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Revue Marocaine de Gestion et d’Economie, N°6, Janvier- Juin 2016

Analyse empirique de la réaction des prix domestiques aux variations du


taux de change : cas du Maroc.

Par : Lahoussine RACHIDI, Yassine ASSANDADI1

Résumé
L’objectif de cet article est d’examiner empiriquement la réaction des prix domestiques
aux variations du taux de change pour le cas du Maroc. Pour tenir compte des effets
réciproques entre l’inflation et les variations du taux de change, nous utiliserons une
démarche en termes du modèle VAR(vector autoregressive) avec quatre variables (l’indice
des prix à la consommation, le prix du baril de pétrole, le taux de change effectif nominal et
l’écart de PIB), sur des données trimestrielles couvrant la période 2000-2014. Les résultats
obtenus, tirés de l’analyse des fonctions de réponse impulsionnelle qui corrobore en grande
partie avec celle de la décomposition de la variance, montrent que tout choc sur le taux de
change entraîne une réaction significative de l’inflation et que cette réaction semble traduire
un degré faible et modeste du pass-through.
Mots clés : Pass-through ; Inflation ; TCEN ; Modèle VAR ; Fonctions de réponse
impulsionnelle ; Décomposition de la variance.

1
Université IBN ZOHR, Groupe de recherches Appliquées en Sciences économiques (ERASE), AGADIR.

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Introduction :
Etant donné le degré élevé d’ouverture de l’économie marocaine, le pays a mis en place
plusieurs politiques notamment monétaire, afin d’assurer une stabilité macroéconomique et en
vue de réussir l’insertion du Maroc dans l’économie internationale. Dans ce cadre, Bank Al-
Maghrib a jugé qu’il est nécessaire de se préparer à l’adoption d’une politique de ciblage de
l’inflation en plus du passage à un régime de change plus flexible.

La politique de ciblage d’inflation est utilisée essentiellement pour stabiliser les prix, ce
qui permettrait de maintenir l’inflation sous contrôle. Il faut noté que l’application de ce genre
de politique économique nécessiterait la migration vers un régime de change plus flexible. Or,
même si un régime de change plus flexible offre un certain nombre d’avantages tels que
l’absorption des chocs externes, une meilleure intégration financière internationale et
davantage d’indépendance de la politique monétaire, il engendrerait toutefois, une volatilité
accrue du taux de change du dirham. Par conséquent, une étude concernant l’estimation du
degré de transmission des chocs de change vers les prix intérieurs s’avère indispensable dans
le sens où elle permettrait d’évaluer et d’analyser la réponse des prix à une variation de
change. Ce qui permettra aussi à la banque centrale d’anticiper les résultats du passage à un
régime de change plus flexible.

L’estimation du degré de transmission des fluctuations des taux de change sur les prix à
la consommation et, par conséquent, sur l’inflation à court terme, pourrait modifier les
prévisions de la banque centrale concernant le comportement futur de l’inflation, prévisions
qui sont déterminantes dans la politique monétaire.

L’objectif de cet article est d’étudier la réaction des prix aux variations du taux de
change dans le cas Maroc et aussi de déterminer les facteurs qui affectent la transmission des
chocs entre ces deux variables.

Les études traitant ces questions ont nommé ces rapports « le pass-through du taux de
change ». Ce dernier se définit comme étant la variation en pourcentage du prix des
importations qui résulte d'une variation de 1% du taux de change.

En effet, le taux de change affecte l’inflation soit directement, dans la mesure où le taux
de change exerce une influence sur les prix des biens importés inclus entant qu’une
composante de l’indice des prix à la consommation, et par conséquent sur l’ensemble des
biens domestiques, ou indirectement, à travers les pressions qu’il exerce sur la demande
intérieure et extérieure des biens locaux.

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I. Revue de littérature.
I.1. Les facteurs explicatifs du Pass-through
La plupart des études sur la transmission des variations du taux de change sont motivées
par la conclusion commune des études empiriques, à savoir que les variations du taux de
change ne se répercutent pas entièrement sur les prix, même à long terme.

Parmi les facteurs qui peuvent influencer le degré de Pass-through, nous citons :
• La structure et le degré de concurrence sur les marchés des biens : Si la demande
locale est très élastique, les entreprises étrangères sont obligées d’absorber les fluctuations du
taux de change et acceptent ainsi des profits marginaux faibles, afin de préserver leur part de
marché. Dans une structure non concurrentielle du marché, même si la dépréciation du taux
de change fait augmenter le coût des produits importés intermédiaires, les firmes non
compétitives peuvent choisir d’absorber la hausse du coût de production, et réduire ainsi le
degré de pass-through aux prix à la consommation. Dornbusch (1987) suggère que l’ampleur
du pass-through est déterminée par la proportion des firmes étrangères présentes sur le
marché local par rapport aux entreprises locales ;
• La politique monétaire et le climat d’inflation : Taylor (2000) montre que les
entrepreneurs auront d’autant plus tendance à répercuter dans leurs prix les variations du taux
de change que l’environnement est marqué par l’inflation. De plus, si l’inflation est
persistante, les entrepreneurs considèreront que les hausses de coûts sont elles-mêmes
persistantes. Toutefois, le Pass-through est faible en présence d’une politique monétaire
crédible. En fait, la crédibilité et l’efficacité de la politique monétaire à maintenir un taux
d’inflation bas doivent amener les firmes à anticiper la non persistance de tout choc négatif du
taux de change sur l’inflation et par conséquent elles ne répercutent pas directement l’effet de
change sur leurs prix (Gagnon et Ihrig, 2004) ;

• La modification de la composition de l’indice des prix des biens importés : Un autre


facteur de cette baisse serait donc la modification de la composition des importations en
faveur des biens venant des secteurs où le degré de différenciation est plus élevé et le degré de
transmission est plus bas. Dans leur étude sur les pays de l’Organisation de coopération et de
développement économiques pour la période 1975-2003, Campa et Goldberg (2005)
obtiennent des résultats qui corroborent cette idée.
• Le degré d’ouverture : Un degré d’ouverture élevé peut signifier, comme le montre
McKinnon (1963), une forte sensibilité de l’économie aux variations du taux de change.

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• Le régime du taux de change : Dans un régime de taux de change flexible, un degré


faible du Pass-through peut contribuer à stabiliser la production et l’inflation car il offre une
meilleure protection contre les chocs extérieurs tout en conférant une plus grande
indépendance à la politique monétaire. Par contre, dans le cas d’un régime du taux de change
fixe, toute action pour stabiliser l’inflation se traduit par une volatilité au niveau de la
production (Devereux, 2001). En fait, les pays à régime de change fixe sont de plus en plus
exposés à la volatilité des flux de capitaux.

I.2. Les principaux enseignements des études empiriques


McCarthy (1999) a utilisé un modèle VAR expliqué par le prix à l’importation, le prix à
la production et le prix à la consommation pour quelques pays avec des données annuelles qui
s’étalent de 1976 à 1998. Il a conclu que le Pass-through au prix à la consommation est
modeste et qu’il est corrélé positivement avec l’ouverture commerciale du pays et
négativement avec la volatilité du taux de change.

Goldfajn et Werlang (2000), en utilisant un échantillon de 71 pays, ont trouvé que le


coefficient de pass-throug est d’autant plus élevé que l’horizon temporel de référence est lui-
même éloigné. Pour l’ensemble des pays de l’échantillon, il atteint son maximum au bout de
12 mois. Il existe cependant des disparités significatives entre les pays.

Choudhri et Hakura (2001), pour un échantillon de 71 pays et sur la période 1979-2000,


ont trouvé que le pass-through est corrélé positivement avec le taux d’inflation. Le pass-
through est incomplet pour la plupart des pays de l’échantillon.
Devereux et Yetman (2003) montrent que le pass-through est associé positivement avec
le taux d’inflation, mais cette relation n’est pas linéaire vue que le degré de pass-through
baisse dans le temps.
Gagnon et Ihrig (2004), ainsi que Bailliu et Fujii (2004) ont choisi d’examiner si le
degré de transmission des variations du taux de change avait diminué dans les pays
industrialisés ayant adopté un régime de politique monétaire plus crédibles. Les deux études
obtiennent des résultats qui confirment cette hypothèse.
Burstein, Eichenbaum et Rebelo (2002) expliquent cette baisse observée dans la
transmission des chocs sur le taux de change à l’indice général des prix par la substitution des
produits importés coûteux par des produits locaux moins chers.

II. Taux de change et inflation au Maroc.


Parmi les différents régimes existants, le choix pour le Maroc s’est porté sur un régime
de change intermédiaire de parité fixe avec un rattachement de la monnaie nationale à un
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panier de monnaie composé de l’euro et du dollar. Cet ancrage tient compte du poids des
échanges commerciaux avec les différents partenaires économiques.

L’objectif de ce rattachement pluri monétaire est de minimiser l’incidence des


changements de parité de ces monnaies et de permettre également d’éviter toute spéculation
contre le Dirham.

A la date du 13 avril 2015, le Ministère de l’Economie et des Finances et Bank Al-


Maghrib ont décidé d’actualiser les pondérations des devises du panier de cotation du dirham
afin de refléter la structure actuelle des échanges extérieurs de notre pays. Les nouvelles
pondérations sont désormais fixées à 60% pour l’euro et 40% pour le dollar US contre
respectivement 80% et 20% auparavant.

Cette révision du régime de change est un moyen concret pour le Maroc de se


prémunir face aux risques de change liés aux importations et au service de la dette. D’après le
ministre des Finances, la dette marocaine étant calculée en dollar, celle-ci se verra réduite
compte tenu de la nouvelle cotation du dollar face au dirham. Elle permet également
d’atténuer l’impact de change sur la facture énergétique et sur les prix des produits pétroliers
en cas d’appréciation du dollar face à l’euro. L’actualisation du panier du dirham devrait
constituer un premier pas dans le processus de transition vers un régime de change plus
flexible visant à renforcer la compétitivité de notre pays.

Le taux de change effectif nominal2 (TCEN) est le taux qui permet d’éliminer les
variations relatives aux fluctuations des prix et par conséquence ne garder que les chocs en
provenance des variations nominales du taux de change. Il permet aussi de tenir compte du
poids des principaux pays partenaires dans la détermination du cours du dirham.

Figure 1 : Evolution du TCEN entre 2000 et 2014 Source : FMI.

2
Le taux de change effectif nominal, qui est une moyenne géométrique pondérée des taux de change bilatéraux
vis-à-vis des principaux partenaires commerciaux, permet d’apprécier l’évolution de cette monnaie par rapport à
l’ensemble de ces pays.
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Le TCEN est exprimé au certain. Ainsi, toute augmentation (resp. diminution) du


TCEN correspond à une appréciation (resp. dépréciation) du dirham. Les données du
graphique ci-dessus montrent que le TCEN se caractérise par de faibles fluctuations,
exception faite de l’année 2001 au cours de laquelle le panier de cotation du dirham est révisé
au profit de la monnaie européenne (dévaluation de 5% en 2001), enregistrant même une
relative stabilité. L’ancrage du dirham aux devises d’économies à faible inflation contribue
ainsi à la stabilité du taux de change effectif et, par conséquent, à la maîtrise de l’inflation.

Afin de pouvoir cerner davantage les anticipations des agents économiques, Bank Al-
Maghrib poursuit sa transition vers la politique de ciblage de l’inflation. Cette politique
consiste à se fixer un objectif à atteindre en matière d’inflation. La Banques centrale s’efforce
de faire correspondre le taux d’inflation à un taux cible ou à une fourchette de taux cibles,
déterminés à l’avance. Les décisions de politique monétaire seront ainsi prises en fonction de
ce taux ou de cette fourchette de taux. Cette politique permet ainsi de publier les prévisions
d’inflation et d’adopter, par anticipation, les mesures qui s’imposent pour maîtriser les prix.
L’un des principaux avantages du ciblage est qu’il permet d’accroître la confiance des
investisseurs et des opérateurs économiques dans la stabilité des prix.

Figure 2 : Evolution de l’inflation au Maroc entre 2000 et 2014 Source : données du HCP & FMI

Il est claire sur le graphique de la figure 2 que le Maroc a pu maîtriser son taux
d’inflation à l’intérieur d’une bande horizontale qui ne dépasse pas une marge de +ou-2%.
Dans ce contexte, la volatilité de l’inflation a sensiblement baissé. Cette maîtrise de l’inflation
a permis d’améliorer la compétitivité de l’économie marocaine en maintenant une certaine
stabilité de la valeur du dirham par rapport aux principales devises.
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III. Etude empirique.


III.1. Méthodologie et données.
Nous avons opté dans notre étude pour le modèle VAR. C’est un modèle statistique
développé par Sims en 1980, qui permet de capturer les interdépendances entre plusieurs
séries temporelles.
Les modèles VAR permettent d’étudier les fluctuations économiques, de construire les
estimateurs qui peuvent être associés à un choc, d’analyser les effets de la politique
économique à travers la simulation des chocs aléatoires ou innovation et la décomposition de
la variance de l’erreur.

L’analyse par le modèle VAR de l’effet du taux de change sur les prix nous permettra
d’identifier l’impact d’un choc de taux de change sur l’inflation à l’aide des fonctions de
réponses impulsionnelles de Cholesky. De même, elle permet d’examiner les effets des chocs
structurels des autres variables macroéconomiques sur l’inflation domestique. Elle va nous
permettre aussi de décomposer l’effet des chocs structurels sur l’inflation pour distinguer les
chocs sur le taux de change et les autres chocs.

Nous procédons pour analyser le pass-through pour le cas du Maroc, à l’usage d’un
modèle VAR avec quatre variables : l’indice des prix à la consommation (IPC), le prix du
baril de pétrole (PTR), le taux de change effectif nominal (TCEN) et l’output gap relatif au
PIB(OP_GAP). Nous avons utilisé des données trimestrielles qui s’étalent de 2000 à 2014 et
qui sont issues des statistiques financières internationales du Fonds Monétaire International
(IFS) et sont complétées des statistiques financières de Bank Al-Maghrib.

Dans le cadre de notre modèle VAR, certaines transformations des données sont
effectuées. À l’exception d’output gap relatif au PIB, toutes les variables sont exprimées en
logarithme3.

Dans le but d’étudier la stationnarité des données en niveau, nous avons procédé à des
tests de racine unitaire sur les variables en niveau. Ainsi, nous avons effectué les tests de
Dickey et Fuller augmenté (ADF, 1981) et de Phillips Perron (PP, 1988). Les résultats de ces
deux tests montrent que les variables LIPC, LPTR et LTCEN possèdent une racine unitaire et
ne sont pas donc stationnaires4 au niveau, mais le sont en première différence. Ces tests de

3
Le logarithme des variables est appliqué afin d’homogénéiser les données, de lisser les fluctuations et de rendre
leur distribution plus proche de celle de la loi normale.
4
Le test PP montre que la série de TCEN n’est pas stationnaire à 1%. Par contre, le test d’ADF montre qu’elle
est stationnaire au seuil de 1%.
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racine unitaire montre aussi que l’out put gap relatif au PIB est stationnaire au niveau pour un
intervalle de confiance de 99%.

Les résultats obtenus sont récapitulés dans le tableau suivant :

Ordre d’intégration retenu par Variable définitivement retenue


Variable
les tests ADF et PP pour l’estimation
LIPC I(1) DLIPC
LPTR I(1) DLPTR
LTCEN I(1) DLTCEN
OP_GAP I(0) OP_GAP
Tableau 1 : Récapitulatif des tests ADF et PP.

Le calcul des critères d’information LR, FPE, AIC, SC et HQ pour des retards allant
de 1 jusqu’à 5, montre que le retard qui peut être retenu est de 3. Nous allons ainsi procéder à
l’estimation d’un modèle var d’ordre 3 (VAR(3)).

Les équations de notre modèle VAR(3) sont estimées par la méthode des moindres
carrés (MCO) en incluant une constante et des variables muettes5 (ou dummy variables).

Iii.2.Résultats et interprétation
a. Analyse des réponses impulsionnelles de Cholesky :
L’analyse des réponses impulsionnelles permet pour sa part d’évaluer la part des
fluctuations du taux de change transmises vers les prix domestiques en donnant accès au
calcul du Pass-through du TCEN vers l’IPC. La figure suivante représente la fonction des
réponses impulsionnelles cumulées liant les deux variables endogènes du modèle (IPC) et
(TCEN).

.002

.001

.000

-.001

-.002

-.003

-.004

-.005
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

5
Reflétant une baisse importante du niveau du prix de pétrole au 4ème trimestre de 2008, ainsi qu’une baisse
importante du niveau du TCEN au 2èmetrimestre de 2001.
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Figure 3 : Réponses impulsionnelles de l’IPC suite à un choc sur le TCEN.

Nous remarquons que l’effet du TCEN sur les prix commence à se manifester à partir
du 2ème trimestre qui suit la date du choc. L’IPC diminue d’abord pour retrouver le pic dans le
4ème trimestre, date après laquelle le choc commence à se dissiper. Aussi, l’allure révèle que
l’IPC réagit à la baisse suite à un choc positif du TCEN. Cela signifie qu’une hausse du taux
de change effectif nominal se traduit par une baisse des prix domestiques.

b. Calcul du Pass-Through du taux de change vers les prix domestiques :


Le but derrière le calcul des fonctions de réponse est d’estimer notre Pass-Through du
TCEN vers l’IPC. Par conséquent, nous avons opté pour le calcul des réponses du TCEN et de
l’IPC à un choc de TCEN.

Le calcul du Pass-through (PT) pour un modèle VAR(p) se fait simplement à partir du


rapport des fonctions d’impulsion cumulées d’ordre p selon la formule suivante :

  ( IPC )
PT  p
i 1

  (TCEN )
i 1
p

 ( ICP) : Réponses impulsionnelles cumulées de l’IPC à un choc sur le TCEN après p


i 1
trimestres.
p

 (TCEN ) :
i 1
Réponses impulsionnelles cumulées du TCEN à un choc sur le TCEN après p

trimestres.

Les calculs empiriques sont fournis par le tableau 2, qui montre les fonctions
d’impulsion cumulées ainsi que les Pass-through durant les dix périodes suivant le choc qui
coïncide avec la période 1.

Période DLIPC DLTCEN Pass-through


1 0 0,005371 0
2 -0,00015 0,005797 -0,02587545
3 -0,00036 0,006452 -0,05579665
4 -0,002493 0,005057 -0,49298003
5 -0,002192 0,004936 -0,44408428
6 -0,002136 0,004107 -0,52008766
7 -0,001911 0,004552 -0,41981547
8 -0,001587 0,004739 -0,33488078
9 -0,001488 0,005062 -0,29395496
10 -0,001689 0,004989 -0,3385448

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Tableau 2 : Les Pass-through dynamiques.

Le signe négatif des valeurs indique le sens de variation. Autrement dit, l’inflation
réagit à la baisse suite au choc positif du taux de change ce qui est conforme à la théorie. Par
ailleurs, le tableau indique un Pass-through modeste et incomplet (<1), qui atteint son
maximum dans le cinquième trimestre après l’incidence du choc soit -0.52. Ce qui signifie
que l’inflation baisse de 0.52% suite à une augmentation de 1% de la variation annualisée du
TCEN.

c. Décomposition de la variance
Dans une tentative de mieux discerner la transmission des chocs sur le taux de change à
l’inflation, nous faisons recours à l’analyse de la décomposition de la variance.

Le tableau 3 reporte les résultats de la décomposition de la variance de l’IPC, afin de


mettre en évidence la part de chaque choc dans l’explication de la variation prévisionnelle de
l’IPC. L’estimation est faite pour un horizon de 10 trimestres pour mieux saisir l’évolution de
cette part dans le temps.

Tableau 3 : Décomposition de la variance de l’IPC.

Dans ce cas, un choc subit par le taux de change commence à s’apercevoir sur l’IPC à
partir du 2ème trimestre pour augmenter au cours du temps. En effet, le quatrième trimestre
marque le début d’une transmission significative vers l’IPC : le taux de change explique
presque 6.6% de la variation de l’IPC. La part de 6% reste quasiment constante sur la totalité
de l’horizon temporel restant. L’IPC n’est pas beaucoup plus affecté par les chocs de taux de
change au Maroc.

Il ressort aussi de ce tableau que la variation de l’IPC est due en moyenne de 73,47% à
ses propres innovations, pour 7,43% à celle du prix de pétrole ainsi pour 12,38% à l’écart de
PIB.

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Conclusion :
La meilleure compréhension du comportement économique que sous-tend le degré de
pass-through joue un rôle pertinent dans la conduite de la politique monétaire. L’objectif
principal derrière cette étude est d’évaluer le degré du Pass-through du taux de change vers les
prix domestiques au Maroc, en utilisant des données trimestrielles qui s’étalent de 2000 à
2014. À travers la simulation des chocs ou innovations que nous procure la modélisation
VAR, on a pu quantifier la réaction des prix domestiques face au choc sur le taux de change.
Les résultats, tirés de l’analyse des fonctions de réponse impulsionnelle qui corrobore en
grande partie avec celle de la décomposition de la variance, indiquent l’existence d’un faible
degré du Pass-through du taux de change, ce qui implique que les prix à la consommation ne
sont pas beaucoup affectés par les fluctuations des taux de change. Les principaux facteurs qui
peuvent expliquer la baisse du Pass-through pour le cas de notre économie sont les suivants :

- Le rôle de la politique monétaire : la banque centrale a réussi à maintenir l’inflation, durant


la période récente, à des niveaux modérés et ce en ancrant les anticipations inflationnistes des
agents grâce à ses interventions et à sa stratégie de communications qui visent à renforcer sa
crédibilité. La période 2000-2014 a été dominée par une variation maitrisée de l’inflation, un
écart type de 0.94 et un taux d’inflation moyen de 1.63% ce qui a été accompagné d’un Pass-
through relativement faible.
- La baisse notable des parts des produits de bases dans les importations marocaines durant
la période 2000-2014.
- Les dépenses de compensation ont permet d’amortir les différentes fluctuations des prix
des produits de première nécessité atténuant ainsi leurs effets sur le consommateur.
- La faible volatilité du taux de change au Maroc, ce qui a permet d’atténuer ces effets sur
les prix domestiques.

Par conséquent, le faible degré de transmission que l’étude a révélé montre que
l’adoption d’un régime de change flexible au Maroc ne devrait pas nuire au processus de
modération de l’inflation dont le pays s’est inscrit.

Références bibliographiques
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Taylor (2000). « Low inflation, pass through and pricing power of firms, »Revue Economique
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