Vous êtes sur la page 1sur 10

See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.

net/publication/350131348

Les fractures bimalléolaires vues au CHU Joseph Ravoahangy Andrianavalona

Article · March 2011

CITATIONS READS

0 783

7 authors, including:

Raherinantenaina Fanomezantsoa F. M. Ralahy


University of Toamasina, Madagascar University of Fianarantsoa
37 PUBLICATIONS   81 CITATIONS    44 PUBLICATIONS   26 CITATIONS   

SEE PROFILE SEE PROFILE

Alexandrio Z. L. A. Rabemazava A.H. Rambel


Faculté de Médecine d'Antsiranana 13 PUBLICATIONS   10 CITATIONS   
32 PUBLICATIONS   644 CITATIONS   
SEE PROFILE
SEE PROFILE

Some of the authors of this publication are also working on these related projects:

Place and limits of orthopedic correction of club feet in children of walking age View project

project View project

All content following this page was uploaded by F. M. Ralahy on 18 March 2021.

The user has requested enhancement of the downloaded file.


Médecine
d’Afrique Noire
Juin 2012

Les fractures bimalléolaires vues au


CHU Joseph Ravoahangy Andrianavalona
1. Chirurgie générale,
F. RAHERINANTENAINA¹, M.F. RALAHY², A. RABEMAZAVA², A.H. RAMBEL³, CHU Joseph Ravoahangy
T.M.A. RAJAONANAHARY4, G.D. SOLOFOMALALA5, H.J.C. RAZAFIMAHANDRY² Andrianavalona (CHU-
JRA), Antananarivo,
Madagascar
2. Chirurgie orthopédique
Résumé et de traumatologie, CHU-
JRA, Antananarivo,
Les fractures bimalléolaires viennent au troisième rang, après les fractures de l’extrémité inférieure du Madagascar
3. Chirurgie urologique,
radius et les fractures de l’extrémité supérieure du fémur. Elles menacent la cheville d’arthrose post- CHU-JRA, Antananarivo,
traumatique à long terme. Madagascar
Nous rapportons une analyse rétrospective de 100 patients, étalée sur une période de trois ans (2008- 4. Chirurgie vasculaire,
CHU-JRA, Antananarivo,
2010). L’âge moyen des patients était de 50 ans avec un sex-ratio de 1,5. Les étiologies étaient
Madagascar
dominées par les accidents de la voie publique et les chutes. Selon la classification de Weber, le type C 5. Chirurgie orthopédique
était prédominant avec 60% des cas. Un diastasis tibio-fibulaire était noté dans 13% des cas. Le et de traumatologie, CHU
fragment marginal postérieur souvent associé à une lésion de type C était noté dans 10 cas. de Fianarantsoa,
Madagascar
L’enfoncement ostéochondral recherché sur des radiographies standards était observé dans 7 cas. Une
subluxation tibio-talienne était observée dans 24 cas. L’ouverture cutanée était notée dans 7% des
cas. Le traitement orthopédique a procuré un résultat satisfaisant dans 80% des cas, alors que le trai-
tement chirurgical avait donné 90% de bons résultats. Cinq patients présentaient une arthrose post- Mots-clés :
traumatique avec un recul moyen de douze mois. Cette arthrose s’était développée chez des patients Fractures, cheville,
qui présentaient une lésion type C de Weber associée à une luxation, un enfoncement ostéochondral et bimalléolaire,
à une ouverture cutanée. équivalent,
La comparaison de nos résultats aux données de la littérature, confirme le bon fondé du traitement traitement
chirurgical. Toutefois le traitement orthopédique garde une place importante dans la prise en charge
de ces fractures.

Abstract
Bimalleolar fractures at Joseph Ravoahangy Andrianavalona teaching hospital

Bimalleolar fractures rank third after lower radius fractures and above femur fractures. Those fractures
gave post traumatic arthrosis in long term result.
We reported a retrospective analysis of 100 medical records after a follow up of three years (2008-
2010). The average age was 50 years with a sex-ratio of 1,5. Road accident is the most frequent
cause, and fall ranks second. In Weber classification, the stage C was the most predominant with 60%. Keywords:
13% of the patients have tibio-fibular diastasis, 10 patients have posterior fragment along. Seven Fractures,
patients have osteochondral depression, 24 have astragalo-tibila dislocation. Open ankle fracture was ankle,
noted in 7% of the cases. Result after conservative treatment was satisfactory in 80% of the cases ; bimalleolar,
Surgical result was good in 90% of patient Five patients present post traumatic arthrosis with an equivalent,
average highsight of 12 months. This arthrosis was in patients with dislocation ankle fracture, treatment
osteochondral depression and open fractures.
The result comparison with literature confirms the importance and the interest of surgical and
orthopedic treatment. However, orthopaedic treatment must be reserved in management in these
fractures.

Copyright © 2012 APIDPM Santé tropicale. Tous droits réservés.


• Les fractures bimalléolaires... •

Introduction Les fractures bimalléolaires correspondent à l’Hôpital Joseph Ravoahangy Andrianavalona,


des fractures qui désorganisent la pince mal- Antananarivo-Madagascar, étalée sur une
léolaire, tout en respectant le rôle de susten- période de trois ans, allant de janvier 2008 à
tation du pilon tibial. Leur fréquence ne cesse décembre 2010. Ces patients ont été tous sui-
d’augmenter et ceci est en rapport avec l’aug- vis jusqu’au terme de leur évolution. Les dos-
mentation des accidents de la voie publique. siers ne comportant pas de radiographie de
Beaucoup de progrès ont été faits dans ce contrôle ont été exclus de cette étude. La
domaine où les conceptions de classification, consolidation osseuse était considérée comme
de mécanisme et de traitement sont en perpé- acquise sur le plan clinique quand l’appui total
tuelle évolution. C’est ainsi que la tendance sans appréhension était possible sur le mem-
thérapeutique évolue vers le traitement chirur- bre fracturé. La consolidation radiologique
gical au détriment des méthodes orthopédi- était évaluée séparément, et considérée com-
ques. me acquise devant la disparition totale du trait
Le but de notre travail portant sur 100 obser-
de fracture ou de pseudarthrose. La survenue
vations était de préciser les caractéristiques
de complications obligeant à une intervention
épidémiologiques, d’évaluer les résultats à
chirurgicale était considérée comme un échec
long terme concernant les deux modalités thé-
du traitement orthopédique. L’évaluation de
rapeutiques, afin de mieux expliquer cette
nos résultats thérapeutiques était basée sur la
tendance thérapeutique vers les méthodes
classification de Vidal qui tient compte les élé-
chirurgicales.
ments radio-cliniques. Les patients étaient
revus régulièrement avec un recul moyen de
Matériels et méthodes
12 mois.

Dans notre étude, nous nous sommes intéres-


Résultats
sés aux fractures bimalléolaires et à leurs
équivalents. Il s’agissait d’une étude rétros-
pective de 100 cas, traités dans le service de L’âge moyen des patients était de 50 ans (15-
chirurgie orthopédique et de traumatologie de 85 ans). Le sexe masculin était touché dans
60 cas (60%) et le sexe féminin dans 40 cas
Figures 1 : Fracture bimalléolaire de type Weber C : opérée (40%) avec un sex-ratio de 1,5. Les accidents
de la voie publique représentaient 53% des
étiologies. Dans 20 cas (20%) le mécanisme
de ces fractures bimalléolaires était direct.
Selon la classification radiologique de Weber
basée sur la hauteur du trait fibulaire par rap-
port à la syndesmose, le type C était le plus
fréquent avec 60 cas soit 60% (figure 1).

Douze patients de notre série avaient présenté


un diastasis tibio-fibulaire (12%). Dix fractures
(10%) étaient accompagnées d’un fragment
marginal postérieur avec 50% concernant le
type C. Sept patients (7%) présentaient un
enfoncement ostéo-chondral dont un cas sur
deux présentait un enfoncement antéro-

328 • Médecine d’Afrique Noire • 2012, Vol.59, N°6 •

Copyright © 2012 APIDPM Santé tropicale. Tous droits réservés.


• Les fractures bimalléolaires... •

Figures 2 : Equivalent de fracture bimalléolaire : opéré médial. Vingt-quatre cas présentaient une luxa-
tion tibio-talienne soit 24% et 4 cas d’équiva-
lent de fracture bimalléolaire (fracture de la
malléole latérale associée à une rupture du
ligament collatéral médial) (figure 2). Les
lésions cutanées étaient relativement fréquen-
tes, 7 cas étaient ouverts (7%) surtout type I.

Sur le plan thérapeutique, plus de la moitié des


patients était traitée dans un délai inférieur ou
égal à 48 heures après l’accident (55%). Le
traitement orthopédique concernait 80 patients
(80%). Vingt patients (20%) avaient bénéficié
d’un traitement chirurgical (figures 1, 2, 4),
parmi eux 7 avaient un traitement orthopédi-
que au début, mais l’existence d’un déplace-
Figures 3 : Fracture bimalléolaire de type Weber A.
ment secondaire sous plâtre nous a poussé à
Traitement orthopédique changer l’indication thérapeutique.

Nous avons eu comme complications : 2 cas


de sepsis dont 1 profond, 1 cas d’ostéo-
arthrite de la cheville avec nécrose cutanée
secondaire, 3 cas de pseudarthrose (1 cas
concernant la malléole médiale et deux cas la
malléole latérale) résultant d’un traitement
orthopédique. Nous avons noté 5 cas d’ar-
throse localisée post-traumatique. L’arthrose
était fréquente pour les fractures de type C et
les fractures avec enfoncement ostéo-chondral
et luxation tibio-talienne. Dans notre série,
nous avons noté 4 cas d’algodystrophie (4%).
Figures 4 : Fracture bimalléolaire de type Weber B : opérée
La majorité de ces patients avait subi une ré-
éducation insuffisante ou une immobilisation
prolongée.

Les meilleurs résultats étaient obtenus lorsque


le traitement est institué dans la semaine de
l’accident. Pour le traitement orthopédique, 60
patients de notre série parmi les 80 traités
orthopédiquement ont pu être évalués, les
résultats étaient bons dans 80% des cas.
Les résultats du traitement orthopédique selon
la classification de Weber (figures 3, 5)
(tableau I) étaient meilleurs pour le type A.
Le traitement chirurgical concernait 20 patients

• Médecine d’Afrique Noire • 2012, Vol.59, N°6 • 329

Copyright © 2012 APIDPM Santé tropicale. Tous droits réservés.


• Les fractures bimalléolaires... •

Figures 5 : Fracture bimalléolaire de type Weber B : traitement orthopédique

fractures de l’extrémité inférieure du radius et


les fractures de l’extrémité supérieure du
fémur. Elles intéressent le sujet jeune de sexe
masculin et sont souvent secondaires à un
accident de la voie publique. Les fractures
bimalléolaires ont fait l’objet de très nombreu-
ses classifications. Les plus utilisées se fon-
dent sur le siège du trait fibulaire par réfé-
rence aux ligaments tibio-fibulaires distaux et
sur les mécanismes lésionnels [2]. Pourtant
aucune classification aussi complète et comple-
xe soit elle ne peut permettre de caractériser
toutes les fractures. C’est pour cela que l’im-
pact thérapeutique de ces classifications n’est
avec 90% de bons résultats. Les résultats du pas toujours évident.
traitement chirurgical selon le type de fracture
sont rapportés dans le tableau II. La fracture bimalléolaire est une urgence. C’est
aussi une fracture articulaire portant sur une
Discussion articulation portante. Le but du traitement est
la restitution d’une anatomie articulaire par-
Les fractures bimalléolaires sont fréquentes faite, garant d’une récupération fonctionnelle
[1]. Elles viennent au troisième rang après les correcte dans l’immédiat et évitant l’arthrose

Tableau I : Résultats du traitement orthopédique selon la classification de Weber

Sous- Inter- Sus- Equivalent de


Résultats ligamentaire ligamentaire ligamentaire fracture Total
Weber A Weber B Weber C bimalléolaire

Bons 15 6 24 3 48
Acceptables 2 3 2 - 7
Mauvais - 1 4 - 5
Non évalués 3 2 15 - 20

Total 20 12 45 3 80

Tableau II : Résultats du traitement chirurgical selon le type de fracture

Equivalent de
Sous- Inter- Sus-
Résultats fracture Total
ligamentaire ligamentaire ligamentaire
bimalléolaire

Bons 1 3 13 1 18
Acceptables - - 2 - 2
Mauvais - - - - -

Total 1 3 15 1 20

330 • Médecine d’Afrique Noire • 2012, Vol.59, N°6 •

Copyright © 2012 APIDPM Santé tropicale. Tous droits réservés.


• Les fractures bimalléolaires... •

post-traumatique à long terme. Ce traitement avec appui. Nous avons l’habitude d’utiliser
peut être orthopédique ou chirurgical mais l’héparine de bas poids moléculaire (HBPM)
doit être méthodique. dans la pratique.

Le traitement orthopédique avec ou sans Si on envisage un traitement chirurgical, l’idéal


réduction du foyer fracturaire réclame la est d’opérer en urgence avant qu’un œdème
même attention que le traitement chirurgical. important ne s’installe ou que la persistance
L’objectif du traitement orthopédique n’est pas des déplacements n’aggrave l’état cutané, ce
la réduction exacte des foyers malléolaires qui n’exclut pas une préparation soigneuse.
mais la restauration et le maintien du centrage Plus ce délai s’allonge, plus le pronostic
du talus jusqu’à consolidation [1, 2]. Avant devient sombre. Un délai plus long de 2 à 3
d’entamer la réduction orthopédique, il faut semaines a été constaté [3]. Ceci est dû à la
traiter d’éventuelles lésions cutanées. La préparation locale de la peau.
réduction orthopédique doit être la plus pré-
coce possible. Même si la fracture était vue Le traitement chirurgical intéresse souvent les
tardivement avec œdème, la tentative de deux malléoles. L’ostéosynthèse de la malléole
réduction de la fracture et son maintien dans latérale est souvent abordée par une voie pré
un plâtre avec un anti-œdémateux est une ou rétrofibulaire en fonction des lésions
mesure prudente et bénéfique. Ceci permettra associées. Le compartiment latéral est abordé
au bout d’une semaine une reprise orthopédi- en priorité. La dérogation à cette règle s’im-
que suivie d’un plâtre ajusté sur un membre pose dans les fractures ouvertes en dedans
dégonflé. La réduction est faite sous anesthé- [2]. La voie d’abord directe se situe immédia-
sie générale ou locorégionale. Elle est obtenue tement en regard des foyers. Toutefois, il faut
souvent par la manœuvre de tire-botte en proscrire toute incision dans un secteur cutané
agissant directement sur les tissus mous. de vitalité douteuse et rester à une distance
Cette manœuvre est réalisable en utilisant de suffisante d’une telle lésion [2]. La réduction
plaques de feutres fixées soigneusement par doit être absolument parfaite afin de restaurer
des bandes autocollantes sur les reliefs osseux la longueur exacte de l’axe et la rotation de la
et sur les zones de réduction [2]. La réduction fibula. Par rapport au traitement orthopédique,
sera assurée par un plâtre cruro-pédieux bien la restauration isolée du centrage talien est
moulé, pied à 9° genou fléchi à 2°. Des insuffisante. La condition nécessaire et suffi-
radiographies de contrôle sont faites : à J0, sante est la réduction anatomique des mal-
J2, J7, J15, J21, J45, J60, puis chaque mois, léoles collatérales, des marges et de la syn-
dans le but de dépister d’éventuels déplace- desmose, de façon symétrique au côté contro-
ments secondaires. Elles sont effectuées sous latéral [2]. Il a été bien démontré que l’instal-
bottillon plâtré de face et de profil [2]. lation tardive d’arthrose chez certains patients
est souvent due principalement à une réduc-
Un plâtre bien moulé, suivi d’une surélévation tion imparfaite de la malléole latérale [4] et à
du membre inférieur pendant une semaine, un moindre degré la malléole médiale.
est habituellement bien supporté. Au 45ème L’ostéosynthèse par plaque vissée est privilé-
jour, le plâtre cruro-pédieux peut être transfor- giée sur le secteur latéral [2].
mé en botte à conserver pendant un mois. L’ostéosynthèse de la malléole médiale est
L’appui n’est habituellement autorisé qu’au préférentiellement abordée par une voie verti-
75ème jour de l’accident. Les anticoagulants cale au centre de la malléole ou mieux repor-
s’imposent jusqu’à la reprise de la marche tée vers l’avant pour donner une vue suffi-

• Médecine d’Afrique Noire • 2012, Vol.59, N°6 • 331

Copyright © 2012 APIDPM Santé tropicale. Tous droits réservés.


• Les fractures bimalléolaires... •

sante sur toute la longueur de la malléole. ration particulière et un respect des indications
Si du fait d’une comminution de la corticale thérapeutiques plus spécifiques pour certaines
médiale, le contrôle de la réduction est aléa- fractures. En cas de doute, la décision théra-
toire, une courte arthrotomie antérieure et peutique se fonde sur l’analyse de tous les
verticale, permet de vérifier la surface cartila- moyens de contention ostéo-ligamentaire du
gineuse. La contention sera assurée par deux talus à l’intérieur de la mortaise et l’évaluation
vis avec effet de rappel dont la direction est de la stabilité globale résiduelle, tout en
perpendiculaire au trait de fracture. sachant que l’attitude actuelle est de ne pas
réparer le plan capsulo-ligamentaire médial [2,
L’état de la marge postérieure peut être l’élé- 5]. Ainsi, le traitement orthopédique est
ment directeur de la tactique opératoire. Au préconisé pour les fractures peu ou pas dépla-
delà d’une perte de substance de 20% du pla- cées, les fractures vues au-delà de la 24ème
fond tibial, les contraintes exercées sur la sur- heure surtout si l’état cutané est médiocre, les
face articulaire restante du tibia sont probable- fractures ouvertes type I ou II vues au-delà de
ment excessives, ce qui aboutit à long terme à la 21ème heure, sujet âgé vu l’ostéoporose et
l’arthrose. L’ostéosynthèse se fait par vissage, sujet artéritique.
après relèvement et greffe de l’enfoncement
associé. Les contre-indications sont : les fractures à
En cas de syndesmose, une réduction adé- 3ème fragment postérieur de grand volume, la
quate de cette dernière est nécessaire pour plupart des fractures par adduction et les
assurer la stabilité de la cheville surtout lors grands enfoncements [1].
des fractures par supination-rotation latérale On obtient de bons résultats pour certains
et pronation-rotation latérale. BIGA [2] trouve types de fractures telles que les fractures par
que l’implantation d’une vis de syndesmose rotation et surtout intertuberculaires avec sim-
est inutile en raison du risque d’induction ple diastasis, les fractures par pronation si le
d’une pince étroite pouvant générer et accen- trait malléolaire n’empiète pas sur le pilon
tuer un conflit talo-fibulaire distal secondaire à tibial, les fractures hautes et complexes de la
une malréduction fibulaire. Cela justifie une fibula [1]. NIRMAL et al [6] pensent que le
reprise de la réduction du foyer fibulaire. traitement orthopédique d’épreuve est le seul
Dans certains cas une réparation ligamentaire moyen de juger la stabilité de certaines
s’avère indispensable. En effet, après une fractures bimalléolaires.
ostéosynthèse classique de la malléole latéra- Si la réduction obtenue est anatomique et s’il
le, une scopie est habituellement effectuée ne se produit aucun déplacement précoce le
pour visualiser le recentrage du talus dans la traitement orthopédique est mené à son
mortaise tibio-fibulaire. S’il persiste un écart terme.
entre le talus et la malléole médiale l’abord du
ligament collatéral médial devient nécessaire. A l’opposé, si la réduction n’est pas parfaite et
Dans ce cas là, il est souvent incarcéré dans s’il se produit un déplacement sous plâtre,
l’articulation par invagination. Sa désincarcé- l’épreuve orthopédique n’est pas poussée et
ration avec ou sans suture plus une immobili- l’indication opératoire est posée.
sation plâtrée, donne une cicatrisation et une En définitive, les indications opératoires repo-
stabilité médiale parfaite [5]. sent sur un principe simple et classique qui
veut que l’ostéosynthèse s’applique essentiel-
Le choix entre un traitement orthopédique et lement aux fractures instables. GAGNEUX et al
un traitement chirurgical mérite une considé- [4] pensent que le traitement orthopédique

332 • Médecine d’Afrique Noire • 2012, Vol.59, N°6 •

Copyright © 2012 APIDPM Santé tropicale. Tous droits réservés.


• Les fractures bimalléolaires... •

n’est pas être un traitement d’attente ou d’es- en théorie, n’est plus guère utilisé et tombe en
sai. Il ne doit pas être réalisé que si l’analyse désuétude [2].
de la fracture montre qu’il y a fortes chances De nombreux facteurs conditionnent le résul-
d’être définitif. Les radiographies de contrôle tat à long terme, les uns sont liés au terrain,
prises juste après réduction orthopédique les autres sont liés au type de fracture et à
doivent être extrêmement critiques et toute son traitement [8]. JOZ et al [9] sur une série
insuffisance de réduction doit conduire à la de 116 patients dont 80% traités chirurgicale-
décision d’une intervention immédiate au ment avec un recul moyen de 8 ans, ont trou-
cours de la même anesthésie. Ce qui est enco- vé 51% de bons résultats, 29% de résultats
re très difficile chez nous sur le plan pratique. satisfaisants et 20% de mauvais résultat.
Toutefois, l’analyse des échecs des traitements Ils ont pu estimer l’influence déterminante de
orthopédiques a révélé qu’ils étaient souvent la réduction initiale sur la qualité des résultats
l’effet d’une réduction insuffisante et non pas à long terme et l’apparition secondaire d’ar-
d’un déplacement secondaire. throse ainsi que le rôle de la fracture (gravité
Le traitement chirurgical est proposé d’emblée type C de Weber) et l’attitude thérapeutique
pour des raisons mécaniques dans les situa- (tableau III).
tions suivantes : fracture par rotation si le
fragment marginal postérieur est accessible à Ainsi les résultats peuvent varier selon le
l’ostéosynthèse, fracture par pronation si le mode de traitement. Pour le traitement ortho-
foyer de la fibula est comminutif ou s’il y a un pédique, 60 patients de notre série parmi les
enfoncement de la partie latérale du pilon ou 80 traités orthopédiquement ont pu être éva-
fracture par supination si le trait malléolaire lués, les résultats étaient bons dans 80% des
latéral vient aboutir sur le pilon tibial ou s’il y a cas. Ce taux est important parce que le traite-
un enfoncement médial du toit [7], ou pour ment orthopédique est essentiellement destiné
des raisons générales: fractures ouvertes aux fractures simples peu ou pas déplacées et
types I ou II de Cauchois vues dans les 6 pre- de type A (figure 1) ou B selon WEBER [10].
mières heures, polytraumatisé du membre
inférieur et au cours de la même anesthésie si Le traitement chirurgical ne doit souffrir d’au-
les radiographies de contrôle révèlent un cune imperfection [2] car un mauvais traite-
déplacement et une réduction insuffisante. ment chirurgical est plus grave qu’un mauvais
traitement orthopédique. Ceci a été clairement
Pour de multiples raisons, le traitement chirur- établi lors de la conférence de BIGA [11] qui a
gical est maintenant le moyen thérapeutique analysé à long terme 275 fractures bimalléo-
systématique des fractures de la pince mal- laires à partir de plusieurs centres français
léolaire. Le traitement orthopédique, possible [12]. Le traitement chirurgical, maintenant

Tableau III : Comparaison des résultats globaux

Nombre de Traitement Résultats (%)


Auteurs
cas évalués Orthopédique Chirurgical Bons Mauvais

Joz-Roland (9) 116 87 29 80 20


Musgrave (12) 118 72 46 84 16
Notre série 80 60 20 82,5 6,25

• Médecine d’Afrique Noire • 2012, Vol.59, N°6 • 333

Copyright © 2012 APIDPM Santé tropicale. Tous droits réservés.


• Les fractures bimalléolaires... •

appliqué systématiquement, doit respecter rareté des déplacements sous plâtre. Il a été
deux préceptes. L’impératif d’une réduction établi que les défauts de centrage talien sont
anatomique sans défaut et le rôle essentiel du presque toujours arthrogènes et que l’arthrose
plan de couverture cutané et de sa gestion à après traitement orthopédique évolue lente-
tous les stades de la prise en charge [2]. ment. Le traitement orthopédique est lourd,
mais le risque chirurgical n’est pas négligea-
L’arthrose post-traumatique de la cheville ble. Pour BIGA [2], ce dernier est actuellement
constitue sur le plan fonctionnel la compli- le mode de traitement quasi univoque parce
cation la plus redoutée de l’articulation de la que, en théorie, c’est le meilleur moyen d’ob-
cheville. Ses différentes causent ne se ratta- tenir la restauration exacte des surfaces arti-
chent pas uniquement au mode de traitement culaires : il ne nécessite pas de contention
mais aussi à l’âge des patients, à l’anatomo- postopératoire contraignante et surtout il dimi-
pathologie des fractures et aux lésions cuta- nue considérablement les impératifs de sur-
nées et/ou cartilagineuses associées. JOZ et al veillance postopératoire.
[9] ont étudié 116 cas de fractures bimalléo-
laires avec un recul de 6 ans. Ils ont répertorié
Conclusion
37% d’arthrose post-traumatique dont 34%
résultent après un traitement chirurgical. Ils
A travers cette étude rétrospective de 100
montrent la corrélation entre le type anato-
observations colligées sur une période de 3
mique de la fracture, la qualité de la réduction
ans, nous pouvons dire que le traitement ortho-
et l’évolution vers une arthrose. Ainsi, le type
pédique garde une place importante dans la
C est le plus souvent doté de mauvaise
réduction et donc d’arthrose, cette arthrose prise en charge de ces fractures. Toutefois, il
était tolérée chez 25% de ces patients [11]. ne saurait être réservé qu’aux lésions offrant la
garantie de consolidation avec un centrage
Dans notre série, nous avons noté 5 cas d’ar- talien parfait. Des indications éclectiques et une
throse (6,25%) pour un recul moyen de 12 prise en charge orthopédique correcte peuvent
mois. En 2006, LECERF avait rapporté une donner des résultats très satisfaisants (80%
série continue de fractures bimalléolaires trai- dans notre série). Le traitement chirurgical ne
tées orthopédiquement et suivies jusqu’à con- doit souffrir d’aucune imperfection dans sa
solidation et ayant au moins quatre ans de réalisation. Il doit être mené en urgence pour
recul [1]. Le protocole adopté reposait sur des les fractures de type C. Il nous a donné de
critères très précis : toute fracture bimalléo- bons résultats dans 90% des cas. Les facteurs
laire est traitée orthopédiquement de principe. pronostiques les plus importants sont : une
La réduction orthopédique a été jugée sur la lésion de type C de Weber, l’existence d’une
reconstitution de l’interligne et le centrage luxation tibio-talienne, d’un enfoncement ostéo-
talien (test de Skinner). L’étude a montré la chondral, et d’une ouverture cutanée.
Références

1. LECERF G. Technique et résultats du traitement orthopédique des frac- de pied et de leurs séquelles par enclouage transplantaire verrouillé. Acta
tures bimalléolaires. Rev Chir Orthop 2006 : 116-1. Orthopaedica Belgica 1997, Vol. 63, 4 : 294-303.
2. BIGA N. Chirurgie des traumatismes du pied et de la cheville. Lésions 5. STROMSOE K, HOQEVOLD HE, SKJELDAL S. The repair of a ruptured
récentes et anciennes de l’adulte. Techniques Chirurgicales-Orhtopédie deltoid ligament in ankle fractures is not necessary. J Bone Joint Surg
Traumatologie, Paris, Masson 2010. 1995; 77 : 920-921.
3. EUGENE J, ISONDARD. Early complications in the operative treatment 6. NIRMAL C. TEJWANI, TONI M. MCLAURIN, MICHAEL WALSH et
of ankle fractures. J Bone Joint Surg 1991; 73, 1: 79-82. coll. Are outcomes of bimalleolar fractures poorer than those of lateral mal-
4. GAGNEUX E., GERARD F. Traitement des fractures complexes du coup leolar fractures with medial ligamentous injury ? J Bone Joint Surg Am

334 • Médecine d’Afrique Noire • 2012, Vol.59, N°6 •

Copyright © 2012 APIDPM Santé tropicale. Tous droits réservés.


• Les fractures bimalléolaires... •

2007 ; 89 : 1438-1441. the pathologic anatomy of ankle fractures. J Trauma 1992 ; 32 : 65.
7. DELACAFFINIERE J.Y., FOURKL, HASS J. La fracture séparation- 11. BIGA N. Arthrose post-traumatique de la cheville. Facteurs étiologiques
enfoncement postérieur dans les fractures bimalléolaires. Rev Chir Orthop et prévisionnels. Bases thérapeutiques des fractures du coup-de-pied. In :
1990 ; 76 : 568-578. Conférences d’Enseignement de la SOFCOT 1987 ; 28 : 259-274.
8. BIGA N. Fractures malléolaires de l’adulte. Cahiers d’enseignement de la 12. EBRAHEIM N., MEKHAIL, GARGASZ. Ankle fractures involving the
SOFCOT. Conférences d’Enseignement 1993 : 71-80. fibula proximal to the distal tibiofibular syndesmosis. Ankle Inter 1992; 18,
9. JOZ-ROLAND P., KRITSKIS N., CYPRIEN J.M. Résultats à long terme 8: 513-520.
du traitement des fractures malléolaires. Rev Chir Orthop 1980 ; 66, 3 : 13. MUSGRAVE D., FRANKHAUSER R. Intra operative radiographic
137-182. assessment of ankle fractures. Clin. Orthop. Related. Research., 1998; 335:
10. MICHELSON J.D., MAGID, NEY D.R., FISHMAN E.K. Examination of 180-190.

Médecine d’Afrique Noire


sur internet

www.santetropicale.com/manelec/afo/index.asp

• Médecine d’Afrique Noire • 2012, Vol.59, N°6 • 335

Copyright © 2012 APIDPM Santé tropicale. Tous droits réservés.

View publication stats

Vous aimerez peut-être aussi