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Sommaire
Introduction.........................................................................................................................................5
Rencontre entre le Muséum d'Histoire Naturelle et la langue occitane......................................8
Contextualisation.........................................................................................................................8
Point sur la taxinomie................................................................................................................11
Des naturalistes au service de la flore régionale.......................................................................17
Le Dr Gaubert et son étude de la flore occitane ..........................................................................22
Démarche du Docteur Gaubert..................................................................................................22
Examen et classification des plantes.........................................................................................27
Détails et singularités de la langue............................................................................................31
Analyses et commentaires.........................................................................................................32
Parcours linguistique ................................................................................................................35
Répercussions et prolongements...............................................................................................38
Rapport entre le nom des plantes et leurs vertus..........................................................................40
Description des usages populaires ............................................................................................40
Jeux d'enfants............................................................................................................................43
Vie pratique...............................................................................................................................45
Traitements et médecines..........................................................................................................47
La poésie des fleurs...................................................................................................................53
Les herbes dites magiques ........................................................................................................54
Valorisation possible de ce travail .................................................................................................61
Idée de livret..............................................................................................................................61
Illustration.................................................................................................................................63
Partenariats possibles................................................................................................................65
Autres applications de ce travail................................................................................................67
Conclusion........................................................................................................................................68
Rapport de stage...............................................................................................................................70
Bibliographie ...................................................................................................................................74
Annexes.............................................................................................................................................79
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Introduction
À travers les mots de Gaston Paris, Alfred Jeanroy expose l'idée que tous les dialectes
occitans sont étroitement liés à une condition de vie et une histoire régionale particulière. De ce fait,
ils possèdent une physionomie propre, une richesse particulière, due à leur culture, à leurs
traditions, qu'il est difficile de mettre en valeur à travers un répertoire commun. Mon travail ne sera
donc pas exhaustif et sera plutôt au départ de plusieurs pistes de recherches en ce qui concerne le
vocabulaire de la flore occitane. Il essayera d'illustrer au mieux l'abondance et la particularité des
idiomes présents sans malheureusement pouvoir en exprimer toute la beauté et la variété.
À l'origine de cette étude il y a Georges Gaubert, docteur en médecine du XX e siècle,
passionné de botanique et pratiquant le languedocien, sa langue maternelle. Il a laissé plus d'une
centaine de fiches, sur lesquelles sont recensées une grande partie de la flore du sud de la France et
qui donnent pour chaque occurrence une ou plusieurs traductions occitanes. Ce fonds d'archive est
conservé au Muséum d'Histoire Naturelle de Toulouse depuis plusieurs années, sans avoir été
exploité ni même référencé. Ma mission était d'abord de retrouver le prénom et les dates de vie et de
mort de ce chercheur, pour ensuite découvrir sa façon de penser et de voir le monde, qui ont très
fortement influencé ses recherches. J'ai avant tout essayé de savoir qui il était, pour comprendre sa
démarche et sa manière de procéder, avant de m’intéresser de plus près à ses fiches. Pour ce faire,
j'ai reconstitué une partie de sa biographie et de sa bibliographie avec l'aide d'Elodie Guiraud,
documentaliste à la bibliothèque Émile Carthailac, du Muséum. Je me suis ensuite penchée plus
sérieusement sur les fiches. J'ai d'abord constitué un tableau où j'ai recensé toutes les notes que G.
Gaubert avait pu prendre, ce qui m'a permis de comprendre sa méthode, d'où venaient ses
informations et comment il avait décidé d'étudier les différentes occurrences. Pour la partie
botanique, j'ai pu recevoir l'aide de Boris Presseq, qui s'occupe de la conservation de cette matière
au Muséum, ainsi que celle de Jean Sanegre, botaniste amateur et locuteur occitan d'Aude, qui m'a
aidé à comprendre la logique de certaines fiches. Hormis l'envie de mettre en lumière ce fonds, le
5
Muséum n'a fait part d'aucune exigence particulière, ce qui m'a laissé une grande liberté pour penser
à la manière de valoriser ce travail et de l'ouvrir au public.
Une problématique s'est alors imposée à moi, comment lier l'étude de l'occitan et celle de la
botanique, et surtout comment rendre compte de l'intérêt de cette liaison ? Il s'agissait finalement de
montrer dans quelle mesure la langue occitane peux servir à la vulgarisation de la matière botanique
et permet de poser un nouveau regard sur la flore et la nature en général.
En effet, la langue occitane, quelque soit le dialecte est encore majoritairement vue comme
un « patois », c'est-à-dire à un langage obscure et inintelligible 2, un baragouin populaire sans
expression littéraire, obsolète et médiocre. Il ne peut donc s'intégrer à une matière scientifique,
même si les sciences naturelles sont connues au XIX e et au XXe siècles pour occuper « une place
charnière au sein des disciplines 3», notamment entre l'enseignement des sciences et des lettres. Il
est donc difficile de rendre légitime la nomination occitane des plantes d'un point de vue
scientifique ou académique. Même si la langue apparaît dans la littérature, de façon très maîtrisée et
bien souvent poétique, dans l'esprit populaire elle reste une parole orale, donc vulgaire. De plus, la
désignation des plantes en occitan ne dépend pas de la bienséance académique, mais découle d'une
expérience sensible de la vie. Ainsi, la plupart des occurrences n'ont pas été inscrites dans un
dictionnaire, mais ont pris, suivant les régions différentes tournures et en fonction de l'utilisation de
la plante, de sa couleur, de ses vertus, etc.
Il faut savoir qu'en botanique, le latin semble être la seule langue réellement acceptée et a été
conservée plus que dans toute autre domaine scientifique. Alphonse de Candolle, botaniste suisse du
XIXe siècle, explique dans son Introduction à l'étude de la botanique, ou traité élémentaire de cette
science4, que c'est parce qu'elle touche toutes les nations, tous les pays. Elle a donc besoin d'une
nomenclature précise, uniforme, commune à tous les peuples. Or, le latin fait partie de la formation
de tout homme éclairé ou du moins scientifique. Cependant, cette nomination ne concerne qu'une
petite partie lettrée de la population du XIX e ou du XXe siècle, celle qui a pu bénéficier d'une
instruction. Les autres continuent à nommer les plantes soit dans leurs dialectes, qu'ils soient d'òc ou
d'oïl, soit en français, et dans ce cas, nous le verrons plus tard, la traduction dépend bien souvent de
la nomination dialectale. Toutefois, n'oublions pas qu'à cette époque l'usage des langues autres que
2 Définition CNRTL
3 Mais aussi, entre les sciences et la médecine avec des enseignements comme l'histologie ou l'embryologie. Cf :
Hulin Nicole. L'enseignement des sciences naturelles au XIXe siècle dans ses liens à d'autres disciplines / The
teaching of natural sciences in the 19th century in its links to other disciplines. In: Revue d'histoire des sciences,
tome 55, n°1, 2002. pp. 101-120. www.persee.fr/doc/
4 CANDOLLE, A. Introduction à l'étude de la botanique, ou traité élémentaire de cette science, Meline, cans et
compagnie, Bruxelle, 1837.
6
le français était exclu des textes administratifs et qu'un processus de francisation avait été lancé
dans les écoles. Tous les idiomes de France ont petit à petit été interdit. Le but étant de faire du
français le seul parler national pratiqué par tous.
Toutefois, il reste dans nos expressions ou dans notre accent des traces des langues de
France. Beaucoup de mots ont d'ailleurs subsisté dans le langage populaire français et sont
majoritairement appliqués au quotidien, dans un contexte familial et intime. Il est donc important de
ne pas négliger ces langues, car elles témoignent, aujourd'hui, d'un regard sur le monde différent du
nôtre. Elles suggèrent une tout autre logique et invite le locuteur à adapter sa façon de penser. Elles
sont donc génératrices d'une plus grande ouverture d'esprit. En botanique, cette idée est
remarquable, car ces langues révèlent une grande sensibilité, que ce soit dans l'observation des
plantes ou dans leur utilisation. En tant que langues vernaculaires, donc propre à une région, une
culture, elles permettent d'aborder cette science d'une autre manière, plus terre-à-terre et
pragmatique.
Ainsi, cette étude se déroulera selon quatre axes. Tout d'abord, nous verrons de quelle
manière le Muséum d'Histoire Naturelle et la langue occitane se rencontrent, ce qui nous conduira à
l'examen plus particulier du travail de Georges Gaubert sur la flore occitane. Ensuite, nous
étudierons le rapport qu'il peut y avoir entre le nom des plantes et leurs vertus, d'après les
recherches du Dr Gaubert, tout en invoquant d'autres auteurs afin de comparer les sources. Enfin,
nous verrons différentes valorisations possibles de l'étude de Georges Gaubert à travers ce travail.
7
Rencontre entre le Muséum d'Histoire Naturelle et la langue
occitane
Contextualisation
Le muséum d'histoire naturelle, en tant que lieu de savoir scientifique et diffuseur culturel,
se doit d'offrir au public le plus grand accès possible à ses collections. Il a un devoir de valorisation
et de vulgarisation de la matière scientifique. Cette démarche relève des sciences naturelles mais
aussi les sciences humaines. Il existe d'ailleurs au Muséum une aile ethnologie qui étudie l'ensemble
des caractéristiques qui composent un groupe humain. Ainsi, le Muséum ne s’intéresse pas
seulement à l'évolution physique de l'homme et de la nature, il s'attache aussi aux conditions
naturelles et culturelles de l'homme, qui comprennent donc ses activités, ses comportements, son
mode de vie et son évolution5. Le langage, la façon de vivre, les traditions propres à une région, font
partie de ses prérogatives. La conservation des fiches botaniques du Dr Gaubert est bien une façon
de préserver un patrimoine à la fois scientifique et humain. Le Muséum effectue un travail de
recensement botanique qui illustre la variété des plantes qui se trouve dans le pays occitan, mais
aussi un travail linguistique attaché de façon très étroite à sa culture.
D'autre part, que ce soit à travers son histoire, ses collections, ou tout simplement ses
bâtiments, le Muséum est profondément enraciné dans son territoire et ne souhaite pas oublier son
origine occitane. En effet, cet établissement vieux de 150 ans a connu trois siècles d'histoire et a
créé ses fondations dans une société où les mots chantaient au rythme de la craba, du hautbois ou
encore de la vielle à roue. Il a d'ailleurs connu de nombreux directeurs ou collaborateurs pratiquant
et revendiquant la langue et la culture occitane.
Parmi eux, le plus célèbre reste Jean-baptiste Noulet (1802-
1890), directeur du muséum de 1872 à 1890. Grand naturaliste
passionné de botanique, il s’intéressera surtout à la flore locale,
ce que nous verrons plus en détails. Il fut également :
Un érudit patoisant […] Il fut des premiers
vers 1840, qui combattit des préjugés [...],
alors qu'on écrivait : Les patois s'en vont,
inutiles désormais ; ils s'en vont, avec les
Jean-baptiste Noulet, fond
vieux usages, avec les vieux costumes de nos photographique
provinces6. du Muséum de Toulouse.
5 ORTIGUES E. Sciences humaines, Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 18 mai 2016. URL :
http://www.universalis.fr/encyclopedie/sciences-humaines/
6 Avant-propos, VISNER G. Jean-baptiste Noulet è soun obro dé bulgarisacioun patouèse, Lé Gril, 1894, p. 10.
8
Il a travaillé à la réédition de nombreuses œuvres comme celles de Godolin 7. Dans l'avertissement
de son édition des œuvres de l'écrivain, il souligne :
Nous avons donc à faire connaître le but que nous nous sommes proposés
d'atteindre en nous appliquant à cette œuvre de longue haleine, qui nous a
procuré un si agréable délassement aux labeurs d'un long professorat et à
de fatigantes, quoique bien attrayantes, recherches d'histoire naturelle.
De plus, il accompagne cette édition d'un glossaire, où la plupart des occurrences sont traduites,
notamment celles concernant la flore. Selon M. Cartailhac, Noulet menait beaucoup de travaux et
collectait beaucoup d'informations dans le but de réaliser un dictionnaire de la langue toulousaine.
Le manuscrit a été vendu à sa mort, sans édition posthume.
De même, Émile Cartailhac (1845-1921), ami et
collaborateur de Noulet, est une grande figure intellectuelle et
culturelle de Toulouse. Bien qu’originaire de Marseille, ses
racines maternelles se situent en Aveyron, là où il a grandi.
Grand préhistorien de son temps, il réalise ses premières fouilles
dans les dolmens aveyronnais où il récoltera de nombreuses
pièces qu'il léguera ensuite au muséum de Toulouse8. Passionné
d'histoire locale et d'archéologie, il prend en 1901 la
responsabilité de la section préhistoire et ethnographie du
muséum9. Il occupe une place importante dans la vie locale et
sera en 1897 élu « mainteneur », c'est-à-dire membre de
La dernière photographie de
Cartailhac. l'Académie des jeux floraux. Cette Académie littéraire date de
Cliché Chevalier, Mai 1921.
Service Bibliothèque et 1323 et a été institué par « sept troubadours » pour honorer le
documentation
du Muséum de Toulouse lyrisme courtois10.
Il s'agit à l'origine d'un concours en langue d'òc et aujourd'hui encore un prix spécial est toujours
décerné pour les textes en occitans. Il s'agit d'une société savante, qui participe à la vie locale et
culturelle et vise à promouvoir la littérature toulousaine. Ainsi, Émilie Cartailhac a été une figure du
monde muséale mais aussi passionné du patrimoine et de la culture locale. C'est dans cette idée qu'il
réorganise le musée St Raymond, musée des Antiques de Toulouse et en devient directeur en 1912.
9
Eugène Trutat, directeur du Muséum en 1890, juste après
Noulet, passionné de photographie, publie en 1894, Les Pyrénées :
les montagnes, les glaciers, les eaux minérales, les phénomènes de
l'atmosphère, la flore, la faune et l'homme 11. Tout un chapitre de cet
ouvrage est consacré à la parole et la culture occitane. Il s’intéresse
aux différents idiomes du sud de la France, considérant cela comme
une langue à part entière. Il n'utilise pas le terme de « patois »
comme une référence péjorative, mais cherche seulement à
comprendre la construction de ces différents langages et à en donner
Portrait d'Eugène Trutat, 1864.
une explication. Mais, contrairement à Noulet, il ne s’intéresse pas Cliché donné en 1971 à
l'Association des Toulousains de
uniquement à la flore locale et n'a pas de rapport privilégié avec la Toulouse par Jean Trutat
culture ou le patrimoine de notre région. le 14 décembre 2006: déposé aux
Archives municipales de Toulouse.
J-B Noulet, possède une grande connaissance linguistique, qui est remarquable d'après les
glossaires qu'il a rééditées et placés à la fin des œuvres. 12 Tous ces textes sont accompagnés de notes
lexicologiques précieuses, qui sont d'une grande importance pour l'histoire des dialectes toulousains
et méridionaux en général13. J-B Noulet donne ainsi un autre crédit à la langue, qui devient savante.
Il lui accorde non seulement un intérêt poétique mais aussi scientifique car celle-ci apparaît dans ses
flores.
Le Muséum d'Histoire Naturelle a donc une relation particulière avec le monde occitan, que
ce soit par l'intermédiaire des personnalités qui s'y sont illustrées, ou par son histoire. De plus, c'est
à travers l'histoire naturelle que la langue occitane semble s'imposer, et comme l'indique Pascal
Tassy14, dans la préface de « Muséum de Toulouse, des aventuriers pour la science15 », il s'agit
d'une :
Science de la nature, qui se déploie depuis sa mise en perspective qui doit
beaucoup à Buffon16 jusqu'aux interrogations sociétales d'aujourd'hui.
11 TRUTAT Eugène, Les Pyrénées : les montagnes, les glaciers, les eaux minérales, les phénomènes de l'atmosphère,
la flore, la faune et l'homme, Chapitre V, « L'homme, ses races et son langage », Édition J-B Baillière et fils, Paris,
1894, pp. 353-360
12 Parmi elles, il y a beaucoup d'ouvrages toulousains de la fin du XVIe siècle : Las ordenansas et costumas del Libre
blanc (paris 1876), Las Nonpareillas Receptas (Montpellier- Paris 1880), Les joyeuses recherches de la langue
tolosaine (sans date, Toulouse,1892).
13 Cartailhac E, Anglade J, Leclerc du Sablon J, Un chapitre de l'histoire intellectuelle de Toulouse : Le Professeur J.-
B. Noulet, Extrait des Memoires de l'Academie des Sciences, Inscriptions et Belles-lettres de Toulouse, 1919, pp.
421 à 483.
14 Professeur émérite du Muséum national de Paris.
15 Duranthon. F, Mendieta. S, op. cit, Préface.
16 Comme nous le verrons dans la sous-partie suivante.
10
En effet, les sciences d'histoires naturelles et notamment la botanique ont été soumises à une grande
révolution qui a entraîné la modification des méthodes de classification des plantes et la
réglementation de sa nomenclature.
Il faut savoir qu’à l'origine il n'y avait pas d'uniformité dans la dénomination des plantes. En
effet, durant l'Antiquité, elles étaient nommées en fonction des soins qu'elles pouvaient prodiguer,
car l'on croyait que les végétaux avaient été créés pour les besoins de l'Homme. Ainsi, plusieurs
plantes ayant les mêmes propriétés médicinales pouvaient porter le même nom. Thierry Hoquet 18,
maître de conférences en histoire et philosophie des sciences à l'université Paris X-Nanterre, illustre
cette idée grâce à l'exemple d'un catalogue alphabétique de plantes réalisé par Pline l'Ancien 19 où il
mentionne :
Alga rufa (bonne pour les morsures de serpents),
Actaea (pour les maladies internes des femmes),
Amelos agria (qui s'utilise en compresse), etc.
Aujourd'hui, ce sont des termes que les botanistes ont du mal à comprendre, d'une part car ils sont
décontextualisés, mais surtout parce que leurs noms ont changés. Malgré la phrase explicative qui
suit, il est difficile de comprendre de quelle plante Pline parle. Thierry Hoquet précise alors que
« dès que les noms changent, le savoir se perd20 », il semble donc de bon usage de conserver une
nomenclature fixe afin que tous le monde comprenne de quoi il s'agit et que les informations
circulent au fil du temps. Pour remédier à cela, les naturalistes 21 des XVIIe et XVIIIe siècles ont
ensuite essayé de créer des synonymies et de lier les noms utilisés durant l'antiquité aux noms
modernes. À ce propos, Jean-Jacques Rousseau affirme dans ses Fragments pour un dictionnaire
des termes d'usage en botanique :
Perdus dans ce labyrinthe immense, les Botanistes forcés de chercher un fil
pour s'en tirer, s'attachèrent enfin sérieusement à la méthode. […]Les noms
des plantes devenaient non seulement des phrases mais des périodes.22
11
Finalement, ces savants cherchaient à retrouver chez les auteurs antiques les plantes qu'ils voyaient.
Mais selon Rousseau cela a eu pour effet un certain chaos de la nomenclature 23, beaucoup de
recherches et de descriptions ont été vaines car il était impossible d'être sûr qu'il s'agissait bien de la
plante à laquelle l'auteur faisait référence. Il fait aussi allusion aux frères Bauhin, qui ont tenté de
mettre de l'ordre en indiquant pour chaque plante tous les noms que les auteurs précédents leur avait
donné, cependant cela a introduit l'usage de nommer les plantes par de longues phrases descriptives.
En voici un exemple tiré d'une définition de Robert Morison24 :
Mauve annuelle à feuille ronde, à fleur les plus petites de toutes, blanches, à
cinq pétales entourant en verticilles les articulations et aux graines de même
étroitement adhérentes en verticilles25.
De plus, avec les voyages et les découvertes qui s'intensifient, cette nomenclature devient de plus en
plus pesante car le nombre de plantes connues ne cesse d’augmenter26. Tournefort, botaniste
français du XVIIe siècle, même s'il perçoit les inconvénients d'une telle dénomination, ne remet pas
en cause son principe, celui qui veut que l'identité de la plante s'exprime à travers sa définition 27.
Pour lui, les noms des plantes sont finalement des définitions. Il prend l'exemple de la Renoncule et
approuve les frères Bauhin qui ont distingué dans ce genre l'espèce de « Renoncule des bocages et
des forêts, à feuille rondes ». Ainsi, selon Tournefort, « Renoncule indique le genre et le reste la
différence28 ». Il est donc important que dans le nom de la plante apparaisse aussi son identité et sa
spécificité.
Linné, grand botaniste du XVIIIe siècle, célèbre pour sa réforme de la classification du
vivant, remet aussi en question le système de nomenclature présent. Il n'a pas vraiment dispensé les
botanistes de descriptions, mais leur a permis de les abréger. À l'origine, pour chaque espèce il a
formé une phrase dans un latin sobre et précis. Puis, il a mis en place la nomenclature binomiale :
chaque plante reçoit alors deux noms latins29, un nom de genre, générique et commun à plusieurs
végétaux, suivit de son nom d'espèce aussi appelé « nom trivial », qui la caractérise plus
particulièrement. Il peut s'agir d'un adjectif qui la qualifie, par son odeur, son goût, sa couleur, son
pays ou sa région d’origine, etc. Enfin, apparaît aussi la première lettre du nom du scientifique qui
23 Voir Fiche annexe 1 : définition.
24 Botaniste écossais du XVIIe, exemple donné par Tournefort dans « Isagoge in rem herbariam » trad. G. Becker faite
sur l'édition de 1719, dans R. Heim (dir), Tournefort, Paris, MNHNT, 1957, p. 296.
25 Voir Fiche annexe 1 : définition.
26 Müller-Wille Staffan, La science baconienne en action, dans Les fondements de la botanique, Linné et la
classification des plantes, sous la direction de Thierry Hoquet, Vuibert, Paris, 2005, p. 58.
27 Drouin Jean-Marc , Linné et la dénomination, op.cit, p. 47-48.
28 Tournefort, « Isagoge in rem herbariam », trad. G. Becker faite sur l'édition de 1719, dans R. Heim (dir.),
Tournefort, Paris, MNHN, 1957, p. 296.
29 Car comme indiqué dans l'introduction, il s'agissait à l'époque de la langue commune à tous les savants.
12
a découvert la plante ou l'a nommé. La première occurrence prend une majuscule, la deuxième une
minuscule et s'écrit en italique, comme Mentha piperata, la menthe poivrée ou Vinca minor, la
petite pervenche30 ou par exemple :
Campanula alpestris L.
De plus, Linné s'empare de «la doctrine des noms » comme il le déclare dans une lettre et utilise le
nom de ses amis ou de ses collaborateurs pour nommer les plantes. Thierry Hoquet semble d'ailleurs
sous-entendre que chez lui l'assignation des noms n'est pas toujours innocente. Voici ce qu'il écrit à
son protecteur et ami Olaus Rudbeck :
Jaloux de te donner l'immortalité, sage Rudbeck, je vais te consacrer une
plante et la nommer de ton nom ; seule elle pourra suffire pour éterniser ta
mémoire et la porter chez nos arrière-neveux. Aussi longtemps que la terre
existera, et que chaque printemps la verra se couvrir de fleurs, le Rudbeckia
conservera ton nom glorieux...
J'ai choisi une plante élevée pour rappeler ton métier et les services que tu as
rendus ; élancée pour donner une idée de ta stature ; je l'ai voulue rameuse
et chargée d'un grand nombre de fleurs et de fruits pour montrer que tu as
su cultiver à la fois les sciences et les lettres. Ses fleurs radiées rendront
témoignage que tu brillas parmi les savants comme le soleil parmi les
astres ; et sa racine vivace nous apprendra que chaque années te voyais
revivre par de nouveaux ouvrages.31
30 Encyclopédie Larousse.
31 Hoquet Thierry, op. cit, p. 81.
* Id
13
À la manière d'un poète, Linné sent qu'il a un pouvoir entre les mains, celui du créateur d'une
nouvelle langue, universelle et pérenne, susceptible d'immortaliser ses amis.
Cependant, n'est-ce pas Anatole France qui déclara :
Le peuple fait bien les langues. Il les fait imagées et claires, vives et
frappantes. Si les savants les faisaient, elles seraient sourdes et lourdes. 32
Il a été l'objet de nombreuses critiques. Voici ce que La Mettrie, médecin et philosophe du XVIIIe
siècle en dit :
[…] Ces noms d'hommes connus, donnés à des plantes, sont autant de
billets qu'un auteur donne gratis au Parterre, pour applaudir une
pièce nouvelle, d'un succès conséquemment douteux33.
Il est finalement accusé de vouloir amadouer ses pairs et de se donner finalement plus d'importance
qu'il n'en a. Toujours est-il que la tradition de nommer les plantes en fonction de ses amis ou
ennemis se perpétuera. Par exemple : Bégonia a été créé pour l'intendant Michel Bégon (1638-
1710), le Gardénia a été dédié par John Ellis (1710-1776) à Alexender Garden ( 1729-1791) et fut
très vite adopté par Linné, et le Camélia pour Georges Josef Kamel (1661-1706), jésuite morave34
qui a voyagé en Asie et a écrit sur les plantes de cette région. De nombreux exemples pourraient
encore être cités.
Linné est aussi connu pour avoir parfait un système de nomination en latin qui peut être
applicable à n'importe quelle créature. Voici un exemple tiré de l'ouvrage de Thierry Hoquet,
Buffon/ Linné, éternels rivaux de la biologie ? :
14
(1) = nom du genre en majuscule
(2) = référence de la plante en italique
(3) = en italique nom raccourci de la plante : « Bufonia tenuifolia »
(4) = ces lignes rappellent les synonymes, avec les références dans Ray, Magnol ou Plukenet 35, ce qui permet de
retrouver des descriptions ou illustrations précédemment publiées.
(5) = habitat, description additionnelle36.
Ce système a été très largement utilisé par les botanistes car il possède des avantages en termes
d'usage, d'une part il soulage la mémoire et d'autre part il l'applique à tous les corps. Néanmoins, on
reproche souvent à Linné la froideur de ce style ou comme l'indique Thierry Hoquet :
Ses austères listes de plantes, ses énumérations de noms, ses ouvrages sans
illustrations, son rejet des noms vernaculaires des plantes, la relégation des
usages (médecine, jardinage, culture), l'invention d'un lexique complexe et
d'une forme aphoristique qui rend son texte hermétique et peu propice aux
grands élans du cœur ou à l'émerveillement de la nature. 37
Bien qu'il ait réformé la nomination des plantes, il n'a pas privilégié la poésie, l'émotion et s'est
éloigné d'une vision sensible du monde. En voulant se défaire des noms vulgaires et créer une
nomenclature fixe, commune à tous, Linné brise finalement le lien qu'il pouvait y avoir entre la
plante et la condition de vie. C'est en partie ce que lui reprochera Buffon. Ce système est néanmoins
toujours pratiqué.
Le travail de Linné a soulevé de nombreuses critiques. La plus féroce est celle de
Buffon qui, bien que spécialiste en zoologie, critique la méthode de classement des êtres vivants de
Linné (car Linné a appliqué cette méthode pour la botanique mais aussi la zoologie), ainsi que sa
nomenclature « normalisée ». Cette critique s'étend aussi à l'univers botanique, mais dans un
premier temps, pour comprendre le problème, considérons sur le cas de la zoologie. D'après Thierry
Hoquet38, Linné pense que la classification et la nomenclature sont liées car sous un même genre
peuvent être classées deux espèces différentes suivant un critère de ressemblance. Ainsi, Linné
classe derrière le cheval, le zèbre d'après leur similitude d'un point de vue physique. À cela Buffon
répond que ce classement ne semble pas naturel :
Ne vaut-il pas mieux faire suivre le cheval qui est solipède 39, par le chien qui
est fissipède40, et qui a coutume de le suivre en effet, que par le zèbre qui
nous est peu connu, et qui n'a peut-être d'autre rapport avec le cheval que
d'être solipède ?
15
Buffon déclare aussi que les dénominations de Linné sont trompeuses :
Ne serait-il pas plus simple, plus naturel et plus vrai de dire qu'un âne est
un âne, et un chat un chat, que de vouloir, sans savoir pourquoi, qu'un âne
soit un cheval, et un chat un loup-cervier ?
Ainsi, selon Thierry Hoquet, Buffon met en avant deux principes : « Le familier pour
la classification et le vernaculaire pour la nomenclature. » Il préfère se fier à un ordre naturel,
observable et connu de tous que de se baser sur des théories froides et complexes. En ce qui
concerne la nomenclature, Buffon n'approuve donc pas la méthode de Linné qui veut exclure les
noms locaux, cela vaut aussi pour la botanique. Il est pour l'utilisation quasi systématique des noms
utilisés dans le pays natal de la plante ou de l'animal. Même s'il reconnaît la difficulté qu'il y a à
prononcer certains noms indigènes, il trouve que Linné est allé trop loin en rejetant les noms
familiers au profit de noms que personne ne connaît. Finalement, comme Diderot ou encore
Maupertuis, ce que Buffon reproche à Linné, c'est d'avoir créé un système artificiel et fixiste 41, qui
est une position métaphysique considérée comme une erreur qui encombre la biologie. En effet, le
fixisme est une théorie selon laquelle :
les espèces vivantes sont immuables parce que dotées, dès l'origine, de tous
les mécanismes nécessaires à leur mode de vie 42
Elle est donc contraire à la théorie de l'évolution. En définitive, Buffon, dans son idée de
nomination des êtres vivants a naturalisé de nombreux noms indigènes et a commencé à fixer son
propre lexique. Il cherche donc a associer la répartition géographique à la nomenclature. Yves
Zarka, le montre dans Buffon, le naturaliste philosophe43 :
[…] Pour le Cerf, il en donne le nom dans pas moins de dix-huit langues,
allant du grec au vieux français en passant par l'indien, le danois, le turc,
l'arabe, etc...
Pour les animaux ou les plantes fraîchement découverts, plutôt que de les affubler d'un nom
européen suivit de leur lieu de vie, il préconise de garder leur nom local. Ainsi, c'est un moyen
d'étalonner la parole populaire dans n'importe quelle langue et de référer les noms locaux à une
nomenclature fixe. C'est d'ailleurs ceux-ci qui resteront dans le langage courant, face aux noms
latins, propres aux scientifiques. Toutefois, de nombreux botanistes du XIX e siècle ont continué à
indiquer les noms « vulgaires » français dans leur flore et certains ont même élaboré des lexiques de
« noms patois ».
16
Des naturalistes44 au service de la flore régionale
Par le biais de la botanique, de nombreux naturalistes ont tenté de mettre en avant la parole
populaire afin d'en faire un objet scientifique. En effet, c'est par l'intermédiaire d'un glossaire, en fin
d'ouvrage, qu'ils ont introduit un vocabulaire local. Il s'agissait de donner les traductions du nom de
nombreuses plantes en « patois », comme ils le stipulaient. Certains botanistes comme Tournon45,
qui a édité la première flore toulousaine : Flore de la région toulousaine46 en 1811, à l'origine était
un médecin. Il explique dans l'introduction de son ouvrage qu'il regrette que la médecine ne
s’intéresse pas davantage aux vertus des plantes, même celles qui sont considérées comme
appartenant à des croyances populaires. Selon lui, elles renferment de nombreuses qualités et
peuvent être à l'origine de remèdes efficaces. À la fin de sa flore, il a indiqué un index des « Noms
patois » au côté de celui des noms français et latins. À propos de ce glossaire, l’Académie des
Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse, fait paraître un texte en 1827 un texte où elle
loue l'utilité de tels outils pour tout herboriste de la région :
[…] accompagnée de deux tables fort utiles à ceux qui herborisent dans nos
environs, l'une des plantes rangées suivant l'époque de leur floraison, l'autre
du nom patois ou vulgaire sous lesquels les paysans les connaissent.47
L'occitan semble ici être au service de la reconnaissance des plantes et illustre un savoir lié au
monde agricole, donc à la culture de la terre. De plus, le sous-titre de l'ouvrage illustre le parti pris
de Tournon :
Avec l'indication de leur lieu natal, l'époque de leur floraison ; des
observations sur leurs propriétés en médecine, en économie rurale ; et les
tables de leurs noms français, latins et patois.
Cette flore est plutôt à l'usage de l'enseignement et tente de montrer la diversité des plantes de la
région, que ce soit pour la médecine, ou pour la culture des sols. Finalement, à travers cette étude,
Tournon exprime la volonté de mettre en valeur la richesse du paysage locale. De même, Jean-
Baptiste Noulet, comme nous l'avons vu un peu plus haut était un passionné et un protecteur de la
17
langue occitane. C'est à la fin de son ouvrage La flore du bassin sous-pyrénéen48, qui décrit les
différentes espèces et les classes suivant l'ordre adopté par le Prodrome de (De) Candolle 49,
qu'apparaît une table des « Noms gascons50 ». Il s'agira ici d'une simple traduction avec un seul
terme à chaque fois. Contrairement au travail de Tournon, Noulet a plus orienté son étude sur la
morphologie des plantes et sur leurs lieux d'habitations que sur leurs propriétés. Il précise aussi la
difficulté qu'il a eu à trouver certaines espèces, tant on aspire à les supprimer :
Il faut laborieusement rechercher les autres soit parmi les cultures où ils
font souvent le désespoir de l'agriculteur, soit dans les bois et les terres
incultes ou leur multiplication est tolérée, puisqu'elle n'y est point
importunée.51
Il faut savoir que Noulet a récolté lui-même chaque plante dont il parle, ce qui lui a valu un travail
de plusieurs années. Il stipule aussi, qu'il a opéré une sélection des différentes espèces présentes,
celles qu'il décrit comme « nouvellement adoptées par nos floristes ». Il préconise d'ailleurs, pour
l'avancée de la science, de laisser ces plantes importées de côté. Finalement c'est un peu de
l'écologie avant l'heure. De plus, il a voulu appliquer la synonymie, tout en se focalisant sur des
ouvrages qui traitent de la flore de la France et plus particulièrement celle de « notre pays ». Il s'agit
en fait pour chaque plante de donner un ou plusieurs synonymes en latin afin que n'importe quel
botaniste puisse repérer rapidement de quelle espèce il est question. Toujours est-il que, à travers cet
ouvrage, Noulet montre son attachement pour son pays. D'ailleurs c'est Émile Cartailhac qui dira,
dans un texte consacré à sa carrière aussi bien scientifique que littéraire, qu'en matière de botanique
il est surtout l'homme d'une région.
Ces différents glossaires intègrent finalement l'occitan à la matière scientifique non plus
comme un langage populaire mais comme une langue à part entière. Cette idée se comprend plus
explicitement chez Picot de Lapeyrouse (1744-1818), à qui Noulet succède en tant que directeur du
muséum. Ainsi, dans son Histoire abrégé des plantes des Pyrénées et itinéraires des botanistes
dans ces montagnes, il montre une véritable passion pour la flore si particulière des Pyrénées. Cet
ouvrage met en avant une richesse botanique peu connue de la région pyrénéenne. Il décrit des
espèces proches ou similaires de certaines qui peuvent pousser en Laponie, en Sibérie ou encore en
Espagne, au Portugal et même en Afrique. Dans son avertissement, après la description de ce
paysage plutôt pittoresque, Picot de Lapeyrouse précise qu'il ne se résout pas à donner les
traductions « patoises » des différentes dénominations. Il explique que pour lui il s'agit « d'une foule
18
de noms bizarres, mal sonnants » et souligne l'inutilité d'un tel travail vis-à-vis de son lectorat.
Cependant, toute une page est consacrée à ce commentaire, dans laquelle il ne peut s'empêcher de
noter quelques formes occitanes et d'en donner la traduction. À cette époque, l'importance de cet
idiome apparaît donc, ainsi que la nécessité de justifier son absence. Malgré ces réticences, les
naturalistes de ce temps ont conscience que la dénomination locale des plantes constitue finalement
une richesse patrimoniale, et peut être est-ce aussi un souvenir nostalgique car bien souvent, il s'agit
de la langue de leur enfance. Toutefois, il y a cette volonté de faire de la « parole populaire » un
objet de science, même si ces hommes se confrontent souvent à la difficulté de l'écriture lorsqu'il
s'agit de retranscrire une parole orale sans une orthographe bien définie.
Néanmoins, cette difficulté à rendre la « parole populaire » légitime se ressent dans
n'importe quelle langue. Les naturalistes se retrouvent, et parfois contre leur volonté, face à une
nomenclature imposée et des règles qui fixent le langage à adopter face aux sciences. Cette règle
étant plus rigoureuse encore en botanique, puisque le latin semble être la seule langue acceptée et
reconnue par tout scientifique. Peu de place est laissée à la langue populaire, ce qui prive une partie
de la population de telles lectures. Bourdieu explique dans les premières pages de son texte « Vous
avez dit « populaire » ? » la notion justement de langage populaire et la vision que la société peut
avoir de telles paroles :
Il en est ainsi de la notion de « langage populaire » qui, à la façon de toutes
les locutions de la même famille (« culture populaire », « art populaire »,
« religion populaire », etc.) n'est définie que relationnellement, comme
l'ensemble de ce qui est exclu de la langue légitime, entre autres choses par
l'action durable d'inculcation et d'imposition assortie de sanction qu'exerce
le système scolaire.52
De plus, il précise en ce qui concerne les dictionnaires, qui pour lui sont des illustrations de la
diversité et de la richesse d'une langue, que si certains mots populaires y sont représentés, ils seront
aussitôt accompagnés d'une remarque négative :
[…] fam. familier, « c'est-à-dire courant dans la langue parlée ordinaire et
dans la langue écrite un peu libre », pop., populaire, « c'est-à-dire courant
dans les milieux populaires des villes mais réprouvés ou évités par
l'ensemble de la bourgeoisie cultivée »53.
Il s'avère toujours d'après Bourdieu que les dialectes s'inscrivent dans cette catégorie des langages
52 BOURDIEU. P, « Vous avez dit « populaire » ? », in : Actes de la recherche en sciences sociales. Vol 46, mars 1983.
L'usage de la parole, p. 98
19
populaires, donc impropre à l'érudition et aux matières dites nobles :
[…] la diversité extrême des parlers […] sont globalement rejetés dans la
classe négative du « langage populaire ».
Sachant qu'il est difficile de considérer l'occitan comme une langue de la vie courante, comment
l'imposer dans un univers scientifique. De nombreuses volontés se manifestent, d'abord par
l'intermédiaire d'index en fin d'ouvrage et, petit à petit, la langue vient occuper le cœur du sujet. Des
flore occitanes seront d'ailleurs éditées dans le courant du XXe siècle et aujourd'hui encore.
Finalement, ce sera avec les Frères Grimm qu'on accordera pour la première fois une
importance toute particulière à la « parole populaire ». En effet, c'est à travers les contes qu'ils ont
recueillis, soit-disant de conteuses du peuple, mais qui selon plusieurs critiques seraient en fait
plutôt des bourgeoises, qu'ils ont voulu mettre à l'honneur le « langage du peuple ». Natacha
Rimasson-Fertin dans son article « Les frères Grimm ont trouvé le ton juste » paru dans Le Monde
des Livres en 2009, estime :
[…] même quand ils réécrivaient les textes: dans leur choix de versions par
exemple, ils étaient guidés par la recherche du conte originel.
Ainsi, les Frères Grimm montrent cette volonté de mettre en avant un savoir populaire et surtout de
le fixer dans la littérature afin qu'il ne se perde pas. Il y a là presque l'expression d'un devoir de
sauvegarde, de transmission, qui se remarque aussi chez nos naturalistes. Philippe Lançon, en
parlant de la démarche des Frères Grimm, précise dans un article du journal Libération :
Ils perçoivent d'ailleurs leur travail comme un acte militant et scientifique :
« Contribuer à l'histoire de la poésie populaire allemande » et « rendre un
service à l'histoire de la poésie et de la mythologie » de ce qui n'est pas
encore un pays. La langue allemande n'est pas comme la française, pensée
et unifiée. L’Allemagne souffre de Napoléon et d'un défaut de conscience
d'elle-même. La collecte des contes contribue à cette conscience : ce sont les
histoires du peuple qui peuvent la lui donner. 54
De la même manière, Noulet ou Tournon, à leur époque respective, ont permis à certains locuteurs
occitans qui lisaient leurs ouvrages, de prendre conscience de leur histoire, de leur langue et
finalement, de leur identité. Dans la même veine, le docteur Gaubert a décidé de pousser
l'expérience encore plus loin en consacrant son étude de la botanique à la recherche des différents
noms occitans des plantes, qu'il répertoriera ensuite sur des fiches. En liant ainsi la matière
scientifique à la matière orale, il donne un support à la langue, ce qui la rend d'autant plus légitime.
54 Philippe Lançon, « Grimm exemplaires », Libération, 2 juillet 2009
20
Le Dr Gaubert et son étude de la flore occitane
Inspiré en partie par le travail de Noulet, le Docteur Georges Gaubert 55 (1894-1992) pousse
un peu plus loin l'utilisation d'une langue vernaculaire dans les sciences d'histoire naturelle. Il
s’intéresse de près à la nomination des plantes dans différents dialectes occitans. Ces parlers propres
à nos régions engendrent un regard singulier sur le monde. Langues du terroir, c'est-à-dire de la
terre, elles sont aussi très intuitives. Chaque objet, être, animal ou végétal, qu'elles désignes prend
souvent sa source dans une caractéristique spécifique du sujet. La théorie de la signature est un
exemple de cette façon de voir et de comprendre les plantes. En effet, il s'agit d'une idée ancienne
qui voulait que toute plante qui possède des similitudes avec une partie du corps humain serve à la
soigner56. Max Rouquette y fait référence dans la nouvelle Lo Trescalan57, lorsque le vieux moine
initie son cadet aux savoirs des plantes médicinales. Ainsi, que ce soit physique, pratique ou
sensitif, le nom de la plante en occitan nous en apprend beaucoup sur l'espèce elle-même. Par
exemple la prêle des champs, qui est une plante vivace, aux feuilles rudes et fines, porte le nom
d'escuerta, c'est-à-dire lavette ou outil pour récurer la vaisselle. En effet, grâce à sa forme elle était
utilisée pour nettoyer, pour gratter les saletés incrustées. Ainsi, elle n'est plus nommée pour elle-
même, mais par rapport à sa fonction. De plus, il arrive que deux plantes portent le même nom en
occitan car elles possèdent la même particularité, ou par confusion. Toutefois, la précision de la
nomination peut aller jusqu'à différencier certaines espèces, comme la blette (Beta, de la famille des
Chénopodiacées). Dans le dictionnaire d'Alibert, elle se retrouve sous le nom de reparc, mais
seulement s'il s'agit d'une blette poirée à grosse côtes, sinon elle peut être bléda58 en gascon ou blet59
en provençale.
C'est un tout autre regard qui est posé sur la flore et qui est significatif d'une condition de
vie. D'ailleurs, Gaubert déclare p 35 de son article Noms de vieilles flores du midi de la France :
21
À travers ce vocabulaire, c'est aussi la vie paysanne qui s'affirme, et le besoin de trouver dans la
nature, dans les plantes nourriture et soin, entre autres. De ce fait, un rapport qu'on qualifierait peut-
être aujourd'hui d'écologique existait entre l'Homme et la terre. Toutefois, Max Rouquette dans son
poème Secret de l’èrba, Verd Paradís I, met en lumière un lien bien plus fort entre l'être humain et
la végétation, celui de la vie.
L’èrba èra nòstra companha. Viviam sempre mesclats a
sa frescor, amics de la vida umila que rescond. Las
matas fernissentas, las arrapàvem a plen ponhat tot
rebalant sus l’aira de davant mon ostal. N’aviam las
mans verdas e nòstre pas n’aviá l’amar perfum. (…)
Èrem los mèstres de l’èrba...
E caçant los grilhs rebalàvem entre las mauvas
alongadas qu’enauçavan tot l’estiu sas flors umilas jos
lo cèl. De còps, las grands nos las fasián acampar, las
doças mauvas, e de saber aquel poder contra lo mal, nos
bailava l’idèa que fasiam quicòm de grand. Conoissi
pas de flor que siá tant umila coma la mauva. Entre
las èrbas, e coma elas, mena una vida de patz, sens
levar d’espinhas contra degun.
22
Max Rouquette fait ici écho au travail de Gaubert en montrant le lien, presque intime, qui peut
exister entre l'Homme et la végétation. L'image de l'herbe comme un être vivant saute alors aux
yeux : v1 « L’èrba èra nòstra companha», et v2 et 3 : « amics de la vida umila que rescond». Elle
ne fait plus seulement partie du paysage, elle en est l'essence. De plus, v 10 « e de saber aquel
poder », à travers le substantif masculin « poder », l'auteur donne une fonction magique à la plante,
une force qui dépasse les capacités humaines et pour laquelle on ne peut ressentir que de l'humilité.
Ainsi, c'est une autre manière de voir le monde et d'appréhender l'univers environnant qui se
manifeste. L’être humain n'est plus au centre, et malgré ce qu'il croit, est loin de pouvoir tout
contrôler.
Dans la même veine, Amada Lacomba, professeur de biologie à Villeneuve sur Lot dans les
années 70-80, a fait tout un travail sur la flore de sa région. Elle publie une première version de
Flora occitana61 en 1978, puis une seconde en 1989. Comme Gaubert, elle estime que le plus grand
savoir vient des paysans car ils ont une expérience sensible de la nature. Ils composent avec ses
caprices, ses exigences, au point qu'ils la connaissent et la reconnaissent. Dans son avertissement
p.5, Amada déclare :
Ne'n vira de las flòras coma dels caractaris : cadun a la sia !
Il en va des fleurs comme des caractères : chacun a le sien !
Lo sabent compta los petals. Lo tisanaire pensa a las dolors e a las
potingas. Lo paisan es al mièg de las plantas las reconeis, pensa a sas
béstias e a sas recòltas.
Le savant compte les pétales, l'herboriste pense aux douleurs et aux
potions. Le paysan est au milieu des plantes, il les reconnaît, il pense à
ses bêtes et à ses récoltes.
Se demandatz a un paisan lo nom d'una planta vos respond sens o
saber en far d'ecologia : « Aquela, la trobaràs dins lo clòt del..., aquela
la trobaràs sul ròc de... aquela, dins la pèça de milh... »
Si vous demandez à un paysan le nom d'une plante il répond sans le
savoir en faisant de l'écologie : « Celle-là, tu la trouveras dans le « clòt
del »..., celle-là, tu la trouveras « sul ròc de... », celle-là dans le champ
de maïs... »
Cal pas esperar d'el la mièg-dotzena de « Rubus », vos parla de
romècs.
Il ne faut pas attendre de lui la demi-douzaine de « Rubus », il vous
parle de ronces...
61 Amada Lacomba, Flora occitana, deux exemplaires : 1978 et réédition 1989, Escola Occitana d'Estiu
23
Le paysan n'a certes pas la science du botaniste car la plupart du temps il ne différencie pas les
espèces. Néanmoins, il sait reconnaître quelle plante est bonne pour son bétail, quelle est nocive et
celle qui le soignera s'il se coupe, etc. Tout cela dépend d'une expérience pratique, de l'observation,
mais aussi d'un exercice sensitif. Beaucoup goûtent la terre pour savoir de quoi elle est faite pour en
déduire ce qui poussera le mieux.
Amada Lacomba explique que les différents termes collectés dans son ouvrage viennent des
paysans de son village natal, Savignac (47) et de quelques noms utilisés dans l'agenais. En ce qui
concerne les termes plus généraux, ils ont été trouvés dans le dictionnaire d'Alibert ou chez Taupiac.
Elle présente en tout 220 plantes accompagnées de croquis et de descriptions. Elle ajoute à ce
lexique plusieurs dissections de différents végétaux, suivies d'une légende. Ainsi, ce n'est pas parce
que l'ouvrage est en occitan que le contenu a moins de valeur scientifique.
Par exemple, voici les pages 6 et 7 de son ouvrage :
24
Et les pages 40 et 41:
De la même façon, Gaubert explique dans son article, Noms de plantes dans de vielles flores du
midi de la France, que son travail de compilation n'est pas exhaustif et qu'il souhaite que cela initie
d'autres recherches. Amada affirme :
Aquesta flòra, localisada, pòt servi de basi a totas las autras...
Comparatz !...Completatz !...
Cette flore, locale, peut servir de base à toutes les autres...
Comparez !... Complétez !...
Ainsi, la flore occitane est une matière dense et surprenante car suivant les lieux (la
composition des terres, l'humidité, l'ensoleillement, etc.), différentes sortes de plantes poussent. De
plus, elles ne sont pas toujours utilisées de la même manière, ni pour les mêmes raisons. Tout cela
suggère donc différentes nominations qui illustrent de nombreuses pratiques et façons de vivre.
Ainsi, Gaubert ne s’intéresse pas seulement à la traduction pure et simple des noms de plantes, mais
25
aussi à tout ce qui les entoure et le constitue.
Par ailleurs, il faut savoir que Gaubert, membre depuis 1963 de la Société d'Histoire
Naturelle de Toulouse, en a été le président 62 de 1969 à 1970. C'est dans ce cadre qu'il publiera son
article en 1978. Il est dans la lignée des érudits du XIX e siècle, s’illustrant dans plusieurs domaines :
littérature, botanique, médecine... D'autre part, les sociétés savantes de cette époque gardaient un
certain charisme hérité du siècle précédent. Elles sont effectivement le regroupement d'une élite
culturelle, très diplômée et reconnue. Même s'il est impossible, selon J.-P. Chaline, d'estimer la
productivité et les effets d'incitations de ces sociétés, les prix distribués, la création d'institutions, la
mise en valeur de sites et monuments attestent de leur ouvrage. Il est important de noter que les
sociétés régionales avaient pour ambition d'être le reflet d'une vie culturelle locale et indépendante
du modèle parisien. Il s'agit, selon l'auteur de « microcosmes culturels jaloux de leur autonomie63 ».
Au-delà de ses passions pour la langue occitane et la botanique, le travail du Dr Gaubert a
certainement été motivé par ce besoin de reconnaissance de l'érudition provinciale. En mettant une
langue régionale au cœur de ses recherches, il invoque la particularité et la richesse de la culture
occitane face à l'uniformisation parisienne.
Pour mettre en forme son travail, Georges Gaubert effectue donc une classification de la
flore de la région. En s'inspirant d'auteurs littéraires ou botanistes, il traduit le nom de chaque plante
qu'il trouve dans différents dialectes locaux, représentant ainsi la majeure partie de l’Occitanie. Il
constitue une centaine de fiches64 à travers lesquelles il va essayer de comprendre chaque
nomination. Toute fiche est constituée de la manière suivante :
26
Famille
de plante
Genre en
Genre en latin
français
Numéro du
département
Occurrences où le nom
occitanes de la plante
apparaît
sous cette
forme
occitane.
Abréviation
du nom des
auteurs
invoqués
par
Gaubert,
chez qui il a
trouvé cette
forme
occitane.*
Parfois
annotations
au crayon à
papier.
Espèce en
latin
Les 267 fiches, dont 117 familles, écrites par G. Gaubert sont donc un moyen d'ordonner sa
pensée et de comprendre le fonctionnement de la langue occitane. Beaucoup d'annotations
apparaissent, plus ou moins lisibles, qui viennent interroger certaines occurrences, rectifient des
erreurs de classement, d'orthographe, ce qui suppose que ce travail n'était pas destiné au public.
Certaines fiches sont difficiles à déchiffrer car les remarques se superposent et l'écriture devient de
27
plus en plus brouillonne. Il s'agit bien d'un travail préalable de recherche, peut-être dans le but de
créer un dictionnaire, comme le suggèrent les 8 fiches annexes, qui semblent sélectionner les
informations les plus intéressantes.
Il m'a toutefois été difficile de comprendre la logique de ces dernières fiches : pourquoi sur une
même ligne apparaissent deux noms de famille ? Que signifie le code couleur ? À quoi correspond
chaque « colonne » ? Finalement, c'est avec l'aide de Jean Sanegre 65, botaniste audois et locuteur
occitan, que j'ai pu répondre à certaines de ces questions.
À travers la première de ce groupe de fiches, nous avons essayé de restituer au mieux la logique de
Gaubert :
En occitan le terme lin apparaît pour désigner différentes plantes, toutes de la famille de
Caryophyllacées, alors que lin appartient à le famille des Linacées. Deux noms identiques peuvent
désigner deux plantes différentes.
65 Voir Fiche annexe 7 : Parcours et histoire de Jean Sanègre d'après une interview téléphonique et quelques échanges
de mail.
28
Légende :
Deux même noms occitans Numéro du département d'où
utilisés pour la vient le noms occitan +
dénomination de deux abréviation d'auteurs ici Al
plantes différentes. (Alibert) et Far (Farenc)
Nous nous sommes rendu compte que Gaubert partait d'une occurrence occitane comme par
exemple le Lin salvatge. Il en donne ensuite la traduction française, c'est-à-dire Alsine printanière et
d'où vient cette information : (Al) qui est l'abréviation d'Alibert, donc Gaubert à trouvé cette
traduction dans son dictionnaire. Toujours sur la même ligne le nom de famille Caryophyllacées
apparaît, qui comprend en fait l'Asline printanière. Ensuite, Lin réapparaît avec sa traduction :
« Lin » qui fait partie de la famille des Linéacées. Finalement, sous un même terme occitan et
français, existent deux plantes totalement distinctes. En ce qui concerne les couleurs jaune et bleu
qui soulignent les différentes familles, nous n'avons pas encore trouvé d'explication valable. Ce
regroupement de fiches soulève aussi plusieurs questions en ce qui concerne sa fonction. Quel est le
but d'un tel classement ? Est-ce une méthode pour mieux comprendre le découpage de la langue ?
Est-ce le rassemblement de tous les noms les noms occitans « trompeurs », qui, malgré les
apparences, ne correspondent pas au français ? Comme certaines de ses abréviations, ces fiches
semblent avoir une logique propre à Gaubert qu'il est donc difficile de comprendre, pour quelqu'un
d'extérieur.
Néanmoins, ce travail reste organisé et suit les différentes règles propres à la botanique. Le
classement s'effectue suivant un ordre systématique. Les fiches sont rangées en fonction du nom des
familles de plante, de A à Z, que ce soit pour les fiches principales ou pour les fiches annexes. Pour
la deuxième catégorie, il faut se référer aux noms de familles de la colonne centrale. Il arrive
cependant, que certains noms correspondent à d’anciennes familles, comme la première catégorie,
les Abiétacées, qui sont aujourd'hui l’équivalent des Pinacées. En effet, la botanique étant une
science, elle connaît sans cesse des remises en question, des découvertes, qui font que la
nomenclature change. À l'intérieur des familles il n'y a pas d'organisation particulière. Dans la suite
logique, les différents genres apparaissent parfois suivit des espèces. Gaubert a bien obéi à la
déontologie qui veut que le nom du genre soit écrit en latin avec une majuscule, suivi de celui de
l'espèce avec une minuscule. Pour ce faire, le chercheur a aussi adopté un code couleur :
Rouge = Nom de la famille
29
Vert = Nom latin du genre et de l'espèce (sur les fiches principales)
Bleu = Nom français du genre (il n'apparaît pas toujours), numéro des départements concernés par
les noms occitans, abréviations des noms des auteurs, quelques annotations
Noir = Noms occitans (sur les fiches principales)
Bien qu'il ait choisi d'utiliser un système de classification particulier, parfois, il le
détourne. Il arrive donc que certaines plantes se retrouvent sur une fiche, non pas en raison de leur
nom de famille, mais parce qu'elles ont une connexion particulière avec une autre plante. Par
exemple, le Cytinus de la famille des Raffinacées, apparaît sur la fiche des Cistacées car il est un
parasite du Ciste, arbrisseau évoluant dans les pourtours du bassin méditerranéen. Dans certains cas,
Gaubert semble préférer mettre en avant les liens qui peuvent exister entre les plantes plutôt que de
suivre la méthode purement scientifique. Là encore, il favorise l'aspect vivant des plantes et les
vertus qu'elles possèdent.
Différents dialectes apparaissent dans l'étude de Gaubert mais aussi différentes graphies. Il
faut savoir que l'occitan est avant tout une langue orale et que pendant très longtemps aucune règle,
à proprement parler, ne régissait son écriture. Au Moyen Âge, les écrits en occitan prenaient
cependant une certaine distance avec la langue orale considérée comme trop populaire. Les
conventions d'écritures suivaient des normes régionales, susceptibles d'être comprises et de circuler
dans l'espace occitan. Au XVIe siècle ces différentes graphies se sont perdues pour laisser place à
une écriture phonétique, qui s'appuient sur le français. Il faudra pourtant attendre le XIX e siècle
pour qu'un nouveau système apparaisse et soit largement reconnu dans la sphère occitane. C'est
avec le Félibrige qu'une nouvelle orthographe est élaborée par Joseph Roumanille et qu'on appelle;e
plus souvent, graphie mistralienne, car elle a pris son nom du célèbre écrivain Frédéric Mistral. Elle
est donc antérieure à la graphie classique et avec le succès du félibrige elle s'est étendu dans
l'ensemble de l'Occitanie. Aujourd'hui, elle reste d'usage en Provence et dans l'espace vivaro-alpin.
À ses côtés, la graphie classique, elle, vient de la volonté d'Antonin Perbosc et Prosper Estieu suivis
par d'autres auteurs, de retrouver un système autonome d'écriture, basé sur la graphie de l'occitan
médiéval. Plusieurs règles ont suivi dans la seconde moitié du XIXe siècle, et ce sera la publication
de Gramatica occitana de Louis Alibert, en 1935 qui représentera la mise en circulation d'une
véritable norme classique, qui connaît aujourd'hui un usage majoritaire. Du Moyen-Âge à nos jours,
différentes graphies se sont donc succédé et encore aujourd'hui, malgré la quasi omniprésence de
30
l'écriture classique, beaucoup de débats sont encore ouverts. Malgré tout, Gaubert a utilisé les
différentes formes qui apparaissaient dans les ouvrages qu'il trouvait, elles dépendaient donc des
siècles d'écritures et de la région d'origine de l'auteur. Il indique d'ailleurs à la première page de son
article66 paru dans le bulletin de la Société d'Histoire Naturelle de Toulouse, qui reprend en quelque
sorte ce travail de recherche :
L'orthographe adoptée est celle du « Dictionnaire Occitan-français d'Alibert »,
édité par l'Institut d’Études Occitanes, et non l'orthographe, en général
phonétique, des auteurs des Flores anciennes ; certaines citations toutefois
seront reproduites en conformité avec le texte de l'ouvrage dont elles sont
extraites.
Il en est de même pour ses fiches qui jonglent entre la graphie normalisée, mistralienne et la
phonétique française. Sur certaines d'entre elles la déclinaison de la langue est néanmoins
remarquable. Fiche 1 par exemple, dans la famille des Abiétacées, le Pinus sp. se traduit Pin en
gascon ou en provençal et Pi en languedocien, de même le Pinus pinea peut être soit Pigné en
languedocien ou Piniè en gascon. Beaucoup d'erba, d'erbo ou d'herbo apparaissent aussi.
L'utilisation de ces différentes graphies montre que l'écriture peut différer de quelques lettres, alors
qu'à l'oreille, les termes semblent identiques.
Par ailleurs il est possible, sans que Gaubert ait fait de véritables enquêtes de terrains, qu'il
ait été inspiré par des collègues ou amis qui pratiquaient la langue. En effet, la lettre retrouvée au
dos de la fiche 2667, montre que le docteur entretenait une correspondance et cherchait des conseils,
des avis auprès d'autres personnes. Il se peut donc que certaines écritures soient totalement
intuitives et dépendent seulement des sonorités et de l'idée que le locuteur se faisait du mot.
Analyses et commentaires
31
(Hypericum de la famille des Hypericacées), tiré de la référence « Mireio p. 29269 ». En effet, aux
vers 19 et 20 du chant VII de Mireille de Frédéric Mistral, on peut lire :
Au recalièu ; e, li man pleno
de trescalan e de verbeno […]
Mais il ne se contente pas d'examiner les œuvres littéraires, il pioche aussi dans les
dictionnaires bilingues, comme indiqué plus haut, et fera d'ailleurs de nombreuses références à
Mistral et Alibert. Il s'inspire aussi de revues savantes, comme la Revue des Pyrénées ou la Revue
de Comminges. À ce propos, sur la fiche du genre 16 de la famille des Graminées, il renvoie à la
page 283 de la Revue de Comminges, 3ème trimestre, n° 74, où il relève le terme de Carrou70 pour
signifier le blé.
En plus de ces fiches botaniques, il a inséré quelques prises de notes qui indiquent la
réflexion qu'il a pu mener au sujet de certains termes. Il y décompose les mots pour arriver à trouver
une explication linguistique à certaines dénominations. La note au dos de la fiche 18 de la famille
des Graminées analyse deux termes Caristia qu'il traduit « Ivraie » enivrante et Margal, « la Ray
grass ». Il interroge de nombreux auteurs, recoupe les informations, afin décortiquer au plus près les
occurrences.71 De plus, il n’hésite pas à faire appel à des connaissances, très certainement
occitanistes, pour l'aider à analyser les formes. Au dos de la fiche 26, deux feuillets rapportent les
conclusions qu'il a pu tirer sur certaines étymologies, ainsi que le brouillon d'une lettre, sans
adresse, mais qui indique qu'il s'enquérait d'autres avis, comme nous avons pu le voir plus haut 72.
Une dernière note73 apparaît, glissée entre deux fiches de la famille des Oléacées, qui suggère une
traduction béarnaise du Troène. Cette indication montre que Gaubert s’intéresse aussi aux légendes
locales, peut-être plus superstitieuses.
Petite légende de certaines abréviations qui apparaissent dans les fiches supplémentaires :
Al = Alibert
Ax Dubou = Axel Duboul
Boiss = Boissier des Sauvages
DJT ou Douj = Doujat
J. Séguy = Jean Séguy
Lagr Foss = Lagrèze-Fossat
32
En plus de ce travail de recherche, j'ai commencé la numérisation 74 des premiers groupes de
fiches. Il s'agissait de retranscrire au plus près les informations présentes et d'arriver à déchiffrer au
mieux certaines occurrences. Finalement, ce travail m'a permis d'examiner de plus près les
documents et de me rendre compte de la précision de nombreux termes. J'ai aussi remarqué que le
chercheur était revenu plus tard sur son travail : il a rajouté des mots, il en a corrigé d'autres, cela
s'observe surtout grâce à la netteté du trait de son crayon et l'intensité de l'encre. Plus le temps passe
et plus son écriture semble tremblante.
Jean Sanegre a effectué un travail un peu similaire en ce qui concerne un document de
Guillaume Laffage75, botaniste du XIXe siècle, intitulé « Nom des plantes en patois et français, en
usage dans les environs de Carcassonne ». C'est dans le cadre de la SESA (Société Scientifique de
l'Aude), société savante qui a pour but de promouvoir le département de l'Aude à travers ses
richesses dans de nombreuses matières scientifiques, comme la botanique, qu'il a pu effectuer ce
travail. Il a retranscrit l'intégralité du manuscrit qui comprend 13 pages et s'est posé un bon nombre
de questions en ce qui concerne la fidélité qu'il doit accorder au texte. En effet, nous nous sommes
tous les deux retrouvé dans la situation ou certains mots étaient indéchiffrables ou peu
compréhensibles. Alors doit-on écrire ce que l'on
comprend ou ne pas se risquer à faire d'erreurs ? De
même, en ce qui concerne les fautes d'orthographes
qui correspondent souvent à une écriture plus
ancienne de certains noms, notamment de lieux, doit-
on les corriger. Faut-il rester fidèle à la présentation,
bien que parfois cela paraisse compliqué à
retranscrire ? À tout cela, Jean Sanegre répond dans
un texte, Remarcas, où il explique son parti pris et
éclaire de nombreuses points. Il est donc difficile de
se mettre à la place de ces auteurs et de comprendre
parfaitement leur méthode de travail et de réflexion
seulement à travers quelques écrits. Les fiches de
Gaubert semblent en plus être principalement un outil
de travail et de réflexion, donc un véritable brouillon Première page de la liste de Guillaume Laffague
concernant le Nom des plantes en patois et français,
préparatoire. en usage dans les environs de Carcassonne.
Ouvrage entier disponible aussi sur le site internet de la
SESA.
33
Parcours linguistique
34
Légende : Index des départements qui apparaissent
sur la carte :
Langue d'Oïl
Gironde (33)
Lot-et-Garonne (47)
Gers (32)
Tarn-et-Garonne (82)
Cantal (15)
Délimitation entre le pays
d'Oïl et l'Occitanie
Tarn (81)
Ariège (09)
Délimitation entre les dialectes
Aude (11)
Hérault (34)
Aranais
Gard (30)
35
Les informations cartographiées sont tirées des fiches de Georges Gaubert, d'après le relevé des
différents numéros de départements correspondants aux occurrences occitanes 76. La ligne rouge
délimite la langue d'oïl et la langue d'òc, il faut néanmoins noter qu'elle est très approximative et
s’appuie beaucoup sur les contours des départements. Une carte de l’Occitanie mise en annexe
permettra de mieux appréhender les contours de la région77. Le but de cette carte est de représenter
au mieux la démarche du Dr Gaubert et de pouvoir clairement repérer quels dialectes il a étudié.
Elle montre, toutefois, que son travail n'est pas exhaustif et n’expose qu'une partie de la diversité
occitane. Les dialectes les plus présents dans ces travaux sont le provençal et le languedocien qui
apparaissent quasiment pour chaque plante, à la différence du limousin ou du vivaro-alpin qui ne
sont jamais mentionnés. Le corse est aussi évoqué, mais souvent pour établir une comparaison avec
certains termes occitans. Le camaïeu de bleu, du plus clair au plus foncé, illustre les parlers sur
lesquels Gaubert a travaillé et souligne la partie de l'Occitanie a laquelle il s'est la plus attaché. Il
s'agit donc principalement du sud de l'Occitanie, d'ouest en est.
Le languedocien, le gascon et le provençal semblent être au cœur de l'étude de Gaubert, ce
qui suggère qu'il est surtout un homme de lettre et non de terrain. Ces trois dialectes se trouvant au
cœur d'une littérature riche et répandue, de nombreuses références à la flore locale apparaissent
dans ces textes, sans oublier les « Tables des noms patois », texte souvent présent à la fin des Flores
de cette époque. De plus, certains auteurs comme Frédéric Mistral 78 pour le provençal, qu'il cite à de
multiples reprises, ou Louis Alibert pour le languedocien, ont édité des dictionnaires bilingues où
les noms des plantes sont présents sous différentes formes. Ainsi, G. Gaubert a surtout fait un travail
de recherche littéraire, à la différence de Dominique-Jérôme Tournon dont il s'inspire. Ce médecin
de campagne et auteur de la Flore de la région toulousaine, a parcouru les villages de la région pour
collecter différentes traductions occitanes des plantes et créer un « Index des noms patois » à la fin
de son livre. Pour moi, le travail du Dr Gaubert était surtout de partir de toutes ces sources écrites
qui répondent déjà à un certain collectage des occurrences et de les commenter. Il ne s'agit pas d'un
simple recensement mais d'un véritable questionnement sur la nomination des plantes. Pourquoi tel
nom a été donné à telle plante ? Le but étant avant tout de comprendre l'histoire de sa langue, pour
peut-être après créer son propre dictionnaire de la flore occitane.
36
Répercussions et prolongements
L'article paru dans le Bulletin de la Société d'Histoire Naturelle de Toulouse mettra donc en
mots ce travail79. Le but étant de montrer la diversité et la richesse de l'occitan, d'éclairer un
vocabulaire trop souvent considéré comme confus et sans intérêt. Il signale, dans son introduction,
que beaucoup de flore du XIX e siècle proposaient encore une table des noms « patois ». Il précise
que ce terme, dans l'esprit des auteurs, n'est pas défavorable contrairement à aujourd'hui, mais
correspond au fait que dans les campagnes, la population ne connaissait le nom des plantes que dans
leur langue courante, l'occitan80. Cet article long de 11 pages ne contient pas toutes les informations
qu'il a pu collecter, néanmoins il regroupe les plantes en plusieurs catégories plutôt représentatives.
D'abord il y a une classe qui célèbre les saints ou les fêtes religieuses. Ensuite il a regroupé les
plantes qui doivent leur nom à une partie particulière de leur physionomie (par exemple avec de
larges feuilles), à la forme de son fruit ou en comparaison avec le corps humain. Puis l'odorat entre
en jeu, certains noms sont donnés en fonction de l'odeur plus ou moins agréable de la plante. Une
catégorie est spécialement consacrée aux plantes redoutées ou dites dangereuses. Il y a aussi les
noms donnés en faveur de belles plantes ou qui sont au cœur de légendes amoureuses, comme le
myosotis que nous verrons en détail plus tard. Certains noms sont seulement drôles et suggèrent une
certaine curiosité. Ensuite, il y a une catégorie propre à l'utilisation des plantes, soit par les enfants,
(c'est le côté ludique qui est mis en avant), soit par leurs propriétés pratiques, médicales, soignantes.
Certaines sont, alors, au cœur de vieilles croyances, que beaucoup trouvent aujourd'hui désuètes
mais qui restent ancrées dans leur nomination. Gaubert met aussi en avant la déformation de
certains termes latins qui, passés dans le langage populaire, ont une toute autre sonorité. Selon lui,
ce sont les bergers qui auraient répandu ces noms qu'ils auraient entendu des botanistes mais qu'ils
auraient mal compris. Enfin, certains termes restent pour lui inexplicables, malgré de nombreuses
recherches, il ne les comprend toujours pas. Le travail qu'il a fourni pour cet article est conséquent,
mais peu représentatif de l'énergie qu'il a mis en œuvre pour créer ces fiches. C'est de façon très
modeste qu'il termine :
Je souhaite que mon modeste travail de compilation de Flores méridionales
incite à des recherches pluridisciplinaires dans lesquelles comme « la treille
où le pampre à la rose s'allie » (El desdichado), botanique et linguistique
devront se donner un mutuel et constant et très efficace appui81.
37
Je ne peux réellement donner une date aux fiches qu'il a écrites, pour savoir si l'article est paru après
qu'il les ait terminés ou pendant leur création. Toujours est-il que cet article semble être
l'aboutissement de ses recherches, alors qu'il n'y dévoile qu'une infime partie de ses trouvailles.
De la même manière, André Calvet, occitaniste du Tarn-et-Garonne, montre que ce dialecte
suscite encore aujourd'hui un grand intérêt, mais aussi de nombreuses questions. Technicien
agricole de formation, il se spécialise dans l'arboriculture fruitière, ce qui révèle une certaine
sensibilité à la flore de notre pays. C'est donc tout naturellement qu'il publiera en 2000 le Dictionari
Occitan-Francès, de la flora del moissaguès e d'alentorn... 82, d'après des relevés effectués dans les
ouvrages de A. Lagrèze Fossat, J. Bel et M. Gaterau. Contrairement au travail de G. Gaubert, il
s'agit d'un collectage des occurrences, sans explication précise de leur origine, qui illustre toutefois
la diversité et l'inventivité de ce vocabulaire. A. Calvet avait un rapport particulier avec la langue
occitane, ses parents et grands-parents, la parlant tout en lui interdisant sa pratique. Il explique sa
motivation par l'envie de se reconnecter avec un passé que nous oublions peu à peu. Pour lui, il
s'agit finalement d'un engagement naturel, qui rend compte d'une certaine nostalgie. En effet, cette
recherche témoigne d'un véritable saut dans le temps, qui mène à la rencontre des ancêtres de notre
région. Le but étant de mieux comprendre quels éléments ont pu motiver le choix des désignations
qui se sont imposées, car ce n'est pas une académie qui en a décidé. L'usage des simples83, l'aspect,
la couleur dominante, l'héritage d’appellations latines, la date de cueillette, d'où présence
d'hagionymes (nom de saint utilisé comme nom propre), sont selon lui, des composantes
essentielles de la dénomination des plantes. Il est donc intéressant, pour André Calvet, de retrouver
dans ces appellations, des noms de lieux et de personnes qui l'entourent 84. Dans la même veine que
Georges Gaubert, il est transporté par l'envie de se rapprocher d'un passé défendu, de comprendre
l'histoire de notre langue et ses répercussions dans notre quotidien85.
38
Rapport entre le nom des plantes et leurs vertus
Le travail du Dr Gaubert montre donc que de tout temps l'occitan a attiré l'attention. C'est à
travers la langue que différentes traditions et divers savoirs concernant l'utilisation des plantes se
transmettent. Grâce à cette terminologie, c'est toute une culture, une façon de vivre qui se conserve.
Les catégories présentées un peu plus haut qui composent l'article de Gaubert, illustrent bien se
rapport entre le nom de la plante, son usage et la transmission d'une observation, d'une expérience,
d'une croyance. Toutefois, le nom n'est pas toujours lié à l'usage, il peut dépendre d'un moyen
mnémotechnique, se référant ainsi à une partie singulière de la plante, à un aspect qui rappelle un
objet connu, une partie du corps humain, etc. C'est finalement une nomenclature qui ne prétend plus
satisfaire un regard scientifique, comme a pu le faire Linné, mais qui préserve un patrimoine
populaire et bien souvent local. En entrant un peu plus dans le détail de son article et de ses fiches,
toute la richesse et la diversité liée à la nomination des plantes apparaît.
D'une part, évoluant dans un univers encore très croyant, beaucoup d'erbas ont donc un
rapport avec la religion ou les superstitions. Certaines plantes prenaient le nom d'un saint,
simplement parce qu'elles fleurissaient le jour de sa fête, d'autres comme les herbes de la Saint-Jean
entraient dans des pratiques très ritualisées. L'abbé Boissier de Sauvage indique que ces herbes sont
rassemblées en bouquet et passées trois fois au-dessus du feu dédié au saint. Il s'agit souvent de la
sauge, l'armoise, le millepertuis, la verveine, la lavande, la camomille, entre autres, accrochées
ensuite aux portes des maisons, des étables ou des bergeries, elles apportaient bonheur et santé.
Certains noms, eux, sont donnés en fonction de l'allure d'une partie de la plante, de la forme du fruit
ou en comparaison avec le corps humain ou animal, ce qui s'observe aussi en français 86. Tout cela
nous renvoie à un même et unique sens la vue. Cependant, l'odorat peut aussi être source
d'inspiration. Qu'il soit agréable ou mauvais, le nom de la plante nous préviens ainsi par son arôme.
Le suffixe «-asso », employé dans beaucoup d’occurrence, lui donne une connotation péjorative87.
L'occitan vient ici exprimer la méfiance, de même lorsqu'il associe sa dénomination à un animal
redouté, comme le serpent par exemple88. D'autre noms exprimant la beauté sont en faveur de la
plante et peuvent même devenir poétique. Le rire aussi est souvent évoqué, soit en rapport à une
histoire, une légende, soit à la forme de la plante qui suggère une figure comique.
39
Ensuite, certains noms dépendent de la façon dont étaient utilisées les plantes. Josiane
Ubaud développe cette idée dans son article Les salades sauvages. En effet, elle explique que le mot
« salade » vient de la préparation qu'on lui fait subir à base de sel et vient du provençal salada,
salée. Ici, la pratique prend le dessus sur la plante elle-même, l'objet est détourné par l'utilisation qui
peut en être faite. Josiane Ubaud le démontre ainsi :
Le langage populaire français a souvent gardé dans son vocabulaire certains termes occitans comme
salade, mais aussi mesclun, qui découlent de ces pratiques. Ces salades sont désignées en provençal
par les termes salada champanèla, salada fèra, et en languedocien : salada salvatja ou le collectif
las erbetas. Il s'agit donc des herbes qui se trouvent dans la nature, sauvages, car personne ne les
cultive, mais qui étaient consommées couramment, surtout dans le sud de la France. Ainsi, une
nouvelle difficulté entre en jeu, car ces plantes n'étaient donc nommées qu'en occitan. Josiane
Ubaud explique p. 6 de son article que, hormis le pissenlit, le cresson, le bourse-à-pasteur, le salsifis
et quelques autres, la plupart n'ont pas de noms vernaculaires français. Souvent parce qu'elles
n'existent pas sur le territoire de la langue d'oïl, ou simplement parce qu'elles n'y étaient pas
consommées. Beaucoup ont seulement un nom occitan ou leur nom latin traduit, mais qui a pu
changer au gré de la nomenclature, ce qui est donc peu pertinent. De nombreuses herbes de cette
espèce se vendaient, en Languedoc, à la crié, et dans les rues des villes, Josiane Ubaud en a trouvé
des témoignages pour Montpellier, Nîmes ou Marseille, par exemple :
Enfin, suivant les régions, un même nom peu correspondre à deux plantes différentes, soit
parce qu'elles ont les mêmes vertus, soit par confusion. Dans l'avertissement de son glossaire sur la
flore de St Pons91, Melquiòr Bartès l'explique pour la Sabine. En effet, cette plante peut se nommer
Sabino en occitan qui dans l'esprit de tous correspond au Juniperus sabina. Cependant, lorsqu'il a
travaillé sur son glossaire, Melquiòr Bartès a pris le parti de vérifier chaque plante en les récoltant et
enquêtant directement auprès des locaux pour savoir quel nom leur était donné dans la région. Il
40
s'est avéré que pour la Sabine, la plante qu'il a récoltée, était en fait le Genévrier de Phénice,
Juniperus phœnicea. Dans sa description de la plante, il précise que les bouviers la donnaient à
manger à leurs vaches comme un médicament, et que réduite en poudre et mêlée à du vin, elle
pouvait être un très bon apéritif et un aphrodisiaque. Ainsi, de nombreuses confusions pouvaient
naître, notamment d'un village à l'autre, et encore plus d'une région à l'autre.
Il y a donc une profusion de termes et dans certaines catégories comme pour les herbes
médicinales, cela est probant. En reprenant, en commentant, et en comparant le travail de Georges
Gaubert avec d'autres auteurs, je me contenterai d'exposer une dizaine de plantes, les plus parlantes.
En ce qui concerne l'illustration de chacune, j'ai fait confiance à Alice Traisnel qui a su capter leur
spécificité et leur beauté. Néanmoins, nous n'avons pas pu récolter toutes les photographies
nécessaire car la nature vivant au rythme des saisons, nous n'avons pas eu l'opportunité, ni la chance
de voir chaque plante à l’apogée de leur floraison. Il faut aussi savoir que les photographies telles
qu'elles sont présentées dans cette étude seraient plus expressives si elles s'inscrivaient dans un
format plus grand et avec une meilleure qualité de papier.
41
Jeux d'enfants
L'imagination est toujours porteuse d'inventions fascinantes. Bien qu'induite par le réel, elle
le transforme, le contourne, pour créer un univers fantastique. Peu importe les jouets utilisés, de tout
temps les enfants ont détourné les objets qui les entourent pour s'inventer un monde à eux. Le jeu
dépend donc de cette capacité à s'évader et à trouver dans n'importe quelle chose une particularité
ludique. La flore n'y échappe donc pas et se retrouve au cœur d'une grande cour de récréation.
42
Le sureau ou Sambucus de la famille des
Caprifoliacées, d'une toute autre manière, entre aussi dans
cette catégorie. Il servait à la fabrication d'une
canonnière. En utilisant la tige dont l'intérieur avait été
extrait, les enfants propulsaient des boules à l'aide d'une
sorte de piston. Ainsi, lo petarra, petadou, petarello ou
Lo peta barra désigne plus la plante transformée que la
branche de sureau elle-même. Le mot devient ici très
mimétique du son produit par le jeu ; sans être locuteur
on peut très bien comprendre de quoi il s'agit. Ces termes
n'apparaissent pas dans les fiches du Dr Gaubert,
seulement dans son article, sans réelles précisions des
pays où ils étaient utilisés. Toutefois, dans le dictionnaire
de Mistral, Lou Tresor dou Felibrige, donc en provençal,
l’occurrence petarra apparaît pour désigner
littéralement une pétarade, c'est-à-dire plusieurs détonations à la suite. Alors que chez Alibert, dans
son dictionnaire du languedocien, ce terme indique la canonnière de sureau. C'est Petadou qui
définira en provençal la canonnière, toujours d'après Mistral. Dans son Atlas linguistique Xavier
Ravier92 indique que dans la région girondine, les enfants utilisaient le sureau pour fabriquer des
pétœroloe.
Dans un autre genre, plus sensible, le Chèvrefeuille
Louicera en latin, apparaît. Cette Caprifoliacée au goût plutôt
sucré, inspira bien des langues. En occitan, chucomel,
littéralement « suce miel », se dit surtout en languedocien et en
gascon. En effet, il apparaît chez Bayrou et chez Farenc dans sa
Flore du Tarn. Selon Gaubert, cette occurrence existe aussi en
gascon et s'utilise plus particulièrement dans les Landes. Ce
terme se transforme en honey suckle en anglais, qui signifie
exactement la même chose. La fleur est ici définie par un sens
gustatif, bien que l'odorat soit aussi invoqué. L'odeur sucrée de
la fleur semble presque laisser un goût de miel en bouche après
l'avoir sentie.
92 Ravier Xavier, Atlas linguistique et ethnographique du Languedoc occidental, vol.1, CNRS, Paris, 1978.
43
Vie pratique
Afin de chasser les nuisibles, certaines astuces existaient, que la chimie a quelque peu
détrôné aujourd'hui. Elles étaient surtout utilisées pour l'usage domestique, des jardins ou encore du
corps. Bien que peu dangereux, beaucoup de ces parasites pouvaient devenir très vite encombrants
et même gâter les récoltes. Une des anecdotes du Dr Gaubert, bien qu'elle ne concerne pas la
botanique, est tout simplement improbable. Selon lui, il suffirait de mettre la dépouille desséchée
d'un martin-pêcheur ou arnier, pour faire fuir les mites des gardes robes.
44
D'autres plantes sont
à éviter avec le plus grand soin, car
elles peuvent être nocives, surtout
pour le bétail. C'est à cause d'un
champignon
toxique, qui pousse sur l'Ivraie
enivrante, herbe qui se confond bien
souvent avec blé, et qui peut
griser les troupeaux.
Le Glaïeul, lui aussi est dangereux et
donne un sentiment d'ivresse
après l'avoir consommé. Ainsi, elles
prennent les noms d'Embriago en
provençal et en languedocien, termes
qui se retrouvent d'ailleurs chez
Alibert. Embriacs apparaît aussi. Ces
occurrences
viennent des verbes Embria ou Ebria
Ivraie enivrante, Lolium
temulentum, de la famille des qui signifient enivrer.
Poacées.
Il faut savoir que ce genre de plante est de plus en plus difficile à trouver aujourd'hui. En
effet, grâce aux nouvelles technologies et notamment aux OGM, les agriculteurs ont réussi à se
débarrasser en partie de ces herbes qui pouvaient rendre le pain mauvais. C'est d'ailleurs dans l'Atlas
linguistique et ethnographique du Languedoc occidental93 que Xavier Ravier indique la présence
d'un jeu, dans une localité du Languedoc, pour lequel on utilise la formule pan, vin, irago 94, « pain,
vin, ivraie ». On arrache une à une les folioles d'une ivraie en prononçant à chaque fois l'un des 3
mots. Suivant le dernier mot prononcé, on pronostique qu'il y aura une bonne récolte de blé, ou une
belle vendange ou au contraire, qu'il n'y aura que de l'ivraie, donc une mauvaise année.
45
Traitements et médecines
L’Achillée millefeuille, Achillea millefolium, fait partie de la famille des Astéracées, famille
que Gaubert n'a pas traitée dans ses fiches et qui apparaît pourtant dans son article. Ainsi, il n'y a
aucune indication sur la provenance des termes. Toutefois cette herbe connaît plusieurs vertus, elle
peut être Erba del piq (herbe de la piqûre), Erba del talh (herbe de la coupure) ou encore Erba de
l'enrelhada, relha signifiant soc, elle soigne donc les blessures dues au soc de la charrue. Ces
occurrences apparaissent dans le dictionnaire de Mistral. Il précise, erbo de pi ou erbo de pic, herbe
de blessure, plante des coupures, à Toulouse, plante vulnéraire, c'est-à-dire qui entre dans la
composition d'une préparation qui sert à guérir les blessures. Il rajoute plus bas erbo de
l'enreiadurao ou erbo dou tai, Gaubert n'utilise donc pas la même graphie que Mistral, cependant,
ils énoncent les mêmes vertus.
46
La Joubarbe, dans la même rubrique servait de
pansement. Grâce à ses feuilles épaisses et isolantes, elle
devient Erba dels agacics, en provençal et en languedocien,
qui permet de soigner les cors aux pieds ou erba de la copo
(herbe de la coupure). Ces termes apparaissent aussi chez
Axel Duboul, dans son Glossaire patois. Une autre légende
concerne cette Crassulacée, qui explique son nom français et
lui confère le nom d'Erba del tron (du tonnerre) en
languedocien. Il semblerait que Jupiter, maître des dieux et
des vivants, du ciel et de la terre, Zeus en grec, épargnait de
sa foudre les toits couverts de sa barbe. En effet, Jovis barba
en latin désigne la barbe de Jupiter, qui dans le langage
Sempervivum, de la famille des courant s'est transformé en joubarbe. Cette ancienne légende
Crassulacées.
païenne se retrouve donc au fil des siècles et de l'évolution
de la langue. Gustave Farenc reprend aussi cette légende et
la commente dans sa Flore du Tarn. Pour lui, il s'agit
vraiment d'une croyance « imbécile ».
47
Les plantes qui vont suivre, tirées de l’œuvre de Pierre Trinquier 95, n'apparaissent pas dans
l'article de Gaubert, mais se retrouvent parfois dans ces fiches. Il s'agit du coquelicot et du pissenlit.
Ce qui est intéressant, en ce qui concerne ces plantes en particulier, c'est de remarquer la profusion
des termes les désignant. Ceux qui apparaissent ici ont un rapport plus particulier avec les soins que
la plante procure. Toutefois, ces mêmes plantes peuvent aussi être nommées en fonction de leur
couleur, de leur forme, d'un autre remède qu'elles peuvent constituer. Ces deux espèces, comparées
à d'autres, se retrouvent dans beaucoup de région et sont majoritairement connues de tous. Ainsi,
elles prennent une multitude de noms différents suivant les régions et sont rarement considérées
pour la même raison. Elles sont l'exemple parfait d'un vocabulaire très diversifié et d'une façon de
nommer les plantes qui ne dépend pas toujours d'un même point de
vue.
Le Coquelicot, d'une part, peut prendre deux noms
bien différents. Il peut être rouzèlo, c'est-à-dire petite rose, en
languedocien et en gascon, ou bien parpèu en provençal,
terme qui apparaît aussi dans le dictionnaire de Mistral, Lou
Tresor dou felibrige, ou encore parpèl en languedocien. Ces
deux derniers termes sont très différents du premier car ils ne
s'appuient pas sur les mêmes qualités de la plante. En effet,
rouzèlo s'attache à la beauté, à la forme de la plante, alors que
parpèl ou parpèu peuvent aussi indiquer aussi le cil, la
paupière. Il ne s'agit pas de ressemblance avec cette partie du
corps humain, mais comme pour la graina de caissal, d'une
vertu de la plante qui sert à soigner les maladies liées aux
Coquelicot, Papaver rhoeas, de
yeux. la famille des Papaveracées.
95 TRINQUIER Pierre, Les herbes d’oc et leurs vertus. Nîmes, Lacour, 1997.
48
Dans la même idée, le Pissenlit ou Taraxacum officinale peut prendre le nom de
petalaganha car il guérissait les affections ophtalmiques. En effet, Laganha ou lagagno96 signifie le
chassie, c'est-à-dire l'écoulement oculaire. L'emploi des sucs des Euphorbes, Pissenlits et
Renoncules servaient à guérir cette infection. Amada Lacomba, elle, montre dans son ouvrage
Flora occitana, que le pissenlit peut prendre un tout autre nom, toujours en languedocien : il peut
être Pissenlit (m), Pissa-al-lièit (m) ou Pissorlin (m). Elle explique que ce nom vient du fait que :
La tisana de raisses e fuèlhas secas fa pissar.
Elle rappelle, comme on a pu le voir dans le texte de Josiane Ubaud 97, que le pissenlit est aussi
considéré comme une salade sauvage, car ses feuilles sont comestibles et peut donc s’appeler
ensalada.
96 Id
97 UBAUD J. Op.cit, Les salades sauvages, 2003
49
Parmi la flore locale, certaines herbes avaient des propriétés plus médicinales : purgatives,
hépatiques ou encore emménagogues (qui provoque ou facilite le flux menstruel), elles soulageaient
les maux intérieurs. La Bourse-à-pasteur par exemple possède plusieurs propriétés. Erba del fetge
(foie), sa décoction, amère est réputée pour combattre les insuffisances hépatiques. Elle devient
aussi Fel de terra (fiel) ou encore Erba de las febras (fièvre) et soigne ainsi plusieurs maladies.
50
D'autres plantes, dont les effets ne sont pas précisés, semblent guérir tous les maux. La
Fougère doradille, qui se retrouve souvent dans le creux des murets en pierre, prend le nom de
Salvavida (sauve la vie). Elle fait partie de la famille des Astéracées, fiche que Gaubert n'a pas
composé.
La Monnoyère, ou Herbe aux écus, semble aussi avoir des vertus si puissantes qu'elle peut
guérir n'importe quelle maladie. Elle prend donc le nom d'Erba de cent malautia (Herbe des cent
maladies), surtout en Provence.
Les particularités des plantes sont donc reconnaissables à travers leur nom. Il s'agit la
plupart du temps d'une tradition orale qui se transmet de génération en génération et qui découle
beaucoup de l'expérience. En effet, ce n'est pas par la science ou les manuels que les vertus de ces
plantes ont été trouvés pour la première fois, mais simplement en les testant. Elles sont aussi au
cœur de beaucoup de croyances superstitieuses, qui prétendent à des vertus qu'elles ne possèdent
pas forcément. D'ailleurs, beaucoup de plantes aux effets inconnus ou sans particularités sont
simplement appelées Erbas.
51
La poésie des fleurs
98 Rambosson Jean, Histoire et légendes des plantes utiles et curieuses, Firmin-Didot frères (Paris), 1871 pp. 195-
196
52
termes d'Erba de las estelas (herbe des étoiles) en languedocien, de Uelh de l'Enfant Jésu (œil de
l'enfant Jésus) en provençal, sûrement dû à la forme en branche et à la couleur jaune vif de son
pistil. Amuredétés apparaît lui en gascon, certainement dû à la légende expliquée un peu plus haut.
La science des plantes entre aussi dans de nombreuses pratiques qui dépassent
l'entendement. Au-delà de l'herborisation qui servait surtout à soigner, d'autres plantes entraient
dans des compositions plus ou moins douteuses. Il y a tout d'abord l'exemple de la cupidone ou
catananche que l'on a vu un peu plus haut, que les enfants utilisaient comme un jeu. Les adultes eux,
lui pensaient des vertus magiques. Selon Claudi Vassièra 99, elle prend aussi le nom de cupidone ou
en occitan d'amoreta car elle entrait dans la composition d'un filtre d'amour.
Avril, cueillette des fleurs, vignette du XVe siècle, tiré d'un recueil :
Calendrier et livre de prière, Bibliothèque du Périgord, Toulouse.
À ce propos l'article de René Nelli sur l'herbe magique du curé de Montaillou examine de
près ces croyances en des plantes miraculeuses. Ainsi, Pierre Clergue, curé de Montaillou aurait
utilisé au début du XIVe siècle une herbe qui lui permettait de s'unir aux femmes qu'il séduisait sans
que celles-ci ne tombent enceinte. Devant le tribunal de l'inquisition il déclare :
qu'il possédait une certaine herbe qui ayant telle vertu que si un
homme la porte sur lui, quand il a commerce avec une femme,
l'homme ne peut engendrer ni la femme concevoir [...]
53
D'après le témoignage d'une de ses conquêtes, Béatrice de la Gleyze, dite Béatrice de Planissoles , il
apportait quelque chose :
d'enveloppé et de ficelé dans un morceau d'étoffe de lin, de la largeur
et de la longueur d'une once ou de la première phalange du petit
doigt (de Béatrice) et suspendue à un long fil qu'il lui passait autour
du cou au moment des rapports.
Le curé disait qu'il s'agissait d'une plante, mise dans un petit sachet qui pendait au bout d'une
ficelle et descendait entre les seins de la femme et s'arrêtait « au bout de l'estomac » ou orificum
stomachi comme l'a noté le scribe du procès. Une grande interrogation va se poursuivre sur l'origine
de cette plante et ce que le curé entendait par « estomac ». Étant donné que les mots latins
correspondent aux mots occitans selon l'auteur de l'article : « lo trauc del estomac » est traduit par le
nombril, par Jean Duvernoy dans son ouvrage Le Registre d'inquisition de Jacques Fournier100. De
plus, selon René Nelli, « estomac », en occitan ancien, présente des significations très imprécises.
Le mot a pu signifier cœur, tête, mémoire, etc. De même, que « trauc » qui ne signifie pas toujours
trou, mais aussi fossette, « los traucs » peuvent être les fossettes du menton, de la joue. Toujours
dans le but de comprendre s'il s'agit de magie ou non, l'auteur de l'article s'est demandé si par
extension l'orificum stomachi ne signifiait pas l'orifice vaginal. Ainsi, il y aurait une action réelle
exercé par l'objet introduit, il aurait alors le rôle d'un stérilet ou d'une éponge à ficelle utilisé par les
femmes naguère. Donc ce ne serait pas de la magie. Néanmoins, le curé a précisé dans sa
déposition :
si on la porte sur soi (ou si on la touche) elle a une puissance telle
que l'homme ne peut engendrer ni la femme concevoir.
Son action s'exerce à la fois sur l'homme et la femme, par simple contact, sans absorption de suc. Il
n'y a donc aucune action mécanique ou chimique. L'auteur de l'article précise alors :
Cependant, il existe peu d'informations sur les effets contraceptifs des plantes du XIVe.
Matfre Ermengaut dans son Brevari d'amor101 explique l'action des plantes à travers certains
100 DUVERNOY Jean, Le Registre d'inquisition de Jacques Fournier, t. I, Gallimard Paris, 1975, pp. 243-244. L'auteur
y rend une traduction du procès du curé de Montaillou.
101 ERMENGAUD Matfre, Le breviari d'amor, secrétariat de la Société archéologique (Béziers), 1862-1881
54
principes de chaud et de froid. Ainsi, selon si l'erba es cauda o freja elle peut avoir différentes
actions, être bénéfique ou nocive. De même, selon si elle est administrée dans un pays chaud ou
froid, selon la saison chaude ou froide et si le patient a un tempérament sanguin ou lymphatique.
Ainsi, il s'agirait plutôt de l'émanation d'une énergie qui pourrait devenir contraceptive.
Le Brevari d'Amor (fin du XIIIe siècle) prétend qu'elle fait périr les dragons et les serpents,
qu'elle arrête les écoulements sanguins. De plus, dans Bestias e plantas102 : la rue caillerait le lait, et
au Moyen âge on croyait qu'elle arrêtait le flux sanguin. Ainsi, avant la conception, elle rendait les
femmes temporairement stériles. La rue est donc soit considérée comme un anti-coagulant soit
comme caille lait, donc retiendrait à l'intérieur ce qui doit s'écouler. Elle aiderait à la conception et
en même temps serait un contraceptif… Toutefois, l'auteur précise qu'elle a bien était utilisée
comme contraceptif.
La coriandre, Coriandrum sativum, de la famille des Apiacées, aurait les mêmes propriétés
que la rue. Xénocrate dans L'Histoire naturelle de Pline103 déclare que si une femme prend une
graine en potion elle arrête son écoulement sanguin pendant un jour, pendant deux jours si elle en
prend deux, etc. Elle était aussi considérée comme aphrodisiaque. C'est peut-être parce que cette
graine suspendait la fécondation que les hommes l'utilisaient comme un aphrodisiaque, car ils
n'avaient plus à se gêner avec les femmes. La coriandre prise avec du vin, rend l'homme luxurieux.
Les décoctions d'aconit exposées pendant quelques heures en plein soleil puis bu très froide
55
(toujours le chaud et le froid) favoriseraient l'avortement. L'armoise (Arsenisa) appelé aussi en
Languedoc cinta de san joan (ceinture de saint Jean) a les mêmes propriétés. Mais toujours
introduites dans l'organisme, il n'est pas question de magie dans ces cas.
Il y a donc deux modes de fonctionnement afin que les vertus des plantes soient efficaces,
soit par introduction dans l'organisme ou par contact (il s'agit ici d'une action chimique ou
mécanique) ; soit par la simple présence de la plante, qui lui conférerait un certain rayonnement,
donc une action magique. René Nelli précise qu'en Languedoc et dans la province de Foix, l'action
magique a souvent été privilégiée à l'autre. On la pensait plus efficace.
Dans le Brevari d'amor, l'auteur considère la plupart des plantes comme autant de talismans
efficaces par eux-mêmes, que l'on doit porter sur soi comme les pierres ou les petits animaux
desséchés :
La bétoine officinale ou Stachys officinalis, de la famille des Lamiacées (bétonica ), préserve
de tout venin, si on la porte sur soi, qui la porta sobre si.
La rue (Ruda) celui qui la porte devant soi peut occire sans crainte les basilics, que qui la
porta davan si, aucis basilics ses temors.
La pivoine ou Paeonia officinalis, de la famille des Paeoniacées (Pezonia) a un grand
pouvoir, une grande vertu, et fait grand bien, si seulement on la porte sur soi. Que neis la porta
sobre se.
La verveine ou Verbena officinalis, de la famille des Verbénacées a des effets encore plus
magiques :
si en la tenant en main, on demande à un malade « Comment vas-
tu ? », s'il répond : « bien » c'est, sans nul doute, bon signe : il guérira.
S'il répond : « mal », il faut considérer sa réponse comme le présage
de sa mort !
Beaucoup de femmes portaient au Moyen âge et même plus tard, entre leur peau et les
vêtements des plantes pour les « réchauffer », qui devaient avoir des vertus contraceptives et dans
certains cas provoquer l'avortement. Cependant, il est difficile selon l'auteur de savoir exactement
de quelle plante il s'agit. Il y a aussi ce proverbe recueilli au XIX e siècle par Gustave Thérond de
Sète, qui témoigne de la survivance de cette coutume, du moins en ce qui concerne l'armoise :
Se las femnas conoissian
la vertut de l'artemisa
segur que la penjarian
al panèl de sa camisa.
56
Si les femmes
connaissaient la vertu
de l'armoise, elles se la
pendrait, pour sûr, au
pan de la chemise !
Finalement, beaucoup d'herbes et de plantes semblent avoir des vertus magiques, René Nelli,
finit son article en pensant que c'est le cas de l'astuce du curé de Montaillou. Il pense que la magie
dépend beaucoup de cette ligature qui lie les seins au bas ventre et de la plante utilisée, comme nous
avons pu le voir plus haut. Toutefois, la vertu de ces plantes devait tout de même dépendre de la
croyance.
57
Les noms des plantes sont remarquables de cette richesse du lexique régional. Très imagé, il
rend compte d'une condition de vie difficile, où il fallait faire preuve d'inventivité pour se divertir
ou tout simplement se soigner.
Toutefois, il ne s'agit ici que d'un bref échantillon face à
la profusion des termes. De plus, ce travail ne prend pas
en compte toutes les variétés de la langue occitane et se
restreint à quelques témoignages soit littéraires, soit des
paysans d'une région bien précise, comme à travers
l'ouvrage d'Amada Lacomba.
Il s'avère aussi que ces appellations sont
évocatrices d'une histoire, d'une époque. Elles rappellent
certaines pratiques ou métiers oubliés et nous montre
finalement le peu de connaissance que nous avons
aujourd'hui de la flore qui nous entoure. C'est un tout
autre rapport à la nature qui nous est présenté, à travers
un réel respect et une grande observation de celle-ci.
Ainsi, le docteur Jacques Gaubert, fils de Georges,
raconte dans son article Les petits métiers toulousains p.
271 de la revue L'Auta « Que bufo un cop cado mès » de
2008, la vente à la criée dans les rues. D'après les récits
que son père lui avait rapporté, il décrit une marchande
Petite centaurée, Centaurium
déclamant à grande bouche :
erythraea, de la famille des
Gentianacées.
58
Voici une photographie apparaissant p. 273 de la
revue L'Auta, d'un vendeur à la criée de
Caoulados. D'après Jacques Gaubert, il s'agirait
d'un marchand de caillé, qui déposait ses laitages
sur un tapis de joncs tressés d'où aussi le nom de
juncados.
Il rend ainsi hommage à ces métiers disparus, mais aussi à son père qu'il décrit comme :
La botanique illustrée par la langue occitane apparaît donc moins comme une science froide et
stoïque. Ce dialecte lui donne vie à travers une expérience concrète et sensible du quotidien. Il
nous transporte ainsi vers un âge où les histoires faisaient encore rêver.
59
Valorisation possible de ce travail
Idée de livret
À partir du travail de Georges Gaubert sur les différentes nominations occitanes de la flore
du sud de la France, la création d'un livret recensant une partie de ces plantes ainsi que leur
traduction, permettra de mettre en valeur ces différents usages de la langue. Toutefois, il ne s'agira
pas d'une simple reprise des fiches de Gaubert que je pense les utiliser en tant que référence, mais
aussi de faire appel à d'autres auteurs pour comparer, étayer, commenter les différentes informations
présentes. Cet ouvrage aura donc pour objectif de reprendre quelques plantes choisies de notre
région avec leur appellation scientifique, d'en donner leur traduction dans différents dialectes
occitans suivant les sources, d'identifier la provenance de telles nominations, de s’intéresser à la
manière dont ces plantes ont été nommées, et d'en donner une illustration photographique. Il me
semble important de bien contextualiser chaque dénomination. Et pourquoi pas d'intégrer une
référence littéraire issue d'un ouvrage ou d'un dictionnaire comme celui d'Alibert ou de Mistral, afin
que ce ne soit pas une liste froide et étouffante. Ainsi, le lecteur pourra donc se référer à un
territoire, une époque et saura dans quel contexte utiliser ce mot. La langue occitane étant une
langue plutôt littéraire, il est aussi intéressant de créer des passerelles entre certains noms de plantes
qu'on aurait pu lire, sans savoir d'où il venait ou à quoi la plante ressemblait, et son illustration. La
littérature peut souvent donner l'impression de se substituer à l'expérience. Dans ce cas, grâce à la
lecture on pense connaître les plantes sans les avoir vues. Ce livret permettra donc de remettre une
image sur un nom « flottant » ou inversement. Il ne s'agit donc pas de créer un lexique à proprement
parler qui énumérerait une liste interminable de noms comme a pu le faire Gui Benoèt 104. Il a
certainement effectué un énorme travail de recensement et a répertorié une grande diversité de
nominations, mais il donne des noms sans aucune référence, ni aucun contexte, si bien qu'on ne sait
pas, finalement, lequel utiliser. Il serait plutôt question, pour ma part, d'un outil qui permettrait de
comprendre la logique de la langue occitane et dans quelle mesure elle ancre la flore dans un
contexte culturel particulier.
Comme je l'ai démontré plus haut, la langue occitane permet d'aborder la botanique d'une
manière plus pratique. Ainsi, ce livret montrera qu'en occitan les qualités ou les vertus des plantes
apparaissent dans leur appellation. L'usage qu'il soit médical ou pratique, la forme de la fleur ou du
fruit, la couleur dominante, les différentes croyances, sont donc des composantes essentielles de
104 BENOET Gui, Mond occitan, Las plantas, Lexic, IEO edicions, 2008.
60
leur désignation. Il s'agit d'une perspective peu connue de l'occitan, langue pourtant porteuse
d'histoire et d'une autre vision du monde. De plus, le livret pourra faire prendre conscience à son
lecteur qu'un pont existe entre l'usage courant de la langue, celle que l'on pratique, et l'usage
scientifique réservé à un milieu particulier. Ici, les nominations courantes des plantes font surtout
référence au monde rural, donc à une condition de vie particulière très liée à l'expérience. Les
termes scientifiques, eux, ne dépendent pas de ce ressenti, ils servent surtout à être compris par le
plus grand nombre de botanistes dans le monde. L'exemple le plus marquant est celui de l’absence
de toute marque de superstition dans la dénomination. Même Buffon qui revendiquait un usage
« naturel » des noms, refusait que celui-ci fasse référence à une quelconque croyance. Il y a donc
dans le milieu scientifique une sorte de rejet de toute forme d'attachement populaire. Si le nom des
plantes apparaît dans un langage courant, il sera en français et surtout en « bon » français. C'est
pourquoi, comme nous avons pu le voir plus haut, Buffon s'acharne à franciser un bon nombre de
noms indigènes.
D'autre part, la collaboration avec le Muséum d'Histoire Naturelle de Toulouse, ancre
l'occitan dans un univers plus scientifique. L'idiome s'offre ainsi à un nouveau regard et à une
population qui pourra, par ce biais, découvrir différentes particularités et utilisations des plantes.
Néanmoins, il ne s'agira pas d'un ouvrage botanique, comme ont pu le faire Amada Lacomba avec
sa Flora occitana ou encore Josiane Ubaud avec son Lexique normatif français-occitan de
botanique publié en 2013. N'ayant pas les compétences scientifiques, je m'attacherai plus à la
langue occitane, à la façon dont elle nomme les plantes.
Dans ce mémoire, le travail que j'ai effectué sur le rapport qu'il peut y avoir entre les plantes
et leur nom n'est que partiel. Il peut toutefois servir d'exemple de ce à quoi pourrait ressembler ce
livret. Néanmoins, il y a de nombreuses pistes de recherches qui pourraient compléter cette étude.
Par exemple, en ce qui concerne la partie médecine et traitement, il serait intéressant, suivant les
noms occitans trouvés, d'aller faire un tour du côté du métier d'herboriste 105. Bien que ce diplôme ne
soit plus reconnu en France et que ces études ne se pratiquent plus beaucoup, il existe à Toulouse
une pharmacie spécialisée dans l'herborisation. Il s'agit de la pharmacie de la Croix Verte, rue
Rémuzat qui utilise toujours les plantes comme remède principal et les fait entrer dans divers soins.
Pour certaines plantes, il serait intéressant suivant les noms occitans trouvés et les particularités qui
en découlent, de voir si les vertus qu'on leur attribuait sont toujours d'actualité ou non. Ainsi, on
pourrait mieux comprendre d'où vient ce savoir : d'une observation, d'une expérimentation des
plantes, d'une certaine connaissance scientifique, de croyances...
61
Illustration
Il me semble important que ce livret soit accompagné d'illustrations pour chaque plante car
cela donne au contenu un aspect plus attrayant et interactif. En effet, grâce à la photographie, le
lecteur peut clairement identifier la plante dont il est question et ensuite la reconnaître ou même la
chercher lors de balade. Elle permet aussi d'éviter les confusions, d'observer des plantes qui nous
étaient jusqu'alors inconnues ou au contraire nous permettre de rectifier de fausses croyances.
L'utilisation d'un tel livret serait donc aussi le moyen de vérifier le nom d'une plante qu'on croyait
connaître mais qui finalement faisait partie de notre imaginaire.
Pour ce faire, j'ai abordé ce travail avec Alice Traisnel, photographe en herbes, mais qui à
mon sens, pose un regard singulier sur les éléments qu'elle capture. Se retrouvant bien souvent dans
des positions plus qu'acrobatiques, elle propose ainsi un angle de vue qui nous est peu familier, ce
qui nous permet alors de redécouvrir le plus banal des objets. En ce qui concerne la photographie
des plantes cela est probant, car dans un lieu purement artificiel comme peut l'être un jardin public,
elle arrive à donner une toute autre
perspective au sujet qu'elle touche. Sans mise
en scène, quasiment sans toucher la plante,
elle fait presque disparaître l'univers
qui l'entoure pour qu'il ne reste que l'essence,
la fleur à l'état brut.
Centaurée. Photographie prise au jardin botanique
du Muséum.
Il faut savoir qu'une partie des photographies présentées ici ont été prises au jardin botanique
Henri Gaussen, aménagé dans le cadre de la rénovation
du muséum. Il est constitué en spirale suivant différents
types de plantes et surtout suivant leurs vertus (toxiques,
aromatiques...). Il s'agit, a proprement parler, d'un jardin
ethnobotanique qui présente des plantes qui peuvent être
médicinales, condimentaires, alimentaires et
industrielles106.
Vue d'en haut de la spirale botanique du
Muséum*.
62
Ce site est en lien avec l'université de Paul Sabatier, car le jardin gère un « patrimoine botanique
universitaire107 ».
L'autre partie des photographies a été prise au jardin du Muséum à Borderouge. Il s'agit plutôt ici
d'un jardin potager, qui possède des plantes du monde. Situé dans le parc de la Maourine, à
l'extérieur du centre-ville de Toulouse, ce jardin offre une bouffée d'air frais dans un espace urbain.
Il comprend près de 700 espèces de plantes alimentaires, fruits ou légumes108.
Bien que ces jardins ne répondent pas aux critères de jardins à la française, où la nature est très
contrôlée et subit une exigence très géométrique, une certaine mise en scène a été créée, ce qui n'en
fait pas des lieux dits « naturels », même si certaines herbes y poussent à l'état sauvage.
107 Id
108 Voir Programme saison 2016, Les saveurs s'exposent, Jardin muséum Borderouge. Illustration correspondant aux
pages 2 et 3.
63
D'autres photographies ont été prises à l'orée des bois ou des champs, où les plantes poussent
dans leur habitat naturel, comme pour ces pissenlits.
Elle ne cherche pas à arranger la nature pour qu'elle soit plus agréable à l’œil humain, elle la rend
telle qu'elle est. En cela elle se rapproche aussi d'une prérogative plutôt écologique de Gaubert qui
était de respecter la nature et d'en apprécier sa beauté à sa juste valeur109.
Pour elle, comme pour moi ce genre de collaboration étant nouveau, nous avons décidé de
créer une sorte de contrat afin de protéger notre travail110.
Partenariats possibles
Tout d'abord, il me semble important de préciser que dans un but d'ouverture et pour
sensibiliser un public le plus large possible, ce livret sera écrit en français. L'objectif n'étant pas de
prêcher des convertis, il serait intéressant d'essayer de sensibiliser une population peut-être
hétérogène, et donner envie à des lecteurs plus férus de botanique de s'intéresser à l'occitan ou
inversement. Toutefois, ce livret ne fera que mettre en avant certaines pistes et poussera
certainement le lecteur à se poser des questions sur son propre lexique des plantes. Il ne s'agira pas
64
d'un travail figé et complet, mais je l'espère plutôt d'un outil qui suscitera de nouvelles curiosités et
de ce fait des échanges.
De plus, la création de plusieurs petits livrets suivant la catégorie de plantes : potagère,
ornementale, arbres et arbustes, etc., peut être une façon d'éviter la lourdeur et la redondance d'un
tel travail de vocabulaire. Ils constitueront une sorte de collection, en petit format, afin que ce ne
soit pas quelque chose de trop dense et compact. La dimension du livret sera aussi plus pratique,
facilement transportable et pourra être l'occasion de quelques repérages en balade. Toutefois, pour
tout ce qui concernera la médecine ou les traitements corporels, il faudra quand même préciser que
ces anciennes pratiques ne sont pas toujours efficaces et peuvent bien souvent dépendre de
croyances populaires, donc, dans le doute, qu'il vaut mieux éviter de les pratiquer.
Dans le but d'éditer ce livret, plusieurs types de partenariats peuvent s'offrir à nous. Il y a
tout d'abord des associations occitanes, prônant bien souvent la langue et la culture, comme peut le
faire la Tortuga. Cette association édite aussi de nombreux livres qui lient avec une esthétique
particulière la photographie au texte. De plus, elle s’intéresse depuis peu à la toponymie et à
l'onomastique (relatif à l'étude des noms propres), ce projet irait donc dans le sens de leur étude des
différentes nominations occitanes. Il y a aussi la possibilité de faire une coédition avec le Muséum
d'Histoire Naturelle avec lequel j'ai travaillé. En effet, le fonds documentaire venant de ses archives,
l'exploitation de ce travail lui permettrait de gagner en informations et de valoriser les fiches du Dr
Gaubert. Les sociétés savantes comme la Société d'Histoire Naturelle dont Gaubert était président
pourrait aussi être un partenaire potentiel. Même si le projet aborde plus la langue occitane et sa
culture que le botanique, il met en avant le docteur Gaubert et son étude. De plus, l'actuel président
Michel Bilotte, m'a aidé dans certaines de mes recherches, notamment en ce qui concerne la
biographie du Docteur. Encore une fois, d'autres pistes sont à creuser que ce soit à l’échelle de
revues, qui transformeraient ce livret en plusieurs articles ou en ce qui concerne des maisons
d'éditions non spécialisées dans la matière occitane. Plume de Carotte, dont le siège est à Toulouse,
a déjà publié certains livres de botanique ou d'ethnobotanique. Ce livret pourrait être pour eux
l'occasion d'aborder l'occitan et de prendre part à la culture locale.
65
Autres applications de ce travail
Hormis la possibilité d'éditer un livret, cette étude pourrait aussi conduire à une réalisation
bien plus simple, celle d'une exposition. Il s'agirait de la mise en avant des photographies d'Alice,
suivies d'un commentaire qui reprendrait les noms communs des plantes choisies, deux ou trois
traductions dans différents dialectes occitans et l'explication de telles nominations. On peut
imaginer ce texte écrit sur des fiches distribuées à l'entrée de l'exposition ou ce qui me paraît plus
simple et plus efficace, sur des cartels disposés au mur à côté des plantes auxquelles ils font
références. Bien sûr les explications seraient moins développées que dans le livret par besoin de
place, mais elles seraient l'occasion de populariser notre travail et peut-être aussi de convaincre de
futurs éditeurs. Cette exposition pourrait être itinérante et occuper ponctuellement plusieurs lieux
que ce soit à Toulouse ou dans les communes environnantes. En effet, il est toujours intéressant
d'exporter des créations urbaines dans un monde rural, surtout en ce qui concerne la botanique et la
reconnaissance des plantes. Elle pourrait aussi prendre place à l'Ostal d'Occitania qui accepte
régulièrement des expositions de tout genre.
Enfin, il y aurait aussi la possibilité de créer un parcours occitan dans les jardins du
muséum, je parle plus particulièrement de ceux de Borderouge. En effet, ce lieu offre une grande
diversité en ce qui concerne la variété des plantes qui y poussent. La particularité de ce jardin est
qu'il y est avant tout question d'un potager, donc toutes les plantes qui y poussent sont comestibles,
que ce soit les légumes comme les herbes. Il est vrai que dans l'exposé que j'ai fait un peu plus haut
sur les plantes et leur propriétés j'ai peu mentionné les légumes et la cuisine. Toutefois, dans les
fiches de Gaubert, tout comme dans les flores que j'ai pu consulter ces deux aspects apparaissent et
font l'objet de différentes études. De plus, pour ce parcours il serait intéressant de ne pas seulement
mettre en avant un aspect culinaire mais -pourquoi pas?- leur utilité médicinale, ludique, pratique,
etc. Ainsi, cela permettrait de montrer que les plantes d'un potager peuvent avoir différents usages et
ne se restreignent pas à la cuisine, bien au contraire. Dans ce « potager du monde », il serait
intéressant de donner une place à la culture régionale, occitane.
66
Conclusion
La nomination occitane des plantes est un sujet qui a suscité de nombreuses recherches et
spéculations. Que ce soit de la part de spécialistes en botanique, en occitan, ou même les deux,
beaucoup ont essayé de comprendre d'où venaient ces noms ou simplement d'en recenser un
maximum. Toutefois, comme l'indique Josiane Ubaud dans son article, Lexique normatif francais-
occitan de botanique111, publié sur son site, il faut aussi se méfier de certains textes, flores ou
glossaires qui contiennent des fautes. Selon elle :
C'est le drame de la lexicographie occitane où même les
incompétents en langue et en botanique s'expriment cependant sur le
sujet.
Il semblerait donc sous prétexte qu'il s'agisse d'une langue populaire peu usitée, qu'on fasse moins
attention à la véracité de certains propos, que pour toute autre langue. Il ne faut donc pas hésiter à
comparer, à croiser les informations, à bien s'entourer de spécialistes, et d'enquêter soi-même.
Néanmoins, ce phénomène montre bien l'intérêt grandissant pour la nomination occitane des
plantes. Cet engouement pour les langues occitanes se comprend car elles mettent en avant une
expérience de vie, des pratiques, des croyances qui bien souvent sont tombées dans l'oubli
aujourd'hui. Elles font donc parties de ces patrimoines à la fois proche et lointains, que l'on tente de
se réapproprier.
De plus, un lien plutôt étroit entre la langue et la botanique apparaît. En effet, d'après leurs
noms certaines plantes racontent quelles sont leurs vertus, leurs particularités physiques, entre
autres, ce qui bien souvent fait partie des objets d'études des botanistes. Finalement, ce rapport entre
la matière scientifique et la langue d'òc vient d'une connaissance toute particulière des plantes. Les
deux disciplines, bien qu'elles ne procèdent pas de la même manière, ont étudié de près la flore afin
d'en comprendre au mieux son fonctionnement. Toutes deux dépendent d'une expérience et d'une
observation précise de la plante, bien que ce soit pour des raisons totalement opposées. D'un côté le
langage populaire tente de rendre la nomination la plus pratique possible, dans le but de facilité la
vie de chacun. De l'autre la science met plutôt en avant une certaine curiosité, propre à la recherche
fondamentale, qui tente de comprendre comment le monde fonctionne.
Enfin, il me semble que l'étude de Gaubert s'imprègne de ces différentes dynamiques, car il
arrive à combiner un savoir scientifique et un savoir occitan. En effet, il fait toujours interagir les
deux matières, que ce soit dans ces fiches ou dans son article. Même lorsqu'il travaille sur un terme
111 UBAUD Josiane, Lexique normatif français-occitan de botanique, 2013
67
en particulier son découpage méthodique du mot lui donne un aspect scientifique, il le décortique
comme il disséquerait une plante. Gaubert, à travers ses différentes publications montre un amour
incontestable pour la nature et sa protection, ainsi que pour la culture paysanne, celle qui était le
plus amené à nommer les plantes.
Toujours est-il que, ce qui est le plus frappant dans cette étude, c'est le doute, la perte
d'information, la confusion et parfois même l'incompréhension. Ainsi, au fil du temps, il semblerait
que la langue ait perdu une de ses fonctions qui est la transmission. Que ce soit une observation, une
croyance, un savoir, l'information circule ici à travers le nom de la plante. Si le nom se perd, la
particularité de la plante tombe aussi dans l'oubli. Mettant en scène des parlers principalement
oraux, de nombreuses connaissances ont aujourd'hui disparu car elles n'ont pas été échangées.
L'essentiel et le nécessaire, afin de conserver ce patrimoine est donc de restituer un maximum de
noms, tout en s'interrogeant sur le sens et la valeur d'une telle nomination.
68
Rapport de stage
GRANDCHAMP Charline
21209313
SERVICI (S) : descripcion del luòc e del ròtle del (s) servici(s)
112 Id
113 Cf. site internet www.museum.toulouse.fr rubrique : Le muséum
69
personnages qui y ont contribué, mais aussi l'origine de ses collections. Il a donc conscience
de son identité et ne renie pas son appartenance régionale. Enfin, il est un lieu de
conservation et de sauvegarde du patrimoine scientifique. Il se doit donc de garder dans ses
archives tout objet, œuvre, ouvrage provenant d'un don ou d'un achat, qui ait un rapport
avec l'histoire naturelle ou les personnages qui ont contribué à ces recherches. De plus, la
documentation de ces fonds est une tâche que le Muséum prend grand soin de remplir, car
elle constitue un savoir important à la compréhension de certains objets et à la transmission
de n'importe quelle découverte.
En ce qui concerne les différents services, ayant plutôt été autonome au cours de
mon stage, j'ai donc eu à faire à plusieurs services sans vraiment y être intégré. Que ce soit
le service de conservation en botanique, la documentation ou encore, le développement du
muséum, pour lequel François Gurtler est responsable, j'ai surtout eu un regard extérieur sur
leurs différentes missions. J'ai néanmoins pu observer la vie interne d'une telle institution,
avec son organisation, ses objectifs et les contraintes qui y sont liées.
70
fond d'archives, mettre en évidence cette langue dans le sein de l'établissement.
Une autre mission m'a été confiée, que je n'ai néanmoins pas eu le temps de remplir
entièrement, il s'agissait de la retranscription des fiches au format numérique. Plusieurs
questions se sont alors imposées à moi : Que faire des fautes d'orthographe, des ratures, des
mots incompris ou dont je n'étais pas sûre, etc. ? J'ai donc pris le parti de rester la plus
fidèle possible aux fiches et de les retranscrire mot pour mot. J'ai seulement pu travailler les
premières catégories de fiches qui allaient de A à C.
71
Enfin, il m'a fallu faire preuve d'esprit de synthèse afin de sélectionner les données
les plus importantes et le plus intéressantes, ce qui est bien souvent frustrant. En effet,
s'agissant avant tout d'un travail de mémoire, j'ai essayé de ne pas trop m’étendre et de
rester proche de ma problématique.
Ce stage m'a permis de me rendre compte de la satisfaction que l'on peut trouver
dans la recherche, que ce soit dans l'étude d'un fond d'archives ou dans sa documentation.
L'idée de mon projet m'est en fait venue au cours du stage, ce qui fait que j'ai pu orienter
mon travail et finalement mes missions vers la création d'un livret.
J'ai toutefois pu me rendre compte de la difficulté qu'il peut y avoir à convaincre de
l'utilité et surtout de l’intérêt d'un tel projet. Que ce soit pour collecter de nouvelles
informations ou tout simplement pour faire connaître ses recherches, le milieu scientifique
et même universitaire émet souvent des réticences face à l'application de la langue occitane
dans cette matière. Beaucoup ne comprennent pas vraiment l'enjeu ou même peuvent
paraître suspicieux. Il s'agissait néanmoins d'un bon exercice qui m'a permis de m’entraîner
à défendre mes convictions et mon travail.
Enfin, grâce à ce stage j'ai pu plonger dans un univers que je connaissais très peu,
celui de la botanique. J'ai aussi rencontré de nombreuses personnes passionnées, allant de
jardiniers du jardin botanique à des botanistes amateurs ou professionnels. Il était
intéressant de faire le lien entre leurs connaissances scientifiques et celles que j'avais
mobilisées en occitan. De vrais moments d'échanges et de partages en ont découlé qui
montrent aussi que le savoir ne sert que s'il est transmis. Ce stage a vraiment été pour moi le
moyen de me confronter à une institution aussi importante dans le milieu culturel
toulousain et surtout d'explorer une matière qui finalement au-delà de scientifiques, a aussi
passionné de nombreux linguistes et gens de lettres.
72
Bibliographie
Georges Gaubert
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société d’histoire naturelle de Toulouse, tome 114,1978, pp. 71-82.
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librairie Édouard Privat, 1914.
GODOLIN Pèire, Œuvres de Pierre Goudelin, collationnées sur les éditions originales
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73
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XAVIER de FOURVIÈRES (pseud. complet de Xavier Rodolphe Albert RIEUX). Lou pichot
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Muséum
GASTON Astre, Le muséum d’histoire naturelle de Toulouse : son histoire. Muséum d’histoire
naturelle de Toulouse, 1949.
77
Annexes
Annexe 1 : Lexique
Botanique : Subst. Fém. et adj.
Science qui a pour objet l'étude des végétaux.
Définition CNRTL.
Toutefois, il semble que cette science ait connu de nombreux changements depuis son
origine, notamment en ce qui concerne son objet d'étude. La notion de « monde végétal » et ce qui
le constitue est en réalité ce qui a le plus évolué. Ainsi, le démontrent Sophie NADOT et Hervé
SAUQUET dans leur article « Botanique contemporaine » :
« Le terme botanique a longtemps été synonyme de science des plantes. Ce n'est plus le cas
aujourd'hui où seules les disciplines qui concernent la systématique, le développement, l'évolution
et l'écologie des végétaux continuent de définir la botanique. Les autres branches que sont la
physiologie et la génétique des plantes sont regroupées sous le terme général de biologie végétale
(plant sciences en anglais). Le domaine d'application de la botanique, traditionnellement vaste, s'est
aussi restreint. En effet, les champignons ne font plus partie du monde végétal. Ces organismes,
plus apparentés aux animaux qu'aux plantes du point de vue évolutif, forment désormais un groupe
à part (les mycètes ou Fungi) et la science qui les concerne est appelée la mycologie. De même,
dans la pratique, l'étude des algues (dont une partie seulement appartient aux plantes vertes) est
exclue de la botanique. On parle plutôt de phycologie. Ainsi, la botanique et les botanistes se
concentrent aujourd'hui sur les plantes terrestres (ou embryophytes), vaste groupe d'organismes
rassemblant toutes les espèces de mousses, fougères, gymnospermes (ou plantes à graines nues) et
angiospermes (ou plantes à fleurs). »114
Botaniste : Subst
Personne qui étudie la botanique ou qui s'y intéresse. Synon. Herborisateur.
Définition CNRTL.
Fissipède : Adj
[En parlant de certains quadrupèdes] Qui a les pieds divisés en plusieurs doigts ou parties.
Anton. solipède.La troisième [série de gibier] est plus connue sous le nom de venaison; elle se
compose du sanglier, du chevreuil et de tous les autres animaux fissipèdes (Brillat-Sav., Physiol.
goût,1825, p. 87).
− Emploi subst. masc. Le chien est un fissipède (Ac.1932).
Définition CNRTL
Herboriste : subst.
Personne habilitée à vendre des plantes médicinales.
Définition CNRTL
Le diplôme d'herboriste a été supprimé le 11 septembre 1941 par le gouvernement de Vichy
et n'a pas été recrée depuis.115
78
avant tout à l'histoire naturelle. Il fait l'inventaire et l'étude des « êtres naturels116 », c'est-à-dire des
animaux, des végétaux et des minéraux. En tant qu'étude de la flore, la botanique fait donc partie de
ces objets de recherches. Il faut savoir que le terme de naturaliste est apparu en 1527 à partir du
latin naturalis et du suffixe -iste. Il désignait dès cette époque, le spécialiste d'histoire naturelle mais
aussi la personne qui suit ses instincts naturels. Au XVIII e siècle et au début du siècle suivant, le
terme désignait plutôt toute personne chargée de récolter des spécimens d'histoire naturelle et aussi
celle qui en faisait commerce. Le mot a été largement utilisé jusqu'au XIX e siècle avant d'être peu à
peu remplacé par les termes spécifiques des différentes disciplines. D'autre part, le XIXe siècle est
une période de vulgarisation scientifique. En effet, les premiers éditeurs étaient soucieux de
répandre des savoirs et de publier des ouvrages populaires. Ainsi, de nombreuses flores se sont
succédé et sont devenues de véritables guides du botaniste. Toutefois, la forte production d'ouvrage
scientifique est aussi dû à un soucis de rentabilité. En effet, derrière les nobles causes d'instruction
du peuple et de formation du citoyen, un véritable marché est né117.
Solipède : Adj
[En parlant d'un animal] Dont le pied n'a qu'un seul doigt doté d'un sabot. Synon.
monodactyle, ongulé; anton. fissipède, polydactyle.Le cheval solipède nage avec grace et
longtemps; mais le bœuf et le porc traversent les eaux avec encore plus de vigueur (Bern. de St-P.,
Harm. nat., 1814, p. 190).
Définition CNRTL
79
Annexe 2
80
81
82
Annexe 3 :
En effet, le 24 août 1920, il épouse Marcelle Lormand et de cette union naîtrons deux
enfants Raymonde (dates inconnues) et Jacques Jean François Gaubert, le 03 avril 1926122.
Le Docteur Gaubert semble être un érudit, comme il en était durant le XIX e siècle, mais qu'il
a finalement peu connus. Naturaliste, pyrénéiste, occitaniste, il s’intéressait à tout et tentait de lier
ses différentes passions.
Curieux de tout, attentif et méthodique, d'un grand brio intellectuel,
d'un raffinement subtil, d'une mémoire étonnante,
Ainsi le définit son fils, dans un article de l'Auta de 2008. 123 Passionné de nature et de botanique, il
publiera plusieurs ouvrages à ce sujet comme Un canoë passe en 1934. Pour lui la nature se vit, se
83
ressent. C'est ce qui semble ressortir de ce livre, dont une partie fut publiée dans le Midi socialiste
du 19 août 1934. Il éditera ensuite en 1939, Un grand pyrénéiste, Jean Arlaud, à la suite du décès
tragique de son ami, lors de l'ascension du pic des Gourgs-Blancs, dans les Pyrénées. En 1950 paraît
Canoë quand même !, faisant échos à son premier ouvrage. Il y exprime toute sa passion pour les
rivières et la navigation fluviale. Il signale d'ailleurs :
Je m'amuse parfois à dire, non sans quelques conviction que je suis
un « homo fluviaticus »124.
Georges Gaubert semble bien avoir un rapport particulier avec la nature et surtout celle de sa
région. Il entre à la Société d'Histoire Naturelle de Toulouse en 1963 et deviendra président de 1969
à 1970.
Pratiquant l'occitan depuis l'enfance, cette langue lui tient à cœur. Au même titre que Noulet
un siècle auparavant, il veut lui rendre ses lettres de noblesse et changer cette vision péjorative, d'un
langage malsonnant, confus et obsolète. Il effectuera plusieurs conférences au sein de cette société,
qui tourneront autour de cet idiome et de son rapport avec les sciences naturelles : « Noms
vernaculaires occitans de quelques oiseaux et mammifères de notre région. » en 1967, « Précision et
incertitudes sur les noms occitans des plantes. » en 1969, « Faut-il sauver les noms occitans des
plantes ? » en 1970, « Quelques champignons de la région toulousaine et leur nom languedocien. »
en 1975, « Petites devinettes botaniques et occitanes. » en 1977125. Ainsi, la reconnaissance de
l'occitan comme langue à part entière, qui peut toucher tous les sujets, même les plus scientifiques,
l'habite.
De ce fait, il fera paraître en 1978 l'article : « Noms des plantes dans de vieilles flores du
Midi de la France 126». Cet écrit vise tout d'abord à promouvoir la langue et à montrer dans le détail
sa richesse et sa profusion. Tout un travail de recherche avait été fait au préalable. Notamment à
travers la conception de fiches127, sur lesquelles il avait recensé une bonne partie des plantes de la
région et avait donné plusieurs traductions occitanes. Fouillant les dictionnaires aussi bien que la
littérature, il réussi à trouver plusieurs explications concernant la nomination des plantes. Mêlant
ses expériences personnelles et ce qu'il a pu lire, le travail qui en ressort en d'autant plus fourni.
Néanmoins, il n'ira pas plus loin dans ses recherches. Malgré la volonté que son travail
inspire, comme il le dit :
124 G. Gaubert, Canoë quand même !, Havas, Toulouse, 1950, p. 138
125 Comptes rendus des activités de la société d'Histoire Naturelle de Toulouse de 1967 à 1977.
126 Bulletin de la société d'histoire naturelle de Toulouse, Tome 114. Publié sous les hospices de l'université de
Toulouse, avec le concours du conseil générale de la Haute-Garonne et de la ville de Toulouse. Imprimerie du-champ-de
mars, Toulouse, 1978. p. 31- 41
127 Conservées au Muséum d'Histoire Naturelle de Toulouse
84
des recherches pluridisciplinaires dans lesquelles comme « la treille
où le pampre à la rose s'allie » (El desdichado), botanique et
linguistique devront se donner un mutuel et constant et très efficace
appui.128
il n'y aura pas de suite. Aujourd'hui, le Muséum conserve ses fiches, plus que précieuses, pour qui
voudrait prolonger son travail.
Son admiration pour le monde paysan et les petits métiers est considérable. Il y voit
finalement une approche de la nature plus respectueuse et harmonieuse, source d'une grande liberté.
Ainsi, il s'exclame :
Cette rusticité que les paysans sont en train de perdre, ne la sous-estimez
pas ![...] Vivre de rien, c'est le secret de la plus merveilleuse liberté... .129
Le Docteur Gaubert décédera le 26 septembre 1992, à l'âge de 98 ans, laissant derrière lui
l'âme d'un occitaniste amoureux de sa région, de sa culture et de son patrimoine.
128 P 41 de l'article « Noms des plantes dans de vieilles flores du Midi de la France »
129 G. Gaubert, Canoë quand même ! Havas, Toulouse, 1950, p. 138
85
Acte de naissance
Acte de décès
86
Coupures de presse
Médaille d'honneur
87
Bibliographie de Georges Gaubert, suivie d'une référence de son fils, Jacques
Noms de plantes dans de vieilles flores du midi de la France. Bulletin de la société d'histoire
naturelle de Toulouse, Tome 114. Publié sous les hospices de l'université de Toulouse, avec le
concours du conseil général de la Haute-Garonne et de la ville de Toulouse. Imprimerie du-champ-
de mars, Toulouse,1978.
GAUBERT. J, Les petits métiers toulousains, L'Auta : que bufo un cop cado més : organe de la
société les Toulousains de Toulouse et amis du vieux Toulouse / gérant P. Mesplé (s.n.),Toulouse
2008
NB : Cette bibliographie est certainement incomplète, car au vu de la qualité et de la quantité de son travail,
le Dr Gaubert a dû écrire bien d'autres textes qui me restent aujourd'hui inconnus. Néanmoins, grâce à cet
échantillon, ainsi qu'aux titres de ses différentes conférences, on comprend son grand intérêt pour les
sciences d'Histoire Naturelle et la nature tout simplement, qu'il pratique à travers différentes expériences,
quelles soient sportives ou littéraires.
130 Dont une partie est parue dans le Midi Socialiste du dimanche 19 août 1934, 26ème année, n° 9.293. Un article
commente aussi cet ouvrage, « Tourisme nautique et conférence du Dr Gaubert », parut dans le Midi socialiste de 1938,
30ème année, n°10.256.
88
Article sur Un canoë
passe...
89
Annexe 4 :
1894 - 20 octobre, naissance de Georges Jean Guillaume Gaubert de Pierre Alphonse Gaubert et
de Rose Irma Rouquié
1916 - 23 mars assure l'évacuation de 82 blessés sous les tirs de l'artillerie ennemie
- reçoit la croix de guerre, la légion d'honneur et la médaille militaire
1968 - Id
1969 - Président
- 21 mai. Communication M. Gaubert : « Précisions et incertitudes sur les noms occitans des
plantes. »
1970 - Id
- 4 février. Communication Dr Gaubert : « Faut-il sauver les noms occitans des plantes ? »
90
1974 - Membres élus du conseil d'administration : Id
1978 - Article : « Noms des plantes dans de vieilles flores du Midi de la France. »
1979 - Membres élus du comité de publication : MM. Gaubert, Rivals, Morquer et Melle Sudre
1980 - Membres élus du comité de publication : MM. Gaubert, Morquer et Melle Sudre
1982 - Membres élus du comité de publication : MM. Gaubert, Morquer et Melle Sudre
1991 - Conseil d’administration : MM. Pulou et Mirouse, Melles Sudre, De Ferré, Mme
Segonzac, MM. Campan, Gaubert, Dupias, Carles, Crouzel, Taillefer
1992 - Conseil d’administration : MM. Pulou et Mirouse, Melles Sudre, De Ferré, Mme
Segonzac, MM. Campan, Gaubert, Dupias, Carles, Crouzel, Taillefer
- 26 septembre décès du Docteur Georges Gaubert
- 29 septembre célébration des obsèques
91
Annexe 5 : Première fiche
92
Annexe 6 : Dernière fiche n°116
93
Annexe 7 : Petit texte sur Jean SANEGRE
Botaniste amateur et locuteur occitan, Jean Sanegre est originaire de l'Aude. Étant petit il a
beaucoup entendu sa famille parler la langue, surtout le languedocien de Carcassonne et du
Lauragais, sans toujours bien comprendre de quoi il s'agissait. Au moment de ses 15 ans, il décide
alors de prendre des cours d'occitan au lycée, ce que son père lui interdit. Toutefois, ne voulant pas
rompre avec ses racines, il décide de s'acheter le dictionnaire Occitan-français d'Alibert et une
grammaire afin d'apprendre tout seul. Il commence ensuite à prendre en notes les mots qu'il
entendait de ses parents et grands-parents et se constitue lui-même un petit vocabulaire, ce qui lui
permet aujourd'hui de parler la langue. C'est ensuite à travers Joan Bodon et Andrieu Lagarda entre
autre, qu'il s'est plongé dans la littérature occitane, ce qui lui a permis d’apprécier toute la poésie de
la langue.
Plus tard, il fera une licence de biologie et géologie à la faculté. Par le biais de l'armée, il a
ensuite été envoyé en côte d'Ivoire où il a enseigné les sciences naturelles pendant 8 ans au collège
et au lycée. Lorsqu'il est rentré en France, il a passé les concours de l'administration française et a
ensuite travaillé à la poste pendant 20 ans, au service de la distribution du courrier à Paris.
Néanmoins, à chaque printemps il rentrait dans l'Aude car c'est la saison où l'on peut observer le
plus de plantes dans sa région. Il a toujours gardé cette passion pour la botanique et tout comme
l’occitan s'est formé tout seul, grâce aux flores et à l'observation des espèces. Aujourd'hui il fait des
sorties botaniques dans le cadre de la SESA (Société d'Etudes Scientifique de l'Aude) et à pour
projet avec d'autres collègues de recenser toutes les espèces qui poussent dans sa région. Son regret
aujourd'hui est de ne pas avoir mieux écouté plus jeune les paroles des anciens et d'être passé à côté
de nombreuses nominations de plantes. Toutefois, il a réussi à en retenir une dizaine, qu'il explique
parfois lors de ses sorties à ses collègues ou aux quelques curieux, friands d'anecdotes.
94
Annexe 8 : Fiche supplémentaire au dos de la fiche n° 26
Recto
95
Verso
J'ai eu beau chercher dans mes fiches, notes, listes et dictionnaires, je n'ai rien trouvé
concernant fuelha dé boc (orthographe actuelle). J'ai repris alors vos données : un arbuste à fruits
noirs utilisé par les bûcherons contre les blessures.
Arbustes à fruits noirs : Sur etc
Le terme de boc indique très probablement une odeur forte désagréable (Ex Loroglosse à odeur de
131 Vulnéraire, du latin vulnerarius désigne de manière générale ce qui est propre à la guérison des plaies ou des
blessures.
132 L’orchis bouc, (Himantoglossum hircinum), est une orchidée terrestre européenne. On l'appelle parfois
loroglosse à odeur de bouc (Loroglossum hircinum).
96
bouc). Le seul de tous ces arbustes qui soit désigné dans la liste de pudis133 est le viorne lantane ou
mancienne.
Il est convenu, ses feuilles duveteuses, assez grandes peuvent servir de pansement. Un
Viburnum prunifolium étranger est utilisé contre les troubles veineux.
Le seul nom pouvant faire allusion à des propriétés hémostatiques est Senguelh en pays Foix
( Dict Alibert) (couleur pourpre à l'automne ?)
D'autres noms rappellent l'utilisation pour lier les fagots : estiro bielho, reblehigue qui sert andortos
(liens)
7 ou 8 noms différents restent pour moi inexplicables Mate et Mat de maï, Atatié, tassigné,
volinie, reblébigué et Higuerasso, Tammargue
Ravissano
Tassigné = viorne------------Boiss
Atatie 0 ---mat- maï 0
Ravissano = viorne des boucs (largues feuilles)
133 Cf E. Jolibois, « Revue historique, scientifique et littéraire, du département du Tarn », Nouguiès, imprimeur-
libraire, Albi p 63 « Le territoire de Frejairolles à 1,742 hectares, dont 787 de terres labourables, 146 de près, 215 de
vignes et 325 de bois. Il est arrosé par plusieurs ruisseaux : Le Jauson, Le Pudis, le Secaleux, etc. ; »
97
Annexe 9 : Premières lignes du tableau récapitulatif des annotations de Gaubert dans ses fiches fait sur
Excel
Larix (latin)
1 Abiétacées Mélè (provencale 13) apparaît dans la Calendal de Mistral chant VII
https://fr.wikipedia.org/wiki/Larix
Acer campestre
Érable champêtre En 40 (Landes) auserole= pulmonaire
Auzerol (31-AD)
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89rable_champ%C3%AAtre
Acer Monspessulanum
Erable de Montpellier
Agar (82) Bayr (= Bayrou) II p105
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89rable_de_Montpellier
3 Acéracées
Dans la revue forestière (1977 n°2)
Acer pseudoplatanum (page 145)
Aias (13) http://www.jannieuwesteeg.nl/fr/shrubs-trees-a-z/319-
acer-pseudo-brilliantissimum.html
98
Commentaires généraux Légende
99
Annexe 10 : Poème de Mistral
100
Annexe 11 : p 283 de la revue de Comminges
101
Annexe 12 : Fiche supplémentaire regroupée à le fiche n°18
102
Dans Pi Tr (??) carestié = cherté / amour
Pour Lagr Fors 82
J. Seguy
Carista = ivraie enivrante
Ax. Duboul
Curieusement, un interlocuteur de Ste Marie de Campan, donne à Séguy pour lolium temul.
(temulentum) Pa bi kar karestya. Faut-il traduire : pain, vin, viande, cherté ou plutôt (amour), bonne
vie.
Mais, si pour Doujat, car = viande
cher (coûteux)
char
Boissier donne car
= viande
caru
103
Annexe 13: Fiche supplémentaire groupée à la fiche n°74
Recto
Verso
Un vieux manuscrit béarnais, dit de Sangué donne pour remède contre le muguet (maladie des
bébés, sorte de levure qui se développe dans la bouche), neuf pousses de « huste noir » (qui serait le
troène ??) dans une écuelle de bon vin blanc. Huste = fust = pièce de charpente (rues de la Fusterie,
fustier = charpentier. Jamais un troène si développé fut-il n'a pu servir de pièce de charpente. Fustet
existe (voir au dos) mais c'est un arbre méditerranéen.
(Dos de la fiche)
Fustet = Cotinus (Méditer) Coccygia / Arbre à perruques
Anacardiacées 637
Pistacia lentiscus
térébinthus - Htes Pyrénées
vèra
104
Annexe 14 : Retranscription de la toute première fiche
Pinus silvestris
Pinus pinea
Pigné Tou Al donne pinastre
Pi roïg botaniquement erroné.
Pin méteh 40 (Pin frane) Pin parasol
Pigné 82-30-AD pignon
Pi bort } 66
Piniè 82 -(?)-Far Pinassa
Pi 66
Pi de pinyas 66 Pinus uncinata
Pignon 13 P à crochets
Pin pignoun 83
Pinhier 34-H-Al Pi vert 66
Piguié 13
105
Annexe 15 : Carte de l'Occitanie
134
Carte des différents dialectes d'Occitanie, Université Paul-Valéry, Montpellier 3
106
Annexe 16 : Contrat de prestation photographique
107
Les photos seront envoyées dans la semaine suivant la réalisation de la
prestation sur un lien de partage de fichiers en ligne.
Les commandes de tirages photo peuvent être adressées au Photographe
pendant une durée de 6 mois suivant la réalisation de la prestation. À compter
de sa réception, la commande sera traitée dans un délai de 15 jours.
Les réclamations éventuelles pourront être adressées par lettre recommandée
avec demande d'avis de réception dans un délai maximum de 7 jours ouvrables
à compter de la réception de la commande.
V. Conditions
Le présent contrat sera résolu de plein droit, après une mise en demeure par
lettre recommandée avec demande d'avis de réception restée sans effet
pendant une durée de 7 jours en cas de non-respect de l'une des conditions
stipulées aux présentes.
VII. Élection de domicile
Pour l’exécution du présent contrat les parties font élection de domicile aux
adresses indiquées en tête des présentes et s'engagent à informer l'autre
partie de tout changement de coordonnées.
Prénom et nom du Client Prénom et nom du Photographe
Signature Signature
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