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DI2LPECH
Un grand historien
contemporain :
Arnold Toynbee
F aisant des fouilles en Grèce, trois ans plus tard sur les traces
d'Epaminondas et de Philopomen, et é c o u t a n t les conver-
sations dans les cafés des villages, Toynbee appris pour la pre-
m i è r e fois l'existence de quelque chose qui s'appelait la politique
e x t é r i e u r e de sir E d w a r d Grey. E h bien, dit-il, « même alors je ne
réalisais pas que nous aussi, après tout, nous étions aussi dans
l'histoire (5) ». L a guerre générale de 1914 le surprit alors qu'il
expliquait Thucydide aux é t u d i a n t s de B a l l i o l qui p r é p a r a i e n t les
Litterae humaniores ; et alors tout d'un coup son entendement
s'éclaira. L'expérience que nous étions en train d'avoir dans notre
monde, Thucydide l'avait déjà eue dans le sien et i l prend cons-
cience de la quasi-simultanéité des civilisations « quoi qu'en pût
dire la chronologie, il était établi que le monde de Thucydide et le
mien étaient philosophiquement contemporains. Et si c'était cela
la vraie relation entre les civilisations gréco-romaine et occidentale,
E n un mot :
L ' h u m a n i t é est suspendue à Dieu. Et Toynbee ne craint pas
d'écrire : « Ainsi au sommet de la pente visible de la falaise en
haut de laquelle la créature est attirée par l'appel de son Créateur
à tenter une ascension périlleuse, nous entrevoyons la main de
Dieu se tendant vers le bas pour rencontrer la main dressée de
l'alpiniste en difficulté ; et, au point où les mains se rencontrent
dans l'étreinte de l'Amour, la Loi et la Liberté cessent de se dis-
tinguer ».
définitif qui puisse lui garantir son destin, il faut qu'un mouve-
ment constant aille du temps à l'éternité et de l'éternité au temps,
qu'une partie du temps passe dans l'éternité par une insertion
mystérieuse, que l'éternité soit dans le temps par un pressenti-
ment et une espérance » (17).
On peut dire que peut-être inspiré par l'esprit d'un Newman,
Toynbee a réalisé avec le maximum d'ampleur le v œ u d'un des
plus grands philosophes religieux catholiques du d é b u t du siècle,
l'oratorien Lucien L a b e r t h o n n i è r e qui écrivait en 1904.
« Au risque d'en scandaliser quelques-uns, nous continuons de
regarder comme absolument juste l'idée qu'a eue Bossuet, dans
le Discours de l'histoire universelle, de faire du Christ le centre
et la vérité de l'histoire et de se servir de l'histoire pour mettre
en valeur la vérité du Christ. Seulement au lieu de donner pour
objet à l'histoire les événements extérieurs, la naissance et la chute
des Empires, les exploits des grands capitaines et les intuitions
des grands politiques, c'est la vie même de l'humanité qu'il faut
lui donner pour objet, dans cette immense inquiétude enfin qui
en se renouvelant toujours est toujours la même et ne lui permet
de trouver le repos nulle part. Et il y aurait lieu de montrer que
le Christ est présent à toute cette diversité, inconnu, connu ou
méconnu, désiré, accepté ou repoussé, mais toujours principe et
centre de mouvement.
L'histoire par la critique devenant de plus en plus une étude
de l'humanité ainsi envisagée par le dedans, on peut rêver pour
les Bossuet de l'avenir la tâche de faire, à ce point de vue, une
nouvelle synthèse de l'humanité dans le Christ et un nouveau dis-
cours sur l'histoire universelle » (18).
L.-J. D E L P E C H