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Université Paris-Est Créteil — Faculté de sciences économiques et de gestion

3e année de licence Économie et Gestion — Parcours Expertise économique et financière


Fluctuations et croissance — 2022-2023 — François Legendre et Fredj Meribah

TD 2 Le lien entre la consommation et le revenu disponible des ménages


Le but de ce deuxième TD est de discuter, à partir de la formulation de la fonction de consommation
proposée par Keynes, des spécifications modernes du lien entre la consommation et le revenu disponible
des ménages en rapport notamment avec le perfectionnement de la modélisation macro-économétrique.

La spécification de la dynamique de court terme


On détaille la façon dont la modélisation macro-économique « à l’ancienne » a l’habitude de spécifier la
dynamique de court terme des agrégats. Pour cela, on suppose, dans un premier temps, que les différentes
théories économiques sont capables de fournir, pour la grandeur que l’on cherche à modéliser, une relation
de long terme. Par exemple, la consommation des ménages peut être spécifiée, à long terme, comme une
proportion constante du pouvoir d’achat du revenu disponible :

P𝑡 Y𝑡 − T𝑡
C⋆
𝑡 =𝑐 = 𝑐 R𝑡 avec 0 < 𝑐 < 1
P𝑡

C⋆
𝑡 a, ainsi, le statut de consommation désirée (𝑐 est la propension de long terme à consommer le revenu).
Par souci de généralité, on désigne par Y𝑡 l’agrégat dont on cherche à reproduire le mouvement et par Y𝑡⋆
son niveau désiré (ce niveau est donc en fait une expression qui dépend d’une ou de plusieurs autres
variables économiques).
Dans un deuxième temps, on suppose que la dynamique de court terme peut être spécifiée en recou-
rant à un processus d’ajustement dynamique, processus d’ajustement à la quantité désirée. Par exemple,
l’utilisation d’un modèle d’ajustement partiel conduit à l’expression suivante (les variables sont donc en
termes de logarithme) :

Δ ln(Y𝑡 ) = λ [ln(Y𝑡⋆ ) − ln(Y𝑡−1 )] avec 0 ≤ λ ≤ 1

où Δ est l’opérateur de différence première au cours du temps (Δ ln(Y𝑡 ) ≡ ln(Y𝑡 ) − ln(Y𝑡−1 )).
Il s’agit ainsi d’une démarche en deux étapes ; la première de détermination de la grandeur désirée
(pour spécifier la relation de long terme), la seconde de recours à un processus d’ajustement dynamique
(pour spécifier le mouvement de court terme).
1) Quelle dénomination retient-on habituellement pour λ ? Interprétez économiquement les deux cas
polaires λ = 0 et λ = 1.
2) En reprenant l’exemple de la fonction de consommation, déterminez la forme réduite que l’économétre
pourrait estimer. Ce dernier est-il en mesure de « remonter » aux paramètres structurels du modèle (à
savoir, 𝑐 et λ) ? Quelle est la propension à consommer de court terme ? la propension à consommer de
long terme ?
3) On envisage maintenant une modélisation alternative pour la consommation. Cette dernière dépend
de l’anticipation du revenu au temps 𝑡, notée R𝑎𝑡 , sous la forme suivante :

C𝑡 = 𝑐 R𝑎𝑡 avec 0 < 𝑐 < 1

Cette anticipation, quant à elle, se forme de façon adaptative (en termes de logarithme) :

Δ ln(R𝑎𝑡 ) = μ [ln(R𝑡 ) − ln(R𝑎𝑡−1 )] avec 0 ≤ μ ≤ 1

Interprétez ce mode de formation des anticipations. Montrez que la forme réduite de ce modèle ne se dis-
tingue pas de la forme réduite du modèle précédent. Interprétez en termes de rationalisations alternatives
possibles de la même dynamique de court terme.

1
4) Pour mieux comprendre la dynamique de court terme engendrée par le modèle d’ajustement partiel, on
se propose d’évaluer la réponse de la quantité effective à une hausse (entretenue) de la quantité désirée. On
se fixe ainsi le protocole suivant. D’une part, on envisage une situation initiale d’équilibre (Y𝑡 = Y𝑡⋆ = 100
pour 𝑡 = 0, 1 et 2) ; d’autre part, un choc de 10 %, survenant en 𝑡 = 3, affectant la quantité désirée
(Y𝑡⋆ = 110 pour 𝑡 = 3, 4, 5, … ). Déterminez l’évolution de la quantité effective si cette dernière relève
du modèle d’ajustement partiel suivant :
Δ ln(Y𝑡 ) = λ [ln(Y𝑡⋆ ) − ln(Y𝑡−1 )] avec λ = 0,25
Combien de périodes sont-elles nécessaires pour que la moitié du choc soit résorbée ?
Quantité désirée et effective

115

110

105

100

95
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19
Trimestres

5) Une généralisation possible du modèle d’ajustement partiel est le modèle à correction d’erreurs, qui
prend la forme suivante :
Δ ln(Y𝑡 ) = λ1 Δ ln(Y𝑡⋆ ) + λ2 [ln(Y𝑡−

1 )− ln(Y𝑡−1 )] avec 0 ≤ λ1 , λ2 ≤ 1
Montrez que ce dernier modèle coïncide avec le modèle d’ajustement partiel pour λ1 = λ2 . Interprétez les
quantités Δ ln(Y𝑡⋆ ) et ln(Y𝑡−

1 )− ln(Y𝑡−1 ).
6) En prenant les chiffres des comptes nationaux trimestriels disponibles sur le site de l’Insee, un écono-
mètre estime les quatre équations suivantes :
(1) Δ ln(C𝑡 ) = 𝑎1 Δ ln(R𝑡 ) + 𝑏1 + 𝑢1 𝑡
(2) Δ ln(C𝑡 ) = 𝑎2 Δ ln(R𝑡 ) + 𝑢2 𝑡
(3) Δ ln(C𝑡 ) = 𝑎3 [ln(R𝑡 )− ln(C𝑡−1 )] + 𝑢3 𝑡
(4) Δ ln(C𝑡 ) = 𝑎4 Δ ln(R𝑡 ) + 𝑏4 [ln(R𝑡−1 )− ln(C𝑡−1 )] + 𝑐4 + 𝑢4 𝑡
où 𝑢1 , 𝑢2 , 𝑢3 et 𝑢4 sont les termes d’erreur de chaque équation.
Il obtient les résultats suivants
Équation
Variable (1) (2) (3) (4)
Δ ln(R𝑡 ) 0,63 0,75 0,59
(7,6) (11) (7,4)
ln(R𝑡 )− ln(C𝑡−1 ) 0,19
(7,3)
ln(R𝑡−1 )− ln(C𝑡−1 ) 0,13
(4,9)
Constante 0,0027 −0,026 −0,020
(2,6) (5,7) (4,2)
Début 1949-II 1949-II 1949-II 1949-II
Fin 2022-III 2022-III 2022-III 2022-III
SCR 0,0608 0,0623 0,0617 0,0562
R2 0,166 — 0,155 0,230
DW 2,78 — 2,38 2,63
t de Student entre parenthèses.

2
7) Donnez les instructions edu-ecotrics qui permettent de lire les données et d’ajuster ces quatre équations.
8) Donnez l’interprétation de chaque équation en termes de modèle d’ajustement. Quelle équation, à
votre avis, faudrait-il retenir ?
9) Il est aussi possible d’envisager le modèle à correction d’erreurs d’ordre deux suivant :

Δ2 ln(Y𝑡 ) = λ1 Δ2 ln(Y𝑡⋆ ) + λ2 [Δ ln(Y𝑡⋆ )−Δ ln(Y𝑡 )] + λ3 [ln(Y𝑡−



1 )− ln(Y𝑡−1 )]

avec
0 ≤ λ1 , λ2 , λ3 ≤ 1
et

Δ2 ln(Z𝑡 ) = Δ[Δ ln(Z𝑡 )] = Δ[ln(Z𝑡 )− ln(Z𝑡−1 )] = [ln(Z𝑡 )− ln(Z𝑡−1 )] − [ln(Z𝑡−1 )− ln(Z𝑡−2 )]


= ln(Z𝑡 ) − 2 ln(Z𝑡−1 ) + ln(Z𝑡−2 )
Interprétez ce dernier modèle d’ajustement. Une forme particulièrement simple du modèle à correction
d’erreurs d’ordre deux est la suivante :

Δ2 ln(Y𝑡 ) = λ [ln(Y𝑡⋆ )− ln(Y𝑡 )] avec 0 ≤ λ ≤ 1


Quelles sont les restrictions portant sur λ1 , λ2 et λ3 qu’il a fallu adopter pour obtenir cette forme particu-
lière ?
10) Afin de mieux contraster la dynamique engendrée par un modèle d’ajustement partiel et par un
modèle à correction d’erreurs d’ordre deux, on reproduit le même protocole d’expérience que précédem-
ment, cette fois-ci dans un contexte de croissance régulière. D’une part, on envisage une situation initiale
d’équilibre (Y𝑡 = Y𝑡⋆ = 100 exp(𝑔 𝑡) pour 𝑡 = 0, 1 et 2) ; d’autre part, un choc de 10 %, survenant en 𝑡 = 3,
affectant la quantité désirée (Y𝑡⋆ = 110 exp(𝑔 𝑡) pour 𝑡 = 3, 4, 5, …). 𝑔 est le taux de croissance de la
grandeur désirée, égal à 1 % dans cet exemple. Commentez le graphique ci-après, rapportant l’évolution
de la grandeur effective Y𝑡 pour, d’une part, le modèle d’ajustement partiel, noté MAP :

Δ ln(Y𝑡 ) = 0,25 [ln(Y𝑡⋆ )− ln(Y𝑡−1 )]


et pour, d’autre part, le modèle à correction d’erreurs d’ordre deux, noté MCE 2 :

Δ2 ln(Y𝑡 ) = 0,20 [ln(Y𝑡⋆ )− ln(Y𝑡 )].


Expliquez précisément les raisons des évolutions très différentes engendrées par l’un et par l’autre des
deux modèles.
135
Quantité désirée et effective

130
125
120
115
110
105
100
95
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19
Trimestres

11) On envisage enfin le modèle d’ajustement partiel augmenté qui se formule comme suit

ln(Y𝑡 ) = λ ln(Y𝑡⋆ ) + (1−λ)[ln(Y𝑡−1 ) + 𝑔] 0≤λ≤1

où 𝑔 est le taux de croissance de Y⋆ . Expliquez pourquoi ce modèle n’est pas victime du phénomène de
sous-ajustement mis en évidence précédemment.

3
La pratique de la modélisation macro-économique
On cherche à montrer, dans cette partie, la mesure dans laquelle les modèles macro-économiques sont
utilisés au sein de l’administration économique française. Récupérez sur Eprel, le document intitulé La
maquette de prévision Opale :
Daubaire (A.), Lefebvre (G.) et Meslin (O.) (2017) —. « La maquette de prévision Opale2017 », Document
de travail de la DG Trésor, n°2017/16, mai.
12) Lisez le document jusqu’à la page 15. En quoi l’équation de consommation estimée dans la maquette
Opale s’apparente-elle à la fonction de consommation keynésienne ?

Les multiplicateurs dynamiques


On envisage, dans cette partie, de rendre compte de la cohésion des flux globaux en retenant une spéci-
fication très fruste, fondée sur un modèle élémentaire de multiplicateur. On retient, pour la fonction de
consommation, la spécification suivante :

P𝑡 Y𝑡 − T𝑡 T
C⋆
𝑡 =𝑐 = 𝑐 Y𝑡 − 𝑐 𝑡 et ln(C𝑡 ) = λ C ln(C⋆
𝑡 ) + (1−λ C )[ln(C𝑡−1 ) + 𝑔]
P𝑡 P𝑡
La consommation désirée est une fraction constante du pouvoir d’achat du revenu disponible des ménages
(où le revenu est identifié directement à la valeur du produit) et la dynamique de court terme est retraçée
par un modèle d’ajustement partiel augmenté pour éviter le sous ajustement de ce modèle mis en évidence
auparavant.
13) Quelle valeur faut-il retenir pour la propension marginale à consommer 𝑐 pour être cohérent avec le
compte central présenté dans le TD 1 ?
Les comportements d’investissement ne sont pas endogénéisés et on retient ainsi la formulation sui-
vante :
I𝑡 = I𝑡
où I𝑡 est le niveau de l’investissement dans le compte central. Les dépenses publiques, G𝑡 , et les prélève-
ments obligatoires, T𝑡 , ne sont bien sûr pas modélisées : ils constituent deux instruments discrétionnaires
de politique macro-économique. Le commerce extérieur n’est pas modélisé. On a ainsi

X𝑡 = X𝑡 et J𝑡 = J𝑡

Le modèle est bouclé en utilisant l’équilibre emplois-ressources :

Y𝑡 = C𝑡 + I𝑡 + G𝑡 + X𝑡 − J𝑡

La sphère monétaire et financière n’est pas endogénéisée : le taux de change et le taux d’intérêt sont
égaux à leur valeur du compte central :

E𝑡 = E𝑡 et ρ𝑡 = ρ𝑡

Enfin, la dette publique est calculée à partir de son équation d’évolution :

D𝑡 = D𝑡−1 + P𝑡 G𝑡 + ρ𝑡 D𝑡−1 + T𝑡

4
Au total, le modèle est constitué des 10 équations suivantes :

P𝑡 Y𝑡 − T𝑡
(1) C⋆
𝑡 =𝑐
P𝑡
(2) C𝑡 = exp [λ C ln(C⋆
𝑡 ) + (1−λ C )[ln(C𝑡−1 ) + 𝑔]] et λ C = 0,25
(3) I 𝑡 = I𝑡
(4) X 𝑡 = X𝑡
(5) J 𝑡 = J𝑡
(6) Y𝑡 = C𝑡 + I𝑡 + G𝑡 + X𝑡 − J𝑡
(7) P𝑡 = P𝑡
(8) E𝑡 = E𝑡
(9) ρ𝑡 = ρ𝑡
(10) D𝑡 = D𝑡−1 + P𝑡 G𝑡 + ρ𝑡 D𝑡−1 − T𝑡

14) Montrez que ce modèle s’inscrit dans une perspective d’ajustement par les quantités où le niveau du
produit s’ajuste au niveau de la demande.
15) Pour mieux comprendre la dynamique de court terme engendrée par ce modèle, on envisage la
variante suivante : une hausse pendant une année des dépenses publiques de 1 % intervenant en 𝑡 = 3,
c’est-à-dire, puisque 𝑡 = 0 en 2023-I, pendant toute l’année 2024. Les trois graphiques suivants figurent les
conséquences d’une telle mesure de politique macro-économique. Commentez ces graphiques. On pourra
notamment répondre aux questions suivantes :
i) Pourquoi les évolutions du produit et la consommation sont-elles si contrastées en 𝑡 = 3 ?
ii) Pourquoi, sur le troisième graphique, la réponse n’est-elle pas monotone ?

Y𝑡 − Y𝑡 C𝑡 − C𝑡
Écarts relatifs au sentier de référence en % ; trait rouge : 100 ; trait bleu 100
Y𝑡 C𝑡
1,0
0,9
0,8
Écarts relatifs en %

0,7
0,6
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
2023 2024 2025 2025 2026 2027 2028 2028 2029 2030 2031 2031 2032 2033
Trimestres

5
Y𝑡 − Y𝑡
Multiplicateur dynamique :
G𝑡 − G𝑡
5

4
Multiplicateur

0
2023 2024 2025 2025 2026 2027 2028 2028 2029 2030 2031 2031 2032 2033
Trimestres

Dette publique D𝑡 D𝑡
Écarts du ratio en points de Pib : 100 −
Pib ( Y𝑡 Y𝑡 )
3,5
3,0
2,5
Points de Pib en %

2,0
1,5
1,0
0,5
0,0
−0,5
−1,0
2023 2024 2025 2025 2026 2027 2028 2028 2029 2030 2031 2031 2032 2033
Trimestres

16) Les réponses livrées par ce modèle, pour cette variante, vous semblent-elles vraisemblables ?
17) Pour mieux comprendre la dynamique de long terme engendrée par ce modèle, on envisage la
variante suivante : une hausse entretenue des dépenses publiques de 1 % intervenant en 𝑡 = 3, c’est-
à-dire, puisque 𝑡 = 0 en 2023-I, en 2024-I, le premier trimestre de l’année 2024. Les trois graphiques
suivants figurent les conséquences d’une telle mesure de politique macro-économique. Commentez ces
graphiques. Peut-on retrouver la valeur du multiplicateur de long terme sur le deuxième graphique ?

6
Y𝑡 − Y𝑡 C𝑡 − C𝑡
Écarts relatifs au sentier de référence en % ; trait rouge : 100 ; trait bleu 100
Y𝑡 C𝑡
1,0
0,9
0,8
Écarts relatifs en %

0,7
0,6
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
2023 2024 2025 2025 2026 2027 2028 2028 2029 2030 2031 2031 2032 2033
Trimestres

Y𝑡 − Y𝑡
Multiplicateur dynamique :
G𝑡 − G𝑡
5

4
Multiplicateur

0
2023 2024 2025 2025 2026 2027 2028 2028 2029 2030 2031 2031 2032 2033
Trimestres

7
Dette publique D𝑡 D𝑡
Écarts du ratio en points de Pib : 100 −
Pib ( Y𝑡 Y𝑡 )
3,5
3,0
2,5
Points de Pib en %

2,0
1,5
1,0
0,5
0,0
−0,5
−1,0
2023 2024 2025 2025 2026 2027 2028 2028 2029 2030 2031 2031 2032 2033
Trimestres

18) Les réponses livrées par ce modèle, pour cette variante, vous semblent-elles vraisemblables ?
19) Quelle est l’évolution implicite du coefficient de capital au cours de cette variante ? Cette évolution
est-elle vraisemblable ?
20) En vous en tenant à cette perspective d’ajustement par les quantités, quels sont les facteurs dont la
prise en compte permettraient un affermissement du multiplicateur ? un amoindrissement du multiplica-
teur ?
21) On envisage maintenant une variante destinée à restaurer les comptes publics. On songe notamment
au cas de la Grèce qui a été sommée d’augmenter les impôts afin de réduire la dette publique. Plus pré-
cisément, on simule une hausse entretenue des prélèvements obligatoires de 1 % intervenant en 𝑡 = 3.
Les trois graphiques suivants sont construits comme les trois précédents. Expliquez précisément pourquoi
Dette publique
l’austérité budgétaire conduit à une augmentation du ratio ?
Pib

Y𝑡 − Y𝑡 C𝑡 − C𝑡
Écarts relatifs au sentier de référence en % ; trait rouge : 100 ; trait bleu 100
Y𝑡 C𝑡

−0,1
−0,2
Écarts relatifs en %

−0,3
−0,4
−0,5
−0,6
−0,7
−0,8
−0,9
−1,0
2023 2024 2025 2025 2026 2027 2028 2028 2029 2030 2031 2031 2032 2033
Trimestres

8
Y𝑡 − Y𝑡
Multiplicateur dynamique :
T𝑡 − T𝑡
5

4
Multiplicateur

0
2023 2024 2025 2025 2026 2027 2028 2028 2029 2030 2031 2031 2032 2033
Trimestres

Dette publique D𝑡 D𝑡
Écarts du ratio en points de Pib : 100 −
Pib ( Y𝑡 Y𝑡 )
3,5
3,0
2,5
Points de Pib en %

2,0
1,5
1,0
0,5
0,0
−0,5
−1,0
2023 2024 2025 2025 2026 2027 2028 2028 2029 2030 2031 2031 2032 2033
Trimestres

La résolution numérique des modèles macro-économiques


On cherche, dans cette partie, à donner quelques indications quant à la façon dont, effectivement, sont
résolus numériquement les modèles macro-économiques. Un modèle, formellement, apparaît comme un
système d’équations simultanées. Le système le plus simple qu’il est possible d’imaginer est sans doute le
suivant :
𝑥 = 0,6 𝑦 et 𝑦 = 𝑥 + 40
où 𝑥 et 𝑦 sont les deux inconnues.
22) Résoudre ce système par substitution.
23) Mettre ce système sous la forme matricielle suivante :

X = AX + B

9
où X est le vecteur de taille 2×1 regroupant les deux variables inconnues, A une matrice de taille 2×2 et B
un vecteur de taille 2×1 regroupant les termes constants. Résoudre, en inversant une matrice, ce système
(la solution sera notée X⋆ ).
24) Soient les suites définies de la manière suivante :

𝑥𝑛 = 0,6 𝑦𝑛−1 et 𝑦𝑛 = 𝑥𝑛 + 40

Définir 𝑥𝑛 en fonction 𝑥𝑛−1 . Donnez l’expression de 𝑥𝑛 en fonction de la condition initiale 𝑥0 , supposée


fixée.
25) Pour un nombre réel λ compris entre −1 et 1, on a :

1
si |λ| < 1 alors = ∑ λ𝑛,
1−λ 𝑛=0

En déduire que la suite 𝑥𝑛 est convergente et que sa limite est égale à 𝑥⋆ .


26) On se propose maintenant de retenir, comme mode de résolution du système, une procédure fondée
sur l’évaluation itérative du système jusqu’à l’obtention d’un point fixe. Le programme suivant, écrit en
Python, s’acquitte de cette tâche :
1 ε = .0001
2
3 def assignation(X, i, valeur, critère):
4 critère = critère + abs(X[i] - valeur)/abs(valeur)
5 X[i] = valeur
6 return critère
7
8 def résolution_numérique():
9 X = [1, 1]
10 for itération in range(100):
11 critère = 0
12 critère = assignation(X, 0, .6*X[1], critère)
13 critère = assignation(X, 1, X[0] + 40, critère)
14 print(itération, critère, X[0], X[1])
15 if critère < ε:
16 print("La convergence a été obtenue après", itération, "itérations.")
17 break
18 if critère >= ε:
19 print("Oups, la convergence n'a pas été obtenue après 100 itérations...")
20
21 résolution_numérique()

L’exécution de ce programme produit les résultats suivants :


1 0 1.6420361247947457 0.6 40.6
2 1 1.3445428577551763 24.36 64.36
3 2 0.5505105320174507 38.616 78.616
4 3 0.2794630845571635 47.169599999999996 87.1696
5 4 0.15372792552029807 52.30176 92.30176
6 5 0.08788612000835364 55.381056 95.381056
7 6 0.051286548844337976 57.2286336 97.2286336
8 7 0.03027531603748269 58.337180159999996 98.33718016
9 8 0.017991221216714346 59.002308096 99.00230809600001
10 9 0.010733108190358876 59.4013848576 99.4013848576
11 10 0.006417892553852217 59.64083091455999 99.64083091455998
12 11 0.0038429908187834867 59.78449854873599 99.784498548736
13 12 0.0023029009156832906 59.87069912924159 99.87069912924159
14 13 0.0013807268728274584 59.92241947754495 99.92241947754495
15 14 0.0008280716505203057 59.95345168652697 99.95345168652696
16 15 0.0004967118771008567 59.97207101191617 99.97207101191617
17 16 0.00029797994646531137 59.9832426071497 99.98324260714969

10
18 17 0.00017877098767791143 59.98994556428981 99.98994556428981
19 18 0.0001072564807113322 59.99396733857388 99.99396733857388
20 19 6.435168835560598e-05 59.99638040314433 99.99638040314433
21 La convergence a été obtenue après 19 itérations.

Commentez ce programme. Montrez que ce mode de résolution numérique coïncide exactement, formel-
lement, à l’évaluation des termes successifs de la suite 𝑥𝑛 .
27) On cherche maintenant à faire l’analogie entre le système d’équations précédemment proposé et un
modèle de multiplicateur extrêmement simple. Ce modèle se réduit aux deux équations suivantes :

C𝑡 = 𝑐 Y𝑡 et Y𝑡 = C𝑡 + I𝑡 + G𝑡

où C𝑡 est la consommation des ménages, Y𝑡 le produit, I𝑡 l’investissement productif (considéré comme


exogène) et G𝑡 les dépenses publiques (non modélisées car elles constituent un instrument de politique
macro-économique). Mettez en correspondance les termes intervenant dans le système d’équations (𝑥, 𝑦,
0,6 et 40) et les variables du modèle. Montrez que le mode de résolution numérique développé précé-
demment s’interprète en termes d’ajustement par les quantités. Trouvez la condition pour que ce mode de
résolution soit convergent. Interprétez économiquement cette condition.

Grèce : bilan des critiques et perspectives d’avenir


Olivier Blanchard, Conseiller économique et Directeur, Département des études, FMI, IMFdirect, 09 juillet
2015. Le document ci-après est directement tiré du blog du FMI.
Tous les regards sont tournés vers la Grèce, à l’heure où les parties en présence s’efforcent encore de
parvenir à un accord durable, suscitant des débats passionnés et certaines critiques acerbes, y compris à
l’endroit du FMI.
Dans ces circonstances, il m’a semblé utile d’engager une réflexion sur les principales critiques pour
tenter d’éclairer certains grands points de discorde et signaler une issue éventuelle.
À mon sens, les principales critiques peuvent être rangées dans quatre catégories :
1. Le programme de 2010 n’a servi qu’à alourdir la dette et a exigé un ajustement budgétaire excessif.
2. Le financement accordé à la Grèce a servi à rembourser les banques étrangères.
3. Les réformes structurelles nuisibles à la croissance et l’austérité budgétaire ont provoqué une dépres-
sion économique.
4. Les créanciers n’ont rien appris et ils continuent de commettre les mêmes erreurs.

Critique 1 : Le programme de 2010 n’a servi qu’à alourdir la dette et a exigé un ajustement budgétaire
excessif.
— Même avant le programme de 2010, la dette grecque s’élevait à 300 milliards d’euros, soit 130 %
du PIB. Le déficit représentait 36 milliards d’euros, soit 15½ % du PIB. La dette accusait une pro-
gression annuelle de 12 %, ce qui à l’évidence était insoutenable.
— Si la Grèce avait été livrée à elle-même, il lui aurait tout simplement été impossible d’emprunter.
Avec des besoins de financement bruts de 20-25 % du PIB, elle aurait dû réduire son déficit bud-
gétaire d’autant. Même avec un défaut de paiement total, vu un déficit primaire de plus de 10 %
du PIB, elle aurait dû comprimer son déficit budgétaire de 10 % du PIB du jour au lendemain. Cela
aurait entraîné des ajustements beaucoup plus douloureux et un coût social bien plus élevé que
dans le cadre des programmes, qui ont accordé à la Grèce plus de cinq ans pour parvenir à un
solde primaire équilibré.
— Même si la dette existante avait été entièrement éliminée, il aurait fallu réduire le déficit primaire,
considérable au début du programme. L’austérité budgétaire n’était pas un choix, mais une néces-
sité. Il n’y avait simplement d’autre possibilité que de comprimer les dépenses et de relever l’impôt.
La réduction du déficit a été forte car au départ le déficit lui-même était élevé. « Moins d’austérité
budgétaire », c’est-à-dire un ralentissement de l’ajustement budgétaire, aurait exigé un financement
encore plus important doublé d’une restructuration de la dette ; or, il y avait une limite politique à
ce que les créanciers officiels pouvaient exiger de leurs propres contribuables.

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Critique 2 : Le financement accordé à la Grèce a servi à rembourser les banques étrangères.
— La restructuration de la dette a été retardée de deux ans. Il y avait des raisons à cela : la crainte
d’un risque de contagion (la chute de Lehman était encore présente dans les esprits), et l’absence
de coupe-feu pour contenir cette contagion. Ces raisons étaient-elles suffisamment valides ? C’est
tout un débat. Dans le feu de l’action, les risques étaient jugés trop élevés pour engager une restruc-
turation.
— En partie à cause de ce report, une part importante des fonds alloués au premier programme a servi
à rembourser les créanciers à court terme, et à remplacer la dette privée par de la dette publique.
Cela dit, l’opération de sauvetage n’a pas profité qu’aux banques étrangères ; les déposants et les
ménages grecs en ont aussi bénéficié car un tiers de la dette était détenu par des banques grecques
et d’autres établissements financiers nationaux.
— Qui plus est, les créanciers privés n’étaient pas sortis d’affaire et en 2012 la dette a été substantiel-
lement réduite : l’opération de 2012 liée à la participation du secteur privé a entraîné une décote
de plus de 50 % sur environ 200 milliards d’euros de dette détenue par le privé, ce qui a abouti à
une réduction de la dette de plus de 100 milliards d’euros (soit 10.000 euros par citoyen grec).
— En outre, le remplacement des créanciers privés par des créanciers publics est allé de pair avec
une nette amélioration des conditions d’emprunt, à savoir taux inférieurs au marché et échéances
longues. Ainsi, les paiements d’intérêt sur la dette grecque représentaient l’année dernière 6 mil-
liards d’euros (3,2 % du PIB), contre 12 milliards d’euros en 2009. Pour le présenter sous une autre
forme : les paiements d’intérêt de la Grèce étaient inférieurs, en part de PIB, à ceux du Portugal,
de l’Irlande ou de l’Italie.
Critique 3 : Les réformes structurelles nuisibles à la croissance et l’austérité budgétaire ont provoqué
une dépression économique
— Vu la déplorable croissance de la productivité affichée par la Grèce avant le programme, plusieurs
réformes structurelles semblaient s’imposer : depuis la réforme de l’administration fiscale, jusqu’à
la réduction des barrières à l’entrée dans beaucoup de professions, ou aux réformes des retraites,
des conventions collectives ou de la justice, pour n’en citer que quelques-unes.
— Beaucoup de ces réformes n’ont pas été exécutées ou ne l’ont été que partiellement. Les efforts
consentis pour améliorer le recouvrement de l’impôt et le civisme fiscal ont totalement échoué. La
résistance était redoutable à l’ouverture des secteurs et professions fermés. Seules 5 des 12 revues
que le FMI devait réaliser dans le programme en cours ont été menées à terme, et une seulement
a été achevée depuis le milieu de 2013, en raison du blocage des réformes.
— La baisse de la production a en effet été bien plus forte que prévu. Les multiplicateurs ont été supé-
rieurs aux hypothèses initiales. Cela dit, le rééquilibrage budgétaire n’explique qu’en partie le repli
de la production. D’autres facteurs y ont contribué, à commencer par une production supérieure au
potentiel, les crises politiques, des initiatives discordantes, des réformes insuffisantes, les craintes
d’un Grexit, une faible confiance des entreprises ou bien encore la fragilité des banques.
Critique 4 : Les créanciers n’ont rien appris et ils continuent de commettre les mêmes erreurs
— En 2015, l’élection d’un gouvernement ouvertement opposé au programme a davantage réduit
l’appropriation de ce dernier, d’où la nécessité de le revoir, tant du point de vue des politiques à
mettre en œuvre que du financement.
— Des réformes structurelles plus limitées ou un ajustement budgétaire plus lent se traduisent néces-
sairement par une augmentation des besoins de financement et, logiquement, par une nécessité
accrue d’allégement de la dette. Pour prendre un cas extrême, si les créanciers européens étaient
disposés à effacer purement et simplement toute la dette et à accorder d’autres financements, l’ajus-
tement deviendrait pratiquement inutile. Mais à l’évidence il y avait et il y a toujours des limites
politiques à ce qu’ils peuvent attendre de leurs contribuables.
— Autrement dit, une solution réaliste devait passer par un certain degré d’ajustement, un certain
degré de financement et un certain degré d’allégement de la dette, bref par une démarche équili-
brée. Le rôle du FMI dans les négociations consistait à exiger des ajustements spécifiques crédibles
aux politiques mises en œuvre et à montrer clairement les conséquences sur le plan du financement
et de l’allégement de la dette.
— Nous estimions qu’un modeste excédent primaire, appelé à s’accroître dans la durée, était absolu-
ment nécessaire pour préserver la viabilité de la dette. À regarder la situation budgétaire de près, il

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était difficile d’y parvenir sans réformer la TVA, pour élargir l’assiette, et sans réformer le retraites
pour en viabiliser le système. Sur ces points, notre position rejoignait entièrement celle de nos
partenaires européens.
— Jusqu’au référendum et ses retombées potentielles pour la croissance, nous étions persuadés qu’à
partir de ces hypothèses d’excédent primaire il était possible d’assurer la viabilité de la dette
par le rééchelonnement de la dette existante et par le rallongement des échéances des nouveaux
emprunts. C’est ce que faisait apparaître l’analyse de viabilité de la dette (AVD) préliminaire que
nous avions produite avant le référendum. Nos partenaires européens, à qui nous avions signalé
bien avant la publication de l’AVD qu’un allégement était nécessaire, ont jugé cette analyse trop
pessimiste. Nous estimons que la situation actuelle pourrait fort bien exiger un financement encore
plus important, ne serait-ce que pour accompagner les banques, et un allégement de la dette encore
plus poussé que celui prévu dans notre AVD.
Une issue possible
1. Compte tenu des résultats du référendum et du mandat que le peuple grec a accordé à son gouver-
nement, nous pensons qu’il serait encore possible de parvenir à un accord. Celui-ci doit s’appuyer
sur un ensemble de politiques proches de celles examinées avant le référendum, en apportant des
amendements pour tenir compte du fait que le gouvernement sollicite désormais un programme
triennal, et pour traduire de manière plus explicite la nécessité d’un financement et d’un allégement
accrus.
2. En substance, la zone euro se trouve devant un choix politique : qui dit abaissement des réformes
et des objectifs budgétaires pour la Grèce dit coûts plus élevés pour les pays créanciers. Dans ce
contexte, le rôle du FMI n’est pas de recommander une décision particulière, mais de mettre en
lumière les conséquences des choix entre moins d’ajustement budgétaire et moins de réformes struc-
turelles, d’une part, et la nécessité d’un financement et d’un allégement plus importants, d’autre
part.
3. Les possibilités d’un accord sont extrêmement minces et le temps presse. Il ne devrait faire aucun
doute que la sortie de la zone euro serait extrêmement coûteuse et pour la Grèce et pour ses créan-
ciers. L’adoption d’une nouvelle monnaie et la modification des contrats en conséquence soulèvent
des questions juridiques et techniques d’une très grande complexité, et elles s’accompagneraient
vraisemblablement d’une chute encore plus marquée de la production. La dépréciation de la nou-
velle monnaie mettrait probablement beaucoup de temps à inverser sensiblement la tendance..

En somme, nous restons persuadés qu’il existe une issue. Le FMI est déterminé à aider la Grèce à
traverser cette période de turbulences économiques. Comme le pays n’a pas effectué un paiement qui
arrivait à échéance le 30 juin 2015, le FMI ne sera pas en mesure d’accorder de financements tant que
les arriérés n’auront pas été apurés. Nous avons toutefois proposé d’offrir une assistance technique, si elle
était sollicitée, et restons pleinement présents.
28) Qui est Olivier Blanchard ? Quelle a été la politique du FMI à la fin du précédent siècle ?
29) La proposition selon laquelle des réformes structurelles nuisent à la croissance est-elle habituelle de
la part d’un économiste en chef du FMI ? Quelles sont les raisons qui ont été avancées pour expliquer que
l’austérité budgétaire ne conduisait pas à la récession économique ?

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