Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
PLANS DE TRAITEMENT
Restauration
prothétique
é
amovible totale
nt
après chirurgie
Sa
Coordination Jean Champion
d’exérèse d’un
es
MCU-PH, Toulouse
carcinome
tiv
basocellulaire
tia
F. DESTRUHAUT, F. DESTRUHAUT,
R. ESCLASSAN, A. HENNEQUIN,
i
Résumé
Les cancers de la lèvre, de la cavité orale et du pharynx se
situent, chez l’homme, au 5e rang des cancers incidents
masculins et, chez la femme, au 11e rang (rapport INCa,
In
C. DARROUY, P. POMAR
/
17
Situation du cancer en France en 2011). L’arsenal thérapeu-
tique actuel associe souvent chirurgie d’exérèse carcinolo-
gique, radiothérapie et chimiothérapie. Dans ce contexte,
lorsqu’une restauration prothétique endo-orale est envisa-
U ne restauration prothétique amovible complète
représente, dans un grand nombre de cas, un véri-
table défi thérapeutique pour le praticien qui doit
20
totale après chirurgie d’exérèse d’un carcinome basocellu- adaptation possible des futurs intrados prothétiques avec
laire. Cah Prothèse 2017;178:16-29. les surfaces d’appui fibromuqueuses jusqu’à l’obtention
d’une reconstruction occluso-prothétique de qualité. Le
succès de telles restaurations prothétiques émane directe-
ment d’un bon examen clinique, de la maı̂trise des différen-
©
EXPERTISE CLINIQUE
Les objectifs de cet article sont de mettre en exergue les
particularités cliniques inhérentes au contexte général et
local et liées à la chirurgie d’exérèse carcinologique, de
é
présenter les subtilités cliniques optimisant la réussite de
chaque étape thérapeutique et de proposer un schéma
nt
occlusal spécifique au contexte singulier du patient.
Sa
PRÉSENTATION DU CAS CLINIQUE
Anamnèse générale
Une patiente, Mme J., âgée de 92 ans, est venue consul-
es
ter dans le cadre hospitalier dans l’unité de prothèse
maxillo-faciale de Toulouse (fig. 1). Après avoir bénéficié
d’une chirurgie d’exérèse carcinologique, son chirurgien-
tiv
dentiste traitant avait tenté de réaliser des prothèses den-
taires et, face aux difficultés cliniques, avait fini par envoyer
la patiente en milieu hospitalier. Compte tenu du faible
tia
fig. 1 - Patiente reçue à la consultation de prothèse maxillo-faciale,
diamètre de l’orifice buccal, il avait réalisé des prothèses prise en photographie argentique réalisée à la chambre technique
amovibles atypiques et fragmentées mais elles ne donnaient de grand format (« clin d’œil » aux clichés des gueules cassées de
pas satisfaction (fig. 2). 14-18).
i
La patiente avait eu, 5 ans auparavant, un carcinome
basocellulaire localisé au niveau de la lèvre inférieure, à la
jonction du versant rouge sec droit et de la région cutanée
péri-buccale attenante. Le carcinome basocellulaire est un
/ In
plus fréquente ; ce type de cancer avait déjà été identifié lors
d’une précédente consultation de prothèse maxillo-faciale
chez une autre patiente (fig. 3 et 4).
17
cancer cutané qui se développe aux dépens de kératinocytes Mme J. avait initialement consulté un dermatologue à la
de la partie profonde de l’épiderme et qui survient de novo, suite de l’apparition d’une perle épithéliomateuse rosée et
c’est-à-dire sans lésion préexistante [3]. Ce type de tumeur de quelques millimètres siégeant au niveau de la partie
survient généralement après 50 ans et touche les deux sexes inférieure de l’angle droit de la lèvre inférieure. Le diagnostic
20
sans distinction. Il semble exister plusieurs facteurs étiolo- avait conduit à une exérèse cutanéo-muqueuse avec plastie
giques, notamment l’exposition solaire chronique et les de la région labiale et péri-buccale droite (diminuant de fait
microtraumatismes répétés [4]. D’un point de vue épidémio- le diamètre de l’orifice buccal et entraı̂nant un phénomène
logique, le papillomavirus et des facteurs génétiques pour- fibrosique au niveau de la zone opérée). Une chirurgie de
P
raient également intervenir. Il s’observe dans 85 % des cas Mohs avait été pratiquée (ou MMS procedure : micrographic
au niveau du visage et du cou, le nez étant la localisation la Mohs surgery) et consistait en une exérèse minimale suffi-
Cd
ns
itio
Éd
Restauration prothétique amovible totale après chirurgie d’exérèse d’un carcinome basocellulaire
é
nt
Sa
es
tiv
fig. 3 - Exemple d’un carcinome basocellulaire siégeant sur la partie fig. 4 - Carcinome basocellulaire après 2 ans d’évolution (refus de la
latérale gauche de la pyramide nasale. chirurgie d’exérèse).
tia
sante sans exposer au risque de récidive, tout en évitant le servation clinique permet également de définir les difficultés
sacrifice de peau saine. Cette chirurgie permet l’étude de cliniques auxquelles le praticien pourra être confronté et
i
100 % des marges chirurgicales, latérales et profondes, et d’annoncer le pronostic au patient.
précise particulièrement bien le caractère complet de l’exé-
rèse [5]. Compte tenu du stade du cancer au moment du
diagnostic, de sa prise en charge précoce et de l’âge avancé
/ In
n Examen psychologique
Un édenté total, qui plus est avec des antécédents
17
de la patiente, les cancérologues n’avaient pas estimé médico-chirurgicaux entraı̂nant une perte de substance
nécessaire la mise en œuvre de séances de radiothérapie maxillo-faciale, est un patient handicapé. À ce titre, il s’agit
oro-faciale ; des séances de chimiothérapie avaient été pro- d’évaluer l’incidence psychosociale d’un tel handicap.
20
grammées comme traitement adjuvant. Comme pour un bilan d’ergothérapie, il faut, dans une
Malgré son âge avancé, la patiente présentait une forte telle situation clinique, « apprécier les déficits fonctionnel,
motivation en vue d’une restauration prothétique, une très esthétique, psychologique, mental, social et culturel pour
bonne compréhension de la situation et une bonne motri- mieux estimer la compensation prothétique possible en
cité assurant une hygiène buccale tout à fait satisfaisante. La accord avec les espoirs du patient » [6]. La patiente du cas
P
patiente et sa fille souhaitaient qu’elle puisse retrouver le présenté ici présentait une très bonne compréhension, avait
sourire ainsi qu’une certaine esthétique faciale (résultant de une bonne motricité et faisait preuve d’écoute vis-à-vis des
Cd
l’affaissement des tissus cutanés en regard de la plaie chi- conseils prodigués. Elle était consciente de la difficulté de la
rurgicale) et avoir un meilleur confort à la mastication par la thérapeutique prothétique à conduire.
réalisation de prothèses stables. Le coût du traitement ne
semblait pas constituer pour la patiente un réel obstacle ; n Examen exobuccal
ns
toutefois, elle ne souhaitait pas de traitements trop longs et La forme du visage de la patiente étant globalement
envisageait une solution non chirurgicale compte tenu de la ovalaire, il faudra tenir compte de cet élément lors du
mémoire des épisodes chirurgicaux antérieurs et douloureux choix de la forme des dents prothétiques. La palpation laté-
tant sur le plan physique que psychologique. rale des condyles lors des différents mouvements mandibu-
itio
rationnel de signes, d’éléments et de renseignements pour phénomènes cicatriciels avec une fibrose particulièrement
permettre un diagnostic médical et fonctionnel. De l’examen marquée au niveau de la région labiale inférieure droite.
initial découlent un plan de traitement et une séquence Dans le sens vertical, la patiente présentait à l’évidence une
thérapeutique dont toutes les subtilités thérapeutiques perte de dimension verticale d’occlusion résultant de l’absence
doivent être établies au préalable, lors de l’examen et à la totale de dents. La dimension verticale d’occlusion était égale-
©
suite de la pose du diagnostic, afin d’optimiser la prise en ment sous-estimée lorsqu’elle était mesurée avec les anciennes
charge globale et la pérennité des futures prothèses. L’ob- prothèses en bouche : il allait donc falloir la réévaluer au cours
EXPERTISE CLINIQUE
du futur traitement prothétique lors de l’étape de l’établisse-
ment du rapport intermaxillaire (fig. 5). Dans le sens sagittal, le
soutien de la lèvre supérieure n’était pas assuré du fait de
é
l’absence du bloc incisivo-canin maxillaire, avec la présence
de sillons naso-géniens marqués (fig. 6 et 7). Dans le sens
nt
frontal, on notait notamment une légère déviation du
menton et de l’orifice buccal, une aplasie des téguments et
Sa
un effacement de l’angle labial droit. La chirurgie à visée carci-
nologique avait effacé l’angle labial droit sous lequel on notait
une cicatrice arciforme avec affaissement des tissus de la région
génienne basse (fig. 8). À l’ouverture, l’orifice buccal était dévié
et son diamètre était nettement réduit (fig. 9).
es
fig. 5 - Examen exobuccal : vue de face. n Examen endobuccal
Au maxillaire, l’examen clinique a mis en évidence une
tiv
fibromuqueuse adhérente à l’os sous-jacent avec un volume
crestal satisfaisant en vue de la réalisation d’une prothèse
amovible (fig. 10). Les tubérosités offraient par ailleurs des
tia
régions de stabilisation importantes. La palpation avec l’auri-
culaire inséré dans le fond du vestibule en regard des tubé-
rosités, en demandant à la patiente de réaliser des
i
mouvements de latéralité maximale, ne montrait pas d’in-
Restauration prothétique amovible totale après chirurgie d’exérèse d’un carcinome basocellulaire
é
nt
Sa
es
tiv
fig. 13 - Examen endobuccal : crête mandibulaire avec présence
fig. 10 - Examen endobuccal : volume crestal antérieur important. d’insertions fibreuses cicatricielles.
tia
ment en continuité avec le plancher de la bouche, mettant,
en vue d’une réalisation prothétique, dans une situation
pratiquement comparable à celle rencontrée en cas de
i
labio-glossopexie. La palpation des crêtes en regard des
fig. 11 - Examen
/ In
44-45 et 34-35 ne déclenchait pas de réponses doulou-
reuses neurologiques (dans le cas où il y aurait eu un effleu-
rage des nerfs mentonniers en cas de phénomènes de
17
endobuccal : résorption) et n’indiquait pas de décharges particulières
tubérosité pour de futurs intrados prothétiques.
secteur 1
(impossibilité de n Examen radiologique
20
photographier
l’arcade maxillaire Un bilan radiographique a été réalisé grâce à la prise d’un
en entier compte orthopantomogramme dentaire (cliché panoramique)
tenu du diamètre (fig. 14). Ce cliché a permis de juger de la résorption, qui
réduit de l’orifice
restait limitée eu égard à l’âge de la patiente, et de confir-
P
buccal).
mer que l’intervention chirurgicale à visée carcinologique
n’avait pas touché l’arc osseux mandibulaire. Par ailleurs, le
Cd
fig. 12 - Examen
endobuccal :
©
tubérosité
secteur 2. fig. 14 - Orthopantomogramme (cliché panoramique dentaire).
EXPERTISE CLINIQUE
intermaxillaire, tout en maintenant la position mandibulaire
DU DIAGNOSTIC À LA DÉCISION dans une situation répétitive à long terme, des dents
THÉRAPEUTIQUE SR Phonaresâ II, dont le degré d’usure est limitée, ont été
é
privilégiées, associées à une résine IvoBaseâ. Le choix d’un
Objectifs du traitement montage et d’une équilibration selon les règles de l’occlu-
nt
Les objectifs du traitement étaient multiples et devaient sion intégralement équilibrée permet, d’une part, d’assurer
répondre aux éléments significatifs suivants : la stabilité des prothèses lors de l’interposition alimentaire
Sa
– sur le plan fonctionnel : et, d’autre part, d’éviter les résorptions osseuses iatrogènes
rétablir des rapports occlusaux stables, confortables, lors des mouvements de glissement à vide. Ainsi, en vue de
répétitifs, en ayant pris soin de restaurer la dimension verti- la réalisation des prothèses amovibles complètes, le choix
cale d’occlusion, par le biais de plusieurs méthodes d’éva- d’un articulateur semi-adaptable Quick Masterâ (FAG) a été
luation et de détermination, privilégié avec un réglage arbitraire répondant au réglage
es
établir un schéma occlusal adapté au montage prothé- standard de l’articulateur géométrique du Gysi New
tique spécifique utilisé en prothèse amovible complète, assu- simplexâ [10, 14].
rant la stabilité prothétique, et une équilibration à la recherche
tiv
de contacts généralisés (ou à défaut du trépied de Devin) lors
SÉQUENCES DU TRAITEMENT
des mouvements de glissement à vide, évitant ainsi les phéno-
mènes de résorption iatrogènes (on privilégiera, dans le cadre
tia
d’un traitement par prothèse amovible complète, le concept Assouplissement cutanéo-muqueux et rééducation
d’occlusion intégralement équilibrée de Gysi) [9], neuromusculaire
établir un calage occlusal suffisant pour limiter la désta- Afin d’assouplir les tissus cutanéo-muqueux, 10 séances
i
bilisation de la prothèse amovible mandibulaire par la de kinésithérapie oro-faciale sont prescrites afin de détendre
poussée de la sangle labiale et de ses fibres cicatricielles
résultant de la chirurgie d’exérèse carcinologique,
proposer une disposition prothétique favorisant le pla-
/ In
les insertions fibreuses cicatricielles liées à la chirurgie d’exé-
rèse carcinologique. Parallèlement, dans le cadre d’une
rééducation neuromusculaire, après échauffement pendant
17
cement adéquat de la langue, assurant des possibilités 20 secondes des masséters à l’aide de gants de toilettes
accrues de stabilisation prothétique, dans le cadre de la chauds, des exercices de gymnothérapie sont préconisés à
classe II squelettique, et permettant de compenser l’action raison de 15 mouvements rectilignes d’abaissement et d’élé-
de l’orbiculaire des lèvres [10], vation mandibulaire associés à 15 mouvements de latéralité
20
rétablir une fonction occlusale préservant l’équilibre de droite et gauche, matin et soir. Ces mouvements doivent se
l’appareil manducateur et assurant de façon optimale les faire si possible en équilibre postural, devant un miroir, de
différentes fonctions oro-faciales (déglutition, phonation et façon douce, progressive et quotidienne [15]. Leur avantage
mastication) ; est également d’étirer légèrement l’orifice buccal, ce qui
P
– sur le plan esthétique, redonner une harmonie au sourire permettra l’insertion plus aisée des porte-empreintes et
en tenant compte des règles dentogéniques [11] et des fac- des maquettes, pour le praticien, et des futures prothèses,
Cd
centrée sur la personne alliant technicité et humanité [13]. temps grâce à des alginates et l’utilisation de porte-
empreintes adaptés spécialement à l’édentement complet,
Solutions thérapeutiques tels que les porte-empreintes Schreinemakers. Le but de
Malgré le confort d’une solution prothétique supra- l’empreinte primaire est l’obtention de la délimitation de la
itio
implantaire, cette option n’a pas été retenue compte tenu surface d’appui dans une position voisine du repos. Après
du souhait de la patiente de ne pas réaliser de nouvelles validation des empreintes puis coulées des modèles pri-
interventions chirurgicales. Une prothèse amovible com- maires (fig. 15 et 16), des porte-empreintes individuels sont
Éd
plète mandibulaire stabilisée par deux implants en regard confectionnés à l’aide de résine chémopolymérisable
de 33 et 43 aurait été particulièrement intéressante, (Ivolenâ, Ivoclar Vivadent) pour la plaque base et de stents
d’autant plus qu’il n’y avait pas eu de séances de radiothé- pour le bourrelet de soutien. Ce dernier préfigure la future
rapie oro-faciale, thérapeutique adjuvante fréquente dans arcade dentaire, plaçant les tissus périphériques idéalement
un contexte carcinologique. La solution d’une prothèse amo- en vue d’un enregistrement anatomo-fonctionnel. La pre-
©
vible complète bimaxillaire conventionnelle a été choisie mière étape consiste à régler la morphologie du bourrelet
en accord avec la patiente. Afin de pérenniser le rapport de soutien et les bords du porte-empreinte individuel afin
Restauration prothétique amovible totale après chirurgie d’exérèse d’un carcinome basocellulaire
é
nt
Sa
es
tiv
tia
fig. 15 - Modèle primaire maxillaire fig. 16 - Modèle primaire mandibulaire. Noter la faible largeur de la
crête mandibulaire antérieure (secteur 4) liée au
repositionnement des tissus labiaux après la chirurgie d’exérèse.
i
qu’ils n’interfèrent pas avec la musculature oro-faciale
lors de la réalisation de mouvements extrêmes. Ainsi, il est
indispensable de porter une attention rigoureuse à cette
étape afin de supprimer les surépaisseurs et les surexten-
/ In
phonème [ã], mouvements de latéralité). Il est ensuite
réalisé sur les secteurs latéraux et antérieur, après avoir
enduit les bords d’adhésif, à l’aide de polyéther de haute
viscosité aux excellentes qualités thixotropiques (Perma-
17
sions. dyneâ orange, 3M ESPE), en demandant au patient de réa-
Les empreintes secondaires sont réalisées en plusieurs liser plusieurs mimiques (balancement mandibulaire,
étapes. Au maxillaire, le joint périphérique est consciencieu- succion, sourire, baiser du bout des lèvres, etc.) (fig. 17).
20
sement enregistré en plusieurs temps. Il est façonné en Une empreinte de surfaçage est enfin réalisée à l’aide de
premier lieu en postérieur à l’aide de pâte de Kerr verte polyéther de viscosité plus faible que celle utilisée pour les
(ouverture maximale, bâillement, prononciation du joints périphériques (fig. 18).
P
Cd
ns
itio
Éd
fig. 17 - Joint périphérique et postérieur. Noter le vestibulaire plus fig. 18 - Empreinte avec polyéther basse viscosité (Permadyneâ
©
EXPERTISE CLINIQUE
À la mandibule, le bourrelet de soutien est d’abord réglé
en veillant à ce que les secteurs postérieurs ne dépassent
pas une épaisseur de 3 mm pour permettre l’écoulement
é
aisé des excès de matériau d’empreinte et éviter les
surépaisseurs. Après réglage des bords, à l’aide d’une
nt
« pré-empreinte » à la Permadyneâ orange qui est ensuite
éliminée en totalité, une technique d’empreinte avec joint
Sa
sublingual est indiquée compte tenu de l’impossibilité d’ob-
tenir un joint périphérique complet, notamment dans le
secteur en regard des insertions fibreuses supracrestales
[10]. Après avoir stabilisé le porte-empreinte individuel à
l’aide de pâte thermoplastique de Kerr verte et avoir enre-
es
gistré le joint sublingual en sollicitant les mouvements fonc-
tionnels linguaux extrêmes, une empreinte de surfaçage est
réalisée en utilisant un polyéther de moyenne viscosité : il
tiv
sera intéressant de mobiliser le modiolus afin d’évacuer le
matériau d’empreinte relativement compressif sans créer de
surextension ni de surépaisseur (fig. 19).
tia
Après leur analyse critique, les empreintes sont coffrées
et coulées afin d’obtenir des modèles secondaires sur les-
quels sont confectionnées des maquettes d’occlusion. Ces
i
dernières sont stabilisées sur les modèles (après les avoir
isolés) à l’aide de polyéther permettant une meilleure stabi-
lité lors de l’établissement du rapport intermaxillaire.
Établissement du rapport intermaxillaire
/ In
fig. 20 - Non-parallélisme du bourrelet avec la ligne bipupillaire.
17
Le réglage préalable de la maquette maxillaire a nécessité
plusieurs repérages et ajustages cliniques, qu’il faut réaliser
dans l’ordre suivant :
20
fig. 19 - Empreinte secondaire fonctionnelle au polyéther de fig. 21 - Ajustage du bourrelet maxillaire à la recherche du
moyenne viscosité (Impregumâ). parallélisme avec la ligne bipupillaire.
Restauration prothétique amovible totale après chirurgie d’exérèse d’un carcinome basocellulaire
– vérification et ajustage du parallélisme du bourrelet maxil- dimension verticale d’occlusion préalablement déterminée
laire avec le plan de Camper à l’aide d’une plaque de Fox (fig. 24).
(fig. 22). Afin de diminuer les marges d’erreur quant à l’évaluation
é
La maquette maxillaire est caractérisée à l’aide de tracés de la dimension verticale d’occlusion, il est toujours intéres-
sur le bourrelet dans le cadre d’une approche esthétique : sant de compléter la première mesure par une autre
nt
ligne interincisive, ligne haute du sourire et position des méthode, notamment une des méthodes indirectes faisant
pointes canines [16]. intervenir la dimension verticale de repos physiologique ou
Sa
Il s’agit ensuite de déterminer le paramètre vertical du la dimension verticale phonétique. Pour ce cas clinique, il a
rapport intermaxillaire, c’est-à-dire la dimension verticale été convenu d’utiliser en seconde intention une méthode
d’occlusion. Il est toujours intéressant, afin de limiter la anthropocéphalométrique faisant intervenir une téléradio-
marge d’erreur, d’utiliser plusieurs méthodes d’évaluation graphie de profil réalisée avec les maquettes en bouche. En
de cette dimension. La première méthode utilisée a été prenant comme référence l’analyse de Ricketts, il s’agit de
es
celle d’Appenrodt dans laquelle est utilisé le compas d’or déterminer la valeur angulaire entre trois points osseux :
d’Amoedo [17]. Ce dernier possède trois pointes sèches ENA (épine nasale antérieure), Xi (centre de la branche
dont l’écartement respecte, quel que soit le degré d’ouver- montante mandibulaire) et Pm (superpogonion). Cet angle
tiv
ture, la section d’or initialement décrite par le sculpteur grec équivaut en moyenne à 47o pour un individu méso-facial [18].
antique Phidias dans le cadre d’une vision pythagoricienne Il permet ainsi d’ajuster la hauteur du bourrelet mandibu-
de l’harmonie de la nature. En esthétique faciale, il s’agit laire en fonction de la valeur angulaire obtenue (fig. 25).
tia
d’une méthode anthropométrique qui permet de situer le Une fois la dimension verticale d’occlusion établie, le
point interincisif maxillaire tout en donnant une première rapport intermaxillaire est enregistré. Pour ce faire, des rai-
mesure de la dimension verticale d’occlusion. Les pointes nures en chevrons sont réalisées au niveau du bourrelet
i
externes du compas sont positionnées respectivement sur la maxillaire et de la pâte de Kerr est placée sur le bourrelet
pointe du nez et le pogonion cutané en position bouche
ouverte. La distance alors formée par la pointe interne
(qui se positionne généralement au niveau du point interin-
/ In
mandibulaire. La position mandibulaire est guidée par la
main de l’opérateur pendant que le patient est invité à
positionner la pointe de sa langue vers le palais le plus en
17
cisif maxillaire) et la pointe externe située sur le pogonion arrière possible [19]. Une fois l’occlusion de relation centrée
cutané donne une première estimation de la dimension myostabilisée enregistrée, les modèles sont montés sur arti-
verticale d’occlusion (fig. 23). Il suffit d’ajuster la hauteur du culateur selon un montage géométrique. Enfin, le choix des
bourrelet mandibulaire pour respecter la mesure de la dents est réalisé en prenant une forme ovalaire en analogie
20
P
Cd
ns
itio
Éd
fig. 22 - Recherche du parallélisme du bourrelet avec le plan de fig. 23 - Positionnement vertical du point interincisif supérieur et
Camper. estimation de la dimension verticale d’occlusion par la technique
©
EXPERTISE CLINIQUE
é
nt
Sa
es
tiv
i tia
/ In
17
fig. 24 - Détermination de la dimension verticale d’occlusion à l’aide fig. 25 - Téléradiographie de profil (maquettes en bouche) en vue
du compas d’or (technique d’Appenrodt). d’une évaluation de la dimension verticale d’occlusion par
méthode anthropocéphalométrique.
20
avec la forme du visage et une teinte est sélectionnée en point interincisif supérieur et du soutien de la lèvre supé-
accord avec les souhaits esthétiques de la patiente et de son rieure (fig. 28).
entourage. Les dents postérieures sont montées selon le concept de
P
dibule et un essayage clinique de la maquette esthétique est fig. 26 - Montage des modèles secondaires sur articulateur Quick
effectué pour une vérification du bon positionnement du Master B2.
Restauration prothétique amovible totale après chirurgie d’exérèse d’un carcinome basocellulaire
é
nt
Sa
es
tiv
fig. 27 - Rapport des bases squelettiques en classe II de Ballard.
tia
pression centripète de la sangle labiale inférieure liée aux
séquelles de la chirurgie d’exérèse carcinologique. Ce
montage a été possible grâce à une aide virtuelle permet-
tant la bonne réalisation des courbes d’occlusion, à la mise
i
en place de subtilités de montage propres à la classe II
squelettique et au contexte cicatriciel.
Pour aider le travail de laboratoire, une simulation infor-
/ In
fig. 28 - Vérification du soutien labial lors de l’essayage clinique du
17
matique des courbes occlusales sagittales et frontales a tout montage esthétique.
d’abord été réalisée, simulation qui tient compte de la
dimension verticale d’occlusion, du positionnement du ce sens, il a donc été envisagé en respectant certaines règles
plan d’occlusion céphalométrique et de la classe squelet-
20
doivent aider la langue à jouer un rôle stabilisateur. Dans mettre à la langue un étalement plus important ;
Cd
ns
itio
Éd
EXPERTISE CLINIQUE
é
nt
Sa
es
tiv
fig. 32 - Montage des dents prothétiques mandibulaires avec
tia
remplacement des dents no 34 et 44 par un second rang de
canines mandibulaires.
fig. 31 - Table de montage personnalisée avec légère inclinaison du
i
plan d’occlusion par rapport au plan bissecteur.
Restauration prothétique amovible totale après chirurgie d’exérèse d’un carcinome basocellulaire
é
nt
Sa
es
tiv
fig. 34 - Repérage du joint postérieur en vue du grattage. fig. 35 - Prothèses polymérisées.
i tia
/ In
17
20
P
Cd
ns
EXPERTISE CLINIQUE
12 Devin R. La dentogénique d’après Frush et Fischer, une conception
CONCLUSION actuelle de l’esthétique dentaire. Act Odonto Stomatol 1961;53:7-61.
La réussite prothétique dans un tel cas clinique propre à 13 Vigarios E, Destruhaut F, Pomar P. Problématique psychosociale en
é
la cancérologie oro-faciale ne peut être obtenue qu’avec un cancérologie cervico-faciale : le point de vue de l’odonto-stomatolo-
respect minutieux du protocole thérapeutique tout en y giste. Encycl Méd Chir Medecine buccale 2010;28-870-M-10.
nt
incorporant des subtilités de conception, notamment au
14 Van Dael O, Van Dael A. Comment remplacer le Gysi New Simplex
niveau occlusal et lors du montage prothétique. Compte en prothèse complète ? Prot Dent 1990;39:7-12.
Sa
tenu du caractère cicatriciel et fibrosique de la région
labiale avec un recul de la sangle musculaire formée par 15 Destruhaut F, Dichamp J, Hennequin A, Vigarios E, Pomar P. Réédu-
l’orbiculaire, la subtilité du montage prothétique résidait cation fonctionnelle mandibulaire et patients à besoins spécifiques en
dans la participation de la langue en tant qu’organe stabili- cancérologie oro-faciale. Inf Dent 2016;98:54-60.
sateur de la prothèse amovible mandibulaire. Au-delà de 16 Lee JH. The appearance of artificial dentures. Aust Dent J
es
l’objectif fonctionnel à atteindre, la répercussion esthétique 1964;9:304-308.
tant sur le sourire que sur le visage a contribué indéniable- 17 Begin M, Rohr M. La dimension verticale en prothèse totale. Quest
ment à l’amélioration de la qualité de vie de la patiente avec Odonto Stomatol 1983;8:215-229.
tiv
une restructuration des champs identitaires et une reconfi-
18 Berteretche MV, Hüe O. Dimensions verticales. In : Othlieb JD,
guration bio-psycho-sociale. n
Brocard D, Schittly J, Manière Ezvan A, eds. Occlusodontie pratique.
Rueil-Malmaison : CdP 2013:31-40.
tia
BIBLIOGRAPHIE 19 Begin M, Hutin I. Le rapport intermaxillaire en prothèse adjointe
1 Vigarios E, Destruhaut F, Pomar P, Dichamp J, Toulouse E. Prothèse complète. Real Clin 1997;8:389-407.
i
maxillo-faciale endo-orale. In : La prothèse maxillo-faciale. Malakoff : 20 Rignon-Bret JM, Rignon-Bret C. Montage esthétique et fonctionnel
CdP, 2015:89-138.
2 Meulien P, Buchet I, Lachiver X, Pigot J, Sequert C, Sorrel Dejerine E.
/
Apport de la prothèse maxillo-faciale dans le traitement des pertes de
In
en rétro et promandibulie en prothèse amovible complète. Cah Pro-
thèse 2000;112:115-126.
17
substance mandibulaire latérale. Actualités de carcinologie cervico-
faciale 1995;21:300-303.
3 Rubin AI, Chen EH, Ratner D. Basal-cell carcinoma. N Engl J Med
Remerciements
2005;353:2262-2269. Les auteurs remercient tout particulièrement le laboratoire
20
Toulouse
8 Jacquemart P, Rignon-Bret C, Maman L. Chirurgie préprothétique en Fabrice Destruhaut - Agrégé de mathématiques
prothèse complète, aspect médico-chirurgical. Clinic 2005;26:309-
317. Rémi Esclassan - MCU-PH
itio
9 Gysi A. Pratical applications of research results in denture construc- Antonin Hennequin - Adjoint d’enseignement en prothèses et
tion. J Am Dent Assoc 1929;16:199-223. occlusodontie
10 Rignon-Bret C, Rignon-Bret JM. Différentes étapes de réalisation Christophe Darrouy - Prothésiste dentaire (Atelier dentaire)
Éd