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157 Janvier/
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Mars
juin 2012
2019
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AU TRAVAIL • n°
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COMITÉ DE RÉDACTION des services de santé
au travail. L'abonnement
Rédacteur en chef : BERNARD SIANO
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Rédactrice en chef adjointe : ANNE DELÉPINE une durée de deux ans.
Secrétaire générale de la rédaction : ANNE SCHALLER Un avis de réabonnement
est envoyé à échéance.
Chargée d’études bibliographiques et de veille : ANNIE BIJAOUI
+ D’INFOS
Correctrice : CYNDIE JACQUIN-BRISBART www.rst-sante-travail.fr
Chargée de rubrique Allergologie professionnelle :
NADIA NIKOLOVA-PAVAGEAU
Relecteurs et conseillers médicaux : MARIE-CÉCILE BAYEUX-DUNGLAS,
PHILIPPE HACHE, STÉPHANE MALARD, FLORENCE PILLIÈRE
Assistante de gestion : DÉBORAH PAYAN
COMITÉ SCIENTIFIQUE
AGNÈS AUBLET-CUVELIER, Département Homme au travail, INRS
CATHERINE AUBRY, Direction des Études et recherches, INRS
ISABELLE BALTY, Département Expertise et conseil technique, INRS
SYLVIE ODE, Groupement des infirmier(e)s du travail, Paris
MARIA GONZALEZ, Service de pathologie professionnelle, hôpital civil de Strasbourg
GUY HÉDELIN, Département Épidémiologie en entreprise, INRS
PATRICK LAINE, Département Expertise et conseil technique, INRS
FAHIMA LEKHCHINE, Département Information et communication, INRS
SERGE MÉSONIER, Association française des intervenants en prévention des risques
professionnels de services interentreprises de santé au travail, Cergy-Pontoise
GÉRARD MOUTCHE, Département Formation, INRS
CHRISTOPHE PARIS, Centre de consultation de pathologie professionnelle et de médecine
environnementale, Centre hospitalier de Rennes
ALAIN ROBERT, Département Toxicologie et biométrologie, INRS
PRATIQUES ET MÉTIERS
TM 50 P. 119 Santé et maintien en emploi :
prévention de la désinsertion
professionnelle des travailleurs.
Synthèse de la recommandation
de bonne pratique, février 2019
OUTILS
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P. 14 NOUVEAUTÉS DE L’INRS
P. 17 PARTICIPEZ À LA RECHERCHE
Échanges
Évaluer les risques d'une situation de travail et proposer des mesures de prévention
O35 heures, réparties sur 6 semaines
Module 3 O Objectifs : Mettre en œuvre une méthode d'évaluation des risques professionnels et proposer des mesures de
J@2304
prévention adaptées
J@2334 Engager et suivre les actions de prévention ; Mettre en place une organisation permettant d'effectuer une
évaluation récurrente des risques
J@2335 situations à risques liées à un projet d'aménagement de locaux et évaluer les risques ; Proposer des mesures de
prévention et préciser les modalités de leur mise en œuvre
Les formations mixtes : les plus-values Parcours de formation mixte sur le risque
de la FAD et du présentiel chimique
Une nouveauté 2019, 2 parcours (figure 4).
À l’INRS, les formations mixtes combinent la flexi-
bilité des formations à distance avec des modalités « Organiser le suivi médical des salariés exposés aux
pédagogiques classiques. Le travail de formation à risques chimiques » (B@1501)
distance (acquisition personnelle de connaissances) Ce parcours, destiné aux médecins du travail, permet
peut ainsi être approfondi et développé en présentiel d’acquérir progressivement les connaissances néces-
(développement de compétences en groupe). saires à l’organisation du suivi médical de salariés
exposés aux risques chimiques.
La formation « Évaluer et prévenir les nui- Les connaissances de bases autour de la physicochi-
sances sonores » (J@0508) mie, la toxicologie, les fiches de données de sécurité
Elle est dispensée selon deux modalités pédago- (FDS), les étiquettes et la réglementation sont abor-
giques : accompagnée à distance et en présentiel. dées en autoformation (C@1501). Les participants
Cette formation est destinée aux acteurs des services sont ensuite accompagnés à distance pour mettre
de santé au travail, fonctionnels « sécurité et santé au en œuvre l’évaluation et la prévention du risque
travail », ingénieurs… chimique sur des cas d’entreprises à l’aide de situa-
La première partie, en formation accompagnée à dis- tions filmées. Une journée en présentiel clôture ce
tance, concerne l’acquisition des connaissances de parcours de formation au cours de laquelle les mé-
base permettant de donner au groupe des apprenants decins sont confrontés à des cas cliniques d’exposi-
un socle homogène de connaissances nécessaires et tion à des substances chimiques donnant lieu à des
indispensables pour la mise en œuvre d’une méthodo- échanges entre pairs sur l’organisation du suivi médi-
logie d’évaluation des risques encourus par les salariés cal à mettre en œuvre.
exposés au bruit. La deuxième partie, en présentiel,
concerne la démarche de prévention du risque à pro- « Évaluer et prévenir les risques liés aux agents
prement parler, c’est-à-dire la mise en place de me- chimiques » (C@1503)
sures de prévention adaptées à l’entreprise et le suivi En 2019, l’ensemble des modules autour de la dé-
de l’utilisation des moyens de prévention. marche de prévention du risque chimique est pro-
Parmi les avantages du e-learning peuvent être ci- Pour en savoir plus :
tées : www.inrs.fr/services/formation/distance.html
Ola réduction des contraintes géographiques et tem-
porelles facilitant l’accès des salariés notamment de
TPE-PME, les personnels itinérants… ;
Ola diminution des coûts, des délais et des conditions
d’entrée en formation ;
O la souplesse, l'autonomie dans le rythme d’appren-
tissage ;
O l’accessibilité plus favorable pour les publics at-
teints de handicap physique.
Toutefois, il ne faut pas faire abstraction des limites
sociales, pédagogiques et culturelles. En effet :
O des inégalités persistent face à la numérisation de
la formation, tant dans l’acquisition du matériel in-
formatique que dans l’accès au haut débit et à un ni-
veau de connaissances et de pratiques informatiques
suffisants ;
O les formations numériques peuvent contribuer à
fragiliser les limites entre sphère professionnelle et
sphère privée ;
O les salariés sont très attachés à la modalité en pré-
sentiel lié à des situations pédagogiques requérant
un « face-à-face » ou une mise en situation réelle. Il
y a un intérêt exprimé pour le présentiel du fait de la
rupture spatiale et temporelle que cela produit avec
le cadre quotidien du travail ;
O le risque d’abandon des formations numériques
reste élevé.
Par ailleurs, le recours aux outils numériques n’est
pas une garantie automatique de créativité ou de
valeur ajoutée pédagogique. En effet, il nécessite
une appropriation de ces outils par les concepteurs
pédagogiques pour qu’ils puissent les intégrer à des
parcours de formation scénarisés, comprenant une
progression pédagogique et permettant une mon-
tée en compétences des apprenants. De fait, ce sera
une forte mobilisation de l’ingénierie pédagogique
qui garantira cette valeur ajoutée avec les nouvelles
approches et technologies.
Enfin, l’accompagnement humain, par le tutorat, est
fortement souhaitable au cours de l’apprentissage
afin d’accroître l’efficacité et l’acceptabilité des for-
mations à distance.
(SUITE FIGURE 2
ET BIBLIOGRAPHIE)
Des renvois vers le « Guide amiante à l’attention des médecins du travail et des équipes
pluridisciplinaires. Rôle et responsabilités » de l’OPPBTP [2] :
BIBLIOGRAPHIE
[1] Rapport annuel 2017. Assurance Maladie Risques professionnels, 2017 (https://assurance-maladie.
ameli.fr/qui-sommes-nous/publications-reference/assurance-maladie-risques-professionnels/rapports-
annuels#text_47065/).
[2] BRICHET E, BRICHET O, LOIZEAU M - Guide amiante à l’attention des médecins du travail et des équipes
pluridisciplinaires. Rôle et responsabilités. PréventionBTP, 2017 (www.preventionbtp.fr/Documentation/
Explorer-par-produit/Information/Ouvrages/Guide-amiante-a-l-attention-des-medecins-du-travail-et-des-
equipes-pluridisciplinaires-Role-et-responsabilites).
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Étude de cas / Les led dans l'éclairage horticole :
TECHNIQUE évaluation de l'exposition des salariés aux
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Congrès / SAIS 2018 : sécurité des systèmes industriels
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Actualité juridique, Focus Normalisation, Notes
techniques, Bases de données, Formation, Fiche HST…
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NOUVEAUTÉS DE L’INRS
Les Rendez-vous. Horaires atypiques : une émission proposée par Travail & Sécurité
www.travail-et-securite.fr/ts/les-rendez-vous-ts.html
Depuis janvier 2019, la rédaction de Travail & Sécurité, magazine mensuel de l'INRS, propose
un nouveau rendez-vous sur le site de l'Institut. Il s’agit d’une table ronde filmée qui permet
d’approfondir des sujets abordés dans la revue. Des experts répondent aux questions qui se
posent sur un sujet donné et des représentants d’entreprises viennent témoigner de leur
expérience. Ce premier « Rendez-vous » est une émission consacrée aux horaires atypiques,
notamment au travail de nuit et au travail posté, en complément du dossier publié le même
mois dans le magazine. La vidéo de 53 minutes est en ligne.
Focus juridique. Pots d’entreprise et alcool : quelles sont les règles applicables ?
www.inrs.fr/publications/juridique/focus-juridiques/focus-pots-entreprise-alcool.html
De nombreuses entreprises organisent des pots. Moments de convivialité, ils contribuent à renforcer les liens du collectif de travail.
Mais la consommation de boissons alcoolisées peut constituer un facteur de risque pour la santé et la sécurité des salariés. Ce focus
fait le point sur les règles applicables à tous les pots d’entreprise (fin d’année, anniversaire, départ…) : Est-il possible d’organiser
un pot avec des boissons alcoolisées ? Les pots dans les locaux de l’entreprise et le Code du travail ; Les pots en dehors des lieux de
travail ; Existe-t-il des règles spécifiques pour les jeunes travailleurs et les apprentis ? Comment limiter et prévenir les risques ? La
responsabilité de l’employeur peut-elle être engagée en cas d’accident pendant ou après le pot d’entreprise ?
Mises à jour
O1,2-Dichlorobenzène
O1,4-Dioxane
OAcétone
OAcétonitrile
OAlcool méthylique
Tutoriel. Logiciel ProtecPo : un logiciel pour mieux protéger sa peau OAmiante
www.inrs.fr/media.html?refINRS=Anim-165 ODichlorométhane
L'INRS et son homologue québécois l'IRSST ont conçu ProtecPo, un logiciel interactif OHydrogène sulfuré
de pré-sélection des matériaux polymères (butyle, fluoroélastomère, latex, polychlo- OMéthylisobutylcétone
roprène et nitrile) utilisés dans les équipements de protection individuelle (gants, On-Hexane
combinaisons et bottes). L'objectif est de proposer aux professionnels de la prévention OPlomb métallique et composés
et aux entreprises un outil d'aide au choix des matériaux les mieux adaptés pour la (en Pb)
protection cutanée, notamment contre les solvants et les mélanges de solvants. Un OToluène
tutoriel pour aider l'utilisateur de l'outil est mis en ligne. Cette vidéo de 2.42 minutes OTriéthylamine
le guide pas à pas. OXylènes (isomères mixtes, purs)
ICIPEZ à l
a
PART
Projection thermique R CHE
E
et soudage : évaluations REC
H
biologique et atmosphérique
des expositions au chrome et au nickel
Objectifs de l’étude
OÉvaluer les expositions professionnelles au Cr et au
Ni lors des divers procédés de projection thermique et Responsable d’étude à contacter :
les comparer à ceux des opérations de soudage moins Nadège Jacoby
exposantes aux particules ultrafines. Tél. : 03 83 50 21 48
O Proposer, à partir des résultats obtenus, une stra- nadege.jacoby@inrs.fr
tégie de surveillance biologique adaptée aux opé- Laboratoire de Biométrologie
rateurs exposés à ces deux métaux et utilisable en Département Toxicologie et biométrologie
santé au travail. INRS, rue du Morvan, CS 60027
OEstimer l’efficacité des moyens de protection indivi- 54519 Vandœuvre-lès-Nancy Cedex
duelle mis en place.
Z à la
Exposition aux fluides de
TICIPE
PAR
H E
coupe et marqueurs d’effets
C
R E C HER
précoces : stress oxydant,
inflammation et génotoxicité
(OxIGenoCOM)
IPEZ à la
Exposition professionnelle E
PART
IC
RCH
aux silices amorphes REC
H E
nanostructurées : biomarqueurs
d’effets précoces
P. 45 VU DU TERRAIN
en
résumé
sein. Des études animales de plus éléments en faveur d’un excès de le risque de cancer du sein dans
en plus convaincantes sont venues risque de cancer du sein associé au le cadre de l’exposition au travail
appuyer cette théorie [2], qui a aus- travail de nuit, avec des éléments posté de nuit. Alors qu’en 2006 cet
si été confortée par des études chez de preuve limités dans les études organisme avait conclu qu’il exis-
les femmes aveugles, qui présen- cliniques et épidémiologiques. Les tait une association entre le travail
taient un taux plus faible de can- données expérimentales ont été de nuit et le cancer du sein, il consi-
cers du sein [3]. considérées suffisantes. Les experts dère désormais que « cette conclu-
En 2007, le Centre international ont conclu à un « effet probable » sion n'est plus tenable » [8].
de recherche sur le cancer (CIRC) du travail de nuit sur le risque de Ainsi, le débat scientifique sur le
a classé le travail posté qui induit cancer [6]. L’analyse critique des travail de nuit et le risque de cancer
la perturbation des rythmes cir- données de la littérature faite par du sein se poursuit, alors que les dis-
cadiens comme un « cancérogène les experts de l’ANSES porte sur positions du Code du travail français
probable » (groupe 2A). Cette des études publiées entre janvier relatives au suivi de l'état de santé
conclusion était basée sur des 2010 et décembre 2014 (incluant des travailleurs et applicables au 1er
preuves jugées suffisantes issues des études parues jusqu’en juin janvier 2017 ont été modifiées.
d’études d’expérimentation ani- 2015). Au total, vingt-quatre études En 2018-2019, il semble pertinent
male sur la cancérogénicité de épidémiologiques ont été retenues de faire le point des connaissances
l’exposition à la lumière pendant pour l’évaluation de l’effet du tra- sur l’implication de l’horloge bio-
1. Cette notion la nuit biologique 1. Les éléments de vail de nuit sur le cancer du sein : logique et des rythmes circadiens
correspond preuve des études chez l’homme huit études de cohorte prospectives dans le risque de cancer du sein
au moment (huit études) sur le travail posté et seize études cas-témoins, dont chez les travailleuses de nuit, puis
où l’horloge incluant le travail de nuit, étaient sept nichées dans des cohortes. de contextualiser les données
biologique met
jugés limités [4]. Cinq méta-analyses ont aussi été scientifiques dans le cadre de la
tout en œuvre
pour le sommeil. En 2008, le Danemark a été le pre- considérées. réalité du travail et de la santé au
Il s’agit des mier pays où des travailleuses de D’autres organismes se sont pro- travail, en particulier en France.
horaires préférés nuit atteintes d’un cancer du sein noncés sur la question. En 2012, Depuis un peu plus de trois ans, des
de sommeil qui ont été indemnisées. La patholo- la Maison des représentants de nouvelles études ont été publiées,
dépendent donc
gie a été liée à l’exposition profes- l’association médicale américaine apportant quelques éléments nou-
du chronotype et
n’est pas toujours sionnelle au travail de nuit dans 38 (American Medical Association veaux au débat scientifique.
superposable des 75 cas soumis au Comité des House of Delegates) a conclu que L’encadré 1 présente quelques no-
à la nuit maladies professionnelles. Les cas la perturbation circadienne com- tions principales sur le sujet.
astronomique. ayant obtenu une compensation porte des effets cancérogènes po-
Les horaires de la
concernaient des femmes qui tra- tentiels, notamment sur le cancer
nuit biologique
peuvent être vaillaient généralement au moins du sein, associés à la suppression
estimés à partir du une nuit par semaine pendant au de la mélatonine. Dans ce rapport, ÉTUDES ÉPIDÉMIOLOGIQUES
questionnaire de moins 20 à 30 ans et où il n'y avait les experts citaient des études de RÉCENTES
Horne-Ostberg. « aucun autre facteur significatif laboratoire sur le rôle de la méla-
pouvant expliquer le développe- tonine comme anti-cancérogène Depuis la publication du rapport de
ment du cancer du sein » [5]. Le can- et suppresseur tumoral. Les élé- l’ANSES, de nouvelles études épidé-
cer du sein associé à l’exposition au ments de preuve des études épi- miologiques sur l’association entre
travail posté et/ou de nuit n’a pas démiologiques étaient toujours l’exposition au travail de nuit et le
été intégré dans les tableaux des limités [7]. Tandis que le CIRC risque de cancer du sein ont été
maladies professionnelles danois, mettait l’accent sur le risque pour publiées : quatre études de cohorte
les dossiers étant évalués indivi- les travailleurs postés, les experts [9 à 12], dont deux sur des cohortes
duellement. américains alertent sur le risque d’infirmières [10, 11], et une étude
En 2016, une expertise collective pour toute personne exposée à la cas-témoins [13]. Les principaux ré-
de l’Agence nationale de sécu- lumière pendant la nuit biologique. sultats quantitatifs de ces travaux
rité sanitaire de l’alimentation, Au Pays-Bas, le Conseil de la santé sont présentés dans le tableau I
de l’environnement et du travail (Health Council of the Netherlands) pp. 24 à 27.
(ANSES) a évalué les risques sani- considérait, dans un avis publié D’autres études s’intéressent à cer-
taires liés au travail de nuit. Les en octobre 2017, que la recherche tains aspects du sommeil [14] ou à
experts concluent qu’il existe des n'est pas concluante concernant l’exposition à la lumière artificielle
> TRAVAIL POSTÉ/DE NUIT ET CANCER DU SEIN : QUELQUES NOTIONS ET LEURS DÉFINITIONS
Horloges biologiques et attribué à des profils distincts basés nuit » et le « travail posté » lors d’un
rythmes circadiens : Le système sur l’immunohistochimie, des tests consensus international, en prenant
circadien comporte une horloge moléculaires et génétiques. en compte l’impact de l’horaire sur la
biologique centrale et des horloges Le cancer du sein est le cancer féminin physiologie circadienne : tout travail
périphériques, et est organisé de le plus fréquent dans l’ensemble des qui comprend au moins trois heures
façon hiérarchique pour harmoniser régions du monde. En France, pays de travail entre minuit et cinq heures
les fonctions physiologiques, à fort taux d’incidence au niveau doit être considéré comme « travail
psychologiques et comportementales européen, le cancer du sein est le de nuit ».
selon une durée d’environ une cancer le plus fréquent et le plus À l’échelle mondiale, on estime
journée terrestre. Des mécanismes meurtrier chez la femme. qu’environ 20 % de la population
moléculaires contrôlent de façon active des pays industrialisés est
rythmique d’autres processus Facteurs de risque de cancer du engagé dans le travail posté et/ou de
moléculaires, physiologiques, sein : Au contraire d’autres types de nuit.
biochimiques et comportementaux, cancer, il n’y a pas de consensus sur la
y compris des évènements tels que cause primaire du cancer du sein. Des Cadre réglementaire : La
le cycle cellulaire, la réparation de facteurs de risque dits « traditionnels » définition légale du travail de nuit
l’ADN, l’apoptose, l’angiogenèse et la tels que des mutations génétiques et du travailleur de nuit adoptée par
métabolisation et détoxification des primaires, l’histoire reproductive, chaque pays n’est pas exactement
médicaments. l’histoire familiale de cancer et les la même. En France, la définition
antécédents de certaines lésions juridique et les dispositions relatives
Cancer du sein : Le cancer du bénignes du sein sont déjà bien au travail de nuit sont prévues aux
sein est une entité nosologique établis. Néanmoins, ils ne permettent articles L. 3122-1 à L. 3122-24 du Code
qui regroupe plusieurs phénotypes d’expliquer qu’une partie du risque. du travail. La directive européenne de
hétérogènes. Biologiquement, il ne 2003 (directive 2003/88/CE) précise
s’agit pas d’une maladie « unique » Travail de nuit : Les chercheurs certains aspects de l'aménagement
mais le terme cancer du sein est ont essayé de définir le « travail de du temps de travail.
nocturne [15 à 22], impliqués dans était auto-rapportée : « avoir déjà tistiquement significative n’a été
le risque de cancer du sein. Elles ont » et « n’avoir jamais » travaillé de retrouvée entre le travail de nuit et
l’intérêt d’explorer des hypothèses nuit ainsi que le nombre d’années l’incidence de cancer du sein dans
mécanistiques, mais la variable tra- d’exposition pour les deux pre- les trois cohortes. Les auteurs consi-
vail posté / de nuit n’est pas prise mières cohortes ; pour l’UK Biobank, dèrent qu’une augmentation du
en compte et ainsi ces études ne se- l’exposition était définie comme un risque relatif d'incidence de can-
ront pas détaillées dans cet article. « emploi actuel incluant du travail cer du sein de seulement quelques
De plus, quatre nouvelles méta- de nuit », sans information sur la pour cent ne peut pas être exclue.
analyses ont aussi été publiées [9, durée de l’exposition. Le critère de Néanmoins, ils concluent que le
23 à 25]. jugement était l’incidence de can- travail de nuit, y compris sur le long
cer du sein (premier diagnostic terme (20 ans ou plus), n’a que très
LES ÉTUDES EN POPULATION de cancer du sein invasif ou décès peu ou pas d’effet sur l’incidence de
GÉNÉRALE attribué à un cancer du sein). Par- cancer du sein. Ils avancent que la
Travis et al. [9] ont analysé les don- mi 795 850 femmes suivies, dont classification du CIRC sur le travail
nées de trois études de cohorte 84 357 exposées au travail de nuit, de nuit comme cancérogène pro-
prospectives menées au Royaume- 7 710 cas de cancer du sein ont été bable pour le sein chez l’humain
Uni : Million Women Study, EPIC-Ox- observés, dont 768 chez les travail- n’est plus justifiée. Ces cohortes
ford et UK Biobank. L’évaluation de leuses de nuit. En analyse multiple sont des études à grande échelle
l’exposition au travail posté de nuit (ajustée), aucune association sta- qui n’ont pas été spécifiquement
,Tableau I
> PRINCIPAUX RÉSULTATS QUANTITATIFS DES ÉTUDES ÉPIDÉMIOLOGIQUES RÉCENTES (depuis 2016, après la publication
Fritschi Travail de nuit : entre 00h Étude cas-témoins en population Questionnaire, entretien. Cas de cancer du sein
2017 et 05h. générale (Breast Cancer Environment Les données détaillées identifiés par le registre
Australie [13] and Employment Study), sur les horaires de travail du cancer de l’État.
Dérèglement circadien initialement publiée en 2013, puis n’étaient disponibles que
(« désynchronisées ») : si réanalyse des données d’exposition pour ceux qui travaillaient Témoins choisis
au moins une heure de pour tenir compte du dérèglement après minuit. aléatoirement sur la liste
travail pendant la nuit circadien. électorale, appariés par
biologique (i.e. les heures l’âge
préférées de sommeil,
estimées à partir du
questionnaire de Horne-
Ostberg).
Dérèglement circadien Parmi 1 385 postes de travail de
« tardif » : présence nuit, 30 ont changé de catégorie
d’au moins une heure (de « pas exposées au travail de
de travail (le soir/nuit) nuit » à « exposées au dérèglement
après le début de la nuit circadien tardif »).
biologique.
Dérèglement circadien
« précoce » : présence
d’au moins une heure de
travail (le matin) avant la
fin de la nuit biologique.
Si l’heure de coucher
préférée était dans les
2 heures après la fin de
leur poste de travail, les
femmes étaient classées
comme « non exposées »
au dérèglement circadien.
AFC : antécédents familiaux de cancer du sein ; AM: âge à la ménarche ; AMS : antécédents de maladie bénigne du sein ; AP : activité physique ; APE : âge à la naissance du
premier enfant ; CA : consommation d’alcool ; CO : contraception orale ; DA : durée de l’allaitement ; DR : distance de la résidence par rapport au lieu de travail ; Ed : niveau
d’éducation ; ER : récepteurs à œstrogènes ; HC : habiter avec un compagnon ; HER2 : facteur de croissance épidermique humain 2 ; HR : hazard ratio ; IMC : indice de masse
corporelle ; IMC-18 : IMC à l’âge de 18 ans ; Mam : utilisation de mammographie ; Men : type de ménopause et âge de la ménopause ; OR : odds ratio ; P : parité ; PN : pays de
naissance ; RR : risque relatif ; SA : santé auto-rapportée ; SSE : statut socio-économique ; T : tabac ; TRH : thérapie de remplacement hormonal.
RR/OR ou Facteurs
Nombre de cas Catégories d'exposition IC 95%
HR d’ajustement
2 720, dont 67 chez les Travail de nuit vs pas de travail de nuit au moment du recrutement 0,78 0,61 – 1,00
femmes exposées Fréquence du travail de nuit
parfois 0,71 0,50 – 1,00
d’habitude 0,94 0,54 – 1,67
toujours 0,85 0,55 – 1,31
1 201 cas, 1 783 témoins Âge, PN, DR,
SSE, Ed, AM,
APE, P, DA, IMC,
Dérèglement circadien (précoce ou tardif) 1,03 0,86 – 1,23 CA, T, AP, AFC
QQQ
,Tableau I (suite)
Wegrzyn Nombre total d’années 2 cohortes prospectives, infirmières, Questionnaire, mis à jour Cancer du sein invasif
2017 exposées au travail posté Nurses’ Health Study 1 et 2 – NHS et tous les deux ans auto-rapporté, vérifié
États-Unis [10] avec au moins trois nuits NHS2 : 193 075 femmes, 24 ans de dans le dossier médical
par mois (en plus des suivi
jours ou soirs)
NHS, de 1988-2012, 78 516 femmes
âgées de 42-67 ans lors du
recrutement (surtout période de
retraite, seulement 3 % travaillaient
de nuit en 1996)
NHS2, de 1989-2013, 114 559
femmes âgées de 25-42 ans lors
du recrutement (information sur
l’exposition mise à jour)
Jørgensen “normalement vous Cohorte d’infirmières danoises Questionnaires auto- Décès par cancer du
2017 travaillez” : de nuit 23h00 – (Danish Nurses Organization study), administrés avec sein identifiés dans le
Danemark [11] 07h00, le soir 15h00 – 28 731 infirmières, âgées de 44 ans. information sur les registre danois des causes
23h59, de jour 07h00 – Suivi : 17 ans horaires de travail de décès. (Cette étude
15h00, ou en horaires recueillie une seule fois s’intéressait aussi à la
alternants. lors du recrutement. mortalité toutes causes et
spécifiques)
Vistisen Travail de nuit : tout poste 155 540 femmes salariées du secteur Informations Cas de cancer identifiés
2017 comprenant au moins public, suivies de 2007 à 2012 individuelles, objectives et dans le registre danois
Danemark [12] 3 heures de travail entre (évaluation de l’effet du travail de détaillées sur les heures de cancer du sein et
00h00 et 05h00. nuit sur le risque de cancer du sein de travail au jour le jour, information sur le sous-
Travail de jour : tout poste à court terme). vérifiées sur les registres type de cancer (statut ER
comprenant au moins de paie. et HER2).
3 heures de travail entre
06h et 20h.
AFC : antécédents familiaux de cancer du sein ; AM: âge à la ménarche ; AMS : antécédents de maladie bénigne du sein ; AP : activité physique ; APE : âge à la naissance du
premier enfant ; CA : consommation d’alcool ; CO : contraception orale ; DA : durée de l’allaitement ; DR : distance de la résidence par rapport au lieu de travail ; Ed : niveau
d’éducation ; ER : récepteurs à œstrogènes ; HC : habiter avec un compagnon ; HER2 : facteur de croissance épidermique humain 2 ; HR : hazard ratio ; IMC : indice de masse
corporelle ; IMC-18 : IMC à l’âge de 18 ans ; Mam : utilisation de mammographie ; Men : type de ménopause et âge de la ménopause ; OR : odds ratio ; P : parité ; PN : pays de
naissance ; RR : risque relatif ; SA : santé auto-rapportée ; SSE : statut socio-économique ; T : tabac ; TRH : thérapie de remplacement hormonal.
conçues pour analyser l’impact des de nuit pendant toute sa vie. Ces fai- ont repris et réanalysé les données
différents horaires de travail sur blesses ont été fortement critiquées, de l’étude Breast Cancer Environ-
l’incidence de cancer. Dans deux notamment par les quatre cher- ment and Employment Study [28]
des cohortes, les questions sur le cheurs qui travaillent depuis plus pour tenir compte du dérèglement
travail de nuit ont été ajoutées aux longtemps sur l’épidémiologie du circadien, i.e. en évaluant si les ho-
questionnaires existants. L’échantil- travail de nuit et le risque de cancer raires de travail se déroulent pen-
lon de ces trois études est composé du sein [26]. Ils ont remis en cause dant la nuit biologique des femmes.
de femmes ménopausées, avec un les conclusions de ce travail, qualifié Cette dernière a été estimée à partir
âge moyen lors du recrutement de « mauvaise science ». La réponse du questionnaire de Horne-Ostberg.
dans chaque étude supérieur à 50 de ces chercheurs [27] a permis une Celles qui travaillaient au moins
ans ; le temps de suivi est limité à réelle remise en cause des travaux une heure pendant leur nuit biolo-
2 à 3 ans. L’information sur les ho- de Travis et al. gique étaient considérées « désyn-
raires de travail et la définition de De nouveaux résultats d’une étude chronisées ». Les travailleuses pré-
l’exposition sont imprécises. Une cas-témoins en population générale sentant un chronotype plus tardif
« travailleuse de nuit » pouvait être menée en Australie ont été récem- (défini comme l’heure de coucher
quelqu’un ayant travaillé une fois ment publiés [13]. Les chercheurs préférée dans les 2 heures après la
Âge, Taille,
IMC, IMC-18,
AM, APE, P, DA,
Men, TRH, AFC,
AMS, CA, AP,
5 971 cas Histoire de travail posté de nuit vs pas de travail posté, pendant :
Mam
1-14 ans (3 162 cas) 1,03 0,96 – 1,07
15-29 ans (331 cas) 1,02 0,94 – 1,19
≥ 30 ans (96 cas) 0,95 0,77 – 1,17
1 245 cas, dont Présence de travail de nuit vs travail de jour exclusif Âge, APE, P,
136 ER-/HER2-, Tous sous-types de cancer 0,90 0,80 – 1,01 AFC, CO, CA,
797 ER+/HER2-, Sous-type ER-/HER2- 0,85 0,59 – 1,23 Ed, Mam
77 ER-/HER2+, Sous-type ER+/HER2- 0,80 0,68 – 0,95
108 ER+/HER2+, Sous-type ER-/HER2+ 1,49 0,93 – 2,39
et 127 non classés Sous-type ER+/HER2+ 1,26 0,84 – 1,89
fin de leur poste de travail) étaient LES ÉTUDES DE COHORTES naire, mis à jour tous les deux ans,
classées « non exposées ». Parmi D’INFIRMIÈRES et le taux de suivi cumulé dans ces
1 385 postes de travail de nuit, 30 Des nouvelles données sur les cohortes était supérieur à 90 %. Le
ont changé de classification par deux cohortes d’infirmières aux facteur de risque étudié est l’expo-
rapport à la première analyse. Les États-Unis (Nurses’ Health Study 1 sition au travail posté incluant au
chercheurs n’ont pas retrouvé de et 2 – NHS et NHS2) viennent éga- moins trois nuits par mois. Le cri-
différences significatives entre les lement d’être publiées [10]. Ces tère de jugement principal est la
résultats originaux et ceux qui pre- études correspondent maintenant survenue de cancer du sein invasif
naient en compte le chronotype. à un suivi de 24 ans et explorent (le cancer in situ n’est pas pris en
Les conclusions sont limitées par les davantage les relations entre le compte dans les analyses). Parmi
données manquantes et il n’a pas travail posté de nuit et le risque de 193 075 femmes suivies depuis 24
été possible de calculer le nombre cancer du sein en fonction du mo- ans dans les deux cohortes, 9 541
total de « désynchronisations circa- ment d’exposition au travail posté ont développé un cancer du sein
diennes » au long cours ni d’étudier au cours de la vie et du statut des (5 971 dans la cohorte NHS et 3 570
les femmes qui commençaient le récepteurs hormonaux. Les infir- dans la cohorte NHS2). Dans la
travail avant minuit. mières répondaient à un question- cohorte NHS, aucune association
statistiquement significative n’a facteurs sur l’incidence du cancer teurs d’œstrogènes et au facteur de
été retrouvée entre l’exposition au du sein : l’âge du début d’exposition croissance épidermique humain
travail posté de nuit et l’incidence (début de carrière, 20-30 ans) et de 2 (HER2). La cohorte comprenait
de cancer du sein (exposition d’au la durée de l’exposition (20 ans ou 155 540 femmes salariées du sec-
moins 30 ans vs pas d’exposition). plus). teur public, suivies de 2007 à 2012.
Le suivi de cette cohorte a majori- Les données de la cohorte d’in- Les informations sur les heures de
tairement eu lieu pendant une pé- firmières danoises [11] (Danish travail au jour le jour étaient dis-
riode où les femmes n’étaient plus Nurses Organization study, 28 731 ponibles sur les registres de paie.
exposées au travail de nuit : seules infirmières, âgées de 44 ans et plus) Le travail de nuit était considéré
3 % des femmes étaient toujours relatives à leurs horaires de travail comme tout poste comprenant
exposées au travail de nuit en 1996. (nuit 23h00 – 07h00, soirée 15h00 – au moins 3 heures de travail entre
Dans la cohorte NHS2, l’exposi- 23h59, alternant, ou de jour 07h00 00h00 et 05h00. Le travail de jour
tion à long terme au travail posté – 15h00) ont été croisées avec le était celui qui comprenait au moins
incluant la nuit était associée à un registre danois des causes de décès 3 heures de travail entre 06h et 20h.
risque accru de cancer du sein : les afin d’identifier les associations Au total, 1 245 cas incidents de can-
femmes ayant déjà au moins 20 entre les horaires de travail et la cers du sein ont été identifiés. Les
ans d’exposition lors du recrute- mortalité toutes causes confon- résultats n’ont pas confirmé d’ef-
ment (HR pour Hazard ratio = 2,15 ; dues et par causes. Pendant les 17 fet global à court terme du travail
IC95 % = 1,23–3,73) et les femmes ans de suivi, il y a eu 204 décès par posté de nuit sur le risque de cancer
avec une exposition cumulée de cancer du sein, dont 16 chez les infir- du sein. Une augmentation modé-
20 ans ou plus (HR = 1,40 ; IC95 % = mières de nuit et 38 chez celles avec rée du risque a été suggérée pour
1,00–1,97) étaient plus à risque par des postes alternants. Le risque de les sous-types de cancer de sein
rapport aux femmes non exposées. mortalité toutes causes pour les de statut HER2 positif, indépen-
Des associations statistiquement infirmières de nuit était de 26 % su- damment du statut ER. Bien que la
significatives ont été aussi obser- périeur par rapport aux infirmières population étudiée soit grande et
vées avec le statut des récepteurs de jour, mais aucune association compte tenu de la période d’expo-
hormonaux des tumeurs et le tra- significative n’a été montrée entre sition retenue (5 ans), la puissance
vail posté de nuit dans la cohorte les horaires de travail et la morta- statistique pour la plupart des
NHS2 : le risque de développer un lité par cancer. L’information sur les sous-analyses était limitée (du fait
cancer du sein invasif exprimant horaires de travail était recueillie par exemple du faible nombre de
les récepteurs à œstrogène (ER+) une seule fois lors du recrutement. sujets exposés selon les combinai-
ou progestérone (PR+) est une fois Aucune information n’était dispo- sons de sous-types de cancers). Les
et demie plus grand chez les infir- nible sur la durée et l’intensité du définitions de « travail de nuit » et
mières travaillant au moins trois travail posté. La mortalité est un « travail de jour » adoptées par les
nuits par mois, cumulé pendant au critère de jugement discutable et chercheurs peuvent amener à une
moins 20 ans (cancer du sein ER+ : certainement pas unique à retenir classification discutable du groupe
HR = 1,50 ; IC95 % = 1,01–2,22 ; can- pour l’évaluation du risque de can- non exposé car des travailleurs pos-
cer du sein PR+ : HR = 1,57 ; IC95 % = cer du sein chez les travailleuses tés, qui commencent avant 05h00
1,04–2,37). postées et/ou de nuit, puisque la ou terminent après minuit, ont pu
Les femmes de la cohorte NHS2 plupart des femmes traitées pour être classés comme travailleurs de
étaient plus jeunes lors du recrute- un cancer du sein à un stade pré- jour [30], même si cela ne concer-
ment par rapport à la cohorte NHS coce seront des survivantes à long nait que 0,32 % de l’échantillon [31].
(25-42 ans vs 30-55 ans), ce qui per- terme [29].
met d’évaluer le risque de l’exposi- LES MÉTA-ANALYSES
tion dès leurs premières années de ÉTUDE SUR LE RISQUE À Ces dernières années, le nombre
travail. COURT TERME de publications sur le travail de
Le fait que l’augmentation du Une autre étude danoise [12] a eu nuit et le risque de cancer du sein
risque ait tendance à disparaître au pour objectif d’examiner si le tra- a augmenté de façon exponen-
cours du temps quand les femmes vail posté de nuit est un facteur tielle, avec parfois plusieurs méta-
ne sont plus exposées au travail de risque à court terme de cancer analyses publiées la même année.
posté de nuit constitue un argu- du sein, incluant les sous types de L’inclusion d’un grand nombre
ment clé de l’importance de deux cancer du sein combinés aux récep- d’études, des critères d’inclusion
,Tableau II
> IDENTIFICATION DES ÉTUDES DE COHORTE ET CAS-TÉMOINS RETENUES PAR LES TRAVAUX D'EXPERTS
ET PAR LES MÉTA-ANALYSES SUR LES ASSOCIATIONS ENTRE LE RISQUE DE CANCER DU SEIN ET LE TRAVAIL
POSTÉ ET/OU DE NUIT
Travaux d’experts et méta-analyses
TRAVAIL DE NUIT,
ÉTUDES DE COHORTE CIRC ANSES Megdal Jia Kamdar Ijaz Wang Yang He Lin Travis Cordina-
2007 [4] 2016 [6] 2005 [32] 2013 [33] 2013 [34] 2013 [35] 2013 [36] 2014 [38] 2015 [37] 2015 [23] 2016 [9] Duverger
2018 [25]
Schernhammer et al., X X X X X X X X X X
2001, États-Unis
Schernhammer et al., X
2005, États-Unis a
Schernhammer et al.,
2006, États-Unis X X X X X X X X X
Schernhammer et al., X
2014, États-Unis a
Wegrzyn et al.,
2017, États-Unis
Schwartzbaum et al., X X X X X
2007, Suède b
Pronk et al., X X X X X X X X
2010, Chine
Knutsson et al., X X X X X X
2013, Suède
Koppes et al., X X
2014, Pays-Bas
Gu et al., X
2015, États-Unis
Akerstedt et al., X X
2015, Suède
Travis et al., X
2016, Royaume-Uni
Jørgensen,
2017, Danemark b
Vistisen et al.,
2017, Danemark
TRAVAIL DE NUIT,
ÉTUDES CAS-TÉMOINS
Tynes et al., X X X X X X
1996, Norvège c
Hansen et al., X X X X X X X
2001, Danemark c
Davis et al., X X X X X X X X X
2001, États-Unis d
Lie et al., X X X X X X
2006, Norvège c
O’Leary et al, X X X X X X X X
2006, États-Unis d
Pesch et al., X X X X X X X
2010, Allemagne
Lie et al.,
2011, Norvège c X X X X X X QQQ
NB : Schernhammer et al., 2001 correspond aux données de la cohorte NHS ; Schernhammer et al., 2005 et 2006 correspondent aux données
de la cohorte NHS2 ; Schernhammer et al., 2014 et Wegrzyn et al., 2017 correspondent aux données des deux cohortes NHS et NHS2, pour 22
et 24 ans de suivi, respectivement.
35, 36]. Pour les durées d’exposition des limites des études. Chaque fréquence de l’exposition), ont des
les plus longues, supérieures à 15 méta-analyse porte en elle tous critères de jugement différents
ou 20 ans, les risques retrouvés se les biais de chaque étude qu’elle (incidence de cancer du sein tout
situent respectivement entre 15 % analyse, ce qui explique l’hétéro- type ou invasif, hormono-sensible,
[33] et 8,8 % [23] ; une étude n’a pas généité observée (tableau III). Les tous cancers, mortalité) et uti-
retrouvé d’augmentation de risque principales différences résident lisent plusieurs méthodes de re-
[9]. Une exposition fréquente et as- dans le fait que les études indivi- cueil des données (questionnaires,
sez longue au travail posté chez les duelles analysent des populations entretiens, bases de données,
femmes pré-ménopausées repré- variées (population générale, tra- matrices emploi-exposition). La
sente le risque le plus élevé (* 3 nuits vailleurs, groupes professionnels définition du « travail de nuit » est
par semaine pendant * 10 ans, OR = spécifiques), n’utilisent pas une très variable et la description du
2,55 ; IC 95 % = 1,03 – 6,30) [25]. définition homogène et unique de système horaire très insuffisante
la variable d’intérêt (l’exposition voire absente. Le plus souvent, le
LIMITES DES ÉTUDES ET au travail de nuit / à d’autres fac- recueil des données n’intègre pas
INTERPRÉTATION DES teurs perturbateurs du système les changements d’horaires de tra-
RÉSULTATS circadien), analysent différents vail tout au long de la carrière et
L’interprétation des résultats doit paramètres (travail de nuit fixe, l’effet « travailleur sain » ne peut
se faire à la lumière des forces et travail posté, exposition cumulée, pas être complètement exclu.
,Tableau III
Megdal Tout horaire de travail comprenant Personnel navigant commercial (PNC) exposé à des
2005 [32] du travail pendant la nuit vols internationaux ou de longue distance, infirmières,
opératrices de radio-télégraphie, travailleuses de
plusieurs compagnies publiques et privées, ou
profession non précisée
Jia Hétérogène, selon les études incluses Population générale, infirmières, militaires, opératrices
2013 [33] de radio-télégraphie, travailleuses
de plusieurs compagnies publiques et privées
Kamdar Hétérogène, selon les études incluses Personnel navigant commercial, infirmières, opératrices
2013 [34] de radio-télégraphie, travailleuses de l’industrie textile,
travailleuses de plusieurs compagnies publiques et
privées
Ijaz Hétérogène, selon les études incluses Population générale, infirmières, militaires, opératrices
2013 [35] de radio-télégraphie, travailleuses de l’industrie textile,
travailleuses de plusieurs compagnies publiques et
privées
Wang Hétérogène, selon les études incluses Population générale, infirmières, militaires
2013 [36]
He Hétérogène, selon les études incluses Population générale, infirmières, militaires, travailleuses
2015 [37] de plusieurs compagnies publiques et privées
* Un comité d’experts de l’HAS a utilisé les critères suivants pour évaluer le risque relatif (RR) de certains facteurs décrits dans la littérature par
rapport aux femmes qui ne présentent pas le facteur de risque de cancer du sein : RR > 4,0 : augmentation majeure du risque ; 2,0 < RR ≤ 4,0 :
augmentation modérée du risque ; 1,1< RR ≤ 2,0 : augmentation modeste du risque ; 1,0 < RR ≤ 1,1 : augmentation très faible du risque [39].
** En général, les auteurs considèrent que : p < 0,10 correspond à une hétérogénéité statistiquement significative ; une valeur I2 < 25 % indique une
hétérogénéité faible, des valeurs comprises entre 25 % et 50 % une hétérogénéité modérée et une valeur > 50 % une hétérogénéité importante.
Méta
Catégories d'exposition, nombre de cas / études IC 95% Hétérogénéité**
RR*
PNC et autres travailleuses de nuit (5 820 cas, 13 études) 1,48 1,36 – 1,61 p = 0,62
PNC vs population générale (198 cas, 7 études) 1,44 1,26 – 1,65 p = 0,37
Travailleuses de nuit autres que PNC (5 622 cas, 6 études) 1,51 1,36 – 1,68 p = 0,68
QQQ
Travis Hétérogène, selon les études incluses Personnel navigant commercial, population générale,
2016 [9] infirmières, travailleuses de l’industrie textile,
travailleuses de plusieurs compagnies, publiques et
privées, cohorte de jumeaux
* Un comité d’experts de l’HAS a utilisé les critères suivants pour évaluer le risque relatif (RR) de certains facteurs décrits dans la littérature par
rapport aux femmes qui ne présentent pas le facteur de risque de cancer du sein : RR > 4,0 : augmentation majeure du risque ; 2,0 < RR ≤ 4,0 :
augmentation modérée du risque ; 1,1< RR ≤ 2,0 : augmentation modeste du risque ; 1,0 < RR ≤ 1,1 : augmentation très faible du risque [39].
** En général, les auteurs considèrent que : p < 0,10 correspond à une hétérogénéité statistiquement significative ; une valeur I2 < 25 % indique une
hétérogénéité faible, des valeurs comprises entre 25 % et 50 % une hétérogénéité modérée et une valeur > 50 % une hétérogénéité importante.
Il faudrait tenir compte notam- il convient d’évoquer les risques « très faible » à « modeste » de
2. Un
ment du type de système horaire comité d’experts relatifs de cancer du sein rappor- cancer du sein. Pour les femmes
(fixe, posté, sens horaire ou anti- de la Haute tés pour d’autres facteurs considé- pré-ménopausées avec une expo-
horaire), de la durée (par période Autorité de santé rés : obésité après la ménopause sition fréquente et assez longue
de 24h et exposition cumulée en (HAS) a utilisé les – entre 1,12 et 1,26 pour les femmes (supérieure à 10 ans) le risque est
critères suivants
années) et de l’intensité (fréquence en surpoids et obèses vs IMC < 25 ; « modeste », voire « modéré ».
pour évaluer
par semaine ou par mois) [40]. le risque relatif contraception orale – 1,24 pour
L’évaluation du risque de cancer du (RR) de certains les utilisatrices courantes vs pas
sein se fait sans connaissance du facteurs décrits d’utilisation ; diabète de type 2 – 1,2
degré de désynchronisation circa- dans la littérature (IC95 % = 1,12–1,28) ; alcool – 0,07 LES MÉCANISMES DE
dienne individuelle de chaque tra-
par rapport aux
femmes qui ne
par 10 g d’alcool par jour ; lésions CANCÉROGENÈSE CHEZ LE
vailleuse exposée, l’« adaptabilité » présentent pas le mammaires avec atypie – supé- TRAVAILLEUR POSTÉ / DE
individuelle au travail posté et/ou facteur de risque rieur à 2, jusqu’à 6 selon les lésions NUIT
de nuit étant très variable [41]. de cancer du concernées [39].
Par ailleurs, les modèles statis- sein : RR > 4,0 : L’augmentation du risque de can- Les mécanismes sont complexes
augmentation
tiques diffèrent dans le choix des cer du sein peut être classée en et associent des connaissances de
majeure du risque ;
co-variables de risque (antécé- 2,0 < RR ) 4,0 : différents niveaux, en fonction plusieurs disciplines, telles que la
dents personnels et familiaux, augmentation des risques relatifs 2. En utilisant chronobiologie, la médecine du
index de masse corporelle – IMC –, modérée du les mêmes critères que ceux du sommeil, l’immunologie, l’endocri-
tabagisme…), dont certaines ont risque ; 1,1< RR ) comité d’experts de la Haute Auto- nologie, la nutrition, la biochimie et
2,0 : augmentation
été liées à l’exposition au travail rité de santé (HAS), il est possible la biologie moléculaire. Quelques
modeste du risque ;
posté et/ou de nuit. Par exemple, 1,0 < RR ) 1,1 : de constater que les risques rap- revues de la littérature [42 à 45] et
l’effet du travail de nuit sur la sur- augmentation très portés par les études analysées des travaux d’experts [46] font l’état
venue du syndrome métabolique faible du risque ci-dessus sur le travail de nuit cor- des connaissances scientifiques ac-
est avéré [6]. Dans ce contexte, [39]. respondent à une augmentation tualisées à ce sujet, en précisant les
Tout travail posté/de nuit (10 004 cas) 1,057 1,014 – 1,102 p = 0,358, I2 = 9 %
Durée d'exposition au travail de nuit fixe ou posté (vs travail de jour)
< 5 ans 1,029 0,969 – 1,093 p = 0,223, I2 = 32 %
5 ans 1,019 1,001 – 1,038 p = 0,302, I2 = 18 %
5 – 10 ans 1,025 1,006 – 1,044 p = 0,149, I2 = 44 %
10 – 20 ans 1,074 1,010 – 1,142 p = 0,531, I2 = 0 %
> 20 ans 1,088 1,012 – 1,169 p = 0,185, I2 = 38 %
Travail posté de nuit rotatif vs travail de jour 1,089 1,016 – 1,166 p = 0,838, I2 = 0 %
Avoir déjà vs n'avoir jamais travaillé la nuit (4 660 cas) 0,99 0,95 – 1,03 p = 0,052
Durée d’exposition
≥ 20 ans (930 cas, 8 études) 1,01 0,93 – 1,10 p = 0,011
≥ 30 ans (384 cas, 4 études) 1,00 0,87 – 1,14 p = 0,067
Travail de nuit vs jamais de travail de nuit (6 093 cas) 1,12 1,00 – 1,25 p = 0,44, I2 = 0 %
Femmes pré-ménopausées et : p = 0,62, I2 = 0 %
Travail de nuit vs jamais de travail de nuit 1,26 1,06 – 1,51
≥ 10h / nuit 1,36 1,07 – 1,74
≥ 3 nuits / semaine 1,80 1,20 – 2,71
≥ 3 nuits / semaine pendant ≥ 10 ans 2,55 1,03 – 6,30
≥ 20h heures nocturnes / semaine 1,57 1,11 – 2,23
Travail de nuit actuel ou récent vs arrêté depuis > 2 ans 1,41 1,06 – 1,88
éléments d’impact du travail posté entraînant des désynchronisa- suggéré pour la première fois par
sur les mécanismes physiopatholo- tions circadiennes. L’exposition à Cohen et al. en 1978 [47]. La méla-
giques potentiellement impliqués la lumière artificielle la nuit altère tonine a des effets oncostatiques,
dans la cancérogenèse. la fonction de la glande pinéale et antimitotiques, antiprolifératifs et
diminue voire inhibe la sécrétion anti-angiogenèse (fonction d’inhi-
L’EXPOSITION À LA LUMIÈRE nocturne de mélatonine. C’est en biteur de croissance sur des cellules
LA NUIT diminuant le taux de mélatonine tumorales de plusieurs organes :
C’est le premier mécanisme évoqué (hormone aux propriétés oncosta- sein, ovaire, endomètre, prostate),
par le chercheur Stevens en 1987 [1]. tiques) que la LAN pourrait favo- ainsi qu’une fonction importante
Dans la littérature il apparaît sous riser la survenue et la progression dans la régulation du système im-
l’acronyme « LAN » pour « light at d’un cancer du sein. Des différences munitaire et un effet anti œstrogé-
night » ou ALAN pour « artificial interindividuelles de sensibilité à la nique. Son action sur les radicaux
light at night ». Plus récemment, un lumière aussi bien que des varia- libres lui confère un rôle antioxy-
groupe d’experts du Programme tions selon l’âge ont été évoquées. dant, empêchant les lésions oxyda-
national de toxicologie des États- La quantité totale de lumière per- tives sur l’ADN. La perturbation de
Unis a utilisé l’expression « electric çue sur le nycthémère, le moment la synthèse de la mélatonine dans
light practices » [46]. Ils mettent de l’exposition, la durée, l’intensité le cadre de l’exposition au travail
en évidence le double rôle de la de la lumière et le spectre lumineux posté et/ou de nuit modifierait ses
lumière artificielle : son effet direct détermineraient l’effet observé. effets protecteurs sur la survenue
sur l’horloge circadienne endo- du cancer.
gène, ce qui peut affecter la phase LES EFFETS PROPRES DE LA
de l’horloge et conduire à des dé- MÉLATONINE LA VOIE HORMONALE
synchronisations circadiennes ; Le rôle de la glande pinéale et de L’augmentation des œstrogènes en
son effet facilitateur, permettant la mélatonine dans l’étiologie et la circulation, en l’absence de l’effet
des activités et comportements pathogenèse du cancer du sein a été inhibiteur de la mélatonine, favo-
Megdal – Le travail posté, y compris le travail de personnel navigant, augmente – La principale limite des 13 études incluses est
2005 [32] le risque de cancer du sein de 48 %. l’ajustement incomplet sur les potentielles variables de
– L’observation d’un risque similaire chez le personnel navigant et confusion : plus les modèles étaient complets pour les
les autres catégories professionnelles est un argument contre les facteurs de risque, plus atténué était le risque de cancer
théories qui suggèrent que l'incidence accrue de cancer du sein chez du sein.
le personnel navigant serait davantage associée à l'exposition aux
rayonnements cosmiques.
Jia – Les résultats retrouvent une association statistiquement significative – Les principales limites résident dans l’hétérogénéité
2013 [33] du travail de nuit dans le risque de cancer du sein. L'association reste des études (définition et mesure de l’exposition, types
significative dans les analyses stratifiées. d’études, covariables prises en compte, différentes
– Le risque est 40 % plus élevé chez les travailleuses de nuit par rapport professions évaluées).
aux femmes n'ayant jamais travaillé la nuit, en prenant en compte les
études de meilleure qualité. Le risque s'élève à 20 %, avec les 13 études
incluses et n'est pas significatif en analysant uniquement les études
de cohorte.
Kamdar – Compte tenu de l'hétérogénéité entre les études analysées, la preuve – Le choix de définir le travail de nuit de longue durée à
2013 [34] semble faible pour appuyer les conclusions des rapports précédents celui égale ou supérieur à 8 ans n’est pas en accord avec
sur une association entre le travail de nuit et un risque accru de cancer la majorité des études (qui définissent le « long terme » à
du sein. 15 ans ou plus).
– Les analyses en sous-groupes suggèrent que le personnel navigant
travaillant sur des vols internationaux ou la nuit et les infirmières
postées de nuit seraient plus à risque de développer un cancer du sein.
Ijaz – Augmentation de 5 % du risque par tranche de 5 ans d’exposition au – L’évaluation de l’exposition au travail de nuit a été
2013 [35] travail posté de nuit. considérée de qualité suffisante dans une seule étude.
– Étant donnée la faible qualité des données d’exposition et la – Les données sont insuffisantes pour évaluer le risque
différence des effets en fonction du type d’étude, ces résultats cumulé basé sur les deux paramètres : la durée et
montrent des preuves insuffisantes d’un lien entre le travail posté de l’intensité de l’exposition.
nuit et le risque de cancer du sein.
Wang – Cette étude a mis en évidence une relation dose-réponse entre – Les limites liées à l’hétérogénéité des études dans la
2013 [36] le travail de nuit et le risque de cancer du sein : augmentation de définition de l’exposition peuvent conduire à des erreurs
3 % du risque par tranche de 5 ans d'exposition au travail de nuit ; de classification.
augmentation de 13 % du risque par exposition cumulée à 500 postes
de nuit.
He – Les perturbations du rythme circadien (travail posté, sommeil de – Les auteurs n’ont pas différencié l’estimation du risque
2015 [37] courte durée, travail comme personnel navigant, présence de lumière du travail posté incluant la nuit de celui n'incluant pas des
pendant la nuit) sont associées à une augmentation du risque de cancer postes de nuit.
du sein chez les femmes. – La réalisation selon les « MOOSE guidelines » est un point
– Une analyse dose-réponse basée sur des études cas-témoins montrait fort.
que chaque période de 10 ans de travail posté était associée à une
augmentation du risque de cancer du sein de 16 %.
Lin – Le risque de cancer du sein augmente avec le temps d’exposition au – Basé sur des études de cohorte prospectives.
2015 [23] travail de nuit : 1,9 % à 5 ans, 2,5 % pour 5-10 ans d’exposition, 7,4 % pour – La réalisation selon les « MOOSE guidelines » est un point
10-20 ans d’exposition, 8,8 % pour une exposition supérieure à 20 ans. fort.
Travis – Le travail de nuit n’a que très peu ou pas d’effet sur l’incidence de – L’étude inclut le résultat de trois nouvelles études
2016 [9] cancer du sein. La classification du CIRC sur le travail de nuit comme publiées dans le même article.
cancérogène probable pour le sein chez l’humain n’est plus justifiée. – Les nouvelles études ont été remises en cause par
– Une augmentation modérée du risque relatif d'incidence de cancer du plusieurs chercheurs.
sein ne peut pas être exclue.
Cordina- – L’excès de risque de cancer du sein chez les travailleuses de nuit était – Utilisation de données individuelles combinées.
Duverger de 12 %. – Utilisation d’une définition homogène du travail de nuit
2018 [25] – Chez les femmes pré-ménopausées, le risque était modifié par des pour les cinq études cas-témoins incluses, ce qui est un
critères de fréquence et intensité d’exposition. point fort.
– L’excès de risque était limité aux cancers du sein ER+, et en particulier
aux ER+ et HER2+.
– Pas d’association chez les femmes ménopausées.
ER : récepteurs à œstrogènes ; HER2 : facteur de croissance épidermique humain 2
de nuit s’intègre dans la prévention poste de nuit [56, 57]. L’objectif est précier les conséquences éventuelles
plus générale des effets sur la santé le rétablissement d’une relation de du travail de nuit sur la santé et la
du travail de nuit, sans oublier les phase normale entre le pacemaker sécurité des travailleurs, notam-
risques d’accident. Par exemple, circadien endogène et l’horaire de ment du fait des modifications des
agir sur la quantité et la qualité du sommeil décalé des travailleurs. rythmes chronobiologiques, et d'en
sommeil joue certainement sur un appréhender les répercussions po-
des mécanismes biologiques impli- MESURES INDIVIDUELLES tentielles sur leur vie sociale ». Cette
qués dans l’association entre le tra- Ces mesures s’attachent à dimi- visite s’attachera à rechercher des
vail de nuit et le risque de cancer du nuer les effets de la désynchronisa- signes de désynchronisation et de
sein [45]. tion et la dette de sommeil exces- dette de sommeil : fatigue persis-
sive et porte sur [51 à 53] : tante, troubles du sommeil entraî-
MESURES COLLECTIVES Ole maintien d’une bonne hygiène nant une insomnie chronique,
Dans le cas du travail de nuit, le mé- de sommeil ; troubles nutritionnels et métabo-
decin du travail doit être consulté O une bonne hygiène de vie, avec liques, troubles de l’humeur. Néan-
avant toute décision importante notamment une activité physique moins, des individus désynchroni-
relative à sa mise en place ou à la régulière et des repas équilibrés, sés peuvent n’avoir aucun de ces
modification de son organisation. l’absence de tabagisme ; symptômes [41]. L’utilisation de
Quand le travail de nuit ne peut O le respect des périodes d’obscu- médicaments comme les psychos-
être évité, les mesures portent sur rité pendant le sommeil diurne, 3. Le modafinil timulants 3, les hypnotiques ou la
[51 à 54] : l’exposition à la lumière en début est approuvé aux mélatonine, n’est pas cliniquement
O l’organisation du travail de nuit de poste et sa limitation en fin de États-Unis dans justifiée de façon systématique
la prise en charge
de façon à favoriser le temps de poste ; compte tenu de la balance risques-
du syndrome
repos et la régularité des horaires Oles siestes prophylactiques (avant d'ntolérance bénéfices pour les deux premiers
et des rythmes de travail, l’analyse le poste) et de courtes siestes de au travail posté groupes et de la complexité de
des plannings horaires, la mise en moins de 20 minutes (pendant le (Shift work sleep l’administration de la mélatonine
place de siestes [55] ; travail de nuit permettant de re- disorder - SWSD). liée à l’existence d’une courbe de
O les rotations avec un maximum trouver des capacités cognitives et réponse de phase, empêchant ainsi
de 3 nuits consécutives et les rota- utiles pour la prévention des acci- la prévisibilité de l’effet chronobio-
tions en sens horaire seraient pré- dents). tique.
férables (sauf pour les chronotypes Par ailleurs, la caféine prise sous Bien sûr seront recherchés les fac-
matinaux pour lesquels un sens forme de café en début du poste teurs de risque de cancer du sein
antihoraire serait plus adapté) ; de nuit peut réduire le déclin des (notamment en s’assurant que les
Ola mise en place d’actions d’infor- niveaux de vigilance au travail, salariées bénéficient d’un suivi
mation et de sensibilisation sur les même si cela n’a pas d’impact sur gynécologie annuel avec une sur-
effets du travail de nuit et leur pré- le risque accidentel. veillance mammaire), mais aussi
vention, notamment sur l’alimen- les risques pour la grossesse, les
tation ; SUIVI DE SANTÉ maladies cardio-vasculaires ou les
O la mise en place de mesures so- C’est le médecin du travail qui fixe atteintes à la santé mentale [50].
ciales afin de faciliter une meilleure la périodicité des visites d’infor- À l’issue d’une visite médicale, le
conciliation entre la vie profession- mation et de prévention des tra- médecin du travail peut constater
nelle et la vie privée, comme, par vailleurs de nuit, sachant qu’elle ne que l’état de santé de la travail-
exemple, organiser les plannings peut pas dépasser trois ans et qu’il leuse exige qu’elle soit transférée à
horaires selon les horaires des tiendra compte des particularités titre définitif ou temporaire sur un
transports en commun, ou mettre du poste occupé et des caractéris- poste de jour correspondant à sa
à disposition une salle de repos ; tiques du travailleur (par exemple qualification et aussi comparable
O l’exposition à la lumière et à âge, état de santé…). La Société fran- que possible à l'emploi précédem-
l’obscurité, en proposant l’utilisa- çaise de recherche et médecine du ment occupé. Le médecin du tra-
tion judicieuse de la lumière et le sommeil (SFRMS) propose une pé- vail peut, en collaboration avec le
maintien de périodes de sommeil / riodicité annuelle [58]. Le contenu médecin de ville, l'équipe pluridis-
obscurité régulières après la fin du de la visite doit permettre « d'ap- ciplinaire et l'entreprise, anticiper
,Encadré 2
> ÉTUDES DE CAS Ainsi, il est très probable que le de conseiller à une travailleuse la présence de symptômes
médecin du travail soit amené à qui a été atteinte d’un cancer évoquant des difficultés
Cas 1 : Un cancer du sein être confronté à cette question. du sein de garder un travail d’adaptation aux horaires de
est diagnostiqué chez une Les trajectoires professionnelles permettant une activité la travail, des difficultés spécifiques
travailleuse de nuit. Elle pense des personnes atteintes de plus en phase possible avec chez des groupes de travailleurs
que celui-ci est provoqué par ses cancer peuvent être très son horloge interne. Ainsi, il soumis à certains systèmes
rythmes de travail et voudrait variables. L’étude VICAN 2 sur serait déconseillé à une femme horaires ou postes de travail
que sa maladie soit reconnue les conditions de vie, deux ans avec un chronotype vespéral peuvent être menées. L’outil
comme d’origine professionnelle. après un diagnostic de cancer, a de reprendre un travail qui « grille de lecture de la pénibilité
Le « cancer du sein » ne mis en évidence que parmi les commence à 5h00, ou avec des des horaires décalés » permet à
figure pas comme maladie personnes en emploi au moment horaires irréguliers, atypiques l’employeur d’évaluer les effets
caractérisée désignée dans du diagnostic, 78,2 % ont eu des ou de nuit. Le médecin du nocifs prévisibles [55].
l’un des tableaux de maladies trajectoires continues d’emploi, travail peut aussi proposer Cette démarche d’évaluation
professionnelles en France. 6,6 % ont changé d’emploi, des aménagements d’horaires devrait prendre en compte
Néanmoins, une travailleuse 5,6 % étaient au chômage, 8,4 % de travail dans le cas des que le travail posté incluant
peut constituer un dossier pour étaient en inactivité et 1,2 % à la travailleuses qui poursuivent ou non des postes de nuit
demander que soit reconnue retraite [59]. Néanmoins, il n’y leur activité pendant les constitue un scénario complexe
l’origine professionnelle de a pas de données spécifiques traitements. à multi-expositions, en plus de
son cancer. Dans ce cas, le sur les aménagements de poste Il faudrait se poser la question la spécificité des expositions
cancer du sein doit entraîner dans le cadre du travail de nuit. de la pérennisation du bien- liées au travail lui-même, aux
une incapacité permanente La réinsertion professionnelle des être dans l’emploi et miser sur produits manipulés et aux tâches
prévisible d’au moins 25 % ou personnes atteintes de cancer la réévaluation rapprochée exécutées. Des outils comme
être à l’origine du décès de la nécessite la coopération de tous de l’aménagement du poste/ des auto-questionnaires, des
patiente. Le Comité régional de les professionnels impliqués pour temps de travail au long cours entretiens, ou des données de
reconnaissance des maladies aider la femme à garder sa place et pas seulement lors du retour l’employeur sur les heures de
professionnelles (CRRMP) dans la société par le travail. au travail, car l’objectif est une travail peuvent être facilement
devra alors établir si le cancer Le cancer du sein et son reprise durable avec succès [61]. utilisés par l’équipe de santé au
du sein est essentiellement traitement peuvent influencer Le médecin du travail peut travail ; des tests d’évaluation des
et directement causé par son le bien-être physique, informer et accompagner la performances cognitives et des
travail habituel. Le médecin psychologique, social, travailleuse dans une demande tests de vigilance psychomotrice,
du travail rappellera que c’est professionnel d'une femme au- de reconnaissance de la qualité des capteurs pour évaluer
à la travailleuse de faire la delà de la période immédiate de de travailleur handicapé. l’exposition des travailleurs de
demande de reconnaissance de traitement actif. Les problèmes Enfin, il peut solliciter l’avis nuit à la lumière artificielle ou
maladie professionnelle auprès communs incluent la fatigue, spécialisé des centres du des actimètres pourraient être
de son organisme de sécurité les changements cognitifs, le sommeil ou des services de utilisés sous forme encadrée.
sociale. Lui-même peut rédiger dysfonctionnement cardiaque, pathologies professionnelles et Des biomarqueurs des rythmes
le certificat médical initial et le la sexualité, les problèmes environnementales. circadiens avec des prélèvements
CRRMP lui demandera un avis psychosociaux, la gestion du sanguins, urinaires ou salivaires
motivé portant sur la réalité de poids, la douleur, la fertilité et Cas 3 : L’employeur veut évaluer seraient plutôt réservés aux
l'exposition au risque. les symptômes de la ménopause l’impact des horaires de travail de contextes de recherche, auxquels
Les auteurs de l’article n’ont pas [29]. Il a été démontré que les son entreprise sur l’état de santé le médecin du travail pourrait
connaissance de cas de cancer altérations du rythme circadien des salariés et demande de l’aide s’associer. Dans le futur, le
du sein chez les travailleuses sont fréquentes chez les au médecin du travail. Quels sont médecin du travail pourrait
de nuit reconnus d’origine patients atteints de cancer. Dans les outils à leur disposition ? avoir à sa disposition des outils
professionnelle en France. plusieurs études cliniques, les Des indicateurs de santé, sophistiqués pour mieux cibler
chercheurs ont démontré que le sécurité et qualité de vie les postes les plus à risque
Cas 2 : Est-ce qu’une salariée cycle individuel repos-activité au travail permettent une et ainsi entamer les actions
atteinte de cancer du sein est un indicateur quantitatif de évaluation globale (taux de prévention appropriées,
pourrait revenir sur son poste de la qualité de vie et représente d’absentéisme, arrêts de travail afin d’éviter en particulier les
nuit ? une valeur pronostique pour maladie en lien avec le désynchronisations marquées
La plupart des femmes traitées indépendante des autres travail, accidents de travail et la privation chronique de
pour un cancer du sein à un facteurs cliniques connus [60]. et maladies professionnelles sommeil.
stade précoce seront des À la lumière de ces déclarées…) [62]. Des enquêtes
survivantes à long terme [29]. connaissances, il serait plus avisé sur le lieu de travail pour évaluer
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en
résumé
Appréhender l’acceptation :
Acceptation la construction sociale de l’usage
Comprendre l’acceptation
située et des pratiques associées (ex : modèle
de Bobillier-Chaumon)
gration du système c’est-à-dire nelles, subjectives que l’outil peut cette phase se déroule, pour partie,
la manière dont le dispositif prendre au sein de l’activité), ap- en parallèle voire se confond avec
s’insère dans l’organisation, la propriation stratégique (l’accep- celle de l’acceptation située.
situation de travail et dans l’acti- tation serait liée à la possibilité Ces éléments théoriques mettent
vité de l’utilisateur. Ensuite, les des acteurs à l’utiliser pour servir en évidence que le processus
utilisateurs s’approprient la tech- leurs intérêts), appropriation sub- d’acceptabilité/d’acceptation
nologie, c’est-à-dire s’adaptent jective (l’outil se construit et se d’une nouvelle technologie s’ins-
aux caractéristiques de cette der- reconstruit dans l’activité selon crit dans un continuum progres-
nière, apprennent à l’utiliser pour les circonstances de la situation et sif et complexe qui peut être
être capables d'en exploiter les les ressources de l’utilisateur selon appréhendé par des approches et
potentiels. Cette appropriation un processus d’adaptation réci- des dimensions plurielles [12]. Ils
relève donc de processus cognitifs proque) et appropriation instru- montrent également que ce pro-
d'apprentissage. L’appropriation mentale (l’outil est maîtrisé voire cessus est dynamique, en ce sens
comprend 4 composantes : appro- développé par les utilisateurs). que l’utilisation de la technologie
priation symbolique (sens que les Les composantes « subjective » et en situation de travail modifie la
utilisateurs donnent au dispositif, « instrumentale » de l’appropria- relation de l’utilisateur à cette der-
constitué par les valeurs fonction- tion conduisent à considérer que nière. La relation « humain-tech-
nologie » fonctionne en boucle
ou en interactions itératives.
Ceci peut donc amener, à diffé-
Déploiement en entreprise, information, rents moments du processus, des
Conditions facilitantes formation et soutien des collègues
(7 questions) modifications de l’acceptabilité/
et des encadrants
l'acceptation.
Il n’a pas été retrouvé, du point
Mise en place de l’exosquelette, rapidité
de vue de la santé et sécurité, de
Facilité d’utilisation d’apprentissage et utilisation de l’exosquelette résultat d’étude sur les notions
(9 questions) (facilité de mouvement, de déplacement, d’acceptabilité/d’acceptation en
sensation d’empêchement, contrôle des gestes) lien avec les risques profession-
nels (maladies et accidents) dans
le cas des exosquelettes. De même,
En termes de production (vitesse, efficacité,
Attentes de performance productivité, qualité) et de sécurité et santé il apparaît que dans les modèles
(9 questions) (efforts physiques, fatigue, conditions de théoriques, la question de la san-
travail, gênes et douleurs et concentration) té et sécurité n’est pas présente
explicitement sous cette termi-
nologie. Néanmoins des facteurs
Influence sociale de risques physiques ou psycho-
Avis des collègues et de l’encadrement sociaux sont identifiables, notam-
(4 questions)
ment à travers les dimensions pro-
posées par Bobillier-Chaumon [4,
5] (dimension organisationnelle et
Professionnelle Place de l’exosquelette, sens du travail,
individuelle par exemple) et celles
et identitaire compétences et valorisation du métier issues du modèle UTAUT (telles
(8 questions) que la dimension « estimation
des efforts »). Compte tenu des
attentes relatives aux exosque-
Agréabilité de travailler avec l’exosquelette, lettes en termes de soulagement
Affects aimer travailler avec, anxiété, confiance et
(7 questions) des efforts physiques, le ressenti
isolement
des utilisateurs sur ces aspects
est intégré dans la réflexion (par
Figure 4. Les dimensions du questionnaire exemple en termes de fatigue,
de difficultés. Lorsqu’il s’agit des teurs « Favo » répondent globale- de façon sensiblement moins pro-
collègues les résultats sont plutôt ment positivement puisqu’ils sont noncée (25 % « moyennement d’ac-
mitigés : les opérateurs sont « plu- « plutôt d’accord » à 43 % et « tout cord », 45 % « plutôt d’accord » et
tôt d’accord » (43 % des « Favo » et à fait d’accord » à 36 %. Les opéra- 25 % « tout à fait d’accord »).
15 % des « DéFavo ») ou « tout à fait teurs « DéFavo » émettent un avis Au cours de leur activité, 60 % des
d’accord » (21 % des « Favo » et 20 % sensiblement plus négatif ; ils ne opérateurs interrogés déclarent uti-
des « DéFavo ») avec le fait qu’ils sont « tout à fait d’accord » qu’à liser l’exosquelette en continu du-
bénéficieraient du soutien de leurs 10 %, « plutôt d’accord » à 45 % et rant leur temps de travail. La moitié
collègues et à l’inverse, 21 % des « moyennement d’accord» à 45 %. des opérateurs « DéFavo » exprime
« Favo » et 35 % des « DéFavo » ne Les « Favo » expriment, dans une la nécessité de réajuster l’exos-
sont « pas du tout d’accord » avec large majorité, qu’apprendre à uti- quelette durant leur activité (20 %
cette affirmation. liser l’exosquelette est rapide, (7 % « moyennement d’accord », 45 % de
« moyennement d’accord », 36 % « plutôt d’accord » et 10 % « tout à
Facilité d’utilisation (graphique 1) « plutôt d’accord » et 50 % « tout fait d’accord ») alors que l’inverse est
Concernant la « facilité de mise en à fait d’accord »). Les « DéFavo » exprimé chez les opérateurs « Favo »
place » de l’exosquelette, les opéra- expriment le même point de vue (36 % « pas du tout d’accord »,
0% 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 % 90 % 100 %
RAPIDITÉ Favo
D'APRENTISSAGE DéFavo
Favo
RÉAJUSTEMENT
DéFavo
FACILITÉ Favo
D'UTILISATION DéFavo
FACILITÉ DE Favo
DÉPLACEMENT DéFavo
FACILITÉ DE Favo
MOUVEMENT DéFavo
CONTRÔLE Favo
DES GESTES DéFavo
0% 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 % 90 % 100 %
Favo
VITESSE
DéFavo
Favo
EFFICACITÉ
DéFavo
Favo
PRODUCTIVITÉ
DéFavo
Favo
QUALITÉ
DéFavo
avec un exosquelette. À l’inverse, majorité des opérateurs « Favo » opérateurs qui signalent être « plus
14 % des « Favo » pensent que leur perçoivent leurs efforts physiques fatigués » (20 %), voire « beaucoup
performance est « plus impor- comme « moins importants » plus fatigués » avec l’exosquelette
tante » (productivité, vitesse et effi- (64 %) que lorsqu’ils ne l’utilisent (5 %) sont uniquement des opéra-
cacité) et 7 % qu’elle est « beaucoup pas, d’autres les perçoivent comme teurs « DéFavo ».
plus importante » (productivité, « identiques » (21 %). Les opérateurs Si la majorité des opérateurs
qualité et efficacité) lorsqu’ils uti- « DéFavo » expriment un point « Favo » se prononce clairement
lisent l’exosquelette. Aucun d’entre de vue un peu différent (« moins en faveur d’une amélioration des
eux ne considère que l’efficacité, la importants » pour 45 % et « iden- conditions de travail avec l’exos-
productivité, la qualité et la vitesse tiques » pour 30 %). Il est à noter quelette (43 % sont « tout à fait
sont « moins importantes » avec un que pour 20 % des opérateurs « Dé- d’accord » et 50 % « plutôt d’ac-
exosquelette. Favo », les efforts physiques sont cord », soit 93 % au total), les opé-
À la question de savoir si les opé- perçus comme « plus importants ». rateurs « DéFavo » expriment des
rateurs se sentent en sécurité La moitié des opérateurs « Favo » résultats plus nuancés. La réparti-
lorsqu’ils utilisent l’exosquelette, et 35 % des « DéFavo » perçoivent tion de leurs réponses sur cet item
les « Favo » sont majoritairement leur fatigue comme « identique » montre que 5 % sont « tout à fait
« plutôt d’accord » (71 %), voire avec ou sans exosquelette. Cer- d’accord », 55 % « plutôt d’accord »,
« tout à fait d’accord » (21 %). Les tains opérateurs disent cependant 10 % « moyennement d’accord »,
avis des opérateurs « DéFavo » sont être « moins fatigués » (36 % des 15 % « plutôt pas d’accord » et 15 %
moins positifs puisque 40 % sont « Favo » et 40 % des « DéFavo »), « pas du tout d’accord ».
« moyennement d’accord » et 40 % voire « beaucoup moins fatigués » En termes de gênes et douleurs,
«plutôt d’accord ». Aucun des opé- (14 % des « Favo » et aucun des une minorité des opérateurs, qu’ils
rateurs de ces deux groupes ne dit « DéFavo »). Si seuls des opérateurs soient « Favo » ou « DéFavo », si-
se sentir en insécurité. « Favo » mentionnent être « beau- gnale ne pas ressentir de change-
Au cours de leur activité, quand ils coup moins fatigués », on peut ment avec le port de l’exosquelette
sont équipés d’un exosquelette, la souligner par opposition que les sur la zone assistée par ce dernier
,Tableau I
> ÉVOLUTION DE LA PERCEPTION DES GÊNES ET DOULEURS CHEZ LES OPÉRATEURS FAVORABLES
OU DÉFAVORABLES AU PORT D’EXOSQUELETTE SELON LES PARTIES DU CORPS, PAR RAPPORT AU
NON PORT D’EXOSQUELETTE
* Pour mémoire les exosquelettes utilisés sont passifs et dédiés à une assistance au niveau du dos
0% 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 % 90 % 100 %
EXOSQUELETTE Favo
A SA PLACE DéFavo
SENS DE Favo
TRAVAILLER AVEC DéFavo
UTILISATION Favo
COMPÉTENCES DéFavo
NOUVELLES Favo
COMPÉTENCES DéFavo
Favo
MÉTIER VALORISÉ
DéFavo
les « DéFavo »). Chez les « Favo », et « moyennement d’accord » pour cord », 5 % « plutôt pas d’accord »
57 % sont « plutôt d’accord » et 36 % 21 % de « Favo » et 15 % des « DéFa- et 45 % « moyennement d’accord »
« tout à fait d’accord » avec le fait vo ». avec le fait qu’il est agréable de
que travailler avec l’exosquelette a De même, chez les « DéFavo », les travailler avec l’exosquelette.
du sens et les « DéFavo » sont 40 % avis sont partagés sur l’idée que le Cette répartition des réponses est
« plutôt d’accord » et 25 % « tout à métier est valorisé (répartition des semblable lorsqu’on leur demande
fait d’accord ». Au niveau de l’item avis de façon presque homogène s’ils aiment travailler avec l’exos-
concernant la mise en œuvre de sur l’ensemble des 5 niveaux) alors quelette. Les « Favo » sont « tout
toutes leurs compétences lors de que chez les « Favo », une tendance à fait d’accord » (36 %) et « plutôt
l’utilisation de l’exosquelette, si les plutôt positive est observée (29 % d’accord » (50 %) avec l’affirmation
« Favo » sont positifs (43 % « plu- « moyennement », 29 % « plutôt proposée alors que les « DéFavo »
tôt d’accord » et 50 % « tout à fait d’accord » et 21 % « tout à fait d’ac- sont à 30 % « moyennement d’ac-
d’accord »), les « DéFavo » sont plus cord »). cord », 15 % « plutôt pas d’accord »
partagés puisque la répartition des et 20 % « pas du tout d’accord ».
avis se fait de façon presque homo- Dimension des affects Lorsqu’on interroge les opéra-
gène sur l’ensemble des 5 niveaux. (graphique 4) teurs sur le fait que l’exosquelette
La majorité des opérateurs tend à Les opérateurs « Favo » qualifient produirait de l’anxiété chez eux,
exprimer son désaccord sur l’item le port de l’exosquelette comme les réponses des deux catégories
relatif au développement de nou- globalement plus agréable (21 % d’opérateurs sont globalement né-
velles compétences dans le cas « moyennent d’accord », 57 % gatives, même si les avis peuvent
de l’utilisation d’un exosquelette « plutôt d’accord » et 21 % « tout à être parfois plus tranchés chez
puisqu’ils ne sont « pas du tout fait d’accord ») que les opérateurs certains. Ainsi, les « Favo » ne sont
d’accord » à 29 % pour les « Favo » « DéFavo ». En effet, ces derniers « pas du tout d’accord » à 93 % et
et 45 % pour les « DéFavo », « plutôt expriment un ressenti mitigé « plutôt pas d’accord » à 7 % alors
pas d’accord » pour environ 25 % voire opposé à celui des « Favo » que les « DéFavo » ne sont « pas du
des « Favo » et 21 % des « DéFavo », et 20 % ne sont « pas du tout d’ac- tout d’accord » à 60 % et plutôt pas
0% 10 % 20 % 30 % 40 % 50 % 60 % 70 % 80 % 90 % 100 %
C'EST AGRÉABLE Favo
DE TRAVAILLER
AVEC DéFavo
Favo
J'AI CONFIANCE
DéFavo
Favo
JE ME SENS ISOLÉ
DéFavo
mitigés estiment que des soulage- d’accord », « moyennent d’accord » opérateurs acceptent de travailler
ments sont envisageables sur les et « plutôt d’accord »). Globale- avec l’exosquelette, ils interrogent
parties du corps non ciblées par ment, les non-utilisateurs sont néanmoins sur la question de l’im-
l’assistance. « moyennement d’accord » avec le pact de cette technologie sur les
La majorité estime que les niveaux fait qu’ils aimeront travailler avec activités collectives et collabora-
de concentration au cours de leur l’exosquelette. Trois opérateurs tives dans le travail et en particu-
activité seront identiques que ce pensent qu’ils ne seront « pas du lier sur le « collectif de travail ». En
soit sans ou avec l’exosquelette. tout anxieux » s’ils l'utilisaient effet, ce dernier est défini comme
(dont les non-utilisateurs « Favo » la construction, par plusieurs opé-
Dimension sociale et « DéFavo ») alors que deux rateurs, d’une œuvre commune,
Trois opérateurs sont « plutôt d’ac- autres sont « plutôt d’accord » d’un langage commun, des règles
cord » avec le fait que la hiérarchie avec le fait qu’ils pourraient deve- de métier et d’un respect durable
sera favorable à ce qu’ils utilisent nir anxieux. L’opérateur « Favo » de la règle par chacun [13]. De ces
un exosquelette. En revanche un et le « DéFavo » pensent qu’ils règles de métier s’élabore un fac-
seul opérateur est « plutôt d’ac- n’auront pas confiance dans le dis- teur de cohésion du groupe. Le col-
cord » avec le fait que les collègues positif s’ils l’utilisaient alors que lectif de travail est décrit comme
seront favorables alors que les les 3 mitigés ont moyennement ayant une fonction protectrice des
autres sont « moyennement d’ac- confiance. La majorité pense qu'ils opérateurs [14], il constitue par
cord ». D’une manière générale, les ne seront pas exclus de l'équipe de exemple une ressource pour les
opérateurs perçoivent leurs collè- travail en utilisant l’exosquelette. opérateurs pour gérer les « conflits
gues comme moins favorables que de règles » dans l’action, ou encore
leur hiérarchie. pour partager des manières de
SYNTHÈSE ET DISCUSSION faire adaptées à la situation. En
Dimension identité profession- termes de santé, il a été montré
nelle Le tableau II reprend une synthèse que le collectif participe à la pré-
Deux opérateurs sont « moyen- des résultats. servation des ressources psycho-
nement d’accord » avec le fait que Les résultats mettent en évi- sociales et à celle des TMS [15].
toutes les compétences seront uti- dence le fait que les opérateurs Or, s’il est fragilisé, il ne peut plus
lisées (dont le « DéFavo »), deux favorables à l’exosquelette ont remplir cette fonction.
sont « plutôt d’accord » (mitigés) des avis positifs pour quasiment
et un est « tout à fait d’accord » toutes les dimensions. Dans cer- Les opérateurs défavorables expri-
(« Favo »). Ce dernier est également tains cas, ils considèrent qu’il y a ment le même sentiment mitigé
« plutôt d’accord » avec le fait qu’il une amélioration (par exemple que les opérateurs favorables
développera de nouvelles compé- pour la dimension attentes de concernant les collègues et le dé-
tences, que l’exosquelette l’aidera performance). Les items pour les- veloppement de nouvelles com-
à préserver son emploi et « tout à quels ils sont mitigés concernent pétences. En revanche, contraire-
fait d’accord » avec le fait que son ceux relatifs à leurs collègues, ment aux opérateurs favorables,
métier sera valorisé et que l’exos- qu’ils soient issus de la dimension ils expriment également des
quelette a sa place dans le travail. « conditions facilitantes » (collè- points de vue négatifs sur certains
La perception de la valorisation du gues comme soutien en cas de dif- aspects. Ainsi, ils disent d’une part
métier est aussi présente chez les ficultés) ou « dimension sociale » devoir réajuster le dispositif au
opérateurs mitigés mais pas chez (collègues favorables à ce qu’ils cours de l’activité et, d’autre part,
l’opérateur « DéFavo ». utilisent un exosquelette). Il en est se sentir empêchés dans leurs
de même concernant la question mouvements par ce dernier (di-
Dimension des affects du développement de nouvelles mension « facilité d’utilisation »).
Les opérateurs « Favo » et « Dé- compétences avec l’utilisation du Ces aspects pourraient indiquer
Favo » pensent que travailler dispositif (dimension « identité que le dispositif n’est pas adapté
avec l’exosquelette ne sera pas professionnelle »). Si ces avis miti- à l’activité en question ou encore
agréable. Les opérateurs mitigés gés ne semblent pas constituer que sa conception n’est pas opti-
ont des avis divers (« plutôt pas des points bloquants puisque les male. Allant dans le même sens,
Facilité de mouvement
Contrôle des gestes
Pas de sensation d’empêchement
Attentes de performance Efficacité =(+) =(–) (–)
Productivité =(+) =(–) (–)
– Idem (avec et sans exosquelette) =
– Améliorations (+) Qualité = = =
– Diminution (–)
Vitesse =(+) =(–) (–)
Santé et sécurité Sécurité
Efforts physiques (–) (–)
Moins important (–)
Identique = Fatigue = =(+)
Plus important (+)
Gênes et douleurs =(–) =(–)
apparitions de
nouvelles *
Concentration = =(+) =
Sociale Encadrement
Collègues
Identité professionnelle Utilisation compétences
Nouvelles compétences
Travailler avec exosquelette a du sens
Exosquelette a sa place
Valorisation du métier
Affects Agréable
Aimer travailler avec
Confiance
Pas de Production d’anxiété
Sentiment d’isolement
Légendes
Tendance majoritairement positive Tendance majoritairement mitigée Tendance majoritairement négative
* Pour certains, apparition de gênes et douleurs à d'autres endroits que ceux censés être soulagés par l'exosquelette.
les résultats montrent également té par les utilisateurs, avait fait confiance dans le dispositif et que
qu’en termes d’attentes de per- l’objet de plusieurs modifications l’utiliser pourrait même, pour cer-
formance, même si elle est plu- par les concepteurs (suite à des tains, créer de l’anxiété. A priori,
tôt considérée comme identique plaintes d’utilisateurs sur l’appa- ces non-utilisateurs n’ayant pas
avec ou sans exosquelette, cer- rition de nouvelles gênes). Les été informés ni formés au dispo-
tains soulignent qu’elle peut être modèles théoriques soulignent sitif, la représentation qu’ils se
dégradée et d’autres qu’elle peut que le processus d’acceptabilité/ construisent du dispositif s’appuie
être améliorée. Cet aspect peut d’acceptation est dynamique et sur ce qu’ils perçoivent lorsqu’il
être vécu comme d’autant plus que l’utilisation de la technologie est utilisé par leurs collègues en si-
problématique lorsque l’organisa- peut modifier la relation de l’opé- tuation réelle de travail et non pas
tion fonctionne avec des primes rateur à cette dernière. Dans ce sur une expérience personnelle ou
liées à la production. En termes contexte, ajouter une boucle uti- encore des connaissances réelles
de santé, certains indiquent éga- lisateurs-concepteurs serait un sur son mode de fonctionnement.
lement l’apparition de nouvelles élément pouvant faciliter l’accep- Sans information ni formation sur
gênes ou douleurs sur des zones tabilité sociale. La mise en place ces dispositifs, les non-utilisateurs
non assistées par le dispositif. De de cette boucle ne va pas toujours peuvent donc être amenés à déve-
plus, même s’ils considèrent que de soi, surtout si la technologie lopper des représentations incom-
l’exosquelette a sa place dans leur est arrivée à maturité complète. plètes voire erronées du dispositif,
travail ou que travailler avec a du Néanmoins, dans le cas des exos- ce qui évidemment ne favoriserait
sens, certains soulignent qu’il n’est quelettes et pour toutes les tech- pas une acceptation. Ainsi, bien
pas agréable et qu’ils n’aiment pas nologies qui évoluent en continu que ces résultats reposent sur un
travailler avec. Ce dispositif, criti- et rapidement, cette option est à faible effectif de non-utilisateurs,
qué pour ses dimensions, apparaît privilégier. Elle présente comme ils font émerger des pistes de ré-
davantage comme une contrainte avantage de pouvoir améliorer flexion sur ces futurs utilisateurs
pour les opérateurs plutôt qu’une techniquement le dispositif à par- potentiels qui pourraient être
assistance. Une nouvelle technolo- tir des retours d’opérateurs. De intégrés aux étapes d’information
gie est supposée apporter une va- plus, par cette boucle, la direction et de formation au même titre
leur ajoutée dans le travail. Dans le envoie vers les utilisateurs le mes- que les utilisateurs. Les non-utili-
cas des exosquelettes, cet apport sage selon lequel ils participent sateurs expriment d’ailleurs l’im-
semble perçu comme partiel ou en pleinement au processus de chan- portance d’avoir une information,
tout cas insuffisant pour compen- gement, ce qui est un facteur favo- une formation mais aussi un suivi
ser les avis négatifs. Au final, les risant l’acceptation. pour ces nouveaux dispositifs.
dimensions critiquées deviennent Concernant le petit échantillon Dans le même ordre d’idée, une re-
des points bloquants alors que de non-utilisateurs interrogés, présentation incomplète ou erro-
ces mêmes opérateurs ont égale- leur représentation de l’exosque- née des dispositifs est également
ment des avis positifs, plus nom- lette est très mitigée. Ainsi, bien possible chez les utilisateurs ; elle
breux, sur les autres dimensions que certains considèrent que ce est souvent liée à une formation
du dispositif. En termes de pistes dispositif pourrait avoir sa place insuffisante. L’INRS a mis à dis-
de progression, les informations dans leur activité, ils ont une position des préventeurs et des
relatives aux items critiqués pour- image négative de sa facilité d’uti- entreprises un guide pour mener à
raient être retournées aux concep- lisation (mise en place, facilité de bien la phase de déploiement des
teurs des dispositifs pour qu’ils les mouvements, de déplacements, exosquelettes afin d’optimiser les
améliorent (par exemple pour les d’apprentissage…) et pensent que conditions d’intégration du point
aspects liés aux réajustements ou leur performance ne serait pas de vue de la prévention [17]. La mé-
encore aux gênes lors de l’intégra- améliorée, voire serait dégradée, thode proposée comprend, entres
tion du dispositif et aussi lors de s’ils l’utilisaient (que ce soit en autres, des étapes d’information
son acceptation située). Dans une termes de production ou de santé et de formation. Ainsi, conformé-
autre étude menée par l’INRS [16], et sécurité). Contrairement aux ment aux préconisations de ce
il est apparu que l’exosquelette, utilisateurs et anciens utilisateurs, guide, une phase initiale est pro-
avant d’être totalement accep- ils pensent qu’ils n’auraient pas posée. Celle-ci correspond à une
POUR EN SAVOIR +
Exosquelettes. INRS, 2018 (www.inrs.fr/risques/exosquelettes/ce-qu-il-faut-retenir.html).
www.inrs–waw2019.fr
Contact: waw2019@inrs.fr
TF 265
VU DU TERRAIN
en
résumé
U
Prévention de la désinsertion MOTS CLÉS
professionnelle, accroissement Désinsertion /
du nombre de restrictions Maintien dans
l'emploi /
d’aptitudes et d’inaptitudes
Vieillissement
médicales, de demandes ne part croissante de lectives qui permettaient à ceux
d’aménagements du poste ou du salariés travaille avec une santé qui ont une santé fragile de se mé-
temps de travail, de reclassement altérée. Ce constat s’explique par nager, de tenir. Les exigences de
professionnel pour inaptitude… différents facteurs étudiés lors productivité et d’adaptabilité aux
autant de questions dont d’une recherche sur la vie avec multiples changements, organisa-
l’intensité et la complexité vont la maladie chronique, entendue tionnels, de méthodes, d’outils ou
croissantes. En effet, il s’agit bien comme troubles plus ou moins d’objectifs demandent un surplus
de faire face au défi du maintien graves mais durables. Il peut s’agir d’énergie et d’investissement de la
en activité – et pas seulement en tout à la fois, comme explorés lors part de tous les travailleurs, et plus
emploi – des salariés travaillant de l’investigation présentée ici, de encore de ceux qui ont une santé
avec une santé altérée. séquelles d’accidents du travail ou altérée. Ces changements ne sont
Les stratégies usuellement de maladies professionnelles (les pas toujours vécus comme néga-
déployées pour atteindre troubles musculosquelettiques tifs. Mais le défaut de temps de
cet objectif sont en panne. -TMS- notamment), de diverses transition, des changements trop
L’intensification du travail, maladies chroniques telles que fréquents, dépourvus de sens ou
l’érosion des postes « doux », diabète, cancers, maladies car- dont les objectifs sont contraires à
la réduction du recrutement diovasculaires, ou de troubles de ceux poursuivis par les travailleurs
de jeunes permettant la santé liés au vieillissement ou avec une santé fragile, contribuent
mise à l’abri des seniors... à des phénomènes d’usure pré- à mettre en échec les tentatives
complexifient fortement maturée au poste de travail [1]. de retour ou de maintien en acti-
la prévention de l’usure Cette recherche souligne la diffi- vité des travailleurs qui cherchent
prématurée et la réintégration culté majeure qu’ont les salariés à tenir deux objectifs : efficacité
de salariés après une longue à la santé altérée à se maintenir au travail et préservation de leur
maladie ou une inaptitude en emploi. En effet, les organisa- santé.
médicale. La recherche-action tions du travail ne semblent pas L’accroissement des sorties de
présentée ici explore à la fois les avoir pris la mesure de ce phéno- l’emploi pour raison de santé (pré-
processus en cause et les voies mène. En poursuivant une évo- retraite, invalidité, licenciement),
de construction d’un travail lution essentiellement orientée le tarissement des postes « doux »,
soutenable, entendu comme vers la rentabilité-réactivité, des l’augmentation des files actives de
permettant au travailleur contraintes multiples peuvent salariés à reclasser constituent au-
de maintenir sa santé, ses rendre caduques les régulations, tant de problèmes qui ne peuvent
compétences, son employabilité. les stratégies individuelles ou col- être traités par les seuls services
de santé au travail ou des res- avec des capacités de production Pour avoir un ordre de grandeur
sources humaines. L’allongement fluctuantes. Quelles sont les régu- de l’ampleur de la population
des délais pour un reclassement lations permettant de gérer indi- concernée, selon l’enquête Emploi
concourt au risque de désinsertion viduellement et collectivement de l’Institut national de la statis-
professionnelle. Il témoigne de les situations de travail pénibles ? tique et des études économiques
l’inaptitude des organisations du Quels types d’arrangements (INSEE), ce sont 5,7 millions de
travail à intégrer les variabilités informels, de savoir-faire de pru- personnes de 15 à 64 ans qui soit
individuelles, à prévenir les inap- dence, se mettent en place au sein souffrent d’une maladie ou d’un
titudes médicales et demandes de d’équipes de plus en plus souvent problème de santé chronique ou
reclassement. composées de salariés qui ont des durable les limitant depuis au
Dans ce nouveau contexte, com- problèmes de santé ? Quelle orga- moins 6 mois dans leurs activités
ment envisager le rapport au tra- nisation du travail, formelle, infor- quotidiennes, soit ont une recon-
vail et l’organisation du travail melle, peut soutenir ce travail de naissance administrative liée à un
pour une poursuite, en santé, des construction et de négociation de handicap ou une perte d’autono-
activités professionnelles, y com- sa/la santé ? mie. Mais seules 45 % d’entre elles
pris de celles reconnues comme Contrairement aux représenta- sont en emploi [2]. Les troubles de
pénibles ? Et comment repenser tions dominantes qui considèrent santé à une date donnée s’avèrent
les process d’aménagement du que la place du malade serait celle prédictifs de sortie d’emploi
travail et de reclassement afin que lui assigne l’arrêt maladie, (vers le chômage ou l’inactivité)
de prévenir deux écueils souvent hors du travail, et ce jusqu’à son quelques années plus tard [3 à 5].
rencontrés : la gestion solitaire rétablissement, entendu comme Un rapport récent de l’Inspec-
et clandestine de la compatibi- retour à l’état antérieur, « bien tion générale des affaires sociales
lité entre sa santé fragilisée et les portant », les travailleurs à la san- (IGAS) souligne que « les effets
exigences du travail prescrit ne té fragilisée sont de plus en plus délétères des problèmes de santé et
tenant pas compte du travail réel nombreux dans le monde du tra- du handicap sur l’emploi sont avé-
au risque d’une aggravation des vail. rés avec de fortes inégalités sociales
« problèmes de santé » ; le ressen- Une conjugaison de facteurs et de faibles chances de retour à
timent de ceux qui ont quitté leur contribue à cette évolution [1]. l’emploi en cas de désinsertion pro-
poste et sont dans l’attente d’une Les transformations du travail fessionnelle » [6]. Ce même rapport
réaffectation perçue comme se- peuvent favoriser une usure pré- précise que 10 % des postes, soit
mée d’embuches (perte de savoir maturée, notamment dans cer- environ 2,3 millions des « couples
professionnel, du vivre-ensemble, tains métiers reconnus comme salarié-emploi », ont fait l’ob-
longue durée de l’attente d’un associés à de fortes pénibilités. jet d’une ou plusieurs mesures
autre poste…) ? Sentiments d’injus- L’amélioration des techniques de d’aménagement ou de restriction
tice et d’abandon se conjuguent à dépistage et de diagnostic conduit de la part de la médecine du travail
l’anxiété d’être dessaisi de son ave- à une meilleure identification à un moment donné. Une enquête
nir professionnel, de n’être qu’« un des pathologies et à des diagnos- menée par la Direction régionale
pion déplacé », privé d’une activité tics plus précoces. L’amélioration des entreprises, de la concurrence,
valorisée, valorisante. des thérapeutiques permet une de la consommation, du travail et
Dans le prolongement de ces tra- reprise ou une poursuite du tra- de l’emploi (DIRECCTE) d’Aquitaine
vaux précédents, la recherche-ac- vail. Une attention plus grande est [7] s’intéresse non seulement à
tion (RA) conduite avec le service portée aux troubles psychiques et l’accroissement du nombre des
des ressources humaines d’une ils font l’objet d’une plus grande inaptitudes médicales à tout poste
grande ville, présentée dans cet reconnaissance dans le champ de pour raison de santé (+ 29 % entre
article, interroge la place des col- la santé au travail. Enfin, le recul 2006 et 2014 dans le régime géné-
laborateurs fragilisés. Elle vise à de l’âge de départ à la retraite ral) mais aussi au devenir des sala-
identifier les conditions permet- contribue au vieillissement de la riés inaptes : 39 % sont licenciés
tant l’élaboration de stratégies population active, vieillissement sans projet ni solution, 27 % sont
individuelles, collectives et orga- synonyme de « problèmes de mis en invalidité, 26 % sont licen-
nisationnelles afin d’autoriser la santé » chroniques, plus ou moins ciés avec projet identifié, et enfin
poursuite de l’activité d’agents invalidants. 8 % partent en retraite.
prise par les questions de santé lever les freins identifiés et ce dans fondamentalement, des exigences
dans leurs propres activités de ma- différents secteurs et niveaux de du travail et des marges de ma-
nagers. Un groupe « représentants cette collectivité. Un même prin- nœuvre dont les opérateurs dis-
des 4 organisations syndicales de la cipe de départ guide l’investiga- posent dans leurs situations de tra-
ville » a réévalué le rôle et l’action tion et le choix des propositions : vail pour pouvoir tenir ensemble
des représentants du personnel et les changements préconisés travail productif et santé. En effet,
du Comité d’hygiène de sécurité et doivent s’appuyer sur les expé- « malade ou non, on n’est pas le
des conditions de travail (CHSCT) riences de terrain, au plus près de spectateur passif de son propre
dans la prévention de l’inem- l’activité quotidienne de travail, état. Dans le travail (comme dans
ployabilité et le développement les sur le vécu des personnes confron- la vie en général), chacun déploie
démarches préventives et collec- tées à la maladie ou en situation des façons de faire, individuelles,
tives. Enfin, un groupe « projet » a d’usure. C’est l’expertise d’usage collectives, qui se construisent et
constitué l’instance de pilotage de qui permet de mettre en place des se transforment au fil de l’âge, de
la démarche dans ses différentes actions concrètes et utiles. l’évolution de son propre orga-
étapes. Il rassemble à la fois les RH Cette RA a été conduite sur une du- nisme, de ses compétences et de
et les médecins de prévention, des rée de près de trois ans et l’ampleur son expérience professionnelle, etc.
directeurs, des représentants des du travail réalisé à ces différents ni- Il ne s’agit donc pas seulement de
organisations syndicales, des co- veaux de l’organisation a fait l’objet réfléchir à des situations de travail
animateurs de groupes « métiers ». de plusieurs publications [14, 15]. qui n’aggravent pas les manifes-
La première phase de cette RA a été Les résultats de cette RA présentés tations liées à la pathologie, mais
la co-construction d’un diagnostic. ici retiennent deux axes : la régula- de concevoir des « moyens » de
Celui-ci s’élabore dans la mise en tion de la pénibilité et les aména- travail qui permettent de dévelop-
discussion de ce qui rend difficile gements informels déployés quand per ces régulations (anticipations,
la réalisation des tâches et des mis- la santé est fragilisée. vérifications, coopérations…) » [17].
sions et les solutions qui existent Le travail est pénible quand il est
pour y faire face. Ainsi, dans les PÉNIBILITÉ, fait avec difficultés, efforts, dou-
groupes « métiers », les agents ont AMÉNAGEMENTS ET leurs, quand il est source d’ennui,
partagé leurs expériences, difficul- PRINCIPES DE JUSTICE d’anxiété…, quand les stratégies
tés et stratégies pour les réduire ou développées sont rendues inopé-
les prévenir. Les agents « usagers », PÉNIBILITÉ rantes par le système de travail du
qu’ils soient « reclassés » ou en Serge Volkoff distingue trois ac- fait des contraintes de procédures
« attente de reclassement », ont ex- ceptions de la pénibilité : celle et de temps à respecter, du défaut
ploré dans deux groupes distincts qui repose sur une approche pro- de ressources collectives...
les processus qui les ont conduit babiliste, fondée sur des résultats Il est important de souligner ici
de la pénibilité à l’avis d’inapti- épidémiologiques mettant en évi- que les problèmes de santé n’im-
tude médicale en passant par les dence les corrélations entre nui- pliquent pas mécaniquement des
arrangements négociés au sein sances et prévalence des patho- difficultés dans le travail. La crois-
des équipes de travail. Enfin, les logies ; celle qui correspond à un sance des inaptitudes médicales
ressources organisationnelles, en travail vécu comme pénible ; et et des demandes de reclassement
particulier le pôle RH, le service en enfin, celle éprouvée par les sala- dans le monde du travail tient plus
charge du process de reclassement, riés ayant des problèmes de santé fondamentalement à la réduction
la médecine de prévention, la mis- qui leur rendent les exigences du des marges de manœuvre permet-
sion Handicap, des managers de travail peu supportables [16]. De tant un travail compatible avec sa
différents services de la ville, les or- plus, comme « la santé parfaite » santé, puisant dans les ressources
ganisations syndicales ont contri- n’existe pas, des troubles infra-pa- de l’expérience et des collectifs de
bué, dans des groupes distincts, à thologiques, plus ou moins invali- travail. Ce défaut peut être un puis-
ce diagnostic en analysant leurs dants, vont impacter la pénibilité sant facteur de développement de
activités respectives, leurs empê- ressentie. l’usure prématurée au travail. Aus-
chements et transformations. Le caractère plus ou moins gênant si, dans la démarche de cette RA,
La deuxième phase de la RA s’est de ces troubles dépend de leur la prévention de la pénibilité est
appuyée sur des propositions d’ex- nature et gravité mais aussi, et indissociable de la recherche des
périmentations susceptibles de
constructeur de soi, de sa santé. santé, danger, déshonneur, dégra- à fabriquer deux clans : celui des
L’espoir de changement porté par dation, se soldent par un statut « fainéants » (paradoxalement
ces volontaires est à la hauteur négatif attribué aux personnes à favorisés) et celui des « bosseurs ».
des obstacles rencontrés au fur qui il échoit. A contrario, Walzer Dodier [26] a montré que les
et à mesure des avancées de la montre à partir de l’analyse du tra- questions de santé sont toujours
recherche. C’est ainsi qu’un pro- vail des éboueurs de San Francisco, rejugées sur la place du travail.
gramme d’ampleur s’est déployé qu’une organisation coopérative En effet, les dispositifs médico-
et a conduit à une prise en consi- de ce travail restaure l’engage- administratifs (arrêt de travail,
dération du travail réel, tel que ment et la participation aux gains restriction d’aptitude, inaptitude
vécu par les agents, pour aller en- collectifs. médicale, invalidité) ne suffisent
suite vers une clinique, non pas La coopération rend le travail pé- pas à légitimer l’aménagement.
individuelle, mais collective des nible plus soutenable, il devient La validation de la réorganisation
situations à l’origine des maux même source de fierté. Seule une du travail au sein d’une équipe
du travail. équipe soudée peut faire face au semble nécessairement passer par
Dans certains services ou équipes, travail « dur ». L’engagement phy- une réévaluation des principes de
les agents n’ont bien sûr pas atten- sique dans le travail fait partie du justice permettant une redéfini-
du les chercheuses pour découvrir métier. Il est en partie choisi parce tion des équivalences entre tâches,
que d’autres modes d’organisa- qu’on « peut bouger, être libre de agents.
tion permettaient de prévenir ses mouvements, organiser sa jour- Alors qu’un jardinier P. (54 ans, re-
l’usure au travail, les accidents et née » et ne « pas rester assis toute venu d’un arrêt de travail pour une
de donner envie de travailler. Et la journée derrière un guichet, un maladie grave) habitué à se déro-
les chercheuses n’ont pas dans ordinateur ». Avec l’âge ou la sur- ber lors de tâches dures s'éloigne,
leur trousse à outils le remède sollicitation, une usure rend les son chef l’appelle, puis le cherche,
magique qui conviendrait à tous mouvements parfois douloureux afin qu’il aide à descendre le maté-
en toutes situations. Les échanges et l’engagement physique doit riel du camion. « C’est important, il
dans les groupes « métiers », une être mesuré car les capacités de faut qu’il aide. Ce n’est pas à nous
fois l’indignation et la plainte récupération sont bien plus lon- de lui préparer son matériel, des-
récurrente passées, ont permis gues. Cependant, les restrictions cendre la tondeuse, la démarrer ».
de mettre en discussion les solu- d’aptitude, les aménagements L’autonomie, la polyvalence sont
tions que les uns et les autres ont formels du travail, les mises à des conditions de régulation afin
expérimentées dans un contexte l’abri des tâches éprouvantes phy- de faire advenir le juste. Mais c’est
incertain et dégradé. Incertain en siquement ou psychiquement aussi une condition pour que ce
raison des menaces qui pèsent sur pour ceux qui ont « des problèmes jardinier ait le sentiment de faire
l’emploi : une politique d’externa- de santé », leur délégation aux partie de l’équipe. Le travail de
lisation de services municipaux, plus jeunes, aux intérimaires, prévention de l’exclusion mais
notamment chez les jardiniers, les aux moins « râleurs »… peuvent aussi d’inclusion est une activité à
inquiète. Dégradé en raison des contribuer au développement de part entière. Tous, avec leurs com-
relations tendues entre les diffé- tensions dans les équipes. La divi- pétences et incapacités doivent
rents niveaux hiérarchiques mais sion du travail est évaluée à l’aune prendre part aux différentes
aussi entre fonctionnaires et cer- de critères d’équité, mais aussi de tâches, le risque étant que les
tains publics (incivilités, dénon- réciprocité [24]. tâches les plus physiques échoient
ciations, menaces…). L’encadrement de proximité sait aux jeunes ou à ceux qui n’ont pas
bien les conflits structurels qui d’incapacités et qui, à juste titre,
LE TRAVAIL FAIT POUR « FAIRE traversent le double objectif visé : s’interrogent sur la prévention
ÉQUIPE » prendre en compte les situations des pénibilités. Faire à la place
Sur les travaux pénibles, Walzer singulières, la préservation des d’autrui, c’est engager une relation
[23] souligne la contamination des plus fragilisés et les exigences de dissymétrique et de dépendances
traits négatifs qui qualifient à la l’organisation du service [25]. réciproques jamais propice au dé-
fois le travail « dur » et ceux qui en Le soupçon de fainéantise, de veloppement. En allant chercher
ont la charge : ces caractéristiques, mauvaise foi ou de favoritisme P., le chef d’équipe fait ce détour
telles qu'insécurité, atteinte à la pèse souvent. Il peut contribuer pour lui signifier qu’il est membre
trine pour gérer collectivement le pour apporter du mulch dans un lorsque ceux à qui il échoit n’ont
travail dur. autre parc. Selon les incapacités pas choisi de le faire : parce qu’il
L’observation d’un chantier perçu et la forme du moment, chaque n’a pas de sens, qu’il est imposé à
comme éprouvant physiquement jardinier occupe un poste qu’il un moment qui n’est pas propice
montre comment le collectif (une choisit parmi les postes offerts ou parce qu’il est perçu comme
équipe de 5) parvient à rendre sur le chantier proposé. Au cours déshonorant.
juste la part de travail dur de de l’action, chacun juge sa part
chacun. Il s’agissait de pailler les d’effort au travail commun et réé- PARTAGER LES TÂCHES INGRATES,
végétaux d’un petit parc avec du quilibre selon des conventions qui DÉSHONOR ANTES : « LES GENS
mulch (2) apporté par un des jardi- tiennent compte des contribu- DOIVENT NETTOYER LEURS PROPRES
2. Couche de niers O. (55 ans) qui monopolise tions et des capacités de chacun. SALETÉS »
matériau protecteur
le poste de chauffeur en raison Les limitations de capacités ou in- Sans ce partage, ceux qui le font
posé sur le sol
pouvant être de douleurs chroniques à l’épaule capacités sont observées et jugées pour eux-mêmes et pour d’autres
composé de feuilles conséquences d’un accident de en permanence par l’ensemble ne seront jamais des membres
mortes, copeaux de
service. A. (43 ans), un autre jardi- de l’équipe. Le responsable de égaux d’une communauté poli-
bois ou autres.
nier de l’équipe, souffre, lui, d’une l’équipe, sans remettre en ques- tique [23]. Les déchets, le « brun »
hernie discale reconnue en mala- tion la maladie professionnelle (déjections canines, humaines
die professionnelle. Une observa- d’A., pense qu’il « pourrait quand dans les parcs), les seringues
tion attentive montre que sur ce même en faire plus », notamment souillées dans des lieux où se pra-
chantier, il porte deux fois plus de avec le taille-haie que A. accepte tiquent un trafic de drogues, sont
bacs que les autres, mais il les rem- de prendre, mais seulement pour pointés du doigt par les agents
plit à moitié seulement pour sou- un temps limité. Puisque tous comme relevant du « sale boulot »
lager son dos. A. ne prend pas part les membres de l’équipe ne par- [27, 28] qu’ils n’acceptent de faire
aux pauses que les deux autres ticipent pas avec le même enga- que sous conditions. Pour rendre
jardiniers font régulièrement. Le gement à toutes les tâches, des ces tâches acceptables, il est né-
responsable de l’équipe (59 ans), tensions sont perceptibles. Rendre cessaire d’épurer le « sale boulot »
sans incapacité connue, passe ce juste la part de chacun en pratique de son indignité. La respectabilité
jour-là une large partie de la ma- (en théorie, le principe d’équité est des emplois en dépend. Comment
tinée à faire le tour des sites sous acquis) est d’autant plus aisé que choisir un travail, en être fier, avoir
sa responsabilité afin de prendre les équipes sont stables (des rema- du plaisir à le réaliser si la part de
des informations sur le travail à niements d’équipe se font tous tâches indignes, déconsidérées,
réaliser sur chacun d’eux en vue les ans ou deux ans), qu’il y a une est importante ?
de programmer les chantiers de variété de tâches, que les jardi- Dans certains restaurants sco-
la semaine suivante. À son retour niers ont une liberté d’organiser la laires, la doctrine élaborée par le
sur le chantier, un peu avant la répartition des tâches et aussi, et personnel éducatif en accord avec
coupure de midi, les jardiniers lui surtout, de choisir le bon moment celui du restaurant est que les
ont laissé un tas de mulch au pied pour faire les chantiers durs. En ef- enfants doivent ramasser les gros
du camion afin qu’il fasse sa part fet, bêcher une terre gorgée d’eau déchets tombés ou jetés sous les
de travail dur, compte tenu du est épuisant, alors que lorsqu’elle tables (morceaux de pain, pelures
travail « non dur », mais reconnu est ressuyée, cette tâche est bien d’orange…) et porter leur plateau
utile par les jardiniers, qu’il a réa- plus aisée. vers un self de tri sélectif. « C’est
lisé dans la matinée. Sans mettre Il faut noter que le travail dur ne important, ils doivent tous partici-
en cause ce « reste à faire » pour se résume pas aux tâches dans per au tri. C’est pour les responsabi-
lui, le chef prend pelle et bac et fait lesquelles un effort physique doit liser ». Ainsi, les enfants font leur
des rotations. Pour faire sa part être engagé. Au contraire, l’ef- part de « sale boulot », apprennent
de travail dur, c’est au chauffeur fort physique peut être valorisé à ne pas jeter ou gaspiller et sur-
que revient la tâche de nettoyer comme signe de virilité ; il peut tout respectent les agents de
le chantier : balayer le paillage être recherché comme un exercice la restauration. Cependant, les
sur le trottoir, ranger les outils et d’entretien que certains trouvent agents polyvalents déplorent que
faire une rotation supplémentaire, aussi dans la pratique du sport cette participation au sale boulot
empiétant sur l’heure du déjeuner, par exemple. Le travail est dur s’arrête au restaurant alors que les
d’absences. D’où cet échange sur police, parce qu’on est sur la voie métiers au sein de la collectivité,
les causes de l’absentéisme et ce publique ». La tension dans les rap- les échanges dans les différents
principe visant à rendre tous les ports avec le public provient en groupes liés à cette recherche-
emplois, toutes les tâches, respec- partie de l’invisibilité que tout tra- action ont porté sur les ressources
tables. Respecter les agents poly- vail comporte et qui nourrit la sus- à construire. Ce qui a conduit à
valents ou intérimaires, c’est leur picion de fainéantise. Les récits des l’élaboration de films-métiers,
proposer un travail reconnu et jardiniers sur les plaintes déposées conçus, tournés et commentés par
partager le travail dur. À plusieurs via des applications pour smart- les opérateurs de métiers volon-
reprises, au sein de ce groupe, il a phones mises en place par la ville taires afin de montrer le réel du
été établi que le fait de déléguer d’actes répréhensifs montrent travail. L’enjeu est aussi ici celui
le « sale boulot » aux intérimaires l’importance de la construction de la respectabilité des métiers
conduisait à s’exposer à de l’absen- d’une représentation de chaque de chacun par une meilleure (re)
téisme de leur part. Faire équipe, métier. « L’autre jour, on a attendu connaissance des contraintes, in-
stabiliser son personnel, avoir une le camion, pour pouvoir charger jonctions paradoxales, mais aussi
bonne ambiance, passe par des un tronc tombé sur la chaussée et des joies, de la fierté du travail
principes discutés et reconnus : il y a eu des dizaines de photo en- accompli.
partager toutes les tâches, autori- voyées au cabinet du maire pour
ser négociations et rééquilibrages dénoncer notre inactivité ! ». Cette AMÉNAGEMENTS ET
au sein de l’équipe en faisant adve- scène où des jardiniers sont assis RECLASSEMENTS
nir une réciprocité. Ce sont là les durant l’attente du camion a été Les résultats de cette recherche-
conditions de la coopération, du interprétée par certains passants action rejoignent les observations
« faire ensemble », du sentiment comme une preuve de fainéan- faites par d’autres chercheurs sur
d’être engagé dans une épreuve tise. La consigne donnée par leur les inaptitudes médicales et les
commune, d’être utile. chef a été celle de l’activisme : processus d’aménagement, de re-
De jeunes jardiniers ont fait le ré- « vous devez bouger, rester debout classement. Si ceux-ci peuvent être
cit, lors des réunions des groupes au moins, même s’il n’y a rien à des instruments de protection de
« métiers », de situations où ils ont faire ». Ces dénonciations, qui la santé des opérateurs déjà fragi-
tenté de répondre par la violence dans un premier temps ont blessé lisés, ils peuvent aussi les exposer
à la violence (passage à l’acte sur les jardiniers, se sont transformées à des formes de relégation, créer
un habitant qui piétinait délibéré- positivement avec l’exercice de la des tensions entre collègues qui
ment, devant le jardinier, un mas- justification qu’elles ont sollicité. se voient dans l’obligation de com-
sif de fleurs qui venaient d’être Régulièrement convoqués par le penser ce que « l’inapte » ne peut
plantées). Un jardinier plus expé- responsable du service pour ré- plus faire. Et ce dans des contextes
rimenté fait part, en groupe, de sa pondre, au cabinet du maire, de où les marges de tolérance au
pratique : il va à la rencontre des photos de jardiniers en inaction, report de tâches se réduisent du
passants mécontents pour expli- les responsables d’équipe ont fait de l’intensification du travail.
quer le travail du jardinier dans appris à justifier leurs actions par L’exploration des formes de régu-
le contexte de la rationalisation une remise en contexte. C’est tout lations et d’aménagements infor-
des politiques publiques condui- un ensemble d’éléments, souvent mels favorisés ou empêchés révèle
sant à ne tondre certains espaces invisibles, d’incidents (parfois que l’inaptitude est moins le ré-
plus que deux fois par an : « pour récurrents) qui pèsent sur l’exer- sultat d’une pathologie médicale,
les gens, ça fait sale. Il faut expli- cice du métier qui est ainsi mis que l’aboutissement d’un proces-
quer l’intérêt mellifère, en terme en lumière : camion bloqué par la sus d’exclusion déjà amorcé pour
de biodiversité ». Un autre encore circulation ou pour un pneu crevé, d’autres raisons (rupture dans les
analyse les agressions, violences machine en panne, déplacement régulations collectives, difficultés
subies comme une expression inutile en raison d’une mauvaise d’adaptation à un nouvel environ-
d’un mécontentement qui serait information ou de défaut de coor- nement de travail ou de nouvelles
non pas adressé aux jardiniers dination entre services… tâches, relations conflictuelles
mais plus généralement à la ville, Pour contribuer à lever une part de avec les collègues et/ou la hié-
à la société. « C’est pas après nous cette invisibilité du travail réel, et à rarchie…) [29].
qu’ils en veulent. On prend les donner accès à une représentation Ici, l’accent est mis sur la portée de
coups, comme les pompiers ou la de l’ensemble du panorama des démarches qui tiennent ensemble
afin qu’elles deviennent des acti- également la notion de parcours : pas en sens unique et qu’elle ne
vités reconnues et dans lesquelles parcours professionnel tout d’abord bénéficie pas uniquement qu’à
chacun puisse se reconnaître. On où il s’agit de suivre un salarié tout certains membres de l’équipe.
l’a vu, c’est parce qu’elles sont par- au long de sa vie professionnelle et S’engager intensément, travailler
tagées, valorisées et associées au quels que soient les statuts profes- plus que ses collègues, « lever le
métier qu’elles « obligent». sionnels, la nature des contrats et pied » selon sa forme du moment,
leurs éventuelles ruptures ; mais selon les retours que l’on obtient
CONSTRUIRE UNE LIBERTÉ aussi parcours personnel couvrant sur ses actions, construit son rap-
D’ACTION plus de 45 ans de vie à l’âge adulte, port au travail. Ce dernier n’est pas
La construction de sa santé, tout au parcours potentiellement émaillé sans lien avec les normes de vie,
long de sa vie, dans les différentes d’évènements de santé, pathologies toujours évolutives. Les travaux pé-
sphères d’activités, tient à la liber- chroniques et survenue de handi- nibles, s’ils autorisent un dévelop-
té d’action (choisir de faire, avec caps, liés ou pas au travail, qui me- pement de ses capacités, peuvent
qui, comment, pourquoi) qui seule nacent l’insertion professionnelle et être perçus comme autant d’expé-
autorise l’expression des normes dont il convient d’éviter l’aggrava- riences potentiellement enrichis-
de vie perçues comme plus impor- tion par le travail » [6]. santes. Ce qui compte, c’est que
tantes que les recommandations l’opérateur puisse choisir le mo-
de prévention. DÉCLOISONNEMENT ment, l’intensité avec laquelle il se
Cette construction suppose de DES ACTEURS prescrit cette tâche, qu’elle entre
se donner les moyens, indivi- Cette approche de la santé dé- dans ses normes de vie et que ce
duellement et collectivement, de passe les cadres institutionnels travail en plus soit reconnu par les
construire une liberté d’action : elle du champ d’action des services autres, troqué contre un travail en
permet à chacun de réinvestir son de santé au travail ; elle convoque moins le jour où ce même opéra-
travail, l’organiser, d’y vivre (et non pour la transformation non pas teur ne sera pas en forme.
seulement d’en vivre). Cette liberté seulement les experts de la santé,
d’action semble paradoxale dans mais aussi le « milieu de travail ».
la logique salariale et le contrat de Elle implique par ailleurs un sujet
subordination qui l’encadre, mais actif, c’est-à-dire en capacité de CONCLUSION
elle est une nécessité vitale : pou- produire de nouvelles normes de
voir décider de ses actions, du sens, vie, « hors travail », au travail et de Le travail de santé est une
de la hauteur de l’investissement, transformer ces milieux afin qu’ils construction des normes de vie.
du moment de l’engagement… répondent à ces normes. « Je ne veux plus de stress au tra-
Sans cette liberté, dans un univers vail… Je veux faire des choses qui
trop contraint, les normes de vie ne EXERCER SES DROITS ont du sens… Pour mon dos, je dois
peuvent se déployer. DANS DES CONDITIONS limiter la charge ». Ces résolutions
DE RÉCIPROCITÉ individuelles se heurtent quoti-
DÉCLOISONNEMENT Il s’agit de se donner les moyens, diennement aux prescriptions, au
TEMPOREL individuellement et collective- rythme, au contexte dans lequel
La prévention de la désinsertion ment, d’exercer ses droits dans les les activités se déroulent. Au tra-
professionnelle suppose d’intégrer situations sociales dans lesquelles vail, chez soi, la tentation de suivre
une perspective diachronique et chacun est engagé. Ici, ces droits ne le cours de l’action, d’en faire plus
de restaurer la continuité entre la concernent pas seulement le droit ou trop est grande. Le travail de
prévention primaire des accidents de grève ou de retrait qui peuvent santé suppose de négocier, avec
et maladies d’origine profession- être utilisés par les agents lors de soi-même et avec les autres, des
nelle, de l’usure prématurée, la situations critiques ; ils intègrent aménagements temporaires ou
prévention secondaire face aux le droit à en faire moins pour se durables en vue d’une prise en
troubles infra-pathologiques ou préserver, à charge de revanche. compte des symptômes, d’une
dès l’apparition des problèmes de L’acceptation sociale de la varia- amélioration ou d’une recons-
santé avérés, et enfin tertiaire, pour tion des capacités productives et le truction de ses capacités. Mais
réduire les effets sur l’emploi et sur déclenchement de coopérations se faire autrement, être différent des
l’activité d’une santé dégradée. « Ce fait d’autant mieux que la recon- autres appelle une justification et
séquençage dans le temps introduit naissance de cette variation n’est une acceptation. Car révéler une
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en France : réaffirmer les conditions de travail. Toulouse : Quadrige. Paris : Presses
A
Les recommandations de MOTS CLÉS
bonne pratique pour la Risque chimique /
surveillance biologique des Surveillance
biologique /
expositions (SBEP) aux risques Questionnaire /
chimiques ont été publiées en Recommandation / u cours des 20 der- de son exécution (choix de l’indica-
mai 2016. Afin de connaître Biométrologie nières années, le recours à la sur- teur biologique d’exposition (IBE),
leur utilisation, une enquête veillance biologique des exposi- des modalités de prélèvement et de
par questionnaire a été tions professionnelles (SBEP) ou à transport…), à l’interprétation et à la
entreprise auprès de services la biométrologie des expositions restitution des résultats, tant indivi-
de santé au travail (SST). aux agents chimiques, grâce aux duelles que collectives, mais aussi à
Cette enquête met en évidence analyses biologiques spécifiques, la conservation des données.
une bonne maîtrise du contenu a fortement progressé dans le do- Deux années après leur publica-
des recommandations par les maine de l’évaluation de l’exposi- tion, il est apparu utile de mieux
médecins en SST autonome. tion aux agents chimiques. connaître les pratiques actuelles des
En SST interentreprises, le En effet, il est constaté une diversifi- équipes des services de santé au tra-
besoin de formation sur la cation des métiers et secteurs d’acti- vail (SST), dans le but d’améliorer et
mise en œuvre de la SBEP vité susceptibles d’être concernés d’harmoniser l’utilisation de la SBEP
selon ces recommandations par la SBEP, des analyses biologiques en santé au travail, par le biais d’une
est manifeste, notamment disponibles en pratique courante, enquête par questionnaire.
concernant l’usage de la ainsi que des acteurs en santé au
fiche de renseignements travail impliqués dans la mise en
médicaux et professionnels œuvre de la SBEP.
(FRMP), la pratique de la Par ailleurs, en mai 2016, les recom- MÉTHODOLOGIE
pluridisciplinarité, la traçabilité mandations de la Société française
collective des résultats. de médecine du travail (SFMT) sur Le questionnaire a été diffusé aux
La mise en place de médecins la SBEP aux agents chimiques ont différents acteurs susceptibles d’in-
référents régionaux, formés été publiées [1]. Dans les recom- tervenir dans le domaine de la SBEP :
aux risques chimiques et, en mandations de bonne pratique de médecins du travail, infirmièr(e)s en
particulier à la SBEP, avec une la SFMT, 36 recommandations ont santé au travail (IDEST), intervenant
bonne connaissance de ces été rédigées pour guider le médecin en prévention des risques profes-
recommandations, devrait du travail dans sa décision de mise sionnels (IPRP), toxicologues.
permettre de développer en place de la biométrologie (ou Les experts impliqués dans l’éla-
une SBEP de qualité. SBEP), allant du choix des modalités boration des recommandations de
,Tableau I
RÉSULTATS ET DISCUSSION
> LISTE DES QUESTIONS RETENUES DANS LE QUESTIONNAIRE PARMI CELLES
ÉTUDIÉES DANS LES RECOMMANDATIONS [1] POPULATION DES
RÉPONDANTS
Questions des experts retenues Références des
dans le questionnaire recommandations associées Deux cent quarante-quatre (244)
réponses au questionnaire ont été
Q3 : Comment articuler la surveillance biologique des expo-
R2 et R3 obtenues sur une période de 3 mois,
sitions professionnelles avec la surveillance externe ?
de juillet à septembre 2018. Après
Q4 : Quelles sont les caractéristiques d’un bon indicateur
biologique de l’exposition (IBE) à un agent chimique ? Com- R4 et R5 analyse des réponses, 63 % de celles-
ment faire le choix entre plusieurs IBE disponibles ? ci émanent de médecins du travail
Q5 : Comment définir la stratégie de mise en œuvre et en SSTI et 22 % de médecins du tra-
prescrire une surveillance biologique des expositions pro- R6, R7, R8 et R9 vail exerçant en SSTA ; près de 8 %
fessionnelles ?
d’IDEST et 7 % d’IPRP-toxicologues
Q6 : Comment effectuer un prélèvement et un transport ont également répondu (figure 1).
R10, R11, R12, R13, R14 et R15
des échantillons de bonne qualité ?
Parmi les IDEST, 12 sur 19 exercent
Q7 : Quels sont les éléments à prendre en compte pour choi-
R16, R17, R18 et R19 en SSTI. Parmi les IPRP, 6 sur 17 sont
sir un laboratoire ?
toxicologues.
Q8 : Quels sont les éléments à prendre en compte pour Pratiquement toutes les régions
interpréter les résultats de la surveillance biologique des R20, R21, R22, R23, R24 et R25
expositions professionnelles ? françaises sont représentées, puis-
que les réponses au questionnaire
Q9 : Comment restituer les résultats de la surveillance bio-
logique des expositions professionnelles aux travailleurs R26, R27, R28 et R29 sont issues de 12 des 13 régions fran-
concernés ? çaises (tableau II).
Q10 : Comment restituer les résultats de la surveillance
biologique des expositions professionnelles à la collectivité R30, R31, R32 et R33 RÉPONSES AUX QUESTIONS
concernée ?
Dans la majorité des cas, les ré-
Q11 : Comment assurer la conservation des résultats de la ponses des IDEST (19 répondants)
surveillance biologique des expositions professionnelles
pour assurer la traçabilité des expositions individuelles et R34, R35 et R36 et des IPRP (17 répondants), repré-
collectives et permettre, le cas échéant, leur partage et leur sentant, pour chaque groupe, moins
exploitation à des fins de prévention ? de 8 % des répondants, n’ont pas été
exploitées.
bonne pratique de la SBEP ont ré- médecine et de santé au travail QUI PRESCRIT ?
pondu à 11 questions [1]. Neuf d’entre de l’Ouest (SMSTO) en partenariat Quatre-vingt-onze pour cent des
elles ont été reprises dans le ques- avec la SFMT, les 11 et 12 octobre 2018 médecins du travail ayant répondu
tionnaire de la présente enquête, les (compte rendu de ces journées pp. 137 au questionnaire sont prescripteurs
deux autres étant relatives à la défi- à 150 de la revue), ont été l’occasion d’une SBEP. Soixante-quatorze pour
nition de la SBEP et à ses indications de diffuser par mail le question- cent des IDEST et 94 % des IPRP qui
et contre-indications (tableau I). naire aux personnes inscrites à ces ont répondu, sont impliqués dans la
Le questionnaire (annexe 1, pp. 85 à journées mais également à des mé- SBEP prescrite par des médecins du
86) aborde les thèmes suivants : le decins du travail en service de santé travail.
rôle des différents acteurs, l’articula- au travail inter-entreprises (SSTI) Les principaux agents chimiques
tion entre la SBEP et la surveillance ou en service de santé au travail pour lesquels une SBEP est prescrite
de l’exposition externe, la réalisa- autonome (SSTA), ou encore, à des ou envisagée sont :
tion pratique de la SBEP, les critères toxicologues, non-inscrits à ces jour- O les éléments métalliques : plomb,
de choix du laboratoire, son impli- nées. Certains toxicologues, méde- chrome, nickel, cobalt, arsenic, mer-
cation dans la gestion de l’échantil- cins référents ou coordinateurs de cure ;
lon et l’interprétation des résultats, SST ont par ailleurs diffusé le ques- O une grande variété de composés
la restitution et la conservation des tionnaire au sein de leur service ou organiques : des solvants, le styrène,
résultats. de leur réseau médical. Le question- des cytostatiques, des HAP et une
Les journées de toxicologie de La naire était accompagné d’une brève amine aromatique, la méthylène
Baule, organisées par la Société de introduction sur la SBEP. dianiline (MDA).
des médecins en SSTI et pour 70 % sont jugés satisfaisants par plus de renforce l’intérêt de développer la
des médecins en SSTA. 2/3 des médecins du travail (68 % en promotion pour ces recomman-
SSTI et 87 % en SSTA). dations, promotion déjà effectuée
INFORMATIONS SUSCEPTIBLES D’IN- notamment via différents vecteurs
FLUENCER LE MOMENT DE PRÉLÈVE- RESTITUTION DES RÉSULTATS ET TRA- (base de données « Biotox », atelier
MENT ÇABILITÉ précongrès de médecine et de santé
Le moment de prélèvement est La restitution des résultats de la au travail de Marseille en 2018, Jour-
défini par le médecin du travail sur SBEP est effectuée de façon indivi- nées de toxicologie de La Baule en
l’ordonnance de prescription de la duelle par 87 % des médecins du tra- 2018, Journées des différentes socié-
SBEP. Pour cela, le questionnaire in- vail en SSTI ou en SSTA. tés régionales de médecine et santé
vestiguait 3 sources d’information : En revanche, la restitution de la au travail, articles dans la revue de
O les informations données par le SBEP est assurée de façon collective l’INRS Références en Santé au Tra-
laboratoire : elles sont utilisées par par 42 % des médecins du travail de vail...).
89 % des médecins du travail de SSTI et 68 % de ceux en SSTA. La SBEP semble, au vu des réponses,
SSTA et par 59 % des médecins du La traçabilité des résultats dans essentiellement prescrite de façon
travail de SSTI ; le dossier individuel du salarié est individuelle dans le cadre du suivi
O les informations données par une assurée par la grande majorité des médical des salariés (surtout par les
base de données : elles sont utiles médecins du travail, qu’ils soient en médecins du travail de SSTI). Près
pour 74 % des médecins du travail SSTI (92 %) ou en SSTA (94 %). La tra- de 90 % des médecins du travail de
en SSTA et 63 % de ceux qui exercent çabilité collective à travers la fiche SSTA (contre 2/3 des médecins du
en SSTI ; d’entreprise est assurée par 31 % travail de SSTI) la prescrivent plus
O les informations spécifiques à des médecins en SSTI et par 40 % de de façon collective au niveau d’un
l’activité du salarié : la durée de ceux en SSTA. groupe de travailleurs (groupe d’ex-
l’activité exposante, la fréquence de position similaire - GES) exerçant
l’exposition et la durée des tâches CONNAISSANCE DES RECOMMANDA- une activité à risque spécifique, ce
exposantes sont utilisées par plus TIONS DE BONNE PRATIQUE qui fait tout l’intérêt de la SBEP. Le
de 80 % des médecins du travail Un point essentiel, seulement 45 % manque de temps pour définir des
(SSTI et SSTA confondus). des médecins du travail en SSTI GES, le fait de ne pas être toujours
La fiche de renseignements médi- connaissent les recommandations sur le terrain, ou le manque de
caux et professionnels (FRMP) [2] de bonne pratique sur la SBEP aux connaissances sont peut-être des
(annexe 2, pp. 87 à 88) est remplie produits chimiques de la SFMT, vs explications à ces disparités de pra-
(et accompagne le prélèvement) 59 % de ceux qui exercent en SSTA. tique.
pour 43 % des médecins du travail Il est étonnant de constater que la
en SSTI et pour 72 % de ceux en SSTA DISCUSSION mise en place d’une SBEP est le plus
; elle est remplie le plus souvent par L’analyse des réponses confirme la souvent décidée par le médecin du
les IDEST, en collaboration avec le diversité des pratiques et des be- travail seul et que l’équipe pluridis-
médecin du travail. soins des différents acteurs dans le ciplinaire, et notamment l’IDEST, qui
domaine de la SBEP. a un rôle fondamental à jouer pour
CONSEILS DEMANDÉS AU LABORA- Parmi les répondants, 91 % ont une la mise en place pratique de cette
TOIRE DANS LE CHOIX DE L’IBE pratique de SBEP, ce qui témoigne SBEP, n’est sollicitée ou associée que
L’IBE est choisi après conseils pris d’un public déjà bien sensibilisé dans moins de la moitié des cas (que
auprès d’un laboratoire de proxi- à la question, et pourtant seule ce soit pour les médecins du travail
mité par 42 % des médecins du tra- la moitié des médecins du travail de SSTA ou SSTI).
vail en SSTI (vs 77 % des médecins (SSTI et SSTA confondus) connaît les Les difficultés rencontrées par les
du travail en SSTA) et auprès d’un recommandations de bonne pra- répondants, principalement les mé-
laboratoire spécialisé par 37 % des tique de la SFMT. De plus, la moitié decins du travail des SSTI, quant au
médecins du travail en SSTI (vs 68 % des médecins du travail de SSTI et choix de l’agent chimique, de l’IBE
de ceux en SSTA). 1/4 des médecins du travail de SSTA à privilégier et au choix des salariés
Les conseils donnés par le labora- ne savent pas où les trouver. En chez qui mettre en place cette SBEP,
toire, que ce soit sur les conditions revanche, les médecins du travail témoignent de la nécessité d’amé-
de transport des échantillons ou qui les connaissent les jugent, pour liorer la formation des médecins
dans l’interprétation des résultats, plus de 80 % d’entre eux, utiles. Cela du travail (et des équipes de santé
ont également besoin, au sein de conservation des données en vue de permettre de développer une SBEP 1. L'INRS organise une
leur équipe, de médecins du travail leur exploitation collective à visée de qualité et aussi de faciliter la formation BI1530 :
référents, interlocuteurs spécifiques de prévention et afin de promouvoir mise en place d’un dispositif de cen- « Mettre en place
une surveillance
pour leurs confrères médecins du une biométrologie de qualité. tralisation des données de SBEP au
biologique de
travail afin de faciliter la mise en Pour connaître l’impact de ces re- sein de bases de données régionales l'exposition aux
œuvre pratique des recommanda- commandations sur les pratiques et/ou nationales, dans le but d’amé- agents chimiques »,
tions pour la SBEP de la SFMT. En des équipes des SST, deux ans après liorer la prévention des risques du 10 au 12 décembre
pratique, les médecins du travail leur publication, un questionnaire chimiques. 2019 à Paris (www.
inrs.fr/services/
en SSTI évoquent la difficulté pour a été diffusé auprès des acteurs de
formation/doc/stages.
leur direction d’accepter la création SST et 244 réponses ont ainsi pu être Les auteurs remercient le html?refINRS=
de postes de médecin référent en exploitées. Dr Catherine Nisse (Centre hospitalier BI1530_2019).
risques chimiques, postes nécessi- Malgré un panel de répondants régional et universitaire de Lille) et le
tant du temps et du personnel mé- déjà bien sensibilisé à la SBEP, cette Dr Robert Garnier (Hôpital Fernand
dical dédiés. enquête par questionnaire montre Widal Paris) pour leur aide dans
La mise en place d’un dispositif de que seule la moitié des médecins l’élaboration du questionnaire.
centralisation des données de la du travail (SSTI et SSTA confondus)
SBEP au sein de bases de données connaît les recommandations de la
régionales et/ou nationales, préco- SFMT. Par ailleurs, quand une SBEP
nisées dans la recommandation R36 est mise en place, elle est le plus
des recommandations de bonne souvent décidée par le médecin du
pratique pour la SBEP de la SFMT [1] travail seul. L’équipe pluridiscipli-
fait l’objet d’une réflexion dans le naire, et notamment l’IDEST dont le
cadre de l’action 1.10 du Plan Santé rôle est fondamental pour la mise POINTS À RETENIR
Travail 2016-2020 « Développer la en place pratique de cette SBEP, ne Les médecins en SSTA mettent en œuvre la
biosurveillance à des fins de préven- sont sollicités ou associés que dans plupart des recommandations de SBEP de la
tion ciblée » pilotée par Santé Pu- moins de la moitié des cas. La SBEP SFMT.
blique France. Cette centralisation semble prescrite par les médecins
Les médecins en SSTI devraient être plus
des données serait très utile pour du travail de SSTI de façon indivi-
nombreux à s’approprier les recommandations
cibler les actions de prévention. Elle duelle dans le cadre du suivi médi-
de SBEP.
nécessiterait que chaque région cal des salariés tandis que la très
française dispose de 2 médecins grande majorité des médecins du Un nombre insuffisant d’IDEST est formé et
référents dans le domaine de la travail de SSTA la prescrivent plus impliqué dans l’utilisation des recommandations
SBEP afin que ces bases de données de façon collective au niveau d’un
de SBEP.
soient correctement et régulière- groupe de travailleurs. Les IPRP impliqués dans le risque chimique
ment alimentées, tout en préser- Quant à la FRMP, source incontour- semblent connaître les recommandations de
vant la confidentialité des données nable d’informations nécessaires SBEP et participent à sa mise en œuvre quand la
et le secret médical. à l’interprétation des résultats de pluridisciplinarité est opérationnelle.
SBEP, elle n’est renseignée que par Disposer rapidement, par région, de médecins
moins de la moitié des médecins du référents en risque chimique avec une bonne
travail de SSTI (contre 3/4 des méde- connaissance de la SBEP est nécessaire pour la
CONCLUSION cins du travail de SSTA) : il apparaît gestion de la SBEP selon les bonnes pratiques
donc nécessaire de mieux la faire émises par la SFMT (recommandation R36).
La publication des recommanda- connaître.
tions de bonne pratique pour la Être formé 1, pratiquer, partager et
SBEP de la SFMT résulte d’un travail harmoniser les prescriptions sont
collectif et important d’experts du les besoins évoqués par la profes- BIBLIOGRAPHIE
domaine. Leur but est de guider le sion et que confirment les résultats
médecin dans sa décision de mettre de cette enquête. 1 | Surveillance biologique des expositions professionnelles
en place une telle surveillance, le La mise en place de médecins réfé- aux agents chimiques. Recommandations de bonne pratique.
choix des modalités de son exécu- rents régionaux, formés aux risques Pratiques et métiers TM 37. Réf santé Trav. 2016 ; 146 : 65-93.
tion, l'interprétation et la restitution chimiques et, en particulier, à la 2 | Fiche de renseignements médicaux et professionnels
tant individuelles que collectives SBEP avec une bonne connaissance (FRMP). In: BIOTOX. INRS, 2018 (www.inrs.fr/biotox).
et les modalités de collecte et de de ces recommandations devrait
15 questions vous sont proposées afin de mieux cerner les pratiques actuelles
1- Prescrivez-vous, ou les médecins du travail avec lesquels vous travaillez, prescrivent-ils ou ont-ils prescrit des
analyses biologiques spécifiques d’agents chimiques ?
2- Dans votre pratique, quels sont les principaux agents chimiques pour lesquels a été prescrite ou est envisagée
une surveillance biologique des expositions professionnelles aux agents chimiques (SBEP) ?
......................................................................................................................................................................................................................................
......................................................................................................................................................................................................................................
3- Dans votre pratique, les prescriptions de SBEP sont-elles réalisées de façon individuelle dans le cadre d’une
consultation médicale ?
UOui UNon UNon concerné
4- Dans votre pratique, les prescriptions de surveillance biologique des expositions sont-elles réalisées aussi (ou
seulement) de façon collective, au niveau d’un groupe de travailleurs exerçant une activité à risque spécifique ?
UOui UNon
5-2 par le médecin du travail, prescripteur aidé d’autres membres du service de santé au travail ?
UOui UNon
6- Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ou avez rencontrées dans la mise en place ?
6-1 Vous ne savez pas quels agents chimiques choisir ? UOui UNon
6-2 Vous ne savez pas quel indicateur biologique utiliser ? UOui UNon
6-3 Vous ne savez pas pour quel salarié en priorité pratiquer la SBEP ? UOui UNon
7- Utilisez-vous des résultats atmosphériques récents pour vous aider dans la démarche de prescription de dosages
biologiques spécifiques ?
UOui UNon UNon concerné
8- Quelles sont les informations que vous utilisez pour définir le moment de prélèvement ?
8-2 Les informations données par le laboratoire UOui UNon UNon concerné
QQQ
8-3 Les informations d’une base de données UOui UNon UNon concerné
UOui UNon (si Oui, elle est remplie par qui ?) : .................................………………………………………
10- Prenez-vous conseil auprès d’un laboratoire (LBM) dans le choix de l’indicateur biologique ?
11- Jugez-vous satisfaisants les conseils donnés et la gestion par le laboratoire du dossier du ou des salariés ?
14- Connaissez-vous « les recommandations de bonne pratique pour la surveillance biologique des expositions
professionnelles aux agents chimiques » publiées par la SFMT en mai 2016?
UOui UNon
UOui UNon
,Encadré 1
sionnel » (SIP) ont été utilisées [17].
> RISQUE RELATIF (RR) / ODDS RATIO (OR) Cette enquête a documenté, entre
autres, les EDM/TAG, l’état de santé
Un facteur de risque est un facteur associé exposés/non exposés, l’odds ratio (OR) mesure
statistiquement à la survenue d’un évènement la force d’une association dans les enquêtes cas-
global, ainsi qu’un large éventail
de santé. Ce qui signifie que la probabilité de témoins. Il est défini par le rapport de la cote de de FPS classés selon six domaines :
survenue d’un événement est significativement l’événement de santé chez les exposés et de la intensité du travail et temps de tra-
plus élevée chez les sujets présentant le cote de l’événement chez les non exposés. Son vail, exigences émotionnelles, auto-
facteur (exposés) comparativement à ceux ne interprétation est proche de celle du RR si la nomie et marge de manœuvre, rela-
le présentant pas (non exposés). Le facteur fréquence de la maladie est faible. tions sociales, conflits de valeurs et
concerné n’est pas nécessairement la cause de insécurité de la situation de travail
l’évènement. Un RR ou un OR supérieur à 1 signifie que le [12].
facteur étudié est facteur de risque de survenue
Le risque relatif (RR) mesure la force de de l’événement de santé. Un RR ou un OR
l’association entre un évènement de santé et un inférieur à 1 signifie que le facteur étudié est
facteur de risque. Il est estimé par le calcul du facteur protecteur vis-à-vis de la survenue de
rapport des fréquences de l’évènement entre les l’événement de santé. MÉTHODE
2 groupes de sujets exposés et non exposés. L’estimation d’un RR ou d’un OR est toujours
Alors que le RR est estimé dans les enquêtes exprimée avec son intervalle de confiance. POPULATION ET
ÉCHANTILLON D’ÉTUDE
L’enquête SIP est une enquête lon-
collège multidisciplinaire d'experts moment de l'exposition ou après un gitudinale réalisée en 2006 et 2010,
français [12]. Seuls quelques outils certain délai ? Les troubles de santé représentative de la population
standardisés sont disponibles pour mentale surviennent-ils même générale âgée de 20 à 74 ans [17].
mesurer ces facteurs [13, 14], de lorsque l'exposition est diminuée Au total, 13 648 sujets ont été inclus
sorte que ces concepts sont moins ou disparaît ? Le risque d’altération en 2006, dont 11 016 ont également
largement étudiés que les modèles de la santé mentale augmente-t-il participé en 2010. Les participants
Karasek et Siegrist. Theorell et al. dans le cas d'une exposition pro- ont été interrogés par des enquê-
ont publié une revue systématique, longée ? Ces questions ne peuvent teurs sur leurs parcours personnel
qui a confirmé que l'absence d’au- être abordées que dans des études et professionnel, leur santé et leur
tonomie de décision, le job strain longitudinales. Ainsi, Niedhammer situation au moment de l’entre-
et le harcèlement au travail étaient et al. ont montré que deux ans après tien. Pour la présente étude, seuls
associés à des symptômes dépres- la suppression de l'exposition aux les répondants qui travaillaient
sifs chez les hommes et les femmes, FPS, le risque d'un premier épisode au moment des deux entretiens
mais qui a trouvé des preuves limi- dépressif majeur est réduit [16]. ont été sélectionnés, représentant
tées pour le climat social, la justice Dans ce contexte, cette étude visait 5 684 sujets (2 709 hommes et 2 975
au travail, les conflits, l'insécurité à explorer les effets de l’exposition femmes). Le processus de sélection
de l'emploi et les horaires excessifs aux FPS mesurée en 2006 et 2010, des sujets pour cette étude est ré-
[15]. sur l'incidence d’EDM/TAG en 2010 sumé dans la figure 1.
La littérature souligne la nécessité selon le genre, à rechercher si les
de nouvelles études afin d’appro- effets de cette exposition étaient à CRITÈRES DE JUGEMENT DE
fondir la compréhension des rela- court terme, décalés et/ou cumula- L’ÉTUDE
tions « dose-effet » entre l'exposi- tifs, et à examiner l’existence d’un L’existence d’un EDM au cours des 2
tion aux FPS et la survenue d’EDM/ plus grand risque en cas d’exposi- semaines précédant l’interrogation
TAG, ainsi que des effets respectifs tion prolongée aux FPS par rapport et celle de TAG au cours des 6 mois
des différents FPS, pouvant appor- à une exposition à court terme. En précédant l’interrogation ont été
ter des éléments de réponse sur les complément, cette étude s’intéres- déterminées en 2006 et 2010 selon
facteurs les plus nocifs et sur l'exis- sait aux effets de l’exposition aux les algorithmes du Mini Interna-
tence d'interaction entre les FPS mêmes facteurs psychosociaux tional Neuropsychiatric Interview
dans leurs effets sur la santé men- au travail sur l’état de santé global (MINI) [18]. Du fait des faibles effec-
tale. D’autres questions ont émergé perçu. tifs concernés et de la corrélation
dans la littérature récente, concer- Afin de répondre aux objectifs de modérée entre la présence d’EDM
nant la chronologie et la réversibi- l’étude, les données de l’enquête et de TAG, le critère de jugement
lité des effets : l'effet se produit-il au nationale « Santé et itinéraire profes- retenu pour les analyses est la sur-
,Tableau I
> ITEMS UTILISÉS DANS SIP POUR CARACTÉRISER LES FACTEURS PSYCHOSOCIAUX, SELON LA CLASSIFICATION
PROPOSÉE PAR LE COLLÈGE D'EXPERTISE POUR LE SUIVI STATISTIQUE DES FACTEURS PSYCHOSOCIAUX [12]
Domaine Sous-domaine Items utilisés dans l'enquête SIP en 2006 et 2010
surée en 2006 par six items cotés Le score d’exposition « physique » sition) à 7 (niveau d’exposition
sur une échelle de fréquence en proposé par Coutrot et al. [17] a été cumulant le plus de contraintes
4 points (« toujours », « souvent », calculé pour la période 2001 à 2005. physiques).
« parfois », « jamais »). Un score Plus le score est élevé, plus l'exposi- Concernant l’itinéraire profession-
d’exposition psychosociale pour la tion était fréquente. De plus, l'expo- nel, deux périodes ont été distin-
période 2001 à 2005 a été calculé sition « physique » au moment du guées : du début du premier emploi
selon [17]. Plus le score est élevé, recueil de données a été étudiée en à la date de l’enquête en 2006, et
plus l'exposition était fréquente. 2006 et 2010 par sept items (pro- entre les deux dates d’interroga-
L'exposition « physique » anté- duits chimiques, bruit, vibrations, tion en 2006 et 2010. Comme pro-
rieure à 2006 (travail de nuit, tra- environnement agressif, efforts posé par Coutrot et al. [17], trois
vail répétitif sous contrainte de physiques, port de charges lourdes, variables ont été définies pour ces
temps, port de charges lourdes/ postures pénibles) cotés sur une deux périodes : la discontinuité du
postures pénibles ou vibration/ échelle de Likert (« toujours », « sou- parcours (périodes de chômage ou
bruit / température extrême, et vent », « parfois », « jamais »). Les d'inactivité), l’instabilité du par-
exposition chimique) a été éva- réponses aux items ont été dicho- cours (nombre de changements
luée en 2006 par les sujets grâce tomisées (« oui » pour les réponses d'emploi) et la durée totale de
à 4 items cotés sur une échelle de « souvent » ou « toujours »), puis l'emploi. Un indicateur supplé-
fréquence en 4 points (« toujours », additionnées pour donner un score mentaire caractérisant le sens de
« souvent », « parfois », « jamais »). unique variant de 0 (pas d'expo- la trajectoire professionnelle entre
,Tableau II
RELATIONS ENTRE LES forte quantité de travail (groupes (2,37) et de l'exposition répétée à la
PROFILS D’EXPOSITION B, C et D), à une forte complexité forte complexité du travail (2,29).
AUX FPS ET LA SURVENUE (groupe D), aux horaires de travail Enfin, pour la moitié des FPS, la
D’EDM/TAG EN 2010 excessifs (groupe C) et à une dis- présence d’EDM/TAG en 2010 était
Chez les hommes (tableau III), sonance émotionnelle (groupe B). plus fréquente en cas d’exposi-
par rapport au groupe A (jamais En particulier, l’OR de l'exposition tion répétée (groupe D) qu’en cas
exposé), l’incidence d’EDM/TAG répétée à l'insécurité de l’emploi d’exposition en 2010 uniquement
en 2010 était plus élevée en cas (6,20) était presque trois fois plus (groupe B), mais la différence n’est
d’exposition à une insécurité de élevé que l’OR de l'exposition répé- pas significative.
l'emploi (groupes B, C et D), à une tée à la forte quantité de travail
,Tableau III
> RELATIONS ENTRE EDM/TAG EN 2010 ET LES PROFILS D’EXPOSITION AUX FPS CHEZ LES HOMMES
OR [IC95%] Tests des différents effets délétères*
Exposé en 2010 Exposé en 2006 Exposé en Court Décalé Cumulatif Exposition
uniquement uniquement 2006 & 2010 terme OR(C/A)>1 OR(D/A)>1 répétée
(B) (C) (D) OR(B/A)>1 OR(D/B)>1
vs jamais vs jamais vs jamais
exposé (A) exposé (A) exposé (A)
Intensité du travail et temps de travail
Quantité de travail excessive 3,42 [1,79 - 6,54] 1,96 [0,93 - 4,17] 2,37 [1,05 - 4,17] < 0,001 0,038 0,019 0,818
Forte pression au travail 1,65 [0,86 - 3,16] 0,39 [0,13 - 1,13] 0,50 [0,21 - 1,20] 0,063 0,958 0,938 0,999
Forte complexité 1,34 [0,62 - 2,91] 1,70 [0,74 - 3,91] 2,29 [1,11 - 4,71] 0,224 0,104 0,012 0,059
Horaires de nuit/postés 0,98 [0,41 - 2,40] 0,97 [0,34 - 2,73] 0,43 [0,17 - 1,09] 0,510 0,519 0,961 0,919
Horaires excessifs 1,87 [0,88 - 3,96] 2,67 [1,17 - 5,89] 0,74 [0,32 - 1,72] 0,052 0,009 0,754 0,972
Horaires atypiques 0,59 [0,19 - 1,83] 0,50 [0,16 - 1,53] 1,80 [0,55 - 5,84] 0,816 0,886 0,163 0,081
Conciliation travail/hors travail 1,05 [0,51 - 2,14] 0,98 [0,37 - 2,60] 0,92 [0,30 - 2,83] 0,446 0,513 0,552 0,579
Exigences émotionnelles
Tensions avec le public 1,60 [0,81 - 3,17] 0,80 [0,27 - 2,34] 0,81 [0,20 - 3,28] 0,088 0,651 0,612 0,818
Dissonance émotionnelle 1,74 [0,92 - 3,29] 0,88 [0,38 - 2,05] 1,33 [0,69 - 2,56] 0,044 0,609 0,196 0,790
Peur au travail 0,86 [0,32 - 2,27] 0,88 [0,34 - 2,25] 1,99 [0,71 - 5,53] 0,619 0,601 0,093 0,106
Autonomie, marge de manœuvre
Manque d’autonomie procédurale 0,96 [0,50 - 1,85] 1,51 [0,73 - 3,11] 1,95 [0,81 - 4,67] 0,546 0,131 0,066 0,075
Faible utilisation des compétences 1,69 [0,82 - 3,46] 0,44 [0,12 - 1,66] 1,92 [0,70 - 5,21] 0,074 0,885 0,100 0,408
Rapports sociaux au travail
Mauvaises relations avec les
1,42 [0,67 - 2,99] 1,34 [0,56 - 3,22] 1,64 [0,61 - 4,46] 0,174 0,251 0,163 0,401
collègues
Manque de reconnaissance 1,16 [0,64 - 2,08] 0,44 [0,14 - 1,40] 1,36 [0,65 - 2,86] 0,310 0,916 0,203 0,324
Conflits de valeur
Conflits éthiques 1,42 [0,66 - 3,07] 1,54 [0,58 - 4,11] 1,54 [0,29 - 7,95] 0,184 0,191 0,303 0,465
Qualité empêchée 1,35 [0,67 - 2,69] 1,03 [0,42 - 2,51] 1,31 [0,53 - 3,26] 0,196 0,470 0,277 0,521
Insécurité de la situation de travail
Insécurité de l’emploi 4,81 [2,31 - 10,01] 2,37 [1,01 - 5,56] 6,20 [2,23 - 17,19] < 0,001 0,023 < 0,001 0,332
Ajusté sur l’âge en 2010, niveau d’éducation, événements marquants durant l’enfance, événements marquants 1991-2005 et entre 2006-2010, maladie
chronique en 2006, limitations d’activité en 2006, dépression et troubles psychiatriques entre 2006 & 2010, secteur d’activité en 2006, statut de
l’emploi en 2006, durée totale en emploi entre 2006 & 2010, expositions physiques 2001-2005 et en 2006, expositions psychosociales 2001-2005.
* les tests significatifs sont indiqués en gras (p<0,05)
,Tableau IV
> RELATIONS ENTRE EDM/TAG EN 2010 ET LES PROFILS D’EXPOSITION AUX FPS CHEZ LES FEMMES
OR [IC95%] Tests des différents effets délétères*
Exposé en 2010 Exposé en 2006 Exposé en Court Décalé Cumulatif Exposition
uniquement uniquement 2006 & 2010 terme OR(C/A)>1 OR(D/A)>1 répétée
(B) (C) (D) OR(B/A)>1 OR(D/B)>1
vs jamais vs jamais vs jamais
exposé (A) exposé (A) exposé (A)
Intensité du travail et temps de travail
Quantité de travail excessive 0,97 [0,60 - 1,56] 1,10 [0,65 - 1,87] 1,24 [0,72 - 2,16] 0,546 0,362 0,212 0,205
Forte pression au travail 1,66 [1,08 - 2,55] 0,95 [0,46 - 1,95] 1,51 [0,85 - 2,69] 0,010 0,550 0,076 0,640
Forte complexité 1,12 [0,69 - 1,82] 0,86 [0,48 - 1,55] 1,17 [0,72 - 1,89] 0,315 0,684 0,254 0,427
Horaires de nuit/postés 0,55 [0,24 - 1,22] 1,12 [0,50 - 2,51] 0,74 [0,38 - 1,45] 0,929 0,382 0,808 0,272
Horaires excessifs 0,48 [0,22 - 1,05] 1,04 [0,52 - 2,10] 0,92 [0,46 - 1,82] 0,966 0,450 0,593 0,103
Horaires atypiques 0,68 [0,29 - 1,57] 0,60 [0,21 - 1,70] 1,02 [0,36 - 2,90] 0,816 0,828 0,480 0,266
Conciliation travail/hors travail 2,19 [1,37 - 3,49] 0,80 [0,40 - 1,62] 1,62 [0,78 - 3,35] 0,001 0,727 0,095 0,772
Exigences émotionnelles
Tensions avec le public 1,22 [0,76 - 1,95] 0,74 [0,37 - 1,47] 0,74 [0,37 - 1,48] 0,200 0,803 0,799 0,903
Dissonance émotionnelle 2,11 [1,33 - 3,34] 1,27 [0,72 - 2,23] 1,52 [0,98 - 2,37] 0,001 0,199 0,032 0,942
Peur au travail 3,81 [2,13 - 6,81] 1,33 [0,65 - 2,73] 1,82 [0,56 - 5,92] < 0,001 0,215 0,158 0,872
Autonomie, marge de manœuvre
Manque d’autonomie procédurale 1,36 [0,87 - 2,13] 0,94 [0,57 - 1,54] 0,79 [0,40 - 1,58] 0,088 0,594 0,742 0,921
Faible utilisation des compétences 0,90 [0,53 - 1,51] 0,81 [0,43 - 1,53] 0,90 [0,42 - 1,92] 0,651 0,738 0,602 0,497
Rapports sociaux au travail
Mauvaises relations avec les
1,18 [0,73 - 1,93] 1,24 [0,69 - 2,22] 1,30 [0,68 - 2,45] 0,243 0,227 0,209 0,405
collègues
Manque de reconnaissance 1,45 [0,97 - 2,19] 0,89 [0,47 - 1,68] 1,52 [0,94 - 2,47] 0,036 0,633 0,043 0,422
Conflits de valeur
Conflits éthiques 0,93 [0,52 - 1,69] 0,69 [0,30 - 1,59] 2,20 [0,76 - 6,39] 0,583 0,804 0,073 0,076
Qualité empêchée 1,18 [0,75 - 1,87] 0,51 [0,26 - 0,97] 1,29 [0,73 - 2,29] 0,227 0,980 0,187 0,391
Insécurité de la situation de travail
Insécurité de l’emploi 2,27 [1,31 - 3,95] 1,98 [1,03 - 3,78] 0,91 [0,36 - 2,32] 0,002 0,019 0,575 0,957
Ajusté sur l’âge en 2010, niveau d’éducation, événements marquants durant l’enfance, événements marquants 1991-2005 et entre 2006-2010, maladie
chronique en 2006, limitations d’activité en 2006, dépression et troubles psychiatriques entre 2006 & 2010, secteur d’activité en 2006, statut de l’emploi
en 2006, durée totale en emploi entre 2006 & 2010, expositions physiques 2001-2005 et en 2006, expositions psychosociales 2001-2005.
* les tests significatifs sont indiqués en gras (p<0,05)
les analyses ont été réalisées sépa- en 2010 était plus fréquent en cas vais état de santé perçu dans le cas
rément pour les EDM et les TAG d’exposition à une faible utilisa- d’expositions à de faibles relations
(résultats non montrés). tion des compétences quel que soit avec les collègues (groupes B, C), à
le groupe par rapport au groupe A l’insécurité de l’emploi et au désé-
RELATIONS ENTRE LES (jamais exposé), mais également quilibre vie familiale / vie profes-
GROUPES D’EXPOSITION de manière significativement plus sionnelle (groupes B et D), à des
AUX FPS ET UN MAUVAIS fréquente dans le groupe D com- tensions avec le public (groupes
ÉTAT DE SANTÉ PERÇU EN paré au groupe B (OR=1,83), suggé- B et C), une quantité de travail ex-
2010 rant un effet majoré de cette expo- cessive (groupe D) et un manque
Chez les hommes (tableau V), un sition quand elle est répétée. Était de reconnaissance (groupe B). On
mauvais état de santé global perçu également plus fréquent un mau- observait un OR inférieur à 1 en cas
,Tableau V
> RELATIONS ENTRE MAUVAIS ÉTAT DE SANTÉ PERÇU EN 2010 ET LES PROFILS D’EXPOSITION AUX FPS CHEZ LES
HOMMES
OR [IC95%] Tests des différents effets délétères*
Exposé en 2010 Exposé en 2006 Exposé en Court Décalé Cumulatif Exposition
uniquement uniquement 2006 & 2010 terme OR(C/A)>1 OR(D/A)>1 répétée
(B) (C) (D) OR(B/A)>1 OR(D/B)>1
vs jamais vs jamais vs jamais
exposé (A) exposé (A) exposé (A)
Intensité du travail et temps de travail
Quantité de travail excessive 1,35 [0,86-2,11] 1,10 [0,69-1,77] 1,79 [1,08-2,96] 0,091 0,338 0,012 0,163
Forte pression au travail 0,91 [0,61-1,34] 0,99 [0,58-1,71] 0,86 [0,52-1,45] 0,686 0,505 0,702 0,570
Forte complexité 1,39 [0,91-2,15] 0,79 [0,49-1,26] 1,11 [0,73-1,68] 0,063 0,836 0,306 0,844
Horaires de nuit/postés 1,20 [0,68-2,11] 1,04 [0,58-1,85] 0,70 [0,43-1,13] 0,261 0,443 0,925 0,944
Horaires excessifs 1,05 [0,64-1,73] 0,58 [0,32-1,07] 0,49 [0,28-0,82] 0,420 0,965 0,997 0,993
Horaires atypiques 1,23 [0,67-2,28] 1,45 [0,78-2,69] 0,81 [0,35-1,90] 0,250 0,115 0,682 0,794
Conciliation travail/hors travail 1,95 [1,24-3,08] 1,22 [0,64-2,32] 2,60 [1,34-5,05] 0,002 0,267 0,002 0,220
Exigences émotionnelles
Tensions avec le public 1,71 [1,06-2,76] 1,63 [0,92-2,87] 0,84 [0,32-2,20] 0,014 0,044 0,638 0,912
Dissonance émotionnelle 1,31 [0,88-1,95] 1,27 [0,81-2,00] 0,84 [0,55-1,28] 0,089 0,147 0,786 0,963
Peur au travail 1,09 [0,58-2,05] 0,77 [0,43-1,37] 1,05 [0,48-2,32] 0,389 0,810 0,446 0,530
Autonomie, marge de manœuvre
Manque d’autonomie procédurale 1,21 [0,82-1,81] 0,63 [0,40-0,99] 0,92 [0,52-1,61] 0,163 0,976 0,607 0,806
Faible utilisation des compétences 1,75 [1,10-2,77] 1,76 [1,03-3,02] 3,20 [1,63-6,27] 0,009 0,019 0,001 0,050
Rapports sociaux au travail
Mauvaises relations avec les
1,63 [1,03-2,58] 1,96 [1,17-3,30] 1,70 [0,90-3,27] 0,017 0,005 0,054 0,457
collègues
Manque de reconnaissance 1,53 [1,08-2,18] 1,25 [0,74-2,11] 1,25 [0,79-1,98] 0,008 0,193 0,163 0,810
Conflits de valeur
Conflits éthiques 1,53 [0,87-2,69] 1,33 [0,70-2,52] 0,57 [0,18-1,80] 0,070 0,186 0,828 0,940
Qualité empêchée 1,34 [0,86-2,10] 1,28 [0,78-2,13] 0,91 [0,49-1,69] 0,092 0,162 0,608 0,873
Insécurité de la situation de travail
Insécurité de l’emploi 1,95 [1,10-3,48] 0,91 [0,50-1,62] 2,41 [1,00-5,84] 0,011 0,624 0,025 0,342
Ajusté sur l’âge en 2010, événements marquants durant l’enfance, maladie chronique en 2006, EDM/TAG en 2006, secteur d’activité en 2006, statut de
l’emploi en 2006, sens de la trajectoire, durée totale en emploi jusqu’en 2010, exposition physique 2001-2005 et en 2006, exposition psychosociale 2001-
2005
* les tests significatifs sont indiqués en gras (p<0,05)
,Tableau VI
> RELATIONS ENTRE MAUVAIS ÉTAT DE SANTÉ PERÇU EN 2010 ET LES PROFILS D’EXPOSITION AUX FPS CHEZ LES
FEMMES
OR [IC95%] Tests des différents effets délétères*
Exposé en 2010 Exposé en 2006 Exposé en Court Décalé Cumulatif Exposition
uniquement uniquement 2006 & 2010 terme OR(C/A)>1 OR(D/A)>1 répétée
(B) (C) (D) OR(B/A)>1 OR(D/B)>1
vs jamais vs jamais vs jamais
exposé (A) exposé (A) exposé (A)
Intensité du travail et temps de travail
Quantité de travail excessive 0,99 [0,66-1,49] 0,83 [0,52-1,31] 1,06 [0,64-1,74] 0,502 0,219 0,404 0,408
Forte pression au travail 1,47 [1,04-2,08] 0,86 [0,48-1,55] 1,05 [0,64-1,72] 0,014 0,316 0,420 0,930
Forte complexité 1,04 [0,70-1,55] 1,05 [0,69-1,61] 1,20 [0,81-1,76] 0,407 0,403 0,175 0,249
Horaires de nuit/postés 1,06 [0,59-1,79] 1,35 [0,75-2,45] 0,77 [0,47-1,24] 0,449 0,154 0,855 0,806
Horaires excessifs 0,54 [0,29-1,01] 1,21 [0,69-2,12] 1,16 [0,66-2,02] 0,972 0,244 0,299 0,030
Horaires atypiques 0,80 [0,41-1,57] 1,54 [0,78-3,02] 0,55 [0,19-1,57] 0,737 0,103 0,867 0,727
Conciliation travail/hors travail 1,65 [1,07-2,54] 0,94 [0,55-1,61] 0,79 [0,36-1,71] 0,011 0,421 0,721 0,957
Exigences émotionnelles
Tensions avec le public 1,00 [0,65-1,54] 0,87 [0,50-1,51] 1,19 [0,66-2,15] 0,485 0,317 0,275 0,305
Dissonance émotionnelle 1,23 [0,84-1,80] 1,39 [0,91-2,11] 1,24 [0,87-1,75] 0,142 0,059 0,111 0,484
Peur au travail 2,72 [1,55-4,75] 1,46 [0,84-2,53] 2,30 [0,87-6,05] 0,000 0,089 0,045 0,618
Autonomie, marge de manœuvre
Manque d’autonomie procédurale 1,27 [0,86-1,87] 0,80 [0,53-1,20] 1,07 [0,64-1,79] 0,108 0,147 0,394 0,722
Faible utilisation des compétences 1,38 [0,90-2,10] 1,06 [0,64-1,74] 0,89 [0,45-1,75] 0,065 0,406 0,631 0,880
Rapports sociaux au travail
Mauvaises relations avec les
1,29 [0,86-1,93] 0,84 [0,50-1,42] 1,57 [0,98-2,51] 0,108 0,266 0,030 0,245
collègues
Manque de reconnaissance 1,08 [0,77-1,52] 0,56 [0,33-0,95] 1,16 [0,79-1,72] 0,319 0,017 0,219 0,360
Conflits de valeur
Conflits éthiques 1,19 [0,70-2,03] 0,74 [0,36-1,52] 1,71 [0,65-4,48] 0,257 0,212 0,136 0,251
Qualité empêchée 1,16 [0,77-1,74] 0,88 [0,55-1,42] 1,69 [1,03-2,76] 0,234 0,313 0,018 0,086
Insécurité de la situation de travail
Insécurité de l’emploi 1,59 [0,92-2,73] 1,10 [0,60-2,00] 1,78 [0,86-3,68] 0,047 0,372 0,060 0,401
Ajusté sur l’âge en 2010, niveau d’éducation, événements marquants durant l’enfance, événements marquants avant 2006 et entre 2006 et 2010,
maladie chronique en 2006, EDM/TAG en 2006, secteur d’activité en 2006, statut de l’emploi en 2006, temps partiel en 2006, exposition physique en
2006 et exposition psychosociale 2001-2005
* les tests significatifs sont indiqués en gras (p<0,05)
sentés, les expositions observées ceux associés à la survenue d’EDM/ Dans une enquête européenne
couvraient l’ensemble des FPS TAG étaient associés à un mauvais réalisée en 2014, les FPS les plus
explorés. Pour les hommes comme état de santé perçu en 2010 chez répandus étaient la complexité et
pour les femmes, les expositions les femmes, avec des effets à court l'intensité du travail [25]. La fré-
à la forte complexité du travail terme et cumulatifs principale- quence de certains FPS a diminué
et au manque de reconnaissance ment. Chez les hommes, les FPS depuis 2005. Par exemple, moins
étaient les plus fréquemment rap- relatifs à l’autonomie/marge de de personnes font état de longues
portées. manœuvre, aux rapports sociaux heures de travail et d'un manque
Cependant, les effets des expo- au travail et à la conciliation vie de soutien social. Toutefois, l'insé-
sitions psychosociales sur l'inci- professionnelle / vie personnelle curité de l'emploi a augmenté et
dence d’EDM/TAG étaient diffé- étaient spécifiquement associés un cinquième des travailleurs tra-
rents. Chez les hommes, des effets à un mauvais état de santé perçu. vaille encore de longues heures ou
de l’exposition aux FPS relatifs à Enfin, seule une exposition répé- avec des horaires irréguliers. Des
l’intensité du travail étaient prin- tée à une faible utilisation des augmentations de la pression au
cipalement observés : l’exposition compétences chez les hommes et travail, de la violence et du har-
à une forte quantité de travail à des horaires excessifs chez les cèlement ont été signalées dans
avait des effets à court terme, cu- femmes était associée à un sur- certains pays, apparemment asso-
mulatifs et décalés sur la survenue risque de mauvais état de santé ciées à des changements au travail
d’EDM/TAG alors que l’exposition perçu en 2010 par rapport à cette consécutifs à la crise économique
à des horaires de travail excessifs même exposition à court terme. de 2008 [25].
avait des effets à court terme et
décalés, et l’exposition à une forte ÉVOLUTION TEMPORELLE DE NATURE DES EFFETS DE
complexité avait uniquement un L'EXPOSITION AUX FPS L'EXPOSITION AUX FPS
effet cumulatif. Chez les femmes, À notre connaissance, cette étude SELON LE GENRE
les facteurs relatifs à la demande est l'une des rares études longitu- Dans la littérature, les relations
émotionnelle étaient surtout dinales à avoir considéré les rela- avec la santé sont généralement
impliqués. L’exposition à la peur tions entre l'évolution de l'exposi- examinées séparément pour les
au travail, au déséquilibre travail/ tion à une grande variété de FPS, hommes et les femmes en rai-
hors travail et à la forte pression au-delà des dimensions tradition- son des effets différenciés de
au travail avaient des effets à court nelles des modèles de Siegrist et l'exposition aux FPS. Ardito et
terme sur la survenue d’EDM/TAG Karasek, et l'apparition de troubles al. [26] ont également identifié,
alors que l’exposition à la disso- mentaux et d’un mauvais état de dans une étude transversale, des
nance émotionnelle et au manque santé perçu. associations différentielles entre
de reconnaissance avaient des Algava et al. ont également obser- symptômes dépressifs et FPS chez
effets cumulatifs et à court terme vé une intensification de l'exposi- 33 907 employés européens : chez
sur la survenue d’EDM/TAG. L'ex- tion aux FPS chez les travailleurs les hommes, l'exposition à une de-
position au sentiment d'insécu- français entre 2005 et 2013 [23] : mande psychologique modérée, la
rité de l'emploi était fortement au-delà d’une augmentation de nécessité de cacher ses émotions
associée au diagnostic d’EDM/ la pression au travail, le travail et une faible sécurité de l'emploi
TAG pour les trois profils d'expo- semblait plus précipité, mais augmentaient le risque de symp-
sition suggérant un effet à court aussi plus exigeant en termes de tômes dépressifs. Chez les femmes,
terme, cumulatif et décalé chez les vigilance. L'autonomie avait égale- l'exposition à une demande émo-
hommes et pour deux des profils ment diminué sensiblement entre tionnelle modérée, une faible
chez les femmes, malgré le faible 2005 et 2013. Malard et al. ont reconnaissance et une faible sécu-
nombre de sujets dans la plupart estimé des tendances en Europe rité de l'emploi augmentaient le
des groupes. Enfin, aucun risque pour les différents FPS ; ils ont risque de symptômes dépressifs
accru de survenue d’EDM/TAG en souligné, par exemple, une dété- [26]. Des résultats similaires ont
cas d'exposition répétée aux FPS rioration concernant l’autonomie été trouvés dans la présente étude
par rapport à l'exposition à court et la sécurité de l'emploi, et une pour des personnes exemptes de
terme n'a été démontré. amélioration de l'équilibre travail- symptômes dépressifs 4 ans aupa-
Concernant l’état de santé perçu, famille [24], qui a également été ravant.
quasiment les mêmes FPS que observée dans la présente étude. L'insécurité de l'emploi est appa-
Dans une étude avec un suivi de entre l'amélioration de la santé pectif de travailleurs français, la
quatre ans, Stratzdins et al. [31] mentale (mesurée par le score ré- mesure standardisée et validée
ont étudié la relation entre l'amé- sumé mental du SF36 [34]) et une des diagnostics d’EDM et de TAG
lioration ou la détérioration de augmentation de l’autonomie [35]. [18] et de l’état de santé perçu
la demande psychologique, de Dans l’étude présentée ici, pour la [19], ainsi que la grande variété de
l’autonomie et de la sécurité de plupart des FPS, la santé mentale FPS explorés, des facteurs les plus
l'emploi d'une part, et l'évolu- est dégradée dans la population couramment évalués aux plus
tion des symptômes dépressifs et qui devient exposée, tandis que récents concepts qui ont émergé
anxieux d’autre part. Leur étude peu de situations d’amélioration au cours de la dernière décennie.
a révélé que toute amélioration dans l'exposition étaient associées En revanche, le questionnaire uti-
ou dégradation des symptômes à une diminution de la prévalence lisé pour les FPS n’est pas un ques-
était associée à une amélioration d’EDM/TAG. Toutefois, il n'a pas tionnaire standardisé. De plus, la
ou une dégradation respective été possible d'évaluer l'améliora- plupart des sous-domaines identi-
des FPS. De même, Smith et al. ont tion réelle de la santé mentale : le fiés a priori a été explorée par une
étudié les relations entre les chan- nombre de sujets diagnostiqués seule question (au maximum trois
gements en terme d’autonomie avec un EDM/TAG en 2006 mais questions), qui peut ne pas refléter
et la détresse psychologique ainsi pas en 2010 était particulièrement complétement les concepts explo-
que l'état de santé perçu sur une faible (107 sur 145 hommes et 219 rés. En particulier, la mesure des
période de 4 ans [32]. Ils ont mon- sur 333 femmes). conflits éthiques, pour lesquels au-
tré que l'amélioration de l’autono- cune association n’a été retrouvée
mie était associée à une meilleure LIEN INVERSE AVEC avec les différents indicateurs de
perception de l'état de santé et à CERTAINS FPS santé, est très parcellaire. En effet,
une plus faible détresse psycho- Les hommes et les femmes ex- ce concept générique de conflits
logique. Laine et al. ont étudié les posés de manière ponctuelle et éthiques peut correspondre à des
relations entre les changements actuelle ou de manière prolongée situations d’incertitude morale (à
de troubles mentaux communs aux horaires de nuit/postés ou à quel principe éthique se référer ?),
(en termes d'amélioration ou de des horaires excessifs avaient un de dilemmes moraux (plusieurs
dégradation), évalués par le ques- OR inférieur à 1 (sans signification valeurs sont en présence, chacune
tionnaire GHQ-12, et un certain statistique) concernant la surve- appelant à une action contradic-
nombre de FPS légèrement diffé- nue d’EDM/TAG et d’un mauvais toire avec les autres) ou de détresse
rents de ceux évalués dans l’en- état de santé perçu. Ces résultats morale (une contrainte extérieure
quêté SIP (facteurs de Karasek, jus- évoquent le processus de sélection entrave la mise en application du
tice organisationnelle, interface dans le temps (effet du travailleur comportement identifié comme
travail-famille, soutien social et sain) parce que ces deux situations adéquat), difficilement appréhen-
harcèlement au travail) [33]. Ils ont de travail exigent que le travailleur dables par une seule question.
identifié la contribution majeure soit en bonne santé. Ainsi, dans les Les algorithmes du MINI basés sur
du déséquilibre travail-famille sur études longitudinales, seuls les su- les critères DSM IV utilisés ici ont
l'amélioration ou la détérioration jets en meilleure santé continuent permis d'établir les diagnostics
de la santé mentale. Dans leur à travailler et sont ainsi en mesure d’EDM et de TAG pour chaque sujet.
échantillon, principalement com- de participer à ces enquêtes pro- La prévalence d’EDM/TAG en 2006
posé de femmes, les expositions fessionnelles. L’effet du travail- et 2010 (5 % chez les hommes et 12 %
au job strain, à l'injustice organisa- leur sain a été mentionné dans chez les femmes) était conforme
tionnelle, au déséquilibre travail- d'autres études longitudinales et a aux données nationales sur l’EDM
famille et au harcèlement actuel également été évoqué pour expli- (5 % dans hommes et 10 % chez les
ou récent étaient toutes associées quer des résultats similaires [36, femmes de la population géné-
à la dégradation de la santé men- 37]. rale en 2005 et 2010 [38]) et les
tale. Un soutien social fort, aucun TAG (2,1 % en population générale,
déséquilibre travail-famille, et FORCES ET LIMITES avec une fréquence deux fois plus
l'absence de harcèlement étaient MÉTHODOLOGIQUES DE élevée chez les femmes que chez
associés à l'amélioration de la san- L’ÉTUDE les hommes [39]), et aux données
té mentale. De même, Bentley et al. Les points forts de cette étude européennes [40, 41]. La prévalence
ont mis en évidence une relation étaient le large échantillon pros- d’EDM, de TAG et d’antécédents
CONCLUSIONS
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SU
ME
Nouveau protocole et baisse R
de la participation des
médecins : la collecte de données
de l’enquête SUMER 2016-2017
à l’épreuve de l’organisation
de la santé au travail
AUTEURS :
en B. Barlet, H. Malarmey, Institut de recherche interdisciplinaire en sciences sociales (IRISSO), Université Paris Dauphine
résumé S. Memmi, Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES), Paris
L’
Depuis 1986, l’enquête SUMER MOTS CLÉS
(surveillance médicale des Enquête SUMER /
Médecin du
expositions des salariés
travail / Santé au
aux risques professionnels) travail / Méthodo-
construit une cartographie logie / Pluridiscipli- enquête SUMER (sur- reconnue pour la qualité des don-
nationale des expositions narité veillance médicale des exposi- nées collectées qui servent à orien-
aux risques professionnels. tions des salariés aux risques ter la recherche scientifique sur les
Elle repose sur l’expertise professionnels), élaborée à partir risques professionnels ainsi que les
des médecins du travail de 1986 par le ministère du Tra- politiques de prévention à mettre
volontaires qui remplissent vail (Direction de l’animation de en place. En cela, elle contribue à
un questionnaire avec les la recherche, des études et des l'amélioration de la prévention en
salariés tirés au sort. Deux statistiques – DARES –, Direction santé au travail. Elle permet aussi
post-enquêtes portant sur les générale du travail - Inspection de mesurer les évolutions des expo-
ressorts de la participation médicale du travail – DGT-IMT) sitions professionnelles au cours de
des médecins à SUMER et en partenariat avec la Direction ces vingt dernières années en com-
sur la mise en œuvre de la générale de l’administration et parant les résultats de la dernière
pluridisciplinarité dans le de la Fonction publique (DGAFP), campagne à ceux des campagnes
recueil de données ont montré connaît sa quatrième édition. En précédentes (1994, 2003 et 2010).
que même si les médecins 2016-2017, l’enquête couvre l’en- Lors de la campagne 2016-2017, le
reconnaissaient l’intérêt semble des salariés du secteur pri- protocole a permis aux médecins
et la qualité de l’enquête, vé et du secteur public, en France participants de se faire aider par
le protocole s’intégrait métropolitaine et dans les dépar- des membres de leur équipe plu-
difficilement à un exercice tements d’Outre-Mer (DOM). ridisciplinaire (infirmier(e)s, inter-
professionnel en pleine Ce dispositif repose sur l’expertise venants en prévention des risques
évolution. Les conditions des médecins du travail volontaires professionnels – IPRP –, assistant(e)
favorables à l’implication qui remplissent, avec le salarié, un en santé au travail – ASST) dans le
des équipes et au bon questionnaire de vingt pages sur remplissage des questionnaires,
déroulement de l’enquête les expositions professionnelles, tout en gardant l’entière respon-
dépendent notamment de lors de la visite médicale pério- sabilité de l’enquête. Ce change-
l’engagement en ce sens des dique ou visite d’embauche de plus ment s’explique par les dernières
services de santé au travail. de trois mois. Cette enquête est réformes de la médecine du travail.
qui répondent… Nous, il y a 50 % de des structures où la prévention a le 1. Au début Loire, Bourgogne – Franche-Comté,
gens qui ne peuvent pas vraiment plus de difficulté à pénétrer. de l’enquête, Grand-Est et Île-de-France) 2. À elles
répondre, il y a des gens avec qui la les médecins quatre, elles cumulent 46 forma-
participants se
communication est difficile, on voit UNE BAISSE DE MOITIÉ voient remettre un
tions de médecins volontaires et
si physiquement ils vont bien, c’est DE LA PARTICIPATION DES autoquestionnaire représentent 46 % des médecins
tout. J’ai des ouvriers qui sont ma- MÉDECINS DU TRAVAIL À d’information participants (557) 3. La Bourgogne-
nœuvres ou manutentionnaires sur L’ENQUÊTE anonyme. Franche-Comté et les Pays de la
des chantiers de démolition, à quoi La participation des médecins Loire font d’ailleurs partie des ré-
ils sont exposés ? Ils sont exposés à du travail volontaires à l’enquête gions où le taux de participation
2. Les deux études
tout ! ». SUMER a connu une progression portent sur trois des médecins du travail est le plus
En ville, l’enquête est par exemple croissante jusqu’en 2010, avec régions, parmi élevé. La représentativité de ces ré-
difficilement conciliable avec les 2 400 médecins participants cette lesquelles les Pays gions permet une analyse fine des
contraintes de suivi des entreprises année-là. En 2017, ils sont deux fois de la Loire et la conditions d’organisation de la col-
Bourgogne –
de nettoyage. D’une part, l’absen- moins nombreux : seuls 1 244 ont lecte et de participation des méde-
Franche-
téisme aux visites de leurs sala- renvoyé au moins un question- Comté ; l’étude cins du travail à l’enquête SUMER.
riés (principalement des femmes naire, et ce malgré un important « protocole » porte
issues de l’immigration africaine effort en matière de formation par également sur
et asiatique) est particulièrement la DARES et l’Inspection médicale la région Île-de-
élevé. D’autre part, quand les sala- du travail (84 formations réalisées France et l’étude
« participation »
LE RÔLE ESSENTIEL DES
riés se présentent, il n’est pas aisé dans toute la France). Les médecins sur la région ÉQUIPES DANS LE RECUEIL
de les intégrer dans l’enquête car du travail ont pourtant l’habitude Grand-Est. DES DONNÉES
ils parlent et lisent souvent peu le de s’impliquer dans la collecte de
français et peuvent difficilement données en santé-travail à travers DE L’AMONT À L’AVAL DE
remplir les auto-questionnaires. différents dispositifs. Selon l’étude 3. Ces données L’ENQUÊTE : LES SECRÉTAIRES,
sont issues du
Enfin, les salariés sont plus fré- « participation », 33 des 64 méde-
bilan de collecte
DES INTERMÉDIAIRES
quemment convoqués dans les cins interrogés participent à des de l’enquête établi ESSENTIEL(LE)S ENTRE
locaux des SST, car il y a moins de enquêtes à dimension nationale par le prestataire SALARIÉS, ENTREPRISES ET
centres mobiles et les médecins comme EVREST (évolution et rela- de collecte IPSOS. MÉDECINS
disent se déplacer moins souvent. tion en santé au travail), SUMER Les témoignages convergent sur
Cela rend plus difficile l’implica- ou MCP (maladies à caractère pro- le fait que l’implication des secré-
4. Ces ajustements
tion dans l’enquête de salariés dont fessionnel) et 20 d’entre eux par- taires dans l’enquête SUMER est
ne sont possibles
le temps de visite est d’autant plus ticipent à des enquêtes locales et que dans les cas primordiale pour sa bonne mise
compté qu’il s’ajoute à un temps ponctuelles. où le tirage au en œuvre. Les médecins peuvent
de trajet important. De ce fait, si D’après les données du question- sort se fait en les solliciter à chaque phase de
le temps médical dans les SST est naire administré aux médecins amont [2]. l’enquête.
devenu plus rare depuis la dernière volontaires participants à SUMER En amont, ils/elles peuvent effec-
campagne SUMER, c’est aussi le cas 2016-2017 1, l'âge moyen est de tuer le tirage au sort (lorsque les
du temps des salariés. 54 ans, 75 % d’entre eux sont des salariés sont tirés dans les logi-
Le type d’entreprises et de sala- femmes. Plus de la moitié vient de ciels de gestion de convocation),
riés auquel les médecins et leurs SST interentreprises (58 %), bien et l’ajuster en fonction des refus
équipes sont confrontés au quo- que leur proportion ait diminué et des non-présentations 4. Dans
tidien influe donc à la fois sur depuis l’édition précédente (moins la phase de convocation, ils/elles
les dispositions à s’engager dans 5 points) au profit des médecins convoquent les salariés à la visite
l’enquête et sur le déroulement de venant de SST autonomes. Ces der- pour SUMER et organisent l’emploi
l’enquête lui-même. Ici, les moda- niers représentent 27 % des méde- du temps des médecins en fonc-
lités de participation à l’enquête cins participants contre 18 % en tion de ces visites, soit en bloquant
SUMER reflètent des probléma- 2010. une semaine pour l’enquête, soit
tiques plus larges liées à la mise Les deux études sur lesquelles en réservant des créneaux quoti-
en œuvre globale de la prévention : s’appuie cet article portent sur diens ou hebdomadaires. Dans un
les populations les plus exposées quatre régions considérées comme contexte où les visites périodiques
sont, en général, les plus difficiles représentatives des régions par- sont moins fréquentes, ces convo-
à suivre et elles travaillent dans ticipant à l’enquête (Pays de la cations pour l’enquête suscitent
Les infirmier(e)s se disent alors de certains produits ou leur utili- chimiques » du questionnaire
en confiance : ils n’auront a priori sation, il est parfois nécessaire de SUMER puisque l’IPRP aura permis,
affaire qu’à des salariés dont ils se déplacer : les médecins peuvent en amont, au médecin d’acquérir
peuvent mener les questionnaires alors demander à des ASST de le une meilleure connaissance des
à bien sans encombre. Ces condi- faire. Pour ce qui est de la partie expositions aux risques chimiques
tions de recueil de données ne sont « agents chimiques » du question- sur son effectif de salariés.
cependant pas la norme. Beaucoup naire, essentielle mais considérée Les résultats de l’enquête « pro-
d’infirmier(e)s sont confronté(e)s comme ardue et chronophage par tocole » indiquent que la solidité
à des cas complexes, et notam- de nombreux médecins, l’appui de l’assistance pluridisciplinaire
ment à des risques chimiques est cependant jugé insuffisant sur les risques chimiques est
pour lesquels ils ne s’estiment pas dans de nombreux cas. un facteur qui incite les méde-
suffisamment formés, car la divi- Le protocole d’enquête prévoit la cins à penser qu’ils ont « eu de
sion du travail entre les différents possibilité de missionner des IPRP la chance » dans le recueil de
consultants a été faite arbitraire- pour appuyer les médecins sur ce données sur les expositions aux
ment (par exemple, chacun prend versant de l’enquête. Il s’agissait risques chimiques. « Moi, j’en ai
en charge la moitié des entretiens). d’une prise d’informations ou de eu un ou deux (salariés exposés à
De plus, comme les effectifs suivis renseignements en entreprise, des risques chimiques) mais j’ai eu
sont importants et que les méde- afin de préciser certaines expo- cette chance que c’était des entre-
cins ont désormais beaucoup de sitions : « Pour les parties sur les prises qui avaient été visitées il y
visites problématiques à gérer, expositions physiques, chimiques a peu de temps, ou des entreprises
ils n’ont pas toujours le temps et biologiques, qui ont un caractère que je connaissais, donc j’ai eu
d’épauler les infirmier(e)s. Ainsi, plus technique, il s’appuiera tou- beaucoup de chance dans le tirage
d’après l’enquête « protocole », jours sur son expertise médicale et au sort. Beaucoup de chance. C’était
la mobilisation des infirmier(e)s sur les réponses du salarié. Il pourra des entreprises que je maîtrisais,
pour la collecte s’est souvent cir- compléter le questionnaire en pro- ou le tableau des fiches de données
conscrite à une simple délégation, cédant à une visite du poste de tra- de sécurité avait été fait récem-
parfois limitée aux cas présentant vail pendant son tiers-temps (qui ment, donc j’ai vraiment eu de la
peu d’expositions profession- pourra également être réalisée par chance. Sinon oui la partie risques
nelles, mais s’est rarement inscrite les IPRP) » [3]. chimiques va trop loin, parce que
dans une véritable coopération. Pourtant, il ressort de l’enquête c’est vraiment très lourd, et moi il y
« protocole » une faible mobili- a des choses que je n’arrivais pas à
ASST ET IPRP : QUELLE sation des IPRP pour effectuer ce comprendre » (médecin du travail,
ASSISTANCE DES MÉDECINS travail complémentaire en milieu service interentreprises).
SUR LE TERRAIN ? de travail, que les médecins justi- Dans cet exemple, la « chance » de
Les médecins du travail souhaitant fient souvent par le sentiment que la praticienne revient à être tom-
réduire le temps dédié à l’enquête l’enquête SUMER sort de la mission bée sur des entreprises qu’elle suit
ont été encouragés par l’équipe dévolue, au sein du service, aux depuis longtemps, qu’elle connaît
nationale SUMER, voire par leur IPRP. Les médecins disent n’avoir donc bien et qui sont suivies d’as-
hiérarchie, à déléguer le recueil de pas pensé à les mobiliser, ou pas sez près par l’équipe pluridiscipli-
données complémentaires sur le osé le faire. naire. Un IPRP toxicologue était
terrain à des ASST ou à des IPRP. Ceci dit, le rôle des IPRP ne peut passé récemment faire le point sur
Ainsi, quand les entretiens ne suf- être évalué uniquement dans le les risques et analyser les fiches de
fisent pas à recueillir des informa- cadre strict de l’enquête SUMER données de sécurité. Ce cas corres-
tions sur les expositions, en par- proprement dite. Dans certains pond à un exercice professionnel
ticulier aux risques chimiques, il cas, leur rôle est indirect. À titre qui se fait dans de bonnes condi-
faut alors contacter l’entreprise ou d’exemple, un médecin ayant tions : sur un effectif d’entreprises
se déplacer. Faute de temps, beau- recours régulièrement à l’assis- stables, avec des équipes qui ont
coup de médecins optent pour un tance d’un IPRP pour des problé- les moyens d’être efficaces. Ce
appel téléphonique pour complé- matiques en lien avec les risques constat amène à interroger les
ter leur recueil de données. Cepen- chimiques est mieux armé pour conditions de mise en œuvre des
dant, pour clarifier la composition répondre à la partie « agents enquêtes comme SUMER.
la plupart des « lauréats » ont des révèle qu’ils sont relativement plus Leur implication est pleinement
confrères qui ont également par- âgés que la moyenne et plus nom- légitimée par le fait que « partici-
ticipé à SUMER. L’engouement au- breux à avoir déjà participé à SU- per à la traçabilité des expositions
tour de l’enquête passe par l’enga- MER. Leur expérience de collecte de et la veille sanitaire » fait partie
gement du collectif de travail, ainsi données est appréhendée comme des quatre missions prioritaires
que celui du médecin inspecteur un atout pour une participation des SST. La réalisation de cette mis-
régional du travail (MIRT), particu- actuelle ou futur à un dispositif sion semble installée dans la pra-
lièrement moteur dans certaines de veille. Pour ces médecins, une tique des SST puisque la majorité
régions. La participation de plu- implication dans les enquêtes en des médecins du travail enquêtés
sieurs médecins d’un même SST à santé-travail permet d’améliorer participe à au moins une enquête
l’enquête accroît la motivation des la surveillance des expositions et d’envergure parmi les trois sui-
équipes et limite le risque d’aban- risques professionnels ainsi que vantes : MCP, EVREST et SUMER. Les
don. La dynamique collective peut l’état de santé des salariés. Si ces directions des SST interentreprises,
être renforcée par la création d’un médecins sont parvenus à dépas- majoritairement rassemblées sous
espace d’échange sur les pratiques ser leurs conditions de travail pour l’égide de l’association Présanse, af-
ou les difficultés rencontrées. Le assurer leur mission de vieille, ils fichent leur soutien aux différents
MIRT de Grand-Est a par exemple se montrent inquiets quant à leur dispositifs de veille, en témoignent
noté une participation très élevée possibilité d’y parvenir à l’avenir les réunions de présentation de
dans un SST avec 11 médecins par- au regard de l’évolution de la méde- l’enquête réalisées entre l’équipe
ticipants sur un total de 24. Si ce cine du travail. SUMER et Présanse.
taux exceptionnel s’explique en Ainsi, les médecins « lauréats » Pour autant, les entretiens révèlent
partie par l’inscription de l’enquête constituent un groupe hétérogène des pratiques différenciées. D’après
SUMER dans le Contrat pluriannuel où deux profils se distinguent. Les les médecins interrogés, les direc-
d’objectifs et de moyens (CPOM) « sereins » bénéficient des condi- tions des SST incitent rarement à
et le projet de service, ce sont sur- tions de collecte facilitantes qui participer à l’enquête SUMER et
tout les médecins eux-mêmes qui leur permettent de s’investir dans à assumer une mission de veille
ont été moteurs en affirmant leur l’enquête sans qu’il y ait de retom- sanitaire en général. Cela ressort
engagement. L’existence de ce col- bées négatives sur leur charge de d’autant plus des discours des
lectif de médecins a permis, d’une travail. Les « volontaristes » ont une médecins « abandonnistes » et
part, l’implication des acteurs de conception de la veille sanitaire qui « ex-participants ». Les directions
santé et d’une bonne partie du SST les pousse à surpasser leurs condi- de SST interentreprises ont été peu
dans la collecte, et, d’autre part, tions de travail, peu facilitantes, présentes durant la préparation et
une émulation autour de ce projet pour réaliser leur objectif de col- la collecte de l’enquête. Par ailleurs,
de groupe, rendant l’abandon plus lecte. À l’intersection de ces caté- elles se sont rarement investies
8. Inversement,
la coopération
difficile 8. gories, les médecins « lauréats » dans la communication ou l’organi-
entre acteurs des Certains médecins ont néanmoins peuvent être confrontés à certains sation de l’enquête (quoiqu’un peu
SST peut jouer atteint leur objectif de collecte motifs de désengagement, mais plus souvent chez les « lauréats »).
en la défaveur malgré des conditions de travail disposent d’autres facteurs dyna- Une des raisons évoquées serait
de la collecte de peu favorables (un grand nombre misants comme une équipe impli- l’urgence de la mise en place des ré-
données. Dans une
région mobilisée,
de salariés suivis, une équipe peu quée ou des effectifs moins élevés formes et le manque de personnel :
plusieurs stable, un SST peu investi dans la à suivre. les directions étaient accaparées
médecins et collecte...). Chez ces « lauréats vo- par le recrutement et l’intégration
leurs équipes lontaristes », le manque de moyens QUAND DES DÉCISIONS de nouveaux salariés (infirmier(e)s,
ont fait le choix a pu être dépassé du fait des moti- D’ORGANISATION collaborateurs médecins, IPRP,
de boycotter la
formation SUMER
vations éthiques qui les poussent IMPACTENT LES POSSIBILITÉS internes...) pendant la période de
parce qu’ils ne à s’investir dans la veille sanitaire. D’ENGAGEMENT DES ÉQUIPES collecte.
pouvaient pas Il s’agit majoritairement de méde- Les directions de SST interentre- De fait, les médecins ne se sont pas
tous venir faute cins ayant déjà participé à l’enquête prises jouent un rôle fondamen- toujours sentis soutenus dans leur
de place dans la SUMER et qui s’investissent par tal dans la gestion des missions démarche de collecte de données.
salle qui avait été
réservée, pour eux,
ailleurs dans d’autres dispositifs. de veille sanitaire et la réalisation Certains estiment que leur direc-
« c’était tout(s) ou Une analyse statistique sur le profil de la collecte de données épidé- tion favorise la participation à telle
rien ». de ces médecins « volontaristes » miologiques au sein des services. ou telle enquête au détriment des
inexistants : dans deux cas rencon- aux secrétaires d’opérer les ajuste- travail, et de temps et de locaux dis-
trés dans l’enquête « protocole », ments de planning nécessaires à ponibles pour l’enquête.
un(e) infirmièr(e) est présent(e) l’enquête. L’exemple le plus clair est Autant d’éléments qui pourraient
pour cinq ou six médecins. Ces le cas des SST qui fonctionnent avec faire l’objet d’une politique de ser-
situations ne permettent pas l’im- des secrétaires « convocateurs », vice qui valoriserait la mission
plication des infirmières dans le qui ne sont pas au contact quoti- de veille au lieu de la reléguer au
recueil de données SUMER car leur dien du médecin mais s’attachent second plan d’une activité princi-
exercice professionnel est dispersé à remplir un agenda en ligne. La pale qui reste centrée sur l’examen
sur l’ensemble d’un secteur, trop dissociation entre les convocations médical ou l’entretien infirmier.
large pour qu’ils/elles puissent et le reste de l’activité de secrétariat
développer une connaissance suffi- ne permet pas aux convocateurs
sante des entreprises et des postes. de connaître les employeurs et les
Les médecins qui exercent dans ces salariés, d’anticiper leurs réactions. CONCLUSION
conditions n’ont d’ailleurs souvent Dans ces SST, les secrétaires qui
même pas envisagé de solliciter sont au quotidien aux côtés des Les résultats de ces deux études ré-
l’infirmièr(e) avec qui ils travaillent, médecins n’ont pas la main sur les vèlent que le contexte de réformes
connaissant ses contraintes convocations. Le travail de facilita- et de crise démographique médi-
d’agenda. tion du déroulement de l’enquête cale est à l’origine d’une nouvelle
Par ailleurs, pour pouvoir partici- n’est dans ces situations pas pos- organisation du travail et de la
per à l’enquête, les infirmier(e)s ont sible : le secrétaire qui accueille les désaffection des médecins du tra-
besoin d’avoir un bureau à dispo- salariés et prépare les visites, tout vail dans la participation à SUMER.
sition pour mener des entretiens comme le médecin, « subit » l’ordre Certes, la complexité du tirage au
individuels, ce qui n’est pas acquis des consultations prévues par sort, la longueur du questionnaire
dans tous les SST. un(e) secrétaire convocatrice. Il/elle ou la technicité de certaines par-
Enfin, quand leur binôme est trop reçoit notamment les plaintes des ties constituent des contraintes à la
récent, ou que l’infirmier(e) est salariés qui trouvent leur attente collecte. Pour autant, les vraies dif-
encore en cours de formation, trop longue, plutôt que de pouvoir ficultés de participation dépendent
les médecins ont aussi renoncé à chercher à l’éviter. de l’organisation du travail et des
faire appel à eux pour le recueil L’enquête « participation » montre conditions de réalisation de l’en-
de données. Ces cas ne sont pas que l’engagement ou non dans quête.
rares dans des SST qui sont encore l’enquête est associé à des fac- Les médecins éprouvent plus ou
en pleine période d’ajustements teurs organisationnels liés notam- moins de difficultés à insérer l’en-
aux évolutions réglementaires, et ment au bon fonctionnement des quête dans leur pratique profes-
sont d’autant plus fréquents que équipes. L’enquête « protocole » sionnelle. Appréhender de manière
les infirmier(e)s peinent encore montre, elle, que ces facteurs orga- exhaustive les expositions profes-
parfois à trouver une place claire- nisationnels se répercutent sur le sionnelles nécessite de question-
ment définie dans les SST interen- bon déroulement de l’enquête et ner le travail réel des salariés, ce
treprises. L’enquête « protocole » le ressenti positif ou négatif des que les médecins ne peuvent plus
fait état d’un fort turn over sur les médecins par rapport à leur impli- toujours faire compte tenu de leur
postes d’infirmier(e)s dans certains cation. Ces enquêtes sont donc propre travail réel. La décision de
SST, très coûteux pour les médecins convergentes et permettent de participation ou de défection ainsi
qui les forment. définir les contours de configura- que les conditions de déroulement
L’enquête nécessite une connais- tions organisationnelles favorables de l’enquête pour les médecins
sance suffisante de l’effectif d’en- à la participation d’une part et de ou les équipes qui s’y engagent
treprises suivies par toute l’équipe, bonnes conditions de déroulement dépendent de multiples facteurs :
qu’il s’agisse de convoquer et d’ac- d’autre part. Il s’agirait a minima les trajectoires professionnelles des
cueillir les salariés, et plus encore d’équipes solides et bien installées, acteurs impliqués, leur rapport au
de questionner les expositions des se consacrant au suivi d’un effectif travail, les conditions de travail au
salariés à des risques profession- relativement stable d’entreprises, moment de l’enquête, l’organisa-
nels. Ainsi, l’enquête « protocole » mais aussi d’une certaine autono- tion du travail, les changements de
a mis en avant le fait que certaines mie des médecins (et des équipes) règlementation depuis dix ans, la
configurations ne permettaient pas sur l’utilisation de leur temps de démographie médicale, le rôle plus
Promoteurs :
en SFMT, Société française de médecine du travail, et HAS, Haute Autorité de santé
résumé
MESSAGES CLÉS
Le maintien en emploi ne se limite pas aux salariés en Un plan de retour au travail ou de maintien en emploi doit
arrêt de travail : il s’envisage tout au long du parcours être élaboré avec le travailleur et les autres acteurs concernés
professionnel. (employeur, professionnels de santé…) ; le travailleur doit être
informé, orienté et accompagné tout au long du processus.
Il est recommandé de repérer, en amont de tout arrêt de
travail, toute altération de l’état de santé du travailleur ayant Le maintien en emploi comprend des mesures individuelles
un retentissement sur ses capacités fonctionnelles et de ainsi que des mesures concernant l’environnement de travail.
travail.
Il est recommandé de tenir compte des freins et leviers pour
La coordination des acteurs intervenant dans le maintien en chaque situation.
emploi et la prévention de la désinsertion professionnelle est
Une stratégie progressive doit être adoptée, visant d’abord
indispensable.
le maintien au poste antérieur avec des aménagements
La visite de pré-reprise est l’une des clés du maintien en temporaires ou durables. À défaut, un reclassement vers un
emploi. autre poste de l’entreprise ou une reconversion dans une autre
entreprise doit être recherché.
Q Une première phase d’analyse Figure 1 : Paramètres de la situation à prendre en compte par le médecin du travail
et de compréhension partagées
du risque de désinsertion profes-
sionnelle (figure 1).
Q Une deuxième phase d’élabo-
ration d’une liste des freins à la
reprise du travail et des leviers
pouvant être mobilisés. Les me-
sures identifiées (tableau I, pages
suivantes) peuvent :
- être individuelles ;
- cibler le milieu de travail et les
conditions de travail ;
- cibler la coordination des inter-
venants.
Q Une troisième phase de mise
en œuvre planifiée des mesures
identifiées et de suivi avec une
évaluation régulière de l’état de
santé du travailleur et de sa situa-
tion de travail.
PRISE EN CHARGE
DES TRAVAILLEURS
DANS LE CADRE DES
AUTRES VISITES
TABLEAU I
,Tableau I
> MESURES MOBILISABLES DANS LE CADRE DU PLAN DE MAINTIEN EN EMPLOI OU DE RETOUR AU TRAVAIL
Mesure Objectif Modalités de mise en œuvre
Bilan de Aider à la construction d'un projet d'évolution Mobilisable au titre du plan de formation de l'entreprise ou du compte
compétences
DROIT COMMUN
Indemnité Maintenir le versement de l'indemnité jour- Lien entre l'inaptitude et l'accident du travail ou la maladie profession-
temporaire nalière accident du travail/maladie profes- nelle reconnu à titre initial ou de rechute.
d'inaptitude (ITI) sionnelle (AT/MP), au salarié déclaré inapte, Remise du CERFA par le médecin du travail au salarié pour transmis-
pendant la période d'étude du reclassement. sion à la caisse d’assurance maladie.
Versement de l'ITI par la caisse d’assurance maladie au maximum un
mois entre le premier jour qui suit la date de l'avis d'inaptitude et le
jour du reclassement ou du licenciement pour inaptitude.
Temps partiel Aménager temporairement le temps de tra- Prescription du médecin traitant ou d'un autre spécialiste.
thérapeutique vail, y compris lorsqu'il n'y a pas eu d'arrêt de Négociation des modalités avec l'employeur et le médecin du travail.
(TPT) travail pour maladie.
Reprise de travail Aménager temporairement le temps de tra- Prescription du médecin traitant ou d'un autre spécialiste.
léger vail et/ou la charge de travail, par une reprise Accord du médecin-conseil et de la caisse d’assurance maladie.
progressive de l'activité après un arrêt de tra- Négociation des modalités avec l'employeur et le médecin du travail.
vail d’origine professionnelle (accident du tra-
vail ou maladie professionnelle – AT ou MP).
Invalidité Aménager durablement le temps de tra- Prescription par le médecin traitant ou proposition du médecin-conseil.
ASSURANCE MALADIE
vail par une diminution du volume horaire. Après évaluation par le médecin-conseil de sécurité sociale et vérifica-
Compenser la perte de salaire engendrée par tion des droits administratifs par la caisse d’assurance maladie.
l'impossibilité de travailler ou la réduction du Classement en 3 catégories, selon évaluation du médecin-conseil, qui
temps de travail pour raison de santé. correspondent à un pourcentage d'indemnisation différent.
Actions de Élaborer et/ou mettre en œuvre un projet de Actions de formation professionnelle continue et actions d'accompa-
remobilisation maintien en emploi pendant l'arrêt de travail. gnement, d'information et de conseil.
précoces Sur autorisation de l'Assurance maladie via l'accord du médecin trai-
tant (CERFA) et avis du médecin du travail et de la cellule de prévention
de la désinsertion professionnelle.
Maintien des indemnités journalières servies et couverture du risque
AT/MP par la caisse d’assurance maladie.
Essai encadré Valider un projet de maintien en emploi pen- Période en entreprise de 3 jours maximum en continu ou discontinu
dant un arrêt de travail qui permet de : tester Sur autorisation de l'Assurance maladie via l'accord du médecin trai-
les capacités à reprendre le poste de travail ; tant (CERFA) et l'avis de la cellule de prévention de la désinsertion
tester un aménagement de poste ; tester un professionnelle.
nouveau poste de travail ; valider des pistes de Accord de l'entreprise d'accueil et du médecin du travail de cette der-
reconversion professionnelle. nière.
Maintien des indemnités journalières et couverture du risque AT/MP
par la caisse d’assurance maladie.
Contrat de Accompagner un projet de maintien en em- Contrat conclu entre la caisse d’assurance maladie, l'employeur et
rééducation ploi nécessitant de la formation « pratique » le salarié, pour une durée déterminée, renouvelable une fois dans la
professionnelle tutorée pour se réaccoutumer à l'exercice de limite de 18 mois.
en entreprise l'ancien métier ou se former à un nouveau Prise en charge à hauteur de 50 % de la rémunération brute par la
(CRPE) métier. caisse d’assurance maladie dans la limite du montant des indemnités
journalières servies.
Information de la DIRECCTE * de la signature du contrat.
Reconnaissance Faire reconnaître son aptitude au travail en Sur orientation de la Commission des droits et de l’autonomie des
de la qualité tenant compte des capacités et incapacités personnes handicapées (CDAPH) après évaluation médicale et admi-
de travailleur liées à la situation de handicap. nistrative.
handicapé (RQTH)
MDPH **
Permettre de mobiliser les aides, mesures et À l’avenir, la RQTH sera attribuée de façon définitive lorsque le handi-
services d'accompagnement visant à favoriser cap de la personne est irréversible.
le maintien en emploi.
Centres de pré- Définir et construire un projet professionnel Stage rémunéré, à temps plein, de 8 à 12 semaines. Sur orientation de la
orientation (CPO) en tenant compte des souhaits, aptitudes, Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées
potentiels et capacités de la personne. (CDAPH) après évaluation médicale, professionnelle et administrative.
Dispositif d'emploi accom- Permettre d’obtenir et de garder un emploi Sur orientation de la Commission des droits et de l’autonomie
pagné (DEA) rémunéré sur le marché du travail en béné- des personnes handicapées (CDAPH) après évaluation médicale,
ficiant d'un accompagnement médico- professionnelle et administrative.
social et d'un accompagnement à visée La mise en œuvre comprend un soutien et un accompagnement
d'insertion professionnelle. du travailleur ainsi qu’un appui et un accompagnement de
l’employeur.
Prestation de compensation Aider à la prise en charge de certaines Aide financière personnalisée, modulable en fonction des besoins,
du handicap (PCH) dépenses liées au handicap (par exemple, versée par le département.
achat de prothèses auditives, aménage- La demande de PCH fait l'objet d'une évaluation par une équipe
ment du logement ou du véhicule, recours pluridisciplinaire qui élabore ensuite un plan personnalisé de com-
à une tierce personne…). pensation. Ce plan comprend des propositions de toute nature
(prestations, orientation, conseils). Le plan personnalisé de com-
pensation est ensuite transmis, avec les observations éventuelles
du demandeur, à la Commission des droits et de l'autonomie des
personnes handicapées (CDAPH) pour décision.
Prestations
Étude préalable à l'aména- Analyser la situation de travail et identifier Sur prescription du Cap emploi ou par demande directe de l'em-
gement des situations de les solutions permettant l'adaptation du ployeur à la délégation régionale de l'AGEFIPH ou du FIPHFP.
travail poste de travail en fonction du handicap.
Prestations d'appuis spé- Apporter un appui expert permettant Sur prescription du Cap emploi.
cifiques (handicap visuel, d'identifier précisément les conséquences
auditif, moteur, mental, psy- du handicap au regard du projet profes-
chique et troubles cognitifs) sionnel et les moyens à mettre en œuvre.
Prestation spécifique Aider la personne handicapée à se projeter Sur prescription du Cap emploi ou autre acteur selon les régions
d'orientation profession- dans un nouveau projet professionnel. (CARSAT – Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail,
nelle services de santé au travail, COMETE France...).
Aides financières
Aide à l'accueil, à l'intégra- Participer au coût pour l'accompagnement Aide prescrite par Cap emploi ou demande auprès de la déléga-
tion et à l'évolution profes-
AGEFIPH & FIPHFP ***
Aide technique en compen- Participer aux coûts des moyens tech- Demande auprès de la délégation régionale AGEFIPH ou du
sation du handicap niques compensant le handicap. FIPHFP.
Aide prothèses auditives Contribuer au financement d'une prothèse Demande auprès de la délégation régionale AGEFIPH ou du
auditive. FIPHFP.
Aide à la recherche de solu- Participer aux frais occasionnés pour une Aide prescrite par Cap emploi.
tion pour le maintien en recherche de solution de maintien en
emploi emploi.
Reconnaissance de la lour- Compenser financièrement les charges Décision administrative, sur dossier. Demande de reconnaissance
deur du handicap (RLH) importantes supportées par une entreprise de la lourdeur du handicap à déposer auprès de l'AGEFIPH.
du fait des conséquences du handicap
d'une personne sur la tenue de son poste
après que l'aménagement optimal du
poste a été mis en place.
* DIRECCTE : Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi
** MDPH : Maisons départementales des personnes handicapées
***AGEFIPH : Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées ; FIPHFP : Fonds pour l'insertion des personnes
handicapées dans la Fonction publique
Bruit et
vibrations
au travaill
9 • 10 • 11 avril
•
2019
Nancy - France •
Design Graphique : Éva Minem / INRS
Informations et inscription :
www.inrs-bvt2019.fr
Colloque organisé par l’Institut national de recherche et de sécurité
TD 261
SUIVI POUR VOUS
tout de fournir à son utilisateur des l’Agence de protection environne- d’un fichier Excel téléchargeable
informations pertinentes facilitant mentale américaine (US-EPA). gratuitement sur le site intranet du
sa prise de décision médicale face Dans le but d’objectiver des expo- service de médecine de prévention
à un CMR, mais aussi l’accompa- sitions ou d’évaluer l’efficacité de du MINARM. Ce fichier pourra ainsi
gnement des travailleurs et les mesures de prévention mises en être utilisé en temps réel lors des
conseils dispensés à l’employeur. place, des informations sur la bio- visites médicales et consultable
À cette fin, la classification CMR métrologie sont également propo- par tous les médecins du MINARM,
réglementaire en vigueur est ainsi sées. Les indicateurs biologiques quel que soit leur lieu d’affectation,
systématiquement rappelée pour d’exposition (IBE) jugés les plus en France métropolitaine comme
chaque substance. Les noms des pertinents au vu des informations outre-mer. Il sera régulièrement
produits dans lesquels les subs- disponibles sur la base de don- mis à jour selon l’évolution des
tances listées ont été identifiées nées BIOTOX de l’INRS, sont ainsi connaissances scientifiques, de
sont également disponibles. Cette spécifiés lorsqu’ils existent. Les la réglementation, des nouvelles
information est cependant donnée moments de prélèvement recom- substances identifiées à la fois par
à titre purement indicatif. En effet, mandés, les périodes d’exposition les concepteurs et par les utilisa-
il est rappelé qu’elle ne doit pas se sur lesquelles renseignent ces IBE teurs eux-mêmes.
substituer à l’analyse des fiches et leurs valeurs biologiques d’inter-
de données de sécurité (FDS), car prétation (VBI) sont également pré-
la composition de ces produits est cisés. À noter que les concepteurs
susceptible d’avoir changé depuis ont fait le choix de ne pas men- OUTILS DE MESUR AGE
l’analyse initiale des FDS qui a per- tionner d’IBE, même s’il en existe, DES RISQUES CHIMIQUES -
mis d’identifier ces CMR. dès lors qu’aucune VBI (milieu SPÉCIFICITÉ DE LA
Lorsque des recommandations re- de travail et population générale) BIOMÉTROLOGIE
latives au suivi post-professionnel n’existe pour ces derniers, du fait A. Nicolas, Toxilabo Nantes
existent, elles sont spécifiées dans de l’impossibilité de les interpréter
la base de données, qu’elles soient dans ce cas de figure. L’évaluation des risques chimiques
d’origine réglementaire ou conseil- Afin de pouvoir conseiller l’em- est permise à la fois par la connais-
lées par les recommandations de ployeur dans son évaluation des sance des métiers, des procédés,
bonne pratique. risques, les valeurs limites d’expo- des tâches et des comportements
Les effets sanitaires en lien avec sition professionnelle (VLEP) de la et par le recensement des produits
les propriétés CMR des substances substance sont rappelées lorsqu’il utilisés, leur quantité, fréquence,
listées sont également précisés. en existe. Les liens vers la base de condition d’utilisation ainsi que la
Ils sont détaillés chez l’Homme, données des tableaux des mala- présence d’équipement de protec-
mais également chez l’animal dies professionnelles de l’INRS per- tion collective et individuelle.
lorsque les données humaines mettent d’aider le médecin dans La mesure de l’exposition peut
sont inexistantes ou limitées. Cette le cas où le travailleur souhaiterait être atmosphérique, surfaciques
information doit permettre au effectuer une déclaration de mala- ou dans les liquides biologiques.
médecin d’orienter son examen die professionnelle. Elle nécessite des ressources
clinique et la prescription d’éven- Enfin, en vue de faciliter la rédac- humaines et matérielles avec le
tuels examens complémentaires tion des documents de traçabilité recours à une formation et la pra-
en l’absence de recommandations incombant au médecin de préven- tique régulière pour prélever, ana-
officielles. Ces effets ont été sys- tion, des modèles pré-remplis lyser et interpréter.
tématiquement recherchés dans d’attestation d’exposition (volet Les détecteurs de gaz ou vapeurs
les bases de données de différents médical) sont également mis à permettent des prélèvements
organismes experts, parmi lesquels disposition. Ces modèles sont décli- dynamiques ou par badge afin
l’Institut national de recherche et nés pour chacune des substances, de déterminer les concentrations
de sécurité (INRS), le Centre inter- distinctement pour les personnels atmosphériques et ensuite de les
national de recherche sur le can- civils et pour les personnels mili- interpréter en fonction de la valeur
cer (CIRC), l’Agence du registre des taires. guide de la qualité de l’air intérieur
substances et maladies toxiques En pratique, la base de données (VGAI), référence pour la pollution
des États-Unis (ATSDR), ou encore CIRCÉ se présente sous la forme de l’air intérieur et/ou de la VLEP.
à la phase de repérage précoce, une démarche propre à l’ergono- n’ont pas de vision nocturne...).
des examens complémentaires mie en pointant le travail comme L’analyse de cette activité permet
peuvent être prescrits comme un principal objet. L’analyse de la alors de proposer un débat avec
* Carboxy dosage sanguin de CDT *, mar- demande en est la première étape, les acteurs sur les raisons de leurs
Deficient queur indirect le plus fiable. suivie de phases d’observation et choix de détournement de la pres-
Transferrin En conclusion, l’alcool et le risque d’échanges avec les agents et tous cription et, par la suite, de trouver
routier demandent une approche les acteurs qui sont partie prenante avec eux des pistes de solution et
multifactorielle. Une attention par- dans la recherche de pistes de solu- d’aménagement pertinentes.
ticulière doit être portée aux pots tion. Si l’objectif reste d’apporter Ces interventions ont des aboutis-
et repas d’affaires. Le sujet est à la des conseils avisés aux deman- sements qui dépassent le « simple »
frontière entre santé publique et deurs (médecin de prévention aménagement de leur espace de
santé au travail. Pour autant, l’ap- et employeurs), la méthodologie travail ou de leur organisation de
proche doit rester identique à celle s’obstine à tenter de mettre en évi- travail. À travers elles, l’agent défi-
de tout autre risque professionnel dence les écarts entre le travail tel cient visuel a cheminé dans son
avec un rôle important du service qu’il est prescrit et le travail réalisé acceptation du handicap et d’une
de santé au travail. réellement… Autrement dit, perce- possible évolution de celui-ci. Il a
voir les régulations, les stratégies été proposé à sa hiérarchie et son
mises en place par les agents pour équipe des aménagements organi-
faire face à ce qu’on leur demande. sationnels lui permettant d’expri-
ACTION EN MILIEU DU Pour l’agent déficient visuel, à mer son talent et son expérience.
TRAVAIL : « DE LA BANALITÉ qui l’on demande de fournir de la La mise en débat de ces écarts
D’UNE INTERVENTION À LA documentation technique et un entre le prescrit et le réel a permis
RICHESSE D’UNE ACTION soutien aux utilisateurs (via une de renforcer les collectifs autour
COLLECTIVE » boîte mail), cela lui demande bien de projets communs. La mise en
S. Danet, ergonome, et N. Corolleur, plus que de traiter des courriels. lumière de certains acteurs (assis-
infirmière de prévention, Brest En effet, il doit fournir des efforts tante sociale, chargé de prévention
de concentration pour compenser des organismes…) leur a redonné
En partant de deux interventions un sens déficient, trouver des com- du pouvoir d’agir. Les chefs d’orga-
récentes en milieu du travail, « ba- bines, des « trucs », faire des choix nismes se sont repositionnés « dé-
nales » de par leur objet, et qui « radicaux » comme, par exemple, cideurs ». Les agents concernés ont
paraissaient éloignées par leurs de ne pas se former, limiter sa pré- été valorisés lors de leurs échanges
questionnements initiaux, les sence aux réunions et aux visites de savoir-faire et de combines.
intervenants ont cherché à analy- de chantier car il ne peut ni lire les Concrètement, à ce jour, l’agent dé-
ser leur pratique en soulignant les supports, ni prendre de notes, ni se ficient visuel s’approprie progres-
points communs, les difficultés sin- déplacer sur les sites. Il va jusqu’à sivement de nouveaux matériels
gulières et les liens élaborés avec prendre des risques, pour lui et d’aide (logiciel d’agrandissement),
les différents acteurs impliqués. les autres, en venant au travail en profite d’un environnement visuel
La première intervention, a priori conduisant seul son propre véhi- modulable et de mesures d’orga-
classique, fait suite à une demande cule. nisation du travail facilitant ses
d’aménagement du poste de tra- Pour l’équipe de surveillance, de déplacements sur site. Un trans-
vail, essentiellement informatique, la même façon, il existe un écart port domicile/travail a été mis en
d’un agent devenu déficient visuel entre leurs « prescriptions » (fer- place via un fonds handicap. Les
suite à un accident vasculaire céré- mer toujours la porte d’accès du lo- travaux dans le local d’accès au
bral et qui n’a plus qu’une acuité cal, assurer une veille constante la site sensible sont tout juste ache-
visuelle de 2 dixièmes. nuit, sans repos, faire présenter le vés. On sait que la modularité des
La seconde intervention concerne badge au visiophone, surveiller les équipements a été retenue et que
le réaménagement complet d’un caméras du parking…) et ce qu’ils la nouvelle organisation spatiale
poste d’accès à un site sensible font réellement (la porte est tou- de ce petit local comprend à la fois
dans lequel 8 agents se relaient jours ouverte avec une cale, il y a un un espace de repos et un autre
pour assurer la surveillance 24h/24. lit pliant, la mauvaise définition du dédié à l’activité principale de dis-
Les interventions, qu’elles soient visiophone ne permet pas de lire tribution des badges. Là aussi, les
individuelles ou collectives, suivent un badge, les caméras du parking agents mettront du temps pour
O opérationnelle avec des diffi- travailleurs. Bien que depuis cette Actuellement, la surveillance post-
cultés de communication et de étude sur le bien-être, il y a eu des professionnelle repose sur les re-
coordination ; malentendus par changements dans le contenu du commandations de la HAS de 2010.
manque de signaux non verbaux, travail mais aussi une progression Une tomodensitométrie (TDM) est
niveaux d’information hétéro- des aspects technologiques, le télé- proposée aux personnes ayant été
gènes au sein de l’équipe, absence travail affecterait globalement la exposées à l’amiante de manière
de régulation informelle et baisse santé (ressenti). active pendant une durée mini-
de coopération ; Au final, les points positifs du télé- male de 1 an cumulée avec une la-
O émotionnelle et relationnelle travail sont la souplesse accordée tence minimale de 30 ans pour les
avec un fossé affectif lié au déficit dans l’aménagement des horaires, expositions intermédiaires et de
de relation ; ressenti d’isolement, le rythme de travail et le choix des 20 ans pour les expositions fortes.
diminution du sentiment d’ap- priorités, la moindre pression des Si la TDM initiale est normale, il
partenir à une équipe, évolutions sollicitations et imprévus vécus au est recommandé, pour les TDM
différentes de la conception de la quotidien, dès lors que la pression suivantes, une périodicité de 5 ans
mission et des valeurs de l’équipe hiérarchique n’est plus perma- pour les expositions fortes et de 10
et besoin accru de justifier son im- nente, et le meilleur équilibre entre ans pour les autres.
plication. vie professionnelle et vie privée lié Les Armées ne disposent pas d’un
La confiance est la clé de voûte de la notamment à l’économie du temps système spécifique de surveillance
réussite du télétravail. Elle permet de transport. Mais pour chacun des maladies liées à l’amiante.
de gérer trois dérives : la hausse des de ces points positifs, il existe le Aussi une étude de cohorte des-
conflits car la distance provoque revers de la médaille avec pour la criptive prospective longitudinale
nécessairement des incompréhen- souplesse, le risque de travail par multicentrique, sur 4 centres (les
sions, voire des risques de concur- débordement, pour la moindre Hôpitaux d’Instruction des Armées
rence et de jalousie au sein d’un pression, l’absence de hiérarchie – HIA – Clermont Tonnerre à Brest,
collectif de travail ; une coopération pour gérer les problématiques pro- Sainte-Anne à Toulon et Percy à
amoindrie dans les échanges qui se fessionnelles et pour le meilleur Clamart, ainsi que le Centre hospi-
traduit par des rétentions d’infor- équilibre entre vie personnelle et talo-universitaire – CHU – Morvan
mations et un manque de solida- professionnelle, l’intrusion de cette à Brest) est mise en place.
rité et enfin, un stress accru pour dernière dans la vie personnelle. L’objectif principal de cette étude
ceux qui travaillent à distance car Tout salarié n’est pas forcément est de valider une matrice emploi-
ils savent qu’ils ne peuvent comp- préparé à assumer une grande exposition à l’amiante pour la
ter que sur eux-mêmes. autonomie, voire une solitude dans Marine Nationale, élaborée par un
À domicile, un lieu dédié au télétra- le travail et ce type d’organisation travail de thèse en 2013. En effet, à
vail est primordial, permettant de génère en soi de l’anxiété et des ce jour, il n’existe pas d’outil, pour
s’isoler et de se concentrer sur des besoins nouveaux dans le domaine le médecin de prévention, d’aide à
dossiers complexes, de mettre le relationnel. l’évaluation du niveau d’exposition
travail à distance pour les proches à l’amiante au sein des armées.
qui n’ont pas envie d’être confron- Cette matrice a classé les métiers
tés à l’émergence de la sphère pro- les plus à risques d’exposition et
fessionnelle chez eux et de main- ÉTUDE CAM OU COHORTE défini trois catégories de groupes :
tenir une frontière entre la sphère AMIANTE DANS LA MARINE exposition forte (mécanicien in-
professionnelle et celle domes- NATIONALE dustriel en atelier naval, électricien,
tique. A. Pegorie, médecin de prévention, mécanicien d’arme, mécanicien
L’impact psychologique du télé- Brest aéronautique…), intermédiaire
travail est une question déjà an- (matelot de pont, manœuvrier, in-
cienne. Il a été étudié en analysant Depuis 1997, la France a interdit formaticien, transfiliste…) et faible
des facteurs professionnels et de l’usage de l’amiante. Néanmoins ce (autres emplois).
l’organisation du travail mais aussi matériau très résistant et peu coû- Les objectifs secondaires seront
des caractéristiques personnelles teux a été utilisé pendant de nom- d’évaluer la prévalence des ano-
et des contraintes familiales pou- breuses années dans les bâtiments malies liées à l’amiante et celles
vant influer sur le bien-être des de la Marine Nationale. non liées à l’amiante chez des per-
tissant à des pathologies telles que tème régulateur du stress permet- aboutissent à environ 100 décès.
la dépression, l’anxiété, le burnout. tant de moduler les distorsions de Sept pour cent de ces intoxications
Et plus le sujet est « usé », plus il est perception. Ce système intégratif sont d’origine professionnelle et
à risque de déclencher un trouble se conçoit dans l’histoire de vie des peuvent être prises en charge au
de stress aigu et d’évoluer vers un individus. La charge allostasique titre du tableau n° 64 des maladies
syndrome de stress psychotrauma- est la mesure du coût biologique professionnelles du régime géné-
tique face à un événement poten- du stress pour un organisme en ral.
tiellement traumatisant. dehors de sa zone d’homéostasie ; La VLEP 8 heures va prochaine-
Le stress peut être analysé sous dif- elle tient compte de l’hyperréacti- ment passer de 50 ppm à 20 ppm
férents niveaux. vité, de la capacité à réguler cette tandis que celle à court terme sera
Q La psychothérapie considère la activation et des facteurs psycho- abaissée de 200 ppm à 100 ppm.
modalité d’expression du sujet face logiques. Les différences interindi- La toxicité du monoxyde de car-
au stress au travers de 4 champs : viduelles vont influencer ce coût bone est liée à la formation de
comportemental, émotionnel, par la diversité des réponses face à carboxyhémoglobine. D’ailleurs,
cognitif et physiologique. En psy- un stresseur : une habituation ou la relation entre l’imprégnation
chologie, le stress résulte de « la une sensibilisation avec difficultés en carboxyhémoglobine et la sur-
perception d’un déséquilibre entre de récupération. Ce niveau interin- venue d’effets sanitaires (hémato-
les attentes perçues et l’auto-éva- dividuel, déjà influencé in utero, va toxicité, cardiotoxicité, décès…) est
luation de ses propres capacités face se mâturer sous l’effet combiné de linéaire. La valeur de 3 % de car-
aux exigences des contraintes ». facteurs génétiques, développe- boxyhémoglobinémie est à ne pas
Q Les physiologistes intègrent le mentaux et environnementaux. dépasser.
syndrome général d’adaptation À ce jour, en l’absence de biomar- En dehors des intoxications aiguës,
de Selye (1952) divisé en 3 phases : queurs, il demeure difficile de dé- survenant parfois dans des environ-
phase d’alarme (sécrétion d’adré- crire et prédire l’usure de l’individu nements professionnels, l’impact
naline), phase de résistance ou sous la répétition des contraintes, sanitaire des intoxications chro-
d’adaptation (sécrétion de cortisol) obligeant à un regard global de niques à de plus faibles concentra-
et phase de récupération ou d’épui- l’homme intégrant la façon dont tions reste difficilement évaluable
sement (état de stress mal ajusté) il s’est construit, dont il vit le stress et fait toujours l’objet de recherches.
en cas de poursuite de la contrainte. et le contexte dans lequel il va évo- Comme d’autres professionnels,
Les voies décrites par Selye repré- luer. les militaires exercent diverses
sentent le lien entre le cerveau et activités favorisant l’exposition
le corps permettant à l’organisme au monoxyde de carbone, émis
d’agir de manière coordonnée lors des processus de combustion
pour réguler l’adéquation entre le RISQUE MONOXYDE DE incomplète de matière organique :
système sympathique et parasym- CARBONE ET SITUATIONS utilisation ou entretien de moteurs
pathique et contrôler l’axe corti- MILITAIRES, ADAPTATION à combustion, utilisation d’objets
cotrope permettant de durer face DES OUTILS pyrotechniques ou tirs de petites
au stress. Le coordonnateur de ces J.U. Mullot, Laboratoire d’analyse, artilleries, exposition à des fumées
voies de stress est le cerveau, mo- de surveillance et d’expertise de la d’incendie…
dulé par la balance Glutamate (acti- Marine (LASEM), Toulon L’évaluation des risques dans le
vateur et excitateur) – GABA (apai- cadre de certaines activités mili-
sant, anxiolytique), matûrant de la Le monoxyde de carbone (CO) est taires au moyen des outils habi-
vie in utero jusqu’aux premières un gaz incolore et inodore issu tuels est rendue difficile par :
années de vie. Ainsi, l’amygdale de tous les phénomènes de com- O la variabilité et la brièveté d’ex-
détectant un événement stressant bustion incomplète (chauffe-eau positions intenses (par exemple,
va informer plus ou moins violem- mal réglés, véhicules à moteur…), lors des tirs) : des pics allant jusqu’à
ment l’hypothalamus, déclenchant décrit depuis 1846 par Claude 500 voire 600 ppm de monoxyde
la sécrétion d’adrénaline et de cor- Bernard. Selon les données de San- de carbone ont pu être observés
tisol, donnant de l’énergie pour ré- té Publique France, il est respon- dans le cockpit d’un hélicoptère de
pondre au stress. Le cortex frontal sable aujourd’hui de 1 200 intoxica- combat lors d’une séance de tir ;
et l’hippocampe constituent le sys- tions aiguës par an en France, qui O des situations d’isolement ou de
Économie circulaire
en 2040
Quels impacts en santé et sécurité au travail ?
Quelle prévention ?
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TD 262
SUIVI POUR VOUS
Face à cette problématique, P. Frimat des données collectées par l’entre- pas toxicologues mais tous les
développe les propositions de son prise, le SST et la Caisse d’assurance intervenants en santé au travail
rapport selon 4 axes : le renforce- retraire et de santé au travail (CAR- doivent être formés aux risques
ment des obligations de prévention SAT). L’accès aux bases de données chimiques). Cette formation doit
et de traçabilité collective de l’em- serait facilité aux partenaires de concerner l’ensemble des acteurs :
ployeur, la consolidation du suivi prévention. entreprises, instances représen-
et de la traçabilité des ACD, l’amé- Les données du DMST seraient tatives du personnel et SST. Des
lioration de la prise en compte de transférables vers le DMP, pour postes de responsables « sécurité »
l’exposition aux ACD des salariés, coordonner médecine du travail doivent être créés ou encouragés
la formation et la recherche sur les et médecine de ville (accès numé- dans les entreprises de plus de 50
ACD. rique aux données compilées, cla- salariés, tandis que les TPE doivent
Dans le contexte évolutif de la rification de la vision des risques être accompagnées par les SST
santé au travail, 4 domaines priori- professionnels par le généraliste) : dans leur démarche de prévention
taires faciliteraient la politique de prise en charge individuelle des du risque chimique.
prévention souhaitée par le Plan ACD par le généraliste et collec- L’organisation territoriale revêt ici
santé travail 3 (PST3) : le renforce- tive par le médecin du travail. Le une importance déterminante. Elle
ment de la prévention primaire, DMP favoriserait ainsi le suivi à la doit s’adosser sur la mutualisation
la collecte des données ACD dans fois post-exposition et post-profes- des moyens, ainsi que sur une meil-
le DUERP, la réalisation du dossier sionnel (avec possibilité de retraite leure gestion des indicateurs. Il est
d’entreprise au sein du SST et le lien anticipée en cas de maladie profes- souligné qu’il convient de renfor-
entre le dossier médical en santé au sionnelle). cer les moyens humains affectés
travail (DMST) et le dossier médical Pour le salarié, il est nécessaire dans les petits « SST ». Au-delà de la
partagé (DMP). de promouvoir l’abondement du question d’un « guichet unique », il
Le renforcement de la préven- compte personnel de formation, en convient de développer les actions
tion primaire nécessite un DUERP cas d’exposition aux ACD. Par ail- collectives des SST, avec des coopé-
« non écrasable » (conservation des leurs, la prise en compte de la place rations multi-partenariales et une
versions successives). La traçabilité des « sensibilisants » permettrait approche pluridisciplinaire.
réclame un dossier ACD avec une d’accompagner les victimes d’aller-
vision collective associant le comi- gies professionnelles invalidantes
té social et économique (CSE) et vers le retour à l’emploi.
permettant un transfert des don- La reconnaissance des maladies SURVEILLANCE BIOLOGIQUE
nées (interopérabilité). Le Code du professionnelles liées aux ACD DES EXPOSITIONS,
travail pourrait être simplifié : fu- serait facilitée, bien que la surve- APPLICATION DES
sion des sections relatives aux ACD nue des effets pathogènes soit sou- RECOMMANDATIONS 2016 1
et aux CMR, espacement des obli- vent différée (cancer, pathologie A. Nicolas, Toxilabo Nantes
gations de métrologie intégrant la dégénérative), dans un contexte 1. Les résultats
biométrologie. L’instauration d’un de multi-expositions. Il importe de plus détaillés de La surveillance biologique des ex-
cette étude sont
vrai système de bonus / malus promouvoir un système réparateur positions professionnelles (SBEP)
présentés dans ce
semble à ce titre un point essentiel assurant une meilleure compen- même numéro de aux agents chimiques s’appuie sur
(mesures incitatives par la coti- sation et facilitant le maintien en la revue des recommandations de bonnes
sation versée par l’employeur à la emploi (formations de reconver- pp.79 à 88.. pratiques (RBP) qui ont été émises
branche AT/MP, amendes pénali- sion, concertations avec le CSE). en 2016 par la Société française de
sant les employeurs ne respectant La question est de savoir si le SST médecine du travail (SFMT). Afin
pas leur obligation, taxation des est purement au service d’un sys- de mieux connaître les pratiques
CMR). tème assurantiel, ou avant tout le actuelles des équipes des SST, 2 ans
Le rôle des services de santé au tra- garant du suivi de l’état de santé du après la publication de ces recom-
vail (SST) est prépondérant, notam- salarié durant son parcours profes- mandations, un questionnaire a
ment pour aider les très petites et sionnel. été proposé aux différents acteurs
moyennes entreprises (TPE/PME) Une formation et une recherche intervenants dans ce domaine :
à gérer le dossier ACD. La création « de qualité » permettraient d’amé- médecins du travail (MT), infir-
d’un dossier d’entreprise autori- liorer le niveau d’expertise (évi- miers (IDEST), intervenants en pré-
serait la conservation perpétuelle demment tous les acteurs ne sont vention des risques professionnels
Cette liste sera complétée par 30 345 en 2016 versus 6 800 en 2006). ments de protection individuelle
nouvelles VLEP issues de la trans- Le coût du dispositif de réparation/ (EPI) : adéquation des appareils de
position des directives n° 2017/164 indemnisation dépasse 2 milliards protection respiratoire (APR) à la
(ACD) et n° 2017/2398 (CMR), ainsi d’euros (MP, fonds de cessation an- morphologie du travailleur, bon
que par les travaux de l’Agence ticipée d’activité des travailleurs de ajustement des APR et effectivité
nationale de sécurité sanitaire l’amiante, fonds d’indemnisation du test d’ajustement (FIT test),
de l’alimentation, de l’environne- des victimes de l’amiante). Selon rasage quotidien, durée du port
ment et du travail (ANSES). l’ANSES, l’amiante provoque 42 % des EPI en fonction des contraintes
La silice est classée « cancérogène des cancers d’origine profession- thermiques et physiques, port de
pour l’homme » depuis 1997 par le nelle. correction visuelle, allergie cuta-
Centre international de recherche Le rôle du médecin du travail née, asthme…, formation des opé-
sur le cancer (CIRC). Les travaux consiste à rester vigilant sur le rateurs. Un autre point clé de vigi-
exposant à la poussière de silice repérage des matériaux au pré- lance est de s’assurer du respect de
cristalline alvéolaire sont reconnus alable des travaux. Le Code de la la décontamination en SS3 et en
« cancérogènes » par l’UE (direc- Santé publique (CSP) encadre le SS4.
tive n° 2017/37/CE). L’État français a dossier technique amiante (DTA), Il incombe à l’employeur de de-
jusqu’au 17 janvier 2020 pour trans- le dossier amiante des parties pri- mander l’avis du MT sur les notices
poser cette directive. vatives (DAPP), le constat avant de postes, le projet de stratégie
La simplification de la réglementa- vente et le repérage avant démoli- d’échantillonnage et les MO en
tion française doit respecter les di- tion. Le Code de la construction et SS4. Le MT doit être consulté pour
rectives européennes et conserver de l’habitation impose le diagnos- déterminer le nombre et la durée
un niveau équivalent de protection tic « déchet » pour les opérations des vacations, le temps nécessaire
des travailleurs. Sont envisagées la de démolition et de réhabilitation aux opérations d’habillage/dés-
fusion possible des sections rela- lourde d’immeubles bâtis. Le Code habillage et de décontamination,
tives aux ACD et aux CMR en une du travail énumère des principes ainsi que les temps de pause. L’avis
seule section (avec des points plus généraux de prévention, régit l’éva- du MT n’est pas obligatoirement
stricts pour les CMR), ainsi que luation des risques par le donneur requis sur les PDRE.
l’évolution du dispositif actuel de d’ordre (DO) et le repérage amiante En SS4, le MT émet un avis sur
contrôle des VLEP. avant travaux (décret n° 2017-899 l’élaboration et la modification de
Pour ces évolutions de la réglemen- du 9 mai 2017, relatif au repérage l’ensemble du mode opératoire :
tation, sont notamment prévus un de l'amiante avant certaines opéra- niveau d’empoussièrement, EPI et
groupe projet ouvert aux différents tions). Ce décret oblige à identifier mesures de protection collective
acteurs, une phase de négociation et localiser les matériaux conte- prévues, contrôles d’empoussière-
avec les partenaires sociaux, puis nant de l’amiante (MCA) en amont, ment, notices de poste, contraintes
un temps d’élaboration des textes en vue d’assurer la protection des physiques, vacations, procédure de
pour le second semestre 2019. travailleurs. Les arrêtés d’applica- décontamination, gestion des dé-
tion vont paraître prochainement. chets… Un outil méthodologique à
Le nombre de plans de démolition, l’élaboration des MO est disponible
de retrait et d’encapsulage (PDRE) sur le site de la CARSAT (www.car-
O PÉ R ATI O N S SU R D ES et de modes opératoires (MO) de- sat-pl.fr/files/live/sites/carsat-pl/
MATÉRIAUX AMIANTÉS, vraient ainsi tendre à augmenter. files/pdf/entreprises/amiante-outil-
RÔLE DU MÉDECIN DU Le MT doit également être attentif methodologique-mo.xlsx). L’archi-
TRAVAIL au classement en sous-section 3 vage des MO est assuré par l’entre-
F. Leray, CARSAT Pays-de-la-Loire (SS3) et en sous-section 4 (SS4), rele- prise pendant 50 ans (avec les avis
vant néanmoins de la responsabi- du MT).
Plus de 20 ans après son interdic- lité du DO. Le suivi individuel ren- La formation amiante (arrêté du 23
tion, l’amiante est toujours présent. forcé (SIR) implique une périodicité février 2012) concerne les travail-
La sinistralité liée à l’amiante reste des visites médicales d'au moins 4 leurs ayant une activité de retrait ou
préoccupante, même si le nombre ans, avec des visites intermédiaires d’encapsulage (SS3) et les interven-
de maladies professionnelles – MP par un professionnel de santé. tions libérant de l’amiante (SS4). Un
(tableaux 30 et 30 bis du régime gé- Le MT doit également être vigilant « Guide amiante à l’attention des
néral de la Sécurité sociale) baisse (3 quant à l’utilisation des équipe- médecins du travail et des équipes
les CBP (CIRC – groupe 1) et notam- Concernant la surveillance, la re- tion classés dans le groupe 1 par le
ment : amiante, arsenic et ses commandation de bonne pratique CIRC est de 5,5 % chez les hommes
composés inorganiques, béryllium « Surveillance médico-profession- et de 0,6 % chez les femmes. Les
et ses composés, bischlorométhy- nelle des travailleurs exposés ou nuisances professionnelles en
léther et chlorométhyléther, cad- ayant été exposés à des agents can- cause sont les amines aromatiques
mium et ses composés, gaz d’échap- cérogènes pulmonaires » préconise (xenylamine, auramine, benzidine,
pement de moteur diesel, certains la mise en place d’une expérimen- o-toluidine), les HAP, l’arsenic et le
dérivés du nickel, plutonium , radon tation pour le dépistage du CBP par perchloroéthylène.
222 et ses produits de filiation, silice scanner à faible dose chez les sujets Les travailleurs exposés aux
cristalline, rayons X et radiations a, exposés ou ayant été exposés pro- amines aromatiques exercent dans
de multiples composés ou situa- fessionnellement à un agent can- l’industrie du caoutchouc (pesée et
tions exposant à divers hydrocar- cérogène pulmonaire avec un haut mélanges, en fabrication de caout-
bures aromatiques polycycliques risque de CBP. L’essai du National chouc et de pneumatiques), dans
(HAP), travaux souterrains dans les Lung Screening Trial (NLST) a mon- l’industrie des colorants (prépa-
mines de fer, activités de peintures, tré l’efficacité du dépistage du CBP ration et pesée, en fabrication de
industries de production du caout- par scanner thoracique (réduction pigments, peintures, encres, ver-
chouc, tabagisme passif et fumées de la mortalité de 20 %) dans une nis), dans la fabrication de certains
de soudage. population à haut risque de CBP pesticides (chlordiméform), dans
Lors d’une exposition à l’amiante, dans des centres spécialisés en l’industrie des textiles avant 1970
les données récentes du pro- Amérique du Nord. L’étude LUSCO-1 (teintures), dans la fabrication de
gramme ARDCO font état d’une porte sur la faisabilité du dépistage bottes et chaussures en cuir, dans
majoration du risque de CBP asso- du CBP, dans une population défi- l’industrie des matières plastiques,
ciée à l’existence de plaques pleu- nie comme à haut risque dans les dans la coiffure (jusqu’aux années
rales. Une autre étude française RBP (fumeurs, de 55 à 74 ans, expo- 1970, colorant pour les cheveux
met en évidence une majoration du sés à des cancérogènes certains). contenant de la benzidine ou de
risque de CBP associée aux activités La traçabilité des données sur les la 2-naphtylamine), dans l’impri-
de soudage, après prise en compte expositions doit être archivée dans merie et dans les laboratoires de
du tabagisme passif et de l’expo- le DMST. recherche.
sition à l’amiante, en particulier Les opérateurs exposés aux HAP
dans les groupes ayant les durées travaillent dans l’industrie de
d’exposition les plus longues et les l’aluminium, la fonderie d’acier, la
latences les plus élevées. ÉTIOLOGIES production de coke, la combustion
Les émissions de moteur diesel PROFESSIONNELLES DES du charbon, l’enrobage routier, les
concernent les mécaniciens et les CANCERS DE L'APPAREIL traitements anticorrosion, l’inci-
conducteurs (locomotives, poids- URINAIRE nération des déchets, le ramonage,
lourds, autobus, taxis, engins). Ces B. Clin-Godard CHU Caen, INSERM la protection du bois (créosote),
émissions ont été classées CIRC 1 U1086 « ANTICIPE ». l’utilisation d’huiles usagées mal
en 2012. raffinées ou vieillies (usinage,
L’extraction des données du RNV3P Le taux d’incidence des can- huiles de décoffrage…), les activités
concernant le CBP montre une pré- cers de la vessie en France est de exposant aux gaz d’échappement
dominance masculine (sex-ratio à 14,6/100 000 chez l’homme et des moteurs à essence ou diésel et
28) et un âge moyen à 64 ans. Sur 2,5/100 000 chez la femme. La frac- le raffinage de pétrole.
7 233 PRT, les agents cancérogènes tion de ces cancers attribuable à L’arsenic est utilisé dans la fabri-
les plus fréquemment rapportés des expositions professionnelles cation d’herbicides, de pesticides
sont l’amiante (79,3 %), la silice est de 5 à 25 % chez l’homme. Huit et de certains médicaments anti-
(4,2 %) et les HAP (3,9 %). L’étude des à 14 % des cas incidents de cancers cancéreux (As2O3). Les viticulteurs
situations d’exposition confirme de la vessie et 10 à 14 % des décès exposés aux pesticides présentent
le poids important du secteur du liés à ce cancer chez l’homme sont une augmentation du risque de
bâtiment pour les dossiers de CBP attribuables à des facteurs pro- cancer de la vessie. L’excès de can-
retenus en lien avec les expositions fessionnels. La fraction imputable cers de la vessie serait lié à l’utili-
à l’amiante. aux agents ou situations d’exposi- sation de pesticides et de traite-
de la cavité buccale est objectivé réponse : augmentation du risque carcinomes neuroendocrines, les
pour l’exposition à la canne à sucre. notamment en cas de durée d’ex- sarcomes et les angiosarcomes
Les cancers ORL sont rares, mais position forte supérieure à 25 ou 30 cutanés.
avec de nombreux FdR non pro- ans (Boulanger en 2015, Offermans Les carcinomes cutanés repré-
fessionnels (alcool, tabac, papillo- en 2014), temps de latence supé- sentent 90 % des cancers de la
mavirus humains) et profession- rieur à 20 ans (Paris en 2017). La peau, 15 à 20 fois plus fréquents que
nels (amiante, formol, poussières relation causale est probable. les mélanomes malins. En France,
de bois, Ni, Cr…). Aucun tableau de Concernant le trichloréthylène on estime leur incidence à 65 000
MP n’est prévu pour le larynx, il est (TCE), il existe des preuves suffi- nouveaux cas par an. Ils atteignent
donc nécessaire de demander une santes pour le cancer du rein et des sujets de plus en plus jeunes.
réparation via le comité régional pour une association positive pour La fraction attribuable au travail
de reconnaissance des maladies le cancer du foie (CIRC 1). est inconnue.
professionnelles (CRRMP). La sur- Pour le tétrachloroéthylène, le Les facteurs de risque communs à la
veillance médico-professionnelle niveau de preuve est limité chez carcinogénèse épithéliale sont l’âge,
est essentielle pour les personnes l’homme pour les cancers du foie les expositions aux UV chroniques
exposées à un risque de cancer na- et de l’œsophage, mais est suffisant ou intermittentes, les facteurs géné-
sosinusien (bois/nickel). chez l’animal (CIRC 2A). tiques (les dangers des UV naturels
L’association entre RI et cancers sont étroitement corrélés aux pho-
digestifs est retrouvée chez les sur- totypes clairs), les génodermatoses,
vivants des bombes atomiques. l’immunosuppression acquise,
CANCERS DIGESTIFS L’étude INWORKS (2017) retrouve un les infections par papillomavirus
ET EXPOSITIONS excès de risque chez les travailleurs humains et les dermatoses inflam-
PROFESSIONNELLES du nucléaire. matoires chroniques. Les facteurs
C. Paris, CHU Rennes, INSERM Les cancers digestifs sont associés de risque (FdR) extraprofessionnels
U1085 (thème présenté par B. Clin- à plusieurs expositions profession- certains sont les UV (exposition
Godard) nelles : travaux dans l’industrie du aiguë et cumulative), ainsi que les
caoutchouc, radiations ionisantes, médicaments (azathioprine, cyclos-
Les cancers digestifs pouvant être chlorure de vinyle monomère, porine, méthoxsalène). Les FdR pro-
reconnus en MP ne concernent dichloropropane, virus des hépa- fessionnels certains (CIRC 1) sont les
que le foie (angiosarcome, carci- tites B/C, arsenic, trichloroéthylène rayonnements UV (facteur princi-
nome hépato-cellulaire – CHC). Les (foie) et amiante (côlon). pal), les brais et goudrons de houille,
expositions professionnelles en Des questions demeurent en sus- les huiles minérales non ou peu raf-
cause sont au nombre de 3 : arse- pens pour l’exposition à l’amiante et finées, les huiles de schiste, les suies
nic (tableaux n° 20 du RG et n° 10 le risque de cancers de l’estomac ou (ramonage et cancers du scrotum),
du RA), chlorure de vinyle (tableau de l’œsophage, ainsi que l’exposition l’arsenic et ses dérivés inorganiques
n° 52bis du RG), virus de l’hépatite B au TCE ou au tétrachloroéthylène et (As), les UVA et les RI. Les FdR pro-
et C (tableau n° 45 du RG et n° 33 le risque de cancer de l’œsophage. bables sont la créosote et le travail
du RA). en raffinerie de pétrole.
Les FdR (CIRC 1) sont les RI (œso- L’analyse des données du RNV3P
phage), la production de caout- entre 2001 et 2016 retrouve sur
chouc (estomac), le 1,2-dichloropro- C A N C E R S CU TA N É S 258 610 PST, 151 cancers cutanés
pane, les virus de l’hépatite B et C, PRIMITIFS ET EXPOSITIONS non mélanocytaires dont 82 impu-
le plutonium, le thorium-232 et le PROFESSIONNELLES tables au travail (imputabilité forte
chlorure de vinyle (foie). L. Bensefa-Colas, Université Paris ou moyenne). Les expositions asso-
L’amiante semble impliqué dans Descartes ciées aux carcinomes cutanés sont
le cancer colorectal. Une associa- principalement les HAP (20 %), les
tion positive est mentionnée dans Les tumeurs malignes cutanées UV (18 %), les huiles, graisses et
la monographie du CIRC (2012), regroupent les mélanomes cuta- fluides d’usinage industriel (12 %),
avec un désaccord d’experts pour nés malins, les carcinomes cutanés l’arsenic (9 %), les suies (9 %) et les
conclure à des preuves « suffi- (notamment les carcinomes baso- RI (4,8 %).
santes ». Des études récentes cellulaires – CBC – et les carcinomes Les secteurs d’activités les plus sou-
documentent une relation dose/ épidermoïdes cutanés – CEC), les vent impliqués sont la construc-
tion collective ou individuelle. Les O Mobilise-t-on une méthodologie de tennis), dioxyde de titane – TiO2
facteurs extra-professionnels sont d’évaluation optimale ? (peinture, matifiant), oxyde de zinc
conjointement étudiés (alcool, O Dispose-t-on d’une bonne régle- – ZnO (vernis), dioxyde de silicium
tabac, environnement résidentiel, mentation ? – SiO2 (maquillage, catalyseur),
plomb, produits de bricolage…). En prévention primaire, les pistes oxyde d’argent – AgO (textile).
Les plateformes « Prévenir » re- d’amélioration sont la maîtrise La réglementation impose la décla-
groupent le centre ARTEMIS, Pré2B permanente des expositions aux ration annuelle, depuis 2013, des
à Rennes, CREER à Marseille, Mate- reprotoxiques avérés ou présumés, NM mis sur le marché (supérieur
rexpo-ReprotoxIF à Paris et Créteil. l’information des salariées en âge à 100 g par an et par substance),
de procréer, la vérification de la auprès de l’ANSES, l’étiquetage des
compatibilité du poste de travail le cosmétiques, l’indication de la liste
plus en amont possible de la gros- des ingrédients contenant des NP
GROSSESSE ET TRAVAIL : sesse, l’utilisation du dispositif de dans les denrées alimentaires, ainsi
CONNAISSANCES, ÉTAT DES garantie de rémunération en cas quedes procédures d’autorisation
LIEUX ET PERSPECTIVES d’incompatibilité du poste avec la spécifique et d’étiquetage des bio-
P. Brochard, CHU Bordeaux, Centre grossesse. En prévention secon- cides. En 2017, 424 000 tonnes (T)
ARTEMIS Nouvelle-Aquitaine. daire, l’enjeu est le recours aux de NM ont été déclarés (304 000
spécialistes (gynécologues, CCPP de T produites, 120 000 T importées).
Concernant les risques pour la type ARTEMIS). En prévention ter- Les industries concernées sont
grossesse au travail, beaucoup tiaire, citons le signalement des cas celles des produits phytosanitaires,
d’éléments sont en pratique dis- suspects et la place du dispositif de des cosmétiques, des revêtements,
ponibles pour le médecin du tra- réparation. des peintures et des solvants. Les
vail et son équipe, notamment principaux NM produits en France
des outils d’aide à l’évaluation sont pour 97 % le noir de carbone,
et à la prévention : classification le SiO2, le carbonate de calcium –
CLP, fiches DEMETER, recomman- N A N O M AT É R I AU X : CaCO3, le TiO2, l’acide silicique et les
dations de bonne pratique de la DÉFINITION, RISQUES POUR sels de magnésium.
SFMT, réglementation, garantie LA SANTÉ, SURVEILLANCE Les effets toxicologiques connus
de rémunération en cas d’incom- MÉDICALE ET PRÉVENTION sont notamment issus des études
patibilité de la grossesse avec le P. Andujar, Centre hospitalier in- épidémiologiques concernant la
travail. ter-communal de Créteil, INSERM pollution atmosphérique (effets
Cependant plusieurs questionne- U955. respiratoires et cardiovasculaires
ments demeurent : des particules ultra-fines – PUF).
O A-t-on les bonnes bases scienti- Les nanomatériaux (NM) sont des Très peu d’études ont été menées
fiques ? De nombreuses questions matériaux d’origine naturelle ou sur les effets des NM manufactu-
scientifiques sont non résolues : anthropique (non intentionnelle rés chez l’homme (nombreuses
identification des métiers à risque, ou manufacturée) contenant des recherches expérimentales chez
risques émergents, relation dose- particules dont plus de 50 % ont l’animal). Les effets très variables
effet, pathogénie, transmission une taille de 1 à 100 nm : nanofeuil- dépendent de divers détermi-
transgénérationnelle, interactions lets à 1 dimension, nanotubes à 2 nants : facteurs liés à l’organisme
de substances reprotoxiques et ni- dimensions, nanoparticules (NP) à exposé (susceptibilité individuelle,
veau de causalité ou d’association. 3 dimensions. interactions avec les organes), fac-
O Investigue-t-on la bonne pé- Les sources d’émission sont natu- teurs liés à l’exposition (sources :
riode ? Parmi les phases critiques, relles (feu de forêt, éruption vol- aérosols ± particulaires, intensité
il y a les périodes pré / péri-concep- canique), non intentionnelles (gaz de l’exposition, durée de l’exposi-
tionnelles et l’allaitement, mais d’échappement, fumée de tabac / tion, co-expositions ; voies d’expo-
il existe un délai entre le désir de soudage / cuisson) et manufac- sition : respiratoire, cutanée et di-
grossesse, le diagnostic et la décla- turées (engouement s’expliquant gestive). La déposition respiratoire
ration de grossesse, puis l’informa- par les propriétés physiques et les dépend de la taille et de la forme
tion du médecin du travail. applications industrielles) : nano- des NM, de l’anatomie des voies aé-
O Cible-t-on la bonne population ? tubes de carbone – NTC (raquette riennes, du mode ventilatoire et du
services. Près de 15 000 FDS ont par an entre 2008 et 2014. En 2005, nure d'hydrogène (produits électro-
été transmises par 504 adhérents une recommandation de l’Orga- niques), la chloropicrine (résines), le
depuis 2014. L’analyse des FDS com- nisation des Nations Unies pour formaldéhyde (textiles), le benzène
portait notamment : synthèse des l’agriculture et l’alimentation (FAO) (caoutchouc), le toluène (embal-
dangers des produits, conseils pour encadre l’utilisation du bromomé- lages), le styrène (objets décoratifs),
la substitution des CMR, conseils thane, ou des autres traitements le xylène (isolants), le monoxyde
aux femmes enceintes ou en âge du bois utilisés lors du transport de carbone (jouets) et le gaz carbo-
de procréer (selon les phrases de des marchandises par bateau. nique (divers produits).
risques), conseils en cas d’allergie Un rapport de l’Agence européenne Les trois recommandations prio-
cutanée (recommandations selon pour la santé et la sécurité au tra- ritaires concernent l’étiquetage
les substances sensibilisantes), vail examine les risques potentiels (signalétique à utiliser par les ex-
aide pour la caractérisation des pour la santé et la sécurité, liés à la péditeurs, armateurs et salariés),
expositions (métrologie d’atmos- manutention des conteneurs fumi- la non-ouverture avant mesurage
phère et biométrologie). gés à l’aide de pesticides dans les et ventilation, ainsi que les procé-
L’exploitation des résultats par ports (Handling fumigated contai- dures évaluant la concentration
secteur d’activité a utilisé le com- ners in ports — health risks and pre- des gaz toxiques.
pilateur « Super-Colibrisk » pour vention practices – EU OHSA 2018). L’évaluation du risque va dépendre
repérer les dangers prépondérants Les principaux fumigants employés de l’origine du container (pays,
et identifier les substances préoc- sont le bromométhane, la phos- fournisseur), de la nature des
cupantes. Des tableaux de bord ont phine, le formaldéhyde (CIRC 1), marchandises transportées, de la
été réalisés par secteurs : nombre la chloropicrine (utilisation en fumigation éventuelle et des gaz
de FDS, produits et substances hausse), le 1,2-dichloroéthane (CIRC 2. Ouvrir et potentiellement présents 2. Toutes
par risque. Des représentations 2B) et l’oxyde d’éthylène (CIRC 1, uti- dépoter un les étapes doivent être surveillées :
graphiques figuraient les risques lisation en hausse depuis 2010). Le conteneur en zone de départ, transport mari-
sécurité. Éditions
par secteurs. Les secteurs étaient bromométhane est utilisé à visée time, déchargement portuaire,
INRS,
regroupés par codes NAF (nomen- pesticide (traitement des condi- ED 6249. Paris. zone logistique, transport terrestre
clature d’activité française). tionnements en bois). 2016 ; 24 p. et et commercialisation.
Cette démarche est chronophage La sinistralité concerne tous les Dépoter un Le rôle de l’information et de la for-
et réclame des moyens humains maillons de la chaîne de transport, conteneur - les mation des salariés occupe dans ce
4 étapes pour
importants. Les aspects positifs à bord des navires (1 marin décédé domaine une place maîtresse.
intervenir en
sont la pluridisciplinarité, la for- au large de Brest en 2008), dans sécurité. Éditions
mulation de conseils pertinents à les ports (céphalées de douaniers INRS ED 6194.
l’entreprise et aux salariés, le ren- au Havre en 2000, troubles neu- Paris. 2018,
seignement de la fiche d’entreprise, ropsychiques séquellaires chez dépliant 3 volets. ALGUES EN
la possibilité d’alerter en cas d’évo- des dockers à Rotterdam en 2007, DÉCOMPOSITION ET
lution de la classification, ainsi que irritations respiratoires et ocu- TRAVAILLEURS : NÉCESSITÉ
la communication auprès des ad- laires chez des manutentionnaires DE COOPÉRATION ENTRE
hérents d’un secteur d’activité sur à Hambourg de 2006 à 2010) et au PRÉVENTEURS –
les dangers particuliers identifiés. cours du transport terrestre (irrita- ENSEIGNEMENTS ET
tions respiratoires, vomissements PERSPECTIVES
chez des routiers à Rotterdam ; irri- L. Marescaux, DIRECCTE Bretagne
tations oculaires, céphalées, pares-
ACTUALITÉS EN thésies apparues chez des déména- Chaque été depuis plus de 30 ans,
TOXICOLOGIE MARITIME geurs parisiens en 2012). les côtes françaises (en particulier
D. Lucas, CHU Brest, Société fran- Un état des lieux des conteneurs sur le littoral breton) sont réguliè-
çaise de médecine maritime maritimes en France, effectué par rement touchées par des « marées
l’INRS en 2013, concluait à la pré- vertes ». Les causes évoquées de
Le transport maritime s’effectue sence de gaz toxiques à des taux celles-ci sont un excès de nitrates
essentiellement par porte-conte- supérieurs aux VLEP pour la phos- apportés par les activités humaines
neurs (14 %) et par vraquiers (41 %). phine (bois), le bromométhane et une configuration physique
Le nombre de containers transpor- (chaussures), le fluorure de sulfu- des baies favorisant la proliféra-
tés est passé de 500 à 700 millions ryle (denrées alimentaires), le cya- tion des algues. La typologie des
Benzodiazépines
et travail
AUTEUR :
P. Hache, Département Études et assistance médicales, INRS
en
résumé © Rodolphe Escher pour l'INRS
,Tableau I
baisse étant plus prononcée pour çaise), suivie du zolpidem (3,1 %) et RISQUES
les molécules à visée hypnotique du bromazépam (2,7 %) ;
que celles à visée anxiolytique. O la prévalence d’utilisation des TOLÉRANCE, PHARMACO-
Cependant, l’ANSM souligne que benzodiazépines anxiolytiques ou DÉPENDANCE ET SEVRAGE
le nombre d’usagers reste élevé : hypnotiques est plus élevée chez La tolérance, i.e. la nécessité d’aug-
en 2015, 10,3 % de la population les femmes (16,6 %) que chez les menter la posologie pour obtenir
française a eu recours à une ben- hommes (9,7 %), quel que soit l’âge ; les mêmes effets, est un phéno-
zodiazépine anxiolytique, 5,6 % à O 65 % des usagers prévalents de mène qui s’observe avec toutes les
une benzodiazépine hypnotique et benzodiazépines sont des femmes benzodiazépines et les médica-
0,2 % à une benzodiazépine anti- d’âge médian de 57 ans. Toutefois, ments apparentés [5]. Elle peut ap-
convulsivante (clonazépam). De il est noté que les nouveaux uti- paraître au bout d’une semaine ou
même, il est à noter que : lisateurs de ces molécules anxio- d’un mois de traitement, notam-
O l’alprazolam est la molécule la lytiques et hypnotiques sont plus ment pour les propriétés anxioly-
plus utilisée en matière de préva- jeunes, avec un âge médian de 49 tiques et hypnotiques.
lence (3,8 % de la population fran- ans.
RÉGLEMENTATION tion d’une irritabilité et d’un com- similaires dans un hôpital pédia-
Sur le plan réglementaire, l’arrêté portement agressif, avec passage trique. Dans cet établissement,
du 7 octobre 1991 modifié fixe la à l’acte, chez certaines personnes 25 % (n = 193) des personnels ont
liste des substances de la liste I des [10] ; consommé au moins une fois un
substances vénéneuses à proprié- Oles opiacés. Cette association ma- médicament psychotrope [14].
tés hypnotique et/ou anxiolytique jore la somnolence et la dépression L’usage d’anxiolytiques n’est pas
dont la durée de prescription est respiratoire, ce qui peut aboutir à significativement différent chez les
réduite. À titre d’exemple, cette une overdose [11]. hommes et chez les femmes. Par
limitation est de 12 semaines pour contre, une différence significative
l’alprazolam, tandis qu’elle est de est observée quant à la consomma-
4 semaines pour le zopiclone et le tion d’hypnotiques (17 % chez les
zolpidem. DONNÉES EN MILIEU DE femmes vs 8 % chez les hommes,
TRAVAIL p < 0,003).
RECOMMANDATIONS Au sein des armées françaises,
De manière générale, il est conseil- ÉPIDÉMIOLOGIE Desjeux et al. rapportent que 3 %
lé d’envisager les approches non des militaires ont consommé des
médicamenteuses (hygiène de vie, NIVEAUX DE CONSOMMATION hypnotiques en 2005 [15]. Cet
hygiène du sommeil, techniques de La revue de la littérature n’a pas usage concerne principalement les
relaxation, psychothérapies…) avant permis d’obtenir la prévalence femmes de plus de 50 ans.
de prescrire une benzodiazépine (ou de travailleurs consommant des
médicament apparenté) à visée an- benzodiazépines. Toutefois, les LIEN ENTRE FACTEURS LIÉS AU TRA-
xiolytique ou hypnotique [1]. Dans enquêtes des années 2010 et 2014 VAIL ET CONSOMMATION DE BEN-
l’hypothèse où une prescription est du Baromètre santé fournissent ZODIAZÉPINES
nécessaire, il est essentiel d’envisa- des renseignements quant aux Plusieurs études épidémiologiques
ger avec le patient les éventuels ef- consommations de médicaments ont montré que les consomma-
fets indésirables et d’anticiper l’ar- psychotropes en fonction du genre tions, par les travailleurs, de subs-
rêt du traitement médicamenteux. et de la catégorie socio-profession- tances psychoactives ont une ori-
Toutefois, certains patients béné- nelle (tableau II) [12]. Il est observé gine mixte, relevant de la vie privée
ficient, de longue date, d’une pres- un usage plus important chez les et de la vie professionnelle [12, 16].
cription de benzodiazépines. Aussi, femmes pouvant concerner, sur Parmi les facteurs liés au travail,
en 2015, la Haute Autorité de santé l’année précédant l’enquête, 30 % peuvent être cités : le stress, les
(HAS) a publié une Fiche mémo des personnes dans la catégorie horaires atypiques, les mauvaises
intitulée « Arrêt des benzodiazé- « artisans, commerçants et chefs relations au travail, les contraintes
pines et médicaments apparentés : d’entreprise ». Chez les hommes, liées à un poste de sécurité…
démarche du médecin traitant en cette prévalence est supérieure à En raison de leurs propriétés anxio-
ambulatoire » [9]. Celle-ci s’appuie 12 % chez les ouvriers, les employés, lytiques, les benzodiazépines sont
en partie sur des recommanda- les professions intermédiaires et souvent prescrites afin de réduire
tions de bonne pratique publiées les cadres. des symptômes en lien avec les
en 2007 [6]. Plusieurs étapes sont facteurs de risques psychosociaux
conseillées afin d’arrêter, sur une Quelques études fournissent des [17, 18].
durée d’environ 4 à 10 semaines, données sur certains secteurs d’ac- En France, à l’aide des données de
un traitement au long cours : inter- tivité. la cohorte CONSTANCES, Airagnes
vention brève, consultation d’arrêt, En milieu de soins, Orset et al. ont et al. ont étudié le risque de mésu-
consultations de suivi après l’arrêt. interrogé de manière anonyme 7 % sage des benzodiazépines chez les
Une prise en charge pluridiscipli- de l’effectif d’un centre hospitalier travailleurs exerçant au contact
naire peut être nécessaire. universitaire (n= 366 agents) situé du public [19]. Le mésusage est ici
Enfin, l’association de certaines en France. Parmi ces agents, 22,6 % défini par une consommation, sur
substances psychoactives avec les déclarent avoir consommé des mé- prescription médicale, dépassant
benzodiazépines est déconseillée. dicaments psychotropes au cours une durée de 12 semaines. Les
C’est le cas notamment pour : des 12 mois précédant l’enquête auteurs montrent que l’existence
O les boissons alcoolisées. En effet, [13]. Au Chili, Ansoleaga montre d’un stress lié au travail en contact
l’alcool peut potentialiser l’appari- des statistiques de consommation avec le public multiplie par 2,2 le
Alcool
Médicaments Ecstasy/
Tabac Alcoolisation Cannabis Cocaïne
psychotropes Amphétamines
(quotidien) Ivresse ponctuelle (année) (année)
Quotidien (année)* (année)
répétée importante
dans le mois
F H F H F H F H F H F H F H F H
Agriculteurs 21,0 20,8 7,4 21,7 0,0 6,2 4,7 27,9 13,1 5,0 2,8 2,6 1,0 0,0 0,0 0,0
Artisans, commerçants
31,3 34,4 8,7 17,1 3,0 17,3 4,9 34,0 30,0 2,8 4,8 11,6 0,0 1,3 0,0 0,6
et chefs d'entreprises
Cadres 17,7 19,9 2,5 9,1 6,9 14,1 9,0 23,4 14,0 12,1 6,7 10,9 0,6 0,6 0,3 0,6
Professions
22,7 31,5 2,4 9,1 5,3 13,9 7,3 24,2 25,2 13,7 6,1 13,9 0,4 0,4 0,3 0,5
intermédiaires
Employés 29,8 37,2 3,0 9,2 3,4 16,3 8,3 28,2 19,6 14,5 4,5 16,6 0,5 3,6 0,3 2,4
Ouvriers 28,8 44,6 0,8 13,3 2,7 14,4 12,5 32,4 20,3 13,7 0,2 13,1 0,5 0,9 0,1 0,7
risque de mésusage de benzodia- tives (cannabis…). Néanmoins, benzodiazépines au moins une fois
zépines chez les femmes (OR = comme pour tout produit psychoac- durant les 90 jours précédant leur
2,2 [IC 95 % = (1,8 – 2,8)]). Chez tif, un risque de perte de contrôle accident. Pour les opiacés, ce taux
les hommes, ce risque est de 1,6 existe à moyen ou long terme. est de 8,6 %.
(OR = 1,6 [IC 95 % = (1,4 – 1,9)]). Pour Palmer et al. ont étudié l’impact des
mémoire, d’autres travaux issus de BENZODIAZÉPINES ET ACCIDENTO- pathologies mentales et des traite-
la cohorte CONSTANCES ont mon- LOGIE AU TRAVAIL ments psychotropes en matière
tré que cette exposition au public À travers une revue de la littéra- d’accidentologie au travail [23]. À
augmente le risque de consomma- ture, il n’a pas été identifié, pour partir du registre du Clinical prac-
tion d’alcool, de tabac et de canna- la France, d’article fournissant des tice research datalink (Grande Bre-
bis [20]. statistiques d’accident du travail tagne), 8 000 dossiers ont été sélec-
Pour Hautefeuille, les addictologues en lien avec l’usage des benzodia- tionnés (1 348 cas et 6 652 témoins).
et les sociologues constatent que zépines. Les résultats montrent qu’en cas de
le recours aux médicaments psy- Aux États-Unis, Nkyekyer EW et al. pathologie mentale, l’odds ratio de
chotropes peut s’apparenter à un « ont étudié la prévalence de l’usage survenue d’un accident du travail
dopage au quotidien » [21]. Qu’il soit d’opiacés et/ou de benzodiazé- est de 1,44 [IC 95 % = (1,25 – 1,65)]. En
ou non sur prescription médicale, pines dans les jours précédant un présence d’une pathologie mentale
l’objectif de cet usage est de pou- accident du travail [22]. Ce travail en cours de traitement, l’odds ratio
voir rester enthousiaste au travail, a porté sur 313 543 dossiers de tra- est de 1,57 [IC 95 % = (1,36 – 1,81)]. Les
fiable et productif. Dans un premier vailleurs accidentés, les données auteurs concluent que ces données
temps, le recours à un médicament relatives à la prescription de médi- ne justifient pas l'exclusion de per-
psychotrope est invisible vis-à-vis caments psychotropes étant issues sonnes de l'emploi, d'autant plus
de l’entourage professionnel, ce qui du Washington state prescription qu'une évaluation individualisée
constitue un avantage par rapport monitoring program. Parmi ces peut révéler des facteurs atténuant
aux autres substances psychoac- salariés, 2,9 % ont consommé des le risque de blessure ou son impact.
QUEL RÔLE POUR LE SERVICE tions, l’existence d’un éventuel mé- cela est nécessaire, à proposer un
DE SANTÉ AU TRAVAIL ? susage, les thérapies associées et aménagement du poste de travail,
les éventuels effets secondaires. Il ou une adaptation du rythme du
Les missions des services de santé est également nécessaire d’évaluer suivi individuel. La SFA et la SFMT
au travail comprennent notam- le lien entre les différentes situa- recommandent que « cette décision
ment des actions à visée collective, tions de travail et la consommation /…/ prenne en compte le niveau de
sur le milieu de travail, et la surveil- de médicaments psychotropes, risque que cette consommation
lance de l’état de santé des travail- ainsi que des autres substances induit en milieu de travail, pour le
leurs. psychoactives. Ceci permettra de salarié ou son entourage. Elle doit
compléter les informations issues donc d’abord être guidée par la
ACTIONS À VISÉE de l’étude du poste de travail et de connaissance du poste de travail (en
COLLECTIVE proposer des actions de prévention pluridisciplinarité, le cas échéant). Le
Les benzodiazépines et apparen- tant au niveau collectif qu’indivi- maintien au poste doit être privilé-
tés sont majoritairement prescrits duel. gié... » [25]. Un échange avec le mé-
pour leurs propriétés anxiolytiques decin traitant peut être conseillé,
et hypnotiques. Leurs indications Au cours de la visite, des conseils en accord avec le travailleur.
peuvent, entre autres, relever de sont également à délivrer :
symptômes engendrés par les O éviter la prise de boissons alcoo-
risques psychosociaux (anxiété, lisées lors du traitement par benzo-
troubles du sommeil…). Aussi, il diazépines ; CONCLUSION
est conseillé que les actions de O être prudent en cas de consom-
l’équipe pluridisciplinaire de santé mation simultanée de benzodia- Près de 18 % de la population géné-
au travail portent sur la préven- zépines et d’opiacés, notamment rale consomme des médicaments
tion collective de ce type de risque, durant les premières semaines de psychotropes, au moins une fois
ainsi que sur la mise en place d’une traitement ; par an. Les benzodiazépines et
prise en charge des salariés en O être prudent lors des modifica- apparentés représentent une part
souffrance. tions de posologie du traitement importante de ces médicaments en
De même, en cas de travail en ho- par benzodiazépines, notamment raison de leurs propriétés anxioly-
raires atypiques, il revient au ser- lors de la conduite de véhicules ; tiques et hypnotiques.
vice de santé au travail de conseiller O éviter l’automédication ; À l’heure actuelle, il n’existe pas
l’employeur en matière de charge O contacter son médecin traitant, de statistiques relatives au niveau
de travail, d’horaires de début et de de même que son médecin du tra- d’usage des benzodiazépines en
fin de poste, de rotation des postes, vail, en cas de mauvaise tolérance milieu de travail. Néanmoins, il
d’organisation des pauses... du traitement. est intéressant de noter que la
De même, il convient de fournir consommation de médicaments
ACTIONS À VISÉE des informations aux salariés, tra- psychotropes concerne toutes les
INDIVIDUELLE vaillant en horaires postés et/ou catégories socioprofessionnelles.
La Haute autorité de santé (HAS), de nuit, sur l’hygiène de sommeil Bien qu’il existe une prédomi-
ainsi que la Société française et l’hygiène alimentaire. En 2012, nance pour le genre féminin, cet
d’alcoologie (SFA) et la Société l’HAS a labellisé des recommanda- usage n’est pas négligeable chez
française de médecine du travail tions de bonne pratique de la SFMT les hommes.
(SFMT), recommandent d’interro- intitulées « Surveillance médico- L’origine des usages de benzodia-
ger à chaque visite le salarié sur professionnelle des travailleurs pos- zépines et apparentés peut relever
l’ensemble de ses consommations tés et/ou de nuit » [26]. Les auteurs de facteurs individuels, mais aussi
de substances psychoactives : mé- ne recommandent pas la prescrip- de facteurs liés au travail tels les
dicaments psychotropes, alcool, tion de médicaments psychosti- risques psychosociaux. Ces derniers
cannabis… [24, 25]. mulants ou hypnotiques chez les interviennent également dans la
Cet entretien permet de connaître travailleurs postés et/ou de nuit. consommation d’autres substances
le motif de prescription des benzo- Enfin, à l’issue des différentes psychoactives (alcool, cannabis…).
diazépines et apparentés, la date étapes de la visite, les données Les benzodiazépines et apparentés
de début du traitement, ses évolu- recueillies peuvent amener, si peuvent être impliqués dans des ac-
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P. 2)315%3 039#(/3/#)!58
Dans Question/Réponse
Sieste et travail de nuit : quelles:
01-Titre
modalités 24ptde mise en œuvre ?
pratiques
Dans Question/Réponse : 01-Titre 14pt
Stéphane Weibel,
La réponse de Laurence Malard,département Études et
assistance
Départementmédicales deassistance
Études et l'INRS, et service prévention
médicales, INRS. de la Caisse de
retraite et de la santé au travail (CARSAT) Alsace-Moselle
Dans Question/Réponse : 04-Texte et pour le gras
Dans style de caractère Question/réponse 04-Texte
Bold
Dans une entreprise de 600 salariés fabricant resteront ancrés sur un mode diurne, évitant ainsi les
des papiers, le rythme de travail est de 2 matins états de désynchronisation interne.
(4h/12h), 2 après-midis (12h/20h) et 2 nuits (20h/4h). En revanche, cet ancrage sur le mode diurne a
L’ambiance est bruyante, la température élevée potentiellement des répercussions sur les niveaux de
et il y a des vibrations. La direction est favorable vigilance des agents pendant les périodes nocturnes
à l’instauration d’une sieste la nuit. Comment de travail. C’est pour prévenir ces hypovigilances
l’organiser au mieux (local, installation, matériel, nocturnes qu’il est recommandé – quand l’activité
type de fauteuil…) ? de travail le permet – une insertion de pauses
appropriées pour des temps de repos (micro-siestes de
Travailler de nuit n’est pas favorable à un 15-20 minutes). En effet, des recherches scientifiques
fonctionnement physiologique, psychologique et qui ont étudié les effets des micro-siestes nocturnes
social harmonieux et les effets sur la santé du travail sur les travailleurs de nuit mettent en avant des
de nuit sont aujourd’hui largement documentés [1]. effets positifs de la prise de repos durant le poste de
À ce jour, il n’existe pas de seuil d’exposition (nombre nuit avec une amélioration des niveaux de vigilance
de nuits acceptables, nombre d’années maximales pendant plusieurs heures [4, 5]. Cette pratique de
d’exposition au travail de nuit) identifié par les sieste courte permet de contrer la somnolence et les
études épidémiologiques [1]. Cependant, les études défauts de vigilance particulièrement présents en fin
expérimentales tendent à montrer qu’il faut un de nuit.
minimum de 3 nuits de travail consécutives avant Il n’y a pas de recommandation scientifiquement
d’altérer la phase du système circadien : en effet, validée et applicable à tous concernant les modalités
c’est à partir de la 3e nuit consécutive que des états de pratiques de mise en place d’une micro-sieste, mais
désynchronisation sont objectivés [2, 3]. Ce sont ces plutôt un ensemble de pratiques expérimentées
états de désynchronisation qui sont - parmi d’autres dans les entreprises et qui ont fait émerger quelques
mécanismes, notamment la dette de sommeil – recommandations.
actuellement suspectés comme étant à l’origine des La 1re recommandation est bien évidemment
troubles et pathologies des travailleurs de nuit [1]. d’associer le CHSCT/CSE et les salariés concernés à
Pour éviter ces états de désynchronisation, la laBIBLIOGRAPHIE
réflexion concernant ces modalités. En effet, les
préconisation de rotations très courtes (2-3 nuits expériences montrent que les lieux (salle dédiée ou
maximum) est proposée plutôt que l’instauration 1 | ETV
coin parDE
N STYLE exemple)
CARACTÈREet DOSSIER BIBLIOGRAPHIE
le matériel
DANS mis à disposition
d’un travail type 3x8 qui oblige le système (lit couché
ENCADRÉ : 01-T
ouEXTE CAP ROUILLE
fauteuil) Dans
varient Bibliographie
selon les entreprises
circadien à des rephasages toutes les 5 nuits et etEncadré 01-Texte
sont donc à En
contextualiser
syle de caractère afin
Dansd’en optimiser
dossier
expose périodiquement l’organisme à des états de l’utilisation.
Bibliographie Encadré : 01-Texte Ital
désynchronisation interne. La 2e recommandation est de formaliser une
Le travail de nuit tel que décrit ici avec des rotations 1 | EN STYLE DE
procédure deCARACTÈRE
« prise DANS
de sieste BIBLIOGRAPHIE
DOSSIER». Cette procédure
tous les 2 jours remplit ce critère et est donc, a priori, devra
ENCADRÉ : 01-Tla
définir CAP Rde
durée
EXTE Dans Bibliographie
la micro-sieste
OUILLE (en général
protecteur face aux états de désynchronisation Encadré
15-20 01-Texte En
minutes avec
syle un réveil Dans
de caractère pourdossier
faciliter le
interne. En effet, avec des rotations tous les 2 jours, « Bibliographie
lâcher priseEncadré
») ainsi que son
: 01-Texte Ital statut par rapport
la phase de l’horloge ne se décalera pas et les salariés aux pauses déjà prévues (à insérer dans une pause
POUR EN SAVOIR +
Travail de nuit et travail posté. INRS, 2017 (www.inrs.fr/
risques/travail-de-nuit-et-travail-poste/ce-qu-il-faut-retenir.
html).
Travail de nuit. Index de la revue de A à Z. Réf Santé Trav
(www.rst-sante-travail.fr/rst/header/sujets-az_parindex.htm
l?rechercheIndexAZ=travail+de+nuit___TRAVAIL+DE+NUIT /
travail posté).
Travail posté. Index de la revue de A à Z. Réf Santé Trav
(www.rst-sante-travail.fr/rst/header/sujets-az_parindex.html?
rechercheIndexAZ=travail+poste___TRAVAIL+POSTE).
Horaires atypiques. Les rendez-vous de Travail & Sécurité.
Émission filmée. INRS, 2019 (www.inrs-rendezvous-ts.fr).
Dans
RisqueQuestion/Réponse
chimique et :
01-Titre
allaitement 24pt: comment évaluer le
Dans Question/Réponse : 01-Titre 14pt
risque pour l’enfant ?
La réponse de Stéphane Malard,
Département Études et assistance médicales, INRS.
Dans
La Question/Réponse
réponse du Dr Stéphane : 04-Texte
Malard, et pour le gras
Dans styleÉtudes
Département de caractère Question/réponse
et assistance médicales, INRS. 04-Texte
Bold
Une salariée enceinte est chimiste en laboratoire. l'Institut national de santé publique du Québec [2]
Elle bénéficie actuellement d’un aménagement de nécessite de se poser plusieurs questions successives.
poste qui ne sera pas maintenu au retour du congé
maternité. Toutefois, elle souhaite pouvoir continuer Q Les conditions d'exposition sont-elles susceptibles
à allaiter son enfant après cette date. Quels sont les d'entraîner une absorption de la substance par la
éléments à prendre en compte dans l’évaluation du mère ? Les scénarios d'exposition potentiels doivent
risque ? être déterminés au vu des techniques utilisées, de la
formulation des produits (liquide, solide, poudre) et des
L'évaluation des risques vis-à-vis de l'allaitement ne équipements de protection (collectifs et individuels)
peut se baser sur la seule prise en compte du danger disponibles. Les modalités d'exposition potentielles
des substances présentes dans le laboratoire. Une doivent ensuite être mises en parallèle avec les voies
approche globale des conditions d'exposition est d'absorption documentées des différentes substances
indispensable. La démarche générale d'évaluation des concernées. La prise en compte de la volatilité (évaluée
risques vis-à-vis de l'allaitement peut être complexe, à l'aide de la pression de vapeur à la température
en particulier dans un contexte de multi-expositions. d'utilisation du produit) est importante pour évaluer la
Toutefois, dans la plupart des cas, les quantités de possibilité d'inhalation de vapeurs.
produits manipulés par les chimistes travaillant en
laboratoire sont faibles et les mesures de prévention Q La substance est-elle excrétée ou détectée dans le lait
collective (manipulation des produits sous sorbonne maternel ? En l'absence de données publiées dans la
notamment) et individuelle (gants, masques) limitent littérature, la probabilité de présence d'une substance
l'exposition des salarié(e)s, ce qui permet souvent la dans le lait maternel peut être estimée indirectement
poursuite du travail sans risque dans un contexte sur la base d'autres informations spécifiques à chaque
d'allaitement. Cependant, il existe une interdiction substance telles que, notamment :
d'affectation des salariées allaitant à des postes les O la liposolubilité. Il est considéré généralement que
exposant à des agents chimiques classés dans les les substances dont le coefficient de partage octanol/
catégories 1A, 1B (repérables par la mention de danger BIBLIOGRAPHIE
eau (log Kow) est supérieur à 1 sont liposolubles et
H360) ou dans la catégorie supplémentaire de toxicité traversent facilement les membranes cellulaires en se
sur ou via l'allaitement (repérable par la mention de 1 | EN STYLEdans
dissolvant la couche
DE CARACTÈRE DOSSIER B;IBLIOGRAPHIE
lipidique
DANS
danger H362) [1]. le poids
OENCADRÉ : 01-Tmoléculaire.
EXTE CAP ROUILLE Dans Bibliographie
D'après les données du
D'une façon générale, les informations concernant Encadré 01-Texte
répertoire toxicologique
En syle dedecaractère
la Commission de la santé
Dans dossier
le passage des substances chimiques dans le lait etBibliographie
de la sécurité du travail
Encadré (CSST)
: 01-Texte Ital [2] au Québec, 97 %
maternel sont peu nombreuses et les effets potentiels des substances excrétées dans le lait ont un poids
de ces substances sur ou via l'allaitement sont très peu 1 | EN STYLE DE
moléculaire inférieur
CARACTÈREà DANS DOSSIER B;IBLIOGRAPHIE
700 daltons
documentés. Les rares données publiées sont souvent : 01-Taux
la liaison
OENCADRÉ EXTE protéines Dans Bibliographie
CAP ROUILLEplasmatiques. Seules les
issues d'études réalisées chez l'animal. Encadré 01-Texte
substances sous Enforme
syle delibre dans
caractère Dansle dossier
sang seront
La démarche d'évaluation des risques chimiques vis- capables de diffuser
Bibliographie Encadré au travers
: 01-Texte Italdes membranes. Plus
à-vis de l'allaitement, décrite dans un document de la force de liaison aux protéines plasmatiques (en
Dans
TrousseQuestion/Réponse
de secours. :
01-Titre
Quelle 24pt ?
est sa composition
Peut-on la doter de médicaments
Dans Question/Réponse ?
: 01-Titre 14pt
Il n’y a pas de réglementation définissant la – le médecin du travail note sur ce document le nom
composition d’une trousse de secours sur le lieu de des travailleurs habilités à utiliser la trousse de secours
travail. Conformément à l’article R. 4224-16 du Code et décrit les circonstances de son utilisation.
du travail, l'employeur prend, après avis du médecin
du travail, les mesures nécessaires pour assurer les Ainsi, et sous réserve de l’avis du médecin du travail,
premiers secours aux accidentés et aux malades. De la composition de la trousse de secours à l’usage d’un
même, l’article R. 4224-14 dispose que « les lieux de sauveteur secouriste du travail peut être, par exemple :
travail sont équipés d'un matériel de premiers secours – pour la protection du travailleur assurant les gestes
adapté à la nature des risques et facilement accessible ». de premiers secours :
Aussi, il revient à l’employeur de définir la nature de • gants médicaux à usage unique,
ce matériel et sa présentation, en concertation avec le • gel hydro-alcoolique (dosette ou flacon),
médecin du travail. • masque de protection pour le bouche-à-bouche ;
– pour la prise en charge d’une plaie :
Si une trousse de secours est constituée, il est conseillé
• savon liquide (dosette ou flacon),
que son contenu tienne compte de la formation
• antiseptique,
du travailleur qui l’utilisera (exemple : sauveteur
• sachets de compresses stériles,
secouriste du travail). De plus, une procédure de
• pansements adhésifs sous emballage,
contrôle est à définir afin de remplacer les produits
• rouleau de sparadrap hypoallergénique,
manquants ou périmés.
• bandes extensibles,
La trousse de secours ne peut être dotée de
• paire de ciseaux à bouts ronds,
médicaments lorsqu’elle n’est pas utilisée par des
professionnels de santé. Toutefois, il peut exister – pour la prise en charge d’une hémorragie :
des exceptions pour certaines situations d’urgence. • pansement compressif : celui-ci peut être constitué
Ce peut être, par exemple, l’utilisation immédiate BIBLIOGRAPHIE
par des compresses stériles et une bande extensible
d’un antidote suite à une contamination par un longue, ou par un coussin hémostatique d’urgence,
agent chimique dangereux. Dans ce cas, la dotation •1 |garrot : celui-ci
EN STYLE peut être
DE CARACTÈRE DANS constitué d’un lien de toile
DOSSIER BIBLIOGRAPHIE
de la trousse de secours en médicament(s) se fait solide, non élastique, de 3 à 5 cm de
ENCADRÉ : 01-TEXTE CAP ROUILLE Dans Bibliographie largeur et d’au
conformément aux principes de la circulaire du 20 moins 1,50 m de longueur, associé à une
Encadré 01-Texte En syle de caractère Dans dossier barre solide
janvier 1997 du ministère chargé du Travail : (bois, PVC ou métal) de 10 à
Bibliographie Encadré : 01-Texte Ital20 cm de long. Ce peut être
– un protocole est rédigé par le médecin du travail, visé également un garrot disponible dans le commerce et
par l'employeur et présenté au Comité d’hygiène de 1 | EN STYLE
conçu pour DEles hémorragies.
CARACTÈRE Il estBIBLIOGRAPHIE
DANS DOSSIER conseillé qu’il soit
sécurité et des conditions de travail / Comité social et ENCADRÉ : 01-TEXTE CAP ROUILLE Dans Bibliographie
équipé d’une barre de serrage, d’un lien large et d’un
économique (CHSCT/CSE) ; Encadré 01-Texte
dispositif de sécurité
En syle[1]de; caractère Dans dossier
Bibliographie Encadré : 01-Texte Ital
RÉDACTEURS :
Boini S., département Épidémiologie en entreprise, INRS
Langevin V., département Expertise et conseil technique, INRS
Noms des auteurs de qualité de vie). Le WHO-5 a été l’anxiété et la dépression. Une pre-
Bech P. présenté pour la première fois par mière version de l’outil comprenant
le Bureau régional de l'OMS en Eu- 10 items a été élaborée, fournissant
Objectifs rope, lors d'une réunion de l'OMS à un indice global de bien-être posi-
Évaluation du niveau de bien-être Stockholm en 1998, en tant qu'élé- tif et négatif sur une seule échelle
psychologique subjectif. ment du projet DEPCARE sur les unidimensionnelle. Cette version
mesures du bien-être dans les soins initiale a été par la suite réduite à
Année de première de santé primaires [3]. 5 items (aboutissant au WHO-5) en
publication synthétisant 5 items portant sur
1998. Niveau d'investigation l’intérêt pour les choses en 1 seul
Diagnostic. (« ma vie quotidienne a été remplie
Cadre, définition, de choses intéressantes ») et en for-
modèle Langue d'origine mulant positivement un item cen-
La santé mentale comporte des Danois et anglais. tré sur les symptômes (« je me suis
dimensions positives et négatives. senti(e) bien et de bonne humeur »).
Les dimensions positives font réfé- Traduction Une première version à 5 items a
rence aux notions de bien-être et Il existe une trentaine de traduc- été proposée en 1995 avec 4 moda-
de capacité à faire face à l'adversité, tions disponibles, dont une version lités de réponse. Celle-ci a été rem-
tandis que les dimensions néga- française (www.psykiatri-regionh. placée par la version actuelle à 5
tives incluent la détresse psycholo- dk/who-5/Documents/WHO5_ items avec 6 modalités de réponse
gique et les troubles psychiatriques French.pdf). [3].
[1]. L’indice de bien-être en 5 items
de l’Organisation mondiale de la Vocabulaire Structuration de l'outil
santé (OMS) est une mesure sub- Pas de difficultés particulières rap- Une seule dimension.
jective des dimensions positives portées dans les articles.
de la santé mentale [2]. Il est issu Modalités de réponse et
du champ des recherches sur la Versions existantes cotation
qualité de vie liée à la santé (no- Le WHO-5 a été élaboré à partir Les 5 items interrogent sur ce que
tamment pour comparer l’impact des items d’une échelle mesurant les personnes ont ressenti au cours
de différents protocoles thérapeu- le bien-être psychologique général des deux dernières semaines. Six
tiques en termes de bien-être et et deux autres échelles mesurant modalités de réponse réparties sur
une échelle de fréquence sont pos- le W HO-5 est classé premier sans antécédents de dépression ; et un
sibles : tout le temps (5), la plupart sur les 20 puisqu’il n’a aucun sous-échantillon de sujets dépressifs).
du temps (4), plus de la moitié du recouvrement majeur avec des L’unidimensionnalité a également
temps (3), moins de la moitié du aspects spécifiques relatifs aux été retrouvée par une analyse facto-
temps (2), de temps en temps (1), ja- maladies et effets secondaires rielle confirmatoire chez 384 diabé-
mais (0). Un score global est obtenu des traitements médicamenteux. tiques de type 1 et 549 diabétiques
en additionnant les réponses aux Le WHO-5 est, selon ces experts, de type 2 [12]. De même, la structure
5 items, puis en multipliant ce une « pure » échelle générique de unidimensionnelle du WHO-5 a été
résultat par 4 (quoique cette mul- mesure du bien-être général [6 retrouvée par analyse factorielle dans
tiplication ne soit pas toujours réa- citée dans 7]. un échantillon de 2 213 sujets français
lisée par les chercheurs). Le score La validité de contenu du WHO-5 dont 75 % avaient du diabète [13]. Une
varie donc de 0 à 100. Plus le score a également été étudiée par 5 analyse en composantes principales,
est élevé, meilleur est le niveau de experts qui ont noté la pertinence effectuée à partir d’un échantillon
bien-être. de chaque item en termes de de 104 patients espagnols avec des
Un score inférieur à 50 a été le contenu. L’auteur [8] conclut à une troubles bipolaires et 40 personnes a
plus souvent utilisé comme niveau validité de contenu satisfaisante. priori saines [14], a fourni une solution
permettant un dépistage des per- à un facteur qui explique 59,7 % de la
sonnes à risque de dépression (Cf. OValidité critériée prédictive variance du WHO-5.
paragraphe Sensibilité). Certains La validité critériée prédictive du L’unidimensionnalité du WHO-5 a
auteurs ont utilisé des seuils plus WHO-5 sur la mortalité à 6 ans par ailleurs été testée par des mo-
restrictifs [4, 5]. a été étudiée chez 86 patients dèles de réponses à l’item chez des
souffrant de problèmes cardiaques jeunes [15 citée dans 7] et des per-
Temps de passation [9]. Les patients qui avaient un sonnes âgées [16 citée dans 7]. Ces
Compte tenu du nombre d’items, score WHO-5 inférieur à 50 à analyses ont confirmé que les 5 items
celui-ci est très court (moins de 5 l’inclusion présentaient un taux constituent une seule dimension où
minutes). de su r v ie sign i f icativement chaque item ajoute une information
plus faible que ceux qui avaient unique concernant le niveau de bien-
Disponibilités et un score WHO-5 à l’inclusion être [7]. Cela implique que chaque
conditions d’utilisation supérieur ou égal à 50 (31 % vs item peut être additionné pour for-
Les différentes versions – dont la 64 %). mer un score global qui a du sens et
version française – sont disponibles que l’étendue des scores de 0 à 100
sur un site dédié au WHO-5 : www. OValidité critériée concomittante couvre la totalité de la dimension (de
psykiatri-regionh.dk/who-5/about- Le score WHO-5 est lié de manière l’absence de bien-être au niveau le
the-who-5/Pages/default.aspx. significative au niveau de qualité plus haut imaginable de bien-être).
Copy r ight à fa i re f ig u rer : © * WHOQOL : QOL de vie mesuré par le WHOQOL *
Psychiatric Research Unit, WHO pour Quality of (coefficient égal à 0,49) dans un OValidité de structure externe conver-
Collaborating Center for Mental life, échelle de échantillon de 310 Taïwanais souf- gente
Health, Frederiksborg General l'OMS qui évalue frant de syndrome métabolique La corrélation entre le score du WHO-
la qualité de vie
Hospital, DK-3400 Hillerød. [8]. 5 et le score du PHQ-9 (Patient Health
[10].
Questionnaire, outil de mesure de la
Qualités OValidité de structure interne fréquence des symptômes dépressifs
psychométriques Krieger et al. [11] ont confirmé au cours des 2 dernières semaines)
l’unidimensionnalité du WHO- vaut 0,69 chez les diabétiques de
VALIDITÉ 5 par des analyses factorielles type 1 et 0,67 chez les diabétiques
OValidité de contenu confirmatoires multi-groupes de type 2 [12].
Selon u n pa nel d ’ex per ts qu i (échantillon combiné de 414 sujets La corrélation entre le score WHO-5
a exa m i né 85 question na i res comprenant un sous-échantillon et le score de l’échelle CES-D [17] vaut
différents, le WHO-5 fait partie de sujets avec des antécédents de -0,40 dans un échantillon de 254 per-
d e s 20 é c h e l l e s a c c e p t a b l e s dépression ; un sous-échantillon de sonnes âgées issues de la population
pour un usage clinique. De plus, sujets dépressifs et sujets avec ou générale [18]. La corrélation entre le
la corrélation vaut -0,60 avec le score conditions de travail de 2010, 28,3 % Les coefficients _ de Cronbach ont
du PHQ-9 [8]. La corrélation entre des femmes ont un score WHO-5 été calculés dans un échantillon
le WHO-5 et le score de santé men- ) 50 contre 23,6 % des hommes combiné de 414 sujets dont le sta-
tale du SF-36 ** valait 0,84 dans un ** Short form [Schütte et al., 2014]. Par ailleurs, un tut dépressif a été déterminé par le
36 items,
échantillon de 9 542 Danois [2]. faible niveau de bien-être est forte- SCID (Structured Clinical Interview
questionnaire
Krieger et al. [11] ont analysé la validi- de qualité de vie ment associé à un faible sentiment for the DSM IV) : ils s’élèvent à 0,84
té de structure convergente du WHO- développé par d’appartenance à une équipe, à un pour les sujets dépressifs et 0,89
5 dans un échantillon combiné de Ware [20]. fort déséquilibre vie personnelle/ pour les sujets anciennement ou
414 sujets (sous-échantillon de sujets vie professionnelle, à de faibles pro- jamais dépressifs [11]. Dans chaque
avec des antécédents de dépression ; motions au travail et à un manque sous-échantillon initial, le coef-
sous-échantillon de sujets dépressifs, de sens du travail chez les hommes ficient vaut 0,92 pour les sujets
ou avec ou sans antécédents de dé- et chez les femmes [23]. avec des antécédents de dépres-
pression ; sous-échantillon de sujets Dans un échantillon de 2 213 sujets sion ; 0,95 pour les sujets dépressifs,
dépressifs) dont le statut dépressif a français dont 75 % avaient du dia- sujets avec ou sans antécédents
été déterminé par le SCID (Structured bète, le score moyen WHO-5 est plus de dépression ; 0,83 pour les sujets
Clinical Interview for the DSM IV). Il faible chez les femmes comparé aux dépressifs.
existe une relation négative curvi- hommes (13,3±5,6 vs 15,0±5,3 sur une Dans une autre étude, le coefficient
ligne entre le WHO-5 et l’inventaire échelle de scores de 0 à 25) [13]. _ de Cronbach vaut 0,91 pour les dia-
de dépression de Beck (BDI-II) : le score Dans l’enquête française « Condi- bétiques de type 1 et 0,93 pour les
WHO-5 diminue fortement quand tions de travail, volet risques psy- diabétiques de type 2 [12]. Les cor-
le score BDI-II augmente (pente= chosociaux (CT-RPS) » de 2016, les rélations items-tout varient de 0,71
-0,61) jusqu’à des niveaux modérés femmes affichent un bien-être psy- à 0,82 pour les diabétiques de type 1
de dépression et le coefficient de la chologique réduit par rapport aux et de 0,75 à 0,84 pour les diabétiques
pente tend vers 0 pour les niveaux hommes (3 points sur une échelle de de type 2 [12].
de dépression sévères (BDI-II=40). 0 à 100), ainsi que les personnes en Dans un échantillon de 254 per-
La même relation est retrouvée avec couple ou avec des enfants [4]. Les sonnes âgées issues de la popula-
l’échelle de dépression de Hamilton personnes moins diplômées ainsi tion générale, Heun et al. ont ob-
(HAM-D) [11]. que les travailleurs indépendants et servé un coefficient _ de Cronbach
les ouvriers ont un niveau de bien- de 0,95 [18].
OValidité discriminante être plus élevé. Ces deux derniers Le coefficient _ de Cronbach vaut
En 2016, la proportion de personnes résultats ne sont pas habituels au 0,84 dans un échantillon de 9 542
à risque de dépression (score WHO-5 regard de la littérature et nécessitent danois [2].
) 50) est plus faible pour les per- d’après l’auteur des investigations Le coefficient _ de Cronbach valait
sonnes en emploi (17 %) que celles complémentaires. Le score WHO-5 0,89 dans un échantillon de 310
sans emploi : 21 % chez les personnes varie de façon convexe en fonction Taïwanais souffrant de syndrome
sans emploi depuis moins de 12 de l’âge : 68 pour les moins de 25 ans, métabolique [8].
mois, 38 % chez les personnes sans 63 pour les 40-45 ans et 70 pour les
emploi depuis plus de 12 mois et 60 ans et plus [4]. SENSIBILITÉ
57 % chez les personnes en incapacité Bech et al. [2] ont comparé dans
à travailler en raison d'une maladie FIDÉLITÉ un échantillon de 9 542 Danois le
ou d'un handicap à long terme [21]. Fidélité test-retest
O WHO-5 et la dimension de la santé
Dans un échantillon de 2 796 em- Le coefficient test-retest a été calculé mentale du SF-36 (items formulés
ployés chinois, les femmes, les sujets en comparant le score WHO-5 à l’in- de manière positive et négative). Le
score moyen du WHO-5 valait 68,7 servé un score WHO-5 de 9,4±3,5 Composite International Diagnostic
alors que celui de la santé mentale chez les personnes présentant des Interview (CIDI CIM-10), le CES-D
mesurée par le SF-36 valait 82,4. troubles psychiatriques (11 % de [17], le Patient Health Questionnaire
Le WHO-5 reflète donc des aspects l’échantillon) contre 12,7±2,6 pour (PHQ-9). Avec un seuil inférieur ou
autres qu’uniquement l’absence les autres [18]. égal à 50 (une seule étude a pris un
de symptômes dépressifs [2]. Chez La moyenne des scores WHO-5 seuil )28), la sensibilité moyenne
les sujets ayant déclaré une moins (variant de 0 à 25) dans un échan- est de 0,86 et la spécificité moyenne
bonne santé générale par rapport à tillon combiné de 414 sujets dont de 0,81 toutes études considérées
l’année précédente, le score moyen le statut dépressif a été déterminé [7], ce qui en fait un bon outil de
du WHO-5 valait 46,9 et celui du SF- par le SCID (Structured Clinical dépistage.
36 valait 67. Chez les sujets ayant Interview for the DSM IV) valait La sensibilité et spécificité du WHO-
déclaré une meilleure santé géné- 5,61±4,05 pour les sujets dépressifs 5 comparé à un score du PHQ-9* 10
rale par rapport à l’année précé- et 15,83±5,37 pour les sujets ancien- valent 0,79 et 0,88 chez des sujets
dente, le score moyen du WHO-5 nement ou jamais dépressifs [11]. diabétiques [12]. Le seuil de 10 pour
valait 70,5 et celui du SF-36 valait Dans chaque sous-échantillon ini- le PHQ-9 permet de discriminer
84,1. La différence de sensibilité tial, la moyenne valait 14,14±6,28 les sujets nécessitant une prise en
entre les scores moyens du WHO- pour les sujets avec des antécédents charge clinique pour dépression
5 (70,5-46,9 = 23,6) et SF-36 (84,1-67 = de dépression ; 12,27±7,35 pour les majeure.
17,1) était en faveur du WHO-5. sujets dépressifs, sujets avec des Le seuil de changement clinique-
Afin d’étudier l’effet plafond du antécédents de dépression et sujets ment signifiant a été établi à 10
WHO-5 et SF-36, les auteurs ont sans antécédents de dépression ; points sur une échelle de 0 à 100
regardé la répartition des sujets en 5,86±4,07 pour les sujets dépressifs. pour le WHO-5. Tout changement
fonction de leurs scores au WHO-5 Les auteurs concluent sur la capaci- inférieur à ce seuil peut donc être
et à l’échelle de santé mentale té du WHO-5 à comparer des sujets statistiquement significatif sans
du SF-36 selon 6 valeurs ou inter- en fonction du statut dépressif ou l’être cliniquement [25 citée dans 7].
valles : 100 ; 99-76 ; 75-51 ; 50-26 ; non, grâce à une analyse factorielle
25-1 et 0. L’effet plafond était moins confirmatoire multi-groupe [11]. Étalonnage
important pour le WHO-5 : 49,6 % Un score de 18 sur l ’échelle de Depu is 2003, u ne enquête
des sujets avaient un score WHO-5 dépression d’Hamilton (niveau de européenne sur la qualité de vie a
supérieur à 76, contre 78,9 % pour dépression majeure nécessitant un lieu tous les 5 ans. Le site d’Eurofound
le score de santé mentale du SF-36. traitement médicamenteux) cor- permet de visualiser les niveaux
Cet effet plafond pour la dimen- respond à un score WHO-5 de 20. moyens de bien-être mesurés par
sion mentale du SF-36 était princi- Un score de 13 sur la même échelle le WHO-5 en fonction de différents
palement attribuable aux 3 items (niveau de dépression mineure) critères (statut d’activité, genre,
relatifs aux symptômes dépres- correspond à un score WHO-5 de âge) : www.eurofound.europa.eu/
sifs. À l’opposé, 16,7 % des sujets 32 [11 citée par 7]. data/european-quality-of-life-survey.
avaient un score WHO-5 inférieur L es per for m a nces du W HO -5 Dans l’enquête européenne de 2012,
à 50, contre 4,1 % pour le score de comme outil de dépistage de la la moyenne du WHO-5 en population
santé mentale du SF-36 [2]. dépression ont été étudiées dans générale valait 61,1 (63,1 chez les
Dans une étude portant sur 86 18 études concernant différentes hommes et 59,2 chez les femmes) en
patients souffrant de problèmes populations (enfants, adolescents, France et 70,1 (72 chez les hommes et
cardiaques, 33 avaient des troubles personnes âgées) ou différents 68,2 chez les femmes) au Danemark,
mentaux (diagnostiqués par des domaines (neurologie, endocrino- pays avec le plus haut niveau de bien-
outils spécifiques de ces troubles) logie, psychiatrie) [7]. Chacune de être observé sur 34 pays. La France
[9]. Le score WHO-5 moyen de ces ces études utilisaient un gold stan- se classe 21e (tableau accessible en
33 sujets était de 46,2 vs 64,4 pour dard différent pour le diagnostic ligne relatif à la revue systématique
les 53 sujets n’ayant pas de troubles de dépression : les critères DSM IV de Topp et al. en 2015 [7]). En 2016,
mentaux [9]. pour la dépression, le Structured la moyenne était de 66 (64 pour les
Dans un échantillon de 254 per- Clinical Interview (SCID DSM IV), personnes sans emploi et 68 pour
sonnes âgées issues de la popula- le MINI DSM IV [24], le Major De- les personnes en emploi) en France.
tion générale, Heun et al. ont ob- pression Inventory (MDI DSM IV), le L’enquête conditions de travail,
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Faculté de Médecine
(pôle Formation continue en santé)
22 avenue Camille Desmoulins
CS 93837
29238 BREST Cedex 3
Tél. : 02 98 01 73 89
fcs.medecine@univ-brest.fr
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WLa reprise du travail après un événement cardiovasculaire (niveau 1). Paris,
4-5 décembre.
WLa reprise du travail après un événement cardiovasculaire (niveau 2 - Étude de cas
cliniques). Paris, 6 décembre.
WImpact des nouvelles pratiques en cardiologie pour le maintien dans l'emploi. Paris,
6-7 juin ; 6-7 décembre.
W L’électrocardiogramme en médecine du travail (niveau 1 - ECG 1). Lyon 7-8 octobre.
WL’électrocardiogramme en médecine du travail (niveau 2 - ECG 2). Paris, 14-15
octobre ; Lyon, 13-14 mai.
WLes pathologies cardiovasculaires compatibles avec le maintien à l'emploi.
Paris, 17-18 juin.
WTroubles métaboliques-pathologies endocriniennes. Paris, 16-17 septembre.
WLa reprise du travail après un accident vasculaire cérébral (AVC) ou un accident
ischémique transitoire (AIT). Paris, 4-5 novembre.
WLe cœur à l’effort (travail et sport). Paris, 25-26 novembre.
RENSEIGNEMENTS ET INSCRIPTIONS
Cœur et travail
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Tél. : 01 42 80 10 28
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À lire, à voir
AUX AUTEURS
exigences uniformes éditées
par le groupe de Vancouver.
Ce groupe de rédacteurs
de revues biomédicales,
réuni en 1978 afin d’établir
des lignes directrices sur le
format des manuscrits, est
devenu depuis le Comité
international des rédacteurs
de revues médicales
LA REVUE (CIRRM) et a produit une
La revue Références en Santé au Travail a pour objet d’apporter aux cinquième édition des
équipes des services de santé au travail des informations médi- exigences uniformes. Le style
cales, techniques et juridiques utiles à l’accomplissement de leurs Vancouver de ces exigences
missions. est inspiré en grande partie
Cette revue périodique trimestrielle est publiée par l’INRS, Institut d’une norme ANSI (American
national de recherche et de sécurité. National Standards Institute)
La rédaction se réserve le droit de soumettre l’article au comité de que la NLM (National
rédaction de la revue ou à un expert de son choix pour avis avant Library of Medicine) a
acceptation.
adoptée pour ses bases de
données (ex. Medline).
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LE TEXTE dans le numéro du 15
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