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3/8/23, 14:41 Philosophies de la nature - Schelling.

Du processus naturel au processus mythologique - Éditions de la Sorbonne

Éditions
de la
Sorbonne
Philosophies de la nature  | Olivier Bloch

Schelling. Du
processus naturel
au processus
mythologique
Jean-François Marquet
p. 227-236

Full text
1 La relation de Schelling à la philosophie de la nature pose
une curieuse énigme. Pour ses contemporains comme pour
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la postérité, Schelling apparaît, en effet, comme le


représentant par excellence, sinon même comme le père
fondateur, de la Naturphilosophie au point que ce terme a
parfois été utilisé (y compris par lui-même) pour désigner
l’ensemble de son système — cela, du moins, jusqu’en 1806.
Passé cette date, en effet, la philosophie de la nature subit
une éclipse quasi totale, aussi bien dans les publications
(rares) que dans les brouillons et les cours (toujours
abondants) de notre auteur. On peut donc se demander
légitimement où elle a bien pu passer, et c’est à cette
question que les pages qui suivent voudraient apporter un
élément de réponse : en montrant que c’est la philosophie de
la mythologie qui a recueilli les éléments laissés vacants par
l’éclipse de la philosophie de la nature, et aussi que ce virage
au mythe était déjà contenu en germe dans les écrits
de 1801-1806.
2 Rappelons tout d’abord que pour le dernier Schelling, la
mythologie apparaît comme une «  religion sauvage  », «  de
même qu’en allemand on appelle Wildfeuer [feu sauvage] le
feu naturel du ciel, Wildbäder [thermes sauvages] des eaux
naturellement chaudes  »1. La mythologie est donc une
religion naturelle, non pas cependant au sens classique du
terme, mais au sens d’une religion se produisant dans
l’esprit de manière spontanée, aveugle et purement
immanente, et à laquelle on est en proie sans pouvoir
l’esquiver. La religion révélée repose sur la foi, i.e. sur la
libre adhésion à la « bonne nouvelle » d’une libre décision de
l’Absolu  ; la mythologie, au contraire, a un caractère
impersonnel qui fait d’elle «  un phénomène qui, en
profondeur, durée et universalité, n’est comparable qu’à la
nature même ».
3 Cette analogie avec la nature ne concerne pas seulement la
forme de la production de la mythologie, elle vaut également
pour son contenu  : le mythe, mythos, est d’abord un récit,
une histoire ; or, comme nous le verrons, celle-ci a la même
structure que l’exposition du processus naturel, si bien qu’on
peut dire que «  la mythologie est seulement l’histoire de la
nature se répétant à une plus haute puissance ». Il convient

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de souligner ici l’idée de répétition (Widerholung). En effet,


que la mythologie soit seulement l’histoire de la nature, ce
serait là un simple lieu commun, qui, des stoïciens à Max
Muller, n’a cessé de resurgir — soit qu’on voie dans la
mythologie une théorie exposée sous la forme d’une fable
(Heyne), soit qu’on y cherche une impression naturelle naïve
transposée en récit par substitution d’un nom propre au nom
commun (Muller)  ; mais pour Schelling, au contraire, «  la
mythologie n’est pas née sous l’influence de la nature, à
laquelle l’intérieur de l’homme est plutôt dérobé (entzogen)
par le processus  : simplement, le processus mythologique
passe, selon la même loi, par les mêmes étapes à travers
lesquelles la nature est originellement passée  »2. La
mythologie est un rêve — un cauchemar — pendant lequel
l’homme n’a pas vu le monde (l’observation de la nature
commençant en Grèce, i.e. là même où le processus
mythologique s’achève et s’éveille en prenant conscience de
soi dans l’enseignement des Mystères)  ; mais cette nature
ignorée revient, se répète, insiste dans le rêve lui-même, où
les mêmes puissances sont à l’œuvre qui ont construit
l’univers. Pour Schelling, rappelons-le, l’homme est toujours
apparu comme la récapitulation de la nature, où celle-ci se
résume au terme de son évolution et dont il reprend les
éléments à un niveau supérieur (telle était déjà, en  1801, la
conclusion de la fameuse Profession de foi matérialiste de
Heinz Widerpost)  ; ces éléments ou puissances, dès 1801
également, sont au nombre de deux  : la pesanteur et la
lumière, dont le jeu construit la nature et qui finissent par
s’équilibrer dans une troisième puissance, l’organisme
vivant, culminant précisément dans l’homme comme lieu de
la conscience. Si l’homme remet alors ces puissances en état
de tension (tel est, pour Schelling, le sens du péché originel),
elles vont reproduire et répéter dans la conscience les
différentes phases de leur conflit, jusqu’à son point de
résolution qui est là aussi la production de la forme humaine
(d’où le caractère final de la mythologie grecque, fondée sur
des dieux anthropomorphes). Nous aurons donc à voir

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comment ce parallélisme s’est peu à peu mis en place, et


comment il se vérifie dans le détail.
4 Nous partirons d’une remarque d’ordre général  : ce que la
nature et la mythologie ont en commun, selon Schelling,
c’est d’«  être un monde en soi achevé (abgeschlossene) et,
relativement à nous, un passé »3. Nature et mythologie sont
donc l’une et l’autre en arrière, à la place du fondement
(Grund) : une fois qu’elle a produit l’homme, la nature cesse
d’évoluer, s’arrête, se fige — et alors commence l’histoire, cet
autre monde  ; de même, une fois éveillée sur elle-même
(dans les Mystères grecs) la mythologie s’effrite, laissant
place à la Révélation. Pour le Schelling de 1809, la nature et
le monde de la mythologie (le monde antique) se réduisent à
ce rôle de fond (Grund) permettant à « ce qui doit vraiment
être  » de surgir  ; mais, dans les textes de la philosophie de
l’identité, on trouvait au contraire affirmé le primat de la
nature sur l’histoire et du monde antique sur le monde
chrétien (par principe infini et inachevé) — non pas
cependant le primat de la mythologie sur la Révélation, car
Schelling n’avait pas encore élaboré cette distinction et
parlait encore d’une mythologie chrétienne : « la matière de
la mythologie grecque était la nature, l’intuition générale de
l’univers comme nature — la matière de la mythologie
chrétienne est l’intuition générale de l’univers comme
histoire, comme monde de la Providence  »4. Mais, comme
toutes les puissances doivent se retrouver dans chacune
d’elles, les dieux grecs, à l’origine purs Naturwesen, ont dû
«  se séparer de leur origine et devenir des êtres
historiques  », cela grâce aux poètes (Homère, Hésiode) qui
ont créé vraiment la mythologie en transposant les dieux de
leur sol natal (la nature) dans l’élément étranger de
l’histoire5  ; inversement, il appartiendra à l’avenir
d’«  implanter dans la nature les divinités idéales du
christianisme, comme les Grecs avaient implanté leurs
divinités réalistes dans l’histoire  » — et cela également par
une épopée, didactique cette fois, un nouveau De natura
rerum dont Schelling a peut-être rêvé un moment d’être
l’auteur. Reste que, durant cette période, ni la nature ni la

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mythologie ne sont conçues par Schelling comme des


processus, et que la notion de répétition n’intervient donc
pas6  ; la mythologie est seulement une «  symbolique de la
nature  », et, puisque la nature se présente comme une
structure déployée d’un coup (zumal) dans son entier, la
mythologie elle aussi s’exprimera dans une structure ou dans
une « chaîne » (Kette).
5 C’est cette structure mythico-naturelle qu’évoque le célèbre
finale de Bruno  : «  nous comprendrons l’âme royale de
Jupiter ; la puissance (Macht) est sienne ; au-dessous de lui
se trouvent le principe formateur et le principe informe, que
dans les profondeurs de l’abîme un dieu souterrain lie à
nouveau entre eux  »7. Le cours sur la Philosophie de l’art8
complète utilement ce texte un peu elliptique. Jupiter y est
défini comme «  le point d’indifférence absolu, où la
puissance absolue est unie à l’absolue sagesse », puissance et
sagesse correspondant aux deux concepts philosophiques
d’essence et de forme, et aux deux figures mythologiques de
Junon («  pure puissance [Macht] dépourvue de sagesse
élevée  ») et de Minerve (qui «  porte en soi tout ce que la
forme a de haut et d’imposant, d’artiste et de destructeur,
d’unissant et de divisant »). Le « principe formateur » et le
« principe informe » renvoient à Vulcain et à Neptune, le fer
et Veau, les deux extrêmes de la cohésion, i.e. de l’être-pour-
soi de l’individu en tant qu’il s’affirme (= cohésion absolue,
fer) ou se renonce (= cohésion relative, eau) — l’un et l’autre
relevant du pouvoir de l’Un-Tout en tant qu’identité
nocturne ou fondamentale, la pesanteur, signifiée ici par
«  Pluton ou le Jupiter stygien  ». Mais, ajoute Schelling de
manière un peu sibylline, Pluton n’est que l’Indifferenzpunkt
(= le Jupiter) du monde réel  : c’est Apollon, le dieu de la
lumière, qui est celui du monde idéal. Ce monde idéal ne
saurait être celui de l’histoire ou de la culture, car les dieux
grecs, nous l’avons dit, sont fondamentalement de purs
Naturwesen  : il s’agit donc, ici, du côté idéal de la nature
elle-même, Apollon-lumière faisant figure de « jeune Dieu »
opposé au « vieux dieu » Pluton (comme Dionysos à Kronos
dans la dernière philosophie)  ; quant aux deux assesseurs

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d’Apollon, Mars («  le Vulcain du côté idéal  ») et Vénus


(correspondant à Neptune, car issue de l’Océan, i.e. de
l’informe absolu), il faut sans doute ( ?) y voir les figures du
règne animal et du règne végétal. Mais le mot figure est au
fond impropre  : d’une façon générale, les dieux ne
«  signifient  » pas ceci ou cela, «  ils le sont  » (sie sind es
selbst)9. Reste que des dieux à qui rien n’arrive et qui
personnifient des fonctions éternelles de la nature (ainsi
Vulcain « toute la masse des phénomènes que produit le feu
souterrain », ou Vesta « la chaleur interne de la nature ») —
de tels dieux sont-ils vraiment quelqu’un  ? En fait, la
« première image sensible des dieux »10, ce qui reflète le plus
exactement leur condition, n’a rien d’individuel mais
correspond plutôt aux Weltkörper, aux astres sans histoire
ni processus, décrivant depuis toujours leur majestueux
mouvement sur eux-mêmes et autour de leur centre. Le
Weltkörper n’est pas pur point d’indifférence nocturne
(Pluton), ni pur point d’indifférence actuel et lumineux
(Apollon), mais à la fois l’un et l’autre, centre d’attraction et
de diffusion lumineuse, puissance et acte, non pas sur le
mode du suntheton mais sur celui de la fusion organique des
deux. Les dieux, comme les astres, n’ont ni histoire ni
personnalité, et dès lors, quoi qu’en dise Schelling, ils
semblent bien se réduire à de purs symboles qui n’ont de
sens que pour la conscience humaine qui les manie et les
met en place  : «  la vraie mythologie, lisons-nous dans
Philosophie et religion, est une symbolique des idées, qui
n’est possible que par les formes de la nature... Si vous
cherchez donc une mythologie universelle, alors rendez-vous
maître du point de vue symbolique sur la nature, laissez à
nouveau les dieux prendre possession d’elle et la remplir »11.
La mythologie est donc une œuvre humaine, même si le
faire auquel elle renvoie est l’activité suprême de la
conscience, la création artistique  ; elle n’est pas encore
quelque chose qui existe par soi-même.
6 Et pourtant, tous les éléments du scénario du futur
processus mythologique sont déjà là, mais comme facteurs
de ce que Schelling appelle dès cette date le processus

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naturel. Selon la Darstellung meines Systems der


philosophie de 1801 (le seul exposé que Schelling ne reniera
pas), la nature est conflit de la pesanteur et de la lumière. La
pesanteur désigne l’identité absolue en tant qu’elle est en
puissance, i.e. en tant qu’elle est son propre fondement
(Grund) — la lumière la même identité en tant qu’existante
ou plutôt en tant que pur exister (ce que sera aussi, dans la
dernière philosophie, A2 = Dionysos = Christ). Au cours du
processus dynamique (magnétisme, électricité, chimisme —
autant de phénomènes de polarisation), la lumière refoule
peu à peu la pesanteur qui « s’enfuit dans la nuit éternelle —
mais l’identité absolue elle-même ne rompt jamais
complètement le sceau sous lequel elle repose enclose  »12.
Pour passer de ce processus naturel au processus
mythologique, il suffira de donner à ces termes encore
abstraits de lumière et de pesanteur le statut de puissances
personnelles, capables de choix, de refus et de
consentement. C’est cette étape qu’accomplira la
Freiheitschrift de  1809  : la pesanteur, le Grund, s’y trouve
explicitement identifié au désir (Sehnsucht) qu’à Dieu de
s’engendrer lui-même, alors que la lumière apparaît déjà
comme l’incarnation dans la nature de ce qui, au niveau de
l’absolu, s’appelle le Verstand (le sens, le Verbe, le logos) et
qui, dans l’histoire, apparaît comme le Christ. Comme,
d’autre part, dans l’histoire humaine, le paganisme est conçu
comme le produit d’une résurgence du Grund par la faute
d’une initiative humaine, tout semble donc prêt à déboucher
sur la philosophie de la mythologie dans sa forme définitive.
Il n’en est pourtant rien, et le discours Sur les divinités de
Samothrace (paru en  1815, et longtemps le seul travail
connu de Schelling sur la mythologie) nous offre non pas
une histoire, mais à nouveau une chaîne (Kette) de divinités,
chaîne qui simplement est désormais linéaire, au lieu de
refléter une structure symétrique : « tout en bas, Cérès, dont
l’essence est la faim et la quête (Sucht)  », i.e. le désir,
premier début de toute manifestation  ; puis Proserpine,
«  essence ou fondement de toute la nature visible  », et que
suit Dionysos, «  seigneur du monde des esprits  »  ; liant les

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deux, et «  assurant la médiation entre eux comme avec le


supramondain  », nous trouvons ensuite Cadmilos ou
Hermès, enfin s’annonce le supramondain lui-même, «  au-
dessus de tous le Dieu libre du monde, le démiurge »13, qui
comme tel est extérieur à la chaîne. On retrouve là
l’enchaînement des puissances (A = B, A2, A3) qui, dans la
dernière version (1815  ?) des Weltalter, articulent, avant la
création du monde, l’image d’un univers possible pour le
proposer au libre choix de Dieu. Mais dans cette suite la
nature n’est encore qu’un moment (assez curieusement
personnifié par Proserpine) et l’enchaînement n’est pas à
proprement parler historique : c’est de toute éternité que les
puissances se sont ainsi disposées pour constituer l’échelle
entière du possible.
7 Néanmoins, il convient de souligner l’importance des
Weltalter quant à notre problème  : après avoir longtemps
hésité entre une conception structurale et une conception
génétique de la philosophie de la nature (ainsi encore dans
les conférences de Stuttgart de 1810), c’est avec cet ouvrage
que Schelling va opter définitivement pour la deuxième
solution. Maintenant, la nature est une histoire, ou plutôt
une succession d’événements qui mettent aux prises un
principe qui retient et contracte et un principe qui libère et
élargit, chacun de ces principes possédant une liberté qui fait
de ses raidissements ou de ses abandons quelque chose
d’imprévisible. En plus, chacun de ces événements ne se
borne pas à passer, mais il continue à se répéter au sein de
l’âge suivant du monde (ainsi les comètes, vestige actuel de
la «  solution électrique  » qui constitua l’état premier de la
matière), et le temps en s’écoulant se transforme en espace
où se juxtapose, comme dans un vitrail, tout ce qui a eu lieu.
Mais cette répétition peut s’opérer aussi dans la conscience
humaine : par exemple, les orgies dionysiaques reproduisent
la crise par laquelle l’inconscience de la nature, sur le point
d’accéder (en l’homme) à la conscience, s’exaspère en folie
furieuse (chez les fauves  : panthères, tigres, etc., d’ailleurs
associés à Bacchus). Mais tout cela reste à l’état non
systématisé — apparemment, du moins, car nous ne

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possédons pas la deuxième partie des Weltalter, où l’examen


du processus mythologique aurait pu trouver place.
8 En tout cas, lorsqu’en  1827 Schelling reprend son
enseignement à Munich, la cristallisation de ces analyses
partielles est chose faite, et il n’est pas impossible de
retrouver l’intuition fondamentale autour de laquelle elle
s’est opérée  : celle, en l’occurrence, du parallélisme
rigoureux entre processus mythologique et processus naturel
en tant que tous deux commencent de la même façon, par la
tentative que fait le Grund de créer par lui-même. Dès la
Darstellung de 1801, Schelling avait défini la nature comme
« l’identité absolue... considérée comme fondement (Grund)
de son être »14, donc comme ce qui n’est pas l’absolu même,
mais ce par quoi l’absolu s’engendre (natura — nascor) à
l’existence  ; en  1809, c’est le même Grund, désormais
expressément rapporté à Dieu, qui avait été posé (dans son
second surgissement) comme la source du paganisme, i.e. de
la mythologie. Schelling, possédant d’ores et déjà le scénario
du processus naturel, n’avait plus qu’à s’en servir pour
classer la masse de sa documentation mythologique  : c’est
cette transposition qu’il nous faut maintenant envisager sous
sa forme achevée, dans les cours de Munich et de Berlin.
9 Ici aussi, notre analyse sera forcément lacunaire, car
Schelling n’a jamais présenté un exposé systématique de la
philosophie de la nature (une histoire complète du processus
naturel) dans la perspective de sa « philosophie positive ». À
part quelques remarques dans la Philosophie de la
mythologie, le document essentiel demeure la Darstellung
des Naturprozesses, fragment d’un cours de Berlin
1843/184415, et qui ne va pas au-delà des toutes premières
étapes du processus — l’apparition du temps, de l’espace et
de la matière. À première vue, le scénario y demeure
identique à celui de la Darstellung de 1801, avec, au centre,
la lutte entre le vieux dieu nocturne de la pesanteur (Pluton,
le «  Jupiter stygien  ») et le jeune dieu de la lumière.
Néanmoins, lumière et pesanteur sont des expressions
désormais insuffisantes. «  La lumière, écrit Schelling, n’est
pas la puissance supérieure (+A), elle est seulement sa seule

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manifestation possible dans l’espace »16 ; et, à la place de la


pesanteur, il va faire intervenir das Gestirn, l’astre ou
l’astral, concept probablement emprunté à Paracelse (cette
«  nature mythologique  » parmi les Allemands). Pour
comprendre ce terme, il nous faut remonter au tout début de
la cosmogonie schellingienne. À l’origine du monde, selon
notre philosophe, on trouve non pas une matière déjà
présente, mais une explosion (un big bang, dirait-on
aujourd’hui), l’irruption d’une force qui aurait dû rester
centrale, cachée et qui s’est posée, ou qui a été posée, dans la
manifestation, i.e. la périphérie : c’est son effort pour rester
dans le centre sans renoncer pour autant à l’eksistence qui
produit le mouvement tourbillonnaire des astres, qu’on
retrouvera au terme de l’évolution intériorisé dans le circuit
perpétuel du sang. La même chose se répète sur la scène
mythologique  : la première religion, la religion proprement
préhistorique, est le sabéisme, le culte des astres, non pas en
tant qu’entités matérielles (la matière n’existe pas encore
dans la conscience), mais en tant que pur mouvement (d’où
l’étymologie du Cratyle  : les dieux, theoi, sont ceux qui
courent, thein)17. Ce moment est encore pré-mythologique,
car tout mythe raconte un événement et, dans le mouvement
éternel du ciel, il ne se passe rien, pas plus que dans la
préhistoire elle-même  : «  seule cette puissance universelle,
maintenant l’être partout dans l’uniformité et l’identité à soi,
hostile à la vie multiple et développée — seule cette
puissance explique le calme et le repos des temps pré-
historiques, comparable au calme profond et solennel du
ciel. Car, de même que le ciel ne connaît pas d’événement et,
aujourd’hui comme il y a des siècles, se trouve dans un calme
silence, de même cette époque »18.
10 Dans le mouvement de l’astre, le principe insurgé (-A, ou A =
B) règne encore exclusivement et s’affirme, au moins
tendanciellement, comme sujet ou centre unique.
L’événement inaugural, pour la nature comme pour la
mythologie proprement dite, va correspondre à l’approche
du second principe, la « lumière » ou Dionysos (+A), vis-à-
vis duquel le premier «  doit renoncer à la place du sujet, à

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laquelle il s’affirmait encore — il doit plutôt devenir objet


(Objekt) vis-à-vis de +A et pour lui [gegenstandlich], il doit
se subordonner à lui comme la matière de sa réalisation, se
matérialiser vis-à-vis de +A  »19 (ou, en termes
mythologiques, se féminiser). La matière n’est donc pas un
principe, mais un effet du processus, elle représente pour -A
une issue, une manière d’esquiver la menace de +A (d’où une
autre « étymologie » cratylienne dérivant le corps, sôma, du
verbe sôzein, mettre à l’abri, sauver)20. C’est cette
renonciation de -A à sa position centrale qui ouvre à
proprement parler l’espace, ce qui la fait apparaître comme
un élargissement, une dilatation permettant à la multiplicité
de se déployer. À vrai dire, cette katabolè, cet affaissement
ou abaissement qui est position d’un fondement, se trouvait
implicitement déjà à la base du monde sidérique, dans la
mesure où celui-ci est multiple et où les astres possèdent une
matérialité, une «  pesanteur  » propre par laquelle ils
affirment leur «  lieu  » (Ort)21 contre l’attraction générale,
souvenir de l’unité impossible du sujet primitif — cela avec
des gradations, les étoiles étant encore du B pur, la terre un
B déjà dominé (überwältigte)·, mais ce n’était pas à cette
corporéité que s’adressait l’adoration pré-historique, c’était à
l’«  astral  », au «  fondement immanent à eux tous [= les
astres] du mouvement sidérique  », au roi du ciel qui
possédait alors la conscience humaine à laquelle il imprimait
une vie nomade, errante, elle-même semblable à celle des
étoiles dans le désert des cieux. Maintenant, au contraire,
c’est la matérialité comme telle qui s’impose à la conscience
comme la forme actuelle de la métamorphose du Dieu  ;
Ouranos devient Ourania, au culte de l’astre se substitue le
culte des éléments, i.e. de l’« astral matérialisé » : le feu, où
se maintient le plus la nature exclusive et consumante du
principe initial — l’air, encore spirituel, puisque différents
gaz dans un même espace ne s’excluent pas, mais déjà
devenu passif, donc relativement matériel — l’eau, encore
plus avancée sur cette voie et qui est comme « le feu éteint »
(das gedämpfte Feuer)22. Mais ce devant quoi s’effectue
cette matérialisation (+A, Dionysos) n’apparaît pas encore

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comme tel — d’où, en mythologie, la figure ambiguë de


Mithra, ce dieu qui est « le matérialisant et le matérialisé en
un »23 et qui, de lui-même, se fait nature par amour pour les
créatures. Par ce biais ingénieux, le monothéisme primitif se
trouve maintenu malgré la pression polythéiste qui se fait de
plus en plus sentir : « on peut comparer dans cette mesure,
écrit Schelling, la doctrine sur Mithra et la religion perse à
ces formations de la nature qui doivent leur existence en
général à l’évolution organique dont fut saisie la terre et qui
ne seraient même pas nées sans cette orientation, bien
qu’elles soient à proprement parler une résistance contre
celle-ci. une réaction contre la vie »24.
11 Jusque-là, nous n’avons, dans la nature, rien qu’une matière
en général, donc indéterminée, et, dans la mythologie, rien
qu’un Dieu qui s’accroche obstinément à son unicité. Le
moment suivant va être caractérisé par l’apparition de corps
ou de dieux multiples, concrets et déterminés. Sur le plan
naturel, nous avons ici la reprise d’un thème qui est parmi
les plus anciens de l’œuvre de Schelling, puisqu’il est déjà
présent dans les Ideen zu einer Philosophie der Natur
de  1796 (probablement à travers un emprunt à
Eschenmayer)  : selon cette conception, la matière apparaît
d’abord comme matière en général, « à la puissance zéro »,
puis, à l’occasion du processus dynamique (magnétisme,
électricité, chimie), elle revêt des qualités variées à l’infini,
mais toutes réductibles à différentes modifications de la
cohésion  ; elle devient ainsi système de corps concrets, i.e.
non plus simples, comme l’élément, mais intérieurement
déterminés ou polarisés (gezweite) sur le plan magnétique
(d’où le son), électrique (d’où la couleur) et chimique (d’où la
chaleur, qui nous met au seuil de la vie). Il ne s’agit plus dès
lors d’une matière pure, mais d’une matière irriguée et
mobilisée par une lumière que cependant elle détourne et
fige dans la production d’une chose, au lieu de la laisser se
déployer en activité pure  : le corps est désormais un
suntheton où deux puissances (B et +A), et non plus
seulement une, ont imprimé leur trace, et toute qualité
exprime ainsi une brisure interne. Nous retrouvons le même

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conflit sur le plan mythologique avec, cette fois, les religions


du Proche-Orient (Phénicie et « peuples parallèles ») ; il n’y
a plus, ici, un dieu unique, mais deux : Kronos (= Moloch), le
dieu de la constriction et du refus de la vie, la puissance
ignée et destructrice qui exige la mort des premiers-nés — et
Dionysos, qui apparaît là sous la forme humiliée d’Hercule-
Melkart. En même temps, et par opposition à l’aniconisme
du sabéisme (et de la Perse), on voit surgir le fétichisme, i.e.
le culte de corps inorganiques, et tout d’abord de la pierre
informe (les lithoi argoi de Pausanias)25. Désormais, la
religion mythologique a des événements, une histoire (celle
des travaux du dieu souffrant, de la lumière opprimée par les
ténèbres) et des «  objets  » en qui elle se concrétise  : elle a
atteint le niveau du processus dynamique, dont la dernière
étape, nous l’avons dit, débouche directement sur la vie.
12 Le monde organique va être posé par une seconde katabolè,
par laquelle le principe aveugle et exclusif (B, -A) se laisse
absolument dominer par le principe positif (+A) à qui la
première l’avait rendu accessible. Désormais, la lumière,
l’activité, la vie ne sont plus des accidents de la matière, mais
c’est celle-ci au contraire qui se pose comme l’inessentiel et
qui laisse le primat à la forme. Alors apparaît comme telle la
troisième puissance (A3, ±A), l’esprit, le « sens » (le but ou
la fin du processus), alors que les deux premières puissances
agissaient aveuglément, l’une pour s’affirmer, l’autre pour la
repousser. Mais cette troisième puissance n’est au fond rien
d’autre que la première ramenée à sa parfaite subjectivité —
le mot étant pris ici non plus au sens d’affirmation de soi,
mais, plus correctement, au sens de sujétion, soumission, zu
Grund gehen  : au centre, en effet, il ne saurait y avoir un
acte, mais seulement une puissance, qui, grâce au processus,
est seulement devenue ré-fléchie sur soi, et donc consciente.
L’animal, et surtout l’homme, correspond ainsi à l’«  astre
entièrement surmonté  » (das vollig uberwundene
Gestirn)26. Sur le plan mythologique, cette seconde katabolè
va se traduire tout naturellement dans la figure féminine de
Cybèle  : «  Tout en Cybèle indique une descente
(Herabkommen, descendere). Elle descend des montagnes,

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comme la nature elle-même descend progressivement du


massif originel (Urgebirg) par le contrefort (Vorgebirg)
jusqu’à la plaine. L’état originel de la nature est un état
d’erectio (Aufrichtung) universelle. Le vertical est partout le
plus ancien, l’horizontal le plus récent  »27 — et c’est
seulement sur ce sol plat, ou plutôt descendu, devenu fond
(Grund) que peut surgir ce qui doit être, le monde organique
et, par excellence, l’ordre humain.
13 Dans la conscience religieuse, ce surgissement va se traduire
par l’apparition, après la seconde katabolè, de mythologies
organiques — l’Égypte, l’Inde, la Grèce —, les deux
premières correspondant à la création organique pré-
humaine, la troisième à l’homme lui-même. Il est peut-être
possible de préciser davantage et de faire correspondre
l’Égypte, avec ses dieux thériomorphes, au règne animal et
l’Inde au règne végétal (comme le disait déjà la Philosophie
de l’art28, « on comprendra le mieux l’esprit de leur religion,
de leurs coutumes et de leur poésie [= des Hindous) si on
considère l’organisme végétal comme leur type
fondamental  »). Mais Schelling, dans sa dernière
philosophie, ne reprendra pas ouvertement cette analogie un
peu trop forcée, et il se bornera à maintenir le parallélisme
entre l’Égypte et l’apparition de l’animalité : « de même que
l’apparition des bêtes dans la nature n’a rien de contingent,
de même qu’elles sont un moment nécessaire du processus
naturel universel et progressif, de même ce n’est pas par
hasard, mais de manière nécessaire, que les bêtes
apparurent dans la mythologie égyptienne, et elles y
désignent un moment effectif du processus théogonique »29.
Ces animaux sont plus précisément des bêtes de proie, lions,
faucons et panthères, où s’exprime l’ultime flambée de colère
du principe aveugle avant sa renonciation définitive  : «  la
fureur avec laquelle le fauve déchire l’inoffensive créature est
la colère du principe sentant venir sa propre mort  »30. En
revanche, le caractère «  végétal  » de l’Inde reste inévoqué,
Schelling insistant plutôt sur une autre analogie (aussi
hasardeuse) où tout est rapporté à l’homme : l’Égypte (avec
son culte de l’immortalité physique) correspondrait à

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«  l’homme dans sa manifestation corporelle  », l’Inde à


« l’homme à l’état d’âme » (désincarnée et évanouissante), la
Grèce enfin au troisième moment «  où l’unité immatérielle
rentre dans l’unité matérielle pour la transfigurer  »31. Ce
corps transfiguré, on y reconnaît celui des dieux grecs, sur
lequel se clôt le processus mythologique, comme l’apparition
de ce qu’on appellera plus tard l’homo sapiens met fin au
processus naturel.
14 Ainsi donc, la mythologie apparaît comme la répétition dans
la conscience « du passé déjà vaincu dans la nature
extérieure », si bien qu’avec elle nous obtenons « une
philosophie de la nature réfléchie sur un plan supérieur (in
einem höheren Reflex) » — pour reprendre la définition que
Schelling donnait en 1802 de la philosophie de l’art. Nature,
art, mythologie ressortent d’une même fonction
fondamentale de l’esprit — l’activation de ce Grund par
lequel il est spontanément et inconsciemment créateur, et
qui est peut-être l’ultime avatar de l’imagination productrice
kantienne. Entre 1807 et 1827, l’évolution de Schelling l’aura
fait passer du point de vue de la production à celui de la re-
production, à l’idée de la mythologie comme remise en jeu
de la nature sur la scène de la conscience, retour du refoulé
qui a le caractère inquiétant de l’Un-heimlich32. À l’idéal d’un
savoir systématique de la nature se substitue, après 1806,
celui d’un récit qui est, en fait, un mythe des origines : c’est
que la nature comme la mythologie constituent notre passé
et qu’elles ressortent donc de cette dimension du souvenir
qui est désormais, pour Schelling, l’objet de sa plus intime
fascination.

Notes
1. Sämtliche Werke (= SW), ed. Cotta, XI, p. 246.
2. Ibid., p. 216.
3. Ibid., p. 223.
4. Ibid., V, p. 427.
5. Ibid., p.  448. Cette histoire est d’ailleurs essentiellement une
théogonie, dans la mesure où «  l’engendrement est la seule forme de

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dépendance où le dépendant reste pourtant absolu en soi-même » (ibid.,


p. 403).
6. Schelling déclare cependant (ibid., p. 363) que « la philosophie de l’art
est seulement la répétition (Wiederholung) de mon système de
philosophie à la puissance suprême  »  ; mais répétition a ici un sens
purement logique : c’est toujours le même contenu qui revient sous des
formes plus ou moins achevées.
7. Ibid., IV, p. 329.
8. Ibid., V, p. 400 sq.
9. Ibid., p. 401.
10. Ibid., p. 397.
11. Ibid., VI, p. 67.
12. Ibid., IV, p. 163.
13. Ibid., VIII, p. 361.
14. Ibid., IV, p. 203.
15. On en trouve cependant les idées essentielles dès le cours de Munich
de  1832-1833. Cf. Grundlegung der positiven philosophie, Turin, Éd.
Fuhrmans, 1972, p. 362 sq.
16. SW, X, p. 331.
17. Cratyle, 397 d.
18. SW, XII, p. 185.
19. Ibid., X, p. 310.
20. Cratyle, 400 c.
21. SW, X, p. 323.
22. Ibid., XII, p.  203. Cette image boehmiste, par l’intermédiaire de
Baader, ira jusqu’à Balzac (cf. Massimilla Doni).
23. Ibid., p. 211.
24. Ibid., p. 233.
25. Cf. ibid., XIII, p. 398.
26. Ibid., X, p. 385
27. Ibid., XII, p. 354.
28. Ibid., V, p. 424.
29. Ibid., XII, p. 423.
30. Ibid., p. 427.
31. Ibid., p. 577.
32. On sait que Freud reprendra ce terme à Schelling — à travers, il est
vrai, une citation de dictionnaire (cf. l’article de  1919 «  Das
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Unheimliche  », qui renvoie à SW, XII, p.  649 par l’intermédiaire du


Worterbuch der deutschen Sprache de D. Sander [1860]).

Author

Jean-François Marquet
By the same author

Philosophie et alchimie chez


Gerhard Dorn in Alchimie et
philosophie à la Renaissance,
Vrin, 1993
© Éditions de la Sorbonne, 2000

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MARQUET, Jean-François. Schelling. Du processus naturel au
processus mythologique In: Philosophies de la nature [online]. Paris:
Éditions de la Sorbonne, 2000 (generated 03 août 2023). Available on
the Internet: <http://books.openedition.org/psorbonne/15273>. ISBN:
9791035102739. DOI: https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.15273.

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BLOCH, Olivier (ed.). Philosophies de la nature. New edition [online].
Paris: Éditions de la Sorbonne, 2000 (generated 03 août 2023).
Available on the Internet:
<http://books.openedition.org/psorbonne/15078>. ISBN:
9791035102739. DOI: https://doi.org/10.4000/books.psorbonne.15078.
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