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Université Cadi Ayyad ‫جامعة القاض عياض‬

Faculté des sciences ‫كلية العلوم القانونية‬


Juridiques, économiques ‫و االقتصادية و االجتماعية‬
Et sociales
Marrakech-Maroc ‫ المغرب‬-‫مراكش‬

Mémoire de fin d’études présenté pour l’obtention du diplôme de Master


-Département de droit privé-
« Droit des Affaires et de l’Entreprise (D.A.E)
Sous le thème :

Les Ententes Illicites


Réalisé par : Sous la direction du professeur :
AFANDI Hajar Dr. NAKHLI Mohamed.

Membres de jury :

Dr. NAKHLI Mohamed Président F.S.J.E.S Marrakech

Dr. TALBI Anas Suffragant F.S.J.E.S Marrakech

Dr. DOUGHANI Yassine Suffragant F.S.J.E.S Marrakech

Dr. EL MESKINI Youssef Suffragant F.S.J.E.S Marrakech

Année universitaire : 2021-2022.

1
« Toute société, pour se maintenir et vivre, a besoin
absolument de respecter quelqu’un et quelque chose. »
Fiodor Dostoïevski.

2
A Mes chers Parents …

3
Remerciement :

La réalisation de ce Mémoire, a été possible grâce au concours de


plusieurs personnes à qui je voudrai témoigner toutes mes reconnaissances.

Je voudrai tout d’abord adresser toute ma gratitude à MR NAKHLI


Mohamed, encadrant de ce projet, pour sa patience, sa disponibilité et
surtout ses judicieux conseils, qui ont contribué à alimenter et enrichir ma
réflexion.

Je désire de même exprimer ma reconnaissance envers mes parents, amis


et collègues qui m’ont apporté leur support moral et intellectuel tout au long
de ma démarche.

4
RESUME

Le droit des ententes pose plusieurs problèmes dans le monde de la


concurrence et inquiète les autorités en la matière, et ce dans le cas où les
entreprises décident de conclure entre eux des accords pour réaliser leurs intérêts
sans prendre en considération les règles principales de la libre concurrence et
l’ordre public économique. On parle ici de l’entente illicite.

Cette étude a pour objectif d’analyser le cadre juridique de ces ententes au


Maroc, le problème de prouver l’existence d’un accord anticoncurrentiel entre
des entreprises, ainsi que les mesures adoptées pour lutter contre ces ententes
illicites.

5
SOMMAIRE

Première partie : L’encadrement juridique des ententes


anticoncurrentielles.

Chapitre 1 : La typologie des ententes illicites

Section 1 : Les risques portés par les pratiques anticoncurrentielles.

§1 : Impact des ententes anticoncurrentielles sur la libre concurrence

§2 : Impact des ententes anticoncurrentielles sur l’ordre public économique.

Section 2 : Notion et manifestations de l’entente illicite.

§1 : La définition de l’entente illicite

§2 : Les manifestations de l’entente

A- Les formes des ententes illicites.


B- Les types des ententes illicites.

Chapitre 2 : Le cadre légal des ententes anticoncurrentielles

Section 1 : Le Cadre légal des ententes illicites au niveau national

§1 : Philosophie de la loi de concurrence dans le cadre des ententes illicites

A- Généralités des pratiques anticoncurrentiels


B- Les ententes en droit marocain

§2 : Le conseil de concurrence

A- La composition et les attributions du conseil


B- Le volet procédural du conseil

Section 2 : Le Cadre légal des ententes illicites au niveau international.

§1 : La politique internationale dans le cadre des ententes anticoncurrentielles.

6
§2 : L’intérêt d’un accord-cadre sur les mesures anticoncurrentielles.

Deuxième partie : L’encadrement processuel des ententes


anticoncurrentielles

Chapitre 1 : La preuve des ententes anticoncurrentielles

Section 1 : La preuve dans le « public enforcement »

§1 : - La preuve et la forme des ententes

A- L’existence d’accord.
B- L’objet d’accord.

§2 : La preuve de l'abus de position dominante

A- La preuve de la position dominante


B- La preuve de « l’abus » de position dominante.

Section 2 : La preuve dans le « private enforcement »

§1 : La preuve des ententes illicite devant le juge de droit commun.

A- L’établissement de la faute
B- L’établissement du préjudice et du lien de causalité

§2 : Droit de la preuve favorable aux entreprises

A- L'existence d'outils facilitant l'action civile


B- Une modernisation inachevée dans la réduction des obstacles
probatoires

Chapitre2 : Les procédures négociées.

Section 1 : La négociation dans le cadre des procédures négociées.

§1 : Les procédures négociées pouvant aboutir à une exonération totale.

7
A- La Clémence.
B- Les Engagements volontaires.

§2 : Les procédures négociées pouvant aboutir à une exonération partielle.

A- La Non-Contestation des griefs


B- La Transaction

Section 2 : La mise en concurrence des procédures négociées

§1 : Les stratégies des entreprises en infraction.

A- Les stratégies des entreprises dans la phase précontentieuse


B- Les stratégies des entreprises dans la phase contentieuse

§2 : L’articulation des procédures négociées.

8
Introduction
Le souci de règlementer le monde de la concurrence reste toujours l’un des
aspects les plus important dont s’intéresse le droit. Améliorer les techniques
pour faire face aux pratiques anticoncurrentielles est un point essentiel pour
organiser la concurrence, l’ententes illicite est la pratique la plus dangereuse
dont l’élaboration d’une politique des ententes soulève d’importantes difficultés.

L’histoire du régime des ententes s’inscrit dans l’évolution générale du droit de


la concurrence.1

C’est aux Etats Unis que furent posées au XIXe siècle les premières bases
d’une réglementation de la concurrence, qui se poursuivit par l’élaboration
d’une législation antitrust (anti-ententes), très contraignante pour les entreprises
privées.

En France, le droit de la concurrence a connu plusieurs réformes aussi bien


antérieurement que postérieurement à la publication du règlement (CE) n°
1/20032.

Pour le Maroc, ces défis concernent la libéralisation de l’économie et son


ouverture sur les marchés extérieurs. La politique de la libéralisation des prix,
entreprise depuis les années quatre-vingt, dans le cadre du programme
d’ajustement structurel, a été le point de départ d’un vaste programme de
réformes économiques et financières, visant d’une part à restaurer les équilibres
internes et externes, et d’autres part, à mettre en place les structures nécessaires
au fonctionnement d’une économie de marché 3.

Mais pour que le Maroc puisse aspirer à une économie de marché dite évoluée
et compétitive, il est nécessaire d’avoir préalablement instauré les conditions

1
Jean-Bernard BLAISE : « Le statut juridique des ententes économiques » 1964. P : 8.
2
Sanae El Hajoui : « Le nouveau droit de la concurrence au Maroc » 2016. P :30.
3
Lahcen Louchani : « Droit de la concurrence et circuit de distribution au Maroc » 2003. P : 19.
9
adéquates pour que l’entreprise puisse se développer et renforcer ses capacités
compétitives. Et donc il est nécessaire d’adopter une politique économique
basée sur des règles de libre concurrence.

Au sens strict du terme : « la notion de concurrence désigne la rivalité


d’intérêts provoquant une compétition entre plusieurs personnes, en partie entre
commerçants ou industriels qui tentent d’attirer à eux la clientèle par les
meilleures conditions de prix, de qualité, etc. 4 ». Ainsi donc la concurrence se
présente comme étant une compétition obligée entre plusieurs opérateurs en vue
d’arriver à atteindre la conquête et la conservation d’une part de marché. Elle
s’exprime dans une économie de marché basée sur la confrontation de l’offre et
de la demande5.

Alors, au Maroc l’instauration d’une loi sur la liberté des prix et de la


concurrence constitue une véritable refonte du droit positif marocain en matière
économique, car elle a défini les règles juridiques qui vont cadrer l’évolution des
activités économiques et lutter contre les pratiques anticoncurrentielles.

Le droit marocain reste marqué par le droit occidental. L’acte d’Algésiras de


1906 institue dans ce sens le régime de la liberté du commerce au Maroc au
profit des ressortissants des pays signataires. Pendant le protectorat, le
législateur n’a pas fait référence au principe de la libre concurrence. Il se limite à
réprimer par quelques dispositions dans des textes éparpillés les atteintes à la
concurrence déloyale 6 .

Le droit de l’indépendance se caractérise par une phase dirigiste de 1956 à


1972, contraire à la liberté des prix et de la concurrence.

A partir de 1973, le Maroc s’est engagé dans un processus de libéralisation et


d’ouverture. Il s’agit en l’occurrence de la législation de 1973 sur la
4
Le petit Larousse, grand format, 2001, le premier du siècle, P : 245.
5
Lahcen Louchani : « Droit de la concurrence et circuit de distribution au Maroc » 2003. P :20.
6
Il est en est ainsi dans la loi sur la propriété industrielle de 1916 réprimant les atteintes au monopole de la
protection en matière de non commercial, d’enseigne et de brevet. Enseigne et de brevet.
10
marocanisation de l’exercice de certaines activités économiques consacrant la
liberté au profit des nationaux et la loi de 1989 sur la privatisation du secteur
public au profit du secteur privé.

La constitution de 1996 franchit une étape plus favorable au libre jeu de la


concurrence : l’article 15 enrichit la garantie de la propriété privée par la
consécration explicite de la liberté d’entreprendre 7.

Ce processus de libéralisation s’est concrétisé notamment par la mise à niveau


du droit des affaires : réformes 8 du secteur bancaire et du secteur boursier, le
droit des sociétés en 1996 et 1997, le code de commerce en 1997, la création des
tribunaux de commerce en 1997. Ainsi que l’adoption de la loi sur la liberté des
prix et de la concurrence en 2000 par la loi 06-99,

La mesure adoptée par le droit marocain est le clivage entre deux autorités de
la concurrence : le premier ministre, qui a un pouvoir décisionnel, et le Conseil
de la concurrence, qui a un pouvoir consultatif.

Dès lors, la régulation de la concurrence a connu un vrai avancement avec la


réactivation du Conseil de la concurrence suite au discours royal du 20 aout
2008 prononcée à l’occasion du 55e anniversaire de la Révolution du Roi et du
Peuple.

L’année 2011 entrera dans les annales du droit marocain de la concurrence sur
un plan substantiel et institutionnel suite à la constitutionnalisation du principe
de la libre concurrence et de la liberté d’entreprendre : « L’Etat garantit la liberté
d’entreprendre et la libre concurrence 9 » et à la constitutionnalisation du Conseil
de la concurrence en juillet 2011 : « Le Conseil de la concurrence en tant
qu’autorité administratives indépendante chargée, dans le cadre de

7
Sanae El Hajoui : « Le nouveau droit de la concurrence au Maroc » 2016. P :34.

8
A.Benalour, Contribution de la politique et du droit de la concurrence à la promotion du développement
économique, CNUCED, 8-12 novembre 2010, P : 1-10.
9
Art 35, §2 de la constitution de juillet 2011.
11
l’organisation d’une concurrence libre et loyale, d’assurer la transparence et
l’équité dans les relations économiques, notamment à travers l’analyse et la
régulation de la concurrence sur le marché, le contrôle des pratiques
anticoncurrentielles, des pratiques commerciales déloyales et des opérateurs de
concentration économique et de monopole 10».

Dans le cadre de la démarche participative prônée par le conseil de la


concurrence pour l’adoption de la réforme, il a entamé une série d’actions visant
à sensibiliser les principaux acteurs et partenaires concernés 11. C’est après plus
de trois années de travaux législatifs que la loi n° 104-12 relative à la liberté des
prix et de la concurrence et la loi n° 20-12 relative au conseil de la concurrence
ont été publiées, le 7 aout 2014, au Bulletin officiel12.

Le principal objectif d’instaurer des lois règlementant la concurrence est de


permettre aux entreprises de tirer profits de leurs activités sans porter atteinte
aux petites entreprises et au consommateur. Et cela par l’interdiction et
l’incrimination de certaines pratiques qui se caractérisent par une atteinte à la
liberté de la concurrence, soit par un objet soit par un effet simplement probable.
Les ententes illicites sont parmi ces pratiques.

Le but des règles de la concurrence n’est plus d’interdire certains


comportements déterminés, mais de sauvegarder la marge de liberté propre à
chaque marché particulier. Pour les ententes, il ne faut pas s’en tenir aux
comportements des membres de l’entente, mais de rechercher quel rôle joue
l’entente sur les conditions du marché où elle s’exerce, puis en fonction de ce
rôle, prendre les mesures les plus appropriées.

10
Art 166 de la constitution de juillet 2011.
11
Le conseil de la concurrence a organisé plusieurs rencontres avec le monde politique, économique, juridique
et universitaire ainsi qu’avec la presse. Pour plus de détail, voire La Lettre d’information du Conseil de la
concurrence, octobre 2012, n° spécial.
12
Elles ont été promulguées respectivement par les dahirs n°1-14-117 du 2 ramadan 1435 (30 juin 2014),
BORM n° 6280.
12
Pour pouvoir assurer le contrôle des ententes, il faut premièrement définir ces
ententes, chose qui pose un problème ce qui rend le fait de prouver l’existence
d’une entente très difficile dans la mesure où une entente peut se former dans un
simple « déjeuner d’affaire ». Les ententes sont donc polymorphes et
difficilement repérables.

On caractérise l’entente par son effet dangereux sur le marché, car on trouve un
membre qui conserve son individualité, à la concentration, qui soumet tous les
participants à une autorité unique en leur faisant perdre toute liberté dans leurs
décisions économiques. Alors on est face d’une situation qui est contre l’intérêt
du commerçant et de l’ordre économique du pays.

Il faut noter que les articles 6 à 9, de la loi relative à la liberté des prix et de la
concurrence, visent successivement les ententes au sens large d’une part, et
l’abus de position dominante et les exploitations abusives de situations de
dépendance économique d’autre part 13.

Alors, la question qui se pose dans ce sens est la suivante :

 Comment peut-on prouver qu’un accord entre des entreprises fait


partie des pratiques anticoncurrentielles ?

Pour répondre à cette problématique, notre analyse sera répartie en deux :


Premièrement on va parler du Cadre juridique des ententes illicites.
Deuxièmement, du cadre processuel des ententes anticoncurrentielles dont on va
traiter la preuve d’illicéité d’entente.

13
Emmanuelle CLAUDEL : « ENTENTES ANTICONCURRENTIELLES ET DROIT DES CONTRATS ». Thèse pour le
doctorat. (14 décembre 1994). P : 104.
13
Première partie :

L’encadrement juridique des ententes


anticoncurrentielles.

14
Chapitre 1 : La typologie des ententes illicites

La CNUCED14 détermine une liste d’actes et de comportements dont les


entreprises devraient s’abstenir quand elles se livrent sur le marché à des
activités qui sont concurrentes ou peuvent le devenir. Si par des accords ou
arrangements officiels, non officiels, écrits ou non écrits, elles limitent l’accès
aux marchés ou de toutes autre manière, restreignent indument la concurrence
portant ou risquant de porter préjudice au commerce international, en particulier
au commerce des pays en développement économique 15.

De même, l’article 101 du TFUE 15 (ancien article 81), paragraphe 1, indique


que : « Sont incompatibles avec le marché intérieur et interdits tous accords
entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques
concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et
qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu
de la concurrence à l'intérieur du marché intérieur, et notamment ceux qui
consistent à :

a) Fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres


conditions de transaction,

b) Limiter ou contrôler la production, les débouchés, le développement


technique ou les investissements,
c) Répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement,

14
La CNUCED ou la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, en anglais, UNCTAD
pour United Nations Conference on Trade and Development, elle a été créée en 1964, en tant que mécanisme
intergouvernemental permanent. Elle compte 191 pays membres et est le principal organe de l’assemblée
générale des Nations-Unies concernant le domaine du commerce et du développement. Elle est également
responsable des questions relatives aux PMA (Pays les Moins Avancés). Ses principaux objectifs sont d’aider les
pays en développement à tirer le meilleur parti des possibilités de commerce, d’investissement et de
développement qui s’offrent à eux et de les soutenir pour qu'ils puissent s’intégrer de façon équitable dans
l’économie mondiale.
15
Halmaoui Loubna : « Les différentes menaces à la libre concurrence » P : 57.
15
d) Appliquer, à l'égard de partenaires commerciaux, des conditions inégales
à des prestations équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage
dans la concurrence,
e) Subordonner la conclusion de contrats à l'acceptation, par les
partenaires, de prestations supplémentaires qui, par leur nature ou selon
les usages commerciaux, n'ont pas de lien avec l'objet de ces contrats.
L’article 6 de la loi 104-12 interdit l’utilisation de toute pratique
anticoncurrentielle dont l’entente illicite et cela pour la protection de la libre
concurrence et de l’économie du pays (Section 1). Ainsi qu’un conseil de la
concurrence a été mis en place pour renforcer cette protection (Section 2).
Section 1 : Les risques portés par les pratiques anticoncurrentielles.
Max Weber trouve qu’il y a un lien étroit existant entre l’apparition de
l’économie de marché et le processus d’autonomisation d’un droit, désormais
dégagé de la religion, de la morale et de l’économie : l’économie de marché
avait en effet besoin d’un droit « séparé », garantissant les investissements, le
commerce, la sécurité des transactions.

La concurrence entre les entreprises au sein d’un marché économique est très
bénéfique économiquement. Certes, l’abus du jeu concurrentiel et les
agissements malhonnêtes de certains opérateurs économiques peuvent être une
source négative et directe d’un déséquilibre face à la libre concurrence et l’ordre
public économique.

La liberté des prix au Maroc est un principe qui impose aux acteurs
économiques de ne pas conclure d’ententes anticoncurrentielles, et cela pour
protéger la concurrence légale et licite (§1), ainsi que la lutte contre toute
atteinte à l’ordre public économique (§2).

16
§1 : Impact des ententes anticoncurrentielles sur la libre concurrence.

D’parés Marie-Anne Frison Roche, la concurrence produit la puissance, qui


permet le comportement anti-concurrentiel, qui détruit la concurrence… ; pour
cela l’État vient combattre cette tendance à l’autodestruction, en protégeant
l’ordre concurrentiel contre lui-même, en créant les conditions indispensables à
sa reproduction.

Le droit de la concurrence essaye depuis toujours de garantir une concurrence


libre et loyale et à protéger le principe de liberté de commerce et de l’industrie
en interdisant les comportements menaçant la concurrence. Une entente illicite
peut avoir un effet négatif et non désirable sur le marché et peut déséquilibrer la
libre concurrence.

Les types d’ententes anticoncurrentielles sont illimités et on ne peut pas trouver


une liste qui les détermine, mais les plus souvent sont les suivants :

- Les accords ou pratiques concertées qui tendent à limiter l'accès au


marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises
- Les accords qui tendent à faire obstacle à la fixation des prix par le libre
jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse
- Les accords qui tendent à limiter ou contrôler la production, les
débouchés, les investissements ou le progrès technique.

D’après cette liste, on constate que le but de ces trois cas, est d’impacter
indésirablement la concurrence dont le principe général de celle-ci est la liberté.

Un accord entre des entreprises qui se trouvent au même niveau de la chaîne


de production ou de distribution, qui a pour but de fixer les prix avec ses
concurrents, se répartir les marchés où les clients, imposer des prix de revente
aux distributeurs, fixer des quotas de production, organiser le boycott d’un
nouvel arrivant sur le marché, s’entendre sur un appel d’offres ou échanger des

17
informations stratégiques, est une entente illicite qui peut fausser le jeu de la
concurrence.

Lorsqu’on parle d’un prix concurrentiel, il s’agit d’un prix qui met en équilibre
offre et demande, il est fondamentalement synonyme d’un prix juste et équitable
car il respecte les intérêts librement exprimés à la fois des offreurs et des
demandeurs, et selon les règles de la libre concurrence, le prix d’un produit, bien
ou service, est égal à sa valeur d’opportunité marginale, c’est-à-dire à la valeur,
telle qu’estimée par les acheteurs, que le non-achat à ce prix permettrait de
générer au mieux, y compris en consommation, en loisir ou en toute autre
activité.

L'entente sur les prix16 est une forme particulière d'entente par laquelle les
acteurs producteurs dominants d'un marché se mettent d'accord sur une pratique
de prix concertés visant à limiter les effets bénéfiques de la concurrence pour le
consommateur, notamment en termes de prix. Les formes les plus courantes
d'ententes sur les prix sont le fait de pratiquer des hausses concertées ou de se
mettre d'accord sur la pratique d'un prix minimum, et il est donc nécessaire de
signaler que ces ententes sur les prix sont contraires au droit de la concurrence et
donc contre la règle de base qui caractérise le jeu de la libre concurrence. Au
Maroc, une grande affaire qui concerne une entente sur les prix des carburants, a
été sur table et elle a été traitée par le conseil de la concurrence 17 .

Le principal objectif du droit de la concurrence est de garantir un bon prix en


faveur du consommateur, tout en protégeant l’ordre économique du pays et
l’intérêt du commerçant, mais l’existence des pratique anticoncurrentielles tel
que l’entente, qui se caractérise par une action concertée d'un ensemble de
producteurs de produits ou de services représentant l'essentiel d'un marché,

16
L'entente sur les prix est la forme la plus courante d'entente.
17
Entente entre Afriquia, Total et Vivo Energy (Distributeur exclusif de Shell au Maroc).
18
visent à restreindre la concurrence et ses effets bénéfiques pour le
consommateur.

Le principe de la libre concurrence n’est pas seulement un principe d’efficacité


économique pour faire bénéficier le consommateur de la meilleure offre du
marché mais il s’agit d’un ensemble des règles juridiques qui visent à interdire
toute entrave des acteurs du marché qui viendrait porter atteinte ou fausser la
libre concurrence sur le marché ou le processus des négociations commerciales.
La libre concurrence n’existe que si les entreprises respectent ces règles, dans ce
même cadre, on ne peut pas avoir un marché efficient sans un comportement
autonome des acteurs du marché, sans relations commerciales loyales, ainsi que
tout opérateur économique doit déterminer sa politique commerciale de manière
autonome.

La libre concurrence est la garantie de la compétitivité respective de chaque


entreprise dans la mesure où le droit de la concurrence n’est pas une option
facultative pour les entreprises, mais elles sont dans l’obligation de le respecter.

Il est nécessaire de signaler qu’un simple échange d’information peut être


considéré comme une entente illicite lorsque cet échange d’information produit
des restrictions à la concurrence.

Dans ce cadre, il ne faut pas oublier que les informations non publiées par une
entreprise sont couvertes par le secret des affaires et leur publication à des tiers
peut être une violation des engagements de confidentialité de l’entreprise. Alors
les échanges d’informations directs entre concurrents sont répréhensibles et un
simple échange d’informations sur les prix ou d’informations sensibles
permettant un partage de territoire, de clientèle ou encore de limiter la

19
production ou la capacité peut être considéré comme une entente18, et cet
échange peut porter atteinte aux règles de la libre concurrence.

L’intérêt de garantir une bonne concurrence consiste à ce que cette dernière


peut améliorer la performance économique d’un pays, ouvrir des possibilités
d’activité à ses citoyens et réduire le coût des biens et services dans l’ensemble
de l’économie. Dans le sens contraire, avoir un marché qui ne respecte pas des
règles qui lutte contre les ententes illicites et les autres pratiques
anticoncurrentielles, donne l’opportunité à des commerçants qui ont un pouvoir
sur le marché, d’exploiter les petites entreprises pour leur intérêt personnel
même si ce dernier est contre l’intérêt général des consommateurs et même de
l’ordre économique du pays.

§2 : Impact des ententes anticoncurrentielles sur l’ordre public


économique.

L’ordre concurrentiel est indissociable des mécanismes de marché, au point


que les deux notions adhèrent l’une à l’autre : pas d’ordre concurrentiel
concevable sans existence d’un marché et pas de marché sans concurrence. Lieu
(réel ou fictif) d’échanges entre agents économiques, s’effectuant sur la base
d’un prix qui résulte de la confrontation des offres et des demandes de biens et
services 19, le marché présuppose la concurrence ; c’est « le lieu où s’exerce la
concurrence »20.

La concurrence est avant tout une notion économique, même si le droit ne


l’ignore pas. En effet, la concurrence est un mécanisme permettant sur un
marché pertinent, la formation des prix par le simple jeu de l’offre et de la
demande émanant de vendeurs isolés les uns des autres. La concurrence est

18
RÈGLES DE CONCURRENCE ET LOYAUTÉ DANS LES RELATIONS D’AFFAIRES RECOMMANDATIONS PRATIQUES
2017, P : 11
19
Marie-Anne Frison-Roche, « Le modèle du marché », Archives de philosophie du droit, 1995.
20
Michel Rainelli, « L’ordre concurrentiel : approche d’un économiste », in L’ordre concurrentiel, Editions
Frison-Roche, 2003, pp. 13 sq
20
perçue comme une liberté que le droit se doit de garantir ce qui explique la
volonté des pouvoirs publics nationaux ou supranationaux de combattre les
entraves à une libre concurrence. Dans ce cadre la concurrence peut être définie
comme étant : « une confrontation entre entreprises dont chacune cherche à
augmenter ses parts de marché le plus souvent au détriment des autres » 21.

Les ententes sont des arrangements entre entreprises concurrentes destinés à


limiter ou à éliminer la concurrence s’exerçant entre elles, dans le but
d’augmenter les prix et les bénéfices des entreprises participantes, sans produire
d’avantages compensatoires objectifs. Dans la pratique, ces arrangements
consistent généralement à fixer les prix, à limiter la production, à partager les
marchés, à attribuer des clients ou des territoires, à manipuler des procédures
d’appel d’offres ou plusieurs de ces éléments en même temps.

Les ententes sont préjudiciables aux consommateurs et à la société dans son


ensemble du fait que les entreprises impliquées appliquent des prix plus élevés
(et réalisent des bénéfices plus importants) que sur un marché concurrentiel.

Les ententes illicites ont des conséquences désastreuses pour le secteur


d’activité concerné, et plus largement pour l’ensemble de l’économie. Ces
ententes peuvent prendre plusieurs formes, on a le fameux exemple d’entente sur
les prix de vente, l’impact de la concurrence sur le prix est souvent sous-
estimé car une petite baisse de prix peut sembler anecdotique au niveau d’un
seul consommateur mais lorsque l’on raisonne sur l’ensemble d’une économie,
le gain monétaire peut être considérable.

Les hausses pouvant aller parfois jusqu’à 20% et concerner de longues


périodes sans aucune contrepartie pour les clients et ils se forment souvent sur
des marchés de produits intermédiaires : dans ce cas, les premières victimes sont
d’autres entreprises, dont la compétitivité est altérée. De plus, et donc les autres

21
E. COMBE, Economie et politique de la concurrence, Précis Dalloz, 1re éd., 2005
21
entreprises sont moins incitées à innover, à se dépasser, puisqu’elles ne sont plus
soumises à l’aiguillon de la concurrence ce qui impacte négativement l’ordre
économique du pays.

Ces accords peuvent avoir plusieurs formes, à savoir de fixer en commun le


prix de vente, de manière directe ou indirecte, se répartir les marchés, sur une
base géographique ou de clientèle, déterminer en commun des quotas de
production, boycotter en commun un nouvel entrant, notamment en faisant
pression sur les fournisseurs pour qu’ils refusent de l’approvisionner...

Il est nécessaire de comprendre que le contrôle des ententes permet d’assurer


un fonctionnement concurrentiel du marché par une limitation de la liberté
d’entreprendre car le fait d’assurer le fonctionnement concurrentiel du marché
en soumettant à un contrôle les ententes conclues entre les entreprises concourt
aux objectifs de préservation de l’ordre public économique. L’ordre public
économique permet de limiter la liberté économique.

Le lien entre les ententes prohibées et l’ordre public économique est établi
lorsque la Chambre commerciale de la Cour de cassation de Paris parle de
« trouble à l’ordre public économique engendré par une entente comme celle
alors suspectée dans le secteur des travaux ferroviaires 22.

La Cour de justice de l’Union européenne se réfère également explicitement à


l’ordre public économique à propos des ententes et pratiques concertées. Elle
juge que le montant de l’amende venant sanctionner la violation des règles de
concurrence est fixé, notamment, en fonction de la gravité de l’infraction et que
« des éléments objectifs tels le contenu et la durée des comportements
anticoncurrentiels, leur nombre et leur intensité, l’étendue du marché affecté

22
Cass. com., 2 novembre 2011, n° 10-21103, Bulletin 2011, IV, n° 177.

22
et la détérioration subie par l’ordre public économique doivent être pris en
compte »23.

Les ententes illicites causent un préjudice s’élevant à plusieurs milliards de


dollars chaque année, elle peut affecter l’économie du pays.
Alors, les atteintes à l’ordre public économique peuvent résulter de toutes les
formes d’entraves au libre jeu de la concurrence et donc le fonctionnement
concurrentiel du marché est bien un des éléments essentiels de l’ordre public
économique.
En gros, la part de l’économie est tout aussi importante que la part du juridique,
car il ne s’agit pas de voir ce qui se passe aujourd’hui mais ce qui se produira
dans deux ans ou cinq ans sur le marché, la concurrence et l’économie du pays.

Section 2 : Notion et manifestations de l’entente illicite

En droit de la concurrence, pour la répression d’une entente illicite, il faut


d’abord procéder à l’appréciation de cette entente s’elle est illicite ou non, car on
distingue entre les bonnes et les mauvaises ententes. Pour cela il est nécessaire
de déterminer une définition à cette notion (§1).

En général, il faut savoir qu’il existe des formes d’ententes et qui sont visées
par l’article 6 de la loi 104-12. Compte tenu de la diversité des ententes
anticoncurrentielles, il serait difficile de fournir d’en déterminer une liste, et
même l’article 6 de la loi sur la liberté des prix et de la concurrence a cité des
exemples mais l’ingéniosité de l’être humain conduira l’organisation de
nouvelles ententes (§2).

§1 : La définition de l’entente illicite

L’entente illicite fait partie des pratiques anticoncurrentielles, elle est définie,
par l’article 6 de la loi 104-12 sur la liberté des prix et de la concurrence, comme
23
CJUE, 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a. c/ Commission, aff. C-204/00 P, C-205/00 P, C-211/00 P, C-213/00
P, C-217/00 P et C-219/00 P, Rec. p. I-123, point 91.
23
étant des accords expresse ou tacite, sous quelque forme et pour quelque cause
que ce soit, notamment lorsqu’elles tendent à limiter l’accès au marché ou le
libre exercice de la concurrence par d’autres entreprises, faire obstacle à la
formation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur
hausse ou leur baisse, limiter ou contrôler la production, les débouchés, les
investissements ou le progrès technique, répartir les marchés, les sources
d’approvisionnement ou les marchés publics. Ainsi que d’après le même article,
ces ententes sont prohibées, lorsqu’elles ont pour objet ou peuvent avoir pour
effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un
marché.

D’après cette définition, l'entente prohibée est anticoncurrentielle, soit par le


but qu'elle poursuit, soit par le résultat qu'elle produit, ainsi qu’on ne peut pas
parler d’une entente illicite que si la perturbation du marché, constatée ou
redoutée, est le fruit d'un tel concours.

Il est nécessaire d’abord de définir le marché sur lequel se situe l’entreprise,


le marché avait été défini par RIPERT comme le "domaine abstrait, qui peut être
régional, national ou mondial, de négociations de certains biens déterminés. On
y fait un rassemblement idéal de ceux qui cherchent à acquérir et de ceux qui
cherchent à écouler les biens en question " 24.

Pour le droit de la concurrence, le marché et la concurrence sont deux notions


intimement liées : "l’appréciation d’une atteinte à la concurrence se réalise sur
un marché déterminé dit marché pertinent" (E. Claudel.1994)25.

Le concept de marché est pratiquement indissociable de celui de concurrence


: l’appréciation d’une atteinte à la concurrence se réalise toujours sur un marché
déterminé, dit marché pertinent ou Relevant Market. Il est en quelque sorte

24
G. RIPERT, "Les métamorphoses économiques et morales du droit privé d'aujourd'hui", Paris, Dalloz, 1959, p.
110.
25
Mme Maissae Bousaouf : « L’instrumentalisation du marché pertinent en droit marocain de la concentration
». Revue Internationale des Sciences de Gestion N°4. (2021). P : 570.
24
besoin de circonscrire un domaine d'appréciation de l'illicite. Selon les termes du
Conseil, "la définition du marché sert principalement à dessiner les contours de
la concurrence potentielle "26.

Le marché nous aide à mesurer le pouvoir de domination des entreprises, ce qui


facilite le fait de détecter l’existence des pratiques anticoncurrentielles. Dans ce
sens on doit parler de la délimitation de ce marché car sa délimitation est " un
préalable nécessaire à toute analyse concurrentielle. Dans la décision de l’ANRT
contre IAM, elle avait fondé sa décision sur la détermination au préalable du
marché pertinent, il ressort de celle-ci qu’« afin d’examiner le bien-fondé des
pratiques dénoncées par WANA reposant sur l’existence de comportements
susceptibles de caractériser un abus de position dominante, il convient de
déterminer si IAM détient une position dominante sur le marché concerné, ou le
cas échéant sur des marchés connexes.

Alors, pour constater l’existence d’une entente entre des entreprises, il faut
d’abord définir le marché pertinent dont le fonctionnement a été ou risque d'être
affecté par les comportements en cause. La définition du marché suppose que
soient identifiés les produits ou services qui y sont inclus, ainsi que sa dimension
géographique.

S’agissant des ententes anticoncurrentielles, la nécessité de la délimitation du


marché pertinent n’est pas toujours incontestée" (M.Pasturel. 2001). Dans un
rapport du conseil de la concurrence français en 1987, celui-ci a estimé (p. XX)
que : « cette analyse du marché peut enfin, dans certaines circonstances,
constituer un préalable nécessaire à l’étude de certaines ententes… ». Ce qui
veut dire que la délimitation du marché n’apparaît pas nécessaire au conseil dans
toutes les hypothèses.

26
Emmanuelle CLAUDEL : « ENTENTES ANTICONCURRENTIELLES ET DROIT DES CONTRATS » Thèse pour le
doctorat en Droit 1994 P : 23.
25
En effet, la doctrine et la pratique des autorités françaises de la concurrence ont
établi que la définition du marché́ n'est pertinente en matière d'entente que dans
les cas où il faut se demander si l'entente par son effet est susceptible de porter
atteinte sensiblement à la concurrence et, par ricochet, diffuse un certain pouvoir
de marché. Ainsi, la question se résume à la circonstance de savoir si l'entente
produit un effet sensible sur la concurrence. C'est pourquoi dans les cas où la
preuve démontre que l'entente porte atteinte à la concurrence de par son objet
anticoncurrentiel, la définition du marché devient alors superflue. Il n'est alors
pas nécessaire de définir le marché pertinent dans les cas où l'entente a un objet
anticoncurrentiel. En effet, si le cadre d'analyse du juge est déjà auto-construit
par le caractère restrictif patent d'une clause, point n'est besoin de définir le
marché pertinent. De ce fait, il n'est pas nécessaire de définir le marché pertinent
en cas d'entente emportant une restriction caractérisée de la concurrence. Il s'agit
essentiellement des ententes -cartel- de fixation de prix et de partage de marché.
Ce sont les ententes interdites dont la nocivité sur la concurrence est patente et
dont l'interdiction n'exige pas en conséquence une quelconque circonscription de
la puissance de marché. (Karounga Diawara, 2008). 27

Pour la commission européenne dans l’affaire du verre plat : « Les preuves


écrites des ententes ayant existé entre les trois producteurs étaient tellement
claires et explicites qu’elles rendaient tout à fait superflu n’importe quel type
d’enquête sur la structure du marché ». 28 Mais la commission européenne a été
condamnée par le TPICE dans un attendu de principe très net : « Le tribunal
considère […] que la définition adéquate du marché en cause est une condition
nécessaire et préalable à tout jugement porté sur un comportement prétendument
anticoncurrentiel ».

27
Mme Maissae Bousaouf : « L’instrumentalisation du marché pertinent en droit marocain de la concentration
». Revue Internationale des Sciences de Gestion N°4. (2021). P :572
28
Depuis 1990
26
Au contraire, la question de détermination du marché ne se pose pas en droit de
la concentration, car cette délimitation est fondamentale.

Mais en général le marché est un lieu où se rencontrent l’offre et la demande.


Selon la loi les intervenants sur le marché sont les entreprises, cela veut dire que
tout organisme ou toute organisation qui n’a pas la qualification d’entreprise est
exclue du domaine de la loi. Autrement dit, le marché comprend le territoire sur
lequel les entreprises concernées sont engagées dans l’offre des biens et des
services donnés, sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment
homogènes et qui peut être distingué de zones géographiques voisines parce que,
en particulier, les conditions de concurrence y diffèrent de manière appréciable.

En général, le marché pertinent est un marché de biens substituables pour les


consommateurs qui vont arbitrer entre les différents offreurs. Le marché
pertinent est délimité par la loi, et au niveau géographique. La délimitation du
marché pertinent qu’il soit de biens ou de services, implique le recours à des
notions à la fois sectorielles et géographiques.

Sur le plan sectoriel, l’analyse portera principalement, mais pas uniquement,


sur la question de substituabilité des produits et services au regard de la
demande des consommateurs.

Sur le plan géographique, il faut déterminer avec plus de précision possible, la


zone territoriale sur laquelle les effets de l’entente se font ressentir.

Alors qu’on a aussi, la notion de marché intérieur qui ne se confond nullement


avec le marché national. Par marché intérieur, on vise tout marché spécifique,
même s’il est limité géographiquement.

27
C’est sur ce marché que les entreprises passent des ententes pour l’exercice de
leurs activités, ces ententes ne sont pas prohibées d’office, mais ce qui est en
revanche interdit c’est le caractère abusif et anticoncurrentiel de ces ententes 29.

Même si la loi a essayé de définir l’entente illicite dans le cadre d’une


définition des pratiques anticoncurrentielles, pratiquement cette définition n’est
pas claire car c’est impossible de cataloguer les types d’ententes. Et surtout dans
le cas des ententes, il est important de déposer une définition plus précise car
cette définition laisse aux autorités compétentes en la matière d’apprécier
l’entente en question, ou il faut une jurisprudence pour savoir si l’entente tombe
ou non sous le coup de la loi. Selon l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris, le
15 Février 2000, est définie de la manière suivante : « Il importe pour que la
pratique puisse être sanctionnée sous le fondement des articles 421 et autres que
les entreprises aient librement et volontairement participé à une action
concertée, en sachant qu’elles avaient pour objet ou pouvaient avoir pour effet
d’empêcher, de restreindre, ou de fausser le jeu de la concurrence.

§2 : Les manifestations de l’entente

D’après la définition de l’entente dans l’arrêt rendu par la Cour d’appel de


Paris le 15 Février 2000, on peut conclure que pour qu’il y ait entente, il faut
démontrer l’existence d’un accord de volonté entre les parties, cet accord peut
prendre la forme d’un contrat, mais les entreprises sont beaucoup plus
intelligentes. Les entreprises peuvent conclure des accords entre eux, ces
accords peuvent prendre plusieurs formes, et plusieurs types. La forme de
l'entente est relative aux caractéristiques de ses membres et de leur organisation
(A), tandis que le type de l'entente est relatif aux caractéristiques de l'accord lui-
même. Ainsi, une forme précise d'entente peut réaliser différents types
d'ententes (B) et vice versa.

29
Actes du colloque organisé par l’institut Marocain du Droit des Entreprises « IMADE » : Le droit de la
concurrence » 2002. P :78
28
A- Les formes des ententes illicites.

L'article 6 de la loi sur la liberté des prix et de la concurrence détermine toutes


les formes d’accords : actions concertées, conventions, ententes expresses ou
tacites coalisions. Il est clair que par cette accumulation de termes, le législateur
a voulu exprimer son attachement à une conception assez large de la notion
d'entente.

Mais on peut regroupées ces ententes en trois catégories : les ententes


contractuelles, les ententes organiques et les ententes silencieuses concrétisées
par les actions concertées.

Les ententes contractuelles : Ce sont des contrats au sens du droit civil, c'est à
dire des conventions ayant force obligatoire entre les parties. Si d’une façon
générale, le nombre des parties à une convention reste limité, il n'est pas
cependant exclu qu'une convention constitutive d'une entente lie de multiples
opérateurs voire même tous les membres d'une profession ou d'un secteur.
Abstraction faite de leur forme, de leur statut juridique, de leur objet, de la
qualité de leurs signataires, toutes les conventions sont susceptibles d'entrer dans
le champ d'application de l'article 6 de la loi sur la liberté des prix et de la
concurrence.

Peu importe que la convention soit constatée par écrit ou simplement convenue
oralement, expressément ou tacitement. Peu importe également que la
convention ait été établie unilatéralement par une partie dès lors que les autres
parties aient adhéré à cette convention, soit en la signant, soit en l'appliquant.

Le statut juridique de la convention ne constitue pas non plus un critère


d'applicabilité de l'article 6 de la loi sur la liberté des prix et de la concurrence.
Celui-ci peut s'appliquer aux conventions de droit privé comme aux conventions
de droit public. Si l'objet de la convention se confond avec le contrat lui- même,
celui-ci peut être déclaré illicite en soi dès lors que son objet est jugé

29
anticoncurrentiel. Si par contre ; seul certaines clauses du contrat sont de nature
à affecter le jeu de la concurrence, la convention peut être maintenue sous
condition de supprimer ou d'aménager les clauses anticoncurrentielles.

Les parties à la convention peuvent être des entreprises concurrentes situées au


même stade de l'activité économique. On est en présence dans cette hypothèse
de conventions dites horizontales. Lorsque la convention engage des entreprises
situées à des stades d'activités économiques différents, on est en présence de
conventions dites verticales.

Les ententes organiques : L'entente peut prendre la forme d'un groupement


pourvu de la personnalité morale. Par exemple, des entreprises indépendantes,
n'appartenant pas au même groupe, constitue une société commerciale qui
centralise les commandes et assume la fonction d'une centrale de vente. La
société est alors mandataire ou commissionnaire des entreprises membres. Ou
bien un Groupement d'intérêt général est constitué, qui agit dans l'intérêt de ses
membres. Ou encore les membres de l'entente constituent une association ou un
syndicat. Dans tous ces cas se pose le problème de l'application de l'article 6 de
la loi sur la liberté des prix et ce la concurrence, lorsque le groupement constitué
induit des restrictions de concurrence.

Si le groupement ne peut être considéré en soi comme une pratique restrictive


de concurrence, il peut tomber sous la qualification d'entente au moins dans
deux cas :

1) lorsque le groupement a pour objet statutaire des décisions qui sont par nature
restrictive de concurrence comme par exemple la fixation des quotas de
production ou la détermination d'un barème de prix ;

2) lorsque le groupement, n'a pas pour objet de gérer des restrictions de


concurrence, mais, en outre passant ses pouvoirs provoque des restrictions de
concurrence en la personne de ses membres. Il en ainsi par exemple des

30
associations ou chambres syndicales qui diffusent des barèmes de prix ou
donnent des consignes de boycotte de certaines entreprises.

Les ententes silencieuses : (les actions concertées), Les actions concertées


sont des ententes qui n'ont pas été exprimées, mais déduites de comportements
des entreprises en cause. Leur prohibition est fondée sur un critère finaliste :
appréhender tous les comportements anticoncurrentiels même lorsqu'ils sont
soigneusement cachés ou ceux qui l'ont adoptées n'ont pas eu besoin de formuler
expressément leur volonté pour s'accorder sur une restriction de concurrence. Ils
visent donc les hypothèses où les entreprises, sans se lier juridiquement,
adoptent une discipline commune de comportement : alignement spontané et
conscient de prix pratiqués. Il s'agit d'une forme de coordination entre
entreprises qui, sans avoir été poussée jusqu'à la réalisation d'une convention
proprement dite, substitue sciemment une coopération pratique et informelle à la
loi du marché.

En raison de ces caractéristiques, la preuve de l'action concertée est difficile à


rapporter, tout particulièrement à l'élément intentionnel qui consiste à renoncer
l'indépendance de comportement. Des indices peuvent révéler la présence de cet
élément d'informations, similitude parfaite des comportements.

Cependant, le simple parallélisme de comportement n'est pas suffisant. Il doit


résulter d'une concertation, de l'acceptation consciente ou volontaire d'une perte
d'autonomie pour les entreprises concernées.

Les informations échangées doivent avoir influencées le comportement des


entreprises. Il n'y a pas de pratique concertée lorsque le parallélisme de
comportement n'est que le résultat des caractéristiques du marché (transparence,
structures identiques d'approvisionnement et d'exploitation).

31
B- Les types des ententes illicites.

D’après les dispositions de l’article 6 de la loi 104-12, on peut classer certains


types d’ententes illicites, mais on ne peut jamais savoir tous les types qui
existent ou qui peuvent exister prochainement. On peut distinguer entre :

Les ententes tendant à limiter accès du marché ou le libre exercice de la


concurrence par d'autres entreprises (art 6 al. 1) : Ces ententes sont
essentiellement des ententes d'exclusion et peuvent prendre des formes variées.
Elles peuvent d'abord prendre la forme de pratiques concertées telles que le
boycottage, l'exclusion des entreprises d'organisation ou groupement
professionnels, l'application de conditions discriminatoires de vente ou la
subordination des ventes. Elles peuvent ensuite prendre la forme de convention
d'exclusivité de ventes ou d'achat. Elles peuvent enfin prendre la forme
d'engagement de non concurrence.

Les ententes de prix (art 6 al.2) : Les ententes visées par cet article sont en
premier lieu les ententes horizontales de prix, c'est-à-dire toutes les formes
d'accords et de concertation intervenues entre entreprises concurrentes et portant
sur leurs prix et leurs conditions de vente tel que les rabais, escomptes et remises
diverses, ou sur les éléments de leur fixation tel que les marges et les coûts de
revient. Les pratiques concertées qui, sans porter directement sur les prix de
vente, ont pour objet ou peuvent avoir pour effet de favoriser artificiellement la
hausse des prix, sont susceptibles de constituer des ententes de prix prohibées.

Il en est de même des barèmes de prix élaborés par des organisations


professionnelles et des échanges d'information de prix entre entreprises
concurrentes.

Les ententes visées par l'article 6 sont en second lieu les ententes verticales de
prix, c'est à dire les ententes convenues entre les fournisseurs et les distributeurs
ayant pour objet ou pour effet de limiter la liberté commerciale des distributeurs.

32
Ces ententes peuvent se traduire par l'imposition d'un prix de revente ou d'une
marge minimum, par les prix de vente conseillés émis par des organismes
professionnels et par les pratiques d'opacité tarifaire.

Et dans ce cadre, en mars 2006 par exemple, plusieurs entreprises du secteur du


luxe (Chanel, Dior, Kenzo, Givenchy, etc.) et trois distributeurs (Marionnaud,
Sephora et Nocibé) ont été condamnés à plusieurs dizaines de millions d’euros
d’amende. Ils ont été accusés d’une entente sur les prix entre 1997 et 2003.

Les ententes tendant à limiter ou contrôler la production, les débouchés,


les investissements ou le progrès technique, (art 6 al.3) : Les ententes de
limitation ou de contrôle de production sont généralement mises en œuvre dans
des secteurs d'activité en récession.

Elles peuvent se traduire par des accords de quotas qui déterminent


forfaitairement les volumes de production que les parties à l'entente ne doivent
pas dépasser. Ces accords sont éventuellement assortis d'un système de pénalités
pour dépassement et d'indemnités en cas d'insuffisance de chiffre d'affaires. La
limitation de production peut encore résulter d'accords de spécialisation par
lesquels les entreprises décident réciproquement d'abandonner certaines
productions au ou plusieurs d'entre elles et de profit de l'une s'approvisionner
auprès de ces dernières.

Les ententes de limitation ou de contrôle des débouchés sont des accords par
lesquels des entreprises concurrentes décident de renoncer à leur liberté
commerciale et de se concerter sur le montant de leurs ventes ou d'autres
recettes comme les recettes publicitaires. Ces ententes peuvent se traduire par
exemple par l'instauration de quotas de vente, d'un système de contrôle des
importations et par la constitution de structures communes de vente. Les
ententes de limitation des investissements et de progrès technique sont en
quelque sorte des accords de crises qui visent à limiter les investissements
excédentaires, à geler les investissements existants ou à fermer certaines usines.
33
Les accords de spécialisation, les accords d'approvisionnement exclusifs et les
accords de non concurrence relèvent également de cette catégorie.

Les ententes tendant à répartir les marchés ou les sources


d'approvisionnement (art 6 al.4) : Ces ententes concernent tout
particulièrement les accords de partage géographique du marché, les accords de
répartition des clientèles et les ententes de soumission. Ces dernières réunissent
des entreprises qui désirent répondre aux appels d'offres, notamment dans le
cadre des marchés publics, avec la volonté de se soustraire au jeu normal de la
concurrence. Ces entreprises s'entendent sur la répartition des différents marchés
en désignant d'avance l'entreprise qui proposera la meilleure offre, les autres
émettront des « offres de couvertures ».

Chapitre 2 : Le cadre légal des ententes anticoncurrentielles

La loi prohibe l’utilisation abusive des ententes entre les entreprises sur le
marché intérieur ou sur une partie substantielle de ce marché.

La loi de la concurrence a développé trois catégories de pratiques


anticoncurrentielles condamnables : les ententes, les abus de position dominante
et les abus de dépendance économique. Il s’agit également de lutter contre les
pratiques restrictives et nuisibles pour la concurrence : notamment le refus de
ventes, les ventes liées, la publicité des prix, la délivrance des factures, les prix
minima imposés et les pratiques discriminatoires dans les conditions de vente.

Ce sujet se limitera uniquement à traiter la prohibition des ententes en droit


marocain de la concurrence au niveau national dans un premier lieu (Section 1)
et au niveau international dans un second lieu (Section 2).

Section 1 : Le Cadre légal des ententes illicites au niveau national

Tout d’abord, il faut définir l’objet de la loi sur la concurrence, sa philosophie


et la place qu’occupent les ententes au sein de cette réglementation (§1), et

34
après, il est nécessaire de focaliser les lumières sur l’autorité habilité à intervenir
dans le cadre de la concurrence (§2).

§1 : Philosophie de la loi de concurrence dans le cadre des ententes illicites

Le grand débat, non pas seulement au Maroc mais également au niveau


international, a été autour de la loi de la concurrence. Cette loi qui est nécessaire
pour un monde économique équilibré, mais qui peut être pour certains un régime
contre leurs intérêts.

Le principal objectif de cette loi, c’est de lutter contre les pratiques


anticoncurrentielles (A), dont on a les ententes illicites qui couvrent une partie
intéressante de ces pratiques (B).

A- Généralités des pratiques anticoncurrentiels

Le préambule de la loi sur la liberté des prix et de la concurrence a


clairement énoncé que l’objet de cette législation est de définir les dispositions
régissant la liberté des prix et d’organiser la libre concurrence.

Alors, le but recherché est de : stimuler l’efficience économique, améliorer le


bien-être des consommateurs, et assurer la transparence et la loyauté des
relations commerciales.

La philosophie de la loi se base sur des principes qui sont simple. Cette loi
entre dans le cadre d’une réforme économique en vue de la promotion d’un
ordre économique concurrentiel au sein d’un système libéral, avec l’idée
fondamentale d’user de la liberté et de ne pas en abuser 30.

La loi sur la liberté des prix et la concurrence constitue pour les entreprises
marocaines un moyen qui leur permet de tirer profit des mesures de la
libéralisation des prix et de la réduction du contrôle de l’Etat.

30
Abid KABADI : « L’interdiction des ententes en droit marocain de la concurrence et ses effets sur
l’entreprise ». Intervention dans le cadre d’Actes du colloque organisé par l’Institut Marocain du Droit des
Entreprises « IMADE ». à Casablanca, le 7 mai 2002.
35
D’après le milieu des professionnels, l’instauration des règles de la
concurrence « s’inscrit dans le cadre de la mise à niveau de l’économie nationale
dans la perspective notamment de la modernisation de l’outil de production et
l’amélioration des circuits de distribution, pour plus de transparence et de
loyauté commerciale 31.

Le champ d’application de ce texte se caractérise par son universalité. Ses


dispositions s’appliquent à toutes les personnes physiques ou morales opèrent
sur le territoire national. Elle concerne les activités de production, de
distribution et de services pour les deux secteurs, public et privé. Elles visent à
assurer la primauté du marché, l’interdiction des atteintes volontaires aux
principes de la libre concurrence et l’institution d’un organe administratif
indépendant32. Elle vise enfin la protection des consommateurs.

La législation sur la concurrence pose comme règle le principe de la liberté des


prix et sa détermination par le libre jeu de l’offre et de la demande. Grâce au jeu
de la concurrence, les entreprises sont constamment sous pression pour fournir
aux consommateurs les meilleures gammes de biens aux meilleurs prix. Sur un
marché libre, les transactions doivent être un jeu compétitif avec les
consommateurs en leur qualité de bénéficiaires.

Dans ce cadre et parlant de la liberté des prix, l’Etat n’a plus intérêt de
continuer à prendre en charge les missions de règlementation et de contrôle des
prix. Ce rôle est confié aux opérateurs économiques qui doivent mener une
compétitivité effective sur le marché.

Actuellement ce principe est consacré par l’article 2 de la loi 104-12 sur la


liberté des prix et de la concurrence, l’administration peut intervenir pour fixer
les prix de certains biens, produits ou services dans les situations suivantes :

31
Revue de la CGEM info, n° 2261 du 24/11/2000, p : 6.
32
Lahcen Louchahi : « Droits d la concurrence et circuits de distribution au Maroc ». Revue marocaine
d’administration locale et de développement. Première édition, 2003. P : 12.
36
 Monopole de fait et de droit,
 Difficultés d’approvisionnement,
 Dispositions législatives ou réglementaires.

La liste des biens, produits et services dont les prix sont réglementés est défini
par arrêté n° 3086.14 du 29 décembre 2014 du Ministre délégué auprès du chef
du gouvernement chargé des affaires générales et de la gouvernance 33.

Il est obligatoire de noter que cette loi sur la liberté des prix et de la concurrence
repose sur le principe de la transparence des relations liant les différents
opérateurs économiques. Ce principe constitue un moyen efficace de
restructuration économique dans le respect des règles de la loyauté commerciale,
aussi bien dans les relations interprofessionnelles qu’à l’égard des
consommateurs.

Au niveau des relations interprofessionnelles, la transparence tarifaires ou


verticale est devenue une obligation qui s’impose aux opérateurs économiques.
D’après l’article 59 : « Tout producteur, prestataire de services, importateur ou
grossiste est tenu de communiquer à tout acheteur de bien ou de produit ou
demandeur de prestation de service pour une activité professionnelle qui en fait
la demande, son barème de prix et ses conditions de vente. Celles-ci
comprennent les conditions de règlement ou les garanties de paiement et, le cas
échéant, les réductions accordées quelle que soit leur date de règlement. Cette

33
La liste des biens, produits et services dont les prix sont réglementés est défini par arrêté n° 3086.14 du 29
décembre 2014 du Ministre délégué auprès du chef du gouvernement chargé des affaires générales et de la
gouvernance comme suit:

La farine nationale de blé tendre, le sucre, le tabac manufacturé, l’électricité, l’eau potable, l’assainissement
liquide, le gaz butane, le transport de voyageurs par route, les produits pharmaceutiques, les actes et services
médicaux dans le secteur médical privé, les actes pratiqués par les sage-femmes, infirmiers et infirmières du
secteur privé, les livres scolaires, les actes des huissiers de justice, les actes hébraïques, les actes des notaires,
le transport urbain de personnes par autobus, le transport par taxis de 1ére et 2ème catégories, le transport
mixte de personnes, les insertions légales, administratives et judiciaires.

37
communication s'effectue par tout moyen conforme aux usages de la
profession ».

La transparence des transactions commerciales envers le consommateur se


traduit par la mise à sa disposition de l’information nécessaire pour qu’il puisse
effectuer son choix en connaissance de cause avant que toute opération d’achat.
Cette information est un facteur essentiel pour la protection du consommateur
contre les clauses abusives préétablies. En ce sens, l’information afférente aux
prix, aux conditions de vente et à la remise de la facture est la base de la
transparence souhaitée envers le consommateur 34.

La loi sur la liberté des prix et la concurrence place le cadre juridique dans
lequel les opérateurs économiques, privés et publics, vont procéder à l’exercice
de leurs activités, et dans le même cadre, cette loi prévoit la prohibition des
pratiques restrictives à la concurrence et l’interdiction des pratiques
anticoncurrentielles.

Afin de protéger le marché contre l’effet perturbateur d’un certain nombre de


pratiques restrictives à la concurrence. La loi 104-12 interdit aux vendeurs de
produits et prestataires de services de :

- Refuser à un consommateur la vente d’un produit ou la prestation d’un


service, sauf motif légitime.
- Subordonner la vente d’un produit à l’achat d’une quantité imposée ou
l’achat concomitant d’un autre produit ou service.
- Subordonner la prestation d’un service à celle d’un autre service ou à
l’achat d’un produit.
- Vendre ou offrir à la vente des produits ou services aux consommateurs
donnant droit à titre gratuit à une prime consistant en produits, biens ou

34
Lahcen Louchahi : « Droits d la concurrence et circuits de distribution au Maroc » p : 66

38
services sauf qu’ils sont identiques à ceux qui font l’objet de la vente ou
de la prestation.

Ainsi que, cette loi a interdit aux opérateurs économiques de pratiquer à


l’égard de leurs partenaires le refus de vente, le refus de délivrer la facture
d’achat, le stockage clandestin des produits et toutes les méthodes
discriminatoires de vente. Le but recherché par le législateur est de
contrecarrer toutes les manœuvres spéculatives susceptibles de porter atteinte
au fonctionnement normal du marché.

En s’inspirant de la législation française, le droit de concurrence marocain a


renforcé les conditions d’une compétitivité loyale par l’interdiction des
pratiques anticoncurrentielles quel qu’en soit l’origine dès qu’elles ont des
effets sur le fonctionnement du marché. Ces pratiques peuvent prendre la
forme d’ententes sur les prix, sur la répartition de marché ou encore visant à
éliminer un concurrent du marché.

L’abus de position concerne le refus de vente, les ventes liées ou encore


l’imposition d’un prix minimum de revente. Une seule condition est
nécessaire pour que la prohibition soit appliquée, il faudra que ces pratiques
entravent le fonctionnement normal du marché 35.

Ce qu’il faut bien considérer, c’est que l’état de la position dominante n’est
pas prohibé en lui-même. Le fait d’être en position dominante dénote au
contraire de la part de l’entreprise une grande performance sur le plan
économique.

Ce qui en revanche prohibé c’est l’exploitation abusive de cette situation


dominante dans la mesure où elle porte atteinte à la concurrence.

35
Lahcen Louchahi : « Droits d la concurrence et circuits de distribution au Maroc » p : 68

39
Donc la position dominante est l’expression d’une performance
économique. D’ailleurs, on ne peut interdire la position dominante sous peine
justement de sanctionner les entreprises de les paralyser en quelque sorte, de
bloquer leur développement.

Par contre, la loi interdit qu’une entreprise qui se trouve dans une situation
de position dominante exploite, abuse de cette situation au détriment, bien
entendu, à la fois de ses concurrents et des consommateurs 36.

A ce stade de réflexion, la question qui se pose est la suivante :

 Quelles sont les pratiques abusives qu’on peut dénoter et qui


constituent cet abus de position dominante ?

Il s’agit des pratiques qui portent sur le prix : soit une augmentation artificielle
des prix, soit une baisse artificielle des prix. Il s’agit également des pratiques qui
portent sur les conditions de vente tel que les remises de fidélité 37. On peut
ajouter les pratiques qui concernent les relations commerciales avec des
partenaires. (Le refus de vente, le refus de communication des informations sur
le produit ou sur les conditions de vente, la rupture des relations commerciales
sans motifs valable, les clauses d’exclusivité et enfin l’imposition de prix de
vente ou de conditions particulières au distributeurs).

Toutes ces pratiques qui sont anticoncurrentielles sont établies à partir du


moment où on apporte la preuve qu’une entreprise ou un groupe d’entreprises
qui sont placés dans une position dominante abusent ce cette situation 38 .

36
Mohamed MERNISSI : « Détermination de la position dominante et pratiques constituant l’abus de position
dominante ». Actes du colloque organisé par l’institut Marocain du Droit des Entreprises « IMADE » : Le droit
de la concurrence » 2002. P :67.
37
Les remises de fidélité : sont un moyen pour attacher la clientèle, pour qu’elle n’aille justement pas chez les
concurrents. Il s’agit donc d’une pratique anticoncurrentielle.
3838
IDEM, P :71
40
La loi sur la liberté des prix et de la concurrence a institué un contrôle sur la
dimension des entreprises pour empêcher les concentrations excessives qui sont
de nature à faire disparaitre toute concurrence effective sur le marché.

Le contrôle des opérations n’est pas un contrôle facile. Il faut rechercher un


juste équilibre entre deux impératifs qui peuvent sembler parfois difficilement
conciliables. Il faut bien entendu éviter la mise en place de structures nocives
pour la concurrence, mais d’un autre côté, il ne faut pas perdre de vue la
nécessité majeure de permettre aux entreprises de se développer, et en particulier
face à la concurrence internationale. Ce contrôle ne peut se faire qu’à priori,
parce qu’il parait difficilement concevable d’envisager après cout un
démantèlement de la nouvelle structure.

Quant au domaine d’application et pour la mise en œuvre de la procédure de


contrôle, il faut la réunion de deux conditions. D’abord, il faut que l’on se trouve
en présence d’une opération de concentration, ensuite il faut que cette
concentration dépasse un certain seuil.

S’agissant donc de l’opération de concentration, celle-ci résulte en premier lieu


de tout acte, quel que soit sa forme, et qui emporte transfert de propriété ou de
jouissance sur tout ou partie des biens, droits et obligations de l’entreprise.
Alors, même si cette disposition ne vise pas expressément les sociétés, le
législateur a visé essentiellement les techniques du droit des sociétés qui
permettent de placer une société sous la domination d’une autre, en particulier
les fusions, les scissions, les apports partiels d’actifs, les prises de participations
et la création de filiales communes. De même, cette disposition vise les
techniques classiques du droit commercial, par exemple, la gérance libre du
fonds de commerce.

L’opération de concentration peut résulter de tout acte qui a pour objet ou pour
effet de permettre à un ou plusieurs groupes d’entreprises d’exercer directement
ou indirectement une influence déterminante sur une ou plusieurs autres
41
entreprises. Cette formule vise toutes les formes d’intégration intellectuelle, en
particulier les contrats de distributions exclusive, les franchises, et les contrats
de sous-traitance.

En vertu de l'article 12 de la loi n°104-12, le contrôle des concentrations


s'applique aux opérations qui atteignent l'un des seuils suivants :

 Chiffre d'affaires total mondial de l'ensemble des entreprises supérieur à


750 millions de dirhams (environ 70 millions d'euros) ("seuil mondial") ;
ou
 Chiffre d'affaires réalisé au Maroc par deux au moins des entreprises
supérieures à 250 millions de dirhams (environ 23 millions d'euros)
("seuil marocain") ; ou
 Part de marché cumulée au Maroc, ou sur une partie substantielle du
Maroc, supérieure à 40% ("seuil de part de marché").

Ces seuils sont alternatifs, ce qui signifie que si l'un d'entre eux est atteint, une
notification préalable est en principe requise.

Conformément à la pratique décisionnelle, le Conseil considère que le seuil


marocain est atteint si au moins deux parties dépassent ensemble le seuil de 250
millions de dirhams.

On a trois exceptions qui s’applique à ce stade, le premier cas de création d'une


entreprise commune qui n'est pas de plein exercice. Le Conseil a confirmé dans
des décisions que seule la création d'entreprises communes de plein exercice,
c'est-à-dire opérant de manière autonome sur un marché, constitue une
concentration impliquant donc une obligation de notification.

La pratique décisionnelle du Conseil fournit des indications sur la manière


d'évaluer le critère de "plein exercice", en particulier dans le secteur de l'énergie
:

42
Dans une décision n°77/D/19 39, le Conseil a conclu que l'entreprise commune
n'était pas de plein exercice dans la mesure où ses ventes étaient exclusivement
destinées à l'une de ses sociétés mères ;

Dans une décision n°101/D/1940 le Conseil a également conclu que deux


entreprises communes n'opéraient pas en tant qu'acteurs économiques
indépendants sur le marché, les ventes de la première entreprise commune étant
exclusivement dédiées à l'une de ses sociétés mères et la seconde entreprise
commune ayant une fonction auxiliaire par rapport aux activités commerciales
de ses sociétés mères.

Le deuxième cas de restructuration interne dont le Conseil a également


confirmé dans une décision n°01/D1941 que les réorganisations ou
restructurations internes n'étaient pas soumises au contrôle des concentrations.
En effet, ces opérations n'impliquent pas de modification de la structure de
contrôle de l'entité, cette dernière appartenant toujours au même groupe après
l'opération.

D'autres décisions en 2020 ont également confirmé cette analyse.

Le troisième cas est celui d’absence d'activité de la cible au Maroc sous


conditions. Le Conseil a conclu dans des cas limités que certaines opérations
n'étaient pas soumises à l'obligation de notification préalable en se fondant sur
l'article 1 de la loi n°104-12 selon lequel la loi s'applique aux opérations
susceptibles d'avoir un objet ou un effet sur la concurrence sur le marché au
marocain (ou sur une partie substantielle de celui-ci).

39
Décision du 12 septembre 2019 relative à la création d'une entreprise commune entre Nareva Enel Green
Power Maroc et l'ONEE.
40
Décision du 26 décembre 2019 relative à la création de deux entreprises communes respectivement par EDF
Renouvelables / Masdar / Green of Africa Investment et EDF Renouvelables / Masdar / Masen Capital .
41
Décision du 30 janvier 2019 relative à la fusion entre Al Omrane Meknès et Al Omrane Fès.
43
Jusqu'à présent, cette exception n'a été acceptée que dans les circonstances
limitées suivantes 42:

 La cible ne réalisait pas de chiffre d'affaires et n'était pas présente au


Maroc et ne prévoyait pas de s'y développer ;
 Le ou les acquéreurs n'étaient pas actifs au Maroc (y compris via leurs
filiales et leurs participations en cas de contrôle conjoint) dans le même
secteur que la cible et n'avaient pas l'intention de se développer dans ce
secteur au Maroc.
B- Les ententes en droit marocain

L’entente anticoncurrentielle est un accord ou une action concertée qui a pour


effet ou peut avoir pour objet d’empêcher, de restreindre, ou de fausser le jeu de
la concurrence sur un marché de produits ou de services déterminés.

Le droit marocain interdit les accords entre entreprises, dans le cas où ces
accords sont susceptibles d’affecter le commerce et qui ont pour objectif de
fausser ou de restreindre le jeu de la concurrence.

Il s’agit particulièrement, des accords, décisions ou pratiques qui fixent les prix
d’achat ou de vente, ou d’autres conditions de transaction, ou qui limitent la
production, les investissements, les débouchés ou le développement technique,
ou qui répartissent les marchés ou les sources d’approvisionnement, ou qui
appliquent des conditions inégales aux partenaires commerciaux, pour prestation
équivalente, ou qui subordonnent la conclusion de contrats avec les partenaires
commerciaux, à des prestations sans lien avec l’objet du contrat.

Certaines ententes ne pourront pas être sanctionnées, dans la mesure où elles


peuvent présenter un caractère bénéfique, dans certains cas :
42
Voir notamment la décision n°100/D/19 du 24 décembre 2019 relative à l'acquisition par la Caisse des dépôts
et consignations et Total Quadran du contrôle en commun de JMB Solar Nogara et Quadran Nogara ; Décision
n°102/D19 du 26 décembre 2019 relative à la création d'une entreprise commune entre Saudi Aramco
Development Company et Korea Shipbuilding & Offshore Engineering ; Décision n°91/D/19 du 25 novembre
2019 relative à l'acquisition par la Caisse des dépôts et consignations de 77% de La Poste et du contrôle exclusif
indirect de CNP Assurances.
44
Ne sera donc pas sanctionnée toute pratique 43 :

 Contribuant à améliorer la production ou distribution de produits


 Visant à promouvoir le progrès technique ou économique

Si : Une partie équitable du profit résultant de cette pratique est réservé aux
utilisateurs, Et que les entreprises intéressées ne subissent pas de restrictions
autres que les indispensables pour atteindre ces objectifs. Il ne soit pas donné à
des entreprises la possibilité d’éliminer la concurrence, pour une partie
substantielle des produits en cause.

Ils ne seront pas non plus sanctionnés les accords à priori anticoncurrentiels,
qui n’affectent qu’une partie minime du marché dû à la faible position des
intéressés sur le marché en cause, ainsi que les accords collectifs conclus entre
organisations représentatives d’employeurs ou de travailleurs, puisque leur objet
n’est pas de fausser ou restreindre la concurrence (objet social), et également les
accords de recherche et de développement, ni les accords de transfert de
technologie. Ils sont considérés comme compatibles avec la concurrence
puisqu’ils visent à augmenter la compétitivité et à promouvoir l’innovation.

Les ententes peuvent donner lieu à des sanctions civiles ou pénales


lorsqu’elles sont portées devant les juridictions et à des sanctions de nature
administratives.

Dans un premier lieu, on a les sanctions civiles, dans la mesure où aux termes
de l’article 10 de la loi 104-12, les ententes prohibées par cette loi sont nulles de
plein droit. Il s’agit là d’une nullité absolue qui implique obligatoirement un
retour intégral à la situation d’avant l’entente. Etant d’ordre public, cette nullité
peut être soulevée par les parties et par les tiers comme elle peut être relevée
d’office par le juge et ce à toutes les phases de la procédure.

43
Article 9 de la loi 104-12
45
L’article 10 al. 2 précise cependant que cette nullité « ne peut être opposées au
tiers par les parties ». Cette précision implique une double conséquence :

 Renforcement du caractère sanctionnateur de la nullité puisque les parties


à l’entente ne peuvent se prévaloir à l’encontre des tiers de cette nullité
pour se dérober de leurs engagements à leur égard. Aussi les tierces
victimes des conséquences dommageables de cette nullité peuvent
engager une action en réparation conformément aux règles de droit
commun.
 Renforcement de la sécurité juridique des affaires puisque les tiers
peuvent opposer aux parties à l’entente sa nullité pour sauvegarder leurs
droits.

Dans un second lieu on a des sanctions pénales, en application de l’article 75


toute personne physique qui, frauduleusement ou en connaissance de cause, aura
pris une part personnelle dans la conception, l’organisation, la mise en œuvre ou
le contrôle d’une entente, est punie d’un emprisonnement de deux mois à un an
et d’une amende de 10 000 à 50 000 dirhams ou de l’une de ces peines
seulement. Le tribunal peut ordonner que sa décision soit publiée intégralement
ou par extraits dans les journaux qu’il désigne, aux frais du condamné.

§2 : Le conseil de concurrence :

D'après les termes de l'Article 166 de la Constitution : Le Conseil de la


Concurrence est une institution indépendante chargée, dans le cadre de
l'organisation d'une concurrence libre et loyale, d'assurer la transparence et
l'équité dans les relations économiques, notamment à travers l'analyse et la
régulation de la concurrence sur les marchés, le contrôle des pratiques
anticoncurrentielles, des pratiques commerciales déloyales et des opérations de
concentration économique et monopole.

46
Cependant, la création du conseil de la concurrence constitue un saut qualificatif
et une réforme importante visant à renforcer la politique éco-concurrentielle.

Pour bien déterminer le rôle du conseil de la concurrence, il s’avère nécessaire


d’étudier sa composition et ses attribution (A), ainsi que son organisation
financière et administrative (B).

A- La composition et les attributions du conseil.

Le fonctionnement du conseil de la concurrence marocain est fondé,


particulièrement, sur les textes de la loi n° 20-13 relative au conseil de la
concurrence et ceux de la loi n° 104-12 relative à la liberté des prix et de la
concurrence.

D’après l’article 9 de la loi 20-13, Le conseil se compose du président, de


quatre vice- présidents et de huit membres conseillers. Ce conseil comprend,
outre le président, les membres compétents suivants :

- deux membres magistrats, vice-présidents ;

- quatre membres choisis en raison de leur compétence en matière économique


ou de concurrence, dont un vice-président ;

- deux membres choisis en raison de leur compétence en matière juridique, dont


un vice-président ;

- trois membres exerçant ou ayant exercé leurs activités dans les secteurs de
production, de distribution ou de services ;

- un membre choisi en raison de sa compétence en matière de protection du


consommateur.

47
Le président est nommé par dahir, pour une durée de cinq ans renouvelable une
seule fois, et les autres membres du conseil sont nommés, pour une durée de
cinq ans renouvelable une seule fois 44.

Pour un conseil de la concurrence indépendant, l’article 11 de la loi 20-13


précise que le président et les vice-présidents autres que magistrats doivent,
pendant la durée d'exercice de leurs fonctions, suspendre toute activité
professionnelle ou commerciale dans le secteur prive. Ils doivent également
suspendre leur participation dans les organes de direction, de gestion et
d'administration des entreprises privées ou publiques poursuivant un but lucratif.

Le conseil peut siéger soit en formation plénière, soit en commission


permanente, soit en sections. La commission permanente est composée du
président et des quatre vice-présidents. Le conseil ne peut valablement siéger et
délibérer en formation pentière que si au moins huit membres dont un membre
magistrat sont présents. Le règlement intérieur du conseil détermine les règles de
quorum applicables aux autres formations du conseil. Les formations du conseil
délibèrent à la majorité des membres présents. En cas de partage égal des voix,
celle du président de la formation est prépondérante 45.

La nouvelle loi a conféré au conseil de la concurrence plus davantage, dont


trois nouveaux pouvoirs : Pouvoir décisionnel, pouvoir d'enquête et pouvoir
de sanction, et cela afin de pallier les écueils constatés lorsque cette institution
n'était qu'un organe consultatif.

Le Conseil de la Concurrence dispose également d'un véritable pouvoir


décisionnel en matière de concentrations et de pratiques anticoncurrentielles
(ententes anticoncurrentielles et abus de position dominante, pratiques de prix
abusivement bas).

44
Article 10 de la loi 20-13.
45
Art 14 de la loi 20-13
48
Outre le pouvoir d'instruire, le Conseil de la concurrence peut mener des
enquêtes concernant les pratiques anticoncurrentielles et le contrôle des
opérations de concentration économique.

A ce sujet, on rappellera quelques faits évoqués dans le rapport annuel du


Conseil de la concurrence de l'année 2013. Ce dernier avait relevé de forts
indices d'ententes et sollicité des services administratifs compétents (Direction
des Prix et de la Concurrence) pour enquêter sous autorisation judiciaire. Ces
demandes étaient restées sans suite46.

Ainsi que, le Conseil de la concurrence est dorénavant habilité à prendre des


mesures conservatoires et à prononcer des sanctions pécuniaires pouvant
représenter jusqu'à 10% du chiffre d'affaires mondial ou national de l'entreprise
contrevenante (ou des parties impliquées).

Le conseil de la concurrence est tenu de veiller au respect du libre jeu de la


concurrence dans le cadre de l'économie de marché, afin de garantir la
compétitivité du tissu économique national et assurer un bon rapport qualité prix
pour le bien être du consommateur, et également d’informer et sensibiliser
l'opinion publique et les acteurs économiques et sociaux (Colloques, séminaires,
conférences,), étudier la concurrentialité de différents secteurs et branches
d'activité, élaborer le rapport annuel, et intervenir, quand il est saisi, en cas :

 D'ententes anticoncurrentielles pouvant empêcher, restreindre ou fausser


le jeu de la concurrence (fixation des prix, partage géographique du
marché...)
 D'abus de position dominante ou de situation de dépendance économique
(ventes liées, refus de vente...)
 De concentration de nature à porter atteinte à la concurrence.

La compétence du conseil de la concurrence est limitée à savoir :


46
Walid Boudize « Le conseil de la concurrence au Maroc. »

49
 Pratique de dimension locale affectant le marché :

Les autorités gouvernementales compétentes, se voient attribuer des pouvoirs


d'injonction et de transaction pour les pratiques entravant la concurrence sur un
marché de dimension locale et n'affectant pas le marché national et cela
conformément à l'article 43 de la loi 104-12. Cette compétence des autorités
gouvernementaux sera nécessairement résiduelle : elle ne pourra s'exercer que si
l'Autorité de la concurrence n'a pas, au préalable, été saisie des pratiques
concernées par une entreprise ou par un organisme habilité à le faire (notamment
organisations professionnelles, organisations de consommateurs agréées et
chambres de commerce), ou ne s'est pas saisie d'office sur proposition du
rapporteur général47.

Dans ce sens, les autorités gouvernementales seront compétentes pour enjoindre


aux entreprises de mettre un terme aux pratiques visées aux articles 6, 7 ,8 et 9,
(ententes illicites, abus de position dominante et prix abusivement bas) dont
elles sont les auteurs lorsque seront réunies les deux séries de conditions
suivantes :

- les pratiques affecteront un marché de dimension locale

- le chiffre d'affaires réalisé par chacune des entreprises au Maroc lors du dernier
exercice clos ne dépassera pas 50 millions de dirhams et leurs chiffres d'affaires
cumulés ne dépasseront pas 10 millions dirhams et 50 millions de dirhams.
(Projet décret n 2-14-652 pris pour l'application de loi 104-12).

Ces seuils de chiffres d'affaires assez élevés confèrent à l'autorité


gouvernementale un champ d'intervention potentiellement étendu.

L'autorité gouvernementale pourra également, si les mêmes conditions sont


remplies, proposer aux entreprises concernées de transiger. Le montant de la
transaction ne pourra pas excéder 500 000 dirhams ou 5 % du dernier chiffre

47
Idem,
50
d'affaires connu au Maroc si cette valeur est plus faible, Les modalités de la
transaction doivent être fixées par voie réglementaire Notons aussi que
L'autorité gouvernementale devra informer l'Autorité de la concurrence des
transactions conclues (article 43, al 4 loi 104-12).

 Droit d'évocation :

Conformément à l'article 18 de la loi 104-12, l’autorité gouvernementale peut


à titre exceptionnel, une fois la décision du conseil de la concurrence rendu,
évoquer une opération présentant un caractère stratégique pour le pays, au nom
de considérations d'intérêt général autres que la concurrence 48.

Le texte encadre des motifs d'intérêt général autres que le maintien de la


concurrence, à savoir le développement industriel, la compétitivité des
entreprises en cause au regard de la concurrence internationale ou la création ou
le maintien de l'emploi. Ces dispositions ne manqueront pas de soulever des
difficultés à raison de leur interférence avec l'appréciation du bilan concurrentiel
confié au conseil de la concurrence.

Dans le même sens, S'elle décide d'évoquer une décision du conseil de la


concurrence, l'autorité gouvernemental devra prendre une décision motivée
statuant sur l'opération ; cette décision pourra éventuellement être conditionnée à
la mise en œuvre effective d'engagements49. La motivation de sa décision ne
devrait pas consister en la simple reprise des motifs d'intérêt général avancés
pour justifier l'exercice du pouvoir d'évocation.

La loi prévoit également que l'autorité gouvernemental doit statuer dans un


délai de 30 jour ouvré à compter de la réception de la décision de l'autorité de la

48
L’article 18 de la loi 104-12 qui stipule que « ... l'administration peut évoquer l'affaire et statuer sur
l'opération en cause pour des motifs d'intérêt général autres que le maintien de la concurrence et, le cas
échéant, compensant l'atteinte portée à cette dernière par l’opération. Les motifs d'intérêt général, autres que
le maintien de la concurrence, pouvant conduire l'administration à évoquer l'affaire sont, notamment, le
développement industriel, la compétitivité des entreprises en cause au regard de la concurrence internationale
ou la création ou le maintien de l’emploi... »
49
Art 18. -al 3. Loi 104 -12.
51
concurrence ; mais dans le même temps elle n'impose aucun délai au conseil de
la concurrence pour transmettre cette décision l'autorité gouvernemental (c’est
une lacune dans l'encadrement des délais de procédures).

Finalement, une fois adoptée, la décision de l'autorité devra être transmise sans
délai au conseil de la concurrence (. art. 18 -al, loi 104 -12).

 L'application de la compétence du Conseil de la concurrence dans les


secteurs soumis à une régulation sectorielle :

Selon l'article 109 de la loi n° 104.12 précité : « hormis les cas où les rapports
entre les instances de régulation sectorielle et le conseil de la concurrence sont
réglés par les textes institutifs desdites instances, la compétence du conseil de la
concurrence, telle que prévue par la présente loi, sera appliquée à l'égard des
secteurs relevant des autres instances de régulation à une date qui sera fixée par
voie réglementaire. »

B- Le volet procédural du conseil :

La saisine constitue le premier acte de déclenchement de la Compétence du


Conseil.

Les personnes habilitées à saisir le conseil de la concurrence sont :

 Toute Personne physique.


 Une entreprise qui s'estime victime de l'une des pratiques mentionnées
aux articles 6, 7 et 8 de la loi n°104-12, peut saisir le conseil de la
concurrence. Il peut également être saisi par l'administration de :
- Toutes les pratiques mentionnées aux articles 6, 7 et 8 de la loi n°104-12 ;
- Des faits susceptibles de constituer une pratique anticoncurrentielle ;
- Des manquements aux engagements pris en application de l'article 18 de
ladite loi Le conseil de la concurrence peut être consulté également par :

52
 Les commissions permanentes du Parlement : Selon l'article 5 de la loi
20-13, le conseil peut être consulté par les commissions permanentes du
Parlement sur les propositions de loi ainsi que sur toute question
concernant la concurrence.
 Le gouvernement : le conseil peut donner son avis sur toute question
relative à la concurrence à la demande du gouvernement.
 Les conseils des collectivités territoriales ;
 Les chambres de commerce, d'industrie et de services ;
 Les chambres d’agriculture ;
 Les chambres d’artisanat ;
 Les chambres des pêches maritimes ;
 Les organisations syndicales et professionnelles ;
 Les instances de régulation sectorielle : Le conseil recueille l'avis des
instances de régulation sectorielle concernées sur les questions de
concurrence relatives aux secteurs d'activité dont elles ont la charge, dans
un délai qu'il fixe, sans que ce délai soit inférieur à trente (30) jours. Le
conseil peut, le cas échéant, faire appel à leurs compétences et expertises
pour les besoins de l'enquête ou de l'instruction.
 Les associations de consommateurs reconnues d'utilité publique, dans la
limite des intérêts dont ils ont la charge.
 Par les juridictions : selon l'article 6, le conseil peut être consulté par les
juridictions sur les pratiques anticoncurrentielles définies aux articles 6, 7
et 8 de la loi n°104-12, toutefois, il ne peut donner un avis qu'après une
procédure contradictoire ; mais, si le conseil dispose d'informations déjà
recueillies au cours d'une procédure antérieure, il peut émettre son avis
sans avoir à mettre en œuvre la procédure prévue par la loi n°20-13.

53
Le conseil de la concurrence ne peut être saisi ou se saisir d'office de faits
remontant à plus de 5 ans s'il n'a été fait au cours de cette période aucun acte
tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction.

Pour l'application des articles 6, 7 et 8 de la loi n°104-12, le conseil peut, sur


proposition du rapporteur général, se saisir d'office de toutes les pratiques
susceptibles d'affecter le libre jeu de la concurrence. Il peut également, sur
proposition du rapporteur général, se saisir d'office des manquements aux
engagements pris en application des dispositions de l'article 18 de la loi n°104-
12 et des pratiques mentionnées à l'article 19 de la loi n°20-13.

Le rapporteur général désigne un rapporteur pour l'instruction de chaque affaire


Le président du conseil peut demander à l'administration de procéder à toute
enquêtes qu'il juge utiles (Art 28).

Mais avant d'arriver à ce stade, la procédure de l'enquête prévoit certaines


mesures qui visent à préserver les droits des personnes physiques ou morales
visées, ces derniers ont ainsi le droit d'être informées des résultats préliminaires
et d'y répondre avant l'adoption finale du verdict. L'instruction et la procédure
devant le conseil sont contradictoires sous réserves des dispositions particulières
art 29.

Les séances du conseil de la concurrence ne sont pas publiques seules les


parties en causes et le commissaire du gouvernement peuvent y assister, les
parties en cause peuvent se faire assister ou représenter par des conseillers
juridiques de leurs choix...etc.

Le Conseil de la concurrence ne peut donner son avis sur toute question de


concurrence qu'à la demande du Gouvernement, des collectivités territoriales,
des organisations professionnelles, des organisations de consommateurs agréées
ou encore des chambres de commerce, cette autorité de la concurrence pourra en
outre prendre l'initiative d'un tel avis. Elle pourra aussi recommander au ministre

54
de l'économie ou au ministre chargé du secteur concerné de mettre en œuvre les
mesures nécessaires à l'amélioration du fonctionnement concurrentiel des
marchés.

Dans le même sens, le conseil de la concurrence peut rendre une décision


d'irrecevabilité, s'il estime que les faits invoqués n'entrent pas dans le champ de
sa compétence ou ne sont pas appuyés d'éléments suffisamment probants.
D'après l'article 26, cette décision est transmise à l'auteur de la saisine et aux
personnes dont les agissements ont été examinés au regard des articles 6 et 7.

Ensuite, si l'examen du conseil relève des indices de prohibitions qui tombent


sous le coup des articles 6,7,8 et 9 il peut, selon l'article 24 de la loi prononcer
des mesures conservatoires, des astreintes, des injonctions ainsi que des
sanctions cites par la présente loi. S’il y a des sanctions pénales le conseil de la
concurrence adresse le dossier au procureur du Roi prés tribunal de 1er instance
compétente aux fins de poursuites.

D’après l’article 29, le président du Conseil de la concurrence peut procéder à


toutes enquêtes ou expertise qu'il juge utiles, ainsi qu’il peut demander à
l'administration de procéder à toutes enquêtes qu'il juge utiles et cela suivant
l'article 28 de la loi. Il désigne un rapporteur pour l'examen et le suivi de chaque
affaire (l'article 27 de la loi). Il peut également, chaque fois que les besoins de
l'enquête l'exigent, faire appel à toute expertise nécessitant des compétences
techniques particulières.

Selon les dispositions de l'article 44 de la loi 104-12, les recours contre les
décisions prises par le conseil de la concurrence et celles prises par
l'administration dans un délai de trente (30 jrs) à compter de la date de
notification de la décision devant la chambre administrative de la cour de
cassation en application de l'article 18, les recours contre les autres décisions du
conseil de la concurrence sont portés devant la cour d'appel de Rabat.

55
Section 2 : Le Cadre légal des ententes illicites au niveau international.

Certes que les pratiques anticoncurrentielles tel que les ententes illicites
peuvent s’exercer même sur le marché international, et ces pratiques peuvent
nuire aux entreprises des pays en développement, ce qui nécessite une
coopération internationale afin de lutter contre ces mesures anticoncurrentielles
(§2).

Dans le cadre de sa politique de coopération internationale, le Maroc a conclu


des accords dans but de parvenir à un accord général sur la politique de la
concurrence et cela dans le cadre du système commercial multilatéral (§1).

§1 : La politique internationale dans le cadre des ententes


anticoncurrentielles.

La création de l’OMC dont le Maroc est membre 50, ne s’est pas traduite par
l’adoption d’un arsenal de règles contraignantes destinées à lutter contre les
pratiques commerciales anticoncurrentielles dans le domaine des échanges
internationaux. Toutefois, plusieurs dispositions et instruments subordonnés
intégrés aux divers accords de l’OMC témoignent de l’importance des mesures
visant à garantir le fonctionnement concurrentiel des marchés pour le système
commercial international. Parmi ces accords figurent notamment l’AGCS51,
l’Accord sur les ADPIC 52, l’Accord sur les MIC53 et l’AMP54. La politique de la
concurrence occupe une place importante dans les textes relatifs à l’accession à

50
Le Maroc est Membre de l'OMC depuis le 1er janvier 1995 et Membre du GATT depuis le 17 juin 1987.
51
Accord général sur le commerce des services : « constitue l'annexe 1B de l'accord de Marrakech instituant
l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en 1994. Il s'agit d'un accord multilatéral de libéralisation des
échanges de services. »
52
Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce qui est reproduit à
l'Annexe 1 C de l'Accord de Marrakech instituant l'Organisation mondiale du commerce, signé à Marrakech, au
Maroc, le 15 avril 1994.
53
Accord sur les mesures concernant les investissements et liées au commerce (MIC)
Cet accord reconnaît que certaines mesures visant à favoriser l'investissement limitent et faussent les échanges
commerciaux. Il établit un comité sur les MIC qui, entre autres, surveillera la mise en œuvre de ces
engagements.
54
L'Accord sur les marchés publics à pour objet de garantir l'ouverture, l'équité et la transparence des
conditions de concurrence sur les marchés publics, un certain nombre de Membres de l'OMC ont négocié
l'Accord sur les marchés publics (AMP).
56
l’OMC (à savoir les séries d’engagements que les nouveaux membres doivent
souscrire lorsqu’ils accèdent à l’OMC), dans les examens des politiques
commerciales et autres instances de l’OMC, notamment le Conseil des ADPIC.
Ces dispositions et instances qui reconnaissent déjà de manière précise et
tangible le rôle de la politique de la concurrence dans le système commercial
international55.

Les liens entre politique de la concurrence et commerce commencent


également à être reconnus dans les ensembles de textes relatifs à l’accession de
nouveaux membres à l’OMC. Les groupes de travail chargés des accessions
s’intéressent de plus en plus à la politique de la concurrence. En octobre 2019,
36 nouveaux membres avaient accédé à l’OMC selon la procédure prévue à
l’article XII de l’Accord de Marrakech instituant l’Organisation mondiale du
commerce (« membres relevant de l’article XII »). Dans la grande majorité des
cas (80 % de ces accessions environ), le pays accédant a dû fournir des
informations sur le régime national applicable en matière de concurrence, ce qui
montre clairement que les membres de l’OMC voient la politique de la
concurrence comme un outil d’intégration économique important. De surcroît,
dans certains cas, le groupe de travail s’est penché sur les liens entre la politique
de la concurrence et d’autres questions liées au commerce 56.

Ainsi que, le mécanisme d’examen des politiques commerciales (MEPC) est un


autre volet de l’activité de l’OMC qui reconnaît à la politique de la concurrence
une importance croissante 57.

55
Robert D. Anderson, William E. Kovacic, Anna Caroline Müller et Nadezhda Sporysheva : « une note en vue de
la session II du 18ème Forum mondial sur la concurrence » tenu les 5 et 6 décembre 2019. P : 10.
56
IDEM, P :17
57
Annexe 3 à l’Accord de l’OMC, « Mécanisme d’examen des politiques commerciales », paragraphe A(i),
consultable à l’adresse : https://www.wto.org/french/tratop_f/tpr_f/annex3_f.htm. À noter que le Mécanisme
n’est pas « destiné à servir de base pour assurer le respect d'obligations spécifiques découlant des accords ni
pour des procédures de règlement des différends, ni à imposer aux membres de nouveaux engagements en
matière de politique » (MEPC, A(i)).
57
Beaucoup de membres de l’OMC considèrent aujourd’hui que la concurrence
joue un rôle essentiel dans le bien-être des citoyens, la croissance économique et
le développement. Il n’est donc guère surprenant que ce changement de
conception des pouvoirs publics et de comportement économique se soit traduit
par une augmentation rapide du nombre de régimes de concurrence ces dernières
années. De surcroît, la dynamique de démonopolisation, de libéralisation et de
privatisation observée dans certains secteurs, les progrès technologiques rapides
et l’ouverture du commerce international ont libéré un potentiel économique
sans précédent, avec les multiples conséquences qui s’ensuivent dans tous les
pays58.

L’exigence d’un droit de la concurrence au-delà des frontières nationales a


toujours une importance retombée, parfois très positives. Ainsi, les enquêtes et
les poursuites engagées contre les ententes jugées illicite par des juridictions
développées ou en développement peuvent faire cesser des pratiques de fixation
des prix et pratiques apparentées dans d’autres juridictions, même s’il ne s’agit
pas là de leur objectif officiel.

La multiplication des régimes de concurrence observée dans le monde depuis


quelques années a sans nul doute eu de nombreux effets positifs mais diverses
juridictions mènent des actions de promotion de la concurrence afin de tenter de
remédier aux effets anticoncurrentiels observés lorsque le droit de la
concurrence n’est pas appliqué de manière transparente, fiable et impartiale.

Dernièrement, en juillet 2019, le Groupe intergouvernemental d’experts du


droit et de la politique de la concurrence de la CNUCED a approuvé les
Politiques et procédures directrices en vertu de la section F de l’Ensemble de
principes et de règles équitables convenus au niveau multilatéral pour le contrôle
des pratiques commerciales restrictives (les politiques directrices), qui
fournissent des directives pratiques pour la mise en œuvre de la coopération en

58
Richard Whish et David Bailey, Competition Law (Oxford, 8e édition, 2015), p. 4.
58
matière de pratiques potentiellement anticoncurrentielles et de fusions ayant des
effets transfrontaliers 59.

Alors ce qui parait, c’est que ces activités menées par le Groupe de travail de
l’interaction du commerce et de la politique de la concurrence entre 1997 et
2003, de même que le travail colossal accompli (à l’époque et depuis lors) au
sein du RIC, de l’OCDE, de la CNUCED et d’autres organisations, constituent
sans nul doute une base solide pour examiner ces aspects. Bien qu’aucun
consensus ne se soit dégagé à l’époque sur la nécessité de parvenir à un accord
plus général sur la politique de la concurrence au sein de l’OMC, et même si le
Groupe de travail de l’OMC est actuellement « inactif », ce groupe continue
d’exister et pourrait servir d’espace de réflexion sur ces questions. Et il est
nécessaire d’encourager la poursuite du dialogue sur ces questions dans les
enceintes internationales qui sont ou ont déjà été actives.

L’OMC pourrait recueillir de manière systématique des informations


actualisées sur le cadre juridique et les instruments en place dans les pays
membres de l’OMC, offrir des possibilités d’échange de pratiques, notamment
dans les domaines situés à l’interface entre commerce et concurrence, et des
possibilités de coopération (y compris avec d’autres organisations
internationales) en matière de renforcement des capacités fondé sur
l’expérience60.

Dans le cadre du partenariat international, le Conseil a été sollicité par le


Groupe de la Banque mondiale pour l’élaboration d’une coopération visant
principalement le renforcement des capacités institutionnelles du Conseil via le
partage et l’échange d’expertise des parties et le développement d’une politique

59
CNUCED, Groupe intergouvernemental d’experts du droit et de la politique de la concurrence, dix-huitième
session, Genève, 10–12 juillet 2019 : Agreed conclusions, 12 juillet 2019,
https://unctad.org/meetings/en/SessionalDocuments/ciclpd2019_agreedconclusions_en.pdf.
60
Robert D. Anderson, William E. Kovacic, Anna Caroline Müller et Nadezhda Sporysheva : « une note en vue
de la session II du 18ème Forum mondial sur la concurrence » tenu les 5 et 6 décembre 2019. P : 42
59
à même de lutter contre les pratiques anticoncurrentielles. Les deux parties ont
signé un accord de partenariat en janvier 2020.

Dans le cadre de ce partenariat, trois formations ont été organisées. La


première a porté sur les techniques de perquisitions et d’interrogatoires au profit
des rapporteurs, en mars 2020. Animée par des experts du Groupe de la Banque
mondiale, ainsi qu’un expert du Département of Justice des Etats-Unis
d’Amérique et un rapporteur senior de l’Autorité de la Concurrence du
Royaume d’Espagne (CNMC), cette formation s’est déroulée sur 2 jours en
combinant exposés théoriques, exercices pratiques et mise en situation, ce qui a
permis de simuler une perquisition en entreprise quasi réaliste, et, in fine,
conforter les compétences des rapporteurs et mieux les outiller dans leurs
missions d’enquêtes qui permettent de constituer des faisceaux d’indices, voire
des preuves nécessaires dans certaines saisines.

La deuxième formation, organisée par visio-conférence en avril 2020 sur une


journée, a réuni les rapporteurs du Conseil, une équipe d’experts du Groupe de
la Banque mondiale et les rapporteurs de l’Autorité de la Concurrence du
Mexique. Cette dernière dispose d’une renommée internationale en matière de
recherche de preuves digitales dans le cadre des investigations. Cette formation
qui est venue conforter la première, a exclusivement été consacrée aux
perquisitions visant à découvrir des preuves digitales.

La troisième formation, organisée elle aussi par visio-conférence en juin 2020,


a porté sur la question de la procédure actuelle au Conseil de la concurrence
relative au traitement des concentrations économiques et sur un benchmark de
procédures simplifiées déjà existantes, notamment en France et au Canada. En
effet, l’accord de partenariat signé avec le Groupe de la Banque mondiale
préconise la révision et l’élaboration conjointes de guides par les Rapporteurs et
les Experts du GBM. L’un de ces guides concerne la procédure simplifiée du
traitement des concentrations économiques. Dans le contexte économique actuel

60
engendré par la pandémie du Covid–19, cette procédure est plus que sollicitée.
En effet, les Autorités nationales de la concurrence de par le monde se préparent
pour faire face à un nombre considérable de concentrations économiques –
alternatives obligées – dans le contexte de crise économique post pandémie 61.

En 2021, le Groupe intergouvernemental d’experts a tenu une réunion-débat,


dont les intervenants ont parlé des ententes illicites, l’un des intervenants a
expliqué que plusieurs secteurs faisaient l’objet d’ententes au Nicaragua,
notamment le transport aérien, les engrais et les pièces automobiles, et a décrit
les récentes poursuites engagées contre 30 cartels exerçant une forte influence
politique en Amérique latine. Il était indispensable de sanctionner les ententes
internationales et nationales pour empêcher la légitimation de ces dernières.
Concernant l’absence de cadre juridique permettant de partager des
informations, l’intervenant a proposé un accord sur le modèle de celui de
l’Organisation internationale de police criminelle, qui faciliterait les échanges
d’informations entre les autorités de la concurrence. Un autre intervenant a
insisté sur la nécessité de renforcer les règles et les procédures de la coopération
internationale dans le domaine de la lutte contre les ententes, en élaborant des
lignes directrices en la matière avec l’aide de la CNUCED et le concours du
Centre du droit et de la politique de la concurrence du groupe BRICS (Brésil,
Fédération de Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Nombre d’autorités
n’avaient pas encore intégré les outils de coopération internationale, et la
technologie numérique pourrait les aider à le faire 62.

61
Rapport annuel du conseil de la concurrence 2020. P : 114.
62
Rapport du Groupe intergouvernemental d’experts du droit et de la politique de la concurrence sur sa dix-
neuvième session Tenue au Palais des Nations, à Genève, du 7 au 9 juillet 2021. P :10.
61
§2 : L’intérêt d’un accord-cadre sur les mesures anticoncurrentielles.

La politique de la concurrence est aujourd’hui un élément fondamental du


cadre juridique et institutionnel dans lequel fonctionne l’économie mondiale,
alors que les pratiques anticoncurrentielles étaient autrefois principalement
analysées comme un phénomène national, désormais, de nombreux aspects de
l’application du droit de la concurrence comportent une importante dimension
internationale. Ainsi, une proportion non négligeable des procédures ouvertes
contre des ententes vise des accords de fixation des prix ou de répartition des
marchés qui franchissent les frontières nationales et qui ont même, dans
certaines affaires importantes, une envergure mondiale. Si rien n’est fait pour
empêcher ces pratiques, elles risquent d’anéantir les effets positifs du commerce
mondial63.

La politique de la concurrence a pris beaucoup d’importance dans le


programme de la politique commerciale internationale et joue un rôle de plus en
plus crucial dans le cadre de certains accords commerciaux régionaux. Le
programme commercial porte de plus en plus sur le renforcement des marchés,
ainsi que sur leur ouverture. À la suite de la réduction progressive ou de
l’élimination des obstacles érigés par le secteur public, notamment les droits de
douane et les quotas, le comportement des entreprises privées est de plus en plus
en mesure de réduire la concurrence tant nationale qu’internationale 64.

La question qui peut être poser dans ce cadre est la suivante : En quoi les
ententes anticoncurrentielles nuisent aux producteurs des pays en
développement ?

Les ententes sont des accords sur la fixation de prix ou la répartition des
marchés entre des fournisseurs en concurrence sur un marché, ces accords font

63
Robert D. Anderson, William E. Kovacic, Anna Caroline Müller et Nadezhda Sporysheva : « une note en vue de
la session II du 18ème Forum mondial sur la concurrence » tenu les 5 et 6 décembre 2019. P : 5.
64
Doc : « OPTIONS EN VUE DE L’INTERNATIONALISATION DE LA POLITIQUE DE LA CONCURRENCE » P :7.
62
augmenter les prix ou réduisent la disponibilité des intrants industriels ou des
installations nécessaires à la commercialisation d’un produit.

Par exemple, dans le cadre des procédures d’appel d’offres (tels que la
construction ou le revêtement, routier), les ententes visent souvent à coordonner
les soumissions présentées par les fournisseurs individuels65.

Les pratiques anticoncurrentielles – qu’elles se situent au niveau des marchés


locaux, des marchés internationaux de certains produits ou des acheteurs des
marchés internationaux – peuvent faire peser des coûts importants sur les
exportateurs et, par conséquent, miner leur capacité de rivaliser sur les marchés
internationaux. La prolifération de ces pratiques impose d’adopter et de faire
appliquer des règles élémentaires en matière de concurrence afin de garantir que
les coûts ne sont pas faussés et que les possibilités de mise sur le marché ne sont
pas fermées aux entreprises des pays en développement 66.

C'est pourquoi, la réglementation de la concurrence s'impose au niveau


international comme une condition fondamentale à l'exercice de la liberté
d'entreprendre.

Les efforts déployés pour parvenir à un accord général sur la politique de la


concurrence dans le cadre du système commercial multilatéral sont jusqu’à
présent restés infructueux. Le Groupe de travail de l’OMC chargé de
l’interaction du commerce et de la politique de la concurrence, qui a conduit des
travaux de 1997 à 2003 et a examiné l’opportunité de conclure un accord plus
général sur la politique de la concurrence dans le cadre de l’OMC, n’a plus
d’activité depuis 2004. Néanmoins, des dispositions relatives à la politique de la
concurrence figurent dans l’Accord général sur les tarifs douaniers et le
commerce (GATT), l’Accord général sur le commerce des services (AGCS),

65
Guide à l’intention des exportateurs des économies en développement : « Lutter contre les pratiques
anticoncurrentielles » 2012. P :4.
66
Idem, P : 3
63
l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au
commerce (ADPIC), l’Accord sur les mesures concernant les investissements et
liées au commerce (MIC), l’Accord (plurilatéral) sur les marchés publics (AMP)
et autres instruments de l’OMC. De même, alors qu’en 1997, lorsque le Groupe
de travail a commencé ses travaux, une cinquantaine d’économies seulement
avaient adopté une législation nationale en matière de concurrence, aujourd’hui,
plus de 130 pays membres de l’OMC en sont dotés dont le Maroc est membre
également67.

Il faut noter qu’il y a au niveau international des textes qui sont supérieurs tant
au niveau des textes qui sont supérieurs tant au niveau des pratiques
anticoncurrentielles, qu’au niveau des concentrations avec un certain nombre de
directives que les Etats devraient prendre pour modèle.

67
Robert D. Anderson, William E. Kovacic, Anna Caroline Müller et Nadezhda Sporysheva : « une note en vue de
la session II du 18ème Forum mondial sur la concurrence » tenu les 5 et 6 décembre 2019. P : 2
64
Deuxième partie :

L’encadrement processuel des ententes


anticoncurrentielles

65
Il apparait donc indispensable pour traiter la preuve, de parler de cette dernière
dans le « Public enforcement » et dans le « Private enforcement » (Chapitre 1).
Ainsi qu’il faudra ensuite parler d’autres mécanismes pour lutter contre ces
ententes (Chapitre 2).

Chapitre 1 : La preuve dans les ententes anticoncurrentielles

A l’encontre de la plupart des pratiques anticoncurrentielles, l’entente reste


une pratique qu’on ne peut pas déterminer avec précision dont la définition reste
des plus vagues. Ce qui rend la preuve d’existence et de détermination de
l’illicéité de l’entente difficile.

La question ne souffrirait peut-être pas de grandes difficultés si les textes


faisaient simplement état de contrats liant des commerçants. Or les textes relatifs
aux ententes économiques ne se réfèrent pas à cette institution, parfaitement
connue du droit privé. Ils mentionnent un certain nombre de circonstance –
conventions, ententes expresses ou tacites, coalitions, accords entre entreprises,
actions concertées – qui toutes recouvrent une idée de commune intention, mais
dont l’accumulation ne fait qu’augmenter l’ambiguïté de la notion qui leur est
sous-jacente68.

On distingue entre les acteurs publics et les institutions administratives dans ce


que l'on appelle la « sphère publique » ou, le « public enforcement » (Section 1).
D'autre part, les acteurs privés et les juridictions seront regroupés au sein de la «
sphère privée » de mise en œuvre du droit de la concurrence ou, « private
enforcement » (Section 2).

Section 1 : La preuve dans le « public enforcement »

L’entente anticoncurrentielle, pratique prohibé par l’article 6 de la loi sur la


liberté des prix et de la concurrence, est un accord ou une action concertée qui a
pour objet ou peut avoir pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le

68
Jean-Bernard BLAISE : « Le statut juridique des ententes économique » LIBRAIRIES TECHNICHE 1964.P :105.
66
jeu de la concurrence sur un marché déterminé. D’après cet article, on constate
essentiellement que pour l’existence d’une entente illicite, il faut qu’il y ait un
accord entre les entreprises (§1), et que l’objet de cet accord est d’empêcher, de
restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence (§2).

§1 : La preuve et la forme des ententes

A- L’existence d’accord.

En analysant l’article 6 de la loi 104-12, on constate que celui-ci vise toutes les
actions concentrées, conventions, ententes expresses ou tacites et accords sous
quelque forme que ce soit. Cela indique que le dessin du législateur par cette
accumulation des termes est de faire entrer dans le domaine d’application du
texte un phénomène à savoir l’entente illicite extrêmement varié dans ses
manifestations sans le fait de lier le juge par une formule précise pour que
certaines ententes mal caractérisées tentent d’échapper à être sanctionnées.

Dès lors, la portée de l’article 6 découle de deux points essentiels :

 Une définition large qui rend difficile la détermination de l’entente mais


cette dernière doit être étendu au maximum, sur le plan de l’accord entre
les membres.
 Une définition qui est plus ou moins limitée, dans le fait que, en tout cas,
doit avoir existé une rencontre de consentement.

Alors, l’entente est un accord entre les membres sans que ceux-ci se mettent
d’accord à se lier juridiquement. Ils ne s’engagent pas, mais décident
simplement d’adopter une certaine ligne de conduite, tant qu’il y aura intérêt et
ils se réservant la possibilité de changer d’attitude à tout moment.

Il s’agit donc d’une autre catégorie d’accord qui révèlent une unanimité
d’intérêt mais qui sont insusceptibles de créer des obligations de nature
juridique.

67
Autrement, en matière économique, le législateur cherche un résultat pratique
mais la seule chose qu’il prend en considération est de réglementer des atteintes
qui sont portées à la concurrence et non pas l’existence d’un lien juridique entre
les membres d’accord.

L’entente prend la forme de l’action concertée lorsqu’elle ne repose pas sur un


contrat générateur d’obligations à la charge des adhérents. On doit inclure dans
cette catégorie deux situations théoriquement différentes mais aboutissent au
même résultat :

- En premier lieu, un accord sans engagements est à la source de l’entente.


Par exemple, des entrepreneurs décident de se communiquer
régulièrement leurs barèmes de prix ou leurs conditions de vente, mais
sans que l’un des adhérents acquière le droit d’exiger des autres la
communication de ces documents. Ces accords seront généralement
verbaux.
- En second lieu, une convention se trouve bien à la base de l’entente, mais
il est impossible pour les adhérents d’en rapporter la preuve
conformément aux modes spéciaux du droit des obligations.

Dans ces deux hypothèses, qui, en fait tendent à se confondre dans tous les cas
d’ententes verbales, le résultat est identique : l’accord n’emporte aucun effet
nécessaire et l’entente ne sera vraiment constituée que lorsqu’une action
commune, par exemple, l’échange effectif des barèmes et l’alignement des prix
qui doit en résulter, sera venue le compléter.

Il en résulte que, devant les autorités administratives ou devant les juridictions


répressives, l’existence d’une action concertée requiert logiquement la preuve de
deux éléments distincts :

1. Celle de l’action commune effectivement suivie.


2. Celle de l’accord préalable.

68
Mais les autorités saisies ne sont pas tenues par les modes de preuve du droit
civil. L’accord pourra être prouvé par tous moyens, y compris les simples
témoignages et les indice. Dans certains cas il sera prouvé directement, dans
d’autres il sera présumé. 69

Dès lors, l’existence de l’accord reste toujours nécessaire en matière d’action


concertée, mais il faut des indices à partir desquels il pourra être présumé. Donc
il faut que les parties disposent d’une autonomie de décision suffisante les unes
par rapport aux autres.

Une entente ne peut résulter d’une simple situation de fait, comme par
exemple, la tenue d’une réunion au cours de laquelle a été abordé la question de
prix. De même la simple présence à une réunion de concertation sur le prix, de
personnes ignorant l’objet de cette réunion, ne constitue pas de la part de ces
dernières une manifestation de volonté exprimant leur adhésion à l’entente, dès
lors que ces personnes n’avaient pas appliqué par la suite les prix décidés lors de
cette réunion70.

Les parties à l’entente ne sont pas exclusivement celles qui exercent une
activité dans le secteur où s’est conclue l’entente. Le critère d’incrimination
c’est la participation d’une entreprise à l’entente. Mais en tout état de cause,
cette entreprise ne sera sanctionnée que si son accord de volonté est exempt de
vice.

Les ententes entre entreprises d’un même groupe n’excluent pas à priori
l’application de l’article 6 de la loi sur la liberté des prix et de la concurrence dès
lors que ces entreprises du même groupe possèdent leur volonté propre sur le
plan commercial, financier ou technique. L’opinion selon laquelle ces
entreprises forment une entreprise unique auxquelles il ne peut être reproché de

69
Jean-Bernard BLAISE : « Le statut juridique des ententes économique » LIBRAIRIES TECHNICHE 1964. P :110.

70
NOUR-EDDINE TOUJGANI : « Guide pratique du droit de la concurrence » 2006, P :3.
69
s’entendre avec elle mêmes, ne semble pas cohérente avec la logique
économique du droit de la concurrence71.

Dans ce cadre d’entente qui prend la forme d’action concertée, la preuve peut
être apportée par tous les moyens. En pratique, la preuve matérielle peut être
fondée sur un ensemble d’indices graves, précis et concordants.

La notion d’accord en cas d’entente est une question indépendante de


l’existence d’un acte juridique. Mais dans certains cas, les membres de cet
accord choisissent de s’unir et prennent soin d’assurer une stabilité plus grande à
leur engagement en s’obligeant juridiquement. Ici, l’entente repose sur un
contrat. En cas de conclusion d’un contrat écrit par les entreprises pour la
réalisation de leurs intérêts, et lorsque cet accord est contre l’intérêt du Marché
et ne respecte pas les règles imposées par la loi de la concurrence, les autorités
compétentes en la matière peuvent facilement prouver que l’entente est illicite.

Mais il y a des problèmes en ce qui concerne cette conclusion, deux questions


essentielles qui se posent :

 En premier lieu, une question de forme : Quelles sont les formes


juridiques qui conviennent le mieux aux divers types d’ententes :
associations, société, contrat innomé ; le problème est alors
essentiellement celui qui de la validité de l’entente au regard des règle de
droit civil et du droit commercial.
 En second lieu, une question de fond : quel est le contenu des
engagements souscrits par les membres de l’entente et l’on admet qu’il
peut aller jusqu’à la fusion complète des activités.

L’impossibilité de faire entrer les ententes dans le moule d’un acte juridique
particulier et unique conduit dès lors les auteurs, dans leur quasi-totalité, à
opérer une distinction fondamentale et à opposer l’entente proprement dite à la
71
NOUR-EDDINE TOUJGANI : « Guide pratique du droit de la concurrence » 2006, P :4.

70
forme qu’elle peut revêtir, contrat simple, association, société, et aux organes
qui peuvent être crées pour la gréer. L’entente économique, notion unitaire, peut
revêtir les formes juridiques les plus diverses. Mais il conviendra d’observer en
outre que, parmi ces formes, il n’en est aucune qui lui soit parfaitement
adaptée72.

Les notions, entente, coalition, accord entre entreprises, n’appartiennent pas


au vocabulaire traditionnel du droit des obligations marocain, mais pour
l’encadrement de la validité civile de la forme adoptée par l’entente, il faudrait
se reporter à l’ensemble du droit commun qui gouverne la matière.

Le choix de la forme juridique de l’entente dépend en premier lieu et


essentiellement de but économique propre à l’union qui va se réaliser. Elle
répond en second lieu à d’autres préoccupations, qui sont plus ou moins
étrangères à ce but.

Il faut distinguée entre les ententes de type sociétaires ou non sociétaire. Dans
l’entente de type non sociétaire, les membres poursuivent des buts différents ;
corrélativement, leurs obligations n’ont pas des contenus identiques. Ainsi en
est-il lorsque des entreprises concluent des contrats d’exclusivité d’achat ou de
vente. Dans la concession exclusive 73.

Dans l’entente de type sociétaire, au contraire, les parties ont en vue un but qui
leur est commun, ou qui, plus exactement, est le même pour tous. Ce sont ces
ententes que l’on désigne généralement sous le terme de « cartels ». Les formes
économiques de cartels, qui sont multiples, ont fait l’objet en économie politique
de classification désormais classiques 74 .

72
Jean-Bernard BLAISE : « Le statut juridique des ententes économique » LIBRAIRIES TECHNICHE 1964. P :130.

73
Jean-Bernard BLAISE : « Le statut juridique des ententes économique » LIBRAIRIES TECHNICHE 1964. P :131.

74
Baudin, Traité précit, T. I, La concentration, par J. Lajugie, P. 934 ; J. Marchai, Cours précit, T.I, P :897.
71
Dès lors, en cas d’existence d’un contrat dont le contenu est une entente illicite,
le problème de preuve ne se pose pas, car l’écrit prouve l’existence d’un accord
entre les parties. Mais, il est nécessaire de noter que c’est très rare de trouver des
entreprises qui décident de conclure un contrat dans ce sens.

La preuve d’entente anticoncurrentielle dans le cas d’existence d’écrit, est une


preuve matérielle fondée sur l’existence de documents se suffisant à eux même,
sur les constations des enquêteurs et sur les déclarations des parties ou des tiers
consignés dans les procès-verbaux.

B- L’objet d’accord.

L’article 6 de la loi sur la liberté des prix et de la concurrence vise à la fois


les ententes ayant un objet et/ou un effet restrictif de concurrence. Ces deux
notions sont bien distinctes qu’il convient de ne pas confondre.

La notion d’objet anticoncurrentiel permet d’appréhender des comportements


d’entente qui peuvent être dangereux pour le bon fonctionnement de la
concurrence75. Citons deux exemples :

 L’entente révélée au moment même où elle s’est nouée et qui n’a pas eu le
temps de produire ses effets négatifs (par exemple, des producteurs sont
convenus de ne pas fournir certains distributeurs dans l’hypothèse où ils
s’adresseraient à eux mais n’ont pas encore eu l’occasion de mettre cette
décision en pratique, des entreprises ont décidé d’appeler au boycott d’un
salon professionnel mais n’ont encore lancé aucun appel en ce sens…)
 Les accords qui comportent des clauses ou des modalités restrictives de
concurrence doivent être examinés pour vérifier si ces clauses ne vont pas
au-delà de ce qui est nécessaire à l’objectif de protection légitime visé par
l’accord et si, donc, elles ne sont pas restrictives de concurrence. Tel
serait le cas par exemple d’un accord de distribution conclu entre un

75
Nour-Eddine TOUJGANI : « Guide pratique du droit de la concurrence » P : 4
72
producteur et un distributeur qui prévoirait la fixation de prix de vente
communs.

Cette notion d’objet anticoncurrentiel, qui existe dans la plupart des


législations de la concurrence, est indispensable pour préserver le jeu
concurrentiel des marchés. En effet, il ne suffit pas de sanctionner les seules
ententes qui ont réussi, alors que l’on peut agir préventivement.

La notion d’effet anticoncurrentiel, pour sa part, conduit à analyser, au cas par


cas, les effets réels ou potentiels des pratique mises en œuvre. Les sanctions sont
généralement plus fortes lorsque l’atteinte à la concurrence est démontrée et
elles sont d’autant plus élevées que l’affectation de la concurrence, et donc
l’effet anticoncurrentiel, est sensible. En outre, une entente peut être condamné
du fait de ses effets, même s’il n’y a pas un objet anticoncurrentiel caractérisé.

Ces deux notions, d’objet et d’effet anticoncurrentiels, peuvent donc être


utilisées aussi bien séparément que cumulativement 76.

Donc, pour considérer une entente comme anticoncurrentielle, il faut que son
objet soit contre l’intérêt du Marché et de la loi de concurrence, plus que son
effet sur le Marché soit néfaste.

Comme il était déjà indiqué, l’entente peut prendre plusieurs formes, à savoir :
une pratique ou action concertée, une convention expresse ou tacite. Ces formes
sont des ententes illicites lorsqu’elles ont pour objet et pour effet d'empêcher, de
restreindre ou de fausser le jeu de la libre concurrence, et non pas seulement par
le seul fait de conclure un accord entre des entreprises pour la réalisation de
leurs activités.

L’entente peut, également prendre la forme d’un groupement ayant la


personnalité morale (société, association...), lorsque ce groupement a pour objet
de restreindre la concurrence par exemple, un regroupement d’opérateurs

76
Nour-Eddine TOUJGANI : « Guide pratique du droit de la concurrence » P : 6
73
économiques de nature à diminuer le nombre d’interlocuteurs sur le marché ou
lorsqu’il favorise des restrictions de concurrence via ses membres.

Dans tous les cas, il faut déterminer l’objectif de cette entente et son effet, car
on distingue toujours entre les bonnes ententes qui peuvent avoir un effet positif
sur le marché et l’économie du pays, par exemple l’entreprise peut utiliser des
moyens qui s’éloignent de l’entente anticoncurrentielle. Bien souvent, il s’agit
de sociétés qui ont de manière structurelle des excédents de production. La
meilleure solution pour cette société est de dire au conseil de la concurrence :
voilà nous sommes tous en excellente capacité de production, parmi nous il y a
des entreprises qui sont relativement performantes et d’autres qui ne le sont pas.

Si on fermait les non performants, et si nous participions tous au financement


de la fermeture, il s’agirait là d’une bonne entente qui est acceptée. La
profession s’engage à financer la fermeture des sites les moins rentables. Ou
alors, on va créer une filiale commune, réduire les capacités, et là on aboutira à
un problème qui relèvera du droit des concentrations. Mais, il faut toujours faire
attention à ne pas trop abuser de l’entente qui peut ou aurait pu affecter le
marché. En effet si on trop loin avec l’entente potentiellement nuisible à la
concurrence, on risque de créer de la justice.77

La preuve des ententes dans le cadre d'ententes expresses ne pose pas de


difficultés puisque la preuve d'un accord formel d'une entente ayant un objet
directement anticoncurrentiel se suffit à elle-même. C'est ce qu'on appelle les «
preuves directes »78 d'un accord. Ses preuves directes ont une valeur probatoire
absolue, puisque les autorités de concurrence n'ont nul besoin de les associer à
d'autres documents pour obtenir une présomption.

77
Michel GLAIS : « Les bonne et les mauvaises ententes », Acte du colloque organisé par l’Institut Marocain du
Droit des Entreprises, 2002. P :97.
78
« Les poursuites contre les ententes sans preuve directe d'un accord », OCDE, Synthèses, Août 2007.
74
Il existe plusieurs types de preuves directes qui permettent aux autorités de
déceler l'entente. Il est important de souligner qu'il existe « un principe de
neutralité des formes juridiques des ententes » 79. Au Maroc, Il est essentiel
d’assurer la neutralité concurrentielle, car les entreprises publiques participent à
un certain nombre de secteurs économiques clés et ont souvent peu de
restrictions quant à la portée de leurs activités. Récemment, les mesures qui ont
permis de rendre opérationnel le Conseil de la concurrence 80.

§2 : La preuve de l'abus de position dominante

L’application du droit de la concurrence suppose la réunion de trois


conditions cumulatives : l’affectation du marché intérieur ou une partie
substantielle de celui-ci, l’identification de la position dominante sur le marché
commun et l’exploitation abusive de cette position dominante. Il s’applique
aussi bien aux entreprises publiques qu’aux entreprises privées 81.

Ce n’est pas le droit de la concurrence qui définit la notion d’abus de position


dominante mais une jurisprudence de la juridiction de l’Union européenne :
« Une situation de puissance économique détenue par une entreprise qui lui
donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d’une concurrence effective sur le
marché en cause en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants
dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients, et
finalement, des consommateurs 82 .

Pour que soit identifiée une position dominante, il faut définir une part
substantielle du marché en fonction du marché des produits ou services
concernés et en fonction du marché géographique. Il convient de rappeler que la

79
A. GUILLOTIN, « La preuve et la forme des ententes », La Semaine Juridique Entreprise et Affaires, n°6, 9
Février 2012.
80
Diagnostic du Secteur Privé : « CRÉER DES MARCHÉS AU MAROC ». OCTOBRE 2019. P : 8.
81
Sanae EL HAJOUI : « Le nouveau droit de la concurrence au Maroc » 2016, P : 178.
82
CJCE, 13 février 1979, affaire des Vitamines n° 38, CJCE, 14 février 1978 United Brands 27/79 Rec 207.
75
constitution d’une position dominante (A) n’est pas en soi entachée d’illicéité.
C’est l’abus de domination (B) qui est sanctionné 83.

A- La preuve de la position dominante.

La notion de position dominante n’est pas définie par la loi 104-12, La


première définition a été donnée par l'arrêt Hoffman Laroche 84qui définit la
position dominante.

Pour prouver la position dominante, il faut dans un premier temps, que les
autorités de concurrence démontrent que l'entreprise est en situation de
domination sur un marché, en délimitant ce marché.

Dans un deuxième temps, les autorités doivent démontrer une domination sur
le marché. L'approche traditionnelle de la position dominante a été définie dans
l'arrêt « Continental CAN », comme « un comportement indépendant qui les
mettait en mesure d’agir sans tenir notablement compte des concurrents » 85.

La part du marché est l’indice le plus probant de l’existence d’une position


dominante. Une forte part du marché suffit à faire la preuve de la position
dominante. Il n’existe pas de chiffre précis, mais l’on admit généralement que
lorsque la part du marché dépasse les quatre-vingt pour cent, la position
dominante peut être présumée. A l’inverse lorsque la part du marché de
l’entreprise ou du groupe d’entreprise concernées est inférieur à trente pour cent
du marché en cause, elle présumé ne pas disposer d’une position dominante. Les
parts du marché sont le plus souvent calculées à partir des chiffres d’affaires
réalisées sur le marché concerné ou à partir des volumes commercialisés.

83
Sanae EL HAJOUI : « Le nouveau droit de la concurrence au Maroc » 2016, P : 178.
84
« Une situation de puissance économique détenue par une entreprise qui lui donne le pouvoir de faire
obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché en cause en lui fournissant la possibilité de
comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et
finalement des consommateurs ». CJCE, 13 février 1979, Hoffman Laroche, aff. 85/76.
85
CJCE, 21 février 1973, Continental Can, aff. 6-72.
76
Il est en tous cas indispensable, pour établir l’existence d’une position
dominante, de déterminer le marché en cause. La définition de ce marché
constitue en matière de position dominante, un point de passage obligé du
raisonnement. Il faut donc en préciser les trois composantes : le produit ou le
service constituant le marché, le type de clientèle qui caractérise la demande et
la dimension géographique. Le cas de position dominante le plus caractérisé est
la position de monopole 86.

Un autre critère à savoir « La puissance économique et financière », qui est une


appréciation de la situation financière de l’entreprise concernée et celle du
groupe auquel elle appartient ou avec lequel elle entretient des liens
économiques. Cette puissance peut être évaluée en fonction de plusieurs
éléments tels le chiffre d’affaires de l’entreprise concernée et du groupe auquel
elle est liée, le nombre et l’importance des accords financiers et économiques
conclus avec d’autres sociétés ou d’autres groupes, le degré d’intégration de la
société ou de son groupe, leur présence sur les marchés connexes au marché
pertinents.

Également, la situation concurrentielle dans la mesure où une entreprise ne


disposant pas d’une part de marché significative, peut néanmoins acquérir une
grande indépendance à l’égard de ses concurrents, en raison de la faiblesse de la
part individuelle de chacun d’eux et détenir dès lors une position dominante. A
l’inverse, une part de marché importante ne confère pas nécessairement une
position dominante si l’entreprise concernée est confrontée sur son marché à un
ou plusieurs concurrents de même puissance. Aussi pour caractériser un état de
domination, l’analyse de la part de marché est souvent associée à celle de la
situation concurrentielle du secteur concerné et de son évolution. Il s’en suit
qu’avec une même part de marché, deux entreprises peuvent indifféremment

86
NOUR-EDDINE TOUJGANI : « Guide pratique du droit de la concurrence » 2006, P :24.
77
être déclarées en position dominante ou non selon leur environnement
concurrentiel.

D’autres critères qualitatifs, le simple constat de la forte part de marché d’une


entreprise ne permet pas de conclure à lui seul à l’existence d’une position
dominante. D’autres facteurs d’ordre qualitatifs peuvent intervenir dans la
détermination d’une position dominante, sans toutefois être suffisants en eux
même. Ainsi si l’entreprise concernée dispose d’une avance technologique telle
qu’elle lui permet d’augmenter ses prix sans craindre une érosion de sa clientèle,
cette entreprise peut être considérée comme étant en position dominante. Il en va
de même d’une entreprise qui détient des marques d’une très forte notoriété
auprès des consommateurs, au point que les distributeurs ne peuvent se passer
de ces marques87.

B- La preuve de « l'abus » de position dominante.

Au préalable, il faut préciser un point important. Rappelons que la position


dominante n'est pas sanctionnée en tant que telle, mais c'est bien l'usage que
l'entreprise peut en faire. Ainsi des pratiques considérées comme abusives parce
que mise en œuvre par une entreprise en position dominante, ne seront pas
sanctionnées par les autorités de concurrence si elles sont le fruit d'entreprises en
situation de concurrence effective. Par exemple, une remise de fidélité ne sera
tenue pour anti-concurrentielle que si l'entreprise en est situation de position
dominante88.

La preuve de l'abus revient à démontrer « le caractère non-équitable de la


relation commerciale »89, à titre d’exemple, en cas des clauses contractuelles
anti-concurrentielles, L'exemple typique est celui des situations de ventes liées.
« (...)il n’y a pas lieu de considérer que la vente liée des machines de

87
NOUR-EDDINE TOUJGANI : « Guide pratique du droit de la concurrence » 2006, P : 25.
88
Hugo Doray : « La preuve dans les pratiques anti-concurrentielles ». 2013. P :24.
89
D.MAINGUY, J-L. RESPAUD, M. DEPINCE, « Droit de la concurrence », Litec, LexisNexis, p.286
78
remplissage et des cartons est conforme aux usages commerciaux. En outre et en
toute hypothèse, à supposer même qu’un tel usage soit établi, il ne suffirait pas à
justifier le recours au système de vente liée par une entreprise en position
dominante. Un usage même acceptable en situation normale, sur un marché
concurrentiel, ne saurait être admis dans le cas d’un marché où la concurrence
est déjà restreinte. »90. A cet égard, la Cour de Justice a notamment jugé que,
pour « une entreprise occupant une position dominante, le fait de lier
directement ou indirectement ses clients par une obligation d’approvisionnement
exclusif constitue un abus dans la mesure où elle prive le client du choix de ses
sources d’approvisionnement et barre l’accès du marché aux autres producteurs
»91.

Dans les cas des pratiques des ventes liées, la position dominante peut être
analyser comme une mise à profit pour éliminer le concurrent et simplifier la
structure de marché. Et pour l’élimination du concurrent sur un marché,
l’entreprise en position dominante peut faire recours à la pratique « des prix
abusivement bas » qui consiste à baisser les prix sur un marché donné, sans se
soucier des pertes réalisées dans le seul but de contraindre le concurrent à quitter
le marché.

« Des prix inférieurs à la moyenne des coûts variables (c’est à-dire de ceux qui
varient en fonction des quantités produites) par lesquels une entreprise
dominante cherche à éliminer un concurrent doivent être considérés comme
abusifs. Une entreprise dominante n' a, en effet, aucun intérêt à pratiquer de tels
prix, si ce n' est celui d' éliminer ses concurrents pour pouvoir, ensuite, relever
ses prix en tirant profit de sa situation monopolistique, puisque chaque vente
entraîne pour elle une perte, à savoir la totalité des coûts fixés ( c' est-à-dire de
ceux qui restent constants quelles que soient les quantités produites ), et une

90
TPICE, 6 octobre 1994, TETRA PAK, aff. T-83/91, point 137.
91
CJCE, 13 février 1979, Hoffman Laroche, aff. 85/7, points 89 et 90 - CJCE, 3 juillet 1991, Akzo, aff. C62/86,
point 149.
79
partie, au moins, des coûts variables afférents à l' unité produite ». 92C'est donc à
partir de cet arrêt que la notion de prix prédateurs fait son apparition en droit
communautaire. La Cour de Justice de poursuivre que « par ailleurs, des prix
inférieurs à la moyenne des coûts totaux, qui comprennent les coûts fixes et les
coûts variables, mais supérieurs à la moyenne des coûts variables doivent être
considérés comme abusifs lorsqu' ils sont fixés dans le cadre d’un plan ayant
pour but d’éliminer un concurrent. Ces prix peuvent, en effet, écarter du marché
des entreprises, qui sont peut-être aussi efficaces que l’entreprise dominante
mais qui, en raison de leur capacité financière moindre, sont incapables de
résister à la concurrence qui leur est faite. »93. La Cour de Justice nous décrit
donc une situation objective, basée sur une analyse comptable. La Cour de
Justice qualifie « d'abusive » une situation économique objective. On peut donc
en déduire qu'il n'y a pas besoin de preuves complémentaires.

L’exploitation abusive de position dominante est une notion souvent supposée


sui generis, une notion juridique indéterminée, inclassable, qui englobe des faits
matériels hétérogènes et qui ne correspond à aucune réalité économique. Pour
certains, l’abus de position dominante se distingue de l’abus de droit en ce qu’il
ne constitue pas l’exercice abusif d’un droit mais plutôt l’utilisation abusive
d’un pouvoir sur le marché.

Le droit de la concurrence n’interdit pas l’état de position dominante en tant


que tel et par conséquent on ne peut condamner une entreprise qui, grâce à ses
performances économiques, dépasse ses concurrents au point de dominer le
marché. L’interdiction ne concerne que l’exploitation abusive de cette position
dominante.

L’article 7 de la loi 104-12 énumère des pratiques susceptibles de constituer un


abus de position dominante (le refus de vente, les ventes liées, les conditions de

92
CJCE, 3 juillet 1991, Akzo, aff. C-62/86, point 71.
93
CJCE, 3 juillet 1991, Akzo, aff. C-62/86, point 72.
80
vente discriminatoires ou la rupture des relations commerciales au motif que le
partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées,
imposition de prix de revente, prix prédateur…). Cette liste n’est pas limitative.

En fait, la notion d’abus de position recouvre deux notions différentes :

 Les abus illicites par eux-mêmes :

Il s’agit des comportements qui contreviennent déjà à une définition juridique.


Dès lors qu’ils sont mis en œuvre par une entreprise en position dominante, de
tels comportement sont constitutifs d’abus au sens de l’article 7 de la loi N°104-
12.

 Les comportements qui ne sont abusifs que parce que l’entreprise


occupe une position dominante :

Certaines pratiques comme admissibles du point de vue de la concurrence


lorsqu’elles émanent d’entreprises ne détenant qu’une faible position sur leur
marché et étant de ce fait soumises à une concurrence effective, deviennent
anticoncurrentielles lorsqu’elles émanent d’une entreprise en position
dominante. D’une manière générale, sont considérés comme abusifs tous les
comportements excédant les limites d’une concurrence normale de la part d’une
entreprise en position dominante et qui ne trouvent d’autre justification que
l’élimination des concurrents effectifs ou potentiels ou l’obtention d’avantages
injustifiés.

 Un objet ou un effet restrictif de concurrence sur un marché :

Il y a lieu de rechercher si le comportement abusif a un objet ou un effet


restrictif de la concurrence. Seule une atteinte sensible à la concurrence peut
caractériser une pratique anticoncurrentielle. Ainsi, ne peuvent être sanctionnées
que les abus de position dominante dont les effet, actuels ou potentiels, sont
suffisamment tangibles.

81
En outre, l’infraction d’abus de position dominante ne peut être constituée que
s’il y a un lien de causalité entre le pouvoir de domination de l’entreprise et
l’abus qui lui est imputé. En d’autres termes, l’exploitation abusive soit être
réalisée par l’utilisation de la position dominante.

L’effet anticoncurrentiel de telles pratiques peut se produire sur un autre


marché de produits ou de services que celui sur lequel l’entreprise concernée
occupe une position dominante. Ainsi, lorsqu’une entreprise en position
dominante sur un marché donné subordonne l’octroi de remises sur ses produits
situés sur ce marché à l’achat de ses autres produits situés sur un autre marché,
c’est ce dernier marché qui est plus particulièrement affecté 94.

Une volonté de moderniser l'approche de l'abus de position dominante a émergé


au niveau européen, à partir des années 90's, elle est exprimée par le règlement
1/200312095, ce qui influence une forme de maturation du droit de la
concurrence et une forte influence de l'école Chicago.

Classiquement pour déceler une position dominante, les autorités de


concurrence appliquent le test-coût96, Les autorités de concurrence vérifient que
le prix n'est pas inférieur aux coûts variables moyens sur une période donnée et
que cela n'a pas entraîné une éviction du concurrent. Si le résultat est positif,
cela va créer une présomption, mais une présomption qui ne sera pas de même
nature que l'on se situe du point de vue de la juridiction européenne ou du point
de vue de l'Autorité de concurrence française. La modernisation consisterait
dans la possibilité de vérifier la condition préalable de récupération des pertes
engendrées par la baisse des coûts97.

94
NOUR-EDDINE TOUJGANI : « Guide pratique du droit de la concurrence » 2006, P : 28.
95
M-A. FRISON-ROCHE, « A propos du règlement communautaire sur l’application des articles 81 et 82 du
Traité : variations sur les lois de modernisation », in La modernisation du droit de la concurrence, L.G.D.J.p.31.
96
CJCE, 3 juillet 1991, Akzo, aff. C-62/86Z
97
Hugo Doray : « La preuve dans les pratiques anti-concurrentielles ». 2013. P :26.
82
D’après l'Autorité de la concurrence française, l'application du test coût fait
présumer « l'intention prédatrice ». « Le test apporte donc, dans la ligne de
l'arrêt AKZO ; la présomption que l'entreprise dominante a fait ce sacrifice en
vue d'évincer le ou les concurrents qu'elle cherchait à éliminer » 98. Cela implique
que les entreprises puissent apporter la preuve contraire « qu'il lui est en tout état
de cause, impossible de récupérer les pertes engendrées par la pratique des prix,
pour des raisons qu'elle doit expliquer »99.

La règle selon laquelle il appartient à l’entreprise dominante de prouver les


justifications objectives trouve un soutien dans la jurisprudence, notamment
dans les arrêts Irish Sugar précité et Michelin II.

La commission européenne a tiré des enseignements de sa pratique


décisionnelle pour consacrer le met 31 de la communication qui met à la charge
de l’opérateur dominant l’obligation d’apporter la preuve que les gains
d’efficience liés à ses pratiques contrebalancent les effets anticoncurrentiels de
ces dernières : « Il incombe à l’entreprise dominante de fournir toutes les
preuves nécessaires pour démontrer que le comportement en cause est
objectivement justifié ». Ainsi et concernant le refus de fourniture, la
communication précise : « Il incombe notamment à l’entreprise dominante de
démontrer l’incidence négative qu’une obligation de fourniture est susceptible
d’avoir sur son propre niveau d’innovation »100.

Le régime de la preuve et l'administration de la preuve d'une infraction


participent de la réalisation de la mission de protéger « l'ordre public
économique »101. L'existence d'une présomption pour les pratiques concertées
démontrent que les entreprises ont intégré la stratégie concurrence, voire la
stratégie de la sanction. Le régime probatoire des preuves aux infractions des

98
Cons.conc, 14 mars 2007, déc. n°07-D-09.
99
Cons.conc, 14 mars 2007, déc. n°07-D-09, point 178
100
Sanae EL HAJOUI : « Le nouveau droit de la concurrence au Maroc » 2016, P 191.
101
D.MAINGUY, J-L. RESPAUD, M. DEPINCE, « Droit de la concurrence », Litec, LexisNexis, p.21.
83
règles du droit de la concurrence doit donc venir suivre la politique
concurrentielle menée par les autorités de la concurrence102.

Section 2 : La preuve dans le « Private enforcement .

En vue d’avoir une économie mondialisée, le Maroc a opté pour la


modification des rapports entre le droit et l’économie. Car l'ouverture des
marchés dans les années 1990 a élargi le champ du droit économique et renforcé
les instruments juridiques comme moyen de régulation du marché et de la
concurrence.

Il faut faire la différence entre les rôles du « public enforcement » et du «


private enforcement ». L’action publique permet de prévenir, dissuader et punir
les comportements anticoncurrentiels par divers moyens (enquêtes, poursuite,
pouvoir d'injonction, d'amendes, programme de clémence, etc..), alors que
l'action privée ou civile vise, elle, à la réparation du préjudice causé aux
victimes par la pratique anticoncurrentielle.

Autrement dit, « Le private enforcement » désigne l’action privée engagée par


une victime en vue d’obtenir la réparation d’un préjudice qu’elle a subie. Le
droit de concurrence est dominé depuis longtemps par un esprit du « public
enforcement », dans la mesure où il tend à protéger l’intérêt général, l’ordre
public économique, et notamment le fonctionnement et la stabilité du marché.
Raison pour laquelle, en droit de concurrence marocain, comme en France
d’ailleurs, la régulation du marché et la lutte contre les pratiques anti-
concurrentielles, est assurée par le Conseil de la concurrence qui est une autorité
publique.

Cependant, il s’est avéré que la protection des consommateurs devra


représenter un enjeu majeur de la politique anti-concurrentielle, et un outil
parallèle de la régulation du marché. En effet, plusieurs auteurs ont affirmé qu’il

102
Hugo Doray : « La preuve dans les pratiques anti-concurrentielles ». 2013. P : 31.
84
fallait mettre en place un contentieux subjectif en faveur des différents acteurs
du marché économique, et ce en plus du droit objectif assuré par les autorités
publiques de la concurrence. Ce changement apparaît comme une source de la
mutation du contentieux concurrentiel.103

Le « private enforcement » relève donc de la compétence des juges nationaux


(§1). Ainsi que pour encourager les victimes des ententes illicites à intenter des
actions civiles contre les auteurs d’infractions aux règles de concurrence, il faut
que les autorités compétentes garantissent des systèmes efficaces permettant une
indemnisation intégrale aux victimes des agissements anticoncurrentiels,
notamment en permettant une réduction des obstacles probatoires (§2).

§1 : La preuve des ententes illicite devant le juge de droit commun.

Un arrêt de la cour d’appel de commerce de Casablanca n° 260/99 en date


du 4/3/1999104 précise que quand le litige relatif à la concurrence déloyale
oppose deux commerçants et en application du paragraphe 2 de l’article 5 de
la loi sur les tribunaux de commerce, ce litige et du ressort de ces derniers.
Que les faits pouvant induire la responsabilité délictuelle sont considéré
comme des actes de commerce lorsqu’ils sont du fait de commerçant dans
l’exercice de leurs activités.

Pour la démonstration d'une responsabilité civile, cette dernière repose sur


la preuve d'une faute (§1), d'un préjudice et d'un lien de causalité (§2).

A- L’établissement de la faute

D’après l’article 84 du Code des Obligations et Contrats promulgué par le


Dahir du 12 Août 1913 : « Peuvent donner lieu à des dommages-intérêts les faits

103
Benjamine LEHAIRE « L’action privée en droit des pratiques anti-concurrentielles : Pour un recours effectifn
des entreprises et des consommateurs en droit canadien et français », thèse en cotutelle, Doctorat en Droit

104
Arrêt non publier
85
constituant une concurrence déloyale … », D’autre part, la loi 104-12, évoque
les principales pratiques anticoncurrentielles, que l’on va placer sous l’égide de
la « concurrence déloyale ».

Ces faits de concurrence déloyale ne donnent lieu qu’à une action civile en
cessation des actes qui la constituent et en dommages intérêts.

La loi marocaine ouvre la voie judiciaire à toute personne ayant constaté des
agissements pouvant se rapporter à une concurrence déloyale, cette action en
concurrence déloyale, qui doit être portée devant le tribunal de commerce, est
une action en responsabilité civile, nécessitant une faute, un dommage et un lien
de causalité entre les deux.

Le demandeur doit prouver l’existence d’une faute qu’on peut définir comme
tout acte contraire aux usages du commerce, traduisant un excès dans
l’utilisation de la liberté du commerce et de l’industrie. De plus, la simple
usurpation est fautive ainsi que la confusion ou sa simple recherche.

La volonté d'obtenir réparation du préjudice subi oblige aux victimes à


rapporter la preuve d'un comportement fautif. La faute peut relever de deux
acceptions. Tout d'abord, la faute peut être définie objectivement, c'est-à-dire
que la preuve de la faute se confond avec la preuve de la violation de la loi.

Au Maroc, la nécessité de la mauvaise foi voire de l’intention de nuire n’est


plus exigé au profit du simple fait révélateur d’imprudence ou de négligence.
Ainsi la cour de cassation105 avait constater que : « Se prévaloir de sa bonne foi
en ce qu'il a acheté sa marchandise auprès d'une société connue de Casablanca
ne lui est d'aucune utilité, étant donné que la question de confirmer sa bonne ou
mauvaise foi ne se pose pas pour le tribunal civil, l'article 84 précité en fournit la
preuve, en disposant l'indemnisation sur le simple fait d'utiliser le nom ou la
marque, sans la conditionner à l'existence de l'élément de mauvaise foi ». La

105
La cour de cassation Arrêt n° 588 du 12-04-2000 Dossier commercial n° 3225/94
86
Cour a ainsi appliqué en bon droit les dispositions dudit article, et son arrêt est
suffisamment motivé. ».

Les faits, les indications et les allusions constitutifs de concurrence déloyale


sont saisis par la loi dans un sens objectif, en tant que réalité. La rédaction de
l’article 84 peut donner lieu à une interprétation excessive retenant un cas de
responsabilité sans faute. Nous pensons plutôt que la loi ne va pas jusque-là.
Elle met plutôt à la charge des commerçants une véritable obligation de
prudence et de diligence qui les astreints à prendre les précautions nécessaires
avant de recourir à des moyens déterminés de concurrence. Ils ne peuvent
échapper aux conséquences de la responsabilité qu’en établissant qu’ils ont
satisfait à cette obligation, en prouvant le caractère étranger à leur volonté, la
force majeure ou encore le fait de leur concurrent. 106

Concernant les ententes tacites, les informations sont tellement bien gardées et
secrètes qu'il est impossible pour un consommateur de réunir les preuves
suffisantes à l'établissement de la pratique anti-concurrentielle. D’autant plus
que si les preuves de la pratique ne se situent pas à proximité et que l'entente a
lieu sur un autre territoire que le sien.107

Certes, la loi 104-12 ne prévoie pas des dispositions relatives à l’action privée à
vocation réparatrice des dommages causés par des infractions au droit de la
concurrence. En l’absence de dispositions spécifiques, il nous semble que
l’octroi de dommages et intérêts s’effectuera, pour l’essentiel, dans le respect
des règles classiques du droit de la responsabilité civile.

Afin de veiller à l’émergence d’une action privée plus efficace, il est nécessaire
de surmonter les obstacles d’ordre institutionnel et notamment reconnaitre

106
M. Driss Alami Machichi : « Concurrence : Droits et Obligations des Entreprises au Maroc ».
107
Hugo Doray : « La preuve dans les pratiques anti-concurrentielles ». 2013. P : 34.
87
l’autorité de chose décidée aux décisions du Conseil de la concurrence à l’égard
des juges. 108

En Europe, les demandes d’indemnisation faisant suite à des infractions aux


règles sur les ententes ont connu un total sous-développement. Compte tenu de
la rareté des actions privées, la commission européenne depuis 2001 entamé une
action de sensibilisation des Etats membres sur les actions en réparation de
préjudices issus de pratiques anticoncurrentielles 109.

Les victimes de dommages concurrentiels préfèreront d'abord s'adresser à


l'autorité spécialisée pour bénéficier d’une décision préalable constatant
l'infraction. Dans ce contexte-ci, la preuve est facilitée pour les entreprises
victimes qui bénéficient d'une décision préalable d'une autorité de concurrence
qui aura condamné la pratique anti-concurrentielle.

Cette préférence procédurale s'explique par des raisons simples. Tout d'abord,
d'un point de vue matériel, les compétences d'experts et les outils
d'investigations dont disposent l'autorité spécialisée sont beaucoup plus
importants et performants. Le recours à l'expertise économique aura des coûts
que l'entreprise victime n'aura pas à supporter. 110

L'autre raison majeur de la saisine préalable d'une autorité de concurrence est «


qu’elle est un moyen de déplacer la charge de la preuve qui autrement pèserait
sur la victime. »111

La charge de la preuve de l'infraction pèse sur l'autorité de concurrence. Dès


lors que l'autorité de concurrence aura condamné l'entreprise en infraction, donc
reconnue la faute concurrentielle, les entreprises victimes pourront s'appuyer sur
108
Sanae EL HAJOUI : « Le nouveau droit de la concurrence au Maroc » 2016, P : 129.
109
Sanae EL HAJOUI : « Le nouveau droit de la concurrence au Maroc » 2016, P : 288.

110
Hugo Doray : « La preuve dans les pratiques anti-concurrentielles ». 2013. P : 35.

111
L.IDOT, « la plainte en droit de la concurrence : opposition ou convergences des systèmes français et
communautaire ? in Mélanges dédiés à L. BOYER, Presses de L'Université des sciences sociales de Toulouse,
p.257.
88
la décision pour faire reconnaître la faute civile devant le juge de droit commun.
« La faute étant établie, les discussions ne porteront plus que sur l'évaluation du
préjudice »112.

Cependant, bien que facilitant indéniablement la preuve d'une faute par les
victimes devant le juge civil, il ne faut pas surestimer cette pratique qui recèle
un désavantage majeur, « le principe de l'opportunité des poursuites » 113. Les
victimes ne sont donc jamais dans la certitude d'obtenir une décision préalable
de la Commission européenne, sachant que la Commission s'oriente aussi vers
des procédures négociées ne reconnaissant pas la faute en tant que telle.

Le rapport entre les autorités de concurrence nationales et les juges nationaux,


ne facilite pas l'administration de la preuve par les victimes de dommages
concurrentiels. Les décisions des autorités de concurrence ne s'imposent pas
devant les juges nationaux114. Il n'y a donc pas de caractère automatique entre la
reconnaissance entre une faute concurrentielle par l'autorité de concurrence et la
reconnaissance d'une faute civile par les juges nationaux.

B- L’établissement du préjudice et du lien de causalité

D’abord, il faut rappeler, qu'il y a une différence entre « le dommage qui


mesure l'effet perturbateur d'une pratique sur le processus concurrentiel sur un
marché et le préjudice qui n'est que la conséquence, le résultat du dommage
»115. La réalité de l'évaluation du préjudice dans le contentieux des dommages
concurrentiels résulte d'une appréciation économique qui ne s’accommode pas
toujours des conditions pour mettre en jeu la responsabilité civile des entreprises

112
L. IDOT, « la plainte en droit de la concurrence : opposition ou convergences des systèmes français et
communautaire ? in Mélanges dédiés à L. BOYER, Presses de L'Université des sciences sociales de Toulouse,
p.257.
113
CJCE, 18 octobre 1979, Gema, aff. 125/78, point 17.
114
Cass. Com., 15 octobre 1996, Sté pompes funèbres générales c/ Sté d'explotation des marbreries
Lescarelles.
115
N. DORANDEU, « le dommage concurrentiel »,Presse universitaire de Perpignan, Collection Etudes, 2000,
p.7.
89
fautives. « D'autant que le dommage « licite » et le préjudice concurrentiel varie
suivant le temps et le lieu de l'observation »116.

L'établissement du dommage est une des plus grandes difficultés que doit
affronter le demandeur dans une action civile. La preuve du préjudice se révèle
encore plus délicate voir « rigide »117.

La preuve d'un préjudice résultant d’un dommage nécessite une comparaison


entre la situation de la victime dans la pratique anti-concurrentielle avec une
situation de concurrence normal du marché. On voit donc que la preuve du
préjudice est sous la logique de l'appréciation économique. Cette méthode a fait
l'objet de critiques de la part de la doctrine comme étant « une méthode très
complexe et hypothétique »118.

Le préjudice doit répondre à certains caractères. Il doit être direct et certain.


Cela témoigne d'une autre difficulté pour les victimes notamment dans la preuve
du caractère « direct ». Par exemple, la preuve du caractère direct du préjudice
en dénonçant une perte du chiffre d'affaires entre avant et après la pratique anti-
concurrentielle n'a pas été retenu. « Le préjudice ainsi calculé ne présente pas le
caractère direct et certain pour qu'il ouvre droit à réparation »119.

Le standard de preuve résulte donc bien d'un choix de politique


jurisprudentielle dont l'infléchissement permettrait de réparer le dommage
concurrentiel de façon plus efficace.120

Il revient au demandeur d’établir le lien de causalité, c’est à dire que le


préjudice qu’il invoque a bien été causé par les agissements répréhensibles
commis.
116
N. DORANDEU, « le dommage concurrentiel », Presse universitaire de Perpignan, Collection Etudes, 2000,
p.7
117
M.DUMARCAY, « La situation de l'entreprise victime dans les procédures de sanction des pratiques
anticoncurrentielles », Bibliothèque de Droit de l'entreprise, Litec, juillet 2010, p.446-447.
118
R. SAINT-ESTEBEN, « Pour ou contre les dommages et intérêts », Les Petites affiches, 20 janvier 2005, n°14,
p.53
119
T. com. Nanterre, 11 mai 2006, SA Laboratoires Arkopharma c/Sté Roche et sté Hoffmann Laroche
120
Hugo Doray : « La preuve dans les pratiques anti-concurrentielles ». 2013. P :39.
90
La preuve du lien de causalité paraît à ce stade de la démonstration d'une
responsabilité civile des entreprises en infraction au droit de la concurrence
encore plus délicat, en ce sens que les facteurs multiples et complexes de
l'analyse économique empêchent en réalité de pouvoir rapporter des preuves
solides.

En principe, dans le contentieux de la responsabilité civile, le lien de causalité


doit être direct et certain, or, l'analyse économique n'est pas un résultat direct et
certain. Elle permet d'établir un lien de causalité avec « une certaine probabilité
plutôt qu'avec une certitude absolue »121, ce qui se révèle dès lors inadéquat pour
les victimes de dommages concurrentiels.

En Europe, Le droit communautaire ne s'oppose pas à ce que, à la condition de


respecter les principes d'équivalence et d'effectivité (…), le droit national refuse
à une partie, dont il est constaté qu'elle porte une responsabilité significative
dans la distorsion de concurrence, le droit d'obtenir des dommages et intérêts de
son contractant »122. Le principe d'effectivité du droit de l'Union européenne
pourrait donc faire émerger un assouplissement des conditions restrictives à
l'établissement de la responsabilité civile des entreprises en infraction au droit
des pratiques anti-concurrentielles. 123

§2 : Droit de la preuve favorable aux entreprises

En Europe, Les rédactions du livre vert en 2005 et du livre blanc en 2008


montrent l'intention réelle d'amélioration des situations des victimes dans
l'action en réparation des dommages concurrentiels. C'est suite à un diagnostic
unanime dans les difficultés de cette action, notamment due à un droit d'accès
aux preuves limitées (A), que la modernisation s'exprimant par l'encouragement
du « private enforcement » a été lancée. Le livre blanc insiste particulièrement

121
M.NUSSENBAUM, « les difficultés de l'expertise en matière de pratiques anti-concurrentielles » in les
sanctions judiciaires des pratiques anti-concurrentielles, LPA, 20 janvier 2005, n°14, p.37.
122
CJCE, 20 septembre 2001, Courage, aff. C-453/99, point 31.
123
Hugo Doray : « La preuve dans les pratiques anti-concurrentielles ». 2013. P : 40.
91
sur le régime probatoire, qui fait figure aujourd'hui d'obstacle majeur dans
l'action civile en réparation des dommages concurrentiels. Ainsi, la Commission
européenne a proposé des réformes qui vont dans le sens d'une réelle facilitation
de l'administration de la preuve. Seulement, ils persistent de fortes limites,
bénéficient aux entreprises en infraction aux règles de concurrence (B)

A- L'existence d'outils facilitant l'action civile.

Les ententes illicites, sont des accords secrets dont les preuves sont bien
gardées par les entreprises en infraction ou par des tiers et dont les victimes ne
peuvent pas accéder facilement à ces preuves. Ces victimes se trouvent dans une
« inégalité structurelle d'informations inhérentes au caractère par nature secret
des ententes et abus de position dominante 124. ». Et cela malgré l’existence
d'outils devant faciliter l'action civile et les mécanismes de pression sont absents
ou peu utilisés.

En droit marocain, et de même en droit français, la charge de preuve repose sur


le demandeur, ce qui met en œuvre l'adage selon lequel celui qui se prétend
titulaire d'un droit doit le prouver. Mais en cas d’entente illicite entre deux
parties, il est difficile de rapporter les preuves nécessaires au succès de leur
prétention.

Ainsi que le juge civil dispose d'un certain nombre « d'outils juridiques » qui
permettent de faciliter l'action civile en matière de réparation des dommages
concurrentiels.

Dans le cas des ententes illicites, le juge peut juger que les pièces produites
étaient floues. On voit donc que les mécanismes existent mais que les lacunes et

124
M.DUMARCAY, « La situation de l'entreprise victime dans les procédures de sanction des pratiques
anticoncurrentielles », Bibliothèque de Droit de l'entreprise, Litec, juillet 2010, p.463.

92
les difficultés à l'obtention des preuves pourraient être surmontées par « une
mise en état active des affaires civiles qui fait souvent défaut » 125.

Alors, établir la preuve reste très possible, mais on peut toujours constater qu'il
y a une véritable insuffisance dans l'administration judiciaire de la preuve.

Les sanctions habituellement prévues en Europe comme les amendes civiles ou


l'astreinte sont d'une faible efficacité »126, ce qui montre la réalité du « private
enforcement » qui est contraire aux règles applicables lors d'enquêtes par les
autorités publiques, qui peuvent prévoir des peines d'emprisonnements, il
n'existe pas de dispositions pénales pour sanctionner la rétention de preuve en
matière civile.

Seuls certains Etats-membres de l'Union Européenne comme l'Allemagne et le


Danemark prévoient des sanctions pénales dans le cadre d'un refus de produire
des documents dans une procédure civile. L'absence de véritables outils
contraignants démontre l'absence du caractère dissuasif de l'action civile contre
les entreprises en infraction aux règles de concurrence. 127

B- Une modernisation inachevée dans la réduction des obstacles probatoires

En Europe, Dans son livre blanc 128, la réforme principale qu'entend engager la
commission européenne repose sur les questions de l'accès à la preuve et sur la
facilitation de l'administration de la preuve par les victimes. Puisqu'elle n'a pas
tenu à réduire le standard de preuve à la charge du demandeur, la commission

125
M.DUPUIS-TOUBOL, « Action civile en matière de pratiques anti-concurrentielles : éléments de
problématique, Site de la Cour de Cassation, Colloques et activités de formation > 2005 :
http://www.courdecassation.fr/colloques_activites_formation_4/2005_2033/intervention_me_dupuis_toubol
_ 8020.html.
126
J.RIFFAULT-SILK, « Les actions privées en droit de la concurrence : obstacles de procédure et de fond »,
Revue Lamy Concurrence, 2006, n°6, p.84.
127
Hugo Doray : « La preuve dans les pratiques anti-concurrentielles ». 2013. P : 44.
128
Communication Comm. CE, Livre blanc sur les actions en dommages et intérêts pour infraction aux règles
communautaires sur les ententes et les abus de position dominante, 2 avril 2008, COM (2008) 165 final, p. 3 ;
pt. 1.2
93
européenne souhaite donc mettre en place « un accès raisonné mais efficace aux
preuves ».129 Elle propose donc des innovations, non négligeable.

La Commission européenne propose des solutions favorables aux victimes qui


devraient faciliter l'administration de la preuve dans les actions civiles et elle
prévoit un niveau minimal de divulgation de preuves entre les demandeurs et
défendeurs. Cette divulgation dite « inter partes » devrait faciliter
l'administration de la preuve pour les victimes qui sont souvent dans l'incapacité
totale de réunir le niveau de preuves exigé par le juge. Pour ne pas tomber dans
des abus de procédure, le livre blanc prévoit d'entourer de conditions cette
pratique de la divulgation.

A la lecture de ces conditions, on peut dire qu'elles s'apparentent à des


garanties à la faveur du défendeur, pour éviter un véritable renversement de la
charge de la preuve 130. Mais il faut signaler que la commission européenne ne
souhaite pas que les entreprises en infraction bénéficient d'un droit absolu à la
protection des données à caractère confidentiel. Elle préconise un équilibre en ce
droit et le droit, tout aussi fondamental, d'accès à la justice.

Dans la mesure où, les données collectées par le demandeur devront permettre
de croire qu'il existe « des raisons plausibles de croire qu'il a subi un préjudice
»131. Cela permettra d'éviter les demandes infondées. Le juge exerce toujours un
pouvoir discrétionnaire sur la nécessité d'ordonner la production de documents
par la partie défenderesse. Le demandeur devra ensuite démontrer que «
l'injonction est la seule voie envisageable pour requérir toutes les preuves
suffisantes »132. C'est la mise en œuvre « d'un principe de subsidiarité » 133.Il ne

129
E. BARBIER DE LA SERRE, « Accès aux preuves : étendue des pouvoirs du juge, pouvoirs et devoirs des
parties, étendue du droit à la divulgation », Revue Lamy Concurrence, 2009, n°18, p.115.
130
Hugo Doray : « La preuve dans les pratiques anti-concurrentielles ». 2013. P :45.
131
Livre blanc, points 100 à 102
132
Livre blanc, points 103 et 104
133
E. BARBIER DE LA SERRE, « Accès aux preuves : étendue des pouvoirs du juge, pouvoirs et devoirs des
parties, étendue du droit à la divulgation », Revue Lamy Concurrence, 2009, n°18, p.115.
94
pourra s'agir « de catégories de preuves suffisamment précises » 134. La mesure
de divulgation fera l'objet « d'un contrôle de proportionnalité par lequel le juge
vérifiera la pertinence de la mesure demandée »135. « Tout type de documents
pourra être demandé, tant les preuves documentaires que les preuves par témoin
»136. Des restrictions pourront être avancées par le défendeur en invoquant un
motif légitime tenant à la confidentialité des informations.

La commission européenne a donc souhaité encadrer cette procédure de


divulgation « inter partes » en limitant les pouvoirs du juge pour éviter d'aller
vers l'instauration d'une procédure trop contraignante type « discovery »
américaine, dont les effets pervers sont nombreux. « Souvent utilisée comme
une arme par les parties, la discovery présente un risque au regard des affaires.
Une demande de discovery très large formée par un concurrent dans le cadre
d’une procédure peut amener une partie à ouvrir ses archives et produire des
documents dont la nature pourrait être amenée à la nuire » 137.

Malgré une volonté réelle dans la réparation intégrale du dommage


concurrentiel, la Commission européenne semble vouloir mettre en place une
réforme en demi-teinte, laissant parfois les victimes dans des situations trop
complexes pour obtenir réparation.

Cette Commission a proposé que les entreprises en infraction au droit de la


concurrence soient tenues pour responsable des dommages causés, sauf « si elles
prouvent que l'infraction résulte d'une erreur véritablement excusable ». Cette
notion de faute excusable vise les situations dans lesquelles « une personne
raisonnable appliquant un haut de degré de diligence ne pouvait pas avoir
connaissance du fait que le comportement en cause restreignait la concurrence. »
Cette proposition paraît d'une part contraire à l'acquis communautaire puisque la

134
Livre blanc point 2.2., point 105-106.
135
Ibidem point 2.2. ) ^ )^èe 107-109.
136
Ibidem point 2.2. Points 110-111.
137
« Le droit de la preuve devant le juge civil et l'attractivité économique du droit français », Ministère de la
Justice, service des Affaires européennes et internationales, 19 octobre 2005.
95
réparation doit être effective.138 D'autre part, cette proposition crée un dualisme
dans le standard de preuve entre les autorités de concurrence et le juge national
de droit commun. En effet, les victimes qui intenteront une action en réparation
devront en plus de prouver la faute, démontrer la connaissance du fait que le
comportement serait anticoncurrentiel.

De plus, la Commission européenne ne dit rien sur la facilitation de la preuve du


lien de causalité sachant que « en matière de concurrence, la question du lien de
causalité est délicate dans la mesure où l'on se situe le plus souvent dans le
domaine du probable. »139

L'absence de facilitation de la preuve du lien de causalité ne permet donc pas


d'améliorer la situation de la victime. En donc, la Commission européenne n'a
pas voulu harmoniser un régime commun de responsabilité civile.

Chapitre 2 : Procédures négociées.

Au début, l’apparition des procédures négociées était dans l’Union


européenne et dans les textes intérieurs des pays de l’Europe. Par la suite, le
législateur marocain a adopté ces procédures vu leur efficacité. Le Maroc a mis
en œuvre ces procédures après l’adoption de la loi 104-12 et la loi 20-13.

Les procédures négociées qui illustrent le principe « gagnant- gagnant », sont


devenues une tendance en matière de traitement des pratiques
anticoncurrentielles. Cette tendance est légitimement argumentée par les
diverses vertus de ces procédures tant au regard des autorités de la concurrence
que des entreprises contrevenantes140.

A cet égard, il apparait primordial de traité la négociation dans le cadre des


ententes anticoncurrentielles (Section 1), et sa mise en concurrence (Section 2).

138
CJCE, 13 juillet 2006, Manfredi, aff. C-295/04 à C-298/04, point 100.
139
Cons. Conc., Avis du 21 septembre 2006 relatif à l'introduction de l'action de groupe en matière de
pratiques anti-concurrentielles, point.55.
140
C. Grynfogel relève qu’elles sont “rentrées dans les mœurs”, Sanctions du droit communautaire de la
concurrence, Juris-Classeur, Comm. fasc. 287, nos 34 et s.
96
Section 1 : La négociation dans le cadre des ententes illicites.

On parle de deux sortes de procédures : des procédures négociées pouvant


aboutir à une exonération totale (§1) et celles pouvant aboutir à une exonération
partielle (§2).

§1 : Les procédures négociées pouvant aboutir à une exonération


totale.

L’objectif de ces procédures est de ne pas être sanctionné et donc de négocier


avec le conseil de la concurrence alors qu’on est contrevenant et en plus on
plaide coupable.

En effet cette opportunité s’offre pour les contrevenants dans deux cas de
figure : la clémence (A) et les engagements volontaires (B).

A- La Clémence.

La procédure de clémence est une procédure maitresse dans les procédures


négociées. Cette procédure traite la négociation des sanctions encourues en cas
d’infraction aux règles du droit de la concurrence jusqu’à l’exonération totale.

La plupart des autorités de la concurrence ont adopté cette procédure, qui selon
les modèles, offrent l’immunité totale ou une réduction des amendes qui, sinon
auraient été infligées au participant à une entente illicite, en échange de la
divulgation librement consentie, avant ou pendant la phase d’enquête,
d’éléments de preuves relatifs à l’entente présumée répondant à des critères
précis141.

141
Programme modèle du REC en matière de clémence, note de bas de page1, consultable sur le site internet
http://ec.europa.eu/competition/ecn/model_leniency_fr.pdf. Une quarantaine de pays dispose de
programmes de clémence répartis sur quatre continents.
97
Il s’agit plus précisément, d’une rémunération d’une entreprise (ou d’une
personne physique) avouant sa participation à un cartel avant ou pendant une
investigation142.

La clémence connait un réel succès dans la plupart des systèmes dans lesquels
elle est introduite, Une question qui se pose notamment à savoir :

 La situation de la clémence comme procédure négociée en droit


marocain ?

Notre sujet est spécialement sur les ententes illicites qui sont les pratiques les
plus graves parmi toutes les pratiques anticoncurrentielles. Cette procédure
s’applique pour toute pratique illicite et contre la concurrence mais s’adapte
exclusivement aux ententes où elle y trouve son assiette.

À cet égard, le Conseil de la concurrence français a indiqué clairement dans un


communiqué de procédure en date du 11 avril 2006 sur le programme de
clémence français que : « Les infractions concernées sont, en principe, les
ententes ou cartels entre entreprises consistant notamment à fixer des prix, des
quotas de production ou de vente et à répartir les marchés, y compris lors
d’appels d’offres, ou tout autre comportement anticoncurrentiel similaire entre
concurrents. Ces infractions relèvent toutes des prévisions de l’article L. 420-1
du Code de commerce français et, le cas échéant, de l’article 81 du traité CE.

La Clémence permet alors aux autorités nationales de concurrence de détecter,


de faire cesser et de réprimer plus facilement ces pratiques prohibées, en
contrepartie les entreprises qui prennent l’initiative de dénoncer et de coopérer
auront au moins la garantie d’un traitement favorable du dossier ouvert à leur
encontre.

142
A. VIAFLONT, « Engagements et clémence en droit de la concurrence », 2008, p. 1, consultable sur le site
Internet www.ssrn.com.
98
Dans sa décision du 21 février 2007 dans l’affaire des ententes sur les
ascenseurs et les escaliers mécaniques 143, la Commission européenne à relever
qu’il était manifeste que les sociétés savaient que leurs comportements étaient
illicites et qu’elles prenaient soin d’éviter d’être découvertes. Leurs
représentants se rencontraient habituellement dans des bars et des restaurants, se
rendaient à la campagne ou même à l’étranger et utilisaient des cartes de
téléphone prépayés afin d’éviter une identification des appels

Au Maroc, le conseil de la concurrence a adopté la procédure de clémence que


la loi met à sa disposition pour dénicher et sanctionner les ententes entre les
entreprises. Pour les encourager à dénoncer les ententes auxquelles elles
participent.

Il faut rappeler qu’il existe une grande difficulté pour apporter la preuve des
ententes illicites, pour cette raison les autorités de concurrence ont procéder à
cette procédure pour faciliter le fait de prouver l’existence d’une entente entre
des entreprises.

Selon, la loi marocaine qui s’inspire du droit européen, une entreprise qui
participe à une entente avec ses concurrents, peut échapper à la sanction en
dénonçant cette infraction au Conseil de la concurrence et en lui fournissant des
éléments de preuve.

Il est important de signaler que c’est la première entreprise qui dénonce


l’entente qui a de fortes chances de bénéficier de l’exonération totale de la
sanction pécuniaire, d’où l’intérêt d’agir vite. Les autres entreprises parties à
l’entente qui se manifestent après, ne peuvent prétendre qu’à une exonération
partielle de l’amende.

Cette procédure comporte des conditions bien déterminées au détriment de la


récompense :
143
Marie-Chantal Boutard-Labarde, Guy Canivet, (2008) « L'application en France du droit des pratiques
anticoncurrentielles », LGDJ, coll. Droit des affaires, p : 519 ;
99
- Une demande doit être déposée auprès des autorités de la concurrence ou
auprès du président du conseil de la concurrence. Cette demande peut être
produite soit par une lettre recommandée avec accusé de réception ou
oralement. Cette demande doit comporter toutes les informations et les
preuves de l’entente illicites (Produits concernés, Marché concerné,
l’identité des participants…)144.
- L’entreprise dénonciatrice doit apporter de l’aide au cours de la procédure
afin d’éviter toutes les fausses informations.
- L’entreprise dénonciatrice est tenue d’arrêter immédiatement sa
participation aux activités illicites 145.
- Il ne faut pas obliger les autres entreprises à participer à l’engagement.
- L’entreprise dénonciatrice ne doit pas porter connaissance aux autres
entreprises de sa demande.

En cas de réunion de toutes ces conditions, et après l’acceptation de la


demande, il est procédé à la mise en œuvre de la procédure de clémence.

En contrepartie, l’entreprise dénonciatrice est récompensée par une exonération


de sanction, qui peut être totale ou partielle et cela selon son rang d'arrivée.
L'exonération peut conduire à une immunité pure et simple, dès lors que
l'entreprise est la première à fournir des informations sur l'entente à l’autorité de
la concurrence ou à l’administration.

La première entreprise dénonciatrice est la seule qui bénéficie d'une


exonération totale de sanction, c'est-à-dire celle ayant fourni à l'Autorité de la
concurrence des informations et éléments de preuve d'une entente
injustifiable146.

144
AL 1 et 2 de la loi 104-12.
145
Les conditions 2, 3, 4, et 5 ont été mentionnées par :
- Nour-Eddine Toujgani : « Les procédures négociées en droit de la concurrence op. cit, P :80.
146
La première affaire de clémence de l’autorité de la concurrence française : le cartel des portes appelé « club
des cinq », qui a été rendue publique le 11 avril 2006. Appliquant pour la première fois la clémence, la société
dénonciatrice « France Portes » filiale du groupe américain Jeld Wen a été exonérée de la sanction pécuniaire.
100
Son rang d'arrivée est attesté par le marqueur, établi dès le début de la
procédure, tout le système reposant sur l'incitation des entreprises à agir vite
pour dénoncer l'entente à laquelle elles participent. Deux types d'immunité
peuvent être délivrées, selon que l'Autorité de la concurrence dispose déjà (type
1 B) ou pas (type 1 A) d'informations ou de preuves lui permettant de déclencher
une enquête.

Après, les entreprises suivantes bénéficient d'une exonération partielle de


sanction. L'Autorité de la concurrence n'est pas tenue par la fourchette indiquée
dans son avis conditionnel de clémence. Elle conserve sa liberté d'appréciation
lors de la décision finale, et peut donc augmenter le taux d’exonération. Elle
pourrait aussi théoriquement le réduire, mais cette réduction, si elle était mise en
œuvre, irait à l'encontre de la sécurité juridique des entreprises, et serait donc à
terme préjudiciable à l'attractivité de la clémence, qui peine encore à prendre son
essor.

Le niveau de l'exonération attribuée est donc en fonction du rang d'arrivée des


entreprises, du moment de présentation de leur demande de clémence, et du
degré de valeur ajoutée des preuves apportées au regard des éléments dont
disposait déjà l'Autorité de la concurrence.

À l’efficacité attendue de ces incitations objectives à se dénoncer, le


programme de clémence offre une maximalisation des profits de l’entreprise
délatrice mais aussi de l’ensemble d’une économie.

Du fait du rôle qu'elle a joué dans l'entente, cette société encourait une sanction de 1,25 million d’euros,
néanmoins , une immunité totale lui est accordée compte tenu des éléments probants apportés par celle-ci
"contribuant à établir la réalité de deux cartels (un cartel sur les portes planes et isoplanes et un cartel sur les
portes laquées) et à en identifier les auteurs", elle a ainsi " fait preuve d'une coopération totale avec les
autorités de concurrence à tous les stades de la procédure" et "elle a cessé de mettre en œuvre les pratiques
d'entente à compter de l'ouverture de la procédure et elle n'a pas prévenu les autres membres des cartels
dénoncés". Selon le communiqué du conseil, a consulté sur :
https://www.autoritedelaconcurrence.fr/fr/communiques-de-presse/11-avril-2006-secteurde-la-fabrication-
de-portes ;
101
B- Les Engagements volontaires.

Cette deuxième procédure n’est pas fameuse telle que la précédente. Elle a pour
objectif de mettre fin aux entreprises qui violent les règles de la concurrence. La
notion « engagement » désigne l’obligation souscrite auprès d’une autorité 147.

Dans ce cadre, en cas de problème concurrentiel, l’autorité de concurrence peut


décider –au lieu d’ouvrir une procédure lourde et couteuse- d’abandonner les
poursuites contre l’entreprise mise en cause en échange de la souscription par
celle-ci d’engagements propres à rétablir la concurrence.

Cet accord permet que l’entreprise en infraction n’implique aucune admission


de culpabilité de la part des auteurs de la pratique suspecte. Mais le non-respect
de l’engagement est sanctionné.

L’article 9 du règlement n°1/2003 qui a consacré la technique des


engagements volontaires en droit communautaire, quant au droit français, la
procédure s’est introduite par l’ordonnance du 4 novembre 2005, complétée par
le décret n°2005/1668 du 27 décembre 2005, ajoutant une nouvelle disposition
de l’article 464-2 I du code de commerce français, suivi par un communiqué du
conseil de la concurrence du 8 avril 2008, concernant la procédure, qui sera
remplacé par un autre communiqué de la procédure daté du 2 mars 2009 en
tenant compte de la réforme institutionnelle opérée par la LME 148.

En cas d’accord entre des entreprises, cette procédure les mène à s’engager à
cesser le dommage causé à l’économie, et dans la mesure du possible rétablir la
situation de la concurrence telle qu’elle prévalait ex-ante.

147
S. PIETRINI. « Le recours à la négociation en droit de la concurrence : l’exemple des programmes de
clémence » Revue Lamy de la concurrence, 2009, n°21, p. 153.
148
C’est la Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de Modernisation de l'Economie.
102
En droit communautaire, la jurisprudence a confirmé que « la particularité de la
procédure tenait à la dispense pour la commission de démontrer formellement la
réalité de la pratique 149.

Pour recourir à cette procédure, il faut la réunion de certaines conditions à


savoir :

- L’entreprise concernée doit faire connaitre sa volonté d’adopter cette


procédure en portant connaissance lors du début de la procédure et avant
toute opposition, cette étape peut être faite d’une manière non officielle
par un coup de téléphone ou par un courrier électronique à condition de
prouver sa diligence de s’engager.
- Les engagements doivent être acceptables et crédibles car l’acceptation de
ces engagements vaut une réponse aux problèmes causés à la concurrence
et il est indispensable que les membres du conseil puissent être
convaincus par la possibilité d’exécuter les engagements présentés. Ces
engagements peuvent prendre plusieurs formes (Changement des clauses
contractuelles…).

Une évaluation préliminaire est nécessaire dont laquelle le rapporteur va


préciser « en quoi les atteintes à la concurrence relevées à ce stade de la
procédure sont susceptibles de constituer une pratique prohibée » .

Ensuite cette évaluation sera envoyée à l’entreprise concernée, dès lors cette
dernière pourra accéder à tout ce qui constitue le dossier, pour qu’elle puisse
faire sa proposition d’engagements, au sens où elle est en mesure d’apporter -à
travers ses engagements- une réponse aux préoccupations de concurrence
identifiées dans l’évaluation préliminaire.

149
TPICE, 11 juillet 2007, aff. T-170/06, Alrosa c/ Commission, pts 87 et 100 ; S. Grandvuillemin, « La procédure
d’engagements : états des lieux après le communiqué de procédure du 2 mars 2009 », JCP ( E ), 2009, n°22, p.
1542.
103
Le rapporteur général doit publier un résumé de l’affaire sur le site électronique
et sur un journal d’annonces juridiques afin de permettre aux tiers concernés
d’apporter leurs observations dans un délai qui ne peut pas être inférieur à un
mois à compter de sa publication.

Cette étape constitue pour l’autorité « un test de marché » pour vérifier


l’efficacité de la prise de ces engagements vis-à-vis les préoccupations de
concurrence exprimées lors de l’évaluation préliminaire. Enfin l’autorité de la
concurrence adoptera sa décision rendant ces engagements obligatoires et
mettant fin à la procédure.

Cependant, l’autorité détient quand même un pouvoir d’appréciation, lui


accordant de rompre la procédure, et reprendre la voie contentieuse à tout
moment.

Il faut signaler qu’en cas de non-respect des engagements, l’autorité peut


prononcer des astreintes qui ne peuvent excéder 5% du chiffre d’affaires
journalier moyen par jour de retard150. Le chiffre d’affaires pris en compte est
calculé sur la base des comptes de l’entreprise relatifs au dernier exercice clos à
la date de la décision151.

Pour les organismes qui n’ont pas d’activité déclinant un chiffre d’affaires
l’astreinte est fixée dans la limite de cinq mille (5000) dirhams par jour de
retard152.

150
Article 39 de la loi 104-12.
151
Al 4 de l’article 40 de la loi 104-12.
152
Al 5 de l’article 40 de la loi 104-12.
104
§2 : Les procédures négociées pouvant aboutir à une exonération
partielle.

Plusieurs autorités de la concurrence disposent des procédures de transaction,


dans ce cadre on parle de deux types de transaction à savoir la transaction
française (La non-contestation des griefs) (A), et la transaction communautaire
(B).

Le principal objectif de ces procédures est surtout de réduire les couts


d’instruction d’un dossier. Dans la mesure où l’entreprise en infraction à cause
d’une entente illicite ou une autre pratique anticoncurrentielle, coopère à la
procédure administrative se déroulant devant l’autorité de concurrence en
échange d’une réduction de la sanction.

Et selon le cas, l’entreprise peut soit ne pas contester les griefs ou les faits
retenus à son encontre, soit d’avouer sa responsabilité.

A- La Non-Contestation des griefs

La procédure de non-contestation des griefs, est une procédure française qui est
née au Maroc, également avec la loi 104-12 afin de permettre d’accélérer
l’instruction des dossiers et faciliter au conseil l’obtention de la preuve dans le
monde des pratiques anticoncurrentielles dont la plus dangereuse est l’entente
illicite.

La loi ne limite pas le domaine d’utilisation de la non-contestation des griefs


au contraire de la clémence et de la procédure d’engagements dont le domaine
est moins large. La clémence intéresse les ententes et, parmi elles,
essentiellement les cartels153. Les engagements sont, quant à eux,

153
Autorité, communiqué de procédure du 2 mars 2009 relatif au programme de clémence français, § 9.
105
particulièrement adaptés aux pratiques susceptibles d’être qualifiées d’abus de
position dominante ou de restrictions verticales 154.

C’est la loi NRE155, qui a mis en place cette procédure, figurant après
codification dans l’article L.464-2 III du code de commerce français. Au Maroc
c’est l’article 37 de la loi 104-12 qui mis en place cette procédure.

Le déclenchement de cette procédure suppose que les pratiques en cause


entrent dans son champ d’application, et que l’entreprise ne conteste pas les
griefs. Sur ces deux aspects, l’examen de la pratique décisionnelle démontre le
pragmatisme dont fait preuve l’Autorité

Quant au domaine de la procédure française il comporte les pratiques


anticoncurrentielles : ententes anticoncurrentiels et abus de position dominante.

La procédure se déroule par l’envoie des griefs à l’entreprise en question et lors


de la phase d’instruction devant l’autorité de la concurrence, l’entreprise est
tenue de contester les griefs qui lui sont notifiés, la non contestation vaut
renonciation de contester les griefs dans la phase contentieuse.

L’entreprise mise en cause en infraction voulant se couvrir par cette procédure


prend l’initiative d’aborder le rapporteur général par voie de demande et ce le
plutôt possible dans un délai de deux mois à compter de la réception de la
notification des griefs, et cela en comportant une proposition d’engagement.

Le rapporteur général n’est pas tenu de donner une suite favorable à cette
demande puis qu’il en détient le pouvoir d’appréciation de plein droit. Et c’est le

154
F. Zivy, op. cit., § 29, p. 5. V. également le communiqué de procédure de l’Autorité du 2 mars 2009 relatif
aux engagements, § 12.
155
C’est la loi sur les Nouvelles Régulations Economiques, publiée au Journal Officiel le 15 mai 2001, et appelée
plus communément, la loi NRE, elle a pour objectif de réduire les effets néfastes des dysfonctionnements
internes et de la mondialisation. Fondée sur une exigence de transparence de l'information, cette loi instaure
que les sociétés françaises cotées doivent présenter, dans le rapport de gestion annuel, parallèlement à leurs
informations comptables et financières des données sur les conséquences environnementales et sociales de
leurs activités. La loi NRE, est entrée en vigueur par un décret en date du 20 février 2002 et s’applique depuis le
1er janvier 2003 pour les exercices ouverts à partir du 1er janvier 2002.
106
rapporteur général qui décide s’il peut nouer des discussions avec les parties
concernées. Et tout de même il reste libre d’y mettre fin à tout moment.

L’entreprise de son côté peut à tout moment jusqu’à la signature du procès-


verbal -relatif à l’adoption confirmée de la procédure- avec le rapporteur
général, renoncer à poursuivre la procédure.

En cas de renonciation par l’entreprise, les documents et les pièces échangés


entre elle et le rapporteur général, peuvent être versés par les services
d’instruction au dossier soumis au collège.

L’accord entre l’entreprise concernée d’une part et le rapporteur général d’une


autre part, se traduit par un procès-verbal signé par les deux parties.

Lorsqu’un organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui
lui sont notifiés, le rapporteur général peut proposer au conseil de la
concurrence, qui entend les parties et le commissaire du gouvernement sans
établissement préalable d’un rapport, de prononcer une sanction pécuniaire en
tenant compte de l’absence de contestation. Dans ce cas, le montant maximum
de la sanction encourue est réduit de moitié 156.

Lorsque l’entreprise ou l’organisme s’engage en outre à modifier son


comportement pour l’avenir, le rapporteur général peut proposer au conseil d’en
tenir compte également dans la fixation du montant de la sanction 157, ce qui peut
alors réduire à nouveau le montant de la sanction.

B- La Transaction

La procédure de transaction trouve son origine dans la procédure de non-


contestation des griefs, mais la commission européenne a pu l’imposer
indépendamment.

156
Article 37 al.1 da la loi 104-12.
157
Article 37 al.2 de la loi 104-12.
107
La transaction envisagée par la commission européenne remonte à la
publication d’un projet de communication y afférent en vue de l’adoption de
décisions en vertu des articles 7 et 27 du règlement n°1/2003 158 du conseil dans
les affaires d’entente. Il faut noter que la procédure de transaction est inspirée de
la non-contestation des griefs.

L’introduction formelle de la procédure de transaction était par le règlement du


30 juin2008159, suivi par la communication du 2 juillet 2008 160 portant la
description détaillée de la procédure applicable.

La transaction intervenait à la demande de l’entreprise avant toute notification


des griefs dans le même contexte d’une procédure de clémence. En effet la
demande porte la reconnaissance absolue de l’infraction par l’entreprise
concernée, ainsi que les principaux faits y afférents, notamment leur
qualification juridique et la durée de sa participation à l’infraction.

Dès lors, la procédure prend la forme écrite et elle n’a d’intérêt que si toutes les
parties acceptent de négocier et/ou transiger.

Il est à signaler que la procédure de transaction dans sa version


communautaire, ne s’applique qu’aux ententes anticoncurrentielles.

Quant au droit marocain il n’y a absolument pas de désignation précise de la


procédure de transaction, ce qui laisse la porte grande ouverte. Mais d’après les
dispositions de la loi 104-12, si les entreprises mises en cause reconnaissent les
infractions qui leurs sont reprochées, collaborent à l’accélération de celle-ci et
s’engagent à ne plus commettre d’infractions, elles seront récompensées que ce

158
Règlement (CE) n° 1 /2003 du conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de
concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité. JOUE L1 du 4 janvier 2003.
159
Règlement CE n° 622/2008 de la commission du 30 juin 2008 modifiant le règlement CE n° 733/2004 en ce
qui concerne les procédures de transaction engagées dans les affaires d’ententes, JOUE L173/3 du 1er juillet
2008
160
Communication de la commission du 2 juillet 2008 relative aux procédures de transaction engagées en vue
de l’adoption de décisions en vertu des articles 7 et 23 du règlement CE n° 1/2003 du conseil dans les affaires
d’ententes, JOUE C 167/1 du 2 juillet 2008.
108
soit par une réduction du montant de l’amende encourue ou par une exonération
totale de celle-ci.

Mais dans l’absence des textes clairs dans ce sens et une pratique de la part du
conseil de la concurrence, on va parler de cette procédure dans le cadre
communautaire et cela pour la simple raison que cette procédure concerne
spécialement les ententes illicites qui sont le thème de notre sujet.

La phase initiale de la procédure est l’identification des entreprises susceptibles


d’être infligées par une amende, la commission possède des éléments consistants
pour mettre en cause ces entreprises et elle est déjà en position de force en ayant
l’initiative d’envoyer une lettre proposant l’ouverture de la discussion pour un
règlement transactionnel du cas.

Quant à l’ouverture de la procédure ça se fait à tout moment, mais la date


limite c’est la date de la communication des griefs, et c’est suite à la décision de
la commission, qu’un délai d’au moins deux semaines est donné aux parties,
pour qu’elles puissent déclarer par écrit leur intention de prendre part à des
discussions menant à une probable transaction afin de présenter ultérieurement
des propositions de transaction. Il faut signaler qu’un représentant commun est
désigné en présence d’un groupe de sociétés. Ce qui tend à démontrer que les
autorités considèrent le groupe comme une entreprise unique 161.

La seconde phase consiste à ce que la commission peut décider de poursuivre


la procédure par des contacts bilatéraux, et cela après la formalisation d’une
demande d’ouverture de procédure de transaction par les parties concernées.

La commission impose son imminence lors de ces présumées discussions,


notamment le moment de la communication des informations et / ou des
preuves. Or la communication de ces informations permettra aux parties d’être
informées des éléments essentiels y afférents : tels que les faits allégués, leur
161
L. Arcelin, Le droit de la concurrence Les pratiques anticoncurrentielles en droit interne et communautaire,
PUR, 2009, p. 170.
109
qualification, la gravité et la durée de l’entente alléguée, l’attribution des
responsabilités, une estimation des fourchettes d’amendes probables, ainsi que
les éléments de preuves utilisées à l’appui des griefs éventuels. C’est ensuite que
les parties pourront poser-les pour et les contre- en connaissance de cause pour
en décider de conclure une transaction.

En attendant, les entreprises concernées ont tout de même le droit d’accéder


aux documents non confidentiels figurant dans le dossier, en tout cas elles ont 15
jours ouvrables aux moins pour présenter une proposition de transaction.

Les entreprises doivent répondre dans un délai de 2 semaines pour confirmer


s’elles veulent continuer la procédure.

Et c’est suite à la confirmation des parties de leur engagement de parvenir à


une transaction, que la commission adopte une décision finale, après
consultation du comité consultatif. Ainsi que la commission conserve le droit
d’adopter une position finale qui s’écarte de sa position initiale exprimée lors de
la communication des griefs entérinant les propositions de transaction, soit eu
égard à l’avis rendu par le comité consultatif, soit pour d’autres considérations
pertinentes liées à l’autonomie décisionnelle de la commission en la matière.
Dès lors une nouvelle notification des parties s’impose, afin que ces dernières
puissent exercer leur droit de défense conformément aux règles générales de
procédure applicable.

Finalement on a la phase de formalisation qui est concrétisée par une


communication de griefs reprenant la proposition et confirmation des parties. Et
décision formelle simplifiée adoptant la réduction forfaitaire de 10%.

Section 2 : La mise en concurrence des procédures négociées

A ce stade de réflexion, la question qui se pose est celle du choix de la


négociation, et donc parmi ces quatre procédures quelle est la plus compatible
pour les entreprises et comment les entreprises peuvent adopter l’une des

110
procédures selon les circonstances (§1), et notamment la question soulevée dans
ce cadre à savoir l’existence d’une possibilité de cumuler entre ces procédures
(§2).

§1 : Les stratégies des entreprises en infraction.

Il faut noter que la stratégie adoptée par l’entreprise contrevenante varie


selon la notification des griefs. Alors avant la notification des griefs, on parle
d’une stratégie adoptée lors de la phase précontentieuse (A), et après la
notification des griefs, on parle de celle adoptée au cours de la phase
contentieuse (B).

A- Les stratégies des entreprises dans la phase précontentieuse.

Pour la procédure de clémence, il faut signaler qu’il n’est pas facile de


s’engager dans cette procédure facilement.

Bien évidemment, chaque entreprise à ces propres raisons et circonstances pour


décider d’assujettir à l’autorité de la concurrence à travers la procédure de
clémence ou une autre. Mais généralement c’est la survenance d’un élément
déclencheur qui pousse l’entreprise à prendre une décision de procéder à une
demande de clémence 162.

On peut donc citer des cas qui sont les plus souvent à orienter les entreprises
vers cette procédure, notamment celui d’une société prenant le contrôle d’une
autre dont elle découvre qu’elle a participé à un cartel, donc le fait de dénoncer
ne peut être que bénéfique pour elle en vue de l’arrêt des comportements
déviants et l’immunité d’amende.

162
Anne KRENZER, « Articulation avec une transaction ou une demande de non-contestation des griefs », in
comment gérer une demande de clémence, Concurrence N°3-2012 /Pratiques, p. 264.
111
On a aussi le cas où l’entreprise dénonciatrice estime qu’elle a un grand intérêt
à briser la concertation qui prend du recul qu’à y rester. Également, le cas de
l’influence des circonstances extérieures 163.

Le choix d’être l’entreprise dénonciatrice n’est pas facile, cette entreprise est
face à un risque réel, car elle peut se trouver devant une procédure qui finira
sans doute à se voir infliger à des amendes d’ampleur. Donc c’est une question
de poser les avantages et les désavantages, et à comparer les divers types de
risques à l’avantage que représente l’immunité totale.

Les risques dont il est question varient selon la probabilité de se faire prendre
en vue de la découverte des pratiques prohibées, la majoration d’amende
encourue et les représailles des autres membres du cartel et cela dans le cas où ce
dernière comporte des acteurs de marché situés à des stades différents du
processus économique, notamment des distributeurs dont l’un d’entre eux et à la
fois distributeur et producteur164.

En principe, la procédure de clémence offre certaines garanties qui encourage


les entreprises à opter pour une telle procédure. On parle du système du
« Marqueur ».

D’après les points 14 et 15 de la communication communautaire de 2006, ce


système est considéré comme une garantie pour l’octroi d’une immunité,
s’agissant d’une alternative à la demande formelle d’une clémence car
l’entreprise concernée donne un signe de vie par la fourniture de quelques
informations même limitées mais qui va aider les autorités à faire face aux
ententes illicites.

D’un autre côté, ce rang peut poser un problème, si plusieurs entreprises


prennent la même initiative, dans ce cas des « marqueurs » permettent de

163
A titre d’exemples : les menaces directes faites par un salarié licencié.
164
Commission européenne, communiqué de presse IP/10/776 du 22 juin 2010, « Antitrust : Commission Sends
Statement of Objections to Suspects Participants in Window Mounting Cartel ».
112
constater l’odore chronologique dans lequel les entreprises dénonciatrices se
sont présentées.

Ainsi que, les conditions de coopération avec l’autorité de la concurrence


peuvent aussi soulever certaines difficultés.

L’entreprise dénonciatrice est tenue de cesser sa participation à l’entente en


question sans délai et immédiatement, ce qui peut enlever sa responsabilité pour
rupture brutale des relations commerciales. Ce qui mène à négocier une solution
conciliant les exigences de la clémence et du droit des contrats 165 .

Et également, un problème lié à la coopération qui nécessite la fourniture de


tous les renseignements et documents de preuves indispensables, ainsi que
l’audition des représentants légaux et les salariés actuels et anciens de
l’entreprise dénonciatrice. Le problème se manifeste dans la réalisation d’une
coopération étroite doit être assurée entre les différentes personnes concernées,
tout en mettant l’accent sur le rôle de l’avocat pour réussir la procédure.

B- Les stratégies des entreprises dans la phase contentieuse

Dans cette phase, on parle de la procédure de non-contestation des griefs.

Cette procédure se manifeste dès la notification des griefs, dans ce cas,


l’entreprise en infraction ne peut que. Quoi qu’il en soit, dans la phase
contentieuse, la meilleure façon d’éviter la sanction, c’est d’anticiper la
proposition d’engagements.

Le principe ici est : « un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès »,
ce qui veut dire qu’une procédure à l’amiable est nécessaire pour éviter la
possibilité d’intervention ultérieure du juge.

Il faut savoir que les engagements dont il est question sont proportionnés aux
déviations anticoncurrentielles en prenant en considération la modestie de ces
165
J. B. Drummen, « Les modes alternatifs de règlement des conflits en droit de la concurrence », JCP €, 2009,
n° 18/19, p.27.
113
dernières en termes de gravité. Mais une telle proportionnalité s’avère difficile à
cerner ou à mesurer, ce qui manifeste une certaine perplexité lors de la
négociation avec l’autorité dotée du pouvoir de sanction.

Ce qui produit des sacrifices pour l’entreprise qui a décidé de s’engager dans
cette procédure car elle ne dispose pas de tous les éléments qu’après l’évaluation
préliminaire. Dans cette phase toutes les parties ont accès au dossier.

Il existe aussi un risque qui concerne le refus des négociations proposées, car
ces derniers passent par plusieurs étapes avant l’approbation.

On peut mettre l’accent sur les avantages aussi, premièrement, cette procédure
permet de diminuer le risque d’être sanctionnée à la réparation du préjudice, ou
à des dommages-intérêts dans d’éventuelles actions indemnitaires futures. Elle
permet aussi à l’entreprise d’ajuster son comportement selon ses propres
appréciassions. Et de plus, se concentrer sur le futur au détriment du passé.

En outre, les entreprises avant de se lancer dans telle ou telle procédure,


doivent poser le pour et le contre, chose qui peut faire toute la différence.

§2 : L’articulation des procédures négociées.

Dans ce paragraphe, on va parler d’un point, qui a une importance non-


négligeable, à savoir l’articulation entre les procédures négociées dans le sens
où, il y a des procédures qui peuvent se combiner avec d’autres.

Il s’agit de l’articulation de deux procédures négociées ou plusieurs auprès du


conseil de la concurrence.

Avant, il faut déterminer la gravité de l’entente prohibée ou la pratique en


question ainsi que le poids du dommage causé au Marché et à l’économie du
pays ainsi qu’au consommateur. Et cela pour choisir la procédure la plus
convenable.

114
Il existe déjà une règle qui laisse l’idée de réunir la procédure de clémence et
une autre procédure d’engagement hors le jeu d’articulation.

Pour l’articulation entre la procédure de clémence et de non contestation des


griefs est possible surtout en cas de refus d’une demande de clémence de la part
du conseil, l’entreprise peut sauver la situation en procédant à une procédure de
non contestation des griefs. Il se peut qu’un problème se pose, sans le cas où
l’une des parties participantes à l’entente a également déposé une demande de
clémence et a pu avoir une réduction d’amende.

A cet égard on ne peut pas comparer l’apport effectué par les demandeurs de
clémence pour arriver à la constatation et/ou la confirmation de l’infraction par
rapport à une simple renonciation à contester les griefs où tout l’effort est déjà
établit à bien par l’autorité de concurrence. Or on peut évoquer la possibilité du
cumul des réductions d’amende en rassemblant les deux procédures dès lors que
l’autorité estime qu’elle permet de simplifier et accélérer l’instruction 166.

Ainsi on ne doit pas oublier que, la non-contestation des griefs ne peut être
prise en complément de la clémence que dans certains cas exceptionnels et selon
l’appréciation du rapporteur général, il ne s’agit guère d’un droit pour les
entreprises, mais d’une discrétion du rapporteur général propre à des situations
particulières, notamment celle d’un champ des griefs significativement différent
de l’infraction révélée par le demandeur de clémence 167.

Dès lors, une procédure de transaction peut se combiner ou compléter une


procédure de clémence.

166
Toufik MOKEDDEM : THESE Pour l’obtention du diplôme de Doctorat en Sciences En Droit Privé : « LES
PROCEDURES NEGOCIEES EN DROIT DE LA CONCURRENCE ETUDE COMPARATIVE ». P : 76.
167
Anne KRENZER, « Articulation avec une transaction ou une demande de non-contestation des griefs », in
comment gérer une demande de clémence, Concurrence N°3-2012 /Pratiques, p. 265.
115
Conclusion
On nous enseigne que de tels travaux nécessitent une conclusion, le travail
touche à sa fin et il est impératif de conclure. Les questions sont-elles toutes
abordées ?

Un essai ne peut tout renfermer, et si sera une étude qui touche un sujet
qui pose plusieurs problèmes.

Cette entente illicite pose des difficultés quant à sa preuve, malgré l’essai du
législateur marocain d’instaurer une loi qui permet de détecter l’existence d’une
entente illicite par son effet sur le marché.

Suivant les outils juridiques en vigueur et la pratique décisionnelle de la


Commission européenne et de l’Autorité de la concurrence française, il nous
apparait que deux points méritent une attention particulière, à savoir : l’efficacité
d’action du conseil et la sécurité juridique.

Car il est important que le conseil de la concurrence soit doté des moyens
efficaces pour renforcer les techniques qui détectent les ententes dans le marché
et il devrait disposer de suffisamment de rapporteur et d’enquêteurs pour faire
face d’une manière efficace à ces ententes.

Également, il est intéressant de mobiliser des moyens d’investigation et


d’analyse importants en créant un service chargé de la veille concurrentielle
responsable des enquêtes sectorielles.

Et surtout, le Conseil devrait faire des victimes de véritables acteurs de la


politique de concurrence en leur facilitant l’obtention de réparation des
dommages causés par les ententes anticoncurrentielles, d’où l’intérêt de
collaborer avec le juge.

Malgré les progrès constatés au niveau de la loi 104-12, un autre défi qui reste
à soulever à savoir :
116
 Quelles sont aujourd’hui les conditions qui doivent être réunies pour
que la sécurité juridique des opérateurs économiques soit garantie ?

Au final, il sera très utile que la loi sur la concurrence et l’autorité compétente
en la matière répondent aux plusieurs questions qui répondent aux garanties de
la sécurité juridiques des opérateurs économiques. Il s’agit d’un débat qui mérite
d’être ouvert.

117
Bibliographie
Les ouvrages :
- Emmanuel Combe : « économie et politique de la concurrence ». Dalloz.
2005.
- Jean-Bernard BLAISE : « Le statut juridique des ententes économique »
LIBRAIRIES TECHNICHE 1964.
- Linda Arcelin : « Droit de la concurrence ; les pratiques
anticoncurrentielles en droit interne et communautaire ». Pu De
Rennes - Didact Droit. 8 Octobre 2009
- Mathilde Cayot, Malo Depincé, Daniel Mainguy : « Droit de la
concurrence ». LexisNexis. 2019.
- Marie-Chantal Boutard-Labarde, Guy Canivet, Emmanuelle
Claudel, Jérémie Vialens : « L’application en France du droit des
pratiques anticoncurrentielles. L.G.D.J. 2008.
- M. Driss Alami Machichi : « Concurrence : Droits et Obligations des
Entreprises au Maroc ». L’Economiste.
- NOUR-EDDINE TOUJGANI : « Guide pratique du droit de la
concurrence » 2006,
- Richard Whish and David Bailey : « Competition Law ». Oxford, 8e
édition, 2015.

- Sanae EL HAJOUI : « Le nouveau droit de la concurrence au Maroc ».


Publication de la revue Marocaine d’administration locale et de
développement. 2016.

118
THESE ET MEMOIRES :
- AZEROUAL Badallah BOUDIZE walid : "DROIT DES
CONTENTIEUX ». Master droit des contentieux, faculté Mohamed V
Rabat. 2014.
- Benjamin Lehaire : « L’action privée en droit des pratiques
anticoncurrentielles : pour un recours effectif des entreprises et des
consommateurs en droits français et canadien ». Thèse de doctorat
en Droit. L’Université Laval (Québec, Canada). Le 11-10-2014.
- Emmanuelle CLAUDEL : « ENTENTES ANTICONCURRENTIELLES
ET DROIT DES CONTRATS ». Thèse pour le doctorat en Droit.
UNIVERSITE DE PARIS X-NANTERRE U.F.R. de SCIENCES
JURIDIQUES, ADMINISTRATIVES et POLITIQUES. 1994.
-
- Hugo Doray : « La preuve dans les pratiques anti-concurrentielles »,
Mémoire dans le cadre du Master II Recherche mention Droit
communautaire et européen. UNIVERSITE MONTESQUIEU-
BORDEAUX IV Faculté de droit, sciences sociales et politiques, sciences
économiques et de gestion. 2012-2013.
- Marie Dumarçay : « La situation de l'entreprise victime dans les
procédures de sanction des pratiques anticoncurrentielles ». LexisNexis.
2010.
- Nicolas Dorandeu : « LE DOMMAGE CONCURRENTIEL ». Presses
universitaires de Perpignan. 2000.
- Toufik MOKEDDEM : THESE Pour l’obtention du diplôme de Doctorat
en Sciences En Droit Privé : « LES PROCEDURES NEGOCIEES EN
DROIT DE LA CONCURRENCE ETUDE COMPARATIVE ».
Université d’Oran 2 Faculté de Droit et des Sciences Politiques. 2016-
2017.

119
Rapport et colloques :

- Actes du colloque organisé par l’institut Marocain du Droit des


Entreprises « IMADE » : Le droit de la concurrence » 2002.
- Centre du commerce international : « Lutter contre les pratiques
anticoncurrentielles (Guide à l’intention des exportateurs des économies
en développement) ». Genève 2012.
- Communication Comm. CE, Livre blanc sur les actions en dommages et
intérêts pour infraction aux règles communautaires sur les ententes et les
abus de position dominante, 2 avril 2008, COM (2008) 165 final
- Examen de la Recommandation de 1998 de l’OCDE concernant une
action efficace contre les ententes injustifiables 2019.
- Groupe Soufflet : « RÈGLES DE CONCURRENCE ET LOYAUTÉ
DANS LES RELATIONS D’AFFAIRES RECOMMANDATIONS
PRATIQUES ». Février 2017.
- Note de Robert D. Anderson, William E. Kovacic, Anna Caroline Müller
et Nadezhda Sporysheva - : « POLITIQUE DE LA CONCURRENCE,
COMMERCE ET ÉCONOMIE MONDIALE : ÉLÉMENTS FIGURANT
DANS LES ACCORDS DE L’OMC EXISTANTS, ENGAGEMENTS
CONTENUS DANS LES ACCORDS COMMERCIAUX RÉGIONAUX,
DÉFIS ACTUELS ET AXES DE RÉFLEXION ». Forum mondial sur la
concurrence. OCDE 2019.
- World Bank group : « UNE DEUXIÈME GÉNÉRATION DE
RÉFORMES : STIMULER LA CROISSANCE DU SECTEUR PRIVÉ,
LA CRÉATION D’EMPLOIS ET L’AMÉLIORATION DES
COMPÉTENCES » Diagnostic du Secteur Privé. OCTOBRE 2019.

120
Articles et revues.

- Anne KRENZER, « Articulation avec une transaction ou une demande de


non-contestation des griefs », in comment gérer une demande de
clémence, Concurrence N°3-2012 /Pratiques.
- E. BARBIER DE LA SERRE, « Accès aux preuves : étendue des
pouvoirs du juge, pouvoirs et devoirs des parties, étendue du droit à la
divulgation », Revue Lamy Concurrence, 2009, n°18.
- J. RIFFAULT-SILK, « Les actions privées en droit de la concurrence :
obstacles de procédure et de fond », Revue Lamy Concurrence, 2006, n°6.
- Lahcen Louchahi : « Droits d la concurrence et circuits de distribution au
Maroc ». Revue marocaine d’administration locale et de développement.
Première édition, 2003.
- Marie-Anne FRISON-ROCHE : « Le modèle du marché » Revue :
Archives de Philosophie du Droit. 40 :286-313 (1995).
- Marie-Claire RIVIER, Professeur de droit privé à l'Université Jean
Monnet : « LES MODES ALTERNATIFS DE REGLEMENT DES
CONFLITS Un objet nouveau dans le discours des juristes français ? ».
Centre de Recherches Critiques sur le Droit - CERCRID Unité associée
au CNRS, rattachée à l'Université Jean Monnet de Saint Etienne. 2001.
- Mme Maissae Bousaouf : « L’instrumentalisation du marché pertinent en
droit marocain de la concentration ». Revue Internationale des Sciences
de Gestion ISSN : 2665-7473. Volume 4 : Numéro 2.
- Revue de la CGEM info, n° 2261 du 24/11/2000.
- R. SAINT-ESTEBEN, « Pour ou contre les dommages et intérêts », Les
Petites affiches, 20 janvier 2005, n°14.
- S. PIETRINI. « Le recours à la négociation en droit de la concurrence :
l’exemple des programmes de clémence » Revue Lamy de la concurrence,
2009, n°21,

121
Jurisprudence

- Cass. com., 2 novembre 2011, n° 10-21103, Bulletin 2011, IV, n° 177.


- Cass. Com., 15 octobre 1996, Sté pompes funèbres générales c/ Sté
d'explotation des marbreries Lescarelles.
- CJCE, 13 février 1979, affaire des Vitamines n° 38, CJCE, 14 février
1978 United Brands 27/79 Rec 207.
- CJCE, 21 février 1973, Continental Can, aff. 6-72.
- CJCE, 13 février 1979, Hoffman Laroche, aff. 85/7.
- CJCE, 3 juillet 1991, Akzo, aff. C62/86.
- CJCE, 13 juillet 2006, Manfredi, aff. C-295/04 à C-298/04.
- CJCE, 18 octobre 1979, Gema, aff. 125/78.
- CJCE, 20 septembre 2001, Courage, aff. C-453/99.
- Cons. Conc., Avis du 21 septembre 2006 relatif à l'introduction de l'action
de groupe en matière de pratiques anti-concurrentielles.
- Cons .conc, 14 mars 2007, déc. n°07-D-09.
- Cour d’appel de commerce de Casablanca n° 260/99 en date du 4/3/1999.
- Cour de cassation. Arrêt n° 588 du 12-04-2000 Dossier commercial n°
3225/94.
- Cour de justice de l’Union européenne, 7 janvier 2004, Aalborg Portland
e.a. c/ Commission, aff. C-204/00 P, C-205/00 P, C-211/00 P, C-213/00
P, C-217/00 P et C-219/00 P, Rec.
- T. com. Nanterre, 11 mai 2006, SA Laboratoires Arkopharma c/Sté Roche
et sté Hoffmann Laroche.
Les dispositions juridiques :

- Dahir n° 1-11-91 du 27 chaabane 1432 (29juillet 2011) portant


promulgation du texte de la constitution.
- Dahir n° 1-14-117 du 2 ramadan 1435 (30 juin 2014) portant
promulgation de la loi n° 20-13 relative au Conseil de la concurrence.
122
- Dahir n° 1-14-116 Du 2 Ramadan 1435 (30 Juin 2014). Portant
promulgation de la loi n° 104-12 Relative à la liberté des prix et de la
concurrence.
- Loi française n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de
l'économie.
- Règlement (CE) n° 1 /2003 du conseil du 16 décembre 2002 relatif à la
mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du
traité. JOUE L1 du 4 janvier 2003
- Règlement CE n° 622/2008 de la commission du 30 juin 2008 modifiant
le règlement CE n° 733/2004 en ce qui concerne les procédures de
transaction engagées dans les affaires d’ententes, JOUE L173/3 du 1er
juillet 2008
- Communication de la commission du 2 juillet 2008 relative aux
procédures de transaction engagées en vue de l’adoption de décisions en
vertu des articles 7 et 23 du règlement CE n° 1/2003 du conseil dans les
affaires d’ententes, JOUE C 167/1 du 2 juillet 2008.
-

Webographie :

- Dalloz.fr
- Mémoireonline.com.
- Thèses.fr.
- Oecd.org.
- Village-justice.com
- Conseil-concurrence.ma.

123
Table des Matières
Introduction…………………………………………………………………….9

Première partie : L’encadrement juridique des ententes illicites………….14

Chapitre 1 : La typologie des ententes illicites………………………………15

Section 1 : Les risques portés par les ententes illicites……………………...16

§1 : Impact des ententes anticoncurrentielles sur la libre concurrence………...17

§2 : Impact des ententes anticoncurrentielles sur l’ordre public économique….20

Section 2 : Notion et manifestations de l’entente illicite…………………....23

§1 : La définition de l’entente illicite…………………………………………..23

§2 : Les manifestations de l’entente……………………………………………28

A- Les formes des ententes illicites…………………………………………………….29


B- Les types des ententes illicites………………………………………………32

Chapitre 2 : Le cadre légal des ententes anticoncurrentielles……………...34

Section 1 : Le Cadre légal des ententes illicites au niveau national………..34

§1 : Philosophie de la loi de concurrence dans le cadre des ententes illicites…35

C- Généralités des pratiques anticoncurrentiels……………………………………...35


D- Les ententes en droit marocain……………………………………………………..44

§2 : Le conseil de concurrence……………………………………………..46

C- Les attributions et compositions du conseil……………………………………......47


D- Le volet organisationnel du conseil…………………………………………………52

Section 2 : Le Cadre légal des ententes illicites au niveau international…..56

§1 : L’intérêt d’un accord-cadre sur les mesures anticoncurrentielles…………56

§2 : La politique internationale dans le cadre des ententes anticoncurrentielles.58


124
Deuxième partie : L’encadrement processuel des ententes
anticoncurrentielles…………………………………………………………...65

Chapitre 1 : La preuve des ententes anticoncurrentielles………………….66

Section 1 : La preuve dans le « public enforcement »………………………66

§1 : - La preuve et la forme des ententes……………………………………….67

A- L’existence d’accord………………………………………………………………...67
B- L’objet d’accord……………………………………………………………………..72

§2 : La preuve de l'abus de position dominante………………………………..75

A- La preuve de la position dominante…………………………………..76


B- La preuve de l’abus de position dominante…………………………..78

Section 2 : La preuve dans le « private enforcement »………………..84

§1 : La preuve des ententes illicite devant le juge de droit


commun…………...............................................................................................85

A- L’établissement de la faute………………………………………………………….85
B- L’établissement du préjudice et du lien de causalité……………………………...89

§2 : Un droit de la preuve en réalité favorable aux entreprises………………...91

A- L'existence d'outils facilitant l'action civile………………………………………..92


B- Une modernisation inachevée dans la réduction des obstacles probatoires……..93

Chapitre2 : La Tendance de recours aux procédures négociées…………...96

Section 1 : La négociation dans le cadre des procédures négociées………..97

§1 : Les procédures négociées pouvant aboutir à une exonération totale……...97

A- La Clémence…………………………………………………………………………97
B- Les Engagements volontaires……………………………………………………...102

125
§2 : Les procédures négociées pouvant aboutir à une exonération partielle…105

A- La Non-Contestation des griefs……………………………………………………105


B- La Transaction……………………………………………………………………..107

Section 2 : La mise en concurrence des procédures négociées……………110

§1 : Les stratégies des entreprises contrevenantes…………………………….111

A- Les stratégies des entreprises dans la phase précontentieuse…………………...111


B- Les stratégies des entreprises dans la phase contentieuse……………………….113

§2 : L’articulation des procédures négociées………………………………..114

Conclusion……………………………………………………………………116

Bibliographie………………………………………………………………....118

Table des matières………………………………………………………...…124

126
127
128

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