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Sommet de l'Apec : pourquoi la zone indo-pacifique est-elle devenue un

axe prioritaire de la politique étrangère de la France ?

Les dirigeants des pays du forum de Coopération économique pour l'Asie-Pacifique


(APEC) ont rendez-vous à Bangkok jeudi et vendredi. Emmanuel Macron est le
premier chef d'Etat européen invité.
avec Xavier Allain - Bertrand Gallicher
Radio France – 17/11/2022

D'un sommet à un autre. Après le sommet du G20 à Bali, Emmanuel Macron est arrivé
jeudi 17 novembre à Bangkok où il doit participera à la réunion annuelle du forum de
coopération économique Asie Pacifique, l’APEC. Une nouvelle opportunité pour le
président français de développer sa stratégie indo-pacifique, l’un des axes prioritaires de
sa politique étrangère.
Enjeux majeurs
Avec quelque onze millions de kilomètres carrés, la France possède en effet dans
"l'Indopacifique" sa plus grande zone économique exclusive. Mais Paris doit encore
trouver des alliés dans cet immense espace qui va des côtes d’Afrique de l’est à celles de
l’ouest des Etats-Unis. Car pour l’Elysée, c’est ici que se situent les enjeux majeurs tant
économiques, politiques, diplomatiques et même militaires.
La France y compte ainsi sept de ses 13 départements, régions et collectivités d'Outre-
mer: Mayotte, la Réunion, les îles Éparses, les Terres australes et antarctiques françaises,
la Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et la Polynésie française. Une présence
physique à laquelle s'ajoutent 1,6 million de ressortissants français résidant dans ces
territoires. Pourtant, seuls 7.000 militaires sont déployés de manière permanente dans
cette vaste zone. Le ministère des Armées s'y est pourtant doté en 2019 d'une stratégie de
défense, censée renforcer le poids militaire de la France. En juin 2022, le ministre des
Armées Sébastien Lecornu annonçait que la France allait "renforcer et moderniser ses
capacités militaires déployées en Asie Pacifique" en remplaçant notamment cinq avions
Falcon par des modèles plus modernes. Le ministre des Armées avait également évoqué
deux nouveaux patrouilleurs, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française
L'intérêt de la France pour cette région du globe est d'autant plus importante que plus de
7.000 filiales d'entreprises françaises sont également implantées dans la zone, selon le
ministère de l'Europe et des Affaires étrangères. Cet espace est devenu ces dernières
années le centre de gravité de l'économie mondiale, avec par exemple ses voies maritimes
majeures pour le commerce mondial qui contribueront à environ 60% du PIB mondial
d'ici 2030. Le chef de l'État français entend également s'imposer dans la défense des
fonds marins et la lutte contre la crise climatique et la biodiversité. 
L'affaire des sous-marins australiens
Le déplacement d’Emmanuel Macron cette semaine en Indonésie puis en Thaïlande lui
permet de fait de développer des partenariats pour que la France puisse peser face à la
lutte d’influence entre Washington et Pékin dans la région. Et cela fonctionne petit à petit
: en février dernier, l’Indonésie avait passé commande de 42 Rafale. Mercredi, Emmanuel
Macron a échangé avec le Premier ministre australien Anthony Albanese, dont le
prédécesseur avait brutalement rompu le contrat des sous-marins commandés à la France
en septembre 2021, avec l'émergence de la nouvelle alliance AUKUS entre les États-
Unis, le Royaume-Uni et l'Australie. […]
Ce sommet de l’APEC est donc bien une fenêtre d’opportunité pour la stratégie indo-
pacifique du président français.
Relations Afrique - France : pourquoi la France fait face à tant de
colère en Afrique de l'Ouest
 Par Paul Melly, BBC du 7 décembre 2021

Tout a commencé de façon si positive. Où les choses ont-elles mal tourné ? Pourquoi
la France semble-t-elle aujourd'hui si impopulaire en Afrique ?
Le président français Emmanuel Macron augmente l'aide au continent, commence à
restituer les objets culturels volés pendant les guerres coloniales et va au-delà des liens
intergouvernementaux habituels pour impliquer les jeunes générations et la société civile.
Il maintient les troupes françaises au Sahel pour lutter contre les militants djihadistes qui
tuent tant de civils, de policiers et de soldats locaux et soutient le bloc régional de la
Cedeao, qui tente de défendre les politiques électorales contre les prises de contrôle
militaires.
Cette année, il s'est rendu au Rwanda pour reconnaître publiquement les échecs de la
France pendant le génocide de 1994.
Pourtant, son pays est désormais la cible de plaintes et de critiques africaines aigries, à
une échelle probablement sans précédent. Le mois dernier, un convoi de troupes
françaises se dirigeant vers le nord pour soutenir la lutte contre les militants islamistes est
bloqué à plusieurs reprises par des manifestants alors qu'il traverse le Burkina Faso et le
Niger.
En septembre, le Premier ministre malien Choguel Maïga est accueilli par une vague de
commentaires sympathiques lorsqu'il profite d'un discours à l'ONU pour accuser la
France d'"abandonner son pays en plein vol", après que M. Macron commence à réduire
le déploiement de troupes dans le pays.
Parmi les commentateurs progressistes d'Afrique de l'Ouest et les jeunes urbains, il est
désormais courant d'entendre des appels à l'abolition du franc CFA - la monnaie régionale
utilisée par de nombreux pays francophones et qui est arrimée à l'euro sous la garantie du
gouvernement français. Ses détracteurs affirment que cela permet à la France de contrôler
les économies des pays qui l'utilisent, tandis que la France affirme que cela garantit la
stabilité économique.
Arrogance néocoloniale
Comment expliquer ce paradoxe ? Comment se
fait-il qu'un président plus soucieux de l'Afrique
que la plupart de ses prédécesseurs récents, et
plus conscient aussi de la façon dont le
continent change, se heurte à un niveau
d'impopularité française qui n'a pas été ressenti depuis des décennies ?
Le style personnel de M. Macron, sûr de lui - les critiques diraient arrogant - est
certainement un facteur.
Malgré sa main tendue à l'Afrique, le président Macron est confronté à une réaction
négative
Il a fait sa part de gaffes diplomatiques.
Après la mort de 13 soldats français dans un accident d'hélicoptère au Mali en novembre
2019, il exige que les dirigeants ouest-africains s'envolent vers la France pour un sommet
d'urgence, une sortie perçue comme une arrogance néocoloniale, d'autant que le Mali et le
Niger avaient subi des pertes militaires récentes bien plus lourdes.
Le président Macron est contraint de rectifier rapidement le tir, en se rendant à Niamey,
la capitale du Niger, pour rendre hommage aux militaires nigériens morts et en reportant
le sommet à janvier 2020.
Mais les causes du malaise actuel de la France remontent aussi à des décennies avant
l'élection de M. Macron en 2017.
"Vous pouvez citer des controverses historiques liées à la colonisation. Beaucoup d'entre
nous sont les enfants de parents qui ont connu la période coloniale et ses humiliations",
explique l'analyste politique ivoirien Sylvain Nguessan.
Au cours des premières décennies qui ont suivi l'indépendance, la France a entretenu un
réseau dense de relations personnelles avec les dirigeants et les élites africains -
surnommé "françafrique" - qui a trop souvent glissé vers une protection mutuelle des
intérêts particuliers, avec peu de considération pour les droits de l'homme ou la
transparence.
Parmi les puissances extérieures, Paris était loin d'être la seule à être de connivence avec
des alliés dictatoriaux, mais ses relations étaient particulièrement étroites et indiscutables.
[…]

Françafrique

L'expression "France-Afrique" aurait été utilisée pour la première fois en 1955 par Félix Houphouët-


Boigny (1905-1993), futur président de la Côte d'Ivoire et alors ministre du gouvernement français, pour
qualifier le souhait de certains dirigeants africains de conserver des relations privilégiées et étroites avec
la France, après l'accession de leur pays à l'indépendance.
L'usage du néologisme Françafrique, avec un sens péjoratif, s'est développé après la parution en 1998
du livre de François-Xavier Verschave (1945-2005), "La Françafrique, le plus long scandale de la
République".
Le terme Françafrique désigne l'ensemble des relations entre la France et ses anciennes colonies
africaines pour en dénoncer le caractère ambigu et opaque. La Françafrique serait constituée
de réseaux d'influence et de lobbies d'acteurs français et africains intervenant dans les domaines
économique, politique et militaire pour détourner à leur profit les richesses liées aux matières premières
ainsi que l'aide publique au développement.
Le concept de Françafrique prête à la France une attitude néocolonialiste envers ses anciennes colonies
devenues indépendantes.

La Francophonie veut «redoubler d’efforts» contre le recul du


français dans les instances internationales
Par Le Figaro et AFP agence
Publié le 14/11/2022 à 10:01, mis à jour le 14/11/2022 à 10:27

Le week-end prochain, les 19 et 20 novembre, aura lieu le 18e sommet de la francophonie à


Djerba, en Tunisie, qui rassemblera chefs d’État et de gouvernement.

Malgré sa progression dans le monde, le français recule dans les organisations


internationales. La secrétaire générale de la Francophonie entend donc interpeller les États
membres sur le recul du français dans les organisations internationales lors du sommet de l’OIF
les 19-20 novembre prochains, exhortant à «redoubler d’efforts» pour que la langue
française«continue d’occuper sa place», a-t-elle souligné dans un entretien à l’AFP. «On
se rend compte d’après nos rapports que dans les organisations internationales, il y a
eu un recul» du français, constate Louise Mushikiwabo, secrétaire générale de l’Organisation
internationale de la Francophonie (OIF), rencontrée au siège de l’organisation à Paris. Or «ce
sont nos États qui siègent (...) et décident dans ces organisations et moi j’aimerais
beaucoup les réveiller», relève-t-elle. Elle lancera donc un «appel» aux chefs d’État et de
gouvernement des pays ayant le français en partage, lors de leur 18e sommet samedi et dimanche
à Djerba (Tunisie).

Les chefs d’États seront appelés «à s’assurer de garder la langue française dans leurs
instances internationales» et «dans l’enseignement au niveau des pays»  notamment.
Pour Louise Mushikiwabo, «c’est au niveau institutionnel qu’il faut redoubler d’efforts» .
La Francophonie, ce sont des femmes et des hommes qui partagent une langue commune, le
français. C’est ensuite un «dispositif institutionnel»  visant à «promouvoir le français et à
mettre en oeuvre une coopération politique, éducative, économique et culturelle»  au
sein des 88 États et gouvernements de l’OIF (54 membres, sept membres associés et 27
observateurs), précise l’organisation. L’OIF a pour missions de promouvoir la «langue
française et la diversité culturelle et linguistique», «la paix, la démocratie et les
droits de l’Homme», de développer la coopération économique et «d’appuyer» l’éducation.

321 millions de locuteurs

Louise Mushikiwabo souligne que selon les derniers chiffres de l’OIF, le nombre de locuteurs en
français est passé de 300 millions en 2018 à 321 millions en 2022, soit une  «augmentation de
7%» qui vient du continent africain.  Elle confie être «mécontente par rapport à l’Union
européenne (...) où l’on voit que la tendance, même dans les documents écrits, est
d’aller vers la facilité qu’offre l’anglais, alors que l’UE est le deuxième bloc le plus
important à la Francophonie».
«La langue française c’est le fondement même de notre organisation, mais on n’est
pas du tout dans la suprématie de la langue française ; on n’est pas des jihadistes de
la langue, on est là pour que la langue française soit enseignée, parlée,
utilisée», explique-t-elle. Le rôle de la Francophonie, «c’est de s’assurer que la langue
française continue d’occuper sa place» . Ancienne ministre rwandaise des Affaires
étrangères, Louise Mushikiwabo a été élue secrétaire générale en octobre 2018. Elle est seule
candidate à sa succession. L’élection du prochain secrétaire général sera soumis au vote des
chefs d’État et de gouvernement lors du sommet.

Alors que le thème du sommet est le numérique, Louise Mushikiwabo souhaite, si elle est
réélue, «travailler à assurer une plus grande présence sur la toile»  du français, «la
quatrième langue la plus utilisée sur internet».  Interrogée pour savoir si les récents
mouvements anti-France dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest pourraient entraîner un
rejet de la langue française, Louise Mushikiwabo dit ne pas partager cet avis. «La révolte
qu’on voit dans la jeunesse francophone en Afrique vient d’un désenchantement
politique», des «frustrations du quotidien»  et vis-à-vis «de la classe dirigeante» et par
extension de la France qui est l’ancien pouvoir colonial, déclare-t-elle. «Ce n’est pas du tout
un rejet de la langue française».

«Ces pays ont investi énormément dans la langue française pour l’éducation, la
communication»,  etc... «La langue française n’est pas prête à quitter le continent
africain», juge-t-elle, appelant à une «réflexion» sur les crises qui secouent le monde
francophone et la multiplication des coups d’État en Afrique de l’Ouest. «Je pense que nos
dirigeants ont besoin d’écouter beaucoup plus, de faire attention aux citoyens, c’est
pour cela que nos programmes à l’OIF ont été recentrés et resserrés pour créer un
impact sur les citoyens», indique-t-elle.

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