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L’île de Chios à travers l’histoire…
• XIe siècle avant J.-C.: Création de comptoirs ioniens sur l'île de Chios. Avec Samos et des cités-Etats de
l'Asie Mineure, Chios participe à la fondation du Dodecapole des Ioniens.
• VIIe-VIe siècle avant J.-C.: Chios forge sa propre monnaie avec un sphinx comme symbole.
Avènement d'un régime démocratique à Chios, semblable à celui établi par Solon à Athènes.
• 546 avant J.-C.: L'île est conquise par les Perses achéménides.
• 479 avant J.-C.: A la fin des guerres médiques, Chios entre dans la ligue de Délos.
• 201 avant J.-C.: Chios est conquise par Philippe V de Macédoine. Pendant la période hellénistique, elle
est vassale de l'Egypte des Ptolémées, de l'empire séleucide et du royaume de Pergame.
• 88 avant J.-C.: Lors de la guerre opposant le roi du Pont, Mithridatis VI aux Romains, Chios se montre
favorable à la politique romaine. En guise de représailles, Mithridate occupe et pille l'île, en déportant
ses habitants et en la rebaptisant en Bérénice, du nom de sa troisième épouse, originaire de Chios.
• IVe siècle: Christianisée, Chios fait longuement partie de l'Empire romain d'Orient (Empire byzantin).
• 1346-1566: Conquise par la République de Gênes, l'île reste sous son contrôle pendant un peu plus de
deux siècles. La gestion est confiée à une sorte de société par actions, la mahone de Chios.
• 1566-1912: Période ottomane. En 1822, dans le cadre de l'insurrection d'une partie des sujets ottomans
de confession chrétienne, le sultan Mahmoud II envoie des troupes sur l'île. Le massacre perpétré vise à
un double objectif, intimider par son ampleur ses sujets insurgés, et servir de vengeance au massacre
d'Ottomans musulmans par les révoltés, lors de la prise de la ville de Tripolitsa.
• 1586: Naissance de Léon Allacci, devenu par la suite gardien de la Bibliothèque du Vatican.
• 1888: Namik Kemal, romancier, dramaturge et réformateur social ottoman, ayant largement influencé le
mouvement des Jeunes Turcs, meurt en exil à Chios.
• 1912: Rattachement de l'île de Chios à l'Etat grec à l'issue des Guerres balkaniques.
• 1922: Suite à la défaite de l'armée grecque lors de la guerre gréco-ottomane de 1919-1922, des réfugiés
d'Asie Mineure s'installent sur l'île, fondant de nouveaux quartiers, tels que celui de Varvasi.
• Deuxième Guerre mondiale: Lors de l'occupation de la Grèce par les forces de l'Axe, Chios est occupée
par la Wehrmacht qui répliquent à tout acte de résistance par des exécutions punitives.
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« Voyage à Chios, l'île paradisiaque du Levant au début du XIXe siècle »
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Ses1naisons, construites pa.r les Génois et les
Vénitiens, ont une élégance et des agrémens
qu'on est étonné de rencontrer dans l'Archipel.
L'île est coupée par plusieurs chaînes de 1non-
tagnes fort arides; mais les vallées , arrosées
par un grand noinbre de ruisseaux, sont rem•
plies d'orangers, decitronniers, de grenadiers.
Par• tout ses ca1npagnes offrent les tableaux
les plus séduisans. Les vignes de Scio ont ton-
jours été célèbres; elles font encore la princi-
l)ale richesse de cette île; ses vins , si vantés
par les anciens, 1néritent toujours leur répu-
tation.
On fabrique à Scio beaucoup d'étoffes de
soie, d'or et d'argent. Le nombre <les métier
est cependant fort diminué depuis quelque"
années. Mais il est une autre branche <le
co1n111erce particulière à l'île de Scia , et qui,
quoique fort restreinte, ne laisse pas d'y faire
entrer une som1ne considérable; c'est la cul-
ture des lentisques (1 ), qui fournissent cette
5
gomme appelée mastic ., dont les dames h 1 turques
et grecques font 4ne grande consom- ap mation.
en
Elles en mâchent continuellement.
Cette drogue donne à leur haleine une odeur
aromatique, qu'on peut ne pas trouver désa-
gréable, mais qui nuit beaucoup à la beauté
de leurs dents.
On sait que l'île de Chio est une cle celles
qui se disputaient l'honneur d'avoir vu naître
le père de la poésie grecque. Ses habitans conservent
encore quelque souvenir de ce 1
grand homme, et prétendent qu'il venait don- ner
ses leçons sur un rocher qui se trouve à une
lieue au nord de la ville, sur le bord de la 111er
, et qui paraît s'être originairen1ent détaché de la
montagne. Il est inutile de re- lever le peu de
vraise1nblance de cette tradi-
6
tion. La partie supérieure de ce rocher a été
aplanie et creusée; elle for1ne un bassin ovale,
entouré d'une banquette. Au milieu est une
espèce de siége, sur la base duquel on croit
distinguer de petites têtes de lion. On pense
que c'était un temple de Cybèle, dont la sta-
tue a été brisée, et dont les restes mutilés n'
ofirent plus que le siége sur lequel elle était
placée.
Ialgré le séjour d'un grand nombre de
Turcs dans la ville de Scio , les fen1mes y
jouissent de la plus grande liberté. Elles sont
gaies, vives et piquantes. A cet agrément elles
joindraient l'avantage réel de la bea té, si
elles ne se défiguraient par l'habillement le
plus déraisonnable et en mê1ne temps le plus
incommode. On est désolé de voir cet achar-
nement à perdre tous les avantages que leur
a donnés la nature, tandis que les Grecques
de S1nyrne et celles de quelques îles del'Ar-
chipel , plus éclairées sur leurs int rêts, sa-
vent encore ajouter à leurs attraits l'extérieur
le plus voluptueux. Les habitantes de Scio
sont comme toutes ces fem1ues auxquelles une
toilette étudiée sied moins que leur simple
négligé. Elles forinent un spectacle char-
1nan , Iorsqu'assises en foule sur les pertes de
t:
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Source : Pierre Blanchard, Le voyageur de la jeunesse dans les quatre parties du monde, Paris,
1818
8
De Smyrne à Chios dans une croisière à travers la Méditerranée
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VOY AGES D'UNE FAMILLE
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Source : J. Butler, Voyages d'une famille à travers la Méditerranée, Paris, 1890
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Affiche pour la semaine du mastic en août 1983
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Un portrait de l'île de Chios à la fin du XIXe siècle
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STATISTIQUE DESCRIPTIVE
divisé administrativement en 6 cazas et 6 nahiés, comme suit :
Gaza, : Chio, Ipsara, Nicaria, Léros, Kalymnos, Cos
(lstankeuï).
Nahiés : Calomati, Oulia, Cardomila, Pathmos, Aslrapalia
(Astypalé ), Indjirli.
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. 408 VILAYET DE L'ARCHIPEL
au moyen âge, et le reste se compose d'israélites en nombre
infime.
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STATISTIQUE DESCRIPTIVE 409
Conslanliuovle aûn de grossir sans peine cet avoir au moyen
d'aumônes qui souvent les enrichissent. Les filles de celle même
classe de gens à demi-aisés sont aussi celles qui fournissent le
plus grand nombre des servantes des familles riches de Péra el
des rives du Bosphore, 011 l'on n'a du reste qu'à se louer en gé-
néral de leurs services.
Les Turcs de Chio sont pour la plupart des fonctionnaires ou
employés civils ou militaires du gouvernement.
Les catholiques sont presque tous d'origine ilalienne, appar-
tenant à la noblesse génoise qui garda l'tle en sa possession
et la gouverna de t 346 à t 566. date de sa prise par les Turcs et
de sa réunion à l'empire oltomau. Comme du temps de leur do-
mination, ces descendants des ltfahom ou J1annèses, dont on
voit encore les armoiries sur plusieurs maisons de la ville, ont
pour principale occupation le haut commerce el la banque.
Les juifs s'occupent en général de colportage et de divers
petits métiers.
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410 VILAYET DE L'ARCHIPEL
La principale école grecque de Chio avait été fondée en 1792.
Elleélaitdevenue célèbre en Orient avanlia guerre de l'Indéplln-
dance et complait alors 700 élèves, dont 500 Chiotes el 200
étrangllrs. On y enseignait la métaphysique, la logique, la
théologie, la rhétorique, l'histoire, les mathématiques, la phy-
sique et la chimie, le grec ancien, le français et le turc, le des-
sin et la musique.
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STATISTIQUE DESCRIPTIVE 411
vallons el des plaines sont, du moins quelques-uns, assez forls
pour actionner des moulins; mais, sur les hauteurs, on ne ren-
contre que des sources d'eau vive sortant de la montagne et qui
ne s'étendent pas au loin.
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,12 VILAYET DE L'ARCHIPEL
priélés médicales; il eutrail dans sa fabrication des pastilles
ophtalmiques dites pastilles de Chio. Pline dit qu'on or donnait
à Rome le vin de Chio contre les maladies de l'estomac. Horten-
sius, au moment de sa mort, en avait dix milles pièces dans ses
caves. C'était le vin de prédilection de César,
19
STATISTIQUE DESCRIPTIVE
vées. Ils recueillaient le mastic avec des pinces sur les arbres,
età terre avec la main, et le séparaient ensuite selon ses diffé-
rentes qualitt\s dont la première, montant à 60,000 livres pesant,
était envoyée au sérail.
La récolte tout entière, prise à ferme du sérail par un agha
particulier spécialement chargé de gouverner les villages à
mastic, pouvait monter, année commune, à 150,000 livres
pesant.
Les dames turques et grecques faisaieut et font encore une
grande consommation de mastic; celle drogue, que beaucoup
d'entre elles mâchent continuellement, donne à leur baleine une
odeur aromatique qu'elles trouvent agréable, mais nuit
beaucoup à la beauté de leurs dents.
On emploie, comme on le sait, le mastic en médecine et dans
les arts. Pour ce dernier usage, il convient mieux qu'un grand
nombre d'autres drogues similaires. ayant sur elles l'avantage
d'être soluble dans l'essence et dans l'esprit de vin. Cette pro-
priété le fait encore employer aujourd'hui pour la fabrication du
raki, mais dilîérenls produits chimiques l'ont remplacé avan-
tageusement dans les arts.
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VILAYET DE L'ARCHIPEL
la campagne, suivies de leurs perdreaux, pour y chercher leur
nourriture. Le soir, on les rassemblait au son d'un sifflet, et
chaque compagnie, composée quelquefois de plus de trois cents
oiseaux, suivait son gardien au village, en se séparant de la
masse entière de perdrix, s'élevant souvent à six ou sept mille
têtes appartenant à plusieurs propriétaires différents.
On élève à Chio beaucoup deversà soie. C'était avanlia guerre
de l'indépendance, une des grandes occupations des Chiotes que
la s6riculture el la manufacture de la soie. On importait alors
une grânde quantité de soie de la Thrace et de la Syrie pour
satisfaire aux besoins des fabricants et du commerce.
Les abeilles sont aussi l'objet des soins des habitants de Chio,
et leur miel est comparé à celui du mont Hymette el d'Hybla.
21
STATISTIQUE DESCRIPTIVE 41.5
précisément en face du cap Aspro, point le plus avancé à l'ouest
de la presqu'ile de Tchesmé; c'est un abri non moins sûr. -
Plus haut, ver le nord, il peu près au milieu de la côte orien-
tale, se trouve le port de Kastro, qui est le port même de Chio,
el sur les rives duquel s'élève celle ville. Dans l'antiquité, il
pouvait contenir 80 vaisseaux. Du lemps de Choiseul-Gouffier et
d'après son témoignage, c'était un port d'un aspect lrès agréable,
ressemblant beaucoup à celui de Gènes. Deux fanaux avancés
indiquaient la route à suivre aux nombreux bAlimeolsqui le fré•
queotaienl en allant ou retournant d'Égypte à Constantinople.
Une jetée à fleur d'eau le fermail du côté du midi.
En remontant encore du côté du nord, on rencontre le port de
Kolokythia au port Dauphin, à peu de distance de la ville de
Chio. C'était là que se trouvait, dans l'antiquité, la ville el le porl
de Delphinium qui avait le renom d'une excellente rade. Le port
de Fano était aussi célèbre dans l'antiquité sous le nom de Cau-
casa,ville dontles ruines se reconnaissent encore près de !"église
Saint-Théodore.
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416 VILAYET DE L'ARCHIPIIL
s'occupe plus que très peu à Chio de la fabrication de la soie qui
faisait prospérer t ,200 manufactures avant tsn; el la poterie
ne fait plus travailler que quelques fours, dans les villages dits à
mastic, où se trouve la terre argileuse propre à cette industrie.
On y trouve quelques moulins et usines à rabriquer la farine, des
pressoirs à huile et des tanneries.
Les méliersde maçon, de menuisier, de tailleur de pierre, de
maréchal-ferrant,fournissent encore beaucoup de bons ouvriers.
Les jardins sont cullivés avec beaucoup desoin el de go1U, et le
Chioles n'ont pas perdu leur ancienne réputalion d'habiles hor-
ticulteurs.
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STATISTIQUE DESCRIPTIVE 417
gers et les citronniers menace de les détruire et d'anéantir cette
branche de commerce.
L'exportation des amandes à destination de la Russie, de la
Turquie el del'Égjple est de t 30,000 okes paran, out 6!,500 ki-
logrammes, à raison de 6 piastres el demi l'oke. L'huile, l'anis,
les fèves, el autres produits agricoles dont la récolte est très peu
importante, servent aux besoins des habitants.
Ces principaux articles d'exportation, en négligeant tous les
autres produits commerciaux, représentent à eux seuls un chiffre
supérieur à 65,000 livres turques ou environ un million et demi
de francs.
24
STATISTIQUE DESCRIPTIVE 4'.!i
plusieurs noms différents. Primitivement, de même que cer-
taines autres tles de la mer Karpalienne, on l'appelait Ophi-
nissa {lit1,) à cause de la multitude de serpents qui la remplis- .
sait. Elle pril ensuite le nom de Chio {X!o;}, selon les uns du
nom dela nymphe Chione, fille d'Œnopion, premier roi du pays
el femme d'Orion, qui purgea celle lie des serpents dont elle
était infestée. Selon d'autres auteurs, c'est à la grande quantité
de neige{ X!wv} qui tomba le jour de la naissance de l'enfant d
Chione el d'Orion qu'est d0 le nom de Chio. Isidore, enfin,
fait dériver ce même nom d'un mol syriaque qui signifie mastic.
Aujourd'hui, les Turcs appellent aussi Chio l' « tle au m11slic »
Sakyz-adassi). On l'a aussi nommée anciennement l'ile des /Jins,
(Pi l/usa), à cause des pins{1t( ,} qui couvraient alors ses mon-
tagnes; Macris, l'tle longue; el Œthalia (braise) à cause de la
chaleur de sa température.
Chio eut pour premiers habitants des Pélasges de la Thessa-
lie, tradition appuyée sur un fragment d'Éphore conservé par
Athénée, sur les témoignages d'Eusthate et de Strabon, et con-
firmée par le rapprochement des noms de Pelliné, ville antique
de Thessalie, el du mont Pellinéen, aujourd'hui mont ]lias.
Après celle première colonisation eut lieu celle d' Œnopion
qui vint s'établir à Chio avec une colonie crétoise accompagné
de ses cinq fils. OEnopion, qui passait pour être fils de Bacchus
et d'Ariane, enseigna aux Chioles la culture de la vigne el l'art
de faire le vin. Des colons venus de Carie el d'Eubée s'établirent
aussi dans l'tle à la même époque avec l'agrément d'OEnopion,
mais ils en furent chassés vers 1130 avanl Jésus-Christ, lorsque
les Ioniens, qui venaient d'arriver en Asie .Mineure, s'élablirenl
à leur tour à Chio, qui fut mise au nombre des douze villes dont
fui formée, à l'origine, la confédération ionienne.
Depuis celte époque jusqu'au v1• siècle avant Jésus-Christ,
aucun évenement politique remarquable ne se rencontre dans
l'histoire de Chio; mais toute cette période est empl_oyée par
les Chiotes à se créer une marine, à s'enrichir par un com- merce
actif, à asseoir leur prospérité sur des basses solides et durables,
à grandir leur influence en envoyant à leur tour des
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25
422 VILAYET DE L'ARCHIPEL
colonies au loin, à fonder enfin une puissance maritime assez
imposante pour faire respecter son indépendance par le souve-
rain le plus redouté de l'Asie, Crésus, roi de Lydie.
Lorsque la domination persane engloutit la monarchie ly-
dienne, les Chiotes ne se préoccupèrent pas beaucoup, tout d'a-
bord, des dangers auxquels les rapides progrès des conquérants
nouveaux exposaient leur indépendance. Adonnés tout entiers
à leur commerce, ils crurent agir avec prudence en livrant aux
Persesle dépositaire dee trésors de Crésus qui avait fait soulever
les Lydiens c.ontre eux, et en refusaol aux Phocéens qui s'exi-
laient de leur ville pour éviter d'être réduits en esclavage par le
général de Cyrus, de leur vendre, pour s'y établir, les lies
Œnussea, aujourd'hui les. tles Spalmadores. Cependant, ils ne
purent éviter le sort commun à toutes les colonies grecques de
l'Asie .Mineure, et sous Darius l", tous les Étals de la conrédé-
ration ionienne étaient soumis au satrape qui gouvernait en tyran
les provinces conquiôes par le roi des Perses. Lors de la guerre
de ces derniers contre les Scythes, Strallis,tyran de Chio, adopta
avec tous les autres tyrans ioniens, le parti contraire de celui de
Miltiade d'Athènes; celui-ci voulait, suivant le conseil des
Scythes, qui en ce moment venaient dedisperser l'armée des
Perses, détruire, pour leur donner passage et rendre ainsi la
liberté à l'Ionie, un pont donl l.t garde avait été confiée aux
foniens.
Ne pouvant plussupporter celle double tyrannie des Perses et
de leurscréatures, les Ioniens se révoltèrent, et après dessuccès
et des revers alternatifs, pendant lesquels les Chioles se distin-
guèrent par des actions éclatantes, on les retrouve à la bataille
de Mycale combattant vaillamment parmi la flotte grecque.
Pausanias a vu leurs noms gravés sur le piédestal de la statue de
Jupiter à Olympie, à côté de ceux des autres alliés d'Athènes. Par
le traité de 449 avant Jésus-Christ, Chio fut mise à l'abri des
attaques des Perses dont les vaisseaux ne pouvaient plus, en vertu
d'un article de traité, navigue1· dam1 les eaux grecques, du
Pont-Euxin aux côtes de la Pamphylie.
Après avoir subi successi-vemeat l'influence d'Athènes, de
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STATISTIQUE DESCRIPTIVE 423
Spartes et de Thèbes, Chio fut reconnue indépendante en 356.
Elle tomba ensuite sous la domination d'Alexandre le Grand el
de ses successeurg, puis sous celle des Romains, sous le litre
d'alliés de la République, dont les soldais et les magisll·ats la
pillèrent tour à tour. Ces odieuses exactions, citées par Cicéron
contre Verrès, jetèrent Chio dans le parti de Mithridate, mais
le roi du Pont ne sut pas la conserver dans son alliance, et conçut
contre elle, pour cela, une si violente colère que, sous un
prétexte rutile, il envoya son lieutenant Zeisobius qui surprit l'tle
pendant la nuit, rançonna les habitants et les enleva de force
pour les transporter sur les bords de la mer Noire, en 86. Sylla,
vainqueur de Mithridate, les délivra et les rétablit dans leur
pairie, en déclarant Chio ville libre et alliée du peuple romain.
Chio fut réunie à l'empire romain par Vespasien et comprise
dans la province des lies, où elle resta jusqu'à la nouvelle divi•
sion de l'empire sous Constantin. A partir de celle annexion, il
n'est plus fait mention de Chio dans l'histoire avant 449 de l'ère
chrétienne, époque où Tryphon, évêque de Chio, Georges et
Théophile, sont cilés dans les actes des sixième el septième
conciles œcuméniques.
En 1089, un Turc, nommé Zakhas, chef de pirates, déjà mattre
de Clazomène et de Phocée, fit la conquête de Chio par un coup
de main, sous Alexis Comnène qui l'en fit chasser en 1092 par
une flotle impériale commandée par l'amiral Delas- sène, sous
les ordres du généralissime Jean Ducas.
Le doge de Venise, Vital .Michieli, à la tête d'une flotte de
cent galères, prit Chio en t t 7%, mai il ne put la conserver
en sa possession. Trente-deux ans plus ta1·d, en t204, la
création de l'empire latin de Constantinoplll permit aux Véni•
liens de s'adjuger l'tle de Chio avec la plus grande partie de
l'Archipel. Elle fut reprise par Vatace avant la fin même do
l'empire latin; mais à peine les empereurs byzantins étaient-ils
remontés sur leur trône chancelant, que la puissance ottomane,
à·son aurore, vint lui disputer toutes ses possessions de terre et
de mer. Roger de Fior, chef d'une troupe de Catalans; a'Vait
27
424 VILAYET DE L'ARCHIPEL
réussi à arrêter la course victorieuse des Turcs et à sauver l'em-
pire d'une invasion. Ses exploits l'avaient fait élever au rang de
César. Cependant, quelques-uns de ses gens qui s'étaient char-
gés de défendre l'ile de Chio, se la laissèrent enlever par les
Turcs. Celle perte, considérée comme de la plus haute impor-
tance, souleva de Ioules parts des cris contre les Catalans, el le
jeune l\lichd, fils d'Andronic, qui venait d'être associé à l'em-
pire, profita da cette circonstance pour satisfaire sa jalousie
haineuse contre Roger de Flor, qui fut assassiné par son ordre
et en sa présence à Andrinople en t 307.
Chio, rentrée bientôt en la possession des empereurs byzan-
tins, leur fut encore enlevée, celle fois par un noble Génois,
Benoit Zacharie, dont le fils, .Martin, qui lui succéda, effaça des
murailles et des portes de la ville lesarmoiries impériales pour
y substituer les siennes. Andronic Ill vint en personne reprendre
l'tle au moment où Martin poussait avec activité la construction
d'une forte citadelle, et le réduisit à se rendre à sa discrétion.
li fut condamné à la prison; ses troupes furent enrôlées dans
l'armée impériale, el les Cbiotes déchargés de tous les impôts
dont il les avait accablés.
Son frère Benott tenta vainement d'emporter d'assaut la ville
de Chio, devant laquelle il se présenta avec tous les vaisseaux
de Galata qu'il avait pris à sa solde. Repoussé vigoureuse- ment
avec une perle de 300 hommes, il se retira plein de rage et
mourut sept jours plus tard d'une attaque d'épilepsie, en
t329.
Dix-sept ans plus tard, en 1346, Chio était de nouveau atta-
quée el prise par trente-deux nobles Génois, émigrés de Gênes
pour se soustraire aux persécutions du partidémocratique. Sous
leur gouvernement, de forme républicaine, Chio devint puis-
sante el riche. Les tentatives des Turcs, et les dommages qu'à
diverses reprises ils lui firent éprouver, la dévastation qu'elle
souffrit lorsque, en 1394, Sultan Bayaûd la fit ravager par une
flotte da i1oixante navires, ne purent porter aucune atteinte
grave à sa florissante prospérité. Après la prise de Constanti-
nople, les conquérants génois de Chio achetèrent la paii du
28
STATISTIQUE DF.SCRIPTIVE 425
sultan Mohammed Il moyennant un tribut annuel de f0,000 du-
cats.
.Mais en t 566, l'amiral turc Piali Pacha, ayant été contraint de
lever le siège de Malte par suite de secours envoyés de la ville
de Gênes aux Chevaliers, se vengea de son insuccès sur les Gé-
nois de Chio. Ilse présenta devant l'lle avec soixante galères. Les
nobles génois, pour l'apaiser, lui envoyèrent de riches présenl!I
qu'il accepta. Profitant de cette circonstance, il invita tous les
primats de l'lle àvenir le voir à son bord, et lorsqu'ils s'y furent
rendus sans défiance, il les fil charger de chatnes el transporter
à Caffa. Au bout de quatre ans de dure caplivité, ces malheu-
reux recouvrèrent leur liberté par l'intervention du pape Pie V
et de l'ambassadeur de France. La plupart rentrèrent en posses-
sion de leurs biens et de leurs dignités, et quoique réunie à
l'empire ottoman, Chio conserva des privilèges et une indépen-
dance assez étendus jusqu'en t595.
En cette année, Ferdinand J••, grand-duc de Toscane, fit atta-
quer Chio par une escadre commandée par Virgino Ursino, qui
s'empara du château, et, forcé par une tempête de s'éloigner,
laissa dans cette forteresse nne garnison de cinq cents hommes,
que dès le lendemain les Turcs passèrent tous au fil de l'épée;
leurs têtes furent plantées sur les créneaux, où Dapper les vil
un siècle plus lard. Depuis lors, les Turcs occupèrent militaire-
ment l'tle, et neconsentirent à laisser les Latins et les Grecs en
jouissance de leurs églises el de leurs couvents, que sur les plus
vives sollicitations de l'ambas adeur du roi de France Henri IV.
Les Vénitiens réussirent, en t 694, à s'emparer de la ville el
de l'lle entière ; mais en 1696, le Capoudan-Pacha, ancien cor-
saire africain, surnommé par les Italiens mezzo-morto, la reprit
à l'aide des habitants grecs orthodoxes, qui ne pouvaient sup-
porter la suprématie des Latins. Le gouvernement turc lesrécom-
pensa en leur attribuant celte suprématie dont ils élaientjaloux,
et bientôt on ne compta plus à Chio qu'un très petit nombre de
cRlholiques romains.
Pendant plus d'un siècle, la tranquillité régna, el Chio était
redevenue, en t 8 0. aussi riche, aussi prospère, aussi beureusf\
29
VILAYET DE L'ARCHIPEL
30
STATISTIQUE DESCR{PTIVE 427
Il y a encore deux autres phares sur la petite forteresse et à
droite de la pointe septentrionale du moulin, aux approches
du port de Chio. Ils sont à feu rouge; leur portée est de
4 milles, et leur hauteur au-dessu3 du niveau de la mer est de
18 mètres.
31
428 VILAYET DB L'ARCHIPEL
presque tous pour le compt_e de leurs propriétaires, avec un
capital disponible de t 00 livres turques pour chacun.
Leur valeur totale est de'.!, t00 livres turques.
Le total des équipages se compose de 500 marins.
32
source : Vital Cuinet, La Turquie d'Asie, Paris, 1892
33
Carte de l’île de Chios par Christoforo Buondelmonti, 1420
34
A la découverte de l'île de Chios en compagnie de James Aristarchi, Sior Petro, Kemal bey
35
. . '
36
_ · tin s.,.éti..fin quelqüe fop tionn ites chrétien::sa·g;la·-:..
·. $uhlitn·é.J>o ·t.è, r èonn,ais·sa;bl $:à leur .f_ezô: fficiel.. .
-·Celadàisaîf une·pe ite.:B -b 1.. assèz·div.èrti s-àn:te.·
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J é · d e mandài à.IChàralàrnhos.s-'il savait son-.:n.om. ·
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-. - J: r,ne ,:.de -rillus.tre fàmîlle-.'d.es .A.ï -s,tarch.i",
· le p1;opi;e .f.Us dè.rantien··ptiitce:·d ·Sa_ni-0$ ·
_. · -·Cêrt.es, j ·coiu1aissais· le· non1 d\ .;ris:targhî.' Il:·
·. n.'en:e&t.:p·a:-s··d.<l.plus:pqp.ultdrè e ·t - de·ph ·s ré pêçté ..
·:_ dàn& to tes lé pt()vinèes ·greç,que --d-ë lâ :."ro.tquié: ·
·. ta·...f.a.1?).illé :Atistarch-ièst lilf-è.. de ces··clynas_ties·:
.-phan-arioté.-s·qui n'·qnt::·pas· voulu: quitt.t le·-:sol;
·:1ü:1,tal;·i qài mai·ntien.nent vivante.;·-à.:ijy.ia: ce,. la;
_..itç1.dltioil. de_ l'hellénisni.e, .-:qui· ont.d:G>- né-.::aux';·_
·. •. è -per. urs d,e C_9nstantinop!e·des -pto.tOSJ.Yél:thI1-ires-:
_·. -et d·es çl!ul tq:µe-s-, et dont-l s··-descen.dants ·ont ·été·;
i i ore.
.. QU· S:<: ) tr t- s_ous Ja-,. rninàtion, tutque·,. hog...,:..
· p.o:daFs, :voïvode_sg,:- ands logiüthètes,·..d·e l'Ëgli$e,>_
œcùn éniq-ue,- titul i:re$·. des'prin:cipàü:lés-va:ss.al s:· ,:
_ . Singùlie:r:·exè1nplé d-e.Jén;ç1,"è.ité:.p9litig_;U(},'·.qui èom.•.-;_
hht,eles·-concession:S p_:éG ssai,rés 4veè les i11c1'01hp;,.•\
tabie·s-espérancès•-èt ie0·U:V e -ir dès dro1ts lm-prés.-:,
. . . ' .,. ' .
37
··criptihl s;-rôle p·atri.otique . • san . doute, ..inais:"
quelque pèu-déconcertant, .que fârne·shnpl . dés. :
Occidèntaux·ne peut guère·co.ri1prendre,-màis qui·
est tout à.fait ·d'accord avec le génie rés1f,tant.et ..
fl,exib.led e cette race, dont là p'atienèe ingénieuse ·
·est capable de vaincre, par la P1:1issa:p.ce du temps.,
. et la longueur d'un regret inconsolé, tous les.
con:qµérant.s qu'ell · n'a pu .chas er.violemP1erit_:·
.
de son domaine héréditaire..
.1 '
38
·.sç,,ola1·s d'Oxford;. puis . il ·s;était- fait admettre ·à..
. · l École poiytec).lnique de Zuriclî.:A ce moment;un
gTand 1n.alheur 1e frappa:, une·de ces catastrophés·
· fréqùentes ·.en ·Tqrql).ie; préparéès• ioriglernp_s à.
. l'àvari: e par des intrigues·e-tdés ràncunes, et qui ,
, · fondent tout à c.oup sµr une·faniille, pour la dis_,.
· perset à tous es vents·.·L prince de Sa1nos-.fut .
. disgracié; .là. princesse .et ses filles .furent·exilées,
sans, q_ue.l on onnût exaçtement les causes d_e
cettè rigueur·.James dut accepter la place que le
divan l u =i offr·ait: Comme il·av.ait .étudié·à l'Écoie.
·polyte·chniquë ·ae Zurich,.on le nomma ingénieur .
. en chef de l'Ar hipeL · . ·
. Ce brave garçon, en. qui jé retrouvais, à.vec/ia
finesse d .s patriciens de Byzance, un p'eu .de la
hon e hurneur·par laquelle les gens de Paris atté-..
nuent leurs déboires, s·e n1it à la besogn avèe,·une.
élégante tésignation; l fit·des. routes à Lesbos,:
à.Chio, .à Nikarià., à Rhod_ esS
. i lesinsulaires des-
Sporade_s peuvent mainten3:-nt apporter.leurs p o.-.
visions aù niarché· sans. s'écorchèr la :plant des,
pieds aux aspérités des rochers, c'est à-lù-iqù'ils-•.
le 4oivent. 1\ristarchi fut souvent 111.0ll guid_edans-
.· me visites·à la.haute·société de Chio', et.da smes··
excursions aux villàg-es épa_ r sdans- l'in-térièur de
. l'île. Quand il 'fa sai-t trôp chauq. pottr.sortir, no.us ·.
r stions dès heures à·causer_d.:an sa cha1nbr ,' l)a,rmi
les mille. souvenirs qu'il avait rapportés ,de sa
vie··.e1;rante.·Je ne··sàur is dire.combien· j_'ai.
39
Drachme de Chios, 420-350 avant notre ère
40
(…………………………………)
41
· .. p·d.µ- tèrtte 1 ·foi·tu]le:, ·tt v rs';1e·fuo de.:;IL ,' P:
<tfe\'ait 1Vt. ;Pê os'l{ond h1is_ :.MaJs çJa1ts•_.1 ·p,ato :
de. Chio;·. pl i.n de réniiniscences italiennes,: ori·
. ,Î?a.p-p lâ:i't :--fa.mUièr;eqient: s _ i . : Pe't'l -;·. Jé·.l'a:v;âi-s-·
of .
côiinu:_à..·Atb ne $ où.il·.av it pa sé·tout. u,n..hi':er,
· accii iU nt. royaleinent .se. ,: cô_.rri.p_ triotes:·.et.:·le .
· ·étràng'<fts dans:ses beaux sal@ns.:de .l _r uè-.q . pho:
-:cl .·è,._était·un.ho1niJJ•é tr.è-s,'bon..-ët trës cir.ôit,-:tuî
d.e..ce_i$,Grec l borieU:x et ind· trie.u , véritahtes·
·"·h'ieii.faJt·e·urs _publics.,.-san·s lesq.uels··.-," thèpes·::n.e
-s· e.i:ài ·qu'ûn_e boùrgad : comri_ïèB elg.tad;e ou.Sofia...
:Des -yeux brùns; très. éveillés.,,:brillàient dâns sa:
. · -.i:.·ar..gé f-a ·e·brunB; qu' enèadrait ..urié:paj-re 4e:,fà-vo;ri's.
.·- ourgeois -taiUés•. à)·aµ1.odè"des_·.L\ng-lais.d Egyp.t · .·
'
42
... ' . ..
. '··
. ·/
'
.....
....
·; : ..
'
· ... ··.. - .. . ' .·. ·.. .·· :
43
génisse.». La:rieuse -Marika était; avec SêS gr.ace$
· adolesc ntès,·.c'e qu'<?n app.elle là-bas .uµ loulc9 -:
· 1naki 1 :· frêle, .:fi e-, sa·. jolie chevelur .·un·.peu
ébourifî.é·e aµ- ·essus .de :son·:fr.ont ét_roit ·de figu
_ rine tanagréena.e,. çette charn1an.te ·fillette- ay _it
de délicièux enfantillages,. et sa - g.oùveruan-te
sùi.sse la .tançait parce-_·que-;.après avoir fait sa
un
diétée,' elle g rdajt souvent·· ·peu. d'en.crè au ·
doigt.s·. · . · · ·· ··
Sior .Petro rions reçut sous un berceau . e·_ clô-·
matite-,ati milieu d'un.j.a-rdin fr is et profond. Il. é
ait en compagnie ·.d'.un de· ses frères, vi il <:i.r4
maussaàe· ctui ne daigna pas nous ·adr sse·r un ·
seul mot. Tandis qu'il n_ous condu sait 1 . long
des·.allées, nous montrant se fleurs rares, son·
jeu_d. e croquet· et une·grotte q.e rocaille·.q .u'il
venait de faire cqnstruire par un architecte vérii-
. tien,_ la ioche de la grille sonn viven1en_t;deux
robes claires apparui ent dans l'entrelacem nt·:des
· branches;· et des,fusées de riré.s firent partit. les -
oiseaux. C'étai q.t Melpon1èn.e et 1\1:ari a qui t n- ·
· traient de la promenade. Elles étaient.allées:faire
une·excursion en v·oiture dp,ns le Campos, ri'che
terre de.labour et de moissons qui s'étend à l'ouest
de I(liora.. Un jeune Grec.les.accompagnait, coiffé
d'une casquette blanche de lawn-:-tenrtis, raide èt
44
: ·.goi.ù mé .cotr. .1:ne. les: commis ang·lais qu il· avait,.;·_,
. .. s·ans·.doute, .fréquentésAlexandrie.,. . . ..
; Après.de,;tigoureux sha e..hand,.très hi'ita:µni .·
quës,:.je lus convié -dîner.séance te·nante, et- dè.·
·st aimable façon que. j'_acceptai.c. .
· La.,:table, dressée·dan$ une salle.-à 111 ngèr o'Ù
de -:chromos· ré·présentaierit: des.l è.v:res ni.9rts. et_:
'des perdrèaux. faisan. dés·. à. point,.·était f. ort ·bien
garni ._.,: Un. n1aître d'hôtel en h bi noir nous
servait.: l'étai .-à·côté de. Marika, et la·gentille
·enfant-;en cro-quant des friandises.exotiques me
priait._sans·cess.e de lu1·par.ier de Paris.. ·.
·Après dtnet, nous:passâmes au salon. Un-..exem:--
plait•e: illustré· du.-J11aît'l·e d ·- forges occupait la·
place::d'honneur sur un guéridon:.,. aup.fès d'un .
··stéréoscope..Une vieille fille, maîtr sse de français,
. -vint. s àsseoir à côté· e n1oi, et ce e.sentiw.èntale .
Suissesse,·oubliant-qrie je l a- s·avais .Bernoise.,:.me·..
. ·. •parlait avec un=attendris·se1n·ent obstiné du. dési. r.
· ·qu elle éprouvait de:revoit·.<<notr ·.chère·pat ie·>> .
Qû nd j,e··rentrai à l'hôtel Bathy, par-.les rue&.
·désertes et·obs·cure·s o_ù .passaient; _par·bouffées, ·
'des:. sén.teu:rs: n1arirtes,· ·u!l:.refra:in obsédait!111-
mén1oire .: c'éta.it un -air·de ·la Mascotte,.détaillé··
avec toute sorte ·d'in·expériénces, d':hésitations et·
...de·. candeu.r.s. par- le,·fausset. grêle.: e_t mal assuré: .
'
de M110 Marika.
. . .
·-. .•-· JÙelques·_jc:rurs· après j.e reçµ-s une .nouvelle
· _îri.vitatio,1 de. si_or·Petr0.:ll:me_,priâit.de·p.reüdré
45
_p:a:·s:sag :.s-ui•·· n pe_ it·vape.ür:·q -'ü-..+ nai.t-·d loù-er _
pùil,r ltanspo'Î-ter :tine·tiOJ,T.thi·. ·se:· o:nt_pagui .:à.·_.la ··.
fête·.de·Cârd-a yl ,-_v,U.lag_ ; greèj.;situ.é_.a-_lp
t jèd d, s-
. orit gnes, pr,ès 4'un petit_'a1), tàs n,1, r -és ql:l'o.rr -i ·
···ç1;pp:elle·, je ne.s3: s poùrquqi,: rEcol ,d'lio è.r_ . ..
' Je:trouvai sur Je' p-ont, en ..fàqu tt'ês· eùv.és èt en···
·fraîches toiJettes,.tout rari to·cràti-c·grec·que, de_·
· . Cliio -;.La .iongue rédingote· de.·sior ',-.Petr9 _ailait. t .
. avec zèl ,-poür pla:c r conirn.odérii .nt tou.t
\renait,
·le monde et--pour cpi'il n·'yeù-t pas_de·frôisse 1euts·
. '1)- our.a:p opr ·-ni d·e-·q: uei•elt s-.:_de· préséaucè
·, :pariiü les·ii;i.vités: Ceùx-ci;. amen.és_.par.d ..nbt?,1-.
où
hre1:1x·eariots· 'les ombrelles roug.es. fè1nroes ·de
· ·htillaietit.au ·soleil _levé.nt,:.gi;i père:nt-sole eilè-'_.
· ip.ent·le·s ·degr.és·· dè_l'échelle Tous.,:.sàuf Ja:rn::es
-.' B'ey èt ·q·uelques.â-utrès,. là.Lssat-ën,t.t·rop·v_oir qù.'il$·
. ·croyaient··faire ·-hô'nneù-r:à _leµ ·- hôte eh·_veuan.t.·
·s.'installer .et .'n111-nger . ehèz_L. ui .Lés.·_Gtec·s·, ·mêr11e
· les:p1üà polis,e: débatra:ssé'I'lt ntalai ' i ent. d'une
·ceFtain1 (-1n·org-ue,:.q1,1'ils·.p en.nent volo:n..tiers pout
:ite'-Ia dignité..: • _.·. :·• ·. :.'..· · .- ,.•· . .':·.:_:: ·: :
:;
'
.Cette·courte travers.é.é' fut uneheu:iie d-e ravisse:..
• • • • • • • • ' • • • • + • • '\. •
46
· dtOrienl inet.-1è$'.·â.me·s- t:iès=.·Jèui <én:fêtè 1 es....
ray@n:S.·du·,&dleil.:vertigal n ·Jônt:lias. enc r fes:i·:\·
.plénd -ir1i :}eÙ·ô.es ,t i dur s:·:11 l'.écl t-·&ié.riJe,.,de .:,
1
.p±êrres·;Là1ti.ontagnèl rgeine;;i{éùilée·?·ta:IiJ.t6 ro :d , ·:
ét orrd:Üleus :,'_tanJôt;c ·eu&éé•.p-àt:d,:e J _ru µe· .ct,'r,/ •.:
.. y:àss·e.s·,emble·d:éJile.v·d.èvant fi·OU.·S-; .-av.e·<tse· grfk .:
s :e'r-o.ch.ers.co-ule.\iï; d· .p. lê t . \>,rnbre .de.-·se,s_..
dln,·d
.:pro.fondèürs::.hleae$·
. .
-.A 111.,esµ:r(?
. . .
le
, q, .u . s:ol H );).1;0n.t i./. ,
1
47
·Lé port. 'était enco nbré...de· barqqes, ·_et des .sons
.étou és de müs qu-es lentes·vinrent au-dev nt.:de
nou's. à plus d'un:miU en:111er. Autour de l'abside·
et des' éoupoles ve tès de t église•;: dans·les.rues,. -
.sur là place, partout où il y avait un terrain v gue .
et u'·n espace lib1 e·, . des_-l1ommes 1 1oustachus,
coiffés de boP:nets rouges inclinés·sur l'01;eille par :
·.d·e gros glands bleus,,le torsé pris. da:ns ces vestes ..
trop··co .r es, q:ui rüssent presque.sous les bras
.. au=:.d'es·sus·d'une Hu ge ceinture de soie, dansaient,
lès mains entrelacées, une·fara-ndo1 grave, que le
ballottement•de-. lèuts· culottes bouffantes aiour-
..<lissait. L s femmès ·et les jeun.es filles.: vêtùès a·e
, ·couleurs trisles,--re·gard'aient leqrs i11:nocents·.éba:ts..
-Urie ·1nusiquè•ryth111ait lêurs·géstés·gou-rc).s·,:cette
·.musique ·d'Otient, toujoui·s la mên1:è, q·ue l'on
i·eh,;buve ·pa1 to t; sans notables différences, ..d:e
-Tanger. à l\iil.scaté, .e fan:Hne,·exaltée_et.langou- ·
· reùse, a:vec· ses : trois;.·instruments·: la. ·flûte ·.qui
chev·r?t ·d s trilles aig·us, ef sa1:1te; ..en de· sou..,.
daines: fàntai_sies·, d'une·:qctave à l'autre·;·1 lfre
: 'à trois cordes, dont 1es..notes·. s'é'g-rènent·_con11·ne ·
· ctes:go'u.t_tes d'eau:; le.tambourin, sur lequel"les·
··doigts.agiles· variènt. les 1nesures saccàdées, jus
qu'à:ce que la:paùn1e -d:e la 1nain termine la phrase·
par· un·grof·?c oup·sourd. ·Les da lseut's n1arqùent
· 1e-rytlune pa ·r 4 s battements·de pied·; parfois Jes ·
mµsiciens·,. ém1)01,;lés·par l' crith0usiasm·e., appuient·
·sur les peaux· p ssag·es, èn tiraùt;·d_eleur ·gosier .
-- .
48
des:r uiade$.déchü ante:s,:av:ec _unè' telle frénésie,.·
'. que)eurs yeu •Se·.fermen ;èt qué_le rs:vetn e
gonf1e t sur l urs fronts.cong.estl.onnés·. Dans·tou,t_.
, Je vill ge,-.du fond des ruelles, dè l'in é ietir·des·-
. maisons:,_des·_çafés où l_es··.garnins· en1pres.sé ·dise:
tribuaient • des· verres d'ea.u·· pure.:montait la ·
rqélopée · monotone..Deux · ou- trois gènd rmes .
h rcs, en·épq.,isse-tup.ique de dr p bleu, s rrée·par .
un ceintur n à p àque de·cuivre .·se promeuai nt
- tranqui1l meilt.parmi la 'foule, inutiles· et désœu.
vrés dans cette_fête très·.calme, où r n-qansait
-des .·chœurs·1noroses devant une assem))lée ·qui
·ne-parlait pr sque pas.
. >sior Petro, très._con1_1ù et très iµ.tluent !t, Card-a-
· bte1iu· que ·1e· 'scolarqu,e lui p·rêttt
..· myle,. av:ai-to
la' grande salle ..d.e l'-école ponr y recevoir f$eS
invités..On..àvait·eriievé les ha.ries .et là cha1re.; et
.ûne··bonne odèù.r d.e.festin.SOI'.ta_it déjà pa:r:'ia-po t
. uv rte·: Nous •étions tou-sconviés à. un spn1J>;-
tueux :banquet. L'instituteur. Diomèdé. Notara: ·
m'expliqua, en gré ,' que c'était .1;111 _1ttx,. tx. Ceu
_qui n'avaient pas·contribué de leur arg nt à c
repa$ éta1ent tenu. q s uittes, s'ils.·voulaient ,bien.- .
re_ndre tiles ·en quelqué façon. La·:gracieus_e
Marika' · un ' tab lier l). lanc noué autour de sa tail le
. . . .
49
. -- p ià d(p lui ap1torter ·du·sel,.-dcipoivre ét·clé bdu-""·.
. lettés .d.'âgnea:i.L· J:ài;:1tesB'ey'-·:aiçlait,. - n.o·n
sàris
.· quelquè··apparen e de f!,_i, t,. la r-01n n. $'que ·F:rari. .·
. c Ca".Stt_o-z'ï .afo1 le · pti à. K i h r la1;n;b-c.- de.:D.0U.S
donner -:ùtt coup de-riiain,:·e.t il.se ·ianc:e1·-l s; mit
.,, vètres,··d'üi); ah•·._sèignéurial-\ ··-: ... : . ·... ·:.· : . '.·-.
·.·. Nous:·'étîo-n : -su.rre· q·ûar.âri.tairie:,de: convivës--'à
. : t ble.:.Siot l>etro- .prési it.·._'.ft;?ùtes·le$.u · tor-ités ·.·_
d·e la.:c6tn:mün:a:u_té··gr.eqqne·d:e-:-:C rdt=tn1yle _ é't ient_
vecy nô'ûs. ;Je·:ti"éta.i .jJas lofn.>de Jâfues-Bey;.·qJ
êausait en· fra:riçais,: .avec:_detri ·:fringantes ·voi;
. si nés·,·et'Je.. g-ô-6taüf as· ·ez .tra1:1-q1.tiil rfreµt lé.plaisii"
· de vivre; lorsque mà :.sérénit f\lt.troublée pâr·.tin
.. ÇQUp..t.rè$jmpré·v -L'instÜute r Diomède.No.taras..
Œéllianda lé' sileirèe··en: fai sa nt: ·àôn nè r::.son è&-Ù-
• + • • • ' • •
50
. <lit.,<:fl; _ ûn:e;a-ction tien .réglée est,lâ.:"trN mière·q.ua -·._:
..·.lité:de·l; oratea1·::.L'exorde.· frlpo& ,{a:vot; bl.-e.p:ien-i -·
· l'esprit: - e l'-a'1dito re.·. L - tniliéu . _n'eu{·'d'aü-tre--
..:1Ïiétit-eque..<lë."fair _.·attend·rè.·è1uel-qriès.-.'fnstants: ·
·. "la tiéror.ajson.;i qùe terrrihiait .-ùne,.\1ointe, -à.' lp,:·.·
..: façon d'Isocrâte,..s·ÛI: les· G ulàisphjlhellênes:·èt lé...
·· ..J.lel(ènf!s gallophiles·. ·L$in.d.ulgen e dü .pùhHc ft(le:-.·.
j:-
e
·.-· .rëste· :·et fu·s .·applahdL..·Je goûtai, ·:c-ë·jo.ur-là:: .
· '. :chez'.le·-:peuple·qui :·p _s'sè· pôur lé·pJus difijçile ·de ,··
to·0:s.:.-en_:m.'atière-··:de.·disèou-r pùbliè·,.toute.s·.les
-ivresses .des-suècès.'.oratoirès-. : ·· ·. ··· ..
_: . ·P·a-i --'.p:arraghi ,--s'éct1a·-Kl ar l?- : 10s·, ij ·
:p-ai·le a ssi- bi({qfiu ·.T-ii.èoupis! . · .: ·
. . - . •,. .
, .
. . . ' .
51
'
-..:. Â.vez-VOU$ fait la conversation.àyec li. Lysàn-,.
·dre Kàïmacamis? .' ...... ·· • · · ··
: .ce_-nom ine ra:ppela-, en·effet,·un·h.én,i;ràe maigre
v.êtu ·:d.e .noit;.cravaté dé.blanc, '-fo'rt..t.oiTect · èt uri:
peù solennel, ·avec qui J'avais ·éclütrigé'· quel es
·propo affectueux.. . . . . .
- Èh bien,:reprit l'ancien co_nsul, 1\1:. Lysanclre · est
u,n èonda.mné à 1nott:. · · ·
• Jè reg;ardai mon•inte locuteu·r,:·.poui .voi_r s'il ne
parlait point par··1nétaphore :'Mài$ il p ur.::..
suivit, in1pitoyâhle., avec··un petit rire·;satanique.
qui découvrait·to.utes ses. dents et faisait luir ses.
yeux : .
Oui, un. éon.damné· à môrt;·:un vrai··con-
da:mné à mort!: Vous n .avez,·pour-vous·eii assurer;
qu'à . consulter·les .rôles de ia. cour d'assises
d'Athenes. .
Et il me.donna des no1ns,.'des dates, des indi-
cations très précises, tout le récit d'un dran1e fan-
ta·stiqu do'nl les actes successif,sse déroùlaient
dans· outes· les. parties. de· l'Orien:t;··C'était:·uile
· longue·et \riste histoire· Un j.our-; le· consul de ,..
Gree,e, à Alexandrie ·avait été assassiné C'était
justement l1anu d·e M.' Lysandre, et son con1p'agt1oir
habitue.dans·des ·cours·es·nèicturpes aux:1n;aiJsnns
· suspectes du quartier·-ara-be -L'assassin, porte- un
faix·nèg-re-,,fut à..,;rêtê, bavardà, déclara qu'il·-avait
t.é )?àyé. par ]\{.:Ly'san-drè·p.oür-faire·ie coup ;'·on-le
fit causer dava.ntage, et il .dionna toutes·.-s.ortê§ ·de
52
détàîls,.dans lesquels .ori·.entrevoyait lJ.Il d e- ces
. 'cas de: jalousie farouohe et dè·..sensualité :atro+
lante, qui, sur cette. terre hrQ. ée'Égypte·, sous
le· ciel éha_uffé à blànc, 'font perdre.le·.sens aù:X;
plus -raisonnables. L'autorité .consulaire voulu.t
mettre en-·pr son I. ·Lysandre.; mais ceiui-ci-, se
rappelant à propos qu'il .n'était pas. né sur le..sol
de .là Grèce libre, s'enfuit à Ch10 sur tin ·bateau
p-êcheur;·cria b i e n·-haut iqu'il étai·t sujet. tÙrc;. et
in1pfora l'appui.::des autorités ottoma,nes, les-·
quelles, trop 1eureuses de montrer leur puis-·
· sancé aux infidèles,, refusèrent 1'extl"adition-. ::Le
dossièr qe l' ffaire fut transn1is aux juges. athé- niens;
le pr'?cès·fut instruit; l'accusé cité à .corn ,
· pa:ràÜre deYant ·la è9ur ·d'assises d'Ath-ènes, p:rô
de
test.a son innocence, tout e.n: se ·gardant bien
.· de. v nir plaider sa cause, et ·une së.ntence ·.d,e
_·condamnation·· à_.·u10:r.t fut· rè.ndue· pfl.r. con u-·
mace-.
M· Lysandre·'.· en_ moque. Il ...achève· pa.:i ible--
ment s a· c-arrière . au milieu ·de .sa .famille et de
' • • • • +
53
jours.un an1ical·sourire,. mais jè. ne··pouvais me.
, défendre, en serrant s-a n1ajn. cordi.alè, d un petit-
frisson. . . . .' . -
. .. . ..
54
·.;:_ Volo_ntièrs·, lui dis je, à c n-dition q.ue rious
n_"e.F nco·ntrerons pas S9n_-Eicellence Je .mu-fti. .·
... Le commandèUl" v ulut bien rit aux :éclats a. :
· cette.plaisànteri,i, et nous ari•ivâmes à sa 1naison,
an-dès:sus de :1aq:uelle flottait, au boùt_dhp·i mâ.t;
-. ·un·i1nrnens.e d':rapeaü -tricçrl-oi;e._· ·. . ::-·: . .. . · -
·· Uné sallé à' m.anger claire et·spacieu,se nous
. attendait..La- ((.- consù.l. èsse ))· et ses-. d e i l X a
. filles
'
55
-larig·ue très·-cori- ctem_ent._P. uis·,:·il n;1.e .montrait la
phqtogTaphiè . du consul·. généra.l Pélissiei: ·. de
Reynaud, .en .g·:rand :-upiforme,;· et le portrait. du
. capitaine. de··frégate de lVlontesquio_u,con1man.,.
dantdu JJouve,t: : ·
. ----.- Pn des·cendant de.l'auleur des. Lettres 21e1J-.
sanes,..ajouta l'agent.consulà.Îre, d _un air entendu.
. Après .1e café,- qui fut servi ·dans. de· petites.
· tass s, à la: m nièr.e· ottomane·, le 111 ître dè_la
maison disparut. un.11101nent.. Q aµdil revint,. il
portait, au cou et sur la poitrihe, t.out un assor....
tin1ent. de.:décorations, qui bri:llaient lorsqu'un_
rayon, à travers les volets clos,. venait se p.oser·
sur les croix d'émail ·bleu; les :1nédaill s de ver-·
meil, et le cordons de soies niulticolor.es! Uo. peu
ébloui,. je rem.arquai qu:e Je .co1n1na:ndeui· t nait
à la nuiin une :casquette galonnée .d'arg·ent. · . ·
. C'est dà s cet équipage· qu'il me·conduîsit ri,
. konak_...J étais un peu ho.u.teu de. rn:on casque d .
lièg·e, et du. v ston peu décoratif. que 111'â.v.à.it
. vend-ule.taiUeur athénien Aïcl.o_nopQ: lo.. Les reprê....
sentants des.diverses ·p.uissances étaient ar ivés .
déjà devant la porte, :et échang·eaient fro.iden,ient
des_.:politesses·diplo:111atiques.. UQ.. gros· officier à:
épauleltes d'or se promenait, .s.ânglé et botté, dan
le vesLib.ule.. . . ·
. ., _
· n a s t o.ù1\ .cria yjgotrreuseme.nt un tchaoucb.
. Et deux: factionnaires,· dont un.. nègre_,nous·
·présentèrent. les ·a 'P.lest · En lllême temps, · un.
56
.otph.:e$lr·e>:c(;n '.pos:<f :_d'1,1,ne• p: a)l· .cie,.·chien.: tenaû.é..
:sù.t uif N_à}$é·,d.e terre/ ·d,;u,·e.uia.J)doliri-eet:-d),uie· .
•p tit f(ùte.p•,pelé_e, 11,·r1içi,·!att q-ti'a t).·nespèce_:d•è
· -d: sè de:.guerr..e; ,·,dit j:e. ree,onnûs·.'la:,:.Mar.séηlla.is.e :.
.'. Dalls: la petite· salle_-:a·es 'àudièilce&\,.·pauvr.è
.· êhambrë,m ·:. eu·hlée:.,-d:'-qti:·.tapis: vùlgait.e :·_èf - 'ün·
=.· sofa· ·r ·couv ri-.',d:e·toile_:bise,:·Kiém-al -ey,>·g·o'tJ.:.:.,'
-ve.rn tH du - sa_n.d}a :, de>.Chio ,- est ,assîs-;sur ·:iJ:ne-:•·
:· ch ise,..a· van.t-/Ü°:·.:petit·.,hu:r.ea:o: _,d'a'.c.aj ù- •.· S oÏi: '.
Jt .èellence.éto,\;llfé dans u-tï - rediÏng.ilte·-noire; pl s'+
.tt on .n:Je·:d'·or"ef tolite raide·de btodëri s :; L,m
• : • + : .. • •
e ou.
+ • •
57
calembqu·r n1édiocre: Un .de ses: h ag-é Îes .était
'intitulée Pat1tie; et comme.il n'y a. pas,·:dans'. la .
langue turque,'., d'équival nt a ce.·mot,,. l'aùteui.
dl!.t e p1 unter ,au persan :Îe vocable· vathan. ·· ·
-.- é mment voulez-vous qùe, IlOtlS restion·s:en
Europe? dit Fuad, ap.rès dînèr, chez··ramba:ssa-.
deur de Russie:. N:ous. n'.avoris.qu'un :mot.·pour
désignei notre,-pays; et ·ce· mot,:c'ést : Va..-t' n!
l{ién1al.a vécu à. Paris pendant d-elo:ugu-es
anné s. l.l écr vait alors des articie·s qui se hlètent.
suspects-·. u gouvernement impérial. C'est ce·qui ·
e plique 1 m. diocrité d-sa..carrtère ·. t la len.,. .
teur d.e son avanceinent..Avec·111oins d indépen-
. dane .èt d·e vivacité d esprit,:il aur it pu·devenir,
tout comme .un .. autre; am assadeùr, mini tre; g
md-vizir; Il gouverne le . ehiotes, hindis.que de
grosses têtes solennelles et•·vides, président ùx
délibér-ations du divan.·Et puis; sa)ittérat-ùrè
.a effa,rquché-·ses côn1pattiotes. Elle Pa rendu·
célèbre .et..re·do.uté,.•populaire·et :J gèrement .sus·""
.pcct d'hérésie-:·Quelqu s.' ulémas. 'raco ten ..-·av'ec
n1ystère qu'jl a: ét,ér épublicain ·aaàs s.a,jeunesse.
• Comm:e il n?y:·.à :pas·de>Bastille:.(Hi:·Turquie,. la.
Sublime Porte··aï.exilé':cefhomme.d.e.lettres dans
·. l'Aréhipel, et, d t-on, essaye·par· tous·lés.moyens
. de le réduire aù silenpe. Louis ·XIV pensionnait
les·écrivains,·èt'. abaissai sa· fnùrgt:.re toyale fus-
. qu'àlés prier d vouloii· 'liie1i se·d-6nnèr·la p·eîn.e
fécrire•.·Si ·j'en ··crois'·.i<?s mauvaîs.es- lang·ues,
. ....
58
.- .Ki-;oaal :$ y:-. 01tun:e·pen iq .po_u .·itlterr: 1np i 1
;·_.
.. ··"·
59
60
_tres·, me voilà-, toujours en compag·nie de I'ag· nt
cons laire,·. transporté sans transitioni. dans un salon
.pre·sque parisien. Je ·n'ai fait qùe tr verser
la.place;·.je·lie vq.is plus ni zaptiehs, ni k]lodj-as;
. ni turbans.:bli,inCS; .ni·,fez rouges,'ni yataga:ns, -.ni
_ fusils iV[artini, et. je prends: du thé, assis· devant
deux·aimables·femn1es,·qui ont- ha;bità Paris-et le
connaissent . n1ieux. que moi. 1\1:_m·_e Foggia :_et·.sa
fille s'accom-rnodent avec résignation du ·séjorir:de
Chi,o, où lVL,·Foggia é.st _venu o.rgan.is_er une sù-c-
cursale de.·la Banque im_périale ottomane.; m- is
elles: sont ràvies:.:de- parler parisien;:et-s?en :ac-
quittent à merveille. Je 1ne ·surprends à prêfer
l'oreille, -po1,1r ntendre monter, de.la ru·e, le -rou-
leinent des fi.acres et ie fracas des omnibus. En
écoutant-ces voix•si.bien- timbrées·, ce:pur·acceht,_·
un pe.u alang·q.i de nonchalance levantine; r OQblîe
que ·nous s-ommes dans les États:-.du·_G. rand:-,Sei.:.
gneur. Les Foggia-ne·sont p-©Îùt Grecs. C'è t li-ne
de ces familles catholiques qrii, v;enue ave-c Vil .
lehardouin .et- ·Dandolo;:·sont restées en·Orient,·
après la:'<léhâcl · de l'empir:e,)atin, ·et q:ué ron
retrouye, agglqmérées en groupe·s ten, c s, à
Péra, à Smyrne,. et dans-çertaiues' îles des ·Cy..,
..-,clades, particulièremen.tà Naxos et à Sa:ntorin · .
··_ -:- Matntenant m _ed·i"t M_. Spadaro,.qui nie tient
èt qui ne me. lâche '.plus, 1iolis aUo_ns·voir le rèste,
de la « colonie,_» · - · · ..· -.. .
. · L'ag·eu·t consulaire.entend par - e 111ot non pas
61
. :1iine·pop· t Lfàr 'i deg. lons,·f: i . iiç is ,(ê'âr .1< ft·Ftan_ .·.
· ·c:aJsi )iélas·!·.ne voyag·ent gu-èr ),, m:aii.quelq e.s .
. :1 ntison$:catholiqüè ·; dont jl ·a·;:êri ,t tt-µd. è :Capi-::
tûlations-.,..la. tti-télle ··et Ja gàr.de..Pauvrff;co ·onii.;:
. ·Cp i-tlécr îtd e joùr:èP:. j.0ur, et ;que.. Ja:.politjq,ffé:·
. ita1ierinf3·n··o-us· disputé·aV:ec un avidilé: sournois. ;
·· :ef . 11·sou·rd.d·ésü .:·ç1e :ct1ié.é,: Les·.pr.o.té_g.é$··d. e:.la·:
··:aiptibliqùe: française à·Ch.io; ori.t'-auJ rg•è:-d·ans·:
--l ur p tite, ég l së.'..Au temps dè·PàulLqcas, ett ,
1
62
au nrainlie1f de notre ·bonne.renorrin1é -- 11 s·er it
décott-rageant de p.enser q.ue. l'esprit laïque et·
l'indépèndan e·intellectu lle sont .de m,aùvai ses
condHions pour entreprendre de granq.es œuv:r.es.
Pourtànt, il faut·bien constater les faits.·Peu- ·dé
. l ïques conse:q.terit à s'expatrier pour é_tablir loin de
leut patrie·de pareils·ce tres 'cl_e pr"opagan'de., Au
contra.ii·e, les i:noînes:et le r'eligieuses sont
pa. , rtout. Ii' y a>des laz istes à'Sfi?yrne,
. . . jésuitès
des
à Cé aréé de Cappadoce, à f étsi,,an-j·à Bagdad. Les,·
sœurs de Sàint-Joseph ·ont un hôpilal à_Smyrne,
. des· écoles· à..Athènes·, à ·Tinos, ·à Naxos-, aux
Dardanelles,. à Aïdin, dans_bien d'autres. villes·
, qu'il s·erait trop lorig· d'én mér.er: Ces missions
permanentes ravaillerit assu:rément po_tir la·reli...
gion cathoJique,. qui est·leur raison d'être. Mais elles
trav.aillen.t aussi pour la France..Cela doit nous
suffire-..Leµi9n1ent ·serait mal .ch9isi pour porter
h. ors·d'0·nos frontjères·not.re.fureur de laïcisation
. ·Je pensais à tout cela tandis que la sœur Gon •
zag'ue, glissant avec ses sa dales discrètes sur,
le parquet bien ciré, nous montrait le parloh\,tout
blan .de rideaux·,empesés qui ressemblaient à.des
nappes d autel, les ·salles· de-clàss·e, où les· alpha.:.
hets étalaî nt degrandes :qiajusc'rtl s-1 la phàrm-acie;
où. une vieille .sœur gasconne·préparait ·des on-
guents., des,potions et d'innocetltes con ·sedes.
. : J regardai•un: cahièr sur un des p pitres, et.
j'y lus ce·norn .: Alimed...Beaucoap··,de·petits,'fu,.rcs.
• • 1 ,•
63
,
et •de petites.·Turques app.renaientî'A.:B C ·aux
.écoles • enfa1:tti-nes d s • sœurs· de Saint'.':"J oseph
'Hélas!s · -ce queee'.tayon..de :tu:n1ière;..si'. faible;
mettra un peu âe clarté et à.e·.vié dans les.torpeurs
du harem?· . . . .
64
-. · Danf$. l. ·-fo'ule; ·<);ut .son -.d'.un · tam.bo.u:çin· et
;d:un tJ_ût13·_,q' uelque . hc,-m,ine.s .d·a.os -eµt: · . ·:Ch. ' .
Jl()t:r ,-le·m.ot, de·dans ·éyeflle l'idé. 4'1.1µ..).no.11:y,e.· .···
t jô.yeu el-assez iolent, d'uii.. x.ercice·allègf· Qù
Yoir saute,.·011.1'on tfépigne, -P:Ù.· l'on:galf?p -;
oü_1'on tourne, O\i l'on ·se d nièrte,· o.ù l'oil se
.don- e,e·au oùp de rna.l _-et._'"h tic_o p··de plçtisi .
Là-d·a s- :'4es-Tür.cs,:_è'(>nJnte·ceHe-dès GI'.e:cs (c, st·
·1a.même Ghose, et l'on n ,,s it-le.quel-'d &·,:d-éµ
-p.eupl s l inyentée),. n st,gu.è_re q\l Un ·.11;1ar be·
èn
1 ythméè.,.-1Ù1·è_.sé ie de:.·pa. ·,11 e_s r s:;'.. . ,;_-ônd°?.-
acço.mpagµés-d:e cla.queme de doigts et·d?un -
eontorsion 1ent --du torse .. et dès hanche&. E·n ·
· J'urq: •ie_,·-I s fe nies···ne. d n:seri·.t p s; p blique""
.rnen:t-; .pour:itnagfaier leur.-beauté_indolerite; le·urs
y ux bat u . d'autour, _leU:r . s01,1rire.; le.urs :bras.
pârüés• ·ae lâss tuâe et _ l aéadènce dè le rs.mott-vé
1neuts,_•qù:-e,: uit-' l e- clîqu_etis d· s. s.equ,.ins, nous ·.
somme ·-.obligés... recourir-aux rêves .des Mîlle
··èt une.n-u.its, et_aux·fantai ies _.pittorésqiies pal!·oii·
!"on a: s ay,é' (l :nou.s:dépej;n i1·e·le •-ivre1?ses ·d1,1·
·sé i1.... En tou:t cas, le,spect 0le hnptovis. ·devn;n.·t
la ca. sèrn.e des·J;üzams·ne donnait auèu.ne:idé. :de
·ce·s délic·es:De gailla :d·s enturp.annés.-essayaient
d re_µiplace:r;l s hou.ris absentes para_da-ient.-_da11s..
des 1;ohes. rn l agr-af e$; fl µries de de sins naïfs·,
·-.où,·.la l.ueür· v:a, Hlante des·torches· semait • de
_ro9biles écl ii·s..1is:agita'.i nt 'des ·_éC éif.p·e - t' ta ·
. hai'-ent, p v û:ae gy -na i(irie laborieusè,-de-1.to.us
65
·:rëg ésënter_là fàmèus: :« ·dàn:sè d1:1·,,èntr •>'>: 'J.VÎ&is:/
·idéèi<lérti. n-t;.ces ·almées- Ji ri.10ustaëpes.iiia,,aidnt.
·p sa :s îi::èJJl ch: rine e·t.d.oùè.eùi< J'lÎirnaürrri:iétix
· :t\ girdër l s ·ge'ris aütour.d.è:·mo'.ie; ·P. pUl tietn.è4t
.: cl'e è et ·s·q i s'allumait ·da s·1 large·flamp<iè es ...
. · itôtù s résineüx, e·face 'brot1iëe •·de Jeürte soldat
qur·>r ss·ottait•..eri pléin.e,lum ère, .."a-v··é c· ,un vigqu-:-
·teÙ·x:reli f, là haut'e tàturé·a'un-téiia;ouch,:c9lo s·é
âut .. mains·lârge.s; 'au.x n1,anches-·-galonné·ês .d'é
roùge, t.oritês.- c·e ·:,'Physlon-t>"mie ' tùtal;e ,.··m:ai ·
forte· , venuê·s de loîri? êvoq à::t{t,des·sortveritrs d:è·
··g êrres terri.pies . de .è nquêtès:sa g.lant ?. d .
fqlles·ga -0jiadeà qui se· sont qéch'ainées à travers"
· le lin0IÜté ef·qui oht..enttaJ. é l'ês adton .d.:ébrid:é;
jüsqu'_i(.c.e.·<pî ,..-d vànt:·l'OcciŒë t niasse:èommê
tih•itjffanchissable· 'o·bstacle, le. : totirbillo:n ·::·des::
avaliei?$···d'Asi s'àJ:-.rêtât ourt. · . · · · :·
· _.V:ers lè µiiliéû·de.. la :pla.ée,:loin·d·tt-Ia luâiièr-·e·,:
:·dë s fotn:i:es. hlan·ches·, éftà.rses..stl·i· I · sql, s ag. i
iaiént; cô)lfu-s· ilTe'*l;. avéé·-u.p murmu.re \(âgüê-.d .
Cs
·voix ·g io tl1antes·... fa-p:t◊fnes p:âle.s ·-:·uêh gués.
à l'écart; dan un floÜement' d·e voÜ·es et d€.ivêù
.ni nh·, atnplésj ù'étaj·ënt. dés feilimês ·turqtïe ·, .::
.,quï'Fon·ava:i p rcn.i:iide·prendre patt/de·trèiJoin ·.
··à.Jà:fète:. dtt' glorie·sulta. e...s."hon1n1ê impot.:.,
tànts.._ ë.t {è t .r'éut:ti·s ..dans;:·li !)etite··i; :oti:-4P.·
général ·'.Ne1lgih-P·aèlra;.\1tes·âe.la:por e''dé lâ ciùt::..
delle .géiiinise• : cadte d·es fénê.tres. Ïais iait ·v-0ir
• dës ·c0h1 ':d·e·.tablë llx.où.J'àijërcevaii.:.ié.:profil.
66
· h1 sqûé .' d_ug
· énéral, et,. tout_autour de .lui, une
- . assemblée d:é t_urbans blancs, qui -ressemblait .à .
un consell .fantastique de patriar·ches. ·
Le konak était éclairé de. bougies, et Kié1nal-
Bey', ayant _quitté ses dot es, réce-vait ses invit s
eri sin1ple stambouline. Un petit cabar t grec, 3:Ü
mili'eu de. la place, était rempii d·e g·en's qui bu-
vaient e·n plein air·des verres de sitqp de cerise, de
la limonade· et des tasses dè café tù:r;c. Les
_chapeaux_.ronds et les. paletots eur.opéens circQ.-
_laief!.t parmi le accoutreniènts..des insulaires
Quelques famill s;, se tenant.par. la inàin, étaie.nt
venues prendre le frais dans le qua.rtier·musulman·;
' près le repas du soi·rn·es j'eunes filles grecques,
en cheveux., riaient et habillaient. Je. nf ocpupa,i
- .analyser les sentiments divers d c t\e fot;ile
• • • , 1 •
67
Adamantios Koraïs (Smyrne 1748 - Paris, 1833)
68
1
CHAPITRE:III·
i
f,
• •• , ,> : l : '· ; • • , •• • : i • • •' • . .
Souvenirs. de Brzance. - Une cori.qu te par actions. - Las
J·ustfoian,f, mard1ànd"s de. d-enréès coloniales et·princes:souvë-.
,:-.ain:s.:--:'"J;., s· Gr- cs: les L_atin . les, Turcs.----;. Le_général Nedgib-
Pacha. _: Le p a y_sd u. mastic.·. ·
r
. .. . - .
·..
f:
t
Les GFecs d -Chio,·afin-d
mieux affirmer·léur _. l'.
:ancien.rie possessi-011 du>soJ;·ont;organisé,:près d·<r ·:
·_leur··gymna.se.d'euseignem·ent secondaire'; un_petit
· mü-sée:-d1antiqùités.-·Les:souscriptioris·necèssàire$
. à·cet étà\bHssement n'on :pàs été-difficiles -à: réÛnh·.
·Il a., -süffi. qu'Auibtdsios, ·évê.qu-<f,:·rappelât·à•se-s
ouaillés:le but' libéral et:pa_triotique de cette fon-
·dation1:•. cè n1u,sé-, i.l'on eXGepté les inscriptions
.trouvéès èn 187-8 p r:M. Ber:àardB!aussoullier'
. - . . .
,_pe. . '
..
. A
-:i.,'E
_• 'lt1 't<J>
- (Pt) ,c,p.O\JO-
1 •
Y. .t Ç?t ) ,
\O'ltCXTptot ., . Y . I X,C
û"/.O'lt<:> -.:.O\JT'flf>:
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.-t.
"&v -c-Épw.Ôtû,&6op.ëV o·potc;, 1tixpo:Z:,IXÀOÏ:fp.cv Oµ;·ac; IX tOTtµot èruµ.noÀL"'
l
, · f a: t , . ,v ' ha),&6"1-ra -r- v·'cppo·v -rtôci:. ·-r11 ,.ci:-cixyp1Xër,!ïig cr'\JvôpotJ- ·1 )- .w v;;.
* · . . . ) ,. . . . . . . ..
2. Voyez le Bulletin. de··correspondance hellrrniqi(e, t. li, p. 10,
105, 322; t. VI, p. 1.51., 1ij5. - Un jeune savant .{l-utrichien,
M. Studniczka, a-fait une courte exploration·de Chio et en a· '
rendu compté longuement dans les Mélanges de l'École· all -.
'!'•
l
'!
\
!
69
.cop.tient pa, beaucoup.de 1;non11me:r;itsportants·.
· Apremièr.e vuë, l'antiquité e-mbleb s .nte de Chio.·
.Point de·colonues éparse , d frag·ments..d'a:rcl+.i
tecture,. de déb ·is de marbres. Les tén1ples:ao..qiens .
-0nt été si bien détruits et·s·i soigneusep.1ent ràs.és,
qu'il n'en· r·este pas pierre sur pierre. D'ahord..,
.on songe malgré soi-au moyen àg byzantin. La
vieille forteresse·,bâtie sans doute par l s G-énois
sous l'empereur 1\iichel P_aléologùe .domine_.tout,
avec ses gros·murs, ·ses.to rs n1assiv s, :ses·_rein-.
})arts effrités et.. dorés. :Les lourds canons de
bronze.?Ut disparu-de.l'em.brasure de. réneaux.,
et la Sérénissin1e_Républiqu ne 1net plus, dans.
les cb.e1 h1s de ronde, ses routiers, l pertuisane
au col. . N'in1porte, ç,e vieu donjon ra9.on - une
histoire qramatique; il faut. écouter c qu'il dit,
et noter.les_:visions qu il éyoqt;ie . ·
. Justenien,t,' la ommu11auté gr cqu installé,
près·d son églij,e·, de·son musée·et de so_ngy
n.as_e, -µne_ gr nde et bell hibliothèque, qui a·.
• hé-rité e . p es.que tous les livres _e.t manuscrits.
70
.. t ép o-rél1.F:fornstein·ëf_aé l'épi-inélètè'âlirriop&kis,·.·
-·f'ai•p :_.p:rôfiterd_e · ous:·cès trésors- _Pendant lés
·ch, udès·Jôurn ·ès _dé la·:saison ·clà r ,'j'ai p'àssé
là ·de_.·-1ongue 1s i'eurés-·èi1·:tête· à t t . àvec'·Ies·
ylè -,'c rorii·que·urs/ Ann_e·Comnène, Nie pl,àre ..
Grégotâs, _ Nicétas.Choriiate,:George· Paëh31mè1;.e,
.·Micp.êr-D u:èa:à, _.sah_ compte =-l'es 'e:x.cellents·vt,ya"".
.. _. geû-rs ·Bëlori, Stôékhove; Tournefort, Paul Lucas.,
:·Galland/ Oliviet, ·ét'. l'admirable· J1ê'l7ioîie:_·d·e
Fùstel de··e_o_ùlangés ::.· :_. · ··· · ·
A-niesure- q:uë·-Je lisais-;·toute l'histoîre-lo'cale,
· si profon1démen{ mêlé.e aux grands événernents
de·l Orieiit et de-- l'Occident!: se lev it·;du fond--
du p ssé;. én in1ages. n tte :s·et coforé_es l'apet-
cevaî:s ·là déérépftude: d·e :Byzance· à la -nn: dù.
'_'xi -sièéle·;·sous··a.es:empereurs;indôlènts- (Jri-
. voles, la race affai?Ïiè êt: êpuis ·e, ayant pe:gdû - .
jttsqtl'à;·ses qu'alités'1 s'·plùs vivaces: l-'ésprifd'en--
trëprise etlè don 4e trafiqùèr; les -Italiens .fempa:-.
-- ran:t:·peu··a péu•ide_: tout:le;négoêe; Ie•sîles··· a n. s·
. défëiise;-·abahdt>nnées·:, proie facile pourlès:"-aven:....
turi'ers -: aùdâ:bi ux ·Je··sohg'èa.is .- à _ l'.àrri:vé:e d:es
· Génois ën 1346,--e·ta C(fcléhatqùeinent, qûÎ- fu:t
. une·;·co quêtè''pat·.aêtio ·s,·'\1nè.ëntr_ priie' cèf --·
.- ·mandité:e ·_par:iru:·syhdic t de capitalistes, à··'pe
·pr s comme- celles que nous tèntons aujourd'hui
· vêts le .lac·Tchâd :et' l' Adamaoua:·. Les 'galères.-de .
.Simon Vig_ii_ô&Ô: âvai n.t.ét. _-fr.étées··_·gr_à.cê. aux ·
àvancès de trénte-dèu. i p·articuliers .: q-ûi,·après.·
71
_le suécès de la campagnex,:igèrëtit._leur rein+
hoursement. La.République·leq·r montra ses··èof.,.
fr.es: vides,. et leur·dèm.attda un. d•élai d e· vingt
année_s...Ce sursis écoulé, le:·doge·ne·se trouva
pa plus riche, -et dut, .'pour·payér ses dettes_;
abandonner l'île à ses créanciers. ;-Ainsi
..
l'île de
Chio. d?vint non pas une çolonie de·G-ên.e ,.mais
une sorte d ·capital,' un-terrain_·:d''exploitation
. !lne propriété de· ·rapport. Peu a
peu, les.-Jt1sti...
nianï parvinrent. à posséder. la· çr:é:apce. enti'è.r.e,
et à constituer à.eux seuls.la compagnie privilé- giée,
la 11iaho1Îe,.inveslie du droit ei:clusif de fixer .
et e pe ·cev oir l'impôt. L·a suzeraineté nominal.e de
la·B..ép-ublique ne se .marquait::qu-e-.par.,renvoi
l)ériodique d'un pàdestàt. Ce magistrat ne tard pas
à êlre choisi âans le sein même de la niahone, et une
fà111ille de:·marchands enrichis• devint insi
par- le fait; ·s_inon par le titre,:u,p.e .dynasHe· de
princes souverains.· .
. Le caractère essentièllem.ent mercantile. de.cett. e
-·do1ni11:ation n était pas fait·pour ·rendre·populaire-
la famil\e <l'es J ustiniani. Leur oiigine étra gèr_e
s ffisait déjà à rendre leur·.prés nce,odieuse..Des
sujets qui, à la rigueur, consentent.à._pàyer rimpôt
quand ils le vo.ient contribuer,- soùs leurs. yeux,
àl'intérêt général, se·soumettent avec répugnan e
_.à une·taxe qui.est le.revenu ,p r-et simple.d'1..1..n
seig·neur et m-aîtrè·. D·ans ce as;·.1 · sujétion e-st
trop ·voisi_n dÙ s·e;rvage.; -la sou1nission. politiqu:.e
72
-.r ssemble trop à üne. série de prestiùions arhi-
traü e .- Enfin, les Ju tinian:i étaient catholiques., .
··vassaux:.du :pape, p1 êts, en toute 9ccas on,.à. sou,.
·t nir les intérêts de1'Églîse latine;·nouvelle.raison
pou •mériter la haine p rséy rante _ et._a_ctiye. de
·-leut S adminis.tr.és. . :
On peut définir en qqelqu s mots l'histoire·_ge ·.·
, Ch o pendant toute.la.durée'.du, moyen âg : des_t·
.·u:n:e .lutte entr _le culte latin et le culte gi'ec. ·Le ·
·premières.rencôntres des Latins et des Grecs lie.
fur nt point_cordîales.. Lorsque l'ëmpereur A_lex1s .
-e-ut appélé à son·seéours les·chevaliers d'Occident,
- il_fut effrayé de ce qu'il . v it fait <<'. Dès la pre-
.mière entrevue, dit Fustel de Coulang es, les deux
·races se-jugè.rent ; chaéune détesta les ·défauts t
enc9re · plus '}es qualîté·s de l'aÙtre .La haine·fut
égale entre elles_; s_èule_ment eile fùt·mêlée.p,ou1
-l'çn de mépris·, .t pour:l'àqtre de:craint . (?est
. à- partir qe ce jour qùe s_'e t .é.tablie,,èhez les.
Latins, cette opj.nion que Je Grec n'est-q1:1e m,en-
so·nge et fou1·b rïe; de ce: jour arissi le Grec a
reg.ardé le tatin con11,Ue son hrut&,l ennemi! La
. religion, qui devait apaise.r l s-.haines, lés a
- ; • I ' •
e nv eru m·ees, » ·
. . . .
:. Le sultan .Abd-ul-J-1.amid 11-' oblig·e pas -l s taïas
à fair(;}·1a·priète m.1;1suli-nane.en. e to.urn:ant. vèrs
· la Me que... Les· Génois, ·aü . ontr.aJre, ::së soùt
a1nusés,. pat piété, à•hur:nilier l'a1no.ur·patriotique
..de .Grecs pouf·leur reUgion
, . .. .
nationale. L'Ue . fut
73
_pe'uplée de: CQ.rés· e de capqcins·. Q atre ·fois·
r n,- au-xfêtes de Pàqùes, d'es saints Apôtres,
p_aa
de N·oël et de _laCîrco'ncüüon-, le podestat,, avec
un goût tout itàlien:pou,t·la n1is13 en scène,' ordon.:.
nait que les· aisons fussent fleuries.d'or·angers_
. et dè 111yrtes· et. décorées de Japi!:?,.Les pappas
g1·ecs, rang·és en ordre par 4es huissiers·armés
-de hag·vettes, s'assemb àient··sur la grande plac_ ;
. dev nt le palais. U:n crieur public montait sur·un
tréteau, et les •Génois, du·haut-·de leurs terrasses_
pavoisées, a-ssistaient à une.petite-c9,,nédîe sol n--
nelle dont voici le :scénario : •.. -
. · Le crieu1·.- - Au nom de Noti·e-Seigneur
·;Jésus-Christ et de la Sainté-Trinit (roulen1ent d
tan1hours), et de 'la- très glor:i µse Vierge·.:M:arié
(roulement de tarriboùrs),_el dù saint martyr Jean
Bàptiste (sonnerie de clairons}, prioils pour la longue
vie, la g·l6ire· et l'honneur de n0tre .saint
père le Pape_! , ,·
Les papJias. tongues années t·.
. Le .crieU,'J?. ----,- . Pri?ns.- pour. -not ·e invin.cih\e.·
emperèut !·· .
Le pappas. - Longues années·l
Le c1·ù1u1•..-· Prions poµr la Sérénisshne Répu..·;
hlique de Gênes!
Les JJetppas. - L·on·gues.ann· es!
Le c rieu1•.' -· Prions pour la très illustre et la
1
74
:·,J.'11$ 1Javpas. t lepeu7JlfJ -.Nous·:prion_s.. Evviv !.
·Ev•viva!. :_ · . · ·
. . o·n.j.ug·e aisément 4uelles. emences de h ine
l • . • •
75
lorsqu'on cause •:avèc les petites gens ·et··que l'ou
saisit, dans leurs paroles, l'hérédité des ressen.---
de
_tünerits.ancie'rl:S ·Fuste{ Coulanges a très juste-
ment remar.qué cecî : ·« Les· habitants il Chio n'ont
Jamais -aimé_ le Turc;_n1ais.· co.m1ne il&
·détestaient davantage.les Latins.; le Tur prit pour
de l'affection Ge·q-ui'était. qu'une··_nuance dà11s·
.la hairie. »•Et l'illustre historien expHqüe à mer:...
veille, avec sa lucidité· pénétrante; ·ce poin,t de
psycholog_iehistorique·: « Entr_e deu?L·religions,.
-la distanc_e· est ti op g-raride pour que-·1es . anÏ-:·
· n1osités· soie11t bien . vives ·. Mais deux sectes··si
i'approchées se t0i1chent pa11 trop de points; la
comparaison· est trop facile,. la 'discuss on trop
inévitable, les prétentions tr.op.· ardentes, pour·.
qu'une . implacable haine rie_ remplisse pas lés.
cœurs. »
Les Lati s. ont accusé" les Gr.ecs d'avoir pi·o- .
. V<?qué, par· de sournoises intrigues, l'e pédition
·. de_1566,·dans laquelle Pialy Pacha, par ordre•dù
sultan.·Soliman, p1 it possession de l'île. Ce fut une
joie, dans _toutes Ies églises et dans: to1_1s le&
couvents·orthodoxes,' lors·qu'on apprit q e le der -
nier des Jtistiniani ava:it·été euunèn · é_n esclà--
vage et relégué à Caffa t. Les Grecs de·Chi._o ne·
• •
-- +
. • •
76
négligèrènu t cu.ne:o_ceasion-de dénoncer.la::popù
lat on Jranque·"ri rànii:;nosité· -d1;1s. ultan;.·Ce: fuf
·U;-Ile·véritable campagne. a .délations .rp.eil.ée pàr
l'évêque ·ôrthod()ie Jg.;nac · Neochoris:et par·Jin
·prêtré . grec, :si dévoué. aux· turcs, qu'qn rap:
pelaif:dans·l'île le ·« pâpp.as lioustapha ))· · . ·
:· .La .papauté; inquiète,·crut qt1:e, pou_rirainëi· --
. es Grecs, îl fallait à tout lé moins·des.jésuites
·Les· pères·,dé_.'-la Compag ié.:de·Jésus envoyèrent ·
· iles ··missionnair.es à Cl io. Upe diplo1:natie insi-
. . "
·1\i j_esté près le. Gra.nd-S ign·eur, certifions à tous quïl appar-:.
tie dra, çomme· N.-J9s ph Jüstinia_na es é et est un des gr ndi;;
·séigt;teur·s d_l'isle de Chio, qui, en Pan t566, au mois d'aYril,
. fut prise par P aU.y-Pacha;'.pour lors capitaine gé1_1éral d
J'arjnée de l'empereur qes 'l'urcs, et que·1es pri_ncipaux sei- ·
·:gneurs :e. n .Ture·n:t chassé·set: privés de·r.evenus et.profits, qui
Jéur appartenoie.nt _sur le dqrnaine de ladile. isle; d.ont plu-:
sieurs ftjrent menez à· co1ist ntiriople, et là detènus -prisonniers·
plusieurs mois et p 1is exilés ep Carra,·bourg d'e 'I'ai:tarie_;
<lesq9els estoit ledJt N. ioseph, qu} a esté·délenu deux ans
·av C sa· femme et sa fa.m-i_lle sans espoir d,'aide ny secours,
. eorn.me la Iongu'èur de leur déli-v.rance le tëmoigne, mais. pài'.'
l'stid . d'è Dieu tout· ·puissant, et grâce·de s0n Saint-E$prit;
.nostre roy tr èhr stien nous·.a commandé par ses I #res ·
-que·ilous dèmandassions 4e·sa p rt audit Grand-Seigneùr.·la
'liberté desdits s igneurs de:Chio; leq_uel, eri considération.d
Sa Majesté trè$. chr.étienn_e, me l'a accordée·;· et' sont depuis
rèlO\lfDéS.•tcJ à Constantinople ceux qui sont deineu1\éz en vie;
d'oû, on sans'grançl'peine, .sous la .faveur de nostre Ro'y. :tr s
·cbrestie'9-,' ie;; uns.so.n r fourn s à Chio, et. lès àütres à
'Gennés, -pais:natal de·four.s an.céstres, desquels est ledit Joseph,
â. la prière duquel nous avons fait· ia présente attestation,
.faicte..soùs nostrè.scel e signée de nostr propre majn. · ·.
.. <c:-Donné à Péra,-le deu·xfo$me _jour du.--wois dejuiUet 1570.
((.Signé: DE; GnA,NTEnrn, à:mhassaçleur de 'fra:pcc en Le:v:ant;
·et: SILLÉ, êt; à·cosi , CounTAY, secrétair.e de·Monseigneur
:l'a bassad qr. >>
77
nuailte ea t lig·:p.e négocia Uilé esp·èce de 'réconci.:.
-liation. . Des archin:1andrite. s se· ·co.nfessè. renf. aux·
curés. On pu.t··croire. à un ·acco1 d possible· e.n;tb
l;Église romaine .·et le .. chisme ·-de Photius-;.. un.
jour, J'êvêquè lalln officia.au mon.as ère de Néa.:.. .
Moni·, et les.·caloyers grecs·lùi servir.ent la messe .
L s comptes r ndus des Jlfissions des.îles, pourJès
anné_es 1619·,'16.35,'1636, 1637;·-ïnsistent àpl isir
:sur cette trêye;·La catholiéité dut' à·ce ·pefsévêrarit
travai de pro.pagande quelq·ll:es ·année:s d·e répit et
comme une r nàissance de sa supr matie da-ns Je
LevanL A Chio ·seulement, elle fonda ou ocçupa,
pend nt cette. période , . 'plus de . quatre vingts
·égli e·s. ·· · · ·· ··
.. Cette .apparence de concorde. n_'êtàit, pour lés·
-Grecs, qu'un jeu et ·qri'.un rôle. Il ·ménageaient
un:
à leurs rivaux .. tour de Jeur: façon·: et s,e .n1011:..
.trèrent supérièurs· aux jésuitè·s par leùr. habileté
:à se débar1·asser de leurs:-ennemis. Ils trouvèrent
le moyen, da11s là mê111è•occasion,de p yer leurs
. ·dette. ·:.Voici comment. La coµim1:i- auté .g1 ecque
· ·de Chio·devait quelque argent à·plusieurs fonc,..
•tion·nair·es .de..·la:Porte..Èlle fit ·croire· à· cès·.puis-
.'sants
.
s·eigneurs
.
.qu'
,
èlle les. paierait sur rheure, si
'
78
Heu .qu'ave·c·Taulori_$ation de. l'évêque grec.; .;
. <flié l s églis•es des· Latins seraient, C@Illr_
ri.n
e· ous
d.i&ons .aujourd'hui, · « désaffectée's » ;· -.·.· ·que
l'êvêque làtin rendraît con1ptè à' l'évêque grée des ·
-revenus -èt. 4e-s. dép nses d·e· son a lmini .tratiop,
et qu',Q,près ies r stitutions exig·ées,.il · ortiraîf de
-l'île. ·. . .
·.·Ce·n'e$t pas-.torit.. Il arriva, :en: 1694 ;··.que
l'amiral .vénitien .Antonio :Zeno parut dans les .
eaux 'de Chio :avec une. escàdrè, et débarqüa ses
:matelots. qui prii ent la vil. l e.sans peine. Les
familles italiennes de l'ile,_ les.Gi·in1aldi, les For- ·
netti et ce. quf r·esta.it des Justini.aili, • écrivirent
'··.une lettre ·de félicitatiOI)S à l'amiral de la Sérép,isM .
. siine République. Cette lettre tomba, on ·ue sait
com ent;· entre , le·s mains ·des·.Grecs., gui la
nrent voi.r aux. Tu.rcs. L e sultan Ah. 1ned fut. saisi
'
79
<{est, que l'ambassadeur de ·.france· interv1n.t e
faveur_d.e.s Latins poursuivis -.etfugitifs,. et: que le.
consul' français. fit aménager poµr· e11x, dan&: sa
maison, unè petite chapelle. Dès. l'année i 701,
l'exercjce· public de leur.:i;eligion était interdît.
: Beaucoup de fidèles, persé.cutés tout à la. fois. par
. ]ès Grecs et par les Turcs, s'ét;àient arivéS. ·dans
··1es iles·voisines.. « On me ·fit.vo1r,. dit Pa1,1.l Lucas,
plus de trente églises l tines.,: que· les.. Greès
·avaient .détruite!?·ion usurpées., . ou n;iênte:fait
convertir en mosquées. Les plu·s. considérables
étaient la cathédra e, l'église et le collège: des
· révérends }?.ères jésuÜes, celle de& révérends pères
.. capucins. et d e p· s. ocolans. De ces··cinq ég}is.es,.1
c. athédrale.et celle dés dom inicains ont été. con
\
80
ët d'es·-g·ëus·de.!ien;.au.·lieu q e le rit.latin··est-lé
rit·des princés et des p1us grands· ro!s·._·»Ains_i,
·. c'est gr ce à la conquête turqüe.que·Chio s·t redè.,
veiiue grecqùe. Il ne.-fatit pàs s'étonner si le voya- .
gèur êuropéèn qui.s·'aventùr,e par1ni Tes·J?,aisous·.
de bo'i_s dè ·Tatavla, faubourg ·grec de _Co'o.stariti:..
nople, est ap·pelé·, p·ar les·mégères dü quarti r,·
··skylo franco (chiei1 de Franc), et ·si les oùvriers· :
· taliél)S du. Làuriu111; rusent en parlant des·H l
lè;res qui. travaillen"t aveè eux da;ns la mine _.:
Questi g,;ecaccli·î, c ie·· racaglia 1 J · .· .
1
_'
.De toutes: )es contrées·.de· ranciep. empiré
byzan fn., l'He·.·de Chio,·qui devait,.e 1822, 'êfre
.ravagée par le. plus·. horrible ·massacre, est pe.ut :
être. èelle qui, pen·dant' plusï urs siècles, s'est· 1.è
mieux, accom.nJ.odée du régime turc.- Le- Cliiote
est paisible, po.tie_ni·, u.0; peu poltron n1êmê et point.
1 . • .
81
de'raud:ace. Il esfmalaisénient horhÎile e guerre_,;·
·Il d·evienttrès vite un. : excel.len:.t .h omtne d'affair.es..
' . .
82
.tri,otes qui 'sont'te tés .c h è z U
, X·, laprestige' des
. ichèsses.acquises. Lotsqu'ils ne.peuvent :ue'.veiiü
.ciutouif·:du clocher; ils env.oient' de· loin de. ·
sommes crargent _p'ou i'entretien.:de·s .é oles,:.la
construction des ég lîses,.1a fondation des établis:..
sè1nents d e- b.ienf sanèe. G.
râce à_.ces coritribri- '
83
v 1 ll-edu- Levant la mieux ·bâtie. Les mais·ons,
· èonstrüitès par·Jes· Gé:o.ois et' les Vénitien.$, ont
. u.ne élégance et. dè·sà· g•rép.1ents. qu'on·.est.étonné
de rencontr r· ·dans· l'arc ipel... -L'_aspecf de_· s_on
port est très agréable.» Un autrd voyageur, moins
hnu,·le citoyen Olivier, qui fut <invoyé en mis- sion
· scientifique dans l e _ L. é-vant p r· · le cons.eil
_exécutif provisoire de 1792 .et'·q i·rie _rapporta-
. guèr de·son _v.oyag·e que l'liorre,ùr · e la tytannié-
et de la superstition,·décrit·ainsi 1'état·politique
de l'île.: <t .Le -législateur qui :v:oudr'a obs. rver-
J>influèn.ee des. institutidri.S.et. des lois sur les
mœurs; le caractère·e't l'-industi;ie· de l'homn1e,
doit principa}ement tourner ses . regards vers· un'
.peuple qui, vivant sous :le:-1nême ciel, .sur le
1nême sol,.·professant la mên1e:religion; diffère·
cependant de lui-même··au p_oint q.u'il parait
inéconnaissable. Après avoir franchi un petit bras
de 111 r; Je 1ne suis cru tran'spotté dan·s une autre
:1t·égion; sous·un autre clirnat; j'avais YJ.1 le Grec
courbé $Ons le Joug du plus· affreù.t despotis111e :·,
il était .fourbe, grossier, tiniide, igrior.ant,.supers-
titieux et pauvre;· îl jouit ici d'une o•rrib.1 1 e-·d e
liberté; il est probe,. ci- til, hardi, ndustriéux,
spiritue_li; nstruit et riche Je ne retrouve plus ici ce
1nélarig-e d,e fierté et de.bas-ses.se; qui caraètérise
_les Grecs· d·e· Constantinople et· d'une . grande
partie du Levant,_ ette·timidité,·.cette poltron.:.
nerie, qui oc.casiopnent .Ul).e .craiµte. perpétuelle,
• + • ·-
84
, cette· b_ig:ot rie qui n'- 1npêche.:aucun :Crime.,.G..e
qui distingue ·_les habitêints· de· Scio· des ?-l;ltres ·
Grec·s,.c,e&t un penchant décidé v rs_le comnierce;
·· n'goût vif pour les àrts, u;n 9ésir d.' nteeprendre·;
c' s·t un esprit enj ué, plaisa.nt, .épigramm.atique;
c'ést quelqu fois u-n i,orte de gaieté foH. : t hur...
. Iesque, qu a donné li u- au proyer su-ivru;ii : Il be
· est ..·aU,ssi·,rarè de ·t1 ouv.e1 .un. chevq,l. JJert. qu'u/ii
. Sciote .sage•.QlJelque.-vrfil: que so_it.le sens outr.é-
·. d ce.proverbe à.téga:rd d.e.qu lques habitantse -
S'cjo, il en est.un·plus grand nombre qui.$aye_nt
. alli_er .la prudence la plus •circonspecte.à l'enjoue-
ment le phis vif .'e.t,.le·plus aimable. Null ê\Utr ·
yill_e., .dans.le Levant,. ne. présente un .·si grande
m.a se. d'instructiou; · ntille a:utre ne
-renferme.
aut nt cl'homn: e_s e;ernpts -de pr'éjugé , plein$ de
bon sens et de·r&,ison, doués d'une tête- mie
or-g isée 1• » .-· · ·
.Le·_bon sans-culotte Olivier, dans la foug-ti de
·$.oit. enth_0u·siasme, ·s'est fait péut-êtrè que]què
illusions. sv.r l'esprit d.'ind p.endance. qui,.à l'en .,
· te:o.dr , ài;iJm.ai les -habitants de Chio. En.réidité,
ç.'est for.ce d-es· ouplesse politique et de flatterie·
• en.:vers· les puj.ssç1.nts,. que les Chi9tes assurèren·
. le ...lllaiQtien.. d·e leurs. frauèhises'. 11s :a:vaier-i.t,
.pre que. _.toujours. , a:ui·. abord de la Sublhnè-.
.' .
.. . . . ..
. .1.: G.-A,.. OÜvier,.Voyage dan,s _l'emp_ire·o tomçz_nl,'ÉgypÙ et la
· Ptwse, fait par· 01•d1·e rtu gouve1!nement, pendant les si:ipre111.iéres
années. de la r publiqùe,. t-. - ,.p. 1.03. P _ris, an lX. -:.,. . . . . ·
85
Porte' un protecteur'puissç1.nt; quelqu.'U:n des
leurs, arrive p·ar l'adresse et l'intrigue-, et ca-pable
de leu servir_de mînistre ·plénipotentiair·e.a,uprès
du divan. Tèl · fut,. au xvne siècle, Panayotis
Nicosis,' d=rogn1an· de·l'amhassàde r d'Auti iy.h?,
espion du suliàn:auprès 4u n1ême amhassadeur,
t plus. t r.d secrétaire intin1e dtf g;ta!]d-vizir
Ahn1e . Kupruli. Tel ft,1.t .·enc re ·. le ·médecin
Alexaii'dre 1\1:avr_ocordato, natif de Chio, homme
fort savant-qui, au dire de·_ses biographès, pa1·lait le
s a.v.e l'italièn, le français, ie :turc, lè persa1:1, et
l'ar.a.be;· c'ét it-_plus q·ti'il n'en fallait. pour
réussir àùprès des·Ùsn1anlis, g·ens soigneux de
. leur santé-et peu·polyglottes. E·n··Turquie, les
médecins et les interprètes sont en passe d'arriver à
tout, parce qu'on les e1nploie à. toute.s sortes de
p.eLites·con1r.nissions. ,Alexàndre Ma.vrocordato
devint··un -ho we -si indispensable, qu'.on le·sur.-
n mma le Confident des sec1 ets, Ô lE tl.ïtbpp·f,-rwy.
1
D intèrmédiaire officieux., il devint ambassadeur
et pléüipotentiairè ottomali ?-li congrès de..Carlo.,
i1itz-Lès. méchantes laug·ues ·pré.tendent .que,.
dans.·cette.·èêlèbre réunion .·de' diplomates, i1=
servît d son mieux les intérêts :autri-0hiens. En
to1,It cas, dévoué, conùne tou ses:con1patriot s,. aux
pr-ogrès de sa religion èt de sa race, il pro- fita de
son crédit- pour .assurer aux··Grecs la pos- se_ssio.n
du Saint-Sépulcre, et po.ur·établir . par"".
tout_oµ il le pouvait, d·es. coles helléniques.
86
Spute·nue et prése vée p r ces influence_s très
effieace , · la cité de Cqio, administréé p l' ses
;
démogérontes, fut pendant.très·longté1i1ps, malgré.
,- • • • • +
87
(……………………………………….)
88
) . .
Lorsqu.'on -so1 t du_ch_ef-lieu de Chio, on che_-/
mine pendant. assez . longtemps. par d.es. r elle$-.
étroites et tortueuses ,:'.'ih,:o.r.çlées·de murs très .hauts·..·
· Les'Chiote·s-,gens;>Ji?i:¼t.tq1,1es, so t très wéna-.:
gers· le leur terrairi\1ts.':prennent. le .plus d'es .
pace 'possible pour leur-s jardiD:s et pour leurs..-.
cour .: Il y a beaucoup de .villas dans:les.ver .-:
dures_du .Cartipos. te_ s unes sont habitées toute··:
. ·l'année; les q;U;tres.·servent de résjdences· d'été_, à_
de·riches n1.archand$ d' Alexandi. ie, _ d'Odessa_:: et. 4e
Smyrne. T9ut t, sont bien·tenues. L e. -sp o·.,·_:_
priétaires ont re1nédié la ·sécheresse·qui:leur.:· f
it_souvent be _ucoup de mal, en recûeillà.Iit .· clans
. de va_stes citernes l'e u des Jllùies, · des:.
sources .et. des. torrents;- une machinppelée:_
·no1"ia,·roue 1n:µnie. d'une sé ie de seaux en cha-.:.
pelet,_qui_s erriplis nt au fond du. réservoir, et .
:v-iennenf Sé- v.id:er à l'ettér.ieu-1;, leur permet de-
fe1; iliser' '-leurs terres pat un système .. d!irrigation;.
l eè t très ing·éo.ieax.:.1\1:ais les··C 1otes.·::
. très s i m p_
sont .1:noins fiers·de leur.$ ·choux.e.t de -leurs.lai -·
. lues que de. ieur n1astic_.. ..
. Le « pays·du .1nas:tic. » ,; 'lliast.i!cho kh6ra, s' étenl·
.au $ud·de-la _.région.alpestre de Chio. Jej_'ai par-.::.
. ç,ourµ en :tous-·sens, à chéval,- soit.:se.ül, sôit: en;·_·
compagnie de. Jàmes Aristarchî. ·'.Autrefois, on/
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. tait oblig·é..de.·grimper fort p niblèn1ent, .à dos
de piulet,. le long:.des. côtes .raid s, par de ·..se!).-
' .
.tiers ravinés,, véritables ·ruisse x de· pierres·. .
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l -masse soutient -µn-··aqu duc ancien,·1a::_vue - st'
très -- tertdtie·. et très hellé.·Au loin, ·te.-·canipok'.
éhtie, comme une oasis, ses _b uqùets d'orang ts,-
d;'an,1andie1:s,_.de··citronn.ier.s et d'oliviers.·Lè
·..tiiangle du 1non·t Korakari est g1 is perle, nioÙ-
. '}ih_eté _dè' pètites plaque-svertes; ·par .les ·brous;
··.- ailles·clairseméès, --1narhré d'o.mbtes mo.biles pàr·
:1ës·nüages qui passent. Vers l'Orient; la·nter luit,;
· in.éa:1).descen-te; ·-étarné-.d'éclairs qûi éhlôüissent :
··et plissée ·-de repious qui : chatoient.- Les·.caps:
. sombres s'allongent· sur. razut.. L'île de Psarài
· ébauche·sa· silhouétle hle-u tre à l'ho:dzori•. Des:
haie$_et des ; nses,-où:dorment des·harq1:1es·a ar--
rées,, creuseri.t leurs lignes-cour.bes .dans les terres,_:
aù pied des falaises-. Au large, des caïques·1oin;..:.
tains·ouvrent leurs voiles, qui_s'étendent con1me·,
de grandés aile hlànches et semblent fr-is o111iêf
. d'ai_sé-au souffle des brises qui·attiédissent-l'ar '
_ détjr;.du jou-r. . ·
:· Les soirs_·sont- très doux dans .. cettë- saùyag -
.. contrée. Le ·_soleil disparaît-derrière_lès cqlli_nes;·
ri1ais_., a:ti:..dessu-s d s -eaux·:violettes,.l.e ciel d'o_r
· est semblable·à·un._ imn1ense vitrail, tandis qüe.
la pretnière étoile,,s·'allùme dans des. : pâleurs·
nà.crées-, col1;)1n·e une-paillet_t d'argen_t. · .
On _rencontre; dàns· les chemins qui-courent'.
entre e-s lep.tisqués, .des paysans en tarhouch-
éc.arlate et'e-ncuîottes à :Ja.,zouave; ils pous ent'
· devant" eux·, .ave -:un petit -b toi:i.:pointu .qùi ·sert
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piquer les cr up s réL{yes,. de grands tnulets
·oharg_ é sde foin t. de paille. De.· :robustes filles
passent, as.sises sur des baudets, par1-µi des pani rs
et desruches.·Parfois, on crotse un solide gail;,:.
lard; te.n.ant. en main la_bride· d'une jolie :_mu
q.g:i port_e; s'ur -un cacolet roug·e- onstellé de èloùs
d.'or, üJi pâquet. de yoiles 1nulticolores·, ·pro,,.;.
tégés par ·une large on1brelle : c'est une femme
ri.che, une 1nadan a, qui va·,ri$iler s· - terres. On·
-çhange un .joyeux bonjour avec Îes pa sants :
Iiora • J(ali.:. 1(atevodio, • formules :-naï-v s, q.ui
écartent dè la ·rout-eles mauv.ais présage$ et les
aventures .f chèuses. ·un G-rec devant qui YOUS è
prononceriez.pa cet exorèisme seratt triste pour
. toute l journée, et. s'attëndr'âit; pour le .1noins,.
rece oir • sùt la tête, èo1nJDe. le poète E ch T.le.,
. qne éc ille de tortq . ·
. On tràverse. souvent, avant d'arriYer dans- le
riche « pays_du mastic·», des dé.comhrès aban-
donnés. Les frêles èases·,·de·coll:slru:ction récente,
S(·j sont écroulées comme :des châteal}.x. de cartes
92
vaillai n.-fpour - 1 s, er.i ricb1.r, '<l'a.ES· de ::sé·v res·:
1
93
Source : Gaston Deschamps, Sur les routes d'Asie, Paris, 1894
94
LET
J
MEMORABILI
DELL' ABBATE •
R D'ALTRI.
Parte Prima.
, IN ROMA,
Per Nicolo Angelo Tinafsi.
MDCLXVII.
-Con licenz..a de' Supc-rio11 •
,
'
'.
95