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concurrence
___
INTRODUCTION
1
Cette question est au cœur de la pensée économique et du mouvement Law and Economics. Pour une présentation
des principaux courants de ce mouvement, V, T. KIRAT, L’analyse économique du droit, coll ; Repères, Paris, La
découverte 2010.
2
Y. Serra, Le droit français de la concurrence, Dalloz, coll. « Connaissance du droit », 1993. Voir, en outre,
ANGUET Y, « L’équilibre, finalité du droit de la concurrence », in Mélange en l’honneur d’Yves SERRA, Études
sur le droit de la concurrence et quelques thèmes fondamentaux, Dalloz, 2006, p.58.
3
3
Lionel Zevounou. Les usages de la notion de concurrence en droit. Librairie générale de droit et de jurisprudence,
2012, coll. ”Droit public". ffhal-01630848f.
4
Hafidha Cheker, La signification de la concurrence, AJT, n°7, 1993, p15.
5
Voir en ce sens, Alain (B), Principes de concurrence, Economica, 1998
6
Daniel Mainguy et Malo Depincé, Droit de la concurrence, LexisNexis, Paris, 2015, p.35
4
7
Blaise Jean-Bernard, Droit des affaires : commerçants, concurrence, distribution, LGDJ, Paris, 2002, p.314
8
Idem, p. 314.
9
Letourne Philipe, au liberté, égalité, fraternité dans le droit de concurrence, GAZ.1991, p.349
10
V. F. Souty, La politique de la concurrence aux États-Unis, PUF, coll. « Que sais-je ? », n° 2945, 1995. E. Combe,
Économie et politique de la concurrence, Dalloz, 2005.
5
Par ailleurs, on note que les enjeux du droit de la concurrence varient en fonction des
époques et des options politiques du moment en la matière.
Tout d’abord, on doit rappeler que le droit de la concurrence est né pour la première
fois aux USA suite à l’acte de 1890 “Sherman Act” 11considéré comme le premier
texte qui a traité la question de la concurrence conçu également comme le texte
fondateur du droit de la concurrence.
Cet acte s’est vu dans un contexte bien déterminé suite à une agitation sociale dans le
monde agricole à cause de l’existence de trusts, d’où l’adoption d’une législation
anti-trust comme réaction à ce phénomène. Ensuite la Standard Oil (Rockefeller) une
sorte de charte aussi qui concerne la matière de la liberté économique. Son adoption
s’est fut en 1914 de deux textes complémentaires :
Le premier The Clayton antitrust Act 1914 : encadre les concentrations d’entreprise,
les fusions, et la constitution d’entreprises géantes.12
Et le second The Federal Trade Commission Act a créé une Agence fédérale de
contrôle des pratiques contraires à la Concurrence (Federal Trade Commission).
En Droit Européen13 la philosophie était différente. En 1957 le Traité de Rome était le
texte pierre fondamentale en la matière et prévoyait des règles de concurrence qui
visent en particulier le droit aux autorités européennes de surveiller les cartels.
Le droit européen de la concurrence a été renforcé dans les années 90 avec l'apparition
du contrôle des concentrations. La libre concurrence est l'une des obligations
imposées aux États-membres par l'article 3 du Traité de Rome : « l'action de la
Communauté comporte […] l'établissement d'un régime assurant que la concurrence
n'est pas faussée dans le marché commun ».
Ce droit qui s'impose à l'ensemble des pays de l'Union Européenne, est à présent régi
par le titre VII du traité sur le fonctionnement de l'UE (TFUE).
11
Murray Rothbard, The Progressive Era, Ludwig von Mises Institute, 2017 (ISBN 1610166744 et
978-1610166744, p. 602 ainsi Patrick Newman, « The Revenge Origins of the Sherman Antitrust Act » , 4 août 2018
… Robert Bradley Jr., « On the origins of the Sherman Antitrust Act », Cato Journal, no 9, 1990, p. 737-742
Et « Sherman to Alger », New York Times, 25 mars 1890 voir également : Hubert Patrick, Castan Adrien, « Droit
constitutionnel et liberté de la concurrence », Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2015/4 (N° 49), p.
15-27. URL : https://www.cairn.info/revue-les-nouveaux-cahiers-du-conseil-constitutionnel-2015-4-page-15.htm.
12
V. F. Souty, La politique de la concurrence aux États-Unis, PUF, coll. « Que sais-je ? », n° 2945, 1995. E. Combe,
Économie et politique de la concurrence, Dalloz, 2005 précité.
13
Wise Michael, « Droit et politique de la concurrence dans l'Union européenne », Revue sur le droit et la politique
de la concurrence, 2007/1 (Vol. 9), p. 7-98. URL :
https://www.cairn.info/revue-sur-le-droit-et-la-politique-de-la-concurrence-2007-1-page-7.htm.
6
En France14, le droit français 15de la concurrence a été instauré par l'ordonnance du 1er
décembre 1986. « Les prix des biens, produits et services relevant antérieurement de
ladite ordonnance sont librement déterminés par le jeu de la concurrence ».
L'ordonnance a institué le Conseil de la concurrence, remplacé depuis 2008 par
l'Autorité de la concurrence16. Ses dispositions ont été codifiées dans le livre IV
(articles 410-1 à 470-8) du Code de commerce.
On souligne que, la politique de concurrence dans les États démocratiques est un
moyen de construction de « l’économie sociale de marché »17 associant économie de
marché à la démocratie. Le débat sur ces politiques préoccupe aussi les Etats en
transition18, ce qui a mené à un transfert du modèle néolibéral dans le cadre de la
transition démocratique qui véhicule de nouveaux référentiels marchands, des
conditions pour une véritable transition économique19.
En Tunisie le droit de la concurrence a subi plusieurs évolutions, au début malgré
l'importance de la question le législateur tunisien s’est limité à réglementer la matière
par des dispositions générales insérées dans le Code des obligations et contrats20.
Ensuite par l’adoption de la loi n°70-26 du 19 mai 1970 relative aux modalités de
fixation des prix et à la répression des infractions en matière économique21.
« La Tunisie s’est engagée depuis les années 1980, dans un processus de réformes
économiques adoptant notamment la libéralisation du commerce et des prix, la
privatisation des entreprises publiques et ce dans un objectif visant son intégration
14
Wise Michael, « Droit et politique de la concurrence en France », Revue sur le droit et la politique de la
concurrence, 2005/1 (Vol. 7), p. 7-91. URL :
https://www.cairn.info/revue-sur-le-droit-et-la-politique-de-la-concurrence-2005-1-page-7.htm
15
J.-B. Blaise, « Une construction inachevée : le droit français des ententes et des positions dominantes », in
Études dédiées à René Roblot, LGDJ, 1984, p. 160.
16
Aurélien Condomines, Droit français de la concurrence, Ed. Jurismanager 2009.
17
C.Prieto, « L’Europe et le droit de la concurrence : des malentendus aux mérites reconnus ». JCP G 2007, I, 132.
18
« Les objectifs du droit et de la politique de la concurrence... », Revue sur le droit et la politique de la
concurrence, 2003/1 (Vol. 5), p. 8-30. URL :
https://www.cairn.info/revue-sur-le-droit-et-la-politique-de-la-concurrence-2003-1-page-8.htm.
19
A défaut d’un véritable « plan Marshall » (v. Collectif, « Un plan économique pour soutenir la transition
démocratique en Tunisie », Le monde 17.5.2011)
20
C’est ainsi que les articles 90-91-92 du code des obligations et contrats réglementent l’action en concurrence
déloyale.
21
La loi n°70-26 du 19 mai 1970, relative aux modalités de fixation des prix et à la répression des infractions en
matière économique, J.O.R.T, 19-22 Mai 1970, pp.617-621.
7
De plus« Le droit économique tunisien des années 70 et 80 était beaucoup plus axé
sur le contrôle économique des prix et de la qualité que sur la loyauté de la
concurrence et des transactions »23.
Après deux décennies que s’est fut l’adoption de la loi du 29 juillet 1991 relative à la
concurrence et aux prix.
Suite à la globalisation, l’ère de la mondialisation qui a ouvert toutes les frontières
entre les pays du bassin méditerranéen ; surtout après la conclusion de l’accord de
l’association entre la Tunisie et l’UE dans les années 90 et la redéfinition du rôle de
l’Etat surtout en matière économique tout l’équilibre s’est basculé et remis en cause
surtout avec la question de l’efficacité et le souci du maintien du jeu concurrentiel.
Et avec les mutations économiques qui s’opèrent à l’échelle internationale qui ne va
pas son apport, la sphère tunisienne relative au droit de la concurrence se trouve au
courant et s’est influencée 24trop du droit comparé notamment le traité de Rome et
l’ordonnance 86-1243 du 1er décembre 1986.
Le texte a connu cinq réformes principales pour se rapprocher de la législation
européenne avant d’être abrogé par la loi n°36-2015 de 15 septembre 2015 désormais
le nouveau code du droit de la concurrence et elle vient combler les défaillances du
précédent surtout pour résoudre les problèmes relatifs à l’enjeu concurrentiel.
La concurrence, cette « nouvelle orthodoxie »25, qui est « identiquement de l’essence
des économies de marché et celle des régimes démocratiques »26 s’est en effet
22
OCDE, DIRECTION DES AFFAIRES FINANCIÈRES ET DES ENTREPRISES COMITÉ DE LA
CONCURRENCE, Forum mondial sur la concurrence LE DROIT DE LA CONCURRENCE ET LES
ENTREPRISES PUBLIQUES - Contribution de la Tunisie - Session V - 30 novembre 2018. Document publié sur :
https://one.oecd.org/document/DAF/COMP/GF/WD(2018)71/fr/pdf.
23
Mohammed ben fraj, commission de la concurrence, AJT, n°7, 1993, p35.
24
Jaidane Riadh, « L'influence du droit français sur le droit tunisien des concentrations économiques », Revue
internationale de droit économique, 2002/4 (t. XVI, 4), p. 655-678. DOI : 10.3917/ride.164.0655. URL :
https://www.cairn.info/revue-internationale-de-droit-economique-2002-4-page-655.htm
25
J.caillosse, La constitution imaginaire de l’administration, Paris, PUF, 2008, p.259
26
C.Champaud, « Régulation et droit économique », op.cit., p.41.
8
imposée, dans notre ordre juridique et trouve dans la loi relative à la réorganisation de
la concurrence et des prix27 l’expression de sa légitimité.
En fait « le cadre juridique, tel qu’il se présente aujourd’hui, est exhaustif, proche de
la réglementation européenne et très adapté aux exigences nationales et
internationales. La promulgation de la loi sur la concurrence s'accompagne d’un
processus de libéralisation économique qui a concerné le commerce, l’investissement
et la privatisation des entreprises publiques. La déréglementation a été aussi une
composante essentielle de la réforme en vue de créer un contexte favorable à la
concurrence et à l’initiative privée ».28
Au surplus la réforme de 2015 est inscrite dans un contexte post révolutionnaire qui
doit être compatible avec les besoins du pays et la fragilité du contexte politique,
social et économique (grèves fréquentes, fragilité macroéconomique, la contrebande,
commerce parallèle…)29
Au fil des années, les acteurs sont passés d’une bataille 30juridique qui visait à
renforcer le processus de marché unique, mais favorable au consommateur, à une
bataille relevant certainement aujourd’hui de la diplomatie économique. Il a souvent
été question de concurrence déloyale31.
27
Loi n°2015-36 du 15 septembre 2015, relative à la réorganisation de la concurrence et des prix, loi portant refonte
du régime de la concurrence et des prix qui a abrogé la loi n°91-64 du 29 juillet 1991 relative à la concurrence et aux
prix et ses modifications ultérieures. (JORT, n°77-78, du 25-29 septembre 2015, p. 2320).
28
OCDE, DIRECTION DES AFFAIRES FINANCIÈRES ET DES ENTREPRISES COMITÉ DE LA
CONCURRENCE, Forum mondial sur la concurrence LE DROIT DE LA CONCURRENCE ET LES
ENTREPRISES PUBLIQUES - Contribution de la Tunisie - Session V - 30 novembre 2018. Document publié sur :
https://one.oecd.org/document/DAF/COMP/GF/WD(2018)71/fr/pdf.
29
Voir, Article : Neji Baccouche, droit de la concurrence et accord d’association entre la Tunisie et l’Union
européenne et ses Etats-membres, colloque Droit de la concurrence et accord d’association UE-Tunisie, juin 2017,
disponible sur le lien : https://blogdroiteuropeen.com
30
Comme signale également le président du conseil de la concurrence monsieur Ben Mahmoud Ridha dans le
préface du rapport fait par l’OCDE il estime « Veiller à ce que la réglementation ne soit pas inutilement lourde est
essentiel au fonctionnement dynamique et efficace des marchés. En même temps, il est important d’apporter une
réponse efficace aux besoins des consommateurs et de tenir compte des impératifs de développement économique et
social du pays avec tous les arbitrages nécessaires entre les différents instruments de politique économique. »
rapport disponible sur : https://www.oecd.org/daf/competition/ca-tunisia-review-2019-fr.pdf.
31
V. M.-L. Izorche, Les fondements de la sanction de la concurrence déloyale et du parasitisme, RTD com. 1998,p.
17.
9
précaire (I) et qu’il se trouve malgré tout incapable de les concilier puisqu’ils sont
incompatibles (II).
35
A voir également : « Les objectifs du droit et de la politique de la concurrence... », Revue sur le droit et la
politique de la concurrence, 2003/1 (Vol. 5), p. 8-30. URL :
https://www.cairn.info/revue-sur-le-droit-et-la-politique-de-la-concurrence-2003-1-page-8.htm.
36
Définition du dictionnaire encyclopédique disponible sur: https://www.universalis.fr/dictionnaire/macroeconomie/.
11
37
Ibid, définit par Edmond MALINVAUD.
38
Linda Arcelin-Lécuyer, « Droit de la concurrence », ISBN 978-2-7535-2753-9 Presses universitaires de Rennes,
2013, www.pur-editions.fr.
39
Linda Arcelin-Lécuyer, « Droit de la concurrence », ISBN 978-2-7535-2753-9 Presses universitaires de Rennes,
2013, www.pur-editions.fr.
12
contraignante. »40, ceci par la mise en place de règles qui prévoit l’organisation de
l’économie et de la concurrence qui sera indispensable pour lutter contre les dérives
de l’organisation privée de l’économie et de « dirigisme privé »41
Le rôle du conseil de la concurrence pour exercer sa fonction de protection de la
concurrence
En effet, les règles de droit de la concurrence ont pour but d’autoriser, voir stimuler la
concurrence entre les entreprises garantissant l’accès au marché , de protéger la
concurrence existante en sanctionnant la concurrence déloyale et les pratiques élusives
de concurrence, de limiter ou interdire la concurrence dans certains cas en autorisant
certaines entités à échapper à l’application du droit de la concurrence (but
exclusivement social) et en concédant provisoirement certains monopoles pour
encourager la recherche (propriété intellectuelle des brevets)42 comme par exemple la
limitation des hausses des prix dans certains secteurs, qui érodent à la fois les gains de
compétitivité et de pouvoir d’achat sans entraver la productivité qui est gage de
croissance et de gains de pouvoir d’achat sans inflation.
En effet, la concurrence est un outil d’émulation de l’offre productive, elle permet de
renforcer la compétitivité des entreprises et les pousse à l’innovation (article 32 du
traité sur le fonctionnement de l'Union européenne). C’est pourquoi la défense de la
concurrence doit être exercée dans le cadre du respect des règles contraignantes dans
un souci de protéger le marché des pratiques anticoncurrentielles et ce par un
ensemble de normes et de structures compétentes d’instaurer de l’équilibre, d’assurer
la transparence des transactions et de lutter contre les concurrences déloyales.
On rappelle dans ce contexte que le conseil de la concurrence assure le respect de
règles contraignantes, et se prononce sur les requêtes afférentes aux pratiques
anticoncurrentielles (les ententes, les abus de position dominante...).
Dans ce cadre il paraît essentiel d’identifier les diverses pratiques anticoncurrentielles,
en effet, « Le conseil de la concurrence se charge de la preuve des pratiques
40
Y.POIRMEUR, Théories de la concurrence et conceptions de l’Etat », in La concurrence et ses acteurs, actes du
colloque international du 12 et 13 avril 2013, Conseil de la concurrence, l’Association Tunisienne de Droit
Administratif. (ATDA), avec la participation de La faculté du droit et des sciences politiques de Tunis, l’Université
Versailles-Saint Quentin en Yvelines et l’Autorité de la concurrence française à paraître.
41
J-K., GALBRAITH, La science économique et intérêt général, éd. Gallimard, 1974, p.110.
42
Les fondements du droit à la concurrence, Pages : 7 Publié le: 13 novembre 2011. Disponible sur
https://www.etudier.com/dissertations/Les-Fondements-Du-Droit-%C3%A0-La/300524.html
13
43
OCDE, DIRECTION DES AFFAIRES FINANCIÈRES ET DES ENTREPRISES COMITÉ DE LA
CONCURRENCE, Forum mondial sur la concurrence LE DROIT DE LA CONCURRENCE ET LES
ENTREPRISES PUBLIQUES - Contribution de la Tunisie - Session V - 30 novembre 2018. Document publié sur :
https://one.oecd.org/document/DAF/COMP/GF/WD(2018)71/fr/pdf.
44
OCDE, DIRECTION DES AFFAIRES FINANCIÈRES ET DES ENTREPRISES COMITÉ DE LA
CONCURRENCE, Forum mondial sur la concurrence LE DROIT DE LA CONCURRENCE ET LES
ENTREPRISES PUBLIQUES - Contribution de la Tunisie - Session V - 30 novembre 2018. Document publié sur :
https://one.oecd.org/document/DAF/COMP/GF/WD(2018)71/fr/pdf.
45
OCDE, DIRECTION DES AFFAIRES FINANCIÈRES ET DES ENTREPRISES COMITÉ DE LA
CONCURRENCE, Forum mondial sur la concurrence LE DROIT DE LA CONCURRENCE ET LES
ENTREPRISES PUBLIQUES - Contribution de la Tunisie - Session V - 30 novembre 2018. Document publié sur :
https://one.oecd.org/document/DAF/COMP/GF/WD(2018)71/fr/pdf.
46
OCDE, DIRECTION DES AFFAIRES FINANCIÈRES ET DES ENTREPRISES COMITÉ DE LA
CONCURRENCE, Forum mondial sur la concurrence LE DROIT DE LA CONCURRENCE ET LES
ENTREPRISES PUBLIQUES - Contribution de la Tunisie - Session V - 30 novembre 2018. Document publié sur :
https://one.oecd.org/document/DAF/COMP/GF/WD(2018)71/fr/pdf.
14
47
OCDE, DIRECTION DES AFFAIRES FINANCIÈRES ET DES ENTREPRISES COMITÉ DE LA
CONCURRENCE, Forum mondial sur la concurrence LE DROIT DE LA CONCURRENCE ET LES
ENTREPRISES PUBLIQUES - Contribution de la Tunisie - Session V - 30 novembre 2018. Document publié sur :
https://one.oecd.org/document/DAF/COMP/GF/WD(2018)71/fr/pdf.
48
Conseil de la Concurrence rapport non publié, extrait de l’étude faite par l’OCDE. Document publié sur :
https://one.oecd.org/document/DAF/COMP/GF/WD(2018)71/fr/pdf.
49
Cours de la concurrence disponible sur
https://www.maxicours.com/se/cours/le-droit-de-la-concurrence-et-la-protection-du-marche/.
15
Le fait que la Pharmacie Centrale occupe une position dominante sur le marché de
l’importation du médicament, ne l’exonère pas à l’égard de ses clients et de ceux qui
entretiennent des relations commerciales avec elle, du devoir d’observer les règles de
la concurrence et de veiller à ne pas se livrer à des activités de nature à fausser le jeu
de la concurrence et de porter atteinte aux intérêts du consommateur et des
concurrents.
En effet, en procédant à l’importation et à la distribution d’un médicament dont
l’importation est prohibée, La Pharmacie Centrale, a nui à l’équilibre général du
marché en portant préjudice au fabricant local unique de ce médicament dont le
volume des ventes a régressé et le chiffre d’affaires a baissé d’une manière
considérable, durant la période considérée.
Le conseil a condamné la pharmacie centrale pour ces pratiques anticoncurrentielles et
lui a infligé une amende de 50.000 TND.
● La lutte contre les ententes
Sont définies comme “ententes” les actions concertées entre plusieurs entreprises. Ce
type de convention est prohibé lorsqu’il a pour finalité de fausser le jeu de la
concurrence et de faire obstacle à la fixation du prix qui doit s'établir par le seul jeu de
l’offre et de la demande, qu'il a pour effet de limiter ou de contrôler la production, les
investissements ou le progrès technique, ou encore lorsqu'il parvient à répartir les
marchés entre les entreprises qui sont parties à cet accord ou les ressources des
approvisionnements destinés aux signataires de l'entente50.
Les ententes entre entreprises concurrentes ont pour objet d’empêcher, de restreindre
ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché. Cependant, on doit signaler que
les ententes ne font pas tous l’objet d’interdiction. Seulement celles qui portent
atteinte à la concurrence de manière significative qu’on peut considérer comme
“ententes anticoncurrentielles", par exemple, des producteurs s’entendent afin de
contrôler les conditions de vente d’un bien au détriment des consommateurs51.
50
Définition du ministère du Commerce disponible sur le site officiel :
http://www.commerce.gov.tn/Fr/les-ententes_11_112.
51
L’affaire Cartel du « lino » du 19 octobre 2017, dans laquelle 3 grands fabricants de revêtements de sol en PVC ont
été sanctionnés par l’Autorité de la concurrence. (Amende totale de 302 millions d’euros).
17
Parmi les objectifs majeurs dans le cadre macro-économique dans lequel se déroule la
concurrence sur le marché est la réalisation de la libre concurrence, l'équilibre général
du marché et l'efficience économique dans un souci de promouvoir la compétitivité du
pays et d’atteindre un meilleur niveau de vie et un meilleur taux d’emploi.
Cet objectif majeur dépend dans une large mesure du bon fonctionnement des
marchés, c'est-à-dire d’une certaine égalité des divers acteurs et du maintien d' une
pluralité d’opérateurs économiques. C’est pour cela qu'il est évident que le principe de
l’égalité est conçu comme corollaire au principe de la concurrence.
Un autre objectif est aussi d’une grande importance dans ce même cadre
macro-économique, est celui du bien être du consommateur, en effet, on rappelle ce
que Marie Vignal évoque comme expression pour désigner le bien être du
consommateur, « consumer welfare », et ce afin de souligner le fait que la protection
des concurrents performants n’exclut pas la place du consommateur et son bien être
est symptomatique du bien-être du marché, et le bien-être du marché est indispensable
à celui du consommateur.
D’ailleurs, le droit de la concurrence, de sa conception à sa mise en œuvre, est marqué
par le postulat selon lequel son objectif cardinal s’orienterait vers le consommateur et
la prise en compte de ses intérêts.
Le libre jeu de la concurrence doit donc s’effectuer tout en assurant l’allocation
efficace des ressources et la promotion du progrès et de l’efficacité économique, le
bien-être du consommateur en serait toujours recherché en parallèle temps, et une
concurrence effective lui serait comme nécessairement bénéfique dans la mesure où
elle contribue à un meilleur niveau de vie.
En revanche, une protection du consommateur serait nécessaire à cet effet, et elle
dépendra autant de la réglementation que de la concurrence52.
52
Wise Michael, « Droit et politique de la concurrence en France », Revue sur le droit et la politique de la
concurrence, 2005/1 (Vol. 7), p. 7-91. URL :
https://www.cairn.info/revue-sur-le-droit-et-la-politique-de-la-concurrence-2005-1-page-7.htm
18
53
Huveneers Christian, « Les multiples objectifs de la politique de concurrence : un système de N équations à N+1
inconnues ? », Reflets et perspectives de la vie économique, 2008/1 (Tome XLVII), p. 9-37. DOI :
10.3917/rpve.471.0009. URL :
https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique-2008-1-page-9.htm.
54
« Parmi les objectifs généraux du Traité et des objectifs socio-économiques jugés importants que la politique de
concurrence devrait prendre en compte, on cite souvent : La sauvegarde de l’unité du Marché Commun, la promotion
de la compétitivité et de l’emploi et la lutte contre l’inflation dans le contexte actuel de la hausse des prix.»
19
On ajoute également que ce droit cherche à faire prévaloir certains objectifs macro sur
d’autres objectifs or la croissance économique ne fait pas tout, une croissance
économique ne réalise pas forcément le développement économique et social surtout
avec l’existence de problème de dysfonctionnement qui affectent gravement le jeu
concurrentiel tel que le marché informel, la corruption, l’accès privilégié au marchés
public, l’absence de mesures appropriées visant à assurer une gestion saine des
affaires publiques, la fragilité de l’appareil juridico-institutionnel et administratif ainsi
que la mauvaise gouvernance qui sont tous autant des facteurs supplémentaires de la
défaillance de la concurrence.
Ensuite, et dans le cadre de l’objectif de maîtrise de l’inflation, on remarque que le
droit de la concurrence vise deux objectifs difficilement conciliables, d’une part, il
cherche plus de croissance et d’une part il cherche moins d’inflation, c’est dans ce
contexte que la discussion d’un lien entre la politique de concurrence et la maîtrise de
l’inflation est évidente.
Le pouvoir de marché des entreprises opérant dans des marchés non concurrentiels
permettrait à celles-ci de hausser leurs prix, indépendamment des évolutions de la
demande. L’exploitation de positions dominantes et l’existence d’ententes contribuent
aussi à la rigidité des prix à la baisse. Dès lors, une politique de concurrence aiderait à
ralentir la tendance à long terme à la hausse des prix. Dans la mesure où les occasions
d’exercer le pouvoir de marché sont réduites, la capacité de transférer des
accroissements de coûts en accroissement de prix serait réduite.
Il faut d’emblée remarquer que, si on acceptait à la fois l’option de faire de la
croissance et de la création d’emplois un objectif de la politique de concurrence et
l’option consistant à charger l’autorité de concurrence d’une responsabilité en matière
de lutte contre l’inflation, cela exigerait de la politique de concurrence de réaliser ce
que les macroéconomistes ont depuis toujours rêvé de réaliser par des dosages de
politiques macroéconomiques (policy-mix) sophistiqués : une croissance de l’emploi
sans hausse de l’inflation.
L’inévitable existence des difficultés inhérentes à la réalisation simultanée de ces deux
objectifs, la maîtrise de l’inflation et la diminution du chômage.
Parmi les états macroéconomiques situés le long de la courbe de Phillips, il faut
encore exclure les situations qui ne satisfont pas la contrainte de la balance des
21
Les problèmes de mise en œuvre des politiques de la concurrence font que ce droit de
la concurrence soit qualifié de « monument de complexité ». Cette complexité peut
renverser les pratiques attendues d’une autorité de la concurrence par exemple le
Conseil de la concurrence (français), dans un avis rendu en 2008, en est venu à
encourager les producteurs de fruits et légumes à se regrouper et à se concerter afin de
renforcer leur pouvoir de négociation face à la grande distribution. Ce qui fait que ce
droit commence à prendre des allures de ‘‘droit de la non-concurrence’’ marqué par un
manque d’efficience, en effet, le conseil de concurrence se heurte à des difficultés
substantielles pour stimuler une concurrence largement défaillante qui se déroule dans
un cadre de décalage entre la politique, qui tente d’établir et de promouvoir le libre jeu
du marché, et le réalisme économique des structures monopolistiques.
Cette situation s’explique par un ensemble de facteurs qui ont engendré le déficit et
l’affaiblissement des mécanismes concurrentielles :
22
55
Sur la crise économique et ses enjeux dans le contexte de la transition, V., Économie politique de la transition en
Tunisie, colloque international de la faculté des sciences juridiques, économiques et de gestion, Tabarka, 27-28 avril
2016, à paraître ; B.GHERIB, « Economie politique de la révolution tunisienne. Les groupes sociaux face au
capitalisme de copinage », Revue Tiers Monde. 2012/4 n°212, p.19 ; C.VERDIER, O.AUDREY et V.CASTEL,
« révolution tunisienne, enjeux et perspectives économiques », note économique AFDB, 11-3-2011.
56
Les dérives du capitalisme et la crise qu’il a engendrée a eu pour effet le retour des pensées protectionnistes et des
résistances économiques, on voit émerger à juste titre, des dynamiques et des initiatives alternatives. Ces
dynamiques contribuent à ouvrir d’autres formes d’action et de nouveaux espaces.
57
Voir l’Article 4 de la Loi 2015-36, qui précise que « …en vue de faire face à des hausses excessives ou un
effondrement des prix, des mesures temporaires motivées par une situation de crise ou de calamité, par des
circonstances exceptionnelles ou par une situation de marché manifestement anormale dans un secteur déterminé,
peuvent être prises par arrêté du ministre chargé du commerce et dont la durée d'application ne peut excéder six
mois. »
58
«L’Institut tunisien d’études stratégiques (ITES) a révélé en février que le deuxième obstacle majeur à la relance
économique en Tunisie est la concurrence inégale à laquelle sont confrontées les entreprises structurées par leurs
homologues non-formelles.
Selon l’étude présentée par l’ITES, et réalisée par la Banque Mondiale, l’économie parallèle en Tunisie attire 41,5%
de la population active, soit 1 453 620 citoyens dont 87,6% sont des hommes.
Ce secteur informel attire également 53,7% de la majorité des hommes tunisiens, contre 21,5% des femmes actives.
Environ 55% des personnes travaillant dans le secteur parallèle n’ont pas poursuivi leurs études au-delà de l’école
primaire, contre 25% du secteur formel ». Tunisie : L’économie parallèle dévore plus de 25% du PIB
Par IB - 15 juillet 2019 – disponible sur :
http://www.webdo.tn/2019/07/15/tunisie-leconomie-parallele-devore-plus-de-25-du-pib/.
59
ICN, Capacity building and technical assistance. Building credible competition authorities in developing and
transition economies, op. cit., p.39.
23
60
Les entreprises publiques souffrent de problèmes liés à leur gouvernance interne et externe. Pour les subventions
croisées qui masquent l’inefficacité de certaines entreprises publiques, v. par exemple, dans le secteur de l’énergie,
Banque Mondiale (2014), la révolution inachevée. Créer des opportunités, des emplois de qualité et de la richesse
pour tous les Tunisiens, Revue des politiques de développement, 22 Mai 2014. DC : World Bank, p.92.
61
E.Bouslah, « Le désengagement de l’Etat entre le discours et le réel : Le cas tunisien », Annales de l’université des
sciences sociales de Toulouse T XL, 1992, p.61 ; K Ben Massoud, La privatisation des entreprises à participation
publiques, Thèse de doctorat, dactyl, Faculté de Droit et des sciences politiques de Tunis, 2001.
62
On peut lire dans les analyses de « l’économie politique des réformes » que les monopoles correspondent à des
acteurs politiquement puissants défendant le statu quo qui leur permet de préserver leurs rentes et s’opposant à toute
réforme qui risque de bousculer leurs intérêts. Sur la gouvernance des réformes en Tunisie, voir parmi les alternatifs
possibles, le livre blanc, l’économie politique des réformes La mise en place des réformes : Urgences & Méthodes,
L’institut arabe des chefs d’entreprises. Tunisia Economic Forum 2015.
63
P.SALIN., Libéralisme. Edition Odile Jacob. 2000, p.16.
24
64
OCDE
65
Huveneers Christian, « Les multiples objectifs de la politique de concurrence : un système de N équations à N+1
inconnues ? », Reflets et perspectives de la vie économique, 2008/1 (Tome XLVII), p. 9-37. DOI :
25
La politique de concurrence est aussi parfois dirigée vers des objectifs de contrôle des
hausses de prix, a priori, on doit clarifier que la politique de concurrence n’est pas un
substitut au contrôle des prix, en effet, les règles de concurrence se situent dans une
sphère tout à fait différente puisque l’objectif de la politique de concurrence est de
lutter contre le phénomène de pouvoir de marché au niveau microéconomique et porte
sur le niveau des prix et non sur leur variation dans le temps66.
10.3917/rpve.471.0009. URL :
https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique-2008-1-page-9.htm
66
Huveneers Christian, « Les multiples objectifs de la politique de concurrence : un système de N équations à N+1
inconnues ? », Reflets et perspectives de la vie économique, 2008/1 (Tome XLVII), p. 9-37. DOI :
10.3917/rpve.471.0009. URL :
https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique-2008-1-page-9.htm
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Huveneers Christian, « Les multiples objectifs de la politique de concurrence : un système de N équations à N+1
inconnues ? », Reflets et perspectives de la vie économique, 2008/1 (Tome XLVII), p. 9-37. DOI :
10.3917/rpve.471.0009. URL :
https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique-2008-1-page-9.htm