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UNIVERSITE D’ABOMEY CALAVI

(U.A.C)

FACULTE DES LETTRES, ARTS ET


SCIENCES HUMAINES
(F.L.A.S.H)

DEPARTEMENT DE SOCIOLOGIE - ANTHROPOLOGIE


(D.S-A)

MEMOIRE DE MAÎTRISE

Sujet :

La Glexwenu tueuse de mari : quand la


rumeur devient certitude.

Présenté et soutenu par : Sous la direction de :


ZOUNNON Inès Y. Olive Mouléro Dodji AMOUZOUVI
Enseignant à l’UAC/FLASH
Membres du jury
Dr David G. HOUINSA (Président)
Dr Galilou ABDOULAYE (Membre)
Dr Mouléro D. AMOUZOUVI (Rapporteur)
Note 16/20 Mention : Très Bien

ANNEE ACADEMIQUE 2007- 2008


« Ouidah est réputée pour ses bô mauvais : provoquer le

divorce, arracher le mari d’autrui ou même le tuer par

jalousie (spécialité des femmes)…les femmes de Ouidah

sont craintes parce qu’elles ne tolèrent pas de coépouse,

elles ont recours au Bo pour éliminer leur mari s’il est

riche, ensuite leurs coépouses parce qu’elles soutiennent

toutes qu’elles seules peuvent hériter les biens de leurs

maris »

(APOVO, 2005 :110)

Inès Y. Olive ZOUNNON 2


Sommaire
DEDICACE ................................................................................................................................ 4
REMERCIEMENTS .................................................................................................................. 5
RESUME………………………………………………………………………………………7
INTRODUCTION ...................................................................................................................... 8
Première Partie : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE ................................... 11
CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE ................................................................................... 12
1. PROBLEMATIQUE ............................................................................................................ 12
2. CLARIFICATION CONCEPTUELLE ............................................................................... 15
3. ETAT DE LA QUESTION .................................................................................................. 22
4. PERTINENCE DE L’ETUDE ............................................................................................. 30
CHAPITRE II : METHODOLOGIE ........................................................................................ 38
1. Cadre de l’étude ............................................................................................................... 38
2. Nature de l’étude .............................................................................................................. 40
3. Collecte et analyse des données ....................................................................................... 41
4. Limites et difficultés......................................................................................................... 45
5. Durée de l’étude ............................................................................................................... 47
Deuxième partie : PRESENTATION ET ANALYSE DES RESULTATS DE TERRAIN .... 49
CHAPITRE I : La Glexwenu dans l’imaginaire des populations locales de Ouidah et des
autres ........................................................................................................................................ 50
1. Les images et discours : (Hô-Gbé) et (Hô)....................................................................... 50
2. Une vue sur la personnalité de la Glexwenu .................................................................... 51
3. La Glexwenu, le Gbotémi, le mantindjan , le gbass, le bô… ........................................... 56
CHAPITRE II : Histoire politique et mutations socioéconomiques observées à Ouidah : les
germes probables de la rumeur ................................................................................................ 63
1. Le cas de Savi sous Dè Houffon et Abomey sous Agadja ............................................... 63
2. L’histoire sociale de la femme de Ouidah ........................................................................ 69
3. L’analyse Indicamétrique ................................................................................................. 73
SUGGESTIONS....................................................................................................................... 76
CONCLUSION ........................................................................................................................ 77
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................. 80
ANNEXES ............................................................................................................................... 82

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DEDICACE

A toutes les femmes de Ouidah ;

A ma famille ;

Aux amis de l’Université de la Pertinence ;

Inès Y. Olive ZOUNNON 4


REMERCIEMENTS

A tous nos professeurs du Département de Sociologie-Anthropologie ;

A mon maître de mémoire, Monsieur Mouléro Dodji AMOUZOUVI,

pour sa patience, son attachement au travail, son esprit d’ouverture, sa

disponibilité et son humilité ;

Au professeur Emile OLOGOUDOU pour ses nombreux conseils et

orientations ;

Aux sages et aux notables de Ouidah ;

Aux agents de la Mairie de Ouidah ;

Au Directeur de la maison de la culture de Ouidah ;

A tous les interviewés sans qui ce travail n’aurait pas été ;

A la famille OGOUWOLE ;

Au Réseau GLEGBENU, chantiers jeunes ;

A Etienne AGOSSA,
A tous ceux qui, d’une manière ou d’une autre, ont aidé et soutenu la

réalisation de ce travail.

Inès Y. Olive ZOUNNON 5


Listes des tableaux et figures
Liste des tableaux
Tableau I : Présentation de l’échantillon .................................................................................. 45
Tableau II:Chronogramme de la recherche .............................................................................. 48
Tableau III : Opinion des femmes Glexwenu sur leurs conduites en situation de concurrence
conjugale .................................................................................................................................. 58

Liste des figures


Figure 1: Opinion des enquêtés sur l’importance de la localité d’appartenance de leurs
conjoints ................................................................................................................................... 32
Figure 2: Cumul des intentions de mariage suivant l’importance de la localité d’appartenance
de leurs conjoints ...................................................................................................................... 32
Figure 3: Répartition des enquêtés par localité de mariage non souhaité en 2007. ................. 33
Figure 4:Cumul des intentions de mariage suivant le choix des localités ................................ 33
Figure 5: Répartition des enquêtés selon leur opinion sur la femme de Ouidah en 2007. ....... 34
Figure 6:Perception de la femme Glexwenu par les enquêtés ................................................ 34
Figure 7: Répartition des enquêtés selon l’acceptation de se marier à une femme .................. 35
Figure 8:Déclarations d’intentions de mariage avec une femme de Ouidah ............................ 35
Figure 9: Répartition des enquêtés selon l’opinion de leurs parents sur une éventuelle union
avec une femme de Ouidah en 2007. ....................................................................................... 36
Figure 10: Répartition des enquêtés selon la réaction probable de leurs parents sur un éventuel
projet de mariage avec une femme de Ouidah ......................................................................... 36
Figure 11: Répartition des veuves selon la cause du décès de leurs maris par localité en 2007
.................................................................................................................................................. 60

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RESUME
La femme quelle que soit son origine socioculturelle a toujours fait objet de
nombreux stéréotypes dans toutes les sociétés. La Glexwenu1 n’a pas échappé à
la règle. Elle est présentée comme « tueuse de mari ». Cette étiquette qu’on lui
colle a fait objet de recherche, pour comprendre les fondements sociaux liés à la
rumeur sur la Glexwenu. Une enquête exploratoire auprès de 100 étudiants
(18ans-25ans) ressortissants de 10 localités différentes pour avoir leur opinion
sur la Glexwenu a conduit aux résultats ayant permis entre autres, de retenir les
deux hypothèses suivantes qui ont orienté le présent travail de recherche :
- Le recours excessif de la Glexwenu aux forces occultes aux fins de garder
pour elle seule son conjoint favorise l’amplification de la rumeur ;
- la rumeur liée à la femme Glexwenu trouve son fondement dans les
rivalités antérieures et la méfiance réciproquement constatée entre les
peuples des royaumes d’Abomey et de Savi
La première hypothèse a permis d’interroger les différents discours et
pratiques (gbotémi, mantindjan, bô, gbass…) aussi bien dans l’imaginaire des
autres que dans le regard que la Glexwenu porte sur elle-même (exaltation du
moi…) et d’y identifier les éléments qui donnent sens à la rumeur. La deuxième
hypothèse a permis de s’intéresser à l’histoire sociale de la Glexwenu (origine
plurielle, influence coloniale, diversité culturelle de Ouidah…) et à l’histoire
politique de Ouidah au temps des royaumes de Savi et d’Abomey, pour y
déceler les sources probables de la rumeur. L’analyse des données de terrain
permettent de s’apercevoir entre autres, que les éléments liés à la personnalité de
la Glexwenu (c’est-à-dire les discours qu’elle tient sur elle-même, sa certitude
d’appartenir à une classe sociale particulière) influencent la réputation dont elle
fait objet.
Par ailleurs, l’Indicamétrie à travers l’étude de l’énergie capacitaire
intrinsèque liée à la rumeur sur la Glexwenu a permis de conclure que : « la

1
La Glexwenu (éthonyme fon) indique littéralement la ressortissante de Glexwe. (Ouidah est connu sous
l’appelation Glexwe). La Glexwenu est la femme de ouidah

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Glexwenu n’est pas tueuse de mari, ce sont les rumeurs qui amplifient quelques
cas particuliers ou isolés ».

INTRODUCTION
L’encyclopédie Fa enseigne par le signe divinatoire YEKU que « par la
femme, la mort a envahi la terre » (ADJOU-MOUMOUNI, 2007: 47). Un
conte relaté par Maximilien QUENUM, sur « Le chasseur et la biche » indique
qu’il faut : « se méfier de la langue des femmes » (QUENUM, 1999 : 39). De
même, la double entité divinatoire DI-ABLA enseigne qu’il faut : « se méfier
du charme des femmes, il peut y avoir des aspects pervers et cyniques »
Aussi dénote t-on dans un étymologisme qui ne revendique rien de
Griaule ni de la tradition « Sillon Noir » (Mewui whendo), le fonnu voyant dans
l’énoncé de la femme, une mise en garde, un avertissement : Gnonnu : Savoir
boire ! Un peu pour dire qu’il faut se rapprocher de la femme avec modération.
Nul doute en effet que depuis l’origine, la femme a toujours fait l’objet
d’une certaine crainte qui se dénote tant dans les principes divinatoires, les
contes que dans les mythes. Tout semble conférer à la femme un pouvoir inouï
au point qu’il faut faire attention à ne pas susciter sa colère car dit-on, par sa
redoutable langue et par son pouvoir, elle peut non seulement maudire mais
aussi bénir. Dans tous les cas, la femme reste un être énigmatique et occupe une
place considérable dans la culture béninoise et précisément dans l’éducation des
enfants. Dans le système traditionnel : «les femmes s’occupent de quelques
petits travaux domestiques ; sont à leur compte personnel, elles font le
commerce de friandises, de denrées alimentaires, de grains, etc. (…) c’est une
erreur de se figurer l’homme dans la famille dahoméenne, comme jouissant de
tous les droits, pourvoyant seul à tous les besoins matériels de la famille et la
femme comme une sorte d’automate mené au doigt et à l’œil. (…) la femme
partage également la vie de son mari, blâme ou loue ce dernier (…) »
(QUENUM, 1999 : 101). Tout ceci révèle la réalité multiple et ambivalente de la
femme.
Inès Y. Olive ZOUNNON 8
Cependant, la femme, quelle que soit son origine culturelle, fait l’objet de
nombreuses perceptions. C’est ainsi qu’on enregistre dans le langage populaire
au Bénin, différentes manières d’apprécier la femme béninoise selon qu’elle soit
d’une région ou d’une autre :

La porto novienne est supposée hautaine et bavarde ; la savaloise,


frivole ; l’Agonlinu, puissante en forces occultes ; la nan (Reine) d’Abomey,
libre et infidèle ; la nordiste, frigide ; et la Glexwenu, tueuse de mari.
La femme qui retient notre attention dans le cas de la présente étude est la
Glexwenu. L’intérêt porté sur cette catégorie de femme ne vient pas d’un
sentiment de préférence lié à l’attachement à une région particulière mais d’une
curiosité scientifique qui pousse à s’interroger sur le bien fondé de cette rumeur
et son influence sur les relations de la Glexwenu avec d’autres groupes sociaux.
Les résultats et analyses de terrain montreront en effet que la force, le
pouvoir et l’influence que revêt une telle conception, mérite bien qu’on s’y
attarde parce qu’en fin de compte la réputation qu’a la femme de Ouidah,
semble avoir été ancrée dans la pensée d’une multitude d’acteurs sociaux et fait
du coup de la Glexwenu, une femme ‘’crainte’’ dont il faut absolument se
méfier. Mais la rumeur liée à la Glexwenu semble provenir d’une certaine
conviction, du moins pour ceux qui y croient.
En effet, au-delà de la Glexwenu, n’est il pas question de l’image même
de Glexwe en tant que localité spécifique qui a une histoire particulière ? En fin
de compte la rumeur ne distingue pas une Glexwenu particulière mais s’étend à
toutes les femmes de Ouidah.
En un mot, de quelle Glexwenu parle-t-on ? Celle qui réside à Ouidah ?
Celle qui vit hors de Ouidah ? l’Agudanu ? Les nagonu ? ou les fonnu ?
résidant à Ouidah ? Toutes les femmes de Ouidah sont elles tueuses de mari ?
Toutes ces interrogations méritent une réflexion pointue parce qu’en dernière
analyse, il est question d’examiner un discours social et d’y déceler les raisons
de sa certitude.
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Aussi, ce travail de recherche est bipartite. La première partie présente le
cadre théorique et méthodologique qui structure la présente recherche et rend
également compte de ce qui fonde la pertinence du problème investigué. La
deuxième partie présente l’analyse des différentes données de terrain en trois
articulations :
- La première part des différentes représentations et discours
enregistrés sur la Glexwenu (le regard que portent les autres sur
elle ; le regard qu’elle porte sur elle-même) pour faire une
analyse de sa personnalité et des différents éléments pouvant
permettre de proposer une explication à la rumeur dont elle fait
l’objet.
- La deuxième consiste en une analyse rétrospective de l’histoire
sociopolitique de Ouidah (au temps des royaumes) et du statut
historique de la Glexwenu pour mieux comprendre le problème
étudié.
- La troisième a consisté à présenter l’apport d’une autre
discipline, (L’indicamétrie) qui se propose d’expliquer l’homme
et sa communauté à travers leurs productions, faites d’idées
d’appréciations et de décisions.

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Première Partie : CADRE THEORIQUE ET
METHODOLOGIQUE

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CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE
1. PROBLEMATIQUE

1.1. Problème
Dans toutes les sociétés, des faits se produisent, des idées de toutes
natures se forment autour de ces mêmes faits, des opinions diverses prennent
corps. C’est de la même manière que naissent les rumeurs qui comme le dit
(KAPFERER, 1987) « A un moment donné un groupe se mobilise et se met à
‘’rumorer’’, il y a contagion d’actes de parler autour d’un témoignage, d’une
information, d’un évènement. La rumeur est la plus ancienne des mass médias ».
Cela veut dire donc qu’il y a un besoin de communiquer entre acteurs dans une
société, qu’importe leur appartenance sociale, culturelle et religieuse ; ce qui
compte pour eux, est le besoin d’informer, de s’informer, de comprendre, de
pousser loin leur curiosité afin d’être au parfum de ‘’nouvelles’’ : « la
communication est consubstantielle à la vie »1.
Les rumeurs, quand bien même elles apparaissent comme dérivant très
souvent de sources incontrôlées, peuvent endormir, susciter, éveiller tout un
peuple selon la nature qu’elles portent et l’ampleur de la nouvelle qu’elles
répandent parce qu’en réalité : « ce qui est passionnant, ce n’est pas sa source,
mais ce que le public en fait » (KAPFERER, 1997 : 35). Au Bénin, la question
des rumeurs se pose désormais avec acuité. La rumeur structure les conduites
sociales de nombreux acteurs sociaux et fonde de multiples interactions.
Combien de fois les médias n’ont-ils pas démenti après parution, tel ou tel fait
publié pourtant par eux ? Ou mieux, mis à l’impersonnel une affirmation ?
Combien de fois n’a-t-on pas mis certaines déclarations au conditionnel pour
signifier le caractère à peine évident de ces dernières ? La force agissante de la
rumeur apparaît, de manière évidente lorsqu’on se réfère au débat sur la
révision de la constitution qui a prévalu plusieurs mois avant les élections
présidentielles de Mars 2006, (bien sûr qu’il n’y a pas eu finalement révision de
1
(DUVIGNAUD J. cité par ASSABA C, Anthropologie de la Communication, cours et textes, 2003).

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la constitution !).De même, tous les béninois ont encore souvenance de la
rumeur sur les ‘’Ibos, Voleurs de sexe’’ ; "les Ibos, mangeurs d’homme ’’. Il y a
donc un paradoxe et une complexité de sens quand on s’intéresse aux rumeurs.
Mais ces seuls exemples n’auraient pas suffi pour comprendre la force des
rumeurs si l’on ne s’intéresse pas à certains faits prégnants qui remontent à
l’histoire et dont on ne saurait exactement situer ni le début, ni la fin. C’est
alors qu’on peut se demander comment en est on arrivé à affirmer dans
beaucoup de localités du Bénin que la femme Glexwenu est tueuse de mari ?
Parlerait-on dans ce cas de mythes flottants comme Kapferer, c’est-à-dire une
histoire se présentant comme des minis contes moraux et dont l’apparition n’est
liée à aucun fait tangible ? Ou serait-il simplement mieux de parler de réputation
se créant et prenant corps dans la société à partir de faits réels ou non ? De
toutes les façons, il est un fait évident : les femmes selon leur origine
socioculturelle sont très vite l’objet de clichés et de stéréotypes. Il y a donc des
stéréotypes, c'est-à-dire des étiquettes et des représentations sociales qui se
collent à des groupes divers du fait d’une situation, d’un fait, compris, connu,
vécu ou non (OLIVIER DE SARDAN, 1995).
Au-delà de la fausseté ou de la véracité de la rumeur, il s’impose de
s’intéresser aux processus de sa construction sociale. Une telle démarche
permettra de savoir comment s’est construite et répandue la rumeur vis-à-vis de
la femme Glexwenu ? C’est dans une telle perspective que se situe la présente
étude qui se propose d’analyser les fondements de la méfiance à l’égard de la
femme Glexwenu. Il s’agira essentiellement de répondre à la question suivante :
Quels sont les fondements sociaux de la rumeur selon laquelle la femme
Glexwenu est tueuse de mari ?
Quelques hypothèses permettront de répondre à cette interrogation.

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1.2. Hypothèses
Pour explorer la perspective envisagée dans la question de recherche,
deux hypothèses serviront de fil conducteur. Il s’agit de réponses anticipées à la
question de recherche. Elles devront être confrontées à la réalité des faits lors de
l’enquête de terrain.
- Le recours excessif de la Glexwenu aux "forces occultes"2 aux fins de
garder pour elle seule son conjoint favorise l’amplification de la rumeur ;
- la rumeur liée à la femme Glexwenu trouve son fondement dans les
rivalités antérieures et la méfiance réciproquement constatée entre les
peuples des royaumes d’Abomey et de Savi.
Ces hypothèses sont formulées en vue d’atteindre des objectifs précis.

1.3. Objectifs
1.3.1. Objectif Général

Expliciter les fondements sociaux de la rumeur au sujet de la femme


Glexwenu tueuse de mari.

1.3.2 Objectifs spécifiques

- Etablir le lien entre le recours aux forces occultes de la Glexwenu avec les
discours et anecdotes qui participent de la construction de la rumeur à son
sujet ;
- Déterminer à travers les rivalités historiques entre royaumes (Abomey et
Savi), les motifs liés à la persistance réelle ou symbolique de la rumeur
autour de la femme Glexwenu.

2
Toute connaissance dont la pratique relève du mystère ou du secret et capable d’agir, de produire un effet.
(Larousse, 1964)

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2. CLARIFICATION CONCEPTUELLE

Le cadre théorique de la présente étude porte sur un certain nombre de concepts


qui pourraient revêtir des significations autres que celles qui leurs sont données
habituellement. Il serait donc opportun d’opérer une clarification conceptuelle
afin de lever toute équivoque.
Stern définit la rumeur comme partant d’un témoignage initial (texte O)
rapporté par un sujet A, et qui évolue en une succession de dépositions D écrites
par autant de sujets ayant pris connaissance de la déposition précédente D1.
Sans le sujet B, (L’expérimentateur) l’expérience s’arrête dès la première
réplication. C’est lui qui a organisé le protocole, c’est encore lui qui entretient la
‘’rumeur’’ en lisant aux sujets suivants les dépositions des sujets précédents.
En un mot, on retient la rumeur selon STERN (1902) comme une
information rapportée par un individu qui la diffuse à d’autres, et entretient lui
seul la vie de la rumeur initiale. En figure le protocole ci-dessous :

Sujet A Sujet C Sujet D1

0 2
1

Sujet B Sujet B Sujet B


Jour 0 Jour 1 Jour 2

(FROISSART, 1995) dans son effort de comprendre le processus de


construction de la ‘’rumeur’’ et de ses effets marque un intérêt à l’histoire du

1
schéma présenté par STERN (1902) et contenu dans FROISSART (1995) « la rumeur ou la survivance de
l’intemporel dans une société d’information », in Recherches en communication (Louvain-la-Neuve Belgique)
pp103-131

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concept et retient que la rumeur est une expression empruntée au Latin Rumor,
dont on trouve les premières traces dans un Edit de 1274 du parlement de Paris
où elle désigne tout autre chose, le ‘’Haro’’ que tout citoyen est obligé au nom
de la loi de pousser s’il assiste à un crime, de manière à attirer l’attention de la
maréchaussée. Son sens a ensuite évolué au cours des siècles. Au 17è siècle,
elle représente un bruit social incohérent, un chaos sonore porteur d’une
signification diffuse. Au 18è siècle, elle désigne le bruit émanant d’une lutte ou
d’une sédition, moins chaotique mais pas encore organisé, avant de se
transformer le siècle suivant en l’expression de la dénonciation publique ou de
la surprise devant un événement imprévu. A la fin du 19è siècle seulement,
apparaît la différenciation des locuteurs, perdus dans une masse, dans le corps
d’une foule anonyme, ceux-ci sont bientôt les acteurs de la rumeur. Naît alors
l’idée de bouche à oreille et de bruit qui court : de ce fait la rumeur peut être
injurieuse ou infamante, ce qu’elle ne pouvait signifier auparavant. Enfin, la
rumeur du 20è siècle est le résultat d’une nouvelle évolution du concept, dans
lequel on trouve un élément étrange mais significatif : La rumeur devient
information en plus de toutes ses caractéristiques antérieures.
Ainsi d’un simple cri (haro) autorisé par la loi en situation de témoin d’un
crime, en 1274 la rumeur est devenue au fil des siècles, et au 19 è siècle une
information qui se colporte et intègre dans son association des auteurs qui
lui servent de relais.
BYSOV (1928) distinguait 3 types de rumeurs : celle qui rampe (jusqu à
ce que tout le monde la connaisse), celle qui fait feu de paille (et qui a
généralement un sujet touchant à un péril immédiat), et enfin la rumeur ‘’sous-
marine’’ de nature essentiellement cyclique.
Selon Froissart, « Toute rumeur en effet peut être décomposée de triple
façon : une thématique "hors du temps", éphémère et cyclique à la fois bref
intemporel, et un surgissement dans le temps lié à des conditions sociales
d’émergence temporel ».

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En 1957 explique Froissart, débute en France l’histoire de la "rumologie".
Les travaux des américains (ALLPORT et POSTMAN, 1947) ont été ceux qui
ont le plus inspiré. L’auteur considère ces derniers comme étant les pionniers
dans l’exploitation qu’ils font du concept de rumeur. Définissant la rumeur
comme étant une proto-légende en voie de solidification, ou bien, plus
prosaïquement, que la rumeur naît dans des contextes d’incertitude, d’ambiguïté
et d’intérêt général ils en arrivent à leur formule R= i x a. (R= rumeur ; I=
incertitude ; A= ambiguïté)
Les rumeurs telles que définies doivent être mises, dans leur ensemble, en
relation avec d’autres concepts proches ou apparentés pour mieux cerner de quoi
nous parlons.
Dans son ouvrage, Sociologie politique des rumeurs, (ALDRIN, 2005) se
démarque des approches psychopathologiques de la rumeur pour s’inscrire dans
la lignée de la sociologie interactionniste de la rumeur. Abordant la rumeur
comme un fait social, il affirme : « récits de nouvelles non encore vérifiées, les
rumeurs se signalent concrètement par les façons de le dire et de les échanger.
Seule une analyse in situ peut alors saisir leur portée du point de vue des acteurs.
La rumeur constitue ainsi une interaction singulière, mobilisant différents
répertoires d’énonciation (on-dit, insinuation, etc.), types d’énonciateur
(instigateur, colporteur, contradicteur, etc.), contextes sociaux et stratégies
d’acteurs »
Mais le concept même de rumeurs est à différencier de potins, bruits,
ragots etc.…concepts que Kapferer (op.cit) appelle "Phénomènes voisins" à la
rumeur. : « Etymologiquement, rumeur, bruit et ragot sont des effets : des sons
d’intensité et de durée variables. (…) Aujourd’hui, rumeur et bruit ne font plus
référence à l’effet sonore, mais à la cause même de cet effet. Elles se
distinguent, non par leur source mais par l’amplitude du processus : rumeur et
bruit émanent de sources non officielles. La première renvoie à un processus
de diffusion en chaîne, à une force de propagation, à une amplitude dont le
résultat est le son audible qui s’élève de toutes ces voix, et que l’on peut suivre à
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la trace : il court. Le bruit renvoie à un processus décousu, rampant, hésitant,
très limité localement : il est normal que l’on n’entende rien si ce n’est un
vague bruit. « Ce n’est qu’un bruit » signifie que le son est à peine audible (…)
le bruit est insignifiant ».
Le mot ragot faisait référence selon l’auteur à la source et à l’effet d’une
communication. C’était à l’origine un grognement émis par un sanglier et qui
aujourd’hui constitue : « des histoires de bas étage, à la limite de la calomnie
racontée à l’égard d’une personne, mais qui ne porte nullement honneur à celui
là même qui le colporte. »
En un mot ragot, commérage, bruit ont des liens spécifiques avec la
rumeur elle-même, il y a une sorte d’interrelation qui les lient. Le ragot qui
correspond à dire sorte de calomnie, porte sur le contenu de la rumeur ; le potin
qui renvoie à l’objet même de la rumeur, et le commérage qui tend à discréditer
la rumeur, ne constituent en dernière analyse que l’endroit et l’envers d’une
même situation. Ce sont ces derniers en effet qui donnent sens à la rumeur et qui
la font exister et révèlent par devers leurs contenus les multiples facettes de la
rumeur.
Qu’en est-il à présent des concepts de stéréotypes, de préjugés ; de
représentations sociales et autres, et de leurs relations avec le concept de
rumeur ?
MOSCOVICI et Al (1976) affirment que : « les représentations naissent
et se développent dans les conversations quotidiennes et par rapport à des
circonstances culturelles et historiques ». SECA (2005) définit une
représentation sociale comme renvoyant : « à un mode de construction des
savoirs, partagés par les groupes et les individus, et à leurs contenus eux-mêmes
organisés en systèmes ouverts d’idées. (…) Pensée qui se fabrique au fur et à
mesure à partir de réserves et savoirs, de connaissances scientifiques, de
traditions, d’ idéologies et de religions, les représentations sont inscrites dans les
périodes de l’histoire et les changements de la vie sociale ».

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Le dictionnaire de sociologie de Gilles Ferréol présente en termes clairs le
concept de Représentations Sociales : « Les représentations sociales se
présentent d’abord sous une grande diversité phénoménale : images du réel,
croyances, valeurs, systèmes de références et théories du social cœxistent le
plus souvent. Il n’y a là rien d’étonnant si on comprend que les représentations
sociales correspondent à une exigence fondamentale de la pensée humaine : la
nécessité de représenter le réel, que celui-ci est à la fois divers et appréhendable
d’une multitude de points de vue eux-mêmes dépendant des caractéristiques
historiques et sociales des acteurs. (..) De façon plus précise, on désignera par
R.S, le savoir de sens commun socialement élaboré et partagé, construit pour et
par la pratique et qui concourt à la structuration de notre réalité. (…) Mais toute
représentation sociale est représentation de quelque chose ou de quelqu’un (un
individu, une famille, un groupe de classe.). Les RS se présentent toujours sous
deux facettes ; celle de la figure et celle de la signification, aussi peu
dissociables que le sont le recto et le verso d’une feuille de papier. En faisant
correspondre à chaque image un sens et à chaque sens une image, elles
constituent une forment particulière de pensée symbolique. »
En philosophie, tel que le souligne le dictionnaire de sociologie de
Ferréol : « La représentation est l’une des formes de l’activité symbolique visant
à rendre présent un objet absent ». La critique à cette conception est liée à la
représentation comme trace mentale du réel. Le même dictionnaire repend les
travaux de Durkheim qui est considéré comme le premier à avoir donné un statut
sociologique au concept à partir d’un article publié par lui, les « représentations
collectives » dans une revue de métaphysique et de morale.
DURKHEIM (1898) insiste sur les caractères spécifiques et autonomes
des représentations collectives, des représentations individuelles. De même que
selon lui, les représentations collectives ne sauraient être un cumul de celles
individuelles, la structuration de ces dernières ne sauraient être expliquées ou
réductibles aux « Physico – chimiques du cerveau qui les engendrent ».

Inès Y. Olive ZOUNNON 19


Avec MOSCOVICI (1961) présenté à travers ses recherches sur les
représentations sociales à partir notamment de l’étude des représentations que
divers groupes se font de la psychanalyse, par le même dictionnaire, il apparaît
que la notion a connu une évolution conceptuelle considérable par ce biais.
Elles ne seront plus désormais confondues avec l’imaginaire individuel ou les
mythes, les croyances collectives, images héritées de la culture, mentalités, mais
revêtues d’une fonction nouvelle : « Ce n’est plus la démarche scientifique qui
tire son inspiration de perceptions ou de représentations collectives, mais celles-
ci qui se mettent à puiser dans la science des éléments de structuration.
Les R.S. deviennent alors la forme moderne d’un sens commun obligé
d’articuler de façon originale une pluralité de modes de connaissance lorsqu’il
cherche à interpréter le réel »
Ainsi il y a une diversité de sens, de définitions de théories et d’auteurs,
lorsqu’on s’intéresse à la notion de R.S.
Cependant pour ce qui nous concerne dans la présente recherche, une
chose est claire, de toutes les définitions liées à cette notion, on retient : les
représentations sociales renvoient à des images, des concepts, bref à une
construction sociale de la réalité. De ce fait, les liens entre les phénomènes de la
rumeur et celui des représentations sociales sont évidents. Seulement, les
processus de construction ne sont pas identiques et la chaîne de diffusion des
messages ou conceptions restent différents.
LIPPMANN (1922) définit quant à lui, le stéréotype comme : « ce qui
désigne le résultat d’un processus de condensation et de schématisation,
généralisant à un ensemble d’individus les mêmes opinions simplifiées à
l’extrême, parfois jusqu’à la caricature » (FERREOL, 2004).
Le préjugé est défini comme : « opinion généralement péjorative plus au
moins implicite, sans vérification ni contrôle critique, d’un individu ou d’un
groupe à l’égard d’autrui ». (opcit). Ce dictionnaire souligne par ailleurs la
rigidité du concept de stéréotype par rapport à celui de préjugé.

Inès Y. Olive ZOUNNON 20


Rapprochés de la rumeur, ces concepts y trouvent parties liées dans le
sens où, la véracité ne fait pas partie de sa définition scientifique : « le terme
rumeur lui-même donne lieu à une différenciation entre "vraies"et "fausses" »
(KAPFERER, 1987 : 27). Le même auteur affirme : « en réalité la rumeur ne
précède pas la persuasion, elle en est la manifestation visible. (..) Il s’agit d’un
jugement de valeur tout à fait subjectif ». Ainsi, le caractère subjectif de la
rumeur rapproche ses notions, mais elle s’en distingue par sa vélocité et n’est
pas le fait d’un individu. C’est : « le plus souvent une production sociale
spontanée, sans dessein ni stratégie » (KAPFERER, 1987 :33).
« La notion de stéréotype apparaît dans le domaine des sciences sociales
avec le développement de la théorie des opinions. Cette notion recouvre, en tant
que concept scientifique, l’inadéquation de la réalité et des conceptions que l’on
s’en fait. La pratique sociologique a réservé l’usage de ce terme pour désigner
les opinions ou jugements que les groupes sociaux portent les uns sur les autres
et qu’indirectement ils portent sur eux –mêmes. Comme il s’agit généralement
d’opinions sans rapports avec la réalité objective, on rapporte la notion de
stéréotype à celle du préjugé : on a souvent fait de ces deux termes, les deux
aspects d’un même phénomène : l’un –le stéréotype – conceptuel, l’autre le
préjugé affectif. La pensée stéréotypée en général consiste en une certaine
manière d’appréhender la réalité. C’est un mode de pensée qui tend à définir les
ensembles immuables au sein de la diversité sociale. On énumère par exemple
une série d’attributs ou de caractères pour définir le noir, le juif ou la femme … :
le premier serait primitif en fainéant, le deuxième, avare, sans sentiment ou
arriviste, la troisième passive et incohérente etc.…. En même temps ces
attributs renvoient à l’essence respective du noir, du juif ou de la femme comme
à leur origine, de sorte que leur personnalité et attestée par ce qu’ils sont
justement censés dévoiler.
En somme, les jugements stéréotypés consistent à ramener tous les
membres d’un groupe à des caractéristiques générales, ou encore à les penser, à
les percevoir sous la catégorie de l’espèce, ils n’apparaissent du reste, qu’en
Inès Y. Olive ZOUNNON 21
filigrane, sous une forme très appauvrie.»3. Le dictionnaire universel définit la
‘’réputation’’ comme une « opinion commune sur quelque chose, sur quelqu’un.
Ceci pouvant être une bonne ou une mauvaise réputation. C’est aussi le renom
dont jouit quelqu’un ».
Toutes ces définitions de concepts documentés, nous permettent de faire
le point de leur rapport spécifique au concept de rumeur. Globalement, bien que
la rumeur dans son contenu présente un éventail large de spécificités, nous
retenons de la définir en ces termes : « la rumeur est le plus souvent une
information qui part d’un évènement récent, d’un fait troublant, d’une situation
ambiguë, de la défaillance dans l’interprétation d’un message, de secrets
ébruités. Elle se définit par sa source non formelle, son processus de diffusion en
chaîne et porte sur un fait d’actualité, elle a un cycle de vie, se développe par
étapes et connaît une fin. »
A priori, la rumeur semble dans sa définition n’avoir pas de lien réel avec
les stéréotypes. Mais d’une certaine façon le contenu de la rumeur peut contenir
des éléments caractéristiques qui définissent les stéréotypes. Par ailleurs, la
réputation dans sa définition se rapproche beaucoup plus du stéréotype.

3. ETAT DE LA QUESTION

Il n’y a pas d’objet de recherche vierge. On ne peut donc aborder un sujet


de recherche sans que rien n’ait été fait dans ce domaine.
Ainsi, la question liée à la réflexion autour des différentes renommées
auxquelles les femmes de groupes socioculturels variés font l’objet n’a pas
échappé au regard et à l’analyse critique de certains auteurs. Les différentes
études dont on fera ici le point ne font pas que référence aux femmes mais aussi
à l’ensemble des stéréotypes et représentations collectives liés à un groupe

3
Actes du colloque international sur le tricentenaire pays guin ‘’ Aneho 18-20 Septembre 2000-2001
dans Aneho, citée fantastique ou l’image des guins dans les communautés éwé (P525).

Inès Y. Olive ZOUNNON 22


humain spécifique. On parlera du regard que porte en général un groupe sur un
autre.
Dans sa communication les femmes d’Aneho : mythes et réalités paru
dans TRICENTENAIRE D’ANEHO ET DU PAYS GUIN 4, Télé MENSAH-
AMENDAH CRIFF présente les clichés multiples et controversés de la femme
d’Aneho.
En partant de la notoriété dont jouissait ANEHO sous la traite, il montre
comment des faits historiques marquants de l’époque ont contribué à donner une
image particulière à la femme d’Aneho. D’image controversée et variée, la
femme d’Aneho fait objet de nombreux stéréotypes : très fière d’elle-même,
orgueilleuse, qui ne se laisse pas marcher sur les pieds, très snob, Hautaine,
arrogante. Ce n’est pas une femme à épouser – Hypocrite - pas toujours
accueillante avec sa belle famille, très bavarde, voire radoteuse pipelette- mais
aussi – Bonne cuisinière – Bonne épouse (s’occupe bien de son mari) bonne
mère domestique – Propre, s’habille bien – Bonne maîtresse de maison.
L’approche méthodologique de l’auteur a été focalisée sur le recensement
des divers stéréotypes dont la femme d’Aneho fait objet auprès de groupes
ethniques différents avec des questions précises (l’image qu’inspire la femme
d’Aneho ; les qualités et les défauts qu’on lui connaît du point de vue perceptif).
La volonté de compréhension des différentes perceptions liées à la femme
d’Aneho a ensuite amené l’auteur dans sa démarche à s’interroger sur « le
pourquoi et le comment de cette construction de toute évidence mythique des
femmes d’Aneho » (MENSAH, 2000 :126)
Il s’est agit d’énumérer les caractéristiques de la femme d’Aneho en
confrontant selon ses propos : « le mythe à la réalité ». En passant donc de la
femme d’Aneho, femme idéalisée (la citadine, la séductrice, la maîtresse de
maison, le cordon bleu, la compagne, la commerçante, l’intellectuelle) à la
femme diabolisée (la maltraitante domestique, la langue venimeuse, la voleuse

4
(Actes du colloque international sur le tricentenaire du pays guin, Aneho 18-20 Septembre 2000 volume 2)

Inès Y. Olive ZOUNNON 23


de mari, celle qui abandonne le domicile conjugale, l’avare), l’auteur va
conclure que la perception que les acteurs sociaux ont de la femme d’Aneho se
focalise sur : « deux images antithétiques, monolithiques, sans nuance et non
superposables ».
Le plus intéressant dans la démarche de l’auteur a été l’appréhension par
elle-même de la femme d’Aneho. Quelle image la femme d’Aneho a d’elle-
même ? La réponse est simple : « en effet, ce qui frappe quand on interroge les
femmes d’Aneho, c’est la conscience qu’elles ont d’appartenir à un monde à
part, à une maison, à une entité particulières, ce qui peut socialement s’expliquer
par le fait que Aneho est le siège des familles royales et apparentées et de la
bourgeoisie côtière. La femme d’Aneho se sait, se sent, se veut une privilégiée
et elle a une certaine image valorisante d’elle-même, qu’elle impose »
(MENSAH, 2000 : 511).
Par ailleurs, les dictons ci-après :
‘’NE APOU GBLE AHOEVI LA DOU ABLO’’ : ‘’si la mer est
mauvaise, l’enfant du pays trouvera à manger’’
‘’ FIOVI MOU CHI NA DJI NA KODJO’’. L’enfant du roi ne se fait de
souci pour un procès ‘’ (il sait que c’est son père qui prononcera la sentence).
‘’GUINDOUA, AGBOLENU’’. ‘’Le pays Guin a une porte’’,
témoignent selon l’auteur de l’exaltation du moi chez la femme d’Aneho. Et par
l’image qu’elle interroge et que reflète son comportement elle « participe à la
construction du mythe de la "Civilisation" »
Pour conclure, l’auteur va insister sur le va et vient permanent entre le
mythe et la réalité car selon lui il existe pas de création ex-nihilo. L’image de la
femme d’Aneho s’insère selon lui « dans la vision mythique et ambivalente de
l’Eternel féminin qui oscille sans cesse entre deux pôles antithétiques mais
s’ancre pour le cas de la femme d’Aneho dans un contexte géographique et
historique précis ».
Si les travaux de Télé MENSANH, souffrent de ce qu’ils ne portent que
sur les aspects mythiques de la représentation faites à la femme d’Aneho, ils
Inès Y. Olive ZOUNNON 24
présentent un intérêt méthodologique évident. La présente recherche s’en inspire
tout en se proposant de dépasser la vision mythique et ambivalente en même
temps que le contexte géographique et historique aux travers desquelles l’auteur
tente de donner une explication à la représentation liée à la femme d’Aneho. Au-
delà de la complexité du mythe féminin, et du contexte historique qu’est celui de
Glexwe, il faut s’inscrire dans une approche essentiellement compréhensive pour
mieux appréhender les logiques sociales qui sous-tendent une telle rumeur. Il est
donc nécessaire de varier les points de vue sur la question pour une clarté plus
soutenue par rapport au phénomène étudié.
Komi KOSSI – TITRIKOU présente Zebe dans l’imaginaire populaire de
l’arrière pays d’Aneho. En effet, tel que le présente l’auteur, Zebe (petit village
situé au Nord de la lagune qui séparait la ville d’Aneho de son arrière pays.)
devint en 1887 le nouveau siège de l’administration coloniale allemande se
substituant ainsi à petit Popo (ancien siège). Ce déplacement parce qu’explique
l’auteur : « pour un allemand de "bonne moralité’’, il était inadmissible d’habiter
un endroit dont le nom, petit Popo, évoque si manifestement les parties basses
du corps humain. Klein Popo, traduction en allemand de little Popo ou petit
popo signifie bien "petites fesses" (TITRIKOU, 2000 : 515). Ce nom Zebe, qui :
« draine des images précises dans le souvenir des hommes et des femmes est
loin d’être oublié, même aujourd’hui après bien des décennies, et est encré dans
la mémoire collective comme un leitmotiv connotant des idées
contradictoires…. ». Lieu d’implantation des populations Waci dont la
principale activité économique est l’agriculture, Zebe à travers ses occupants
nourrit très tôt d’intenses relations d’échanges avec Aneho (pêche, commerce)
et Glidji.
Zebe restera une zone d’influence considérable par rapport au pays Guin
du fait de son statut de siège de l’administration coloniale et suscitera ainsi des
images controversées dans la culture populaire de l’arrière pays : « Au temps de
la colonisation, les Waci subirent une grande part des exactions et brimades
exercées par les allemands à l’encontre des Africains. Souvent poursuivis pour
Inès Y. Olive ZOUNNON 25
n’avoir pas honoré leurs devoirs civiques, utilisés comme main d’œuvre
disponible, voire gratuite, pour les travaux de toutes sortes exigés par
l’administration, ils sont l’un des groupes de populations les plus marqués par
l’administration coloniale à partir de Zebe, la discipline par les sévices corporels
et le travail obligatoire, le civisme par le payement régulier des impôts
témoignent de la toute puissance démontrée par l’administration qui n’hésitait
même pas à réprimer des chefs de village, les réactions de la population ne
pouvaient s’exprimer sous crainte de représailles. » (TITRIKOU, 2000 : 520).
On comprendra ensuite que naissent dans la culture populaire, des images
variées (peur, plaintes…), fonction des sentiments éprouvés par la population à
l’égard de cet endroit. Quelques dictons et proverbes recensés par l’auteur en
témoignent :
‘’ TA ME SU ZEBE DEDE O’’ (il n’est pas aisé de se rendre à Zebe)
‘’ YEVU A NTO YEFO TOME NA NYE YA! (C’est le blanc même qui
m’a giflé)
‘’MEYI ZEBE ! ‘’ (Je me rends à Zebe pour me plaindre. N’est-ce pas à
Zebe que se trouve la prison !) Zebe passera ainsi dans la culture populaire et
dans l’imaginaire Waci comme : « le symbole de la répression et de la coercition
bref, comme un endroit qu’il convient de craindre » (TITRIKOU, 2000 :523).
Le plus instructif des textes est celui de Janvier AMELA, (Département
de lettres modernes VB. Lomé) avec pour thème central : Aneho, cité
fantastique ou l’image des guins dans les communautés Ewé.
L’auteur dans sa démarche précise d’entrée de jeu le matériau de son
étude essentiellement constitué de textes oraux (la seule restriction selon lui !). Il
avance la thèse fondamentale selon laquelle : « Quelle qu’elle soit, la
représentation de l’autre n’est pas reproduction de la réalité, et les mythes
constitués sur les Guin – Mina par les Ewé restent strictement dans le domaine
de la légende » (P525). En effet, la ville d’Aneho donne lieu chez les Ewé, à de
nombreux fantasmes qu’ils soient de fascination ou de méfiance. Nous relevons
dans le texte, l’essentiel des perceptions des Ewés sur les populations d’Aneho :
Inès Y. Olive ZOUNNON 26
- la cartographie imaginaire qui coïncide avec la géographie mythique des
Ewés situe le centre du monde dans Ewedomè, « le centre des Ewé »,
domaine réservé des « amègbas, les vrais hommes »
- A l’extrême Ouest de ce territoire, les Ewé placent les blui qui sont les
ashantis ou baoulé, ceux dont le parler s’entend comme des balbutiements
d’animaux ou le grondement sourd du tonnerre « bloubloublou ».
- « les fiafialawo », voisins entre Ewe et Blui, sont ceux qui, au lieu de
s’exprimer à la manière des vrais hommes pépient « fififi » comme des
essains d’oiseaux.
- Les Ewe appellent les Guins « nos neveux », sorte de quolibet affectueux
pour signifier que les nouveaux arrivants ont épousé nos sœurs qui n’ont
pas eu le temps de leur apprendre le Ewe authentique et qu’il sont restés à
parler comme des enfants qui prononcent p au lieu de f, v au lieu de V.

Les Ewés vont plus loin dans leurs perceptions de guins d’Aneho : « Ainsi, des
Ewés qui estiment que les gens d’Aneho affichent trop souvent leur air de
suffisance, ne manquant jamais l’occasion de proclamer qu’ « ils sont les
premiers à avoir accueilli les blancs et qu’ils se sont dessillés à leur eau». Les
Ewés tiennent alors sur les Guins – Mina les mêmes propos que sur les blancs.
« Ces chiens trop malicieux, les ayevuwo », prêts à jouer tous les tours aux fins
d’occuper les positions dominantes. C’est d’ailleurs ce seul héritage que ces
blancs auraient légué à ces guins qui ignorent comment tenir une houe pour
sarcler et une machette pour défricher. Tout au plus savent – ils montrer dans
leur barque pour aller pêcher des carpes, les « anexoviwo », ces petits poissons
du même nom que ceux qui les pêchent : s’il y en a qui osent monter an haute
mer, c’est qu’ils l’auraient appris de nos frères, les anlon. » (P 527)
Par ailleurs, des origines controversées sur l’origine des guns sont
révélatrices de stéréotypes :

Inès Y. Olive ZOUNNON 27


- les guins, descendants d’un même ancêtre Noen que les Ewe seraient cette
branche de la grande famille Ewe plus turbulente et plus industrieuse que les
autres qui ont décidé d’aller s’implante ailleurs.
- les guins seraient dune famille gan d’Accra et se seraient enfuis avec le siège
royal gan pour s’installer sur le littoral dans un village de pêcheurs construit
avec des palmes de cocotiers, d’où le nom Nêho, littéralement, cabane en
palmes de cocotiers. Ce serait pour cela que les gans d’Accra dénommeraient
tous les Ewe « ayigbedzoulo, mangeurs d’haricot voleurs ». Etc.…
L’auteur dans sa démarche méthodologique, s’est focalisé sur les discours
des Ewés, sur leurs frères d’Aneho, les légendes les histoires que racontent les
Ewés sur les origines des guins. Toutefois, ils reconnaissent aux guins d’avoir
fait émerger leur culture au-delà des frontières d’avoir servi en qualité
d’instituteurs, d’agents de santé ou de l’administration publique dans leurs villes
et campagnes.
L’auteur conclura : «les Ewes ont tort de cultiver quelque complexe à
l’égard des guin – Mina, leurs parents. De même que les Anlon portent avec
bonheur la culture Ewé dans tout le monde anglo saxon, en Amérique du Nord
et dans les Iles Britanniques, de même que par leur dynamisme, les mina
continuent de propager partout dans le monde, le raffinement et le savoir vivre
togolais. » (P 530).
On comprend clairement alors comment peuvent se former les
représentations à l’égard d’un groupe. Des événements historiques douloureux
siégeant dans l’inconscient des individus se racontant de génération en
génération tout en conservant toute leur vivacité et bien sûr avec toutes les
conséquences qu’ils entraînent à leur et ayant dénomination : méfiance, mépris,
peur, clichés, stéréotypes…à l’égard de l’autre ; des déformations décousues de
l’histoire des peuples, des événements marquants isolés etc.
C’est dans cette même lancée que (MASSAN NUBUKPO, 2000) a fait
une analyse sur : « Regards croisés inter Togolais : la perception des guins
sur les non guins ». Partant de l’origine des guins (ayant fuit de la côte de l’or),
Inès Y. Olive ZOUNNON 28
de leur rapport avec les blancs qu’ils ont très tôt appris à côtoyer, il montre que
le pays guin depuis ses origines jusqu’à la période coloniale n’a pu s’étendre
qu’une superficie de quelques dizaines de Kilomètres carrés : « A titre
d’exemple, on peut citer la mer qui est devenue non pas un simple lien entre le
pays guin et la lointaine Europe d’où venaient les bateaux des négriers et autres
négociants, mais plutôt le signe même de la civilisation par excellence. La
civilisation est donc à leurs portes. Plus on est loin de la mer, plus on est loin
d’être civilisé. » (AMELA, 2000 :532).
Comprendre donc l’image que les guins se projettent d’eux mêmes c’est
ne pas perdre de vue ce lien très tôt scellé entre eux et les européens avec toute
leur visée civilisationnelle. Ainsi donc le rapport avec le blanc permettant de
développer chez le guin des acquis potentiels comme : esprit mercantile,
réflexes d’occidentalisés etc.…. ont souvent : « contribué a créer chez le guin un
sentiment d’auto-satisfation et la certitude d’avoir une longueur d’avance sur les
autres » (P133). Les guins se considérant pendant longtemps comme « la norme
à imiter » ont perdu très vite de leur notoriété et sont autrement appréciés par les
non guins : « les membres du hors groupe s’aperçoivent avec le temps que ce
que faisaient les guins au nom de la norme occidentale n’est plus qu’un pâle
reflet du modèle occidental. Le chemin de l’Europe ne passe plus par Aneho. Le
raffinement des moeurs, des attitudes et des comportements, la culture de
l’éducation scolaire, le goût de l’aventure intellectuelle, de l’argent et de la
politique n’est plus la chasse gardée les seuls guins » (P 534). Complexe de
supériorité, esprit de roublardise, sens aigu du gain, non respect de la parole
donnée, sont des défauts souvent évoqués par les non guins à l’endroit des
guins.
En réalité, ce dernier texte reste très significatif et montre bien comment à
la faveur des circonstances historiques ‘’alléchantes’’, une communauté arrive à
émerger et à se faire supérieure à d’autres, au point de se considérer centre de la
civilisation. C’est aussi bien sûr, au travers des attributs honorifiques acquis par
devers l’histoire et qui restent fonction des rapports avec d’autres groupes
Inès Y. Olive ZOUNNON 29
proches, que se construisent dans l’imaginaire de ces derniers ce qu’on peut
appeler représentations.
Enfin, ces différents textes ont le mérite d’avoir abordé des aspects
importants tels que le regard qu’un groupe porte sur un autre ; le regard que le
groupe porte sur lui-même ; l’influence de faits historiques sur la vie des acteurs,
leurs comportements, la façon dont ils gèrent leurs rapports aux autres. Ainsi,
même si les villes Aneho et Ouidah semblent avoir une homogénéité historique,
ces textes ne font aucunement allusion à la Glexwenu, mais oriente la recherche
sous les différents angles sus évoqués en nous ouvrant sur une perspective
plurielle permettant de mieux aborder le sujet.

4. PERTINENCE DE L’ETUDE
4.1. Raisons subjectives

S’intéresser à la "Glexwenu", principalement à la rumeur liée à la


Glexwenu n’est pas née ex nihilo. L’intérêt porté à cette catégorie de femme
s’apparente à une curiosité scientifique pour mieux comprendre le pourquoi de
la persistance d’une rumeur faisant d’elle une tueuse de mari.

En effet, depuis notre jeune âge, nous avons souvent entendu parler de la
femme Glexwenu. A priori, bien sur cela nous laissait indifférent. Néanmoins
combien d’informations sont stockées dans le cerveau depuis le jeune âge et qui
au contact d’un élément "incitatif" ne resurgissent-elles pas dans la mémoire de
l’individu ?

Ainsi, ce n’est pas ce seul fait d’avoir été au contact de discours liés à la
Glexwenu, à la méfiance qu’elle suscite qui constitue le seul motif lié à l’intérêt
porté sur elle, mais on note la persistance de la rumeur encore aujourd’hui.
Combien de fois n’a-t-on pas entendu certains proches ou même inconnus
dire : « Glexwenu nou bada bada, man té demé » (citée en goun, cela dénote
l’invite à la méfiance vis-à-vis de la femme de Glexwe).

Inès Y. Olive ZOUNNON 30


4.2. Raisons objectives

L’intérêt particulier porté sur le sujet réside dans les premiers résultats issus de
l’enquête exploratoire effectuée auprès d’étudiants de 18 à 25 ans. Les résultats
obtenus à cet effet révèlent que la rumeur au sujet de la femme Glexwenu
structure les interactions. Les cinq questions qui furent posées aux étudiants à
cette occasion sont les suivantes :
1- Est-ce que la localité figure parmi vos critères en matière de choix de
conjointe ?
2- Dans quelles localités ne souhaiteriez vous pas prendre femme ?
3- Quand je dis « femme de Ouidah », quelle est l’image qui s’impose à
vous ?
4- Etes vous aujourd’hui prêts à prendre une femme de Ouidah malgré tout
ce qu’on en dit ?
5- Telle que vous connaissez vos parents, dites nous, si aujourd’hui vous leur
présenter votre futur conjointe comme étant de Ouidah, quelle serait leur
première réaction ?
Les graphiques qui suivent rendent compte des réponses des enquêtés et fondent
par là même, la pertinence de l’étude.

Inès Y. Olive ZOUNNON 31


Graph A1: Critère de localité en matière de choix du conjoint: intentions exprimées par localité

100%

O; 90%
90%

O; 80% O; 80%
80%

O; 70% O; 70%
70%

O; 60% O; 60%
60%
N; 50%
O; 50% O; 50% I; 50% O
50% N
I
N; 40% N; 40%
40%

N; 30% I; 30% N; 30% N; 30%


30%

O; 20% N; 20%
N; 20%
20%

N; 10% N; 10% I; 10%


10%

0%
Abomey Agonlin Bèbérèkè Dassa Dogbo Djougou Lokossa Ouidah Pobè Porto nov

Figure 1:
Opinion des enquêtés sur l’importance de la localité d’appartenance
de leurs conjoints

Graphique A1 : cumule des intentions

indiff; 9%

Non; 28%

Oui; 63%

Oui Non indiff

Figure 2:
Cumul des intentions de mariage suivant l’importance de la localité
d’appartenance de leurs conjoints

Inès Y. Olive ZOUNNON 32


Graph A2 : Localités redoutées en matière de mariage

60%

54%

50%

40%

30%

21%
20%

14%

10%

4%
3%
2%
1% 1%
0% 0% 0%
0%
Abomey Agonlin Dogbo Grd-pop Lokoss Djougou Ouidah Pobè Porto N Savalou Indiff

Figure 3: Répartition des enquêtés par localité de mariage non souhaité en 2007.

Graphique A2' : Cumule des intentions

Savalou; 2% Indiff; 14%


Abomey; 21% Agonlin; 0%
Porto N; 0%
Dogbo; 1%
Pobè; 1%
Grd-pop; 0%
Lokoss; 4%

Djougou; 3%

Ouidah; 54%

Figure 4:Cumul des intentions de mariage suivant le choix des localités

Inès Y. Olive ZOUNNON 33


Graph A3 : Observation par localité de l'image reflétée par la femme de ouidah dans notre société

120%

Négat; 100%
100%
Négat; 90%

Négat; 80% Négat; 80% Négat; 80% Négat; 80% Positive


80%
Négat
Négat; 70% Négat; 70%
INDIFF
INDIFF; 60% Négat; 60%
60%

Négat; 40%
40%
INDIFF; 30% INDIFF; 30% INDIFF; 30%

INDIFF; 20% INDIFF; 20%


20%
INDIFF; 20%
Positive; 10% INDIFF; 10% Positive; 10%

INDIFF; 10%
0%
Abomey Agonlin Bèbérèkè Dassa Dogbo Djougou Lokossa Ouidah Pobè Porto nov

Figure 5: Répartition des enquêtés selon leur opinion sur la femme de Ouidah en 2007.

Graphique A3 : Cumule des intentions

Positive; 2%

INDFF; 23%

Négat; 75%

Positive Négat INDFF

Figure 6: Perception de la femme Glexwenu par les enquêtés

Inès Y. Olive ZOUNNON 34


Graph A4 : Proportion des hommes de différente localité prêts à épouser une femme de Ouidah

100%
indiff; 10% indiff; 10% indiff; 10% indiff; 10% indiff; 10%

90% indiff; 20% indiff; 20%

80% indiff; 40% indiff; 40%

70%
Non; 50%

60%
Non; 70%
Non; 100% Non; 80% Non; 80% Non; 80%
50%
Non; 30%

40% Non; 80% Non; 80% Non; 40%

30%

Oui; 40%
20%
Oui; 30%
Oui; 20% Oui; 20%
10%
Oui; 10% Oui; 10% Oui; 10%

0%
Abomey Agonlin Bèbérèkè Dassa Dogbo Djougou Lokossa Ouidah Pobè Porto nov

Oui Non indiff

Figure 7: Répartition des enquêtés selon l’acceptation de se marier à une femme

de Ouidah en 2007.

Graphique A4 : Cumule des intentions

indiff; 17% Oui; 14%

Non; 69%

Oui Non indiff

Figure 8:Déclarations d’intentions de mariage avec une femme de Ouidah

Inès Y. Olive ZOUNNON 35


Graghique A5 : Réaction des parents face une future bru originaire de Ouidah

100%

INDFF; 20% INDFF; 20%


90%
INDFF; 30% INDFF; 30% INDFF; 30%

80% INDFF; 40% INDFF; 40% INDFF; 40%


INDFF; 50%

70% INDFF; 60%

60%

50% Contre; 40%

Contre; 70%
40% Contre; 80% Contre; 80%
Contre; 60%
Contre; 70%

30% Contre; 70% Contre; 60%


Contre; 40%

Contre; 40%
20%

10% Pour; 20%


Pour; 10%

0%
Abomey Agonlin Bèbérèkè Dassa Dogbo Djougou Lokossa Ouidah Pobè Porto nov

Pour Contre INDFF

Figure 9: Répartition des enquêtés selon l’opinion de leurs parents sur une éventuelle union avec une femme
de Ouidah en 2007.

Graphique A5 : Cumule des intentions

Pour; 3%

Indifférent; 36%

Contre; 61%

Pour Contre Indifférent

Figure 10: Répartition des enquêtés selon la réaction probable de leurs parents sur un
éventuel projet de mariage avec une femme de Ouidah

En résumé, il ressort de cette enquête exploratoire, que le critère de la


localité est loin d’être une préoccupation des personnes de la vieille époque, et
est fortement actuelle (63% des personnes interrogées considèrent la localité
comme un critère fondamental dans le choix de leur compagne).
La méfiance à l’égard de la femme Glexwenu s’affirme avec vivacité et incite
interrogations surtout quand on se rend compte que l’étude a été réalisée avec
Inès Y. Olive ZOUNNON 36
des jeunes célibataires dont la tranche d’âge varie entre 18ans et 25ans. D’une
façon globale, toutes localités confondues, il ressort que 54% des personnes
interrogées affirment leur hostilité à l’égard de la femme de Ouidah ; 75% ont
une image négative de la femme de Ouidah, 69% ne sont pas prêts à prendre une
fille de Ouidah comme épouse et 61% des parents seraient contre un futur
mariage de leur enfant à la fille de Ouidah, ceci à la première occasion de
rencontre. Il va donc sans dire que les parents, les aînés de par leurs expériences,
leur vécu, leurs images vraies ou fausses à l’égard de la femme de Ouidah
semblent exercer de quelque manière leur influence sur les plus jeunes… il nous
semble donc opportun, en fonction des données recueillies d’affirmer une
certaine pertinence du problème, suffisante pour en faire un objet de recherche.

En outre, dans son ouvrage Anthropologie du Bô, (APOVO, 2005) affirme :


« Ouidah est réputée pour ses bô mauvais : provoquer le divorce, arracher le
mari d’autrui ou même le tuer par jalousie (spécialité des femmes)…les
femmes de Ouidah sont craintes parce qu’elles ne tolèrent pas de coépouse,
elles ont recours au Bo pour éliminer leur mari s’il est riche, ensuite leurs
coépouses parce qu’elles soutiennent toutes qu’elles seules peuvent hériter
les biens de leurs maris » (APOVO, 2005 :110).

Tous ces aspects considérés, il semble opportun de nous intéresser à cette


catégorie de femme, à la réputation dont elle fait objet et au pourquoi de la
méfiance qu’elle suscite.

Inès Y. Olive ZOUNNON 37


CHAPITRE II : METHODOLOGIE
1. Cadre de l’étude
1.1. Délimitation et découpage territorial5

Ouidah est une importante cité historique du Département de l’Atlantique


en République du Bénin. Le nom Ouidah renvoie étymologiquement à
l’ethnonyme utilisé par les Fon d’Abomey pour désigner ses premiers habitants
qui sont les HOUEDAH. Ce vocable sera perçu et transcrit différemment par les
européens : Juda, Ajuda par les portugais (16e siècle), Fida par les hollandais
(17e siècle), Whydah par les anglais (1681-1780) et Ouidah par les français (17e
siècle).
Située entre 2° et 2°15 de latitude Est et, 6°15 et 6°30, dans le
Département de l’Atlantique, la Commune de Ouidah s’étend sur une superficie
de 364 km2. Elle est limitée :
-au Sud par l’Océan Atlantique ;
-à l’Est par la Commune d’Abomey-Calavi ;
-à l’Ouest par la Commune de Grand-Popo ;
- au Nord par les Communes de Kpomassè et Tori - Bossito.
La commune de Ouidah compte dix (10) arrondissements subdivisés en
soixante (60) quartiers de ville et villages.

1.2. Cadre humain

La population de la Commune est composée majoritairement de Fon, de


Nago, de Xuéda et de Mina. Les Xuéda ont été les premiers habitants de la ville
de Ouidah ainsi que de sa région. Les Fon d’Abomey y sont venus en grand
nombre sous le règne du Roi Agadja, qui a conquis le royaume Xuéda de Savi,
et a fait de Ouidah sa façade maritime en 1727 : c’était le principal port de la

5
L’essentiel des données présentées sur le cadre de l’étude est tiré du Plan de Développement Communal de la
ville de Ouidah.

Inès Y. Olive ZOUNNON 38


côte du Golfe du Bénin. Ensuite, il y a eu la migration des commerçants nago et
haoussa du Nigeria.

1.2.1. Groupes socio - culturels

Les grandes composantes socio - culturelles6 de la commune se présentent


comme suit : Fon 69,8% ; Adja 16,5% ; Yoruba 9,0% ; Bariba 0,5% ; Dendi
0,3%. Les Fon et apparentés sont majoritaires dans tous les arrondissements. Il
s’agit essentiellement des Fon, des Aïzo, des Xueda, des Afro-brésiliens et des
Métis. Ils représentent plus de 80% de la population des arrondissements ruraux
et plus de 60% de celle des arrondissements urbains.
Les Adja et apparentés sont plus importants dans l’Ouest de la Commune
tandis que les Yoruba sont implantés dans le centre urbain. Ceux-ci représentent
le second groupe socioculturel de la ville de Ouidah après les Fon.
Les groupes socioculturels dendi et bariba se retrouvent prioritairement
dans les arrondissements urbains. A cela, il faut ajouter les nouveaux groupes
venus du Nigeria, constitués des Oguni et des Ibo installés depuis une décennie.
Ils résident majoritairement dans Ouidah.

1.2.2. Caractéristiques démographiques de la population

La population est passée de 64 433 habitants à 76.551 habitants de 1992 à


2002, soit un taux d’accroissement intercensitaire de 1,88 %, taux nettement
inférieur à celui du département (4,29 %) et même au taux de croissance
naturelle du Bénin évaluée pour la période 1992-2002 à 3,23 %.
Ouidah est une localité où les pratiques ancestrales demeurent vivaces.
Ouidah est le berceau mondialement reconnu du vodoun cependant, on y
observe la cohabitation de plusieurs religions. Les principales confessions
religieuses des populations de la Commune sont : vodouisants (46,7%) ; le

6 Atlas monographique des Communes du Bénin, MISD, juin 2001

Inès Y. Olive ZOUNNON 39


Catholicisme (41,2%) ; l’Islam (3,6%) ; le Protestantisme (1,0%) et autres
(7,5%).
Ces pratiques religieuses se retrouvent sensiblement dans les mêmes
proportions au niveau des arrondissements. Cependant, les adeptes des cultes
traditionnels sont plus nombreux en milieu rural qu’en milieu urbain où les
religions chrétiennes tendent à prendre le pas sur le vodoun. L’influence des
chefs religieux traditionnels est incontestable dans tous les arrondissements.

2. Nature de l’étude

Dans le cas de la présente recherche, l’essentiel des données recueillies


nous permettront de mieux situer de quoi nous parlons. La démarche reste
essentiellement qualitative parce que se fondant prioritairement sur les discours
d’acteurs. Seulement, pour une certaine objectivité, l’utilisation de quelques
données statistiques sera très utile pour mieux appréhender le phénomène que
nous entreprenons de documenter.
En faisant recours dans cette étude à l’histoire, notamment de Glexwe ou
encore de son rapport avec d’autres royaumes tel que celui d’Abomey dont il a
été pendant longtemps le vassal, nous nous situons aussi dans un schéma aussi
bien rétrospectif que prospectif .
En se référant au contexte de production de données essentiellement
qualitatives dans lequel nous nous situons, la confrontation du discours des
acteurs concernés en rapport avec celui du chercheur dans sa démarche
analytique est d’une importance particulière. Tout ceci permettra enfin de
compte de comprendre la fonction d’une telle rumeur liée à la Glexwenu, dans
le système social lui-même unique mais diversifié dans son ensemble.
Enfin, le recours à une autre discipline, l’Indicamétrie (concept élucidé
plus bas), est utile, dans la visée d’une démarche multidisciplinaire parce que ce
qui prévaut quand on décide d’investiguer un fait, c’est de pouvoir saisir en
saisir le sens et les contours dans leur globalité.

Inès Y. Olive ZOUNNON 40


3 .Collecte et analyse des données
3.1. Techniques et outils de collecte

La collecte des données a été faite avec des techniques appropriées que
sont : la recherche documentaire, les entretiens de groupe (focus group pour les
étudiants relativement nombreux), et les entretiens individuels pour les cibles.
Les outils utilisés sont le guide d’entretien pour les personnes ressources (le
guide d’entretien a été choisi ceci en raison des objectifs poursuivis et de
l’importance des différents thèmes abordés). Enfin, le questionnaire a été utilisé
pour toutes les autres cibles identifiées (femmes Glexwenu, hommes de Glexwe,
etc.…). Le questionnaire a été choisi à ce titre parce que nous sommes à la quête
de réponses précises, ponctuelles à partir des questions de même nature. Ainsi,
le questionnaire nous permet d’être prompte, précis et de quantifier un certain
nombre d’éléments importants pour une analyse appropriée. Par ailleurs, les
données recueillies ont été traitées à partir de logiciels spécifiques (Word,
Excel….).
L’analyse des données a été faite au regard des résultats issus du
traitement des données, (Discours hiérarchisés, statistiques) et de l’apport
différents ouvrages à travers leurs auteurs spécifiques. (Confère Références
bibliographiques)
Nous sommes en dernière analyse dans une démarche compréhensive qui nous
permettra de mieux appréhender le phénomène dans ses différents aspects.

3.2. Base de sondage et échantillonnage

Notre univers d’enquête est essentiellement caractérisé par sept catégories


d’acteurs identifiés selon leur relation spécifique à notre objet d’étude. La
technique d’échantillonnage est de type non probabiliste. L’échantillon défini
par les cinq catégories d’acteurs ciblés est de type ‘’boule de neige’’.
En effet, le choix porté sur ce type d’échantillonnage vient du fait que la
présente recherche porte sur un phénomène (la rumeur faisant de la Glexwenu,

Inès Y. Olive ZOUNNON 41


la tueuse de mari) et des acteurs sociaux qui se distinguent réciproquement
selon des caractéristiques précises (âge, origine, préférence, statut etc.).
L’intérêt fondamental porté sur l’échantillon ‘’boule de neige’’ s’explique par sa
simplicité et son caractère pratique, surtout qu’il y a une faible connaissance
d’individus réellement liés aux variables et critères retenus. Il s’est agit : « de
constituer l’échantillon en demandant à quelques informateurs de départ de
fournir des noms ou groupes d’individus pouvant faire partie de l’échantillon. ».
Ainsi, dans le milieu principal d’enquête que constitue Glexwe, l’échantillon a
été constitué de contact en contact (un informateur en informe un autre), de
proche en proche jusqu’à ce qu’on juge l’échantillon complet.
Les différentes catégories d’acteurs ciblés se présentent comme suit :
- Les étudiants célibataires : (tous groupes socioculturels confondus).
La particularité au niveau de cette cible vient du fait qu’à la différence des autres
catégories d’acteurs ciblés, la technique n’a pas été fondamentalement la même
et se distingue par le fait qu’au-delà de la quête d’information par
rapprochement, les individus rencontrés sont souvent en groupes constitués par
origine socioculturelle (6 à 8 selon le cas). Ces étudiants réunis selon l’origine
socio culturelle, sont souvent rencontrés dans le jardin de l’université. Les autres
individuellement interrogés sont rencontrés à divers endroits sur le campus
(jardin, arrêt bus, devant ou dans les amphis, etc.)
Il s’est agi ici, dans l’objectif visé à travers cette catégorie d’acteurs, de partir de
ce qu’on peut appeler ‘’test empirique’’ pour juger de la pertinence et de
l’opportunité de l’étude. (Les résultats et commentaires à l’enquête exploratoire,
sont présentés dans la partie, présentation et analyse de données du document).
C’est en réalité cette catégorie d’acteurs qui nous a permis de fonder l’objet et la
pertinence de la présente recherche.
Le choix de ce groupe cible est cependant lié au fait que les étudiants d’un
certain âge (18 ans à 25 ans) sont considérés comme étant dans une phase
potentielle d’aspiration à une ‘’ âme sœur’’, ce que l’on désigne par le plus

Inès Y. Olive ZOUNNON 42


souvent ‘’petite amie’’, ‘’copine’’ et si ça devenait un peu plus ‘’sérieux’’,
‘’fiancée’’.
Ainsi, le choix de la jeune fille se fait suivant plusieurs critères
spécifiques définis par chacun avec toute l’influence qu’il peut y avoir du côté
des parents, des amis et d’autres proches. Et donc, les acteurs ciblés dans cette
catégorie permettront, de mieux situer la femme du groupe socioculturel le plus
prisé ou le moins prisé selon le cas avec bien sûr la possibilité de comprendre les
motifs justifiant la préférence d’un groupe socioculturel par rapport à l’autre et
précisément pour ce qui nous concerne, Glexwe.

- Les hommes mariés ressortissants de Glexwe et ayant épousé femme


Glexwe ou non
Ce groupe est particulièrement important dans la mesure où les hommes
mariés sont supposés avoir vécu une somme d’expériences relatives qui leur
permettront de nous situer par rapport à la préférence ou non de la femme de
Glexwe. Ainsi, que l’on se situe hors de Glexwe, comme dans Glexwe,
l’évidence est claire : les opinions ne sont pas forcément les mêmes.
De même, ce double aspect de comprendre du dehors comme du dedans
paraît intéressant pour comprendre les similitudes et les divergences d’opinions
sans lesquelles aucun lien, ni aucune analyse ne serait à priori permise.

- Les femmes Glexwenu


Elles sont les plus concernées. Et donc, il est important de savoir ce
qu’elles pensent d’elles mêmes, l’importance d’un mari pour elles ; leur
appréhension de la vie conjugale. Ce qu’elles peuvent permettre ou ne pas
permettre, si devant vivre au sein d’une polygamie ; leurs perceptions par
rapport à la méfiance vis-à-vis d’elles.
- Les autres femmes : (celles qui ne sont pas de Glexwe)
Il est toujours une nécessité de diversifier les informations, de rechercher
les liens de causalité relatifs au phénomène que l’on étudie, ce qui permet de
Inès Y. Olive ZOUNNON 43
confronter les opinions parce que quoi qu’on dise : « il n’y a pas une réalité,
sorte d’étalon de vérité, mais des réalités . Pour se faire une idée, chacun puise
dans son environnement immédiat, dans son propre groupe ou classe ».
(KAPFERER, 1987 :21)

- Les veuves (05 localités retenues)


Il nous parait très utile de nous intéresser aux veuves parce que là encore c’est
une autre réalité. Les veuves chez nous, semblent faire l’objet d’un certain
nombre de clichés liés au décès de leur époux. La mort n’est elle pas que
rarement naturelle dans nos sociétés? De toutes les façons, quelle que soit la
nature du décès, la mort d’une personne proche ou lointaine ne laisse pas
toujours indifférent. Les causes du décès font l’objet de beaucoup de
supputations quoique subjectives ou non. C’est comme un besoin urgent pour le
groupe social de comprendre de quoi tel ou tel est décédé. Apparaissent alors,
pour des raisons objectives ou non des hypothèses pour donner sens à la
situation spécifique. C’est alors qu’il n’est pas rare de voir certaines femmes
accusées du décès de leur époux. Il faille donc pour mieux élucider l’objet
d’étude, interroger l’univers des veuves pour une approche plus diversifiée de la
réalité.
- Les sachants
Les sachants sont des intellectuels en pagne, c'est-à-dire l’ensemble composé
par les bokonons (prêtres fa), les dignitaires, les ‘’sages’’, les tradipraticiens.
La catégorie qui nous intéresse particulièrement dans cet ensemble est : les
bokonons. Ces derniers ont occupé et occupent encore aujourd’hui une place
importante dans nos sociétés de par tout le savoir dont ils sont dépositaires. Il
s’agira de comprendre le profil de leurs consultants et des principaux motifs
de leur recours à la divination et à certaines pratiques occultes, nécessaire
pour mieux saisir les contours et d’autres considérations liées à la rumeur vis-
à-vis de la Glexwenu. Le tableau I rend compte des effectifs constitués par
catégorie sociale et de la taille de l’échantillon.
Inès Y. Olive ZOUNNON 44
- Les personnes ressources
Les personnes ressources ciblées (50 ans et plus) sont de tous les groupes
socioculturels inclus parce que là encore, on peut remonter à l’histoire. Et plus
souvent, les vraies questions sont posées par eux aux jeunes couples naissants.
Cette catégorie d’acteurs est souvent la plus habileté à orienter dans le choix
d’un conjoint ou d’une conjointe. Ne dit-on pas qu’ils sont détenteurs de savoirs,
d’expériences et de témoignages ?

Tableau I : Présentation de l’échantillon


Catégories sociales Effectifs

100
Etudiants ; Célibataires (toute catégorie
confondue, de18 à 25 ans)

10
Hommes mariés de Glexwe ayant épousé ou
non une femme de Glexwe

10
Sachants (bokonons)

10
Femmes de Glexwe (21 ans et plus)

10
Autres femmes (21 ans et plus)

10
Personnes ressources

50
Veuves

200
Total

Source : Données de la phase préparatoire, juin 2O07.

4. Limites et difficultés

Nous passerons ici en revue les problèmes ou difficultés liés à chaque rubrique
du présent travail : (de la méthodologie utilisée aux résultats obtenus)

Inès Y. Olive ZOUNNON 45


Difficultés liées au cadre de l’étude

De toute évidence, des données nécessaires et utiles sur le cadre de l’étude


nous ont été fournies sur le terrain (Glexwe).
Mais la difficulté principale qui fut la notre était compte tenu du caractère
sensible du sujet et de la nécessité de diversifier les points de vue des acteurs
diversement ciblés (dans Glexwe et hors de Glexwe) ; la diversité des groupes
socio culturels à rencontrer (eux-mêmes avec leurs points de vue particuliers).
Les questions fondamentales étaient :
- Devrait – on sillonner différentes localités on se limiter à Ouidah seul ?
(évidemment pas !)
- Faudrait – il alors sélectionner des localités précises et recenser leurs
points de vue par rapport au phénomène ? (une nécessité de diversifier les
informations !)
Au regard de tout ces aspects nous nous rendons compte, que Glexwe
n’est pas en réalité le seul terrain concerné à privilégier par la présente
recherche mais devrait s’étendre à d’autres recherches systématiques en rapport
avec le sujet, dans d’autres grandes cités historiques, autre que Glexwe pour une
part d’objectivité.
En témoigne, les acteurs sociaux de groupes socio - culturels diversifiés
rencontrés avec une immense diversité de points de vue.
Il y a donc un à travers ces différents aspects évoqués, ce qu’on pourrait appeler
des cadres d’études secondaires (il est vrai qu’on ne s’est pas déplacé sur
d’autres localités !) que : le campus (milieu cosmopolite) ; Porto-Novo (où nous
avons rencontré quelques personnes ressources)

4.2. Difficultés relatives à la durée et à l’exécution du calendrier


L’honnêteté intellectuelle voudrait qu’on soit claire. Il y a eu par moment un
certain chevauchement dans le respect assidu du calendrier. Soulignons d’entrée
de jeu, que le début de cette recherche a été très timide, ne sachant réellement

Inès Y. Olive ZOUNNON 46


comment aborder un tel sujet, quelle était la façon la mieux indiquée, le langage
adapté, le choix des mots, les cibles etc. le sujet étant sensible à notre avis. La
plupart de ces difficultés ont été surmontés grâce à une détermination absolue et
avec le concours de certaines personnes ressources.

5. Durée de l’étude

Le temps choisi pour la présente étude s’étale sur une durée de 14 mois
(Novembre 2006 à Décembre 2007). La durée de l’étude quoi que relativement
longue compte tenu du caractère sensible que revêt l’objet sur lequel porte le
sujet de recherche. Il est donc important pour assurer une part d’objectivité
considérable à cette recherche de s’attarder sur des questions essentielles qui
méritent qu’on ne s’y précipite pas - (méfiance liée à la Glexwenu ? La
Glexwenu tueuse de mari ? Etc.…)
L’entièreté du mois d’Août 2007 a été consacrée à l’enquête proprement
dite sur le terrain privilégié : Glexwe.
Ce mois a été choisi parce qu’il se situe dans une période relativement
relaxe où les élèves et étudiants, enseignants sont en vacances, les places
publiques sont peuplées et aussi on a plus la facilité d’approcher ces apprenants
qui dans leur rôle d’intermédiaire, nous ont introduit chez les leurs, sans
compter ses nombreuses autorités qui nous ont tendu leurs mains. Nous
présentons dans le tableau ci- dessous le calendrier de déroulement de la
recherche.

Inès Y. Olive ZOUNNON 47


Tableau II: Chronogramme de la recherche

Période Activités Lieu Personnes impliquées

Novembre 2006 Rencontre Travaux Séminaire


Décembre 2006 préliminaires avec le maître ATROKPOKODJI Etudiants mémorants
de mémoire
Centre de
Janvier 2007 Cadre théorique, lectures et documentation (CCI), Personnes ressources et autres
(cette phase s’étend jusqu’à la entretiens exploratoires bibliothèque personnelle acteurs sociaux.
fin de l’étude) cyber cafés

Mai 2007 1- élaboration des Campus d’Abomey Etudiants


Juin 2007 outils de collecte Calavi (18 – 25 ans)
2- pré enquête
Enquête proprement dite 7. Personnes ressources
6. entretien 8. Femmes Glexwenu
Août 2007 questionnaire (30 Glexwe 9. Hommes Glexwenu
jours) 10. Sachants
11. Hommes d’ailleurs
Septembre - octobre Dépouillement, présentation
Novembre – décembre et analyse des résultats Cotonou

Source : enquête de terrain 2006-2007

Inès Y. Olive ZOUNNON 48


Deuxième partie : PRESENTATION ET ANALYSE DES
RESULTATS DE TERRAIN

Inès Y. Olive ZOUNNON 49


CHAPITRE I : La Glexwenu dans l’imaginaire des
populations locales de Ouidah et des autres
1. Les images et discours : (Hô-Gbé) et (Hô)

« Les expressions ou images sont les particularités idiomatiques les plus aptes à
révéler les richesses littéraires d’un peuple » (QUENUM, 1999 : 48)
Dans les propos rapportés ici, ce que nous appelons (HO-GBE : images,
discours) ne sont rien d’autre que ces expressions qui existent dans l’imaginaire
sociale et que nous avons particulièrement recensé à Glexwe. Ces propos
recueillis lors de l’enquête renvoient à un certain nombre d’images qui semblent
colorer, au quotidien le vécu et les attitudes des acteurs sociaux. :
« GON TCHE DJIN E NAN KPON », qui veut dire : le mari ne regardera que
moi de toute façon)
« OUN KO GO XO TCHO GUI WA HONTO » dont la traduction veut dire je
suis déjà rassasié avant même que l’on amène l’akassa au marché ;
« NOU E WAN NAN DOU O, AMAN OU WE EDE », pour dire que la
nourriture de la chenille se trouve sur la feuille ;
« ILE TANI AGO OUN BO » qui signifie : chez qui se dirige la troupe ?
« CHIGAN WE GNI NON DO, OUN NON DO VEDOME AN ! » qui signifie :
Je ne porte pas de friperie, mais de la super qualité ;
« ASSOU NON DO DJE DO KOLI », se dit de la belle mère qui vient
s’immiscer dans les affaires de couple ;
« YIN DE SOU GLEXWENOU VIA ? », pour dire : Moi-même fille de
Glexwe ?
« YE BIO HA GLEXWENU : E DO XO DE DEOU A » : on demande
l’intimité à la Glexwenu, elle n’y trouve aucun inconvénient ;
« YI KAKA BOYI HAN DOUI BO ZE WA XLEMI » : retourne le mordre et
viens me montrer ;
« KIN NON VOA » : il n’y a pas de limite à la rancœur ou aux querelles ;
« NAN DO BO WE » : je t’attaquerai par des forces occultes.
Inès Y. Olive ZOUNNON 50
2. Une vue sur la personnalité de la Glexwenu
2.1. La GLEXWENU : une réalité ambivalente

Les discours sociaux sur la femme Glexwenu peuvent se classer en deux


catégories à priori distinctes entre lesquelles existent cependant des passerelles
de complémentarité. La première catégorie renvoie à une dépréciation de la
femme Glexwenu tandis que la seconde porte sur une admiration de certaines de
ses qualités qu’elle n’utiliserait pas dans le bon sens.

2.1.1. L’opinion des jeunes et la force du Préjugé

Observons de près quelques affirmations de nos enquêtés (18ans-25ans) :


« j’ai peur des femmes de Ouidah, elles sont possessives et dangereuses ; une
petite erreur de chercher une autre femme, elles t’éliminent… »

« il est interdit de prendre une femme de Ouidah. J’ai un oncle qui de son vivant
a vu sa femme originaire de Ouidah intégrer l’association des femmes veuves.
Cette femme a commis l’adultère avec un proche, elle enterre des choses dans le
salon et l’oncle tombe, cela veut dire qu’elle veut l’éliminer… »

« les femmes de Ouidah sont tellement ambitieuses, si l’homme a des richesses,


elles le tuent pour s’accaparer des biens »

« elles ont criminelles ; des femmes mauvaises ; tueuses de maris ; elles ont tué
des cadres de chez nous ; elles envoûtent les hommes ; leurs hommes deviennent
pour elles des enfants placés… »

« j’entends dire que les femmes de Ouidah sont dangereuses »

« quel que soit l’amour, le jour où ma copine va me dire qu’elle est de Ouidah,
je vais réfléchir, car souvent l’homme ne vit pas longtemps… »

Inès Y. Olive ZOUNNON 51


Les remarques fondamentales qu’on pourrait noter à travers ces affirmations
dénotent que:
A priori, les interlocuteurs ne se fondent sur aucun vécu tangible.
L’analyse de leurs discours révèle un usage abondant du conditionnel. Les
propos du genre ‘’j’ai entendu dire’’ ou ‘’il paraîtrait’’ sont d’un usage récurrent
et trahissent l’incapacité de leurs auteurs à étayer leurs propos.
Un tel constat, s’il renseigne sur le caractère non fondé de la rumeur, n’éclaire
pas sur les processus de sa construction.
Comment cela s’explique t-il que la rumeur vis-à-vis de la Glexwenu en
vienne à s’ancrer dans les consciences au point de convaincre résolument la
plupart de ces jeunes interrogés et devienne ainsi leur ‘’vérité’’ ?
Il est clair qu’à travers tous ces différents aspects du sujet il ne serait pas faux
de parler d’effet Pygmalion, en ce sens que tel que l’explique Jacquot Barivelo
et Vladimir Daupiard7: « c’est le processus par lequel un sujet, à partir des
savoirs acquis, produit de nouveaux savoirs singuliers qui lui permettent de
penser, de transformer et de sentir le monde naturel et social »
Il va sans dire que ces jeunes puisent dans ce qui se dit, se raconte, (souvent
avec conviction par ceux qui en sont l’auteur) autour d’eux, des éléments qui
leur permettent de construire leur propre réalité en fonction de laquelle ils
orientent leurs actions, leur pensées et leurs comportements.
Ou encore ferons-nous mieux de parler pour ainsi traduire la résultante de
tout le processus diffusionnel lié à la conception ambivalente, complexe, et
rarement ‘’positive’’ de la femme de Ouidah dans la société, à la manière de
(ROSENTHAL, 1968) lorsqu’en expliquant l’effet pygmalion il parle des
« prophéties à réalisation automatique » ? C’est-à-dire : « il suffit d’avoir émis
ce préjugé qu’il se réalise. Il ne s’agit pas de magie mais la force que peuvent
avoir les attentes sur le comportement »

7
http://www.reunion.iufm.fr/Dep/listeDep/exposes/effet%20pygmalion.pdf

Inès Y. Olive ZOUNNON 52


Dans ce cas, les parents, les amis, les proches, etc. seraient ceux qui
émettent ou non selon leur vécu, ou ce qu’ils ont entendu dire, ce préjugé qui en
raison de la confiance qu’ils inspirent chez ceux à qui ils le racontent, produisent
chez ces derniers un sentiment d’avoir à leur portée une ‘’vérité’’ à prendre en
compte dans les diverses relations qui les lient à d’autres et particulièrement à la
Glexwenu. Le préjugé en lui-même ne dénote t-il pas presque toujours une
attitude défavorable ou hostile envers d’autres personnes en raison de leur
appartenance à un groupe social ou ethnique et reposant sur des stéréotypes,
généralisations simplificatrices relatives à des groupes humains ?
Mais, même dans les cas où, il semblerait que la rumeur dont la
femme de Ouidah fait objet s’avère ‘’vrai’’, serait-il possible de généraliser
certains faits isolés où des femmes de Ouidah sous motivations spécifiques
réelles ou subjectives se seraient allées à certains comportements (menacer une
coépouse, ‘’tuer le mari’’ ; ‘’empoisonner l’époux ; user de gbotémi ou
mantindjan pour ‘’réduire le mari à sa merci’’ etc.), de parler de la Glexwenu,
vue comme la tueuse de mari ? Ces seules explications suffiraient elles ?

2.1.2. La force de la personnalité et l’exaltation du moi chez la


Glexwenu
Joviale ; entretient bien le mari ; pleine de délicatesse et de tendresse ; belle ;
accueillante ; possessive ; sait tenir son foyer ; entreprenante ; trahit rarement,
sait éduquer ses enfants ; a compris qu’un homme se tient par la gueule et non
par la queue ; n’aime pas l’injustice… Ces différentes qualités reconnues à la
femme Glexwenu n’induisent pas pour autant, une attitude favorable à son
égard. L’unanimité semble se faire sur le caractère dérangeant de certains des
traits distinctifs qui auraient pu être des qualités admirées en la femme
Glexwenu. Les enquêtés déplorent en effet une trop grande exaltation du
« moi » chez la Glexwenu.
Pour comprendre cette exaltation du moi, il faut se référer au langage
populaire et à ce que ces femmes pensent d’elles-mêmes. En effet, 100% des
Glexwenu déclarent être fières d’être de Ouidah. Elles avouent ne pas supporter
Inès Y. Olive ZOUNNON 53
l’injustice et la trahison des hommes. Elles déclarent pour la plupart leur jalousie
et leur possessivité. Ainsi, à la question, que représente un mari pour vous ?
Leurs réponses sont toutes simples et se rejoignent :
- ASSOU O WI WÈ EGNI BO DO TA ! (Un époux est comme une protection,
une sorte de dignité qui recouvre notre tête)
- ASSOU O E NON WLI BO NAN WE (le mari, on en prend soin)
- ASSOU O, E TCHI TO KPO NON KPO NOU ME (l’époux est à l’image du
père et de la mère)
A la question : que ne supporteriez vous pas que votre homme vous fasse ? Elles
répondent à près de 80% : ‘’me tromper avec une autre femme ; ne pas me
reconnaître ma place. Seulement, il peut me tromper à mon insu’’.
La particularité chez les femmes rencontrées est qu’elles semblent pouvoir
laisser libre cours à leur époux de les seconder d’une autre femme, mais à
condition qu’elle ne subissent pas d’injustice, qu’elle soient mieux entretenues,
et que la venue de l’autre n’enlève rien à ses droits antérieurs et surtout que
l’autre femme reste à sa place et ne lui cherche noise.
Toutes ces réponses témoignent de l’intérêt que la Glexwenu accorde à son
époux et informent, tout aussi bien, sur son degré de jalousie et de possessivité.
Devrait-on documenter ce que c’est que la jalousie et la possessivité et quels en
sont les contours ? Nous ne saurions véritablement en faire grand débat, mais
partir de quelques définitions et faire quelques analyses.
« La jalousie est ce sentiment étrange qui prend possession de
l’amoureux (se), lorsqu’il (elle) craint que l’amant(e) ne le trahisse. Justifiée ou
non, cette inquiétude parasite violemment la relation. Chaque regard du
partenaire à un(e) autre, chaque rendez vous, aussi anodin soit-il, déclenche la
suspicion. Mais les raisons qui conduisent à la jalousie ne sont pas toujours
communes aux deux sexes : tandis que la femme jalouse s’angoisse d’être
laissée pour compte, l’homme vit la jalousie comme une perte de sa puissance.
Dans les deux cas, pourtant, les jaloux poursuivent de leur haine amoureuse
non seulement leur partenaire, mais aussi l’hypothétique rival(e). (…) La
Inès Y. Olive ZOUNNON 54
jalousie est une émotion empreinte d’agressivité envers une personne dont on
se figure à tort ou à raison, qu’elle possède quelque chose que l’on n’a pas ou
que l’on désire. Par extension, dans le cadre d’une relation amoureuse, la
jalousie est la conséquence de la peur de perdre l’être aimé ou
l’exclusivité de son amour, au profit d’une autre personne sentiment qui peut
être fondé sur l’imagination. Dans les cas extrêmes (paranoïa, agressivité
permanente) elle est attachée à une relation ‘’amoureuse’’ sur un mode
possessif… »
Angoisse, crainte, haine, agressivité sont donc des émotions émanant
de l’expression de la jalousie, ces émotions sont dirigées vers le partenaire, mais
aussi la ‘’rivale’’. L’encyclopédie Fa à travers certains ‘’du’’ nous instruit sur
les conséquences qui peuvent découler de la jalousie et de ses émotions
manifestes¨ : Wlin mèdji préconise l’équité au foyer polygame tandis que Gbé
loso recommande la discrétion de la femme (ogbé irosun avait cru qu’il pouvait
contrôler le comportement de sa femme qui finit par mourir de son indiscrétion
et de sa trop grande assurance.)
Par ailleurs, observons quelques affirmations qui témoignent de
l’exaltation du moi chez la Glexwenu et de la méfiance qu’elle peut susciter :
« GON TCHE DJIN E NAN KPON » (le mari ne regardera que moi de toute
façon)
« OUN KO GO XO TCHO GUI WA HONTO » (je suis déjà rassasié avant
même que l’on amène l’akassa au marché)
« NOU E WAN NAN DOU O, AMAN OU WE EDE » (la nourriture de la
chenille se trouve sur la feuille).
« ILE TANI AGO OUN BO » (chez qui se dirige la troupe ?)
« CHIGAN WE GNI NON DO, OUN NON DO VEDOME AN! » (Je ne porte
pas de friperie, mais de la super qualité)
« YIN DE SOU GLEXWENU VIA ? » (Moi-même fille de Glexwe ?)
Ainsi, la dominance du moi, l’influence de l’autre par le recours aux
forces occultes, le sentiment de n’avoir besoin de personne, aussi une certaine
Inès Y. Olive ZOUNNON 55
marque dans le langage qu’être de la cité Glexwe n’est pas rien ; sont quelques
attributs qui semblent découler de ces affirmations qui sont fréquentes chez la
Glexwenu et qui pourraient expliquer un ou plusieurs des pourquoi de la
méfiance nourrie à son égard. Il convient avant de s’interroger sur la cité Glexwe
elle-même de faire un point sur la force du verbe. En effet, la parole en tant que
force est très explicitée dans l’encyclopédie Fa par la double entité divinatoire
(double ‘’du’’) LOSO AKLAN ou IROSUN OKANNAN en yoruba. Ce "du"
enseigne que la parole peut devenir nuisance, il faut la contrôler.
La légende raconte : « la salive, lorsqu’elle est conservée dans la bouche,
devient visqueuse : c’est la bave. L’eau gardée longtemps dans la bouche,
lorsqu’on ne la crache pas, devient visqueuse : c’est la bave. L’alcool, dans la
bouche, lorsqu’on ne la crache pas, devient visqueux : c’est la bave. Seule la
parole a un devenir différent. Dans la bouche, elle ne devient pas visqueuse. On
ne la crache pas et si on ne sait en user, elle peut entraîner la mort. LOSO
AKLAN dit d’être prudent lorsqu’il s’agit de parler dans le monde. Si tu ne
veux pas que ta parole devienne cause de mort pour toi va chez babalao et Ifa te
prodiguera des conseils. » (ADJOU MOUMOUNI, 2003 : pp94-95)
La leçon que l’on peut tirer du mythe de cette double entité divinatoire, est que
ce qui sort de nos bouches en tant que parole doit être mesuré et contrôlé pour
éviter qu’il ne nous soit préjudiciable et qu’il ne constitue un objet de méfiance,
d’intrigue et même de peur pour ceux qui nous entourent. On peut alors estimer
que la Glexwenu est victime de ce qui sort de sa propre bouche, de sa parole qui
devient l’arme par laquelle elle fait objet d’une rumeur ‘’calomnieuse’’ et
‘’destructrice’’ de son image dans le corps social. Peut-être devrait elle faire
sienne la maxime qui veut que l’on remue sept fois sa langue dans la bouche
avant de parler !

3. La Glexwenu, le Gbotémi, le mantindjan, le gbass, le bô…

Les propos qui suivent constituent les énoncés justificatifs le plus souvent
utilisés par les personnes qui stigmatisent la femme Glexwenu :
Inès Y. Olive ZOUNNON 56
« Elles fréquentent les charlatans » ;
« Elles mettent des produits dans leur vagin pour que l’homme soit à elles
seules » ;
« Elles font gbotémi » ;
« Ce sont les filles qui adorent les pratiques occultes pour s’accaparer de leur
mari et avoir ses biens » ;
« Si les envoûtements ne marchent pas, elles font disparaître le mari » ;
« Parfois, elles usent de verres cassés moulus comme ‘’poison lent qu’elles
mélangent au repas du mari pour l’envoyer petitement dans la tombe » ;
« Elles aiment le bô ».
Ces différentes expressions sont revenues très souvent dans les propos de nos
différents interlocuteurs et font partie des constantes les plus fréquentes. Le vécu
de la ‘’femme Glexwenu’’ semble s’assimiler à l’envoûtement, au poison, à
l’accaparement et à la disparition de son mari, au bô, bref aux ‘’pratiques
occultes’’.
En effet, le gbotémi, le gbass, l’envoûtement, le poison sont l’endroit et l’envers
d’une même réalité : le bô. Le bô est : « la pratique par laquelle l’homme arrive
à forcer la nature pour faire sa volonté. (…) un objet naturel que l’homme
transforme en un objet symbolique pour en faire un objet culturel. (…) le
pouvoir psychologique dont l’individu investit ce symbole lui permet de se
sentir en sécurité, de vaincre sa crainte, sa peur de l’environnement physique
et son anxiété, son angoisse issue de la vie en société, en collectivité »
(APOVO, 2005 :88). L’auteur distingue en effet deux catégories de bô selon les
besoins : le ylo (qui signifie en fon, appeler ou faire venir, qui est utilisé pour
donner la chance, faciliter la réussite, le succès. Il donne la prospérité dans les
affaires, en amour et dans les études. Il a diverses formes : savon de toilette que
l’on utilise dans des conditions précises ; voie alimentaire ‘’gbotémi’’ (écoute
moi) etc.) et le glo (dont on distingue le ‘’bô d’attaque’’, le ‘’bo de protection’’,
les ‘’retours à l’envoyeur’’).

Inès Y. Olive ZOUNNON 57


Le gbotémi ou le gbass seraient donc utilisés par certaines femmes pour
détruire le foyer d’autrui, maintenir un amant en le rendant soumis, se faire
choyer par son mari, récupérer le mari qu’on a perdu, s’attirer énormément de
soupirants etc.
Cependant, si le gbotémi ou le gbass sont une façon d’enivrer de
nourriture un époux ou un amant selon qu’on veuille le garder uniquement pour soi,
on comprend la double fonction de ces deux techniques : se faire aimer et détruire.
Mais si cette pratique s’étend beaucoup plus aux femmes, cela suffirait-il pour en
faire porter l’étiquette uniquement à la Glexwenu ? Mais, même si on s’accordait à
reconnaître la Glexwenu comme le prototype même du gbass ou du poison, il reste
toujours à accorder de la pertinence à une question fondamentale : dans la pratique du
bô, ne peut il pas arriver que la femme se trompe de dosage par exemple en agençant
mal les produits à elle remis par le bôto (le praticien du Bô)? Ou encore que le faiseur
de bô pour la garder pour lui, la fasse victime d’une duperie au point de l’aider par
ses ingrédients à assassiner son époux, car comme l’affirme APOVO (2005) : « dans
l’atlantique, on rencontre souvent des truands en Bo ».
Les propos recueillis auprès des femmes Glexwenu elles –mêmes
semblent aller dans le même sens que les propos des autres acteurs. Le tableau
qui suit en rend compte.
Tableau III : Opinion des femmes Glexwenu sur leurs conduites en situation de concurrence conjugale

Êtes-vous Convaincue
excessivement d'avoir perdu Avez-vous des
jalouse, Êtes-vous votre mari au amies ou des
possessive, capable d'user profit d'une connaissances
capable à tout de forces autre, ou pour veuves
pour garder votre occultes pour toute une autre originaires de
mari? régler des raison, êtes- Glexwe
problèmes vous capable soupçonnées
conjugaux? par vengeance d'avoir tué leur
de tuer votre mari
mari?
Oui 90% 80% 95%
Non 10% 10% 100% 5%
Indécises 10%
Récapitulatif 100% 100% 100% 100%

Inès Y. Olive ZOUNNON 58


S’il est vrai que le Bo n’est pas l’apanage de Ouidah et qu’en la matière, il
existe des groupes sociaux plus redoutés, il importe de se demander pourquoi
est-ce qu’une telle rumeur se rapporte spécifiquement à la Glexwenu.
Jean Marie APOVO rapporte la crainte que suscite les Hollis : « nul d’ailleurs
n’ose s’affronter à un holli même par amusement car les holli ont pour
réputation d’éliminer physiquement leurs adversaires par des forces, des moyens
occultes » ? (APOVO, 2005 :115). Agonlin dans ses pratiques occultes encore
vivaces n’est il pas craint aussi ? Mais alors, s’il est des régions qui suscitent
autant méfiance rien que par ce qui s’y passe en matière de pratiques occultes,
pourquoi Glexwe est-il autant indexé ?
L’auteur lui-même affirme dans ses pages : « Ouidah est réputée pour ses
Bo mauvais : provoquer le divorce, arracher le mari d’autrui ou même le tuer par
jalousie (spécialité des femmes) » (APOVO, 2005 :110).
Est-ce parce que Ouidah est réputée pour ses Bo mauvais qu’on dit de ses filles
qu’elles sont « tueuses de maris » ou encore parce qu’elles font plus recours aux
pratiques occultes ? On ne saurait répondre à ces questions avec objectivité tant
on n’aura pas à portée de main des données statistiques fiables sur le statut
social des femmes qui font recours aux pratiques occultes dans Ouidah (les
bokonons rencontrés pour la plupart ne disposant d’un registre d’enregistrement
de leurs clients) et d’autres données comparatives du même type, de régions
autres que Ouidah. Toujours est-il cependant, que les Bokonon, déclarent tous
que les femmes les fréquentent énormément même si les raisons de leurs
fréquentations sont diverses. Une telle attitude sans doute connue des autres
localités, a probablement contribué à la construction de la rumeur.

Inès Y. Olive ZOUNNON 59


70%

mal adi e; 60% mal adi e; 60% myst èr e; 60%


60%

myst èr e; 50% mal adi e; 50%


50%

40%
mal adi e; 40%
accident
myst èr e; 30%
myst èr e; 30%
acci dent ; 30% acci dent ; 30% maladie
30%

mal adi e; 20%


myst èr e; 20%
mystère
20%

acci dent ; 10%

10%
acci dent ; 10%

acci dent ; 0

0%

Porto novo Lokossa Abomey Agonlin Ouidah

Figure 11: Répartition des veuves selon la cause du décès de leurs maris par localité en 2007

Le graphe ci-dessus traduit une répartition des veuves (10 veuves par localité
choisie) selon les causes du décès de leur époux. Les causes retenues pour
l’enquête sont : maladie, accident, mystère. Les veuves interrogées déclarent
avoir partagé avec leur époux une vie de couple dont la durée varie entre [15 ans
et 30 ans]. On constate que les causes liées à un cas d’accident sont moindres,
celles qui se réfèrent à une maladie sont d’un pourcentage relativement élevé
alors que les décès survenus de façon mystérieuse restent les plus prononcés.
(Agonlin 20% ; Abomey 50% ; Porto-Novo 30% ; Ouidah 60% ; Lokossa 30%).
Ouidah et Abomey sont les localités les plus indexées en matière de décès
mystérieux. Les veuves qui se situent dans ce schéma déclarent ne pas pouvoir
dire exactement à quoi est dû le décès de leur mari et l’attribuent à un mystère :
« ses parents l’ont tué ; il s’est disputé avec un membre ou un proche ; c’était
une affaire de parcelle ; il ne souffrait de rien ; il a fait l’objet d’une menace ; il
souffrait d’une maladie dont personne n’en connaissait les causes…). 80% de
ces femmes déclarent avoir été soupçonné d’avoir tué le mari. Seulement 10%
de ces femmes déclarent que leurs maris avaient des biens. Les autres femmes
déclarent vivre dans une pauvreté remarquable avec leurs enfants, ceci du vivant
même de leur époux. En outre, remarquons déjà à partir du graphe que les morts

Inès Y. Olive ZOUNNON 60


‘’mystérieuses’’ ne renvoient pas toujours aux localités à pourcentage
prépondérant comme Abomey et Ouidah, mais s’étend à toutes les localités
rencontrées.
Un certain nombre de questions se posent cependant :
Pourquoi les décès sont ils attribués souvent à un mystère si ce n’est pas le cas
d’une maladie ou d’un accident ? La mort est elle rarement naturelle dans nos
sociétés ? A quoi est dû le mystère auquel on a tendance à attribuer les décès ?
Le fait que la prépondérance des pourcentages des localités Ouidah et Abomey
soit remarquable signifie t-il ces femmes aient tué leurs époux ou encore qu’il y
a plus de décès dû au mystère dans une localité que l’autre? Dans ce cas même,
quelle explication trouverait-on ? La question est complexe.
Dirons nous que l’ambigüité qui plane sur le décès de certaines personnes
(c'est-à-dire qu’on ne sait pas de quoi ils sont exactement décédés) est
susceptible de faire naître une rumeur qui comme le définit ALLPORT et
POSTMAN (1976) dans leur formule célèbre R= i x a. (R= rumeur ; I=
incertitude ; A= ambiguïté). L’incertitude qui découle de la non connaissance
de la nature exacte du décès de quelqu’un (époux) peut toutefois conduire à
ventiler la rumeur selon laquelle, un mari serait tué par sa propre épouse surtout
si cette dernière est de Ouidah.
De toutes les manières, les données recueillies nous montrent clairement
qu’il ne s’agit pas d’une réalité propre aux femmes de Ouidah, encore que selon
leurs propos 80% de ces femmes affirment avoir été soupçonnés du décès de
leur époux. Il est de toute évidence que ce n’est pas un fait banal. Mais, tout ceci
traduit comment pourrait être le processus de construction et de diffusion d’une
rumeur.
La complexité de la question nous amène sans pour autant trouver une
explication objective à nous référer à Ifa pour mieux saisir les réalités multiples
et ambivalentes de la mort, de la femme :
- personne ne peut échapper à la mort, tôt ou tard, elle se présentera à vous
(yeku fo trukpin)
Inès Y. Olive ZOUNNON 61
- de simples vers de terre peuvent causer des dégâts entraînant la mort (woli
tula)
- la mort guette l’époux de la femme infidèle (gbé woli)
- par ta bouche, tu peux allumer le feu, par ta bouche, tu peux déclencher la
guerre (winlin ti fu)
Toutes ces paroles de sagesse tirées du Fâ, loin de nous inviter à rendre
responsable quelqu’un de la mort d’un tiers, nous invite à la vigilance, à
l’observance des lois de la nature, à côtoyer la mort sans en avoir peur, à faire
attention à ce qui sort de nos bouches (nos soupçons justifiés ou injustifiés), à se
méfier de l’homme mais aussi de la femme. C’est en un mot une question de
« savoir vivre ».

Inès Y. Olive ZOUNNON 62


CHAPITRE II : Histoire politique et mutations socioéconomiques
observées à Ouidah : les sources probables de la rumeur

L’examen de l’histoire de la ville de Ouidah, tant du point de vue de sa


constitution que du point de vue de ses relations avec les autres régions fournira
sans nul doute des éléments de compréhension de la rumeur qui prévaut au sujet
de la femme de Ouidah.

1. Le cas de Savi sous Dè Houffon et Abomey sous Agadja

« Fondée et habitée par des cultivateurs HUELA de SAHE, Glexwe qui n’était
qu’une ferme au 16e siècle vit le jour sous le signe oraculaire GBE-SA ».(
IROKO, 2003 : 59). Cette thèse est corroborée par de nombreux écrits. Elle
révèle que la ville de Ouidah ne fut pas créée sur fonds de conflits
hégémoniques, contrairement à ce qu’on peut noter dans la constitution de
plusieurs autres royaumes. Un tel constat ne permet pas cependant de tirer une
conclusion sur la nature des relations entre ce royaume et les autres. Seul
l’examen de l’histoire politique permettra de le faire.
Le retour à l’histoire des rivalités antérieures entre royaumes parait d’une utilité
remarquable pour comprendre les origines probables de la rumeur sur la
Glexwenu. Il est clair que nous ne saurions lister toutes les séries de rivalités, de
guerres entre différents royaumes dans le Bénin précolonial, mais nous en
retiendrons principalement, celles qui opposaient Abomey et d’autres royaumes,
y compris Ouidah. Glexwe a-t-il été impliqué dans des rivalités dont les
‘’séquelles’’ constitueraient des motifs suffisants à la formation dans le corps
social de stéréotypes, d’étiquettes vis-à-vis d’elle et, par ricochet, de ses
femmes ? Glexwe a-t-il livré des guerres à d’autres royaumes voisins dont les
ressortissants nourrissaient jadis, une haine quelconque et dont les
manifestations seraient encore présentes et vivaces dans les esprits aujourd’hui ?

Inès Y. Olive ZOUNNON 63


Les rivalités antérieures entre royaumes sont-elles une explication
probable à la naissance et à la propension de telles étiquettes, manifestes encore
de nos jours ?
En effet, à l’enquête exploratoire faite auprès de 100 étudiants de
différents groupes socio culturels, nous relevons ce qui suit :
Seulement 10% des interlocuteurs de Dogbo et 10% de ceux de Porto-Novo
affirment avoir une image positive de la femme Glexwenu. Ainsi, dans l’ordre
évolutif des pourcentages d’expression négative vis-à-vis de la femme de
Ouidah, nous avons :
Dogbo 80% ; Porto-Novo 60%; Bembèrèkè 70% ; Abomey 80% ; Ouidah
40% ; Pobè 90% ; Agonlin 100%. Le pourcentage d’indifférence des
interlocuteurs (étudiants ressortissants de Ouidah) par rapport à leur
conception de la femme de Ouidah est 60% contre une variation de 10% à
30% pour ceux des autres localités. Mieux, les statistiques enregistrées nous
montrent une hostilité réelle, simultanée et doublée des localités (Bembèrèkè,
Dogbo, Djougou, Lokossa, Porto-Novo) face aux localités Abomey et Ouidah.
Les ressortissants des localités d’Agonlin (100%) de Dassa (60%), de
Lokossa (50%) et de Pobè (100%) apparaissent comme les plus hostiles à
Ouidah. En outre, lors de l’enquête proprement dite réalisée à Ouidah, 40% des
hommes mariés (40 ans et plus) ont déclaré ne pas être prêts à se remarier avec
une Glexwenu si l’occasion se présentait à eux. (Pour les 60% autres, ça va de
soi, pourquoi pas !). A partir de ces quelques statistiques, nous voyons que
Ouidah et Abomey sont les localités les plus indexées en matière d’hostilité et
on s’aperçoit ensuite que toutes les autres localités expriment un pourcentage
assez élevé quant à la réticence à l’envie d’aller prendre une Glexwenu. Le plus
significatif de ces quelques pourcentages est que ces informations ont été
obtenues à partir de jeunes étudiants (18 ans – 25 ans) célibataires, supposés
n’avoir jamais épousé une femme Glexwenu, mais qui à partir d’histoires
entendues ou rapportées, affirment à 75% nourrir une méfiance à l’égard de la
Glexwenu, avancent à 65% n’être pas prêts à prendre une femme de Ouidah. ?
Inès Y. Olive ZOUNNON 64
Il s’impose de procéder à une analyse historique, pour voir si les villes de
Porto-Novo, d’Agonlin, de Dogbo, de Lokossa et de Pobè, dont les
ressortissants sont particulièrement hostiles à Abomey et Ouidah, auraient eu
des démêlés avec elles.
Dans son ouvrage, Les amazones, éditions Rochevignes, 1984, Hélène
d’Almeida Topor en décrivant la bravoure des amazones, a recensé les
différentes guerres qui ont opposé Abomey et d’autres royaumes. Nous retenons
chronologiquement quelques unes:
- 1708 (attaque des ouémènu par les danxomènu)
- 1728 (attaque et prise de Savi où régnait le roi Dè Houffon, sous Agadja)
- 1782 (attaque des Yoruba de Tchetti, de Djaloukou, d’Agouna)
- 1819 (attaque des Mahi, et des Yoruba d’Oyo)
- 1829 (nouvelle attaque contre les Mahi….)
- 1840 (attaque de Attakpamè avec sa soumission totale à Abomey en
1849)
- 1851(révolte d’Abéokouta)
De toutes ces attaques, il apparaît clairement que Ouidah à proprement
parler, loin d’avoir déclaré la guerre à Abomey, a été conquise en 1727-1728
en devenant vassal d’Abomey. Hélène d’Almeida Topor rapporte la défaite
de Ouidah : « Les sources orales recueillies récemment chez les houéda par
le professeur Emmanuel Karl confirment cette ruse d’Agadja et montrent les
moyens magiques et matériels qui conduisirent Houffon à sa perte. Les
événements sont contés ainsi par les descendants des victimes (dont nous
avons conservé la façon de parler) : « Dè Houffon eut affaire à Agadja. Le roi
a décidé de casser Savi et d’en expulser les habitants. Mais notre roi n’était
pas le dernier venu. Il avait des puissances. Il possédait en effet deux sossi
(queue de cheval), une noire, (…) une blanche. Quand les fons attaquent et
que les siens alarmés accourent pour l’en avertir, Dè Houffon se mettait et
leur disait : « laisser les faire». Et lorsqu’il prenait le sossi noir et l’agitait, les
aboméens tombaient raides morts. Il n’y avait que les chefs de guerre et
Inès Y. Olive ZOUNNON 65
quelques dignitaires qu’ils laissaient vivants. Les aboméens inquiets
décidèrent de lui donner une femme à épouser. Ils lui ont donné une fille en
mariage. La fille est venue elle-même d’Abomey pour l’épouser. Malgré ce
mariage, Agadja venait pour le casser. Dè Houffon disait à sa femme
aboméenne : « comment ton père peut il encore me casser ? Enfin tu ne feras
rien contre moi ! Hein ! ». Et dès qu’il laissait la femme dans la chambre
pour sortir, les hostilités tournaient mal pour les aboméens. Cette constance
des revers étonnait toujours les aboméens. Mais la femme de Dè Houffon et
son royal père étaient de mèche dans un complot. La femme faisait des gris
gris pour obtenir les secrets de son mari. Un jour, la femme le mit en joie en
l’enivrant copieusement. Le roi vendit alors la mèche en disant : si j’agite
cette queue, les ennemis meurent. Si j’agite celle-ci, nos hommes morts sont
ressuscités. La femme dit : c’est bien ! Et Houffon continua : « les chiens de
fusil que tu vois là, si je les place sur les fusils, eh bien ! Ils tirent et les
ennemis sont défaits ». La reine aboméenne envoya des émissaires à son père
Agadja. Ce dernier réussit à trouver des queues de cheval semblables point
pour point aux deux autres et à les renvoyer à sa fille. Dè Houffon avait un
oreiller où il cachait ses richesses en or pierres précieuses. La femme réussit
à percer les secrets de cet oreiller. Elle se décida à agir. Le jour venu, elle dit
à son mari : « c’est la fête des coutumes annuelles dans ma patrie, et je
voudrais m’y rendre d’ici quelques jours. ». Quand elle eut dit cela, elle
commanda de moudre du maïs, elle en fit des akassas et y plongea les chiens
de fusil qu’elle déroba dans l’arsenal de son royal mari. A peine cette femme
est elle arrivée à Abomey, que son père décida une expédition contre Savi.
Dè Houffon, averti de l’attaque, ne s’inquiète pas autrement. Il alla jeter un
coup d’œil sur ces sossi qui dieu merci se trouvaient semble t-il à leur place.
Mais poussant plus loin ses investigations, il alla s’assurer que les chiens de
fusil étaient bien là, eux aussi. Il n’en trouva aucun. Mais qu’importe. Il
comptait sur ses deux sossi. Mais la femme qui fit le coup se nommait Ma
guézé. C’est le début de la phrase Ma guézé tcho bo e glo : « je veux être à
Inès Y. Olive ZOUNNON 66
l’aise sans y parvenir », cela signifie qu’elle a tout tenté pour dominer son
mari sans y parvenir. C’est Na guézé qui a été la cause de la chute de
Savi… » (p156).
Deux éléments essentiels se dégagent de ce témoignage:
- la chute de Savi qui serait causée par la ruse d’une femme d’Abomey
‘’Naguézé’’
- la ‘’ruse’’ du roi Agadja face au roi Dè Houffon, n’ayant que pour seul
but d’agrandir son pays et avoir une façade maritime en offrant sa fille en
mariage au roi de Savi: « après la mort du roi Houffon, Agadja obtint une
victoire complète sur le royaume de Savi en utilisant des troupes
féminines. La conquête de cet Etat vaut au roi du Danxomè le surnom de
Hounyito (ou Hounto), « celui qui prend le chemin des bateaux », (…).
Cependant, même si toutes ces interrogations trouvaient réponses par
l’affirmative, cela aurait-il suffi pour dire de la Glexwenu qu’elle serait
tueuse de mari ?
Une chose est claire, la caricature de la Glexwenu diabolisée aujourd’hui
correspond aux attributs de la Na guézé d’hier : femme rusée ; tenant
l’homme par son ventre ; perce les secrets de son mari ; fait des gris gris ;
trahit son mari ; s’accapare de ses biens etc. Mais, la Na guézé, femme ayant
vécu à Ouidah, symbole de ruse et de trahison n’était-elle pas d’Abomey ?
Pourquoi, si c’est le cas, se substituerait-elle dans ses attributs, à la
Glexwenu ?
Le souvenir de la traîtrise de Naguézé n’est certes plus vivace à Ouidah mais
l’on peut établir un parallèle entre cette dernière et la persistance de la
rumeur. En effet, si les jeunes n’évoquent jamais ce fait dans leurs énoncés
justificatifs, les sachants et les personnes âgées en parlent. Ces derniers
parlent d’une probable transmission du ‘’virus’’ de la trahison à la
progéniture de Naguézé et d’une éducation à la trahison qu’elle aurait faite à
ses filles. Un enquêté affirme à ce propos : « lorsqu’une poule dort sur le
mûr, il est certain que ses petits dormiront sur l’arbre ». En outre, on a
Inès Y. Olive ZOUNNON 67
assisté à un puissant mouvement de migration de certaines familles
d’Abomey en direction de Ouidah à la suite de la conquête de Savi. Etant
donné que le royaume d’Abomey a été particulièrement belliqueux à
l’époque précoloniale, l’on pourrait conclure à une généralisation du
jugement d’hostilité porté sur la femme d’Abomey à toutes les autres femmes
de Ouidah.
En réalité, Ouidah conquise par Abomey permit à ce dernier d’étendre son
hégémonie et ses territoires. Cependant, retenons les deux éléments
‘’essentiels’’ sus évoqués, dans l’histoire et essayons d’en faire quelques
analyses :
- la ruse de la femme d’Abomey Naguézé qui dû trahir son mari le roi
Houffon pour permettre à son père Agadja d’avoir main mise sur Savi,
conséquence :
« Pour les hxéda, ce n’est pas dans le rapport des forces entre les deux Etats
que réside l’explication de leur chute, mais dans la ruse d’une femme qui
parvint à percer les secrets de son mari et à détruire les forces occultes qui
constitueraient l’essence même de sa puissance royale » (p156).
- ou encore, l’autorité et le rôle que Ouidah a joué dans la traite :
« Ouidah n’a pas été le premier et le seul port par excellence de la
traite, de bout en bout durant toute la période, mais il semble avoir
connu des heures de suprématie notamment au 18è siècle », lui aurait-
elle valu cette étiquette de région à craindre, hostile quand au rôle
qu’on y jouait à une certaine période (on y vendait des esclaves !), au
point de laisser cette image complexe chez certains peuples, image qui
se serait peut être étendue à ses ressortissants et principalement à ses
filles ? Et pourtant : « les partenaires noirs provenaient parfois du
milieu Yoruba, mais en général de l’aire culturelle Ajatado dans la
mesure où les entités politiques dont ils étaient des ressortissants,
appartenaient à ce même espace socio culturel. Rois, princes,
dignitaires, marchands, courtiers, ils étaient des hxla, qui des hxéda,
Inès Y. Olive ZOUNNON 68
qui des fons, qui des aïzo ou guns etc. les hxla entretenaient de surcroît
des liens particuliers avec les négriers blancs, puisqu’ils étaient passés
maîtres dans la pratique du canotage (…) » (IROKO, 2003 : 65) ; et
donc, enlevant à Ouidah, l’habit du seul vendeur d’esclaves.
De toute manière, on ne saurait trancher toutes ces interrogations dans la
mesure où, même si Ouidah est reconnue comme le port par excellence de la
traite et connut une certaine notoriété parce qu’ayant été très tôt au contact
avec les blancs, il ne constitue pas le seul peuple ayant participé à la traite, et
donc on note dans les récits historiques la contribution d’autres peuples, fons,
aïzo, gouns en tant que courtiers, rois, dignitaires ou autres…..
Il paraît difficile de trancher la question de l’origine de la rumeur sur la
Glexwenu, et de toutes les manières, la complexité de l’origine de la rumeur
est évidente et il semble bien trop facile de l’attribuer aux seules rivalités
antérieures entre royaumes, notamment Abomey et Savi.

2. L’histoire sociale de la femme de Ouidah

Glexwe dont la fondation remonterait au XVI è siècle (vers 1580) n’était


alors « qu’une petite ferme que côtoyait le sentier conduisant de sahé (plus tard
Savi) à la plage distante de cette capitale de moins d’une quinzaine de
kilomètres. (…) La localité naissante était évidemment sous l’autorité de la
capitale Sahé dont-elle ne tarda pas à devenir le pôle économique, le centre
commercial par excellence. C’est dans ce contexte que Glexwé appelé par la
suite Ouidah par déformation de l’éthonyme Houéda – Houéla - fut
progressivement intégré dans le commerce triangulaire et plus particulièrement
dans la traite des noirs. » (IROKO, 2003 :59)
Ouidah connut une émergence impressionnante avec le fait qu’il était un
des plus importants ports négriers de la côte des esclaves : « Ouidah n’était pas
le seul port négrier de cette côte, il n’était non plus le plus ancien, en dépit de la
fortune singulière qui fut la sienne par la suite » (IROKO, 2003 : 57). En effet,
Ouidah est considérée aujourd’hui comme une cité historique qui abrite
Inès Y. Olive ZOUNNON 69
plusieurs ensembles humains. A Ouidah, on retrouve généralement deux
groupes socioculturels : les Pedah ou Houéda encore appelés Kpassèvi (les
enfants du roi Kpassè) considérés comme fils autochtones. Ensuite viennent les
"étrangers" issus du brassage culturel entre brésiliens, portugais allemands,
français et femmes Glexwenu de l’époque et dont les descendances sont
appelées "aguda" : « La population de la Commune est composée
majoritairement de Fon, de Nago, de Xuéda et de Mina. Les Xuéda ont été les
premiers habitants de la ville de Ouidah ainsi que de sa région. Les Fon
d’Abomey y sont venus en grand nombre sous le règne du Roi Agadja, qui a
conquis le royaume Xuéda de Savi, et a fait de Ouidah sa façade maritime en
1727 : c’était le principal port de la côte du Golfe du Bénin. Ensuite, il y a eu la
migration des commerçants nago et haoussa du Nigeria. » (PDC Ouidah).
S’intéresser donc à la Glexwenu, c’est considérer tous ces aspects de la culture
Glexwe : les ‘’femmes authentiques’’ de Ouidah, les femmes "Aguda"
(L’agouda, patois portugais qu’il parlaient entre eux, devint le pseudonyme par
lequel les autochtones dahoméens désignèrent ces immigrés, appellation qui, en
raison de leur attitude hautaine, acquit rapidement le synonyme de vaniteux…)
et d’autres femmes originaires d’autres localités et qui par devers les rivalités
historiques entre royaumes ou la traite esclavagiste et tout son mécanisme de
fonctionnement et de commercialisation ont connu naissance à Ouidah à partir
de leurs aïeux esclaves marrons ou délaissés par les négriers pour non
conformisme aux exigences et critères auxquels devaient obéir les esclaves à
affranchir vers les terres brésiliennes et américaines.
Parler donc de la Glexwenu, c’est ne pas perdre de vue la portée
historique de cette ville. Glexwe, connut une autorité capitale à partir du roi
Agadja : « devant ses échecs face aux Yoruba d’oyo, le roi Agadja voulant
donner une façade maritime à son territoire, conquit Allada en 1724 et se tourna
vers Savi où régnait le Roi Dè Houffon en 1727 qu’il finit par conquérir en -
1732- grâce à la ruse de sa fille Ma guézé qu’il lui donna en mariage plusieurs
années en arrière. Ainsi, il accrut sa puissance économique et politique et a
Inès Y. Olive ZOUNNON 70
désormais la possibilité d’échanger ses produits » surtout les esclaves, contre des
marchandises importées à Ouidah par les commerçant français et Anglais et
Portugais contre en particulier les fusils (P 55).
Ouidah devient ainsi un véritable lieu d’échanges commerciaux grâce à
sa façade maritime. Plusieurs captifs razziés par les rois d’Abomey à partir de
Agadja dans les pays voisins au Danxomé sont vendus à Ouidah : « Partout, les
danxoméens massacrent les gens âgés, sans valeur commerciale et inadaptés au
travail. Les jeunes prisonniers des deux sexes sont envoyés dans les plantations
royales proches de la capitale. Grâce à cette précaution, écrit Dunglas : « le roi
d’Abomey avait toujours sous la main des lots importants de captifs, prêts à être
vendus à Ouidah comme à être sacrifiés à Abomey. » (TOPOR, 1984 :84)
On comprend donc aujourd’hui que plusieurs groupes socioculturels se
retrouvent à Ouidah : les Yorubas, les Mahi, les Eve, les Idatchas etc.
Ainsi, l’origine de la Glexwenu est plurielle. Mais comprendre
aujourd’hui que la femme de Ouidah est sujette à une méfiance particulière
mérite une attention précise, parce que même si on consent que toutes les
femmes de différents groupes socio culturels font objet de renommée de toutes
natures, on se demandera toujours comment cela s’explique que celle Glexwenu
soit si présente dans les esprits et semble convaincre. Autrement dit, il importe
de savoir par quels mécanismes la généralisation de la rumeur s’est faite et s’est
étendue à tous les groupes sociolinguistiques de Ouidah. En effet, le peuplement
de Glexwe a donné lieu à une présence de nombreux groupes sociolinguistiques
de sorte qu’il serait difficile aux groupes qui stigmatisent la femme de Ouidah,
de prétendre à l’absence de liens de parenté avec ces dernières. La rumeur au
sujet de la femme de Ouidah n’est donc pas due à de simples rivalités entre
royaumes. Elle doit pouvoir s’appréhender au regard de certaines variables ayant
fortement structuré le champ social et les conduites des acteurs à Ouidah.
Nous comprenons donc à travers les flux commerciaux qui eurent lieu à
Ouidah : les Esclaves, les armes, les tissus, les alcools, les pacotilles, cette ville

Inès Y. Olive ZOUNNON 71


devrait impressionner et susciter la hantise d’autres états voisins. Qu’étaient
donc ces femmes moulées dans un brassage de culture ?
En outre, en se situant plus amplement dans le contexte historique
impressionnant qu’a été celui de la ville de Ouidah avec tout ce qu’elle
représentait en tant que port négrier, les différents échanges qui en ont découlé,
la notoriété qu’elle a suscitée, le contexte socioculturel particulier, le contact
avec le monde européen, n’ont-ils pas suscité des images controversées ? Ce
contexte historique et socioculturel de Glexwe n’a-t-il pas eu des incidences sur
ses traits de caractères ? Puisque comme l’affirme, parlant des Anehoviwo (les
ressortissants d’Aneho), MENSAH (2000) : « la civilisation est donc à leurs
portes, plus on est loin de la mer, plus on est loin d’être civilisé (…) les armes
commerciale, intellectuelle, civilisationnelle notamment avaient accompagné
l’homme blanc sur les côtes africaines et les guins s’en étaient saisis. Cet
‘avantage’ qu’a constitué cette familiarité relative des ancêtres des Guin-Mina
avec les futurs colonisateurs n’est pas à négliger lorsque l’on veut étudier
l’image que ce groupe ethnique projette de lui-même depuis des décennies »
(p533)
Considérant Aneho et Glexwe comme deux villes ayant connu une
histoire presque semblable quant au contact avec les blancs, on peut donc
comprendre que certaines habitudes culturelles européennes aient été adoptées
par effet de rapprochement par les Glexwenu au point que leurs femmes
paraissent plus ‘’émancipées’’ que les autres femmes de l’intérieur du pays.
L’expression de cette émancipation (la cuisine, les tenues vestimentaires, la
tenue du ménage, la prestance en société, le niveau intellectuel etc.) pourrait être
traduite par le conjoint et les siens, surtout dans les ménages mixtes comme une
attitude de domination justement dû aux effets du Bô, du mantindjan ou du
gbotémi.
Nul doute que tout ceci pourrait être des éléments explicatifs de l’origine de la
rumeur liée à la Glexwenu.

Inès Y. Olive ZOUNNON 72


3. L’analyse Indicamétrique

L’indicamétrie est définie selon son inventeur comme la science de la globalité


universelle qui étudie les indicateurs objectifs classiques et les indicateurs
subjectifs et leurs effets sur l’homme, sa communauté, son environnement.
Selon cette science, la substance énergétique qui anime tout phénomène est
susceptible d’être étudiée et mesurée pourvu que le phénomène étudié ou l’objet
à appréhender ait une dénomination usuelle (fréquemment utilisée) :
« l’indicamétrie permet de mesurer, autant que possible les profils humains,
scientifiques, techniques technologiques économiques, sociaux, culturels et
spirituels de tout phénomène. Elle aide à mettre au point des instruments
pratiques de programmations, de prévisions, de planifications et de gestions
relativement transparentes et promotionnelles. Elle explique l’homme et sa
communauté à travers leurs productions, faites d’idées d’appréciations et de
décisions. La formule indicamétrique que voici permet presque de tout faire :
Elle touche à la fois la philosophie, les sciences exactes, les sciences sociales,
les sciences appliquées, la religion, la linguistique, la littérature, la géographie,
l’histoire, etc. » (Pr. KOUAKOU, N., Pr. KOKOUA, A., et al, 1963-2007, Les
grandes étoiles et le grand livre de l’Indicamétrie, Université de Bouaké)

C1 C2 C1= combien ?

N1
Y N2
C2= comment ?
N1= résultat
N2= rang du résultat
Y= messager

S’appuyant donc sur cette démarche globalisante, nous ferons le point de


l’apport de la science indicamétrique à la rumeur liée à la Glexwenu.

Inès Y. Olive ZOUNNON 73


Ainsi, le sujet de mémoire dans l’intégralité de son intitulé : « la Glexwenu est
tueuse de mari : quand la rumeur devient certitude», a fait l’objet d’étude
capacitaire intrinsèque et on relève ce qui suit :
Du point de vue capacité d’intoxication, la rumeur ou les personnes qui la
colportent ont un stabilisateur faible, soit Y25= 0,52 inférieure à la norme
Y25=0,75. Cet indicateur traduit une certaine volonté de déstabilisation produite
par la rumeur dans le corps social.
Le stabilisateur naturel de la Glexwenu Y25=0,88 dépasse la norme ; mais
malgré cela, il lui sera bien difficile de contredire la rumeur qui s’amplifie grâce
à l’habileté et à la capacité à convaincre de ceux qui la colportent. La capacité de
la rumeur à maîtriser le flux de son expansion Y16=15,80 est largement
supérieure à celle de la Glexwenu Y16=3,41. On comprend ainsi que la rumeur
liée à la Glexwenu est essentiellement attractive et cela s’explique également
par le taux de son vibrator élevé Y30=12581. Cet indicateur traduit l’effet
puissant de la rumeur, sa forte capacité d’amplification dépassant largement la
norme Y30=5000.
De plus, en comparaison avec le vibrator naturel de la Glexwnu
(Y30=7702,09) qui est supérieur à la norme et qui traduit la chance, les richesses
matérielles financières, une forte capacité morale et spirituelle à pouvoir faire
face aux problèmes de la vie, cette femme va se retrouver dans une situation où
elle devra combattre une rumeur qui ternit son image et dont le taux vibratoire
est largement en excès par rapport au sien. On comprend donc que le caractère
attractif de la rumeur, son facteur d’amplification progressif, sa capacité
d’intoxication et de déstabilisation favorise sa permanence dans le temps, et sa
constance qui ne confirme en rien sa véracité. En règle générale, la carte
d’identité capacitaire intrinsèque liée à la rumeur permet de conclure que la
Glexwenu toutes les femmes de Ouidah ne sont pas tueuses de mari. Les
variables Y16 (stabilisateur) ; Y26 (rapidité d’action) ; Y28 (taux de couverture
sécuritaire), compte tenu de leur forte expression permettent de conclure que ce

Inès Y. Olive ZOUNNON 74


sont les rumeurs qui amplifient quelques cas particuliers ou isolés. On ne saurait
donc extrapoler le phénomène à l’ensemble des femmes de Ouidah.
Il faut donc, face à l’énergie capacitaire intrinsèque liée à la rumeur, pour
la corriger :
- Organiser une contre campagne ou contre publicité plus efficace que celle
organisée par les auteurs de la rumeur de telle sorte que le taux
d’accélération de la rumeur soit inférieur à celui de la contre campagne
destinée à détruire l’image de la Glexwenu (Y14.0Y46 < 0Y65).

- Mobiliser plus de gens pour cette campagne ou publication de façon à ce


que le facteur de mobilisation de ceux qui travaillent à réduire le taux
d’efficacité de la rumeur soit supérieur à celui de ceux qui la colportent.
Soit, Y14.Y65 > Y14.0Y46.

Inès Y. Olive ZOUNNON 75


SUGGESTIONS
Atténuer la force de propagation de la rumeur qui fait de la Glexwenu, « la
tueuse de mari » ou la faire disparaître, nécessite :
- une volonté des ressortissants de Ouidah, qu’ils soient résidents au Bénin
ou de la diaspora ; des rencontres doivent incessamment se tenir sous
forme de retrouvailles, de séminaires, de colloques etc. pour comprendre
les fondements mêmes de la rumeur et de façon consensuelle prendre des
mesures pour anéantir la rumeur ;
- la fête habituelle ‘’Glexwe xwé’’ qui rassemble les ressortissants de
Ouidah, doit servir de creuset permanent pour rehausser l’image de la
Glexwenu ;
- des journées portes ouvertes « une autre image de la Glexwenu », doivent
être fréquemment organisées par la Mairie de Ouidah, pour honorer les
femmes Glexwenu à travers leurs initiatives, tout ce qu’elles sont arrivées
à créer, à innover de leurs mains, de leur cœur, et de leur tête ;
- les femmes Glexwenu, où qu’elles soient, quelque qu’elles soient, doivent
s’unir dans un même creuset, avec pour ambition d’œuvrer à se donner
une image plus positive de la femme de Ouidah ;
- des campagnes de sensibilisation peuvent être tenues dans toutes les
localités béninoises à travers des foires, les coopérations entre mairies, des
échanges entre femmes de Ouidah et d’autres localités béninoises à
travers des jumelages entre groupements féminins, leur savoir faire, etc. ;
- les bokonons, les dignitaires, les prêtres vodoun, doivent eux aussi se
regrouper, pour démystifier les pratiques occultes à Ouidah et le rôle que
les femmes y jouent.

Inès Y. Olive ZOUNNON 76


CONCLUSION

Prétendre à une conclusion définitive sur les motifs liés à la méfiance nourrie à
l’égard de la Glexwenu serait faire preuve d’une tricherie à la science. Scruter,
analyser et comprendre le phénomène lié à la rumeur qui fait de la Glexwenu
une « tueuse de mari », nécessite un travail plus approfondi mais aussi
comparatif c'est-à-dire étendu à d’autres cités historiques comme Glexwe et qui
dépasserait le cadre d’un mémoire de maîtrise. On ne saurait se prévaloir d’avoir
vraiment et suffisamment approché toutes les facettes du phénomène.
Cependant, certains éléments sont d’une évidence à ne plus démontrer :
- la crainte que suscite la Glexwenu dans le corps social est une réalité ;
- la conviction qu’il faut se méfier de la Glexwenu s’étend à plusieurs
localités ;
- la Glexwenu dans l’imaginaire de ses pairs suscite des réactions diverses
et controversées (40% des hommes mariés ressortissants de Ouidah
rencontrés ne veulent plus prendre une femme de Ouidah s’ils devaient se
remarier !) ;
- près de 40% des hommes mariés d’ailleurs ayant épousé une femme de
Ouidah ne sont pas prêts à l’épouser encore, si ceux-ci devraient se
remarier ;
- les régions d’Agonlin, du Nord sans distinction, certaines régions du
Mono-Couffo et même Abomey semblent être d’une hostilité réelle face à
Ouidah ;
- les femmes de Ouidah sont conscientes de la rumeur dont elles font l’objet
et l’imputent à l’histoire faisant de Ouidah une ville d’esclavage mais
aussi de forte ‘’tradition’’ ;
- près de 80% des femmes Glexwenu interrogées déclarent être capables
d’user de ‘’forces occultes’’ pour entretenir leur foyer ;
- près de 90% des hommes originaires d’ailleurs et ayant épousé une femme
de Ouidah, déclarent que leurs femmes seraient capables d’user de "forces
Inès Y. Olive ZOUNNON 77
occultes" dans les conditions suivantes : la délaisser pour une autre, la
femme désire hériter de toutes les richesses de son mari, etc. ;
- la caricature de la Glexwenu diabolisée d’aujourd’hui correspond aux
attributs de la Na guézé d’hier : femme rusée, tenant l’homme par son
ventre, perce les secrets de son mari, fait des gris-gris, trahit son mari,
s’accapare de ses biens.
Il aurait, en effet, fallu pour la présente recherche :
- répartir les conceptions sur la femme de Ouidah selon les statuts socio
professionnels, le niveau d’instruction des acteurs interrogés pour sérier
les informations ;
- disposer d’un registre indiquant les catégories d’acteurs qui fréquentent le
plus les bokonons selon leur âge, statut, origine, car même si le bokonon
affirme accueillir plus de femmes que d’hommes, rien ne certifie si ces
femmes sont réellement originaires de Ouidah, étant donné que même
l’origine de la Glexwenu est plurielle et que d’autres femmes quittent
d’autres contrées pour venir consulter le fa chez les pratiquants de
Ouidah ;
- les autres femmes non originaires de Ouidah auraient pu dans un
échantillon bien déterminé, être approchées pour confronter les opinions
des femmes non originaires de Ouidah face à leurs sœurs de Ouidah ;
- aboutir à l’identification de la catégorie de femme Glexwenu la plus
indexée (est ce l’intellectuelle ? l’aguda ? celle ayant grandi et résidant à
Ouidah ?) serait d’un atout considérable.
De tout ce qui précède, et des résultats obtenus il apparaît que :
- on ne peut pas tabler la justification de la rumeur sur le seul recours des
femmes de Ouidah aux ‘’forces occultes’’, mais aussi sur les discours
qu’elles tiennent sur elles-mêmes, l’univers historique pluriel (contact
avec l’européen, rencontre d’une diversité de cultures à Ouidah, Ouidah
ville sanctuaire à forte ‘’tradition’’ etc.) dont elles sont le produit.

Inès Y. Olive ZOUNNON 78


- les rivalités antérieures entre royaumes principalement entre Abomey et
Savi pourraient être à l’issue de la naissance d’une telle rumeur (l’histoire
de Naguézé, princesse d’Abomey qui dut trahit son mari, Houffon le roi
de Savi pour permettre à son père Agadja d’étendre son hégémonie, et de
traiter directement avec les négriers.
Alors, même si on consent la certitude de la rumeur, on ne saurait extrapoler une
telle étiquette à toutes les femmes de Glexwe. Car, les cas isolés rapportés par
les enquêtés où certaines femmes de Ouidah auraient eu des comportements
(donnant raison à la rumeur), à l’égard de leur époux au point de le tuer pour
telle ou telle raison, relèvent pour la plupart du temps du ‘’j’entends dire’’ et du
‘’vécu d’un proche parent ou non’’ qui serait marié à une femme de Ouidah. Ce
déficit de preuves tangibles amène à convenir avec l’indicamétrie que : «la
Glexwenu n’est pas tueuse de mari ; ce sont les rumeurs qui amplifient quelques
cas particuliers ou isolés. »

Inès Y. Olive ZOUNNON 79


REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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pays Guin, Lomé : Presses de l’UB : pp 532-535.

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une société d’information », in : Recherches en Communication (3)
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de Boeck

13.SECA, J-M. 2005 : Les Représentations sociales, Paris, Armand Colin.

14.TELE, M-A. C. 2000 : « Les femmes d’Aneho : Mythes et Réalités », in :


GAYIBOR, T., Le tricentenaire d’Aneho et du pays Guin, Lomé, Presses de
l’UB : 505-515.

15.TITRIKOU, K.K. 2000 : « Zebe dans l’imaginaire des populations de


l’arrière pays d’Aneho », in : GAYIBOR, T., Le tricentenaire d’Aneho et du
pays Guin, Lomé, Presses de l’UB : 515-523.

16.WEBER, F. et BEAUD, S. 2003 : Guide de l’enquête de terrain, Paris la


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Documents consultés sur Internet


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- http://pascalfroissart.online.fr/3-cache/2002-dauphin.pdf
- http//www.réunion.iufm.fr/Dep/listeDep/exposes/effet%20pygmalion.pdf
- http://pagesperso-orange.fr/alex.g/psycho/d2/perception.htm

Inès Y. Olive ZOUNNON 81


ANNEXES

Annexe I : Cartes de la ville de Ouidah


Carte touristique de Ouidah
2°00' 2°5' 2°10' 2°15'
6°30' 6°30'
Commune de Ouidah
ri

Zones et sites touristiques


To
rs

Inès Y. Olive ZOUNNON 82


Ve

N
Commune de

Tori-Bossito
Source : pdc Ouidah

Inès Y. Olive ZOUNNON 83


2°00' 2°5' 2°10' 2°15'

6°30' 6°30'

COMMUNE DE
DEPARTEMENT DE L'ATLANTIQUE

OUIDAH
Commune de Ouidah

Villages et Commune de
Tori-Bossito N
Quartiers de ville #
Evèdjrèhoué
Assogbénou Daho
#

Bossouvi
#
Amoulèhoué#
Adjarra Kpovié
Assogbénou Kpèvi Gnnoukpankon #

#
Sèhlinhoué
#
#

Lingbahoun Adjarra Hounvè


Hantchohocon #
# #

# Gakpé Honhoué
#
#

Monso Houéyiho #
Dodji
#
Houéton Agbassazounmè #

6°25' Adjagbéhocon
#
#

Commune 6°25'

Ecole Ouessè
Adjarra Adovié
# d'Abomey-Calavi
Lokohoué
Commune Ouessè
#
#

de
#

Sèmè #

Tchiakpècodji
Kpomassè Kinguè # #

Djissoukpa
LobagbomèDekonénou
#

#
#
Bazounkpa
Gahatin PAHOU #

Godonoutin #
# #

Hounganglo #

# Gbéto #
## Akadjamey
Houndjava Djikpotomè
#

Gbèna Zongo
#

# #
# Houndjava Kpèvi #
#
#

Gomè #
Hounhamèdé
Tovè II #
# #
Ahouicodji
#
#

Ahouandjigo #
# # #
#

Assogbénou Daho
#
Sodotéhocon Zomaï Womey #
# ##
# #

Agban
#
#

Gbamè #
Abota I #
#

AVLEKETE #

Zoungbodji Aholobé
Gbézounmè
#
Ahouandjigba Hio Houta
Co rand

#
#
#
#
Gohouncodji Dossou Yovo
G

#
Gbéhonou
#
Agbessikpè
#
Aziagbo Kodji
mm -Po

Gbloudoumé
#
Fadékoucondji #

Djika Ahouandji Assioncodji Agouin Plage #


#

6°20' # #
#
#
Avlékété Plage 6°20'
Djègbamè Houakpè Kouvènanfidé
un po

#
Toligbé # Guédoucodji Djègniba Kodji #
#

Dégoué #
#

Lissassicodji Akpohoué Plage


#
#
ed

Azizakoué
# #

Djègbadji Plage #
e

Adjankancodji PlagDégoué Plage # #


#

Ganhoué # Adjankancodji
#

OCEAN ATLANTIQUE
#

Mèko Plage Azizahoué Plage


Akodjannawa Aïdo Plage
#
# #

#
Village

0 2 4 Kilom ètres Limite d'arrondissement

Agglomération

Juillet E-mail : pisolbe@yahoo.fr

2004 2°00' 2°5' 2°10' 2°15'

2°00' 2°5' 2°10' 2°15'


6°30' 6°30'
Commune de Ouidah
Arrondissements
Commune de
N
Tori-Bossito

Gakpé
(51.28 Km²) Commune
6°25' Savi 6°25'
(74.80 Km²) d'Abomey-Calavi
Commune
de
Kpomassè

Ouidah2 Pahou
(7.45 Km²) (2.72 Km²) (91.97 Km²)
Ouidah4
(2.57 Km²)

Commune Ouidah1
(26.58 Km²) Avlékété
(20.82 Km²)
Houakpè-Daho
de (43.85 Km²) Djègbadji
6°20' (25.02 Km²) 6°20'
Grand-Popo
Océan Atlantique

Légende

Ouidah1 SAVI Djègbadji


0 2 4 6 Km
Ouidah2 GAKPE Houakpè-Daho

Sources : - Fond de carte CENATEL/ABE Ouidah3 Pahou


- MISD/MD
Ouidah4 Avlékété
2°00' 2°5' 2°10' 2°15'

Source : pdc Ouidah

Inès Y. Olive ZOUNNON 84


Outils de collecte des données

QUESTIONNAIRES

Questionnaire à l’endroit des veuves

1- En quelle année êtes vous mariée ? donnez nous l’année de disparition de


votre époux
2- Quelle est la cause du décès de votre époux ? (maladie, mystère,…)
3- Avez-vous connu des problèmes avec votre belle famille après son
décès ? si oui lesquels ?
4- Expliquez nous un peu comment avez –vous géré ces difficultés ?

QUESTIONNAIRE N°2

Groupe cible : Les hommes mariés ressortissants de Glexwe ayant épousé


une femme de Glexwe ou non.
 Pourquoi avez-vous choisi une femme de Glexwe ?
 Depuis quand vivez-vous avec elle ?
 Que pensez vous de la méfiance de beaucoup de gens vis-à-vis de la
Femme de Glexwe
 Si votre désir est d’être polygame, seriez-vous prêt à prendre plus
d’une femme de Glexwe parmi vos épouses ? Pourquoi ?

QUESTIONNAIRE N°3
Groupe cible : les hommes mariés ressortissants d’ailleurs ayant une femme de
Glexwe ou non.

Inès Y. Olive ZOUNNON 85


 Votre femme ou vos femmes sont de quels groupes socio culturels ?
 Si vous avez une femme de Glexwe, pourquoi l’avoir choisi ?
 Que pensez-vous de la femme de Glexwe ?
 Avez-vous déjà collaboré avec quelqu’un de Glexwe ? A quelle
occasion ? Seriez-vous prêt à recommencer ?
 Seriez vous prêt à conseiller une femme de Glexwe à l’un de vos
proches ? Pourquoi ?

QUESTIONNAIRE N°4
Groupe cible : femmes de Glexwe.

 Que représente un mari pour vous ?


 Accepteriez-vous de partager votre mari avec une autre femme ? Si
oui, de Glexwe ou d’ailleurs ?
 Comment faites-vous pour préserver votre mari ?
 Que détestez vous le plus chez votre mari ?
 Savez vous pourquoi beaucoup de gens se méfient de la femme de
Glexwe ?
 Etes vous fière d’être de Glexwe pourquoi ?

QUESTIONNAIRE N°5
Groupe cible : Sachants

1-quelles sont les catégories d’acteurs qui vous consultent le plus ? (Hommes,
femmes, fréquence de fréquentation)
2- quels sont les principaux motifs, selon la catégorie d’acteurs, de leur recours à
la divination et à d’autres pratiques occultes.

Inès Y. Olive ZOUNNON 86


GUIDE D’ENTRETIEN A L’ENDROIT DES PERSONNES
RESSOURCES (SAGES, NOTABLE etc.)

I- Généralités sur les femmes


A- Sur le plan conjugal (traits caractéristiques)
B- Sur le plan relationnel

II- La méfiance observée par beaucoup face à la femme Glexwe


A- Situation historique (dictons, anecdotes sur la femme de Glexwe)
B- Situation actuelle
C- Conséquences

Inès Y. Olive ZOUNNON 87


RESULTATS DE L’ENQUETE EXPLORATOIRE DU 27/05/07 AU
05/06/07 ET DU 11/06/07

Elle a été réalisée sur un échantillon de 100 étudiants sans distinction de


disciplines et choisis au hasard à l’université d’Abomey-Calavi. Nous avons
réalisé des focus group de 06 à 10 acteurs sociaux selon le cas, et 13 entretiens
individuels.

Questionnaire utilisé

Cinq questions ont fondamentalement été posées à nos interlocuteurs :

6- Est-ce que la localité figure parmi vos critères en matière de choix de


conjointe ?
7- Dans quelles localités ne souhaiteriez vous pas prendre femme ?
8- Quand je dis « femme de Ouidah », quelle est l’image qui s’impose à
vous ?
9- Etes vous aujourd’hui prêts à prendre une femme de Ouidah malgré tout
ce qu’on en dit ?
10- Telle que vous connaissez vos parents, dites nous, si aujourd’hui
vous leur présenter votre futur conjointe comme étant de Ouidah, quelle
serait leur première réaction ?

Résultats obtenus par question

1- Est-ce que la localité figure parmi vos critères en matière de choix de


conjointe ?

Inès Y. Olive ZOUNNON 88


- oui, un adja ne doit pas se marier à un fon
- non, mais ne préfèrent pas les femmes de Porto-Novo, parce qu’elles
aiment ‘’ago’’, surtout pas quelqu’un qui vient de loin, il y a aussi les
considérations religieuses.
- Non, c’est à cause des conflits historiques que les parents disent aux
garçons de ne pas prendre une femme de telle région
- Non, le fondamental, c’est l’amour.
- Oui, (Karimama, Malanville), refus de mariage aux fons
- Non, mais une réticence pour Agonlin et Ouidah
- Oui, pas Ouidah, Agonlin, à cause de l’attitude des femmes de Ouidah ;
déception de mon père pour Agonlin
- Non, seulement des considérations religieuses, surtout pas de femme
musulmane, leurs hommes sont mesquins et autoritaires. Aussi, pas de
femme autoritaire.
- Non, mais obligés de tenir compte de l’avis des parents et de
l’appartenance religieuse
- Oui, (Djougou)
- Oui, (Ségbana)
- Oui, (Adjohoun)
- Oui, (Kouandé)
- Non, (Dassa)
- Non, (Djakotomè)
- Importe peu, (klouékanmè)
- Seul le comportement importe (Agonlin)
- Non, (Djakotomè)
- Non, (Savalou)
- Importe peu (Dogbo)
- Importe peu (Dogbo)
- Importe très peu (Dogbo)
- Très important (Djakotomè)
Inès Y. Olive ZOUNNON 89
- Important (Dogbo)
- Importe (Couffo)
- Important (Agoué)
- Pas important
- Important (Agonlin)
- Sans frontière (Ouidah)
- Sans frontière (Ouidah)
- Importe peu (sahouè)
- Sans frontière (Bopa)
- Sans frontière (Houéyogbé)
- Sans frontière (Ouidah)
- Peu importe (Adjohoun)
- Très important (Couffo)
- N’importe pas (Couffo)
- Importe (Couffo)
- Important (Plateau)
- Important (Plateau)
- Important (Couffo)
- Très important, il y a certaines familles qui nous sont interdites par nos
parents
- Important (Ouidah)
- Important
- Peu important
- Culture importante
- Non
- Important
- Important
- Non
- Non
- Non,
Inès Y. Olive ZOUNNON 90
- Non,
- Important (Bohicon)
- Important
- Important
- Pas nécessaire
- Pas très important
- Sans importance
- Pas important
- Importe peu
- Sans importance
- Peu importe
- Important
- Pas important
- Importe peu
- Importe peu, tout dépend de la qualité de la femme
- Capitale ! car il y a des localités et leurs contraintes qui constituent des
entraves pour vous
- Pas important. Mais mon papa dit d’éviter une femme dont la localité ne
dépasse pas le pont de porto novo
- Importe peu
- Importe
- Peu importe, l’amour prend le dessus
- N’importe pas
- N’importe pas
- Importe
- primordial

2- Dans quelles localités vous ne souhaiteriez pas prendre femme ?

- Porto-Novo
Inès Y. Olive ZOUNNON 91
- Ouidah, Abomey (Oumako)
- J’ai des préjugés sur les femmes sombas (Savè)
- Mahi
- Adja
- Femmes du Nord
- Nord- Zou-Adja
- Peu importe
- Pas de femme évangéliste ni musulmane
- Collines et plateau
- Femme d’Abomey (il y a trop de pression)
- Ouidah
- Ouidah
- Ouidah
- Toutes les localités
- Pas une femme du sud, surtout pas les adjas
- Ouidah et Abomey (3 personnes du Couffo)
- Peut prendre une femme de Ouidah (Savalou)
- Peut composer avec toutes les localités, mais, il n’y a pas de fumée sans
feu (Agonlin)
- Ouidah, mais avec distinction (Dogbo)
- Jamais Ouidah (Dogbo)
- Comè (Djakotomè)
- Couffo (Abomey, Ouidah, Ouidah, Ouidah)
- Fon, Abomey, Ouidah, Porto-Novo
- Sud Ouidah
- Ouidah
- Porto novo ; Ouidah
- Agonlin, Agonlin
- Couffo (pas de localité)
- Importe peu
Inès Y. Olive ZOUNNON 92
- Adja, Avrankou (plateau)
- RAS (Agonlin)
- Abomey, Porto novo (Ouidah)
- Nord (Ouidah)
- RAS (sahouè)
- Grand Popo, Ouidah (Bopa)
- Pas de chez lui (Houéyogbé)
- Couffo (Ouidah)
- RAS (Adjohoun)
- Nord (à cause de la distance)
- Peu importe, à condition qu’elle réponde à mes attentes.
- Mono, Borgou, zou
- Abomey, Covè, Ouidah
- Partout
- Partout
- Pas de femme sudiste (Ouidah)
- Ouidah, nordiste
- Abomey, Ouidah
- Abomey, Agonlin, Ouidah
- Ouidah, fon, nordiste
- Pas de localités trop éloignées « dans ma famille, on dit que les femmes
de Ouidah ne sont pas bonnes à prendre ; entre ouidaniens c’est bon ».
- Abomey, elles sont fortes dans les pratiques occultes. Pour sauver sa tête,
il vaut mieux ne pas insérer dans ces genres d’affaires.
- C’est vrai que je ne suis pas encore marquée par une fille, mais c’est aussi
vrai que les régions en vue sont Ouidah, Abomey. Ce qu’il faut, c’est
l’amour, la compatibilité.
- Il y a des localités qui n’inspirent pas confiance, seulement on peut être
d’une même localité sans avoir les mêmes comportements. Ce qui
importe, c’est l’éducation de la fille, l’histoire de sa maman
Inès Y. Olive ZOUNNON 93
particulièrement et de son vieux. Mais il y a beaucoup de préjugés et de
superstitions.
- Pas d’importance
- Pas de femme en milieu fon (Ouidah,…)
- Pas d’importance
- Pas de femme somba
- Pas d’importance pour moi seul, mais en milieu nago, on évite les femmes
fons en particulier de Ouidah
- Pas important
- Pas de femme de Ouidah et d’Abomey
- Il y a des personnes qui ne reflètent pas toujours les préjugés. 3 localités :
Kétou, Abomey, Ouidah
- Maxi
- Bariba
- Peuhl
- Beri beri
- Mes parents me mettaient en garde contre les femmes de Ouidah,
Abomey, Sahouè
- Mes parents me disaient de ne pas fréquenter les adjas
- La femme de Ouidah

3- Quand je dis « femme de Ouidah », quelle est l’image qui s’impose à


vous ?

- l’histoire de Ouidah a fait de la femme de Ouidah, des femmes qui


impressionnent ; monogamie ; elle n’aime pas partager son homme ;
possessive, agressive « quand tu la cherches, tu vas la trouver » ; elle pose
un certain nombre de conditions et peut te rendre la vie impossible.
- J’ai peur des femmes de Ouidah, elles sont possessives et dangereuses.
Une petite erreur de chercher une autre femme, elle t’élimine. En plus, il y
Inès Y. Olive ZOUNNON 94
a une association des femmes veuves du Bénin et c’est les femmes de
Ouidah qui la gèrent.
- Il est interdit de prendre une femme de Ouidah. J’ai un oncle qui de son
vivant a vu sa femme de Ouidah intégrer l’association des femmes
veuves. Cette femme a commis l’adultère avec un proche, elle enterre des
choses dans le salon et l’oncle tombe et donc ça veut dire qu’elle veut
l’éliminer
- Les femmes de Ouidah sont influencées par le blanc. Elles ont une autre
perception du mariage africain, béninois, elles prennent de leur mari. Sa
famille la supporte spirituellement et matériellement pour faire taire son
mari.
- Elles ne sont pas entreprenantes, veulent tout aux dépens de l’homme sans
aucun partage.
- Quand la femme est 100% de Ouidah, ses parents ont les yeux dans son
foyer ; la femme ‘’aguda’’ n’a pas de scrupule à tromper son mari, pas de
cérémonie traditionnelle chez elle, un foyer à l’européenne.
- Femme à l’image de ce que l’histoire leur a conféré ; ne supporte pas les
coépouses ; aucune intention d’avoir une femme de Ouidah
- La femme de Ouidah est prête à tout jusqu’au sacrifice de l’homme ; elles
aiment la bagarre
- Les femmes de Ouidah sont tellement ambitieuses. Si l’homme a des
richesses, elles le tuent pour s’accaparer des biens ; elles écartent les
parents de l’homme
- Les parents de la femme de Ouidah peuvent bénéficier du bien de son
mari mais pas les parents de ce dernier
- Elles sont autoritaires dans le foyer ; ne respectent pas les beaux parents
- Il faut vivre l’expérience avant d’en parler
- Ce qu’on entend dire, c’est des femmes qui ne restent pas dans leur foyer
jusqu’au soir de leur vie. « vi gbè assou xo », est une case qui leur est

Inès Y. Olive ZOUNNON 95


toujours réservée chez leur parent. Quel que soit le temps qu’elles vont
faire dans leur foyer, elles reviennent toujours chez les parents
- Elles ont l’habitude de préparer les mets spéciaux aux hommes
- Elles sont criminelles ; une femme mauvaise, tueuse de mari ; elles ont tué
des cadres de chez nous et interdisent la fréquentation de leurs beaux
parents ; elles envoûtent les hommes ; leurs hommes deviennent pour eux
comme des enfants placés. Elles préparent pour eux ‘’man tin djan’’ ;
parfois, elles usent des verres cassés moulus comme ‘’poison lent’’
qu’elles mélangent au repas du mari pour l’envoyer dans la tombe.
- C’est de l’ancienne corde qu’on tisse la nouvelle. Les ancêtres en ont fait
et elles en font aujourd’hui ; elles disposent du droit de veto dans leurs
foyers et leurs enfants les écoutent plus que le papa.
- Les femmes de Ouidah n’ont pas un bon comportement
- La femme de Ouidah n’obéit pas à la famille de l’homme (Couffo)
- Elle est mauvaise (Savalou)
- Quand elle s’énerve, le mari ne peut passer par là
- RAS (Ouidah)
- Les ouidaniennes, quand elles s’énervent, tu passes. Avant, les gens
faisaient trop de mal ; certaines femmes sont rusées ; elles le faisaient
avec l’histoire ; on estime que les femmes de Ouidah sont tueuses et
préparent des ‘’gbotémi’’
- Elles sont bonnes, elles respectent bien (Ouidah)
- Sans frontière (Houéyogbé)
- Ça n’a pas marché avec son grand père (Bopa)
- Peut prendre une femme de Ouidah (Ouidah)
- J’entends dire que la femme de Ouidah est dangereuse
- La femme de Ouidah est un danger permanent. Elles sont très
dangereuses ; elles sont acariâtres ; elles créent des problèmes à leur mari
et écartent leurs beaux parents (Dogbo) ; elles s’approprient de tous les
biens de leurs maris
Inès Y. Olive ZOUNNON 96
- Là où les rois étaient restés les femmes de cette localité respectent
- La femme de Ouidah est méchante, arrogante, acariâtre
- Le sentiment qu’on a d’elle n’est pas positif ; elles éliminent, tuent leurs
maris et certaines d’entre elles ont même peur de se déclarer comme étant
de Ouidah
- Elles cherchent à réduire l’homme à leurs dépens ; elles cherchent à être
maîtresses du foyer ; l’homme est là comme assistant
- Elles sont très traditionalistes, l’histoire en dit beaucoup
- Les hommes n’aiment pas les femmes de Ouidah parce qu’ils disent
qu’elles sont mauvaises
- C’est des femmes légères qui n’ont pas de pitié pour leur mari ; prêtes à
tout pour ruiner l’homme ; acariâtre, arrogante, machiavélique
- J’entends dire qu’elles sont mesquines, rusées, d’esprit mauvais
- Elles sont agressives, possessives, tueuse de mari, dominante, font
‘’gbotémi’’ à leurs hommes
- C’est des femmes qui sont dures de caractère ; elles aiment s’imposer à
l’homme ; c’est ce qu’elles désirent qui passent. Elles cherchent à tout
savoir de l’homme et cachent leurs sentiments
- Elle est mauvaise ; si je sais qu’une femme est de Ouidah, je ne l’aborde
plus ; si je découvre que ma copine est de là-bas, je fais marche arrière
- Tueuses de mari, elles ont même une association de veuves ; elles tuent
vite leur mari si ce dernier a un peu de bien matériel ; elles veulent
hériter ; elles vont du ‘’gbotémi’’ à leurs maris
- Tueuse de mari, elles ont la sorcellerie, leur tête ne me plaît pas ; elles
sont prostituées
- Elles sont tueuses de mari ; elles maltraitent l’homme et écartent la belle
famille. Si l’homme a des richesses, elles s’en accaparent avec leur
famille. Elles fréquentent les charlatans. Elles mettent des produits dans
leur vagin pour que l’homme soit à elle seule. Elles sont arrogantes et
aiment s’imposer.
Inès Y. Olive ZOUNNON 97
- Ce sont les filles qui adorent les pratiques occultes pour s’accaparer de
leur mari, avoir ses biens ; elles ont leur manière d’aimer, je ne peux pas
les juger sans les avoir fréquenté
- Je ne peux pas apprécié la fille de Ouidah. Il n’y a pas de mauvaise qualité
sans bonne qualité. C’est l’histoire qui fait que aujourd’hui on porte des
jugements, il faut oublier et tenter
- La fille de Ouidah, si tu touches à son mari, tu es cadavre. Si son gars sort
avec une autre, ce serait une croix sur le gars
- D’après ce que j’entends, la femme de Ouidah m’inspire vraiment peur.
Quel que soit l’amour, le jour où elle va me dire qu’elle est de Ouidah, je
vais réfléchir. Pour la majorité des cas, un mariage avec une femme de
Ouidah ne dure pas. Souvent, l’homme ne vit pas longtemps et pire, ces
femmes voient que tout ce qu’il y a à faire c’est de créer une association
des veuves ! l’image que les femmes de Ouidah donne en amitié est
souvent différente à son image dans le foyer.
- J’ai un oncle qui vit bien avec une femme de Ouidah, mais celle-ci n’est
pas restée au village ; les hommes du nord n’aiment pas les femmes du
sud.
- Je suis né d’un père polygame défunt qui a vécu 9ans avec une femme de
Ouidah, elle était la dernière épouse. C’est d’ailleurs avec elle qu’il a
contracté le mariage civil. Mon père avait construit pour elle, nous on était
gosses, on ne comprenait rien. Je pense que la femme de Ouidah est une
femme matérialiste qui n’aime pas vivre dans la polygamie. Et si elle voit
qu’elle n’a pas le monopole des biens, il y a problème avec comme
conséquence, les pratiques occultes, l’envoûtement. Il peut y avoir 1000
femmes, c’est toujours elle qu’on aime. Si les envoûtements ne marchent
pas, elles font disparaître leurs maris. Il y a des familles à Ouidah, si vous
y allez prendre une femme, c’est des histoires.
- C’est des femmes qui arrivent très tôt à tuer leurs maris et posséder leurs
biens
Inès Y. Olive ZOUNNON 98
- Elles monopolisent l’homme et veulent s’en accaparer
- Par rapport à ma connaissance, j’ai entendu que c’est des femmes qui
tuent leurs maris. L’histoire nous apprend qu’elles ont le complexe de
supériorité par rapport à l’homme.
- Elles sont infidèles
- Elles aiment le pouvoir parce qu’on les a valorisé, c’est le cas des agudas
- Les femmes ouidaniennes sont célèbres parce que possessives. Elles
bafouent, dominent leurs maris. Elles aiment préparer ‘’man’’ pour
manipuler leur mari. Elle est en mesure de l’éliminer.
- Ce sont des idées reçues ; de toutes les idées, la plus pertinente c’est
qu’elles aiment ‘’récupérer’’ leur homme dans le sens du terme.
- Pas d’expérience personnelle, mais elles tuent leur mari ; elles dominent
leur mari ; les parents du mari ne rendent pas visite.
- Elles sont attachées à leur culture. Elles savent passer à l’élimination.
- Pas de perception particulière
- Il y a des femmes de Ouidah qui ne nient le caractère mauvais des femmes
de Ouidah
- Pas d’information sur une localité particulière, mais je ne suis pas prêt
pour une femme d’Abomey à cause d’une histoire vécue.
- Image mauvaise de la femme de Ouidah
- Elles ont un amour démesuré pour leur mari
- Elles veulent préserver leur mari par n’importe quel moyen
- Elle peut tuer l’homme
- Quittent tôt le mari
- Ville de Ouidah, cité fon, étymologiquement « gbè to wi da »
- Elles « gbasse », tout ce qui est à l’homme doit entrer dans leur compte,
elles exagèrent en tuant leur mari
- Je déteste la femme de Ouidah, quand tu l’épouses on remarque que le
mari meurt avant elle, elles sont jalouses

Inès Y. Olive ZOUNNON 99


4-
- Ils seront surpris. Ils nous conseillent de ne pas prendre les femmes fons
(Segbana)
- les parents vont s’étonner de mon choix sur la femme de Ouidah. Ils
vont s’opposer. Souvent quand nos filles du nord marient les gens du sud et
viennent s’établir au sud, leurs maris reviennent difficilement ou bien tard au
nord visiter la belle famille.
- Je ne dépens plus des parents et cela dépend aussi du niveau des parents
- Cette situation existe au Nord et les bariba ne se marient pas au peuhl. Les
parents ne peuvent pas s’opposer car papa est instruit et maman compréhensive
- Ma mère ne sera pas d’accord compte de ce que la femme de Ouidah
représente
- On peut trouver des exceptions à la règle, il faut vivre l’expérience.
- Mes parents n’accepteront jamais une femme de Ouidah (segbana)
- Les nordistes ont une vision sur les femmes sudistes. Elles aiment la
domination, hors les hommes du nord n’aiment pas la domination.
- Jamais ! Si la maman te maudit, même si tu vas en Europe, ça te suit
- Refus catégorique des parents
- Certains diront que les femmes de là-bas ne sont pas bonnes, d’autres peuvent
l’accepter
- Les parents ne seront pas contents
- Les parents ne diront rien
- Il y aura un soupçon au niveau des parents, mais ce n’est pas leur affaire
- Dogbo affiche un non strict
- Rejet à l’égard de la femme
- Les parents attirent l’attention de leur enfant sur la fille
- Les parents vont accepter contre leur gré, tout en se donnant le temps
d’observer la fille
- Le fils et la femme ne peuvent pas rester ensemble
- Les parents ne peuvent pas accepter
Inès Y. Olive ZOUNNON 100
- Je ne veux même pas m’approcher de la femme de Ouidah (Couffo)
- La maman ne peut pas accepter
- Les parents ne seront pas d’accord
- Ils ne diront rien à priori, peut être mener des enquêtes sur elle
- ils vont accepter
- Les parents accepteront
- On risque de m’écarter de ma famille parce que mon père en a pris une qui l’a
déjà empoisonné en 1979 (parakou)
- ils vont me conseiller de faire attention mais ne vont pas s’opposer (porto-
novo)
- réticence, attention, seront contre
- avertis il y aura un mais, pas de problème
- je ne sais rien de leur réaction
- ils ne diront rien mais me demanderont de faire très attention « énon gbè, bo lè
non gbè »
- mes parents ne vont pas s’opposer
- quand je commence à sortir avec une femme, j’envoie son nom à ma maman et
elle va vers les sages pour voir si cette personne est bien pour moi et m’avertit.
Donc, quand je vais tomber sur une femme de Ouidah, je ferai la même et elle
me conseillera avant que ce ne soit trop tard
- quand on est homme, on est responsable ; je ne ferai pas un choix sur les
considérations de ma mère
- mes parents vont refuser, mais moi je sais ce que je veux. Si mon père dit non,
ça peut influencer
- non
- si c’est ma mère qui le dit, je ferai attention
- non
- non
- non
- ils vont s’appuyer sur les préjugés
Inès Y. Olive ZOUNNON 101
- oui
- opposition passive (peut se négocier ou dégénérer)
- non, mais en gardant une certaine limite
- ne pas dépasser le pont
- j’ai mon cousin voulant se marier à une femme de Ouidah, ma mère s’est
opposée. Mon propre grand frère a dû mentir à notre mère que sa femme
d’origine ouidanienne est de grand popo. Il a fallu d’abord qu’elle fasse des
enfants….
- les gens ne s’étonnent pas s’ils t’arrivent un problème
- il faut vivre l’expérience, voir les comportements de la femme, il faut une
durée d’amitié
- pour prendre une femme de Ouidah, savoir : si le papa est vivant ? Comment il
est ? Ce n’est pas d’office, si tu aimes ta vie, il faut avoir peur
- peu importe
- non
- peu importe
- attention
- pas de méfiance
- me prendre en conséquence avant de l’épouser

5-
-oui
-oui
-oui, si il n’y a rien de négatif
-il peut faire avec (Couffo)
-jamais (Couffo)
-si la femme de Ouidah peut changer de caractère d’accord, mais du tout pas
- Non
- ça peut arriver
- c’est possible
Inès Y. Olive ZOUNNON 102
- Jamais, c’est impossible, mais possible dans le rêve (Parakou)
-même si il y a l’amour, il y aura méfiance et doute
-oui
- peut être, ça dépend de l’amour
- ça peut arriver
- je ne ferai jamais fi de tout ce qui se dit à propos d’elle, je peux l’aimer à
n’importe quel degré, je ne peux pas mourir de l’amour, je suis catégorique
- tout dépend de ses comportements
- ça peut arriver, il suffit qu’elle m’aime
- pas prêt !
- A condition que je l’isole de ses parents. La probabilité est très faible de la
laisser revenir à Ouidah.
- deux positions : tout dépend de celle qu’on a en face ; la guerre annoncée ne
tue pas l’handicapé « ogun agbptêlê ki dja aro », donc faire attention surtout si
c’est des idées qui viennent des parents
- en Afrique, la femme épousée appartient à ses parents et quand on est au nord,
la distance….
- si tu prends la viande du porc et tu as les maux de ventre, il faut éviter
- en Afrique, c’est deux familles qui se marient et donc il faut faire attention.
- papa, ça lui importe peu, ma mère sera gênée tout de suite
- mes parents seront gênés et vont chercher à savoir si les parents de la fille sont
de Ouidah ; si la maman de la fille est de Ouidah, c’est très grave
- mon papa non, ma maman non plus
- ma mère va bien observer la fille
- il y aura rien.

Inès Y. Olive ZOUNNON 103


Enquête1 : opinions des jeunes de 18ans à 25ans sur la femme de Ouidah

R E C A P I T U L A T I F DES D O N N E E S T O U T E S L O C A L I T E S C O N F O N D U E S
1 - La localité figure t-elle parmi vos critères en matière de choix de conjoint?
Nombre 100

OUI 63%

NON 28%

INDIFF 9%

2 - Dans quelles localités ne souhaitez vous pas prendre femme?


Localité
Abomey Agonlin Dogbo Grd-pop Lokossa Djougou Ouidah Pobè Porto N
d'origine
Taux 21% 0% 1% 0% 4% 3% 54% 1% 0%

3 - Quand je dis "femme de Ouidah" quelle est l'image qui s'impose à vous?

Nombre 100

Positive 2%

Négative 75%

Indifférent 23%

Inès Y. Olive ZOUNNON 104


4 - Etes vous prêts à prendre une femme de Ouidah malgré ce qu'on en dit?
Nombre 100

OUI 14%

NON 69%

Indifférent 17%

5 - Telle que vous connaissez ………………..………………… première réaction?


Nombre 100

OUI 3%

NON 61%

Indifférent 36%

Inès Y. Olive ZOUNNON 105


Enquête 2 : opinion des veuves face aux causes de décès de leur époux
Graphique 1: Cause des décès

Accident maladie Mystère


Porto novo 10% 60% 30%
Lokossa 10% 60% 30%
Abomey 30% 20% 50%
Agonlin 30% 50% 20%
Ouidah 0 40% 60%

Enquête 3 : Opinion des hommes mariés d’ailleurs ayant épousé une femme de Ouidah

2 - Données statistiques

Votre femme Pensez-vous que pour des


Pensez-vous que pour Avez-vous eu des amis Si vous devez vous
est-elle raisons ci-après
des raisons ci-après défunts dont les femmes remarier aujourd'hui,
excessivement énumérées, votre épouse
énumérées, votre originaires de Glexwe seriez-vous prêt à
jalouse, possessive, est capable d'user de
épouse est capable de ont été soupçonnées de prendre à nouveau une
capable à tout pour forces occultes pour avoir
vous supprimer la vie? les avoir tuer? femme de Ouidah?
vous garder? satisfaction?

Oui 95% 90% 40% 100%

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Votre femme Pensez-vous que pour des
Pensez-vous que pour Avez-vous eu des amis Si vous devez vous
est-elle raisons ci-après
des raisons ci-après défunts dont les femmes remarier aujourd'hui,
excessivement énumérées, votre épouse
énumérées, votre originaires de Glexwe seriez-vous prêt à
jalouse, possessive, est capable d'user de
épouse est capable de ont été soupçonnées de prendre à nouveau une
capable à tout pour forces occultes pour avoir
vous supprimer la vie? les avoir tuer? femme de Ouidah?
vous garder? satisfaction?

Non 5% 5% 10% 40%

Indécis 5% 50% 60%

Récapitulatif 100% 100% 100% 100% 100%

-vous délaissez votre femme au profit d’une autre


-très riche, votre femme veut hériter de votre richesse
-votre femme a un amant auquel elle tient
-autres

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Inès Y. Olive ZOUNNON 108
Graphe n°1 : Opinion des hommes mariés d’ailleurs ayant épousé une femme de
Ouidah

120%

Positif; 100%
100% Positif; 95%
Positif; 90%

80%

Indécis; 60%
60%
Indécis; 50%

Positif; 40% Négatif; 40%


40%

20%
Indécis; 5% Négatif; 10%
Négatif; 5% Négatif; 5%

0%
Question N°1 Question N°2 Question N°3 Question N°4 Question N°5

Positif Négatif Indécis

Source : enquête de terrain 2007

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Fiche diagnostic de la carte d’identité capacitaire intrinsèque du sujet de
recherche « la Glexwenu, tueuse de mari : quand la rumeur devient certitude »

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Inès Y. Olive ZOUNNON 111
Inès Y. Olive ZOUNNON 112
Inès Y. Olive ZOUNNON 113
Inès Y. Olive ZOUNNON 114
Table des matières
DEDICACE ................................................................................................................................ 4
REMERCIEMENTS .................................................................................................................. 5
RESUME ................................................................................................................................... 7
INTRODUCTION .................................................................................................................... 8
Première Partie : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE ................................... 11
CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE ................................................................................... 12
1. PROBLEMATIQUE ............................................................................................................ 12
1.1. Problème........................................................................................................................ 12
1.2. Hypothèses .................................................................................................................... 14
1.3. Objectifs ........................................................................................................................ 14
1.3.1. Objectif Général ......................................................................................................... 14
1.3.2 Objectifs spécifiques ................................................................................................... 14
2. CLARIFICATION CONCEPTUELLE ............................................................................... 15
3. ETAT DE LA QUESTION .................................................................................................... 22
4. PERTINENCE DE L’ETUDE ............................................................................................. 30
4.1. Raisons subjectives ....................................................................................................... 30
4.2. Raisons objectives ......................................................................................................... 31
CHAPITRE II : METHODOLOGIE........................................................................................ 38
1. Cadre de l’étude ................................................................................................................... 38
1.1. Délimitation et découpage territorial............................................................................. 38
1.2. Cadre humain ................................................................................................................ 38
1.2.1. Groupes socio - culturels ............................................................................................ 39
1.2.2. Caractéristiques démographiques de la population .................................................... 39
2. Nature de l’étude .................................................................................................................. 40
3 .Collecte et analyse des données ........................................................................................... 41
3.1. Techniques et outils de collecte .................................................................................... 41
3.2. Base de sondage et échantillonnage .............................................................................. 41
4. Limites et difficultés............................................................................................................. 45
Difficultés liées au cadre de l’étude ..................................................................................... 46
5. Durée de l’étude ............................................................................................................... 47
Deuxième partie : PRESENTATION ET ANALYSE DES RESULTATS DE TERRAIN .... 49
CHAPITRE I : La Glexwenu dans l’imaginaire des populations locales de Ouidah et des
autres ........................................................................................................................................ 50
1. Les images et discours : (Hô-Gbé) et (Hô) ...................................................................... 50
2. Une vue sur la personnalité de la Glexwenu ........................................................................ 51
2.1. La GLEXWENU : une réalité ambivalente................................................................... 51
2.1.1. L’opinion des jeunes et la force du Préjugé ................................................................... 51
2.1.2. La force de la personnalité et l’exaltation du moi chez la Glexwenu ........................ 53
3. La Glexwenu, le Gbotémi, le mantindjan, le gbass, le bô… ............................................... 56
CHAPITRE II : Histoire politique et mutations socioéconomiques observées à Ouidah : les
sources probables de la rumeur ................................................................................................ 63
1. Le cas de Savi sous Dè Houffon et Abomey sous Agadja ............................................... 63
2. L’histoire sociale de la femme de Ouidah ........................................................................ 69
3. L’analyse Indicamétrique ................................................................................................. 73
SUGGESTIONS....................................................................................................................... 76
CONCLUSION ........................................................................................................................ 77
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ................................................................................. 80
ANNEXES ............................................................................................................................... 82

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