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Le mariage dans le protestantisme, une approche

théologique
Contribution n° 6 Synode sur la famille
Dans le protestantisme, le mariage n’est pas considéré comme
un sacrement. Pourquoi ? Dans ses œuvres latines, Luther écrit
« Les Saintes Écritures ne connaissent qu’un seul sacrement,
c’est le Christ, le Seigneur, lui-même ». En 1520, dans « De la
captivité babylonienne », il évoque toujours ce « seul sacrement
[à savoir le Christ] et trois signes sacramentaux ». Le signe
sacramental nécessite une parole de promesse liée -par
institution du Christ- avec un signe. Dans ce sens, on ne peut retenir que le baptême et la
cène.
La compréhension christocentrique du sacrement l’emporte. C’est le Christ seul qui est
« moyen de salut ». Luther précise en ce qui concerne la compréhension du mariage comme
sacrement : « Puisque le mariage existait depuis le commencement du monde, et qu’il existe
toujours même chez les incroyants jusqu’à aujourd’hui, il n’y a pas de raison de penser que le
mariage puisse être appelé un sacrement de la nouvelle alliance et de l’Église seule. Car les
mariages des pères n’étaient pas moins saints que les nôtres, et les mariages des incroyants ne
sont pas moins des vrais mariages que ceux des croyants – et pourtant, chez eux, ils [l’Église
romaine] ne les considèrent pas comme un sacrement. En plus, chez les croyants, il s’y trouve
des conjoints incrédules qui sont bien plus incrédules que même les païens. Pourquoi alors
appeler ici le mariage un sacrement, mais non pas chez les païens ? »

La position de Calvin est proche de celle de Luther, tout en mettant des accents
différents. Á partir de la conviction que seul le Christ (présent par la prédication) offre le
salut. Dire que le mariage n’est pas un sacrement n’en réduit par pour autant l’importance qui
lui est accordée dans les Églises protestantes qui préfèrent parler de « bénédiction de
mariage ».

Par rapport au droit matrimonial au Moyen Age, de plus en plus édicté par l'Église,
pour Luther, le mariage est un état voulu par Dieu qui relève de l'ordre de la création. Il ne
joue pas de rôle dans l'ordre de la rédemption. De ce fait, il est l'affaire du gouvernement civil.
La conception protestante du mariage s'inscrit sans difficulté dans la pratique de l'antériorité
légale du mariage civil par rapport au mariage religieux. En effet, le mariage est une
institution foncièrement humaine qui aménage un cadre de vie pour les relations privilégiées
d'un homme et d'une femme. Les caractéristiques essentielles de la compréhension chrétienne
du mariage ont été reprises par le droit civil : elles portent sur le lien matrimonial dûment
officialisé, durable, exclusif, librement consenti et ouvert à l'accueil d'enfants. Cela ne signifie
cependant pas que l'État se substitue à l'Église dans les questions du mariage. Mais il est du
devoir de l'État d'exercer sa protection à l'égard du mariage, qui est pour lui une institution qui
le précède.

Le sens de la célébration du mariage

La célébration du mariage à l'église est considérée comme un « casuel », c'est-à-dire


comme un culte pour une occasion particulière. Les chrétiens accompagnent généralement
toutes les phases importantes de leur vie par la prière et la parole de Dieu. Cela vaut aussi
bien pour le début de la vie (culte de baptême) que pour sa fin (culte d'adieu), mais aussi pour
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le début de la vie à deux.
La raison essentielle du mariage religieux réside dans l'échange des engagements en
présence de Dieu, c'est-à-dire dans la conscience de sa responsabilité devant le Créateur et
dans la confiance dans son aide et sa protection, qui se traduit par la bénédiction donnée au
couple. Dans les liturgies de mariage, l'engagement de Dieu vis-à-vis des époux précède celui
des époux, le fond et lui donne sens et avenir. Dans le Nouveau Testament, le mariage est
une image et une forme de réalisation de l'amour du Christ pour l’Église. La célébration
religieuse constitue une aide pour le mariage. Celui qui reçoit de l'amour peut à son tour en
donner. Celui qui se laisse aimer par la « tête du corps », par le Christ, peut aussi essayer de
refléter cet amour dans son couple Dans la bénédiction du couple, Dieu fait don aux époux de
la force du Christ, qui donne son assise au mariage chrétien.

Bénédiction

Luther explique dans son « Livret de mariage pour les pasteurs simples » (1529) que le
mariage bien que ce soit une institution profane « a pour lui la Parole de Dieu » et c’est
pourquoi il faut « honorer cet état divin », « le bénir, prier pour lui et l’orner ». Et un peu plus
loin : [La venue du couple à l’Église] exprime le « grand sérieux » qu’ils y accordent. Car « il
n’y a aucun doute, ils viennent y chercher la bénédiction de Dieu et une prière de tous et non
pas faire une comédie ou des farces païennes. » « Car celui qui désire prière et bénédiction du
pasteur ou de l’évêque, celui-ci combien il a besoin de la bénédiction de Dieu et de la prière
de tous pour cet état dans lequel il débute, car cela se voit bien quotidiennement, combien de
misère le diable sème dans l’état du mariage avec adultère, infidélité, désaccord et toutes
sortes de malheur. » La bénédiction de Dieu est donc envisagée d’emblée par Luther comme
une aide indispensable afin de vivre la vie pour laquelle le couple s’engage.

Jehan-Claude Hutchen

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