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PERCEVAL L’ADOUBEMENT

Perceval est un jeune homme qui vit dans la forêt. Il est élevé par sa mère qui le maintient dans l’ignorance
du monde extérieur. Mais un jour, il voit des chevaliers et, émerveillé, décide de partir à l’aventure.
Le seigneur Gornemant de Goort le prend alors sous sa protection et fait de lui un chevalier.

Le seigneur était expert dans le maniement de l’écu, du cheval et de la lance, car il l’avait appris dès l’enfance.
Quand il eut fait sa démonstration, il revint vers le jeune homme qui l’avait regardé, émerveillé, en notant le
moindre détail. Le prud’homme se fait chausser les éperons d’acier tranchants du jeune Gallois, enfourche son
cheval, pend l’écu à son col par la guiche et saisit la lance
-Ami, dit-il, apprenez à vous servir de vos armes. Notez comment on doit tenir sa lance, éperonner et retenir son
cheval. Là-dessus il déploie l’enseigne et lui montre comment porter son écu : il faut le laisser pendre un peu en
avant, de façon à toucher le col du cheval ; puis, la lance en arrêt, il fait sentir l’éperon au fougueux coursier que nul
autre ne surpasse à la course. Le prud’homme est un maître passé en tous ces exercices, car il les avait appris dès
l’enfance. Le valet se plaît fort à le regarder et suit de l’oeil chacun de ses mouvements. Son galop terminé, le
prud’homme revient, lance levée, au valet et lui dit
-Ami, sauriez-vous jouter ainsi de la lance et de l’écu et gouverner ainsi votre cheval ?
- Ah ! sire, je ne veux posséder ni terre ni avoir ni même vivre un jour de plus, avant que je sache ce jeu-là.
   – Ce qu’on ne sait pas, on peut l’apprendre, si l’on veut s’en donner la peine. Mon cher ami, dans tous les
métiers, il faut courage, effort et expérience. Ce sont les trois conditions pour acquérir n’importe quel savoir. Mais
puisque tu ne l’as jamais fait ni vu faire par quiconque, il est normal que tu l’ignores : il n’y a aucune honte à cela.
  Il le fit monter à cheval, et le jeune homme se servit de la lance et de l’écu comme s’il avait toujours vécu parmi
les tournois et les guerres ou parcouru le monde en quête de batailles et d’aventures. Tout cela lui venait de Nature :
lorsque Nature est favorable et que l’on y met tout son cœur, rien ne peut être difficile. Le noble seigneur était ravi
des bonnes dispositions de son élève.[…]

Perceval abandonna les vêtements donnés par sa mère. Alors le


seigneur se baissa, et lui chaussa l'éperon (1) droit. La coutume était
en effet la suivante : celui qui faisait chevalier devait lui chausser
l'éperon. Il y avait beaucoup d’autres serviteurs. Ceux qui purent
l’approcher l’aidèrent à s’armer. Le noble seigneur prit ensuite l'épée,
la lui ceignit (2), lui donna l'accolade (3), et lui déclara qu'avec cette
épée il lui conférait l'ordre le plus élevé que Dieu ait créé et établi,
c’était l'ordre de chevalerie qui n'admet aucune bassesse (4).
Puis il ajouta : « Mon ami, s’il arrive que vous deviez combattre
quelque chevalier, souvenez-vous des instructions que je vais vous
donner : si vous avez le dessus et que votre adversaire ne peut plus se
défendre ni résister et qu'il lui faille demander grâce, ne le tuez pas
délibérément (5).
Et gardez-vous d’être trop bavard ni médisant. Nul ne peut trop parler
sans qu’il ne dise quelque chose qu'on lui impute à bassesse (7).
L’homme sage dit et répète : « Qui parle trop commet un péché. »
Voilà pourquoi, mon ami, je vous déconseille de trop parler. Et je vous prie également, si vous rencontrez une jeune
fille ou une femme qui se trouve privée d'appui, secourez-la, si vous pouvez le faire. Vous agirez honorablement. J'ai
encore une autre chose à vous apprendre (ne la négligez point, car elle n'est pas à dédaigner) : ne manquez pas de
vous rendre à l'église y prier le Créateur de toutes choses d'avoir pitié de votre âme. »
D’après Le Conte du Graal (Perceval) de Chrétien de Troyes
Notes :
1 - Pièce de métal fixée derrière le talon pour piquer les flancs du cheval et le faire avancer plus vite.
2 - Du verbe « ceindre » (qui a donné «  ceinture  ») : mettre autour du corps ou d’une partie du corps. Gornemant accroche l’épée autour de la
taille de Perceval.
3 - Coup donné avec le plat de l’épée sur l’épaule. Le seigneur prend alors le nouveau chevalier dans ses bras.
4 - Action méprisable, qui fait honte ; lâcheté.
5 - Volontairement.
6 - Quelque chose que l’on vous reproche, que l’on considère comme une bassesse.
PERCEVAL L’ADOUBEMENT
Questions

1.Chercher dans le dictionnaire la définition du mot « adoubement ».

2. Que doit faire Perceval avant que l’adoubement commence ?

3. Quelles sont les différentes étapes de l’adoubement ?

4. Relevez les formules employées par ce personnage pour donner des conseils à Perceval. Quels sont les temps et
les modes des verbes ?

5. Quelles sont les qualités que l’on attend d’un chevalier ?

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