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les zones rurales. Même dans certaines zones où des opérations cadastrales ont été enclenchées par le passé,
ou bien des zones spécifiques (terres d’anciens colons, zones irriguées aménagées par l’Etat…) dont les terres
sont titrées, les titres fonciers éventuels n’ont jamais fait l’objet de procédures de mutation à ceux qui les
exploitent actuellement. Ainsi la plupart des agriculteurs malgaches n’ont aucun droit reconnu sur les terres
qu’ils exploitant, parfois depuis plusieurs générations. Par ailleurs, les pratiques de métayage et fermage sont
légalement interdites par des lois datant des années 1960/70.
Dans les années 2000, le constat a été fait que le système de reconnaissance de la propriété (le titre foncier)
était particulièrement inadapté et inefficace. Seul 7 % des parcelles était titré, au prix de longues (5 ans en
moyenne) et couteuses procédures (500 $ par titre), en relation avec des bureaux de l’administration domaniale
beaucoup trop éloignés des parcelles agricoles.
Malgré ces grandes innovations juridiques et institutionnelles apportées par la réforme de 2005 pour la
formalisation des droits, plusieurs autres dimensions restent non abordées ou non impactées par la réforme,
entre autres l’accès à la terre pour les sans-terre, l’occupation des terrains titrés aux noms d’anciens colons, les
dotations de terres pour les jeunes et la légalisation et la sécurisation des pratiques de faire-valoir indirect.
De nouveau en 2015, sous l’action et la pression de la société civile, plusieurs réformes doivent être mises en
œuvre dans la Lettre de Politique Foncière (LPF) 2015 – 2030, dont la première orientation prévoit la Sécurisation
des droits dans leur diversité et notamment d’accompagner la sécurisation des transactions et de favoriser
l’inscription des mutations :
− Toutes les interdictions liées à la pratique des modes de faire-valoir indirect seront levées.
− Des outils d’accompagnement (modèles d’acte et registre, informations, etc.) seront mis à disposition
au niveau des communes (voire des fokontany) pour améliorer la sécurisation des transactions, dans le
cas de transfert temporaire de droits (métayage, location, prêt) comme dans le cas de transferts
définitifs (vente, donation ou succession).
Actuellement des propositions de révisions des textes législatifs, notamment pour reconnaitre les modes de
faire-valoir indirect, sont en cours.
L’accès des jeunes à la terre se fait surtout par héritage (les femmes sont souvent encore lésées par rapport aux
hommes), l’achat de parcelles est difficile du fait du prix du foncier, de la rareté des opportunités et de la
difficulté d’accès aux informations sur les ventes, les possibilités de défriches sont limitées car les terres sont
dans certaines zones déjà appropriées dans leur totalité ou bien trop éloignées des réseaux (pistes, centre de
santé, marché…). Les modes de faire-valoir indirect sont des alternatives intéressantes pour les jeunes mais le
renouvellement des accords n’est pas assuré faute de légalisation et de sécurisation de ces formes de faire-
valoir ce qui peut parfois remettre en cause une installation durable des jeunes : témoignage de Patrice, jeune
agriculteur de la région de Diana : https://www.youtube.com/watch?v=IiUEcCd4bMI; Témoignage de Lucio,
jeune agriculteur de la région Bongolava : https://www.youtube.com/watch?v=Rcer_AmgqvY
Par ailleurs, la pratique du mode de faire-valoir indirect (fermage, métayage) est perçue comme un moyen pour
une certaine catégorie de ménages propriétaires de résoudre des contraintes de liquidités, d’incapacité, en
raison généralement de l’éloignement, à gérer des salariés agricoles ou tout simplement pour sécuriser leurs
droits en l’absence de titre ou certificat foncier, la location ou le métayage permettant d’une certaine manière,
une reconnaissance informelle de leur propriété.
Le Réseau Soa, avec la plateforme Solidarité des intervenants sur le foncier (SIF), souhaite travailler sur les
problématiques de défense et d’accès à la terre des agriculteurs malgaches, et parmi les nombreux chantiers à
suivre (migrations des paysans, aménagement du territoire et zones de développement local/zones
économiques spéciales ou zone d’investissements agricoles réservée à des investisseurs, programme…), la
relance de la reconnaissance légale de ces modes de faire-valoir indirect est prioritaire.
En effet, alors que depuis 2005, le processus de formalisation simplifiée, accessible et légale des droits de
propriétés via des certificats fonciers délivrés par des guichets fonciers dans les communes rurales se développe
et permet de sécuriser plus massivement les propriétaires, il conviendrait en parallèle de sécuriser les modes de
faire-valoir indirect.
Deux entrées sont identifiées :
- la reconnaissance des modes de faire valoir indirect par des modalités contractuelles, dans des
situations où propriétaire et locataires sont bien identifiés,
- une réflexion pour sécuriser, même pour une période courte mais définie, les agriculteurs exploitant
des terres aux statuts obsolètes ou spécifiques (terres titrées d’anciens colons, terres titrées au nom de
sociétés mais non exploitées, terres d’aires protégées…) : se pose la question de savoir s‘il existe ailleurs
dans le monde, des cadres légaux permettant de reconnaitre des droits aux exploitants le temps que le
statut de ces terres s’éclaircissent (ex. en France d’activité agricole sur des friches en attente
d’aménagement industriel ?).