclavage domestique dans les cercles, personnes proposées pour sa suppression,
1908.

2EE 14(4) : Colonie de la Côte d’Ivoire. Affaires politiques, rôle de la pacification


au point de vue anti-esclavagiste. Réponses des cercles 1913

3EE : Affaires musulmanes et culte.

3EE 1(1) : Colonie de la Côte d’Ivoire. Cabinet du Gouverneur, Affaires politiques,


renseignements sur l’organisation du personnel administratif indigène dans les
régions de religion musulmane de la Côte d’Ivoire, 1902.

3EE 3(1/3) : Colonie de la Côte d’Ivoire. Correspondance relative à l’expression


de l’islam 1913-1914.

3EE 3(2) : Côte d’Ivoire, Affaires musulmanes, statistiques des écoles coraniques
1907-1929.

3EE 6(1) : Mission catholique 1899, 1902, 1903, 1908, 1914, 1915.
Correspondance relative à des demandes d’autorisation de construire, de
subvention adressée au gouverneur, à l’administrateur.

3EE 6(2) : Note relative à la séparation des églises et de l’Etat, 1906

147
3EE 6(5) : Colonie de Côte d’Ivoire. Cabinet du gouverneur. Affaires politiques.
Correspondance échangée avec les missionnaires catholiques relative à
l’établissement des chapelles et catéchistes dans les cercles 1916, 1921, 1925.

3EE 7(3) : Colonie de la Côte d’Ivoire, cabinet du gouverneur. Lettre adressée par
le Lieutenant-Gouverneur général de l’AOF au sujet de l’ouverture de chapelles et
écoles dans la colonie, 1920.

3EE 7(5) : Mission protestante 1984, 1907, 1912, 1915, 1916. Correspondance
relative à des demandes d’autorisation pour la construction de temples, pour
exercer le culte, pour réunion etc.

Série F

1FF 138 : Interdiction des jeux de hasard sur les chantiers des chemins de fer 1904-
1905

1FF 81 : Circulaires relatives au contrôle et à l’exploitation des étrangers, 1935-


1936

Série H : Santé et assistance

1HH 109 : Situation numérique du personnel médial en service à la colonie 1910

2HH 1 : Rapports sur la situation sanitaire en Côte d’Ivoire.

Série K : Travaux publics

1KK 1 : Rapport fait par monsieur Kair, inspecteur de 1ère classe des colonies,
concernant l’exécution des grands travaux publics se rapportant au développement
de l’outillage économique de la colonie, 1919.

2KK 2 : Loi relative aux plans d’extension et d’aménagement des villes 1919

KK 2 : Rapports sur l’état des voies de communication, 1909-1920

3KK 11 : Note et circulaire a/s de la construction du réseau routier à souder aux


voies ferrées de la Côte d’Ivoire 1914.

148
3KK 13 : Circulaire à messieurs les administrateurs et commandants au sujet de la
construction des routes 1914

3KK 14 : Projet de circulaire pour le réseau routier de la Côte d’Ivoire 1914

3KK 16 : Correspondance au sujet de l’aménagement du réseau routier de laCôte


d’Ivoire, 1914-1915.

3KK 20 : Correspondance de l’administrateur du cercle de Kong à monsieur le


Gouverneur de la Côte d’Ivoire au sujet du classement des routes, 1915.

5KK 9 : Situation générale des voies ferrées de laCôte d’Ivoire, 1914.

5KK 29 : Correspondance a/s. Influence du chemin de fer sur le développement de


la Côte d’Ivoire, 1918.

5KK 43 : Arrêté, correspondances relatives à l’exploitation provisoire de la partie


de voie comprise entre Katiola et Niangbo 1925.

5KK 51 : Enquête sur la situation des manœuvres du chemin de fer de la Côte


d’Ivoire 1922-1923.

5KK 62 : Rapport du capitaine THOMASSET relatif aux projets de continuation


des travaux du chemin de fer de la Côte d’Ivoire, 1911.

5KK 69 : Correspondances relatives à la mission du chemin de fer de la Côte


d’Ivoire

5KK 74 : Correspondance relative à l’avant-projet du prolongement du chemin de


fer au nord de Bouaké (mémoire descriptif) 1911

5KK 84 : Projet de prolongement du chemin de fer au nord de Bouaké du km 396


au km 450, 1923-1927.

7KK 5 : Correspondance relative au service automobile de la 1918-1920.

Série N : Affaires militaires

1NN 26 : Colonie de la région de Kong, opérations militaires. Rapports, comptes


rendus et correspondance, 1900-1901, 1903, 1905-1907.

149
2NN 70 : Côte d’Ivoire-Besoin de la colonie en main d’œuvre, plan de mobilisation
disposition à prendre en cas de troubles insurrectionnels. Entrainement des cadres
et des troupes, 1931-1932.

2NN 99 : Côte d’Ivoire cercle de Kong, 1898-1900, 1902-1907, 1910-1912.

2NN 122 : Côte d’Ivoire cercle de Kong. Ravitaillement des troupes 1902-1903,
1905-1906, 1910-1911, 1923-1932.

3NN 2 : Colonie de la Côte d’Ivoire. Recrutement indigène 1919-1920, 1931, 1935-


1936.

3NN 3 : Colonie de la Côte d’Ivoire, recrutement indigène, correspondance 1919-


1920.

3NN 13 : Côte d’Ivoire, recrutement indigènes rapports, instructions, décrets,


arrêtés, circulaires et notes circulaires 1915-1916

3NN 13 (2) : Côte d’Ivoire, Statistiques et Rapports des cercles 1915-1916

Série QQ : Affaires économiques et commerciales

1QQ 19 : Colonie de Côte d’Ivoire, correspondance échangée entre le Gouverneur


et les administrateurs de cercle au sujet de l’établissement d’un répertoire
commercial de la Côte d’Ivoire.1920-1923

1QQ 23 : Colonie de la Côte d’Ivoire, premier bureau : Affaires économiques,


caoutchouc 1924-1927

1QQ 24 : Colonie de la Côte d’Ivoire, affaires économiques, premier bureau,


correspondance échangée entre le gouverneur, le président de la chambre de
commerce et les sociétés européennes au sujet des possibilités d’entrer en rapport
d’affaires avec les maisons de commerce installées en Côte d’Ivoire, 1924-1925.

1QQ 42 : Introduction des billets de banque et propagande en faveur de leur


circulation 1912-1916.

1QQ 43 : Colonie de la Côte d’Ivoire, correspondance relative aux monnaies 1915-


1917-1919-1920.

150
1QQ 75 : Colonie de la Côte d’Ivoire, cercle du Baoulé Nord, marchés de Bouaké

1QQ 79 : Colonie de la Côte d’Ivoire. Cercle du Baoulé Nord sur la situation


économique et commercial du cercle et des postes de Bouaké, M’Bahiakro,
Tiébissou, Béoumi, Diézoukro 1901, 1910, 1921, 1925

1QQ 83 : Cercle de Kong. Poste de Kong. Rapports sur la situation économique et


agricole du poste de Kong, 1909-1914.

1QQ 101 : Rapports sur la situation économique et commerciale des cercles 1916-
1918.

1QQ 191 : Cercle du Baoulé Nord, Rapports sur la situation économique et


commerciale du cercle 1910, 1920, 1923, 1924.

B. BIBLIOGRAPHIE

1. Instruments de travail

Le Nouveau Petit Robert de la langue française, mai 2008, Jouve, Paris,

Petit Larousse, 1998, Paris, 1165 p.

Dictionnaire des civilisations africaines, Paris, 1968 ; 456p.

Dictionnaire d’histoire économique, de 1800 à nos jours ; les grandes puissances ;


les grands thèmes ; Hatier Paris, 1987, 638 p.

DOMINIQUE ET MICHEL FRREMI, Quid 2003, Edition, Robert Lafont ; 2158p

Dictionnaire méthodique du français actuel, le Robert méthodique, édition le


Robert, 1998 ; 1533 p ; rédaction dirigée par Josette Rey-Debove.

Dictionnaire Universel, 2014, 5e Edition, AUF, Hachette

ROBERT (P), 1987, Le Grand Robert de la Langue française, Tome III, Couv Ento.
107, Paris XIe, 1055 p

BORREMANS (R), 1986, Le grand dictionnaire encyclopédique de la Côte


d’Ivoire, NEA, Abidjan, Volume A et B, 385 pages.

151
Planète terre, notre monde, Hatier ; Tome2, Paris, 368 pages.

ROUGERIE (G), 1978, l’encyclopédie générale de la Côte d’Ivoire, Paris/Dakar-


Abidjan, France impression – NEA, 3 volumes 1192 p.

2. Ouvrages généraux

B. FALL, Le travail forcé en Afrique occidentale 1900-1946, Paris, 1970, 280p.

KIPRE (P), 1985, Villes de Côte d’Ivoire (1893-1940), Abidjan, NEA, tome1, 238p

-(S/D) 1987, Mémorial de la Côte d’Ivoire, tome2 : la Côte d’Ivoire


coloniale, Abidjan, édition AMI, 303p

-(S/D), 1992, Histoire de la Côte d’Ivoire, Abidjan, Edition AMI, 111p

M. REMOND, La main d’œuvre dans les colonies françaises, Paris, 1902, XII –
155P.

M ARCHER, le travail forcé et le processus de mobilisation de la main d’œuvre


en Côte d’Ivoire

P. GUILLAUME, le monde colonial, XIXe-XXe siècle, Paris, 1974,296p.

R. ROBIN, la question de la main d’œuvre dans les colonies d’exploitation


française, Paris, 1899,288p.

3. Ouvrages Spécialisés

HERBEL, DENIS, La compétitivité du coton ivoirien, 1996,195p.

THOMAS(J.B), Le coton des paysans, une révolution agricole. (Côte


d’Ivoire1880-1999), IRD édition, 2002,291p.

.Ouvrages sur les Mangoro

COULIBALY (D), 1994, L’organisation sociale des Mangoro de Katiola,


Abidjan, IES, 62 p.

152
DJIBRIL (TN), Soundjata ou l’épopée mandingue, Paris, Présence Africaine,

153 p.

MADON (H), Note sur le gisement d’argile noire de Katiola Côte d’Ivoire, rapport
N°206.

OUAYOU (CN), La production céramique des Djimini (Mangoro et Djéli) au


Nord de la Côte d’Ivoire, SD, 479 p.

.Ouvrages sur les Tagbana

CAMARA (N), 2006, La nouvelle conscience, roman, Abidjan, CALAO éditions,


343p.

CHARTER (A), 1921, « Le cercle des Tagwanas. Etudes ethnographiques »,


L’Afrique française’’ n°11, 249-274 ; n°, pp 282-290

Echo de la Société des Missions Africaines de Lyon, 1953, « Paul Katia,


catéchiste de Katiola »n°04 PP54-61

‘’Funerailles chez les tagouanas’, Echo de la société des Missions Africaines de


Lyon, n°5, 1953, pp 59-61.

KELETIGUI (J.M), 1978, Le Sénoufo face au cosmos, Abidjan, NEA,

KONE (D.), 1973, 1974, Esperance Tagwana et esperance chrétienne. Mémoire


de morale, grand seminaire d’Anyama.

KONE (O.G.), 1976, l’homme qui vécut trois vies, Issy-les-Moulineaux, roman,
les classiques africains, n°710.

OUATTARA (T.F.), 1998, Côte d’Ivoire, Katiola des origines à nos jours,
Abidjan, NEI, 222 p.

-1999, Histoire des Fohobélé de Côte d’Ivoire, une population sénoufo inconnue,
Paris, Karthala, 274 p.

-1995, sources orales et histoire de Katiola (Côte d’Ivoire), texte dactylographié,


Abidjan, inédit.

153
YEGNAN (A.), le Gbofé d’Afounkaha, la musique des trompes traversières de la
communauté tagbana. In www.kamitewoman. Com/article-angeline-yegnantouré.
Consulté le 07 janvier 2016 à 11h 45mn.

4. Thèses et Mémoires

ANOUMA (R-P), 1987, l’impôt de capitation et le travail forcé en Côte d’Ivoire


(1901-1946), université de Provence, Aix-en, thèse pour le Doctorat d’Etat es
lettres et sciences humaines sous la direction deJ-L MIEGE, 4tomes, 1587p

GBODJE (S, A) 2005, Evolution économique de Bouaké : De l’économie


précoloniale à l’économie de marché (1858-1934), Thèse de Doctorat unique
d’Histoire contemporaine, Université de Cocody, 594 p.

YAO (V), 1989, Evolution des techniques textiles en Côte d’Ivoire de 1920 à 1960,
université nationale de Côte d’Ivoire, mémoire de maîtrise sous la direction de Jean
Noel LOUCOU, 242p.

TOURE (T), Les Tagbana et le monde extérieur du XVe siècle à 1960 : mutations
et résistances, non édité.

5. Articles scientifiques

ANTOINE (L.), « Le coton : une culture de riches », in Afrique agriculture,


n0302 Avril2002, p 15.

ARAULT, PASCAL, « dans les champs du nord : bras de fer engagé sur les
prix de coton-graine », in Afrique agriculture, no 265, décembre 1998, -p. 53-54

BISSON, P., LAPORTE, M., TRAORE, S. : « La filière du coton en Côte


d’Ivoire », in Exemple d’intégration verticale : CIDT, 1984, - 16p.

CHAVATTE, DIDIER, « Le coton, facteur du développement rural », in


Recherche et développement, no spécial, Avril 1990- p.9-10.

154
CHATEL, BENEDICTE, « La carte de l’Afrique sur un marché du coton qui
devrait se redresser », in Marchés tropicaux et méditerranéens, no 2828,21
Janv2000, p111-113.

ESTUR, GERALD, RAYMOND, GEORGES, « Le coton dans le monde


et en Afrique francophone de l’ouest et du centre », in Coton et fibres tropicales no
3, vol XCIII, Janv. 1988, p205-219.

GABRIEL (A), 2005 « coton ouest-africain », in Le chemin de la transformation


balisée, no299, Janv2002, p28-29.

GOEBEL (S.), 1984, « les variétés de cotonnier ISA 205, sélectionnées en Côte
d’Ivoire », in Coton et fibres tropicales, no- fascicule. 3 vol39, 1984, p. 91-93

GUILLAUME-GENTIL, ANNE, « La filière coton », in Marchés tropicaux


et méditerranéens, no2364, 01Mars1991, p535-536.

GRETNET (M.), « aide à la décision pour la fertilisation du cotonnier en Côte


d’Ivoire », in Coton et fibres tropicales, no 3, vol 42, du 20 mars 1987, p245.

RAPHAEL (J.), CHAPOUNIERE, LATREUILLE, « La place du coton


dans les économies de l’Afrique de l’ouest », in La lettre des économistes de l’AFD,
no 13, JUILLET 2006- p2-4.

MAURICE, FREDERIC, « Cacao, Coton, paradoxe ivoirien », in Jeune


Afrique, no hors-série, 2006 :p42- 44.

OURNIER (F.), « Enquête sur le coton ivoirien », in Coton et fibres tropicales,


no2, vol XLIII, du 22fev1988, p111-117.

PIERRE (J.), TURQUOI, « Les caprices du coton africain », in Le monde, no


15240, 27 Janv1994,-p1, p14.

155
VERBEEK (K.), « Le coton en Afrique subsaharienne : les défis », in Coton et
fibres tropicales, no 1 vol45 de Mars1999, p64

VALA, PATRICE, « Le coton, or blanc de l’Afrique de l’ouest : débats », in


Courriers d’Afrique de l’ouest, no 13, Mars2004.-p9-12.

6. Webographie

http: // www.persee.fr/

http : //gallica.bn.fr/

http://www.adjectif.net/spip/spip.php?article1

horizon.documentation.ird.fr

156
La table des illustrations

a. Table des cartes

Carte no1 : Les zones de production, les fermes et les industries cotonnières

en Côte d’Ivoire. ………………………………………………………………...12.

Carte no2 : Le cercle Tagouana dans la Côte d’Ivoire coloniale………………….14

Carte no3 : Le pays Tagbana en Côte d’Ivoire..................................................…...29

Carte no4 : La destination de la main-d’œuvre Tagbana dans la colonie………...120

b. Table des photos

Photo no 1 : Le filage du coton……………………………………………………40

Photo no 2 : La récolte manuelle du coton………………………………………...61

Photo no 3 : Une égreneuse manuelle en activité………………………………….66

Photo no 4 : Le plan de la station cotonnière de Dabakala ………………………...67


Photo no 5 : Le pagne tissé localement en pays Tagbana………………………….70

Photo no 6 : Une presse à coton…………………………………………………..71

Photo no 7 : Les porteurs de coton prêts pour le voyage…………………………..75

Photo no 8 : Le marché de coton à Tiébissou vers 1915………………………….76

Photo no 9 : Les laboratoires de l’IRCT à Bouaké………………………………...91

Photo no 1 : La serre de l’IRCT à Bouaké. ………………………………………..92

c. Table des tableaux

Tableau no1 : Les précipitations antérieures et postérieures à l’ensemencement. ...32

Tableau no2: Les principaux caractéristiques du climat, de la végétation et du sol

157
du cercle Tagbana………………………………………………………………..35

Tableau no 3 : Les caractéristiques des usines d’égrenage………………………..72

Tableau no 4 : Le mouvement de colportage des tissus indigènes à

Dabakala pendant le quatrième trimestre de l’année 1923………………………..81

Tableau no 5: Le relevé des produits achetés par le commerce européen…………82

d : Table des graphiques

L’histogramme de l’évapotranspiration potentiel (EPT) de Katiola, de Dabakala

et de Tafiré…………………………………………………..……………………33

158
TABLE DES MATIERES
DEDICACE………………………………………………………………………1

SOMMAIRE……………………………………………………………………...2

REMERCIEMENTS……………………………………………………………..4

SIGLES ABREVIATIONS……………………………………………................5

INTRODUCTION………………………………………………………………..7

PRERMIERE PARTIE : LA MISE EN PLACE D’UNE L’ECONOMIE


COTONNIERE EN PAYS TAGBANA (1905-1924)………………………….27

CHAPITRE I : DES FACTEURS FAVORABLES A LA MISE EN PLACE


D’UNE ECONOMIE COTONNIERE…………………………………………30

I : Des facteurs naturels favorables à la culture du coton…………………………30

1 : Un climat favorable à la culture du coton……………………………………...30

2 : Un sol favorable à la culture du coton…………………………………………34

II : Une population habituée à la culture du coton………………………………...37

1 : La population Tagbana et la culture du coton avant la colonisation…………...37

2 : Le tissage traditionnel, une activité bien connue des Tagbana………………...39

CHAPITRE II : LA CREATION DES PREMIERS

CHAMPS COLLECTIFS DE COTON..............................................................41

I : Les facteurs et les moyens de production………………………………………41

1 : L’échec de l’introduction des variétés étrangères de coton et le

Recours aux espèces locales……………………………………………………...41

2 : L’imposition du paiement de l’impôt de capitation en numéraire, un facteur


important Pour la création des plantations collectives……………………………43

159
3 : La pression comme moyen de production…………………………………….48

II : La méthode de culture………………………………………………………...52

1 : L’occupation l’espace…………………………………………………………52

2 : Les techniques culturales……………………………………………………...56

CHAPITRE III :L’INTRODUCTION DU MATERIEL INDUSTRIEL……66

I : Les reformes................................................................................................…...66

1 : L’arrivage du matériel industriel……………………………………………...66

2 : L’installation des usines………………………………….……………………68

II : La transformation et la commercialisation du coton…………………………..68

1 : La transformation artisanale du coton…………………………………………69

2 : La transformation industrielle du coton......................................................…...70

3 : La commercialisation du coton………………………………………………..73

DEUXIEME PARTIE : LA PROSPERITE ET LA DECADENCE

DE L’ECONOMIE COTONNIERE EN PAYS TAGBANA (1924-1946)……83

CHAPITRE IV : LA PROSPERITE DE L’ECONOMIE COTONNIERE….85

I : La production…………………………………………………………………85

1 : Une production modeste de coton…………………..........................................85

2 : Le prix du coton…………………………………………………………….…86

II : La relance de l’économie cotonnière………………………………………….90

1 : L’accroissement de la production………………….………………………….90

2 : L’amélioration du niveau de vie des populations..........................................….94

160
CHAPITRE V : LA DECADENCE DE L ‘ECONOMIE COTONNIERE….95

I : La manifestation de la décadence……………………...………………………95

1 : La chute de la production……………………………………...………………95

2 : L’opposition de la population à la culture industrielle de coton…………….....96

II : Le marché parallèle de coton…...……………………………………………101

1 : Les facteurs de la persistance du marché parallèle....................................…...102

2 : La lutte contre le secteur artisanal……………………………………………104

CHAPITRE VI : L’INFLUENCE DE LA DEUXIEME GUERRE

MONDIALE…………………………………………………………………...106

I : Le recrutement des Tagbana pour la guerre…………………………………..106

1 : La contribution des Tagbana à l’effort de guerre……………………………..106

2 : Le dépeuplement du pays Tagbana…………………………………………..108

II : L’abandon partiel de la culture du coton……………………………………..108

1 : Le mépris des indigènes……………………………………………………...109

2 : L’attitude des nouveaux administrateurs…………………………………….109

TROISIEME PARTIE : L’IMPACT DE L’ECONMIE

COTONNIERE EN PAYS TAGBANA……………………………………110

CHAPITRE VII : LES CONSEQUENCES AU NIVEAU

ECONOMIQUE……………………………………………………................112

I: L’impact sur la quantité de coton produite…………………………………….112

1 : La diminution de la production……………………………………………....112

161
2 : La dégradation de la production……………………………………………...112

II : La persistance du paiement de l’impôt………………………………………114

1 : La continuité de l’impôt……………………………………………………...114

2 : L’obligation continue du paiement de l’impôt……………………………….115

CHAPITREVIII : LES CONSEQUENCES AU NIVEAU SOCIAL……….119

I : Le déplacement de la population ………………………………………….….119

1 : Le mouvement de la population……………………………………………...119

2 : La perte identitaire des Tagbana par le recensement de la population…….…121

II : Le Tagbana face à l’homme blanc et la fin du travail forcé…………………..123

1 : La conception de l’homme blanc selon les Tagbana………………………....123

2 : L’abolition du travail forcé…………………………………………………..130

CONCLUSION ………………………………………………………………..132

ANNEXE……………………………………………………………………….136

ENTRETIEN..............................................................................................…....141

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE.…………………………………….142

LA TABLE DES ILLUSTRATIONS…………………………………………157

TABLE DES MATIERES……………………………………………..159

162

Vous aimerez peut-être aussi