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Royaume du Maroc

Master Juriste
Université sidi Mohammed Ben Abdellah
D’affaires
Faculté des Sciences Juridiques
Module
Économiques et Sociales
Droit de la
concurrence

Présentation de la loi 104.12

Sous l’encadrement du
DR:
Driss Jouidi

Réalisé par :

IMANE BARKI EZZIYATI JALILA

DOHA BAIDDOU SARA AHLAMINE

MUSTAPHA OULIDE EL KHOMSSI


Droit de la concurrence

1
Droit de la concurrence

Sommaire

Introduction

Partie1 : le principe de la liberté des prix et les pratiques des agents


économiques

Chapitre1 : le principe de liberté des prix


Section1 : la libre fixation des prix
Section2 : les apports et limites de la loi 104.12 en matière de liberté des prix

Chapitre2 : les opérations de concentration économiques et les pratiques


restrictives
Section1 : les opérations de concentration économique
Section2 : les pratiques restrictives

Partie 2 : le conseil de la concurrence

Chapitre1 : les attributions et les pouvoirs du conseil


Section1 : le dysfonctionnement de la présente loi n°06-99
Section2 : les nouvelles compétences et nouveaux pouvoirs

Chapitre2 : la saisine élargie du conseil de la concurrence


Section1 : le déverrouillage des mécanismes de saisine
Section2 : les voies de recours

Conclusion

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Droit de la concurrence

ans de nombreux discours, politique ou d’entreprise, la concurrence apparait comme

une donnée et une nécessité, c’est en toute hypothèse une idée actuelle, en vogue. En effet, la
concurrence n’est pas une fin en soi ; elle est plutôt un moyen d’atteindre des objectifs plus
important, à savoir l’efficacité économique et une meilleure allocation des ressources1.

La concurrence peut se définir donc comme la compétition qui se joue sur un même marché
pour atteindre une fin économique déterminée : l’offre de produits ou de services qui satisfont
des besoins identiques ou similaires ou, si l’on préfère la conquête et la conservation d’une
clientèle.

Elle se définit aussi comme la confrontation des plans des producteurs, des travailleurs et des
consommateurs à la recherche respectivement, du plus haut profit, du plus haut salaire et de la
satisfaction la plus élevée2. La concurrence suppose alors que les centres de production et de
consommation sont décentralisés et autonomes.

Le point commun essentiel de toutes ces définitions est la nécessité d’une réglementation.
Ainsi, cette notion de concurrence est aujourd'hui légalement encadrée afin de conduire
l'économie vers ce qui serait son objectif ultime: le bien être des individus.

En effet, le droit de la concurrence regroupe l’ensemble des dispositions législatives et


réglementaires visant à garantir le respect du principe de la liberté du commerce et de

1
« N.KROS, « la libre concurrence n’est pas une fin en soi… », RDLC 2007 /2, P.1. » Cité par SRITI CHAYMAE,
mémoire de fin d’étude sous le thème « le pouvoir de contrôle de la concurrence : étude comparative entre le
droit marocain et le droit européen » encadré par professeur MARGHICH ABDELLAH, page 6
2
ESSRRHINI LAKHDISSI, thèse pour l’obtention du Doctorat en droit privé « les interférences entre le droit de
la concurrence et le droit de distribution à la lumière du droit marocain », encadré par professeur Driss
JOUIDI , page 13

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Droit de la concurrence

l’industrie au sein d’une économie de libre marché, et aussi à organiser la compétition


économique dans les échanges de biens et de services entre les entreprises, et entre les pouvoirs
publics et les pouvoirs économiques3.

Au Maroc, le dispositif légal qui vise à permettre une concurrence saine et à assurer la
protection du consommateur existe depuis la publication de la loi n°06-99 du 5 juin 2000
relative à la liberté des prix et de la concurrence. Celle-ci a déjà rendu caduque la loi 007-08
de 1971 sur le contrôle des prix et les conditions de vente des produits et marchandises

Toutefois, selon cette loi (06-99), le conseil de la concurrence n’était qu’un simple organe
consultatif dénué du pouvoir de décision ou de sanction.

Aujourd’hui, le droit de la concurrence est réglementé par la loi n°104.12 relative à la liberté
des prix et de la concurrence qui contient 111 articles divisés en 10 titres qui sont
successivement :

 Champs d’application ;
 La liberté des prix ;
 Les pratiques anticoncurrentielles ;
 Les opérations de concentration économiques ;
 Les procédures, la décision, et les voies e recours ;
 Les pratiques restrictives de la concurrence ;
 Dispositions particulières relatives aux biens, produits, ou services dont le prix est
réglementé ;
 Enquêtes et sanctions ;
 Dispositions relatives aux biens, produits et services dont les prix sont réglementés et
aux transactions et sanctions administratives relatives aux infractions aux dispositions
du titre VII ;
 Dispositions diverses et transitoires.

Et la loi n°20.13 relative au conseil de la concurrence qui a élargi son champ d’intervention eu
lui attribuant de nouveaux pouvoirs destinés à renforcer son rôle régulateur de la concurrence.

3
Ibid.

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Droit de la concurrence

Désormais, le conseil de la concurrence est investi d’un triple pouvoir : pouvoir décisionnel,
pouvoir d’enquête et pouvoir de sanction.

Ce sont les deux lois qui traduisent la modernisation du droit de la concurrence depuis l’année
2011 qui a marqué la constitutionnalisation du principe de la libre concurrence et de la liberté
d’entreprendre.

A cet effet, la constitution marocaine de 2011 a consacré le principe de la libre concurrence


dans l’alinéa 2 de son article 35 qui dispose que « l’Etat garantit la liberté d’entreprendre et la
libre concurrence… », En habilitant le Conseil de la concurrence, en tant qu’autorité
administrative indépendante, à garantir la transparence et l’équité dans les relations
économiques, à travers l’analyse et la régulation de la concurrence sur les marchés, le contrôle
des pratiques anticoncurrentielle, des pratiques commerciales déloyales et des opérations de
concentration économique et de monopole4.

Cette nécessité d’une réglementation concurrentielle est admise par la quasi-totalité des
juristes, économistes et politiques pour deux raisons majeurs :

 La première est d’ordre théoriques sur un marché donné où règne la concurrence, il


existe par nature une tendance à la concentration croissante des opérateurs et
l’expérience montre que l’absence de normes entraine la constitution d’ententes de
coalitions et de monopoles.
 La seconde est d’ordre pratique ; l’observation révèle que lorsqu’il existe des règles de
concurrence, leur application permet d’éviter des abus incontestables5.

Plusieurs raison sont à l’origine du choix de ce sujet. D’abord, un intérêt théorique nettement
prépondérant, dans la mesure où, sur le plan économique, le pouvoir de contrôle de la
concurrence sert à protéger le marché et le principe de la libre concurrence, ainsi qu’à la
protection des concurrents et des consommateurs. Ensuite, un intérêt pratique dans la mesure

4
HALMAOUI LOUBNA et MAISSAE BOUSAOUF, Revue de Droit Civil, Economique et comparé «Les différentes
menaces à la libre concurrence », Page 53
5
EDDRRHINI LAKHDISSI, thèse pour l’obtention du Doctorat en droit privé « les interférences entre le droit de
la concurrence et le droit de distribution à la lumière du droit marocain », encadré par professeur Driss JUOIDI
i, page 18

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Droit de la concurrence

où les pratiques anticoncurrentielles et les concentrations affectant la concurrence peuvent être


une cause de conflits et de désaccord au sein du marché économique, voire même pousser des
entreprises déjà existantes sur le marché à des difficultés ou à la disparition.

De ce qui précède, une question importante nécessite d’être posée, il s’agit de savoir l’apport
phare de la loi 104-12 en matière de réglementation de la concurrence et la liberté des prix.

Afin de répondre à cette problématique, on va traiter, dans une première partie les principes
relatifs à la liberté des prix tels qu’ils définis par la loi 104-12 ainsi que les pratiques des
agents économiques, alors que la seconde partie sera réservée à l’appréciation du nouveau
rôle accordé au conseil de la concurrence par la loi 104-12

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Droit de la concurrence

Partie 1 : le principe de la liberté des prix et les pratiques


des agents économiques

Le principe de la liberté des prix a été fortement souligné par la loi 06-99, relative à la
liberté de la concurrence dont l'article 2 dispose que : « Les prix des biens, des produits et des
services sont déterminés par le jeu de la libre concurrence sous réserve des dispositions des
articles 3, 4, 5 et 83 ». Toutefois cette loi a réglementé ce principe et a réduit son champ
d'extension par l'entremise de certains articles 3, 83, 51, 54,53 et en outre a comporté une liste
d'une trentaine de biens dont les prix sont réglementés par la loi.

Il est vrai que cette loi a consolidé fortement le principe de la liberté des prix, cependant elle
ne se distingue pas énormément de celle de 1971 afférente à la réglementation des prix qui a
également insisté sur la liberté des prix par le biais de son premier article et en a conjointement
limité la portée en prévoyant certaines mesures et en renfermant une liste d'une centaine de biens
dont les prix sont déterminés par la loi.

Aussi peut-on affirmer que le principe de la liberté des prix a vu ses prémisses dans la loi de
1971 et s'est épanouie avec l'apparition de la loi 06-99 du 5 juin 2000. Ce principe qui stipule
que les prix sont le résultat de la rencontre entre l'offre et la demande et qui insiste sur le fait
que les agents économiques sont libres dans la fixation des prix, vise à préserver les intérêts
des « sujets passifs du marché » en l'occurrence les consommateurs et aspire à réglementer et
améliorer les relations professionnelles entre commerçants.

Le 17 juin 2014, le projet de loi n° 104-12 sur la liberté des prix et de la concurrence a été
adopté par la chambre des représentants.

Comprenant 111 articles, la loi n° 104-12 abrogera les dispositions des articles 1 à 13 et les
dispositions des articles 24 à 103 de la loi n° 06-99 relative à la liberté des prix et de la
concurrence.

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Droit de la concurrence

Le préambule de cette loi indique qu’elle a pour objet de stimuler l’efficience économique,
définir les dispositions régissant la liberté des prix, d’améliorer le bien-être des consommateurs
et d’assurer la transparence et la loyauté dans les relations commerciales.

Quelles sont les dispositions apportées par la loi 104/12 dans le cadre du principe de la liberté
des prix ? Ces dispositions et ses mesures sont-elles aptes à contrecarrer toutes les pratiques
délictueuses portant atteinte négative aux intérêts des consommateurs et des professionnels ?

Pour venir à bout de cette problématique nous allons traiter les points suivants :

Les apports de la loi 104/12 en matière de liberté des prix pour assurer une protection
solide des intérêts des consommateurs.
Les dispositions apportées par la loi 104/12 dans le cadre du principe de la liberté des
prix pour réglementer les relations entre professionnels.

Chapitre 1 : le principe de liberté des prix

Section 1 : la fixation des prix

Paragraphe 1 : la politique des prix au Maroc

La politique des prix au Maroc date de la période du protectorat ou la fixation des prix
s’effectuait dans le cadre du code du commerce, promulgué en 1913. Ce n’est qu’avec
l’adoption de la loi n° 008/71 de 1971, qu’un cadre juridique et administratif suffisamment
étoffé a été mis en place. La réglementation des prix a pu s’appliquer à 172 catégories de
produits et services appartenant à tous les secteurs de l’activité économique.

Plusieurs produits bénéficiaient dans le cadre de leur réglementation du soutien de l’Etat,


notamment le lait et ses dérivées, les produits agro-alimentaires : huiles, sucre, farine, les
intrants tel que les engrais, les cultures sucrières, les produits énergétiques.

La politique des prix a connu depuis 1982 une importante mutation dans ses principes
fondamentaux, le Maroc qui avait abordé la décennie 80 avec des problèmes d’ajustements
majeurs imputables en partie à des facteurs externes défavorables mais aussi à des faiblesses

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Droit de la concurrence

structurelles intensifiées, a procédé à une réforme de sa politique d’état dont notamment une
nette réduction de l’intervention directe de l’Administration dans l’économie.

La libéralisation des prix, celle du commerce extérieur ainsi que la promotion des exportations
étaient parmi ses principales composantes.

Avec la promulgation de la loi 06/99 sur la liberté des prix et la concurrence en 2000 et la
consécration du principe de la liberté des prix, uniquement 15 groupes de produits et services
ont été maintenus réglementés.

Ces produits qui restent réglementés représentent des biens et services qui sont considérés
comme stratégiques ou socialement sensibles et dont les secteurs ne présentent pas assez de
concurrence par les prix.

La liberté des prix est considérée comme le principe de base de l’économie du marché, elle
joue un rôle fondamental dans l’instauration des règles et des mécanismes d’une concurrence
loyale dans le marché. Le prix fixé par le marché est celui résultant de l’équilibre entre l’offre
et la demande ce qui permet une allocation optimale des ressources sur un marché donné.

Paragraphe 2 : la position de la loi 104.12

La libre fixation des prix

Le titre deuxième de la loi 104.12 traite du principe de la liberté des prix et l’érige en règle
générale de formation des prix, et ce par la voie de la libre concurrence a fin d’assurer le bien-
être du consommateur en faisant baisser le coût de la vie.

En effet, le principe de la liberté des prix est consacré par l’article 2 de la loi 104-12. Toutefois,
l’administration peut intervenir pour fixer les prix de certains biens, produits ou services dans
certaines situations.

Les limites relatives à la liberté des prix

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Droit de la concurrence

Le principe de la liberté des prix demeure limité dans le texte de loi par deux exemptions qui
confèrent à l’Etat le droit d’intervenir dans la fixation des prix, et ce pour un certain nombre
de raisons :6

La première se rapporte à des causes structurelles lorsque la concurrence se trouve limitée ou


carrément inexistante, soit en raison d’un monopole dans un secteur tel que celui de l’eau ou
de l’électricité, soit en raison de dispositions réglementaires tels que les prix administrés.

La seconde exception est issue de causes conjoncturelles liées à un événement ou à des


imprévus ou à une situation anormale dans un secteur donné ou dans un segment du marché
telle que l’augmentation excessive des prix sans raison économique valable.

Toutefois, l’intervention de l’Etat demeure entourée de conditions et en premier la demande de


l’avis du Conseil de la Concurrence afin d’assurer la garantie juridique contre tout éventuel
retour injustifié à la réglementation des prix.

Par ailleurs, il est à noter que le prix de certains produits et service est défini par l’arrêté n°
3086.14 du 29 décembre 2014 du Ministre délégué auprès du chef du gouvernement chargé
des affaires générales et de la gouvernance . Il s’agit des produits et services suivants suit :7

La farine nationale de blé tendre


le sucre
Le tabac manufacturé
L’électricité
L’eau potable
L’assainissement liquide
Le gaz butane
Le transport de voyageurs par route
Les produits pharmaceutiques
Les actes et services médicaux dans le secteur médical privé
Les actes pratiqués par les sages-femmes, infirmiers et infirmières du secteur privé

6
Article1 de la loi 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence
7
https://www.mag.gov.ma.php/fr/2014-&11-1016-26/2015-11-10-39.html

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Droit de la concurrence

Les livres scolaires


Les actes des huissiers de justice
Les actes hébraïques
Les actes des notaires
Le transport urbain de personnes par autobus
Le transport par taxis de 1ére et 2ème catégories
Le transport mixte de personnes
Les insertions légales, administratives et judiciaires

En outre, les prix peuvent être contrôlés en cas de circonstances exceptionnelles entraînant une
hausse ou une baisse excessive des prix, pour un secteur déterminé, pour une durée de 6 mois
maximum.8

Section 2 : Apport et limites de la loi en matière de liberté des prix

Paragraphe 1 : L’interdiction des prix abusivement bas

Du fait de leur taille, de leur part de marché ou de leur avance technologique, certaines
entreprises peuvent acquérir une position dominante sur un marché, c’est -à-dire une capacité
à affecter de manière significative la concurrence sur ce marché.

L’exploitation délibérée de cette situation pour restreindre la concurrence est considérée par
les autorités publiques comme un abus de position dominante.

Dans ce cadre, la loi 104.12 interdit l’adoption d’un comportement de prix prédateur. Il s’agit
de fixer un prix abusivement bas largement inférieur aux coûts de production pour forcer un
concurrent à sortir du marché. Une fois cet objectif atteint, la société peut ensuite accroître ses
prix et enregistrer des profits qui font plus que compenser les pertes enregistrées pendant la
période de prédation.

Si, les prix prédateurs sont interdits, force est de constater qu’un prix très élevé est en revanche
légal, à condition qu'il ne constitue pas une tromperie.

8
Article4 de la loi 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence

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Droit de la concurrence

Paragraphe 2 : Les limites de la loi 104.12 en matière de liberté des prix

Malgré les nouveautés apportées par la loi 104-12, des limites subsistent encore. A ce titre, une
présence trop importante de l’administration dans la réglementation des prix peut être observée
: c’est ce qui remet en cause la place centrale du conseil de la concurrence.

A titre d’exemple, l’Exécutif nomme par décret un commissaire du gouvernement au sein du


conseil de la concurrence. De même, concernant la liberté des prix, le conseil n’a qu’un simple
rôle consultatif et surtout un pouvoir inexistant en matière d’homologation des prix.

12
Droit de la concurrence

Chaptre2 : les opérations de concentration économique

Section 1 : les opérations de concentration économique

A première vue, les opérations de concentration doivent être perçues comme un


moyen permettant aux entreprises d'améliorer leur compétitivité en dégageant des
gains d’efficacité économique, qui peuvent se répercuter positivement sur le bien-
être et le pouvoir d’achat des consommateurs par des prix plus bas, une
amélioration de la qualité des produits, ou un élargissement du choix qui leur est
offert. En conséquence, elles devraient « être appréciées de manière positive pour
autant qu’elles correspondent aux exigences d’une concurrence dynamique et
qu’elles soient de nature à augmenter la compétitivité de l’industrie, à améliorer
les conditions de la croissance et à relever le niveau de vie ».9

La concentration économique est définie par l’article 11 de la loi 104-12 comme étant
l’opération juridique résultant généralement :

 Soit d’une entente conclue entre deux ou plusieurs entreprises ou entre des groupes
d’entreprises indépendants par voie de la fusion
 Soit par le jeu du contrôle qu’exercent certains de leurs dirigeants que ce soit par des
prises de participations dans leur Capitale respectif ou achat d’éléments d’actifs.
 Soit par la création d’une entreprise ou d’un groupement commun ou de toute autre
manière, parviennent de contrôler toute ou partie de l’ensemble de ces entreprises et
donc les activités économiques qu’ils existent.

La loi n°104-12 prévoit un système de contrôle des opérations de concentrations économiques,


une opération de concentration est réalisée lorsque deux ou plusieurs entreprises
antérieurement indépendantes fusionnent; lorsqu’une ou plusieurs personnes, détenant déjà le
contrôle d’une entreprise au moins, acquièrent, directement ou indirectement, que ce soit par

9
Mme MAISSAE BOUSAOUF « L’instrumentalisation du marché pertinent en droit marocain de la
concentration » page 569

13
Droit de la concurrence

prise de participation au capital ou achat d’éléments d’actifs, contrat ou tout autre moyen, le
contrôle de l’ensemble ou d’une partie d’une autre entreprise ou de l’ensemble ou de parties de
plusieurs autres entreprises ; ou encore lorsqu’une ou plusieurs entreprises acquièrent,
directement ou indirectement, que ce soit par prise de participation au capital ou achat
d’éléments d’actifs, contrat ou tout autre moyen, le contrôle de l’ensemble ou d’une partie
d’une autre entreprise ou de l’ensemble ou de parties de plusieurs autres entreprises.

A noter que toute opération de concentration doit être notifiée au conseil de la concurrence par
les entreprises concernées, avant sa réalisation.

Les entreprises et les parties concernées doivent notifiée chaque opération de


concentration avant sa réalisation au conseil de la concurrence. Toutefois cette obligation est
subordonnée par la réunion de trois conditions énumérées par l’article 1210 :

 le chiffre d’affaires total mondial, hors taxes, de l’ensemble des entreprises ou groupes
de personnes physiques ou morales parties à la concentration est supérieur au montant
fixé par voie réglementaire ;
 le chiffre d’affaires total, hors taxes, réalisé au Maroc par deux au moins des entreprises
ou groupes de personnes physiques ou morales concernés est supérieur au montant fixé
par voie réglementaire ;
 les entreprises qui sont parties à l’acte, ou qui en sont l’objet, ou qui lui sont
économiquement liées ont réalisé ensemble, durant l’année civile précédente, plus de
40% des ventes, achats ou autres transactions sur un marché national de biens, produits
ou services de même nature ou substituables, ou sur une partie substantielle de celui-ci.

Selon l’article 13 de la loi 104-12, les entreprises concernées par l’opération de


concentration doivent adressées un dossier de notification qui comprend un certain nombre
d’éléments. Ils doivent présentés quatre exemplaires. Lorsque le dossier est incomplet, le
conseil de la concurrence demande que le dossier soit complété et rectifié.
A noter que, le conseil de la concurrence est tenu de délivrer un accusé de réception dès

10
Mme MAISSAE BOUSAOUF « L’instrumentalisation du marché pertinent en droit marocain de la
concentration » page 570

14
Droit de la concurrence

la réception du dossier. Il adresse aussi un exemplaire à l’autorité gouvernementale chargée de


la concurrence.

L’article 13 précise aussi que dès la réception de la notification par le conseil de la


concurrence. Elle doit faire l'objet d'un communiqué publié par le conseil sur son site internet
et dans un journal d'annonces légales. Ce communiqué comporte notamment un certain nombre
d’éléments énumérés par l’article 1015 du décret n° 2-14-652. Le communiqué est publié dans
les cinq jours suivant la date de réception du dossier de
notification par le conseil de la concurrence.11

En outre, l’article 14 de la loi 104-12 prévoit que la réalisation effective d'une opération
de concentration ne peut intervenir qu’après l'accord du conseil de la concurrence.

Section 2 : les pratiques restrictives

Le principe de la liberté des prix vise à la défense du jeu de l’offre et de la demande. Cependant,
certains comportements déloyaux faussent le jeu de la libre concurrence. On qualifie ces
comportements de pratiques anticoncurrentielles dont l’auteur est passible de sanctions pénales
car elles constituent des atteintes à l’intérêt général de la concurrence.

A) La transparence des relations entre professionnels

 L’obligation de facturation :

L’obligation de facturation entre professionnels est générale et concerne toutes les activités de
production, de distribution et de services. Elle vise à assurer la transparence dans les relations
interprofessionnelles et permet notamment de vérifier le respect de l’interdiction de la revente
à perte. La facture constitue un élément de preuve d’une opération commerciale et un document
comptable majeur.12

11
« https://bmavocats.com/droit-de-la-concurrence/ »

12
Cabinet d’avocats / Löw firme « LOI N° 104-12 RELATIVE À LA LIBERTÉ DES PRIX ET DE LA CONCURRENCE :
AMBITIONS ET LIMITES » page 14

15
Droit de la concurrence

La facture mentionne le nom des parties, leur adresse et leur adresse de facturation si elle est
différente, la date de la transaction, la quantité et la dénomination précise ainsi que le prix
unitaire hors TVA. La loi indique expressément l'obligation de faire figurer sur la facture "toute
réduction de prix acquise à la date de la vente (etc.) et directement liée à cette opération" (sous
réserve des dispositions du CGI qui introduisent la faculté, pour les acheteurs résidant dans un
Etat membre et disposant d’un mandat de facturation établi par leur fournisseur français, de ne
pas indiquer sur la facture certaines mentions comme les rabais, ristournes ou acomptes acquis
lors de l’opération, ainsi que le prix hors taxe).13

Il est nécessaire de mettre l’accent sur la durée de la conservation de la


facture qui est prévu par le même article. La loi prévoit dans ce sens que le vendeur et l’acheteur
doivent en conserver chacun un exemplaire de la facture durant une période de cinq ans, à
compter de la date d’établissement de la facture.

 La communication des barèmes :

L’art 59 de la loi 104-12 dispose que tout producteur, prestataire de services , importateur ou
grossiste est tenu de communiquer à tout acheteur de bien ou de produit ou demandeur de
prestation de service pour une activité professionnelle qui en fait la demande, son barème de
prix et ses conditions de vente.

La communication des barèmes de prix est une obligation qui permet à tout professionnel
d'opérer son choix lors d'une opération d'achat tout en étant bien informé. Tout vendeur se voit
dans l'obligation de communiquer à son acheteur commerçant la liste des produits mis en vente
les garanties et réductions accordées ainsi que toutes les modalités permettant de déterminer
avec précision le prix.

 La communication des conditions générales :

Les conditions générales visées doivent comprendre les modalités de règlement


que le fournisseur de produit ou le prestataire de services propose à ses clients tels que les

13
HAFSA ACHOUR « REGARDS SUR L’AFFRANCHISSEMENT DE LA SANCTION EN DROIT DE LA CONCURRENCE »
page340

16
Droit de la concurrence

délais de paiement, les garanties de paiement, le montant de l’escompte en cas de paiement


anticipé.

L'exécution de l'obligation de transmettre les conditions générales n'est pas liée à une forme spécifique.

Cela peut être fait de n'importe quelle manière qui convient à l’objectif de la profession.14

B) Les pratiques anticoncurrentielles

Considérés comme des pratiques anticoncurrentielles, les ententes, l’abus de position


dominante et les prix abusivement bas sont prohibés par la loi 104-12.

 L’entente

L’articla 6 de la loi 104-12 interdit « les actions concertées, accords, ententes ou coalitions
expresses ou tacites ». Les différentes expressions utilisées par cet article traduisent des degrés
dans la formalisation de l’entente. Toutefois, ces distinctions n’emportent aucune conséquence
du point de vue du régime juridique demeure le même.

Cet article interdit les ententes « lorsqu’elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet
d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur le marché… » .

S’il est vrai que la majeure partie des ententes ont à la fois pour objet et pour effet de nuire à
la concurrence, on peut remarquer que, selon l’article précité, ce cumul n’est pas nécessaire
pour que la pratique en cause revêtisse le caractère illicite. L’intention anticoncurrentielle, en
l’occurrence l’objet, suffit à elle seule à conférer ce caractère même en l’absence d’effet
attentatoire à la concurrence et, de la même manière, un effet anticoncurrentiel est réprimé
même s’il n’a pas été recherché par les autres de l’entente.15

14
« www.memoireonline.com/07/08/1409/le-principe-de-la-liberte-des-prix »

15
« https://medias24.com/2018/05/21/loi-sur-la-concurrence-ce-qui-est-permis-ce-qui-est-interdit/ »

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Droit de la concurrence

Sans établir une nomenclature exhaustive des actions restrictives de la concurrence, l’article 6
se contente d’en énumérer une liste indicative. Ledit article énonce qu’il s’agit de celle qui
tendent :

*à limiter l’accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d’autres entreprises ;

*à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement
leur hausse ou leur baisse ;

*à limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements ou le progrès


techniques ;

*à partir les marchés ou les sources d’approvisionnement.

 L’abus de domination économique

L’abus de dénomination économique est interdit sous ces deux formes, l’exploitation abusive
d’une position dominante sur le marché d’une part, et d’autre part, l’exploitation abusive d’une
situation de dépendance économique dans laquelle se trouve un client ou un fournisseur ne
disposant d’aucune autre alternative équivalente.

L’abus de domination peut notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en


conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales
établies, imposer directement ou indirectement un caractère minimal au prix de revente d’un
produit ou d’un bien etc.16

 Prix abusivement bas

L’article 8 de la loi 104-12 prohibe « les offres de prix abusivement bas par rapport aux couts
de production, de transformation et de commercialisation, dès lors que ces offres ou pratiques
ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d’éliminer un marché, ou d’empêcher d’accéder à
un marché, une entreprise ou l’un de ses produits ».

16
« www.memoireonline.com/07/08/1409/le-principe-de-la-liberte-des-prix »

18
Droit de la concurrence

Cette pratique était déjà interdite par la loi 06-99 qui la considérait comme une forme d’abus
de position dominante. La nouvelle loi, quant à elle, traite des prix abusivement bas comme
pratique anticoncurrentielle à part entière. Elle se trouve de ce fait interdite sans qu’il soit
nécessaire de prouver la position dominante de son auteur.

19
Droit de la concurrence

Partie2 : le conseil de la concurrence

Conformément aux dispositions de l’article 166 de la Constitution, le Conseil de la


Concurrence, est une institution indépendante chargée, dans le cadre de l’organisation d’une
concurrence libre et loyale, d’assurer la transparence et l’équité dans les relations économiques,
notamment à travers l’analyse et la régulation de la concurrence sur les marchés, le contrôle
des pratiques anticoncurrentielles, des pratiques commerciales déloyales et des opérations de
concentration économique et de monopole.17

En effet le rôle du conseil de la concurrence était insuffisant et très restreint dans la mesure où
il ne dépassait pas le domaine des consultations et des recommandations. Cependant,
l’adoption, par le parlement, à la fois, de la nouvelle loi 104-12 relative à la liberté des prix et
de la concurrence et de la loi n˚20-13 instituant le conseil de la concurrence a renforcé ses
attributions (1) et lui a permis, de jurer, de se hisser (2) au niveau d’une institution
constitutionnelle disposant de pouvoirs très étendus18.

Chapitre1 : Les attributions et les pouvoirs du conseil

Le conseil de la concurrence (CC), au Maroc, est une institution constitutionnelle indépendante


dotée de la personnalité juridique, de l’autonomie financière et investie de larges pouvoirs de
décision, d’enquête et de sanction.

En effet, ces dernières prérogatives ne lui sont pas reconnues qu’après l’entrée en vigueur, en
19
2014, des lois 104-12 et 20-1320 relatives, successivement, à la liberté des prix et de la

17
https://conseil-concurrence.ma/cc/le-conseil/mission-et-attributions/
18
https://www.village-justice.com/articles/lutte-contre-les-pratiques-anticoncurrentielles-maroc,29730.html
19 La loi n˚ 104-12, portée par le Dahir n˚ 1-14-116 du 30 juin 2014, publiée au Bulletin Officiel n˚ 6280 du 7 Août 2014.
20 La loi n˚ 20-13, portée par le Dahir n˚ 1-14-117 du 30 juin 2014, relative au conseil de la concurrence.

20
Droit de la concurrence

concurrence et au conseil de la concurrence (CC) sachant que cette institution était déjà prévue
par la loi 06-99 21relative à la liberté des prix et de la concurrence, remplacée.

En effet, l’objectif du conseil de la concurrence depuis son instauration était de veiller à la


bonne application de la loi sur la liberté des prix et de la concurrence, de lutter contre des
pratiques anticoncurrentielles et de garantir une concurrence loyale, transparente et bénéfique
aux consommateurs.

Par contre, les moyens et les outils dont disposait le conseil, sous l’égide de la loi 06-99,
précitée, n’étaient pas de la même importance que ceux dont dispose aujourd’hui, son rôle été
quasiment passif(1). Cependant, l’adoption des lois 104-12 et 20-13 relatives, respectivement,
à la liberté des prix et de la concurrence et au conseil de la concurrence viennent renforcer ce
rôle en élargissant les pouvoirs et les prérogatives de cette institution (2).

Section1 : Le dysfonctionnement de la précédente loi n˚06-99

a- Pouvoirs limités

Le rôle du conseil de la concurrence dans la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles en


application des dispositions de la précédente loi n˚06-99, était insuffisant et très restreint dans
la mesure où il ne dépassait pas le domaine des consultations et des recommandations.

En effet, l’article 14 de la loi 06-99 disposait : « Il est créé un Conseil de la concurrence aux
attributions consultatives aux fins d’avis, de conseils ou de recommandations ».

Il ressort de cette disposition que le conseil n’avait aucun pouvoir décisionnel ni de sanction.
Il ne bénéficiait également pas de prérogatives pour mener des enquêtes nécessaires pour bien
instruire des affaires en cause, son rôle était limité à émettre des avis et des recommandations,
il était démuni de tous pouvoirs décisionnels.

D’ailleurs, l’article 25 de la loi 06-99, susvisée, dispose : « Le Conseil de la concurrence


examine si les pratiques dont il est saisi constituent des violations aux dispositions des articles

21Laloi n˚ 06-99 est la première loi, au Maroc, sur la liberté des prix et de la concurrence. Elle a été apportée par le
Dahir n˚ 1-00-25 du 5 juin 2000, publiée au Bulletin Officiel de 6 juillet 2000.

21
Droit de la concurrence

6 et 7 ci-dessus ou si ces pratiques peuvent être justifiées par l’application de l’article 8 ci-
dessus. Il communique son avis au Premier ministre ou aux organismes dont émane la demande
d’avis, et recommande, le cas échéant, les mesures, conditions ou injonctions prévues par la
présente section ».

Le Conseil de la concurrence n’était par conséquent qu’un simple organe consultatif, alors que
le chef du Gouvernement disposait lui de larges pouvoirs. Il pouvait autoriser des opérations
de concentration susceptibles d’entraver le libre jeu de la concurrence ; saisir le Procureur du
Roi, afin que ce dernier, le cas échéant, puisse diligenter des poursuites dans le cas d’ententes
anticoncurrentielles entre opérateurs du marché ou dans des hypothèses d’abus de position
dominante22.

Ainsi, une des particularités du droit marocain de la concurrence, sous l’égide de l’ancienne
loi, est le clivage entre deux autorités de la concurrence : le Premier ministre, qui a un pouvoir
décisionnel, et le conseil de la concurrence qui a un pouvoir consultatif23

b- Une institution dépourvue de ses organes de délibération

Toutefois, dans le cadre de l’exercice de ses compétences consultatives, le Conseil de la


Concurrence a reçu le 19 mars 2013 une demande d’avis par l’Organisation Démocratique
du Travail (ODT), sur la situation du marché des médicaments et plus précisément sur leurs
prix qui auraient été plus élevés par rapport à ceux ayant cours dans un certain nombre de pays
voisins du Maroc.24

Cependant, le Conseil de la Concurrence, sous l’égide de l’ancienne loi n° 06.99 sur la liberté
des prix et de la concurrence s’est trouvé dépourvu de ses organes de délibération à
compter du mois d’octobre 2013 et ne pouvait pas, par conséquent, se prononcer sur la
présente demande d’avis. Il fallait attendre jusque l’activation du Conseil de la Concurrence
en novembre 2018 avec la nomination de son nouveau Président et son Secrétaire Générale par

22
https://www.usinenouvelle.com/article/maroc-ce-qu-il-faut-savoir-de-la-reforme-du-droit-de-la-
concurrence-selon-cms-bureau-francis-lefebvre.N325325
23
RDCEC, HALMAOU LOUBNA : Doctorante à l’UM5 Rabat : Les différentes menaces à la libre concurrence, Vol
1 no 1 2020. Page : 3.
24 Avis Concurrence-Num -A.4.20-FR-du-15-01-21 du conseil de la concurrence. Page : 20.

22
Droit de la concurrence

Sa Majesté le Roi, et après l’installation des nouveaux membres, le Conseil s’est attelé à
examiner et donner une suite aux dossiers hérités de l’ancienne instance.

Après un travail de sensibilisation des opérateurs au droit de la concurrence, le Conseil de la


concurrence s’est vu doter de nouveaux pouvoirs, à l'instar de ceux reconnus aux autorités
nationales de concurrence des Etats membres de l’Union européenne. Surtout que, le Maroc
bénéficie déjà du statut avancé auprès de l’Union européenne et s’est engagé dans un processus
de convergence réglementaire notamment en matière de droit de la concurrence.

Section2 : les nouvelles compétences et nouveaux pouvoirs

Conscient du rôle très limité du conseil de la concurrence dans la lutte contre des pratiques
anticoncurrentielles, le législateur marocain a procédé, en 2014, à l’adoption des lois 104-12
relative à la liberté des prix et de la concurrence et 20-13 relative au conseil de la concurrence
afin de raviver celui-ci et lui permettre de fonctionner compte tenu des besoins du marché
marocain en mutation perpétuelle. De ce fait, il est intéressant de revenir sur les principaux
apports de la réforme du droit de la concurrence au Maroc.

Après la réforme de nouveaux pouvoirs ont été conférés au Conseil de la concurrence, qui sont
au nombre de trois pouvoirs : pouvoir décisionnel, pouvoir de sanction et pouvoir
d’enquête.

a- Pouvoir décisionnel et pouvoir de sanction

Le conseil dispose dorénavant d’un véritable pouvoir décisionnel en matière de lutte contre les
pratiques anticoncurrentielles et de contrôle des opérations de concentration économique, telles
que sont définies dans la loi relative à la liberté des prix et de la concurrence.25 A cet égard,
toutes les décisions qui étaient reconnues au premier ministre par la loi 06-09 ont été transférées
au conseil de la concurrence. Cependant, le changement le plus significatif concerne le pouvoir
du conseil d’infliger aux entreprises une sanction pécuniaire.26

25
https://conseil-concurrence.ma/cc/le-conseil/mission-et-attributions/
26
EL MERGHADI Mohamed, « la régulation de la concurrence au Maroc : évolution du cadre législatif et
réglementaire ». Page : 7.

23
Droit de la concurrence

Il est, également, appelé à donner son avis sur les demandes de consultation, telles que prévues
par la loi 20-13 et par la loi 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence, et à publier
des études sur le climat général de la concurrence sur les plans sectoriel et national.

Le conseil peut être saisi, pour toutes les pratiques anticoncurrentielles, par les entreprises ou,
pour toute affaire qui concerne les intérêts dont ils ont la charge, par les organismes mentionnés
au dernier alinéa de l’article 5 de la loi 20-13.

En effet, l’article 2-al.1 de la loi 20-13 dispose : « le conseil a un pouvoir décision en matière
de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles et de contrôle des opérations de
concentration économique telles que définies dans la loi relative à la liberté des prix et de la
concurrence ».

Dans ce contexte, par sa décision n°134/D/2021 du 06 décembre 2021, le Conseil de la


concurrence s’est saisi d’office et a ouvert une instruction concernant la réalisation par la
société « SIKA AG » en 2019 d’une opération de concentration économique sans notification
préalable au Conseil de la Concurrence, en infraction des articles 12 et 14 de la loi 104-12 27.
Par conséquent, réuni en formation plénière le Jeudi 28 avril 2022, le Conseil de la concurrence
a décidé, à l’unanimité, d’infliger à la société Skia AG une sanction pécuniaire d’un montant
de 11.670.215 dirhams conformément à l’article 19 de la loi 104-12. La société Skia AG a
accepté le paiement de cette sanction pécuniaire qui sera versée au budget de l’Etat ».

Cette nouvelle décision de l’entité ayant un pouvoir de sanction laisse légitimement penser que
le temps de l’inobservation des règles élémentaires du droit de la concurrence sans
conséquences est révolu.

a- Pouvoir d’enquête

Outre le pouvoir d’instruire, le Conseil de la concurrence peut mener des enquêtes concernant
les pratiques anticoncurrentielles et le contrôle des opérations de concentration économique.

27
https://www.challenge.ma/le-conseil-de-la-concurrence-inflige-une-amende-de-plus-de-11-millions-de-dh-a-
la-societe-sika-ag-237996/

24
Droit de la concurrence

Le conseil dispose désormais d’un corps de rapporteurs et d’enquêteurs habilités à procéder à


toutes les investigations nécessaires afin d’instruire les affaires dont il est saisi.

Ainsi, Par sa lettre n°3664/18 du 06 décembre 2018 enregistrée au Secrétariat général du


Conseil sous le numéro 1/S/18, le Ministre délégué auprès du Chef du Gouvernement chargé
des Affaires Générales et de la Gouvernance28 a demandé l’Avis du Conseil de la Concurrence
concernant « l’introduction, à titre provisoire, des prix des carburants dans la liste des produits
et services dont les prix sont réglementés prévue par l’article 2 de la loi 104.12 sur la liberté
des prix et de concurrence ».

Par contre, la réponse du conseil de la concurrence sur la présente demande d’Avis s’inscrit
dans le cadre des compétences consultatives et non contentieuses du Conseil 29:

-Le Conseil ne se prononcera pas sur le volet comportemental des opérateurs du marché des
carburants ou qualifier leurs pratiques commerciales au regard du droit de la concurrence. A
ce sujet, il y a lieu de signaler qu’une instruction a été déjà ouverte par le Conseil de la
Concurrence et qui concerne la conformité avec le droit de la concurrence de certaines pratiques
commerciales des opérateurs du marché ;

- Le Conseil ne peut émettre une opinion sur ce que pourrait être un niveau optimal des prix ou
des marges. Cette compétence relève du plein pouvoir d’appréciation du Gouvernement.
L’appréciation du Conseil de la Concurrence, en tant qu’autorité de régulation et non de
réglementation des prix, portera sur la légalité, l’opportunité et la proportionnalité d’une telle
mesure au regard des éléments requis par l’article 4 de la loi 104.12 sur la liberté des prix et de
la concurrence ;

28
Avis du Conseil de la Concurrence relatif au projet de décision du Gouvernement concernant le
plafonnement des marges bénéficiaires des carburants liquides. Enregistré sous le numéro : 1/S/18.
29
L’avis du Conseil de la Concurrence relatif au projet de décision du Gouvernement concernant le
plafonnement des marges bénéficiaires des carburants liquides .A/1/19. Page : 9.

25
Droit de la concurrence

Chapitre2 : la saisine élargie du conseil de la concurrence

D’après les termes de l’article 166 de la constitution : le conseil de la concurrence est une
institution indépendante chargée ; dans le cadre de l’organisation d’une concurrence libre et
loyale, d’assurer la transparence et l’équité dans les relations économiques, celui-ci est doté
d’un pouvoir décisionnel pour lutter contre les pratiques anticoncurrentielles et de contrôler les
opérations de concentration économique qui sont définies aux articles 6,7, 8, et 11 de la loi
104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence.

Ce chapitre va être consacré pour analyser le déverrouillage des mécanismes de saisine


section1 puis les vois de recours section2

Section1 : déverrouillage des mécanismes de saisine

La saisine constitue le premier acte de déclenchement de la compétence du conseil. Il est


constaté à la lecture de la loi 104-12 que le législateur a déverrouillé le champ de saisine du
conseil de la concurrence ce qui a élargie sa capacité d’action.

1 : multiplicité d’acteurs pouvant saisir le conseil

Le conseil peut être saisi par ;

 Toute personne physique


 une entreprise qui estime victime de l’une des pratiques mentionnées aux articles 6-7-
8 de la loi 104-12, peut saisir le conseil de la concurrence, il peut également être saisi
par l’administration de
 Toutes les pratiques mentionnées aux articles 6, 7 ; 8 de la loi n°104- 12
 Des faits susceptibles de constituer une pratique anticoncurrentielle
 Des manquements aux engagements pris en application de l’article 18 de ladite loi,
le conseil de la concurrence peut être consulté également par

26
Droit de la concurrence

 Les commissions permanentes du parlement ; selon l’article 5 de la loi 20-13 le conseil


peut être consulté par les commissions permanantes du parlement sur les propositions
de la loi ainsi que sur toute question concernant la concurrence.
 Le gouvernement : le conseil peut donner son avis sur toute question relative à la
concurrence à la demande du gouvernement.30

Le conseil de la concurrence dit être obligatoirement consulté par le gouvernement sur tout
projet de texte législatif ou réglementaire instituant un régime nouveau ou modifiant un régime
en vigueur ayant directement pour effet.

 De soumettre l’exercice d’une profession ou l’accès à un marché à des restrictions


quantitatives
 D’établir des monopoles ou d’autres droits exclusifs ou spéciaux sur le territoire du
Maroc ou dans une partie substantielle de celui-ci
 D’imposer des pratiques uniformes en matière de prix ou de conditions de vente
 D’octroyer les aides de l’Etat ou des collectivités territoriales
Les chambres d’agriculteur
Les chambres d’artisanat
Les chambres des pèches maritimes
Les organisations syndicales ou professionnelles
Les instances de régulation sectorielle, le conseil recueille l’avis des instances de
régulation sectorielle concernées sur les questions de concurrence relatives aux
secteurs d’activité dont elles ont la charge dans un délai qui fixe, sans que ce délai soit
inférieur à trente jours , le conseil peut faire appel à leurs compétences et expertises
pour les besoins de l’enquête ou de l’instruction
Les associations de consommateurs reconnues d’utilité publique, dans la limite des
intérêts dont ils ont la charge
Par les juridictions, selon l’article 6, le conseil peut être consulté par les juridictions
sur les pratiques anticoncurrentielles définies aux articles 6-7-8 de la loi 104-12,
toutefois il ne peut donner un avis qu’après une procédure contradictoire , mais si le
conseil dispose d’information déjà recueillies au cou d’une procédure antérieure , il

30
WALIDE BOUZIDE « le conseil de la concurrence au Maroc » 2016/2017

27
Droit de la concurrence

peut émettre son avis sans avoir à mettre en ouvre la procédure prévue par la loi n° 20-
1331

2 : la procédure devant le conseil de la concurrence

Le conseil de la concurrence ne peut être saisi ou se saisir d’office de faits remontant


à plus de 5ans s’il n’a été fait au cours de cette période aucun acte tendant à leur
recherche, leur constatation ou leur sanction.
Le conseil de la concurrence examine si les pratiques dont il est saisi sont prohibes ou
non par la présente loi.32
Le conseil de la concurrence peut dans un délai de deux mois se sa saisine déclarer, par
une décision motivée, la saisine irrecevable pour :
Défaut d’intérêt ou de qualité à agir de l’auteur de saisine
Si les faits sont prescrits au sens de l’article 23 de la n°104-12
S’il estime que les faits invoqués n’entrent pas dans le champ de sa compétence ou ne
sont pas appuyés d’éléments suffisamment probants.
Le conseil peut déclarer par décision motivée, après que l’auteur de la saisine ait été
mis en mesure de consulter le dossier et de faire valoir ses observations, qu’il n’y pas
lieu de poursuivre la procédure33
La décision du conseil est transmise à l’auteur de la saisine et aux personnes dont les
agissements ont été examinés au regard des articles 6, 7,8, de la loi sur la liberté des
prix et de la concurrence.
Pour l’application de ses articles, le conseil peut sur proposition du apporteur
général, se saisir d’office de toutes les pratiques susceptibles d’affecter le libre jeu de
la concurrence , il peut également, sur proposition du rapporteur général, se saisir
d’office des manquements aux engagements pris e application des dispositions de
l’article 18 de la loi 104-12 et des pratiques mentionnées à l’article 19 de al loi 20-13

31
Conseil de la concurrence, quatorzième rapport d’activité, année 2000
32
DRISS ALAMI MA CHICHI « concurrence, droits et obligations des entreprises au Maroc » édition2004
33
‘ La réactivité du conseil de la concurrence introduit une donne nouvelle sur le marché marocain ‘ accessible
via https://www-medias24/2019/11/21nhesitez-pas-a_saisir-le-conseil-de-la-concurrence

28
Droit de la concurrence

Le rapporteur général désigne un rapporteur pour l’instruction de chaque affaire le


président du conseil peut demander a l’administration de procéder a toute enquête qu’il
juge utile (article28) expertise nécessitant des compétences techniques particulières.
La procédure de l’enquête prévoit certaines mesures qui visent à préserver les droits
de personnes physiques ou morales visées celles- ci ont ainsi le droit d’être informées
des résultats préliminaires et d’y répondre avant l’adoption finale du verdict.
L’instruction et la procédure devant le conseil sont contradictoires sous réserves des
dispositions particulières (article 29).

Section2 : les vois de recours

On désigne par vois de recours l’ensemble des procédures destinées à permettre un


nouvel examen de la cause. Soit que la procédure ait été irrégulièrement suivie, soit
que le juge n’ait pas tenu compte d’un élément de fait présenté par la partie, soit que
le jugement n’ait pas été motivé ou ait été insuffisamment motivé, soit qu’il contienne
une erreur de droit. Le recours est porté devant une juridiction hiérarchiquement
supérieur à celle qui rendu la décision critiquée. Si la réformation est fondée sur un
moyen de droit et que le jugement de première instance est insusceptible d’appel ou
encore, si la violation de la loi est un reproche adressé à l’arrêt d’une cour d’appel. La
compétence pour sanctionner le jugement ou l’arrêt, appartient alors à la cour de
cassation.34
Aux termes de l’article 44 de la loi 104 -12, les recours contre les décisions prises
par le conseil de la concurrence et celles prises par l’administration dans un délai
de 30 jours à compter de la date de notification de la décision devant la chambre
administrative de la cour de cassation en application de l’article 18, les recours
contre les autres décisions du conseil de la concurrence sont portes devant le cour
d’appel de rabat.

34
Voie de recours, accessible via https://www.dictionnaire-juridique.com/dédinition/voie-de-recours.php
consulté 2/5/2022

29
Droit de la concurrence

Les décisions prises par le président du conseil de la concurrence en application de


l’article 31 ne peuvent faire l’objet de recours qu’en même temps que la décision sue
le fond.
Le recours doit être formé par les parties en causes ou les commissaires du
gouvernement
Le recours est formé au conseil de la concurrence il en est délivré un récépissé.une
copie du requête portant le timbre du conseil tient lieu de récépissé le dépôt de la
requête est constaté sur un registre spécial (article 47).
La requête est transmise dans les 10 jours à compter du dépôt du recours au greffe de
la cour d’appel cette dernière adresse une copié de la requête aux parties et ou
commissaires du gouvernement dans les 10 jours qui suivent la réception du dossier.
La cour d’appel fixe la date des débats et les délais dans lesquels les parties doivent
communiquer leurs observations écrites, le greffe convoque les parties à l’audience
prévue.

Si le recours porte sur les mesures conservatoires la cours dispose 30jours pour
statuer, les décisions sont rendues publiquement.
Le recours n’est pas suspensif toutefois, la cour d’appel peut ordonner le sursis à
exécution, si les mesures conservatoires et les décisions émises par le conseil de la
concurrence sont susceptibles d’entrainer des conséquences irréparables pour les
entreprises concernées (article53).
Elle annule ou infirme la décision évoqué sans renvoi sauf disposition contraire.
Le ministère public peut rendre communication des affaires dans lesquelles il estime
devoir intervenir (aticle52).

30
Droit de la concurrence

Conclusion

La concurrence pousse les personnes, les entreprises et les marchés à utiliser


leurs ressources de façon optimale et à sortir des sentiers battus pour élaborer de
nouvelles façons de faire des affaires et d’attirer des clients. En plus d’augmenter la
productivité, elle permet d’améliorer notre niveau de vie.
A cet égard, le droit de la concurrence a essayé depuis toujours de garantir une
concurrence lire et loyale et à protéger le principe de la liberté de commerce et de
l’industrie en interdisant les comportements menaçant la concurrence, mais pour
encadrer la concurrence et pour la favoriser, le droit de la concurrence a justifié
quelques agissements qui peuvent contribuer au progrès économiques, toutefois, leur
justification est soumises à un certain nombre de conditions, le cas échéant elles seront
soumises aux dispositions de la loi relative à la protection de la concurrence et tout
règlement visant la lutte contre ces pratiques et aux mesures de protection adoptées par
les autorités de la concurrence

31
Droit de la concurrence

Bibliographie

Ouvrages

EL MERGHADI Mohamed, « la régulation de la concurrence au Maroc :


évolution du cadre législatif et réglementaire ».
DRISS ALAMI MA CHICHI « concurrence, droits et obligations des
entreprises au Maroc » édition2004
RDCEC, HALMAOU LOUBNA : Doctorante à l’UM5 Rabat : Les différentes
menaces à la libre concurrence, Vol 1 no 1 2020.

Thèses

EDDRRHINI LAKHDISSI, thèse pour l’obtention du Doctorat en droit


privé « les interférences entre le droit de la concurrence et le droit de distribution
à la lumière du droit marocain », encadré par professeur Driss JUOIDI .

Rapports

Conseil de la concurrence, quatorzième rapport d’activité, année 2000


Cabinet d’avocats / Löw firme « LOI N° 104-12 RELATIVE À LA LIBERTÉ
DES PRIX ET DE LA CONCURRENCE : AMBITIONS ET LIMITES »
Avis du Conseil de la Concurrence relatif au projet de décision du
Gouvernement concernant le plafonnement des marges bénéficiaires des
carburants liquides. Enregistré sous le numéro : 1/S/18.
L’avis du Conseil de la Concurrence relatif au projet de décision du
Gouvernement concernant le plafonnement des marges bénéficiaires des
carburants liquides .A/1/19.
Avis Concurrence-Num -A.4.20-FR-du-15-01-21 du conseil de la concurrence.

32
Droit de la concurrence

HAFSA ACHOUR « REGARDS SUR L’AFFRANCHISSEMENT DE LA


SANCTION EN DROIT DE LA CONCURRENCE »
Mme MAISSAE BOUSAOUF « L’instrumentalisation du marché pertinent en
droit marocain de la concentration »

Textes de Lois

La loi 104-12 relative à la liberté des prix et de la concurrence du 30 juin 2014


La loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence du 6juiellet 2000
La loi 20-13 relative au conseil de la concurrence.

Articles web

https://www-medias24/2019/11/21nhesitez-pas-a_saisir-le-conseil-de-la-
concurrence
https://www.dictionnaire-juridique.com/dédinition/voie-de-recours.php
https://www.challenge.ma/le-conseil-de-la-concurrence-inflige-une-amende-
de-plus-de-11-millions-de-dh-a-la-societe-sika-ag-237996/
https://conseil-concurrence.ma/cc/le-conseil/mission-et-attributions/
https://www.usinenouvelle.com/article/maroc-ce-qu-il-faut-savoir-de-la-
reforme-du-droit-de-la-concurrence-selon-cms-bureau-francis-
lefebvre.N325325
www.memoireonline.com/07/08/1409/le-principe-de-la-liberte-des-prix
https://conseil-concurrence.ma/cc/le-conseil/mission-et-attributions/
www.memoireonline.com/07/08/1409/le-principe-de-la-liberte-des-prix
https://medias24.com/2018/05/21/loi-sur-la-concurrence-ce-qui-est-permis-
ce-qui-est-interdit/
https://www.village-justice.com/articles/lutte-contre-les-pratiques-
anticoncurrentielles-maroc,29730.html
https://www.mag.gov.ma.php/fr/2014-&11-1016-26/2015-11-10-39.html

33

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