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Construire pour penser

ÉCOLE NATIONALE SUPÉRIEURE D’ARCHITECTURE PARIS-VAL DE SEINE

Timothée PAVY

Construire pour penser


-
Procédés constructifs contraints

2023

DE1 Alto

Sous la direction de Martine Weissmann et Paolo Amaldi


Construire pour penser
-
Procédés constructifs contraints
Avant-propos

Ce travail de recherche s'intéresse au thème de l’économie de moyens, une


locution couramment employées dans des moments de crise et de remise en question des
manières d'exploiter les ressources pour construire. Elle peut correspondre à une éthique
mais également à une approche conceptuelle qui demande de s’intéresser aux conditions
de production d’un projet architectural. Une forte contrainte des moyens disponibles peut
induire un travail riche d’enseignements du point de vue constructif. C’est le lien, entre
projection et fabrication dont il est question dans ce travail d’analyse, et dans la démarche
de recherche. Le nombre d’intermédiaires grandissants entre le premier dessin de
l’architecte et la réalisation d’une construction peut paraître une contrainte difficile à
accepter, et un dommage pour la qualité de l’œuvre. Ces intermédiaires sont relatifs à des
sociétés qui disposent aujourd’hui d’une multitude de moyens techniques de contrôles
relatifs à la construction. Penser l’économie de moyens pourrait être une démarche
conceptuelle propre à l’architecte qui renforce le lien entre le dessin et le chantier. Cela peut
être le cas par exemple pour des constructions vernaculaires qui se construisent dans des
logiques concrètes et objectives, entre projection et construction. Ce travail de recherche
propose de se pencher sur la question de l’économie des moyens comme une approche
conceptuelle du projet à construire. La démarche de recherche par le faire qui sera détaillée
et correspond à cette manière de penser le projet. Ce mémoire est intrinsèquement lié à la
méthode conceptuelle que j’aimerais mettre en place dans ma vie d’architecte.
Je remercie Martine Weissmann et Paolo Amaldi pour la grande qualité de leur suivi tout au
long du semestre. Au-delà de ce travail, les discussions sur les sujets de mes camarades
m’ont beaucoup apporté. Le lien entre projet et mémoire porté par le groupe de recherche
m’a permis de mieux comprendre comment faire les deux à la fois. Je remercie une nouvelle
fois ces enseignants pour m’avoir laissé libre dans ma démarche, cela a permis de travailler
avec enthousiasme et de mesurer l’intérêt pour ma vie d’architecte future. Je remercie
également mon ancien enseignant Pierre Courtade pour les discussions épistolaires qui ont
nourri mes réflexions et donné du courage. Et enfin Jean-Marc Weill pour les précieux
documents sur la Fisher House qu’il m’a transmis.
Table des matières

Avant-propos
Introduction 7
Corpus 9

I. Première approche et protocole de recherche 16


a) Le contexte géographique et temporel 17
b) Les trois procédés constructifs 19
Le montage de la maison 6x6
La Kalil House et les « Usonian automatic House »
Le Balloon Frame et la Fisher House

c) Le protocole de recherche 27
Le redessin
Trois échantillons construits

II. Des procédés constructifs conditionnés par les limites de l’homme 50


bâtisseur

a) La maison 6x6, les panneaux et la légèreté de la tôle 51


b) La Kalil House, bloc par bloc 53
c) La Fisher House, les faibles sections et la dextérité du bois 55
d) Des procédés clairs et intuitifs pour faciliter la mise en oeuvre 56

III. La répétition par module et la composition par cadre 58

a) La maison 6x6, la répétition d‘un panneau standard 59


b) La Kalil house, l’empilement d’un module standard 61
c) La Fisher House, composition par cadres de dimensions et de natures différentes 63

VI. La préfabrication, comme moyen de planification de la mise en oeuvre 66


sur site

a) La maison 6x6 et le tout préfabriqué 67


b) La Kalil House et la préfabrication d’un module standard 69
c) La Fisher House et la préfabrication ouverte 70

5
V. La polyvalence, comme moyen d’exploitation maximale des procédés 72
constructifs

a) Les quatre éléments de l’architecture de Gottfried Semper 73


b) La fusion des éléments et procédés semperiens 75
La maison 6x6 et le cas de la métallurgie
La Kalil House, un ensemble stéréotomique, tectonique, moulé ou tissé ?
La Fisher House, un ensemble stéréotomique et tectonique

c) La fusion du revêtement et de la structure 81


La maison 6x6, panneaux structurels et complexe par agrégation
La Kalil House, enveloppe structurelle et complexe synthétique
La Fisher House, enveloppe structurelle et complexe par agrégation

d) La fusion du gros-oeuvre et du second-oeuvre 83


La Kalil House, des menuiseries en béton
La Fisher House, des fenêtres-meubles et des menuiseries structurelles

VI. L’expressivité brute de la matière 90

a) La maison 6x6 et la tôle pliée 91


b) La Kalil House, un monolithe de béton 93
c) La Fisher House, un monolithe de bois 95

VI. Trois paradigmes de leur procédé constructif, vers un néo-vernaculaire ? 98

a) La maison 6x6, un manifeste de la construction démontable 99


b) La Kalil House, un paradigme moderne de la construction à empilement 101
c) La Fisher House, un paradigme du Balloon Frame 103

Conclusion 105
Coda 107
Bibliographie 111
Annexes 113

6
Introduction

Comment parler d’économie de moyens en architecture ? L’économie vient du grec


oikonomia qui signifie organisation. On peut donc plus simplement parler de « l’organisation des
moyens ».1 L’économie peut être également définie en tant que régulation, une organisation qui vise
une diminution des dépenses.2 En architecture, l’économie de moyens pourrait être une démarche qui
amène à réfléchir aux conditions de production du projet, et qui résulte d’une réduction des moyens
disponibles. Elle est relative à l’efficience des moyens utilisés, et à la manière dont ils sont employés. Si
le nombre de moyens est réduit cela suppose de trouver des solutions avec ceux qui restent pour
répondre à la même demande. Réduire le nombre de moyens pourrait permettre de mieux les utiliser,
comme l’illustre une note du cinéaste Robert Bresson :

La faculté de bien me servir de mes moyens diminue lorsque leur nombre augmente.3

Cette approche conceptuelle serait selon lui génératrice de créativité. Il s’agit de réduire ses moyens
pour mieux se concentrer sur les autres, et en extraire de nouveaux potentiels. Se poser la question
des conditions de production du projet induit un regard critique sur sa fabrication et énonce des
règles, un cadre qui peut affermir des choix. C’est le cas de Georges Perec lorsqu’il écrit le roman La
Disparition en 1969. Il décide de faire un roman en lipogramme qui sur près de 300 pages n’apparaît
jamais la lettre « e ». L’auteur supprime volontairement une lettre, ce qui le conditionne pour écrire le
roman. Voici le Post-scriptum :

L’ambition du « Scriptor », son propos, disons son souci, son souci constant, fut d’abord d’aboutir à un produit aussi
original qu’instructif, à un produit qui aurait, qui pourrait avoir un pouvoir stimulant sur la construction, la narration,
l’affabulation, l’action, disons, d’un mot, sur la façon du roman d’aujourd’hui. 4

Georges Perec parle du pouvoir stimulant de la suppression de la lettre et de l’originalité de l’écriture


qui en découle. Il paraît intéressant de transposer cette approche pour la construction en architecture
qui est aussi une forme de langage. Réduire ses moyens pourrait amener à découvrir de nouvelle
manière de faire. Le travail de recherche se concentre alors sur les moyens de mise en œuvre d’une
construction. Mais l'architecte dispose d’une multitude d’autres moyens et de tout ordre. On distingue
ceux de la théorie qui ne sont pas quantifiables et en quelque sorte illimités pour l’architecte, et ceux
de l’action et du réel que l’on peut quantifier. Ce travail se penche sur les moyens de la mise en œuvre
dans la mesure où l’approche de l’économie de moyens concerne les conditions de production de
l’objet architectural. La conception pré-fabriquée induit de se projeter et de déterminer comment
employer le peu de moyens disponibles. L’approche de l’économie de moyens semble relative à une
réflexion rationnelle et ordonnée. Pour autant, elle n’est pas un curseur stable, il est nécessaire de
contextualiser un projet dans son époque et sa géographie pour comprendre en quoi il est économe.
Un projet peut paraître économe en termes de moyens aujourd’hui alors qu’il ne l’était pas. Dans la
même logique, cela dépend du lieu qui n’offre pas toujours les mêmes conditions. Il convient alors de
déterminer une contrainte objective qui vérifie l’économie de moyens, et d’établir un corpus
architectural de recherche cohérent.

1 LAPIERRE, Eric. « Conférence d'Éric Lapierre » [en ligne]. 22 Octobre 2019, [Consulté le 13.10.2022]

2 LAROUSSE. Dictionnaire de français. [en ligne]. 2023, [Consulté le 28.01.2023]

3 BRESSON, Robert. Notes sur le cinématographe. Paris, Gallimard, Avril 1995. ISBN : 788487783197, 144 pages.

4 PEREC, Georges. La disparition. Paris, Éditions Gallimard, 1969. ISBN : 9783037343227, 328 pages.

7
À l’ère de la machine, des projets uniquement construits par la main de l’homme paraissent économes
en termes de moyens de mise en œuvre. En effet, sa force et ses dimensions sont plus faibles. Les
prédispositions de l’ouvrier sont intéressantes car il s’agit de limites indépassables. Si l’ouvrier force
trop, il sera blessé, et si ce qu’il porte est trop lourd ou trop gros, il ne le portera pas. Cette limite
pourrait être une manière d’atteindre plus objectivement l’économie de moyens. Le corpus
architectural est établi à partir de cette contrainte objective. Il s’agira d’analyser les procédés
constructifs et leur mise en œuvre. Il paraît intéressant de déterminer en quoi ces projets peuvent
correspondre à une logique d’économie de moyens. Qu’est-ce que génère cette approche dans
l’utilisation des procédés constructifs ? Comment les exploiter au maximum pour répondre à une forte
contrainte ? Ce travail propose finalement par une étude comparative de trois constructions distinctes,
d’établir des approches et des manières de transgresser le peu de moyens disponibles pour
construire. L’étude concerne le travail de conception des architectes et la qualité de leur démarche qui
transgresse les manières de construire. Ces réflexions seront tirées d’une démarche de recherche par
le faire qui correspond à cette approche de l’économie de moyens de mise en œuvre.
Finalement, il s’agira de se demander sous quelle forme les trois constructions s’inscrivent dans une
logique d’économie de moyens de mise en œuvre, et comment les architectes exploitent au maximum
les procédés constructifs ?
La réponse à cette question s’organise en sept parties. Il parait nécessaire d’amener une première
approche des trois procédés constructifs, et d’expliquer la démarche de recherche. Dans la logique du
choix du corpus, la deuxième partie porte sur la manière dont sont conditionnés les procédés
constructifs par les limites de l’ouvrier. Ces contraintes introduisent le troisième point qui concerne la
composition par module et par cadre, consécutive de ces limites. Les logiques de préfabrications
complètent cette volonté de rationaliser la mise en œuvre. Ensuite, l’analyse se penche sur la manière
dont les architectes exploitent les procédés constructifs et en tirent parti au maximum à travers une
recherche de la polyvalence des éléments employés. Le sixième point concerne l’unité matérielle et
l’approche brutaliste des trois architectes. Enfin, l’exemplarité des trois projets est évoquée dans la
dernière partie qui ouvre vers une certaine idée d’un néo-vernaculaire.

8
Corpus

Le corpus est choisi en fonction des critères établis précédemment, il s’agit de maisons individuelles
construites à la force des ouvriers. Dans cet élan, le premier cas d’étude est la maison démontable
6x6 de l’ingénieur, architecte et constructeur français Jean Prouvé. Cette maison-type a été conçue en
1944 pour être entièrement montée et démontée en un minimum de temps par deux personnes. Un
exemple riche d’enseignements du point de vue constructif qui montre un travail industriel conditionné
par l’échelle humaine du montage post-fabrication. Le deuxième cas d’étude est la Kalil House
construite en 1955 par l’architecte américain Franck Lloyd Wright à Manchester dans l’état du New
Hampshire. Elle fait partie des quatre maisons dite « Usonian automatic House », construite en blocs
de ciment préfabriqués. Elle apporte un autre exemple de l’utilisation de la préfabrication dans le
domaine de la maçonnerie. L’architecte applique ses théories modernes avec un procédé constructif
ordinaire de l’époque. Enfin, le troisième cas d’étude est la Fisher House de l’architecte américain
Louis I. Kahn, construite en 1967 en Pennsylvanie. Cette icône de l’architecture du XXe siècle est un
détournement de la technique du Balloon Frame, procédé constructif très répandu à cette époque au
États Unis, et qui nécessite peu d’ouvriers pour le montage. L’architecte détourne cette technique en
tirant parti de la nature de ce procédé constructif. La maison de Jean Prouvé est un peu à part dans la
mesure où elle ne traverse pas le temps, elle n’est pas située. Il s’agit d’un travail de recherche sur la
construction à faibles moyens de mise en œuvre, la comparaison avec les deux autres maisons se fera
par ce biais.

Nom : Maison démontable 6x6


Année : 1944
Type : Pavillon d’urgence
Lieu : Non situé
Architecte (s) : Jean Prouvé
Surface totale : 36 m2

Photographie
extérieure
Maison 6x6
© Galerie Patrick
Seguin, 2014

9
Photographie
extérieure Kalil
house
© Paula Martin
Group at Keller
Williams

Nom : Kalil House Nom : Ficher House


Année : 1955 - 1957 Année : 1964 - 1967
Type : Maison privée Type : Maison privée
Lieu : Manchester - New Hampshire - USA Lieu : Hatboro - Pennsylvanie - USA
Architecte (s) : Franck Lloyd Wright Architecte (s) : Louis I. Kahn
Maître d’ouvrage : Dr. Toufic H. et M. Kalil Maître d’ouvrage : N. et D. Fisher
Surface totale : 128 m2 Surface totale : 180 m2
Climat : Continental humide Climat : Continental
Températures : -5°C à 23°C Températures : -3°C à 30°C

Photographie
extérieure Fisher
House
© Cemal Emden

10
Photographie, Jjardin des Tuileries, Paris Photographie, Collection privée, France
© Galerie Patrick Seguin © Galerie Patrick Seguin

Photographie, montage en Camargue, 2014 Photographie, montage en Camargue, 2014


© Galerie Patrick Seguin © Galerie Patrick Seguin

Photographie, montage rue des Jardiniers, Nancy, 1944 Photographie, exposition Gagosian Gallery, Le Bourget, 2013
© Galerie Patrick Seguin © Galerie Patrick Seguin

Photographie intérieure, montage en Camargue, 2014 Photographie intérieure, montage en Camargue, 2014
© Galerie Patrick Seguin © Galerie Patrick Seguin

11
Photographie ouverture, montage en Camargue, 2014 Photographie volet, montage en Camargue, 2014
© Galerie Patrick Seguin © Galerie Patrick Seguin

Photographie côté rue Photographie côté jardin


© Sean Dungan © Sean Dungan

Photographie du perron Photographie du carport


© Sean Dungan © Sean Dungan

Photographie de l’entrée Photographie depuis le sas


© Sean Dungan © Sean Dungan

12
Photographie du salon Photographie de la cheminée
© Sean Dungan © Sean Dungan

Photographie de la terrasse Photographie côté jardin


© Sean Dungan © Sean Dungan

Photographie de la cuisine Photographie d’une salle d’eau Photographie du couloir


© Sean Dungan © Sean Dungan © Sean Dungan

Photographie depuis le bas de la parcelle Photographie depuis le jardin


© J. Manzi © J. Manzi

13
Photographie côté rue Photographie depuis le sous-sol
© J. Manzi © J. Manzi

Photographie du volume de jour Photographie du volume de jour


© Tom Crane © J. Manzi

Photographie du volume de jour Photographie d’une chambre


© J. Manzi © J. Manzi

Photographie menuiseries extérieures Photographie menuiseries intérieures Photographie menuiseries intérieures


© C. Emden © J. Manzi © J. Manzi

14
15
I. Première approche et protocole de recherche

La première approche a pour objectif d’amorcer l’analyse constructive des


trois bâtiments du corpus, et d’expliquer la démarche de recherche mise en place
pour les étudier. Il s’agit d’une partie introductive utile à la compréhension de la
suite. Comme évoqué dans l’introduction, il est nécessaire de contextualiser les
trois projets dans leur époque et leur géographie pour pouvoir parler d’économie de
moyens. Faire un point sur les procédés constructifs propre au cas d’étude du
corpus permet d’amorcer l’analyse constructive. Ensuite, la démarche et le
protocole de recherche seront détaillés afin de comprendre l’angle par lequel la
problématique est abordée.

16
I.

a) Le contexte géographique et temporel

Les trois projets se situent après la Seconde Guerre mondiale, cet événement a amené des architectes
à chercher de nouvelles manière de construire avec moins et plus vite. Associé à cette crise, le
développement de l’industrie et des machines à considérablement modifié les conditions de
production des constructions.

La maison 6x6 de Jean Prouvé est mise en production dans ses ateliers et se situe dans le contexte
d’urgence de 1944. Elle répond à des problématiques de l’habitat d’urgence, il faut pouvoir abriter
rapidement les sinistrés de Lorraine et de Franche-Comté restés sans logement suite aux destructions.
L’usine produisait à la chaîne les éléments constitutifs de l’abri, et chaque jour des camions partaient
pour aller monter dans la journée les constructions. De la même manière qu’un meuble, cette maison
doit pouvoir être produite, monter et démonter en un minimum de temps.
La Kalil House, construite en 1955, fait partie des dernières maisons de Franck Lloyd Wright. Il s’agit
d’une de ses « Usonian Houses », série de maisons bon marché répondant à la crise économique.
Plus précisément, la maison est la quatrième de la série nommée « Usonian automatic House ». Les
six autres maisons de cette série sont ; Adelman S.344, Pieper 349, Tonkens 386, Turkel 388, Tracy
389 et Pappas 392. L’architecte cherchait à expérimenter de nouvelles manières de construire avec
des blocs maçonnés. Toutes ses recherches avaient pour objectif de développer l’identité des maisons
de l’Usonie, le nom que préférait Franck Lloyd Wright pour appeler son pays.
Douze ans après est construite la Fisher House de Louis I. Kahn en Pennsylvanie. Dans un quartier
résidentiel de Hatboro, l’architecte utilise la technique du Balloon Frame, une technique largement
généralisée à cette époque et qui correspond à un archétype de la maison coloniale américaine. De
nouveau, il s’agit d’une technique bon marché que Louis I. Kahn va savoir détourner pour appliquer
ces théories et transgresser les manières de construire en bois.
Les trois objets d’études sont donc un abri d’urgence temporaire français de 1944 et deux maisons
américaines situées. Comme évoqué dans le choix du corpus d’étude, la forte économie de moyens
de mise en œuvre est un des critères qui peut permettre de les mettre en relation, et de les confronter.

Photographie
Ateliers Jean
Prouvé, presse-
plieuse Maxéville,
1950
© Galerie Patrick Seguin

17
Photographie
extérieure
Fisher House
© Jean-Marc Weill

Photographie
extérieure
Kalil House
© Sean Dungan

Photographie
Alice Milard
House
© Jeremy Levine

Photographie
extérieure
maison 6x6
© Galerie Patrick
Seguin

18
I.

maison démontable 6x6 - 1944 6x6 demountable house - 1944

08:00 08:05

08:10 08:20
08:40 09:00

Photographies du
montage en
Camargue, 2014
© Galerie Patrick Seguin, 2014

09:15 09:30

b) Les trois procédés


11:30constructifs 11:45

Le montage de la maison 6x6 :

Ce pavillon peut s’introduire en développant les étapes de montage. C’est une structure à portique qui
se monte par le haut. Dans un premier temps, on place des pieux en pierre ou en métal en guise de
fondation pour reprendre les éventuelles irrégularités topographiques, et protéger la construction du
sol. Ensuite, on monte la structure du plancher bas constitué d’une poutre centrale, deux sablières, et
des solives. On fixe le portique central constitué de deux parties à la poutre centrale du plancher bas,
pour ensuite déposer les12:15 panneaux de revêtement en bois. Les deux solives centrales de la charpente
12:45
sont fixées au portique14:00 en attente des poutres de rive. Il est nécessaire ensuite
14:45 de placer quatre
panneaux de façades afin de soutenir la poutre faîtière et les deux poutres pignons, toutes constituées
de deux parties. On peut alors fixer les deux poutres de rive puis placer quatre autres panneaux. Il ne
reste plus qu’à fixer le reste des solives et les autres panneaux qui aident à stabiliser l’ensemble. Enfin,
on installe
Montage lesmaison
d’une couvredémontable
joints entre les
6x6, panneaux et Assembling
1944 fixe les 24abacs de toit. Ceshouse,
6x6 Demountable structures
1944 à portique
Camargue, 2014
font l’objet d’un long travail de recherche de Jean Camargue (France), 2014
prouvé entre ces ateliers de mise en production et
ces dessins. L’objectif est de produire et de monter la construction le plus rapidement possible.
48

15:00 16:15
19
maison démontable 6x6 - 1944 6x6 demountable house - 1944

08:00 08:05
08:25 08:35

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08:00 08:05
08:25 08:35
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08:40 09:00
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Montage d’une maison démontable 6x6, 1944 Assembling a 6x6 Demountable house, 1944
Camargue, 2014 Camargue (France), 2014

48
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maison démontable 6x6 - 1944 6x6 demountable house - 1944

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Montage d’une maison démontable 6x6, 1944 Assembling a 6x6 Demountable house, 1944
Camargue, 2014 Camargue (France), 2014

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17:10 18:00

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22
I.
b) Les trois procédés constructifs

Photographie d’un
« textile block »
type, 1924
© The Wright Library

La Kalil House et les « Usonian automatic House » :

Les sept maisons sont construites par l’assemblage de blocs de béton préfabriqués plus connu sous
le nom de parpaing, cette série arrive après les maisons dites « textile block ». Franck Lloyd Wright
s’intéresse à ce procédé constructif d’assemblages par bloc, fasciné par les temples mayas qu’il visite
au Yucatan, et soucieux de développer une technique bon marché et contemporaine des moyens de
construire de son époque. Il met alors au point les dessins et dépose un brevet pour la mise en
production de ces blocs. Ce type de maisons appelées « Usonian automatic House » nous parle d’un
procédé qui serait automatique. Automatique est un adjectif qui signifie ; qui s’accomplit sans la
participation de la volonté, qui une fois mis en mouvement, fonctionne de lui-même, opère par des
moyens mécaniques.5 La Kalil House est entièrement construite à partir de ces blocs que l’on retrouve
dans les deux plans. En effet, ils constituent à la fois la structure, l’enveloppe, et les planchers à
caissons. Il s’agit donc d’une structure non-hiérarchique ou tout est structurel et tout participe à la
stabilité de l’ensemble. L’idée est de développer des systèmes permettant à n’importe qui de monter
sa propre maison. La mise en scène d’assemblage bloc par bloc, archaïque et didactique, se retrouve
dans l’entièreté de la maison. Ces blocs se constituent d’un cadre à l’intérieur duquel il peut être plein
en béton, ou vitré. On distingue des blocs pleins en creux et d’autres plats. L’architecte se libère de
l’opacité des blocs de pierre classique en évidant l’intérieur de sorte à obtenir des transparences. Il est
nécessaire d’associer ces blocs à une armature en fer à béton noyé dans le mortier de jointure. Cette
armature est visible sur la photographie ci-dessus qui montre un block textile. Ces nouveaux systèmes
transforment les manières de construire des maisons par bloc de maçonnerie avec l’association du
béton avec le métal et l’utilisation des blocs pour la charpente à toiture plate.

5 LE ROBERT. R Le Robert. [en ligne]. 2023, [Consulté le 16.11.2022]

23
Photographie
intérieure Ennis-
Brown House
© The Wright Library

Photographie
intérieur du salon
© Sean Dungan

24
I.
b) Les trois procédés constructifs

Balloon Frame Platform

Axonométries type
ballon Frame et
Platform
© Auteur d’après BILP

Le Balloon Frame et la Fisher House :

Le Balloon Frame est une technique qui nécessite peu d’ouvriers, peu d’outils et qui permet un
chantier rapide. Elle apparaît à la fin du XVIIIe siècle suite au développement des scies actionnées
mécaniquement et la production industrielle des clous. Elle se caractérise par l’utilisation d’éléments
légers et de petites sections. Les montants font deux étages et les solives du plancher se fixent
latéralement pour accélérer le montage. Dans cette même famille, on parle d’une structure platform
lorsque le montant ne fait qu’un étage, et qu’il repose sur une poutre de rive. Les deux axonométries
ci-dessus illustrent ces deux techniques. Pour chacune, il s’agit d’une succession de cadres à faible
entraxe qui reposent sur une lisse basse. Pendant l’assemblage, des éléments de contreventement
éphémères sont placés en attente des panneaux puis du bardage, comme le montrent les
photographies de chantiers ci-contre. Il s’agit donc d’une structure non-hiérarchique ou tout participe
à la stabilité et à la rigidité de l’ensemble. Louis I. Kahn détourne cette technique ou plutôt le modèle
type de la maison balloon connu à l’époque, en appliquant ses théories. En effet, la maison-type avec
ces portes, ces fenêtres, et son toit à deux pans, deviennent deux cubes à couverture imperceptible
qui répond aux canons de l’architecture moderne. Il établit un socle en pierre de taille qui reprend la
topographie, intègre du stockage, et permet l’accès au jardin. C’est sur ce niveau que reposent les
deux cubes en structure balloon. Un pour les usages de nuit, et un en double hauteur pour les usages
de jour. Les photographies de chantier nous montrent qu’il a utilisé la technique de la platform pour le
volume en simple étage, avec la lecture d’une poutre de rive masquée ensuite par le bardage. Une
cheminée en pierre émerge du socle et participe au contreventement du volume en double hauteur.

25
Photographies de
chantier
© Documents de Jean
Marc Weill offerts par
Norman Fisher

26
I.

Plan général
d’électricité Kalil
House
Site du Currier
Museum of Art ©
Franck Lloyd
Wright

Ateliers Jean Prouvé


« Pavillon démontable 6x6 »
Plan maison 6x6 Plan de présentation no 9691, mai 1945

Plan de Ateliers Jean Prouvé

présentation “Demountable house 6x6”


Presentation drawing, no. 9691, May 1945
n°9691, mai 1945,
Galerie Patrick
Seguin, 2014 © 25
Jean Prouvé

Plan RDC Fisher


House
Documents scannés
par Jean-Marc Weill
© Louis I. Kahn

c) Le protocole de recherche

Le redessin :

Ce travail de recherche aborde des notions de construction et de mise en œuvre. Le redessin des
plans, des coupes, des façades, et des détails constructifs, font donc partie intégrante de la
démarche. Ils permettent d’appréhender ces trois constructions techniquement, en rentrant dans la
composition des complexes de murs et des détails d’assemblages. Les documents de base n’étaient
pas toujours de bonne qualité, il a fallu les faire correspondre avec des photographies de chantier. Par
exemple pour les plans de Louis I. Kahn, seulement deux traits symbolisent les murs à ossature bois.
Les photographies de chantiers ont permis de placer plus ou moins précisément les montants et de
déterminer les entraxes. Les détails en coupe ont servi à comprendre le complexe des murs puis de
les faire correspondre aux plans. C’est à partir des documents originaux de l’architecte, scanné par
Jean-Marc Weil aux archives de Philadelphie en 1999, qu’il a été possible de travailler. Pour la maison
6x6 de Prouvé, la Gallerie Patrick Seguin a publié des documents précis sur les différents éléments de
la construction. De plus, une vidéo sur Internet montre en accéléré le montage de la maison.6 C’est à
partir de ces documents et des détails constructifs de Jean Prouvé qu’il a été possible de monter le
plan et les coupes de la construction. Pour la Kalil House, le redessin s’est fait à partir de documents
du Currier Museum of Art qui se tient aujourd’hui au sein de la maison.7

6 MAÎTRE, Elodie. « JEAN PROUVE - MAISON DEMONTABLE 6x6, 1944 » [en ligne]. 2017, [Consulté le 22.10.2022]

7 CURRIER MUSEUM of ART [en ligne]. 2015, [Consulté le 12.11.2022]

27
Structure

Plan Maison 6X6


Redessiné par
l’auteur d’après les
élévations et détails
de la Galerie Patrick
Seguin

Plan fondations,
Kalil House
Redessiné par
l’auteur d’après le
plan général
d’électricité de
Frank Lloyd Wright

Plan RDC,
Fisher House
Redessiné par
l’auteur d’après les
dessins de Louis
Kahn scannés par
Jean-Marc Weill

28
Structure

Plan fondations,
Maison 6X6
Redessiné par
l’auteur d’après les
élévations et
détails de la
Galerie Patrick
Seguin

Plan fondations,
Kalil House
Redessiné par
l’auteur d’après le
plan général
d’électricité de
Frank Lloyd Wright

Plan sous sol,


Fisher House
Redessiné par
l’auteur d’après les
dessins de Louis
Kahn scannés par
Jean-Marc Weill

29
Plan maison 6x6
Redessiné par l’auteur
d’après les élévations et
détails de la Galerie
Patrick Seguin

Élévation maison 6x6


Redessiné par l’auteur d’après
les élévations de la Galerie
Patrick Seguin

30
Structure

Plan RDC et R+1,


Fisher House
Redessiné par l’auteur d’après
les dessins de Louis Kahn
scannés par Jean-Marc Weill

31
Plan détail, Fisher
House
Redessiné par l’auteur d’après
les dessins de Louis Kahn
scanné par Jean-Marc Weill

Élévation Nord-
Ouest, Fisher House
Redessiné par l’auteur d’après
les dessins de Louis Kahn
scannés par Jean-Marc Weill

32
Coupe détail, Fisher
House
Redessiné par l’auteur d’après
les dessins de Louis Kahn
scannés par Jean-Marc Weill

33
34
Structure

Plan fondations, Kalil


House
Redessiné par l’auteur d’après
le plan général d’électricité de
Frank Lloyd Wright

35
36
Élévation Sud-Est, Kalil House
Redessiné par l’auteur d’après les dessins de Frank Lloyd Wright
@

Coupe longitudinale, Kalil House


Redessiné par l’auteur d’après les dessins de Frank Lloyd Wright
@

37
38
I.
c) Le protocole de recherche

Trois échantillons construits :

La deuxième stratégie d’approche de ces trois projets est la réalisation de trois maquettes d’angle à
échelle 1. Elles constituent une base visuelle et sensitive, une présence de ses constructions. Elles ne
sont pas à proprement dites des maquettes, car l’échelle n’est pas réduite, ce sont des échantillons,
des morceaux de ces trois maisons. La manipulation des échantillons apporte à l’œil et à l’esprit des
informations d’ordre phénoménologique utiles pour aborder les constructions. Il ne s’agit pas de la
représentation de l’angle de ces maisons, mais bien de leur construction. Il parait intéressant de parler
de cette démarche qui correspond à des logiques d’économie de moyens de mise en œuvre. La
réalisation des échantillons a été possible à partir du redessin des détails techniques et des
photographies des projets. Travailler le bois, la tôle, le fer, mais aussi le béton, a constitué une
expérience riche d’enseignements du point de vue sensorielle. La relation entre le travail de la main et
celui de la pensée est au cœur de la démarche qui vise à aborder les trois projets sous l’angle de la
construction, aux moyens de mise en œuvre limités. Les difficultés rencontrées à travers la réalisation
des échantillons se sont avérées assez proches des difficultés que posent ces trois procédés
constructifs.

L’échantillon d’angle de la Maison 6x6 :

Dans le même esprit que ce pavillon démontable, il s’agit de l’échantillon le plus rapide à assembler.
La difficulté, c’est de se procurer les bons matériaux.
En tant que non-professionnel, il est difficile de s’approprier des éléments de constructions en petite
quantité, notamment pour les clins et les planches de bardage. Il a fallu trouver des échantillons
récupérés des matériauthèques d’écoles d’architecture. Leurs dimensions ont contraint les dimensions
de l’échantillon qui aurait pu être plus grand. Ensuite, couper ces éléments s’est fait en atelier à l’école,
à l’aide d’une scie. L’assemblage ne demande aucune colle ni vis, car ces éléments s’assemblent
comme des legos. Un marteau et des clous ont permis d’assembler le bardage aux clins avec le
montant. Au niveau de la réalisation, le plus difficile a été de couper et de plier la tôle l’aluminium qui
fait le joint d’angle. À l’aide d’une pince coupante, de deux serre-joints, d’un maillet en bois, et d’un
morceau de bastaing comme support, la tôle se plie progressivement. Il est difficile d’obtenir des
angles parfaits comme l’aurait fait la plieuse mécanique de Jean Prouvé. Ainsi, la souplesse du maillet
en bois permet de limiter les impacts sur la feuille d’aluminium. Une bombe de peinture de carrosserie
vient protéger le gabarit. La couleur verte a été repérée sur le modèle de la maison 6x6 de la Galerie
Patrick Seguin. Enfin, à l’aide d’une clé, l’assemblage final avec les vis et les écrous est très facile.
En plus de cette première expérience du travail du métal, la réalisation de cet échantillon a été riche
d’enseignements pour analyser cette construction. Par exemple, le joint en tôle n’est qu’un joint qui
assure l’étanchéité et ne permet pas de fixer les deux panneaux ensemble. Bien qu’à première vue, il
soit possible d’imaginer l’inverse. Une fois les éléments prêts à assembler, c’était simplement un travail
de mécano accessible et au sec. L’échantillon est léger et démontable, à l’image de la maison.

39
Photographie du
pliage de la tôle
© Auteur

40
Photographie
échantillon
maison 6x6
© Auteur

41
42
I.
c) Le protocole de recherche

Photographie
assemblage
coffrage
© Auteur

L’échantillon d’angle de la Kalil House :

Cet échantillon s’est avéré le plus difficile à réaliser. La première difficulté est de fabriquer le moule en
mousse polyuréthane d’isolation récupérée. Les panneaux d’isolations ne faisaient que 8cm
d’épaisseur pour un élément en béton d’environ 10cm de section, et le fil chaud pour la découpe ne
permettait que 14cm de hauteur pour les éléments. De plus, la complexité du profil de section et le
retournement en angle ont nécessité un travail en plan coupe précis. Ce coffrage est donc un puzzle
de différents morceaux de mousse assemblés par du scotch. Il devait être pensé de manière à ce que
le béton prenne bien toute la forme du moule avec le minimum d’imperfection. L’ensemble est
recouvert de scotch à l’intérieur pour ne laisser aucune fuite et assurer le décoffrage. Grâce à ce
système de puzzle, il est possible de réutiliser le même coffrage pour un autre essai en le
reconstituant. C’est un coffrage démontable.
Le premier essai s’est fendu et n’avait pas l’aspect prévu. Cela est dû à une erreur de dosage du
béton trop faible en ciment. Il était prévu une dose de ciment pour deux doses de sable et une dose
de gravier. Le ciment utilisé était finalement du mortier qui contenait déjà du sable et du gravier. Pour
assurer la solidité du deuxième essai, une armature en fer à béton plié et coupé à la scie à métaux a
été placée au centre de l’élément en béton à la moitié du coulage. Pour trouver du gravier et du sable
en petite quantité, il faut aller dans des magasins pour aquarium. Le mélange à la truelle des 15kg de
béton n’a pas été facile mais il était nécessaire d’obtenir un mélange bien homogène. Le deuxième
essai a aussi permis de réajuster le dosage en eau trop important pour le premier. Le béton a été vibré
à l’aide d’un bout de bois de manière calme et lente. Enfin, des éléments en plaques de polystyrène
transparent représentent le vitrage.
En plus de cette première expérience du travail du béton, la réalisation de ces deux échantillons a été
riche d’enseignements pour l’analyse de la Kalil House. Elle illustre les difficultés du chantier de cette
maison et rend compte de la difficulté de faire un objet fabriqué en usine à la main. La manipulation de
l’échantillon permet de se projeter dans le chantier et de mesurer les difficultés.

43
Photographie
pré-mélange
© Auteur

Photographie
coffrage et fer à
béton
© Auteur

Photographie
essai n°1 puis
n°2
© Auteur

44
Photographie
échantillon
Kalil House
© Auteur

45
46
I.
c) Le protocole de recherche

L’échantillon d’angle de la Fisher House :

Cet échantillon est fait de bric et de broc, de morceaux de bois de différentes essences (pin, sapin,
mélaminé) récupérés. Il était important d’avoir les bonnes sections des planches de bardages, des
montants et du revêtement intérieur pour obtenir un complexe de mur de 14cm. Cette exigence à
demandé la redécoupe des éléments en bois récupérés qui ne correspondaient pas toujours. Pour
cela, les scies mécaniques de l’atelier ont été une aide précieuse. S’approprier le bois et le transporter
en tramway n’a pas été facile, mais a renforcé l’envie de construire l’échantillon. La modénature de
l’élément de jointure a été improvisée à travers l’utilisation d’une scie d’une manière peu
conventionnelle. Cet échantillon s’est construit progressivement, entre la redécoupe des éléments et
les assemblages par clous, dans le même esprit que les constructions balloon. Pour des raisons de
propreté des tranches, il est préférable d’utiliser du mélaniné blanc à la place du placoplatre pour le
revêtement intérieur. Cela alourdit légèrement l’échantillon par rapport à la réalité. Un tissu noir a été
cloué derrière le bardage pour représenter le film d’étanchéité. Les planches de bardages étaient très
fragiles, ce qui a conditionné le diamètre des clous. Le bois de cèdre utilisé pour la Fisher est
beaucoup plus résistant et adapté à cette construction. La construction de l’échantillon s’est réalisée
dans la sciure de bois et l’inquiétude de devoir aller rechercher de nouveaux éléments de bois. Cela
explique le manque de documentation de ce travail.
L’expérience du travail du bois était plus riche que la maison 6x6 dans la mesure où il a fallu retravailler
les éléments récupérés. Après cette étape, l’assemblage par clou a été formidable et le résultat proche
de ce qui était prévu. Cet échantillon montre les faibles sections et met en valeur l’élément de jointure
sculpté, à travers la gestion de l’angle. C’est grâce à ce travail que les 14cm de complexe de mur sont
apparus d’autant plus importants dans la perception de cette construction. Cet échantillon peut
apparaître comme un morceau d’abri de jardin ou encore de meuble, il s’agit pourtant de l’épaisseur la
plus importante de l’enveloppe de la Fisher House.

Photographies
échantillon
Fisher House
© Auteur

47
48
49
II. Des procédés constructifs conditionnés par
les limites de l’homme bâtisseur

Les trois constructions s’assemblent uniquement par des ouvriers et sans


l’aide de machine de levage. L’homme a des prédispositions physiques comme sa
capacité de portance, l’écart entre ses bras et la taille de sa main. Il parait
intéressant de voir comment ces limites se retrouvent dans les procédés
constructifs étudiés. L’homme est l’unité de mesure de ces constructions, il
détermine les sections et les dimensions des éléments à assembler. Ce premier
point rassemble les trois cas d’étude et les place dans une logique d’économie de
moyens de mise en œuvre objective. En effet, ces limites dimensionnelles sont
universelles et ont traversé l’histoire. La spectaculaire avancée technique des
machines à partir de la révolution industrielle a considérablement transformé les
manières de construire. Aujourd’hui, en France, des constructions uniquement
assemblées par l’homme paraissent d’autant plus économes en termes de moyens
employés. Il est donc question d’échelle, de poids, et de dimensionnement dans
cette deuxième partie. Les dessins et les échantillons construits évoqués
précédemment constituent les illustrations.

50
II.

a) La maison 6x6, les panneaux et la légèreté de la tôle

La rétrospective ci-dessous reprend les éléments les plus grands de la construction. Les confronter
avec une main et un ouvrier permet de se rendre compte de l’échelle et de mesurer le degré de
difficulté de la manutention de ses éléments. Dans la maison 6x6, tout est conçu pour faciliter le
montage avec le moins de temps possible. Les éléments sont légers, facilement transportables, et
manutentionnables. Les éléments de structure comme le portique central ou les poutres sont creux. Il
s’agit de l’optimisation du poids grâce au pli de l’acier qui multiplie les capacités de résistance. Le pli
génère également un angle doux qui rend plus aisée la manutention. Concernant les panneaux de
façades, ils font chacun 1m de large ce qui est adapté à l’écart entre les bras d’un homme. Il en va de
même pour le sol de la maison qui se compose de module en bois qui se pose sur les solives du
plancher. Jean prouvé dira qu’il a choisi les 1m car c’est plus facile pour compter. C’est un peu de la
provocation car les détails constructifs montrent que c’est plus complexe. Avec les épaisseurs et les
écarts nécessaires au correct assemblage notamment. Dans cette construction, chaque choix est
conditionné par les prédispositions du monteur, l’unité de la composition, le poids, la dimension des
éléments constructifs, et même la rondeur des angles.

Maison 6x6, Demi


Portique et poutre
plancher bas
Redessiné par l’auteur
d’après les élévations et
détails de la Galerie
Patrick Seguin

51
Photographie
chantier
Maison 6x6
dans la cour des
Ateliers Jean
Prouvé à Nancy
© Galerie Patrick
Seguin, 2014

Photographie
échantillon
maison 6x6
© Auteur

52
II.

b) La Kalil House, bloc par bloc

La construction par blocs maçonnés est également adaptée à l’auto-construction dans la mesure où
chaque bloc peut être porté par un ouvrier. Il suffit de les empiler pour constituer un mur ou un
plancher à caissons, tout en mettant en place les armatures dans les joints creux. Chaque bloc
mesure 60cm/30cm ce qui est environ le double d’un parpaing classique de 20cm/30cm. Cependant,
ils font seulement 10cm de largeur contre 20cm pour le parpaing commun. Les blocs pleins font tout
de même pas loin de 80kg, il est donc plus facile d’imaginer deux ouvriers pour porter un bloc et le
placer correctement. Chaque bloc est constitué d’un cadre rempli de ciment ou de vitrage. Ce cadre
permet une meilleure prise en main du bloc et facilite la manutention. De plus, le joint creux recevant le
mortier et l’armature de fer permet aussi une meilleure prise en main. L’objectif de Franck Lloyd Wright
était de mettre au point un procédé adapté à l’auto-construction, la rétrospective ci-dessous et les
photographies illustrent cette idée. Les difficultés rencontrées sur le chantier seront détaillées dans une
autre partie.

Kalil House,
Bloc de ciment
Redessiné par
l’auteur d’après
les dessins de
Frank Lloyd Wright

Photographie
chantier Kalil
House
© Martha
(Elizabeth) Tracy

53
Photographie
échantillon
Kalil House
© Auteur

Photographie
échantillon
Kalil House
© Auteur

54
II.

c) La Fisher House, les faibles sections et la dextérité du bois

Les structures balloon nécessitent peu d’ouvriers, peu d’outils, et permettent un chantier rapide. La
non-hiérarchie des éléments structurels permet d’utiliser des éléments de faibles sections, légers, et
facilement transportable. La section des éléments ne dépasse pas 10cm/4cm pour les montants, et
18cm/6cm pour les solives. Ces faibles sections permettent également d’avoir une bonne prise avec
les mains. La dextérité du bois rend possibles de potentielles retouches pendant le chantier pour
absorber un léger décalage par exemple. Manipuler ou retoucher certains éléments est possible grâce
à des scies mécaniques de petite dimension adaptées à l’échelle humaine. Les assemblages en mi-
bois avec des clous ne nécessitent pas de visseuse, un simple marteau suffit. Ce type de construction
non-hiérarchique en bois est adapté aux prédispositions de l’ouvrier et à l’auto-construction.

Fisher House,
Montant et solive
Redessiné par l’auteur
d’après les dessins de
Louis Kahn

55
d) Des procédés clairs et intuitifs pour faciliter la mise en oeuvre

La clarté du montage de la maison 6x6 évite à l’ouvrier de se poser trop de question, c’est une maison
qui se monte aussi facilement qu’un jeu mécano pour enfant. L’évidence de son assemblage permet
d’accélérer le temps de chantier et à n’importe qui de se prêter au jeu. Dans le même esprit,
l’empilement des blocs de la Kalil House est un processus intuitif et répétitif. Le Balloon Frame
demande quelques notions de menuiseries mais c’est toujours le même type d’assemblage. Ces
procédés constructifs sont adaptés aux limites physiques de l’homme, mais également à ses
prédispositions mentales. Il parait possible d’établir que plus un procédé constructif est évident, plus il
est efficace en termes de temps de mise en œuvre. Il s’agit d’une sorte de didactique de la
construction à la portée de tous.

Photographies de
chantier
© Documents de Jean
Marc Weill offerts par
Norman Fisher

56
57
III. La répétition par module et la composition par
cadre

Après avoir déterminé que les trois procédés sont conditionnés par l’échelle
de l’ouvrier, il parait intéressant de voir comment la composition peut aider à
rationaliser le montage. Le travail de conception pré-fabrication de l’architecte sur
sa table à dessin, a déjà une influence sur l’efficacité du chantier. Certains types de
compositions pourraient correspondre à ces montages limités par les
prédispositions de l’ouvrier. Les trois architectes ont recours à une composition par
cadre ou par module. Ces cadres sont proportionnels aux dimensions de l’ouvrier,
ils correspondent à une mise en œuvre répétitive et intuitive. Ces types de
compositions déterminent la mise en œuvre mais également l’expressivité des
façades et le rapport au paysage. Un module est une unité qui détermine des
proportions.8 Tandis que le cadre est une bordure qui encadre quelque chose.9 Ces
deux définitions seront utiles pour comparer les trois systèmes. Ces compositions
correspondent à une économie de moyens de mise en œuvre dans la mesure où
leur rationalité permet des logiques d’assemblages répétés et simplifiés.

8 LE ROBERT. R Le Robert. [en ligne]. 2023, [Consulté le 22.11.2022]

9 CNRL. Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales. [en ligne]. 2023, [Consulté le 17.11.2022].

58
III.

a) La maison 6x6, la répétition d‘un panneau standard

Jean Prouvé établit un standard qui rationalise la production en usine des panneaux. Chaque panneau
a la même dimension, c’est la multiplication de ce panneau qui détermine le carré de 6m par 6m en
plan. C’est un dispositif de la répétition d’un panneau standard de dimension identique. La position en
plan des panneaux n’a presque pas d’importance, il s’agit simplement d’alterner avec un panneau
plein ou un panneau qui reçoit un ouvrant, de sorte à obtenir au moins une ouverture par façade. Le
panneau de 1m de large est un module, c’est l’unité dimensionnelle de la composition en plan, et en
façade. La répétition d’un panneau de même dimension et de même nature permet également la
répétition des assemblages. Une fois qu’on en assemble deux, il reste plus qu’à répéter l’opération.
Certains panneaux ont des ouvrants rudimentaires, une porte, et trois fenêtres. Ce sont eux qui
constituent l’enveloppe de la maison. Ils offrent un point d’appui pour la charpente et participent au
contreventement et à la stabilité de l’ensemble. Les panneaux sont donc des modules qui reçoivent ou
non des cadres ouvrants. Ce type de composition rationalise le montage, la production des éléments à
l’usine, et le transport.

Maison 6x6, Trois


panneaux
Redessiné par l’auteur d’après
les élévations et détails de la
Galerie Patrick Seguin

59
Photographie du
montage
Montage de la maison,
Camargue, 2014 ©
Galerie Patrick Seguin,
2014

60
III.

b) La Kalil House, l’empilement d’un module standard

Ici de nouveau, c'est la répétition d'un module standard de même dimension. Le bloc de ciment est
l’unité dimensionnelle qui est multipliée et assemblée dans les deux plans. Cela génère comme pour la
maison 6x6, d’une mise en œuvre de la répétition, un processus programmé et permis par la parfaite
association des modules à dimensions identiques. Cela fait appel au principe archaïque d’empilement
de pierre pour monter un mur, mais avec un procédé industriel qui le rationalise, et prévoit sa finalité.
Ces blocs sont de dimensions identiques, mais de nature différente. Ils sont chacun délimités par un
cadre à l’intérieur duquel ils peuvent être pleins, ou vitrés. L’association de l’armature permet
notamment de mettre en place une grande partie de bloc vitré dans l’angle du séjour. Cela n’aurait pas
été possible avec la simple association des blocs vitrés entre eux qui n’auraient pas résisté aux
poussées horizontales. Leur dimension est plus petite que les panneaux de Prouvé, cela permet une
plus grande variété d’assemblage et une plus grande liberté de composition. Cependant, elle sera
toujours déterminée par l’unité de base du bloc de ciment. On obtient une mise en scène de
l’empilement dans les deux plans, une juxtaposition de modules identiques. L’utilisation du béton et
des armatures en acier dans les joints permet de dépasser la contrainte de l’opacité d’un mur en
parpaings classique. Les armatures génèrent un appareillage droit, la composition des plans et des
façades résulte de la multiplication des dimensions du module. On retrouve ce dessin pour le carrelage
ou encore le mobilier. Les blocs de ciment sont donc des modules constitués d’un cadre ouvert ou
opaque.

Kalil House, Extrait


façade SE
Redessiné par l’auteur
d’après les dessins de Frank
Lloyd Wright

61
Photographie
chantier
© Inconnu

62
III.

c) La Fisher House, composition par cadres de dimensions et de natures


différentes

Le Ballon Frame est l’association de cadres continuant une enveloppe périphérique porteuse.
Contrairement aux deux autres maisons, il n’y a aucun standard, chaque cadre peut être de
dimensions différentes. Il n’existe pas d’unité dimensionnelle qui conditionne la composition. Louis I.
Kahn va ainsi mettre en place une composition de plusieurs cadres de différentes natures. On
distingue ; les cadres bardés, les cadres en retrait, les cadres vitrés et les cadres à structure
hiérarchisée. Ces différents cadres s’assemblent pour dessiner une façade unie à partir de cadrages
vitrés à position et forme diverse. L’association des cadres vitrés avec les cadres à structure
hiérarchisée permet de dessiner un deuxième cadre qui subdivise la façade et tire de nouvelles lignes
reliées aux arêtes du volume. La répétition codifiée de ces différents cadres, et leur association,
permettent d’obtenir un plus grand cadre qui détermine une façade, tout en intégrant des ouvertures
de formes et de positions diverses. Les différentes positions et formes des ouvertures sont
déterminées par les usages intérieurs et le cadrage du paysage. C’est un système qui permet une plus
grande liberté de composition que les deux précédents. Il n’est pas question de module mais de la
répétition de cadres à dimensions et natures différentes.

Fisher House, Extrait


façade NO
Redessiné par l’auteur
d’après les dessins de
Louis Kahn scanné par
Jean-Marc Weill

63
Photographie
façade NO
© Isabelle
Dumoulin

64
65
IV. La préfabrication, comme moyen de
planification de la mise en oeuvre sur site

Toujours dans l’objectif de réduire le temps de montage sur le chantier, ces


trois architectes ont recours à la préfabrication d’éléments hors site. Les types de
compositions dont il était question correspondent à des logiques répétitives de mise
en série des éléments. Il y a la préfabrication dite « ouverte » lorsque seulement
certains éléments standards sont préfabriqués pour être combinés à des éléments
construits traditionnellement. Et il y a la préfabrication dite « fermée » ou tous les
éléments sont fabriqués exclusivement les uns pour les autres.10 Ce procédé prend
son essor avec le développement de l’industrie au début du XXe siècle, et apparaît
comme un outil nécessaire lors de la reconstruction après la Seconde Guerre
mondiale. L’utilisation de la machine en tant qu’outil pour les trois constructions
étudiées, est principalement utilisée pour préfabriqué les éléments, afin de les
assembler ensuite par la force de l’homme. La machine produit des éléments
proportionnés et adaptés aux prédispositions de l’homme monteur. L’approche des
logiques de préfabrications complète les questions de proportion et de composition
précédente. Avoir recours à la préfabrication facilite le montage et répond aux peu
de moyens de mise en oeuvre sur site.

10 HONEI, Architecture. « REDÉFINIR LE PRÉFABRIQUÉ POUR LE 21ÈME SIÈCLE » LE BLOG HONEI [en ligne]. 2021, No. 24,
[Consulté le 24.11.2022]

66
IV.

a) La maison 6x6 et le tout préfabriqué

Tous les éléments sont ici préfabriqués, le montage est entièrement planifié dans l’objectif de minimiser
le temps de mise en œuvre et de permettre la production en série. C’est la catégorie de la
préfabrication dite « fermée ». Les éléments structurels comme le portique et les différentes poutres
sont pliés et soudés en usine. Il en va de même pour les panneaux constituant l’enveloppe, les
panneaux du sol, mais aussi les éléments de jointures. Le montage en une journée n’est rendu
possible que par la préfabrication de ces éléments. Rien n’est laissé au hasard, c’est la garanti de
n’avoir aucun problème lors du montage. L’aléa du chantier est banni au profit d’un contrôle total de
chaque élément, et de leur principe d’assemblage. La composition par cadres identiques évoquée
précédemment est également tirée de cette volonté d’optimiser la production en série. Cette
composition est la conséquence des conditions de production dans la mesure où le standard permet
à la machine de produire plus vite. Cette maison se monte comme un meuble, c’est un objet préconçu
et standardisé pour être développé en série. La préfabrication des éléments qui s’assemblent
parfaitement, libère l’ouvrier monteur de toute réflexion supplémentaire, il lui suffit de mettre ensemble
des éléments prévus pour s’accorder. De la même manière que les jeux de construction pour enfants.
La nature du socle, elle, varie suivant les photographies trouvées. Le modèle proposé par la Galerie
Patrick Seguin utilise des sabots métalliques préfabriqués, mais Jean Prouvé a eu recours également à
des pieux en pierre édifiés sur site.

67
Principe de
préfabrication
maison 6x6
© Auteur

68
IV.

b) La Kalil House et la préfabrication d’un module standard

La construction de cette maison fait également appel au moyen de la préfabrication, chaque bloc de
ciment est préfabriqué en usine puis assemblé sur site. Étant tous de même dimension, cela
correspond comme chez Prouvé à une production en série caractéristique de l’industrie. En revanche,
c’est le module qui est mis en série et non la maison dans son ensemble. Afin d'automatiser la
production, le Dr Kalil lui-même maître d’ouvrage, a fait construire une machine qui créait chaque bloc
sous pression, cela permettait de retirer les blocs de leurs formes immédiatement et de commencer le
bloc suivant. Ainsi, ils auraient pu être mis en série de manières plus large, et on aurait vu naître de
nouvelles maisons utilisant ce principe. Il s’agit d’une préfabrication dite « ouverte ». La préfabrication
de ces blocs ne détermine pas un ensemble prédéfini, mais simplement un bloc standard que l’on
peut associer de multiples façons. Par conséquent, la mise en œuvre et le montage de la maison sont
plus longs. Il faut sur le site, mettre en place les armatures avec le mortier et couler les chapes par
exemple. Les assemblages ne sont pas préfabriqués à l’usine comme pour la maison 6x6. On est
donc dans un degré inférieur de préfabrication, seul le module est fabriqué hors site.

Principe de
préfabrication
Kalil House
© Auteur

69
c) La Fisher House et la préfabrication ouverte

La Fisher House correspond également à une logique de préfabrication, car les éléments en bois ont
des sections prédéfinies par l’usine. En revanche, la préfabrication pour la construction bois n’était pas
autant développée qu’aujourd’hui ou on est capable de préfabriquer directement les murs à ossature
pour un assemblage plus rapide sur site. Cette construction rejoint le principe de la Kalil House dans la
mesure où ce sont les matériaux qui sont préfabriqués et non la construction dans son ensemble.
Cependant, l’usage de la préfabrication est encore plus ouvert, l’usine ne produit pas un module
identique, mais bien une multitude de sections et de longueur d’éléments en bois. De plus, la dextérité
du bois évoquée précédemment permet d’ajuster les éléments facilement afin d’absorber les aléas du
chantier. Ce que ne permet pas le système par blocs maçonnés. L’usine préfabrique donc des
sections standards, et le constructeur peut les modifier ensuite. En ce qui concerne le socle de la
Fisher House en maçonnerie de pierre sèche, il s’agit d’un procédé archaïque aux antipodes de toutes
logiques de préfabrication.

Principe de
préfabrication
Fisher House
© Auteur

70
71
V. La polyvalence, comme moyen d’exploitation
maximale des procédés constructifs

Après avoir déterminé en quoi ces trois constructions correspondent à des


logiques d’économie de moyens de mise en œuvre, il s’agit de voir comment les
architectes exploitent au maximum les procédés constructifs. Comment par l’étude
de ces procédés est-il possible de réduire les moyens mis en place ? Comment
couvrir toutes les fonctions premières d’une construction avec moins ? Les trois
architectes ont recours à des dispositifs que l’on définit comme polyvalents. La
valence provient du bas latin valentia qui est relatif à la capacité.11 Ce terme
chimique paraît pertinent car il parle de liaison et de substitution, or un élément qui
recouvre deux fonctions à la fois supprime la nécessité d’en utiliser un autre, il
établit une fusion en un seul élément capable. Il obtient alors un nouveau statut qui
fait la synthèse des deux fonctions. Mais alors comment un dispositif construit peut
recouvrir plusieurs fonctions à la fois ? Comment par exemple le gros-œuvre peut
être à la fois le second-œuvre ? Il s’agit ici de repérer dans chacun des trois projets,
les dispositifs qui recouvrent plusieurs qualités à la fois. Des qualités qui sont
habituellement distinctes et propres à plusieurs éléments d’une construction. Cette
idée de la polyvalence peut s’avérer être une approche qui correspond à une
logique d’économie de moyens de mise en œuvre. Se demander comment un
élément peut couvrir plusieurs rôles à la fois génère consécutivement une réduction
des moyens employés. Il s’agit d’une logique objective de réduction. Pour
commencer, il convient de s’intéresser à un théoricien qui a séparé en quatre
éléments distincts l’architecture, afin de vérifier si les trois architectes ont réussi à
les fusionner. Il est question de Gottfried Semper, un architecte, théoricien d’art et
enseignant allemand du XIXe siècle qui détermine le toit, le socle, l’enveloppe et le
foyer comme les quatre éléments de l’architecture. Pour établir cette classification
quadripartite, le théoricien se base sur la hutte primitive de Vitruve.12 Ensuite, il
s’agira de la fusion du revêtement et de la structure dans la constitution des
enveloppes, puis de la fusion entre le gros-œuvre et le second-œuvre.

11 LAROUSSE. Dictionnaire de français. [en ligne]. 2023, [Consulté le 28.01.2023]

12 RYKWERT, Joseph. « Semper et la conception du style » Le journal de Pontormo. 1979, Macula 5/6, p 181. Traduit de l'anglais par
Priscille Michaud.

72
V.

a) Les quatre éléments de l’architecture de Gottfried Semper

Gottfried Semper formule ces quatre éléments lorsqu’il voit à l’exposition universelle de Londres en
1851, une maquette d’une hutte de bambou des Indes occidentales nommée « hutte des Caraïbes ».
Il semble qu’il s’agît plutôt d’une construction de la Guyane britannique.13 L’architecte l’a présentée
comme analogue à la hutte primitive de Vitruve. Il propose une organisation quadripartite des artefacts
humains à partir de la hutte qui fournit un modèle d’articulation. Les quatre éléments sont : le foyer,
l’enveloppe, le socle, et le toit. Le foyer est l’élément le plus ancien, l’élément moral [das moraliste
Element] de l’architecture. Les trois autres sont des entités protectrices [die schützenden Negationen]
qui gravitent autour ; le toit, la clôture [die Umfriedigung] et le terre-plein [der Erdaufwurf].14 La
combinaison de ces quatre éléments peut prendre différentes configurations suivant des influences
diverses comme le climat, les conditions géographiques, les rapports entre cultures ou les aptitudes
différentes entre races [Racen].15 À partir de cette classification quadripartite, des procédés résultant
des aptitudes techniques des hommes s’organisent. Chaque procédé est associé à un matériau
fondamental [Urstoff] qui offre le moyen le plus commode pour produire des formes qui appartiennent
à son domaine de référence originel.16 Les quatre procédés sont le tissage pour l’enveloppe, le
moulage pour le foyer, la tectonique pour le toit, et la stéréotomie pour le socle. Ils sont relatifs aux
quatre éléments précédemment cités et correspondent à une classification des arts techniques que
Gottfried Semper établit. Le théoricien élabore également quatre catégories de matériaux bruts selon
la manière dont ils sont employés à des fins techniques.17 C’est à partir de ces quatre types de
matériaux que découlent les procédés qui visent à soumettre le matériau à un but déterminé en
fonction de ses qualités. Ainsi, la tectonique peut être associée à des matériaux en forme de bâtons,
élastiques, qui résistent à une force verticale qui s’exerce sur la longueur. La stéréotomie peut
correspondre à des matériaux solides, compacts, qui résistent à l’écrasement et à l’éclatement. Ils
sont aptes à être façonnés en une forme quelconque par enlèvement de parties de la masse et à être
assemblés en blocs réguliers. Les matériaux mous, souples, capables de durcir peuvent correspondre
au travail de la céramique associé au moulage. Enfin, les matériaux pliables, durs, très résistants au
déchirement peuvent servir le tissage.18 Il convient de préciser qu’il existe une multitude de corrélations
entre ces divisions. Par exemple, le travail de la métallurgie rassemble l’ensemble des propriétés
énumérées ci-dessus. Elle renferme une plénitude de procédés techniques intermédiaires que l’on
trouve dans aucun autre matériau.19 Il paraît alors indispensable de réserver une rubrique spéciale pour
la métallurgie. Il existe d’autres interversions possibles comme par exemple le sujet de la céramique,
des tuiles ou des briques qui peuvent à la fois correspondre au procédé de la stéréotomie, du tissage
et du moulage. Ainsi, le tissage ne relève pas uniquement de l’art textile.20 La stéréotomie n’est pas
utilisée seulement pour les travaux de maçonnerie et de terrassement, mais aussi pour la mosaïque, le
travail du bois, de l’ivoire ou du métal. C’est en ce sens que Gottfried Semper n’a pas une approche

13 RYKWERT, Joseph. « Semper et la conception du style » Le journal de Pontormo. 1979, Macula 5/6, p 179. Traduit de l'anglais par
Priscille Michaud.

14 SEMPER, Gottfried. Du style et de l’architecture, Écrits, 1834-1869. Marseille, Éditions Parenthèses, 2007. Traduit de l’allemand en
français par Jacques Souillon avec la collaboration de Nathalie Neumann. ISBN : 9782863646458, p 125. De l’ouvrage original en deux
volumes, Der Stil, Gradhiva, 1860-63.
15 Ibidem p 126

16 Ibidem p 312

17 Ibidem p 312

18 Ibidem p 312

19 Ibidem p 314

20 Ibidem p 313

73
matérialiste de l’architecture, il catégorise des procédés qui permettent l’existence matérielle des
quatre éléments de l’architecture universels. Les limites de la corrélation entre les éléments de
l’architecture et les procédés sont intéressantes, car elles pourraient permettre la fusion des éléments
entre eux à travers un seul procédé. Par exemple, l’assemblage par blocs régulier est un procédé
relatif à la stéréotomie, mais qui peut permettre aussi de réaliser un toit, une enveloppe ou un foyer.
En termes d’économie de moyens de mise en œuvre, un procédé en mesure de synthétiser les quatre
éléments de Semper est intéressant. En effet, un seul savoir-faire est requis, un seul corps d’état, ce
qui facilite la construction. La fusion des éléments à travers un procédé unique rend impossible de les
séparer objectivement.
Ce point théorique permet d’introduire l’idée de dispositifs polyvalents. Est-ce que Jean Prouvé, Louis
I. Kahn et Franck Lloyd Wright arrivent dans ces constructions à fusionner les éléments que Gottfried
Semper à pris soin de séparer ? Comment ces œuvres construites peuvent remettre en cause cette
théorie ?

La « Hutte des Caraïbes »,


dessins de Gottfried
Semper
© Abre Etteh.

74
V.

b) La fusion des éléments et procédés semperiens

La maison 6x6 et le cas de la métallurgie :

Le travail du métal correspond aux quatre catégories de matériaux bruts que dresse Gottfried Semper.
Comme le montrent les dessins ci-contre, il est d’abord moulé, il peut ensuite se plier, s’assembler en
bâton, ou encore résister à l’écrasement. La maison 6x6 rend donc difficile la distinction d’un foyer,
d’une enveloppe, d’un toit, et d’un socle si l’on suit les écrits du théoricien. Le portique central pourrait
être considéré d’un premier abord comme le foyer de la construction, il est l’élément central et la tôle a
été moulée. Cependant, il résiste à des forces verticales transmises par la charpente et il est constitué
de plusieurs barres soudées. Il serait donc possible de considérer le portique comme constitutif du
toit, correspondant au procédé de la tectonique. Cette contradiction se retrouve dans les panneaux de
façades construits par un procédé tectonique avec des éléments en bois. Ils participent au soutien de
la charpente et à la stabilité de l’ensemble, ainsi, on ne peut pas les considérer comme une enveloppe
tissée, bien qu’ils constituent une enceinte protectrice. La maison 6x6 est un bon exemple pour mettre
en exergue les limites des théories de Semper, en ce sens ou le travail de la métallurgie est en mesure
de couvrir chacun des quatre procédés énoncés. Il est donc ici difficile de séparer objectivement les
quatre éléments. Néanmoins, cette cabane correspond à la forme archétypale de la hutte primitive de
Vitruve qui est le modèle d’articulation sur lequel se base le théoricien. Mais les multiples qualités du
métal remettent en cause le caractère universel porté par ses théories. Comme le montrent les dessins
ci-contre, il est possible de séparer chaque élément distinctement en considérant que les panneaux de
l’enveloppe, la charpente, et le socle gravitent autour du portique central. Cependant, la cabane
pourrait être aussi considérée comme un ensemble d’assemblages en barres, un ensemble
tectonique. La fusion des procédés par la métallurgie contredit la distinction quadripartite de Gottfried
Semper avec le même archétype que la hutte.

Coupe schématique,
Maison 6x6
Dessiné par l’auteur

75
Quatre manières de
représenter la
métallurgie
Dessiné par l’auteur

Distinction des
éléments
sempériens
Dessiné par l’auteur

Un ensemble
tectonique
Dessiné par l’auteur

76
V.
b) La fusion des éléments et procédés semperiens

La Kalil House, un ensemble stéréotomique, tectonique, moulé ou tissé ? :

Les blocs de béton correspondent eux aussi aux quatre catégories de matériaux bruts de Gottfried
Semper. Comme le montrent les dessins ci-contre, les blocs sont d’abord moulés et peuvent ensuite
être empilés. En revanche, l’association avec l’armature peut faire également penser à un tissage, et
les blocs sont constitués d’un cadre en bâton. Il s’agit une nouvelle fois d’une fusion des catégories
sempériennes. L’ensemble peut être considéré comme un assemblage de blocs réguliers qui reposent
sur une dalle de béton moulée en place comme sur le dessin ci-dessous. On distinguerait alors deux
procédés, celui de la stéréotomie et du moulage. Mais il y a aussi du tissage avec les armatures
métallique des blocs, et le plancher haut à caissons résiste à des forces verticales appliquées sur la
longueur, ce qui est propre à la tectonique. Il est donc difficile de déterminer si ce système par bloc de
ciment est un procédé tectonique, stéréotomique, moulé ou tissé. Il est les quatre à la fois, il est
polyvalent. Ce système synthétique capable est en mesure de couvrir plusieurs fonctions à la fois. La
distinction des quatre éléments de l’architecture de Gottfried Semper est contredite par un dispositif
qui recouvre les quatre procédés. On pourrait aussi comme sur le dessin ci-contre, considérer la dalle
comme le socle qui devient le foyer avec cet emmarchement moulé pour la cheminée. Et le reste un
ensemble tectonique constitué de cadres. Plusieurs d’autres interprétations sont possible, ce système
est totalement polyvalent. Les théories de Gottfried Semper sont mises à mal par les qualités de
l’association du béton et du métal. Un siècle après ces écrits, ce dispositif fusionne les catégories, et
permet ainsi de synthétiser et de simplifier la mise en œuvre. Il est possible de recouvrir les fonctions
premières d’une construction avec un seul et même procédé constructif.

Coupe schématique,
Kalil House
Dessiné par l’auteur

77
Quatre manières de
représenter les blocs
Dessiné par l’auteur

Un ensemble
tectonique sur un
moulage
Dessiné par l’auteur

78
V.
b) La fusion des éléments et procédés semperiens

La Fisher House, un ensemble stéréotomique et tectonique :

Les murs en pierres sèches correspondent à un empilement stéréotomique qui constitue le support
des deux parallélépipèdes en ossature bois. L’enceinte périphérique soutient le plancher haut et se
compose d’un assemblage tectonique. Ainsi, comme le montre le dessin ci-dessous, la Fisher House
pourrait être synthétisée par deux des quatre procédés semperiens ; la stéréotomie et la tectonique.
La cheminée habituellement attribuée au foyer correspond ici au même procédé que le support
stéréotomique. Le dessin ci-contre tente de séparer les quatre éléments semperiens. On distingue un
socle stéréotomique, deux planchers tectoniques, une cheminée comme foyer, et une enveloppe
tissée avec ces plis vers l’intérieur. Cependant, le premier schéma parait plus pertinent. Cette
construction est le troisième exemple de fusion des éléments de l’architecture semperiens et des
procédés qui s’y rattachent. Elle montre une solution sans métal, un système non-hiérarchique qui
répartit les forces sur une multitude de points périphériques. Ce système polyvalent couvre plusieurs
fonctions à la fois. Il serait presque possible de retourner les parallélépipèdes en bois comme le montre
le dessin ci-contre. Une des faces de l’enceinte périphérique structurelle pourrait très bien devenir le
plancher haut ou le plancher bas. Le Balloon Frame est donc aussi polyvalent, avec une structure non
hiérarchique qui simplifie et fusionne les procédés sempériens.

Coupe schématique,
Fisher House
Dessiné par l’auteur

79
Distinction des
éléments sempériens
Dessiné par l’auteur

Polyvalence du
système
Dessiné par l’auteur

80
V.

c) La fusion du revêtement et de la structure

Dans la même lignée que la première partie sur Gottfried Semper, il parait intéressant de
sélectionner ce qui est de l’ordre de la structure ou de revêtement dans la composition des
enveloppes. Comment à l’intérieur de la composition de ces complexes, le revêtement peut être aussi
structure ? Et comment un élément structurel peut faire office de revêtement ? Cette approche peut
aider à caractériser la polyvalence des systèmes. Cette fonctionnalité double est de nouveau une
réduction des moyens mis en œuvre. Il s’agit de rechercher dans cette partie la polyvalence des
dispositifs, à l’intérieur des complexes d’enveloppes.

La maison 6x6, panneaux structurels et complexe par agrégation :

Le bardage et les clins intérieurs des panneaux de façade lient les montants entre eux. Ces
revêtements sont donc partie intégrante de la structure des panneaux. Comme expliqué
précédemment, les panneaux participent à la structure de l’ensemble. Ainsi, il est possible de dire que
tous les revêtements de l’enveloppe participent à la structure de l’ensemble. Le bardage et les clins
assurent à la fois leurs propriétés de revêtement car ils recouvrent et protègent l’intérieur, et leurs
propriétés structurelles. Cette fonctionnalité double caractérise l’efficience du système par les qualités
polyvalentes de l’enveloppe. Comme le montre le dessin ci-dessous, seuls les couvre joint ne sont pas
structurels.

Plan détail enveloppe


Maison 6x6
Redessiné par l’auteur d’après les
élévations et détails de la Galerie
Patrick Seguin

La Kalil House, enveloppe structurelle et complexe synthétique :

Avec le système non-hiérarchique où tout est structurel, les enveloppes dans les deux plans sont à la
fois revêtement et structure. Les blocs de béton assurent les deux fonctions à la fois. De la même
manière qu’un mur en pierre périphérique, mais avec des propriétés enveloppantes de différentes
natures. Le complexe de l’enveloppe est donc synthétique et polyvalent. Recouvrir les deux fonctions
à la fois correspond à une logique d’économie de moyens de mise en œuvre dans la mesure où il
s’agit d’une économie de temps, et de matière. Le dessin ci-après montre que seul le vitrage n’est pas
structurel.

81
Plan détail enveloppe
Kalil House
Redessiné par l’auteur
d’après les dessins de Frank
Lloyd Wright

La Fisher House, enveloppe structurelle et complexe par agrégation :

L’enveloppe se compose depuis l’intérieur d’une plaque de placoplatre, des montants et lisses
horizontales, d’un panneau de contreplaqué, et des planches de bardage. Comme le montre le dessin
ci-dessous, tout participe à la structure à l’exception du placo et de l’étanchéité. En effet, les planches
de bardages participent au contreventement de l’ensemble, c’est pour cette raison qu’avant de clouer
ces planches, on place des éléments de contreventement éphémères visibles sur les photographies
de chantier. Ainsi, le complexe par agrégation de l’enveloppe assure à la fois sa fonction de
revêtement, et de structure. Le système est non hiérarchisé et ne nécessite pas de points porteurs
centraux comme pour le portique de la maison 6x6. Il s’agit d’un mur périphérique de bois avec une
multitude de points porteurs de seulement 14cm.

Plan détail enveloppe


Fisher House
Redessiné par l’auteur d’après
les dessins de Louis Kahn
scannés par Jean-Marc Weill

82
V.

d) La fusion du gros-œuvre et du second-œuvre

Il apparaît dans la Kalil House et la Fisher House une fusion entre le gros-œuvre et le second-
œuvre. Comment un élément peut être à la fois de l’ordre de la structure, de la menuiserie et du
meuble ? Ces deux maisons montrent ce type de fusion, avec le béton chez Wright et avec le bois
chez Kahn. L’idée de couvrir plusieurs qualités avec un seul élément, peut correspondre à une logique
d’économie de moyens de mise en œuvre. En ce sens ou la durée du chantier, le poids de la
construction, le nombre de corps d’état agissant sont réduits. La construction des éléments du
second-œuvre est habituellement mis en place après le gros-œuvre qui constitue leur support. Ici, à
travers le même procédé, les deux étapes sont assurées en même temps. Les menuiseries des
ouvertures ou encore l’ossature des meubles sont structurelles. Il ne s’agit pas d’éléments rajoutés, ils
participent à la rigidité de l’ensemble.

Plan détail enveloppe


Redessiné par l’auteur
d’après les dessins de
Frank Lloyd Wright

La Kalil House, des menuiseries en béton :

Le cadre des blocs à remplissage vitré est à la fois un élément structurel, et à la fois le châssis de
l’ouverture. Ce système recouvre une fonction de gros-œuvre et de second-œuvre. Cette fusion est
une économie de matière et de temps de montage. Elle correspond bien à une logique d’économie de
moyens de mise œuvre. Le béton est-il fait pour faire des menuiseries ? Un élément filaire en béton
peut-il assurer sa fonction d’ossature et de châssis ? Il est important de stipuler ici que ce système a
fait l’objet de problèmes de condensation. Pour les ouvrants, Wright intègre des menuiseries
métalliques de couleur grise proche de celle du béton. L’architecte tente de fondre les ouvrants pour
jouer la carte du monolithisme, mais se fait rattraper par les qualités de perméabilité que doit assurer
une enveloppe. Le reste du second-œuvre (meuble, cloisons) est en acajou des philippines. Cette
dichotomie béton/bois exprime le rapport gros-œuvre/second-œuvre. Les menuiseries en métal gris
devraient être structurelles et en béton, constitutive de l’enveloppe unitaire. Wright ment d’une certaine
manière en fondant le second-œuvre de l’enveloppe avec l’utilisation d’un métal gris proche du béton.

83
Photographie
extérieure
© M. Steiner

Photographie
intérieure
© Keller Williams

84
V.
d) La fusion du gros-œuvre et du second-œuvre

Coupe section lisse Coupe section


horizontale chassis
© Redessiné par l’auteur © Redessiné par l’auteur
d’après les dessins de d’après les dessins de
Louis Kahn Louis Kahn

La Fisher House, des fenêtres-meubles et des menuiseries structurelles :

On retrouve ici la même volonté de fusionner le second-œuvre avec le gros-œuvre mais avec le bois.
Le poteau de l’angle ouvert par exemple, est à la fois structurel, et à la fois le châssis des ouvertures.
Ce même poteau se confond avec le bardage placé au même nu pour les autres angles. Toutes les
menuiseries des ouvertures fixes, vitrées ou pleines, sont également l’ossature de l’enveloppe
porteuse. Seuls les ouvrants ne sont pas structurels. L’architecte prend donc soin de les placer en
retrait pour les protéger de la pluie, mais aussi pour ne pas les distinguer de l’extérieur. En mettant en
retrait ses ouvrants, il réalise un pli de l’enveloppe qui participe à la rigidité de l’ensemble. Les meubles
associés aux ouvertures sont de la même nature que la structure de l’enveloppe, ils apportent de
l’inertie. Ainsi, l’ensemble de l’enveloppe, des menuiseries et des meubles, sont à la fois du second-
œuvre et du gros-œuvre. On construit tout en même temps ce qui réduit la quantité de matière et le
temps de mise en œuvre. Il en résulte un certain monolithisme et une certaine efficacité grâce aux
fonctions doubles des éléments filaires. Cette volonté est plus aboutie dans la Fisher House et plus
efficiente. Le bois est plus adapté pour jouer ce double rôle que le béton. Les deux maisons
américaines montrent donc comment fusionner deux étapes de chantier d’ordinaire séparées, avec
deux matériaux différents.

85
Plan détail,
Fisher House
Redessiné par
l’auteur d’après les
dessins de Louis
Kahn scanné par
Jean-Marc Weill

Photographies
menuiseries
intérieures
© Jean-Marc Weill

86
Photographie
échantillon
Kalil House
© Auteur

87
Photographie
échantillon
Fisher House
© Auteur

88
89
VI. L’expressivité brute de la matière
Après ces logiques de fusions et de polyvalence, il convient de s’intéresser à
l’expressivité de ces dispositifs construits. Le terme brutaliste concerne ici
l'expressivité des matériaux, un des aspects de ce mouvement exposé par Reyner
Banham, professeur d’université, historien de l’art et critique britannique du XXe
siècle. Il élabore une synthèse de tous les aspects du brutalisme et présente une
chronique de cette recherche esthétique des années 50 à 60. L’inventeur du terme
serait le suédois Hans Asplund dans une lettre à Éric de Maré, publiée en 1956
dans l’Architectural Review. L’architecte nomme de « néo-brutalistes » les plans
d’une maison à Upsala de ses collègues Benêt Edman et Lennart Holm. Ce terme,
alors utilisé pour la première fois sous le ton de la plaisanterie, est rapidement
diffusé en Angleterre. Le groupe d’architectes qui reprend ce terme préfère
l’expression de « New Brutalism » qui évoque une éthique et non une esthétique,
comme l’exprime la première expression.21 Les premiers à qualifier de brutaliste leur
bâtiment sont Alison et Peter Smithson avec la Smithdon High School à
Hunstanton. Ils gagnent le concours en 1949, sept années avant que Hans Asplund
n'évoque pour la première fois le terme.22 Derrière les débats et la recherche des
différentes significations de ce mouvement en Angleterre, celle de Le Corbusier est
concrétisée dans l’unité d’habitation de Marseille. Il qualifie son béton de « brut », ce
qui est à l’origine de la rapide diffusion du terme « brutalisme ». Il admet alors que le
béton peut rester à son premier stade, il réinvente son expressivité en acceptant sa
grossièreté et celle du coffrage en bois pour créer une texture d’une noblesse
rude.23 Cette approche, cette éthique, envisage les matériaux dans leur véracité
première. Le principe de laisser à l’état brut la matière peut correspondre à une
logique d'économicité de la construction, dans la mesure où il s’agit d’une
réduction de moyens mise en œuvre pour exprimer un élément architectonique.
Dans le cas de l'unité d'habitation de Marseille de Le Corbusier, le béton n'a plus
besoin d'être enduit ni recouvert d'un autre matériau. Les trois constructions
étudiées sont pratiquement constituées d’un seul et même matériau et laissé à
l’état brut. Ce choix peut correspondre à une logique d’économie de moyens de
mise en œuvre, dans la mesure où cela réduit le nombre de corps d’état agissant et
supprime du second-œuvre. Cette approche brutaliste maintenant définit et cette
unité matérielle génèrent des ensembles presque monolithiques. L’expression de ce
monolithisme est recherchée par Franck Lloyd Wright et Louis I. Kahn.

21 BANHAM, Reyner. Le brutalisme en architecture : éthique ou esthétique ?. Marseille, Dunod, 1970. Traduit de l’allemand en français
par A. Et P. F. WALBAUM. ISBN : 2863646648, p. 10. De l’ouvrage original, Brutalismus in der Architecture, 1966.

22 Ibidem p 19

23 Ibidem p 16

90
VI.

Photographie
Jean Prouvé
© Inconnu

a) La maison 6x6 et la tôle pliée

Jean Prouvé utilise son travail de la tôle pliée. Le pli permet de multiplier sa résistance et d’augmenter
l’inertie d’un élément structurel sans qu’il ne soit rendu trop lourd, par l’ajout de matière dans
l’épaisseur. Il utilise la tôle pliée pour répondre à sa volonté de construire léger. La finesse et ce travail
produit aussi les éléments de jointures dans les angles et entre les panneaux. On est dans
l’optimisation maximale de ce que permet la tôle d’acier qu’il magnifie à travers une sorte de fatalisme
formelle. Cet architecte, constructeur et ingénieur, croit à cette esthétique du degré zéro de la
construction, en dehors de toute recherche purement plastique.

Je n’ai pas inventé une Architecture, je l’ai faite. Je n’ai pas inventé des formes, j’ai fait une Architecture qui avait
des formes. Je l’ai faite en tôle pliée, parce que j’avais de la tôle, et des presses pour la plier. C’est aussi simple que
cela... 24

24 GALERIE PATRICK SEGUIN, JEAN PROUVÉ, maison démontable 6x6 [en ligne]. Paris : Galerie Patrick Seguin, 2014, [Consulté le
20.10.2022]. ISBN : 9782909187082

91
Photographie du
pliage de la tôle,
© Auteur

Photographie
couvre-joint
© Auteur

92
VI.

Détail joint en plan


Redessiné par l’auteur
d’après les dessins de
Frank Lloyd Wright

b) La Kalil House, un monolithe de béton

L’utilisation systématique des blocs de béton dans la Kalil House affirme une certaine obstination dans
l’utilisation de ce matériau. L’exploitation du bloc de béton a un caractère systématique, on retrouve
son expressivité, sa présence dans toutes les pièces de la maison. L’architecte explore les qualités de
ce matériau dans toutes les directions, transgressant avec radicalité et obstination cette technique.
L’ensemble apparaît alors monolithique et constitué d’un seul et même matériau, à l’intérieur duquel
prend place le mobilier en bois. Pour obtenir cette expression, Wright prend soin de prévoir une
réservation dans le gabarit des cadres des modules pour placer l’armature et le joint de mortier. Ainsi,
aucun joint n’est perceptible et cela donne l’impression d’un empilement de bloc à sec. Ce détail
participe au caractère monolithique de l’ensemble et cherche à exprimer cette simplicité. Il trouve dans
l’évidence de ce procédé de l’empilement, une certaine esthétique. C’est une représentation littérale
du tout et des parties qui correspond à ses théories de l’architecture organique. L’évidence et la clarté
expressive de ce procédé met en avant l’esprit des constructions vernaculaires, accessibles à tous.
En revanche, si cette mise en œuvre apparaît simple et archaïque, l’obstination pour l’utilisation de ce
bloc de béton dans les deux plans organise un système immuable qui rejette tout aléa spécifique au
chantier. C’est en s’intéressant à l’histoire du chantier que l’on repère la limite de ce procédé. Pour
cela, on se base sur un texte de Paul Beaudoin qui explique cette histoire telle que lui a raconté son
beau-père John Martineau.25 Ce monsieur a participé à la construction de la maison en tant que
maçon. Dans le même esprit que la maison 6x6 préfabriquée, il a fallu prévoir toutes les spécificités
des blocs avant de les produire, concernant par exemple les prises électriques. L’erreur fatale qui est
survenue est que l’épaisseur du joint de mortier n’a pas été prise en compte dans le dimensionnement
des blocs de béton. Les documents de cette page illustrent ce problème. Ainsi, l’ingénieur en chef
s'est rapidement rendu compte qu'en raison des tolérances accumulées, les blocs allaient rapidement
rendre les murs trop longs. De plus, aucun des joints horizontaux ou verticaux n'allait s’aligner. Il a dû
alors concevoir un gabarit composé de deux moteurs équipés de meules géantes, placés de part et
d'autre d'un convoyeur à rouleaux. Chaque bloc devait être passé deux fois pour que les quatre côtés
soient rectifiés de manière égale. On remarque alors la limite de ce système qui ne permet aucune
tolérance à l’imprévu, les assemblages sur site se sont avérés très complexes à réaliser. Tout devait
être aligné et répondre à un système de composition statique, d’une parfaite satisfaction de l’esprit,
qui a eu du mal à répondre aux aléas de la réalité du chantier. On pourrait dire qu’en poussant
jusqu’au bout le procédé constructif de l’empilement de blocs parpaing, l’architecte a produit un
système trop statique qui n’a pas pu résister à une erreur de calibrage.

25 STEINERAG. « Dr. Toufic H. & Mildred Kalil Residence, Manchester, NH (1955 - S.387) » THE WRIGHT LIBRARY [en ligne]. 2020,
[Consulté le 11.11.2022]

93
Élévation projetée
Redessiné par l’auteur
d’après les dessins de
Frank Lloyd Wright

Photographie du
grattage du joint
de mortier
© Martha (Elizabeth)
Tracy

Détail coupe des


blocs
Redessiné par l’auteur Photographie
d’après les dessins de entrée
Frank Lloyd Wright © Sean Dungan

94
VI.

Plan détail,
Fisher House
Redessiné par
l’auteur d’après les
dessins de Louis
Kahn scanné par
Jean-Marc Weill

c) La Fisher House, un monolithe de bois

Louis I. Kahn applique pour la Fisher House ces théories sur la nature des matériaux, ce qu’ils
demandent à être. Il s’interroge sur l’essence même du matériau et ce qu’il demande pour être utilisé
et assemblé. Les deux parallélépipèdes posés sur le socle en pierre sont constitués uniquement de
bois, avec un remplissage en plâtre pour le revêtement intérieur et les cloisons. Caractéristiques des
assemblages par clous du Balloon Frame, l’architecte prévoit les découpes avec beaucoup de
dextérités. Chaque découpe est prévue en fonction des différences de nu, de perception que l’on a du
dessin de la façade. Il réussit à mettre tous les éléments au même nu de la façade ce qui donne
l’apparence d’un monolithe. Seul le joint apporte l’ombre comme un élément rajouté. Le pli cache les
panneaux ouvrants et fait croire à une épaisseur, Louis I. Kahn joue la masse avec un complexe de
mur de 14cm. Le seul ouvrant au nu de la façade, avec ses goujons visibles, perturbe l’unité de
l’enveloppe. Il s’agit d’une ouverture qui a sans doute posé problème, les dessins n’étant pas
cohérents avec les photographies, tout comme les nombreuses assises intégrées à l’intérieur que l’on
ne retrouve pas. Louis I. Kahn note bien sur son plan que ces assises dépendent du budget. Pour lire
ce monolithe, l’œil a besoin d’une forme claire et identifiable, et ce travail sur les différences de nu
participe à sa lecture. L’arrêt de l’élément de jointure dans les arêtes des parallélépipèdes permet la
lecture unitaire du volume par la libération de l’arête. L’architecte réussit à faire croire à un monolithe
de bois ouvert sur le paysage. Il met en avant la grande liberté de composition que permet la
construction balloon frame, un ensemble d’éléments de petites sections. L’ensemble est comme un
grand meuble habité, on retrouve comme dans la Kalil House cette clarté du tout et des parties.

Ces trois architectes exploitent la matière dans un certain brutalisme, les procédés constructifs
polyvalents s’expriment dans leur véracité première. Ils croient à cette expressivité de l’emploi de la
matière. Cette attitude correspond à une logique d’économie de moyens dans la mesure où elle réduit
le second oeuvre et fait intervenir moins de corps d’état. Franck Lloyd Wright et Louis I. Kahn
cherchent à travers les détails, à obtenir un monolithe. Cette pureté de la forme, des assemblages,
correspond au caractère vernaculaire des constructions, à une certaine didactique constructive.

95
Photographies
enveloppe et
pli ci-contre
© Jean Marc Weill

Coupe détail,
Fisher House,
ci-après
Redessiné par
l’auteur d’après
les dessins de
Louis Kahn
scanné par Jean-
Marc Weill

Photographies
enveloppe et pli
© Jean-Marc Weill

96
97
VII. Trois paradigmes de leur procédé constructif,
vers un néo-vernaculaire ?

La dernière partie a pour objectif d’ouvrir la recherche et de montrer


l’exemplarité des trois projets. En quoi ces trois constructions sont en quelque sorte
un paradigme de leur principe constructif ? Le Balloon Frame était très répandu aux
États-Unis à l’époque de la construction de la Fisher House, de même pour la
construction parpaing concernant la Kalil House. Ces maisons ont modifié la
représentation que l’on pouvait se faire de ce type de construction. Dans le même
registre, la maison 6x6 est un manifeste de la construction démontable et
préfabriquée. Il paraît intéressant dans cette dernière partie de déterminer sous
quelle forme ces trois architectes transgressent l’utilisation des procédés
constructifs, et si cet effort tend vers une recherche d’un néo-vernaculaire. Il
apparaît chez chacun des architectes une approche radicale, un questionnement
portant sur la racine même des procédés qu’ils mettent en place. La radicalité est
un adjectif qui signifie ; relatif à la racine, à l’essence de quelque chose.26 Cette
définition est intéressante à mettre en parallèle avec des constructions à faibles
moyens. En effet, moins on a de moyens plus on s’approche de ce qui est
essentiel, ainsi, peut-être s’approche-t-on d’une certaine forme de radicalité. De
plus, Franck Lloyd Wright et Louis I. Kahn sont connus pour leur approche
essentialiste des choses. Un questionnement sur la manifestation la vérité, des
questions existentielles sur l’architecture, la nature des choses, et ce que veulent
être les matériaux. Ces trois architectes, constructeurs de génie, établissent trois
nouveaux modèles des procédés constructifs qu’ils emploient à travers les outils de
leur époque. La transgression de ces trois procédés constructifs adaptés à l’auto-
construction pourrait amener à parler d’une recherche d’un néo-vernaculaire. Pour
cela, il convient de préciser ce qu’est le vernaculaire dans l’architecture. Jacques
Lucan, architecte, historien, critique et enseignant, introduit la question du
vernaculaire en évoquant notamment des écrits de Bernard Rudofsky, Martin
Heidegger et Le Corbusier.27 Le vernaculaire peut être relatif à des architectures
construites sans architectes et correspondre à des « types » ancestraux inscrits
dans un territoire. Il parait intéressant de déterminer si ces trois constructions sont
vernaculaires ou non, afin de mesurer l’impact de la transgression de ces procédés
constructifs.

26 CNRL. Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales. [en ligne]. 2023, [Consulté le 28.01.2023].

27 LUCAN, Jacques. Habiter. Lausanne, EPFL, 2021. ISBN : 9782889154067, pp 15-32

98
VII.

Photographie
avant montage
© Galerie Patrick
Seguin, 2014

a) La maison 6x6, un manifeste de la construction démontable

La très grande rationalité de la composition prend sa source dans l’essence même de sa mise en
production. En effet, ce que demande la production en série à l’usine, c’est de produire très
rapidement des éléments identiques. Jean Prouvé utilise l’esprit de cette mise en production en
développant des maisons fabriquées à la chaîne. Ce procédé accessible à n’importe qui, permet de
monter une maison en une journée. C’est un paradigme de l’abri qu’un homme se construit avant la
tombée de la nuit. Ce travail de préfabrication à l’usine inscrit ce projet comme un nouveau modèle de
l’abri d’urgence. Il tire parti au maximum des outils de son époque, la machine est ici un accélérateur
de temps et un moyen de mise en série pour répondre au plus grand nombre. On peut qualifier de
radicale son approche dans la mesure où le minimum de temps de construction régit toute la
conception de la maison, et ce minimum est la conséquence de l’urgence et du besoin instinctif de
s’abriter pour se protéger des intempéries. Il ne laisse rien au hasard, tout est prévu et maîtriser pour
un montage répété et rapide. Cette volonté détermine ces choix et ne fait jamais exception,
caractérisant son attitude d’une certaine radicalité dans l’utilisation des moyens de ce procédé
constructif. La scénographie du montage est une illustration contemporaine de ce que peut signifier
s’abriter dans l’urgence. Cette construction se monte comme un meuble, à partir d’éléments qui
s’assemblent parfaitement. C’est un objet parfaitement artificiel, un pur produit de l’homme et du
calcul. Ce projet est un manifeste dans la mesure où il transforme l’image de l’abri. Il est très clair et
didactique à ce sujet, rien n’est ajouté, il n’offre qu’un confort rudimentaire pour un moment
temporaire. Ce projet n’est pas situé, il est fait pour l’homme moderne nomade avec son camion, ou
pour celui qui n’a plus d’abri pour la nuit. Cette petite cabane raconte à elle seule une époque et ses
nouveaux outils. Elle est un objet de la perfection, pré-dessiné et pré-fabriqué hors site. On peut
aujourd’hui acheter cette maison sur Internet, traverser le monde avec, et se poser pour un temps
avant de repartir ailleurs. Ce mobile-home est un nouveau modèle de la cabane produit par la machine
qui correspond à une société transformée par de nouveaux moyens de mobilités. Cette cabane
correspond pourtant bien à un archétype et ne demande pas de qualifications pour la monter. Il est
pour autant difficile de là qualifier de vernaculaire dans la mesure où elle n’est pas associée à un
territoire. De plus, l’extrême facilité du montage n’est permise que par les dessins très précis et un
travail de recherche à l’usine. Cette perfection est le fruit de professionnels, elle n’est pas accessible
aux constructeurs de cabanes vernaculaires associées à un territoire. Ainsi, la maison 6x6 est bien un
manifeste de l’abri d’urgence, un nouveau modèle universel, mais ne correspond pas en tout point à
une recherche d’un néo-vernaculaire.

99
Trois
photographies
du montage
© Galerie Patrick
Seguin, 2014

100
VII.

Photographie
maison en
parpaing
© Inconnu

Photographie
extérieure
Kalil House
© Sean Dungan

b) La Kalil House, un paradigme moderne de la construction à empilement

On remarque chez Franck Lloyd Wright une volonté d’établir un paradigme moderne de la construction
à empilement par bloc. De nouveau, ce procédé parle d’un acte instinctif et archaïque d’un homme qui
empile des pierres pour se ménager un lieu. L’architecte utilise ce procès sans concessions dans
l’entièreté de la maison. En se questionnant sur la nature de ce procédé, il trouve une manière de le
répéter à l’horizontale. Il cherche l’unité de son architecture organique à partir du module et de la
manière dont on l’assemble. Ces blocs remplissent des fonctions de structure et de second-œuvre
dans l’entièreté de la maison. Cette approche radicale, sans concessions et obstinée, différencie cette
construction des autres maisons construites en blocs maçonnés. Il tire parti au maximum des
possibilités du procédé et l’adapte à ses théories de l’architecture organique. Il trouve une manière
d’obtenir une toiture plate en débord afin d’obtenir une ombre qui met en relation la construction avec
le sol. Il fait rentrer le paysage à l’intérieur par la transparence des blocs vitrés. Dans les angles, les
blocs n’ont pas d’arête, il veut briser la boîte et dilater le vide intérieur vers l’extérieur. La parfaite
harmonie entre le tout et les parties correspond également à ses théories de l’architecture organique,
une construction doit croître dans une logique d’unité, constituée de plusieurs éléments. C’est dans
cet esprit qu’il intègre les meubles pour ne pas perturber l’unité. Le dépôt de brevet pour ces
nouveaux blocs de ciment avait pour objectif de généraliser cette nouvelle manière de construire avec
des parpaings de ciment. La série des « Usonian automatic House » transforme le modèle de la
construction parpaing qui était jusqu’alors banalisé dans un archétype de la maison à toiture à deux
pans et à petites ouvertures. Franck Lloyd Wright montre la poétique de l’expression de l’empilement
de ces pierres modernes, produite à la chaîne. Cette maison est vernaculaire dans la mesure où les
blocs sont produits localement par le maître d’ouvrage lui-même, elle est donc bien relative à un
territoire donné. De plus, sa mise en œuvre est relativement accessible à des non professionnels, bien
que la proportion des blocs est à préciser. Ainsi, par ce nouveau modèle de la maison à empilement, la
Kalil House s’inscrit dans une recherche d’un néo-vernaculaire. Elle offre une multitude de possibilités
d’assemblages et demande peu de savoir-faire manuels. Une maison organique de Franck Lloyd
Wright est maintenant accessible au plus grand nombre.

101
Photographie
intérieure
© Sean Dungan

102
VII.

Photographie
échantillon angle
© Auteur

c) La Fisher House, un paradigme du Balloon Frame

Louis I. Kahn livre une approche radicale, presque littérale de la construction Balloon Frame. Elle
correspond comme pour Wright à sa manière de questionner les choses dans son essence et de
chercher une certaine vérité, ce que demande à être les choses. Pour l’entendre, il faut reprendre les
caractéristiques même de cette technique. Elle nous dit notamment que les montants font deux
étages ce qui accélère le montage. L’architecte met alors en place le volume du séjour et de la cuisine
en double hauteur. Cette idée transgresse le modèle de l’époque des constructions balloon qui était
bloqué dans une esthétique coloniale. On retrouve cette volonté d’exprimer la double hauteur,
significative du procédé constructif, dans le dessin de l’enveloppe. Avec l’élément de jointure des deux
planches de bardages qui prend des positions différentes laissant imperceptible une rive de plancher.
De même, dans la gestion de l’angle où ce joint s’arrête et laisse filer l’arête du parallélépipède pour
que l’œil lise un seul volume unitaire et non scindé en deux par le plancher intermédiaire. Le Balloon
Frame est aussi l’association de cadres à faible entraxe constitués d’éléments de faibles sections qui
établissent la rigidité de l’ensemble. Louis I.Kahn tire parti de cette caractéristique en mettant en place
ces fenêtres/meubles qui font partie de la structure. Les sections étant réduites, la hiérarchie des
éléments n’étant pas perceptible, les châssis ou les meubles peuvent être utilisés pour la structure
même de la maison. Louis I. Kahn tire parti de cette technique pour établir très précisément tous les
cadrages associés aux usages domestiques. Dans le même esprit que la maison 6x6, tout est prévu
et maîtrisé, il ne laisse rien au hasard. Tout prend sens et nécessité, on est de nouveau dans une
conception radicale de ce que peut demander à être une construction Balloon Frame. Il établit un
nouveau modèle de la construction balloon avec l’application de ces théories. Il montre que ces
constructions bon marché peuvent avoir une forme canonique moderne, une double hauteur, une
toiture plate, de grand châssis vitrés qui projettent l'intérieur vers l’extérieur. Il ne prend à l’ancien
modèle colonial que son principe constructif et sa cheminée en pierre. Ces maisons légères peuvent
maintenant avoir une épaisseur aussi profonde que des murs en pierre. La Fisher House montre de
nouveaux potentiels de ce procédé constructif. La Fisher House est bien inscrite dans un territoire
donné et utilise ses savoir-faire. Le Balloon Frame fait partie des procédés constructifs adaptés à
l’auto-construction. Il convient donc de dire qu’elle est vernaculaire, ce nouveau modèle de la maison
balloon est inscrit dans une recherche d’un néo-vernaculaire. Il est maintenant possible de construire
soi-même une maison à caractéristique moderne avec la technique du Balloon Frame. Le caractère
proliférant de cette technique et de l’appropriation qu’en fait Louis I. Kahn laisse la possibilité
d’inventer de nouveaux modèles à partir de ce type de construction.

103
Photographie
Fisher House et
la maison
voisine, structure
Balloon Frame
© Jean Marc Weill

104
Conclusion

Pour conclure, il convient de répondre à la question initialement posée ; sous quelle forme les
trois constructions s’inscrivent dans une logique d’économie de moyens de mise en œuvre, et
comment les architectes exploitent au maximum les procédés constructifs ?

Le premier élément de réponse développe le conditionnement des procédés par les limites de l’ouvrier.
Des limites dimensionnelles et de portances qui déterminent la proportion et le poids des éléments
constructifs. Les architectes mettent en place des dispositifs de montage clairs et intuitifs qui
simplifient le chantier. La maison 6x6 va au bout de cette démarche et propose un montage mécano à
la portée de tous.
La forte contrainte des moyens de mise en fabrication explique la méthode de composition qu’utilisent
les architectes. Il s’agit d’une composition par cadre ou par répétition d’un module standard
proportionnel à l’ouvrier. Les trois projets montrent des manières différentes de composer avec des
cadres avec une structure en acier, en bois et en béton. Ce type de composition rationalise la mise en
œuvre et correspond à une logique de mise en production de ces éléments. En effet, pour produire
ces éléments standards rapidement, et pour réduire le temps de chantier, les architectes ont recours à
différents degrés de préfabrication.
Cette idée de produire vite et hors du chantier correspond à ce type de composition par éléments
répétés. Elle nécessite un travail précis dans le dessin et rejette tout aléa sur le chantier. Elle est aussi
un moyen de mise en série à plus grande échelle, de la construction entière pour la maison 6x6, aux
blocs de béton pour la Kalil House. La structure balloon de la Fisher House se rapporte à une logique
de préfabrication plus ouverte. Sa composition par cadre de dimensions et de natures différentes est
proliférante. Elle offre une plus grande liberté que les deux autres systèmes qui sont saturés par le
standard.
Les échantillons construits et le redessin ont donné la mesure de ces réflexions. Ils ont permis de se
projeter à la fois dans les chantiers, et sur la feuille de dessin des architectes.

À l’aide d’écrits théoriques, la recherche à portée sur la manière dont les architectes ont exploité au
maximum les procédés constructifs. Leur exploitation a généré une fusion d’éléments d’ordinaire
séparés. L’organisation quadripartite des éléments de l’architecture de Gottfried Semper, associée à
des procédés de mise en œuvre distincts, ne fonctionne dans aucun des trois projets. Les architectes
réussissent à couvrir plusieurs fonctions avec un seul procédé. Ils remettent en cause par le projet les
théories sempériennes. Il devient difficile de définir ces quatre éléments dans la mesure où ils sont
exprimés par des procédés polyvalents. Cette approche correspond à une logique d’économie de
moyens de mise en œuvre dans le sens où elle simplifie le chantier. Toujours dans cette idée de la
polyvalence, le projet de Louis I. Kahn et celui de Franck Lloyd Wright atteignent une fusion entre le
gros-œuvre et le second-œuvre. De plus, le complexe des enveloppes des trois projets couvre à la fois
des fonctions de revêtement et de structure. La notion de la polyvalence génère des dispositifs
synthétiques et efficaces en termes de moyens employés.
Ces procédés polyvalents produisent une certaine unité matérielle qui correspond à la clarté des
dispositifs mis en place. Les architectes réfutent ce qui n’est pas essentiel et laisse la matière à l’état
brut. Cette approche brutaliste dans l’expression de la matière correspond aussi à une logique
d’économie de moyens, avec chaque élément qui s’exprime dans sa véracité première.

105
La dernière partie montre en quoi les trois objets d’études sont des paradigmes de leur procédé
constructif. Les architectes les exploitent de manière radicale et transgressive. La maison 6x6 est un
manifeste de l’abri construit avant la nuit, on le monte et le démonte facilement sans efforts. Elle illustre
de manière didactique l’intérêt de la préfabrication industrielle proportionnée à l’homme. Ce mobile-
home est un modèle d’habitat temporaire, une construction rapide d’un abri rudimentaire. La Kalil
House tente d’établir un paradigme moderne de la construction par empilement. C’est la mise en
scène de l’expressivité de ce procédé dans les deux plans. Franck Lloyd Wright applique ses théories
de l’architecture organique et transgresse le modèle de construction parpaing de l’époque. Il montre
que ce dispositif à la portée de tous peut offrir de nouvelles qualités spatiales. Louis I. Kahn exploite au
maximum les qualités proliférantes du Balloon Frame et contourne le modèle type. Il met en place un
monolithe de bois à forme canonique moderne avec une double hauteur. Il montre une nouvelle
manière de concevoir ces maisons bon marché qui peuvent alors avoir de nouvelles qualités spatiales.
Les deux maisons américaines tendent vers un néo-vernaculaire dans la mesure où les architectes
utilisent des procédés constructifs locaux à la portée de tous, et contournent les modèles associés.
Le projet de Jean Prouvé pose question à ce sujet car il n’est pas situé. Cependant, l’archétype de la
cabane correspond à des constructions vernaculaires par exemple dans les écrits de Heidegger. La
préfabrication totale et la mise en série de l’objet transgressent les manières de construire ces cabanes
montées par n’importe qui.

Ce travail de recherche, de la construction à la pensée, a permis de mettre en avant des principes de


composition et de production efficaces lorsqu’on parle d'économie de moyens de mise en œuvre. La
recherche de la polyvalence des procédés constructifs et l’approche brutaliste dans l’exploitation de la
matière a enrichit et ouvert le propos. Ces principes de réduction des moyens et de fusion des
éléments, produisent des ensembles synthétiques et unitaires qui révèlent la clarté des procédés.
Projeter dans le dessin ces mises en œuvre contraintes peut être une démarche intéressante pour
arriver à transgresser des procédés constructifs vernaculaires. Les approches et les principes
développés dans ce mémoire donnent des outils conceptuels pour correspondre à une logique de
réduction des moyens, et pour exprimer la poésie de ces procédés intuitifs et accessibles.

Finalement, ce mémoire tente d’introduire une méthodologie conceptuelle et analytique objective. Elle
peut être transposée pour des projets de toutes les époques, et de plusieurs échelles différentes.

106
Coda

Expérimentation, combinaison des systèmes :

Il s’agit ici d’essayer de comprendre dans quelle mesure ces trois dispositifs sont compatibles. La
composition par cadre rend possible de pianoter par le dessin des façades entre les trois projets. Ces
dernières expérimentations par le dessin tentent d’ouvrir l’intérêt de ce mémoire pour le projet.

Expérimentation 1 :

C’est une reprise de la façade de la maison 6x6 par panneaux préfabriqués. Les panneaux sont
composés des modules de la Kalil House auxquels s’ajoutent des cadres de différentes natures
comme pour la Fisher House. Le mélange des trois dispositifs permet de montrer qu’il est tout à fait
possible de puiser les qualités de chacun des projets en un seul. Il s’agit d’un essai abstrait sans
aucune prétention à être un projet de qualité. Cette expérimentation montre cependant qu’il est
possible de sortir de la signification très convenue de la cabane 6x6 avec une vraie relation à
l’extérieur. Elle montre également qu’on peut sortir de la lecture des 6 panneaux en les subdivisant par
plusieurs modules pleins ou vitrés.

Expérimentation 2 :

C’est aussi une reprise de la façade de la maison 6x6 par panneaux préfabriqués. Les panneaux sont
également composés des modules de la Kalil House qui par leur opacité ou transparence, détermine
depuis l’extérieur l’emplacement du mobilier. La troisième illustration montre ces panneaux qui
pourraient intégrer le mobilier et ainsi fusionner les éléments entre eux. Ils sont imaginés en bois pour
des questions de portance. Cette idée de panneaux préfabriqués qui intègrent le mobilier fait penser
par exemple au projet Tétrodon de Jacques Berce et Henri Ciriani exposé en 1971 dans la cour du
Louvre. Mais aussi aux meubles porteurs de la série de Furniture House de Shigueru Ban (1995-2002).

107
Élévation 1
Dessins de l’auteur
d’après les dessins
de Frank Lloyd Wright
et Louis I. Kahn

Élévation 2
Dessins de l’auteur
d’après les dessins de
Frank Lloyd Wright

Panneaux
enveloppe/meuble
préfabriqués
Dessins de l’auteur
d’après les dessins de
Frank Lloyd Wright

108
Photographie
bibliothèque en
cours de
construction
© Auteur

Retour sur une construction personnelle réalisée deux années auparavant :

C’est avec beaucoup de plaisir que je découvre les liens entre mon mémoire et cette
bibliothèque, construite de mes mains en une semaine. Sans formation technique et contraint par le
temps, j’ai inconsciemment établi un procédé constructif de la répétition d’un module dans les deux
plans. Cette répétition a facilité les mesures, la découpe et les assemblages. On remarque sur la
photographie ci-dessus le patron en carton que j’ai utilisé. À partir de ce module adapté aux livres, j’ai
préfabriqué des modules plus grands à la limite de ce que je pouvais porter, on en voit un mis en place
sur la même photographie. Le plafond à caissons a été entièrement préfabriqué et a nécessité l’aide
de deux autres personnes pour le placer en hauteur. L’idée de répéter le module dans les deux plans
permet de redessiner l’espace entre la double hauteur et le linteau en bois du passage vers les
chambres. Cela reprend également le plan en U du socle et encadre la fenêtre qui donne à l’Ouest. Il
permet aussi de cacher le nez de l’ancienne cloison que j’ai choisi de démolir pour faire un lieu
accueillant dans cet étage constitué seulement de pièces d’eau et de nuit. Je n’avais jamais fait le lien
entre cette expérience et mon mémoire, je peux aujourd’hui mieux en parler et comprendre ces choix
intuitifs. Il s’agit bien d’un procédé constructif adapté à l’homme et qui est la répétition d’un module
préfabriqué. Le bois est bien laissé à l’état brut pour gagner du temps. Il y a aussi une certaine
polyvalence du procédé avec la répétition du module dans les deux plans. Cette bibliothèque
correspond à toutes les parties développées dans ce mémoire.

109
Photographie
bibliothèque
© Auteur

Photographie
bibliothèque
depuis l’assise
© Auteur

110
Bibliographie

BANHAM, Reyner. Le brutalisme en architecture : éthique ou esthétique ?. Marseille, Dunod, 1970.


Traduit de l’allemand en français par A. Et P. F. WALBAUM. ISBN : 2863646648, 224 pages. De
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BRESSON, Robert. Notes sur le cinématographe. Paris, Éditions Gallimard, Avril 1995. ISBN :
788487783197, 144 pages.

BROOKS PFEIFFER, Bruce. WRIGHT. Scottsdale, Taschen, 2015. Traduit de l’américain par Thérèse
Chatelain-Südkamp, Lohmar, ISBN : 9783836560481, 96 pages.

CITÉ DE L’ARCHITECTURE ET DU PATRIMOINE. « Quel futur pour l’architecture ? Économie de


moyens versus nouvelle économie » [en ligne]. 2021, [Consulté le 12.10.2022]. Disponible à l’adresse :
https://www.youtube.com/watch?v=ZKybvRI6-bg

CNRL. Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales. [en ligne]. 2023, [Consulté le
17.11.2022]. Disponible à l’adresse : https://www.cnrtl.fr

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l’adresse : https://www.encyclopedie.fr

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Seguin, 2014, [Consulté le 20.10.2022]. ISBN : 9782909187082, Disponible à l’adresse : https://
www.patrickseguin.com/en/wp-content/uploads/sites/2/2020/03/jean-prouve-6x6-demountable-
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111
LLOYD WRIGHT, Franck. Testament. Marseille, Éditions Parenthèses, Septembre 2005. Traduit de
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LUCAN, Jacques. Habiter. Lausanne, EPFL, 2021. ISBN : 9782889154067, 397 pages.

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MATHOUL, Lisa. QUELLE EFFICACITE EN ARCHITECTURE ? : Un concept moteur du projet. Mémoire


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MORSE-FORTIER, Leonard J. « FROM FRANK LLOYD WRIGHT'S USONIAN AUTOMATIC BUILDING


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PROUVÉ, Jean. JEAN PROUVÉ PAR LUI-MÊME. Paris, Éditions du linteau, 2001. ISBN :
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SEMPER, Gottfried. Du style et de l’architecture, Écrits, 1834-1869. Marseille, Éditions Parenthèses,


2007. Traduit de l’allemand en français par Jacques Souillon avec la collaboration de Nathalie
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NOM, Prénom ou ORGANISME. Titre du Site [en ligne]. Date de publication. Date de mise à jour ou de
révision. [Consulté le JJ.MM.AAAA]. Disponible à l’adresse : <URL>

112
Annexes

Dessins de Jean
Prouvé, maison
6x6
Plan de présentation
Ateliers Jean Prouvé
n°9691, mai 1945,
« Pavillon démontable 6x6 »
Galerie Patrick Seguin,
o
Plan de présentation n 9691, mai 1945

2014 © Jean Prouvé


Ateliers Jean Prouvé
“Demountable house 6x6”
Presentation drawing, no. 9691, May 1945

6x9 demountable house - 1944

Notice de
montage, maison
6x9
Brevet n°849.762,
Janv 1940, Galerie
Patrick Seguin, 2014
© Jean Prouvé

Ateliers Jean Prouvé Ateliers Jean Prouvé


« Pavillon démontable. Brevet no 849.762. “Demountable pavilion. Patent no. 849.762.
Notice de montage [étape no 10] », Assembly instructions [step 10]”,
janvier 1940 January 1940
113
Plan général
d’électricité Kalil
House
1955, Site du
Currier Museum of
Art © Franck Lloyd
Wright

Détails, Kalil
House
1955, Site du
Currier Museum of
Art © Franck Lloyd
Wright

114
Coupes, Kalil
House
1955, Site du
Currier Museum of
Art © Franck Lloyd
Wright

Élévations, Kalil
House
1955, Site du
Currier Museum of
Art © Franck Lloyd
Wright

115
Plan RDC Fisher
House, dessiné par
Louis I. Kahn
Document scannés par
Jean Marc Weill en
1999 aux archives de
l’university of Penn ©
Louis I. Kahn

Plan R1 Fisher
House, dessiné par
Louis I. Kahn
Document scannés par
Jean Marc Weill en
1999 aux archives de
l’university of Penn ©
Louis I. Kahn

116
Coupes détail
Document scannés par
Jean Marc Weill en
1999 aux archives de
l’university of Penn ©
Louis I. Kahn

Plan R1 Fisher
House, dessiné par
Louis I. Kahn
Document scannés par
Jean Marc Weill en
1999 aux archives de
l’university of Penn ©
Louis I. Kahn

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