Vous êtes sur la page 1sur 10

Encyclopédie Médico-Chirurgicale 22-351-A-10

22-351-A-10

Chirurgie de la glande parotide


et de la glande sous-mandibulaire
G Malka
A Danino

Résumé. – Les tumeurs des glandes salivaires représentent 3 % des tumeurs de la tête et du cou, et 75 % de
ces tumeurs sont situées dans la glande parotide.
Le traitement des lésions de la glande parotide est le plus souvent chirurgical. Il va nécessiter des exérèses
variables suivant l’importance de la lésion : parotidectomie superficielle, parotidectomie totale avec ou sans
conservation du nerf facial, voire parotidectomie élargie associée à un évidement jugulocarotidien.
Si la pathologie tumorale prédomine à la glande parotide, c’est la pathologie lithiasique et inflammatoire qui
prédomine à la glande sous-mandibulaire. Le diagnostic clinique, confirmé par des examens complémentaires
de qualité, facilite la mise en place d’une véritable stratégie thérapeutique. Si l’objectif de guérir prévaut, il
faut une extrême prudence lors de l’acte opératoire, le risque majeur étant représenté par une lésion du nerf
facial pouvant entraîner une paralysie faciale. La parotidectomie est avant tout une « chirurgie nerveuse ».
Comme celle de la parotide, la chirurgie de la glande sous-mandibulaire est elle aussi bien codifiée. Ces
caractéristiques justifient donc une bonne connaissance de l’anatomie. La glande sous-mandibulaire, la
glande sublinguale et la glande parotide représentent les glandes salivaires principales.
© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : parotide, sous-mandibulaire, lithiase salivaire, tumeurs salivaires, paralysie faciale.

Chirurgie de la glande parotide La glande est traversée par la carotide externe et la veine
communicante intraparotidienne.

RAPPEL ANATOMIQUE (fig 1A, B, fig 2) CLASSIFICATION ANATOMOPATHOLOGIQUE (fig 3)


L’étude anatomique nécessaire à une bonne approche chirurgicale Les tumeurs des glandes salivaires peuvent être classées selon leur
permet de localiser le nerf facial à partir de repères constants. Les type histologique. La classification adoptée est celle définie par
repères constants sont : l’Organisation mondiale de la santé en 1972. Celle-ci a l’avantage
d’être simple. L’adénome pléiomorphe, appelé encore « tumeur
– la mastoïde, véritable promontoire du rocher ; mixte », représente environ 50 % des tumeurs des glandes salivaires.
– l’arcade zygomatique, croisée par les filets de la branche Ces tumeurs se distinguent en adénomes, carcinomes, tumeurs non
temporofaciale ; épithéliales et tumeurs inclassables. Le contrôle histologique de
toute lésion des glandes salivaires s’impose. La seule possibilité
– le tragus ;
d’affirmer le diagnostic est représentée par l’exérèse avec contrôle
– le bord antérieur du sterno-cléïdo-mastoïdien sur lequel chemine histologique de la lésion. Les autres types de biopsie (drill-biopsie)
le plexus cervical superficiel. sont à proscrire formellement.
On retrouve aussi la jugulaire externe.
Le nerf facial, qui divise la glande parotide en deux lobes, sort du Adénome pléiomorphe
trou stylomastoïdien, formant un tronc qui se divise en deux • Affirmer le diagnostic par l’exérèse-biopsie.
branches : une branche temporofaciale et une branche cervicofaciale. • Ponction biopsie : contre-indication.
Le nerf facial est très profond et sa division en deux branches est
variable : aucune systématisation ne peut être faite, ce qui nécessite BILAN PRÉOPÉRATOIRE (fig 4)
une grande prudence lors de son abord. Outre les examens biologiques, habituellement demandés dans le
Il a été décrit une « zone muette » entre les deux branches du nerf cadre de la consultation d’anesthésie, les examens de choix sont
facial, cette « zone muette » ne comportant pas de filets nerveux. représentés par l’échographie et la sialographie. Ces examens sont
Cette particularité anatomique n’a pas été retrouvée lors des en général suffisants pour affirmer la nature parotidienne ou sous-
dissections du facial. Il n’existe donc pas de zone muette, le facial mandibulaire de la lésion :
est profond. – peu d’intérêt sauf visualisation des calcifications ;
– opacification de la glande par injection des canaux (diagnostique
que dans 70 % des cas) ;
Gabriel Malka : Professeur, chef de service. – permet d’affirmer la nature intraparotidienne ; fiabilité assurée
Alain Danino : Assistant chef de clinique.
Service de chirurgie maxillofaciale et stomatologie, Hôpital général, 3, rue du Faubourg Raines, BP 1519,
pour la tumeur inférieure à 2 cm, en faveur de la bénignité : tumeur
21033 Dijon cedex, France. homogène ; malignité : absence de ces deux critères.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Malka G et Danino A. Chirurgie de la glande parotide et de la glande sous-mandibulaire. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits
réservés), Stomatologie, 22-351-A-10, 2003, 9 p.
22-351-A-10 Chirurgie de la glande parotide et de la glande sous-mandibulaire Stomatologie

1 A. 1. Carotide externe ; 2.
parotide ; 3. sterno-cléido-
mastoïdien ; 4. artère maxil-
laire interne ; 5. nerf facial ;
6. communicante intraparo-
tidienne ; 7. condyle mandi-
bulaire.
B. 1. Carotide interne ; 2.
parotide ; 3. muscle stylo-
hyoïdien ; 4. ventre posté-
rieur digastrique ; 5. sterno-
cléido-mastoïdien.
7

4
5

3 2

*
B

*
A

INSTALLATION DU PATIENT (fig 5)


2 Schémas anatomiques.
1. Lobule de l’oreille ; 2. ar- Le patient est installé en décubitus dorsal et en position proclive,
cade zygomatique ; 3. tra- position qui permet de réduire le saignement veineux. Un billot est
gus ; 4. bord antérieur du placé sous les épaules et la tête est tournée du côté opposé. La zone
sterno-cléido-mastoïdien ;
chevelue préauriculaire est rasée ; un collyre est instillé dans les
5. angle mandibulaire.
yeux et ceux-ci sont protégés. Après désinfection, les champs
2 opératoires sont mis de façon à ce que l’hémiface correspondante
3 reste visible, permettant un contrôle permanent de la mimique
faciale lors de l’intervention et lors de l’utilisation du
neurostimulateur. Une mèche est mise dans le conduit auditif
1 externe.
L’utilisation du neurostimulateur n’est pas obligatoire, mais il est
préférable de s’en servir car il facilite le repérage du facial au début
de l’intervention et le contrôle en fin d’intervention. La coagulation
bipolaire est utilisée notamment dès que l’on se rapproche du nerf
4 5
facial.

• Position proclive
• Hémiface visible
• Neurostimulateur
Le scanner et l’imagerie par résonance magnétique (IRM) ne se
• Coagulation bipolaire
justifient qu’en cas de lésions importantes ou devant des lésions
ayant des prolongements cervicaux ou pharyngés. L’examen
clinique ayant défini la date d’apparition des signes, l’étude de leur
évolutivité va surtout rechercher les signes de cancérisation : la
INTERVENTION DE PAROTIDECTOMIE
douleur, la paralysie faciale, la fistule cutanée, les adénopathies
cervicales, voire des signes otologiques en cas d’envahissement du
rocher. ¶ Voies d’abord (fig 6)
Celles-ci doivent répondre à trois impératifs :
• Radiographie sans préparation – tout d’abord permettre un accès facile à la région parotidienne et
• Sialographie donc avoir une bonne exposition du champ opératoire ;
• Échographie
• IRM ou scanner – minimiser les séquelles morphologiques et notamment les
séquelles cicatricielles, ainsi que la dépression postopératoire ;

2
Stomatologie Chirurgie de la glande parotide et de la glande sous-mandibulaire 22-351-A-10

Tumeurs épithéliales Tumeurs non épithéliales Lipomes 3 Classification anatomopathologique de l’Organisation


60 % 8-18 % mondiale de la santé.

Bénignes Malignes Bénignes Malignes Tumeurs conjonctives


• Hémangiopéricytome
• Fibromes
Papillomes
Adénolymphome Tumeurs vasculaires Sarcomes
Adénomes cystadénolymphome • Hémangiome Tumeurs secondaires
monomorphes (Tumeur Wharton) • Lymphangiome

Métastases
Adénomes oxyphiles • Tumeurs à cellules acineuses Tumeurs nerveuses • Cancer cutané
oncocytomes • Tumeurs mucoépidermoïdes • Neurinome • Cancer buccopharyngé
Adénomes à cellules claires • Carcinomes • Neurofibrome • Cancer viscéral
Adénomes trobéculaires à Cylindrome
Adénomes basocellulaires à Carcinome adénokystique
Adénomes sébacés Adénomes, cancer
à Cancer épidermoïde
à Cancer indifférencié
Adénomes
Cancer développé sur adénome
pléiomorphes
pléiomorphe

4 A. Échographie parotidienne. 6 Voies d’abord (Redon).


B. Sialographie de la glande parotide.

*
A

*
B
7 Abord du plan de dis-
section.

5 Installation du patient
pour la parotidectomie. Voie
d’abord de Redon.

– mastoïde ;
– permettre d’agrandir et de prolonger l’incision en cervical pour – arcade zygomatique ;
réaliser dans le même temps l’exérèse d’un prolongement tumoral
– vaisseaux temporaux ;
ou un évidement jugulocarotidien.
– bord antérieur du sterno-cléido-mastoïdien ;
– angle mandibulaire.
• Voie d’abord camouflée ¶ Infiltration
• Minimiser les séquelles morphologiques : cicatrice, dépression
• Parotidectomie élargie. Incision prolongée en cervical L’infiltration de la voie d’abord est réalisée à l’aide d’une solution
de Xylocaïnet 1 % adrénalinée et diluée avec du sérum
physiologique.
¶ Tracé (fig 6) ¶ Incision (fig 7)
Au crayon dermographique, on repère les éléments anatomiques L’incision comporte un segment préauriculaire vertical, un segment
majeurs : curviligne sous-lobulaire s’arrêtant au bord antérieur de la mastoïde,

3
22-351-A-10 Chirurgie de la glande parotide et de la glande sous-mandibulaire Stomatologie

*
A *
B *
C

8 A. Repérage du tronc du nerf facial. Le tronc du facial (2) correspond à la bissec- B. Dissection du facial après parotidectomie superficielle.
trice de l’angle dièdre formé par le plan prétragien (1) et le plan présternocléido- C. Parotidectomie du lobe profond.
mastoïdien (3).

puis un segment vertical descendant le long du bord antérieur du sectionner la glande. Deux écarteurs de Farabeuf réclinent la
sterno-cléido-mastoïdien qui se termine horizontalement dans un pli parotide vers l’avant, ce qui permet de tendre le tronc du nerf. Les
du cou. Des variantes ont été proposées, en utilisant l’incision du petits vaisseaux sont coagulés.
face lift et passant derrière le tragus. Un fil de traction est alors posé Il est à noter que la position du tronc du nerf facial peut être
sur le lobule de l’oreille, qui peut être ainsi rétracté vers le haut et modifiée du fait du développement d’un processus tumoral, celui-ci
l’arrière. Une hémostase des plans sous-cutanés étant réalisée, on modifiant les rapports anatomiques. Le tronc du nerf facial peut
commence la libération sous-cutanée du lambeau cutané antérieur. alors être refoulé en dedans par une lésion du lobe superficiel ou en
Cette dissection peut être menée facilement sans risques de lésions dehors par une tumeur du lobe profond.
du nerf facial, celui-ci étant très profond (cf supra). La libération du
lambeau cutané antérieur se fait dans le plan situé entre la peau, le
tissu cellulaire sous-cutané et le fascia préparotidien. Il faut se méfier • Plan préauriculaire
de ne pas poursuivre le décollement trop en avant pour ne pas léser • Plan présterno-cléido-mastoïdien
les portions terminales des filets du facial (fig 7). • Facial dans l’angle dièdre entre ces deux plans
• Bissectrice de l’angle dièdre
• Incision de Redon.
• Le facial est très profond. ¶ Variante : découverte du tronc par voie rétrograde
• Décollement au-dessus du platysma. Dans les cas d’infiltration de la région prétragédienne ou de tumeur
de la gouttière préauriculaire, on peut aborder le facial par voie
rétrograde. La voie d’abord est identique ; on libère le lambeau cutané
¶ Repérage du tronc facial (fig 8) vers l’avant, on repère une des branches du facial et, à partir de cette
C’est le temps le plus important de l’intervention. Le nerf facial branche cutanée, on dissèque le nerf en remontant vers le tronc. Le
forme la bissectrice de l’angle dièdre formé par le plan tronc une fois libéré, on reprend la libération du facial d’arrière en
préauriculaire et le plan sterno-cléido-mastoïdien (Striker). À l’aide avant. En général, c’est la branche cervicofaciale qui est isolée ; celle-ci
de ciseaux courbes à bout mousse, on plonge dans le plan longe le bord inférieur de la branche horizontale mandibulaire du
préauriculaire, en haut au voisinage des vaisseaux temporaux que massif et, souvent, c’est la position de la veine communicante
l’on relève vers l’arrière. Ce plan permet de libérer le bord postérieur intraparotidienne qui permet de retrouver la branche cervicofaciale.
de la parotide en avant et le plan du conduit auditif externe en
arrière. On libère alors le plan présterno-cléido-mastoïdien en ¶ Parotidectomie superficielle (fig 9)
passant en avant du bord antérieur du muscle. Le plexus cervical En restant au-dessus du plan du nerf facial, on peut couper la glande
superficiel est préservé en général pour permettre de réaliser une d’arrière en avant, tout en suivant les filets. Cette dissection se
réparation du nerf facial (greffe nerveuse) en cas de lésion de celui- poursuit jusqu’au bord antérieur de la parotide. Les différentes
ci. Ce temps permet en même temps de libérer le pôle inférieur de branches du nerf sont ainsi isolées. Cette dissection nécessite
la glande et la veine jugulaire externe est liée. l’utilisation des ciseaux courbes mousses, la concavité du ciseau
Le tronc facial : la dissection à partir de ce moment se fait de la devant rester vers le haut. Le canal de Sténon est repéré en avant de
superficie vers la profondeur, utilisant les ciseaux courbes, courbure la glande, celui-ci est en général lié, mais il est possible de ne pas le
vers le haut et parallèlement au plan du nerf facial. Le faire puisqu’il n’y aura aucune complication.
neurostimlateur facilite le repérage du tronc du nerf facial. Près du
nerf, il existe souvent un saignement correspondant à l’artère
stylomastoïdienne (Fritneau) qui est coagulée à la bipolaire. Ce • Abord du tronc
saignement, en général, signe la présence du facial. En réclinant la • Voie d’abord rétrograde
parotide vers l’avant, on aperçoit le blanc nacré du nerf. La longueur • Parotidectomie superficielle
du tronc étant variable, il faut être prudent avant de commencer à

4
Stomatologie Chirurgie de la glande parotide et de la glande sous-mandibulaire 22-351-A-10

¶ Extensions intrapétreuses
En cas d’atteinte de la mastoïde sous forme d’ostéolyse et
d’envahissement rétrograde du facial, il faut envisager un geste
otologique complémentaire.

¶ Récidives
C’est une chirurgie à risque pour le nerf facial car sa dissection au
sein d’un bloc fibreux s’avère d’une difficulté extrême. La chirurgie
des récidives pose en fait deux problèmes :
– celui du décollement cutané, qui doit être prudent ;
– celui de la découverte du tronc facial.
On s’aide alors d’un neurostimulateur. On peut, après toute
intervention sur la parotide, laisser un fil non résorbable près du
tronc du nerf, ce qui facilite sa découverte.

¶ Fermeture
Un drain de type « Jost-Redon » est mis en place. Son ablation a lieu
9 Parotidectomie superficielle. au troisième jour et les fils sont retirés au sixième jour. Des massages
sont prescrits sur la cicatrice pendant au moins 6 mois.

¶ Complications postopératoires
Les complications peuvent être précoces ou tardives :
– complications précoces :
– une désunion de la cicatrice, qui souvent est traitée en
cicatrisation dirigée ;
– une gêne masticatoire ;
– une hypoesthésie de la région auriculaire ;
– une parésie faciale, notamment dans la région frontale, parésie
en général transitoire et qui récupère dans les quelques jours qui
suivent l’intervention ;
– des hématomes nécessitant parfois des reprises le jour de
l’intervention ;
– la dépression prétragéienne, qui laisse parfois un déficit
morphologique ; cette dépression peut être réparée par un
10 Ablation du lobe profond. comblement à l’aide du sterno-cléido-mastoïdien ou à l’aide des
muscles peauciers ;
ABORD DU LOBE PROFOND (fig 8A, 10) – complications tardives :
Les filets du nerf facial sont situés sur la face externe du lobe – apparition d’une fistule salivaire, qui peut survenir vers le
profond ; la dissection et l’ablation du tissu glandulaire se font à huitième jour et qui souvent se tarit spontanément ;
travers les mailles du réseau nerveux. Le problème majeur est
représenté par la présence de l’artère carotide externe qui peut être – le syndrome de Frei, qui se traduit par l’apparition de rougeur
liée en cas de blessure ou préservée. En effet, cette artère, qui et de sudation de la région parotidienne lors des repas ; de
provient de la région cervicale, va se diviser au pôle supérieur de la pathogénie discutée, ce syndrome est traité par section du nerf
glande en artère temporale superficielle et en artère maxillaire auriculotemporal ou par traitement médical.
interne. L’exérèse terminée, un contrôle au neurostimulateur du nerf
facial est réalisé pour vérifier l’intégrité de la mimique faciale.
Chirurgie de la glande
¶ Parotidectomie élargie sous-mandibulaire
Si la parotide est le siège de lésions à extension pharyngée, la voie
d’abord est la même, mais on peut s’aider d’un doigt endobuccal
ANATOMIE DE LA GLANDE SOUS-MANDIBULAIRE
pour refouler la lésion vers l’extérieur. On peut même s’aider en
réalisant une voie d’abord endobuccale. On élargit la voie d’abord Située dans la loge sous-mandibulaire, la glande sous-mandibulaire
chaque fois que l’on est en présence de signes de cancérisation pour est située en avant de la région carotidienne et sous la région
réaliser en même temps l’évidement jugulocarotidien permettant parotidienne. Ses rapports principaux se font essentiellement avec
l’ablation de tous les ganglions. En cas de fistule cutanée, le sacrifice le pédicule facial, le nerf lingual en dedans et le rameau mentonnier
de la peau est nécessaire et une reconstruction par un lambeau le long du bord inférieur de la mandibule. En effet, en dehors l’artère
cutané ou musculocutané s’impose. faciale, branche de la carotide externe, contourne le pôle inférieur
de la glande pour cheminer le long du bord basilaire de la
mandibule. La veine faciale, superficielle, est quant à elle située à la
• Voie d’abord endobuccale face profonde de l’aponévrose cervicale superficielle. Le rameau
• Lambeau myocutané mentonnier cervical chemine entre l’aponévrose et le muscle
• Lambeau cutané peaucier. Le nerf lingual entre en rapport avec la face interne de la
glande et contracte des rapports avec la glande par des fibres

5
22-351-A-10 Chirurgie de la glande parotide et de la glande sous-mandibulaire Stomatologie

11 Scialographie sous-maxillaire.

sécrétoires parasympathiques. La projection de la glande dans la – sialographie sous-mandibulaire pratiquée en dehors des épisodes
région cervicale correspond à une zone située entre le bord basilaire inflammatoires, qui permet d’apprécier l’état fonctionnel de la
en haut, le plan de l’os hyoïde en bas, un travers de doigt en avant glande et d’aider à poser l’indication opératoire ;
de l’angle mandibulaire en arrière. – enfin l’échographie, qui peut être utilisée comme examen
complémentaire.
• Pédicule facial La sialographie (fig 11) permet de préciser l’état de la glande sous-
mandibulaire et éventuellement d’affirmer la nature lithiasique ou
• Rameau mentonnier
tumorale de la lésion.
• Nerf lingual

INDICATIONS OPÉRATOIRES INSTALLATION DU PATIENT (fig 12)


Le patient est installé en décubitus dorsal, la tête légèrement
¶ Lithiase sous-mandibulaire
surélevée, ce qui permet de diminuer le saignement veineux. La tête
Elle représente l’indication la plus fréquente de chirurgie de la est tournée du côté opposé. Les champs sont placés de telle façon
glande sous-mandibulaire. Il s’agit le plus souvent de sous-maxillite que l’hémiface correspondante peut être observée pendant
lithiasique chronique ne réagissant plus au traitement médical. Elle l’intervention pour surveiller la mobilité faciale et permettre de
peut s’accompagner de calculs situés dans le canal de Wharton. dégager la région antérolatérale du cou.

¶ Pathologie tumorale
SOUS-MANDIBULECTOMIE
Les tumeurs de la glande sous-mandibulaire sont nettement moins
fréquentes que celles de la parotide. Elles ne représentent que de 10 ¶ Repérage des points principaux
à 25 % des sous-mandibulectomies. Si l’on retrouve la possibilité
d’adénome pléiomorphe, les tumeurs malignes sont avant tout des Au crayon dermographique, on repère le bord basilaire, l’angle
cylindromes et des lymphomes. Dans le cadre de cancers mandibulaire. L’artère faciale est palpée et dessinée. On trace
locorégionaux, on retrouve souvent des métastases ganglionnaires l’incision à deux travers de doigt du rebord basilaire, ce qui permet
par extension de proche en proche ou par voie lymphatique. d’éviter le rameau mentonnier. Cette incision mesure environ 5 cm.
Une infiltration à la Xylocaïnet 1 % adrénalinée est réalisée, ce qui
¶ Lésions inflammatoires et dysimmunitaires permet de favoriser l’hémostase et décoller les plans.
Si le traitement est avant tout médical, le traitement chirurgical peut
être proposé pour préciser le diagnostic. Il s’agit d’augmentation de – En avant de l’angle mandibulaire
volume de la glande dans le cadre de syndromes secs ou de – Deux travers de doigt sous le rebord mandibulaire
sarcoïdose.
– Cervicotomie horizontale

• Sous-maxillite chronique ¶ Incision (fig 13)


• Métastases de cancers locorégionaux
L’incision intéresse la peau, le tissu cellulaire sous-cutané et le
• Tumeurs primitives : cylindromes
muscle peaucier. Après libération des deux lambeaux supérieur et
inférieur, on charge le lambeau supérieur sur un écarteur de
BILAN PRÉOPÉRATOIRE Farabeuf, ce qui permet de protéger le rameau mentonnier. La
Outre les examens biologiques demandés dans le cadre de la glande apparaît sous l’aponévrose ainsi que la veine faciale.
consultation d’anesthésie, les examens les plus courants utilisés
sont :
• Incision intéressant le peaucier
– le film occlusal maxillaire inférieur, qui permet de retrouver la • Incision à deux travers de doigt du bord basilaire
projection des calculs notamment dans le canal de Wharton ;

6
Stomatologie Chirurgie de la glande parotide et de la glande sous-mandibulaire 22-351-A-10

12 A. Installation du patient pour le sous-maxillaire. 1.Pro-


jection de veine ; 2. angle mandibulaire ; 3. projection de
l’artère faciale ; 4. rameau mentonnier.
B. Repères de la voie d’abord de la glande sous-
mandibulaire.

*
B

*
A

13 Voie d’abord sous-capsulaire de la glande sous-


mandibulaire.
A. L’incision intéresse la peau, le tissu cellulaire sous-
cutané et le peaucier.
B. Dissection sous-capsulaire.

*
A

*
B

14 A. Ligature du pédicule facial.


B. Libération du pôle antérieur de la glande.

*
B

*
A

¶ Dissection de la glande (fig 14)


la région sous-mentale ; des petits vaisseaux doivent être coagulés.
Le lambeau antérieur récliné, la dissection est réalisée en sous- Le pédicule facial est alors abordé au pôle postérieur de la glande ;
capsulaire. On libère le pôle inférieur de la glande, en liant en l’artère est liée. On poursuit alors la dissection vers le bord basilaire
premier la veine faciale repérée en arrière de ce pôle. Cette libération pour lier le pédicule facial dans sa portion horizontale. Un écarteur
se poursuit en avant, en bas jusqu’à la région sous-mentale ; en haut, charge le bord basilaire, permettant de récliner en même temps le
la glande est libérée du bord postérieur du mylohyoïdien dans mylohyoïdien. Ceci permet d’objectiver le prolongement antéro-

7
22-351-A-10 Chirurgie de la glande parotide et de la glande sous-mandibulaire Stomatologie

15 Projection du canal de
Wharton. 1. Angle mandi-
bulaire ; 2. prolongement
3 3
antérieur de la glande sous-
maxillaire ; 3. canal de
Wharton.

2 2
1

interne de la glande représenté par le canal de Wharton, qui


passe entre le mylohyoïdien et le muscle hyoglosse. Le nerf
lingual apparaît du fait de la traction exercée sur la glande en *
A *
B
dehors. Des éléments vasculonerveux relient la glande au nerf
lingual. Ces éléments vasculonerveux sont sectionnés au ras de 16 A. Kyste sublingual.
la glande pour ne pas léser le nerf lingual. La glande ne tenant B. Traitement du kyste par marsupialisation.
plus que par le canal de Wharton, on sectionne alors entre deux
pinces ce canal le plus près possible du plancher buccal. Le nerf chirurgie est réalisée sous anesthésie locale, rarement sous anesthésie
grand hypoglosse est aperçu sous l’aponévrose profonde. La générale. Il s’agit de la taille du canal de Wharton.
glande est alors adressée au laboratoire pour un examen
anatomopathologique. ¶ Taille du canal de Wharton
Après anesthésie locale, un fil tracteur est mis sur la pointe de la
• Ligature du pédicule facial à deux niveaux langue ou un abaisse-langue récline celle-ci. Elle est tractée du côté
sain. On réalise une incision de la muqueuse buccale centrée sur le
• Dissection sous-capsulaire
calcul ; deux fils tracteurs sont mis en place sur les berges de la
• Éviter la traction sur le nerf lingual
muqueuse. Le canal de Wharton apparaît et est incisé dans son
grand axe. Le calcul est expulsé. À l’aide d’une sonde à bout
¶ Fermeture mousse, on vérifie l’absence d’obstacle en amont et en aval. La voie
Après vérification de l’absence de saignement dans la loge sous- d’abord peut ne pas être suturée mais il est préférable de rapprocher
mandibulaire, un drain de Redon est mis en place. La fermeture est les berges du canal de Wharton à l’aide d’un fil résorbable. Des bains
réalisée en deux plans, un plan sous-cutané prenant le peaucier au de bouche sont prescrits en postopératoire.
fil résorbable et un plan cutané sous forme d’un surjet
intradermique. L’ablation du drain a lieu à j2 ou j3, les fils étant ¶ Complications
enlevés à j6. Une antibioprophylaxie est le plus souvent préconisée – Sous-maxillite aiguë, qui est traitée par antibiothérapie et soins
en peropératoire. locaux.
– Grenouillette sublinguale : cette complication est observée dans
COMPLICATIONS POSTOPÉRATOIRES un nombre variable, entre 5 à 20 % des cas, du fait de la possibilité
de drainage de la sublinguale dans le canal du Wharton et dans la
¶ Complications vasculaires
muqueuse buccale directement. L’indication opératoire va nécessiter
En cas d’hématome postopératoire, il faut intervenir l’ablation de la glande sublinguale. Pour éviter cette complication,
immédiatement. Une hémostase soigneuse permet de prévenir ces on peut dériver directement le canal de Wharton.
complications.

¶ Complications nerveuses Chirurgie de la glande sublinguale


– Paralysie du rameau mentonnier du nerf facial : elle est souvent
transitoire et touche l’hémilèvre inférieure correspondante, ce qui La glande sublinguale peut être le siège soit d’un kyste rétentionnel,
gène l’élocution et l’alimentation ; la récupération est variable dans soit de tumeurs bénignes ou malignes. Nous n’envisagerons que le
le temps. traitement de la grenouillette, les tumeurs ne nécessitant qu’une
exérèse simple.
– Paralysie du nerf lingual : elle entraîne une diminution de la
sensibilité de l’hémilangue correspondante. Elle peut se traduire par
des paresthésies. Cette complication se retrouve dans 3 à 6 % des GRENOUILLETTE (fig 16A)
cas.
Il s’agit d’un kyste rétentionnel mucoïde. Il est situé sur le plancher
– Paralysie du grand hypoglosse : elle est très rare. de la bouche et peut évoluer jusque dans la région médiane ou
latérale sus-hyoïdienne.
¶ Complications infectieuses
Deux techniques peuvent être utilisées.
Elles sont rares. Il est nécessaire d’opérer les sous-maxillites à
distance d’un épisode aigu. ¶ Marsupialisation (fig 16B)
Après anesthésie locale ou générale : incision de la muqueuse
CHIRURGIE DU CANAL DE WHARTON (fig 15) buccale ; évacuation du contenu mucoïde ; résection de la partie
L’indication de l’abord du canal de Wharton se justifie le plus superficielle du kyste ; suture des berges du kyste à la muqueuse du
souvent par la présence d’un calcul qui obstrue le canal. Cette plancher.

8
Stomatologie Chirurgie de la glande parotide et de la glande sous-mandibulaire 22-351-A-10

¶ Exérèse du kyste (fig 17)


17 Exérèse du kyste.
Ces kystes possèdent des parois très fines et très fragiles. Il faut
éviter l’exérèse incomplète.

¶ Complications
La complication majeure est représentée par l’hémorragie, à prévenir
par une bonne hémostase à la coagulation bipolaire.
Les lésions du nerf lingual sont plus rares.
La récidive de la grenouillette est possible.
Une plaie du Wharton est très rare (et sans gravité).

Anatomie de la glande sous-mandibulaire et sublinguale


• Rameau mentonnier du facial
• Pédicule facial
• Canal de Wharton

Références
[1] Belloc JB, Laccourreye O, Chabardes E, Carnot F, Brasnu D, [9] De Ru JA, vanBenthem PP, Bleys RL, Lubsen H, Hordjik GJ. [17] Marie JP, Trotoux J, Vilde F, Clavier A, Aubert P. Parotid
Laccourreye H. Mucco-epidermoid tumors of the parotid Landmarks for parotid gland surgery. J Laryngol Otol 2001 ; tumors of intermediate malignancy. Prognoassessment.
gland. Diagnostic and therapeutic attitudes. Ann Otolaryn- 115 : 122-125 Review of the literature. Ann Otolaryngol Chir Cervicofac
gol Chir Cervicofac 1991 ; 108 : 119-125 [10] Diop EM, Hitima A, Diouf R, Diop LS. Submaxillectomies. 1989 ; 106 : 304-308
[2] Beziat JL, Seguin P, Freidel M. Parotidectomy in children. A Evaluation of 39 cases. Dakar Med 1984 ; 29 : 107-116
propos of a homogeneo series of 15 cases. Rev Stomatol [11] Froehlich P, Fombeur JP, Vuong PN. Treatment of recur- [18] Poncet JL, Rondet P, Kossowski M, Cudennec YF, Buffe P.
Chir Maxillofac 1988 ; 89 : 142-147 rence of pleomorphic adenomas of the parotid gland. Ann Surgery of the parotid gland. Indications. Review of
[3] Bischofberger A, Linder T, Melik N, Schmid S. Indications Otolaryngol Chir Cervicofac 1991 ; 108 : 333-337 anatomy. Ann Radiol 1991 ; 34 : 122-129
and effects of the SMAS in parotid surgery. Schweiz Med [12] Glas AS, Vermery A, Hollema H, Robinson PH, Roodenbur-
Wochenschr 2000 ; 125 (suppl) : 112S-115S [19] Reece PH, Papesch ME, Tolley NS. Superficial aparotidec-
gNap RE, Plukker JT. Surgical treatment of recurrent pleo-
[4] Bremerich A, Eufinger H, Rustemeyer J, Schaus M. Frey syn- morphic adeno of the parotid gland: a clinical analysis of 52 tomy under local anaesthesia. J Laryngol Otol 2000 ; 114 :
drome. Mund Kiefer Gesichtschir 2001 ; 5 : 33-36 patients. Head Neck 2001 ; 23 : 311-316 983-984
[5] Breton P, Seguin P, Freidel M. A trap of parotidectomy: [13] Gordeef A, Piot B, Gaillard F, Billet J, Gaillard A, Delaire J, [20] Rosenblum BN, Benecke JE Jr. Combined transcervical
nervous tumors of the facial nerve. Ann Chir Plast Esthet Mercier J. Prognostic and therapeutic aspects of lympho- transmastoid approach to giant parotid pleomorphic
1988 ; 33 : 172-175 epith lesions of the parotid. A propos of 8 cases. Rev Stoma-
adenoma: a case report. Mol Med 2001 ; 98 : 267-269
[6] Calearo C. Classification of parotid cancers. Acta Otorhino- tol Chir Maxillofac 1990 ; 91 : 44-48
laryngol Ital 1990 ; 1010 : 31-34 [14] Hamoir M, Lawson G, Andry G, Lothaire P, Sacre R, Rema M [21] Simoncelli C, Ricci G, Capolunghi B, Molini E, Lippera R.
[7] Chow TL, Lam CY, Chiu PW, Lim BH, Kwok SP. et al. Tumors of the submaxillary gland. Ann Otolaryngol Submaxillary gland excisions: a retrospective investiga-
Sternomastoid-muscle transposition improves the cos- Chir Cervicofac 1991 ; 108 : 26-29 tion. Rev Laryngol Otol Rhinol 1989 ; 110 : 467-469
metic outcome of superficial parotidectomy. Br J Plast Surg [15] Julie C, Aidan D, Arkwright S, Brocheriou C, Vilde F. Carci-
2001 ; 54 : 409-411 nosarcoma of the submaxillary gland. Ann Pathol 1997 ; [22] Trotoux J. Parotid tumors. Diagnostic approach. Rev Prat
[8] De Ru JA, Bleys RL, VanBenthem PP, Hordijk GJ. Preopera- 147 : 35-37 2001 ; 51 : 75-83
tive determination of the location of parotid gland tumors [16] Kuttner C, Berens A, Troger M, Keil C, Eckart A. Frey syn-
by analysis of the position of the facial nerve. J Oral Maxillo- drome after lateral parotidectomy. Follow and therapeutic [23] Yu GY. Superficial parotidectomy through retrograde facial
fac Surg 2001 ; 59 : 525-528 outlook. Mund Kiefer Gesichstschir 2001 ; 5 : 144-149 nerve dissection. J R Coll Surg Edinb 2001 ; 46 : 104-107

Vous aimerez peut-être aussi