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La mission spatiale Rosetta

Physique II, année 2017 — filière PSI Mines Ponts

Ce sujet propose de revenir sur l’exploit réalisé par l’Agence Spatiale Européenne lors de l’accom-
plissement de la mission Rosetta. Cette mission consistait à rejoindre la comète 67P Churyomov –
Gerasimenko (rebaptisée Churry à cette occasion) sur son orbite à plusieurs centaines de millions de
kilomètres de la Terre. Une fois sur place la sonde devait étudier l’environnement de Churry en se
satellisant autour d’elle. Une fois ce premier exploit réalisé le 6 août 2014, la sonde Rosetta devait
envoyer un robot, nommé Philæ, pour qu’il se pose sur la comète et réalise une étude in situ. Ce robot
a réussi à se poser sur la comète le 12 novembre 2014, il a ensuite réalisé sa mission de façon quasi-
nominale pendant 3 jours dans des conditions physiques extrêmes. Il a ensuite transmis les données
recueillies vers Rosetta toujours en orbite autour de Churry. Rosetta les a ensuite envoyées vers la
Terre où nous les avons reçues quelques dizaines de minutes plus tard.
La réalisation complète de cette mission aurait pu être présentée comme un exploit retentissant de la
conquête spatiale, n’ayant rien à envier aux premiers pas de l’homme sur la Lune. Cependant, le fait
que Philæ se soit posé de façon peu stable, le traitement médiatique de ce genre d’évènement, et bien
d’autres facteurs plus complexes, n’ont pas permis de se rendre compte de l’incroyable performance
scientifique réalisée à l’occasion de cette mission.
Ce sujet revient sur différents aspects de la problématique associé à cette mission. La première partie
consiste en l’étude des propriétés orbitales de Churry, la seconde partie consiste en une étude de
l’environnement des comètes du type de Churry et notamment de sa chevelure et de sa queue. La
dernière partie est une étude technique de la motorisation de la foreuse de Philæ. Ces trois parties
sont totalement indépendantes.
Les résultats numériques des calculs seront des ordres de grandeurs ne possédant au plus qu’un seul
chiffre significatif. Les valeurs numériques utiles sont rassemblées en fin d’énoncé. Hormis le nombre j
tel que j 2 = −1, les grandeurs complexes sont soulignées. Une quantité surmontée d’un point désigne
dr
la dérivée temporelle de cette quantité : ṙ = .
dt
Etude de la comète 67P Churyomov – Gerasimenko
La comète étudiée s’appelle Churyomov – Gerasimenko, du nom des scientifiques ukrainiens M. Chu-
ryumov, l’utilisateur du télescope, et Mme Gerasimenko, la comparatrice d’images, qui l’ont co-
découverte en 1969. Cette comète mesure entre 3 et 5 km de diamètre et tourne sur elle-même en
une douzaine d’heures. Voilà à peu près tout ce que l’on savait sur la comète objet de Rosetta et
Philae. Les estimations sur sa masse, varient, quant à elles, d’un facteur 10 et sa forme exacte restera
un mystère jusqu’en juillet 2014 date de la première photo envoyée par Rosetta. Le noyau de la comète
n’a pu être observé que depuis la Terre (le Very Large Telescope au Chili en lumière visible ou proche
infrarouge) ou les satellites tournant autour de la Terre (Hubble en lumière visible, Spitzer en moyen
infrarouge). De ces observations ont été tirées des courbes de lumière qui, elles-mêmes, ont permis de
déterminer quelques unes de ses caractéristiques.
1 — En appliquant le principe fondamental de la mécanique (Comète)
à une comète de masse m en orbite circulaire de rayon R autour Centre !
de l’ellipse
du Soleil, retrouver la 3e loi de Kepler. Dans le cas d’une orbite $
elliptique, on peut démontrer que cette relation se généralise en % %&
"#
remplaçant le rayon R par le demi grand axe a de l’ellipse (voir (Soleil)
figure 1). En déduire la relation entre le demi-grand axe a de Aphélie Périhélie
l’ellipse parcourue par la comète, la période T de la comète, la
masse du Soleil M⊙ et la constante de gravitation G. Déterminer Figure 1 – Orbite elliptique d’ex-
la valeur numérique de la période Tc de la comète Churry. On centricité e et de demi-grand axe a.
donne 2πac = 33 · 1011 si et on prendra 1 an ≃ 31 · 108 secondes.
2 — On ne suppose plus la trajectoire circulaire, et on note ⃗r le vecteur position de la comète dans
le référentiel héliocentrique et r = ∥⃗r∥. Donner l’expression du moment cinétique ⃗σs de la comète par
rapport au Soleil. Montrer que la trajectoire de la comète est contenue dans un plan que l’on précisera.
Déterminer l’expression de C = ∥⃗σms ∥ en fonction des coordonnées polaires (r,θ) de la comète dans ce
plan.

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3 — Etablir la relation 12 mṙ2 = Em − Eeff (r) où Em est l’énergie mécanique supposée négative de
la comète et Eeff (r) son énergie potentielle effective que l’on exprimera en fonction de C, G, m, M⊙
et r. Tracer la représentation graphique de Eeff (r), et positionner sur ce graphique Em , l’aphélie rmax
et le périphélie rmin (voir figure 1).
4 — Montrer qu’il existe une trajectoire circulaire correspondant à r = rmin = rmax = r0 et
Em = E0 . Déterminer l’expression de r0 en fonction de C, G et M⊙ puis en déduire celle de E0 en
fonction de C, G, M⊙ et m. On note respectivement Ec (r) et Ep (r) les énergies cinétique et potentielle
de la comète à la distance r du Soleil, déterminer la relation entre Ec (r0 ) et Ep (r0 ).
5 — Etablir l’équation du second degré en r dont rmin et rmax sont solutions, qui permet de
déduire l’expression de Em en fonction de G, m, M⊙ et a. On donnera cette expression. Après avoir
montré que son discriminant est bien positif, résoudre l’équation et déterminer la relation liant e à
Em , C, a et m.
6 — Quelle est la propriété de la vitesse aréolaire de la comète, rapport de la surface balayée par
le rayon vecteur de la comète sur le temps mis par la parcourir ? Quel est l’astronome qui a identifié
cette propriété qui√porte son nom ? Sachant que l’aire d’une ellipse d’excentricité e et de demi-grand
axe a est S = πa2 1 − e2 , déterminer la relation entre la période de la comète et le demi-grand axe
de l’ellipse. Commenter le résultat obtenu.
Rosetta a bénéficié de 4 assistances gravitationnelles afin d’acquérir l’énergie nécessaire pour rejoindre
la comète sur son orbite. La précision requise pour l’accomplissement de cet exploit est absolument
insensée : fenêtre de quelques kilomètres entre des objets sur des orbites gravitationnelles à des vitesses
de l’ordre du kilomètre par seconde, à plusieurs centaines de millions de kilomètres de la Terre. Peu
de gens ont pris conscience de l’exploit réalisé par les ingénieurs de l’Agence Spatiale Européenne.
7 — Qu’entend-on par assistance gravitationnelle ? On étaiera sa réponse par un schéma explicatif.

Données numériques
• Constante de la gravitation : G = 6,7 × 10−11 m3 · kg−1 · s−2
• Vitesse de la lumière : c = 3 × 108 m · s−1 .
• Masse du Soleil : M⊙ = 2 × 1030 kg.
• Luminosité du Soleil : L⊙ = 4 × 1026 W
• Unité astronomique : 1 ua = 1,5 × 1011 m
Caractéristiques de la comète Churry
• rmax : aphélie, distance au plus loin du Soleil : 5,70 ua
• rmin : périhélie, distance au plus près du Soleil : 1,30 ua
• Taille caractéristique : 2000 m (albédo de 4%)
• Période de rotation autour de son axe principal : 12,6 h

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# »
#» t e #» d #» #» #» d #»
u θ − r θ̇ 2 #»
= r θ̈ #»
r v
q 1 – OM = r u r avec r = C ; v = = r θ̇ u θ ; a = u r . Le principe fonda-
dt dt
¡ #» 2 #» GmM ¯ #» G M¯
mental de la dynamique s’écrit : m r θ̈ u θ − r θ̇ u r = − u r , soit θ̈ = 0 et θ̇ 2 r =
¢
2
.
s r r2
2π r3
Or θ̇ = , soit T = 2π . Pour Chury, en remplaçant r par a, T = 6,5 ans.
T G M¯
Remarque
Intérêt de donner 2πa plutôt que a ?
#» #» #» d #»
σ S #» #» #» GmM ¯ #»
µ ¶
q 2 – σS = r ∧ m v . = v ∧m v + r ∧ − r = 0 (produits vectoriels entre vecteurs
dt r3
paralèlles). #»
σ S est donc constant et #» r est perpendiculaire à ce vecteur constant, la trajectoire est
donc plane dans un plan perpendiculaire à #» σS.
r˙ 0
     
r

σS =  0  ∧m r θ̇  =  0  de norme mr 2 θ̇ et donc C = r 2 θ̇
0 0 mr 2 θ̇
GmM ¯ 1 mC 2 GmM ¯
q 3 – E m = E c + E p = 21 m r˙2 + r 2 θ̇ 2 − = 2 m r˙2 +
¡ ¢
− soit
r 2r 2 r
mC 2 GmM ¯
E eff (r ) = −
2r 2 r
E eff
r min r 0 r max r

Em
E0

q 4 – La trajectoire circulaire correspond à r = C t e , le minimum de la courbe E eff (r ).


dE eff mC 2 GmM ¯ C2 mC 2 GmM ¯
=− 3 + = 0, soit r 0 = . E (r
c 0 ) = = = − 21 E p (r 0 ) (le terme en r˙
dr r r2 M ¯G 2r 02 2r 0
GmM ¯
disparait puisque r = C t e ), et E 0 = − .
2r 0
q 5 – D’après la figure 1, r min = a(1 − e) et r max = a(1 + e). Pour ces deux valeurs de r , le terme en
mC 2 GmM ¯
1
2
m r˙2 est nul et E m = − , ce qui donne l’équation du second degré en r
2r 2 r
E m r 2 +GmM ¯ r − 21 mC 2 = 0
1 GmM ¯ 2
µ ¶
2 2
de discriminant ∆ = (GmM ¯ ) +2E m mC . Ce discriminant est positif si E m > − . En
2m C
1 GmM ¯
remplaçant C 2 par r 0 M ¯G (d’après la question précédente), on obtient E m > − = E 0 , ce
2 r0
qui est cohérent avec la courbe.
−GmM ¯ ± ∆
Les racines sont r = . En identifiant avec les expressions de r min et r max , cela donne
2E m
−mM ¯
a= (on retrouve la même relation que pour la trajectoire circulaire en remplaçant le rayon
2E m
2E m C 2
par le demi grand axe) et e 2 − 1 = 2 2
soit
mM ¯ G
C2
e2 − 1 =
2E m a 2
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q 6 – La surface balayée pendant dt est de 12 × r × (r dθ),

r dθ
S dθ
r C
dS C te
soit une vitesse aréolaire de = = C . Cette loi est la deuxième loi de Kepler. On intègre l’équa-
dt 2 p
CT
tion précédente sur une période πa 2 1 − e 2 = . On utilise le résultat de la question précédente
2
pour 1 − e 2 , ce qui donne
4π2 a 3
T2 =
M ¯G

soit une nouvelle fois la même relation que pour la trajectoire circulaire en remplaçant le rayon
par le demi grand axe.
q 7 – L’assistance gravitationnelle est l’utilisation de l’attraction d’une planète pour modifier la
trajectoire d’un engin spatial. Voir l’animation de Geneviève Tulloue : www.sciences.univ-nantes.
fr/sites/genevieve_tulloue/Meca/Planetes/assist_grav.php
L’objectif est d’utiliser ce phénomène pour économiser le carburant. Dans le schéma ci-dessous,
le cercle représentant la planète est celui de la zone d’action gravitationnelle de celle-ci, zone dans
laquelle on peut négliger l’influence du soleil. On suppose que la durée du transit dans cette zone
est faible de sorte que la vitesse de la planète est inchangée durant le transit. La loi de composition
des vitesses donne : #» v C /¯ = #»
v C /P + #»
v P /¯ . On dessine ce qui se passe avant l’entrée dans la zone,
puis après la sortie de cette zone.

#» Planète
vC /⊙


v #»
P /⊙ v C /P ,après
Comète
#» #» #» #»
v
vC /⊙ v C /P vC /⊙ C /P ,après

v C /P

#» #»
direction du soleil v P /⊙ v P /⊙
Référentiel soleil Réf. soleil → Déviation Réf. planète →
avant Réf. planète dans réf. planète Réf. soleil
¯ #» ¯
¯ v C /P ¯ n’a pas changé par conservation de l’énergie, l’angle ( #» v C /P ) s’est refermé, ¯ #»
v P /¯ , #»
¯ ¯
v C /¯ ¯ a
donc augmenté.

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Rapport de jury :
Le sujet comporte de nombreuses questions très classiques (loi de Képler, moteur synchrone) ce qui permet
de juger le travail effectué par le candidat pendant les deux années de préparation.
La calculatrice n’était pas autorisée, mais le sujet propose neuf applications numériques qui ont été valorisées
dans le barème. Une majorité de candidats ont recherché les applications numériques avec plus ou moins de
réussite. En effet, nombreux sont incapables d’effectuer à la main une évaluation numérique avec un chiffre
significatif. Des expressions comme 10 exposant 3,5 ou 9,9/(racine de 2) semblent insurmontables. Dans
l’avenir, il semble important qu’ils s'entraînent à ce type d’estimation. Rappelons qu’un résultat numérique
en physique ne peut pas être présenté sous forme d’une fraction (⅓ Volt…). La physique est quand même
une science numérique !
La présentation des copies a été souvent soignée, ce qui a facilité la correction et incité les correcteurs à la
bienveillance, mais nous avons trouvé aussi des brouillons peu lisibles.
En revanche, certains candidats affirment les résultats de questions simples sans apporter de justification ce
qui nuit à leur crédibilité dans les réponses aux questions plus complexes. La vérification de l’homogénéité
de la réponse proposée reste comme l’an dernier d’actualité, tant il est choquant de relever des réponses
manifestement inhomogènes en raison d’une erreur de calcul facilement détectable.

QQ 1-7 : la troisième loi de Képler est généralement connue, mais pas toujours correctement démontrée.
L’application numérique assez longue donne des résultats très dispersés. Le théorème du moment cinétique
est attendu pour justifier le caractère plan de la trajectoire. Ici, attention aux raisonnements circulaires
(elliptiques…) : on ne peut pas se placer en coordonnées polaires en supposant (implicitement) la trajectoire
plane pour finalement conclure que la trajectoire est plane ! Le graphe d’énergie potentielle effective n’est
pas toujours maîtrisé. L’expression de l’excentricité a été rarement trouvée. La deuxième loi de Képler est
connue, mais la démonstration de la troisième loi rare. L’assistance gravitationnelle est parfois bien
expliquée, mais peu de candidats traitent cette question.

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