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Religion des Celtes

La religion des Celtes constitue un système de pratiques et de croyances basé sur un panthéon
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mythologique, civique et philosophique des Celtes .

Comme les autres peuples de la protohistoire/Antiquité d'Europe, les Celtes ont développé un système
religieux polythéiste, dans le cadre duquel officiait la classe sacerdotale des druides. Cette religion s’est
progressivement dissoute dans la culture de l’Empire romain à partir du ier siècle av. J.-C., à l’exception de
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l’Irlande où la civilisation celtique a continué d'exister jusqu’à l’évangélisation de l’île au ve siècle .

Sources et documentation
Les druides ayant systématiquement privilégié l’oralité, les Celtes
n’ont pas laissé de témoignages directs sur leurs croyances, leurs
dieux et leurs rites. Les trois sources d'informations dont disposent
les celtologues sont indirectes : les vestiges archéologiques, les
témoignages de leurs voisins grecs et romains, les littératures
médiévales galloise et irlandaise, et l'hagiographie ancienne et la
matière de Bretagne en France.
L'enseigne gauloise de Soulac-sur-
Mer.

Les témoignages contemporains

Leurs contemporains livrent des informations générales. On peut citer, à titre d’exemple : Diodore de Sicile
(Bibliothèque historique), Strabon (Géographie), Pomponius Mela (De Chorographia), Lucain (La
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Pharsale), Pline l'Ancien (Histoire naturelle), Tertullien et Jules César avec les Commentaires sur la
Guerre des Gaules. Ces témoignages donnent souvent une image partiale et négative des peuples celtes.
Ces informations sont largement déformées par l’interpretatio romana, qui cherche systématiquement un
équivalent romain des dieux celtes.

On peut aussi parler des témoignages quasi contemporains écrits par des historiens ou géographes qui
décrivent des scènes celtes auxquelles ils ont assisté, mais à une époque plus récente. On peut considérer
que le témoignage de Giraud de Barri (xiie) sur le rituel d'intronisation d'un roi irlandais est l’un de ceux-là.

L’archéologie

Depuis la loi sur l’archéologie préventive en 1986, les fouilles archéologiques concernant les Celtes ont fait
des bonds en avant. Des sites comme le Sanctuaire de Ribemont-sur-Ancre ou le site Oppidum de Corent
ont pu donner des informations précieuses sur les offrandes faites, les types de sanctuaires utilisés ou même
des renseignements sur le culte des crânes.

L’analyse des tombes à char a donné des objets votifs communs à toutes les tombes de l’époque comme de
la vaisselle, de la nourriture et des bijoux, mais on a parfois aussi trouvé des objets plus emblématiques
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comme la pendeloque en forme de lyre de Vasseny .
Depuis une quarantaine d’années, les pièces de monnaie sont aussi étudiées dans le but de proposer des
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motifs religieux . Des ex-voto trouvés dans les sources sacrées vont donner des informations sur les dieux
(noms et fonctions). D’autres objets comme une couronne de feuilles de chêne en or, des cônes d’or rituels,
le chaudron de Gundestrup ou le char solaire de Trundholm sont peut-être celtes.

Les littératures médiévales

La littérature médiévale remonte à une période où le christianisme s'était déjà généralisé, de sorte qu'elle ré-
interprète les thèmes et comporte de nombreux récits largement remaniés tels que la légende du roi Arthur
ou de Merlin l'enchanteur, où il n'est pas aisé de démêler les thèmes de la religion celtique de l'imagination
des conteurs. Cela s'appelle la matière de Bretagne.

L'hagiographie de certains saints donne aussi des informations concernant la religion celte, soit parce que
les saints combattent les païens, soit parce que leur vie est inspirée par les dieux celtes ou la mythologie
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celte .

Les dieux et l’« Autre monde »


Si certaines figures divines majeures sont communes à l'ensemble du monde celtique, chacune des aires
culturelles a développé une mythologie particulière. Au-delà des particularismes locaux, on retrouve le
schéma trifonctionnel des Indo-Européens, tel qu'il a été présenté par Georges Dumézil.

Mythologie galloise

Mythologie gauloise

Mythologie irlandaise

La mythologie des Irlandais s’inscrit dans la succession des invasions mythiques de l’île. Cette « histoire »
est racontée dans le Lebor Gabála Érenn (Livre des Conquêtes d’Irlande) depuis le Déluge jusqu’à
l’arrivée des Gaëls. L’île est successivement occupée par le peuple de Cesair, par les Fomoires, les
Partholoniens, les Nemediens, les Fir Bolg et les Tuatha Dé Danann. Ces derniers sont des dieux, venus
des îles au nord du monde, amenant avec eux le druidisme. Dans cette chronologie légendaire, ils vont être
vaincus par de nouveaux arrivants, les Milesiens, ancêtres des Gaëls et contraints de se réfugier dans leurs
sidh.

Hiérarchie des principaux dieux

hors classe :
Lug Samildanach (dieu polytechnicien)
fonction sacerdotale :
Dagda (dieu-druide)
fonction guerrière :
Ogme (dieu de l'éloquence)
Nuada (royauté)
fonction artisanale :
Goibniu (dieu forgeron)
Credne (dieu bronzier)
Luchta (dieu charpentier)
participent aux trois fonctions :
Diancecht (dieu-médecin) père de Airmed, Miach et Oirmiach
Mac Oc ou Oengus (jeunesse)
déesse féminine unique connue sous les formes :
Brigit (déesse des poètes, des forgerons et des médecins)
Étain ou Eithne (reine d’Irlande, mère de tous les dieux)
Boand (autre nom de Brigit, déesse éponyme de la Boyne)
Morrigan (déesse guerrière, ou bien de la souveraineté)

L’Autre Monde celtique

L’Autre Monde celtique n'est pas le lieu des morts, même si certains héros de la littérature irlandaise en sont
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familiers. C’est principalement le séjour des dieux et de leurs messagères (bansidh) .

Selon l’histoire mythique de l’Irlande, rapportée par le Lebor Gabála Érenn (Livre des Conquêtes
d'Irlande), les dieux des Tuatha Dé Danann se sont réfugiés dans des tertres (sidh) où ils ont établi leurs
résidences. L’Autre Monde est aussi parfois localisé à l’ouest de l’Irlande, là où le soleil se couche, ou dans
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les profondeurs des lacs . L’accès se fait principalement aux fêtes de Samain et de Beltaine (voir
section Les fêtes religieuses).

Les données concernant la vision de l'autre monde celte vient essentiellement des imramma comme l'Imram
Bran Mc Febal et des echtrai comme l'Echtra Nerae. Certaines Vitae chrétiennes, comme le voyage de saint
Brendan, s'en sont inspirées.

La classe sacerdotale
La société celtique est une société de type théocratique qui se compose de trois classes sociales aux
fonctions spécifiques : une classe sacerdotale que l’on désigne globalement sous le terme de « druides »,
une aristocratie guerrière (les equites de César) menée par un souverain (roi, prince) ou un magistrat
suprême, et une classe de producteurs (plebs), artisans, agriculteurs, éleveurs qui pourvoit aux besoins de
l'ensemble de la société.

Le titre générique de « druide » provient de dru-wid-es qui signifie les « très savants », l’étymologie dérivée
du chêne, donnée par Pline l'Ancien, étant erronée. L’expression « classe sacerdotale » doit être comprise
dans un sens large, car il ne s’agit pas d'un clergé au rôle strictement réservé au domaine religieux. Les
druides sont des personnages sacrés, au-dessus des deux autres classes, intermédiaire entre les dieux et les
hommes et dont la parole est primordiale. Si les domaines du religieux et du sacré sont de leur ressort, leur
compétence s'étend à tout le savoir, notamment la justice et le droit, l'histoire, la magie, la divination, etc. Ils
assument l'éducation de certains élèves dont les études peuvent durer pendant 20 ans selon César :

« Les premiers s'occupent des choses de la religion, ils président aux sacrifices publics et
privés, règlent les pratiques religieuses ; les jeunes gens viennent en foule s'instruire auprès
d'eux, et on les honore grandement. Ce sont les druides, en effet, qui tranchent presque tous
les conflits entre États ou entre particuliers et, si quelque crime a été commis, s'il y a eu
meurtre, si un différend s'est élevé à propos d'héritage ou de délimitation, ce sont eux qui
jugent, qui fixent les satisfactions à recevoir et à donner ; un particulier ou un peuple ne
s'est-il pas conformé à leur décision, ils lui interdisent les sacrifices. C'est chez les Gaulois
la peine la plus grave. Ceux qui ont été frappés de cette interdiction, on les met au nombre
des impies et des criminels, on s'écarte d'eux, on fuit leur abord et leur entretien, craignant
de leur contact impur quelque effet funeste ; ils ne sont pas admis à demander justice, ni à
prendre leur part d'aucun honneur. »
— Jules César, Commentaires sur la Guerre des Gaules, livre VI, chap. 13.

La classe sacerdotale se compose de trois spécialisations :

le druide « théologien » dont les domaines d’attribution sont la religion, le sacrifice, la


justice, l’enseignement, la poésie, la divination, etc.
le barde est spécialisé dans la poésie orale et chantée, son rôle est de faire la louange, la
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satire ou le blâme .
le vate est un devin (l'eubage), il s’occupe plus particulièrement du culte, de la divination
et de la médecine. Les femmes participent à cette fonction de prophétie (telles les
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Gallisenae de l’île de Sein) .

Cultes

Rites et sacrifices

Comme pour toute religion, la notion de sacrifice est présente dans la spiritualité des Celtes. Il s’agit de
rendre sacré (consacrer à la divinité) un objet, un animal ou plus rarement un être humain. Le sacrifice
requiert un prêtre sacrificateur, obligatoirement un druide, un objet ou un être sacrifié (propitiatoire ou
expiatoire) et l'assemblée. Dans le cas d’un animal ou d’un homme, la mise à mort est un « retrait de
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monde », donc une approche du divin. Christian-J. Guyonvarc'h distingue trois types de sacrifices :

sans effusion de sang, par les éléments (première classe) ;


avec effusion de sang avec utilisation d’une arme (deuxième classe) ;
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sans mise à mort (troisième classe ).

D’autres pratiques sont connues par la littérature irlandaise :

la geis
le glam dicinn est une malédiction suprême, proférée par un file, une satire qui entraine
l’exclusion de la victime de toute vie sociale et la voue à la mort.
l’imbas forosnai est une prophétie incantatoire qui relève de la magie druidique et ne peut
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être prononcée que par les filid de haut rang, les ollamh .
le dichetal do chennaib cnâime, qui se traduit par « incantation par le bout des os
(doigts) », semble avoir été une incantation simple et improvisée et sur laquelle la
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documentation est lacunaire .

Les fêtes religieuses


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L’année celtique se décompose en 2 saisons, l'une claire et l'autre sombre . Elle comporte 4 fêtes
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religieuses :
Samain, qui a lieu le 1er novembre de l’actuel calendrier, correspond au début de l'année
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et de la saison sombre . C'est une fête de passage, de transition, elle dure une semaine,
trois jours avant et trois jours après. C’est à la fois la fin de l'année qui s’achève et le début
de la nouvelle année. Elle est marquée par des rites druidiques, des assemblées, des
beuveries et des banquets rituels. Elle a la particularité d’être ouverte sur l’Autre Monde
(le sidh des Irlandais) et donc de favoriser le rapport des hommes avec les dieux. On la
retrouve en Gaule sous le nom de Samonios (le mot désigne le mois qui correspond
approximativement à novembre), attestée par le calendrier de Coligny.
Imbolc, qui a lieu le 2 février est l’évènement sur laquelle les informations sont les plus
lacunaires. Selon l'étymologie, c'est une fête de purification et de lustration.
Beltaine, qui a lieu le 1er mai, marque une rupture dans l’année, c’est le passage de la
saison sombre à la saison claire, lumineuse. Cela entraîne aussi un changement de vie
puisque c’est l’ouverture des activités diurnes : reprise de la chasse, de la guerre, des
razzias, des conquêtes pour les guerriers, début des travaux agraires et champêtres pour
les agriculteurs et les éleveurs. Il s'agit également d'une fête célébrant la fertilité dédiée à
la déesse Mère.
Lugnasad, l’« assemblée de Lug » a lieu le 1er août, pendant la période des récoltes.
C’est la fête royale et plus précisément de la souveraineté dans sa fonction redistributrice
des richesses. C'est une trêve militaire qui célèbre la paix, l’amitié, l’abondance et la
prospérité du royaume.

Lieux de cultes

Les Celtes utilisaient toutes sortes de lieux naturels (montagne, grotte, source, lac, etc.) comme lieux de
cultes car ils les considéraient comme des endroits habités par les dieux. Ils utilisaient également, pour faire
des sacrifices, des offrandes, des enclos carrés entourés de fossés et de palissades en bois.

L’immortalité de l'âme

La croyance des Celtes en l'immortalité de l’âme provient notamment d’un passage de Jules César dans ses
Commentaires sur la Guerre des Gaules à propos des Gaulois. Dans son Histoire de France, Michelet
rappelle que cette croyance en l'âme immortelle est associée à la théorie de la transmigration des âmes, des
réincarnations ou métempsycoses ; c'est ce que rapportèrent les observateurs romains.

Rituel guerrier de la décapitation

Après une bataille gagnée, les Gaulois coupent les têtes des morts ennemis pour les rajouter à leurs
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collections de têtes .

Notes et références
1. Jean-Louis Brunaux, Les Religions gauloises : rituels celtiques de la Gaule indépendante,
Éditions Errance, 1996, p. 38.
2. (en) Arthur Aughey et John Oakland, Irish Civilization : An Introduction, Routledge, 2013,
384 p. (ISBN 978-1-31767-850-2, lire en ligne (https://books.google.com/books?id=8YZiAgA
AQBAJ&pg=PAPA66)), p. 66.
3. Joseph Vendryes note que « César ne nomme pas un seul dieu gaulois […] Tous les
peuples de l’Antiquité ont jugé bon d’identifier les dieux de l’étranger et ceux de leur propre
pays », La Religion des Celtes, p. 30. Pour Claude Sterckx, César « ne cite que leurs
équivalents romains, à la fois sans doute parce que les Gaulois ne désignent leurs dieux
que par des surnoms infiniment divers et parce que César cherche à se faire comprendre de
ses lecteurs. » », Mythologie du monde celte, p. 261.
4. « La nécropole gauloise de Vasseny - INRAP » (https://www.inrap.fr/dessus-des-groins-341
3) (consulté le 12 septembre 2018).
5. Paul-Marie Duval, Monnaies gauloises et mythes celtiques, Paris, Herrmann, 1987.
6. Les saints successeurs des dieux. Écrit sous le nom de Pierre Saintyves (Émile Nourry,
1907], bien qu'un peu ancien, est très intéressant à lire à ce sujet.
7. Philippe Jouët, Aux sources de la mythologie celtique, Fouesnant, Yoran Embanner, 2007,
445 p., 22 cm (ISBN 9782914855372,
OCLC 470670569 (https://worldcat.org/fr/title/470670569), lire en ligne (https://books.google.
com/books?id=ExwRAQAAIAAJ&pg=PA348)), p. 348.
8. Christian-J. Guyonvarc'h et Françoise Le Roux, Les Druides, p. 280 et suiv., « L’Autre Monde
et le Sid ».
9. Venceslas Kruta, Les Celtes, histoire et dictionnaire, p. 454 ; Guyonvarc’h & Le Roux, Les
Druides, p. 432.
10. Venceslas Kruta, Les Celtes, histoire et dictionnaire, p. 853 ; Guyonvarc’h & Le Roux, Les
Druides, p. 441.
11. Voir l’étude approfondie de Christian-J. Guyonvarc'h, Le Sacrifice dans la tradition celtique :
les rites, la doctrine et les techniques, Brest, Armeline, 2005, 302 p., 21 cm
(ISBN 978-2-91087-831-3, OCLC 231792171 (https://worldcat.org/fr/title/231792171)).
12. Pour la définition des classes, voir l’article Fonctions tripartites indo-européennes.
13. Christian-J. Guyonvarc'h et Françoise Le Roux, Les Druides, p. 177 et suiv.
14. Sandrine Adso, Mythes celtiques, BoD - Books on Demand, 2021, 88 p., 22 cm x 17 cm
(ISBN 978-2-32238-303-0, OCLC 1262746432 (https://worldcat.org/fr/title/1262746432), lire
en ligne (https://books.google.com/books?id=4q0xEAAAQBAJ&pg=PAPT18)), P18.
15. Carl McColman, The Complete Idiot’s Guide to Celtic Wisdom=, Penguin, 2003, 384 p.
(ISBN 978-1-44069-581-0, lire en ligne (https://books.google.com/books?id=VZf0cTI2u9EC&
pg=PAPT560)), p. 560.
16. L’année celtique ne comportait que deux saisons : une saison sombre de Samain à Beltaine,
puis une saison claire. Les « siècles » comptaient une trentaine d’années.
17. Pierre Lambrechts, L’Exaltation de la tête dans la pensée et dans l’art des Celtes, Bruges,
De Tempel, 1954, 127 p. (OCLC 786121677 (https://worldcat.org/fr/title/786121677), lire en
ligne (https://books.google.com/books?id=jktNAAAAYAAJ&pg=PA38)), p. 38.

Sources et bibliographie
Bibliographie sur la mythologie celtique
Jean-Louis Brunaux, Les religions gauloises : ve – ier siècles av. J.-C., Paris, CNRS
Éditions, 2016, 480 p., 18 cm (ISBN 978-2-271-09328-8, lire en ligne (https://books.google.com/books?i
d=lJuEzQEACAAJ)).

Liens externes
Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste : Britannica (https://www.bri
tannica.com/topic/Celtic-religion)
Notices d'autorité : Tchéquie (http://aut.nkp.cz/ph221304)
Il existe une catégorie consacrée à ce
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