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Eliseo Verón

L'analogique et le contigu
In: Communications, 15, 1970. pp. 52-69.

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Verón Eliseo. L'analogique et le contigu. In: Communications, 15, 1970. pp. 52-69.

doi : 10.3406/comm.1970.1214

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1970_num_15_1_1214
Eliseo Verôn

L'analogique et le contigu

(Note sur les codes non digitaux)

particulier
1. La linguistique
: interprétée
a introduit
à un niveau
une distinction
élevé d'abstraction,
qui jouit d'unelle
privilège
semblethéorique
pouvoir
s'appliquer à un grand nombre de champs différents des processus de commun
ication humaine. Dans son Cours de linguistique générale Saussure a établi
une distinction entre liens syntagmatiques et liens associatifs (Saussure, éd. de
1949 : deuxième partie, chapitre v). Le syntagme est « la chaîne parlée », la succes
siondes mots dans le temps. Les unités composant cette chaîne verbale entre
tiennent des relations que Saussure a appelées « syntagmatiques »; celle qui
existe par exemple entre « Jean » et « sort » dans le message « Jean sort ». Les
relations syntagmatiques sont celles qui existent entre les unités d'un message
donné, en raison de la « co-présence » simultanée de plusieurs unités à l'intérieur
du message. D'autre part, il y a les relations résultant, selon Saussure, d' « asso
ciations mentales ». Prenons par exemple l'expression « à sang froid ». L'unité
« froid » est, dans cette expression, mise en relation par association avec les
unités (absentes) « chaud », « brûlant » etc. « Sang » est associé de façon analogue
aux unités « sanguin », « sanguinolent », « sanguinaire », « exsangue » et aussi à
« chair », « os », etc. Les axes selon lesquels on peut établir les relations associa
tives sont multiples. Certains axes peuvent définir un ensemble de termes ayant
en commun un morphème invariable (par exemple l'ensemble composé de
« gaîté », « musicalité », « bonté », et bien d'autres termes). L'association peut
aussi être établie à partir de critères sémantiques excluant des traits morphol
ogiques communs : par exemple l'association qui relie « arrière » et « avant ».
La notion saussurienne de relation associative se réfère donc à des liens existant
entre, d'une part, des unités qui sont présentes dans le message, et d'autre part,
des unités existant dans le répertoire, mais absentes du message. Cette notion
peut être rapprochée de ce que nous appellerions sans doute aujourd'hui des
champs sémantiques 1.
Roman Jakobson a emprunté cette distinction à l'ouvrage classique de Saus
sure, quand il s'est référé au « caractère bivalent du langage ». L'approche de
Jakobson est d'ordre pragmatique. Il prend donc pour point de départ l'idée

1. « Le rapport syntagma tique — remarque Saussure — est m praesentia; il repose


sur deux ou plusieurs termes également présents dans une série effective. Au contraire,
le rapport associatif unit des termes in absentia dans une série mnémonique virtuelle »
(Saussure, 1949, p. 171).
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ISanalogique et le contigu

que tout utilisateur d'un langage effectue, pour émettre un message, deux opé
rations fondamentales : l'émetteur doit sélectionner, dans le répertoire d'unités
disponibles et combiner les unités sélectionnées de façon à composer le message *.
Deux relations de base entre les signes naissent de ces opérations : la substitution
(ou similarité) et la contiguïté.
« Le destinataire perçoit que l'énoncé donné (message) est une combinaison
de parties constituantes (phrases, mots, phonèmes, etc.) sélectionnées dans le
répertoire de toutes les parties constituantes possibles (code). Les constituants
d'un contexte ont un statut de contiguïté, tandis que dans un groupe de substi
tution les signes sont liés entre eux par différents degrés de similarité, qui oscillent
de l'équivalence des synonymes au noyau commun des antonymes. » (Jakobson,
1963, 48-49.)
Jakobson décrit à titre d'exemple un test d'association de mots. Si le stimulus
verbal « hutte » est proposé, les réponses des sujets peuvent être classées en deux
catégories : les substitutives et les predicatives. Si la réponse est « cabane » ou
« cahute », elle appartient à la première catégorie, si le sujet répond « a brûlé »,
sa réponse relève clairement de la seconde catégorie. A « hutte » on peut substi
tuer« cabane »; « a brûlé » forme avec « la hutte » un ensemble syntaxique. Il
joue le rôle d'un prédicat et établit ainsi un lien de contiguïté. Supposons que le
mot « hutte » soit suivi de « est une petite maison pauvre »; dans ce cas, la réponse
établit une relation de contiguïté avec le stimulus d'un point de vue syntaxique,
et en même temps une relation substitutive d'un point de vue sémantique*.
Le champ d'application de cette distinction paraît être très vaste et Jakobson
a cité différents domaines dans lesquels elle entre en jeu. C'est le cas par exemple
de la critique littéraire; la distinction entre les relations de substitution et de
contiguïté correspond aux procédés que sont respectivement la métaphore
et la métonymie. Ceci nous permet de dire qu'un style littéraire est caractérisé
par l'emploi prédominant de l'une ou l'autre de ces figures. Jakobson cite égal
ement a) la classification des mécanismes du rêve établie par Freud (le « déplace
ment» et la « condensation » étant des mécanismes de contiguïté, alors que
« l'identification » et le « symbolisme » sont des opérations substitutives); b) la

1. A la lumière des développements récents des grammaires transformationnelles,


le modèle de l'émetteur présenté par Jakobson peut paraître beaucoup trop simple.
Cependant, il faut tenir compte du fait que la plupart des modèles transformationnels
sont purement syntaxiques; les notions jakobsoniennes de sélection et de combinaison
se proposent d'établir certaines des conditions de production des messages linguistiques
à un niveau d'analyse très différent : celui de Jakobson est un des quelques modèles
issus de la linguistique qui dépassent largement l'hypothèse d'après laquelle la signi
fication linguistique peut être étudiée sans tenir compte de la situation de communic
ation.Cette hypothèse, typiquement chomskyenne, s'exprime clairement par la
distinction nette entre compétence et performance. (Pour une vue critique orientée vers
la construction d'un modèle génératif qui met en question l'hypothèse de la prédo
minance syntaxique et la distinction même entre syntaxe et sémantique, cf. Chafe,
1967 et 1968).
2. Les relations de substitution sont aussi, d'après Jakobson, basées sur le principe
de similarité (voir citation précédente). Comme nous allons employer dans cette étude
la notion de a similarité > dans le sens où l'on emploie ce mot quand on parle de la
codification analogique, nous préférons ne pas l'employer quand nous nous référons
aux distinctions de Jakobson, et nous limiter ainsi, dans le cadre de ce contexte, au
terme c substitution ».

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Eliseo Verôn
distinction introduite par Frazer entre les processus magiques « homéopathiques »
et « imitatifs » d'une part (c'est-à-dire la magie par similarité) et la magie
« contagieuse » d'autre part (c'est-à-dire la magie basée sur des principes de
contiguïté) ; c) les types de processus d'acquisition du savoir établis par Bateson
(l'intégration « progressive » et « sélective ») et d) la signification attribuée par
Parsons aux opérations de conjonction et de disjonction dans le processus de
socialisation.
Ce dernier exemple (Parsons et Baies, 1956, 119-120) révèle que les dimensions
inhérentes à la dichotomie substitution /contiguïté sont d'une grande généralité.
La notion de conjonction ou d'addition implique un ensemble construit comme un
agrégat de parties : C = (a.b.c). Aucun des termes n'est équivalent à l'ensemble
C; seule leur somme est équivalente à C. Dans une relation de disjonction, au
contraire, les termes peuvent se substituer les uns aux autres; les termes étant
reliés aux autres soit par une opposition soit par une équivalence, l'expression
(a /\ b /\ c) ne représente plus une somme mais un ensemble d'éléments dont
chacun peut être remplacé par n'importe lequel des autres dans une fonction
donnée.
J'avancerai ici l'hypothèse selon, laquelle la dichotomie substitution /conti
guïté est un des axes fondamentaux qui servent à distinguer les principes de
codage dans la communication humaine. L'introduction de cette distinction
peut aider à clarifier certaines des difficultés qui entourent le problème d'une
typologie des règles de codification. Plus précisément, je voudrais suggérer que
le principe de métonymie ou de contiguïté est le mécanisme sémiologique qui
soutient la nature signifiante des processus concrets d'action sociale, c'est-à-dire
leur caractère de « messages ».

II. L'action sociale en tant que succession de comportements communicatifs


peut être sous différents aspects comparée au langage. L'un d'eux est celui de
l'organisation hiérarchique. Le comportement social et le comportement verbal
sont tous deux des processus qui se caractérisent par une organisation en mult
iples niveaux superposés. Dans le langage : a Les phonèmes sont organisés en
morphèmes, les morphèmes sont combinés pour former des propositions qui,
dans l'ordre de succession voulu, forment une phrase, et un enchaînement de
phrases constitue le message » (Miller, Galanter et Pribram, I960, 14).
Des termes analogues peuvent être employés pour décrire le comportement.
L'action demande une description à plusieurs niveaux. Cette comparaison a été
développée par Miller, Galanter et Pribram qui ont pris pour fil conducteur le
modèle du circuit en feedback. Vient ensuite une autre propriété comparable.
Le comportement social et le langage ont une caractéristique commune très
importante, que nous avons essayé de décrire ailleurs sous le nom de « multi-
valence sémantique ». Si nous nous limitons au niveau « molaire » de la descrip
tion du comportement, il nous est possible d'affirmer qu'une même action sociale
présente aux yeux d'un observateur une pluralité de « significations ». En d'autres
termes, on peut dire qu'un observateur peut interpréter une succession donnée de
comportements sociaux de plusieurs manières différentes selon le niveau de
description choisi1.

1. Voir Verôn (1968), surtout le chapitre iv où la notion de « multivalence sémanti


que » de l'action sociale est discutée en relation avec le modèle sociologique du « compor
tement orienté subjectivement » tiré de Max Weber.

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L'analogique et le contigu
D'autre part, on considère cependant que l'action en tant que message (soit
directement perçue, soit son « image » comme dans le cinéma par exemple) obéit
à des règles de codification très différentes de celles qui entrent en jeu dans les
messages verbaux. Rappelons d'abord comment les deux types fondamentaux
de codification ont été décrits dans la littérature existante. Dans un livre de
Ruesch et de Kees sur la communication non verbale, nous trouvons une descrip
tion qui peut être considérée comme typique : « Les découvertes récentes ont fait
apparaître sous un jour nouveau les différences entre deux façons de codifier
l'information. L'une d'elles, la codification analogique, crée une série de symboles
qui sont, par leurs proportions et leurs relations, similaires à la chose, à l'idée ou
à l'événement qu'ils représentent. Par exemple, les compagnies de chemin de
fer possèdent des modèles réduits de leurs réseaux ferrés, comportant des détails
tels que des gares, des tunnels et des voies ferrées situés sur des maquettes en
relief du terrain. Ces modèles réduits peuvent être considérés comme analogues
au véritable réseau ferré. »
« Cette forme de codification s'appuie sur des fonctions continues, contrair
ement à la codification digitale, qui opère avec des éléments discrets séparés par
des intervalles. Les deux exemples les plus caractéristiques de codification digitale
sont le système numérique et l'alphabet phonétique. Il n'existe aucune transition
progressive entre une lettre quelconque de l'alphabet et la suivante ou entre un
nombre du système numérique et le suivant. Il est évident que l'information
transmise par l'intermédiaire d'un système de cette sorte est codée au moyen de
diverses combinaisons de lettres ou « digits » (Ruesch et Kees, 1961, 8).
Il faut remarquer qu'un des points centraux de la définition de la codification
analogique est l'existence d'une « similarité » ou « ressemblance » entre le signe
et ce qu'il représente. La caractérisation du matériel analogique citée ci-dessus
peut être rapprochée de la définition que Morris fait de 1' « icône » (Morris, 1946).
Il y a certaines « proportions » ou « relations » qui sont préservées quand nous
passons du denotatum au signe. Une photographie est donc un message ana
logique. Au contraire, les mots ne sont dans aucun sens acceptable du terme
« similaires » aux choses qu'ils désignent. Bateson a mentionné la machine à
calculer ordinaire comme un bon exemple de codification digitale, dans laquelle
« l'entrée diffère déjà très profondément des problèmes extérieurs auxquels la
machine est en train de « penser ». Dans les machines analogiques, par contre,
« les événements extérieurs... sont représentés dans la machine par un modèle
reconnaissable » (Bateson, 1951, 171).
Ainsi, tandis que le langage est habituellement présenté comme l'exemple
classique de codification digitale au niveau de la communication humaine natur
elle, les comportements considérés comme des messages (c'est-à-dire la commun
ication par les attitudes et les mouvements du corps) ont été classés dans le
type analogique. Qu'est-ce que la communication analogique? demandent les
auteurs d'un important livre récent sur la théorie de la communication. Et ils
poursuivent : « La réponse est relativement simple : c'est pratiquement toute la
communication non verbale » (Watzlawick, Beavin et Jackson, 1967, 62). Cepen
dant, considérer « communication non verbale » et « communication analogique »
comme des expressions équivalentes, peut nous mener à de graves confusions.
Dans une étude sur la communication analogique dans l'interaction, Bateson
et Jackson ont fait il y a plusieurs années les remarques suivantes : « Dans de
nombreux cas, il est en réalité impossible de séparer le contenu (subject matter)
d'une communication analogique... de la substance matérielle du message

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(message material) dans laquelle une certaine proposition relative à ce contenu


est encodée. Les processus mêmes de l'échange peuvent en fait contenir deux
éléments à la fois : a) un élément signalisateur (par exemple si A serre le poing,
il mentionne ou suggère une possibilité de violence et le geste a une fonction
communicationnelle puisque le poing fermé équivaut à un nom pour un certain
type d'action) et b) un autre élément, plus direct, puisque l'acte de fermer le
poing représente un changement réel dans la disposition de A à l'action violente.
L'expression de cette disposition n'est pas séparée de la réalité pragmatique de
cette disposition par une étape de codification. Le poing serré n'est pas seulement
un nom désignant un certain type d'action, il est aussi une partie ou un échant
illon de cette action. Il est donc dangereux d'employer dans nos réflexions la
notion même de codification qui a été si utile à l'analyse de la communication
digitale » (Bateson et Jackson, 1964, 272 x).
Ekman a fait une restriction tout à fait semblable. Dans une étude récente, il
propose une typologie des comportements non verbaux basée sur la fonction,
l'origine et le procédé de codage des actes. Il établit une distinction entre codi
fication « arbitraire » et codification « iconique ». La plupart des mots ne ressem
blentpas aux choses qu'ils désignent. Certaines unités non verbales sont aussi
codées arbitrairement, par exemple le fait d'ouvrir et de fermer une main levée
peut être aussi bien un geste de bienvenue qu'un geste d'adieu. Mais la plupart
des actes non verbaux sont, selon Ekman, codés iconiquement, ou en d'autres
termes : « Le signe présente une certaine ressemblance avec ce qu'il signifie ».
On peut observer que les termes « arbitraire » et « iconique » ont ici une signi
fication très similaire à celle de « digital » et « analogique », bien que Ekman
fasse remarquer que :
« Les termes analogique et digital (...) impliquent de nouvelles définitions des
mathématiques appliquées au modelage de l'information en cours et soulèvent
la question de la continuité des éléments d'information, notions qui ne sont pas
indispensables à la distinction que nous établissons ici »(Ekman, 1968).
Au cours d'une discussion suivant l'exposé de son étude, Ekman fut amené à
introduire sous forme de « commentaires » un troisième type d'actes non verbaux :
« Si je donne un coup de poing à quelqu'un au cours d'une conversation, ce
geste n'est pas semblable à une agression, il est une agression, l'acte est la chose
signifiée. Si je menace quelqu'un du poing, il s'agit alors de savoir si c'est ou non
un acte iconique ; il ne peut pas être iconique si je menace la personne, lui mont
rant non quelque chose d'analogue à ce que je ferais, mais ce que je vais faire (...).
Je pense que nous devons donc distinguer trois types de codification : la codifi
cation arbitraire, la codification iconique et un troisième type qu'on pourrait
peut-être appeler non codé » (Ekman, 1968, « Appendice »).
Si je frappe quelqu'un pendant une conversation, sous-entend Ekman, il ne
s'agit pas de savoir si c'est ou non un signe iconique, il semble qu'il n'y ait là
aucun signe : il y a réellement agression et non signe d'agression. Il semble donc
que l'existence d'un signe implique une certaine discontinuité; une certaine
forme de distance spatiale ou temporelle entre les éléments composant le signe

1. La distinction entre subject matter et message material, (très souvent impossible à


établir, d'après ces auteurs, au sein des échanges non-verbaux), semble pouvoir être
reformulée, dans la terminologie hjelmslevienne, comme celle entre la substance du
contenu et la forme de l'expression, respectivement. Voir les remarques de Barthes,
1964, section II.1.3.

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Un objet réel n'est pas un signe de ce qu'il est mais il peut être le signe de quelque
chose d'autre. Un problème se pose en ce qui concerne l'action, car l'action n'est
jamais un signe « primaire » comme un mot ou un groupe de mots, mais elle est
tout au plus un signe « secondaire »; le comportement verbal est d'abord destiné à
porter un message; la majorité des comportements non verbaux spontanés sont
d'abord destinés à remplir quelque autre fonction et peuvent secondairement
véhiculer certains messages 1. Ainsi, s'il est vrai que l'acte de frapper n'est pas
un signe de lui-même, il peut certainement être le signe de quelque chose d'autre
et très probablement le signe de la séquence d'agression qui va se continuer par
la suite. Comme nous le montrerons plus loin, dans le cas des signes comporte
mentaux, la dimension temporelle joue un rôle capital. Ce point ressort implic
itement de la remarque d'Ekman : il estime intéressant de se demander si le
geste menaçant est ou non un signe iconique. Je pense que c'est tout simplement
parce que le comportement menaçant annonce un événement futur et qu'il en
résulte donc un laps de temps; il s'agit de ce que nous pourrions appeler une
présentation différée.

III. Les mêmes faits amènent Bateson et Jackson à mettre en doute l'utilité
d'appliquer la notion de codification à certaines formes de comportement et
amènent Ekman à introduire un type d'actes non verbaux « non codés ». Il y a des
comportements qui ont indubitablement une fonction communicationnelle et
peuvent être considérés comme des signes, mais on ne peut pas dire ni qu'ils
reposent sur une relation arbitraire ni qu'il soient similaires à ce qu'ils représen
tent a.
Il me semble qu'un problème a été clairement défini mais qu'aucune solution
valable n'a été proposée. « La codification non codée » est en tout cas une expres
sion bien singulière. Si les actes en question sont des messages, s'ils peuvent
réellement être considérés comme des signes, ils doivent nécessairement être
soumis à certaines règles de codification. Le fait que nous soyons incapables de
les classer soit comme codés arbitrairement soit comme codés iconiquement, ne
signifie pas qu'ils n'obéissent à aucune règle de codification; cela signifie plutôt
qu'il nous faut remettre en question nos typologies construites sur les dicho
tomies digital /analogique ou arbitraire /iconique.
Examinons d'abord le critère de « similarité ». On dit toujours qu'un signe
est arbitraire quand il n'y a aucune relation intrinsèque entre ce signe et la chose
qu'il représente. Le lien entre le signe et le denotatum apparaît alors comme
résultant d'une règle purement conventionnelle ; suivant l'expression de Bateson
et Jackson, rien dans le mot « table » ne ressemble particulièrement à une table.
Mais les faits empiriques nous amènent à rejeter l'utilité de l'opposition corre
spondant à la dichotomie arbitraire /similaire. Il semble évident qu'il ne s'agit
pas d'une dichotomie unidimensionnelle : elle renferme plusieurs axes différents.
Le critère de similarité est en fait un critère perceptuel ou « phénoménolog
ique ». L'évaluation de la similarité varie avec les changements qui intervien
nent au niveau perceptif et nous pouvons supposer qu'elle varie selon les per
sonnes. Nous disons qu'une photographie est un message analogique : ce que

1. La distinction entre systèmes de signification primaire et secondaire a été faite


par C. Lévi-Strauss (1958), chap. xiv.
2. Voir à ce sujet l'analyse du c message photographique » chez Barthes, 1961.

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nous voyons « ressemble » à l'objet reproduit. Mais si nous regardons cette photo
graphie agrandie dans des proportions assez importantes, nous y trouverons
simplement une foule de points discrets d'intensité variable : toute similarité
a disparu. La télévision nous fournit un autre bon exemple. Ici aussi, quand un
changement donné est introduit dans les paramètres de réception, une forme ou
une silhouette bien connue et reconnaissable se transforme en une configuration
de lignes discrètes ne présentant aucune similarité avec l'objet représenté. Je
pense que le passage de la similarité à la non-similarité est progressif, quantit
atifet relatif aux processus de perception.
Ensuite, la codification digitale est, comme nous l'avons vu, associée à la
notion de discontinuité; nous supposons que les messages digitaux sont construits
au moyen de règles combinatoires appliquées à des éléments discrets entre le
squels il n'y a pas de transition. En retour, le matériel analogique est caractérisé
par sa continuité. Or il est avéré que toute forme visuelle peut être traduite en
un système digital de représentation spatiale au moyen d'une surface réticulaire
dans laquelle chaque unité se définit par oui ou non. La précision de cette trans
formation dépend de la dimension des unités de surface de la grille. Comme c'était
le cas pour la dichotomie similarité / non similarité, la continuité et la disconti
nuité sont les pôles d'un axe qui doit être conçu en termes de quantité, de pro
gressivité et de relativité.
J'ai rappelé plus haut le fait évident que le message « continu » que représente
une photographie pour la perception naïve apparaît à un certain stade d'agran
dissement comme une surface composée d'une collection de points discrets. Si
nous considérons le langage verbal, le phénomène inverse semble se produire. Le
langage verbal a été très souvent cité comme l'exemple typique d'un système
basé sur des règles combinatoires appliquées à des unités discontinues. Cette
image s'est cristallisée en phonologie dans divers modèles construits dans le
cadre de ce qu'on a appelé le « binarisme » et elle semble coïncider avec l'expé
rience commune de l'utilisation du langage. En fait, l'utilisateur moyen distingue
facilement les unités composant les chaînes phonémiques de son langage, et il est
capable de fragmenter intuitivement le flux d'un discours en unités discrètes.
Cependant, il paraît impossible d'établir une relation stricte entre le modèle
phonologique binaire construit en termes de traits distinctifs, et le phénomène
acoustique analysé du point de vue de ses propriétés physiques. Les phonéticiens
ne semblent pas avoir trouvé de critère opérationnel pour diviser le flot acoustique
en unités discrètes qui pourraient correspondre aux entités abstraites appelées
« phonèmes ». Au niveau de sa structure physique, le langage apparaît comme
un phénomène continu. Ce fait n'amène certainement pas à nier la valeur du
modèle binaire; il révèle simplement que nous traitons les faits acoustiques du
langage « comme si » ils étaient des chaînes d'éléments discrets. Mais quand la
théorie rattache le modèle phonologique binaire aux faits acoustiques, les règles
du composant phonologique de la grammaire modifient le caractère strictement
digital de ce modèle x.

1. « Dans la représentation phonémique, les différents traits distinctifs ont le droit


de prendre seulement deux valeurs : plus ou moins. Cependant, dans cette représen
tationaucun contenu phonétique n'est associé directement avec les traits distinctifs
qui entrent en jeu ici en tant que marqueurs différentiels abstraits. Les règles du compos
antphonologique modifient — parfois radicalement — les matrices de la représen
tationphonologique : les règles donnent des valeurs à des traits non-phonémiques,
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L'analogique et le contigu

Le point essentiel qui se dégage de ceci est le suivant. Un message verbal et


une photographie ont en commun une caractéristique très importante : ils ne
font pas, en aucun sens raisonnable de l'expression, partie de ce qu'ils représent
ent. Les messages analogiques (ceux qui manifestent une relation « imitative »
avec ce qu'ils représentent) comme les messages verbaux, maintiennent seulement
une relation substitutive avec leurs referents. En retour, dans le cas de ce
qu'Ekman appelle « des actes non codifiés », le lien substitutif qui les fait fonc
tionner en tant que signes est bâti sur, ou issu d'une relation de contiguïté
empirique avec ce qu'ils représentent.
L'axe substitution /contiguïté définit donc la frontière entre des signes obéis
sant à deux principes de codification différents; d'une part les signes construits
conformément à la règle de substitution entre eux et leurs referents; d'autre part,
les signes tirant leur fonction substitutive (c'est-à-dire leur fonction symbolique)
d'un lien de contiguïté empirique entre eux et les choses qu'ils représentent.
La règle de contiguïté établit une équivalence symbolique entre un ensemble
et une de ses parties ou bien entre des parties systématiquement reliées, d'un
ensemble donné1. Nous pourrions parler de signes « métonymiques » pour les
distinguer des signes « métaphoriques » qui sont basés uniquement sur un prin
cipe de substitution et excluent toute relation empirique ou existentielle entre les
deux termes du signe. En raison du fait que le signe métonymique fait (ou a fait)
partie de la réalité empirique à laquelle il se réfère, nous ne pouvons pas le définir
comme un « signe arbitraire ». Si nous nous limitons à la dichotomie arbitraire /
similaire, nous sommes obligés de classer ensemble les signes analogiques et
métonymiques dans la catégorie des « signes non arbitraires ». Mais en fait ils
fonctionnent selon des règles de symbolisation très différentes.
Nous pouvons donc utiliser quatre axes pour différencier les règles de codi
fication. Représentons quelques-unes des combinaisons possibles des termes
composant ces quatre dichotomies (le signe + représente conventionnellement
le premier membre et le signe — le second membre de chaque paire) :

Substitution /contiguïté + + — +
Continuité /discontinuité — + + —
Arbitraire /non arbitraire + — — —
Similarité /non similarité — + ~~ +

elles changent les valeurs de certains traits, et elles assignent une interprétation phoné
tique aux rangées individuelles de la matrice (...). Puisque les traits phonétiques ne
sont pas tous binaires, le composant phonologique comprendra des règles remplaçant
quelques-uns des plus et des moins qui sont dans les matrices par des nombres entiers
représentant les différents degrés d'intensité que le trait en question manifeste dans le
message » (Halle, 1964, 332-333).
1. Parler de relations de la partie au tout est la façon la plus générale de caractériser
le mécanisme de symbolisation métonymique. Il serait nécessaire de développer une
typologie complexe des liens métonymiques : contenu /contenant, avant /après; en
arrière /en avant; à l'extérieur /à l'intérieur; composant fonctionnel /ensemble fonc
tionnel; au-dessus /au-dessous, etc. Comme on peut le remarquer, la plupart de ces
exemples n'impliquent pas à proprement parler une relation entre la partie et le tout.
Le tout sou8-jacent est associé à la symétrie existant entre les parties présentant un
lien entre elles.
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Eliseo Verôn

Les systèmes de signes appartenant au type I sont ceux qui fonctionnent


conformément à des règles de codification basées sur la substitution, la disconti
nuité,l'arbitraire et la non similarité. Nous pouvons retenir le terme générique
digital pour les définir : le langage lui-même (ou mieux, les séries audio-linguis
tiques x) ; les signaux lumineux de circulation ; le code des drapeaux représentant
les différents pays du monde2; la notation musicale ordinaire. Les systèmes de
signes appartenant au type II sont ceux qui obéissent à des règles de codification
basées sur la substitution, la continuité, le non arbitraire et la similarité. Réser
vons-leur le terme d'analogique : la photographie, le dessin et la peinture figu
ratifs, quelques-uns des « emblèmes » d'Ekman appartiennent à ce type (par exemp
le,celui de passer le doigt sous la gorge pour signifier regorgement) (Ekman,
1968), et aussi les successions de comportements dans lesquelles l'action a des
caractéristiques nettement imitatives (nous en trouvons les illustrations institu-
tionalisées les plus typiques dans certains styles de danse et dans la pantomime).
Le type III groupe les systèmes de signes que nous appellerons « métonymiques »,
qui fonctionnent selon des règles de codification basées sur la contiguïté, la
continuité, le non arbitraire et la non similarité. Le cas qui nous intéresse le plus
est celui de l'activité sociale non imitative et « spontajiée » : les messages transmis
par la perception de fragments d'un processus d'action en cours.
Quelques-uns des critères proposés rappellent certainement la classification
des signes en icônes, indices et symboles, introduite par Peirce 3. L'indice de
Peirce est en fait une notion très proche de nos signes « métonymiques » : il y a
un lien existentiel entre l'indice et l'objet qu'il représente. Quelques-uns des
exemples de Peirce sont conformes au schéma de la relation de partie à ensemble
que nous avons mentionnée. Ceci n'est pas vrai cependant pour tous ses exemples;
entre les indices de Peirce et les systèmes de signes de notre type III, il y a seu
lement un recoupement partiel. Ceci vient du fait que selon les critères de classi
fication proposés ici, le « lien existentiel » entre le signe et le réfèrent est seulement
une des dimensions qui entrent en jeu. En outre, l'idée d'un lien existentiel est
peut être trop générique. Examinons deux des exemples d'indices donnés par
Peirce : la pendule ordinaire indiquant l'heure et la photographie. Aucun des
deux ne peut être classé dans notre type III. La photographie est clairement
un cas de message analogique et appartient, comme nous l'avons dit plus haut,
à notre type II. La photographie se situe dans une relation substitutive (c'est-à-
dire imitative) avec la réalité. La pendule implique également une règle de substi
tution, les différentes positions des deux aiguilles sur le cadran constituant le
répertoire des signes. A ce trait caractéristique nous pouvons ajouter ceux de la
continuité, du non-arbitraire et de la non-similarité : ainsi, notre type IV corre
spond au cas de la pendule 4. Enfin, nous avons un type V : les systèmes de signes

1. Pour une typologie des séries informationnelles, voir Verôn (1964). Les phénomènes
habituellement appelés paralinguistiques ne sont pas codés digitalemcnt, mais comme
nous le montrerons plus bas, ils ne sont pas non plus analogiques.
2. Évidemment, outre la fragmentation d'un certain champ spatial et sa mise en
rapport avec le spectre des couleurs, les drapeaux comportent aussi beaucoup d'él
éments analogiques (animaux, arbres, corps célestes, etc.).
3. Cf. Peirce, « Speculative grammar » and o Existential graphs », in Collected Papers
(1960).
4. Les signes composant la pendule ne sont pas arbitraires, du moins dans le sens
dans lequel le mot « temps » est arbitraire. On ne peut dire qu'ils sont a similaires » à
ce qu'ils représentent parce qu' « un moment donné du jour » est un concept abstrait.

60
L'analogique et le contigu

obéissant à des règles de codification qui se caractérisent par la substitution, la


discontinuité, l'absence d'arbitraire et la non-similarité. Beaucoup de signes
contemporains destinés à symboliser des entreprises et d'autres organismes
sociaux peuvent se classer dans cette catégorie. Celui qui a été récemment créé
aux États-Unis pour symboliser 1' « Hemisfair », une exposition internationale
qui a eu lieu à Texas en 1968, est un assez bon exemple. Les règles de construction
du symbole « Hemisfair » ont été présentées ainsi :

O O

i . the
Begin
Comme
world
with
il a été dit plus
2.Hemisphere
Move
Western
haut,tolathe
racine de paths
3.
ce
Old
Explore
que
theworld
from
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life
byArègle
of
la is
the
the
new
established
Old
meeting
New
deway
conti
andof

guïté est une relation empirique de la partie au tout ou de partie à partie sous-
tendant le processus de symbolisation. Les signes basés sur une substitution
impliquent au contraire une nette discontinuité entre le signe et le denotatum :
le mot « table » n'a de contiguïté empirique avec aucune des tables réelles existant
dans le monde extérieur. Je pense cependant que la dimension substitution/
contiguïté devrait être considérée comme une ligne continue, comme les trois
autres axes, les mots d'une part et le poing fermé de l'autre étant les deux extrêmes
opposés. D'un point de vue génétique, il paraît probable que beaucoup de compor
tements fonctionnant initialement comme des signes en vertu d'un lien empirique
de contiguïté, avec ce qu'ils représentent, peuvent par la suite s'être de plus en
plus éloignés du tout auquel ils appartenaient à l'origine. Pour conserver leur
fonction symbolique malgré ce processus d'éloignement, ces signes pourraient
avoir acquis une relation conventionnelle croissant avec leurs signifiés; ou bien
ils pourraient s'être graduellement incorporés des caractéristiques imitatives
et être devenus aussi des signes analogiques. Par contre, les mots semblent avoir,
du moins en partie, une relation initiale de contiguïté avec ce qu'ils représentent;
pour un jeune enfant qui apprend à parler, l'association de la perception de
l'objet et du son qui le nomme comme de parties d'une même expérience globale
est un aspect important du processus d'acquisition du langage. A mesure qu'est
parcouru le chemin qui mène à la maîtrise de l'abstraction, le signe se dissocie
de plus en plus de l'objet saisi par l'expérience et le premier commence à jouer
effectivement le rôle de substitut du dernier. Il ne serait peut-être pas trop risqué
d'identifier le principe de contiguïté, d'un point de vue génétique, avec la matrice
la plus primitive des processus symboliques. En tout cas, le phénomène métony-

On pourrait alléguer que la pendule ne représente pas le temps mais le mesure. En lai
ssant de côté les problèmes métaphysiques, s'il est vrai qu'en premier lieu la pendule
mesure le temps, il est également vrai que dans le contexte de notre société, elle symbol
ise toujours le temps.

61
Eliseo Verôn

mique du signe est certainement le processus de base grâce auquel l'acte social
spontané devient un message pour les communicateurs impliqués dans une
interaction sociale « naturelle ».

IV. Bateson et Jackson ont attiré l'attention sur le problème de la « traduc


tion » de ce qu'ils appellent des messages analogiques, en mots, en messages
digitaux : « Trois caractéristiques du matériel analogique concourent à rendre
difficile la transformation en mots; ces caractéristiques, ne doivent pas être
considérées isolément, parce que les difficultés de traduction résultent de leur
combinaison. D'abord, le matériel analogique contient des grandeurs réelles
(et donc toujours positives); ensuite, le matériel analogique ne contient pas de
signe négatif simple, c'est-à-dire pas de mot pour « ne pas »; et enfin le matériel
analogique ne contient pas de signes morphémiques. Il n'y a pas d'analogue de
« comme si » ou « peut-être », pas de différenciation entre a et » et « ou » et en somme
aucun signe dans la communication analogique ne permet de classifier un message
conformément à son type logique » (Bateson et Jackson, 1964, 279).
En dépit des avertissements des auteurs, examinons un moment chacune de
ces caractéristiques séparément. Dès le début, un problème ardu se pose : la
relation impliquée dans la description de la première caractéristique, entre les
notions de « réel » et de « positif ». L'affirmation selon laquelle tous les systèmes
non digitaux (c'est-à-dire tous nos types sauf le type I) contiennent seulement des
grandeurs positives semble vraie si l'on veut dire par là que ces sortes de messages
ne peuvent transmettre de jugement négatif. Ce point nous conduit au problème
de l'établissement de types logiques, qui sera abordé plus loin. Mais que pourrait
vouloir dire dans ce contexte la notion de grandeurs « réelles »? Si nous disons
q*ue les signes analogiques ont toujours une existence matérielle, ceci est évidem
mentvalable également pour n'importe quel signe digital; une photographie
est aussi réelle que le son d'un mot prononcé ou la forme d'une proposition écrite.
En partant d'un point de vue différent et complémentaire une photographie est
aussi irréelle qu'un exposé verbal; dans les deux cas, celui qui reçoit le message
se trouve face à un signe réel qui remplace quelque chose d'autre, et qui dans
ce sens est donc irréel. Cette observation pourrait-elle vouloir dire qu'un message
relatif au caractère irréel de quelque chose, à l'absence, au manque ou à l'inexis
tencede quelque chose ne peut être transmis par l'intermédiaire d'un matériel
analogique? Mais cette remarque peut nous mener au problème, exposé comme
seconde caractéristique, de l'absence du sens négatif simple, et de là au problème
des marqueurs (markers) logiques, ou bien elle peut se réduire à la banale affirma
tion qu'une image n'est pas un mot. J'ai mentionné intentionnellement le seul
exemple de la photographie parce que je pense que le seul cas dans lequel nous
puissions rapprocher les notions de «positif» et de «réel» dans un sens non trivial
est celui des signes « métonymiques » et en particulier celui des processus de compor
tement pris comme messages. Dans ce cas (mais pas dans le cas de messages analo
giques correspondant à notre type II) il est vrai (a) que les signes peuvent seul
ement contenir des grandeurs positives (dans le sens précis qu'ils ne peuvent
véhiculer de messages négatifs), ce qui est une propriété commune à ce système
et à tous les autres systèmes non digitaux, et en même temps (b) qu'on peut dire
qu'ils impliquent des grandeurs réelles, dans le sens que les signes eux-mêmes sont
une partie réelle et empirique de l'ensemble signifié et non l'image ou Vanalogon
de quelque chose. Selon toute probabilité, Bateson et Jackson pensaient aux
processus d'action sociale, mais le fait qu'ils aient parlé d'une façon générique

62
L'analogique et le contigu
de « matériel analogique » et qu'ils aient donné quelques exemples empruntés à
des codes graphiques tend à rendre le problème moins clair.
Reconnaissons maintenant que jusqu'à ce point, nous n'avons pas été très
juste dans notre discussion. Il y a en fait une autre façon d'interpréter la pre
mière des caractéristiques, que nous n'avons pas mentionnée plus tôt par souci
de clarté. Elle touche au problème de l'impossibilité de la négation simple sans
pourtant s'identifier avec ce problème. Rappelons quelques remarques faites
par Metz au sujet du cinéma, qui ont été étudiées ensuite par Russel (1968).
Nous citons Metz :
« Un gros plan de revolver ne signifie pas "revolver" (unité lexicale purement
virtuelle) — mais signifie au moins, et sans parler des connotations, "Voici un
revolver". Il emporte avec lui son actualisation, une sorte de "voici" » (Metz,
1964, 76).
En conséquence, le matériel analogique (nous devrions dire : le matériel non
digital) semble toujours impliquer une sorte de « présentification » d'une chose
concrète « qui est là ». Ceci paraît être vrai de beaucoup de systèmes de signes non
digitaux, mais à des degrés variables. Certaines remarques s'imposent ici.
En premier lieu, cette qualité présentative ne devrait être identifiée en aucun
sens avec une assertion linguistique au mode affirmatif. Je suis donc en désaccord
avec la façon dont Metz s'est exprimé sur ce point. En fait, je pense que Metz est
tombé dans un piège linguistique qui se rencontre couramment quand on étudie
les signes non linguistiques. « Revolver» est «une unité lexicale purement virtuelle »
le gros plan ne l'est pas, mais il n'est pas non plus équivalent à « voici un revolver ».
Sa qualité présentative demeure hors de la sphère des fonctions de vérité qui
peuvent s'appliquer au jugement verbal assertif. En d'autres termes, l'équiva
lence proposée par Metz obscurcit précisément la différence cruciale entre le gros
plan et le jugement verbal. Je veux dire que le message verbal « voici un revolver »
n'a pas de qualité présentative quelle quelle soit.
En second lieu, il faut tenir compte du fait qu'il existe indubitablement des
systèmes de signes analogiques (appartenant à notre type II) dans lesquels les
règles stylistiques appliquées « séparent » pour ainsi dire les signes dans une
certaine mesure du point d'attache concret impliqué dans la qualité présentative
qui semble inhérente à Vanalogon. Il est évident qu'il existe des messages véhi
culés par des matériels analogiques comme des peintures ou des dessins qui peu
vent atteindre un haut niveau d'abstraction. Prenons par exemple la sorte parti
culière de règles stylistiques qui caractérisent les dessins qu'on trouve général
ement dans les dictionnaires et encyclopédies : ces messages analogiques peuvent
en fait transmettre la notion d'une classe de choses ; ils sont parvenus à éliminer
dans une très large mesure la qualité correspondant à la présentation d'un
exemple ou d'un composant de quelque chose. Le dessin du corps humain dans
un livre courant de biologie ou d'anatomie humaine ne peut être interprété
comme équivalent à l'affirmation verbale « voici un corps humain », mais
au contraire comme le support d'un message associé à l'idée ou au modèle du
corps humain dans un sens général. Peut-être vaudrait-il mieux dire que ces
sortes de messages analogiques n'ont pas perdu leur qualité présentative mais
plutôt qu'ils présentent ou proposent (par opposition à « affirment ») une classe
de choses et non un exemple particulier de quelque chose 1.

1. La notion de « proposition » (« proposai ») appliquée à la qualité référentielle parti


culière au matériel non digital a été suggérée par Bateson et Jackson (1964). Il vaudrait

63
Eliseo Verôn

La possibilité d'atteindre un niveau d'abstraction assez élevé est donc ouverte


à certains systèmes de signes compris dans notre type II (analogiques au sens
strict du terme). Cette voie est complètement fermée aux systèmes composés de
signes « métonymiques » (type III) : il est donc impossible de dépasser leur
qualité présentative, à cause du lien de contiguïté sur lequel repose leur fonction
de symbolisation. En d'autres termes, la possibilité pour un système non digital
de véhiculer des messages plus ou moins abstraits repose seulement sur la règle de
substitution. Pour un message comportemental, la seule façon d'atteindre l'abstrac
tion est de rompre son lien de contiguïté, ce qui aboutirait à un acte imitatif
stylisé, un analogon de comportement.
Comme nous l'avons dit plus haut, la 2e et la 3e caractéristiques mentionnées
par Bateson et Jackson mènent au problème complexe de l'établissement de
types logiques. Le principe général est valable pour tous les systèmes non dig
itaux : ceux-ci ne contiennent aucun élément équivalent à la simple négation;
il n'y a aucune possibilité de qualifier de façon métalinguistique une partie du
message à l'aide d'une autre, car nous manquons de marqueurs logiques. Il me
semble que tout cela revient à dire que, dans les systèmes non digitaux, l'opéra
tion denotative n'existe pas. « Dénotation » est un terme qui n'a pas de sens
hors des codes digitaux; l'opération à laquelle ce terme se réfère est celle qui est
impliquée dans les relations métalinguistiques entre les niveaux de langage, où
le denotatum lui-même est un signe ou un message et non un objet appartenant
à la réalité extra-linguistique. A mon avis il s'agit d'une observation assez impor
tante pour une raison très simple : ce qui est exclu des systèmes non digitaux
est la possibilité d'une relation entre deux niveaux différents de langage telle
que les éléments d'un des niveaux (le « supérieur ») désignent les éléments de
l'autre niveau (le niveau « inférieur »). Mais la capacité beaucoup plus simple de
construire des messages montrant clairement des niveaux différenciés de langage
n'est pas exclue des systèmes non digitaux. Prenons quelques exemples naïfs :
la peinture montrant un peintre en train de peindre une toile, ou une photo
graphie dans un journal montrant des photographies d'un autre journal. Il y a des
cas de niveaux de langage bien définis à l'intérieur d'un matériel analogique,
et ces niveaux peuvent être reconnus d'emblée par un consommateur naïf des
messages. Mais le rapport qui relie ces niveaux n'est pas un rapport de dénotation :
ici le principe général de la qualité présentative du matériel analogique est valable
également. Le niveau inférieur est simplement « proposé » par le niveau supérieur;
il n'est ni affirmé, ni nié, ni qualifié d'une façon denotative quelconque. En
d'autres termes : nous avons en fait deux niveaux de langage, mais le niveau
supérieur ne contient aucun marqueur logique.
L'ambiguïté attribuée par Bateson et Jackson aux échanges analogiques est
en fait la caractéristique typique des systèmes de signes « métonymiques », des
processus* symboliques agissant dans les échanges comportementaux. Selon
ces auteurs : « ... il semblerait que, justement parce que la nature des échanges est
discutée précisément par le moyen d'un échange d'échantillons d'échange, les
participants eux-mêmes sont suceptibles d'être incertains de ce qui se passe »
(Bateson et Jackson, 1964, 273). Cette remarque fait ressortir exactement le

peut-être mieux traduire « proposai » par « position » et non par « proposition », pour
éviter la confusion entre le sens logique du terme et son sens fonctionnel (faire une pro
position = proposer quelque chose à quelqu'un), qui est le seul pertinent ici.

64
(cada vez me gusta mas)

CAMISAS

VAN H EUS EN
L'analogique et le contigu

problème central posé par l'emploi de systèmes de signes fondés sur la règle
de contiguïté. Il ne se produit jamais une telle confusion potentielle dans
le cas d'un analogon. Le matériel analogique n'est pas ambigu dans le sens
ici indiqué, parce que nous ne pouvons jamais confondre le signifiant avec le
signifié.
Reprenons notre exemple antérieur pour éclaircir la remarque de Bateson et
Jackson. Le poing fermé, en tant que signe de A envers B (c'est-à-dire, en tant
que « menace ») est un « commentaire » de la relation entre A et B : l'agression
ou la violence est présente comme possibilité au sein de l'interaction. Le poing
fermé possède sa capacité signifiante du fait qu'il est un fragment, une partie
extraite d'une séquence d'action plus longue : la séquence d'agression, dont la
possibilité est « proposée » par le fragment. Appelons 5 la séquence d'action;
à un moment donné, la « discussion » interpersonnelle porte sur la possibilité
de son actualisation. Supposons que la séquence S puisse être divisée en certaines
« parties » (disons a, b, c ... n). La « discussion » sur S est donc introduite par A
par le moyen de a : le fragment d'action a (le poing fermé) est à la fois une partie
de S et son signifiant. Et c'est précisément en tant que son lien métonymique
avec S est reconnu, que a peut remplir sa fonction signifiante. Tout acte maint
ient avec la séquence dont il fait partie, comme on peut le voir, une relation
tout à fait particulière. On pourrait dire que le signe comportemental « méto
nymique » n'a d'existence que sur la base d'un lien qui est à la fois reconnu
et méconnu. Sa reconnaissance est la condition même du fonctionnement
du fragment d'action comme signifiant du tout; mais du fait que ce lien
est investi d'une fonction symbolique, il résulte une « neutralisation » de
la relation purement « naturelle » ou « causale » qui mène d'un acte au sui
vant : si le poing fermé était en relation « naturelle » avec ce qui « suit » il
ne s'agirait pas d'un message sur une violence possible, mais de la violence elle-
même.

V. La contiguïté, nous l'avons dit, est la règle de base par laquelle un acte,
même si sa réalisation n'est associée à aucune « intention » de communiquer,
transmet des informations à un observateur. Tout acte corporel a un lien de
contiguïté spatiale et temporelle avec la séquence plus longue dont il fait partie,
et par conséquent, il est inévitablement « contaminé » par la signification : il
tend à se transformer en un signe de la séquence plus longue. Mais cette conta
mination a toujours un caractère indéterminé, parce que le même acte peut faire
partie de différentes séquences de comportement. Tout acte corporel observé
est donc un signe ambigu.
Prenons un exemple — mais comment en trouver un? Nous pourrions inviter
le lecteur à considérer toute séquence d'action « naturelle » en cours dont il
pourrait être témoin. Ou bien nous devrions introduire notre exemple de signes
« métonymiques » par l'intermédiaire d'un analogon, ce qui est une situation très
intéressante, caractéristique de toutes les représentations analogiques (« images »)
de l'activité humaine : dans ces cas-là, le message analogique représente un
matériel fait de signes « métonymiques ».
Il est évident que ce qu'on vient de dire enferme un problème théorique très
important : pour la reconstruction de 1' « effet de sens », quand on étudie des
messages analogiques (photographie, cinéma, par exemple), il faut tenir compte
non seulement des propriétés des codes qui président à la production des messages
dans le système analogique considéré, mais aussi des propriétés des objets « pré-

65
Eliseo Verôn
sentes » ou « proposés » par les images. On pourrait croire que cette affirmation
comporte une trahison du principe d'autonomie de la sémiotique, qu'elle implique
un retour à des perspectives dépassées, en réintroduisant la préoccupation du
réfèrent. A mon avis, ce n'est pas du tout le cas : il s'agit plutôt d'une attitude
cohérente avec l'idée d'une sémiotique étendue, translinguistique. Les « propriétés
des objets représentés » par les images n'entrent pas en considération en tant
que propriétés du « réel », mais dans la mesure où ces « objets » sont à leur tour
des objets sémiotiques, des messages. Une image, par sa nature même, est d'habi
tude un message qui « présente » ou « propose » d'autres messages. Ce critère découle
précisément du fait qu'il n'y a, à l'intérieur de la démarche sémiologique, rien
qui soit du « réel » pur. Si l'effet de sens d'une photographie « présentant » un
fragment d'action humaine n'est pas le même que celui d'une photographie
« proposant » une nature morte ou un paysage, la différence — au-delà du fait
qu'il s'agit de deux messages obéissant aux mêmes principes de codage, ceux du
matériel analogique — relève du fait que dans la première, opèrent certains des
mécanismes symboliques propres à l'action sociale en tant que message, méca
nismes qui sont absents de la seconde. A travers Vanalogon, transparaissent les
mécanismes symboliques propres des objets sémiotiques imagés.
Voyons comment la règle de symbolisation par contiguïté, inhérente aux pro
cessus d'action, fonctionne par l'intermédiaire d'un matériel analogique, quand
ce dernier « propose » un message codé « métonymiquement ».
Le placard reproduit ici illustre parfaitement la manière dont la publicité
utilise le caractère essentiellement ambigu du lien métonymique entre les actes.
La connotation sexuelle du placard semble évidente; elle peut être facilement
déchiffrée dans les opérations sélectives et combinatoires faites par le publicitaire.
Cependant, quand le message est construit à l'aide de matériel non digital, ces
opérations peuvent toujours prétendre à l'innocence : le message sexuel connoté
peut être nié par l'auteur et attribué à un mécanisme de « projection » du specta
teur.La photographie présente d'une part un acte : un homme qui paraît en train
de s'habiller. De quelle séquence comportementale plus longue cet acte est-il
un fragment? Chacune des diverses réponses possibles contient « l'effet » que le
publicitaire a cherché. Si nous « remontons » de cet acte vers ceux qui l'ont
précédé nous avons le choix entre plusieurs « antériorités » différentes : l'une
d'elles est indubitablement l'acte sexuel, dans la mesure où l'acte de s'habiller
implique un état de nudité antérieur et où le placard tend à associer cet état de
nudité à la présence de la femme et à la réflexion silencieuse placée sous l'image *.
Naturellement, cette interprétation n'est pas nécessaire : l'homme pourrait être
en train de changer de costume, et dans ce cas sa nudité passagère aurait eu un
caractère tout à fait innocent. Cependant, la présence simultanée, dans la même

1. < Camisas » signifie < chemises >. Le jugement verbal silencieux figurant sous la
photographie ne peut être traduit en français sans que soit perdue une bonne partie de
l'effet du message. Le pronom personnel n'étant pas obligatoire en espagnol, ce mor
ceau de phrase < cada vez me gusta mas » est indéterminé en ce qui concerne la personne
ou la chose évoquée. Elle peut ou bien vouloir dire « j'aime ça chaque fois davantage »
ou c j'aime cet homme davantage chaque fois » ou a j'aime cette femme », etc. Ainsi sous
sa forme espagnole, ce fragment de phrase pourrait être une pensée de la femme relative
à l'homme, de l'homme relative à la femme, ou de l'un ou l'autre relative à l'acte sexuel
ou à la chemise. Cette ambiguïté disparaît si nous choisissons une des différentes tra
ductions françaises possibles.

66
L'analogique et le contigu

situation, de l'image de l'homme en train de s'habiller et de celle de la femme


aurait peut-être trop forcé le message dans le sens d'une interprétation sexuelle.
Les deux images ont donc été présentées en surimpression légère afin de trans
mettre l'idée qu'il pourrait s'agir d'une situation dans laquelle la femme seule se
remémore l'image de l'homme. Dans ce cas, les deux personnages auraient un
statut empirique différent et l'image de l'homme serait transposée dans le domaine
de l'imaginaire. Le placard contient cette « lecture » possible de sa signification
mais en même temps l'écarté, puisque la silhouette de la femme est moins nette
que celle de l'homme : ce dernier produit une impression plus forte de réalité.
En fait, la figure imaginée pourrait être celle de la femme si l'on se laissait guider
par le critère de la netteté relative des deux personnages. Or, si c'était le cas, la
réflexion silencieuse devrait être attribuée à l'homme et son contenu se référerait
selon toute probabilité à l'image de la femme : ici encore, la connotation sexuelle
serait fortement suggérée. Donc, même si la netteté différente de la photographie
fait associer l'image de l'homme à la réalité et celle de la femme à l'irréalité ou
à la fantaisie, la distribution spatiale du message verbal en relation avec la photo
graphie ainsi que la dimension relative de chaque figure tendent à relier la
remarque écrite à la femme plutôt qu'à l'homme. Toutes ces lectures possibles
composent une sorte de mécanisme d'oscillation, une sorte de jeu autour d'une
configuration de sens potentiels; configuration instable parce qu'elle repose sur
l'indétermination du rapport de contiguïté qui relie les actes : que faisait cet
homme un peu avant?
Évidemment dans ce cas, le message digital est le complément rigoureux de
cet équilibre délicat d'ambiguïtés (voir note 1, p. 22). En espagnol, la remarque
verbale pourrait évoquer une situation précédente présentant un caractère
sexuel (ou mieux : une série de situations précédentes, connotation transmise par
l'expression o cada vez » : « chaque fois ») ; elle pourrait aussi évoquer la personne
(lui ou elle), sans établir de lien entre lui (ou elle) et une action particulière
quelconque; et naturellement elle pourrait enfin évoquer la chemise, qui est
finalement le personnage privilégié de l'histoire. Et parce que le réseau de ces
choix sémantiques alternatifs demeure ouvert dans toute son ambiguïté,
l'heureuse chemise est apte à s'associer avec n'importe lequel d'entre eux et donc,
par une curieuse opération d'addition, avec tous.

VI. Un acte est un message, mais un message qui parle de quoi? Si je vois
un individu crier, rougir et gesticuler, je ne peux pas me contenter de dire que
cette séquence comportementale « représente » sa colère; indubitablement, elle
est sa colère pour toute personne recevant le message. Mais un fragment de
séquence comportementale tend, par contiguïté, à symboliser le tout dont il
fait partie. Et comme le fait de rougir traduit parfois la colère, parfois la honte,
parfois la confusion, le lien symbolique rattachant les actes corporels les uns aux
autres est toujours instable. La texture des actes à l'intérieur de la structure
temporelle de l'action sert cependant de base à la qualité primaire de message
que comporte tout acte. La règle selon laquelle cette texture s'organise paraît
très différente de celle qui gouverne la communication digitale et analogique :
le digital et le métonymique sont peut-être les deux pôles de l'univers symbolique.
Quand ils mentionnent les difficultés impliquées par la « traduction » du code
digital dans le langage des échanges comportementaux, Bateson et Jackson
font remarquer que ce passage confère toujours un élément de secret à la commun
ication. Démêler et décrire en détail les mécanismes symboliques qui se cachent

67
Eliseo Verôn

derrière cette qualité de « mystère » associée aux messages par l'action, repré
sente une des tâches fondamentales de la recherche sémiologique.

Eliseo Verôn
Centro de Investigaciones Sociales
Instituto Torcuato Di Telia
Buenos Aires.

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