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Bange Pierre. A propos de la structure de l'interaction : la réciprocité des motivations. In: Réseaux, Hors Série 8, n°1, 1990.
Les formes de la conversation volume 1. pp. 51-68;
doi : https://doi.org/10.3406/reso.1990.3530
https://www.persee.fr/doc/reso_0984-5372_1990_hos_8_1_3530
DE L'INTERACTION :
Pierre Bange
Université de Lyon
Distinctions analytiques
"désigne les conditions que l'un des acteurs pose, au moyen d'une
activité ou d'un ensemble d'activités, à son partenaire pour le
déroulement des activités de celui-ci". Et il existe un "principe de
suspensibilité des dépendances conditionnelles" (1977 : 59) qui joue
un grand rôle pour la constitution d'ensemble de l'interaction. "En
particulier, ce principe donne la possibilité de traiter les perturbations
et d'assurer les présuppositions nécessaires pour réaliser des
dépendances conditionnelles". Comme chez Schegloff, le principe de
fixation par anticipation des activités et le principe de suspensibilité
des dépendances conditionnelles doivent pouvoir être appliqués non
seulement aux paires adjacentes, c'est à dire au niveau de
l'organisation locale, mais aussi à l'analyse des connexions entre blocs
plus importants d'activités.
Kallmeyer et Schiitze (1979) suggèrent aussi de distinguer
entre des dépendances conditionnelles "plus interactives" et d'autres
"plus monologiques". Par là, le principe de fixation par anticipation
des activités devient un principe général de cohésion du discours,
puisqu'il est efficient même à l'intérieur d'un discours monologique.
Ces explications font apparaître qu'il faut distinguer de la
"dépendance conditionnelle" la dépendance séquentielle des actions,
qui fait entrer le résultat d'une action dans l'action suivante comme
une condition réalisée, et explique la succession des séquences. On
sait, par exemple, que les ouvertures de conversations téléphoniques
comportent le traitement successif de tâches telles que :
a - manifestation de l'intention de communiquer et de la disposition à
communiquer ;
b - identification mutuelle ;
с - introduction et acceptation d'un premier thème.
Mécanisme de l'interaction
L'intercompréhension.
opérationnel qui n'est pas autonome, qui n'a de fonction que par
rapport à la première, comme moyen à son service.
Les deux types d'interprétation peuvent être empiriquement
séparés, dit Kayser, et les buts communicatifs peuvent être compris
sans que le contenu propositionnel de renonciation l'ait été. Si cela
était, cela reviendrait à dire que la seconde interprétation n'est pas la
condition de la première. En réalité, ce qui permet de comprendre les
buts sans comprendre la signification, c'est le contexte et l'intervention
d'autres codes que le code verbal et cette compréhension est limitée à
ce que ces codes et le contexte peuvent permettre de comprendre.
La seconde interprétation concerne l'aspect sémantique de la
communication, si on définit, avec Winograd (1976), comme le fait
Kayser, la sémantique comme : "l'étude des relations entre les objets
linguistiques et les états et processus mentaux impliqués dans leur
production et leur compréhension". Les états mentaux impliqués sont
constitués notamment par un savoir sur le monde représenté par des
"frames" ou des "scripts" stéréotypés, par des concepts typifies, c'est à
dire socialement partagés. La communication repose sur la
supposition réciproque diffuse que le partenaire dans l'interlocution
dispose des mêmes connaissances que le premier ou de connaissances
comparables et qu'il sait que celui-ci le sait et sur la supposition que
chacun dispose d'hypothèses concernant les différences de leurs
savoirs. Les partenaires font également des suppositions réciproques
chacun sur l'interprétation de la situation par l'autre et sur le degré de
conformité de leurs interprétations ; sur la personnalité de l'autre, sur
son rôle et sur la façon qu'il a de considérer ego ; sur les buts qui
guident l'autre et sur les buts qu'alter prête à ego, ainsi que sur leur
degré de communauté et de divergence. C'est cela que Schutz désigne
comme "la thèse générale des perspectives réciproques" (1962 : 12) à
partir de laquelle les partenaires construisent leurs interprétations.
L'intercompréhension, dit Kayser, "consiste fondamentalement
dans les activités d'interprétation des interlocuteurs. A travers les
processus de compréhension, les interlocuteurs interprètent les
occurrences linguistiques qu'ils perçoivent ; à travers les processus de
production, ils anticipent l'interprétation de leurs occurrences, c'est à
dire qu'ils conçoivent leurs occurrences de manière qu'elles soient
interprétables par les récepteurs et même qu'elles le soient selon
l'interprétation qu'ils visent" (15). Mais l'intercompréhension, c'est à
dire la similitude dans l'attribution des significations, n'est manifestée
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son but immédiat et, comme une question s'inscrit toujours dans un
système plus vaste de motivations, de réaliser aussi d'autres buts ; il
peut accepter la motivation en-vue-de du questionneur A, son projet
d'action, comme motivation à-cause-de pour son acte de répondeur et
y réagir en-vue-de donner satisfaction à A et en vue de réaliser
d'autres buts supérieurs qui passent par cette satisfaction de A. La
séquence se déroule alors selon le scénario typique connu et accepté.
Ayant réalisé à travers la réponse de В un premier but
subordonné, A est arrivé au terme d'une étape d'action et va procéder
lui-même à une évaluation avant de choisir la prochaine étape à
réaliser. C'est une étape d'action initiée par A, acceptée par В et
réalisée coopérativement sur la base d'une réciprocité de motivations.
Le résultat de l'action de A réside dans le fait que В réagit, non dans
le contenu de sa réaction, bien que celui-ci influe évidemment sur la
suite du déroulement C'est à dire sur le processus d'interprétation et
d'évaluation de A qui ouvre pour lui l'étape suivante. Pour la plupart
des séquences, deux types de réactions peuvent être envisagés :
- la réaction de type "préférentiel", par exemple
l'acceptation d'une requête ;
- la réaction de type "non-préférentiel", par exemple le
refus d'une requête. Les dénominations "préférentiel" et
"non-préférentiel" se justifient par les problèmes de
"figuration"
(Goffman) qui sont impliqués par le type de
réaction.
Notes
Bibliographie
schutz A., 1962, "Common Sense and Scientific Interpretation of Human Action",
Collected Papers, I, 1962, 3-47.
schutz A., 1982, Dos Problem der Relevant, Frankfurt/Main : Suhrkamp.
SCHUTZ A., 1964, "The social World and the Theory of Social Action", Collected
Papers, П, 3-19.
schutz A., 1987, Le chercheur et le quotidien, Paris, Méridiens Klincksieck.
wiNOGRAD т., 1976, "Towards a Procedural Understanding of Semantics", Revue
internationale de Philosophie, 1 17-8. 1976. 260-303.
Wright G.H., 1971, Explanation and Understanding, Trad, all : Erklàren und
Verstehen, 1974, Frankfurt/Main : Athenaum.