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Approvisionnement en eau potable en Afrique: Une technologie appropriée


pour relever le défi.

Book · October 2016

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7 authors, including:

Péguy NDONKOU Ndonkou Richard Domga


University of Yaounde I University of Ngaoundere
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Chicgoua Noubactep Paul Woafo


Georg-August-Universität Göttingen University of Yaounde I
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Some of the authors of this publication are also working on these related projects:

Metallic Iron Filters for Safe Drinking Water in Informal Settlements of Douala (Cameroun): A Pilot Scale Study View project

Household and community water treatment in developing countries - Frontiers In Chemical Engineering (Special Issue) View project

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Afrika & Wissenschaft
Africa & Science / Afrique & Science

Approvisionnement en eau potable en Afrique


Une technologie appropriée pour relever le défi

Chicgoua Noubactep
Editeur
Afrika & Wissenschaft
Africa & Science / Afrique & Science

Avec la contribution de:

Jacob Emmanuel MABE, Docteur en science politique, Docteur et Docteur habilité en philosophie,
Professeur de philosophie à l’université libre de Berlin, Allemagne.

Péguy TCHAKOUTIO NDONKOU, Ph.D en Anthropologie, Enseignant à l’Université de Yaoundé I,


Enseignant à la Faculté de Médecine de l’Université Bengono Touré de Yaoundé, Cameroun.

Richard DOMGA, Étudiant en Doctorat, Département de Chimie Appliquée, Laboratoire de Chimie


Industrielle et de Pollution, Ecole Nationale Supérieure des Sciences Agro Industrielles (ENSAI),
Université de Ngaoundéré, Cameroun.

Nadège GATCHA-BANDJUN, Étudiante en Doctorat, Département de Chimie, Université de Maroua,


Cameroun.

Chicgoua NOUBACTEP, Professeur Associé (PD Dr. rer. nat.) en Hydrogéochimie, Département de
Géologie Appliquée, Université de Göttingen, Allemagne

Jean-Bosco TCHATCHENG, Maître de Conférences en Génie Mécanique, Département de Chimie


Appliquée, Laboratoire de Chimie Industrielle et de Pollution, Ecole Nationale Supérieure des Sciences
Agro Industrielles (ENSAI), Université de Ngaoundéré, Cameroun

Paul WOAFO, Professeur en Mécanique, Laboratoire de Modélisation et Simulation en Ingénierie,


Biomimétisme et Prototypes, Faculté des Sciences, Université de Yaoundé I, Cameroun
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Approvisionnement en eau potable en Afrique


Une technologie appropriée pour relever le défi

Chicgoua Noubactep
Editeur
Afrika & Wissenschaft
Africa & Science / Afrique & Science

© Africa & Science 2016


Postfach 500 717, 60395 Frankfurt/Main
www.africa-and-science.com

ISSN: 1862-6793
ISBN: 978-2-9808950-9-8
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Cette publication ainsi que tous les articles et images qu’elle contient sont protégés par les droits d'auteur.
Toute exploitation partielle ou complète en dehors du cadre strict autorisé par la loi est interdite et nécessite
une autorisation écrite préalable de l'éditeur. Ceci vaut en particulier pour la reprographie, la traduction, le
microfilmage, l'enregistrement et le traitement dans tout système électronique.
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Table des matières

Préface ……………………….………………………………………..………………….…...……….… page 8


Jacob Emmanuel Mabe

Editorial ……………….………………………………………………………………….…………….….. page 7


Chicgoua Noubactep

La consommation de l’eau et la résurgence des maladies hydriques au Cameroun:


Dilemme entre santé publique et exceptions culturelles ……………………...………..……..…... page 10
Peguy Tchakoutio Ndonkou

Un savoir-faire ancestral africain au service de la société moderne:


La métallurgie du fer à exemple du peuple Matakam …………………………………………..…... page 27
Richard Domga

Evaluation du potentiel des filtres à base de fer métallique pour l’approvisionnement


en eau et la salubrité urbaine: Cas de la ville de Maroua (Cameroun) ………………..……..…… page 37
Nadège Gatcha-Bandjun

L'autonomie dans l’approvisionnement en eau potable:


Une technique de filtration efficace et accessible aux petites communautés……...……………... page 51
Chicgoua Noubactep

Traitement décentralisé de l’eau sur filtres à fer métallique:


Le sentier africain ………………………………………………………………….………..…………...page 57
Chicgoua Noubactep, Jean-Bosco Tchatchueng, Paul Woafo
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NB: Cette publication présente par endroit des conclusions basées sur faits résultats et convaincants, mais qui restent des avis des
auteurs. Nous sommes ouverts toute réaction et critique constructives qu'elles peuvent susciter auprès de nos lecteurs. Voici notre
adresse:

African Development Initiative e.V.


Duisbergstrasse 16
60320 Frankfurt am Main
www.a-d-i.info
info@a-d-i.info
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Préface
Par Jacob Emmanuel Mabe1 [Ce renvoi n'est pas élucidé]

Si l’eau est une ressource indispensable à la vie humaine, alors elle doit aussi servir le développement
économique et garantir le bonheur des nations. À en croire les statistiques au niveau international, près
d’un milliard de personnes dans le monde restent sans accès à l’eau potable. Et en Afrique, malgré
tous les efforts déployés depuis plusieurs décennies, même les pays les plus riches en eau (comme le
Cameroun et la République Démocratique du Congo), ne parviennent pas encore à exploiter leur
potentiel hydrologique de sorte à pouvoir assurer un approvisionnement approprié des populations.
Bien au contraire, les pénuries d’eau qui continuent de sévir surtout dans les zones arides du continent
se sont, de surcroît, accentuées par une démographie sans cesse croissante. Pour faire face à ce
double défi et contrecarrer les incertitudes sur le ravitaillement en eau potable et saine, une nouvelle
politique de management durable est absolument impérative.
Au Cameroun, les ressources hydriques sont certes abondantes, mais inégalement réparties sur toute
l’étendue du territoire. Ainsi il existe un contraste énorme entre le littoral et le sud connaissant une
certaine prospérité en contrepartie de l’aridité presque perpétuelle dans la région septentrionale dont le
cycle hydrologique est caractérisé par une absence de mer, une paupérisation fluviale et une
raréfaction des rivières et des ruisseaux. Aussi, les irrégularités des pluies empêchent non seulement
l’irrigation pour l’agriculture (et entravent même l’évacuation des déchets) au Nord, mais et renforcent
aussi l’impact de la sécheresse sur la pauvreté, la santé, l’environnement et la sécurité alimentaire. En
effet, au vu du nombre élevé et persistant des personnes n’ayant pas accès à l’eau salubre pour la
boisson et les autres usages ménagers, il est peu probable que le Cameroun atteigne son objectif de
garantir sa sécurité d’approvisionnement, sans mettre en application les nouvelles techniques de
traitement de l’eau.
Le présent numéro du journal Africa et Science regroupe des articles rédigés par des chercheurs
Camerounais reconnus internationalement dans le domaine du traitement des eaux. Leurs réflexions et
préoccupations portent sur les solutions à apporter non seulement pour atténuer et éradiquer les
pénuries, mais aussi pour assurer un approvisionnement autonome et autarcique en eau saine au
Cameroun. Il est important de noter que la stratégie développée par ces chercheurs est axée sur les
questions purement techniques. Cependant, leur objectif principal consiste à proposer une technologie
nouvelle et facilement réalisable en Afrique.

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Les auteurs justifient leur choix pour le Cameroun par l’argument habituel selon lequel ce pays serait
l’Afrique en miniature. Possédant presque toutes les formes climatiques et végétatives du continent, le
Cameroun peut effectivement servir comme modèle et inaugurer ainsi le « sentier africain » d’utilisation
des filtres à base de fer métallique. Le savant Chicgoua Noubactep et ses collègues croient aussi bien
à la fonctionnalité innovatrice de système de filtrage qu’à son efficacité pour le traitement et
l’élimination de la contamination à la fois biologique, microbienne et chimique des eaux tant de surface
que du sous-sol. L’introduction de cette technologie serait, selon les auteurs, également d’autant plus
aisée qu’elle ne nécessiterait pas de grands investissements financiers. Le fer étant disponible et
transformé sur place, la fabrication ou production industrielle des filtres à fer ne rencontrerait aucun
obstacle véritable. Enfin, cette technique offrirait d’autres opportunités pour le développement
économique, la création de nouvelles filières industrielles et de nombreux emplois, notamment dans le
domaine de l’épuration, de la distribution et de la gestion des eaux.
La stratégie elle-même est novatrice car elle présente une solution originale, élaborée pour la toute
première fois par des natifs camerounais de l’extérieur en coopération avec les chercheurs nationaux
ouverts à la diaspora. Tous ont compris que même si l’enjeu de l’eau est local, les actions à appliquer
pour résoudre les pénuries dévastatrices dans certaines zones nécessitent une coopération étroite de
tous les érudits Camerounais à travers le monde. Il ne revient donc plus aux coopérants expatriés,
mais plutôt aux experts natifs Camerounais eux-mêmes d’apporter l’aide technique et matérielle
nécessaire pour la production, la gestion et la gouvernance durable de l’eau dans l’ensemble du
territoire camerounais.
Les résultats présentés dans ce numéro sont d’une haute portée scientifique qui se traduit par la
réussite de synthétisation des analyses théoriques et méthodologiques sur les différents des procédés
de filtration des eaux à partir des travaux interdisciplinaires. Les auteurs livrent des analyses
pertinentes qui vont assurément susciter des débats publiques et renforcer la prise de conscience des
problèmes fondamentaux du développement. Il reste seulement à espérer que ces informations
faciliteront tant la bonne gouvernance en eau que la mise en concordance avec les stratégies
politiques et économiques existantes en matière de subsistance et sécurité nutritionnelle.
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Éditorial
Chicgoua Noubactep

Maroua est une ville d’environ 350 000 habitants, située dans l’extrême-nord du Cameroun. En moins
de quatre décennies elle a vu sa population passer du simple au quintuple. L’administration
communale n’a pas été capable de répondre à cette pression démographique en mettant en place des
infrastructures adéquates qui puissent améliorer la condition de vie des populations. La défaillance est
remarquable dans le domaine d’approvisionnement en eau potable notamment. Cette situation est
typique pour plusieurs villes en Afrique au Sud du Sahara. Dans beaucoup de cas on a construit des
barrages et des forages en réaction à l’explosion de la demande en eau buvable. Malheureusement les
barrages et les forages résolvent potentiellement le problème de quantité mais pas forcément celui de
la qualité de l’eau. Les eaux disponibles, tout comme celles fournies par ces deux types d’installations
peuvent êtres polluées par des sources variées, mais qui sont presque toutes étroitement liées à
l’activité humaine: agricole, industrielle, minière ou urbaine. La pollution de l’eau dans les cités
africaines est de nature biologique, chimique ou physique, et est généralement source de maladies
aiguës telles que la diarrhée et le choléra ou même de maladies chroniques comme le cancer.
Le mercredi 28 juillet 2010 est une date historique pour les efforts en vue de l'accès universel à l'eau
potable. Ce jour là en effet, l'Assemblée générale de l'ONU a reconnu l'accès à une eau de qualité et à
des installations sanitaires comme un droit humain. Ainsi, l’accès à des quantités suffisantes d’eau
salubre, à usages personnel et domestique, est un droit humain fondamental universel. L'organisation
internationale proclame que «le droit à l’eau est indispensable pour mener une vie digne. Il est une
condition préalable à la réalisation des autres droits de l’Homme». Même si cette déclaration n’est pas
contraignante pour les Etats membres de l’ONU, son objectif est cependant clair: Il faut favoriser et
promouvoir l'accès universel à l'eau potable. L’initiative de l’ONU est appréciable et peut être
considérée comme l’expression de la volonté politique qui existe au niveau international d’atteindre cet
objectif. Cependant, il incombe à la communauté scientifique mondiale de développer des solutions
technologiques efficaces et économiquement accessibles pouvant permettre d’atteindre ce noble
objectif.
La recherche scientifique a consenti beaucoup d’efforts à la question de la production d’une eau de
qualité, même pour les populations démunies. La liste des technologies mises au point à cet effet est
assez longue. Néanmoins, tout ce que l’on doit regretter c’est qu’on y note l’absence de contributions
africaines. Cet état de choses traduit vraisemblablement une passivité de l'Afrique dans la recherche
de solution à un problème qui plombe son développement socio-économique, et augure en même
temps l'éventualité d'aboutir à des solutions exogènes qui risquent de connaître de problèmes
d'adaptation à l'environnement du continent noir. La raison généralement avancée pour justifier
l'absence de solution africaine est celle du manque de financements. Cependant, si on accepte que la
science n’est rien d’autre que la création de connaissances et que l'activité scientifique devrait par
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conséquent se mener dans toutes les conditions, cette raison devrait être réfutée avec la dernière
énergie. Les résultats obtenus dans des conditions peu favorables peuvent être vérifiés et complétés
dans des laboratoires plus équipés. C’est sur la base de cette prémisse que les travaux présentés
dans cet ouvrage ont été réalisés. Les résultats publiés ici ont fait l'objet de présentations sur plusieurs
tribunes, et notamment (i) aux Journées Scientifiques Africaines organisées annuellement par l’Africa
Development Initiative (ADI e.V.) dans la ville de Francfort en Allemagne, (ii) aux journées culturelles
de l’association Culture et Développement Durable (CDD e.V.) à Göttingen toujours en Allemagne, et
des séminaires organisés à Namur en Belgique par le Comité Afro Européen.
Les contributions regroupées dans le présent ouvrage concurrent à démontrer que les filtres à base de
fer métallique portent le potentiel de résoudre le problème d'approvisionnement en eau potable même
dans les régions économiquement défavorisées en Afrique. La logique du développement de ces filtres
est bien compréhensible: (i) les filtres biosables sont efficaces et recommandés par l’Organisation
Mondiale de la Santé (OMS) pour l’élimination de la contamination microbienne, (ii) les oxides de fer,
qui sont des produits de corrosion aqueuse du fer, sont efficaces pour l’élimination de la contamination
chimique et microbienne, et par conséquent (iii) les filtres résultant de l’amendement des filtres
biosables par des particules de fer métallique devraient avoir la capacité de produire une eau potable
avec un rendement qualitatif plus élevé. Il est à noter que le défi de l'activité de recherche dans le
domaine consiste à mettre au point des filtres efficaces en fonction du degré de pollution et du débit de
l’eau (et donc de la taille de la population à desservir). Au cours des quinze (15) dernières années
plusieurs filtres à fer zéro ont été mis au point et dont au moins deux (2) fonctionnent de manière
durable: (i) les filtres domestiques SONO initialement développés pour l’arsenic au Bangladesh
(Hussam et Munir 2007) et (ii) les filtres communautaires IITB (Indian Institute of Technology Bombay)
couramment installés dans plusieurs dizaines de village en Inde (Chaudhari et al. 2014). Pendant que
les filtres SONO utilisent une matrice poreuse brevetée (2 à 3 kg par filtre), les filtres IITB utilisent des
clous commerciaux (10 kg par unité). Utilisant de faibles masses de fer et de sable, les filtres IITB
produisent environ 3000 L/jour et approvisionnent environ 200 familles et ont une durée de vie de plus
de 5 ans. Ces filtres sont construits par des plombiers et maçons locaux qui n’ont pas eu besoin de
passer par une autre formation particulière. Ces exemples sont des preuves que le projet "d'accès
universel à l’eau potable par les filtres à fer zéro" est bien faisable, notamment avec l'implication des
forces locales.
Ce numéro spécial démontre la faisabilité du projet de manière endogène en Afrique. Le Prof. Jacob
Emmanuel Mabé nous a honoré avec une préface. Le Dr. Péguy Ndonko jette un pan de lumière sur la
place de l’eau dans le quotidien du citoyen Africain. Richard Domga essaye une étude anthropologique
qui culmine sur l’évidence que le matériau pour le filtre (le fer zéro) peut être fabriqué localement. Son
collègue Nadège Gatcha-Bandjun démontre l’utilité des filtres à fer zéro pour l’eau potable et
l’assainissement dans la ville universitaire de Maroua. Les deux dernières contributions sont rédigés
par les trois professeurs ayant supervisé les deux premières thèses de doctorat en terre Camerounaise
(Togue-Kamga 2013, Btatkeu-K 2015). Ils rappellent la faisabilité des filtres à fer zéro en Afrique et
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résument la contribution scientifique décisive des Africains au développement de ces filtres. Ceci est
un appel à contribution ou mieux, une invitation au co-développement.
C’est le lieu de remercier tous ceux qui ont contribué aux efforts réalisés jusque là. Je remercie
Dr. Léonard Jamfa et l’équipe éditorial de Afrique & Science pour l’accompagnement professionnel
dans la réalisation de ce volume. Emmanuel Chimi (Université de Douala/Cameroun) a relu l'ensemble
des manuscrits et amélioré la présentation générale. Que tous les auteurs reçoivent ici mes sincères
remerciements. Ce numéro spécial de Afrique & Science est l'aboutissement de différentes actions
menées sur les huit (8) dernières années en ayant toujours comme fil conducteur l’autonomie dans
l'approvisionnement en eau potable en Afrique. J’espère qu'il encouragera et sensibilisera tout un
chacun à rester à l’œuvre jusqu'à l'aboutissement de cet objectif. Que chacun se sente concerné dans
mes remerciements pour les efforts passés et à venir.
Je souhaite que ce numéro spécial de Afrique & Science participe à la vulgarisation des initiatives
visant à établir les filtres à fer zéro comme système de référence de traitement d'eau à l'échelle
domestique. Cette vulgarisation permettra d'encourager les initiatives au service de la qualité de l’eau.
Chaque citoyen de cette planète est concerné, et je suis convaincu que la communauté scientifique
Africaine poursuivra à grands pas son chemin vers un approvisionnement autonome et une gestion
exemplaire de l’eau.

Rittmarshausen, Juin 2016

Dr. Chicgoua Noubactep

Références [mettre dans le format des autres références]


Btatkeu-K B.D. (2015) : Application du fer métallique au traitement de l'eau : Contribution à l'élimination
d'un micropolluant. Thèse de Doctorat/PhD, Université de Ngaoundéré.
Chaudhari S., Banerji T., Kumar P.R. (2014): Domestic- and community-scale arsenic removal
technologies suitable for developing countries. In: Water Reclamation and Sustainability, S. Ahuja (Ed),
Elsevier Inc., ISBN: 978-0-12-411645-0, pp 155–182.http://dx.doi.org/10.1016/B978-0-12-411645-
0.00007-9.
Hussam A., Munir A.K.M. (2007): A simple and effective arsenic filter based on composite iron matrix:
Development and deployment studies for groundwater of Bangladesh. Journal of Environmental
Science and Health, Part A 42, 1869–1878.
Togue-Kamga (2013): Filtre à eau à base de fer et sable: modélisation, simulation numérique et étude
expérimentale. Thèse de Doctorat/PhD, Université de Yaoundé 1 (Cameroon). (en Anglais)
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La consommation de l’eau et la résurgence des maladies hydriques au
Cameroun: Dilemme entre santé publique et exceptions culturelles
Peguy Tchakoutio Ndonkou

Résumé
Le lien entre les maladies hydriques et la consommation de l’eau polluée n’est toujours pas bien perçu
par les populations. Cet article voudrait montrer comment elles sont confrontées à un dilemme entre la
consommation de l’eau du robinet recommandée (polluée par des conduits d’adduction caducs) et
l’eau des rivières insalubre. Les populations sont toujours à la quête d’une eau de bonne qualité et d’un
état de santé parfait. Cette lecture nous permet de répondre à quelques questions : Quelles sont les
sources d’approvisionnement en eau potable des populations camerounaises aujourd’hui ? Comment
les populations se comportent-elles face à l’accès difficile à l’eau potable ? La privatisation de cette
ressource au Cameroun a-t-elle été bénéfique pour les populations ? Que pensent les populations des
maladies liées à l’eau insalubre ?
Mots clés : Eau, Maladie, Privatisation, Santé, Sensibilisation.

1 Introduction
L’amélioration de l’état de santé des populations reste au centre du projet global de développement des
pays d’Afrique. La sécurité hydrique est une condition préalable de l’existence. Mais cette ressource
devient de plus en plus rare et la quantité disponible est menacée par une croissance démographique
sans précédent. Oswaldo de Rivero (2003 :198) indique que « L’eau destinée à la production
d’aliments, à l’approvisionnement de l’industrie et à la consommation humaine est (…) rare et difficile
d’accès sur la planète. Quatre-vingt-dix-sept pour cent de toute l’eau sur la planète est salée;
seulement 3% est douce et les trois quarts de celles-ci se trouvent concentrés dans des endroits
inaccessibles comme les régions polaires et les glaciers. ». Les déterminants de la pollution de l’eau
sont d’ordre chimique, microbien, animal et humain. Du point de vue humain ou anthropologique, la
petite fraction d’eau douce accessible dans les rivières et les nappes souterraines est de plus en plus
polluée par les excréments humains. Des pratiques culturelles permettent encore aujourd’hui aux
populations d’aller déféquer dans l’eau. Il ressort par exemple dans un rapport d’étude de Célestin
Ngoura (1998) réalisée à l’Extrême-Nord Cameroun par l’État et les bailleurs de fonds que les
populations vont faire leur besoin dans l’eau parce que le gendre ne doit jamais savoir quand et où la
brute fait ses besoins. Les latrines gracieusement mises à leur disposition n’étaient pas jusque-là
utilisés. Face à ce dilemme entretenu entre la production de normes et la prise en compte des
exceptions culturelles, face à la diversité des eaux consommées et la complexité des maladies
d’origine hydrique qu’elles engendrent, les populations cherchent quotidiennement les moyens de

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produire la santé. Quelle eau doivent boire les populations camerounaises afin d’éviter les maladies
d’origine hydrique? Comment se représentent-elles ces maladies?

2 La place de l’eau et de la santé dans les discours politiques


La gestion de l’eau au Cameroun relève de la compétence de plusieurs organismes dont les uns sont
chargés de l’exécution, d’appui technique et de conseils, de la gestion et de l’exploitation du service de
l’eau et les autres du financement, de la recherche et des acteurs non institutionnels. Parmi les
organismes d’exécution, il faut inscrire sur le registre le Ministère de l’eau et de l’énergie. Son rôle est
d’élaborer, de mettre en œuvre et d’évaluer la politique de l’Etat en matière de production, de transport
et de distribution de l’eau, la gestion et la protection des ressources en eau au niveau institutionnel. Le
Ministère de la santé publique quant à lui, veille à la surveillance sanitaire des collectivités, à la
promotion de l’hygiène et de la salubrité de l’environnement. Les organismes de santé n’ont pas
manqué d’intervenir pour l’éradication des maladies liées à l’eau. Ainsi par exemple, lors de la
conférence internationale de 1978 à Alma-Ata en Crimée sur les soins de santé primaires, l’OMS
souligne la nécessité urgente de la communauté internationale, de tous les gouvernements et des
personnels des secteurs de santé et du développement à protéger et promouvoir la santé de tous les
peuples du monde.
Une décade plus tard, on a essayé d’évaluer le degré de réussite des objectifs de cette conférence et il
en est ressortit que l’état de santé des populations dans les pays en développement s’empirait. Les
maladies comme le choléra, la typhoïde resurgissent un peu partout en Afrique. Cela s’explique par
l’échec d’un système. A une époque, la politique de santé était axée sur la gratuité des soins dans les
formations sanitaires. On administrait aux patients des soins sans exiger d’eux une contrepartie. Les
médicaments étaient distribués gratuitement. Cette situation peut se justifier par les nombreuses crises
économiques et le contexte sociopolitique souvent tendu dans ces pays qui vont réduire les montants
des crédits alloués au secteur de la santé. En conséquence, les formations sanitaires publiques
n’auront plus d’excellente réputation d’antan auprès des populations. (Ndonko et Schmidt-Ehry 2000).
De plus, l’explosion démographique de plus en plus croissante va accentuer la situation. Osvaldo de
Rivero (2003:208) l’atteste en ces termes:“ 90% de cette croissance explosive des villes se produit
dans des pays très pauvres, dépourvus de sécurité alimentaire, énergétique et hydrique“. Dans une
étude réalisée par l’Institut National de Statistique du Cameroun en 2011, la population camerounaise
augmente rapidement. Le taux d’accroissement moyen qui était estimé à 1,9% en 1950 et 2,9% en
1987, a été évalué à 2,8% en 2005 […] A ce rythme de croissance, la population doublerait en moins
de 30 ans; en d’autres termes, si ce rythme de croissance se maintenait jusqu’en 2035, le Cameroun
compterait environs 35 millions d’habitants.
Ces problèmes qui n’étaient pas propre au seul Cameroun ont d’ailleurs motivé „ L’initiative de
Bamako“. Ainsi, lors de la 37e réunion régionale de l’OMS organisé à Bamako au Mali (« Initiative de
Bamako ») en septembre 1987, l’UNICEF proposa aux Ministres de certains pays de financer la santé
maternelle et infantile. En 1988, l’OMS complète cette bonne intention en se fondant sur le constat que

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la plupart des populations des pays Africains sont disposés à payer des fortes sommes d’argent pour
consulter des marabouts et des tradi-praticiens (médecins traditionnels) ou des médecins moderne en
privé. Il suffirait de doter gratuitement les centres de santé d’un lot initial de médicaments essentiels.
Ces médicaments seront vendus aux patients et le bénéfice de la vente servira à réapprovisionner les
centres et étendre leurs activités. Jusqu’à ce jour, les politiques de santé au Cameroun sont
entretenues par des mutations profondes qui suscitent des réflexions sur la notion de santé publique et
les facteurs de production de la santé. La politique de la gratuité des soins n’existe plus, elle manque
aux populations, mais les méthodes d’enquête ne manquent pas aux sciences sociales.
Les informations fournies dans cette étude sont issues en partie des enquêtes de terrain qui continue,
menées au Cameroun entre 2007 et 2009 dans le cadre de ma thèse de Doctorat. Les entretiens
directifs et sémi-directifs réalisés auprès des populations du milieu rural (Bangangté) et du milieu urbain
(Yaoundé) au Cameroun ont permit de mener cette analyse.

3 L’explosion démographique et l’accès à l’eau : un déséquilibre visible


La croissance démographique sans cesse en hausse dans les pays en développement n’est pas sans
conséquences sur les ressources naturelles. L’accès difficile à l’eau potable condamne les populations
camerounaises à la maladie et à la mort prématurée. En effet, pour l’ensemble de la population
camerounaise estimée à environ 20 millions d’habitants, la Société nationale des eaux du Cameroun
connue sous l’acronyme SNEC alimente environ 4 millions d’individus (Equinoxe 2005). Plus de 16
millions d’autres n’ont pas accès à l’eau potable. De plus, au Cameroun la population croît sans que le
nombre d’abonnés au réseau d’eau potable suive le même rythme de croissance (Tanawa 2001).
Selon cet auteur, de 1990 à 1997, le nombre d’abonnés de la SNEC devenue CAMWATER, puis CDE
(Camerounaise Des Eaux) entre 2007 et 2008, est passé de 128.250 à seulement 149.530 sur
l’ensemble du pays, soit une augmentation relative de 16,6 %, tandis que la population urbaine a
augmenté de 72 %, passant de 3.900.000 à 6.700.000 habitants. Dans le même temps, le nombre de
bornes fontaines publiques sur le réseau SNEC est passé de 1737 à 257, soit une diminution de plus
de 80 %. C’est d’ailleurs au cours de cette période que les municipalités camerounaises, incapables de
payer les factures d’eau des bornes-fontaines publiques, vont en abandonner la gestion. À partir du
moment où les communes ont été très endettées, les zones périurbaines et les centres urbains se sont
trouvés en difficulté, l’accès à une eau de bonne qualité était devenu difficile et les populations ont
optées de retourner aux anciennes sources naturelles d’approvisionnement. Les zones urbaines et
périurbaines sont les plus en difficulté parce que les concessionnaires de réseaux estiment toujours en
première analyse que les investissements dans ces zones ne sont pas rentables. Dans ces conditions,
le soin est laissé aux citoyens de déterminer par eux-mêmes la qualité de l’eau qu’ils doivent boire.
À Yaoundé particulièrement, la demande des populations est peu analysée et prise en compte par
l’État et les principaux acteurs de la filière eau (Ministère de l’eau et de l’énergie, SNEC, CAMWATER,
CDE…) (Ngwé et Sall 1997). On observe ainsi une inadéquation entre la demande et l’offre qui
contraint les habitants à recourir à des sources d’approvisionnement en eau dont la qualité n’est pas

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garantie. La suppression des bornes-fontaines publiques en 1979 et l’institution de bornes fontaines
payantes en 1990 sont venues accentuer les inégalités d’accès à l’eau. Fort de ce constat, l’État
camerounais optera pour la privatisation du secteur eau. Il a fallu du temps pour la mise en place du
schéma stratégique de réforme du secteur de l’eau et la privatisation de la SNEC. Une dizaine
d’années, émaillées d’étapes décisives. D’abord la nomination d’un administrateur provisoire. Sa
mission était de redonner une visibilité à la trésorerie de l’entreprise et la rendre « vendable » tout en
continuant à assurer le service public de production et distribution de l’eau. Avec la privatisation, les
populations attendaient que les quartiers marginaux « hors réseau » soient alimentés et que cessent
les conflits vécus quotidiennement dans les quartiers précaires dont la particularité de l’habitat est la
cour partagée avec un seul robinet. Ces conflits naissent du fait que les ménages se partagent la
facture d’eau et le coût de consommation s’avère plus élevé, majoré par le propriétaire du robinet qui
dissimule le plus souvent la quittance. La question de la privatisation reste très discutée entre les
acteurs de la vie sociale, d’où la nécessité de mettre sur pied une bonne politique de réhabilitation du
réseau pour favoriser l’accès à l’eau à la majorité des populations camerounaises. On peut tout de
même noter une amélioration au niveau de la qualité de l’eau consommée par les populations avec des
pratiques de pompage souterrain, de filtrage et des ventes des eaux filtrées. Mais l’accessibilité à ces
eaux demeure un problème majeur pour toutes les couches de populations.
Face à de telles situations et d’après les études déjà réalisées ( Sy I. : 2006 ; OMS : 1993), la
prévalence importante des maladies diarrhéiques chez les enfants de 0 à 5 ans à Yaoundé et ailleurs,
maladies essentiellement liées à l’eau s’accentuent et ternissent la qualité de vie et la qualité de santé
des populations. Malgré la privatisation du secteur eau, les populations consomment les eaux de
qualité douteuse et les conséquences du manque d’eau ne pouvaient que favoriser la montée de
maladies hydriques dans un contexte où les rapports des populations à l’eau se combinent avec leur
mode de vie.

4 Les difficultés d’accès à l’eau au Cameroun


L’eau consommée par les populations camerounaises est distribuée par la SNEC. Mais cette
distribution ne couvre pas l’ensemble du territoire national. Et pour cause, l’état du réseau d’adduction
d’eau de la SNEC au Cameroun est obsolète, car depuis les années de l’indépendance (1960), il n’y a
pas eu de renouvellement des infrastructures du réseau, que l’on se trouve en milieu urbain où en
milieu rural. Les raisons qui expliquent l’accès difficile au réseau d’adduction d’eau de la SNEC en
milieu rural sont liées entre autres aux moyens financiers. Les populations affirment avoir la volonté de
s’abonner au réseau, mais leur revenu ne peut permettre à chacun de s’offrir le luxe de l’adduction.
D’autres accusent par contre les prestations des services de la SNEC, notamment le coût
insupportable des prestations pour la grande partie de la population. En zone urbaine, la situation
semble être la même. Les Camerounais qui n’ont pas d’emploi se sentent incapables de payer les
prestations pour une installation des sanitaires par exemple. On peut ajouter à cela les conflits liés au
passage des infrastructures sur le foncier du voisin (Ndonkou, 2009 b).

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Avant la privatisation, le secteur de l’eau au Cameroun était entièrement géré par la SNEC (Société
nationale des eaux du Cameroun) et le Ministère des eaux, des mines et de l’énergie. Selon
l’évaluation d’un technicien des eaux à Bangangté, M X…, 38 ans, chef de Centre SNEC, « le bassin
hydraulique du Cameroun est fourni en eau et le pays à la possibilité d’avoir dix huit mille litres d’eau
par jour et par habitant contre deux mille cinq cents litres pour 100 personnes au Burkina-Faso ». Selon
cet informateur, la principale raison qui excplique cette situation relève de ce que la SNEC n’intervient
que dans 108 centres sur l’ensemble du territoire national. Ainsi, certaines régions du pays ne sont pas
connectées au réseau SNEC dans le contexte d’urbanisation croissante que connaît le Cameroun
actuellement. Les populations continuent ainsi de souffrir du manque d’eau potable. Les distances
entre les ménages et les sources d’approvisionnement naturelles sont longues et insupportables pour
la majorité et les eaux de pluies recueillies pour pallier au manque sont gérées avec parcimonie et
conservées pendant une longue période sans traitement. Elles favorisent ainsi la transmission des
maladies hydriques lorsqu’elles sont consommées.
Les innovations dans le domaine de l’eau ont contribué, cela va s’en dire, à la réorganisation de la
société. La SNEC est une société d’État qui sera par la suite confiée à des concessionnaires. Cette
privatisation n’est pas sans danger pour les populations, car les concessionnaires sont à la recherche
effrénée du profit et n’éprouvent aucune volonté d’offrir un service meilleur. Pour Clément M.
(39 ans) « la privatisation est une erreur de la part du Gouvernement, car un État doit tout faire pour ne
pas privatiser les sources d’énergie et supporter même les charges ».
À Bangangté par exemple, parmi les trois arrondissements que compte le département du Ndé
(Bangangté, Bazou et Tonga), seuls les deux premiers qui comptent quatorze villages bénéficient de
l’adduction d’eau de la SNEC. Dans tout le département du Ndé, et cela depuis 1987, le château d’eau
offre la possibilité de brancher 3 000 milles ménages, mais seules 1 600 personnes sont effectivement
connectées au réseau d’adduction d’eau de la SNEC. Cela s’explique par l’absence d’extension du
réseau d’adduction dans tous les villages et même dans tous les quartiers. Pour avoir l’eau potable, les
populations se débrouillent comme elles peuvent ; soit en payant plus cher le litre d’eau chez le voisin
ou dans les citernes de réserve d’eau, soit en collectant l’eau du puits, soit en retournant simplement
au marécage comme cela était le cas il y a plus de 30 ans. Au centre ville de Bangangté, il existe une
seule borne fontaine privée pour toute la population. Elle est tenue par une femme d’environ 60 ans,
régulièrement absente pour cause de maladie. Sa fille, âgée de 14 ans, quand elle ne va pas à l’école,
passe le reste de son temps à la vente de l’eau potable. Ici, il est interdit de rincer son récipient pour
éviter le gaspillage de l’eau. Elle pense que chaque consommateur doit le faire dès la maison. Les
bénéfices tirés de cette activité permettent de subvenir aux besoins de la famille (nutrition, scolarisation des
enfants, tontine, charges sanitaires). Il arrive qu’à la fin de certains mois, la quittance de consommation
dépasse de loin les économies et la SNEC rompt la distribution pour facture impayée, excluant de ce fait les
nombreux consommateurs de l’approvisionnement en eau.

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4.1 Les eaux consommées au Cameroun
La seconde alternative pour la consommation d’eau potable au Cameroun est l’eau en bouteille. Même si
l’on peut remarquer la vente des filtres et les eaux filtrées vendus dans les marchés locaux camerounais et
sur les axes de regroupement des populations ; ces pratiques réduisent apparemment la pollution des
eaux, mais ne garantissent pas une eau de bonne qualité à la consommation. Le prix des filtres ne sont
pas à la portée de toutes les bourses. Les femmes responsables des ménages ne trouvent pas souvent le
temps nécessaire pour filtrer de l’eau à boire. Les eaux filtrées sont consommées occasionnellement en
contexte de soif et de manque. On trouve une grande variété sur le marché camerounais : Source Tangui ;
Supermont, Madiba, Sawawa, Semme, Sano, Volvic, Volcanique… Le prix d’une bouteille d’eau varie entre
450 Fcfa et 1000f cfa (450 f cfa = environ 80 centimes, 1000f cfa = environ 1 euro 50 centimes). Les eaux
minérales sont douées de propriétés thérapeutiques. Mais elle coûte chère pour les populations qui n’en
consomment que occasionnellement comme atteste cette informatrice, Mme X…, 32, parturiente : « Je
goute à l’eau minérale quand j’accouche, seul le nouveau-né la boit au début de sa croissance parce que
son organisme n’est pas encore solide pour résister aux microbes. Il n’y a que les riches pour boire l’eau
minérale chaque jour ». La consommation de l’eau minérale est la mesure du prestige social. On l’achète
encore pour rendre visite à une femme qui vient de mettre au monde un enfant. Le nourrisson consomme
l’eau minérale dès les 6 premiers mois de sa naissance. L’eau minérale n’est pas à la portée de bourse des
populations camerounaises les plus démunies.
En dehors de ces possibilités d’accès à l’eau propre et des pratiques de filtrages adoptées par les
populations camerounaises, elles s’approvisionnent dans les sources les plus diverses qui ne sont pas
sans danger pour leur santé. Ainsi, on peut noter les eaux en sachets vendues quotidiennement dans les
rues et dans les boutiques. À Yaoundé, on en trouve de toutes marques : Cristalline ; Cristal water,
Sawawa, Aquavita, Golden, Royal, Aquaba, Sweet water, Bosvi, Geca, Africa pure water… Chaque
marque a un message «flatteur», c’est ainsi que l’on peut lire sur des emballages eau minérale
naturelle ou encore eau potable mise en sachet sous conditions d’hygiène et contrôle de laboratoire.
Mais presque rien n’est justifié, encore moins l’identité des producteurs ou l’adresse des unités de
production, ni le siège de ces marques, ni même la provenance de l’eau, ajouter à cela les règles
d’étiquetage qui ne sont généralement pas respectées. Ces sachets d’eau sont mis sur le marché sans
autorisation des autorités compétentes. On en trouve partout à Yaoundé à moindre coût d’ailleurs,
entre 50 et 75 FCFA. Dans les marchés, les établissements scolaires, les stades, sur les places
publiques, à la portée des milliers de personnes qui les consomment au quotidien sans aucune
garantie sanitaire et parce qu’ils n’ont pas toujours la possibilité de se procurer des bouteilles d’eau
minérale. Les réseaux de distribution de l’eau constituent en même temps les réseaux de propagation
des maladies hydriques.
En milieu rural comme en milieu urbain, le reste de la population qui n’a pas accès à l’eau de la SNEC
et à l’eau minérale en bouteille s’approvisionnement dans les puits familiaux le plus souvent creusés à
proximité des latrines. Dans les villages de Bangangté, les populations sont en contact permanent avec
l’eau des rivières, des marigots dans leurs pratiques quotidiennement, ce qui les exposent

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constamment aux maladies hydriques telles le choléra, la typhoïde, la dysenterie, l’onchocercose, la
diarrhée… Face aux maladies liées à l’eau, les populations développent des croyances étiologiques
dont la logique n’obéit pas aux normes scientifiques, lesquelles croyances constituent des obstacles à
la réussite des initiatives de santé et compromettent les grands axes de politiques de santé dans les
pays du sud. Les usages que les populations font de l’eau dépassent de loin le cadre des pratiques de
santé, introduisent à une vision du monde spécifique. Comment comprendre les croyances étiologiques
des maladies hydriques au Cameroun ?

4.2 Les croyances étiologiques des maladies liées à l’eau


D’où viennent les maladies, comment et pourquoi se développent-elles ? Les théories classiques de
causalité sont connues et répondent aujourd’hui avec moins de conviction à ces questions. L’évolution
des maladies suit des stades culturels successifs de la société (Froment 1997). Ainsi, il faut cibler et
préciser au préalable l’environnement d’étude. Dans le cas d’espèce, nous nous situons dans deux
zones en pleine mutation sociale regroupant en son sein un « complexe environnemental » où l’on est
confronté, en milieu rural, à une faible densité de la population parce qu’elle migre vers les centres
urbains. Par conséquent, elle serait moins exposée aux maladies. En milieu urbain, la croissance
urbaine, les coupures intempestives engendrent un stress hydrique au sein des populations. Personne
ne parle en bien des pouvoirs publics lorsque la question de l’eau est abordée.
L’analyse des savoirs populaires, considérés comme un corpus de connaissances cohérent et
systématique propre à un groupe donné permet de comprendre les croyances des populations sur les
maladies liées à l’eau. Cette forme de savoir génère donc des modèles d’interprétation et d’explication
de la maladie au nombre desquels figurent les modèles explicatifs et les réseaux sémantiques. Dans ce
contexte d’étude, les croyances populaires des maladies s’opposent aux considérations biomédicales ;
ce qui constitue un frein à la réussite des initiatives de santé (publique). Le modèle explicatif culturel de
la maladie rassemble les croyances élaborées par un groupe social, lesquelles gravitent autour des
nosologies, des manifestations, de leur évolution et qui conditionnent le processus de prise en charge.
Bien entendu, il ne s’agit pas de la maladie en tant que réalité biologique, mais plutôt d’une vision
particulière de celle-ci qui relève d’un processus de construction socioculturelle. Les réseaux de
significations quant à eux portent le regard dans le continuum d’un élan interprétatif de la maladie sur le
fait qu’il existe une articulation transparente entre le vécu et le savoir en ce sens que, le vécu peut être
créateur de sens. Autrement dit, l’individu malade peut être poussé par son expérience individuelle au
contact avec le déséquilibre physique, à produire une connaissance à la suite des interrogations
suivantes : « Pourquoi moi ? » « Pourquoi cela m’arrive maintenant ? » « Que faire pour retrouver la
guérison ? ». Ainsi, le réseau sémantique est un système de sens élaboré par le malade pour
comprendre et gérer sa maladie. L’exercice auquel nous voulons nous soumettre dans ces lignes
paraît scientifiquement périlleux, car fondé sur des sources orales invérifiables et des faits superficiels.
Ce risque scientifique est calculé dans le but de mieux appréhender l’ethnoscience au sujet des
maladies endémiques d’origine hydrique. Aussi avons-nous adhéré dès le départ aux hypothèses qui

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considèrent les acteurs sociaux non scientifiques comme des producteurs de sens, une production des
savoirs qui comportent certainement un aspect diachronique et synchronique dont on ne saurait
arbitrairement se passer. Que pensent les populations des maladies liées à l’eau dont elles sont
constamment victimes ?

4.4 Les maladies diarrhéiques ou « le ventre qui s’ouvre »


Parmi les maladies endémiques d’origine hydrique identifiées dans les zones d’étude, la diarrhée
s’exprime et s’imprime fortement dans les croyances étiologiques. Les populations pensent que ces
maladies sont indispensables dans la croissance du nourrisson. La diarrhée est par exemple l’une des
preuves du développement normal de l’enfant. Les causes sont loin d’être biologiques, mais portent les
marques de la culture du groupe étudié. Les Bamiléké désignent la diarrhée par le terme
« bam.nè.co’o » ou « koñ bam » (le ventre qui s’ouvre ou qui s’arrache) ou par « bam.nè.lo’o » (le
ventre qui te prend). Néanmoins, les informateurs reconnaissent plusieurs formes de diarrhée. Dans la
majorité des cultures du sud Cameroun, la diarrhée se dit « ntui » pour désigner toute sorte
d’écoulement rejeté par le ventre. Les termes « ntui » des Béti ou « bam.nè.lo’o » des Bamiléké sont
génériques à toutes les maladies qui se manifestent par un écoulement rejeté par le ventre. D’après les
mères d’enfants, les symptômes de cette maladie se caractérisent par les selles liquides et fréquentes,
les yeux blancs, la fatigue et la soif chez les nourrissons. Par ailleurs, plusieurs agents causaux sont
indiqués : aliments mal préparés, saletés, coutumes, fétiches, malédictions... L’ensemble de ces agents
constitue un complexe pathogène. Les facteurs sont extérieurs au corps ou la maladie est introduite
dans le corps (action humaine) dans un environnement insalubre (saleté).

4.5 Les maladies diarrhéiques liées à la poussée dentaire


Pour désigner la maladie diarrhéique due à la poussée dentaire, les Bamiléké utilisent l’expression
«nsóè.mi.cwend.ngúê.i » qui se traduit par « ses dents lui font ». La diarrhée liée à la poussée dentaire
se manifeste par les selles liquides et mousseuses et les blessures des gencives chez le nourrisson.
Cette poussée se manifeste aussi par la rougeur des fesses devenue aussi un nom locale de la
diarrhée ; les Bamiléké le désignent par l’expression « co’.nè.tuèn » et qui se traduit par « Arrache
fesse, enlève fesse ». Il s’agit en effet d’une coloration rouge de la peau au niveau des joues, du cou,
du visage et des fesses. Puisque cette maladie attaque tous les nourrissons, les Bamiléké la désignent
sous le vocable « juê.kua ». «Ju » signifie chose et « kua » veut dire générale, qui attaque tout le
monde, les choses des gens d’ailleurs. Cette maladie attaque le nourrisson dès l’âge de 05 mois selon
certaines informatrices.

4.6 Les diarrhées liées aux rapports sexuels


Dans les croyances étiologiques des maladies diarrhéiques chez les nourrissons, la cause attribuée est
la relation sexuelle des parents pendant l’allaitement. D’après les informations de terrain, les avis sont

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très partagés sur cette cause. Les uns pensent que cette diarrhée arrive quand la mère allaitante
entretient des rapports sexuels avec un homme différent du père géniteur de l’enfant. En conséquence,
la présence d’un sperme autre que celui qui a fécondé la mère, mélangé au sang et aux sécrétions
vaginales pollue le lait maternel. La consommation du lait maternel ainsi pollué et devenue par ce fait
toxique, cause la diarrhée à l’enfant. En outre, les autres pensent que même le père géniteur ne doit
pas entretenir des rapports sexuels avec la femme quand celle-ci allaite. Toutes ces restrictions
soulèvent des débats et des discussions au sein de la société et les enjeux n’en sont pas les moindres.
Ces croyances imposent la fidélité du couple, limite la fécondation de la femme et donc la croissance
démographique et constitue pour une famille une stratégie de planning familial.
Les Bangangté utilisent l’expression « nè.ya’.men » (traverser l’enfant) ou « nè.bé’.nku.men » (casser
les pieds de l’enfant) pour désigner cette diarrhée qui se manifeste par des selles liquides, fréquentes
et sanguinolentes, des vomissements, le ballonnement du ventre… Cette forme de diarrhée attaque
l’enfant, soutient-on, lorsque la mère entretient des rapports sexuels et continue à l’allaiter. Chez les
Samo du Burkina-Faso, les rapports sexuels sont interdits entre la femme et le mari après la naissance
d’un enfant. Dans cette culture, on admet que cet interdit a pour légitimation la volonté de ne pas nuire
à l’enfant au sein, en ne faisant pas courir à la mère le risque d’une conception précoce qui entraînerait
l’arrêt de la lactation. Or, il semble que pendant la lactation, il n’y ait plus de sécrétion de
gonadostimulines par l’hypophyse, donc pas de stimulation ovarienne, pas d’ovulation et en
conséquence pas de risques de nouvelle grossesse, bien que parfois l’hypophyse reprenne son
autonomie, ce qui empêche de garantir à cent pour cent l’impossibilité de concevoir pendant la
lactation. (Héritier 1996)
Mais si l’explication biologique ne trouve pas d’inconvénient quant à l’entretien des rapports sexuels
après une naissance, l’interdit culturel montre que les peuples ont jadis élaboré des interdits pour
répondre aux problèmes liés à leur santé de reproduction. Cet interdit pouvait également permettre de
réguler les naissances et d’élaborer un planning familial qui n’est pas un phénomène nouveau dans les
comportements des peuples.

5 La santé : un concept malade de sa définition


La santé publique est un champ d’action avant d’être un champ disciplinaire. L’objet de cette action est
l’amélioration, la préservation, la restauration, la promotion, voire l’optimisation de l’état de santé de
l’Homme. Les moyens de cette action sont d’ailleurs connus. Il s’agit d’une part, de ceux de l’action
publique en général et d’autre part, d’un certain nombre d’outils techniques tels que le dépistage, la
communication, la vaccination, la prophylaxie, l’assainissement, la surveillance, la formation, la fixation
de normes, le management, la planification, l’organisation des soins, etc. (Dab 1993). En même temps,
cet auteur relève que tout cela était déjà écrit dès 1923 par Winslow lorsqu’il proposa sa définition de la
santé publique qui reste, encore aujourd’hui une des plus complètes, à défaut d’être la plus concise :
« public health is the science and art of preventing disease, prolonging life, and promoting

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physical health and efficiency through organized community efforts for the sanitation of the
environment, the control of community infections, the education of the individual in principles of
personal hygiene, the organization of medical and nursing services for early diagnosis and preventive
treatment of disease, and the development of social machinery which will ensure to every individual in
community a standard of living adequate for the maintenance of health ».
Le concept de santé publique a beaucoup évolué et renvoie de nos jours à différentes acceptions qui
convergent et contribuent ainsi à entretenir une certaine ambiguïté. Discutons d’abord le mot « santé »
qui précède l’adjectif « publique ». L’OMS a proposé une définition sui generis de la santé entendue
comme un état de bien-être total physique, social et mental de la personne (Thebaud-Mony, 1996 ;
Aïach, et Vernazza-Licht, 1996). La définition de ce concept a évolué de telle sorte qu’elle intègre
aujourd’hui la prévention et les soins qui ne sont toujours pas les seuls moyens au service de la santé.
Les amendements de cette définition prennent en considération les lois, les règlements, les orientations
politiques en environnement et en aménagement du territoire. La santé est donc entendue comme
absence de maladie, elle est en relation avec les facteurs sociaux et religieux qui lui donnent tout son
sens.
Mais dans la conception africaine, la santé est l’accord entre l’individu et les ancêtres, les esprits avec
qui il entretient des rapports d’échange et de vie. Être en santé en Afrique, (Ndonkou, 2006) c’est aussi
respecter les transgressions du milieu culturel qui confèrent ainsi un état de bien-être individuel, familial
et social. La santé est une prise en compte de l’analyse des savoirs populaires. Le concept de santé
reste relatif voire subjectif. La maladie quant à elle est un trouble de l’organisme, une perturbation de
l’équilibre physique, biologique et mental de l’individu. La conception africaine de la maladie fait état
d’un appel au resserrement des liens qui existent entre les hommes et les esprits, à une élection
ouvrant l’accès à la carrière de guérisseur ou de devin (Sow 1978). De ce point de vue, la maladie est
un sortilège, elle est basée sur la notion de conflit dans les réseaux de relation structurant l’existence
du patient. Elle fait partie d’un ensemble plus vaste, celui des malheurs de tout genre : infortunes,
malchances, mauvaises récoltes, chômage... Dans les sociétés lignagères, la maladie a fréquemment
valeur d’un rappel à l’ordre social et au resserrement des liens entre les acteurs sociaux.
En outre, associé à la santé, l’adjectif « publique » peut correspondre à, au moins, cinq interprétations :
- l’action gouvernementale dans le domaine de la santé ; -la participation de la population à la
promotion de la santé ; - les services de santé qui ne procèdent pas d’une action au niveau individuel ;
- les actions de prévention, - l’organisation sociale face aux risques sanitaires, etc. Les implicites de la
santé publique qui ne prennent pas en compte le pluralisme préventif contemporain et la dimension du
magico-religieux sont remise à évaluation. (Dozon et Fassin 2001). Il faut aussi lire la montée des
maladies hydriques dans les choix techniques d’accès à l’eau opérés par le passé et leur inadaptation
au vécu et aux représentations des populations, peu prises en compte dans les projets qui se sont
succédés et n’ont pas apporté les résultats attendus (Ndonkou, 2009 a).

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6 Conclusion
La croissance sans cesse de la population camerounaise rend l’accès difficile à l’eau potable parce que
le réseau d’adduction d’eau ne suit pas le même rythme. Ce décalage expose les populations à des
eaux de qualité douteuse qu’elles utilisent chaque jour pour consommer et pour leurs besoins
quotidiens (eaux en sachet, eau de rivière et des puits, eaux de pluie…), lesquelles favorisent la
montée des maladies endémiques (Choléra, dysenteries, typhoïde, diarrhée…). Face aux maladies
liées à l’eau, les populations camerounaises disposent un modèle explicatif lié aux représentations
culturelles qui offre une nouvelle réflexion sur la notion de santé publique. En définitive, la maladie de
l’individu et l’état de santé de celui-ci résulte de la conjonction de multiples facteurs, la production des
normes de santé n’étant que l’un d’entre eux. Les maladies sont en lien avec les contextes
géographique, politique, démographique, socioculturel et psychoculturel qui se mêlent aux facteurs
sanitaires et à l’état des connaissances médicales et nutritionnelles pour influencer, en responsabilités
relatives et complexes, la santé de l’homme. De ce fait, le besoin, celui de formaliser le dialogue entre
les scientifiques d’une part et entre les scientifiques et les décideurs d’autres part explique donc
l’irrationalité du débat sur la santé du point de vue du spécialiste de la santé publique. Il faut donc
expliquer le fossé entre la connaissance et l’action en santé publique, ce qui passe par l’identification
des facteurs associés au poids faible des variables de santé dans le processus de décision (Dab 1993).
Les populations n’ont-elles pas un rôle à jouer dans les pratiques d’évitement des maladies et de la
pollution de l’eau ? L’éducation à la citoyenneté et à l’environnement des populations ne peut-elle pas
réduire le fossé dans les écarts de comportement ?

Références bibliographiques
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Un savoir-faire ancestral africain au service de la société moderne:
La métallurgie du fer à l’exemple du peuple Matakam
Richard Domga

Résumé
L’origine de la métallurgie du fer en Afrique a été pendant longtemps controversée. Il est aujourd’hui
établi que le fer n’a été introduit ni par le ‘conquérant’ Arabe, ni par le ‘civilisateur’ Européen. La
métallurgie du fer appartient à la catégorie dite du ‘système de connaissances endogènes’. Des
courants de pensées récents notent que l’expression ‘systèmes de connaissances’ a une connotation
péjorative. Il s’agit à vrai dire de la technologie ancestrale, c’est à dire de l’application des lois
universelles, de la science universelle. En accord avec la thèse du passé scientifique africain, cet
article donne un aperçu de la métallurgie du fer chez le peuple Matakam du Nord Cameroun et de son
évolution à travers les deux derniers siècles. Il est postulé que le forgeron africain procurera le fer
métallique granulé nécessaire à la construction des filtres pour le traitement de l’eau.
Mots clés : Fer métallique, Fer artisanal, Forgeron, Traitement de l’eau.

1 Introduction
« La vie n’est pas possible sans eau », « Le manque d'eau potable est un problème crucial du 21ème
siècle », « 80 % des personnes privées d’accès à une source d’eau potable vit en Afrique », « 80 %
des maladies des pays en développement sont liées à l’eau : elles font chaque année près d’1,7 million
de morts », «Aujourd’hui en Afrique, 3.800 enfants meurent chaque jour à cause du manque d’eau
potable », « Près de 340 millions d’Africains n’ont pas accès à une eau potable salubre et près de 500
millions ne bénéficient d’un système d’assainissement décent », « Près du dixième des maladies dans
le monde pourraient être évitées en améliorant l’approvisionnement en eau, l’assainissement, l’hygiène
et la gestion des ressources en eau ». Ce sont là quelques slogans véhiculés par les médias.
Il est évident que de nombreuses maladies (choléra, typhoïde, diarrhée) proviennent uniquement de
l’usage d’une eau insalubre. D’autres maladies (fièvre jaune, paludisme) se propagent par
l’intermédiaire des insectes qui se reproduisent dans des eaux insalubres. Il est donc indispensable de
trouver des solutions pérennes qui soient intégrées par les communautés qui en bénéficieront.
Une pareille solution est en cours de développement par la communauté scientifique mondiale, avec
une contribution active de l’Université de Ngaoundéré (Noubactep 2013a, Btatkeu-K et al. 2013,
Kobbe-Dama et al. 2013, Btatkeu-K et al. 2014a, Btatkeu-K et al. 2014B, Btatkeu-K 2015, Domga et al.
2015, Btatkeu-K et al. 2016, Noubactep 2016). Il s’agit de la filtration de l’eau sur des lits contenant le

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fer métallique (Fe0) comme matériau réactif. Dans la perspective d’un emploi généralisé des filtres à
Fe0 pour le traitement d’eau en Afrique, il est impératif de trouver des matériaux abordables ou en
développer soi-même. L’utilisation du fer artisanal (‘fer indigène’) a été suggérée à cette fin (Noubactep
et al. 2009). Cette suggestion a initié un travail sur l’histoire de la forge dans plusieurs localités de
l’Afrique. Cet article se concentre sur le pays Matakam au Nord du Cameroun. Une présentation du
métier de forgeron dans la société Matakam sera d’abord donnée.

2 Le forgeron dans la société Matakam

2.0 Le peuple Matakam


Le peuple Matakam ou Mafa est une fraction du grand Peuple Kirdi. Pour le mulsuman Fulbé, un kirdi
est un impur, mécréant, paganiste, païen, croyant aux esprits surnaturels. Quoique les chrétiens soient
membres de cette famille païenne, kirdi désigne tous les peuples des régions de l'Adamaoua, du Nord
et de l'Extrême-Nord du Cameroun qui n'étaient pas musulmans en 1924 (ou en 1960, date de
l’indépendance du Cameroun). Certains groupes comme les Fali, les Guiziga, les Moundang ou les
Mousgoum ont été plus ou moins convertis à l’islam sans que cela porte atteinte à leur fonds religieux
animiste. Cependant, dans le jargon politique Camerounais, qu'un (descendant) kirdi de 1924/1960 soit
devenu chrétien ou mulsuman, il reste kirdi. Les grandes familles kirdi sont: Baya, Dii, Fali, Guidar,
Guiziga, Mada, Matakam/Mafa, Massa, Mofou, Moundang, Mousseye, Namchi, Tikar, Toupouri, Zoulgo
(Martin 1968, Baskouda 1993, Melchisedek 2011).
Les rapports sociaux chez les kirdi sont toujours régis par des inégalités statutaires (castes, classes
d’âge, sexe). Le modèle de production consacre l’économie de subsistance. Jusqu’à l’introduction de
l’économie de marché, les clivages riches/pauvres étaient inconnus. L’autorité et le pouvoir restent
ouverts et disséminés à travers des unités territoriales réduites consacrant le caractère résiduel de
l’organisation politique et administrative dite païenne. En dehors de ces quelques traits fédérateurs, les
kirdi sont une population très hétérogène surtout sur le double plan linguistique et géographique. Les
kirdi parlent des langues distinctes, habitent des espaces hétérogènes (massifs montagneux, plaines).
Les Mafa ou Matakam sont des kirdi montagnards (Houli 2006, Melchisedek 2011).

2.1 Un citoyen entièrement à part ?


Pour comprendre le rôle du forgeron dans les sociétés africaines, il faut d’abord se rappeler que la
terre (le sol) est sacrée selon la vision africaine du monde. Est impur celui qui a le droit exclusif
d’agresser la terre. Celui-ci a aussi des pouvoirs particuliers. Le forgeron avait acquis le droit de
creuser la terre pour miner la matière première pour la métallurgie. Dans certaines sociétés, ce
privilège s’étend à l’enterrement des morts.
Chez les Matakam, les familles de forgerons forment un groupe bien à part. Généralement,
ces familles constituent jusqu’à 20 % de la population (Zra 1993) et habitent hors du centre
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du village. L’endogamie est pratiquée dans les familles forgerons Matakam. Le chef des
forgerons est une personnalité importante. Il est craint, respecté mais pas honoré car
toujours tenu à l’écart, du fait justement de son ‘impureté innée’. Le forgeron joint le plus
souvent à ses activités de créateur d’instruments, des connaissances spirituelles (voyance,
fétichisme et sorcellerie).
Martinelli (1998) précise que : « si le forgeron doit intervenir au cours des discussions, ce n’est en
principe que comme modérateur pour rappeler les participants à l’obligation de véracité et reformuler
les arguments en un sens positif. Le refus de conciliation est considéré comme un manquement grave
au respect dû au forgeron ».
Le forgeron donne une éducation particulière à sa progéniture. On prête aux fils de forgerons
une intelligence au dessus de la moyenne, un courage exceptionnel et une bonne maîtrise
de la pharmacopée traditionnelle. Malgré ces aspects positifs, la vision selon laquelle le
forgeron nait impur persiste. Les forgerons ne peuvent boire dans la même calebasse que les
autres membres de la communauté.

2.2 La noblesse du forgeron Matakam


Etant un agent du fer et du feu, le forgeron est indispensable dans la vie du peuple Matakam. Il
représente une autorité sociale réelle, tirant sa légitimité des traditions en vigueur. Le forgeron est
considéré comme créateur de vie et de force. Au delà des frontières du pays Matakam, dans la région
située au sud du lac Tchad, les forgerons ont d'autres fonctions que celle de la création des
instruments. Le forgeron est tour à tour fossoyeur, devin, guérisseur et parfois aussi responsable
religieux. En sa qualité de leader religieux, le forgeron dirige certaines fêtes, en particulier les
cérémonies d'initiation ou de circoncision. Le forgeron était la seule personne habilitée à circoncier.
C’est entre l’âge de 15 à 17 ans que le jeune garçon est circoncié. A cet âge débute l’apprentissage du
métier de la forge.
Les pouvoirs du forgeron peuvent contre-balancer ceux des doyens de la société (les plus âgés), ceux
des prêtres des ancêtres ou même des chefs de village (Wente-Lukas 1977). Podlewski (1966) avance
l'hypothèse selon laquelle pour les Matakam la tâche de fossoyeur était première. Les forgerons
avaient l’exclusivité de (i) creuser les tombes, (ii) habiller les morts, et (iii) les enterrer. La tâche liée au
génie du fer ne venait qu'en seconde position. Ainsi, 72 % des forgerons considérés dans les
statistiques de Podlewski (1966) forgent et enterrent en même temps, 24 % ne forgent plus mais
enterrent encore. La femme du forgeron avait, elle aussi, une position particulière.
Chez les Matakam, la femme du forgeron avait le monopole de la commercialisation des poteries et
était très souvent sage-femme.

2.3 Le forgeron Matakam, philosophe naturel

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Dans le cadre de la philosophie naturelle (ou universelle), la théorie des quatre éléments est une façon
conventionnelle de décrire et d'analyser le monde. Les composantes expliquant la formation de
l'univers, sont la terre, l'eau, le feu et l'air. Ces quatre éléments correspondent exactement aux
instruments quotidiens du forgeron. Le feu des anciennes forges étaient remplis de terre; la
combustion du charbon était activée par le soufflet (oxygène de l'air); le fer était finalement trempé
dans un baquet d'eau.

Symboliquement, la réunion du couple air-feu, avec le couple terre-eau, suggère la création. Puis
individuellement, chacun de ces éléments symbolise une recherche de la vie, l'éloignement de la
maladie et de la mort. La terre est source de vie, protectrice contre toute force d'anéantissement. L’eau
est un moyen de purification et de ressourcement, une source de régénérescence. Le feu symbolise la
purification: on incendie les champs pour qu'ils se parent ensuite de nature vivante. L'air, souffle
nécessaire à la subsistance des êtres, purifie et éloigne le mauvais. Il n'est donc pas surprenant que le
maître de la forge soit soigneur, puisqu'il passe son temps au centre d'une activité qui respire la vie; et
le symbolisme qui se dégage d'un tel lieu met instinctivement le malade en confiance, lui qui est à la
recherche de l’énergie vitale, de la vie.

2.4 La forge comme un sanctuaire


Les forgerons Matakam fabriquent des objets destinés à lutter contre les forces maléfiques (Martinelli
1995). Le forgeron était un « héros civilisateur » et porteur des changements, et plus prolifique
surtout dans la fabrication des outils agricoles et les ustensiles de cuisine. La forge était un lieu sacré
et hautement symbolique au sein duquel on ne s’insulte pas ni ne se bat. Ce lieu était si sacré que
même les criminels qui y trouvaient refuge ne pouvaient pas être poursuivis sans l’accord du forgeron
principal ou chef d’atelier. Il est facile de faire un parallèle avec l’enceinte de l’église chrétienne en
Occident où des demandeurs d’asile (par exemple) trouvent temporairement refuge.

3 L’industrie et le marché du fer

3.1 Production du fer


Les forgerons et les hommes de son lignage quittaient le village à la recherche des gisements de
minerais de fer pour effectuer des opérations d’extraction et de fonte du fer. Ils construisaient et
remplissaient le four pendant deux à trois jours de granites, puis le couvraient avec des morceaux de
bois en le laissant allumé pendant des jours. Une fois la fonte obtenue, les scories étaient séparées du
fer, ce dernier était coupé en plusieurs morceaux pour le forgeage.
Chez le peuple Matakam, comme dans bien d’autres sociétés africaines, on pouvait pratiquer la
forge et être spécialiste de l’utilisation du fer, sans rien connaître du minerai. On pouvait
inversement être maître des techniques de prospection minière et de réduction du minerai sans
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connaître de la forge avec une conscience des limites allant jusqu’à l’exclusion de l’autre (Martinelli
1995).

3.2 Utilisation du fer


Le forgeron était considéré comme le père de la révolution agricole car il concevait et perfectionnait les
outils indispensables à l’essor de l’agriculture (Martin 1968, Lyaya 2013). Le forgeron était chargé de
réfectionner les objets usés, cassés ou troués. Il était comme un créateur et promoteur de la beauté et
du confort, un véritable styliste. Il fabriquait des objets de toilettes et des parures. Les parures en
particulier marquaient des distinctions sociales. Les dignitaires les arboraient du fait de leur rang
social et quelques personnes nanties, des fois avec autorisation explicite, se les offraient. Le forgeron
procurait l’arsenal de la chasse (flèches, fusils, poudre) et de la pêche (hameçons) mais aussi le
matériel de guerre (sagaies).

3.3 Commercialisation du fer


A l’époque pré-coloniale, le commerce du fer, faisait l'objet de circuits particuliers. La fonte du fer se
pratiquait dans toutes les g r a n d e s c o m m u n a u t é s h u m a i n e s ( villages, régions). La qualité de
fonte différait de localité en localité en fonction de la matière première disponible. Les besoins en fer
n'étaient pas toujours couverts de manière autarcique. Certaines localités surproduisaient le fer ou
avaient de la fonte d’une meilleure qualité. Des courants de circulation du fer existaient entre
différentes communautés villageoises plus ou moins éloignées les unes des autres. Par exemple, les
Magoumaz, Ziver et Chougoule qui manquaient de fer allaient se ravitailler à Mabass. Magoumaz,
Ziver et Chougoule sont des villages Kirdi voisins du Nigeria. Mabas est situé au bord d’une falaise où
l’on a une superbe vue panoramique sur la vaste plaine nigérienne. II y avait donc apport extérieur de
fer dans ces villages par l'intermédiaire des forgerons de Mabass. Le fer, troqué contre des produits
vivriers ou de l'élevage, était livré sous forme de barres plates (douval), longues d'une quarantaine de
centimètres et larges de trois (Zra 1993). Le prix de ces barres allait d'une poule à une chèvre,
selon l'état de saturation du marché (la loi de l’offre et de la demande). Un bon moyen de se procurer
des barres de fer était d’en faire une composante de la dot. Le père de la fiancée pouvait ainsi
recevoir du bon fer de Mabass sans devoir s’y rendre.

4 La métallurgie du fer
L’exploration des gisements de fer était un savoir de la caste des forgerons. Une fois
l’étude de faisabilité de l’exploitation achevée, des forgerons creusaient la terre pour récolter
les minerais. Le fer lui-même était extrait dans des dispositifs semblables aux « hauts fourneaux »
modernes. Le feu de combustion était attisé à l'aide d'un soufflet en peau d'animal.
L ’ o x y g è n e d e l ’ a i r é t a i t introduit dans le haut fourneau pendant plusieurs
heures. Ensuite l’on récoltait le fer fondu et le refroidissait pour obtenir des blocs de fer.
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Ces blocs seront de nouveau fondus découpés pour faire des barres ressemblant à l'os du
fémur (humain). Cette barre servait de monnaie, une monnaie qui s'intégrait à tous les circuits
correspondant aux différents types d'organisations économiques de l'époque (Martin 1968). Les
barres de fer étaient également livrés comme matière première aux autres forgerons qui en
fabriquaient divers objets (aiguilles, bracelets, cache-sexe féminins, chaines, colliers,
couteaux de jet, faucilles, haches, houes, pointes de flèche). Le rôle essentiel du fer dans la
société africaine précoloniale résultait de sa double fonction: (i) une fonction de monnaie (ii) une
fonction en tant que moteur de l’agriculture, chasse, défense et pêche.

4.1 Fer ‘‘made in Africa’’


Les forgerons des Monts Mandara alimentaient le marché montagnard et celui de la plaine: Bornou,
Sultanat du Mandara, Peul. Les populations de la plaine reconnaissaient la supériorité technologique
des « païens montagnards » dans la production du métal et préféraient s'en procurer chez eux. Ceci
prouve l’origine endogène de la métallurgie du fer en Afrique. Il faut se rendre à l’évidence que
jusqu’en 1960, il y avait des villages montagnards Mandara qui vivaient « coupés » du reste du monde.
Les montagnards acceptaient d'autant plus volontiers le marché qu'en échangent ils recevaient
différents types de biens dont le sel et les étroites bandes de tissus de coton appelées gabak. Les
explorateurs Denham (1822-1824) et Barth (1851-1852) présentent la chaine du Mandara comme le
fournisseur principal du royaume du Bornou en fer au XVIIIe siècle (Martin 1981).

4.2 Le forgeron et l’arrivée des européens


Le forgeron africain était une personnalité avec un rang enviable. Il était fier de sont métier très utile
pour les domaines clés de l’économique, l’esthétique et de la défense. Il exerçait une science divine et
avait une autorité reconnue grâce à son travail et son dévouement.
Avec l’arrivée du colon européen, le forgeron africain a perdu son prestige, il est dépersonnalisé. Il
part perdant dans une compétition introduite par un système qu’il ne maîtrise pas. Il n’est plus
respecté par les hommes qu’il servait avec tant d’abnégation. Pire, avec l’introduction de l’économie
des marchés, il doit changer de métier pour assurer sa survie. C’est ainsi que le scientifique du fer se
retrouvera en train de faire les petits métiers, comme commis de l’administration coloniale quand il
n’est pas tout simplement cultivateur des produits d’exportation (arachide, coton).
La technologie du fer a connu une réelle décadence tant au niveau de l’exploitation, du traitement et
de la production des outils. Ce qui a finalement entraîné des incidences graves sur le processus de
transformation des sociétés africaines (Wente-Lukas 1977, Muramira 2006). La fonte du minerai de fer
a décru depuis l'arrivée des européens et, pendant les deux dernières décennies, le travail créatif de
réduction du minerai a été progressivement abandonné au profit de l'utilisation du fer de récupération
importé, forgé à nouveau pour d'autres besoins (Martinelli 1998). Refondre le fer industriel pour en
faire la limaille nécessaire pour la construction des filtres à eau pourra bientôt redonner au forgeron
32
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africain sa noblesse d’antan !

4.3 Le parchemin du forgeron Matakam


Chez les Matakam on note une dynamique réelle en matière d’innovations techniques dans le travail
du fer. La conception et le dimensionnement des fours ont subis une évolution notoire et assez bien
documentée (Martinelli 1995). Les fours anciens produisaient des quantités limitées de métal à forte
proportion d’acier. Les fours contemporains étaient destinés à la production intensive du fer doux. La
mise au point d’autres formes de fours équipés de soufflets était la suite logique de cette révolution
(Martinelli 1995).
Le four de forgeron Matakam ne se trouve apparemment nulle part ailleurs en Afrique. Ce four est
construit de sorte que l'air soit envoyé de haut en bas à l'aide de soufflets. Un long conduit d'argile,
placé à l'intérieur du four, envoie de l'air déjà chauffé sur le charbon de bois et le minerai, permettant
ainsi d'atteindre plus rapidement une assez haute température. Chez les Matakam, les instruments les
plus importants sont la pince en fer avec laquelle est tenu le morceau de fer à travailler, une grosse
enclume en pierre et diverses masses avec lesquelles le fer est battu ; ces dernières, dans tous les cas
connus, sont constituées de pierres plus ou moins volumineuses.
La présentation qui précède révèle que les forgerons Matakam sont les vrais ‘créateurs de fer
métallique’. Curieusement, des membres de leurs familles et les forgerons eux-mêmes souffrent et
meurent de maladies hydriques (amibiase, choléra, diarrhée, dengue). Des progrès récents indiquent
que le forgeron Matakam pourra bientôt contribuer à prévenir toutes ces maladies et veiller à un
meilleur environnement. La raison est simple : le rôle du fer métallique dans la production de l’eau
potable et l’assainissement de l’environnement a été démontré (Hussam et Munir 2007, Noubactep et
al. 2009, Noubactep 2013a, Noubactep 2013b, Neumann et al. 2013).

5 Fer métallique et traitement de l’eau


Le fer métallique est un matériau approprié pour le traitement de l’eau par filtration. Il a été utilisé avec
succès dans diverses régions du monde pour élimer la pollution par l’arsenic (Hussam et Munir 2007,
Neumann et al. 2013), ainsi que par une variété de polluants comprenant les fongicides, nitrates et
pesticides (Noubactep 2013b, Neumann et al. 2013). Des travaux récents ont établie l’équation
universelle du filtre à fer (Rahman et al. 2013, Domga et al. 2015, Ndé-Tchoupé et al. 2015, Noubactep
2015, Tepong-Tsindé et al. 2015). Cette équation sans dimension, basée sur le remplissage de la
porosité initiale d’un lit granulaire par le processus expansif (augmentation de volume) de la corrosion
du fer, indique que la proportion volumétrique dans un lit filtrant ne doit guère dépasser 60 %. Bien plus
les filtres les plus durables ne contiendront qu’environ 25 % de fer. Pour la réalisation de ce concept,
des études sont en court pour caractériser l’influence des paramètres tels que la taille relative des
particules (e.g. fer et sable), l’origine du fer et sa composition métallographique, la vitesse
d’écoulement de l’eau et l’épaisseur du lit filtrant (Btatkeu-K. et al. 2014a, Btatkeu-K. et al. 2014b,
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Africa & Science / Afrique & Science
Phukan et al. 2015, Phukan et al. 2016, Btatkeu-K. et al. 2016). Au cours du processus de filtration, les
polluants sont éliminés par adsorption, co-précipitation et filtration.
Le forgeron africain peut être au centre de la recherche conduisant aux filtres à eau en fabriquant des
matériaux nouveaux ayant une réactivité égalant ou dépassant celle des produits actuellement
commercialisés. Il peut également réduire des matériaux existants comme par exemple le fer à béton
en granules de moins de 3 mm qui seront testés pour leur efficacité au traitement des eaux. Un
troisième aspect sera la création des matériaux composites poreux dont l’aptitude à être réactive à
long terme a été prouvée dans les filtres SONO (Neumann et al. 2013, Rahman et al. 2013, Noubactep
2015).

De ce qui précède, il est évident que l’utilisation généralisée des filtres à fer métallique pour le
traitement de l’eau en milieu rural sera facilité si le forgeron africain est intégré (en tant que partenaire)
dès la phase de la recherche. Cette tâche incombe à l’Université Africaine qui a le devoir de lier la
science fondamentale au vécu quotidien de la population. Quand le forgeron de Mabass saura à quoi
sert le fer qu’il forge et que les étudiants de Accra, Buéa, Maroua ou Ouagadougou sauront à quoi sert
le ‘petit forgeron’, l’africain cessera progressivement de croire que la Science est ‘la chose des blancs’.
Ce réveil est indispensable pour un nouveau départ, pour la Renaissance Africaine.

6 Conclusion
Le forgeron Matakam jouait un rôle complexe dans la société ancestrale. Son rôle débordait
largement les fonctions purement techniques. Ses tâches spirituelles é t a i e nt également
essentielles pour la cohésion de la société. Ces véritables ‘créateurs de fer métallique’, joueront
bientôt un rôle essentiel dans l’approvisionnement en eau potable et l’assainissement tant en milieu
rural qu’en milieu urbain. Le forgeron africain de l’an 2015 ne sera pas nécessairement désigné par
son origine clanique/familiale. Il est espéré et vivement souhaité qu’une classe scientifique africaine se
penche sur l’histoire de la métallurgie du fer en Afrique, en Inde, en Occident et ailleurs, pour créer
partout les conditions de production à l’échelle locale des matériaux appropriées pour le traitement de
l’eau disponible. Une pareille entreprise aura le double avantage (i) de concilier modernité et tradition
au service de la population africaine et (ii) d’éliminer l’esprit de classe bourgeoise qui détourne toutes
les couches africaines du devoir (ancestral) de solidarité.

Remerciements
Mes sincères remerciements vont à Dr. Chicgoua Noubactep (Université de Göttingen, Allemagne)
pour la lecture critique du manuscrit.

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Africa & Science / Afrique & Science
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Africa & Science / Afrique & Science

Evaluation du potentiel des filtres à base de fer métallique pour


l’approvisionnement en eau et la salubrité urbaine: Cas de la ville de Maroua
(Cameroun)2
Nadège Gatcha-Bandjun
Résumé
La région Extrême-Nord du Cameroun est la deuxième zone la plus peuplée du pays. L’accès à l’eau
potable y est très limité. L’insalubrité généralisée, l’absence d’assainissement et l’abondance des
structures polluantes (artisanales, industrielles et sociales) représentent des sources permanentes des
déchets toxiques. La consommation continue d’une eau de mauvaise qualité est à l’origine de la
prolifération des maladies hydriques, et du choléra dont la dernière grande épidémie date de 2010.
Pour faire face à cette situation, deux principales mesures ont été adoptées par les pouvoirs publics en
vue d’améliorer la qualité de l’eau: (i) l’adduction d’eau potable par le réseau national de distribution et
(ii) la mise à la disposition des populations de quelques forages. Cependant, considérant le niveau de
paupérisation des populations et le nombre réduit des forages installés, ces mesures seront de portée
limitée face à l’ampleur du problème. Cet article présente une solution alternative envisageable pour
toute région présentant le même profil hydraulique que l’Extrême-Nord du Cameroun: L’utilisation des
systèmes filtrants à base de fer métallique pour l’approvisionnement en eau. Ces systèmes ont été
démontrés moins onéreux, efficaces, nécessaires et utiles pour améliorer la qualité de l'eau pour
toutes les couches sociales et surtout de manière décentralisée. Il s’agit des filtres domestiques pour
les familles individuelles et des stations locales pour des petites communautés (quartiers, villages).

Mots clés: Choléra, Eau potable, Fer métallique, Filtration, Maladies hydriques.

Une première version de cet article a été publiée en 2013: Voir Afrika und Wissenschaft – NS1- September
2013, ISNN 1862-6793

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1. Introduction
L’eau est un bien social, la santé humaine est directement liée à la qualité de l’eau consommée. L’eau
est un bien économique, nécessaire à la production d’autres biens (agricoles et industriels). L’eau est
directement rapportée à la production de l’énergie hydroélectrique. L’importance de ce bien le lie
automatiquement aux conflits internationaux et régionaux. L’eau potable est cependant un bien qui ne
peut pas être considéré comme un quelconque bien commercial du fait qu’il est indispensable à la vie
et est un don de Dieu. L’eau est un bien environnemental (Forum Mondial de l'Eau 2012).
On utilise l’eau à des fins domestiques telles que la boisson, la cuisine, le lavage, l'évacuation des
toilettes, le nettoyage de la maison. La société l’utilise pour générer une croissance économique
durable et une prospérité par des activités telles que l’agriculture, la pêche commerciale, la production
d’énergie, le transport et le tourisme. L’eau recouvre 72% de la planète terre. Seulement 3% de l’eau
douce est fraîche et seule une fraction est disponible à l'homme (Barhoumi-Andréani et al. 2004,
Nguendo Yongsi 2010). Chaque usage de l’eau contribue à sa pénurie et justifie les efforts consentis
pour protéger les sources encore propres et pour traiter et recycler l’eau polluée. Dans une société où
règne une économie de marché, les services liés à la production de l’eau potable en font
inévitablement un bien économique. Quoique l’eau soit un don de Dieu, les activités humaines ont
rendu plusieurs sources d’« eau naturelle » inadéquates à la boisson. Des services techniques sont
désormais indispensables pour rendre l’eau potable. Ces services demandent (i) un personnel qualifié
pour le traitement et le contrôle de qualité pour l’application des techniques existantes et (ii) un travail
d’innovation scientifique continue pour créer des nouvelles technologies. La question n’est plus si l’eau
doit coûter quelque chose ou pas, mais comment avoir de la bonne eau à un bon prix. Une autre
question fondamentale est qui doit payer ce prix pour l’eau potable, l’individu ou l’état (l’argent du
contribuable)? Répondre à cette question est une issue politique qui ne sera pas adressée dans ce
travail.
La région de l'Extrême-Nord du Cameroun est caractérisée par une faible précipitation annuelle.
L’accès à l’eau en quantité et en qualité est un problème majeur pour la population, car environ 70%
de sa population n’ont pas accès à une eau potable (Pangire 2009). À cette faible disponibilité d’eau
s’ajoutent: i) une absence de systèmes sanitaires et d’assainissement, ii) une absence de systèmes
d’épuration et de vidange des fosses septiques appropriées, iii) une présence quasi permanente des
eaux stagnantes en saison de pluie, iv) une abondance d’eaux usées provenant des structures
diverses. Ces eaux usées sont déversées dans les cours d’eau sans traitements préalables (Pangire
2009, Fonjong et al. 2003).
L'écoulement des eaux usées industrielles ou résidentielles contamine les eaux de surface (pluie,
ruisseaux, rivières, lacs) qui deviennent insalubres et véhicule des virus, des bactéries, des
parasites, des micro-organismes végétaux ou animaux, qui provoquent des maladies graves telles
que : la fièvre typhoïde, les diarrhées, la dysenterie amibienne, le choléra et autres. Ces maladies liées
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à l'eau encore appelées maladies hydriques se propagent par la contamination des systèmes de
distribution d'eau potable, par les aliments et les excréments des personnes ou animaux infectés. Ceci
a été la cause des épidémies de choléra dont la plus récente dans la ville de Maroua est celle de 2010
qui a fait des ravages énormes.
Le choléra constitue un problème majeur de santé publique dans la région Extrême-Nord du
Cameroun. En effet, entre 1996 et 2010, cette région a connu plusieurs épidémies, aussi bien en
saison pluvieuse qu’en saison sèche (Djao et al. 2011). Maroua a été l'épicentre de la dernière
épidémie de choléra sévère (2010), la pire depuis plus de 20 ans avec environ 600 décès sur plus de
9000 cas détectés. Au Cameroun, cette épidémie a progressivement gagné 9 des 10 régions du pays
(OMS 2010, 2011). Le tableau 1 présente l’évolution de cette maladie de 1996 à 2010 à Maroua.

Tableau 1 : Évolution du nombre de cas et de décès causé par le choléra de 1996-2010


(MINSANTE Cameroun/SNV Cameroun 2011).
Années Nombre de cas Nombre de décès
1996 2703 284
1997 1725 182
1998 3469 270
1999 227 01
2000 0 0
2001 266 0
2002 0 0
2003 0 0
2004 746 0
2005 694 0
2006 804 0
2007 0 0
2008 0 0
2009 395 0
2010 9404 601

1.1 Accès à l’eau potable dans la région Extrême-Nord du Cameroun


Dans l’Extrême-Nord du Cameroun, seulement environ 14 % des ménages ont accès à l’eau potable
(MINSANTE Cameroun/SNV Cameroun 2011). Les mesures d’hygiène individuelle et collective y sont
faiblement respectées. La rareté de l'eau potable a pour conséquence la présence permanente et
même croissante des maladies hydriques. Pour pallier à cette situation, le gouvernement de la
République du Cameroun et certaines ONG ont apporté leur soutien en installant quelques forages et
en réhabilitant les forages préexistants, mais défectueux. Malgré cette initiative, le problème est loin
d’être résolu, car l’entretien de ces puits forés est négligé d’une part, et d’autre part, le nombre de
forages existant est minable par rapport à la population (croissante).
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Étant donné que le traitement de l’eau offre la possibilité de faire de gros progrès sur le plan sanitaire
en général et de réduire considérablement à défaut d’éradiquer les maladies hydriques en général et le
choléra en particulier, l’utilisation des techniques simples, disponibles, accessibles et appropriées pour
l’obtention d’une eau potable s’avère nécessaire et impérative pour cette zone. Les filtres domestiques
efficaces se sont révélés être la méthode de traitement d'eau la plus appropriée pour les petites
communautés (Ali 2014).

1.2 Objectif du travail


Le filtre à base de fer métallique (Fe0) est une nouvelle approche de traitement de l’eau à l’échelle
domestique. Sa simplicité d’utilisation et sa fabrication à partir des matériaux facilement accessibles à
toutes les couches sociales en font un système de choix pour l’Afrique rurale et peri-urbaine. Le fer
métallique (Fe0) couramment appelé fer à valence zéro (ZVI; zero-valent iron), sous la forme granulaire
a été utilisé pour remédier à la contamination des eaux souterraines depuis le milieu de l’année
1990 (Chiu 2013). Actuellement près de 200 barrières perméables réactives sont installées surtout en
Amérique du Nord et en Europe. La présente communication a deux buts : (i) recenser les sources de
pollution de l’eau dans la région Extrême-Nord du Cameroun et la ville universitaire de Maroua, et (ii)
présenter l’aptitude des systèmes filtrants basés sur le fer métallique (Fe 0) à résoudre de manière
durable l’épineux problème de l’accès à l’eau potable et de l’assainissement dans la zone d’étude.

2. Quelques aspects caractéristiques de la région de l’Extrême-Nord du Cameroun

2.1 Aspects géographiques et climatiques


Le Cameroun est un pays d’Afrique subsaharienne localisé dans la partie occidentale bordant l’océan
atlantique au fond du golfe de guinée. Situé entre le 2° et 13° de latitude Nord, et le 12° et le 16°de
longitude Est, le Cameroun a une superficie de 475.650 km 2, dont 466050 km2 de superficie
continentale et 9600 km2 de superficie maritime (Libité 2010). Administrativement, le Cameroun est
constitué de dix régions, dont la plus au Nord (Extrême-Nord) est l’objet de cette étude. L’Extrême-
Nord s’étend sur une superficie de 34 263 km 2; sa capitale politique (chef-lieu) est la ville de Maroua.
Cette région se situe entre les 10° et 13° de latitude Nord et les 14° et 16° de longitude Est et s’étire
sur près de 325 km.
Elle compte six départements à savoir le Diamaré, le Mayo-Danay, le Mayo-Kani, le Mayo-Tsanaga, le
Mayo-Sava et le Logone et Chari. Située en zone sahélienne, la ville universitaire de Maroua, chef-lieu
du département du Diamaré, a un climat de type tropical sec (soudano-sahélien) qui se caractérise par
une seule saison des pluies de juin à septembre, centrée sur un maximum au mois d’août, avec des
précipitations annuelles variant de 400 à 1100 mm. À Maroua règne une sécheresse rigoureuse et
longue (sept mois et plus) avec des températures atteignant 45 ◦ C (l’Hôte 1999, Sighomnou 2003,
Fonjong et al. 2005). Par ailleurs, la région est bordée des montagnes aux formes tourmentées et
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particulièrement pittoresques dans les départements du Mayo-Sava et du Mayo-Tsanaga. Maroua est
occupée par une grande plaine, parsemée de quelques collines granitiques et inondée pendant la
courte saison des pluies à cause de deux fleuves: le Logone et le Chari. Les sols ont des formes
pédologiques: les sols sableux dans les plaines; les sols limoneux riches en alluvions le long des cours
d’eau et les sols argileux.
Il faut noter que malgré la courte saison des pluies, la région de l’Extrême-Nord en général peut couvrir
une large proportion en besoin d’eau douce (et même la totalité) par la récolte, le stockage et le
traitement de l’eau des pluies. Cette méthode connue sous le nom de ‘rainwater harvesting’ est de plus
en plus appliquée en Afrique (Kwaadsteniet et al. 2013) et ne sera pas adressée dans cet article.

2.2 Aspects démographiques.


L’Extrême Nord Cameroun reste jusqu’à nos jours, la deuxième région la plus peuplée du Cameroun
après la région du centre et sa population ne cesse d’augmenter. Sa population urbaine qui était de
1.394.765 habitants en 1976 est estimée à 3.111.792 habitants au 1 er Janvier 2010, soit une densité de
90,8 habitants au km² avec plus de femmes que d’hommes (BUCREP 2010, Libité 2010). La ville de
Maroua sa capitale connait aussi une telle croissance démographique, avec l’avènement de l’université
en 2009 qui a injecté en plus dans la ville, plus de 10.000 nouveaux habitants. La figure 1 donne un
aperçu de l’allure de l’augmentation de la population de ville de Maroua entre 1960 et 2010
(BUCREP 2010).
Si entre 1960 et 1985/1990 on note une croissance quasi linéaire, une croissance quasi exponentielle
caractérise les 20 dernières années. Cette augmentation rapide de la population urbaine est
caractéristique des villes africaines au sud du Sahara. Elle se traduit sur le plan spatial par l’expansion
de la ville avec la « création anarchique » des nouveaux quartiers résidentiels. Par conséquent, le
nombre d’équipements en logement pour assurer l'accès à l'eau potable ne peut suivre ce rythme. Plus
graves, des mesures adéquates d’accompagnement sont sinon inexistantes, du moins très rares.
Maroua a une architecture en damier. Certains quartiers sont plus ou moins bien construits et équipés,
d’autres ne présentent aucune structure reconnaissable. Dans les quartiers moins nantis qui sont par
ailleurs les plus nombreux, les constructions sont de type traditionnel, faites en terre et ne sont pas le
plus souvent électrifiées. Un contraste net existe avec quelques quartiers avec des constructions de
type moderne habité majoritairement par une population financièrement plus nantis. Dans la ville de
Maroua, il y a des domaines administratifs, des domaines industriels et des logements sociaux (les
bâtiments de la société immobilière du Cameroun - SIC).

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Figure 1 : Évolution de la population de Maroua. D’après les statistiques du BUCREP (2010).

2.3 Aspects économiques


L’économie dans la région Extrême-Nord du Cameroun est diversifiée avec une forte dominance dans
l’agriculture artisanale. Ceci est typique des villes où la pauvreté est accentuée. On y cultive du riz, du
coton, du sorgho, maïs et des oignons, qui sont les cultures de rente dominantes. Une autre activité
économique importante est la pêche dont la production semi-industrielle permet une exportation vers
les pays voisins notamment le Tchad. L’élevage bovin et caprin joue également un rôle important dans
l’activité économique des communautés. Dans toutes les communautés de la région de l’Extrême-Nord
du Cameroun, le petit commerce est une activité économique significative. Le coton fait l’objet d’une
activité industrielle (SODECOTON: Société de Développement du Coton), le riz et les projets de la
SEMRY (Société d’Expansion et de Modernisation de la Riziculture à Yagoua) avec l’aménagement
d’une digue de retenue (retenue de Maga) qui assure le stockage des eaux pour l’irrigation des
champs de riz. L’artisanat et le tourisme constituent aussi des atouts économiques pour cette région.

2.4 Source d’approvisionnement en eau à Maroua.


Dans la ville sahélienne, l’eau potable reste l’un des véritables problèmes qui frappent la population. Le
problème est d’ailleurs général dans toute la région Extrême-Nord. Très peu de personnes parviennent
à avoir de l’eau en quantité, en qualité, et aussi à des distances raisonnables (Fongong et al. 2003). En
effet, une bonne partie de la population parcourt plusieurs kilomètres en saison sèche à la quête de
l’eau. Les modes d'approvisionnement en eau ici sont très variés. Ils peuvent être schématisés,
comme suit et par ordre décroissant: (i) eau du réseau national de distribution d’eau (Camerounaise
des eaux) par une minorité de personnes résidant dans des quartiers huppés et disposant des moyens
financiers élevés, (ii) le reste de la population qui constitue la majorité s’approvisionne grâce aux

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forages et aux puits peu profonds existant pendant la saison sèche. Au cours de la saison des pluies,
en plus des puits et forages, les populations s’approvisionnent en eau de pluie et auprès des fleuves
saisonniers (Mayos) qui connaissent des crues et s’assèchent pendant la saison sèche. Notons que
ces points d’eau en général et les Mayos en particulier servent en plus de points de breuvages pour le
bétail, de baignade, de lave-linge et de lave-vaisselle.

3. Principales sources polluantes des eaux à Maroua

3.1 Structures polluantes


Les infrastructures d’assainissement de base sont inexistantes ou non fonctionnelles dans la ville de
Maroua et toute la région Extrême-Nord du Cameroun. Les dispositions pratiques ne sont pas prises
pour faciliter l'application de la réglementation légale qui stipule que les structures locales génératrices
de déchets dangereux en assurent un traitement sûr pour l’homme et pour l'environnement. Aucune
forme de gestion des déchets agricole, artisanal, domestique, industriel ou urbain n’est obligatoire.
À Maroua on trouve par exemple des industries extractives (huileries), des hôtels, des hôpitaux, des
logements sociaux, des abattoirs, des garages et bien sûr des centres de santé et une université.
Toutes ses structures produisent comme déchets des eaux usées de types divers: eau de ménage,
eau des fosses septiques, huile de vidange, excréments/sang des animaux abattus.
Une situation particulièrement alarmante est l’état défectueux des stations d’épuration des logements
sociaux qui a entraîné le déversement des eaux des fausses sceptiques sans traitement préalable
dans les Mayos. Aucun autre dispositif fonctionnel de traitement n’existe à ce jour (Octobre 2013).
Dans beaucoup de structures et dans la plupart des ménages, les tuyaux de canalisations sont
bouchés par les ordures ménagères, l’évacuation des effluents se fait par déversement, en l’état, sur
des terrains vagues ou des rigoles. Maroua est l’une des villes du Cameroun où l'élevage est une
activité économique importante. Les peaux des animaux sont utilisées à des fins commerciales.
La tannerie est traditionnelle, les différentes peaux travaillées sont trempées, lavées, grattées et les
déchets qui en découlent (poils, eaux de lavage et de trempage, produits chimiques utilisés) sont
versés dans la nature. L’état d’insalubrité des abattoirs de la ville de Maroua est une plaie
particulièrement profonde. Aucun des sept abattoirs que compte cette ville n’est raccordé à une station
d’épuration. Il s’agit de bâtiments de construction simple, approvisionné en eau par le réseau national
de distribution d’eau (CDE), où en moyenne dix bœufs (par jours et par établissement) sont égorgés à
même le sol. Il est difficile de donner une estimation du volume d’eau utilisée, mais un grand volume
est consommé et par conséquent génère des quantités d’eaux résiduaires: eaux de lavage du sang,
des carcasses, des viscères, eau d’égouttage des matières stercoraires. Il faut noter qu’en saison de
pluie, les viscères sont nettoyés dans les eaux du Mayos.

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3.2 Les installations sanitaires non améliorées.
Le pourcentage de la population bénéficiant d’installations sanitaires améliorées est particulièrement
bas. L’état des latrines et des toilettes dites modernes est déplorable. Les populations utilisent soit des
latrines ‘améliorées’, soit des latrines traditionnelles ou n’ont pas de système défini. Dans ce dernier
cas, la seule zone de soulagement est la nature. Dans les quartiers résidentiels, beaucoup de
ménages n’ont pas de toilettes avec une chasse d’eau et aucune toilette ne comporte un tuyau
d’aération (d’où les odeurs nauséabondes, rats, et insectes vecteur de maladies). Les latrines
traditionnelles utilisées par la grande partie de la population sont le plus souvent peu profondes, et sont
à utilisation commune (plusieurs familles). Les fosses septiques des toilettes améliorées n’ont pas
d’installation permettant d’épurer les eaux usées des fosses. La ville de Maroua ne dispose pas de
service de vidange. L’enlèvement des boues et autres matières de vidange s'effectue généralement
sans aucun contrôle, ni des lieux, ni des conditions de manutention. Le plus souvent ces déchets sont
déversés dans les marigots, les caniveaux ou sur des terrains vagues. Il en résulte un état de pollution
grave des nappes phréatiques qui sont par ailleurs encore très sollicitées pour l’approvisionnement en
eau de consommation. Les fosses d’aisance, quand elles existent, n’obéissent pas aux normes
requises. Elles se remplissent rapidement, entraînant des ruissellements le long des voies.

3.3 Structures polluantes publiques et administratives


La ville de Maroua est riche d’un hôpital provincial, de plusieurs dispensaires publics et de plusieurs
centres de santé privés. Il faut considérer que chaque médicament est une source de contamination.
Même consommé, tout médicament n’est que partiellement digéré et les produits dérivés sont des
polluants. Pour cette raison au moins, chaque centre de santé devrait être équipé d’une station
d’épuration.
Une autre source de contamination considérable constitue les hôtels, les restaurants, le débit de
boissons et tous les autres points où les personnes humaines se retrouvent quotidiennement en
nombre élevé. La contamination ici est comparable à la contamination d’origine domestique avec la
différence que l’usage des produits manufacturés (déodorants, détergents, parfums) est plus poussé.
Une dernière source importante de contamination pour la ville de Maroua constitue l’Université elle-
même. L’activité de recherche est une activité essentiellement polluante. Tous les produits chimiques
sont des potentiels polluants. Généralement, les produits chimiques doivent être emmagasinés et
utilisés de manière contrôlée et les eaux usées des départements de Chimie et Biologie doivent être
particulièrement contrôlées. Dans le cas idéal, tout bâtiment de la Faculté de Science doit être équipé
d’une station d’épuration. Le dimensionnement des systèmes filtrants correspondants dépend de la
nature des polluants potentiels.

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4. Prévention des maladies d’origine hydrique à Maroua : Filtres à base de fer métallique

4.1 Le besoin en filtre à l’échelle domestique


La cause principale de la présence quasi endémique du choléra et de sa propagation rapide dans la
région de l’Extrême-Nord est sans aucun doute l’absence d’un système fiable d’adduction d’eau. À
cette ‘cause collective’ qui relève du domaine d’action de la municipalité, s’ajoute une absence ou une
négligence des règles élémentaires d’hygiène par les populations. La conséquence est une véritable
‘insalubrité généralisée’ dans toute la région. L’amélioration de la qualité (et la quantité) de l’eau de
consommation (boisson, cuisson) est donc d’une importance capitale. Toute action dans ce sens
permettra une prévention généralisée des maladies hydriques en général et du choléra en particulier. Il
faut noter que dans cette région le manque d’infrastructures d’eau potable est la règle et non
l’exception. Seule une infime minorité de la population est censée avoir accès à une eau potable
fournie par la Camerounaise des eaux (CDE) et les forages. Cependant, la qualité des eaux provenant
de ces sources est douteuse et aucune structure (e.g. laboratoire indépendant) ne contrôle la qualité
de l’eau produite. Pour ce qui est de l’eau de la CDE, les coupures sont fréquentes et peuvent durer
plusieurs jours. Pendant ce temps, les tuyaux se corrodent sûrement comme le révèle la coloration
rougeâtre de l’eau du robinet après chaque coupure. Cette eau rougeâtre peut également contenir une
population accrue de micro-organismes qui s’est multipliée pendant la stagnation.
En vue de l’amélioration de la qualité de l’eau consommée, une ‘minorité consciente’ (moins pauvre,
généralement instruite) a adopté un certain nombre de ‘mesures préventives’ telles que : (i) l’utilisation
de « Eau de Javel » (produit chimique), (ii) l’utilisation des filtres commercialisés dans la région
(appelés ‘Bougies’), (iii) l’exploitation de rayons solaires pour la désinfection (méthode SODIS).
Cependant, aucune de ses méthodes n’est appropriée pour la production de l’eau potable. En effet,
l’eau de Javel, à condition d’être très bien dosée ne réduit que la contamination microbienne. Pour une
eau contenant de la matière organique, tout excès d’eau de Javel induit automatiquement la formation
des composés (organiques) chlorés dont le potentiel cancérigène est documenté depuis les années
1970s. L’exploitation du rayonnement solaire dans la région Extrême-Nord du Cameroun serait une
méthode idéale puisque les températures atteignent 45°C. Cependant exposer de l’eau embouteillée à
ce soleil n’agresse que la contamination microbienne, si l’eau est chimiquement contaminée, aucune
amélioration de la qualité n’est possible. Enfin, les ‘bougies’ commercialisées dans la région de
l’Extrême-Nord du Cameroun n’ont pas été conçues/construites pour la purification de l’eau, mais
plutôt pour éliminer les particules suspendues. Étant donné que la filtration sur colonne est une
méthode applicable de traitement de l’eau, il est intuitif de penser que concevoir un filtre contenant un
matériau ou un mélange de matériaux capable d’adresser de manière synergique la contamination

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chimique et microbienne résoudra le problème de l’eau potable à l’échelle domestique. L’Université de
Maroua se doit de contribuer à ce défi.

4.2 Le besoin en filtre à l’échelle communautaire


Le paragraphe 2 a énuméré les sources polluantes de la ville de Maroua. Ces sources sont les mêmes
qui contaminent l’eau que les ménages individuels utilisent. Le paragraphe 4.1 a démontré le besoin en
eau à l’échelle domestique et proposé la filtration comme une solution appropriée. Il est intuitif de
penser que le traitement (e.g. la filtration) des eaux usées limiterait le besoin de filtre à l’échelle
domestique. En d’autres termes, si les eaux usées du Laboratoire de Chimie de l’Université de
Maroua, de l’hôpital provincial de Maroua, ou de l’Abattoir Central sont traitées à la source (en amont),
cette opération réduit à coup sûr le degré de contamination de tous les points d’eau situés en aval
(y compris les eaux de puits).
Si chaque industrie de la région de l’Extrême-Nord, chaque hôtel, chaque hôpital, chaque abattoir,
chaque garage, chaque cité de logements sociaux, chaque hôtel traite son eau usée de manière
décentralisée, il restera juste les eaux usées des ménages et celles des fosses septiques qui
pollueraient la région. Cette fraction de la pollution est facilement contrôlée par l’administration
municipale ou par un investissement humain régulier et structurée. En d’autres termes, retenir et filtrer
les eaux usées avant de les ‘relâcher’, serait une contribution inestimable pour la santé des
populations de l’Extrême-Nord du Cameroun.
Un autre champ d’application des filtres à l’échelle communautaire concerne la potabilisation des eaux
des forages, des puits/sources. Dans chaque localité, il serait souhaitable et économique d’installer
des points d’eau pour quelques dizaines à quelques centaines de personnes plutôt que de construire
des filtres pour chaque ménage. Ceci a l’avantage de considérer la fraction de la population qui n’aurait
pas accès aux filtres individuels et également de maintenir la récolte de l’eau comme une activité
sociale. L’aspect le plus économique des filtres communautaires se reflète sur contrôle de qualité. Il est
plus facile, plus pratique et bien sûr plus économique, de contrôler la qualité d’une source qui dessert
100 personnes que de contrôler 10 filtres dans 10 ménages. Il est superflu de rappeler que les
laboratoires d’analyses sont non encore existants (en Afrique au sud du Sahara en général).

4.3 Le filtre à base de fer métallique: une solution appropriée


La conception des filtres à eau contenant un matériau filtrant bon prix, non toxique, traitant les
contaminations chimique et microbienne serait une solution idéale pour les populations de la région
Extrême-Nord du Cameroun. Le fer métallique (Fe 0) est un exemple de matériau réactif pouvant être
utilisé pour le traitement de l’eau et l’assainissement de l’environnement. Par exemple, Fe 0 (sous forme
de composite poreux) est utilisé au Bangladesh pour éliminer l’Arsénique dans l’eau (SONO Filtre)
(Hussam 2009). L’élimination des composés aliphatiques halogénés, aromatiques, nitro-aromatiques,
des bactéries, des métaux lourds, des virus a été réalisée (Bigg et Judd 2000, You et al. 2005).
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Initialement, la courte durée de vie des filtres était leur principal inconvénient. La courte durée de
service des filtres à fer est due à la perte de perméabilité, liée à l’expansion volumétrique qui
caractérise la corrosion des métaux. Des études théoriques poussées ont montré que la proportion
volumétrique de Fe0 dans le lit filtrant doit être réduite au maximum (Caré et al. 2013). Ainsi, une
fraction des particules dans le système filtrant doit être un matériau non expansif (gravier, pierre ponce,
sable) (Miyajima et Noubactep 2013, Noubactep 2013).
La pertinence des filtres à Fe0 découle du fait qu’ils ne nécessitent pas de compétences particulières
pour leur construction. Un concept solide de construction a été présenté (Noubactep et al. 2012,
Btatkeu 2013, Caré et al. 2013, Rahman et al. 2013, Togue-Kamga 2013, Ndé-Tchoupé et al. 2015,
Tepong-Tsindé et al. 2015). Ce concept flexible peut être adaptée aux situations locales en utilisant
tous les agrégats disponibles possibles (y compris les biomatériaux comme les copeaux de bois, la
pierre concassée, gravier, pierre ponce, sable). Le dimensionnement de chaque filtre ou de chaque
système filtrant est une fonction de la disponibilité des matériaux (Fe0 et autres agrégats), de la
réactivité des matériaux utilisés, de la cinétique de l’écoulement de l’eau et de l'étendue de la
contamination (Noubactep 2016).
La pertinence des filtres à Fe0 pour le concept «One World, One Health» dans le contexte africain est
évidente. Un concept initié à Göttingen (Allemagne), muri avec la collaboration de Paris (France),
Ngaoundéré et Yaoundé (Cameroun) sera optimisé et appliqué à Maroua et les résultats seront
disponibles pour la communauté humaine mondiale. L’application (vivement souhaitée) des filtres à Fe 0
dans la région Extrême-Nord du Cameroun consistera d’abord à la construction des filtres domestiques
et des systèmes filtrants communautaires pour l’eau potable. Ensuite des unités pilotes seront
installées pour l’assainissement de toutes sortes de sources des eaux usées. À terme, le choléra dans
la région de l’Extrême-Nord du Cameroun sera une triste page de l’histoire de l’Afrique.

5. Conclusion
Ce travail a évalué les besoins en systèmes filtrants à base de fer métallique (Fe 0) pour une meilleure
santé des populations de la région Extrême-Nord du Cameroun en général et de la ville de Maroua en
particulier. Sur l’exemple de la ville de Maroua, un inventaire des activités quotidiennes induisant la
contamination de l’eau a été réalisé. Il en ressort clairement, que l’adduction d’eau insuffisante dans la
région et le manque d’assainissement sont la cause et la source de propagation des maladies
hydriques endémiques et surtout du choléra. La pollution des eaux de surface est en infime partie due
au manque d’application des règles d’hygiène en matière de conservation de l’eau. Les structures
polluantes qui déversent à longueur de journée des produits toxiques (liquide solide ou gazeux) dans la
nature sont la principale source de contamination. Il est donc indispensable que les municipalités se
chargent de l’assainissement, en milieu rural comme en milieu urbain. Pour soutenir l’activité de ces
communes (pas très riche non plus), le concept des filtres à Fe 0 a été présenté et discuté. Si ce

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Afrika & Wissenschaft
Africa & Science / Afrique & Science
concept est testé et réalisé à l’échelle régionale, la région Extrême-Nord du Cameroun sera bientôt un
modèle pour le reste du Cameroun et les autres pays en voie de développement.

Remerciements
Chicgoua Noubactep (Université de Göttingen - Allemagne) est sincèrement remercié pour les
fructueuses discussions et la correction du manuscrit.

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Africa & Science / Afrique & Science

L'autonomie dans l’approvisionnement en eau potable: Une technique de


filtration efficace et accessible aux petites communautés (*) [Ce renvoi devait
être 3. Il n'est pas élucidé]

Chicgoua Noubactep
Résumé
L'affirmation selon laquelle « L’eau ne tue pas » s'est avérée définitivement fausse ! Eh oui l’eau tue
bel et bien ! La contamination anthropique, par exemple par des pesticides, fait de l’approvisionnement
en eau potable un problème crucial pour les pays en développement. En raison des insuffisances (et
parfois de l'absence) de la réglementation et du manque de contrôle, on assiste encore dans ces pays
à une utilisation intensive de produits agrochimiques, interdits en occident pour certains. Pour
approvisionner les petites communautés en eau potable, des technologies simples, robustes et moins
coûteuses doivent être mises sur pied. Par ailleurs, il est primordial que ces technologies utilisent des
matériaux locaux ou moins chers et qu'elles soient maîtrisées par la main-d'œuvre locale. La présente
communication présente le concept de la technologie de filtration sur des lits à base du fer métallique
(Fe0). Les filtres à Fe0 offrent aux communautés villageoises une perspective d'accéder à une
autonomie réelle dans l’approvisionnement en eau potable. Cette autonomie, garante du bien-être,
représente le socle de tout développement durable.

1 Introduction
L'utilisation généralisée et intensive des produits agrochimiques représente un danger pour la santé
humaine et pour l'environnement. La contamination de l’environnement terrestre est une préoccupation
croissante dans le monde entier, comme le témoigne les différents sommets internationaux depuis Rio
(1992) (Muller 2015). Dans plusieurs pays du monde, des études scientifiques ont détecté des
pesticides et leurs produits de dégradation dans l’organisme des êtres humains, en particulier chez les
enfants, les femmes en âge de procréer, et même dans le lait maternel. Cette situation est exacerbée
dans les pays en développement où les sociétés agrochimiques trouvent encore un marché non
contrôlé pour des produits jugés dangereux pour la santé humaine et interdits dans les pays
développés (Narita et al. 2014, Yadav et al. 2015).
Les produits agrochimiques présentent une gamme de toxicité très variée. Certains d’entre eux sont
cancérogènes, d’autres sont neurotoxiques, d’autres sont des inhibiteurs de la cholinestérase, d’autres
encore sont des perturbateurs endocriniens ou toxiques pour la reproduction. De manière générale, les
produits agrochimiques pris ici comme représentant de la contamination chimique sont à l'origine de
maladies chroniques plus ou moins graves (Narita et al. 2014, Yadav et al. 2015).

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Africa & Science / Afrique & Science
A côté de la contamination chimique, la contamination microbienne est une autre cause de maladie en
ville et dans les communautés villageoises. La contamination microbienne est l’origine des maladies
dites hydriques dont le choléra et la typhoïde sont deux exemples classiques. Les maladies hydriques
sont à l'origine des plus forts taux de mortalité dans les pays en voie de développement (Kumate et al.
1998, McCann et al. 2011).
La question qui se pose est celle de savoir pourquoi ces maladies continuent à faire tant de ravages.
La raison la plus plausible semble être « la pauvreté ». Ainsi par exemple, ce n’est qu’en construisant
des hôpitaux, des centres de traitement des eaux et en éduquant la population que l'on pourra
endiguer ces maladies.

1.1 Sortir du cercle vicieux


Un argument « satisfaisant » qui explique la situation alarmante des communautés villageoises en
Afrique est la pauvreté. Ainsi : (i) l'aide internationale serait insuffisante et inefficace pour réaliser les
investissements nécessaires, (ii) les populations concernées ne disposeraient pas d'installations
sanitaires, (iii) le climat équatorial et/ou la région tropicale garantissent la pérennité des maladies
hydriques. Ainsi, le Sud pauvre n’aura la vie sauve que quand le Nord riche l’aidera avec plus de
volonté que par le passé (Biswas 1981). Il faut bien quitter cette logique !

1.2 Sortir de l'impasse


Complémentairement au paradigme courant consistant à « aider les gens à s'aider eux-mêmes », cet
article décrit un procédé qui appartient de la catégorie « Do-It-Yourself » (« réalise-le toi-même ») pour
le traitement de l'eau et qui a le mérite d'être applicable dans toutes les petites communautés (Kearns
et Flanagan 2007).
Le procédé utilise le fer métallique (Fe 0) et d’autres matériaux facilement accessibles, disponibles en
grande quantité et peu coûteux pour éliminer efficacement les contaminations biologique et chimique
de toute source d’eau (You et al. 2005, Noubactep et al. 2009, Bradley et al. 2011, Noubactep et al.
2012, Noubactep 2013, Noubactep 2014, Tepong-Tsindé et al. 2015). Ce système offre à toute
communauté une autonomie dans le secteur vital de l'approvisionnement eau potable.

2 Filtration sur fer zéro (Fe0)


La filtration sur Fe0 a été développée pour le traitement des eaux souterraines dans les tranchées
connues sous le nom de « barrières perméables réactives ». Cette technologie a démontré sa capacité
à traiter des eaux souterraines polluées par plusieurs classes de contaminations biologique et
chimique. Actuellement près de 200 barrières perméables réactives sont installées à travers le monde.
Ces barrières fonctionnent en majorité de manière très satisfaisante, en partie, depuis plus de 15 ans
(Henderson et Demond 2007, Gheju 2011, Ghauch 2015, Guan et al. 2015).

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Africa & Science / Afrique & Science
Pour construire des systèmes filtrants d’efficacités similaires dans les conditions atmosphériques, il
faut artificiellement créer les conditions semblables à celles du sous-sol. En particulier, il faut réduire la
concentration de l’oxygène dissoute d’environ 8 mg/l à des valeurs inférieures à 2 mg/l. Ensuite, il faut
créer l’obscurité (Noubactep et al. 2009, Tepong-Tsindé et al. 2015). Créer de l’obscurité est sans
doute la condition la plus facile à remplir, il suffit de bien choisir le contenant du filtre. Au cas où celui-ci
serait transparent, le couvrir avec une feuille d'aluminium sera une solution adéquate. Pour ce qui est
de créer un milieu pauvre en oxygène, des solutions intelligentes peuvent être trouvées, une d’elles
consiste à monter le fil de Fe0 après un filtre biosable (Noubactep et al. 2012, Tepong-Tsindé et al.
2015). Dans les filtres biosables, l’oxygène est utilisé dans le filme biologique (Anglais : biofilm) de
sorte que la solution sortant du filtre ne contient presque pas d’oxygène.
La présentation ci-dessus suggère qu’un filtre à Fe 0 situé en aval d’un filtre biosable remplisse les
conditions pour fonctionner comme une barrière perméable réactive (souterraine). Ce pré-requis est
d’autant plus valable que les filtres à Fe0 testés dans les conditions atmosphériques pour l’élimination
de l’arsenic en Asie du Sud-Est (Bangladesh, Inde, Népal) ont été prouvés très efficaces mais pas
durables (Hussam 2009, Neumann et al. 2013). La courte durée de vie observée est due à
l’abondance de l’oxygène qui engendre la formation des oxydes de fer (III) (Fe 2O3, FeOOH, Fe(OH)3)
dont le volume est 4,3 à 6,4 fois plus large que celui du fer dans le réseau cristallin (Fe 0) (Caré et al.
2013). En d’autres termes, les filtres à Fe0 utilisés dans les conditions atmosphériques étaient mal
dimensionnés.
L’expansion volumétrique du fer pendant le processus de corrosion exige que la proportion de Fe 0
dans le lit filtrant soit réduite au maximum. Il est impératif qu’une partie des particules de fer soit
remplacée par des particules d’un matériau non expansif (gravier, sable). Dans le cas idéal ce
matériau non expansif doit être poreux (roches volcaniques). Des calculs théoriques ont montré que la
proportion volumétrique idéale du Fe0 est d'environ 25 %. Ce taux de fer correspond à un système qui
se colmate juste à l’exhaustion du fer (Caré et al. 2013). Comme il est difficile d’atteindre ce seuil dans
les conditions de terrain, il est conseillé que les proportions supérieures soient testées dans un premier
temps, par exemple 40 %. La prépondérance de sable dans le filtre, fait qu’un filtre viable à base de fer
est à proprement parler, un filtre à sable modifié au Fe0.

3 Filtres à sable modifié au Fe0


La présentation ci-dessus a démontré que les filtres proposés représentent une amélioration du filtre
biosable dont l’efficacité à améliorer la qualité de l’eau est connue depuis le 19 e siècle. Les filtres à
sable ont efficacement aidé à combattre le choléra dans les villes de Hambourg et Altona en 1892 et
1893. Il n’y a pas de raison que ces systèmes n’éloignent pas le choléra de l’Afrique au 21 e siècle. Bien
plus, le traitement de l’eau de la ville de Berlin, la capitale politique de l’Allemagne Fédérale est
essentiellement basée sur la filtration sur sable (Urfer et Fortier 2012). Ce qui signifie que ces

54
Afrika & Wissenschaft
Africa & Science / Afrique & Science
systèmes filtrants sont encore d’actualité en occident, il n’y a donc aucun obstacle à les introduire de
manière systématique en Afrique.
Bien plus, ces systèmes biosables sont améliorés par un lit à Fe 0 (Bradley et al. 2011, Erickson et al.
2012). Dans les lits à Fe0 bien dimensionnés, l’élimination de la contamination microbienne excédant le
filtre biosable et l’élimination de la contamination chimique sont garanties.

Par ailleurs, en fonction de la nature de la contamination, un lit de charbon actif peut être joint en
amont et/ou en aval pour éliminer des polluants qui auraient une faible affinité tant pour le sable que
pour les oxydes de fer (du lit Fe 0) (Noubactep et al. 2012, Tepong-Tsindé et al. 2015). En effet,
l'Organisation Mondiale de la Santé recommande la filtration sur charbon actif comme la meilleure
technologie disponible pour le contrôle de nombreux produits chimiques organiques synthétiques dans
l'eau potable. Les charbons actifs commerciaux sont chers mais des techniques de leur synthèse à
petites échelles sont disponibles (Kearns and Flanagan 2007). En plus du charbon actif, d’autres
matières organiques (végétales) et minérales peuvent être incorporées dans le système filtrant en vue
d’en améliorer l’efficacité à produire de l’eau potable (Noubactep et al. 2012, Ndé-Tchoupé et al. 2015,
Tepong-Tsindé et al. 2015).

4 Conclusion
Cet article a présenté un système facile à réaliser pour éliminer efficacement les contaminations
biologique et chimique de l'eau. Le système est simple, efficace et robuste. Il est construit à l'aide du
génie local. Le fer métallique qui est le cœur de ce système a été fabriqué en Afrique Noire longtemps
avant l’arrivée du premier esclavagiste Arabe, longtemps avant l’arrivée du premier
esclavagiste/explorateur Européen. Les forgerons africains ont modifié le « fer industriel » à la
demande de l’administration coloniale depuis les premières années de l’implantation européenne. Le
génie Africain est capable de refondre le fer à béton (par exemple) dans les « hauts-
fourneaux artisanaux » pour produire de la limaille de fer à utiliser dans les filtres à eau à l’échelle
domestique ou à l’échelle du village. L'éducation et le souci de rendre les populations locales
autonomes a été la motivation pour la conception du système de traitement d'eau présenté dans cette
communication. Il n’y a pas de doute que ce système efficace, simple et élégant dans la conception,
peu coûteux dans sa réalisation, permettra bientôt aux communautés rurales de s’approprier le secteur
vital de l'eau potable. Pour reprendre Koffi Annan, « nous ne vaincrons ni le SIDA, ni la tuberculose, ni
le paludisme, ni de toute autre maladie infectieuse qui frappe les pays en développement, avant d'avoir
gagné la bataille pour l'eau potable, l'assainissement et les soins de santé de base ». La filtration sur lit
à Fe0 est naturellement applicable et est d’ailleurs appliquée à l'assainissement à petite échelle.

Remerciements

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Afrika & Wissenschaft
Africa & Science / Afrique & Science
Mes remerciements vont à Roukiatou Maas (Bruxelles/ Belgique) et Emmanuel Chimi (Douala/
Cameroun) pour les fructueuses discussions qui ont permis d'améliorer la qualité de ce manuscrit.

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Afrika & Wissenschaft
Africa & Science / Afrique & Science

Traitement décentralisé de l’eau sur filtres à fer métallique: le sentier africain


Chicgoua Noubactep, Jean-Bosco Tchatchueng, Paul Woafo

Résumé
Pour plusieurs communautés isolées à travers le monde, un raccordement à un réseau d’eau potable
serait très coûteux. Un approvisionnement adéquat en eau potable dépend alors de la disponibilité des
technologies appropriées ayant la capacité de traiter des eaux de qualités variables. La filtration sur un
lit de fer métallique (Fe0) est une pareille technologie. Il s’agit d’une filtration lente sur un système de
filtres comportant au moins un filtre contenant du Fe0. Le filtre à Fe0 est très simple d’utilisation et
d’entretien. Il ne requiert pas de produits chimiques ni d’électricité. Il est par conséquent adaptable à
toutes les situations et peut être implanté dans toutes les communautés. Le potentiel de ces filtres
pour l’approvisionnement en eau potable dans les pays en développement est immense. Cet article
présente la contribution actuelle de l’Afrique au développement des filtres à Fe 0. Il insiste sur le fait que
la version « filtre domestique » avait déjà été abandonnée à cause d’un mauvais dimensionnement.
Les axes de recherche actuellement menées afin d’optimiser la performance des systèmes filtrants à
Fe0 pour le traitement de L’eau sont présentées.
Mots clés : Barrière perméable réactive, Fer métallique, Filtre domestique, Recherche fondamentale,
Traitement de l’eau.

1 Introduction
Une multitude de techniques sont proposées pour le traitement de l’eau à l’échelle décentralisée (et
domestique). Le choix de la technique la plus appropriée dépend de trois facteurs essentiels: (i) la
complexité de l’opération de traitement, (ii) la nature de la pollution, et (iii) le coût du système traitant.
L’opération de traitement d’eau doit être simple et, autant que possible, faisable en une seule étape. La
filtration a été identifiée comme la méthode la plus simple et la plus compacte pour le traitement de
l’eau.
Des systèmes filtrants efficaces contiennent des adsorbants, de la céramique et des membranes par
exemple. Les adsorbants sont les matériaux les plus courants et les moins coûteux (Giles et al. 2011,
Murutu et al. 2012). La nature de la pollution détermine le système le plus approprié. Par exemple, si
l’eau à traiter par filtration contient un composé anionique, le système filtrant doit contenir un ou
plusieurs matériau(x) ayant une grande affinité pour les composés anioniques. Il est en principe facile
de trouver un tel matériau (adsorbant). Cependant l’eau naturelle contient à la fois des composés
anioniques, cationiques et neutres qui sont en plus de tailles et de réactivité différentes (Urfer et Fortier

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Afrika & Wissenschaft
Africa & Science / Afrique & Science
2012, Gottinger et al. 2013). En d’autres termes, une eau naturelle doit être considérée comme une
panache de polluants qui devrait être traitée par des multi-barrières.

Le coût du système filtrant est très souvent le facteur le plus important pour le consommateur. De ce
fait, le régulateur devrait veiller à ce que ne soient offerts que les systèmes efficaces. Il est essentiel
pour le consommateur d’engager une démarche “coûts/avantages” en considérant les meilleures
technologies disponibles. Pour le scientifique, développeur de technologies, la même démarche est
importante afin d’initier une recherche devant bien servir une cible. Pour le traitement de l’eau en milieu
africain, il est indispensable de développer une « technologie appropriée ». Une technologie
appropriée offre de l’eau potable aux populations démunis sans les mettre sous aucune pression
financière (Noubactep 2013). La filtration sur des lits à fer métallique a été présentée dans la littérature
comme une pareille technologie et son optimisation est couramment étudiée avec une contribution
active de la communauté scientifique Africaine (Tepong-Tsindé et al. 2015a, 2015b). Au Cameroun,
quatre (4) universités sont déjà impliquées dans cet effort. Ce chapitre donne un aperçu descriptif du
parchemin camerounais. Un aperçu historique de l’évolution des filtres à Fe0 sera d’abord donné.

2 Historique du filtre à Fe0

2.1 Barrières réactives perméables


Les barrières réactives perméables (BPRs) sont un développement du début des années 1990s pour
dépolluer les eaux souterraines de la contamination chimique (substances organiques et inorganiques)
(Phillips et al. 2010, Wilkin et al. 2014, Guan et al. 2015). L’eau souterraine suit un gradient naturel et
traverse une barrière perméable contenant un médium réactif qui diminue la solubilité des
contaminants ou les transforme en espèces bénignes pour l’environnement. Le Fe 0 est considéré
comme un agent réducteur et le mécanisme de la décontamination est un processus chimique. Le fer
métallique (Fe0) sous forme de granules de dimension sub-millimétrique est le matériau réactif le plus
utilisé à nos jours (Phillips et al. 2010, Ghauch 2015, Wilkin et al. 2014, Noubactep 2015). Son
efficacité à dépolluer l’eau souterraine a été démontrée dans (i) un nombre immense d’expériences sur
colonnes au laboratoire, (ii) un grand nombre de projets à l’échelle pilote et (iii) environ 200 barrières
réactives perméables (BRPs) à travers le monde. Les BRPs sont aujourd’hui une technologie établie
pour le traitement de l’eau souterraine (Phillips et al. 2010, Gheju 2011, Wilkin et al. 2014, Ghauch
2015, Guan et al. 2015, Noubactep 2015).

2.2 Filtres à Fe0 pour les eaux usées


Le succès des tests de faisabilité des BPRs a motivé l’utilisation des systèmes filtrants à Fe0 pour le
traitement de l’eau à la surface du sol. Un avantage de taille par rapport aux barrières souterraines est
une flexibilité pratiquement illimitée dans le dimensionnement. En particulier, l’épaisseur de la couche
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Afrika & Wissenschaft
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réactive et la cinétique d’écoulement peuvent être variées à souhait. Un exemple en plein essor est la
filtration des eaux usées agricoles (recyclage des eaux de drainage) et des eaux usées urbaines en
vue de l’irrigation (Allred 2012). Le traitement des eaux pour l’irrigation a pour objectif de filtrer les
pathogènes et la contamination chimique. Bojic et al. (2001) et You et al. (2005) ont démontré la
capacité des alliages des éléments métalliques (Al 0, Fe0) à éliminer les micro-organismes (bactéries et
virus) des solutions aqueuses. Pour les pathogènes en particulier, le mécanisme de décontamination
est l’adsorption et l’enchevêtrement dans la masse des hydroxydes issus de la corrosion du fer.

2.3 Filtres à Fe0 pour usage domestique


Les filtres à Fe0 à usage domestique ont été introduits en Asie du Sud-Est dans le cadre des efforts
scientifiques en vue de l’élimination de la contamination en arsenic (As) (Khan et al. 2001, Ngai et al.
2006, Hussam and Munir 2007, Hussam 2009). Khan et al. (2001) introduisent Fe 0 afin que par sa
dissolution, il augmente la concentration de fer dissout et élimine l’As par co-précipitation. Ngai et al.
(2006) introduisent Fe0 pour fixer l’As à l’entrée des filtres lents afin que la contamination microbienne
soit traitée par filtration sur sable (biosable). Enfin, déçu par la courte durabilité des couches de fer
(100 % Fe0) insérées dans les filtres traditionnels (‘3-Kolshi’) au Bengladesh, Hussam et Munir (2007)
développent un matériau poreux à base de Fe0 qui montre une efficacité et une durabilité
exceptionnelle (Hussam 2009, Neumann et al. 2013, Rahman et al. 2013). Il faut insister sur le fait que
les systèmes ‘3-Kolshi’ à Fe0 étaient très efficaces, mais pas durables (Hussam 2009).
La caractéristique de tous ces travaux c’est qu’ils étaient réalisés sur une base purement pragmatique
(Ghauch 2015, Noubactep 2015). Dans ce contexte, l’élimination de l’As était justifiée par les
excellentes propriétés adsorptives des hydroxydes de fer. Les mêmes propriétés justifiaient de manière
satisfaisante l’élimination des pathogènes (You et al. 2005, Bradley et al. 2011). D’autre part
l’élimination de la majorité de la contamination chimique était justifiée par les propriétés réductrices du
Fe0. Bien plus, des hypothèses dépourvues de toute signification physique étaient favorisées pour
rationaliser le fait que la réduction chimique continuait à la surface du Fe 0 malgré la présence des
hydroxydes, non conductrices d’électrons par nature (Scherer et al. 2000, Ritter et al. 2002).

3 Vers le chemin Africain


3.1 Genèse de l’idée
En 2001, Noubactep, alors doctorant, avait préparé un manuscrit pour un numéro spécial de la revue
scientifique Journal of Contaminant Hydrology (volume 61, 2003). Ce numéro spécial était le compte
rendu (‘proceeding’) de la conférence internationale Migration 2001 tenue du 16 au 21 Septembre
2001 à Bregenz en Autriche. La contribution avait été présentée comme poster à la conférence. Le
manuscrit fut rejeté par J. Contam. Hydrol. et soumis, plusieurs mois après, sans modification aucune
à la revue Environmental Science & Technology (ES&T). ES&T accepta le manuscrit avec révisions

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Afrika & Wissenschaft
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mineures, correspondant essentiellement à éditer la bibliographie selon les standards de la revue
(Noubactep et al. 2003).
L’intention du travail présenté était d’utiliser les adsorbants, en particulier les oxydes et les sulfures de
fer (Fe3O4, Fe2O3, FeS2) et un oxyde de manganèse (MnO 2) pour accumuler l’uranium (VI) dissout
autour des particules de Fe0 afin d’en faciliter la réduction chimique. La réduction chimique était alors
quasi-unanimement reportée comme le mécanisme de l’élimination de l’uranium (Gu et al. 1998). Les
résultats montrèrent, qu’aucun additif n’avait pu accélérer l’élimination de l’uranium. Bien au contraire,
dans le cas de FeS2 et MnO2, l’élimination de l’uranium fut considérablement retardée (observation
clé). Sans avoir utilisé des méthodes physiques de caractérisation des surfaces solides ni de
spéciation des espèces dissoutes, ce travail démontrait clairement deux choses : (i) le Fe0 n’est pas un
agent réducteur dans les conditions environnementales et surtout (ii) la réduction, même si elle a lieu,
n’est pas le mécanisme d’élimination de l’U(VI). Un résultat jusqu’aujourd’hui (14 ans après) en
majorité ignoré par la communauté scientifique (Gheju and Balcu 2011, Ghauch 2015, Noubactep
2015).

3.2 Vulgarisation de l’observation clé


A partir de 2005, Dr. Noubactep participa à plusieurs séminaires et conférences en Allemagne dans le
but de faire connaître ces résultats et surtout de les généraliser puisque l’élimination de U(VI) de la
solution aqueuse n’était pas une propriété du l’uranium (oxydant) mais plutôt celle du fer qui se dissout
et précipite en présence de l’uranium. Dans les systèmes avec FeS 2 et MnO2, il y a d’ailleurs
dissolution accrue de Fe0 mais pas d’élimination de U(VI) jusqu’à ce que la précipitation devienne
quantitative (Noubactep et al. 2003). En d’autres termes, les processus d’élimination des contaminants
en présence du Fe0 sont exactement ceux que l’on observe au cours de l’électrocoagulation, l’étendue
de l’élimination dépend de l’affinité des contaminants pour les hydroxydes de fer et de la quantité
d’hydroxyde générée (Bojic et al. 2009, Noubactep et Schöner 2010).

3.3 Une rencontre fortuite


En avril 2007, Prof. Waofo du Laboratoire de Modélisation et Simulation en Ingénierie, Biomimétisme
et Prototypes (Université de Yaoundé 1, Cameroun) arrive à Göttingen en Allemagne pour un séjour
scientifique de 6 mois. Il rencontre Dr. Noubactep avec qui il sympathise. Au cours de leurs échanges,
l’application de la science (universelle) aux besoins élémentaires des citoyens Africains est au centre
des intérêts. Dr. Noubactep prend connaissance des grands axes de travaux du Laboratoire de
Modélisation et Simulation en Ingénierie, Biomimétisme et Prototypes à Yaoundé. L’idée de concevoir
les filtres à Fe0 est explorée et adoptée facilement. Le concept résultant est soumis et accepté comme
présentation orale pour la conférence internationale Uranium Mining and Hydrogeology à Freiberg
en Allemagne (Noubactep et Woafo 2008). Ce concept sera ensuite complété et présenté à la
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conférence internationale EnviroWater à Stellenbosch en Afrique du Sud, puis à un workshop à
Lusaka (Zambie) en mars 2009. La contribution de EnviroWater a été publiée comme review article
dans la revue Clean Soil Air Water (Noubactep et al. 2009). Noubactep et al. (2009) est considéré
comme la pierre angulaire sur laquelle, le filtre à Fe 0 se développe. Le prochain paragraphe donnera
un aperçu des progrès faits depuis 2009.

4 Le chemin africain

4.1 Le problème
Se donner pour objectif d’inventer des filtres à eau pour les communautés en Afrique (et dans le
monde) est une ambition certainement salutaire. Seulement, sans argent et sans financements à
moyen ou long terme, cette ambition ressemble beaucoup plus à une prétention ou même une simple
plaisanterie. Quand on y ajoute les backgrounds divergents des deux protagonistes et leur éloignement
géographique, il peut apparaître que ce projet est une pure illusion. Dr. Noubactep
(Göttingen/Allemagne) est chimiste, Prof. Woafo (Yaoundé/Cameroun) est physicien. Les deux anciens
étudiants de la Faculté des Sciences de l’Université de Yaoundé (Ngoa-Ekellé) entreprennent un
travail bénévole d’ingénieur concepteur.
Reconnaître et intégrer toutes les difficultés éventuelles est le chemin même du progrès. Armé d’une
volonté exceptionnelle, les deux scientifiques sont encore animés par la curiosité de savoir pourquoi
leur vision ne se réaliserait pas. Le premier obstacle était la communauté scientifique elle-même. Les
collègues n’étaient pas (aujourd’hui encore en partie) prêts à accepter que la technologie du traitement
de l’eau par Fe0 soit née avec une interprétation erronée (réduction électrochimique) d’une excellente
observation expérimentale (réduction des certaines substances en présence du Fe 0) (Ghauch 2015,
Noubactep 2015). Personne ne peut nier une observation, d’ailleurs reproduite et vérifiée avec des
composés chimiques les plus divers. Attribuer la réduction observée à un processus électrochimique
est cependant une faute grave (Togue-Kamga et al. 2012, Ghauch 2015, Noubactep 2015). Sans
entrer dans les détails mécanistiques, une nature électrochimique de la réaction supposerait que le fer
soit oxydé (corrosion) par les contaminants. Cependant la corrosion du fer, vainement combattue
depuis plusieurs siècles, est provoquée par des traces d’eau (humidité) (Schindelholz et Kelly 2012).
Plusieurs produits de cette réaction sont des agents réducteurs (Fe2+, H2, Fe3O4). Il est donc illusoire de
considérer que le fer immergé dans l’eau sera oxydé par des contaminants en trace alors que le
solvant est corrosif. L’expertise qui prévaut actuellement dans la communauté scientifique est
malheureusement basée sur l’illusion ainsi décrite (Guan et al. 2015). Ceci fait de chaque article
contredisant le paradigme prévalent un exploit (Noubactep 2015). Pendant que les articles migrent de
journaux en journaux pour trouver des examinateurs plus réceptifs, les demandes de financements

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Afrika & Wissenschaft
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sont évaluées par un cercle restreint dont la logique de sélection n’est pas toujours claire, même pour
les sujets sans controverse.
Des doctorants studieux de Douala, Maroua, Ngaoundéré et Yaoundé ont systématiquement démontré
les lacunes du concept couramment favorisé pour l’élucidation des processus de décontamination par
le Fe0 (Togue-Kamga et al. 2012, Gatcha-Bandjun et Noubactep 2013, Kobbe-Dama et al. 2013,
Togue-Kamga 2013, Btatkeu-K et al. 2014a, Btatkeu-K et al. 2014b, Gatcha-Bandjun et al. 2014,
Btatkeu-K 2015, Domga et al. 2015, Ndé-Tchoupé et al. 2015, Tepong-Tsindé et al. 2015a, Tepong-
Tsindé et al. 2015b, Btatkeu-K et al. 2016). Ces publications sont vivement recommandées à toute
personne désireuse de commencer une activité dans ce domaine. La collaboration dans le cadre de
cette démarche a déjà produit vingt deux (22) articles scientifiques publiés dans des revues avec
comité de lecture (peer-reviewed - Bibliographie). Un étudiant a bénéficié d’une bourse de 6 mois du
Service de Coopération et d’Action Culturelle (SCAC) de l’Ambassade de France à Yaoundé et
d’une bourse d’équipement de la International Fondation for Science (IFS - Suède). Toutes les autres
demandes de financement sont restées sans succès, une cause majeure devrant être l’expertise
discutable des évaluateurs (Noubactep 2016).

4.2 Un résultat fondamental


La contradiction sur le mécanisme de décontamination a été déjà notée. Une autre contradiction, au
moins aussi vielle concerne le rôle du sable dans les systèmes fer/sable. Le sable étant non réactif,
son emploi était considéré comme une dilution de Fe 0 réactif avec une conséquence sur la cinétique
des réactions chimiques désirées. Cependant plusieurs études expérimentales relataient une efficacité
accrue des systèmes Fe0/sable par rapport aux systèmes Fe0 purs. Une synthèse de l’état de l’art est
donnée dans la thèse de Master de Miyajima (2012) (Göttingen). Les travaux de thèse de Btatkeu-K
(Ngaoundéré) et de Togue-Kamga (Yaoundé) ont démontré clairement que le mélange d’un matériau
non réactif comme le sable ou du gravier au fer était avantageux pour la durabilité des lits filtrants
(Btatkeu-K et al. 2014a, 2014b). En effet, à cause de l’expansion volumétrique du fer, il fallait réduire
au maximum la proportion de Fe0 dans le mélange pour augmenter la durabilité. Des simulations
supportées par l’expertise du Dr. Caré (Paris) ont démontré que les proportions volumétriques
optimales de fer doivent être inférieures à 52 % (Caré et al. 2013). Ceci correspond à une proportion
massique de 25 % pour le mélange fer/quartz et révèle que pour une efficacité accrue, les systèmes
nouveaux permettront une économie du matériel de 75 %. Autrement dit, l’addition de sable encore
utilisée comme un moyen de réduire les coûts du fer, est un pré-requis pour un système durable.

4.3 Les résultats pratiques


Le premier résultat pratique c’est que des filtres domestiques efficaces peuvent être dimensionnés en
mélangeant des matériaux non expansifs au Fe 0 (gravier, pumice, sable). Ceci explique pourquoi les
filtres à matériaux poreux sont efficaces et durables (Hussam 2009, Neumann et al. 2013, Rahman et
63
Afrika & Wissenschaft
Africa & Science / Afrique & Science
al. 2013). Les résultats expérimentaux ont indiqué que le taux optimal de Fe 0 est de 25 % (Btatkeu-K et
al. 2014b). Ces résultats confirment la théorie du système et rationalisent la proportion volumétrique
Fe0:sable de 30:70 efficacement testée au Canada (Gottinger et al. 2013). D’autres travaux
expérimentaux associés ont confirmé que les matériaux poreux sont meilleurs que les matériaux
compacts en ce sens qu’ils contribuent à l’emmagasinement des produits de corrosion (Bilardi et al.
2013).
Quelles substances fallait-il tester pour avoir des résultats valables avec des tests à durées
raisonnables ? Il faut également considérer le manque de laboratoires équipés. Le seul appareil
disponible est encore un spectrophotomètre UV. Il fallait donc trouver un colorant capable de livrer le
maximum de renseignements sur le système Fe0/H2O en peu de temps. Le colorant devrait par
conséquent avoir une affinité faible pour les produits de corrosion. Pour réduire la durée de
l’expérience, il fallait utiliser des petites quantités de Fe0 (Noubactep et Caré 2011). Le bleu de
méthylène fut identifié comme le colorant de choix, qui en plus de présenter une faible affinité pour le
hydroxydes/oxydes de fer, présente une grande affinité pour le sable (Mitchell et al. 1955, Miyajima
2012, Btakeu-K et al. 2013, Btakeu-K et al. 2014a, Btakeu-K et al. 2014b, Btakeu-K et al. 2016). Le
bleu de méthylène et d’autres colorants sont actuellement testés à Douala, à Ngaoundéré et à Maroua
pour caractériser divers aspects du dimensionnement des systèmes filtrants à Fe0.

5 En guise de conclusion
L’installation généralisée des filtres à Fe 0 en Afrique nécessite (i) une source abordable de matériaux à
Fe0, (ii) des travaux supplémentaires de tests au laboratoire et à l’échelle pilote et (iii) des laboratoires
de référence pour l’analyse de la qualité de l’eau. Il est postulé que le forgeron Africain fournira le
matériau à Fe0. Des astuces efficaces permettront les tests nécessaires à tous les niveaux pour
optimiser les filtres. Cependant, pour garantir la santé des populations, il faudra construire et équiper
des laboratoires indépendants pour les renseigner sur la qualité de l’eau produite. Ces analyses
soutiendront par ricochet les efforts de perfectionnement des filtres. Egalement essentiel : un
personnel qualifié, régulièrement recyclé doit prendre en main la filaire de l’eau au sein de chaque
commune. Seule cette approche décentralisée pourra permettre aux citoyens de comprendre les
enjeux et de contrôler la qualité de l’eau produite.

Remerciements
Les auteurs aimeraient exprimer leurs gratitudes à Dr. Sabine Caré (Paris/France), Dr. Antoine Ghauch
(Beirut/Liban), Dr. M. Azizur Rahman (Hannovre/Allemagne) et Dr. Angelika Schöner
(Halle/Allemagne) pour leurs contributions essentielles au progrès réalisé. Que tous les autres
collaborateurs non nommés, y compris les étudiants, les techniciens et les partenaires des activités
associatives se sentent également remerciés.

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Bibliographie
Liste des 22 articles publiés en collaboration avec l’Afrique. Les articles sont classés par ordre
chronologique décroissante. Les auteurs Africains sont marqués gras et les non camerounais
soulignés.

1. Makota S., Ndé-Tchoupé I.A., Mwakabona H.T., Tepong-Tsindé R., Noubactep C., Nassi A.,
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Btatkeu-K. B.D., Tchatchueng J.B., Noubactep C. Caré S. (2016): Designing metallic iron based water
filters: Light from methylene blue discoloration. Journal of Environmental Management 166, 567–573.
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Contact des auteurs: [mais les contacts sont déjà dans les articles. D'après
moi on laisse ceci tombé! On garde « Avec la contribution de… » au début]

Jacob Emmanuel MABE


Université libre de Berlin, Allemagne.
Courriel:

Péguy TCHAKOUTIO NDONKOU


Université de Yaoundé I
Faculté de Médecine de l’Université Bengono Touré de Yaoundé, Cameroun.
Courriel : pegndonko@yahoo.fr

Richard DOMGA
ENSAI, Département de Chimie Appliquée, Laboratoire de Chimie Industrielle et de Pollution,
Université de Ngaoundéré, BP… Cameroun.
Courriel: domga.richard@yahoo.fr

Nadège GATCHA-BANDJUN
Département de Chimie Université de Maroua BP 55 Maroua Cameroun.
Courriel: nadegegatcha@yahoo.fr

CHICGOUA NOUBACTEP
Geologie Appliquée, Université de Göttingen, Goldschmidtstraße 3, D - 37077 Göttingen, Allemagne;
Kultur und Nachhaltige Entwicklung CDD e.V., Postfach 1502, D - 37005 Göttingen, Allemagne;
Comité Afro-européen - Avenue Léopold II, 41 - 5000 Namur, Belgique.
Courriel: cnoubac@gwdg.de

Jean-Bosco TCHATCHENG

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ENSAI, Université de Ngaoundéré, Département de Chimie Appliquée, Laboratoire de Chimie
Industrielle et de Pollution, BP 455 Ngaoundéré, Cameroun.
Courriel:

Paul WOAFO
Laboratoire de Modélisation et Simulation en Ingénierie, Biomimétisme et Prototypes, Faculté des
Sciences, Université de Yaoundé I, BP 812 Yaoundé, Cameroun.
Courriel:

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Produit commercial pour certains, source de vie non estimable en argent - et donc
non commercialisable - pour d’autres, l’eau potable fait aujourd’hui débat en Afrique
au sud du Sahara. Le problème n’est pas tant celui de l’accessibilité à cette
ressource. Bien au contraire ! L’Afrique subsaharienne dispose de réserves quasi
inépuisables, ceci à côté d’océans, de grands fleuves et grands lacs exploitables à
moindre coût. Alors, comment pouvons-nous expliquer la carence actuelle de l’eau
potable dans les cités africaines?

Ce livre aborde le problème sous divers aspects. Selon les auteurs, l’Afrique
dispose du savoir-faire technologique nécessaire à l’approvisionnement des
populations en eau potable et à très moindre coût. Ils invalident de ce fait les
politiques de commercialisation de l’eau potable actuellement en cours sur le
continent.

ISBN : 978-2-9808950-9-8

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