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mots français !
L'invasion arabe du VIIIe siècle, dont les lourds « vêtus de fer »de Charles Martel
brisèrent net l'élan aux environs de Poitiers en l'an 732, n'a pas laissé beaucoup de traces
dans notre langue. Au contraire de l'Espagne, envahie par les troupes de l'émir Al-Tarik
venues du Maroc. Celui-ci traversa la Méditerranée en droite ligne par ce que l'on
appelait encore les colonnes d'Hercule, dirigea un
débarquement et un assaut magistral contre cette montagne qui termine l'Andalousie.
Tout naturellement, les vainqueurs l'appelèrent djebel al-Tarik, « la montagne de Tarik »,
qui donna « Gibraltar ».
Les croisades du XIIIe siècle amenèrent des contacts plus prolongés, à une époque où les
Arabes avaient développé une civilisation tout à fait brillante. Il nous en reste entre autres
l'« alambic » - al-ambic - l'appareil servant à faire de l'« alcool» - al-kohl . Deux mots qui
prêtent à sourire quand on sait que, pour le Coran, « une seule goutte d'alcool est maudite
». Notons qu'alcool est le même mot que kohl, le fard à paupières. Le terme peut se
traduire par « sublimé », le résultat de l'opération chimique qui, grâce à une chaleur vive,
fait passer directement un corps solide à l'état gazeux sans transition par une phase
liquide.
Prenons d'autres mots au hasard. Al zard justement, en arabe, désigne le « bourgeon »
mais aussi le « jeu de dés », peut-être à cause de la taille de l'objet ou du dessin sur une
des faces. On voit la suite. Et qui commande sur mer ? N'est-ce pas un « amiral »? Eh
bien c'est la transcription d' amîr ou emir al-bahar, littéralement le prince ou commandant
de la mer !
Autre mot bien connu de nous : le « coton », qutn, reconnaissable en espagnol sous la
forme algodón . Au Moyen Age, où on l'appelait « laine d'arbre », on le représentait
naïvement comme un noyer donnant de grosses noix et, dans chaque noix, on pouvait
voir un petit mouton. N'est-ce pas joli ?
Plus étrange est le cas de l'« abricot ». Les Romains, du temps qu'ils dominaient l'Egypte
et l'Asie Mineure, l'appellaient mala praecox, « la pomme hâtive ». Les Arabes
s'emparèrent de ce terme latin qu'ils prononcèrent à peu près al-pricocs. Qui a donné par
un singulier retour des choses « abricot » en français, albicocco
en italien, albaricoque en espagnol. En fait, « abricot », c'est du latin arabisé : qui l'eût cru
?
On pourrait trouver ainsi bien des mots arabes passés en français : des vents «alizés»
jusqu'au «zénith» (le sommet du ciel) et au « nadir » (son opposé). Ou même, en cuisine,
le délicieux « sorbet », qui vient de chorbât, le dessert à la neige prisé des Arabes de
l'Atlas. En revanche, un mot qui a fait le tour du monde, le « bazar », s'il est venu par
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l'arabe, est originaire d'Iran : c'est un mot farsi. De même que notre « truchement »,
l'interprète, vient du turc drogman, par l'intermédiaire de l'arabe où il signifie traducteur.
Un des rares mots arabes à quatre consonnes ! La conquête de l'Algérie et des pays
voisins, à partir de 1830, nous apporta elle aussi une foule de mots nouveaux. Notre brave
chien, vulgairement appelé « clébard », vient du kleb arabe. A vrai dire, c'est de l'arabe
du Maghreb car en arabe classique, c'est kelb . Le « s » de clebs est-il là pour faire joli ou
par erreur, on ne sait ? Et ne disons-nous pas couramment « toubib » - tabib en arabe -
pour médecin ? De même qu'un village isolé de France n'est-il pas devenu un bled paumé
?
Et comment ne pas rêver devant les merveilleux noms des étoiles légués par les
astronomes arabes, Altaïr ou Bételgeuse, Fomalhaut ou Achernar, en passant par
Aldébaran, Algol et Dénébola ?
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Artichaut, aubergine, épinard, estragon, massepain, orange, pastèque, sucre, candi, tasse,
café, sorbet, safran, alcool, sirop, magasin et bazar, fardeau, luth, truchement (truguman -
traducteur)
La sauce mousseline vient de Mossoul ville d'Iraq réputée pour ses tissus aussi légers que
délicats que l'émulsion qui porte le même nom.
Loukoum vient de rahat-loukoum : le repos du gosier.
Bougie du toponyme Bougie (Bejaïa), cité d'Algérie autrefois grande exportatrice de cire.
Algèbre vient de al-jabr procédé de calcul découvert par al-Khawarizmi qui est devenu
algorithme.
Chiffre vient de Sifr signifiant néant qui après un passage par l'italien est devenu zéro de
même que carafe, gabelle, matelas, jupe.
Divers mots arabes nous sont parvenus par l'espagnol : alcôve, algarade, alcazar qui ont
conservés l'article et aussi guitare, récif et sarbacane, matamore (le tueur de Maures) resté
dans la langue française synonyme de fanfaron venant de farfar (bavard).
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Mots d’origine arabe
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Gandoura Longue robe (berbère)
Gazelle Rhazel (arabe)
Goudron qatran (arabe)
Hasard Azzahr : jeu de dés (arabe)
Jupe Jubba (arabe)
Laque de l'arabe Lakk
Magasin Makhazine (arabe) = lieu de dépôt
Momie Moumia (arabe)
Nuque Nuqua (arabe) : moelle épinière
Orange Narandj (arabe)
Raquette Rahat (arabe qui veut dire : paume de la main)
Razzia Razya (arabe qui veut dire : attaque)
Santal Sandal (arabe) : un arbuste
Satin Zaytouni (arabe) de la ville de Zaytoun en Chine
Simoun Mot anglais emprunté à l'arabe Samoun
Sirocco Scirocco (italien emprunté à l'arabe)
Sirop Charab (arabe)
Smala Smala (arabe)
Sofa Suffa (arabe)
Sorbet Sorbetto (italien), Chorbet (turc), Chourba (arabe pop), Charbat (arabe
classique)
Soude Souwad (arabe)
Sucre Asucare (de l'italien zucchero, emprunté à l'arabe)
Talc Talq (arabe)
Tasse Tassa (arabe)
Zénith Samt (arabe) : Chemin
Zéro Sifr (arabe)
Zouave Zwâwa (arabe)
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alcôve arabe 1646 lieu de réception renfoncement
amiral arabe 1080 prince de la mer
café arabe vers 1600 café
hasard arabe 1100 jeu de dé
casbah arabe 181 forteresse ville et faubourg
jasmin arabe 1400
Sur environ les 40 000 mots d'un petit dictionnaire, on peut relever environ 100 mots
empruntés à l'arabe dès le Moyen Age:
zéro, gourbi, damasquin, alcool, chiffre, gazelle, matelas, zouave, coton, alchimie,
algèbre....
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arabe
abricot (1547)
abricotier, abricotine
alcool (16ème siècle)
alcoolique, alcoolisme
algèbre (1554)
artichaut (1530)
café (17ème siècle)
cafetière, cafetier
carafe (1558)
rester en carafe
estragon (1564)
lilas (1651)
magazine (1776)
moire (1646)
nacre (16ème siècle)
sorbet (1553)
talisman (1637)
tarif (1572)
persan
aubergine (1750)
babouches (1546)
bazar (16ème siècle)
bazarder
chacal (1676)
châle (1671)
divan (1653)
jasmin (1500)
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Mots d'origine arabe et persane
alambic (1270)
alambiqué
alchimie (14ème siècle
algorithme (13ème siècle)
arsenal (1395)
assassin (au Moyen-Âge comme nom propre et figuré, pris à l'arabe au temps des
Croisades)
avaries (1250)
azur (1080)
camphre (du persan, transmis par l'arabe. 1256)
chiffre (1485)
coton (de qutun, 12ème siècle)
douane (1372)
élixir (14ème siècle)
épinards (1331)
gazelle (de l'arabe al-ghazal. 1272)
girafe (de l'arabe zarafa, par Marco Polo. 1298)
guitare (1360)
hasard (12ème siècle)
jarre (1449)
jupe (12ème siècle)
luth (13ème siècle)
magasin (vers 1400)
momie (13ème siècle)
musc (du persan muchk. 12ème siècle)
muguet (odeur de muscade), musqué, muscade, muscat, muscadet
nénuphar (13ème siècle)
orange (de narandja. 13ème siècle)
riz (vers 1270)
rizière, risotto, rizerie
safran (12ème siècle)
satin (14ème siècle)
sirop (1181)
sucre (12ème siècle)
tasse (1180)
zénith (14ème siècle)
zéro (1485
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Des mots venus de l'arabe, du persan, du turc
Les mots empruntés à l'arabe sont en grande partie des mots de la science, ce qui rappelle
que les Arabes étaient au Moyen Âge les plus grands savants d'Europe, aussi bien en
médecine qu'en astronomie et en mathématiques : algèbre, sinus, chiffre et zéro, tare et
carat, zénith et nadir, algorithme et almanach, alambic et alcool, calibre et hasard, émir
et calife ont des emprunts à l'arabe.
Bien d'autres mots venus de l'arabe sont aujourd'hui si bien intégrés qu'on les prendrait
pour du français "pure laine" (comme diraient les Québécois) :
Seuls les emprunts plus récents, comme flouse, toubib ou couscous, trahissent leur
origine.
Grâce à ces échanges commerciaux renouvelés à dates fixes, à l'occasion des foires, ce
sont aussi des mots persans (comme azur, babouche ou épinard) ou turcs (comme gilet,
savate ou cravache) qui, souvent par l'intermédiaire de l'arabe, pénètrent en français.