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Le processus de réforme de l’ONU vers une « Nouvelle Méthode de Travail » (NWoW) tend
à faire travailler ensemble les différents acteurs pour atteindre des résultats communs après
un certain nombre d’années, en veillant à ce que les réponses humanitaires aux crises
prolongées permettent aussi d’investir pour les Objectifs du développement durable (ODD).
’un côté, le nexus n’est qu’un moyen de faire tomber les murs hérités de décennies
d’efforts de la part des ONG pour délimiter leur mandat, avec une séparation stricte
entre aide humanitaire d’urgence, développement et consolidation de la paix.
L’origine de cette tendance à la séparation est souvent attribuée aux bailleurs de
fonds, dont la structure de financement privilégie les organisations à mandat unique
et bien défini.
La communauté humanitaire est d’accord pour dire qu’en situation réelle, les
différents secteurs ne peuvent ni ne doivent rester en vase clos. Ainsi, la question se
pose de l’opportunité de continuer à utiliser cette séparation purement artificielle.
Pour certains, l’approche nexus est la meilleure, mais elle est loin de faire
l’unanimité.
Quels arguments pour et contre le nexus ?
Pour les sceptiques, la question est surtout centrée sur le « comment » : « facile à dire, mais
difficile à mettre en œuvre », peut-on ainsi lire dans un article récent du
New Humanitarian. Se pose également la question de savoir qui déterminera la portée de
l’approche nexus et qui la mettra en œuvre, alors que les acteurs de l’aide humanitaire et de
l’aide au développement font preuve de scepticisme non seulement mutuel, mais aussi envers
le rôle de l’armée dans le processus de consolidation de la paix.
ECHO, la Direction générale pour la protection civile et les opérations d’aide humanitaire de
la Commission européenne, soutient actuellement des projets pilotes fondés sur l’approche
nexus dans six pays. Mais les ONGI appellent à la prudence. Leur principale crainte ? Que le
dialogue avec l’armée, indispensable pour la mise en œuvre des processus de consolidation
de la paix, ne compromette leur capacité à fournir une aide conformément aux principes
humanitaires de neutralité, d’impartialité et d’indépendance.
Beaucoup des critiques de l’approche nexus sont valables, mais elles ne font pas
avancer le débat sur l’avenir de l’action humanitaire pour autant. En termes de coût,
chaque année le budget mondial de l’aide connaît un déficit de 15 milliards de
dollars, et ce malgré des investissements record de la part des États donateurs.
Pourquoi ? Avec des crises de plus en plus prolongées, et vouées à se poursuivre,
une bonne partie du budget dédié à l’aide humanitaire est absorbé par la réponse
aux besoins fondamentaux de personnes coincées dans une situation de crise
permanente, et qui ont besoin d’une aide de première urgence. Par exemple, la
durée moyenne d’engagement du CICR dans la réponse aux conflits est de 35 ans.
« La réalité est que le financement de l’action humanitaire est dépassé par des
besoins croissants et que plus de 80 % de l’aide humanitaire va maintenant à des
crises prolongées », d’après un rapport publié par l’Alliance2015.
Personne n’ignore les difficultés liées à la mise en place d’une aide humanitaire
dans des contextes instables et complexes, ni les compromis éthiques parfois
nécessaires aux interventions de première urgence. Dans ce contexte, l’approche
nexus représente essentiellement une occasion de réaffirmer l’importance du
principe « Do no harm », censé prévenir les potentiels effets négatifs de l’action
humanitaire. L’approche nexus encourage les partenaires de mise en œuvre à
intégrer le processus de consolidation de la paix dans le cadre de leurs projets, avec
les indicateurs nécessaires à sa réalisation.
Si l’approche nexus semble bien justifiée, qu’en est-il de la transition des bailleurs de fonds,
des gouvernements et ONG vers un tel système ?
À quoi pourrait ressembler le Nexus ?
Si la question de savoir « comment on va y arriver » n’a pas encore trouvé de réponse, on
peut tout de même avoir une idée des types d’interventions correspondants. Par exemple, une
fois les causes d’une crise alimentaire identifiées, on peut conjuguer distributions
alimentaires d’urgence et initiatives qui encouragent l’agriculture locale, en privilégiant une
approche communautaire pour réduire les conflits fonciers entre villages.
ACTED adopte une approche de type nexus depuis sa création en 1993, combinant
différentes sources de financement investies en fonction du contexte de chaque
pays, et de manière multisectorielle. Au-delà de l’urgence immédiate, ACTED
s’intéresse aux opportunités de reconstruction des moyens d’existence à long terme
et de développement durable.
Le contiguum : concomitance d’approches d'urgence, de réhabilitation
et de développement dans une zone donnée
ACTED adopte une approche en contiguum, par opposition au continuum qui fait référence à
la séquence traditionnelle des opérations d’aide d’urgence, de réhabilitation et de
développement. L’approche contiguum vise à mettre en place un ensemble d’interventions
d’urgence, réhabilitation et développement parallèles et concomitantes, souvent financées par
différents instruments d’aide. Après plus de 25 ans de programmation lien urgence,
réhabilitation et développement (LRRD), ACTED a formalisé son approche de la mise en
œuvre de NEXUS en développant AGORA.
L’approche d’AGORA repose sur deux piliers : synergies entre entre les structures locales
(autorités locales, provinciales ou nationales, société civile) et les acteurs de l’aide
internationale ; l’utilisation de l’habitat comme unité territoriale pour la planification ; la
coordination et la fourniture de l’aide et des services essentiels. Ce faisant, AGORA améliore
non seulement l’efficience, la pertinence et l’efficacité de l’intervention humanitaire, mais
favorise également un relèvement plus durable des communautés touchées par la crise grâce
un partenariat et un cadre territorial qui permet d’établir des liens entre l’aide d’urgence, la
réhabilitation et les actions de développement (LRRD).
Au cours des cinq dernières années, ACTED a travaillé sur un large éventail de
projets multisectoriels en Asie, Afrique, Europe et Amérique latine.
La Manteqa est une zone géographique et sociale fluide qui forme l’identité et la solidarité
des communautés rurales afghanes. Plutôt que d’être une unité territoriale, la Manteqa est un
espace socio-économique dans lequel les communautés sont actives dans leur quotidien et qui
est structuré par des relations de réseaux interpersonnels.
L’approche nexus en Irak
L’action intègre un certain nombre d’aspects et d’approches qui tiennent compte du
contexte du conflit : d’après un rapport récent du cluster urgence, moyens de
subsistance et cohésion sociale, « les communautés d’accueil, dont une part
importante dépend du gouvernement pour subvenir à ses besoins fondamentaux,
sont environ 30 fois plus susceptibles d’avoir des perceptions négatives et des
relations hostiles avec les déplacés internes ». Dans ses interventions, ACTED met
l’accent sur la réhabilitation des infrastructures communautaires utilisées par les
déplacés internes, les rapatriés et les communautés d’accueil. Cet engagement à
mettre en œuvre le principe fondamental de « ne pas causer de préjudices » (« Do
No Harm ») doit être intégré dans tous les projets qui suivent l’approche nexus.
Cette approche par zone est largement mise en œuvre dans l’ensemble des
missions d’ACTED. Parmi les facteurs qui impactent la vie des communautés
ciblées, on trouve les services, l’accès aux ressources, les relations
intercommunautaires, le niveau d’éducation… Autant de facteurs qui vont renforcer
ou réduire la capacité à faire face aux situations d’urgence ou aux enjeux de
développement. Lors de ses évaluations de besoins, ACTED tient compte de tous
les critères propres à chaque communauté, afin de garantir la prise en compte
effective des besoins.
Le contiguum, une dynamique à trois niveaux
Urgence – Dans les situations d’urgence, ACTED met en place des programmes de
promotion de l’hygiène pour minimiser les risques sanitaires liés aux maladies hydriques
dans les zones où les populations affluent en masse et où les infrastructures d’eau, hygiène et
assainissement sont insuffisantes.
Face aux raisons économiques qui rendent les Irakiens dépendants de l’aide, plus vulnérables
au recrutement par les groupes armés, et qui découragent les retours, ACTED réhabilite des
sites sélectionnés qui peuvent permettre de générer des opportunités d’emploi. Il s’agit
également de rétablir l’accès aux marchés en réhabilitant les routes d’accès les plus
importantes.
ACTED a remarqué rapidement que le volet consolidation de la paix et cohésion sociale était
négligé dans la réponse globale à la situation du nord de l’Irak, notamment autour de Telafar
et Mossoul. Compte tenu des défis et des sensibilités susmentionnés, ACTED a pris un
certain nombre de mesures pour s’assurer que ses programmes respectent les principes du «
Do no harm ». En outre, les centres de ressources communautaires nouvellement créés offrent
un espace dans lequel l’organisation peut offrir une série de sessions éducatives qui intègrent
des sessions de sensibilisation sur la cohésion sociale avec des ateliers de rédaction de CV et
des cours d’anglais. Ces mesures, en plus de cibler la remise en état des infrastructures
publiques qui sont utiles à tous les groupes de la communauté, représentent des moyens
cruciaux et efficaces de soutien à réduire les tensions et à rebâtir ses relations internes.