Vous êtes sur la page 1sur 321

G

logiciel
énie
Véronique Messager
Préface de Bernadette Lecerf-Thomas
Postface de Françoise Engrand

Coacher
une équipe agile
Guide à l’usage des ScrumMasters,
chefs de projets, managers… et de leurs équipes !
G énie •
logiciel
> Quels outils et méthodes pour la création logicielle ?

Coacher une équipe agile


Des méthodes efficaces mais exigeantes en termes de communication
La pertinence des méthodes agiles pour mener des transformations de façon dynamique et innovante ne
fait plus de doute pour de nombreuses organisations et équipes de réalisation. Pariant sur la souplesse des
équipes en évitant une définition trop précoce et figée des besoins, ces méthodes se révèlent performantes
pour intégrer des changements plus facilement que les méthodes traditionnelles. Pourtant, elles sont plus
exigeantes concernant la communication entre les acteurs des projets.

Le coaching pour accompagner et sécuriser la transition


Toute personne engagée dans une équipe agile (ScrumMaster, chef de projet, manager, coach agile… mais
aussi membre de l’équipe) trouvera dans ce livre des outils pratiques pour anticiper les heurts et résistances
inéluctables face au changement, et ainsi faciliter l’adoption des bons comportements pour s’engager sur la
voie de l’agilité. S’appuyant à la fois sur sa longue expérience en gestion de projet agile et sur sa compétence
de coach professionnel, Véronique Messager illustre, exemples à l’appui, comment une posture et une
démarche de coach se sont avérées essentielles pour réussir ses missions auprès d’équipes ou de personnes
en contexte de transformation agile.
Un guide indispensable pour développer les compétences collectives et relationnelles nécessaires au
succès de votre démarche de transformation !

AU SOMMAIRE
Le contexte d’une transformation agile • Valeurs agiles et comportements associés •
Coach certifiée HEC, accréditée
3 exemples de situations réelles • Le changement vécu comme une menace • Prendre en compte
Process Com, Véronique Messager les émotions, les freins personnels • Initier le changement • Cadre contractuel : demande et
accompagne, depuis près objectif de coaching, engagements mutuels • Responsabiliser les acteurs du changement :
de quinze ans, des équipes projet autoévaluation, décision de changer • Faciliter le processus de désapprentissage/apprentissage
et des organisations en phase • Sécuriser la démarche de transformation • Créer un cadre sécurisé : dimension humaine,
confiance • Outils et techniques de coach : synchronisation, empathie, écoute active • Coacher
de transition agile. Accordant
l’équipe agile • Étapes de constitution de l’équipe • Création et structuration : vision commune,
une part essentielle à la dimension rôles et responsabilités, règles du jeu • Confrontations et tensions : résolution de conflits,
humaine, elle leur propose confrontation positive, communication pacifique • Régulation et normalisation • Synergie
un support organisationnel et performance : autonomie, engagement, intelligence collective, bien-être • Dissolution et
et méthodologique, et surtout séparation • Coacher le ScrumMaster • Un leader au service de l’équipe • Aborder son propre
changement • Développer ses qualités d’écoute • Trouver le bon positionnement vis-à-vis de
un accompagnement personnalisé,
l’équipe • Développer son leadership • Animer les cérémonies agiles • Conclusion : faut-il
afin de faciliter l’adoption des bons former les responsables au coaching ou faire appel à un coach externe ? Annexes • Glossaire •
réflexes comportementaux. Certifiée Bibliographie.
ScrumMaster, Véronique Messager
est également l’auteur de Gestion
de projet agile, aux Éditions Eyrolles
(3e édition, 2010).
ISBN 978-2-212-13414-8

Conception Nord Compo


Code G13414
G é n i e l o g i c i e l

Coacher
une équipe agile
CHEZ LE MÊME ÉDITEUR

Du même auteur

V. messager. – Gestion de projet agile. Avec Scrum, Lean, eXtreme Programming….


N°12750, 3e édition, 2010, 278 pages.

Méthodes agiles

J.-L. Bénard, L. Bossavit , R. Médina, D. Williams. – Gestion de projet Extreme Programming.


N°11561, 2002, 300 pages (e-book).

C. Hohmann. – Lean management.


N°55381, 2012, 424 pages.

Gestion de projet, normes et qualité


S. Bordage, D. Thévenon, L. Dupaquier, F. Brousse. – A. Fernandez-Toro. – Management de la sécurité
Conduite de projet Web. informatique. Implémentation ISO 27001
N°13308, 6e édition, 2011, 432 pages (collection Solutions N°12697, 3e édition, 2012, 322 pages (collection Solutions
d’entreprise). d’entreprise).

N. Chu. – Réussir un projet de site web. D. Mouton. – Sécurité de la dématérialisation.


N°12742, 6e édition, 2010, 260 pages (collection Accès libre). N°13418, 2012, 314 pages (collection Solutions d’entreprise).
Y. Constantinidis. – Expression des besoins pour le système R. Hennion, H. Tournier, É. Bourgeois. – Cloud Computing.
d’information. Guide d’élaboration du cahier des charges. Décider, concevoir, piloter, améliorer.
N°12783, 2010, 246 pages (collection Solutions d’entreprise). N°13404, 2012, 242 pages.

Y. Constantinidis. – Mémento Cahier des charges A. Altinier. – Accessibilité web. Normes et bonnes pratiques
informatique. pour des sites plus accessibles.
N°13289, 2011, 14 pages. N°12889, 2012, 340 pages (collection Accès libre).

D. Moisand, F. Garnier de Labareyre. – CobiT. Pour une X. Delengaigne, P. Mongin. – Boostez votre efficacité
meilleure gouvernance des systèmes d’information. avec FreeMind et Freeplane. Bien démarrer avec le Mind
N°12427, 2009, 258 pages (collection Solutions d’entreprise). Mapping.
N°12696, 2e édition, 2010, 280 pages.
C. Dumont. – ITIL pour un service informatique optimal.
Mis à jour avec ITIL v3 et la norme ISO 20000. R. Hertzog, P. Habouzit. – Mémento Git à 100%.
N°12102, 2e édition, 2007, 378 pages (collection Solutions N°13438, 2012, 18 pages.
d’entreprise).

Collection Design Web


S. Daumal. – Design d’expérience utilisateur. Principes et G. Barrère & É. Mazzone. – Card Sorting. Ne perdez plus
méthodes. vos internautes !
N°13456, 2012, 192 pages. N°13448, 2012, 108 pages.

C. Schillinger. – Intégration web : les bonnes pratiques. Le I. Canivet & J.-M. Hardy. – La stratégie de contenu en
guide de survie de l’intégrateur. pratique. 30 outils passés au crible.
N°13370, 2012, 380 pages. N°13510, 2012, 170 pages.

K. Deloumeau-Prigent. – CSS maintenables avec Sass &


Compass. Outils et bonnes pratiques pour l’intégrateur web.
N°13417, 2012, 254 pages.

pII_Altinier.indd 1 27/09/12 10:50


G
logiciel
énie
Véronique Messager
Préface de Bernadette Lecerf-Thomas
Postface de Françoise Engrand

Coacher
une équipe agile
Guide à l’usage des ScrumMasters,
chefs de projets, managers… et de leurs équipes !
ÉDITIONS EYROLLES
61, bd Saint-Germain
75240 Paris Cedex 05
www.editions-eyrolles.com

En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage,
sur quelque support que ce soit, sans l’autorisation de l’Éditeur ou du Centre Français d’exploitation du droit de copie,
20, rue des Grands Augustins, 75006 Paris.
© Groupe Eyrolles, 2012, ISBN : 978-2-212-13414-8

Copyright_Messager.indd 1 09/08/12 17:29


Préface

Dans de nombreuses organisations, la pertinence des méthodes agiles pour mener des
transformations de façon dynamique et innovante ne fait plus de doute. Si les méthodes
agiles sont performantes pour innover et pour réaliser des changements avec moins d’alé-
as que les méthodes traditionnelles, elles sont vécues comme plus exigeantes concernant
la communication entre les acteurs des projets.
L’agilité fonctionnelle et technique demande de l’agilité mentale de la part des équipes
projet. La complexité des contextes projet et la complexité des comportements humains,
quand elles sont combinées, peuvent engendrer des moments difficiles à vivre par ceux
qui ne sont pas suffisamment armés pour conduire le changement.
Composée d’acteurs de différentes spécialités, l’équipe agile forme un bouquet de com-
pétences où chacun porte la responsabilité de sa délégation. Concurrents et partenaires
au sein d’une même équipe projet, ses membres expriment ainsi les divergences de point
de vue des différentes parties prenantes de l’organisation. Les équipiers vivent, de ce fait,
une tension inhérente à leur fonction. Ils apportent une partie de la solution et ils prennent
une part dans les responsabilités et les risques liés aux projets et aux transformations qui
en résultent. La structure du projet agile amène chacun à être en même temps partenaire
(pour la qualité du résultat) et concurrent (pour le choix des options, des priorités, des
mises en forme) au sein des interactions de co-création, tentant d’avoir le pouvoir sur
l’autre sans être pleinement conscient de la force des enjeux.
Ces enjeux sont de plusieurs natures :
• systémique, provenant de la pression exercée par l’entreprise ;
• psychologique, liée à la constitution du matériel psychique : le cerveau a des particu-
larités de fonctionnement cognitif créant des perturbations émotionnelles, qui s’exa-
cerbent dans les situations où la créativité est sollicitée ;
• technique, liée au manque de compétences et d’outils en communication interperson-
nelle et en négociation pour de nombreux acteurs.

Messager-Livre.indb 5 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
VI

Pour le scrummaster non expérimenté, le défi est considérable. Il doit vivre plusieurs
changements simultanément : celui lié aux objectifs du projet – créer une nouvelle solu-
tion –, celui lié à l’acquisition d’une nouvelle méthodologie – abandonner la sécurité des
acquis méthodologiques anciens et entrer dans l’expérimentation d’une nouvelle manière
de conduire les opérations de façon beaucoup plus interactive –, et enfin, celui lié à la
conduite de ce type de projet – être capable d’adopter un comportement managérial tout
en agilité (ou souplesse) relationnelle !
Pour le scrummaster expérimenté, le défi reste conséquent. À chaque fois, il doit mettre
en mouvement une nouvelle équipe constituée de personnes plus ou moins aguerries à
la co-création et gérer quotidiennement les tensions et les doutes inhérents à ce type de
processus dans un environnement en perpétuelle évolution.
Dans son ouvrage Gestion de projet agile, Véronique Messager a posé les bases des
connaissances méthodologiques nécessaires aux équipes agiles. Elle propose aujourd’hui
le complément indispensable à l’adoption d’une posture relationnelle agile pour les
membres de ces équipes. La double compétence qu’elle offre ainsi aux professionnels
prend efficacement en compte la complémentarité des savoirs techniques et des métho-
dologies, et les attitudes adaptées à la mise en performance des compétences humaines.
Bien qu’ayant appris à travailler seul, il suffirait à chacun d’entre nous de se réunir en
équipe pour savoir collaborer et co-élaborer de nouvelles solutions innovantes ! Cette
croyance est largement répandue. La coopération est pourtant un sport exigeant. Créer
à plusieurs permet de trouver des solutions mieux adaptées à la complexité des enjeux,
mais engendre des tensions et des conflits susceptibles de nuire à la production d’idées
nouvelles. Pour travailler avec les autres de façon productive, il vaut mieux avoir appris
les particularités des différents types de comportements et savoir interagir de façon pro-
ductive.
Véronique Messager guide les coéquipiers sur les points clés de cette compétence : être
capable d’accepter les différences de perceptions et de besoins relationnels. Savoir intera-
gir avec autrui exige que les acteurs acceptent les différences comportementales et soient
à même de s’adapter à cette réalité, sans nier leurs propres besoins.
Le contexte de l’agilité crée une condition favorable et une difficulté particulière. Conduire
un processus fondé sur l’essai-erreur est plus naturel pour l’esprit humain que chercher à
tout définir à l’avance. Cependant, ce type de processus peut s’avérer anxiogène pour des
personnes inquiètes de garantir une performance à toute épreuve, les mettant ainsi sous
stress. Les méthodes agiles posent le défi du droit au tâtonnement. La créativité poten-
tielle issue de ce type de travail est remarquable. Ce tâtonnement permet de construire
de nouvelles représentations, d’élaborer en expérimentant, de finaliser en utilisant. Il n’y
a pas mieux pour un cerveau humain, car il est plus imaginatif quand il a le droit d’explo-
rer que quand il vise la maîtrise du résultat à tout prix. Quand il cherche à contrôler sa

Messager-Livre.indb 6 12/10/12 09:38


Préface
VII

production, il entre dans un processus d’exclusion de ce qui lui semble incertain. Autant
dire qu’il se prive de créativité et cadenasse l’imagination.
Véronique Messager donne aux scrummasters un accès aux outils et à la posture du
coach, qui ont été développés pour permettre aux personnes de donner le meilleur d’elles-
mêmes. Elle apporte aux acteurs de projets agiles les moyens de prendre en compte la
complexité humaine, de créer les conditions managériales propices à la production col-
lective, et de mettre en place des ambiances et les conditions de confiance qui incitent
chacun à se dépasser.
Elle rappelle que, pour conduire un processus agile, il ne suffit pas d’une méthode, il faut
aussi de l’agilité dans la posture managériale et dans les relations entre les coéquipiers.
Elle donne à chacun la possibilité de s’améliorer dans ce domaine de compétence.
Bernadette Lecerf-Thomas1
Superviseur en coaching d’organisation

1. Bernadette Lecerf-Thomas a travaillé en tant que spécialiste de la communication auprès de directions


marketing, puis de la conduite du changement auprès de directions générales. Elle se consacre aujourd’hui à
faciliter l’appropriation des neurosciences par les acteurs de la transformation des entreprises et de la péda-
gogie (conférences, coaching, formation, supervision).
Elle est l’auteur de Activer les talents avec les neurosciences (Pearson), Neurosciences et management, le
pouvoir de changer (Éditions d’Organisation), L’informatique managériale (Hermès), et co-auteur de Tous
leaders (Eyrolles, dir. Jean-Marie Peretti).

Messager-Livre.indb 7 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 8 12/10/12 09:38
Table des matières

Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
Quels sont les objectifs de l’ouvrage ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
À qui l’ouvrage est-il destiné ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
Comment l’ouvrage est-il organisé ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
Comment lire cet ouvrage ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
À propos de l’auteur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

Première partie

Le contexte d’une transformation agile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

CHAPITRE 1
Valeurs agiles et comportements associés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
Valeurs et pratiques agiles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
Fonctionnement d’une équipe agile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
Management d’une équipe agile. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
Comportements attendus. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

CHAPITRE 2
Qu’observe-t-on en réalité ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
Équipe Alpha. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Le contexte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
La demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Vu et entendu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Équipe Bêta . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
Le contexte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

Messager-Livre.indb 9 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
X

La demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
Vu et entendu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
Équipe Gamma . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
Le contexte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
La demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
Vu et entendu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
Réalité et comportements observés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24

CHAPITRE 3
Comment expliquer ce qui se passe ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
Le changement est vécu comme une menace. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
Les changements induits. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
Le mécanisme de l’homéostasie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
Un passage obligé : le renoncement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
Nous sommes des êtres d’émotions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
Quelles sont nos émotions ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
La peur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
L’émotion est notre GPS interne. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
Nos freins personnels : les messages contraignants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
Conséquences sur nos comportements. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
L’absence de confiance. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
Conséquences sur nos comportements. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38

Deuxième partie

Initier le changement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

CHAPITRE 4
Créer un cadre contractuel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
L’entretien préliminaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
La grille RPBDC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
La demande et l’objectif de coaching . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
La demande de coaching . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
L’objectif du coaching. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
La demande de coaching prescrit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
La demande ambiguë ou composite. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
Accepter ou non la mission ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

Messager-Livre.indb 10 12/10/12 09:38


Table des matières
XI

Les engagements mutuels. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53


Du côté du coach : un engagement de moyens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
L’engagement du bénéficiaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

CHAPITRE 5
Responsabiliser les acteurs du changement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
Prendre conscience. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
S’autoévaluer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
Accueillir ses émotions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
Décider de changer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62
Un nombre critique de volontaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62
Des comportements inadaptés qu’il faut changer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
Désapprendre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

CHAPITRE 6
Faciliter le processus de désapprentissage/apprentissage . . . . . . . . . . . . . . . 69
Le coach est un miroir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
Le coach est en position basse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
Le coach est un facilitateur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73

Troisième partie

Sécuriser la démarche de transformation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75

CHAPITRE 7
Créer un cadre sécurisé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
Un cadre où la dimension humaine est prise en compte. . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
Un espace où l’on peut exprimer qui l’on est . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
Un espace où l’on se connaît. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
Un cadre où l’on a confiance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84
Comment créer la confiance ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
Quels sont les bienfaits de la confiance ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
Les cadres d’intervention du scrummaster . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92

Messager-Livre.indb 11 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
XII

CHAPITRE 8
Maîtriser des outils et des techniques de coach. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
La synchronisation ou « check-in » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
Pourquoi se synchroniser ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
L’éclairage de la Process Communication. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
La synchronisation verbale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96
L’empathie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
L’écoute active. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100
La reformulation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
L’art du questionnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102
Le silence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106

Quatrième partie

Coacher l’équipe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109

CHAPITRE 9
Comment l’équipe se constitue-t-elle ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
Les étapes de constitution de l’équipe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
À quelle étape se situe l’équipe ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116

CHAPITRE 10
Création et structuration. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117
Définir une vision commune . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117
Pourquoi partager une vision ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118
Qu’est-ce que la vision ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118
Comment élaborer la vision ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119
Quels sont les bénéfices pour l’équipe ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123
Préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124
Déterminer les rôles et responsabilités. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124
Fixer les règles du jeu. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129

CHAPITRE 11
Confrontations et tensions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131
Les premières tensions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131

Messager-Livre.indb 12 12/10/12 09:38


Table des matières
XIII

Situations difficiles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132


La stratégie de résolution de conflits. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133
Pratiquer la confrontation positive. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 138
Réguler. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 138
Déjouer les jeux de pouvoir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
Anticiper les réactions prévisibles grâce à la Process Communication . . . . . . . . . . 142
Pratiquer une communication pacifique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 146
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

CHAPITRE 12
Régulation et normalisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
Améliorer le processus. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
Ajuster les relations. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157
Repérer les attitudes « écoutricides » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157
Métacommuniquer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158
Accepter le feedback de l’autre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
Développer l’esprit d’équipe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164

CHAPITRE 13
Synergie et performance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165
Une équipe performante. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166
Autonomie et auto-organisation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166
Responsabilité et sens de l’engagement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169
Intelligence collective . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172
Plaisir et bien-être . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 176

CHAPITRE 14
Dissolution et séparation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179
Le traumatisme de la séparation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179
Vivre ensemble les derniers instants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
Le rôle protecteur du coach . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181

Messager-Livre.indb 13 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
XIV

Cinquième partie

Coacher le scrummaster . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183

CHAPITRE 15
Pourquoi coacher un scrummaster ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185
Qui est le scrummaster ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185
Quelles sont ses compétences ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185
Quels sont ses besoins en coaching ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 186

CHAPITRE 16
Scrummaster, un autre style de leadership . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187
Au service de l’équipe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188
Et vous, quel est votre style de leadership ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191
Les questions à se poser. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191
Analysez vos résultats. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 198

CHAPITRE 17
Aborder son propre changement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201
Pas à pas, sur la pyramide de Dilts. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 202
Être congruent. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204
Définir son contrat d’évolution personnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206

CHAPITRE 18
« En tant que scrummaster, je veux
développer mes qualités d’écoute ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209
Écouter plus. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 210
Écouter mieux. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 214
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217

CHAPITRE 19
« En tant que scrummaster, je veux
trouver le bon positionnement vis-à-vis de l’équipe ». . . . . . . . . . . . . . . . . 219
Adopter une position basse. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 220
Apprendre à déléguer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221

Messager-Livre.indb 14 12/10/12 09:38


Table des matières
XV

Les freins à la délégation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222


Déléguer face à une équipe passive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 222
Accorder le droit à l’erreur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 224
Les sept niveaux de délégation ou d’autorité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 226
Les bénéfices de la délégation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 227
Savoir donner des signes de reconnaissance. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 228
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 233

CHAPITRE 20
« En tant que scrummaster, je veux
développer mon leadership » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 235
Développer sa capacité d’influence. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 235
Donner du sens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 236
Inspirer confiance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237
Motiver ses coéquipiers. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239
La finalité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239
La maîtrise. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239
Le code SACRÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 240
Obtenir l’engagement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 244
Le rôle de notre « joueur intérieur ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 245
La théorie du sandwich ou les trois lois de l’entraîneur. . . . . . . . . . . . . . . . . . 245
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 247

CHAPITRE 21
« En tant que scrummaster, je veux
apprendre à animer les cérémonies agiles » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249
Les constats et les dysfonctionnements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 250
O = Objectif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
La solution globale OPALE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
P = Participants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 252
A = Agenda. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 254
L = Livrable(s) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 255
E = Environnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 255
Animer efficacement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 256
Préparer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 256
Accueillir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 256
Animer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 259
Gérer les situations difficiles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 259
Évaluer et clore . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 260
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262

Messager-Livre.indb 15 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
XVI

Épilogue. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
Équipe Alpha. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
Rappel du contexte d’intervention et de la demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . 265
Mission effectivement menée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
Résultats visibles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
Équipe Bêta . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 266
Rappel du contexte d’intervention et de la demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . 266
Mission effectivement menée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 266
Résultats visibles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 267
Équipe Gamma . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 267
Rappel du contexte d’intervention et de la demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . 267
Mission effectivement menée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 268
Résultats visibles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 268

Conclusion. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 269
Doit-on former tous les managers ou leaders d’équipe
au coaching ou bien faire appel à un coach externe ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 269
Dans quelle configuration faire appel à un coach externe ?
Y a-t-il une mission de coaching type ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271
Et dans le cadre d’une transformation globale ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 272

Postface. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 275

ANNEXE A
Les outils du coach . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 277

ANNEXE B
Manifeste Agile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 281
Manifeste pour le développement Agile de logiciels. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 281
Principes sous-jacents au manifeste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 282

ANNEXE C
Check-list d’Henri Kniberg. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 285
Check-list Scrum non officielle d’Henri Kniberg. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 285

Messager-Livre.indb 16 12/10/12 09:38


Table des matières
XVII

ANNEXE D
Glossaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289

ANNEXE E
Bibliographie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 293
Coaching. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 293
Gestion du changement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 294
Leadership, management. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 294
Développement personnel, Process Communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 295
Méthodes agiles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 296

Index. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 297

Messager-Livre.indb 17 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 18 12/10/12 09:38
Avant-propos

J’ai compris l’intérêt d’introduire la pratique du coaching dans mon domaine d’activités,
la conduite de projets en mode agile, dès 20071. En effet, le lien avec l’humanisme des
méthodes agiles m’est apparu évident : nous sommes des êtres d’émotions avant d’être
développeurs, business analysts, chefs de projet, scrummasters ou product owners. Ce
n’est d’ailleurs pas par hasard que le Manifeste Agile2 met en avant sa première valeur :
« Priorité aux interactions entre les individus sur les processus et les outils. »
J’ai alors ressenti la nécessité de revisiter la façon dont j’accompagnais mes équipes pro-
jets : non plus en chef de projet classique mais en coach, non plus en experte mais en
facilitateur.
Aujourd’hui, avec cette troisième casquette – les deux autres étant celles de consultante
et de formatrice –, je me définis comme un « agent du changement », dans un contexte
d’évolution méthodologique et culturelle, que représente une transformation agile.
Aborder une transformation agile, c’est découvrir les méthodes agiles (valeurs, principes,
philosophie) et mettre en place une nouvelle organisation, de nouvelles pratiques et de
nouveaux outils ; c’est aussi apprendre à travailler et à communiquer différemment… Une
transformation agile constitue donc plusieurs transformations en parallèle (figure 0-1).

Figure 0-1
Les transformations
agiles
Acquisition de nouveaux savoirs

Mise en place d’une nouvelle organisation

Évolution des pratiques professionnelles

Adoption de nouveaux comportements

Transformation agile

1. Lors de ma certification à HEC Paris (2007)


2. http://agilemanifesto.org (annexe B)

Messager-Livre.indb 1 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
2

Dans ce contexte de transformation, toutes les strates de l’organisation sont concernées.


Les acteurs vivent le changement avec des points de vue différents selon leur position et
leur échelle d’observation : celle de l’individu, celle de l’équipe, celle du management et
celle de l’organisation (figure 0-2).

Figure 0-2
Les différentes Organisation
échelles
d’observation Management
du changement
Équipe

Individu

Dès lors que l’on introduit le concept de changement, on lui associe souvent les termes
« conduite » ou « accompagnement », ce qui laisse entendre que le changement doit être
accompagné. Plus précisément, ceux qui doivent l’être sont les individus, les équipes, les
managers et les organisations vivant ce changement. Peuvent alors intervenir accompa-
gnants et facilitateurs chargés de rendre la transformation effective, avec une démarche
adaptée à chacun des niveaux de l’échelle.
Cet ouvrage est un guide de la conduite du changement dans le contexte d’une transfor-
mation agile, avec mon point de vue de coach : cela signifie que je n’aborde pas tous les
aspects d’une transformation (formation, déploiement d’outils, mise en place des pra-
tiques agiles…). Certains diront que la description du coaching agile qui est proposée ici
est incomplète, parce que bien plus large en réalité… Peut-être. Mon parti pris, ici, est de
décrire la conduite d’une transformation agile sous l’angle du coaching exclusivement,
afin de bien faire comprendre au lecteur la spécificité du métier et ses bénéfices.

Quels sont les objectifs de l’ouvrage ?


L’objectif premier est de démontrer à tous les acteurs du changement engagés dans une
transformation agile, combien la posture de coach favorise le succès de la démarche.
Je décris comment un coach peut intervenir dans la conduite de ces changements afin de
clarifier son positionnement et ses apports.
Les différentes mises en situation offrent au lecteur une occasion de s’interroger sur
l’évolution de sa propre pratique professionnelle.

Messager-Livre.indb 2 12/10/12 09:38


Avant-propos
3

Quant aux grilles de lecture proposées, elles aideront chacun à mieux saisir la dimension
humaine d’une transformation et à comprendre ce qui se passe sur le plan des relations
interpersonnelles, souvent difficiles à décoder.
L’objectif ultime est, bien entendu, de contribuer à la réussite des projets en permettant
à chaque individu d’être pleinement acteur, responsable, engagé voire épanoui dans ses
missions.

À qui l’ouvrage est-il destiné ?


Le livre s’adresse à tous ceux qui, de près ou de loin, sont acteurs du changement : ceux
qui le vivent, directement ou indirectement, et ceux qui l’accompagnent.
• En premier lieu, il est destiné aux scrummasters, juniors ou expérimentés, et aux chefs
de projets traditionnels, qui sont en charge de l’animation d’une équipe agile. Ils sont
en effet eux-mêmes à la fois acteurs et agents du changement. Si les situations décrites
et les exemples proposés dans l’ouvrage sont tirés de mes missions de coach externe, je
dédie cette matière aux scrummasters, en priorité ; je souhaite qu’ils se l’approprient et
bénéficient d’un véritable transfert de compétences. En effet, pour favoriser l’émergence
d’une équipe agile, auto-organisée et responsable, ces meneurs d’équipes doivent adop-
ter une posture de coach. D’une part, l’ouvrage leur offre les moyens de s’approprier
cette posture et de faire évoluer leur pratique managériale ; d’autre part, il met à leur
disposition des outils pour faciliter la transformation de l’équipe qu’ils doivent animer.
• Parmi les « agents du changement » (internes ou externes), responsables de la générali-
sation des pratiques agiles et de la conduite du changement, interviennent des « coachs
agiles », appelés ainsi au sein de la communauté agile. Ce livre s’adresse à ceux d’entre
eux qui souhaitent enrichir leur palette d’outils d’intervention avec les outils de coa-
ching qui y sont présentés ; ils y trouveront des clés pour passer plus facilement d’une
posture de consultant ou de « sachant » à celle de coach.
• Bien évidemment, les acteurs du changement eux-mêmes, membres d’une équipe agile
en (trans)formation, se retrouveront dans certaines situations décrites dans cet ouvrage
miroir ; en mettant des mots sur ce qu’ils peuvent vivre ou observer, ils franchiront une
première étape vers leur propre changement.
• Les managers, quel que soit leur niveau dans la hiérarchie, devront, tôt ou tard, prendre
la mesure des conséquences en profondeur d’une transformation agile sur l’organisa-
tion, sa stratégie, sa culture, sa politique RH, ses modes de management. En découvrant

Messager-Livre.indb 3 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
4

– peut-être pour certains – comment le changement est vécu « sur le terrain », ils pour-
ront ainsi mettre en place les rouages adaptés au fonctionnement optimal des équipes
agiles.
• Enfin, certains coachs professionnels pourront y trouver une application illustrée des
techniques de coaching dans un contexte particulier.

Comment l’ouvrage est-il organisé ?


La première partie plante le décor ! Elle brosse un tableau des écueils rencontrés sur le
plan humain, dans le cadre d’une transformation agile. À partir de trois histoires, vous
serez invité à observer comment est vécu le changement par les différents acteurs et à
décrypter la complexité de ce qui se passe ; vous serez amené à mesurer l’importance
de la dimension émotionnelle et l’influence des freins personnels dans la résistance au
changement. Vous verrez pourquoi les comportements observés sur le terrain ne sont pas
toujours conformes aux valeurs agiles et aux comportements associés attendus.
Dans la deuxième partie, vous comprendrez en quoi la posture d’un coach est particuliè-
rement appropriée pour accompagner le changement. Vous mesurerez l’importance de la
demande initiale et de l’objectif du coaching pour définir les engagements mutuels. Vous
découvrirez les mécanismes de désapprentissage/apprentissage nécessaires, facilités par le
coach.
Dans la troisième partie, vous apprendrez comment le coach, responsable du cadre,
crée les conditions favorables pour bien intégrer la dimension humaine et sécuriser la
démarche de transformation. Quelques outils, les plus basiques sur lesquels il s’appuie, y
seront présentés.
Dans les deux parties suivantes, vous observerez le coach en action : le coach accompa-
gnant une équipe dans les différentes étapes de son évolution (coaching d’équipe, dans
la quatrième partie) et le coach guidant un scrummaster (coaching individuel, cinquème
partie). Dans la quatrième partie, en nous appuyant sur les cinq étapes du modèle de
Tuckman, nous explorerons les différents niveaux d’intervention du coach ou du scrum-
master, avec de nombreux outils utilisés en situation. Enfin, dans la cinquième partie,
vous suivrez le cheminement d’un scrummaster bénéficiant de l’aide d’un coach pour
aborder son propre changement, notamment l’évolution de son style de leadership.

Messager-Livre.indb 4 12/10/12 09:38


Avant-propos
5

Les outils de coaching présentés sont nombreux (il y en a plus de 40) : concepts, grilles de
lecture, trucs et astuces, questionnaires, guides… (Ils sont signalés par un pictogramme
représentant des outils en marge du texte.) Tous ne sont évidemment pas utilisables sys-
tématiquement. Il reviendra à chacun, en fonction du contexte et des acteurs impliqués,
mais aussi en accord avec sa propre sensibilité, de retenir ceux qui paraissent le plus
appropriés. Et puis, il faut laisser une part belle à la spontanéité des échanges, au natu-
rel de la relation qui s’établit entre le coach et le coaché, sans qu’il y ait nécessairement
besoin d’un outillage particulier.

Prérequis
Un postulat de départ, dans cet ouvrage, est que les pratiques d’ingénierie et organisa-
tionnelles des méthodes agiles sont connues du lecteur. Si tel n’était pas le cas, je l’invite
à lire mon premier ouvrage :
Véronique Messager Rota, Gestion de projet agile avec Scrum, Lean, eXtreme Program-
ming…, Eyrolles, 3e édition, 2010

Comment lire cet ouvrage ?


Cet ouvrage s’adresse au lecteur du point de vue d’un coach externe. En effet, je coache
des scrummasters, des équipes, des organisations, avant tout des personnes embarquées
dans une transformation, qu’elle soit ou non désirée.
Les retours d’expérience sont riches et nourrissent la vision du métier de coach que je
livre ici. Cette vision évolue bien sûr, grâce aux précieux échanges avec mes pairs, dans
mon espace de supervision ou encore avec d’autres agents du changement et mes clients.
En tout état de cause, lorsque je coache un scrummaster, je l’aide à adopter une posture
et à développer des compétences de coach vis-à-vis de son équipe. Lorsque je coache une
équipe, je m’efforce de m’effacer suffisamment pour mettre en lumière le vrai coach de
l’équipe : son scrummaster.
Derrière le terme de « coach » que j’utilise au fil des pages suivantes – même s’il provient
de situations vécues en tant que coach externe –, vous pouvez donc vous retrouver :
• soit en tant que scrummaster, chef de projet, manager ou coach de votre équipe agile ;
• soit en tant que coach interne ou externe, chargé d’accompagner une équipe, son scrum-
master, les deux, voire plusieurs équipes.
Et lorsque j’évoque le « coaché », il peut s’agir aussi bien d’une personne que d’une équipe.

Messager-Livre.indb 5 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
6

Cher lecteur, nous savons tous que dans une transformation agile, l’agilité n’est pas un
objectif en soi ; c’est le chemin pour y parvenir qui est fondamental, le coach étant le
compagnon de route sur ce chemin.
Alors, je vous propose de parcourir, dans ces pages, un petit bout du chemin ensemble.
Bonne lecture !

À propos de l’auteur
Coach certifiée HEC, accréditée Process Com, Véronique Messager accompagne, depuis
plus de quinze ans, des équipes projet et des organisations en phase de transition. Chaque
mission, chaque projet, chaque équipe sont uniques parce que chaque personne, acteur de
ces projets, est unique et vit la transition de façon spécifique ; c’est pourquoi la prise en
compte de la dimension humaine est essentielle dans l’approche proposée par Véronique
à ses clients. Outre un support organisationnel et méthodologique, notamment dans la
mise en place des méthodes et pratiques agiles, elle leur propose surtout un accompa-
gnement personnalisé de type coaching, afin de faciliter l’adoption des bons réflexes
comportementaux.
Certifiée scrummaster, Véronique Messager est également l’auteur de Gestion de projet
agile, paru aux éditions Eyrolles (3e édition, 2010).

Remerciements
S’engager dans la rédaction d’un ouvrage n’est pas un acte léger ; durant quelques mois,
en ce qui me concerne, rien n’a autant mobilisé mon temps, mes pensées, mon énergie…
C’est donc avec beaucoup de gratitude que je remercie, d’abord, ceux qui m’entourent,
qui ont supporté cette indisponibilité passagère et qui m’ont soutenue.
Sans le groupe Eyrolles, ce projet n’aurait sans doute pas abouti aussi vite ; merci donc à
Karine Joly, éditrice du secteur informatique, qui m’a, une nouvelle fois, fait confiance.
Je suis également infiniment reconnaissante à mes relecteurs ; avec justesse et bienveil-
lance, ils ont pratiqué l’art du feedback constructif, en me poussant toujours plus loin
dans la recherche de la qualité et de la clarté des propos.

Messager-Livre.indb 6 12/10/12 09:38


Avant-propos
7

Merci à mon amie coach Magali Baton3 ; merci à mes confrères Laurent Morisseau4 et
Arnaud Villenave… et une mention spéciale pour Christophe Addinquy5, fidèle relecteur
depuis le premier ouvrage et toujours aussi intraitable !
Merci à Laurent Sarrazin, responsable du Centre Agile de SG-CIB (BFI de la Société
Générale) pour m’avoir proposé le concours du BookClub qu’il co-anime avec Jean-
Claude Grosjean6 ; vos retours ont été si précieux. Merci donc à Myriam Roux, Émilie
Leducq, Gilles Philippart et Jean-Marc Decouleur.
Je ne peux oublier de citer mes confrères coachs (souvenir de Grenoble avec Madeleine
Zalkind, Véronique Brenner, Patrick Le Go, Michel Cezon et Joël Conti) ni Fabrice Ai-
metti, qui ont aimablement nourri ma réflexion sur le titre de l’ouvrage.
Je remercie Gilles Charest7 pour s’être prêté à l’exercice de l’interview sur la sociocratie,
Romain Vignes pour son témoignage, Yves Blanc, Gérard Collignon et Michaël Aguilar,
pour m’avoir autorisée à faire référence à leurs outils que j’utilise régulièrement dans mes
missions.
Merci, enfin, à deux femmes talentueuses, qui ont accepté spontanément de rédiger une
préface et une postface, associant ainsi leurs noms à mon projet : merci à Bernadette
Lecerf-Thomas et à Françoise Engrand.

3. http://www.seikacoaching.com
4. Auteur de Kanban pour l’IT, Dunod, 2012
5. http://addinquy.tumblr.com
6. http://www.qualitystreet.fr
7. http:/www.sociogest.ca

Messager-Livre.indb 7 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 8 12/10/12 09:38
Première partie

Le contexte d’une
transformation agile
Les méthodes agiles1 véhiculent des valeurs qui sont censées
induire des pratiques et des comportements collaboratifs. Or,
l’expérience sur le terrain montre que la réalité est souvent diffé-
rente de ce qui est décrit dans la littérature : en effet, les compor-
tements observés ne sont pas toujours ceux attendus.
Pourquoi ? Parce que l’introduction de nouvelles pratiques col-
laboratives et managériales implique, en premier lieu, certains
changements individuels. Cela engendre des peurs, amplifiées
dans un contexte où la confiance ne règne pas toujours entre les
membres d’une même équipe ; et nos freins personnels ralen-
tissent voire paralysent le processus d’adaptation qui devrait se
mettre en place.

1. Voir en annexe B le Manifeste agile (AgileManifesto.org).

Messager-Livre.indb 9 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 10 12/10/12 09:38
1
Valeurs agiles
et comportements associés

Un idéal n’a aucune valeur


si vous ne pouvez pas le mettre en pratique
Swâmi Râmdâs, philosophe indien

L’agilité met en avant des valeurs et des principes humanistes, ainsi que de nombreuses
pratiques collaboratives ; les comportements attendus restituent une image d’Épinal
d’équipes soudées, auto-organisées, engagées, solidaires…

Valeurs et pratiques agiles

Fonctionnement d’une équipe agile


Contrairement à une équipe traditionnelle qui fonctionne en silos et travaille en mode
séquentiel, une équipe agile est intégrée et pluridisciplinaire. Cela signifie que tous les
corps de métier sont réunis – idéalement dans une même salle – et travaillent tous à
la fabrication d’un résultat commun. Des réunions plénières, appelées « cérémonies »,
ponctuent le rythme des itérations et offrent de fréquentes occasions de collaborer.

Messager-Livre.indb 11 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
12
Première partie

Étroite collaboration
Cette collaboration est nécessaire à l’équipe, notamment pour qu’elle puisse définir,
en toute autonomie, son « processus de fabrication », le « comment » (par rapport au
« quoi » exprimé par le client ou son représentant, le product owner1) ; la synergie et la
complémentarité entre les membres donnent à ces derniers cette capacité à déterminer
leur organisation et leur mode de fonctionnement. Plus précisément, lors du sprint plan-
ning meeting2, l’ensemble des coéquipiers découpe les fonctionnalités à développer en
tâches, estime celles-ci et se les répartit.

Engagement
En contrepartie de cet espace de liberté pour s’autogérer, l’équipe agile est responsable du
résultat sur lequel elle s’engage de façon collective. Cet engagement ne porte que sur le
périmètre d’un sprint ; il est possible parce que l’équipe évolue dans un cadre collaboratif
qui favorise sa performance et parce qu’elle est propriétaire de son processus.
En cas de doute, l’équipe agile ose ; elle accepte de ne pas toujours tout savoir ou tout
contrôler pour avancer. Elle bénéfice d’un droit à l’erreur, donné par le management, qui
favorise l’apprentissage.

Amélioration continue
L’équipe agile enclenche, dès le démarrage, un mécanisme d’amélioration continue, afin
d’ajuster au plus tôt son processus de fabrication, de rôder ses pratiques et de réguler ses
interactions ; cela lui donne une forte adaptabilité.
Les pratiques collaboratives fluidifient la communication entre les membres et vis-à-vis
des acteurs externes, et elles évitent les situations de blocage grâce à l’entraide et la soli-
darité entre coéquipiers : cela garantit une forte disponibilité des membres.

Transparence
Enfin, l’équipe travaille en toute transparence : l’avancement des tâches de chacun ou du
projet est connu de tous et communiqué quotidiennement.

Management d’une équipe agile


Dans ce contexte, quel est le rôle du leader d’une équipe agile, responsable, auto-organi-
sée et engagée ?
Le scrummaster est décrit dans la littérature comme un leveur d’obstacles, un servant

1. Le product owner ou « propriétaire du produit » est le représentant du client et l’interlocuteur privilégié


de l’équipe de réalisation.
2. Réunion de planification d’une itération ou sprint, dans la méthode Scrum

Messager-Livre.indb 12 12/10/12 09:38


Valeurs agiles et comportements associés
13
Chapitre 1

leader (leader au service de l’équipe), un sheep dog (chien de berger) ou encore un


firewall (pare-feu). Il est un leader au service de son équipe, et non l’inverse, avec un rôle
protecteur contre le « chaos extérieur ».
Il n’est plus celui qui commande et qui contrôle ; son équipe responsabilisée, il délègue la
prise de décision. En facilitateur, il peut alors se concentrer sur la communication et les
interactions entre les personnes. Tout en alignant l’équipe sur la vision du projet et en la
recentrant en permanence sur la valeur ajoutée pour le client, il développe l’esprit colla-
boratif, assure la fluidité de la communication et favorise l’apprentissage et l’adaptation
des membres de l’équipe. Il crée un cadre favorable.

☞ Rendez-vous dans la cinquième partie « Coacher le scrummaster » pour en savoir


davantage sur le rôle de ce dernier et le style de leadership à adopter.

Comportements attendus
Qu’attend-on concrètement des membres d’une équipe agile et de son leader, en termes
de comportements associés aux valeurs véhiculées ?
Reprenons ces valeurs et ces pratiques (tableau 1-1).3
Tableau 1-1 Valeurs agiles et comportements attendus

Valeur agile Comportement


Collaboration Chaque membre de l’équipe est attentif à préserver l’intérêt collectif, avant
ses objectifs personnels, pour la performance globale. On n’observe pas de
comportement individualiste ou recherchant la « starisation ». La program-
mation en binôme y fonctionne à merveille, par exemple.
Confiance Chaque membre de l’équipe sait que ses coéquipiers sont bienveillants à
son égard ; chacun accepte d’apparaître vulnérable, le cas échéant, et de
reconnaître une faiblesse ou une difficulté. Cette confiance garantit égale-
ment le libre échange d’informations lors du daily stand-up meeting3 (pre-
mier lieu où cela est perceptible) et la participation constructive aux estima-
tions ; elle permet de discuter ouvertement et sans détour d’améliorations ou
de changements, sans que cela engendre des conflits.
Solidarité La confiance entre les membres facilite leur démarche spontanée de de-
mande ou de proposition d’aide, en cas de problème.
Responsabilité Chaque membre est co-responsable des décisions collectives. En cas
d’échec, on ne recherche pas le « coupable » : on réussit ou on échoue col-
lectivement. L’échec est assumé et considéré comme une étape d’appren-
tissage.

3. Le daily stand-up meeting ou scrum est une réunion courte (quinze minutes) quotidienne pour faire le
point sur l’avancement des tâches. Le protocole veut que l’on se tienne debout en cercle, pour éviter qu’elle
ne dure trop longtemps et pour que chacun communique avec l’ensemble des coéquipiers.

Messager-Livre.indb 13 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
14
Première partie

Autonomie Chacun profite de cette autonomie pour prendre des initiatives, proposer
des solutions, innover, sans attendre passivement les directives du chef.
Chaque membre est proactif.
Sens de l’engagement Chaque membre est soucieux de respecter les décisions prises ensemble,
notamment vis-à-vis du client, sur le résultat attendu. Tout est mis en œuvre
pour honorer le contrat. Il n’y a pas de situation de blocage. Et tous parti-
cipent activement au daily stand-up meeting, qui se tient chaque jour pour
s’assurer que l’engagement sera tenu.
Droit à l’erreur Prendre des risques, innover, itérer, apprendre constituent les fondements
d’une approche agile. Chacun accepte de se tromper, potentiellement,
puisque les erreurs ne sont ni jugées ni sanctionnées. En effet, sur des
cycles courts, les erreurs ont moins de conséquences. Tous apprécient de
s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue et voient les rétros-
pectives4 comme une opportunité de corriger. Ce qui est important, c’est
apprendre de ses erreurs.
Apprentissage Chaque membre de l’équipe accepte de démarrer sans tout maîtriser, avec
une part d’inconnu. L’apprentissage fait partie du travail quotidien, par la dé-
couverte, l’autoformation, la programmation en binôme (pair-programming)
ou le transfert de compétences entre membres.
Transparence Chacun communique quotidiennement et spontanément son estimation du
travail restant à faire, sans se sentir contrôlé ; personne n’hésite à alerter ses
coéquipiers sur un obstacle rencontré, y compris une difficulté personnelle.
Adaptabilité Le changement est accepté, les remises en question fréquentes et indo-
lores, puisqu’elles ne portent pas sur les personnes.
Exemplarité Porteur lui-même des valeurs et principes agiles, le manager sait les par-
tager et s’assure de leur respect et de leur bonne application. Il fait preuve
d’exemplarité.
Courage Les membres de l’équipe ont du courage pour accepter de démarrer un pro-
jet sans avoir tous les éléments, tout en sachant que l’on devra sans doute
défaire, refaire, améliorer, adapter ; il leur en faut pour accepter les prises de
risques les remises en question, la transparence, l’appropriation collective
du produit…
Respect Il leur faudra également du respect, les uns envers les autres et pour le
travail de leurs coéquipiers. Le manager qui délègue la responsabilité à son
équipe fait preuve de respect à son égard.
Disponibilité Elle est particulièrement vraie pour le manager, « leveur d’obstacles », dont
le rôle est dédié à son équipe pour l’aider à progresser.

Note
Cette liste n’est pas exhaustive. 4

4. Une rétrospective est une réunion en fin de sprint ou de release pour dresser le bilan intermédiaire et voir
comment on peut améliorer le fonctionnement de l’équipe. Une rétrospective est également organisée à la
fin du projet.

Messager-Livre.indb 14 12/10/12 09:38


Valeurs agiles et comportements associés
15
Chapitre 1

Ce que nous avons appris


Nous avons vu qu’au-delà du Manifeste Agile, qui présente les quatre valeurs et les douze
principes, les pratiques agiles exigent, de la part des membres de l’équipe et de leur lea-
der, des attitudes d’ouverture, de dialogue et de transparence. En choisissant d’adopter
ces démarches agiles, on introduit un style différent de management et un nouveau mode
de fonctionnement des équipes.
Toutefois, suffit-il d’ériger « les individus et leurs interactions » comme première valeur
et de s’engager dans une démarche agile pour que, soudainement, les hommes se parlent,
se comprennent et se comportent comme décrit précédemment ?
La réalité observée est souvent différente. Faisons la connaissance de trois équipes.

Messager-Livre.indb 15 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 16 12/10/12 09:38
2
Qu’observe-t-on en réalité ?

Les seules connaissances qui puissent influencer le comportement d’un indi-


vidu sont celles qu’il découvre par lui-même et qu’il s’approprie.
Carl Rogers, psychologue humaniste américain

Afin d’illustrer tout ce qui suit, j’aimerais vous raconter trois histoires. À travers ces
trois instantanés de trois contextes différents, nous découvrirons que les comportements
observés ne sont pas toujours ceux auxquels on s’attend dès lors qu’on s’engage dans une
transformation agile.

Précision
Les personnages et les situations de ces trois récits sont purement fictifs ; cependant,
toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé
n’est pas fortuite.

☞ Aide
Un récapitulatif de ces trois exemples (caractéristiques de chaque équipe, objectifs, ac-
teurs, etc.) est présenté en troisième de couverture, afin que vous puissiez y avoir accès
facilement tout au long de la lecture de cet ouvrage.

Messager-Livre.indb 17 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
18
Première partie

Équipe Alpha

Le contexte
Patrick a 44 ans ; il est le scrummaster d’une équipe de sept personnes. Sa société a
décidé de s’engager dans une transformation agile il y a neuf mois.
Patrick travaille dans cette société depuis plus de dix ans ; il a une double compétence
technique et fonctionnelle, et une certaine autorité naturelle. C’est un « gaillard » impo-
sant, jovial, qui s’exprime avec force et vigueur.
Le responsable Qualité & Méthodes, à l’origine de l’orientation vers l’agilité, considère que
Patrick n’exerce pas de façon optimale ses nouvelles fonctions, en dépit d’une formation
certifiante de scrummaster. Il considère que les membres de l’équipe de Patrick sont peu
autonomes, fuient les responsabilités et ont du mal à s’engager sur des livraisons à date fixe.

La demande officielle
Le responsable Qualité & Méthodes et Patrick me confient la mission d’amener l’équipe
à davantage d’implication, de responsabilité et d’engagement.
Sans a priori, je propose d’assister – en observatrice – à quelques cérémonies agiles (daily
stand-up meeting, sprint planning meeting, rétrospective) et de mener, en parallèle, un
entretien avec chaque membre de l’équipe Alpha.
Je proposerai ensuite l’accompagnement personnalisé de Patrick.

Vu et entendu

Verbatim
« Pourquoi nous demander des estimations ? C’est bien le rôle du chef de projet, non ? »
(développeur)
« On vous demande des estimations, sans savoir vraiment ce qu’il y a à faire ; et puis
après, on vous tape sur les doigts si vous vous êtes trompé. » (développeur)
« C’est au chef de projet d’assumer ; moi, je n’ai pas sa paie ! » (développeur)
« On est contrôlé tous les jours ; je ne comprends pas pourquoi on ne nous fait pas
confiance. » (développeur)
« À quoi ça sert, ces rétrospectives ? On n’est pas là pour se poser des questions méta-
physiques. En plus, on nous répète tout le temps de nous secouer pour livrer plus vite ;
alors, ce n’est pas une perte de temps ça ? » (développeur)

Messager-Livre.indb 18 12/10/12 09:38


Qu’observe-t-on en réalité ?
19
Chapitre 2

« Heureusement que j’ai ce background technique, sinon je ne sais pas comment ils
feraient… » (scrummaster)
« Avant, on ne se posait pas la question de savoir qui était responsable ; c’était le chef
de projet et ça marchait comme sur des roulettes. » (scrummaster)

Ce que j’ai vu
• J’assiste à un release planning meeting1 : les membres de l’équipe doivent évaluer le ni-
veau de complexité des user stories du product backlog2 pour les ventiler sur les quatre
sprints3 de la release 4 . Tous les prétextes sont invoqués pour ne pas donner d’estima-
tion. Le scrummaster finit par proposer un chiffre, validé par les membres de l’équipe.
• J’observe que Patrick est souvent sollicité, pour ci, pour ça ; il semble incontournable,
compte tenu de son ancienneté et de ses compétences. Il est ravi, d’ailleurs, de pouvoir
aider les membres de son équipe.
• Il est également très souvent appelé par la direction pour rendre compte de l’avan-
cement ; il redescend généralement préoccupé puis s’en prend systématiquement à
l’équipe pour qu’elle « se ressaisisse ». Des contrordres modifient souvent l’organisation
du travail.
• Deux ou trois membres sont absents à certaines cérémonies. En fait, des développeurs
travaillent sur deux, voire trois projets en même temps. Je découvre que la direction
préempte facilement les ressources pour faire face aux priorités changeantes.
• J’assiste à un daily Scrum meeting : je suis assez surprise de constater que chaque par-
ticipant s’adresse unilatéralement à Patrick, comme s’il avait des comptes à lui rendre.
Et pendant ce temps, les autres attendent passivement !
• Lors de la rétrospective, je constate peu de participation ; certains membres de l’équipe
s’échappent sur leur smartphone, d’autres, alternativement, répondent à leurs courriels
sur leur portable. Patrick peine à obtenir une réaction ou un retour d’expérience ; alors,
il résume les faits marquants de l’itération, propose une ou deux amélioration(s), rapi-
dement validée(s) par l’équipe. Puis la rétrospective est close.
• Patrick suit l’avancement de « son » projet sur un diagramme de Gantt.

1. Le release planning meeting est une réunion de planification d’une version majeure de l’application.
2. Le product backlog est la liste des exigences du client exprimées sous forme d’usages du système (user
stories).
3. Un sprint ou itération est une « tranche » de temps d’une durée de deux à trois semaines.
4. Une release est une version majeure de l’application, qui regroupe généralement plusieurs sprints.

Messager-Livre.indb 19 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
20
Première partie

Équipe Bêta

Le contexte
L’équipe Bêta compte cinq personnes, dont une scrummaster, Catherine. Tous ses
membres sont de brillants ingénieurs, chacun expert dans son domaine, y compris la
scrummaster.
Les méthodes agiles ont été introduites depuis plusieurs mois dans cette organisation ;
cette équipe, récemment constituée pour mener un projet de quelques mois, assez straté-
gique, applique donc cette approche.
Le directeur du projet, qui supervise ce projet et d’autres, constate cependant que l’équipe
n’en est pas vraiment une, puisque chaque membre travaille plutôt isolément. La perfor-
mance collective n’est par conséquent pas optimale. Elle pourrait sans doute être améliorée.

La demande officielle
Le directeur de projet suggère aux membres de l’équipe l’intervention d’un coach pour les
amener à mieux collaborer et tirer profit de l’efficacité du groupe.
Je propose, dans un premier temps, un entretien avec chacun des membres. Je proposerai,
ensuite, un accompagnement collectif de l’équipe.

Vu et entendu

Verbatim
« Pourquoi cette réunion debout chaque jour ? Je n’ai rien à faire des tâches des autres. »
(développeur)
« Je sais m’organiser tout seul, je n’ai pas besoin que d’autres m’aident à découper mes
tâches et les estiment à ma place. Et puis, je suis le seul à maîtriser cette technique. »
(développeur)
« Oui, on est une équipe agile, puisque toutes les compétences sont intégrées dans
l’équipe. » (scrummaster)
« Je n’ai pas envie de coder à deux ; je vais plus vite tout seul. » (développeur)
« Chacun son domaine ! » (développeur)
« On n’est pas obligé d’appliquer la méthode à la lettre… » (scrummaster)
« On ne comprend pas vraiment pourquoi on vous fait intervenir. » (développeurs)

Messager-Livre.indb 20 12/10/12 09:38


Qu’observe-t-on en réalité ?
21
Chapitre 2

Ce que j’ai vu
• Ma première observation lorsque j’arrive pour le premier entretien, c’est la grande concen-
tration des ingénieurs ; je suis frappée par l’ambiance laborieuse et le silence « assourdis-
sant » qui règne dans la salle : chacun est devant son écran, un casque sur la tête.
• Je constate qu’il n’y a pas de scrumboard5 pour visualiser l’avancement des tâches.
• À l’heure du déjeuner, la scrummaster peine à organiser un daily stand-up meeting qui
réunisse tout le monde. Elle-même est en retard par rapport à l’horaire annoncé. Un
second retardataire arrive au milieu de la réunion.
• J’apprends, par hasard, que la dernière livraison s’est mal déroulée, puisque aucun test
d’intégration n’avait été mené durant la précédente itération.
• La rétrospective n’a pas eu lieu, car il a fallu très rapidement trouver l’origine des bo-
gues et procéder d’urgence à une nouvelle livraison. Puis l’itération suivante a démarré.

Équipe Gamma

Le contexte
Cette troisième équipe n’est pas agile ; il s’agit d’un département Études & Développe-
ments dans une grande organisation, qui maintient des applications en production et gère
de nouveaux projets. Onze personnes composent cette équipe.
L’organisation est en train de mener une réflexion sur l’opportunité d’introduire des pra-
tiques agiles dans le processus de développement.

La demande officielle
Le responsable de l’équipe, Bruno, très en amont de la démarche et en prévention de
certaines résistances, souhaite s’entourer d’un coach pour anticiper les difficultés prévi-
sibles.
L’objectif est d’amorcer une transformation en prenant en considération les personnes qui
sont au cœur du processus.
Je propose de dresser un « état des lieux » et de mener une étude stratégique en intégrant
les facteurs humains. Cette intervention commence par un entretien avec chacun des
membres de l’équipe et avec leur interlocuteur marketing.

5. Un scrumboard est un tableau mural affichant l’avancement des tâches.

Messager-Livre.indb 21 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
22
Première partie

Vu et entendu

Verbatim
« Une nouvelle mode, ces méthodes agiles ! » (développeur)
« Je ne comprends pas pourquoi on veut tout changer, alors que ça ne marche pas si
mal, aujourd’hui. » (testeur)
« On voudrait nous faire porter le chapeau pour tous les dysfonctionnements ! Alors on
nous impose ces méthodes. » (développeur)
« Je crains que ce ne soit la prise de pouvoir assurée par les développeurs. » (marketing)
« Ca ne marchera jamais chez nous, ça. » (analyste)
« Je doute de la coopération au sein de cette équipe ; il y en a qui tirent toujours la cou-
verture à eux ! » (développeur)
« Qu’on nous laisse faire tranquillement notre boulot ; je le connais, cela fait dix ans que
je suis là. » (technicien)
« Je monterais bien en compétences sur d’autres techniques, mais ceux qui la maîtrisent
ne veulent pas la partager ; c’est comme si on les dépossédait de quelque chose ! » (déve-
loppeur)

Ce que j’ai vu
• Je vois peu de communication ouverte entre les membres de cette équipe. Je sens plutôt
des échanges « souterrains », en aparté ou sous forme de sous-entendus, a fortiori entre
l’équipe et le représentant marketing, et entre les membres de l’équipe et leur manager.
• Je note un décalage entre le manager de l’équipe, impatient, passionné, qui souhaite
avancer vite, et ses collaborateurs, plutôt réticents.
• Je ressens d’ailleurs une certaine méfiance à mon égard.
• Je constate que les personnes sont souvent interrompues par des demandes toujours
plus urgentes les unes que les autres de la part du centre de contacts clients.
• J’assiste à certaines de leurs réunions de travail et j’observe très peu d’écoute entre les
participants. Lorsqu’ils interviennent, j’ai l’impression qu’ils s’expriment sous contrôle
du manager.

Messager-Livre.indb 22 12/10/12 09:38


Qu’observe-t-on en réalité ?
23
Chapitre 2

• Je prends connaissance d’un conflit non réglé entre deux personnes : celui-ci pèse clai-
rement sur l’ambiance au sein de l’équipe.
• Un jeune ingénieur, Nicolas, vient d’être recruté au sein de l’équipe (il y a deux mois) ;
visiblement, celui-ci est peu intégré par ses coéquipiers, excepté par Sylvie, une analyste
fonctionnelle. Souvent en retrait, il est peu sollicité pour donner un avis. Lui semble favo-
rable à une évolution du processus de développement ; il est donc « suspect ».
Ces trois situations feront l’objet d’une analyse et constitueront le support pour la mise en
œuvre d’outils de coaching (d’équipe ou individuel) tout au long des pages de cet ouvrage.

Réalité et comportements observés


Ne serait-ce qu’au travers de ces trois instantanés, on aura identifié de nombreux compor-
tements différents de ceux auxquels on pourrait s’attendre, compte tenu de ce que l’on a
décrit du mode de fonctionnement d’une équipe agile.
Quels sont les comportements observés au sein de nos trois équipes ou plus généralement
« dans la vraie vie », par rapport aux descriptions (parfois) idéalistes de la littérature ?
• Une incompréhension apparente sur le rôle et les responsabilités des uns et des autres.
• Des hésitations à s’exprimer (à tout le moins de façon authentique), à donner un avis ou
tout simplement une estimation.
• Une lassitude par rapport à la fréquence des cérémonies, des retards, voire une démo-
bilisation.
• Une méfiance par rapport aux avantages de la transparence.
• Des ordres ou consignes venus d’en haut alors même que l’autonomie des équipes est
mise en avant. et bien d’autres décalages entre les discours officiels et la mise en œuvre
concrète.
• Sous couvert d’autonomie, précisément, un individualisme exacerbé.
• Des modes de communication non sereins allant de l’absence d’échange à l’agressivité,
en passant par des non-dits ou des sous-entendus.
• Des règlements de compte ou la recherche d’un « coupable ».
• Une certaine passivité, expression d’une forme de défaitisme ou de désengagement vis-
à-vis du résultat.
• De la susceptibilité chez quelques-uns face à de l’autosatisfaction affichée par d’autres.
• Etc.
Bref, des comportements éloignés des valeurs agiles !

Messager-Livre.indb 23 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
24
Première partie

Malentendu
Souvent, j’entends des clients affirmer qu’ils ont adopté l’agilité. Ils sont persuadés de la
pratiquer, mais il s’agit en réalité de ScrumButs6 : une méthode Scrum aménagée, mais
dénaturant considérablement la méthode originale. Les pratiques ne sont alors pas cor-
rectement implémentées ; a fortiori, les (nouveaux) comportements associés ne sont pas
adoptés. D’où l’intérêt de doubler une intervention auprès des personnes (coach) par un
audit méthodologique (expertise).

Ce que nous avons appris


Au travers de ces trois histoires vécues dans différents contextes de transformation agile,
on constate un décalage entre les comportements agiles attendus et les comportements
réels : incompréhensions, difficultés de communication, individualisme, lassitude, mé-
fiance, passivité…
Essayons à présent d’en comprendre l’origine.

6. http://www.scrum.org/scrumbut

Messager-Livre.indb 24 12/10/12 09:38


3
Comment expliquer ce qui se passe ?

Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons
pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles.
Sénèque, philosophe latin

Lorsqu’on introduit de nouvelles façons de travailler et de communiquer, apparaissent


inévitablement des résistances pour conserver les anciennes pratiques. Ces blocages, aux
niveaux comportemental, relationnel et managérial, peuvent s’exprimer différemment en
fonction du « capital émotionnel » de chacun. En effet, pour la plupart, ils prennent leur
source dans les ressentis des acteurs concernés et influencent alors leurs comportements.
En outre, l’absence de confiance au sein de l’équipe ou de l’organisation renforce ces
influences négatives.

Le changement est vécu comme une menace

Les changements induits


Introduire une approche agile est un changement majeur dans le quotidien des équipes
de développement : changement d’organisation, changement de pratiques, changement
d’outils, mais surtout, changement de mode relationnel et de communication.
En outre, c’est un changement pour le leader de cette équipe qui doit faire évoluer sa
propre pratique managériale !

Messager-Livre.indb 25 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
26
Première partie

Quels sont ces changements ? Quelles sont les nouvelles pratiques qui apparaissent ? Que
faut-il faire évoluer dans les comportements ?

Pour l’équipe
• Constituer une équipe intégrée, multidisciplinaire et travailler avec d’autres corps de métier.
• Accepter une prise de risque (notamment par l’introduction du développement itératif).
• S’engager sur un résultat collectif, à partir d’estimations fournies par l’équipe ; par
conséquent, introduire une interdépendance entre les coéquipiers.
• Prendre des décisions de façon autonome et responsable.
• Accepter le droit à l’erreur pour soi, mais aussi pour les autres, sans condamner.
• Être transparent sur l’avancement de son travail, quotidiennement.
• S’inscrire dans une démarche d’amélioration continue.
• Être solidaire de ses coéquipiers.
• Adopter une communication sincère et honnête excluant les jeux politiques et les calculs.
Les hommes doivent pouvoir être authentiques, à l’aise, exprimer spontanément une dif-
ficulté, livrer une préoccupation ou manifester leur désaccord avec une décision prise.
• Etc.

Pour le leader
• Développer des qualités d’écoute liées à la nature des échanges facilitant l’expression
de ressentis ; développer son sens de l’empathie pour des problématiques relationnelles
et moins techniques.
• Lâcher son expertise technique et passer à un autre métier pour favoriser les interac-
tions au sein de l’équipe, et entre l’équipe et les interlocuteurs extérieurs ; « d’apporteur
de solutions » ou donneur d’ordres, il devient « leveur d’obstacles ». Il doit accepter de
ne plus « faire » mais de « faire faire ».
• Déléguer et accepter le droit à l’erreur, faire preuve d’humilité pour soi-même, marquer
la confiance et le respect envers ses collaborateurs.
• Garantir un processus, la bonne application de la méthode, sans décider des pratiques
à adopter.
• Au-delà de sa propre évolution personnelle, accompagner et soutenir la transformation
de son équipe en facilitateur et non en chef.
• Etc.
Ces changements ne sont que des exemples et ne constituent pas une liste définitive.

Messager-Livre.indb 26 12/10/12 09:38


Comment expliquer ce qui se passe ?
27
Chapitre 3

Synthèse
Tableau 3-1 Synthèse des changements induits

Changements induits pour…


L’équipe Le leader
Travailler en équipe Être « acteur », voire « porteur » du changement
Prendre des risques Développer son leadership
S’engager Lâcher prise et trouver une nouvelle légitimité
Accepter la solidarité et l’interdépendance Être dans l’écoute empathique
Être plus visible, plus exposé Déléguer et donner plus d’autonomie
Être plus autonome dans la prise de décision Assumer les erreurs de l’équipe auprès
de la hiérarchie
Se remettre en question Adopter une nouvelle posture
Interagir et communiquer différemment

De nouvelles compétences relationnelles mal développées


En résumé, on notera que les changements liés à une transformation agile induisent non
seulement l’assimilation de nouveaux savoirs et de savoir-faire méthodologiques et tech-
niques, mais aussi l’adoption de nouvelles façons de travailler, de collaborer ou de com-
muniquer. Il s’agit, en effet, de développer de nouvelles compétences dites relationnelles
ou collectives, qui nous sont rarement enseignées, puisqu’elles relèvent davantage de nou-
veaux savoir-être.
Dans ce nouveau contexte, les acteurs sont souvent peu préparés à ces nouvelles ap-
proches agiles ; de retour d’une formation qui leur enseigne les savoirs de base (et non
les savoir-être), ils entrent en (inter)action comme ils peuvent, avec leur parcours, leurs
expériences, leur vision, leurs règles, leurs ressentis, leurs attentes… Bref, en tant que
personnes, avec ce qu’ils sont.
« La régulation relationnelle se fait [alors] de façon empirique, sans cadre, ni mé-
thodologie autre que les quiproquos relationnels, les rapports de force et les jeux
d’influence. »1

La dimension psychologique du changement négligée


Malheureusement, la dimension psychologique du changement est souvent négligée et
l’on constate fréquemment que seuls les aspects organisationnels et technologiques sont
privilégiés. Dans une démarche top-down, initiée par la direction, les équipes se voient
trop souvent mises devant le fait accompli. Elles se projettent difficilement dans l’avenir,

1. Bernadette Lecerf-Thomas, Neurosciences et management : le pouvoir de changer, Eyrolles, 2009

Messager-Livre.indb 27 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
28
Première partie

en dépit de la mise en place de cellules dédiées au changement – lorsqu’elles existent –


chargées de gérer les fameuses « résistances au changement ». Lorsque l’initiative émane
de l’équipe elle-même, celle-ci est impatiente de mettre en application les nouvelles pra-
tiques et de déployer les nouveaux outils ; elle en oublie souvent ou minimise les aspects
comportementaux.
Pourtant, on sait par expérience qu’une proportion de 10 % des individus est systémati-
quement contre le changement, alors que 10 % sont toujours favorables. Cela laisse une
proportion non négligeable (80 % environ) de personnes attentistes, mais influençables,
vis-à-vis du changement (figure 3-1).

Figure 3-1
Positions face
au changement
80 %

10 % 10 %

Acteurs du Indécis Opposants


changement

Les résistances au changement : les indécis (la majorité) vont dans le sens de ceux qui ont le
plus d’influence ; il faut donc agir sur les extrêmes, pour qu’ils soient moteurs et promoteurs du
projet et que les opposants ne nuisent pas à ce dernier.

Mettre en place un changement induit inévitablement un enjeu personnel pour chaque


individu directement ou indirectement concerné : quelles sont les conséquences de ce
changement chez chacun, sur ses compétences, ses croyances, ses habitudes, ses alliances
avec les autres, etc. ?
Devons-nous systématiquement vivre le changement dans la douleur et y résister ?

Le mécanisme de l’homéostasie
Lorsque nous sortons d’un bâtiment chauffé à 20 °C pour affronter le grand froid hiver-
nal avec -15 °C, se déclenche – sans que nous le maîtrisions – un mécanisme d’adaptation
à l’agression extérieure, qui s’appelle l’homéostasie.
C’est la capacité de l’organisme à maintenir un état de viabilité, à se protéger contre tout
ce qui menace son intégrité ou son équilibre. Et chacun réagit différemment au froid ;
certains s’adaptent rapidement, d’autres plus lentement, d’autres encore renonceront à
sortir, ne pouvant affronter ce trop gros écart.

Messager-Livre.indb 28 12/10/12 09:38


Comment expliquer ce qui se passe ?
29
Chapitre 3

Un individu est un système ou un organisme qui évolue dans un environnement ; si l’envi-


ronnement global qu’est l’organisation ou l’équipe dans laquelle il travaille est le même pour
chaque membre, il n’en demeure pas moins que chacun y trouve son positionnement et son
équilibre en s’appuyant sur des facteurs très personnels. Chacun a sa « zone de confort ».

Un processus personnel d’adaptation avant tout


Si son environnement de travail et les modes de fonctionnement avec les autres évoluent,
cela nécessite que l’organisme ou le système « individu » s’adapte pour préserver son
équilibre. Et bien évidemment, chacun ayant une perception et une interprétation diffé-
rentes du changement en question, chacun sachant mieux que quiconque ce qui est bon
pour lui, le mécanisme d’adaptation ou de « régulation interne » varie d’une personne à
l’autre. Il vise à « enrayer la tentative de déstabilisation »2.
La résistance au changement est donc un mécanisme naturel de protection et d’adapta-
tion. Il est spécifique à chacun, en fonction de son vécu, de son référentiel, de son état
émotionnel…
Ce qui est commun, en revanche, c’est le passage obligé par les différentes étapes du
renoncement ; chacun, à son rythme, traversera ces différentes phases pour intégrer le
changement et se projeter positivement dans le futur.

Un passage obligé : le renoncement

À quoi faut-il renoncer ?


Reprenons l’exemple de nos équipes Alpha, Bêta et Gamma. Observons les renonce-
ments auxquels les acteurs concernés sont confrontés (tableau 3-2).
Tableau 3-2 Renoncements induits par la transformation agile

Équipe Alpha Équipe Beta Équipe Gamma


Un certain confort lié à une
forme d’anonymat Une indépendance totale
Un confort lié à la maîtrise
Une passivité ou une tran- L’exclusivité d’une expertise d’un savoir-faire routinier
quillité relative et d’un savoir-faire
Pour l’équipe Une forme d’autosatisfaction
Une forme de déresponsa- Une compétitivité entre
L’exclusivité d’une expertise
bilisation membres
La nostalgie du passé
Leur prise en charge par le Une certaine tranquillité
manager

2. B. Lecerf-Thomas, op. cit.

Messager-Livre.indb 29 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
30
Première partie

La reconnaissance de son
expertise technique
Un rôle central gratifiant Une indépendance totale
d’« apporteur de solu- Son impatience motrice
L’exclusivité d’une expertise
tions »
Pour le et d’un savoir-faire Un certain confort lié à
manager Un certain paternalisme l’évitement des conflits
Une compétitivité entre
vis-à-vis de ses collabo-
membres
rateurs
Une certaine tranquillité
Des pratiques anciennes
de gestion et de contrôle
du projet

Comment les membres de ces équipes peuvent-ils renoncer à ce à quoi ils sont attachés,
consciemment ou inconsciemment ?

Les étapes du deuil


Accepter un changement, c’est entrer dans un processus de renoncement, de rupture par
rapport à un équilibre existant ; un deuil est donc inévitable.

Figure 3-2 Le choc L’engagement


Les étapes
du deuil
1 Déni 7 Construction

2 Colère 6 Projection

3 Marchandage
5 Rebond
4 Tristesse

La remise La
en question remobilisation

Ce processus de deuil3 sera vécu par chacun à un rythme qui lui est propre. Il comporte
sept étapes.
1. Il commence par le déni. On refuse la réalité : « Ce n’est pas possible, ce n’est pas le
moment, ce n’est pas pour nous. »
2. Puis vient la colère. On se révolte, on accuse, on en veut à tout le monde ; on cherche
« le coupable » à l’origine du changement.
3. Une phase de marchandage. Pour changer, il va falloir obtenir quelque chose : « Qu’ai-
je à y gagner ? »

3. Source : travaux de Elisabeth Kübler-Ross, psychiatre suisse

Messager-Livre.indb 30 12/10/12 09:38


Comment expliquer ce qui se passe ?
31
Chapitre 3

4. La résistance se relâche, la personne ressent une sorte de vacuité et de la tristesse :


« Il n’y a plus rien à faire, de toute façon, ils ont décidé ! », « Les autres ont accepté ! »
5. Puis vient le moment de l’acceptation de l’évidence, ce qui permet l’apaisement et le
rebond.
6. On commence à envisager la suite et à intégrer le changement, à se projeter de façon
plus positive dans l’avenir.
7. Et enfin, on mobilise son énergie retrouvée pour s’investir dans le projet et construire
l’avenir.
Bien sûr, il y a ceux qui traversent ces étapes de façon tout à fait inconsciente, rapide et
indolore.

Comment utiliser cet outil ?


Il s’agit d’une grille de lecture pour vous aider à comprendre les comportements observés
et déterminer le type d’action à mener. Grâce à votre questionnement et à vos observa-
tions, il vous sera plus aisé de repérer à quelle étape du processus se situe l’équipe, dans
son ensemble, ou une personne en particulier.
L’objectif est d’accompagner tout au long du processus les personnes qui vivent une trans-
formation, pour qu’elles amorcent le changement de façon positive, en en étant actrices
(deuxième moitié de la courbe, à droite), et non pas en le subissant.
Vous pourrez ainsi adapter votre action.
• Étapes 1 et 2 : écouter, permettre à la personne d’exprimer et de verbaliser ses ressen-
tis, informer, être pédagogue.
• Étapes 3 et 4 : communiquer, faciliter les échanges entre les acteurs du changement,
permettre à chacun de commencer à visualiser concrètement le changement.
• Étapes 5 et 6 : fixer des mini-objectifs, encourager, valoriser les succès, féliciter.
• Étape 7 : dresser un bilan des objectifs atteints, mesurer les progrès, permettre à la
personne d’être satisfaite et fière du chemin parcouru.
Cet outil peut être utilisé à découvert ou in petto, c’est-à-dire sans le présenter ouverte-
ment à votre interlocuteur. Si vous l’utilisez à découvert, vous pouvez, pendant un entre-
tien en face à face, demander à la personne de se positionner sur la courbe ; cela constitue
un point de départ pour élaborer un plan d’actions vers les étapes ultérieures.
Attention ! Cet outil doit être manipulé avec précaution dans un contexte de changement
vécu très difficilement.
☞ Voir aussi le chapitre 14, « Dissolution et séparation ».

Messager-Livre.indb 31 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
32
Première partie

En évoquant la notion de deuil, on comprend pourquoi le changement engendre du stress


et pourquoi la résistance porte une connotation négative. On ne peut, en effet, ignorer la
dimension émotionnelle de la résistance au changement.

Nous sommes des êtres d’émotions


Le mot « émotion » est souvent proscrit dans le cadre professionnel. Qui n’a jamais
entendu l’invite à « laisser ses émotions à la porte de l’entreprise » ? D’ailleurs, nous
développons assez peu notre vocabulaire pour exprimer une émotion.
Et pourtant, nos émotions sont essentielles dans la compréhension de nos comporte-
ments.

Quelles sont nos émotions ?


Nous avons quatre émotions primaires : la joie, la colère, la tristesse et la peur.
Les émotions secondaires sont une combinaison d’émotions primaires : la jalousie est un
mélange de peur et de colère, par exemple.
Si les émotions, négatives ou positives, sont assez mal tolérées dans la sphère profession-
nelle, elles sont pourtant naturelles. Qui n’a pas ressenti de la peur à l’idée de prendre de
nouvelles responsabilités ? Qui n’a pas ressenti de la colère à l’encontre d’un collègue qui
s’est approprié le succès d’un projet ? Qui n’a pas ressenti de la tristesse à l’idée de voir
partir un manager ou un collègue avec lequel on s’entendait bien ? Qui a osé laisser sa
joie exploser en apprenant une nouvelle nomination ? Qui ne s’est pas enthousiasmé pour
une mission intéressante en démontrant une formidable créativité ?

La peur
Dans le cadre d’une transformation, les émotions sont encore plus aiguës. En particulier, la
peur, souvent non exprimée, est présente au quotidien sous forme de stress, de doute, d’an-
xiété, d’incertitude…, et sous forme plus violente, parfois, dans un contexte de transition.

Exemple

Revenons à nos trois équipes Alpha, Bêta et Gamma. Après avoir recensé les changements
induits pour les membres des équipes et leur leader, en général, citons à présent ce que
peuvent être leurs craintes (tableau 3-3).

Messager-Livre.indb 32 12/10/12 09:38


Comment expliquer ce qui se passe ?
33
Chapitre 3

Tableau 3-3 Peurs induites par la transformation agile

Comportement visible Émotion possible


Hésitation à donner des estimations Peur de dire qu’il ne sait pas
Refus de l’engagement ou engagement subi Peur de se tromper
Peur de la sanction ou du blâme
Aversion pour communiquer son avancement Sentiment d’être sous surveillance, donc peur de
quotidien l’autorité
Peur d’être exposé, donc du regard de l’autre
Peur d’être jugé
Retard ou absence lors des daily meetings ou Peur des autres
des rétrospectives
Manque d’habitude et donc peur de s’exprimer
devant les autres
Passivité lors des rétrospectives Peur de la confrontation
Peur de se remettre en question
Omniprésence du manager Peur de perdre la reconnaissance de son expertise
et de son utilité
Colère vis-à-vis de celui qui a décidé
Peur de perdre la reconnaissance liée à son posi-
tionnement hiérarchique
Manque de confiance dans l’équipe et peur de
l’échec/l’erreur
Peur de perdre la face
Peur de perdre du pouvoir qui rend « fort »
Rejet de toute nouvelle méthode Colère de devoir apprendre
Peur de sortir de sa « zone de confort »
Conflit non résolu Peur du conflit et de la confrontation
Personnalisation du conflit
Refus du pair-programming Peur de ne pas être à la hauteur
Peur de perdre l’exclusivité
Fuite des responsabilités Peur par ignorance, si on n’en a jamais exercées
Méfiance à l’égard du coach Peur d’être jugé

Toutes ces peurs et d’autres encore renvoient à la peur de perdre. En effet, tant que l’on n’a
pas « gagné » en retour, que l’on n’a pas obtenu une compensation ou l’assurance d’une
issue avantageuse, la perte est difficile à vivre. On est au milieu du gué.

Messager-Livre.indb 33 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
34
Première partie

La perte sera d’autant plus lourde si elle renvoie à des événements similaires vécus dans
le passé, car nous mémorisons plus rapidement et plus durablement les épisodes doulou-
reux de notre vie.

Vivre de nombreuses transformations


Un développeur expérimenté a déjà vécu de nombreuses transformations : l’avènement
des technologies objet, le déploiement d’une méthodologie de gestion de projet, la mise en
place de CMMi… et leur cohorte de renoncements et de remises en question personnelles.

Sans entrer dans la sphère privée de chacun, la prise en compte des émotions individuelles,
et en particulier des peurs, nous aide dans la compréhension des comportements visibles.

L’émotion est notre GPS interne


Les émotions sont d’excellents indicateurs. Le terme « émotion » vient du latin motio qui
signifie « mouvement » : autrement dit, notre émotion, positive ou négative, est ce qui
nous pousse à entrer en mouvement ou, au contraire, ce qui freine notre mouvement. Il y
a, par exemple, des peurs dynamisantes et des peurs inhibitrices.

Exemple

Illustrons notre propos : un leader annonce à son équipe l’introduction de méthodes agiles et
une nouvelle organisation. Un des membres de l’équipe objecte et exprime son scepticisme
ainsi : « Cela ne marchera pas chez nous et cela ne sert à rien ; c’est une nouvelle mode qui
ne durera pas. » Le leader reçoit (mal) cette objection, remarque le regard vindicatif de son
collaborateur, ressent des battements du cœur et sent monter sa température interne. Sa
perception de l’objection s’est transformée en émotion (de la colère ? De la peur ?), qui s’est
manifestée physiologiquement. Son analyse de la situation va influencer sa réaction : attaque
(agressivité), fuite (indifférence) ou repli (renoncement) et, par voie de conséquence, altérer la
qualité de sa relation avec ce contradicteur et les autres membres présents.
Autrement dit, si le leader analyse la réaction de son collaborateur comme une contestation
de sa décision ou comme une opposition, voire une remise en cause de son autorité ou
encore de sa personne, il y a de fortes chances pour que sa réponse soit inadaptée.
S’il analyse la réaction de son coéquipier comme l’expression possible d’une peur, sa ré-
ponse sera tout autre : « Je ne sais pas si ça durera. Essayons pour voir : recensons nos
besoins en formation, en accompagnement, fixons-nous des échéances… » Déjà, il a peut-
être (un peu) rassuré l’équipe.

Une émotion fait suite à une perception ou à une observation. Elle nous alerte en se
manifestant souvent par des signaux physiologiques (bouffées de chaleur, palpitations,
mains moites…). Elle précède une réaction de notre part, fondée sur notre analyse de
la situation, puis nous affichons un comportement particulier. À partir du moment où
ce comportement est visible – même s’il s’agit d’une absence de réaction –, il affecte le

Messager-Livre.indb 34 12/10/12 09:38


Comment expliquer ce qui se passe ?
35
Chapitre 3

niveau de qualité de la relation avec les autres (figure 3-3). Nos comportements sont les
manifestations visibles d’émotions souvent mal assumées ou non exprimées.

Figure 3-3
L’influence de nos Perception Émotion Réaction
Comportement
Relation
visible
émotions

En tant qu’indicateurs, nos émotions nous renseignent sur ce qui est « bon » pour nous.
Elles nous aident à mieux comprendre et à appréhender notre environnement, puisqu’elles
motivent directement l’action ou l’inaction.
Ainsi, nous verrons que nous avons intérêt à accueillir nos émotions, pour mieux les
« entendre » et mieux les exploiter.
Des freins personnels peuvent également entraver notre processus d’adaptation au chan-
gement.

Nos freins personnels : les messages contraignants


Notre éducation parentale et scolaire, notre vie sociale et ses codes nous ont façonnés ;
nous avons des croyances, des a priori, des idées reçues. Des « messages contraignants »
agissant comme des pilotes internes nous gèrent de façon inconsciente et conditionnent
nos comportements ; il s’agit d’injonctions qui nous gouvernent. Ainsi, notre entourage
nous influence, les autres nous regardent et nous jugent. Au final, pour nous conformer à
cet entourage, nous sommes souvent amenés à jouer un personnage ou un rôle différent
de ce que nous sommes ou de ce que nous souhaiterions être réellement.
Concepts issus de l’analyse transactionnelle (qui les nomme drivers), nos messages
contraignants sont au nombre de cinq.

• Fais plaisir : je dois faire plaisir pour être apprécié, je ne dois pas décevoir en refusant,
je ne dois pas dire non (« Si je ne réponds pas à sa demande, il va croire que je ne sers
à rien » ou « Ils vont être déçus »).
• Sois parfait : tout ce que je fais doit être parfait, je dois être irréprochable (« Il faut que
je contrôle tout » ou « Si je prends la parole, les autres vont me juger »).
• Sois fort : je dois me débrouiller seul, j’ai la capacité de tout gérer, je suis fort (« Si je de-
mande de l’aide, je perds ma crédibilité » ou « Ils n’ont qu’à se débrouiller tout seuls ! »).
• Fais un effort : il faut travailler dur, il faut transpirer pour mériter, je dois m’acharner
pour y arriver.
• Dépêche-toi : je vais y arriver si je me dépêche, je dois (me) mettre la pression.

Messager-Livre.indb 35 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
36
Première partie

Quelles conséquences ont ces messages dans un contexte de transformation ?

Conséquences sur nos comportements


C’est précisément dans ces contextes de stress que se manifestent ces messages contrai-
gnants ; ils pompent de l’énergie et nous éprouvons du stress si nous ne parvenons pas à
répondre à leurs ordres.

Exemples
Prenons le cas de nos équipes Alpha, Bêta et Gamma.

Patrick, dans l’équipe Alpha, a probablement un message contraignant « Sois parfait » pour
tout (sur)contrôler et que rien ne lui échappe.
Parmi les développeurs de l’équipe Bêta, où l’individualisme est prédominant, le message
contraignant « Sois fort » doit vraisemblablement peser dans les relations : chacun se dé-
brouille, quitte à rester bloqué un certain temps sur un bogue, sans risquer d’apparaître faible
aux yeux des autres.
Pourquoi un membre de cette équipe dont le message contraignant serait « Sois parfait »
accepterait-il de travailler en mode itératif, de montrer un travail inachevé, imparfait, et de voir
ainsi sa compétence, voire sa légitimité contestées ?
Quant à notre manager de l’équipe Gamma, il pourrait être victime de son message contrai-
gnant « Dépêche-toi » : impatient de nature, il pourrait mettre la pression à ses collaborateurs
pour qu’ils s’adaptent vite aux nouvelles méthodes de travail !

Comment utiliser cet outil ?


Ces messages contraignants constituent une grille de compréhension efficace de ce qui se
joue en observant les membres d’une équipe. Vous pouvez utiliser cet outil à découvert
ou in petto, selon la confiance établie avec les personnes en situation.
Si la (ou les) personne(s) est (sont) volontaire(s), vous pouvez proposer un questionnaire
d’autoanalyse afin que chacun identifie ses principaux messages contraignants. L’analyse
des résultats en face à face constitue un point de départ pour élaborer un plan d’actions.
Attention ! Il ne s’agit pas de coller une étiquette sur les personnes ; les résultats donnent
simplement une indication sur l’origine de certains comportements automatiques.
Pour aider la personne à s’émanciper de ses messages contraignants, on lui rappellera
qu’elle peut demander de l’aide si elle en a besoin (Sois fort), que le mieux est l’ennemi
du bien (Sois parfait), qu’elle a tout à fait le droit de refuser (Fais plaisir)…
☞ Voir aussi le chapitre 11, « Confrontations et tensions », et le chapitre 19, « En tant que
scrummaster, je veux trouver le bon positionnement vis-à-vis de l’équipe ».

Messager-Livre.indb 36 12/10/12 09:38


Comment expliquer ce qui se passe ?
37
Chapitre 3

Reconnaître et accepter de parler des émotions et de nos messages contraignants n’est


envisageable que dans un contexte dans lequel les individus se sentent en confiance. Or,
trop souvent, on n’ose pas !

L’absence de confiance
Pourquoi n’ose-t-on pas aborder les événements, les difficultés relationnelles ou les obs-
tacles rencontrés au quotidien sous un angle émotionnel ?
Au-delà du fait que nous sommes peu habitués dès l’enfance à nous exprimer sur ce
registre, on constate que le manque de confiance est le premier des dysfonctionnements
au sein des équipes.
Patrick Lencioni4 explique les conséquences nuisibles du manque de confiance au sein
d’une équipe (figure 3-4) : les membres ont une attitude autoprotectrice pour cacher leur
vulnérabilité, ce qui les amène à ajuster leur comportement et à masquer leurs difficultés.
Ceci crée un climat de tension, voire de méfiance, dans lequel tout le monde ne s’exprime
pas, par crainte du conflit (ou de simple désaccord). Si un conflit se déclenche, il est géné-
ralement mal géré : les échanges portent rarement sur les faits mais sur des réactions ou
des attaques personnelles.
La conséquence est que, si chaque membre de l’équipe n’a pu ou n’a pas osé s’exprimer, il
lui est particulièrement difficile de s’engager sur un objectif commun auquel il n’adhère
pas. Le manque d’engagement incite alors à fuir ses responsabilités et à considérer le
manager comme la seule autorité.
Dans ce cas, le « chacun pour soi » prédomine et l’on se laisse facilement détourner des
résultats.

Figure 3-4
Les dysfonctionnements
d’une équipe

L’absence de confiance a des conséquences fâcheuses.

4. Patrick Lencioni, Optimisez votre équipe, Un monde différent, 2006

Messager-Livre.indb 37 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
38
Première partie

Conséquences sur nos comportements


• Le changement annoncé est perçu comme un danger, qu’il soit réel ou imaginé par une
personne, donc comme une menace ; si l’on ne peut afficher clairement sa peur, celle-ci
devient alors paralysante.
• L’énergie est utilisée soit pour masquer sa peur, soit pour se défendre et résister, plutôt
que pour intégrer le changement.
• Les relations sont dénaturées et les individus deviennent agressifs ou destructifs.
• La suspicion s’installe et certains peuvent avoir l’impression que le changement ne
représente que pertes pour eux-mêmes et bénéfices pour d’autres.
Ces émotions, qui devraient être dynamiques et motrices, deviennent des freins au chan-
gement : la peur suscite des stratégies d’évitement, la colère engendre agressivité et sabo-
tage, la tristesse entraîne la démission. Et la joie, qui donne de l’élan et favorise la créa-
tivité, trouve rarement sa place.
☞ Voir aussi le chapitre 20, « En tant que scrummaster, je veux développer mon leader­
ship ».

Ce que nous avons appris


• Nous avons vu qu’une transformation agile impliquait de nouvelles façons de collabo-
rer et de communiquer ; par conséquent, elle induit de modifier certains de nos com-
portements au quotidien.
• Souvent peu enclins à changer spontanément, les acteurs de nos équipes résistent pour
se protéger : c’est ce qu’on appelle le mécanisme de l’homéostasie, première défense
avant d’entamer un processus de renoncement facilitant la transition vers le change-
ment.
• On constate que la dimension psychologique du changement est malheureusement trop
souvent négligée.
• Cette dimension psychologique transparaît au travers de nos émotions, que nous ten-
tons généralement de masquer, mais qui sont au cœur de nos comportements et de nos
interactions avec les autres.
• Elle se manifeste aussi lorsque nous activons nos messages contraignants, qui condi-
tionnent certains de nos faits et gestes.
• Enfin, nous avons expliqué que la prise en compte des aspects émotionnels et psycho-
logiques était difficile, en particulier dans le monde de l’entreprise et a fortiori dans les
équipes où la confiance entre les membres était rarement instaurée.

Messager-Livre.indb 38 12/10/12 09:38


Comment expliquer ce qui se passe ?
39
Chapitre 3

Outils du coach proposés

• La courbe de Kübler-Ross ou les étapes du deuil


• Les messages contraignants (ou drivers)

Une posture de coach s’avère être la plus appropriée pour traiter ces problématiques
humaines. Le coach initie le changement en associant toutes les parties prenantes. C’est
l’objet de la deuxième partie.

Messager-Livre.indb 39 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 40 12/10/12 09:38
Deuxième partie

Initier le changement
Initier le changement, c’est avant tout comprendre ce que ce
dernier représente pour chaque personne ; en effet, on ne peut
généraliser une démarche d’accompagnement, puisque chaque
individu appréhende le changement en fonction de sa personna-
lité, de son histoire, de son référentiel personnel et de son capital
émotionnel.
Accompagner le changement et, plus précisément, les personnes
qui le vivent, c’est écouter et faire preuve d’empathie, pour per-
mettre à chacun d’exprimer plus facilement la façon dont il ap-
préhende le changement et ses renoncements associés.
Pourquoi, dans ce contexte, faire appel à un coach ? Le coach
aide à adopter de nouveaux comportements : il amène la per-
sonne ou l’équipe coachée à prendre conscience de la nécessité
d’évoluer, lui propose de définir comment elle souhaite évoluer
et, enfin, l’accompagne dans son objectif de changement.
Voyons comment il intervient auprès des personnes ou des
équipes qu’il accompagne, dans un cadre contractuel qui fait
suite à une demande explicite. Découvrons aussi comment il
déclenche le processus de changement avec une posture bien
particulière.

Messager-Livre.indb 41 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 42 12/10/12 09:38
4
Créer un cadre contractuel

Le besoin, c’est ce qui manque au client pour résoudre son problème.


François Delivré

Évoquer le volet contractuel du coaching amène inévitablement à la question de la de-


mande initiale, du besoin et de l’objectif, traitée lors d’un entretien préliminaire. De cette
demande et de la définition de l’objectif émanera un « contrat d’évolution » ou « contrat
d’alliance ».

Contexte
Nous nous situons davantage, ici, dans le cadre d’une mission d’accompagnement par
un coach externe ; néanmoins, les éléments et outils présentés dans ce chapitre peuvent
tout à fait aider le scrummaster à endosser la posture de coach vis-à-vis des membres
de son équipe. Ces entretiens peuvent se mener de façon plus informelle entre le scrum-
master et les membres de l’équipe : c’est le volet « leadership » de sa fonction.

L’entretien préliminaire
Avant d’aborder une démarche de coaching, un entretien préliminaire (ou plusieurs) est
nécessaire pour mieux cerner la demande du client et ses objectifs. C’est une forme de
diagnostic ou d’étude d’opportunité.

Messager-Livre.indb 43 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
44
Deuxième partie

La grille RPBDC
Nous utilisons, pour cela, la grille d’entretien proposée par Vincent Lenhardt1, appelée
grille RPBDC, dont le sigle signifie : Réel, Problème, Besoin, Demande et Contrat. Cette
grille vise à recueillir quelques éléments prérequis pour cerner la demande du client et
comprendre son besoin pour mieux se positionner.

Tableau 4-1 La grille RPBDC

R Réel Quelle est la situation, le contexte du client ? Sa réalité ? Qui est concerné ?
Depuis quand ? Où ?
Ces questions visent à explorer la réalité du client, qui a parfois du mal à
clarifier sa vision, son analyse et, par conséquent, à identifier la solution à
son problème.
P Problème Quel est le problème ? En quoi la situation exposée est-elle un problème ?
Pour qui ? Quelles sont les conséquences ? Pourquoi le client n’arrive-t-il
pas à régler ce problème en particulier ? Quel est l’écart entre la situation
aujourd’hui et la situation voulue ?
Ce questionnement vise à amener le client à formuler clairement son prob-
lème ou à identifier un problème derrière le problème.
B Besoin Quel est le premier diagnostic ? Quel est le besoin ? Que faudrait-il faire ?
Cette étape peut être partagée ou pas avec le client, qui ne sait précisément
pas toujours quel est son besoin. S’il le savait, il ne ferait pas appel à un
coach !
D Demande Quel est le résultat attendu par le client ? Quelle est sa demande vis-à-vis
du coach ?
Au-delà du problème exposé, le client doit formuler clairement une demande
pour se (re)mettre en situation de responsabilité ou d’autonomie vis-à-vis du
coach.
C Contrat Quel processus est envisagé pour aborder le changement ? Quels sont les
rôles de chacun (coach et coaché) ?
Le contrat est l’aboutissement de ce processus de découverte et précède le
démarrage de l’accompagnement.

Lors de cet entretien, le coach cherche à mieux appréhender l’univers de son interlo-
cuteur. Son objectif est de mieux cerner la relation entre la personne ou l’équipe et sa
problématique (figure 4-1).

1. Vincent Lenhardt, Les responsables porteurs de sens, Insep Consulting Éditions, 3e édition, 2010

Messager-Livre.indb 44 12/10/12 09:38


Créer un cadre contractuel
45
Chapitre 4

Figure 4-1
L’action du coach
scrummaster

Équipe
Alpha

Action
du coach

Exemple : entretien préliminaire avec Patrick, scrummaster de l’équipe Alpha


Patrick : « Moi, je veux bien les aider à s’impliquer davantage, à prendre plus de responsa-
bilités… Mais, ils les fuient les responsabilités. »

Coach : « Sur quel exemple vous appuyez-vous pour dire qu’ils fuient les responsabilités ? »
Patrick : « Je ne sais pas, moi, ils ne veulent pas s’engager, tout simplement. »
Coach : « S’engager sur quoi ? »
Patrick : « Sur tout. Si je ne suis pas là pour les pousser un peu… »
Coach : « Pousser à quoi ? »
Patrick : « Pour tout, ce n’est pas dans leur mode de fonctionnement. C’est tout. Ce sont des
assistés ! »
Dans cet exemple, on distingue trois éléments : Patrick le scrummaster, son équipe et la per-
ception ou l’analyse qu’il fait de son équipe. Le coach, dans sa compréhension du contexte,
ne s’intéresse pas davantage à l’équipe ; il ne cautionne pas l’analyse de Patrick, il ne cherche
pas à valider par lui-même la perception de Patrick. Il souhaite comprendre en quoi cette
équipe pose un problème à Patrick pour atteindre son objectif (rappel de la demande offi-
cielle : amener l’équipe à davantage d’implication, de responsabilité et d’engagement). Si
le coach ne s’intéresse qu’à l’équipe, le risque est de laisser Patrick penser qu’il ne peut
rien faire, que seule l’équipe doit changer. Or, en tant que leader, ses interactions avec son
équipe vont lui permettre de l’influencer et, peut-être, avec l’aide du coach, de la faire évoluer
(figure 4-1).

Le coach est le partenaire du coaché (Patrick, dans notre exemple) ; c’est lui qui va agir et
résoudre ainsi sa problématique, et non le coach, qui n’intervient pas à sa place.
Lors de cet entretien préliminaire, le coach repère les sabotages éventuels, conscients
ou inconscients, opposés par le coaché. C’est particulièrement le cas lorsque le coaché

Messager-Livre.indb 45 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
46
Deuxième partie

n’a pas de demande vis-à-vis du coach et se voit imposer un entretien de coaching. Les
sabotages, souvent attachés à des croyances, rendent l’objectif du coaching difficile à
atteindre, voire impossible.

Exemple

Dans notre exemple, Patrick accepte de se faire coacher, mais ses sabotages (en résumé :
« Si je ne suis pas là, ils n’y arrivent pas ») empêchent sa progression vers l’objectif. II part
vaincu avant même d’avoir démarré !

À l’issue de l’entretien, le coach et le coaché sont en mesure de signer un contrat, un pacte


d’alliance, pour atteindre l’objectif.

Comment utiliser cet outil ?


Cette grille d’entretien peut être utilisée comme trame de conversation à n’importe quel
moment de la vie d’un projet. Vous pouvez suivre ou ne pas suivre l’ordre des rubriques.
Elle est tout à fait pertinente dès lors que l’un des membres de l’équipe ressent une dif-
ficulté, exprimée ou pas ; elle vous aidera à mieux cerner cette difficulté et permettra à
votre interlocuteur de préciser son besoin d’être aidé ou accompagné dans son objectif
d’évolution.
Enfin, elle vous aidera dans votre rôle de leader de proximité auprès de votre équipe,
pour adopter une posture de coach.
☞ Voir aussi la cinquième partie, « Coacher le scrummaster ».

La demande et l’objectif de coaching

La demande de coaching
Une demande de coaching est une demande d’aide ou d’accompagnement pour aller vers
un changement souhaité. Une demande explicite est donc indispensable pour orienter le
coaching (l’objectif) et formaliser un contrat d’évolution ou de changement.

Exemple

Dans l’exemple de l’équipe Alpha, la demande qui m’est formulée en tant que coach est
« d’amener l’équipe à davantage d’implication, de responsabilité et d’engagement ». Après
un ou deux entretiens préliminaires avec le scrummaster Patrick, nous finissons par déter-
miner son objectif de changement : le coaching a pour but de l’aider à trouver un autre po-
sitionnement par rapport à son équipe, à faire confiance à ses coéquipiers et à travailler

Messager-Livre.indb 46 12/10/12 09:38


Créer un cadre contractuel
47
Chapitre 4

sur son « lâcher prise » technique pour déléguer davantage et développer ses capacités à
motiver. Ces objectifs sont validés par le responsable Qualité & Méthodes.
Ces entretiens auront permis de montrer que le changement initial doit provenir du scrum-
master lui-même, alors que l’on aurait pu spontanément vouloir coacher et intervenir auprès
de l’équipe.

☞ L’exemple du contrat d’évolution personnelle de Patrick est présenté au chapitre 17, dans
la cinquième partie.

En résumé, une demande – informelle ou se dégageant de l’entretien préliminaire – décrit


des difficultés, des situations vécues. Elle exprime également un besoin, des attentes, des
changements désirés, des craintes… Un objectif définit un axe de travail et précise les
thèmes de réflexion.

L’objectif du coaching
Marcheur, il n’y a pas de chemin.
Le chemin se construit en marchant.
Antonio Machado

Cependant, l’objectif reste général, car il se peut qu’il évolue en cours de route. En effet,
le travail mené précisément lors des séances de coaching ou les événements parallèles
durant le projet amènent à préciser, parfois à ajuster l’objectif. Celui-ci n’est, en fait,
qu’une « porte d’entrée du coaching » 2.
De même que les besoins émergent au fil d’un projet et que les changements sont accueil-
lis favorablement (grâce aux retours ou feedback du client), l’objectif général de coaching
est évolutif : c’est la démarche de coaching elle-même qui fait émerger l’objectif. Par le
questionnement et l’effet miroir du coach (boucle de feedback), le « symptôme » auquel
on s’attache en premier se transforme en objectifs plus spécifiques au fil de l’eau. Tout
comme le principe de la sérendipité (le fait de trouver par hasard ce que l’on ne cherche
pas), la démarche de coaching peut être une aventure pleine de surprises, nécessitant des
recadrages permanents.

Exemple

L’objectif de Patrick est de travailler sur la délégation, la confiance et sur son « lâcher prise »
technique. La mission d’accompagnement de Patrick aura ouvert des voies nouvelles vers de
nouveaux axes de travail : sa propre confiance en soi, son besoin de reconnaissance et son
rapport à l’erreur – axes non identifiables de façon évidente au début.

2. Philippe Bigot, Le coaching orienté solution, Eyrolles, 2010

Messager-Livre.indb 47 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
48
Deuxième partie

Un objectif de transformation agile, qu’il s’agisse d’une équipe ou d’une organisation, ne


peut être que générique : par exemple, on vise à réduire le délai de commercialisation,
à améliorer la qualité des livrables ou à afficher une plus grande réactivité face au client…
Le coach est chargé ensuite d’aider les acteurs à définir eux-mêmes leurs propres objec-
tifs de changement au sein de cet objectif global d’organisation et du contexte qui est le
leur ; autrement dit, il les aide à déterminer comment ils envisagent, eux, ce changement
et quels comportements ils souhaitent modifier, pour atteindre l’objectif de transforma-
tion agile.
En tout état de cause, il est impératif que l’objectif soit exprimé par la personne ou le
groupe bénéficiaire du coaching.
Nous avons vu qu’un entretien préliminaire structuré autour de la grille RPBDC
(tableau 4-1) permettait de faire émerger l’objectif et la demande du coaché. Insistons sur
le fait que l’objectif est celui du coaché et non celui du coach.

La demande de coaching prescrit


Dans le cadre d’un coaching externe, très souvent, le coach se retrouve face à une
demande de coaching (re)commandé par un prescripteur distinct du bénéficiaire (per-
sonne ou équipe).

Exemples

C’est le cas de nos deux équipes Alpha et Bêta : dans le premier cas, le responsable
Qualité & Méthodes demande un accompagnement du scrummaster, Patrick ; dans le
deuxième, c’est le directeur de projet qui prescrit un coaching pour l’équipe. Dans l’équipe
Alpha, le bénéficiaire accepte le coaching ; dans l’équipe Bêta, certains membres ne sont
ni demandeurs, ni favorables au coaching. Enfin, dans le cas de l’équipe Gamma, Bruno, le
patron du département Études & Développements formule une demande d’expertise et non
d’accompagnement.

La relation tripartite : attention à la manipulation !


Cette situation « tripartite » peut présenter le risque de voir des acteurs sous contrainte,
instrumentalisés, voire manipulés. Le cas est particulièrement fréquent dans le contexte
d’une transformation agile non désirée par tous, voire imposée par le management : non
seulement les bénéficiaires potentiels n’ont pas d’objectif choisi de changement, mais ils
ne souhaitent pas être embarrassés d’un coach !
Le risque de manipulation réside, plus classiquement, pour un coaching individuel pres-
crit, dans des cas tels que le suivant.

Messager-Livre.indb 48 12/10/12 09:38


Créer un cadre contractuel
49
Chapitre 4

Exemple : un directeur prescrit un coaching individuel à un scrummaster


récemment nommé

Le directeur reçoit le coach et lui explique que, selon lui, le scrummaster n’a pas d’autorité,
qu’il doit développer son leadership pour « booster » les membres de l’équipe, qu’il a un style
de management trop « mou » et qu’il « se fait balader » par ses collaborateurs qui « se la
coulent douce ». Bref, la demande formulée au coach est d’« aider le scrummaster à être plus
ferme, assertif et autoritaire et influencer la productivité de l’équipe ».
Le coach rencontre le scrummaster, qui n’a pas connaissance des objectifs de ce coaching
et qui n’en voit, d’ailleurs, pas l’intérêt immédiat.
Que fait le coach, dans ce cas ?
Il entrevoit le risque de manipulation, si le scrummaster ne souhaite pas évoluer dans le sens
désiré par le directeur. Peut-être, après tout, que le scrummaster souhaite conserver son
style de management qui lui convient ?
Le coach organise un entretien préalable tripartite afin de définir un objectif commun officiel.
Le directeur doit expliquer clairement ses attentes vis-à-vis du scrummaster en termes d’évo-
lution, et le scrummaster doit clairement accepter ou refuser le coaching, en fonction de ses
objectifs personnels, dans ce contexte.
Le coach accepte ou refuse la mission.

Question au coach :
Comment convaincre ceux qui résistent ou s’opposent à une transformation agile
(ouvertement ou pas, d’ailleurs) ?

À cette question très fréquemment posée, ma réponse est double.


• Premièrement, le terme « convaincre » vient du latin convincere qui signifiait « prouver
la culpabilité de ; dénoncer (une faute, une erreur), démontrer, prouver que ». Convaincre
signifierait-il que l’on veuille culpabiliser celui qui ne pense pas la même chose que nous ?
Faudrait-il, pour persuader l’autre, le vaincre et « partir en guerre » ? Donc, attention à
l’usage de ce mot et à l’attitude inconsciente induite !
• Deuxièmement, quelles que soient les mesures coercitives ou de motivation, les leviers du
changement se trouvent en chaque personne et lui sont propres, même si elle affiche un
consentement de façade. Plutôt que de convaincre, il s’agit d’amener l’autre personne à voir
les choses différemment et à apprécier elle-même la nécessité de changer pour s’adapter.
Cela revient à lui faire prendre conscience par un autre éclairage de sa réalité. Et il faut du
temps.

☞ Voir aussi le chapitre 5, « Responsabiliser les acteurs du changement ».

Par conséquent, une première étape de sécurisation à traiter par le coach est la rencontre
avec le prescripteur, d’une part, et avec le(s) bénéficiaire(s), d’autre part. Au cours de ces
entretiens préliminaires, le coach explore le contexte, l’origine de la demande, l’objectif
général du coaching et les changements attendus ; il mesure les enjeux si l’objectif n’est

Messager-Livre.indb 49 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
50
Deuxième partie

pas atteint et il évalue la communauté de vision sur les objectifs entre prescripteur et
bénéficiaire(s).
À l’issue de ces entretiens, le coach et le(s) bénéficiaire(s) peuvent avoir développé un pre-
mier niveau de relation, et donc de confiance. Le coach s’assure que le(s) bénéficiaire(s)
est (sont) favorable(s) ou au moins non opposé(s) au coaching. Reste à s’entendre sur
l’objectif du coaching au cours d’une réunion tripartite de validation.

Pas de demande, pas de coaching !


S’il n’y a pas de demande initiale exprimée par une personne, une équipe ou une organi-
sation, il ne peut y avoir de coaching. En effet, peut-on aider une personne ou un groupe
qui n’a pas demandé à l’être ? « Le désir de changer est le pivot du coaching, son alpha et
son oméga. » (Pierre Blanc-Sahnoun) 3
Dans ce cas, la personne ou le groupe bénéficiaire n’a peut-être pas d’objectif de chan-
gement : peut-on la contraindre à changer ? Ou bien dans son objectif de changement, la
personne ou le groupe n’a pas (conscience de son) besoin d’être accompagné : peut-on la
ou le contraindre à établir une relation authentique avec un coach qui lui serait imposé ?
Le coach engage sa responsabilité ; il ne saurait cautionner une instrumentalisation des
acteurs qui n’auraient pas de demande propre de coaching. Il peut, pour des considéra-
tions déontologiques, renoncer à cette mission, s’il n’y a pas de demande ou s’il n’y a pas
de consensus entre la demande du prescripteur et l’objectif de coaching défini par le(s)
bénéficiaire(s).
La difficulté liée à la demande explicite de coaching vient également de la confusion sur
le terme « coaching », souvent utilisé à tort.

La demande ambiguë ou composite


Aujourd’hui, le terme « coaching » recouvre tous types de prestations d’accompagne-
ment et la fonction de « coach agile » est présente dans toute proposition commerciale
dès lors qu’on aborde un projet de transformation agile.

Des termes eux-mêmes ambigus


L’association de « coach » et « agile » est un pléonasme. En effet, un coach est par
définition « agile » au sens de souple, flexible, adaptable. Il s’adapte au contexte de son
client, qui décide de son objectif ; il rebondit sur ce que lui livre le coaché et sait donc
s’adapter à l’inopiné. Le coach est lui-même dans le changement permanent ; il incarne
le changement pour être à l’écoute de ses coachés. On devrait donc parler de « coach
en agilité ». Cela laisse néanmoins supposer que le coach serait expert en agilité ; or un
coach n’a pas d’expertise, sauf celle de l’humain.

3. Pierre Blanc-Sahnoun, L’Art de Coacher, InterEditions, 2006

Messager-Livre.indb 50 12/10/12 09:38


Créer un cadre contractuel
51
Chapitre 4

Le coach et les autres facilitateurs


Dans une démarche de transformation agile, plusieurs facilitateurs sont potentielle-
ment amenés à intervenir : des formateurs, pour transmettre des connaissances sur les
méthodes agiles et/ou sur l’utilisation d’outils spécifiques, des consultants dotés d’une
expérience dans la mise en place des pratiques agiles, pour apporter les adaptations orga-
nisationnelles et techniques nécessaires, et des mentors, in situ auprès des acteurs, pour
guider et donner des conseils avisés aux néophytes.
On le voit bien, différents corps de métier de l’accompagnement agissent avec une pos-
ture très différente. En effet, d’une part, ceux qui apportent des savoirs ou savoir-faire
(formateurs, consultants et mentors), en position haute ; d’autre part, des coachs, certes
experts de la relation ou de l’humain, mais en position basse.
☞ Voir le chapitre 6, « Faciliter le processus de désapprentissage/apprentissage ».

Ni formateur, ni consultant, ni mentor


Le coach, contrairement aux autres intervenants, n’a pas de réponse ou de solution pour
le bénéficiaire du coaching ; il n’est ni consultant expert, ni formateur, ni mentor, ni psy-
chothérapeute (figure 4-2). Il agit sur le cadre et non sur le contenu, à l’inverse des autres
facilitateurs.

Figure 4-2
Ce que n’est pas Je vous
le coach n Un consultant
conseille de
mettre ça en
place…
Consultant Client

Je vous
enseigne les
connaissance
n Un formateur
de base
Formateur Client

D’où vient
votre
n Un psychothérapeute rapport à
l’autorité ?
Psychothérapeute Client

J’ai fait
ça…
n Un mentor
Essayez
Mentor
çà... Client

Si une demande de coaching agile exprimée par une organisation peut être ambiguë, elle
doit être explicitée ; le coach doit éclaircir cette demande pour savoir si elle entre dans
l’espace de coaching et/ou dans un autre espace.

Messager-Livre.indb 51 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
52
Deuxième partie

Si cette demande est composite, c’est-à-dire nécessitant l’intervention complémentaire


de deux ou trois corps de métier, ces derniers peuvent collaborer, sans aucun problème,
chacun sur son périmètre d’actions, pour faciliter le changement (figure 4-3).

Figure 4-3
Complémentarité
des facilitateurs oirs es
es
u r l n ts
e
sav Aid ortem
r t de teur) p h)
po
Ap (form
a com (coac

A Objectif de changement B

A pp
o
con rt de Ap p
s ort
(ex eils d’ex de reto
pe r
t) pé urs
(me rience
ntor
)

Malheureusement, l’usage intempestif du terme par les consultants experts ne milite pas
en faveur de cette complémentarité pourtant nécessaire et si bénéfique pour le client.
Les acteurs de l’accompagnement, eux-mêmes, entretiennent la confusion !

Accepter ou non la mission ?


Une fois la demande clarifiée, la deuxième étape de sécurisation à traiter par le coach qui
va s’engager, est de se poser cinq questions, au-delà des considérations économiques. Ces
questions sont d’ailleurs celles que toute personne intervenant dans une relation d’aide
doit se poser, comme nous l’indique Claude Steiner4. Elles représentent en quelque sorte
son « go/no-go » :
1. Ai-je une demande d’aide explicite (nous l’avons vu précédemment) ?
2. Ai-je envie d’aider la personne ou le groupe concerné(e) ?
3. Ai-je les compétences pour aider la personne ou le groupe concerné(e) ?
4. Est-ce que la demande relève de ma responsabilité ?
5. Est-ce que je ferai moins de 50 % du travail ?

4. Claude Steiner est psychologue et adepte de l’analyse transactionnelle.


Voir son site : http://www.emotional-literacy.com

Messager-Livre.indb 52 12/10/12 09:38


Créer un cadre contractuel
53
Chapitre 4

C’est le coaché qui doit être acteur de son propre changement et évoluer, pas le coach ;
même si le travail est une co-construction vers l’objectif.
Ainsi, le coach qui répond au moins un « non » à l’une des questions court un risque
dans lequel il entraîne le bénéficiaire ; il doit, dès lors, s’interroger sur l’opportunité de
démarrer cette mission.

Comment utiliser cet outil ?


Ces cinq points vous aideront à vous interroger sur l’opportunité qui se présente et sur
votre propre responsabilité.
Il peut être opportun de se poser ces questions lors de votre nomination en tant que
scrummaster, par exemple, ou bien, en tant que coach interne ou externe, au démarrage
d’une mission de coaching individuel ou d’équipe, ou encore face à n’importe quelle
demande d’aide exprimée par un membre de l’équipe lors du projet.
Il s’agit de valider que vous êtes la « bonne personne » ; dans le cas contraire, c’est recher-
cher et orienter vers la personne la mieux appropriée.
Cet outil vous aidera également à prendre conscience de façon objective que vous ne
voulez pas, ou ne pouvez pas, vous engager dans une voie risquée, voire dangereuse.
Si le coach accepte la mission, il s’agit ensuite de valider le contrat.

Les engagements mutuels


On distingue plusieurs types de contrats de coaching. On parlera du contrat d’évolution
ou contrat d’alliance ou encore de contrat de relation, une fois l’objectif défini par le
bénéficiaire ; il est généralement établi oralement entre le coach et le(s) bénéficiaire(s)
et peut être mis à jour à chaque rencontre, en particulier sur les objectifs à court terme.
Le contrat commercial, lui, encadre juridiquement la prestation et les modalités de son
exécution (où, quand, combien ?). Il est généralement tripartite.
Formalisés officiellement ou tacites, quels sont les engagements mutuels entre un coach
et la personne ou le groupe coaché(e) ?

Du côté du coach : un engagement de moyens


Le coach a un engagement de moyens : il propose un espace de questionnement et de
prise de conscience afin que le coaché atteigne son objectif plus facilement.
Partant de l’hypothèse que le groupe ou la personne coaché(e) est le (la) seul(e) à savoir ce

Messager-Livre.indb 53 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
54
Deuxième partie

dont il (elle) a besoin pour changer, le rôle du coach est de permettre au coaché d’accéder
à ses ressources.

Responsable du cadre
Le cadre est l’environnement dans lequel sont mis en place les conditions, les outils et les
techniques afin de rendre le changement possible. Le coach, en créant ce cadre, permet
au coaché de passer de l’intention à l’action. Le premier pas vers l’objectif est en effet
capital pour initier le changement, au travers d’actions concrètes, visibles et planifiées.
Le coach invite le coaché à exercer son « pouvoir ».
Lorsque le coach accompagne une équipe dans sa transformation agile (objectif), celle-
ci devra préciser sa demande d’aide : le coach a alors la responsabilité de mettre tout en
œuvre pour que cette équipe devienne ce qu’elle souhaite devenir et fonctionne selon
les modalités qu’elle a définies. Le coach n’apporte aucun avis sur l’objectif de l’équipe ;
en revanche, il s’engage à créer les conditions pour que l’équipe l’atteigne grâce aux
moyens, techniques et outils qu’il met à sa disposition. Par exemple, il veille à la qualité
des échanges entre les membres et intervient en tant que régulateur des tensions pos-
sibles. Ou bien il amène l’équipe à prendre du recul sur ses règles de fonctionnement et à
réévaluer leur adaptation à l’objectif visé. En aucun cas, il n’exprime un point de vue sur
le bien-fondé de telle ou telle règle. Il favorise ainsi la responsabilisation et l’autonomie
de l’équipe agile qu’il accompagne. Il n’est pas un expert, puisqu’il a une position basse.

☞ Voir le chapitre 6, « Faciliter le processus de désapprentissage/apprentissage ».

Le scrummaster, avec une posture de coach, est responsable du cadre.

Permission + Protection = Puissance


Pour résumer, l’engagement du coach porte sur trois rôles clés, que l’on peut résumer
ainsi : les 3 P (figure 4-4).

Figure 4-4
Le rôle du coach : Puissance
les 3 P

Permission Protection

Messager-Livre.indb 54 12/10/12 09:38


Créer un cadre contractuel
55
Chapitre 4

Puissance : le coach libère le potentiel de son coaché pour qu’il accède à sa pleine puis-
sance. Grâce à un sentiment de confiance et de sécurité, le coaché accède à toutes ses
ressources.
Permission : grâce aux « permissions » données par le coach, le coaché s’autorise à
penser, à ressentir. Il ose renoncer à certaines croyances limitantes, agir ou réagir diffé-
remment et lâcher prise.
Croyances limitantes
Les croyances limitantes sont des idées généralisées qui induisent une sous-estime de
soi ou une incapacité à faire certaines choses.

Protection : la bienveillance du coach sert en outre à protéger son coaché afin qu’il
mesure les conséquences de ses choix et qu’il ne prenne pas de décisions trop risquées.

Comment utiliser cet outil ?

Vous pourrez vous reporter à ce triangle dès lors que vous vous interrogerez sur la perti-
nence de votre action ou sur votre rôle auprès d’une personne ou d’une équipe.
• Votre action développe-t-elle le potentiel de la personne/l’équipe ?
• Cette action participe-t-elle de la protection de la personne/l’équipe, sans tomber dans
le sauvetage ?
• Est-ce que vous ne faites pas prendre à la personne/l’équipe de risque démesuré qui
pourrait (lui) être préjudiciable ?
• Avez-vous bien créé les conditions pour que cette personne/équipe se sente libre et ne
se censure pas ?
• Est-ce que vous n’agissez pas à la place de la personne/l’équipe elle-même ?
Voici quelques questions à vous poser régulièrement.

Responsable du processus
Le coach reste maître, quoi qu’il arrive, du processus relationnel dans lequel prend place
le coaching ; c’est dans ce cadre que s’installe le contenu du travail et que prend naissance
le changement. Lyssa Adkins5 parle du container (contenant) créé par le coach, permet-
tant ainsi à l’équipe ou à la personne coachée de produire le contenu. En tant que facili-

5. Lyssa Adkins, Coaching Agile Teams: A Companion for Scrummasters, Agile Coaches, and Project Ma-
nagers in Transition, Addison Wesley, 2012

Messager-Livre.indb 55 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
56
Deuxième partie

tateur du processus, le coach favorise l’émergence du contenu. Vincent Lenhardt6 parle,


lui, « d’enveloppe culturelle minimale », constituée, entre autres, de valeurs et de langages
communs, d’expériences partagées, de compétences au sein d’une équipe.
Le scrummaster est responsable du processus, méthodologique et relationnel.

L’engagement du bénéficiaire
Le coaché, lui, s’engage à être responsable et à ne pas faire pression sur le coach pour
exiger de lui un savoir qu’il n’est pas censé avoir. Autrement dit, l’équipe accompagnée
ne demande pas la solution au coach ; elle peut le faire auprès d’un consultant expert.
Le coaché ne doit donc pas exercer une pression du résultat sur le coach.
Le coach n’est là que pour créer le cadre. La personne ou le groupe coaché(e) est expert(e)
de son changement. D’ailleurs, le regard porté par le coach sur le coaché, différent de
celui du consultant expert, valorise et responsabilise la personne ou l’équipe. Celle-ci peut
alors exprimer tout son potentiel et s’engage à le faire.

Ce que nous avons appris


• Nous avons vu qu’un contrat doit être établi entre un coach et le coaché, à partir d’une
demande explicite.
• C’est lors d’un entretien préliminaire, qui peut être mené en suivant la grille RPBDC,
que le coach cerne le contexte du client et son besoin d’accompagnement.
• Après avoir clarifié la demande, l’objectif du coaching est défini.
• Le coach doit alors se poser cinq questions pour évaluer les risques, pour lui et/ou le
coaché, à démarrer le travail.
• Une fois la mission acceptée, un contrat est établi entre les différents acteurs ; il fixe les
engagements mutuels.
• On peut résumer l’engagement du coach à 3 P : Puissance, Permission et Protection. En
effet, son engagement repose sur la mise à disposition et la sécurisation de moyens (le
cadre et le processus) pour libérer le potentiel du coaché.

6. Op. cit.

Messager-Livre.indb 56 12/10/12 09:38


Créer un cadre contractuel
57
Chapitre 4

• Le coaché s’engage, lui, à être acteur ou auteur de son changement, en toute responsa-
bilité.
• Enfin, nous avons vu que le scrummaster qui adopte une posture de coach peut utiliser
les outils présentés pour s’interroger sur son rôle et sur la pertinence de son action.

Outils du coach proposés

• La grille d’entretien RPBDC


• La trousse de Steiner ou le « go/no-go » du coach
• Le triangle des 3 P

La responsabilisation des acteurs du changement fait l’objet du chapitre suivant.

Messager-Livre.indb 57 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 58 12/10/12 09:38
5
Responsabiliser
les acteurs du changement

Ce n’est pas tant ce que les gens ignorent qui cause


des problèmes, c’est tout ce qu’ils savent et qui n’est pas vrai.
Mark Twain, écrivain américain

« L’erreur initiale »1 souvent commise est de penser que « ce qui est bon pour moi, l’est
pour tout le monde ». Cela nous fait passer à côté des interrogations et des peurs des per-
sonnes touchées par le changement.
Intégrer facilement un changement et s’y engager nécessite une prise de conscience per-
sonnelle, l’accueil de ses émotions et le renoncement à certaines certitudes bien ancrées.
Seule la personne qui l’a décidé pourra aborder le changement et s’inscrire dans un pro-
cessus de désapprentissage puis d’apprentissage.

Prendre conscience
La prise de conscience et l’acceptation de nos émotions, puis des renoncements néces-
saires, constituent une première étape pour aiguiller son énergie de façon positive et
trouver son nouvel équilibre.

1. Charles-Henri Russon & Carole Lalonde, Management du changement, Panorama des approches, tech-
niques et principes utiles, IFEAS, 2012

Messager-Livre.indb 59 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
60
Deuxième partie

S’autoévaluer
Plutôt que de tirer moi-même des conclusions ou émettre des hypothèses (toujours) sub-
jectives suite à mes observations et mes entretiens individuels, j’apprécie la complémen-
tarité de la technique de l’autoévaluation.
Lors d’une situation de coaching d’équipe, l’objectif est d’amener ses membres à prendre
conscience des changements nécessaires et à définir les axes d’amélioration pour devenir
une équipe (plus) agile, ou comment mettre l’agilité au service de la performance de
l’équipe.
Lors d’un atelier dédié, chaque membre de l’équipe est sollicité, soit à titre individuel,
soit collectivement, pour évaluer un certain nombre de critères sur une échelle de 1 à
10 (figure 5-1). Les questions posées, pour chacun des critères, sont : selon vous, cette
valeur est-elle présente au sein de l’équipe ? Comment se manifeste-t-elle concrètement ?
Pourquoi et comment pourrait-on s’améliorer ?
Les résultats peuvent être recueillis globalement ou individuellement. Ils sont alors ex-
ploités soit comme support d’un atelier avec l’équipe, soit comme support d’un entretien
individuel avec le leader de l’équipe.
L’intérêt est d’amener les membres de l’équipe à échanger leurs points de vue sur la base
de comportements visibles. Ils prennent alors conscience de leur « degré d’agilité » ; ils
prennent la mesure de leurs comportements, de leurs forces et de leurs axes de progrès.

Précision
Il ne s’agit ni d’un diagnostic, ni d’une prescription de changements à mener élaborée
par un expert ! Nous reviendrons sur « l’effet miroir » de ce type d’exercice, basé sur le
ressenti exprimé par les membres de l’équipe.

Figure 5-1 Confiance


Résultats 7
6
de l’autoévaluation : Respect Solidarité
5
où en est l’équipe ?
4
3
2
Courage Responsabilité
1
0
Avant
Après

Transparence Autonomie

Sens de
Droit à l'erreur
l'engagement

Messager-Livre.indb 60 12/10/12 09:38


Responsabiliser les acteurs du changement
61
Chapitre 5

Comment utiliser cet outil ?


Vous pouvez sélectionner les valeurs ou les critères de votre choix, puis afficher le radar
comme sur la figure 5-1.
• Si le recueil des évaluations est collectif, je demande à chaque participant, à tour de
rôle, d’apposer une gommette ou de dessiner une croix sur chaque axe du radar et de
commenter son évaluation.
• Si le recueil est individuel et anonyme (selon le niveau de confiance), chaque membre
est invité à évaluer les différents critères du radar sur une feuille qui lui est remise.
Une fois que toutes les feuilles me sont revenues, je restitue une synthèse sur le radar
affiché.
• Vous pouvez vous appuyer sur cet outil pour que l’équipe apprécie ses avancées : avant
(au démarrage de la transformation), puis après (à deux ou trois mois d’intervalle, puis
à la fin du projet, par exemple).
Cette autoévaluation peut porter, à titre individuel, sur l’analyse de son style d’écoute ou
sur son type de leadership, l’objectif étant toujours de permettre une prise de conscience
des changements à envisager par la personne elle-même. Le radar est une sorte de miroir
pour la personne ou l’équipe.
Un autre moyen de prendre conscience des renoncements ou des progrès à apporter dans
ses comportements est l’accueil et l’analyse des émotions.

Accueillir ses émotions


J’aimerais partager avec vous cette citation du conte Le Magicien des Peurs de Jacques
Salomé 2 : « Derrière chaque peur, il y a un désir. Il y a toujours un désir sous chaque
peur, aussi petite ou aussi terrifiante soit-elle ! Il y a toujours un désir, sache-le. »
En accueillant nos émotions, en nous autorisant à les ressentir, nous prenons conscience
qu’elles ne sont pas créées par les autres. L’objection, la réaction ou la parole de l’autre
qui nous dérangent ne sont que les déclencheurs de nos émotions.
Si nous souhaitons ignorer ou masquer nos émotions, notre corps, lui, ne nous trompe
pas.

Le trac
Lorsque nous avons le trac, nous tremblons, nous avons des maux de ventre, la bouche
sèche. Cette sensation traduit une émotion de peur… peur de ne pas être à la hau-

2. Jacques Salomé, Le Magicien des Peurs, in Contes à guérir, contes à grandir, Albin Michel, 1993

Messager-Livre.indb 61 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
62
Deuxième partie

teur, très probablement. En l’acceptant, nous pouvons décider de mieux préparer notre
intervention, de nous isoler et de nous détendre, de relativiser l’enjeu de la prestation…
Chacun a sa propre réponse.
Le trac, forme de peur, peut traduire le désir d’être parfait, d’être reconnu, d’être célèbre…

Par conséquent, prendre conscience de nos émotions et les accepter nous permet de mieux
comprendre notre réaction et d’en analyser la nature. Accueillie et contrôlée, l’émotion
peut être un puissant levier d’action, pour le changement précisément : « Et si je réagis-
sais autrement dorénavant, par rapport à telle situation ? », afin de se débarrasser de
certaines sensations désagréables qui nous encombrent.
Et la solution à bien des malaises, discordes, conflits est à trouver en nous, en particulier
dans la satisfaction de nos besoins psychologiques, sur lesquels nous aurons l’occasion de
revenir dans la troisième partie (chapitre 7, « Créer un cadre sécurisé »).
En effet, pour nous motiver et donner un sens à notre vie, nous recherchons la satisfaction
de nos besoins et le respect de nos valeurs. Cela signifie que nous ressentons une émotion
positive et agréable lorsque nous satisfaisons nos besoins psychologiques, et une émotion
négative et désagréable si ceux-ci sont « malmenés ». De même qu’une valeur, chère à
nos yeux, qui ne serait pas respectée pourra engendrer une réaction de révolte.
L’acceptation de nos émotions et la connaissance de soi nous aident à nous mettre sur le bon
chemin pour vivre le changement comme nous le souhaitons, lorsque nous l’avons décidé.

Décider de changer
Dans une transformation agile, le constat que les comportements ne sont pas tous ceux
qui sont attendus démontre que les compétences collectives et relationnelles ne sont pas
spontanément déployées. Elles se fondent, nous l’avons vu, sur des relations de confiance.
Or, dans une équipe, a fortiori récemment constituée, règne plutôt de prime abord une
ambiance neutre et attentiste, voire de méfiance entre les membres.
Et pourtant, n’est-il pas plus confortable de travailler dans la confiance ? Ne collaborons-
nous pas plus efficacement lorsque nous échangeons de façon positive et constructive
avec nos coéquipiers, sans arrière-pensée ? Sans aucun doute. Cependant, cette colla-
boration n’est pas spontanée. Nombreuses sont les équipes que j’accompagne qui y par-
viennent, un peu pour certaines, un peu plus progressivement ou très bien pour d’autres…

Un nombre critique de volontaires


Quel est leur point commun ? Le constat que j’ai fait à plusieurs reprises est que, dans
chaque équipe qui a enclenché un processus de changement avec succès, un nombre

Messager-Livre.indb 62 12/10/12 09:38


Responsabiliser les acteurs du changement
63
Chapitre 5

suffisant de personnes volontaires ayant décidé de s’engager vers le changement avait été
nécessaire. Cela signifie qu’une seule personne, aussi charismatique soit-elle, ne suffit
pas à emmener l’équipe vers le changement. En effet, l’amorce d’un changement ne pou-
vant provenir que de chacun, c’est la juxtaposition de plusieurs volontés individuelles qui
rendra possible le changement de l’équipe.

Des comportements inadaptés qu’il faut changer


À quel moment cette décision de changer peut-elle être prise ? Lorsque la personne prend
conscience que ses comportements actuels sont inadaptés et qu’ils ne lui permettent pas
d’obtenir l’effet escompté, elle doit alors envisager autrement la situation pour déclen-
cher de nouveaux comportements et obtenir le résultat souhaité. Elle doit débrancher son
« pilotage automatique », c’est-à-dire revoir ses croyances et modifier ses réflexes.
Pourtant, on a souvent tendance à considérer que « Je suis dans le vrai, c’est à l’autre de
changer son comportement » !

Exemple

Prenons l’exemple de notre scrummaster Patrick (équipe Alpha) : il souhaite rendre son
équipe plus autonome et la responsabiliser davantage.
Or, aujourd’hui, il est intrusif, directif, incontournable sur bien des sujets ; son comportement
n’est pas adapté à son objectif, puisque même s’il invite son équipe à prendre plus de respon-
sabilités, le résultat n’est pas à la hauteur de ses attentes.
S’il prend conscience que le changement doit, dans un premier temps, être initié par lui, il a
fait l’essentiel du chemin. Son changement de comportement va inévitablement susciter des
réactions, des ajustements de la part de ses collaborateurs. Il progressera vers son objectif.

Messager-Livre.indb 63 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
64
Deuxième partie

Cette prise de conscience est la première étape pour initier le changement (figure 5-2).

Figure 5-2 Conscient


Les étapes Je sais que
de l’apprentissage Je sais que
je ne sais
je sais
pas
1 23

Compétence Compétence
non acquise acquise
0 3
Je ne sais pas
Je ne sais pas
que je ne sais
que je sais
pas Inconscient

• Étape 0 : je n’ai pas conscience que je n’ai pas le bon comportement ou la bonne com-
pétence.
• Étape 1 : je prends conscience que je n’ai pas le bon comportement ou la bonne com-
pétence et qu’il en existe peut-être de plus appropriés.
• Étape 2 : je m’ouvre à d’autres représentations, je développe de nouvelles compétences,
j’expérimente de nouveaux comportements en toute conscience.
• Étape 3 : j’ai développé de nouvelles compétences et les mets en application spontané-
ment, sans même m’en rendre compte.
Cette prise de conscience individuelle ou collective est la clé, contrairement à une invite
ou une injonction, voire une sommation de changer venant d’autrui.

Comment utiliser cet outil ?


Cette autre grille de lecture vous permet de repérer où en est votre interlocuteur dans le
processus d’adoption d’un nouveau comportement ou d’acquisition d’une nouvelle com-
pétence.
• Grâce à votre questionnement, vous repérerez s’il a pris conscience de la nécessité de
changer, première étape incontournable.
• Votre action dépendra de cet état d’avancement : agir sur la prise de conscience (pas-
sage de 0 à 1) ou expérimentation et évaluation d’un nouveau comportement (étape 2).
Le « désapprentissage » est le mécanisme qui permet cette prise de conscience.

Messager-Livre.indb 64 12/10/12 09:38


Responsabiliser les acteurs du changement
65
Chapitre 5

Désapprendre
Le changement est à la fois un processus
de désapprentissage et d’apprentissage.
Jacques-Antoine Malarewicz

Pour découvrir et développer de nouvelles compétences collaboratives plus adaptées et


modifier son comportement, il est nécessaire de désapprendre.
Désapprendre signifie abandonner nos certitudes du passé et nos réflexes, guidés par
notre « pilote automatique », sur lesquels nous fondons nos comportements ; nous devons
lâcher prise pour nous ouvrir à de nouvelles possibilités. Désapprendre, c’est savoir sortir
de ces schémas souvent exclusifs et réducteurs.
Il est d’ailleurs souvent plus difficile de désapprendre que d’apprendre.

Réflexes et croyances limitantes


Si l’on veut apprendre, savoir, deviner, entrevoir,
il faut se délester de ses acquis, être neuf comme un enfant,
capable d’émerveillement, se rendre perméable, poreux.
Bernard Giraudeau

Ne rejette-t-on pas fréquemment celui qui n’est pas d’accord, en amalgamant l’idée et la
personne qui l’a proposée ? En effet, il est plus facile de rejeter la nouveauté que de faire
l’effort de remettre en cause notre propre jugement, ou d’intégrer cette nouvelle idée et
bousculer notre propre vision de la situation. Nos croyances peuvent en effet limiter notre
capacité à voir et à analyser les choses différemment, donc à changer.
Cependant, désapprendre ne veut pas dire nier et rejeter tout ce que nous croyons au-
jourd’hui. Par exemple, dans le cadre d’une transformation agile, désapprendre signifie
remettre en cause certains comportements liés à des compétences et innover dans ses
pratiques (figure 5-3, page suivante). Remettre en cause ses comportements ne signifie
pas que nos compétences ne sont pas réellement acquises ou qu’elles sont devenues inu-
tiles. Il s’agit juste de prendre conscience qu’il y a un nouveau contexte et de nouveaux
besoins, et par conséquent, qu’il peut être opportun de modifier la façon dont nous met-
tons en pratique nos compétences, afin de les adapter à la situation, voire de les compléter.

Messager-Livre.indb 65 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
66
Deuxième partie

Exemple : l’expert

L’expert sait estimer ses tâches et a un taux élevé de fiabilité. Il a d’ailleurs toujours été sol-
licité précisément pour son expertise et cité en exemple par son chef de projet. Il n’a donc
jamais eu l’opportunité de comparer ses estimations.
Désapprendre, dans ce cas, n’est pas renoncer à sa compétence, mais c’est l’exploiter autre-
ment : s’ouvrir à l’idée que ses estimations peuvent être discutées avec d’autres, que son
processus de découpage des tâches et d’estimation peut intéresser ses coéquipiers, bref,
que mettre son expertise au service de l’équipe lors des planning games3 peut être profitable
pour l’ensemble de l’équipe.

Ces compétences restent acquises et sont sans doute très précieuses pour la suite !
Il ne s’agit pas d’opposer compétences acquises et nouvelles compétences à acquérir ; au
contraire, il s’agit bien de les relier. 3

Figure 5-3 Contexte passé Contexte futur


Accepter
de désapprendre
J’ai des J’ai des
compétences compétences
acquises à développer

Comment capitaliser ?
Comment assembler les
deux ?

Exemples : équipes Alpha et Bêta

Revenons sur nos équipes Alpha et Bêta.


Dans l’équipe Bêta, c’est en apparence l’individualisme qui prévaut, avec l’indépendance, le
non-conformisme et, peut-être, de la concurrence entre coéquipiers. Pourquoi un membre
de l’équipe Bêta accepterait-il facilement et spontanément de partager ses connaissances
ou son expérience et de travailler en synergie avec les autres membres ? Uniquement s’il y
trouve un intérêt : être reconnu, apprendre, se valoriser, prendre du plaisir, créer du lien…
Ici, désapprendre c’est réaliser que la compétition n’apporte pas que de l’émulation. Ap-
prendre, c’est envisager de mettre son expérience ou son expertise – non contestée et
même reconnue – au service de l’équipe et d’en mesurer l’effet bénéfique sur la performance
globale.

3. Le planning game ou planning poker est une séance d’estimation et de planification collective, à l’aide
d’un jeu de cartes.

Messager-Livre.indb 66 12/10/12 09:38


Responsabiliser les acteurs du changement
67
Chapitre 5

Dans l’équipe Alpha, Patrick est confiant dans ses compétences fonctionnelles, techniques et
de gestionnaire. Ses coéquipiers alimentent cette certitude puisqu’il est très sollicité.
Désapprendre pour Patrick consiste à faire le deuil de son omnipotence et de son omni­
science, de sa gestion classique à l’aide de diagrammes de Gantt, pour expérimenter une
plus grande délégation ainsi qu’un pilotage plus agile. Ses compétences, sa rigueur, son
sens de l’organisation sont acquis et non remis en cause, mais peuvent être exploités diffé-
remment pour responsabiliser son équipe. Ses compétences de gestionnaire sont toujours
utiles, mais il responsabilisera l’équipe pour qu’elle s’implique davantage dans le pilotage ;
ses compétences techniques lui seront également utiles pour challenger les développeurs
sur d’autres solutions techniques possibles.

Une autre erreur souvent constatée consiste à mettre en avant les défauts, les dysfonction-
nements ou l’inadéquation de l’existant par rapport à la situation visée.

Exemple : un expert travaillant seul

Aujourd’hui : un expert s’organise depuis des années en gérant lui-même son travail. Son
chef de projet lui demande une estimation, la valide et le laisse gérer la tâche. Il s’enquiert
régulièrement de l’avancement et le développeur termine sa tâche généralement à temps.
Demain : l’expert ne doit plus travailler seul. Il doit fournir une liste de tâches de granularité
fine et communiquer le travail restant à faire chaque jour.
Dans cet exemple, non seulement l’expert doit modifier sa façon de travailler, alors qu’il ne
voit pas nécessairement l’intérêt de cette nouvelle approche, mais il peut de surcroît inter-
préter ces changements comme une perte de confiance (et de temps). Si on lui présente la
transformation de façon négative (« Tu ne peux plus travailler tout seul dans ton coin ; ce n’est
pas l’esprit agile »), on renforce sa probable résistance.
Accompagner le changement, c’est par conséquent reconnaître, valoriser et transformer des
acquis en atouts pour changer : « Grâce à ton expérience dans l’estimation des tâches, tu vas
pouvoir aider les autres jeunes développeurs lors des séances de planning poker ».

Il s’agit de penser différemment pour agir différemment, remettre en question ses modes
de pensée et les confronter avec d’autres pour élargir sa vision. L’assemblage des deux
facilite ainsi l’apprentissage et le développement de comportements plus pertinents dans
le nouveau contexte.
Malheureusement, cette prise de conscience et le désapprentissage ne sont pas faciles :
« Mettre en concurrence au sein de notre référentiel des stratégies plus ou moins perfor-
mantes est un défi pour notre modestie et notre souplesse d’esprit. » 4
C’est pourquoi une aide extérieure peut s’avérer bénéfique.

4. Bernadette Lecerf-Thomas, Neurosciences et management : le pouvoir de changer, Eyrolles, 2009

Messager-Livre.indb 67 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
68
Deuxième partie

Ce que nous avons appris


• Nous avons vu qu’une prise de conscience individuelle est nécessaire pour amorcer
volontairement un changement.
• Cette prise de conscience peut être le fruit d’une autoévaluation qui fait office de mi-
roir ; elle peut aussi résulter de l’accueil et de l’analyse de nos émotions.
• Quoi qu’il en soit, une prise de conscience est nécessaire pour réaliser qu’un compor-
tement n’est plus adapté à une nouvelle situation et pour identifier les axes de change-
ment.
• Seule la personne consciente de cette nécessité de changer peut décider de s’engager
dans le changement.
• S’engager dans le changement, c’est se débarrasser de certaines attitudes ou certains
réflexes, donc désapprendre ; puis, c’est expérimenter de nouvelles voies, de nouvelles
pistes, pour apprendre.

Outils du coach proposés

• L’autoévaluation ou la mesure du degré d’agilité


• Les étapes de l’apprentissage

Si cette démarche n’est pas facile, une aide extérieure peut nous prêter main forte. Elle
peut être apportée par celui ou celle qui adopte une posture de coach, non pas pour
fournir une solution toute faite, mais pour faciliter le processus de désapprentissage et
d’apprentissage.

Messager-Livre.indb 68 12/10/12 09:38


6
Faciliter le processus
de désapprentissage/apprentissage

On ne peut rien apprendre aux gens.


On peut seulement les aider à découvrir qu’ils
possèdent déjà en eux tout ce qui est à apprendre.
Galilée

Nous avons vu que le changement est un processus de deuil. L’énergie consommée dans
les premières étapes du processus est utilisée par la personne « endeuillée » pour se
défendre et compenser sa frustration.
Pour une équipe ou une organisation, le phénomène est identique. Le mécanisme d’ho-
méostasie se déclenche de la même façon : on observe des tensions, des non-dits, des
clans apparaissent, des alliances se nouent, des rumeurs circulent… Voilà les manifesta-
tions visibles du processus d’adaptation du système vivant.
L’objectif pour le coach est d’exploiter cette énergie utilement pour que la personne ou
l’équipe franchisse le gué et devienne l’acteur de son propre changement.
Nous avons vu également que le processus d’apprentissage se déroulait en quatre étapes
(figure 5-2) : le coach intervient principalement aux étapes 1 et 2, c’est-à-dire dans la
prise de conscience et dans l’apprentissage.
C’est sa posture de coach, sur laquelle il travaille lui-même en profondeur, qui garantit le
succès de la démarche : en miroir et en position basse, il facilite le passage de l’intention
à l’action.

Messager-Livre.indb 69 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
70
Deuxième partie

Le coach est un miroir


Le principe du coaching est « d’ex-poser » sa réalité (au sens étymologique de exponere,
c’est-à-dire « mettre à la vue de »). La personne ou l’équipe accompagnée par un coach
est invitée à décrire une situation problématique ou conflictuelle, au travers de faits, de
ressentis ou d’analyses.
Grâce à des techniques d’écoute active (et d’autres outils que nous décrirons dans le cha-
pitre 8), le coach est un miroir réfléchissant de ce que décrit le coaché, un miroir qui ne
juge pas, qui ne déforme pas.
« Un miroir n’émet pas. Il renvoie ce qu’il reçoit comme la lune reflète une partie de
la lumière du soleil. Le soleil est bien le collaborateur. »
(Michel Giffard, directeur d’Executive Coaching HEC)
Le coach nous libère : en décrivant cette situation, en nommant nos ressentis, nous com-
prenons mieux une réaction, une inaction, une situation de difficulté relationnelle… notre
réalité.
« Posée devant soi », cette problématique peut être perçue avec plus de distance : « Est-il
possible de faire son lit sans en sortir ? » (Michel Moral1). Le coach invite la personne à
prendre du recul et encourage le changement de point de vue. Il facilite la clairvoyance
et le discernement.
Par son questionnement, le coach « bouscule » et amène la personne à s’interroger
sur l’adéquation ou l’inadéquation de son comportement dans tel contexte. En ouvrant
d’autres perspectives, la personne désapprend ce qu’elle croit pertinent de faire dans cer-
taines situations et entrevoit les changements à apporter.

Exemple : un développeur qui refuse le pair-programming

Revenons à notre transformation agile et prenons le cas d’un développeur qui refuse de
travailler en binôme, soit en rejetant ouvertement l’idée, soit en s’y soustrayant de façon
inefficace.
En dialoguant avec le développeur, le coach aide celui-ci à décrire ce qui ne lui convient pas
dans le pair-programming, à identifier ce qu’il craint, à imaginer ce qui lui conviendrait et à
proposer des actions. Le coach comprend que le développeur a peur de ne pas être à la hau-
teur et qu’il craint le jugement de l’autre développeur. Grâce au coaching et à l’effet miroir du
coach, le développeur prend conscience que ses craintes peuvent être relativisées.
Un autre, qui a peur de perdre l’exclusivité de son expertise, réalisera que cette peur peut être
dépassée en gagnant une reconnaissance des autres pour ses qualités de pédagogue et en
conservant un rôle de référent sur ce domaine.

1. Michel Moral, Les outils du coach, InterEditions, 2011

Messager-Livre.indb 70 12/10/12 09:38


Faciliter le processus de désapprentissage/apprentissage
71
Chapitre 6

Comment utiliser cet outil ?


L’effet miroir n’est pas un outil à proprement parler, puisqu’il est le prolongement de votre
intervention. L’outil, c’est vous !
C’est votre questionnement et votre talent à faciliter l’expression de votre interlocuteur
qui a l’effet du miroir. C’est l’exposé d’une situation ou de faits ou l’extériorisation d’un
ressenti qui permet à cet interlocuteur de prendre de la distance et donc plus facilement
conscience. Cette fonction de miroir est tout à fait adaptée au leader qui adopte une pos-
ture de coach.
☞ Reportez-vous au chapitre 8, « Maîtriser des outils et des techniques de coach », pour
développer vos capacités d’écoute et de questionnement. Voir aussi le chapitre 18, « En
tant que scrummaster, je veux développer mes qualités d’écoute ».

Nous verrons, dans la quatrième partie consacrée au coaching de l’équipe, comment


le coach permet à celle-ci une prise de conscience collective. Une fois cette prise de
conscience réelle, le coach invite à imaginer de nouvelles solutions et de nouveaux com-
portements.

Le coach est en position basse


Le coach accompagne la personne dans sa recherche de solutions. Il l’aide à trouver elle-
même ses propres réponses aux questions qu’elle se pose ou aux problématiques qu’elle
rencontre, sans rien suggérer.
Cette personne ou cette équipe conserve toute sa « souveraineté » et sa responsabilité
pour définir son objectif d’évolution et les moyens qu’elle se donne pour l’atteindre.
Le coach n’a pas à indiquer quel comportement adopter dans telle situation : seule la per-
sonne est à même de trouver comment elle doit réagir, même si cela lui semble difficile.
Le coach renonce à savoir ce qui est bon pour l’autre.
La métaphore souvent utilisée est celle du pauvre homme qui réclame du poisson au
pêcheur : celui-ci a le choix entre donner du poisson à l’homme, et ainsi le maintenir
dans une certaine dépendance, ou lui apprendre à pêcher pour qu’il gagne en autonomie
et s’émancipe.
On dit du coach qu’il adopte une « position basse », celle de celui qui ne sait pas, qui
n’a pas d’a priori. Il aide à « grandir », à prendre conscience de la nécessité du change-
ment. Il aide à apprendre à apprendre. Il accompagne la personne vers son objectif de
changement afin de lui rendre le chemin plus facile. Il ne cherche pas à prouver qu’il est
compétent en donnant des solutions à tout prix, malgré la pression éventuelle du coaché.

Messager-Livre.indb 71 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
72
Deuxième partie

Comment utiliser cet outil ?


Là encore, il ne s’agit pas d’un outil à proprement parler, mais bien d’une posture à adop-
ter, puisque vous êtes vous-même l’outil qui va permettre à la personne accompagnée de
trouver sa solution.
Comment adopter une posture basse ? C’est tout d’abord en acceptant l’idée que votre in-
terlocuteur est suffisamment compétent pour trouver une solution. C’est ensuite réfréner
votre envie de communiquer votre réponse à sa place lors de la résolution d’un problème.
Attention ! Cette posture est difficile à adopter. Nombre de coachs mettent des années à
l’embrasser ; c’est un des sujets de prédilection traités entre un coach et son superviseur !

☞ Voir aussi le chapitre 19, « En tant que scrummaster, je veux trouver le bon position-
nement vis-à-vis de l’équipe ».

Le coach est un facilitateur


Une fois que la personne a pris conscience de la nécessité et de la possibilité de changer,
et qu’elle s’est fixé un objectif de changement, le rôle du coach est de faciliter sa pro-
gression vers son objectif. Et l’on sait combien les changements d’attitude sont souvent
difficiles : « Chassez le naturel, il revient au galop ! »
Le coach permet à la personne de passer de l’intention à l’action. Son premier pas vers
l’objectif est capital pour initier le changement, au travers d’actions concrètes, visibles et
planifiées. Il accompagne la personne sur le chemin de l’objectif (figure 6-1).

Figure 6-1
De l’intention Situation A Situation B
à l’action (problématique) (cible)

Le coach facilite
la progression
sur le chemin.

Exemple

Pour notre scrummaster, Patrick, il s’agit d’être moins intrusif et de déléguer davantage la
prise de décision à son équipe.
Nous observerons, dans la cinquième partie, comment cette prise de conscience est pos-
sible grâce au questionnement du coach.

Messager-Livre.indb 72 12/10/12 09:38


Faciliter le processus de désapprentissage/apprentissage
73
Chapitre 6

Patrick a pris conscience de son omniprésence. Il en a compris l’origine. Il a de surcroît


entrevu ce que pourrait être une équipe autonome et a mieux appréhendé le rôle qu’il sou-
haiterait jouer. Grâce au travail effectué avec le coach, il a envisagé différentes situations
au cours desquelles il avait un comportement inadapté et a pris la décision d’adopter une
nouvelle attitude.
Patrick va être « en conduite accompagnée » durant un certain temps : cela signifie que,
régulièrement, il va expérimenter de nouveaux comportements, en observera les effets, pren-
dra du recul sur son vécu avec l’aide de son coach, puis ajustera et finira par trouver la bonne
posture vis-à-vis de son équipe.

En résumé, le coach peut intervenir à trois niveaux dans le processus de changement


(figure 6-2).

Figure 6-2
L’aide du coach
à trois niveaux

Prendre
conscience Définir quel Lancer une
de la changement action
nécessité de apporter concrète
changer

Ce que nous avons appris


• Pour initier un changement de comportement, il n’est pas possible de convaincre
quelqu’un : chaque acteur du changement doit décider de s’y engager et définir com-
ment s’y engager.
• L’aide du coach ou la posture qu’il adopte porte sur la prise de conscience : le coach a
une fonction de miroir pour que la personne réalise que son comportement n’est plus
adapté à la situation.
• Son aide porte également sur la recherche d’un comportement adéquat à la nouvelle
situation, sans jamais donner lui-même la solution : on dit qu’il est en position basse.
• Enfin, son aide facilite le passage à l’action, pour enclencher le changement.

Messager-Livre.indb 73 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
74
Deuxième partie

Outils du coach proposés

• Postures du coach : effet miroir et position basse

La personne ou l’équipe s’engageant volontairement dans cette démarche de transforma-


tion doit néanmoins être protégée. Offrir un cadre sécurisé relève de la responsabilité du
coach.

Messager-Livre.indb 74 12/10/12 09:38


Troisième partie

Sécuriser la démarche
de transformation
Focalisées sur des enjeux économiques, organisationnels et
technologiques, souvent sous pression, les personnes en charge
de la conduite du changement ne créent pas toujours les condi-
tions favorables pour prendre en considération le volet humain
d’une transformation.
L’objectif d’amélioration ou de changement visé par une per-
sonne, une équipe ou une organisation n’est pas celui du coach.
En revanche, ce dernier est responsable du cadre dans lequel
évoluent les acteurs.
Formé, équipé d’outils spécifiques, le coach prend en compte la
dimension humaine des projets de transformation et instaure la
confiance entre les acteurs. Il travaille ainsi à la sécurisation et à
la pérennisation de la démarche.

Messager-Livre.indb 75 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 76 12/10/12 09:38
7
Créer un cadre sécurisé

N’importe quel objet peut être un objet d’art


pour peu qu’on l’entoure d’un cadre.
Boris Vian

Le cadre est le « décor » dans lequel vont jouer les acteurs. À partir d’un contrat (cadre
contractuel), dans lequel l’objectif de l’accompagnement est défini et les engagements
mutuels précisés, le coach est responsable de la mise en place des conditions qui vont faci-
liter le changement ; il s’assure de la prise en compte de la dimension humaine des projets
et crée un climat de confiance (cadre relationnel). C’est le socle sur lequel se construit le
processus de changement.
Le coach est chargé d’encadrer la démarche de changement pour que tous s’y sentent en
sécurité. Il cherche à mettre en avant les acteurs : c’est eux qui exercent leur pouvoir, au
sens noble du terme, c’est-à-dire qu’ils peuvent exprimer librement ce qu’ils sont vraiment
et aborder le changement en confiance, de la façon la mieux appropriée.

Un cadre où la dimension humaine est prise en compte


Pour permettre à chacun d’exprimer ce qu’il est, le coach repère les ressources exploi-
tables et disponibles du coaché, qui souvent les ignore ou ne les mobilise pas. Il s’assure
que la personne coachée est pleinement responsable de ses actes et que ses compor-

Messager-Livre.indb 77 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
78
Troisième partie

tements sont le reflet de ce qu’elle est et ne sont pas uniquement conditionnés par son
environnement. Dans le cas d’une équipe, il veille à ce que son identité émerge et qu’elle
prenne en considération la personnalité de chaque membre.

Un espace où l’on peut exprimer qui l’on est


La figure 7-1 montre que nos actions (ou nos réactions) sont souvent influencées par notre
environnement : les autres, la société, le contexte dans lequel nous évoluons… L’objectif
du coach est de rétablir un équilibre afin que soit pris en compte l’être de chacun : cela
signifie qu’une réaction doit, bien sûr, tenir compte du contexte et des interlocuteurs,
mais qu’elle doit, avant tout, être le reflet de ce que nous sommes profondément.

Exemple : un développeur qui n’ose pas s’exprimer

Un développeur est en réunion avec son équipe. Il a une idée à proposer ou un avis à faire
partager. S’il n’ose s’exprimer, c’est que le poids de l’environnement fait pencher la balance
du côté gauche. Cela démontre que son être a du mal à apparaître au grand jour et que sa
dimension personnelle ne pèse pas assez. Sans doute ne s’affirme-t-il pas assez par rapport
au regard de l’autre ou à la crainte de son jugement.

La prise de conscience de soi et l’affirmation de soi permettent de contrebalancer le pou-


voir et l’influence de notre environnement sur nos actes. On ne peut pas être ce que les
autres veulent que l’on soit ou induisent par leur comportement !

Figure 7-1
Intégrer
la dimension
humaine

Être

Environnement

Messager-Livre.indb 78 12/10/12 09:38


Créer un cadre sécurisé
79
Chapitre 7

C’est pourquoi, le coach veille à ce que les personnes qu’il accompagne progressent vers
une plus grande connaissance de soi et des autres ; cette connaissance mutuelle favorise
les comportements authentiques et la qualité des interactions.

Un espace où l’on se connaît


La difficulté, dans nos relations avec les autres, c’est que l’on est au minimum deux
personnes à interagir. Chacun a ses convictions, ses désirs, ses craintes, ses souvenirs,
ses émotions… qui vont influer sur sa façon de communiquer. Cette communication a
inévitablement un effet chez l’interlocuteur, qui réagit lui-même avec ses convictions, ses
désirs, etc. (voir le chapitre 3, « Comment expliquer ce qui se passe ? »).
Il est par conséquent essentiel, avant tout, de prendre conscience de soi, c’est-à-dire de
nos émotions, qui sont à l’origine de nos comportements et de nos interactions : repérer,
entendre, analyser, respecter pour contrôler ces émotions.
La connaissance de l’autre est un deuxième prérequis. Elle nous permet d’anticiper cer-
taines réactions prévisibles de la part de notre interlocuteur et d’adapter, de fait, notre
communication. « Connaître les autres, c’est sagesse. Se connaître soi-même, c’est sa-
gesse supérieure. » (Lao-Tseu.) C’est ce que l’on appelle « l’intelligence émotionnelle »
(figure 7-2).

Figure 7-2
L’intelligence
émotionnelle

© 2008 Kahler Communication France

Messager-Livre.indb 79 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
80
Troisième partie

De nombreux outils ou modèles nous aident à mieux nous connaître, nous-mêmes et


ceux qui nous entourent (MBTI, Ennéagramme, Team Management System…). J’utilise,
pour ma part, le modèle de la Process Communication, qui nous donne à cet égard un
éclairage très utile.

L’éclairage de la Process Communication


La Process Communication ou « Process Com » est un modèle développé en 1970 par
Taibi Kahler, docteur en psychologie. Initialement, ce modèle avait pour vocation d’éva-
luer la compatibilité entre les astronautes de la NASA : outil d’aide au recrutement, il
permettait d’identifier qui fonctionne bien ou moins bien avec qui, quels comportements
prévisibles sont à envisager en cas de stress, etc.
Ce modèle définit six types de personnalités : Travaillomane, Empathique, Persévérant,
Rêveur, Rebelle, Promoteur (© Taibi Kalhler1).

L’immeuble de personnalité2
Chaque personne a une structure constituée de six types de personnalités : c’est notre
« immeuble de personnalité » (© Taibi Kahler2, figure 7-3).
Figure 7-3
Exemple
d’un profil
de personnalité

© 2008 Kahler Communication France

Notre « base » constitue les fondations de notre personnalité. Puis nous pouvons vivre
des tranches de vie successives appelées « phases », auxquelles sont associés des besoins
psychologiques qui sont nos sources de motivation. Nous le constatons tous, ces sources
de motivation peuvent évoluer avec notre histoire et notre cheminement personnels.

1. Taibi Kahler, Ph.D., Manager en personne, Kahler Communication, Inc., Little Rock, Arkansas, 1988,
1992, 2000, 2004
2. Taibi Kahler, Ph.D., L’immeuble de personnalité, Séminaire Process Communication Management, Taibi
Kahler Associates, Inc., Little Rock, Arkansas, octobre 1982, 1996

Messager-Livre.indb 80 12/10/12 09:38


Créer un cadre sécurisé
81
Chapitre 7

Exemple de profil
Dans l’exemple de la figure 7-3, la personne a une base Travaillomane et elle est en
phase Empathique. Cela signifie qu’aujourd’hui, elle cherche à satisfaire ses besoins de
reconnaissance de la personne et ses besoins sensoriels, sources de motivation du type
de personnalité Empathique.

Les points forts du type de personnalité


Chaque type de personnalité présente, en outre, trois points forts qui le caractérisent
(© Taibi Kahler3, tableau 7-1).
Tableau 7-1 Les points forts des six types de personnalités

Type de personnalité Points forts


Travaillomane Responsable, Logique, Organisé
Empathique Compatissant, Sensible, Chaleureux
Persévérant Observateur, Dévoué, Consciencieux
Rêveur Imaginatif, Introspectif, Calme
Rebelle Spontané, Créatif, Ludique
Promoteur Adaptable, Charmeur, Plein de ressources

Les besoins psychologiques du type de personnalité


À chaque type de personnalité sont associés des besoins psychologiques (© Taibi Kahler4,
tableau 7-2).
Tableau 7-2 Les besoins psychologiques des six types de personnalités

Type de personnalité
Besoin psychologique
(phase)
Travaillomane Reconnaissance du travail et structuration du temps
Persévérant Reconnaissance du travail et des convictions
Empathique Besoins de reconnaissance en tant que personne, satisfactions sensorielles
Rebelle Contacts
Rêveur Solitude
Promoteur Excitation

Identifier nos propres besoins psychologiques (et ceux de nos interlocuteurs) nous permet
de comprendre ce qui nous (les) motive. C’est d’autant plus important que notre énergie
provient en grande partie de la satisfaction de ces besoins. Cette connaissance nous aide,

3. Taibi Kahler, Ph.D., Manager en personne, Kahler Communication, Inc., Little Rock, Arkansas, 1988,
1992, 2000, 2004
4. Id.

Messager-Livre.indb 81 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
82
Troisième partie

en outre, à anticiper des comportements négatifs, car lorsque ces besoins ne sont pas
satisfaits ou s’ils sont malmenés, nous avons des difficultés à communiquer avec autrui.
Nous aurons l’occasion ultérieurement de présenter les modes de communication asso-
ciés aux types de personnalités (voir le chapitre 8, « Maîtriser des outils et des techniques
de coach »).

Comment utiliser cet outil ?


Attention ! Seuls les coachs accrédités par Kahler Communication France (KCF) sont
habilités à l’utiliser officiellement. En effet, pour obtenir un immeuble de personnalité
(figure 7-3) et un profil complet, un questionnaire rempli par la personne volontaire est
envoyé à KCF. Après traitement, le coach procède à une analyse, puis à une restitution à
la personne, au cours d’un entretien individuel. Je vous invite, si vous êtes intéressé par
l’usage de ce modèle, soit à vous renseigner sur ses modalités d’exploitation auprès de
KCF, soit à vous entourer d’un coach certifié. De nombreux ouvrages ont, par ailleurs, été
publiés sur le sujet (voir bibliographie en annexes).
Pourquoi alors vous le présenter ? Il s’agit de démontrer la valeur ajoutée de la connais-
sance de soi et des autres dans la collaboration au sein d’une équipe, au travers d’un mo-
dèle qui constitue un référentiel commun, une fois partagé par les membres de l’équipe.
Rappelons que l’objectif est de créer un cadre sécurisé. Il serait risqué, voire préjudi-
ciable parfois, d’exploiter le modèle sans précaution aucune : personne ne peut être « éti-
queté » sous tel ou tel profil, et aucun profil n’est meilleur qu’un autre. En outre, nous
sommes des êtres si complexes, que nous avons un profil à six étages, et non un seul type
de personnalité !
Comment l’utilisé-je dans mes missions d’accompagnement ?
• 1re étape : inventaire individuel de personnalité. Chaque membre de l’équipe bénéfi-
cie d’une séance de coaching individuel au cours de laquelle il découvre son profil de
personnalité.
• 2e étape : découverte mutuelle des profils individuels, afin de découvrir le profil de ses
coéquipiers. Je propose un exercice sur la découverte des points forts (liés à la base).

––Parmi la liste affichée des points forts associés aux types de personnalités (ta-
bleau 7-1), chaque membre identifie ceux de chacun de ses coéquipiers pour n’en
retenir qu’un et essayer ainsi de déterminer sa base.

––Un tour de table donne à chaque participant l’opportunité d’envoyer un message posi-
tif à chacun de ses coéquipiers : « Ce que je considère comme point fort chez toi,
c’est... Je m’appuie pour cela sur tel ou tel comportement observé ou tel ressenti. »

Messager-Livre.indb 82 12/10/12 09:38


Créer un cadre sécurisé
83
Chapitre 7

• 3e étape : découverte du profil de l’équipe (figure 7-4). L’équipe découvre son profil
dans son ensemble, avec la proportion de chaque type de personnalité : « Notre équipe
est-elle globalement plutôt de type Empathique ? Plutôt de type Promoteur ? Ce profil
est-il en adéquation avec notre métier ? Quels sont nos points forts ? Quels sont les
points forts à développer ensemble ? Comment s’appuyer sur un type de personnalité
moins représenté globalement, incarné par l’un des membres ? »
Figure 7-4
Exemple
d’un profil
d’équipe

© 2008 Kahler Communication France

Cet atelier ludique offre aux membres de l’équipe un moyen de mieux se découvrir et de
se constituer un référentiel et un langage communs.

Exemples

Dans l’équipe Bêta, Paul a besoin de solitude (type Rêveur) et, par conséquent, s’isole régu-
lièrement pour être au calme ou participe peu activement lors des réunions. Si l’équipe le
comprend, elle ne le prendra pas pour un « autiste », un « timide » ou un « prétentieux ».
Cela vaut tout particulièrement pour Catherine, la scrummaster de la même équipe, qui, elle,
a besoin de contacts (type Rebelle), de travailler dans une ambiance ludique et qui s’ennuie
rapidement.
Comprendre que Patrick, notre scrummaster de l’équipe Alpha, apprécie qu’on le sollicite,
qu’on lui demande systématiquement son point de vue (base Persévérant) et qu’il est ainsi
plus performant, engagera les autres à le solliciter dans toute discussion. Le débat n’en sera
que plus riche.

Messager-Livre.indb 83 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
84
Troisième partie

Bruno, le responsable de l’équipe Gamma ne tient pas en place car il a besoin d’action (base
Promoteur) et il prend (trop) rapidement des décisions. Quand les autres auront compris son
côté fonceur, peut-être pourront-ils en tirer profit dans certains cas !
Comprendre que Sylvie (équipe Gamma), qui, avec un côté agaçant pour certains, veille
au confort de la salle de travail, au bien-être de chacun et ne rate aucune occasion de faire
plaisir aux autres (base Empathique), est le « garde-fou » pour préserver des relations cha-
leureuses et humaines au sein de l’équipe.
Admettre enfin que Jacques (équipe Alpha) est pointilleux sur les délais et rarement satisfait
de lui (base Travaillomane) parce qu’il est exigeant, voire perfectionniste, peut précisément
constituer un point fort pour une équipe projet qui a un planning et des engagements à res-
pecter.

Les chaudoudoux
S’il a lieu au tout début d’un projet, cet atelier crée une confiance minimale pour com-
mencer à travailler ensemble. S’il est organisé après plusieurs mois de collaboration, on
s’aperçoit que l’on ne se connaît pas toujours vraiment et qu’avec le modèle proposé, on
peut mettre des mots sur des situations et des comportements connus. L’objectif n’est pas
tant de deviner la base que de permettre à chacun d’envoyer un « chaudoudou » 5 à ses
coéquipiers. On est parfois agréablement surpris de ce que pensent les autres de soi et ça
fait du bien !

Définition
Les chaudoudoux sont des signes chaleureux et positifs que l’on s’échange. Je fais réfé-
rence au conte de Claude Steiner, psychologue, dans lequel les habitants d’un village
sont heureux parce qu’ils s’échangent des chaudoudoux sans compter. Les chaudou-
doux procurent des sensations douces et chaleureuses.

Travailler sur les points forts des individus qui forment un groupe stimule l’énergie posi-
tive. Chacun prend conscience des ressources de ses coéquipiers et des atouts de l’équipe.
Cette prise de conscience renforce l’esprit d’équipe et la solidarité et constitue un socle
pour construire des relations de confiance.

Un cadre où l’on a confiance


La connaissance de soi et des autres est la première brique pour bâtir des relations de
confiance. Nous avons vu les effets négatifs de l’absence de confiance sur le bien-être,
la collaboration et, au final, sur la performance de l’équipe. Par conséquent, en tant que
responsable et protecteur du cadre, le coach ou le scrummaster s’attache à créer et à
maintenir un climat de confiance.

5. Claude Steiner, Le conte chaud et doux des chaudoudoux, InterEditions, 1984, 2004

Messager-Livre.indb 84 12/10/12 09:38


Créer un cadre sécurisé
85
Chapitre 7

Cependant, la confiance ne se décrète pas et elle n’est pas permanente ; elle nécessite du
temps pour se développer et se consolider, puis elle s’entretient. C’est au fil du projet, pro-
gressivement, qu’une relation de confiance peut s’instaurer entre la personne ou l’équipe
coachée et le coach lui-même.
Indispensable, cette confiance donne une légitimité au coach pour créer, ensuite, les
conditions d’une plus grande confiance entre les membres de l’équipe, entre l’équipe et
le scrummaster, et entre l’équipe et ses différents interlocuteurs, product owner compris.
Un enjeu majeur réside donc dans ce premier niveau de confiance, qui doit être institué
pour que chacun puisse exercer ses pleines capacités et pour que l’équipe s’appuie sur ce
socle pour se construire.

Comment créer la confiance ?


La confiance se construit à différents niveaux : celui de l’organisation, celui du manage-
ment intermédiaire, celui des équipes et celui des personnes.
Le coach qui accompagne une organisation dans sa transformation agile intervient sur
les leviers de haut niveau. En effet, plus l’organisation met en œuvre des principes d’ou-
verture, de transparence, d’autonomie et de délégation, plus les managers intermédiaires,
leurs équipes et les personnes sont susceptibles d’être « en confiance ».
Le coach, en tant que relais, intervient également dans la déclinaison de ces principes
aux niveaux opérationnel et personnel.
Par conséquent, le rôle du coach est avant tout de développer un climat positif où chacun
est animé d’un esprit constructif. Le contrat d’alliance qui le lie à son coaché (personne
ou équipe) offre à celui-ci un environnement « contenant » et rassurant où il va pouvoir
s’ouvrir sans risque. C’est l’axe Protecteur, du triangle des 3 P (figure 4-4).

Développer un état d’esprit positif

La confiance, au sein de l’équipe, et donc la qualité des relations dépendent, entre autres,
de l’image que chacun se fait de lui-même et de la considération qu’il porte aux autres.
La grille de lecture offerte par les « positions de vie », concept de l’analyse transaction-
nelle6, nous permet de décoder nombre de nos comportements (figure 7-5).
L’axe vertical représente l’estime de soi ou l’état circonstanciel dans lequel on se trouve
(je suis « OK » ou je suis « Non OK ») ; l’axe horizontal matérialise la considération
portée à l’autre (il est « OK » ou « Non OK », selon moi).

6. L’Analyse transactionnelle est un ensemble de techniques d’analyse de la personnalité et de la commu-


nication.

Messager-Livre.indb 85 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
86
Troisième partie

Figure 7-5 Je suis +


Les positions OK
de vie Je me
survalorise, Je m’accepte,
je dévalorise j’accepte les
les autres autres

Domination Coopération
L’autre est – L’autre est +
Non OK OK
Retrait Dévalorisation

Je suis nul, les Je me dévalorise,


autres sont nuls : les autres sont
il n’y a rien à meilleurs que moi
faire
Je suis –
Non OK

Source : Éric Berne, l’Analyse transactionnelle

Exemples

Je peux être énervé après avoir passé deux heures dans les embouteillages (Non OK) ; je
peux régulièrement douter de moi et me sentir souvent maladroit (Non OK) ; je peux globale-
ment me sentir « bien dans mes baskets » (OK), je peux aussi me considérer (inconsciem-
ment) supérieur aux autres (OK). Je peux détester celui-ci pour je ne sais quelle raison (Non
OK), comme je peux être naturellement bien, en phase avec un autre (OK) ; je peux aussi être
mal à l’aise avec l’un (Non OK) et en connivence avec un autre (OK)…

• La position +/+ (OK/OK) : je me respecte et je respecte l’autre, j’accepte l’autre tel


qu’il est, y compris avec ses travers. J’ai conscience de ma valeur et de la sienne : nous
sommes égaux. Cela implique que je considère ce que l’autre me dit, que je lui parle
d’une manière adulte, que j’envisage notre rapport sous l’angle de la coopération et du
partage, même si nous ne sommes pas d’accord et si nous ne nous apprécions pas.

Exemple

Deux développeurs travaillent ensemble à la conception et au développement d’un com-


posant. Chacun apporte son point de vue. Les échanges sont fructueux. On n’observe ni
compétition, ni condescendance entre eux, même si nous sommes en présence d’un junior
et d’un senior.

• La position -/+ (Non OK/OK) : c’est une position qui se traduit par une dévalorisation de
soi. Les autres sont beaucoup mieux que moi, ils y arrivent mieux, « Ils sont heureux et je
ne le serai jamais... », « Je ne vaux pas grand-chose, n’importe qui vaut plus que moi »...

Messager-Livre.indb 86 12/10/12 09:38


Créer un cadre sécurisé
87
Chapitre 7

Exemple

Le développeur junior appréhende de devoir programmer en binôme avec le développeur


senior (« Je suis nul » ou « Il va penser que je suis nul », « Je suis sûr que je ne vais rien
pouvoir produire »).

• La position +/- (OK/Non OK) : je pense que je vaux mieux que l’autre. Cela se mani-
feste de deux façons différentes : soit j’envisage l’autre de manière condescendante :
« Mon pauvre, tu n’es pas capable d’y arriver ; laisse, je vais le faire », soit je l’envi-
sage d’une manière hautaine, voire agressive « T’es trop nul, t’es un incapable, pousse-
toi de là que je le fasse » ou « T’es trop nul, fais comme je te dis et pas autrement ».
C’est une position de dévalorisation de l’autre ou de domination, d’arrogance vis-à-vis
de l’autre.

Exemple

Le développeur senior s’est vu contraint de travailler en binôme avec le jeune développeur


qui vient d’intégrer l’équipe (« Encore une demi-journée de perdue ! Je vais devoir tout lui
expliquer, car il y a des chances pour qu’il ne comprenne rien »).

• La position -/- (Non OK/Non OK) : « Je ne vaux rien et vous non plus », j’ai une
image négative de moi-même et du monde. Il n’y a plus rien à faire, je subis.

Exemple

L’un des deux développeurs considère que cette proposition de travailler en binôme ne sert
à rien (« De toute façon, le projet est en train de capoter, l’équipe est médiocre, le client est
insupportable ; je préférerais qu’on me laisse tranquille à me dépatouiller avec mon code
plein de bogues… »).

Au quotidien, le coach s’assure de la bienveillance des échanges au sein de l’équipe, lors


des cérémonies par exemple. Il permet à chacun une prise de conscience de son état
d’esprit et facilite la progression vers l’état +/+. Il entretient l’esprit « +/+ », l’expression
devenue un langage commun au sein de l’équipe pour construire la confiance.

Exemple

Membre de l’équipe : « Il est vraiment nul, Philippe ; à cause de lui, on n’a pas pu livrer. »
Coach : « Peux-tu nous dire la même chose en +/+ ? »
Membre de l’équipe : « OK. Philippe a eu un problème ; il a été retardé, du coup on n’a pas
pu livrer. Comment peut-on éviter ça lors du sprint suivant ? »

Messager-Livre.indb 87 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
88
Troisième partie

La pression quotidienne, les tensions, le stress, la peur… sont autant de facteurs pouvant
dégrader le climat +/+. La réalité nous montre en effet que nous pouvons facilement tom-
ber dans le -/+ ou le +/- dans certaines situations.

Comment utiliser cet outil ?


Le premier objectif est de faire prendre conscience à chacun que la communication ne peut
être efficace que lorsque les interlocuteurs sont en position +/+ : faire découvrir le modèle à
l’équipe, puis s’appuyer sur des échanges réels et attirer l’attention des acteurs sur la forme
de leurs échanges. (Voir aussi le paragraphe suivant sur la métacommunication.)
Ensuite, si vous souhaitez « ramener » une personne en position +/+ :
• Si elle est en position -/+, lui donner des signes de reconnaissance, par exemple l’encou-
rager et la féliciter.
• Si elle est en position +/-, souvent la personne se protège et affiche un masque qui cache
un manque d’estime de soi et/ou une peur des autres. Là encore, valoriser sa contribution.
Vous le constaterez à l’usage, c’est un outil que les membres d’une équipe s’approprient
facilement et qu’ils utilisent même de façon légère : « Fabrice, arrête de nous faire ton
-/+, là ! ».
Le coach s’attache donc à préserver le climat positif et la qualité des relations (cadre rela-
tionnel). Il sensibilise l’équipe aux bénéfices de la « métacommunication ».

Apprendre à métacommuniquer
La métacommunication est l’une des conditions pour entretenir de bonnes relations au
sein de l’équipe : il s’agit de la capacité à échanger sur sa façon de communiquer (forme),
indépendamment du sujet (fond).
Les interlocuteurs sortent du dialogue, prennent alors de la hauteur (comme s’ils étaient
devenus spectateurs de la scène) et conscience de leurs comportements : ils s’attachent,
dans ce cas, davantage à la relation établie entre eux plus qu’au contenu. Ils sont parties
prenantes de leurs interactions.

Exemple : un débat animé

Lors d’un sprint planning meeting, deux coéquipiers ont un débat animé sur l’estimation de la
complexité d’une user story :
« N’importe quoi, c’est simple à développer. Comment peux-tu savoir, toi qui débutes sur
cette technologie ? » (position +/-)
« Je te dis que c’est complexe, puisque j’ai déjà eu un cas similaire sur un autre projet… »
(position +/+ ou -/+)

Messager-Livre.indb 88 12/10/12 09:38


Créer un cadre sécurisé
89
Chapitre 7

« Arrête, je te dis que tu ne peux pas estimer ça ! » (position +/-)


Dans cet échange sans fin, l’un des protagonistes finit par réaliser que la discussion est
stérile :
« Je crois que nous n’arriverons pas à nous mettre d’accord et que le ton de notre conversa-
tion est en train de se dégrader » (position +/+)

Cette métacommunication peut être déclenchée par l’un des acteurs de la conversation
(qui se sent agressé, par exemple, et qui le fait savoir à l’autre) ou bien par un tiers, scrum-
master, coéquipier ou encore le coach en situation. Il s’agit d’avoir le courage de dire que
quelque chose ne va pas dans la qualité de l’échange en cours. Cette aptitude à métacom-
muniquer évite la détérioration de la communication et prévient de nombreux conflits.
Elle permet, de plus, de revenir à un climat +/+, favorisant la coopération.

Comment utiliser cet outil ?


Vous pouvez, par exemple, à l’issue d’une cérémonie, prévoir cinq à dix minutes pour
discuter, non pas des résultats de la réunion, mais de la qualité des échanges.
Vous pouvez inviter les participants à s’interroger sur :
• la qualité des échanges : passionnés ? Ouverts ? Agressifs ?
• la capacité à s’excuser auprès des autres ;
• la capacité à reconnaître ses points faibles ou ses erreurs ;
• l’efficacité de la réunion (objectif atteint, durées respectées, intérêt ou ennui ?).
Ce peut être aussi un axe de discussion lors d’une rétrospective pour analyser la qualité
des échanges en général au sein de l’équipe.
Vous observerez peut-être quelques réticences au début, puis avec l’habitude, certains
se lanceront. Ne baissez pas les bras, proposez toujours ce moment privilégié d’échange.
☞ Voir aussi le chapitre 12, « Régulation et normalisation ».
Le niveau de confiance est le baromètre de la santé de l’équipe !

Quels sont les bienfaits de la confiance ?


Dans un climat favorable et protégé, on crée un cercle vertueux : plus la confiance est
grande, plus les personnes ont une capacité à s’ouvrir et à être authentiques. Cette authen-
ticité favorise la transparence, condition pour une collaboration efficace. Si cette dernière
conduit au succès du projet, chacun ressent de la fierté, ce qui augmente l’estime de soi,
la confiance en soi et la confiance dans les autres (figure 7-6).

Messager-Livre.indb 89 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
90
Troisième partie

Grâce à la confiance, les membres de l’équipe repoussent leurs limites et découvrent de


nouvelles possibilités.
Grâce à cette confiance, on peut :
• reconnaître une difficulté, une faiblesse, une fragilité, sans qu’il y ait une exploitation
malveillante par les autres ;
• ne pas hésiter à exprimer son soutien ou son désaccord pour une décision ;
• partager les informations, sans compétition individualiste ;
• ne pas mal interpréter les intentions des autres en projetant les nôtres sur leur conduite ;
• demander ou proposer de l’aide, accepter les retours de l’autre et la confrontation posi-
tive, résoudre les conflits ;
• se tromper et apprendre de ses erreurs ;
• rappeler, si besoin, les règles applicables par chacun, afin de préserver le cadre rela-
tionnel ;
• avoir plaisir à travailler dans ce cadre.

Figure 7-6
Le cercle vertueux
de la confiance
Confiance

Fierté
Ouverture
Estime de
Authenticité
soi

Collaboration
Résultats
Efficacité

Cette confiance est à créer en premier lieu entre l’équipe et le coach. Elle participe du
cadre, de cette « enveloppe culturelle minimale » dont il est responsable.

Messager-Livre.indb 90 12/10/12 09:38


Créer un cadre sécurisé
91
Chapitre 7

Les cadres d’intervention du scrummaster


Arrêtons-nous un instant sur le rôle du scrummaster, en tant que responsable du proces-
sus et du cadre.
Quel est le cadre sur lequel il intervient ? Comme nous l’indique la figure 7-7, le scrum-
master doit veiller à la sécurité de plusieurs niveaux de cadre.

Figure 7-7
Les cadres 2. Cadre relationnel
d’intervention
du scrummaster
Vision 1. Cadre organisationnel et
PO Produit méthodologique
Organisation

Équipe Produit
Vision
Équipe
3. Interfaces

Une équipe agile a un produit à délivrer, en conformité avec la vision qu’en a le product
owner. Pour délivrer ce produit, s’il a été décidé d’utiliser la méthode Scrum, le scrum-
master est garant de la bonne application de la méthode. À ce titre, il est responsable du
cadre organisationnel et méthodologique (1).
Le scrummaster est au service de l’équipe de développement.
En tant qu’équipe de réalisation auto-organisée, elle est souveraine pour élaborer sa vi-
sion d’équipe et construire son identité, définir son organisation et ses règles de fonction-
nement, et procéder à des choix tactiques pour déterminer son processus de fabrication :
dans ce contexte, le scrummaster est, pour sa part, responsable du cadre relationnel (2)
qui permet à l’équipe d’atteindre ses objectifs. Il lève les obstacles qui pourraient l’entra-
ver et anime, si nécessaire, les cérémonies agiles pour faciliter le travail de l’équipe.
Il est également l’interface (3) entre l’équipe et le product owner (et l’organisation dans
son ensemble) en veillant à la qualité et l’efficacité des interactions.
Le scrummaster n’intervient donc pas sur le contenu des échanges, mais bien sur le pro-
cessus et le cadre dans lequel les interactions ont lieu.

Messager-Livre.indb 91 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
92
Troisième partie

Ce que nous avons appris


• Nous avons vu que le changement doit être initié dans un espace sécurisé. À cet égard,
le coach est responsable du cadre dans lequel évoluent les acteurs d’une équipe agile, et
en particulier du cadre relationnel.
• Ce cadre relationnel fait une large place à la dimension humaine des projets, permet-
tant aux membres de l’équipe de mieux se connaître et de mieux communiquer.
• Nous avons découvert, grâce à l’éclairage donné par l’outil Process Com, que les points
forts et les besoins psychologiques des différents types de personnalités nous permet-
taient de décoder certains comportements.
• Cette meilleure connaissance de soi et des autres constitue un socle pour bâtir des rela-
tions authentiques et instaurer un état d’esprit positif (position de vie +/+).
• La confiance, facilitée par le coach, a de nombreux bienfaits en termes de bien-être,
d’estime de soi et de performance.
• Nous avons vu, enfin, que le rôle du scrummaster s’approche de celui d’un coach, dans
le sens où il est responsable du cadre dans lequel une équipe agile et ses interlocuteurs
interviennent et interagissent.

Outils du coach proposés

• Le modèle de la Process Communication


• Les positions de vie
• La métacommunication

Découvrons, à présent, les techniques et les outils du coach.

Messager-Livre.indb 92 12/10/12 09:38


8
Maîtriser des outils
et des techniques de coach

L’homme a découvert les outils de façon successive.


Mais depuis les temps les plus reculés,
l’homme a toujours été un outil pour l’homme.
Stanislaw Jerzy Lec, écrivain polonais

Le coach a une fonction miroir qui aide le coaché à prendre conscience de la nécessité de
changer. Avec une position basse, il amène celui-ci à élaborer une solution. Enfin, avec
la casquette de facilitateur, il permet de passer de l’intention à l’action et d’enclencher
le changement. Toutes ces fonctions interviennent dans un cadre relationnel dont il est
responsable.
Pour adopter cette posture, le coach s’appuie sur des outils. Le premier d’entre eux, c’est
lui-même, puisqu’il crée une relation avec la personne ou l’équipe coachée. Les autres
outils sont essentiellement fondés sur l’écoute.

Précision
Chaque coach a sa personnalité et ses propres outils. Dans ce chapitre, nous allons
présenter les outils de base de tout coach, indépendamment de son bagage, et tout à fait
utilisables par un leader d’équipe.

Messager-Livre.indb 93 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
94
Troisième partie

La synchronisation ou « check-in »
Si le principal outil du coach, c’est lui-même, alors il doit être totalement présent et dis-
ponible. La synchronisation permet de se rendre totalement disponible pour son coaché.

Pourquoi se synchroniser ?
En premier lieu, la synchronisation a pour objectif de créer un « sas de décompression »
entre ce que chacun des protagonistes vient de vivre et le moment qu’il s’apprête à parta-
ger. Une rencontre entre un coach et son (ses) coaché(s) demande de la concentration, de
l’écoute, de la sérénité, autrement dit, une disponibilité totale.
Rappelons qu’en tant que responsable du cadre, le coach crée cet espace sécurisé, favo-
risant la prise de contact.

Comment utiliser cet outil ?


De façon très simple, lorsque vous démarrez un entretien individuel ou une cérémonie,
demandez à votre (vos) interlocuteur(s) comment il(s) se sent(ent), quelle est sa (leur)
« météo du jour » ; proposez-lui (leur) de dire ce qu’il(s) a (ont) envie de dire, dans le but
de libérer la parole.
Attention ! Pas de commentaire et n’entamez pas de discussion durant cette pratique de
la synchronisation.
☞ Voir aussi le chapitre 21, « En tant que scrummaster, je veux apprendre à animer les
cérémonies agiles ».

Ensuite, il s’agit de se mettre au diapason de l’autre, de se connecter sur la même longueur


d’onde. L’outil Process Com nous donne un éclairage sur nos modes de communication.

L’éclairage de la Process Communication


Dans le modèle Process Com, on considère qu’il y a communication efficace lorsque
l’offre et la réception se font sur le même canal.
Les canaux de communication
Cinq canaux sont identifiés, par rapport aux types de personnalités (tableau 8-1).

• Le canal interruptif : il est utilisé lorsqu’une personne vit une émotion avec difficulté
ou pour interrompre une situation de mécommunication. Celui qui émet cette offre
invite à se calmer, à se détendre, par exemple.
« Calmez-vous. Respirez profondément. Regardez-moi. »

Messager-Livre.indb 94 12/10/12 09:38


Maîtriser des outils et des techniques de coach
95
Chapitre 8

• Le canal directif : il est utilisé pour donner un ordre sur un mode impératif.
« Travaillez en binôme, tous les deux ; vous saurez trouver la solution. »

• Le canal interrogatif/informatif : c’est le canal de l’échange d’informations.


« Avez-vous une idée de la solution que l’on pourrait déployer ? »

• Le canal nourricier : il exprime de la chaleur humaine, de la compassion, de la com-


préhension.
« Je suis à ta disposition, si tu en as besoin. N’hésite surtout pas. »

• Le canal ludique/émotif : il est utilisé pour exprimer des émotions, des envies, de
l’enthousiasme.
« Ça vous tente ? Génial, non ? »
« Quelle horreur ! »
« Cool ! »

À chaque type de personnalité est associé un canal de communication préférentiel1.


Tableau 8-1 Types de personnalités et canaux de communication2

Type de personnalité (base) Émission Réception


Empathique Nourricier Nourricier
Travaillomane Interrogatif/Informatif Interrogatif/Informatif
Promoteur Directif Directif
Persévérant Interrogatif/Informatif Interrogatif/Informatif
Rêveur Interrogatif/Informatif Directif
Rebelle Ludique/Émotif Ludique/Émotif

Comment utiliser cet outil ?


Essayez de repérer le type de personnalité dominant (la base) de votre interlocuteur et
faites quelques tentatives en utilisant le bon canal pour vous adresser à lui.
Si le canal choisi est le bon, votre interlocuteur entrera efficacement en relation avec
vous. Si vous sentez un décalage dans l’échange, si vous n’obtenez pas de réponse ou si
vous détectez une incompréhension de sa part, c’est que vous n’êtes pas sur le bon canal.
Essayez-en un autre.

1. Taibi Kahler, Ph.D., Séminaire Process Communication Management, Taibi Kahler Associates Inc., Little
Rock, Arkansas, octobre 1982, 1996
2. Taibi Kahler, op. cit.

Messager-Livre.indb 95 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
96
Troisième partie

Exemples

Voici quelques exemples illustrant l’aide précieuse de cet outil pour se mettre sur la même
longueur d’ondes.
Détecter que le responsable de l’équipe Gamma, Bruno, a probablement une base Promo-
teur me fera gagner du temps, car j’aborderai directement la situation sous l’angle des pro-
blèmes qu’il rencontre dans la mise en œuvre de ses actions. En effet, tout ce qui le freine
pour progresser est problématique : « Racontez-moi, décrivez-moi, dites-moi, allons droit au
but… » (canal directif).
Repérer, dans l’équipe Bêta, qu’une bonne partie des ingénieurs est vraisemblablement de
base Rêveur, m’aide à comprendre leur individualisme apparent ; ils aiment travailler seuls.
Je sais d’emblée que si je suis amenée à accompagner cette équipe, je pourrai obtenir des
informations sur leur mode de fonctionnement, sans les brusquer, mais en étant ferme et
précise : « Décrivez-moi la façon dont vous êtes organisés. Expliquez-moi comment se dé-
roulent vos réunions quotidiennes… » (canal directif). Je sais que si nous devons apporter
des changements avec la scrummaster, Catherine, celle-ci devra utiliser un canal directif
pour fixer, avec les ingénieurs, les objectifs et les échéances : « Analysons le périmètre défini
par le product owner, ce matin, et estimons la complexité cet après-midi. »
En revanche, avec Catherine, j’utiliserai un ton moins sérieux, avec un vocabulaire plus ima-
gé, et sans doute me permettrai-je quelques plaisanteries légères.
Comprendre enfin qu’au sein de l’équipe Gamma, certains, de base Empathique, ont besoin
d’être avant tout rassurés, me conduit à utiliser mon canal nourricier : « Je suis très sensible
à ce que vous exprimez ; je suis là pour vous aider. »

Nous verrons, dans les deux parties suivantes, que cet outil est d’une réelle puissance
pour améliorer la communication entre les différents acteurs eux-mêmes.
Nous avons vu ce qu’est la synchronisation des canaux de communication. Elle peut
également s’accompagner d’une synchronisation physique, verbale et sémantique : on ne
dialogue pas avec une personne debout, l’autre assise, l’une chuchotant, l’autre hurlant.

La synchronisation verbale3
La synchronisation verbale consiste à repérer, par exemple, les mots utilisés par son
interlocuteur. En Programmation neuro-linguistique3 (PNL), notre perception du monde
extérieur est synthétisée au travers de l’acronyme VAKOG, en relation avec nos cinq
sens :
• V pour Visuel : la personne qui utilise ce canal de perception a un vocabulaire lié à
la vision : « Je vois… », « ma vision des choses », « j’ai observé que… », « en un clin
d’œil… », etc.

3. La Programmation neuro-linguistique ou PNL est une technique de psychologie appliquée.

Messager-Livre.indb 96 12/10/12 09:38


Maîtriser des outils et des techniques de coach
97
Chapitre 8

• A pour Auditif : la personne qui utilise ce canal a un vocabulaire lié au son : « Ça me


parle », « ça sonne bien », « bien entendu », « c’est criant de vérité », etc.
• K pour Kinesthésique : la personne qui privilégie le canal kinesthésique utilise des
expressions telles que « garder les pieds sur terre », « se prendre la tête », « ça me
touche beaucoup », etc.
• O pour Olfactif et G pour Gustatif : la personne qui utilise ces canaux privilégie les
expressions telles que « elle n’est pas en odeur de sainteté », « ça sent le roussi », « ça
a le goût de la fin », etc.

Comment utiliser cet outil ?


Utiliser le même canal sensoriel que votre interlocuteur améliorera grandement la qualité
de votre échange. Soyez à l’écoute des mots qu’il utilise et observez son attitude.
• Une personne dont le canal est Visuel est souvent physionomiste, se tient droite, re-
garde son interlocuteur, aime les descriptions…
• Une personne dont le canal est Auditif reconnaît les gens à la voix, est souvent décon-
tractée, ne regarde pas son interlocuteur, aime les dialogues, fredonne…
• Une personne dont le canal est Kinesthésique exprime des sentiments, a un rythme
lent avec des pauses, apprécie la proximité avec son interlocuteur, l’action et le mou-
vement…
Vous pouvez également, a contrario, lui proposer un autre canal, ce qui lui offre l’oc-
casion de percevoir le monde différemment et d’avoir une autre représentation ou une
analyse différente d’une situation : par exemple, demander à une personne de type A
(Auditif) de décrire ce qu’elle a vu, concrètement.
D’autres techniques de synchronisation seront présentées en situation dans les deux par-
ties suivantes.

L’empathie
Chacun a sa propre vision du monde. Si vous demandez à plusieurs personnes de vous
décrire le paysage qu’elles ont sous leurs yeux, chacun ira de son détail, qui de sa descrip-
tion… Nous voyons et analysons, nous filtrons le monde en fonction de qui nous sommes,
de nos valeurs, de notre passé, de notre ressenti.

Discrimination visuelle
Observez l’image de Boring (figure 8-1, page suivante). Que voyez-vous ? Une jeune
femme au profil gracieux ou bien une vieille dame au nez crochu ? Cette image illustre

Messager-Livre.indb 97 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
98
Troisième partie

notre facilité à voir et notre difficulté à changer de point de vue. Même en ayant changé
de vision, la réversibilité est souvent difficile !

Figure 8-1
L’image
de Boring :
que voyez-vous ?

La prise en compte de visions différentes est souvent complexe. Inconsciemment, il nous


arrive même de rejeter la vision des autres, voire de la juger mauvaise. C’est ce qui
conduit généralement aux incompréhensions et parfois aux conflits.

Exemple

Bruno, responsable de l’équipe Gamma : « Je ne comprends pas ce qui peut les freiner tous
à aller vers l’agilité ; c’est pourtant un superbe défi que je leur propose… »
Coach : « Comment leur avez-vous présenté le projet ? Sur quels constats avez-vous justifié
votre réflexion de changer de méthode de développement ? Combien de temps avez-vous
passé avec eux pour le leur expliquer ? »
Dans ce cas, Bruno va, peu à peu, prendre conscience que tout le monde n’avance pas au
même rythme (surtout le sien !) et qu’avant de s’engager, contrairement à lui qui passe faci-
lement à l’action et qui aime les challenges, d’autres ont besoin d’informations, de réflexion,
d’analyses avant d’agir.

Faire preuve d’empathie, c’est « chausser les lunettes de l’autre » pour voir le monde
comme il le voit : c’est se déplacer dans son monde et partager sa vision.

Comment utiliser cet outil ?


• Démontrez votre empathie en restant centré sur votre interlocuteur, en étant à l’écoute
de ses ressentis.
• Faites abstraction, autant que possible, de votre propre point de vue, pour comprendre
comment il voit les choses. Faites comme si vous ne saviez rien !
• Essayez de le comprendre au travers de ses mots, de ses ressentis, de ses comporte-
ments ou de ses analyses. Écoutez avec vos oreilles et vos yeux !

Messager-Livre.indb 98 12/10/12 09:38


Maîtriser des outils et des techniques de coach
99
Chapitre 8

Faire preuve d’empathie, c’est ne pas projeter notre propre vision sur une situation don-
née. C’est ne pas prêter à l’autre des raisonnements qu’il n’a pas. C’est ne pas juger l’autre.
C’est accepter la différence de système de représentation.

Exemple

Développeur de l’équipe Alpha : « Pourquoi nous demande-t-on des estimations ? C’est bien
le rôle du chef de projet, non ? »
Attitude non empathique : « Eh bien, non, dans une démarche agile, c’est aux développeurs
de donner ces estimations ; je vais vous expliquer le principe d’un planning game. »
Attitude empathique : « Qu’est-ce qui vous gêne, précisément, dans le fait de donner des
estimations ? » ou « Et si demain, c’est vous qui donnez ces estimations, que se passe t-il ? »
ou bien « Que vous manque-t-il pour pouvoir donner ces estimations ? »
Dans la première attitude, le postulat est que le développeur n’a pas compris ; on va lui expli-
quer (position haute). Dans la seconde attitude, on cherche à comprendre ce qui se cache
derrière cette interrogation de l’ingénieur : mauvaise compréhension ? Manque de moyens ?
Peur de la sanction, s’il se trompe ? Peur de ne pas savoir ? Perte totale de repères ?
Une attitude empathique permet à l’autre de (mieux) s’exprimer.

L’empathie est la condition première pour être en position basse. Le consultant « sachant »,
attendu par le client pour son expertise, court le risque d’avoir plus facilement tendance à
tirer des conclusions hâtives, en plaquant un modèle déjà expérimenté chez un autre client.

Exemple : déterminer le rythme d’une itération

Consultant : « Je pense que, dans votre contexte, compte tenu de ce que vous m’avez pré-
senté et que je comprends parfaitement, une durée de deux semaines pour les itérations
serait un bon rythme. Qu’en pensez-vous ? »
Coach : « Quel rythme avez-vous déterminé pour la durée d’une itération ? (réponse : deux
semaines) Bien. Quels en sont les avantages par rapport à une durée de trois semaines ?
Quels risques avez-vous identifiés ? »

Vincent Lenhardt et Philippe Bernard4 précisent qu’en tant que coachs, nous devons
pratiquer « l’ascèse permanente, qui consiste à prendre constamment ce recul ». Cela
suppose que le coach s’impose une discipline et qu’il renonce à son propre cadre de réfé-
rence. Grâce à son empathie, il aide l’autre à lui communiquer le sien.
Cette prise de recul est possible grâce à l’écoute active. Elle permet au coach non seu-
lement de comprendre la réalité du coaché, mais aussi d’obtenir de sa part davantage
d’écoute puisqu’il aura lui-même déjà été écouté. Avec confiance, ses défenses éven-
tuelles seront limitées.

4. Vincent Lenhardt et Philippe Bernard, L’intelligence collective en action, Pearson, 2e édition, 2009

Messager-Livre.indb 99 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
100
Troisième partie

L’écoute active
Nombreuses sont nos attitudes « écoutricides »5, celles qui démontrent que nous n’écou-
tons pas vraiment, que nous sommes déjà dans le jugement, l’évaluation, l’interprétation
ou la recherche d’une réponse.

Exemples : attitudes démontrant le manque d’écoute

« Cela n’a rien à voir avec le sujet. »


« La question n’est pas là. »
« Vous n’avez pas bien compris. »
« C’est une bonne idée, mais… »
« J’ai vécu cette situation et je peux vous dire que… »
« Excusez-moi de vous couper la parole... »
« Si j’étais vous… »

J’aimerais, à titre d’illustration, faire référence à un poème de Virginia Satir, psychothé-


rapeute américaine :
« Lorsque je te demande de m’écouter et que tu me donnes des conseils,
tu ne fais pas ce que je t’ai demandé.
Lorsque je te demande de m’écouter
et que tu me dis que je ne devrais pas me sentir ainsi,
tu piétines mes sentiments.
Lorsque je te demande de m’écouter
et que tu crois que tu dois faire quelque chose pour résoudre mon problème,
tu me brimes, aussi étrange que cela puisse te paraître.
Écoute ! Tout ce que je te demande, c’est de m’écouter.
Pas de parler ou de faire, ou juste m’entendre.
Les conseils, je n’en ai que faire. Je peux accomplir mes choses ; je ne suis pas
sans ressources ; peut-être suis-je découragé ou hésitant, mais je ne suis pas
impuissant. Lorsque tu fais quelque chose à ma place et que je peux
l’accomplir moi-même, tu contribues à ma peur et à ma faiblesse.
Mais lorsque tu acceptes, comme un simple fait, que je sente ce que je sens,
aussi irrationnel que ce soit, alors je peux cesser de vouloir te convaincre et
travailler à comprendre ce qui se passe en moi.
Et si un jour, tu désires parler, “je” t’écouterai à mon tour. »

5. Yves Blanc, Le Manager à l’écoute, Dunod, 2003, 2005

Messager-Livre.indb 100 12/10/12 09:38


Maîtriser des outils et des techniques de coach
101
Chapitre 8

La position basse du coach, qui accepte de ne plus être un « sachant » pour l’autre, favo-
rise cette écoute active. Débarrassé de cette envie pressante de montrer qu’il sait, qu’il a
une solution ou qu’il a une opinion, le coach est totalement centré sur le coaché et il est à
son écoute. Ainsi, il peut s’intéresser à ce qui est exprimé, explicitement ou non, avec les
mots et avec le corps, ce qu’on appelle la communication non verbale.
On distingue le langage paraverbal (ton, rythme) du langage non verbal ou corporel (mi-
mique, tremblement, haussement d’épaule, moue...). Un message émis passe à hauteur de
7 % par le langage verbal, de 38 % par le paraverbal et de 55 % par le corporel. Ce mode
de communication peut représenter une part importante comparé à la communication
verbale et en dit souvent plus long que de longs discours !
En position basse, le coach peut écouter et observer ; il peut rebondir sur le choix de tel
ou tel mot, grâce à sa technique de questionnement.

La reformulation
La reformulation s’avère également un outil efficace de communication et d’écoute active.
Reformuler n’est pas répéter ce que l’autre a dit ; il s’agit de valider que l’on s’est bien
compris. La reformulation améliore l’écoute, met parfois en valeur ce qui vient d’être dit,
permet de nuancer un propos, de relever subtilement un excès de langage. La reformula-
tion a un effet miroir, puisque le coaché s’entend répéter ce qu’il vient d’exprimer.
Reformuler, c’est commencer sa phrase par « Si j’ai bien compris… », « En d’autres
termes… », « Pour résumer… ».
Attention aux pièges du langage (tableau 8-2, page suivante) ! Une écoute passive laisse
passer des informations précieuses.
« Sachez écouter. Malheur à celui qui, sans la ramasser, laisse tomber une parole d’or
de la bouche d’autrui. »
(Jules Renard)
Une écoute active rebondit sur les mots, relance les idées. Elle permet de repérer les im-
précisions dans ce qui est exprimé (les omissions, les généralisations et les suppositions)
et ainsi d’éviter les incompréhensions, sources fréquentes de mauvaise communication.

Messager-Livre.indb 101 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
102
Troisième partie

Tableau 8-2 Les pièges du langage6

Objectifs Questionnement
Imprécisions Exemples
visés possible

Équipe Gamma :
« Qu’entendez-vous par
« Je doute de la coopéra-
Nom imprécis Expliciter coopération ? Pourquoi
tion au sein de cette
doutez-vous ? »
équipe. »
Équipe Alpha :
Verbes non
« On est contrôlé tous les Préciser « Contrôlés, dites-vous ? »
Omissions spécifiques
jours. »

Retrouver la
Équipe Alpha : « Pourquoi ? Au nom de
cause
Règles « C’est au chef de projet quelle règle ? Qui en a
Préciser la
d’assumer ! » décidé ainsi ? »
conséquence

Équipe Gamma :
« Jamais ? Pourquoi ? Et si
Adverbes « Chez nous, ça ne Relativiser
ça marchait un jour ? »
marchera jamais ! »

Généralisa- Équipe Alpha :


Mots et pro- Trouver la « Qui précisément vous de-
« On vous demande des
tions noms indéfinis référence mande ces estimations ? »
estimations ! »

Affirmations Équipe Bêta :


Spécifier « Que voulez-vous dire ? »
péremptoires « Chacun son domaine ! »

« Une mode ? Est-ce nou-


Équipe Gamma : Retrouver veau ? Quelles informations
Cause-effet « Une nouvelle mode, ces la relation avez-vous sur le sujet ?
méthodes agiles ! » cause-effet Qu’en pensent vos col-
lègues ? »

Équipe Gamma :
Suppositions Lecture de Retrouver « Qu’est-ce qui vous fait
« Je doute de la coopéra-
l’origine de dire ça ? Pourquoi en
pensée tion au sein de cette
l’information doutez-vous ? »
équipe ! »

Équipe Bêta : « Sur quoi fondez-vous


Clarifier et
Présupposition « Je développe plus vite cette affirmation ? Avez-
spécifier
tout seul ! » vous essayé en binôme ? »

L’art du questionnement
Dans son ouvrage sur l’écoute, Yves Blanc nous interpelle sur l’évolution de notre ques-
tionnement au fil du temps : « Pourquoi les enfants posent-ils des questions ouvertes ?
Parce qu’ils veulent tout savoir ! Pourquoi les adultes posent-ils des questions fermées ?
Parce qu’ils pensent tout savoir ! »

6. Source : « PNL, le Métamodèle », in Yves Blanc, Le Manager à l’écoute, op. cit.

Messager-Livre.indb 102 12/10/12 09:38


Maîtriser des outils et des techniques de coach
103
Chapitre 8

Il est intéressant, en effet, de constater qu’en posant des questions ouvertes, les enfants
n’ont aucun a priori. Ils sont curieux de tout, ils sont prêts à tout entendre : « Pourquoi
ça ? Comment ça ? Et si... ? »
En revanche, dès lors que nous construisons notre propre référentiel, que nous nous for-
geons des certitudes, nous avons tendance à poser des questions fermées, qui portent déjà
en elles la réponse et qui n’appellent qu’un oui ou un non.

Exemple

Suite de l’entretien avec Bruno, responsable de l’équipe Gamma, à propos des réticences
des membres de son équipe.
Questions fermées : « Leur avez-vous expliqué que la méthode allait les responsabiliser ?
Leur avez-vous démontré qu’ils allaient être beaucoup plus impliqués ? Je peux vous donner
d’autres arguments, si vous voulez. Avez-vous organisé une réunion d’information ? Est-ce
que vous avez compris qu’ils sont face à un changement ? »
Questions ouvertes : « Quel type de relation entretenez-vous avec votre équipe et chacun de
ses membres ? Comment pourriez-vous prendre en considération leurs réticences ? Com-
ment abordez-vous ce changement, vous ? Quel est votre rôle dans ce changement ? Quels
sont les points de rencontre que vous avez avec votre équipe ? »
Avec des questions fermées, le coach/consultant « donne du poisson » à Bruno mais ne lui
apprend pas à pêcher. Va-t-il s’approprier ces arguments pour les transmettre à son équipe ?
Le postulat de départ, en lui posant des questions fermées, est qu’il ne sait pas quoi faire.
Avec un questionnement ouvert, le postulat de départ est qu’il est capable de trouver la solu-
tion.
Avec des questions ouvertes, le coach invite Bruno à s’arrêter quelques instants dans sa
course, à prendre du recul, à s’interroger, peut-être à revisiter sa façon d’interagir avec son
équipe. De base Promoteur (selon le modèle Process Com), Bruno ne consacre certainement
pas beaucoup de temps à échanger avec ses collaborateurs, à les écouter. Le questionne-
ment ouvert va très probablement, ici, amener Bruno à remettre en question sa capacité
d’écoute. N’oublions pas que la demande initiale est précisément d’anticiper les difficultés
sur le plan humain !

Le questionnement permet au coach de bien comprendre la représentation qu’a le coaché


d’une situation donnée, de repérer les éventuels non-dits ou des éléments qui n’auraient
pas été évoqués, volontairement ou involontairement. Des questions fermées risqueraient
de porter des interprétations qui pourraient influencer les réponses du coaché ; ou tout
simplement, elles constitueraient pour le coaché un formidable moyen d’aller au plus
simple en répondant « oui ».
Les questions ouvertes stimulent la réflexion du coaché et aiguisent sa créativité. Elles
sont une invitation à explorer davantage son vécu et ses ressentis. L’objectif du coach est
ainsi de comprendre et d’aider, et non de suggérer, d’induire ou d’orienter.

Messager-Livre.indb 103 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
104
Troisième partie

Exemple

Pour l’équipe Bêta :


Question fermée : « Vous savez qu’un daily meeting se tient à heure fixe, toujours au même
endroit et que la ponctualité est la règle de base ? »
Question ouverte : « Pourquoi cette réunion quotidienne vous ennuie-t-elle ? » ou bien
« Comment pourrait-on l’organiser pour qu’elle vous soit utile ? »

Bien sûr, le coach veille à ce que le questionnement ne soit pas inquisiteur. La qualité du
questionnement est fondamentale pour la qualité de la relation qui s’établit entre le coach
et le coaché. Il ne s’agit pas d’un interrogatoire !

Le silence
Écouter activement, c’est aussi savoir se taire. La nature ayant horreur du vide, nous
sommes, pour la plupart, mal à l’aise avec le silence :
• soit parce que nous avons la sensation d’être attendu, pour analyser, proposer, suggérer,
conseiller..., et cela nous « met la pression » (voir l’exemple 1) ;
• soit parce que la question que nous venons de poser met mal à l’aise (l’autre) et que nous
souhaitons « nous racheter » en « comblant ce vide » (voir l’exemple 2) ;
• soit encore parce que nous ressentons un malaise que nous souhaitons masquer… alors
nous « meublons » également.

Exemple 1 : le silence permet une nouvelle analyse

Scrummaster : « Oui, on est une équipe agile, puisque toutes les compétences sont inté-
grées dans l’équipe. »
Coach : silence.
Scrummaster : « Enfin, ce que je veux dire, c’est qu’il y a un analyste, un concepteur, un
développeur et un testeur ; c’est ça une équipe intégrée, non ? »
Coach : silence.
Scrummaster : « Enfin, intégrée… c’est vrai qu’ils ne travaillent pas vraiment ensemble, donc
elle n’est pas vraiment intégrée finalement. Vous avez raison. »
Coach : « Je n’ai rien dit, moi. C’est vous qui considérez que l’équipe n’est pas vraiment
intégrée. Quelle serait votre définition d’une équipe intégrée ? »
Il eut été facile, dans ce cas, d’expliquer au scrummaster ce qu’est une équipe intégrée et
de lui démontrer que son équipe était loin de l’être. Le silence lui a permis de revenir sur
son affirmation et de déclencher un mécanisme d’évaluation et de réflexion, sans avoir à le
mettre volontairement face à un dysfonctionnement. Le même exercice est possible face à

Messager-Livre.indb 104 12/10/12 09:38


Maîtriser des outils et des techniques de coach
105
Chapitre 8

une équipe : devant le silence du coach, plusieurs personnes auraient exprimé leur point de
vue et un échange aurait démarré sur la définition qu’elles donnent d’une équipe intégrée.

Exemple 2 : le silence pousse à réfléchir

Coach : « Vous m’avez dit tout à l’heure que vous n’avez pas envie de coder à deux et que
vous allez plus vite tout seul… Pourquoi n’en avez-vous pas envie ? »
Développeur : « Euh… »

Scénario 1

Coach : « Parce que les autres sont lents ? »


Développeur : « Non, ce n’est pas ce que je voulais dire. Enfin, un peu, oui, je ne sais pas… »

Scénario 2

Coach : silence.
Développeur : « En fait, j’aime décortiquer un problème, me faire des croquis et coder seul. »
Dans le scénario 1, le coach induit une réponse comme s’il voulait faire dire au développeur
quelque chose qui n’est pas nécessairement à l’origine de son attitude. Dans le scénario 2,
le silence du coach pousse le développeur à réfléchir et à obtenir plus facilement le fond des
choses.

Être attentif aux silences, aux hésitations, aux gestes, voire aux mimiques (langage non
verbal) participe de cette écoute active.
Respecter le silence de l’autre, c’est aussi respecter son rythme. C’est particulièrement
important avec les personnes de type Rêveur, qui sont posées, qui aiment considérer les
choses dans leur globalité. En effet, ces personnes réfléchissent avant de parler, prennent
leur temps pour « faire le tour de la question » ; elles ont souvent un débit de parole lent.
Le coach ne doit pas s’impatienter. Le silence est son allié ; il est l’expression de l’autre.
Le consultant « sachant » aura tendance à souffler la réponse à la question.
Le silence peut aussi être utile face à ce qui peut être ressenti comme une attaque agres-
sive ou une intrusion provocatrice, pour se donner le temps de l’accueillir, de préparer
une parade, de s’exprimer avec authenticité et justesse, tout simplement.
Laisser le silence faire son travail, cela permet d’en profiter pour repérer un signe de
communication non verbale, un geste ou toute manifestation du corps : changement de
position, froncement de sourcils, accélération du rythme de la respiration, regard fuyant,
etc. En effet, un froncement de sourcils peut manifester une difficulté, un blocage, un
refus d’explorer une piste.

Messager-Livre.indb 105 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
106
Troisième partie

Comment utiliser ces outils ?


Les outils de l’écoute active sont simples en apparence. Et pourtant, notre propension à
poser des questions fermées est difficile à réprimer.
Je ne peux que vous inviter à vous entraîner, vous entraîner et vous entraîner pour ap-
prendre à poser des questions ouvertes, à reformuler juste et non à chaque phrase de votre
interlocuteur, ou à accepter le silence. Cet entraînement peut se faire dans n’importe quel
contexte, entre amis, en famille…
Essayez de mettre ces outils en application et observez les changements d’attitude chez
vos interlocuteurs : sont-ils plus prolixes ? La teneur et la profondeur de vos échanges
sont-elles plus riches ? En apprenez-vous davantage sur vos interlocuteurs ?
N’oubliez pas ce que Pythagore prétendait : « Qui parle sème, qui écoute récolte ! »

Ce que nous avons appris


Nous avons découvert les principaux outils de base du coach.
• Son premier outil est lui-même. Par conséquent, il se doit d’être totalement disponible
pour son ou ses coachés. Se synchroniser avec lui (eux), c’est se mettre sur la même
longueur d’onde, en utilisant le même canal de communication (Process Com).
• C’est aussi se synchroniser sur le même canal sensoriel (VAKOG).
• Être disponible et totalement à l’écoute, c’est faire preuve d’empathie, en faisant abs-
traction de sa propre vision du monde et en appréhendant une situation avec le point
de vue de l’autre.
• Sans rien suggérer, sans rien induire, le coach est à l’écoute. Cela ne signifie pas être
passif, mais pratiquer une écoute active, qui repose sur un questionnement à base de
questions ouvertes, sur la reformulation et le respect des silences, si nécessaire.
• C’est aussi savoir repérer les pièges du langage, tels que les généralisations ou les omis-
sions, volontaires ou inconscientes.

Outils du coach proposés

• La synchronisation avec les canaux de communication Process Com ou les canaux sen-
soriels (VAKOG)
• L’empathie
• Les outils de l’écoute active (questionnement, reformulation, silence).

Messager-Livre.indb 106 12/10/12 09:38


Maîtriser des outils et des techniques de coach
107
Chapitre 8

Nous avons compris en quoi l’intervention d’un coach, ou l’adoption d’une posture de
coach, pouvait compléter celle d’autres facilitateurs et apporter un réel bénéfice dans une
démarche de changement et de transformation agile en particulier. Nous avons découvert
la posture qu’il adopte et les outils sur lesquels il s’appuie. Observons-le à présent en
action, auprès d’une équipe (quatrième partie) et auprès d’un scrummaster (cinquième
partie).

Messager-Livre.indb 107 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 108 12/10/12 09:38
Quatrième partie

Coacher l’équipe
Nous savons tous, à nos dépens, que réunir les meilleurs joueurs
des meilleurs clubs ne signifie pas constituer la meilleure équipe
nationale ! On sait également que ce n’est pas parce que l’on
regroupe, au sein d’une équipe projet, les éléments les plus com-
pétents que le succès du projet est assuré.
Si l’objectif d’une équipe agile est de devenir performante via la
coopération, la créativité, l’autonomie et la responsabilité, il n’en
faudra pas moins plusieurs étapes pour que celle-ci se constitue
en développant des compétences collectives et relationnelles.
Le rôle du coach est de l’accompagner tout au long de cette évo-
lution, pour l’aider à se consolider.

Messager-Livre.indb 109 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 110 12/10/12 09:38
9
Comment l’équipe
se constitue-t-elle ?

Une équipe (agile) performante est une structure de coopération, mobilisée par un enjeu
collectif fort, animée par un niveau d’exigence réciproque élevé (valeurs communes,
règles de fonctionnement), avec une part belle donnée à la créativité, tant dans ce qu’elle
produit que dans le processus de production. Cette équipe est autonome, responsable,
auto-organisée (voir le chapitre 1, « Valeurs agiles et comportements associés »).
Avant d’être une équipe performante, le groupe de personnes, ou « pseudo-équipe »,
devra traverser plusieurs étapes. Ses membres doivent apprendre à mieux se connaître
et à développer des compétences collectives et relationnelles. Reposant sur une vision
partagée, l’esprit d’équipe agile pourra alors se consolider.
Le coach accompagne l’équipe aux différentes étapes de son évolution, comme un parent
guide son enfant à chaque âge de sa vie, ou comme un jardinier prend soin de sa plante
aux différentes phases de sa croissance.
Avec tact et intuition, et en fonction de la demande, le coach sait prendre plus ou moins
de distance vis-à-vis de l’équipe : en protection rapprochée au début (étapes Création et
structuration, Confrontations et tensions), il laisse peu à peu l’équipe prendre son envol
vers son autonomie (étapes Régulation et normalisation, Synergie et performance), tout
en demeurant un repère pour tous, avant de préparer la Dissolution et la séparation de
l’équipe.
Par tâtonnements successifs, cette équipe va progresser, régresser parfois, mais restera
sur sa trajectoire, encadrée par le coach.

Messager-Livre.indb 111 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
112
Quatrième partie

Question au coach :
Qui coache l’équipe ?

Selon la configuration, selon les organisations, selon l’avancement du projet de transforma-


tion, celui qui accompagne l’équipe agile peut être :
• un scrummaster, débutant ou confirmé ;
• un chef de projet traditionnel, avec un profil plus ou moins technique ;
• un membre de l’équipe reconnu par ses pairs ;
• toute autre personne ayant démontré sa capacité à mener un groupe (leadership).
Mon postulat de départ est que, pour amener l’équipe agile à plus d’autonomie et plus de
responsabilité, ce manager opérationnel, de proximité doit adopter une posture de coach,
telle qu’elle a été présentée dans les parties précédentes.
Dans cette quatrième partie, dédiée au coaching de l’équipe agile, je propose une démarche
d’accompagnement de l’équipe, en tant que coach externe. Elle est le fruit de plusieurs re-
tours d’expérience et de la prise en compte du feedback de mes clients. Elle ne constitue
évidemment pas la seule manière d’aborder l’évolution de l’équipe.
Mon objectif est de proposer aux scrummasters, chefs de projet ou autres meneurs d’équipes
de s’inspirer de cette démarche pour adopter eux-mêmes une posture de coach. Il ne s’agit
pas d’imiter le coach ou de calquer ses pratiques. D’ailleurs, dans le coaching, l’exemplarité
ne fonctionne pas, puisque le coach lui-même, sa personne et la relation qu’il établit avec le
coaché, sont uniques ; un coach n’est donc pas reproductible.
Par conséquent, j’emploie le terme de « coach » ici non pas en faisant référence à une fonc-
tion, mais pour évoquer davantage une posture, celle du scrummaster, du chef de projet, de
tout autre team leader ou encore d’un coach externe.

☞ Nous verrons dans la cinquième partie pourquoi et comment ce leader peut lui-même être
coaché par un coach externe pour mieux adopter cette posture.

Les étapes de constitution de l’équipe


Bruce Tuckman, psychosociologue américain, a proposé un modèle de construction
d’une équipe en cinq étapes (Forming – Storming – Norming – Performing – Mourning).
Ce modèle prévoit qu’un groupe, avant de devenir une équipe, traverse plusieurs étapes.

Ces étapes offrent un repère intéressant pour le coach puisqu’elles lui permettent de
mesurer le degré de maturité de l’équipe et de trouver ainsi son propre positionnement.
Quelles sont ces étapes (figure 9-1) ?

Messager-Livre.indb 112 12/10/12 09:38


Comment l’équipe se constitue-t-elle ?
113
Chapitre 9

Figure 9-1
Les cinq étapes Dissolution et
séparation
de constitution
d’une équipe
Synergie et
performance

Régulation et
normalisation

Confrontations
et tensions

Création et
structuration

1. Création et structuration : les membres du groupe se rencontrent, se (re)découvrent.


Chaque membre se socialise. On creuse les fondations : objectifs, rôles, règles du jeu…
2. Confrontations et tensions : les membres de l’équipe se découvrent vraiment. Les
personnalités se révèlent. Certains essaient de s’imposer ou d’imposer leur savoir-
faire. L’équipe apprend, s’affronte ; l’équilibre est fragile, « ça pousse des coudes ».
3. Régulation et normalisation : des règles de fonctionnement se mettent en place. Les
membres recherchent la pacification des échanges. On cherche des solutions aux diffi-
cultés apparues en phase précédente.
4. Synergie et performance : efficacité, coopération, responsabilité caractérisent
l’équipe dans cette quatrième phase. Son identité se renforce, la confiance entre les
membres est réelle, le niveau de créativité et d’agilité est élevé.
5. Dissolution et séparation : cette étape précède la dissolution de l’équipe lorsque
celle-ci est éphémère (fin d’un projet, par exemple). C’est l’occasion de clore un cycle
et de préparer la séparation des membres de l’équipe.

À quelle étape se situe l’équipe ?


Dans un premier temps, avant d’envisager toute action, le coach doit repérer à quel niveau
se situe l’équipe qu’il s’apprête à accompagner. En effet, certaines équipes sont consti-
tuées ad hoc pour un projet spécifique. Il se peut que ses membres se connaissent, aient
déjà travaillé ensemble ou ne se connaissent pas du tout. On trouvera fréquemment ce
type de configuration chez les sociétés prestataires de services.

Messager-Livre.indb 113 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
114
Quatrième partie

Ce peut être aussi une équipe ou un département existant, dont les membres se connaissent ;
un nouveau projet, une nouvelle méthodologie sont l’occasion de travailler différemment,
tout en maintenant une activité classique en parallèle.
Sur le même principe que la grille d’autoévaluation qui mesure son degré d’agilité (voir
chapitre 5), je propose de prendre un instantané de l’équipe et de mesurer son niveau de
maturité. Ce radar me permet de mieux appréhender les contours de ma mission d’accom-
pagnement et les axes de travail prioritaires.
Figure 9-2
Le niveau
de maturité
de l’équipe

Comment utiliser cet outil ?


Vous pouvez utiliser cet outil in petto, mais le risque est d’être trop subjectif ou de ne se
fier qu’à une première impression. Une période d’observation, même de quelques jours, à
l’aide d’une grille d’analyse apporte un éclairage moins empirique.
Cependant, il existe un moyen plus efficace de mesurer ce degré d’agilité : c’est l’auto­
évaluation par l’équipe elle-même. Vous pouvez appliquer le même processus que pour
l’autoévaluation du degré d’agilité (voir figure 5-1).
C’est à vous de définir une liste de critères vous permettant de vérifier les conditions de

Messager-Livre.indb 114 12/10/12 09:38


Comment l’équipe se constitue-t-elle ?
115
Chapitre 9

passage au stade supérieur, dans le modèle de Tuckman. Vous pouvez tout à fait utiliser
la liste que je propose dans le radar (figure 9-2), qui recense, selon moi, les principaux
critères d’analyse.
Ensuite, je vous invite à préparer les questions à vous poser ou à poser aux membres de
l’équipe pour « évaluer » chaque critère.
• L’équipe a-t-elle une vision partagée ? Une identité ?
• Les rôles sont-ils clairement définis ? Comment organise-t-on le travail ? Qui alloue les
tâches ?
• Existe-t-il des règles du jeu ? Une charte ?
• Y a-t-il des jeux de pouvoir ou « politiques » ? Comment les confrontations sont-elles
gérées ?
• Comment communique-t-on ? Comment s’écoute-t-on ? Les membres de l’équipe
ont-ils la capacité de se dire les choses en position +/+ ? Échange-t-on du feedback ?
À quelle fréquence ? Sous quelle forme ?
• Les membres de l’équipe sont-ils sensibles à l’atteinte des résultats ? Se sentent-ils res-
ponsables ? Ont-ils le sens de l’engagement ?
• Une joie de vivre se dégage-t-elle de cette équipe ?
• Existe-t-il une intelligence collective ?
Il est important que les réponses aux questions soient justifiées par des observations
réelles et des éléments tangibles.
Exemple : évaluation

Si l’équipe considère qu’elle a des règles de fonctionnement, sur un axe de 0 à 10, vous valori-
serez le critère à 8 ou 9, voire 10 si elle est en mesure de vous montrer un code ou une charte
respectés par tous. Si elle dispose de règles tacites mais réelles, vous pourrez valoriser à 5.

Après valorisation et discussion, vous restituez la photographie à l’équipe, sous forme


d’un radar ou d’un histogramme.
Ainsi, si l’équipe dispose d’une vision partagée, si les rôles sont définis et les règles du jeu
connues de tous, on pourra considérer qu’elle a passé l’étape 1. Ensuite, il reste à évaluer
les modes de communication et de résolution des problèmes, pour repérer si elle se situe
à l’étape 2 ou 3 ou autre. Cette photographie à un instant t constitue une base de travail
pour franchir les étapes du modèle et fait régulièrement l’objet d’un atelier dédié, ou est
l’un des thèmes abordés lors des rétrospectives.

Messager-Livre.indb 115 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
116
Quatrième partie

Ce que nous avons appris


• L’équipe, avant d’atteindre son niveau de performance optimale, doit traverser plusieurs
étapes de maturation.
• Une posture de coach est tout à fait appropriée pour accompagner cette équipe tout au
long de son évolution vers plus d’autonomie et de responsabilité.

Outil du coach proposé

• Le niveau de maturité de l’équipe (modèle de Tuckman)

Voyons à présent comment coacher une équipe agile et trouver le juste positionnement,
aux différentes étapes de son évolution.

Messager-Livre.indb 116 12/10/12 09:38


10
Création et structuration

La pierre la plus solide d’un édifice est la plus basse de la fondation.


Khalil Gibran, poète libanais

Cette première étape a pour objectif de poser les fondations sur lesquelles l’équipe va
se construire. Le coach tient un rôle clé pour l’aider à définir le cadre dans lequel elle
va évoluer ; sa priorité est de créer la confiance entre l’équipe et lui-même et entre les
membres de l’équipe. Cette confiance est un prérequis pour qu’une réflexion puisse être
menée par le groupe sur sa vision, la répartition des rôles et ses règles de fonctionnement.

Définir une vision commune


Une vision permet de révéler le rêve d’une communauté de travail et de l’exprimer
sous la forme d’un futur idéal, désirable par tous et suffisamment détaillé pour que
chacun voit tout de suite comment il peut contribuer, chaque jour, à sa réalisation.
Michael Doyle, chercheur américain en relations internationales

Avoir une vision commune, partagée, est structurant et est un préalable au bon fonction-
nement d’une équipe performante. Elle constitue cette « enveloppe culturelle minimale »
évoquée dans le chapitre 4, « Créer un cadre contractuel ».

Messager-Livre.indb 117 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
118
Quatrième partie

Pourquoi partager une vision ?


L’équipe agile constituée est mandatée pour développer un produit. Le commanditaire,
représenté par le product owner, a défini et partagé la vision de ce produit, afin que tout
le monde travaille avec la même représentation. La vision du produit peut être représen-
tée par une product (vision) box, sorte de représentation graphique et visuelle du produit
final attendu.
Une fois la vision du produit connue, l’équipe doit prendre le temps de répondre aux
questions suivantes.
• « Qui sommes-nous ? »
• « Pourquoi nous ? Pourquoi moi ? Pourquoi eux ? »
• « Comment allons-nous faire pour atteindre notre objectif ? » Il s’agit, ici, non seule-
ment de déterminer les solutions techniques à mettre en œuvre, mais aussi les règles
de fonctionnement.
Travailler sur la vision, non pas du produit mais de l’équipe à construire, est un travail
de réflexion identitaire. Nous sommes face à une grande variété d’individus, donc d’indi-
vidualités. À partir de là, comment l’équipe, en tant qu’entité, peut-elle être identifiée ?
Comment ses membres peuvent-ils se reconnaître ? Comment chacun peut-il s’y dévelop-
per et donner sa performance maximale ?

Qu’est-ce que la vision ?


La vision donne un sens, une direction, un cap, un point d’ancrage pour toutes les activi-
tés et les décisions de l’équipe. Partagée, elle donne envie d’aller quelque part ensemble.
C’est en quelque sorte la boussole de l’équipe.
Vincent Lenhardt1 utilise six niveaux pour décrire la vision d’une entreprise. Appliqués
à une équipe, les six niveaux peuvent prendre le sens suivant.
• La vocation : « Quelle est notre raison d’être ? Que se passerait-il si nous n’étions pas
là ? » La question sous-jacente est « Pourquoi ? »
• L’ambition : « Quel est le défi à relever ? » La question sous-jacente est « Pour quoi ?
Pour qui ? »
• Les valeurs : « Quelles sont les valeurs (éthiques, morales, culturelles et organisa-
tionnelles) qui constituent notre identité ? »
• Les principes de management : « Comment souhaitons-nous fonctionner, en termes
de gouvernance ? De prise de décision ? » La question sous-jacente est « Comment ? »

1. Vincent Lehnardt et Philippe Bernard, L’intelligence collective en action, Pearson, 2e édition, 2009

Messager-Livre.indb 118 12/10/12 09:38


Création et structuration
119
Chapitre 10

• Les priorités stratégiques : ce niveau s’applique moins bien à une équipe, car les prio-
rités stratégiques d’une équipe agile sont guidées par celles du client et par la création
de valeur. On peut cependant envisager un projet en parallèle, celui de la transforma-
tion agile, et considérer que, dans une démarche itérative, les pratiques agiles et les
comportements associés sont introduits, petit à petit, par ordre de priorité.
• Les plans d’action : « Quelle organisation et quelles pratiques devons-nous mettre en
place sur le plan opérationnel ? » Ici également, la question sous-jacente est « Com-
ment ? »
Le rôle du coach, par son questionnement, est d’amener les membres de l’équipe à prendre
conscience et à être partie prenante active dans la définition de leur cadre.

Comment élaborer la vision ?


La démarche qui consiste pour l’équipe à élaborer sa vision est un « processus organique,
dynamique et itératif, ayant davantage trait à l’orientation donnée, au chemin à prendre
qu’au but à atteindre »2.
La réflexion est menée collectivement. Le rôle du coach est alors d’assurer le bon dérou-
lement du processus, de créer un climat de confiance et un état d’esprit basé sur l’authen-
ticité.
Si la vision est un rêve collectif, chaque membre en a sa représentation individuelle ; le
coach a la mission de « réconcilier » ces différentes représentations. Il s’appuie, pour
cela, sur un outil de coaching : la visualisation (visioning).
La visualisation ou l’ouverture du champ des possibles
Cet outil est utilisé pour faciliter le passage d’une situation A à une situation B. L’exercice
de la visualisation rend les choses possibles.
En pratique
Dans notre cas, la situation A est l’équipe à l’instant t, telle que nous l’avons photogra-
phiée. La situation B est l’équipe telle qu’elle souhaite devenir.

Le principe de la visualisation consiste à amener le coaché – qui serait face à un objectif


de changement – à imaginer un futur possible, à envisager la situation idéale, comme si
le futur était déjà réalisé et l’objectif atteint (situation B).
Dans cette situation imaginaire mais néanmoins réaliste, le coaché est sollicité pour
exprimer ses perceptions. Le coach prend en compte le canal sensoriel du coaché ;

2. Pierre Barrère et Jean-Claude Montauzé, Pari sur les hommes : Le management par la vision partagée,
L’Harmattan, 2009

Messager-Livre.indb 119 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
120
Quatrième partie

le travail porte alors davantage sur ce que le coaché visualise ou entend, ou sur ce qu’il
ressent.
L’étape suivante consiste à décomposer le chemin parcouru depuis la situation A de dé-
part, à repérer les « petits » succès qui l’ont jalonné et à identifier les obstacles contournés.
À la fin de l’exercice, l’objectif est plus facilement accessible, le chemin à parcourir
moins difficile, puisqu’il a déjà été vécu et que les solutions de contournement des obs-
tacles ont déjà été trouvées.
Cette technique a l’avantage de faire appel à l’imaginaire et d’ouvrir ainsi le champ des
possibles. La permission de se projeter hors de la réalité, donnée par le coach, amène la
personne ou l’équipe coachée à envisager de nouveaux horizons, d’autres solutions qui
n’auraient peut-être pas été examinées, à cause des croyances limitantes.
La visualisation sollicite l’intuition, le symbolique, et met « en sourdine les limitations
du cerveau gauche pour favoriser l’émergence du potentiel créatif du cerveau droit » 3. En
effet, l’hémisphère gauche est le siège de la méthode, de la raison, alors que l’hémisphère
droit héberge les sentiments et l’imagination. La partie droite est généralement moins
souvent stimulée chez les ingénieurs.
Ce principe a été repris dans la conception de l’innovation game 4 intitulé « Remember
the future ».

Comment utiliser cet outil ?


Vous pouvez tout à fait utiliser l’outil de visualisation pour faire émerger la team vision
box. Cette dernière est à l’équipe ce qu’est la product vision box au product owner !
Je vous propose d’organiser un atelier dédié auquel chaque membre de l’équipe est convié
et sollicité pour participer activement à l’élaboration de cette vision.
Vous pouvez guider la réflexion de l’équipe et poser des questions telles que :
• Qu’est-ce qui est important dans notre histoire et qui influence le présent (et peut-être
le futur) ?
• Quelle est notre mission, notre « raison d’être » ?
• Qui sont nos clients (internes, externes) ?
• Quelle est notre valeur ajoutée ? Quels sont nos points forts ?
• Comment, concrètement, nous voyons-nous travailler ensemble ?

3. Françoise Kourilsky, Du désir au plaisir de changer, 4e édition, 2008


4. Les innovation games sont des ateliers menés sous forme ludique pour faciliter l’atteinte des objectifs
opérationnels ou pédagogiques.

Messager-Livre.indb 120 12/10/12 09:38


Création et structuration
121
Chapitre 10

• Qu’est-ce qu’une équipe pour nous ? Une équipe agile ? Quelle équipe souhaitons-nous
être ? Quelles sont nos valeurs ?
• Quels sont nos freins (pour mieux exercer notre mission) ?
• Quelle pourrait être notre slogan ? (en une phrase ou quelques mots)
L’étape 1 consiste à mener cette réflexion individuellement. Chacun laisse libre cours à
son imagination.
À l’étape 2, chacun réalise à l’aide de matériel que vous aurez fourni (magazines, ci-
seaux, feutres, colle…) un panneau représentant sa vision de l’équipe, sa team vision box
(figure 9-1, par exemple).

Figure 10-1
La team vision box

Vient l’étape 3, au cours de laquelle chacun présente sa vision aux autres membres.
Simultanément, vous notez sur trois tableaux différents les mots-clés permettant de re-
présenter la vocation, l’ambition et les valeurs de l’équipe. Il est intéressant de repérer à

Messager-Livre.indb 121 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
122
Quatrième partie

ce moment-là les points de convergence/divergence entre les membres et de mesurer la


maturité de l’équipe. N’hésitez pas à amener l’équipe à s’interroger sur les constats, les
découvertes et les ressentis de chacun, en direct.
L’étape 4, enfin, a comme objectif de déterminer ce qui est commun dans toutes les
visions présentées et de définir la vision de l’équipe.
Vous pouvez également prévoir plusieurs ateliers, l’un portant sur les deux premiers ni-
veaux (Vocation, Ambition), puis un atelier spécifique sur les valeurs, un autre sur les
principes de management et le plan d’actions, etc.
Alternative
Vous pouvez partir de la grille d’autoévaluation soumise à l’équipe (voir figure 5-1) pour
mesurer son niveau de maturité. Sur la base des résultats consolidés, l’équipe peut se
projeter dans l’avenir et mieux formaliser ce qu’elle souhaite faire évoluer ou améliorer
pour construire son identité.

Le choix de telle ou telle technique varie selon le temps disponible, le profil des collabo-
rateurs de l’équipe, la culture de l’entreprise…
Attention !
Vous ne devez pas avoir de vision pour l’équipe ! Vous créez un espace ludique et créatif ;
vous aidez les membres de l’équipe à ouvrir le champ des possibles, sans se censurer,
en travaillant avec leur imaginaire.

Si cet exercice d’élaboration d’une vision commune peut apparaître déroutant pour cer-
tains, c’est normal. En effet, dans une équipe de développement logiciel, on est peu habi-
tué à faire des découpages et du collage ! Et si la vision n’est pas toujours tout à fait claire
à l’issue d’un premier atelier, ce qui est le plus important c’est le chemin à parcourir
ensemble, plus que le but en soi. La vision émergera au fil du temps.
L’outil de visualisation peut également être utilisé en coaching individuel (voir la cin-
quième partie, chapitre 17).

Exemple de coaching individuel

Scrummaster : « Je dois faire évoluer mon style de management, mais cela fait dix ans que
je pratique ainsi ; cela va être difficile. »
Coach : « Demain, en imaginant que vous vous réveillez et que vous avez atteint votre objec-
tif, quel manager êtes-vous ? Observez-vous en situation, vous êtes devenu ce nouveau
manager : comment êtes-vous ? Que faites-vous ? Que voyez-vous ? Que ressentez-vous ? »
Scrummaster : « Je me vois à l’aise, en train d’animer des cérémonies passionnantes, je
me vois passer beaucoup de temps avec mes coéquipiers ; il se dégage une bonne am-
biance… »

Messager-Livre.indb 122 12/10/12 09:38


Création et structuration
123
Chapitre 10

Coach : « Qu’avez-vous fait pour devenir ce nouveau scrummaster ? Si l’on regarde ce qui
s’est passé entre aujourd’hui et cette situation future, quels ont été les faits marquants ? Les
obstacles que vous avez réussi à contourner ? »

Quels sont les bénéfices pour l’équipe ?


L’élaboration d’une vision commune est une première expérience collective pour une
équipe encore au stade de groupe. Elle est un élément clé pour commencer à développer
une intelligence collective.
Cette réflexion a été menée par une équipe agile de Wyplay, société française spécialisée
dans la production de plates-formes logicielles multimédias. Romain Vignes, Respon-
sable Méthodes & Outils, nous livre son point de vue sur l’intérêt de l’exercice, qui por-
tait sur les valeurs.

Témoignage de Romain Vignes

La transition agile au sein de Wyplay a donné lieu à un changement d’organisation des


équipes. Les équipes métier, au sein desquelles le lien principal entre développeurs était
l’expertise d’un domaine technique particulier, ont évolué vers des équipes projet, syno-
nymes de multicompétences, avec comme objectif commun le produit et donc les intérêts
du client.
Afin de fédérer les différents intervenants autour de cet objectif commun et de recréer un es-
prit d’équipe, nous avons fait le choix avec Véronique de mettre en place une série d’ateliers
collectifs pour chaque équipe concernée par la transition agile. Ces ateliers ont été articulés
autour de trois axes :
• un apport théorique sur les pratiques agiles et notamment Scrum ;
• une mise en application directe sur le projet/produit porté par l’équipe ;
• le partage des motivations et attentes individuelles.
Ces deux derniers axes ont notamment permis de travailler de manière collaborative sur
la vision produit (Que devons-nous construire ?), d’une part, et la vision équipe (Comment
allons-nous fonctionner ensemble ?), d’autre part.
Dans le cadre de ces ateliers collectifs, une équipe projet a souhaité approfondir la notion
de « transparence », une des valeurs fondamentales de l’agilité. En se basant sur un enchaî-
nement de temps de réflexion et de partage, les membres de l’équipe ont successivement
échangé sur la définition de la transparence, les comportements associés qui ont de l’impor-
tance à leurs yeux, ainsi que leurs attentes vis-à-vis des autres membres de l’équipe. L’atelier
a permis à l’équipe d’aboutir de manière consensuelle à un principe commun de transpa-
rence dans son fonctionnement.
En participant aux cérémonies agiles de cette équipe au cours des semaines qui ont suivi, j’ai
pu constater les effets positifs de cet atelier : meilleur partage des informations, y compris des
« mauvaises nouvelles », moins de freins pour faire valoir ses opinions et envies, objectivité
dans l’analyse des problèmes pendant les rétrospectives.

Messager-Livre.indb 123 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
124
Quatrième partie

Rappelons qu’une équipe agile doit devenir autonome, responsable, auto-organisée. Par
conséquent elle est souveraine pour faire émerger son identité, celle qui sera en adéqua-
tion avec sa mission.

Préliminaires
Le travail autour de la construction de la vision initie le travail de co-création et de res-
ponsabilisation. Les membres de l’équipe sont amenés à prendre conscience, déjà lors de
l’exercice, des forces et des axes de progrès pour mieux fonctionner ensemble.
Pierre Barrère et Jean-Claude Montauzé parlent de « préliminaires », souvent négli-
gés alors que c’est grâce à eux que les personnes se découvrent, se parlent, travaillent
ensemble avec empathie et s’apprécient, le cas échéant. Chacun est invité à sortir de la
croyance que tout est joué d’avance et à ne pas se contenter d’être un wagon mais vouloir
être une locomotive.
La technique utilisée présente l’avantage de combiner expression individuelle et réflexion
collective. Elle crée une rupture par rapport aux pratiques habituelles : s’appuyant sur
l’imagination, l’intuition, les ressentis, elle est un entraînement à la créativité dont chacun
devra faire preuve tout au long du projet pour trouver des solutions.
La vision initiale pourra se transformer avec les aléas et les évolutions du projet.
Le coach a comme mission de créer les conditions de l’émergence (le cadre), d’insuffler
et de maintenir la dynamique du départ, le « façonnage » de la vision appartenant aux
membres de l’équipe.
Les rétrospectives sont des occasions données régulièrement à l’équipe pour s’interroger
sur sa vision, le respect de ses valeurs et ses pratiques.

Déterminer les rôles et responsabilités


Une fois la vision clarifiée et partagée, les membres de l’équipe doivent définir qui
fait quoi pour atteindre l’objectif. Ils dressent une première liste de corps de métier ou
« rôles » et recensent les compétences obligatoires et les compétences souhaitées.

Compétences et rôles
Souvent, les équipes sont constituées en amont par une autorité, externe au projet, à
partir d’une liste de compétences déjà connues et associées à chaque personne. On
sait que Pierre est architecte et non testeur ; on sait que Jacques est développeur PHP
et non .Net. Cependant, le fait de s’attribuer les rôles participe de la responsabilisation
de chacun.

Messager-Livre.indb 124 12/10/12 09:38


Création et structuration
125
Chapitre 10

À partir de cette liste, l’équipe auto-organisée se répartit les rôles et responsabilités.


Chacun exprime ses souhaits de montée en compétences ou de formation, l’objectif étant
de constituer une équipe pluridisciplinaire ou multicompétente. On obtient alors une
matrice des compétences (figure 10-2).

Figure 10-2
La matrice des
compétences de
l’équipe

Cette matrice permet d’établir un plan de formation ou de montée en compétences, de


planifier des séances de travail en binôme ou de mentoring, et de créer ainsi les bases
d’une intelligence collective.

Comment utiliser cet outil ?


Je vous invite à organiser une réunion dédiée avec tous les membres de l’équipe ; ceux-ci
se répartissent rôles et responsabilités.
Soit à partir d’une première matrice de compétences, soit à partir d’une page blanche,
vous les invitez à répondre aux questions suivantes.
• Quelles sont mes compétences/points forts ? Quel est mon niveau de maîtrise ? Que
puis-je apporter à l’équipe ?
• Quelles sont les compétences avec lesquelles je suis le moins à l’aise ? Quelles sont les
activités que je n’aime pas effectuer ?

Messager-Livre.indb 125 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
126
Quatrième partie

• Quelles sont les compétences disponibles chez l’un des membres de l’équipe que j’ai-
merais développer et que je considère comme un point fort pour le projet ?
Cette troisième question est peut-être la plus importante !
Attention ! Si les membres de l’équipe ne se connaissent pas du tout, cette démarche est
risquée. Généralement, nous ne sommes pas à l’aise pour communiquer, ni sur nos points
forts, ni a fortiori sur nos points faibles ! Cette réunion peut être différée dans le temps
après quelques premières réalisations et lorsque les membres de l’équipe se connaissent
un peu plus.
Vous pouvez aussi renouveler l’expérience régulièrement afin de prendre en compte les
différentes montées en compétences.
Si la confiance est créée au sein de l’équipe, cet exercice peut être très enrichissant, utile
et créateur de lien. Il participe de la meilleure connaissance de soi et des autres (voir le
chapitre 7, « Créer un cadre sécurisé ») et est utile pour accepter sa singularité et celle
des autres.
Vision commune partagée et rôles répartis, les membres de l’équipe s’attachent égale-
ment à définir les modalités de leur fonctionnement.

Fixer les règles du jeu


Les règles du jeu représentent le « code de la route » de l’équipe. La nature ayant hor-
reur du vide, si aucune règle n’existe, chacun institue ses propres règles. Par conséquent,
l’équipe doit se créer un référentiel commun ; celui-ci est propre à son identité, à sa vision,
à sa mission et à ses membres, dans le contexte environnemental qui est le sien.
En pratique
En réfléchissant au niveau 4 de la vision, on établit les principes de management.

Ce référentiel commun garantit la sécurité des acteurs. Il les protège et est utile notam-
ment dans la prévention des conflits.
Toutefois, il ne s’agit pas de tout réglementer ni de rigidifier le cadre. Le coach, en tant
que responsable du cadre, ne fait qu’inviter les personnes à s’interroger sur leurs modes
de fonctionnement et leurs règles de communication. Cette réflexion est une première
brique posée pour élaborer le cadre relationnel dans lequel elles vont se côtoyer. Chacun
a l’occasion de s’exprimer sur ces règles du jeu communes et s’engage à les respecter.

Messager-Livre.indb 126 12/10/12 09:38


Création et structuration
127
Chapitre 10

On élaborera une Charte des droits et devoirs au sein de l’équipe, par exemple ; c’est le
« Manifeste » de l’équipe. Ce peut être également la Charte des droits et devoirs entre
l’équipe et le product owner (tableau 10-1).

Tableau 10-1 Les droits et devoirs de l’équipe et du product owner

Droits
Product owner Équipe
Participer aux daily Scrums meetings. Négocier les changements, le périmètre,
les priorités.
Féliciter, encourager les membres de l’équipe.
Connaître la vision.
Être informé et avoir une bonne visibilité.
Obtenir des clarifications sur les spécifications.
Comprendre ce qu’est la dette technique ou une
technical story. Disposer des moyens adéquats.
Bénéficier d’une délégation de la maîtrise d’ouvrage Droit à l’erreur.
ou du comité de pilotage.
Définir son processus/ses outils.
Obtenir des estimations de l’équipe.
Accéder facilement au product owner.
Modifier le product backlog et les priorités.
Régler la dette technique ou réaliser des technical
Obtenir des résultats tangibles. stories.
Équipe dédiée, sans préemption.
Lab day/Free day5 entre les sprints.
Explorer, investiguer (spikes) 6.
Participer à la démo.

(Suite page suivante.)

5. Lab (Laboratory) day ou Free day : l’équipe bénéficie régulièrement d’une journée libre pour faire de la
recherche, se former, se documenter…
6. Un spike est une tâche d’étude ou d’exploration lorsque l’on ne peut estimer précisément un élément du
product backlog ; c’est en quelque sorte un crédit recherche limité et non un chèque en blanc.

Messager-Livre.indb 127 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
128
Quatrième partie

Devoirs
Product owner Équipe
Partager la vision du produit. Être transparent.
Être disponible pour l’équipe. Définir la notion de « ready » (user story).
Participer aux réunions de planification. Respecter ses engagements.
Être le représentant des utilisateurs. Livrer des user stories respectant la définition
du « done ».
Apporter des réponses, prendre des décisions.
Estimer le product backlog.
Créer le product backlog priorisé, le mettre à jour
tout au long du projet. Entraide entre les membres.
Livrer des user stories « ready ».
Préciser ses critères d’acceptation « done ».
Valider le produit.

Comment utiliser cet outil ?


Entre la répartition des rôles et la définition des règles du jeu, vous pouvez organiser un
autre type d’atelier, pour définir et formaliser les engagements réciproques des acteurs
d’un projet (équipe et product owner) : un atelier « Ready/Done ».
• Ready : état ou conditions dans lesquels le product owner s’engage à fournir les user
stories à l’équipe de développement, pour qu’elles puissent être « embarquées » dans un
sprint.
• Done : état ou conditions dans lesquels l’équipe de réalisation s’engage à livrer les user
stories au product owner.
Au-delà de l’aspect processus et organisation, cet atelier permet à chaque groupe (product
owner d’un côté, équipe de réalisation de l’autre) d’exprimer des attentes et de les présen-
ter à l’autre partie. Les attentes sont ensuite analysées et trois réponses sont possibles :
• Vert : OK, nous nous engageons à y répondre ;
• Orange : peut-être, sous certaines conditions ;
• Rouge : non, pour tel motif.
Ces différents ateliers participent de la construction du cadre relationnel de l’équipe.
Certes, on y évoque les détails du processus. Mais c’est également le lieu où l’on se ren-
contre, où l’on apprend à se parler, à négocier et à rechercher un terrain d’entente. Ce sont
ces interactions entre les personnes qui sont le plus important !

Messager-Livre.indb 128 12/10/12 09:38


Création et structuration
129
Chapitre 10

Ce que nous avons appris


• Au cours de cette première étape de constitution de l’équipe agile, une esquisse du
cadre est brossée.
• Avoir une vision partagée donne un sens et mener une réflexion sur l’identité collective
permet à chacun de prendre conscience de sa responsabilité.
• Avoir un rôle et avoir plaisir à l’exercer, grâce à des compétences acquises ou à la pos-
sibilité de les acquérir, suscite le désir d’avancer et de changer.
• Définir et respecter des règles du jeu protège les acteurs.
• C’est, de plus, l’occasion pour le leader ou le coach, responsable du cadre, de déployer
quelques outils, facilitant ainsi les prises de conscience pour les progrès à mener.

Outils du coach proposés

• La visualisation et la vision de l’équipe


• La matrice des compétences
• La charte des droits et devoirs
• L’atelier Ready/Done

Ce premier travail n’est pourtant qu’une ébauche, car ce cadre va vraisemblablement


évoluer. En phase de création, la confiance et les modes de communication ne sont pas
encore bien établis ; chacun reste souvent sur ses gardes, la politesse est de rigueur, car on
ne se connaît pas encore vraiment. Par ailleurs, des règles fixées, parfois précocement,
nécessitent un ajustement en fonction de l’évolution de l’équipe, en particulier lors de la
deuxième étape, marquée par des tensions au sein du groupe.

Messager-Livre.indb 129 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 130 12/10/12 09:38
11
Confrontations et tensions

Là où je n’ai le choix qu’entre lâcheté


et violence, je choisis la violence.
Mahatma K. Gandhi

La première pierre étant posée, l’équipe a démarré les premiers sprints : les personnalités
se révèlent, les premières difficultés opérationnelles apparaissent, la pression du client
sur la qualité ou les délais augmente… On sent des tensions, ici ou là ; des confrontations
ont lieu, d’autres sont évitées.
Ce qu’on observe est assez classique dans le schéma d’évolution d’une équipe. En effet,
ces confrontations sont normales, elles doivent même avoir lieu, car elles peuvent s’avérer
utiles afin que l’équipe ajuste ses modes de fonctionnement.
Toutefois, les confrontations doivent rester positives. Pour cela, l’équipe a souvent besoin,
dans ces premières étapes, d’un « régulateur » qui facilite l’apprentissage des confronta-
tions positives et la pratique d’une communication pacifique.

Les premières tensions


Mes différentes interventions auprès d’équipes projet me démontrent chaque jour que les
confrontations sont souvent mal gérées. Elles le sont d’autant plus qu’on les évite. Excepté
quelques personnes qui recherchent les situations conflictuelles, on n’est généralement
pas à l’aise avec les confrontations. On préfère « mettre la poussière sous le tapis ». Cela
engendre un climat de tension, qui se traduit par des non-dits, des rumeurs, des sous-

Messager-Livre.indb 131 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
132
Quatrième partie

entendus, des sournoiseries… Le leader lui-même peut avoir la sensation de perdre le


contrôle de son équipe et d’être un mauvais leader, lorsque ces tensions se font jour. Il
peut donc rechercher l’évitement des confrontations.

Situations difficiles
Observons d’un peu plus près quelques situations relationnelles difficiles, vécues par nos
trois équipes Alpha, Bêta et Gamma. 1

Équipe Alpha, situation A

J’assiste à une revue de backlog, sans le product owner, indisponible. Je suis le témoin d’une
scène où les ingénieurs et Patrick discutent de la compréhension d’une exigence ; manifeste-
ment, ils n’en ont pas la même interprétation. À un moment donné, le ton monte, surtout de la
part de Patrick, qui fait valoir ses années d’expérience et son ancienneté pour défendre avec
virulence son point de vue. Je m’attends à ce qu’il impose son interprétation ; sans surprise,
il affirme en effet qu’il détient la vérité et qu’il ne supporte pas que Christophe, un membre
de l’équipe, mette sa compétence en doute. Finalement, ses collaborateurs, connaissant
Patrick, qui est susceptible et s’emporte facilement, se résignent à ne pas le contredire.

Précision
Cet épisode est survenu avant le travail effectué en coaching avec Patrick et avant qu’il
ne prenne conscience de la nécessité de déléguer davantage.

Équipe Alpha, situation B

J’assiste, en présence du client, à une démonstration qui devait se terminer à 12 h 30. Il


est 12 h 50. Jacques, développeur, s’impatiente, regarde sa montre ; il ne supporte pas que
l’horaire ne soit pas respecté, en raison de discussions imprécises avec le client qui n’abou-
tissent pas. Il jette des regards hostiles au scrummaster qui anime la réunion. Je l’observe :
il chuchote en aparté avec son voisin, probablement pour dénigrer Patrick qu’il considère
comme inapte à gérer correctement un agenda. Lorsque l’un de ses collègues le brocarde, il
réagit avec agressivité.

Équipe Bêta, situation C

Lors d’une des rares rétrospectives menées au sein de l’équipe Bêta, qui démarre en retard,
j’assiste à une entrée en matière on ne peut plus inadaptée. Catherine, la scrummaster, inter-
pelle ses collaborateurs : « Alors, bandes d’autistes, je vous propose le petit jeu ESTP1 pour
démarrer cette rétrospective. Ça vous tente ? » Je sens que les ingénieurs n’apprécient pas
beaucoup la provocation et je les vois tous s’enfermer dans le silence. Catherine est exaspé-
rée. Impulsive, elle poursuit : « Bon, je vois que mon petit jeu ne vous plaît pas. Vous êtes
des mollassons, il n’y a pas moyen de vous faire réagir ! »

1. Voir une mise en application de la technique ESTP dans le chapitre 21.

Messager-Livre.indb 132 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
133
Chapitre 11

Équipe Gamma, situation D

J’assiste à une réunion de travail dont l’objectif est de trouver l’origine d’un bogue. Il faut
savoir que cette tâche avait été confiée au jeune ingénieur Nicolas (qui vient d’être embau-
ché) pour qu’il découvre l’application, justement. Malheureusement, il n’a pas réussi à trouver
la réponse.
La réunion est commencée. Sylvie, qui arrive dix minutes en retard, s’excuse mille fois et
se fait rabrouer par Bruno, le leader de l’équipe, visiblement énervé. Sylvie, vexée, se met à
rougir ; je la sens au bord des larmes. Bruno poursuit la réunion en rappelant l’objectif, mais
se fait interrompre par un des membres de l’équipe, Matthieu, qui lance des sous-entendus
sur l’incompétence de certains et fait allusion plus précisément à Nicolas. Bruno continue
et lance un tour de table pour recueillir les analyses des uns et des autres sur le bogue en
question. Personne ne s’écoute ; chacun impose son idée, rejetant celle des autres de façon
caustique. Nicolas est maintenant ouvertement critiqué par Matthieu. C’est alors que Sylvie
intervient pour prendre sa défense en invoquant son arrivée récente et sa jeune expérience.
Elle se fait à nouveau rabrouer ; on ne l’entendra plus de toute la réunion. Au bout d’un certain
temps, Bruno, las de tous ces échanges, tranche et confie la tâche de débogage à un autre
ingénieur, plus expérimenté.

Des clés de lecture pour comprendre ces différentes situations sont proposées dans les
paragraphes suivants.

La stratégie de résolution de conflits


On vient de voir, une fois de plus, au travers de ces situations plus ou moins difficiles,
que la gestion des relations est complexe. On observe tel ou tel comportement et l’on se
dit que l’on aurait peut-être réagi autrement.
C’est précisément parce que chacun d’entre nous est unique qu’il va réagir d’une certaine
façon. S’il n’y a pas de bon ou de mauvais comportement, on peut néanmoins lister un
certain nombre de conduites négatives à risque pour la qualité de la relation.2

Les cinq attitudes du modèle Thomas-Kilmann


Face à une objection, une critique, une personne agressive ou dans un conflit, chacun
d’entre nous a habituellement une attitude qui lui est propre. Le modèle Thomas-Kil-
mann2 en recense cinq (figure 11-1, page suivante).

2. http://www.kilmann.com/conflict.html

Messager-Livre.indb 133 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
134
Quatrième partie

Figure 11-1
Les cinq attitudes Rivaliser Collaborer

Affirmation de soi
de résolution
de conflits
Chercher un
compromis

Éviter Céder

Coopération

Le modèle décrit cinq attitudes fondées sur une tendance plus ou moins orientée, soit
vers la défense de ses propres intérêts (affirmation de soi), soit vers le respect des intérêts
de l’autre (coopération). Le comportement fondé sur la détermination et l’assertivité est
le signe que la personne privilégie plutôt le résultat ou l’objectif ; le comportement fondé
sur la coopération manifeste un souci de privilégier la relation. En découlent les cinq
attitudes suivantes, ni tout à fait bonnes ni tout à fait mauvaises, selon la situation, la
fréquence et la qualité de la relation.
• Céder (« Tout ce que tu voudras ») : la personne qui a cette attitude montre peu d’asser-
tivité et néglige ses propres besoins ou, en donnant à penser qu’elle abdique, recherche
la collaboration avec l’autre. Cette attitude peut donner la sensation de se sacrifier, mais
elle peut aussi se justifier pour reconnaître une erreur ou faire preuve de générosité ou
de désintérêt.
Les réactions visibles peuvent être : on fait des concessions injustifiées, on ne fait pas
preuve de créativité.
• Rivaliser (« C’est comme ça et pas autrement ! ») : à l’opposé, la personne qui agit
ainsi « passe en force ». Inflexible, elle fait preuve d’autorité et veut gagner à tout prix.
Elle peut aussi tout simplement faire valoir des droits ou défendre son point de vue.
Les réactions visibles peuvent être : imposer ses idées, couper la parole, attaquer
les idées des autres, voire les autres personnellement, insulter ses interlocuteurs ; on
s’écoute peu, on est péremptoire.
• Éviter (« On verra plus tard ») : c’est une forme de dérobade ou de retrait, à moins que
ce soit juste un moyen de temporiser ou d’éviter un conflit vraiment inutile.
Les réactions visibles peuvent être : changer de sujet de conversation, s’enfermer dans
le silence, ravaler ses mots, en parler plutôt à un tiers, faire circuler des rumeurs.
• Collaborer (« On est plus intelligent à deux ») : cette attitude, plutôt constructive, vise
à trouver une issue gagnant-gagnant tout en s’appuyant sur la collaboration avec l’autre.

Messager-Livre.indb 134 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
135
Chapitre 11

On s’affirme, tout en s’écoutant et en se respectant, même si ce peut être une lourde


perte de temps et d’énergie dans certains cas, surtout si l’on cherche à satisfaire les
deux parties.
Les réactions visibles peuvent être : on palabre, on palabre et on affiche une complicité
de façade.
• Chercher un compromis (« Essayons de nous entendre sur ce qui est juste ») : c’est
l’attitude d’une personne déterminée et coopérative, qui recherche une solution accep-
table par tous et est prête à faire des concessions. Cependant, la décision prise sera-t-
elle durable, si la volonté était de faire vite ?
Les réactions visibles peuvent être : on s’emballe pour trouver un accord, coûte que
coûte, et on ne prend pas le temps d’écouter l’autre pleinement.

Comment utiliser cet outil ?


Vous pouvez utiliser cet outil soit en tant qu’arbitre, soit en tant qu’acteur, soit en tant que
coach d’une personne ou d’un groupe impliqué dans un conflit.
Si le choix de la stratégie à retenir appartient à la personne directement concernée par
le conflit, vous pouvez néanmoins l’aider à être clairvoyante sur l’objectif recherché, en
étant toujours vigilant sur le contexte, les personnes en situation et les conséquences.
Avec une posture de coach, vous devez protéger votre coaché ! (Voir les 3 P, au cha-
pitre 4.)
• Si l’objectif est plus important que la relation, on peut rivaliser.
• Si la relation est plus importante que l’objectif, il faudra plus facilement céder.
• Si la relation et l’objectif sont aussi importants, on collaborera.
• Si ni l’objectif, ni la relation ne sont importants, on adoptera une attitude de type éviter.
• Enfin, si l’objectif et la relation sont relativement importants, on privilégiera la recherche
de compromis.
Nous avons tendance à n’utiliser qu’un type de comportement, celui avec lequel nous
sommes le moins mal à l’aise, celui que nous reproduisons assez automatiquement. Ces
attitudes, négatives pour la plupart, témoignent d’une position de vie -/+ ou +/-, ou encore
-/- ; elles augurent souvent d’une communication inefficace.

Messager-Livre.indb 135 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
136
Quatrième partie

Exemples : l’analyse du coach

Situation A

La confrontation est positive, jusqu’à ce que Patrick (base Persévérant) entre en situation
de stress et commence à partir en croisade pour défendre son point de vue. Patrick met son
masque d’attaquant. Il est en position +/- et adopte l’attitude « Rivaliser ». L’effet est dévasta-
teur pour que l’équipe gagne en autonomie et s’engage davantage !

Situation B

Au-delà de l’opportunité de proposer à Patrick de travailler sur les techniques d’animation, je


comprends que Jacques (base Travaillomane) entre en situation de stress également, à cause
de son besoin de structuration du temps non satisfait. Il attaque lui aussi, mais pas ouverte-
ment, et crée, par sa position +/-, des tensions dans l’équipe. Il adopte une attitude proche de
l’évitement, en apparence. La stabilité de la réunion et son efficacité sont menacées.

Situation C

Catherine (base Rebelle) aime jouer de la provocation ; elle doit être mal à l’aise dans cette
équipe constituée d’ingénieurs majoritairement de base Rêveur, donc appréciant la solitude
et les longs moments de réflexion. Catherine, quant à elle, recherche le contact, quitte à
provoquer ; elle apprécie ce qui est ludique, d’où la proposition de jeu. Elle fait face à des
réactions plutôt passives ; pourtant, elle aurait pu être confrontée à des réactions plus agres-
sives en réponse à sa provocation. Elle affiche plutôt une attitude de type « Rivaliser » ou,
de façon moins évidente, de type « Céder ». Les ingénieurs, eux, adoptent plutôt une attitude
« Éviter ».

Situation D

La réunion est stérile puisqu’elle n’a pas fait avancer la réflexion et que l’on se retrouve au
point de départ. Bruno (base Promoteur) veut des décisions rapides ; si la solution n’a pas été
trouvée durant la réunion, il décide unilatéralement de confier la tâche à quelqu’un d’autre.
Sylvie se sent culpabilisée et affiche un masque de victime (position -/+) dès son arrivée ;
puis elle se pose en « sauveur », face au « bourreau » Matthieu qui s’attaquait à Nicolas.
Néanmoins, elle finit avec le rôle de victime à nouveau. Ses réactions sont classiques pour
une personne de base Empathique ; elle adopte une attitude de type « Céder » ou « Éviter ».
Quant à Bruno, il choisit clairement l’attitude « Collaborer » au départ, puis passe rapidement
en mode « Rivaliser ».

Exemples : comment utiliser les outils du coach ?

En coaching individuel de Patrick, équipe Alpha, situation A

L’objectif est, pour Patrick, de prendre conscience, a posteriori, qu’il a eu une part de respon-
sabilité dans la mauvaise gestion de la confrontation, de voir s’il s’agit d’un comportement
exceptionnel ou automatique et d’en mesurer les effets négatifs.

Messager-Livre.indb 136 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
137
Chapitre 11

Lors d’un entretien en face à face, il serait bon de l’interroger sur les points suivants, pour
faciliter sa prise de conscience.
• Comment avez-vous réagi ? Pour quelles raisons ?
• Quel a été le déclencheur ?
• Quelle a pu être votre émotion à ce moment-là ? (Éventuellement, lui soumettre une liste
d’émotions positives et négatives ; notre vocabulaire est souvent pauvre en la matière !)
• Pourquoi cette émotion a-t-elle déclenché cette réaction ?
• Quelles sont les autres réunions ou situations où vous avez réagi de la même façon ?
• Quels ont été les effets à court terme ? À long terme ?
• Dans cette situation, a posteriori, comment auriez-vous pu réagir ? Quelle attitude aurait
été la plus appropriée ?
• Comment et quand pensez-vous pouvoir adopter cette nouvelle attitude ?

En coaching de l’équipe Bêta, situation C

L’objectif est, pour l’équipe, d’éviter à l’avenir de revivre ce type de confrontation, agréable ni
pour les membres de l’équipe, ni pour leur scrummaster.
Vous pouvez proposer aux membres de l’équipe d’établir leur inventaire de personnalités
Process Com. Au-delà de l’incident de la réunion, il me semble opportun de remonter à
sa probable origine, c’est-à-dire le profil des acteurs. Prendre conscience pour les uns que
Catherine a un besoin de contact pour être motivée (base Rebelle) et, pour Catherine, que
les ingénieurs de l’équipe ont un besoin de solitude (base Rêveur) serait déjà un grand pas,
le premier pour comprendre et accepter l’autre et sa différence.
Dans ce cas, on aurait également pu revenir sur la réunion en question et permettre à chacun
d’exprimer son ressenti ; mais l’exercice semble plus difficile avec ces deux types de profils
(Rêveur et Rebelle).

L’atelier « Attentes »
Un autre type d’outil peut être proposé comme alternative à l’équipe Bêta : un atelier
« Attentes ».

Comment utiliser cet outil ?


Le principe est de demander à chaque membre de l’équipe d’exprimer ses attentes vis-
à-vis des autres membres, la scrummaster participant au même titre que les ingénieurs.
Chaque attente fait l’objet d’un Post-it.

Messager-Livre.indb 137 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
138
Quatrième partie

Exemple : attentes de l’équipe Bêta

« En tant que développeur, je veux pouvoir m’isoler régulièrement pour réfléchir. »


« En tant que membre de l’équipe, je souhaite pouvoir faire de la R&D une demi-journée par
mois pour monter en compétences. »
« En tant que scrummaster, je souhaite une participation active de tous les membres de
l’équipe lors des rétrospectives pour améliorer notre fonctionnement. »

L’étape suivante consiste à afficher et à présenter oralement ces attentes. Chaque destina-
taire est ensuite invité à se prononcer sur sa capacité à répondre favorablement ou pas à
la demande. Un plan d’actions est ensuite établi.
Génératrices de stress, chez soi et chez l’autre, sources de démotivation, les attitudes
conflictuelles nuisent à la bonne croissance de l’équipe et à sa performance. C’est pour-
quoi, nous avons tout intérêt à développer de nouvelles compétences relationnelles pour
gérer positivement les confrontations.

Pratiquer la confrontation positive


Une confrontation positive est un échange de points de vue, un débat d’idées. Le bénéfice
est de tirer parti des différentes opinions pour trouver la meilleure solution et pouvoir
s’engager.
Cela n’a rien d’un conflit interpersonnel, même si l’on n’est pas d’accord. Il n’y a pas d’at-
taque personnelle, pas de dommages collatéraux ni de ressentiment résiduel après une
confrontation. Une confrontation positive aide à résoudre un problème tout en améliorant
la qualité de la relation. Elle s’attaque au problème et non aux personnes.
Le coach a, dans cette deuxième étape, un rôle clé de médiateur et de régulateur. On
verra que dans la troisième étape « Régulation et normalisation », l’équipe atteint un
degré d’autonomie lui permettant de réguler elle-même ses différends, sans aide externe.

Réguler
« Réguler », c’est en quelque sorte purger tous les non-dits qui ont pu s’empiler. Patrick
Lencioni invite les membres d’une équipe à jouer les « mineurs » pour « extraire les
désaccords enfouis dans les souterrains » 3.

3. Patrick Lencioni, Optimisez votre équipe, Un monde différent, 2006

Messager-Livre.indb 138 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
139
Chapitre 11

Après une altercation, par exemple, c’est oser aborder le sujet, même s’il dérange ; c’est
en parler vraiment, de façon authentique, et en parler jusqu’au bout, sans éliminer préci-
sément ce qui est fâcheux et gênant. En effet, on peut vouloir, mais ne pas oser en parler.
On peut en parler, mais prendre trop de précautions, qui finalement dénaturent le propos,
puis on peut omettre certains éléments, sans que le problème soit finalement résolu.
Un outil particulièrement performant facilite la régulation de certains conflits, ouverts ou
latents. Il s’agit du « jeu de cartes », dont le principe est d’organiser, par binômes au sein
d’une équipe, une session d’échange de feedback.

Comment utiliser cet outil ?

Si, au sein d’une équipe qui a déjà vécu quelques sprints, vous sentez des tensions, vous
pouvez – à condition que la confiance soit instaurée – proposer un jeu de cartes autre que
le planning poker, dans le cadre d’un atelier dédié.
Il s’agit, pour chaque membre de l’équipe, de renseigner une carte pour chacun de ses
coéquipiers et de répondre aux quatre questions suivantes.
• Que fait-il bien ?
• Que peut-il améliorer ?
• Quelles sont les difficultés que je rencontre avec lui (elle) ?
• Quand je rencontre ces difficultés, que puis-je faire, à mon niveau ?
Ensuite, vous devez prévoir une heure ou deux durant lesquelles chaque membre ren-
contre en face à face tous ses coéquipiers ; ainsi, en binôme, ils échangent réciproquement
sur le contenu de leur carte.
Au cas où la communication serait rompue entre deux personnes, vous pouvez proposer
votre aide. Rappelez-vous que vous êtes, de façon générale, Protecteur (3 P), c’est-à-dire
le gardien de la qualité et de la bienveillance des échanges. À ce titre, vous devez être
vigilant sur tout dérapage éventuel.
Le résultat est généralement surprenant et vaut toutes les actions de team building. En
effet, une fois encore, on est souvent surpris de ce que pense l’autre. D’abord, chacun
reçoit un feedback positif, puis un autre non pas négatif mais suggestif pour s’améliorer.
Et surtout, chacun prend conscience que, dans la gestion de la relation difficile, la solu-
tion à trouver réside d’abord en soi (question n° 4 : « Quand je rencontre ces difficultés,
que puis-je faire, à mon niveau ? »).

Messager-Livre.indb 139 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
140
Quatrième partie

Attention !
L’exercice n’est pas facile. Il est donc impératif de vous assurer de certains prérequis :
confiance et bienveillance entre les membres, volontariat des participants, temps dispo-
nible, faible pression sur le projet.

Le rôle du coach, plus globalement, est de donner à chaque membre de l’équipe les
moyens de s’exposer plus en confiance dans une confrontation. Il propose de déjouer les
jeux de pouvoir ; il éclaire sur les réactions prévisibles de ses coéquipiers et il entraîne à
la pratique de la communication pacifique.

Déjouer les jeux de pouvoir


Il existe, en effet, dans les organisations, des jeux de pouvoir et d’influence qu’il convient
de détecter. Le triangle dramatique de Stephen Karpman (figure 11-2) nous aide à mieux
comprendre ce qui se passe.

Figure 11-2 Persécuteur Sauveteur


Le triangle ou
« bourreau »
dramatique
de Karpman

Victime

Source : Analyse transactionnelle

Le triangle met en scène trois personnages dans une relation dynamique et dans un jeu
souvent inconscient.
• La victime : elle subit une « persécution ». Elle vit une situation dont elle n’est pas
responsable, mais pour laquelle il y a nécessairement un coupable. Elle se plaint et
reste souvent passive. Elle a tendance à rechercher de l’aide, mais aucune solution n’est
adaptée à son cas (« Oui, mais… ») : elle est en position de vie -/+ ou -/-.
• Le persécuteur ou « bourreau » : il veut souvent se venger d’une frustration et prendre
sa revanche. Il peut être agressif, ironique. Il n’écoute généralement pas et ne cesse de
faire des reproches. Il a besoin d’une victime et veut dominer : il est en position de
vie +/-.

Remarque
Le persécuteur est perçu de façon négative par une victime, mais il peut être un inno-
vateur, un initiateur, la source d’une salutaire remise en question, sans comportement
dominant ni agressif, ni intention de persécuter.

Messager-Livre.indb 140 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
141
Chapitre 11

• Le sauveteur : c’est le « héros », celui qui protège, qui doit absolument faire quelque
chose pour la victime, même si on ne lui a rien demandé. Il pense savoir ce qui est bon
pour la victime et se sent donc indispensable et irremplaçable : il est en position de
vie +/-.

Remarque
Le sauveteur est souvent guidé par la pitié, la culpabilité ou l’anxiété. Il est donc animé
d’une bonne intention ; il croit bien faire.

Nous sommes généralement attirés inconsciemment par l’un de ces trois rôles : nous
jouons la victime parce ce que nous obtenons de l’attention de la part des autres, nous
jouons le persécuteur pour avoir l’illusion du pouvoir ou le sauveur pour soigner notre
image. Et nous passons d’un rôle à l’autre, souvent sans nous en apercevoir.

Exemple : équipe Gamma, situation D

Lors de la réunion organisée par Bruno, le jeune développeur Nicolas est critiqué par Mat-
thieu. Sylvie intervient pour prendre sa défense.
Le persécuteur ou bourreau est celui qui critique, Matthieu. La victime est Nicolas, qui ne
demande rien. Le sauveteur est Sylvie. Cependant, cette dernière se fait à nouveau rabrouer.
Elle devient donc une nouvelle victime.
Un nouveau persécuteur devient possible, en la personne de Nicolas (ex-victime), qui n’ap-
précie pas les arguments invoqués par Sylvie : « C’est bon, Sylvie, je suis assez grand,
non ? » Ou bien le même persécuteur, persévérant dans son rôle : « Toi, Sylvie, tu ne t’en es
pas mieux sortie, je crois… » Ou encore un tiers, Bruno, par exemple, attiré par le jeu auquel
il assiste et appréciant de trouver une victime pour démontrer son pouvoir : « Sylvie, on ne t’a
pas demandé ton avis ! »
D’ailleurs, dans la suite de l’histoire, un autre jeu se dessine, lorsque Bruno choisit de confier
la tâche à un autre développeur plus chevronné ; ce dernier pourrait bien devenir le nouveau
persécuteur de Nicolas qui, s’il ne fait rien, risque de devenir le bouc-émissaire de l’équipe.

En tant que responsable du cadre, le coach doit veiller à ce qu’aucun jeu ne soit entretenu,
notamment en invitant les protagonistes à reformuler en mode +/+ ce qui vient d’être dit.
Le coach protège les acteurs pour qu’une confrontation ne se transforme pas en conflit,
mais il ne surprotège pas les victimes. Enfin, il n’entre pas lui-même dans un jeu vers
lequel il pourrait être attiré subrepticement.

Comment utiliser cet outil ?


La première étape consiste à détecter ces jeux. Observez les échanges, repérez la distri-
bution des rôles : qui est victime ? Qui est persécuteur ? Qui est sauveteur ?

Messager-Livre.indb 141 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
142
Quatrième partie

Une fois que vous avez détecté un jeu, il est essentiel de chercher à établir un autre
mode relationnel entre les personnes et à revenir en mode +/+ (voir chapitre 7). Invitez
la victime à développer sa responsabilité, à exprimer ce qu’elle ressent, à argumenter, à
proposer une solution, à prendre conscience de sa valeur.
Vous devez amener le sauveteur à se poser les questions suivantes : « Ai-je une demande
de la victime ? », « Ai-je envie de l’aider ? », « Suis-je compétent pour l’aider ? » et « Ma
victime va-t-elle pouvoir se prendre en charge ? »
Enfin, face à un persécuteur, invitez-le à chercher une nouvelle façon de communiquer,
moins agressive ou plus explicite, tenant compte du profil de ses interlocuteurs.

Question au coach :

Comment éviter d’entrer soi-même dans ces jeux psychologiques ?

Plusieurs stratégies sont possibles 4.


• Se rappeler l’autre triangle, celui des 3 P (Puissance, Permission, Protection) : c’est l’anti-
dote ! Victime et sauveteur doivent prendre conscience que chacun a un potentiel à déve-
lopper et une responsabilité à exercer (voir chapitre 4).
• Jouer le même rôle que son interlocuteur peut avoir un effet miroir laissant l’autre prendre
conscience de son jeu ou voir qu’il ne trouvera pas, en face, le rôle qu’il recherche ; si une
victime trouve une victime en face d’elle, elle sera interloquée de ne pas trouver un sauve-
teur et pourra s’interroger sur ce qui est en train de se jouer.
• Pousser le curseur à son maximum en jouant exagérément le rôle attendu par son inter-
locuteur, ce qui peut surprendre et effrayer celui qui invite à entrer dans le jeu ; cela peut
l’amener à changer de comportement.
• Le silence ou le retrait de la conversation, pour signifier son refus d’entrer en relation dans
ces conditions.
• Envoyer des signes de reconnaissance positifs pour valoriser la personne.
• Rester factuel, faire préciser, clarifier, rester neutre.
• L’humour ou la dérision, à utiliser avec précaution.

Anticiper les réactions prévisibles grâce à la Process Communication


Sans toujours comprendre pourquoi, il arrive que nous connaissions des situations de
mécommunication. Concept issu de l’analyse transactionnelle, il s’agit d’un échec de
communication : soit l’émetteur ne se fait pas comprendre par son interlocuteur, soit il ne
comprend pas son interlocuteur. Le degré le plus élevé de mécommunication conduit au
conflit ou à la rupture totale de communication.

4. Merci à Alain Cardon, http://www.metasysteme-coaching.fr/francais/alain-cardon/

Messager-Livre.indb 142 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
143
Chapitre 11

« Il y a mécommunication dès lors que commence à s’altérer l’expression ou la com-


préhension des messages que nous tentons de faire passer. »5
En se connaissant mieux et en connaissant mieux ses coéquipiers, il est possible de dé-
tecter les signaux avant-coureurs d’une situation de mécommunication.
La Process Communication nous éclaire sur les comportements prévisibles de chacun
des six types de personnalités. En effet, nous avons, à notre disposition, un « feu trico-
lore », qui nous indique notre disposition plus ou moins grande à (bien) communiquer.
• Lorsque le feu est vert, nous communiquons de façon harmonieuse avec les autres,
nous nous faisons comprendre, nous comprenons l’autre.
• Lorsque le feu passe à l’orange, nous abordons une situation de mécommunication ou de
stress. Nous ne nous faisons plus comprendre, nous ne comprenons pas et n’acceptons
pas l’autre. Nous commençons à entrer dans un mode relationnel défensif ou agressif,
nous lâchons notre position de vie +/+. Nos perceptions sont altérées, notre pensée n’est
pas claire, nos émotions sont inopportunes, nos comportements sont inadaptés.
• Lorsque le feu devient rouge, nous entrons dans une phase de mécommunication totale.
Or, ce qui est vrai pour soi l’est aussi pour les autres. En effet, les autres ont aussi leur
feu tricolore ; reste à déterminer les facteurs, propres à chacun, qui modifient la couleur
du feu.
La Process Com offre, à ce titre, une grille intéressante permettant ainsi d’anticiper un
malentendu ou un conflit (tableau 11-1). Pour chaque type de personnalité, le modèle
nous propose une grille de comportements prévisibles qui nous indiquent la couleur du
feu tricolore.
Tableau 11-1 Les séquences de stress par type de personnalité 6

Type de personnalité 1er degré de stress 2e degré de stress


« feu orange » « feu rouge »
Empathique Se suradapte. Cherche à faire plaisir Fait des erreurs.
et n’écoute pas vraiment les membres
de l’équipe. Manque de confiance en soi, rit de soi
de manière inappropriée et invite à la
Le manager est trop attaché au bien- critique.
être des gens et a du mal à prendre
des décisions.

5. Gérard Collignon, Pascal Legrand, Coacher avec la Process Communication, InterEditions, 2006
6. Taibi Kahler, Ph.D., Manager en personne, Kahler Communication, Inc., Little Rock, Arkansas, 1988,
1992, 2000, 2004
Taibi Kahler, Ph.D., Process Communication Management Seminar, Kahler Communication, Inc., Little
Rock, Arkansas, octobre 1982, 1996

Messager-Livre.indb 143 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
144
Quatrième partie

Rebelle Fait des efforts pour comprendre ce Blâme.


qu’il doit faire. Râle en soupirant.
Se montre négatif, se plaint. Adresse
Le manager a du mal à savoir com- des « oui, mais… » à tout le monde et
ment faire quoi et délègue mal. se met à blâmer les autres, les événe-
ments, les situations.
Promoteur Ne donne pas les informations et at- Manipule.
tend des membres de l’équipe qu’ils
se débrouillent seuls. Provoque des bagarres, ignore ou
casse les règles et manipule les au-
Le manager n’apporte pas de soutien. tres.
Rêveur Se replie sur lui-même (passivité) et Attend passivement.
se coupe de l’équipe. Devient trop
impersonnel et insensible à ce qui se Retrait long dans la passivité, aug-
passe. mentation des initiatives et projets qui
ne finissent pas.
Le manager attend que les choses se
résolvent seules et ne prend pas de
décision.
Persévérant Attend des membres de l’équipe qu’ils Impose ses croyances.
soient parfaits et se focalise sur ce qui
ne va pas. Extrêmement sensible aux critiques,
il devient suspicieux et donneur de
Le manager se concentre sur ce qui leçons. Croit que seules ses opinions
ne va pas et sur ce qui n’est pas bien. sont les bonnes.
Travaillomane Devient perfectionniste, pinaille et Surcontrôle.
donne trop d’informations.
Frustré par ceux qui ne pensent pas
Le manager ne délègue pas bien. logiquement. Devient obsessionnel sur
les délais, l’argent, l’ordre, la propreté.

Comment utiliser cet outil ?


Bien entendu une formation à la Process Com ou une lecture approfondie s’imposent
pour en maîtriser les concepts et les subtilités. Il peut être opportun, d’ailleurs, de former
une équipe entière qui découvre et partage ce langage commun, afin de mieux collaborer.
Lorsque vous détectez un passage au feu orange, c’est-à-dire qu’une personne montre un
comportement caractéristique du premier degré de stress, cela signifie qu’elle active son
message contraignant principal (voir chapitre 3). L’intervention efficace consiste alors
à utiliser le canal et la perception associés au type de personnalité identifié7 (voir cha-
pitre 7) pour se reconnecter avec la personne.
La perception est la porte d’entrée pour interpeler l’autre, créer le contact et entrer en
communication. Dès lors que l’on utilise la « bonne » porte, l’interlocuteur se sent écouté
et reconnu.

7. Taibi Kahler, Ph.D., The Advanced PCM Seminar, Kahler Communication, Inc., Little Rock, Arkansas,
1997

Messager-Livre.indb 144 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
145
Chapitre 11

• Avec le « Sois parfait » (type Travaillomane), utiliser le canal interrogatif/informatif et


fonder l’échange sur les pensées et la logique.
• Avec le « Sois parfait » (type Persévérant), utiliser le canal interrogatif/informatif et
solliciter les opinions ou les convictions.
• Avec le « Fais plaisir » (type Empathique), utiliser le canal nourricier et les émotions,
faire preuve de chaleur humaine.
• Avec le « Fais des efforts » (type Rebelle), utiliser le canal émotif/ludique et provoquer
des réactions par la plaisanterie.
• Avec le « Sois fort » (type Rêveur), utiliser le canal directif et solliciter l’imagination.
• Avec le « Sois fort » (type Promoteur), utiliser le canal directif et proposer des actions.
Si vous détectez qu’une personne déclenche les signaux du deuxième niveau de stress ou
feu rouge, cela indique que ses besoins psychologiques (tableau 7-2) ne sont pas satisfaits
positivement. La réaction, souvent inconsciente de la part de cette personne, est alors
de tenter de les satisfaire, mais de façon négative. Avec quelques clés, nous pouvons
alors rétablir la communication positive et éviter la confrontation ou le jeu psychologique
(tableau 11-2).
Tableau 11-2 Exemples de réponses aux comportements négatifs
pour la satisfaction des besoins psychologiques

Type de personnalité Comportement négatif (exemples) Parade


Empathique Se dévalorise, se présente en victime. Adresser des signes de reconnais-
sance inconditionnels, exprimer ses
ressentis, être chaleureux.
Rebelle Va déranger ses collègues, provoque Solliciter sa créativité, lui demander sa
et pousse à bout, n’est jamais respon- réaction sous forme d’onomatopées
sable des problèmes, conteste pour le (« T’es OK ? », « Ça te botte ? »).
plaisir.
Promoteur Monopolise la parole pour séduire, Admirer sincèrement, reconnaître les
impose un niveau d’énergie et d’effer- réussites, lancer des défis.
vescence élevé, fonce tête baissée et
prend des risques, utilise la compéti-
tion négative, sème la zizanie.
Rêveur Refuse toute invitation à déjeuner, Respecter le besoin de solitude, pro-
évite toutes les manifestations pro- poser la tranquillité et l’isolement,
fessionnelles, ne prend pas la parole fixer des directives et des échéances
en réunion. claires.
Persévérant Monopolise la parole pour convaincre Solliciter son opinion, son avis.
à tout prix, s’arc-boute sur des posi-
tions, refuse toute idée qui ne vient Lui marquer notre confiance.
pas de lui, écoute peu.

Messager-Livre.indb 145 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
146
Quatrième partie

Travaillomane Ne parle que du travail lors des Adresser des félicitations sur la qua-
pauses et déjeuners, s’approprie les lité du travail ou son utilité.
idées des autres, se surmène, perd
du temps sur des détails. Proposer un agenda, des dates, des
échéances et les respecter.
Impose ses exigences temporelles,
refuse l’improviste, est agressif avec
ceux qui le dérangent.

Cette connaissance des canaux de communication, des « portes d’entrée » et des besoins
psychologiques participe non seulement de la meilleure connaissance de soi et des autres,
mais aussi de l’amélioration des relations au sein de l’équipe. Elle facilite grandement les
confrontations positives.

Pratiquer une communication pacifique


N’aie pas peur de te confronter ; du chaos naissent les étoiles.
Charlie Chaplin

Afin d’accompagner les membres d’une équipe à pratiquer une communication paci-
fique et des confrontations positives, nous pouvons nous inspirer de l’humanisme de la
Communication NonViolente® (CNV), créée par Marshall B. Rosenberg. L’objectif est
de développer des relations authentiques, bienveillantes et respectueuses pour aborder
sereinement ces confrontations.
Il est compréhensible que, pour certains, aborder les relations interpersonnelles sous cet
angle dans la sphère professionnelle puisse être inconfortable. Cependant, je constate
quotidiennement qu’il suffit qu’une personne modifie son comportement dans une équipe
pour que les autres adaptent le leur. Alors, qui doit commencer ? Soi-même ou les autres ?
En tant que responsable du cadre relationnel, il est essentiel d’amener chacun à prendre
conscience de sa part de responsabilité dans la qualité de ses relations avec les autres.
L’énergie positive ainsi dégagée est d’autant mieux exploitée : nous nous affirmons
davantage, nous savons dire non, nous valorisons les objections et gérons sereinement
l’agressivité.
Le fondement d’une relation de qualité avec les autres s’appuie sur une démarche en
quatre étapes, transposable à de nombreuses situations (figure 11-3).

Messager-Livre.indb 146 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
147
Chapitre 11

Figure 11-3
Les quatre étapes
de la communica-
tion efficace

Source : Marshall B. Rosenberg, Communication NonViolente®

1. Observer les faits : lorsque nous décrivons une situation vécue, nous devons nous
contenter des faits et non des impressions ou des interprétations. Nous devons être
vigilants sur la forme (ton, position, regard…), qui peut en dire plus long que les faits.

Exemple : un développeur de l’équipe Alpha à Patrick

Non OK : « De toute façon, toi, Patrick, tu as toujours raison !!! »


OK : « Lors de la dernière revue de backlog, nous discutions sur l’interprétation d’une user
story et toi, tu as commencé à hausser le ton et à défendre ton avis avec véhémence. Puis tu
as accusé Christophe de mettre ta compétence en doute. »

2. Exprimer ses sentiments (facultatif) : il s’agit, si on le souhaite, de partager son res-


senti, son émotion ou une sensation physique. Encore faut-il en prendre conscience et
disposer d’un vocabulaire adapté !

Exemple : le même développeur

« Je me suis senti mal à l’aise lorsque tu as changé de ton. J’étais frustré et j’avais envie de
me mettre en colère aussi. Puis finalement, je me suis senti découragé, avec un sentiment
d’amertume. »

3. Exprimer des besoins : comme nous l’avons vu dans le chapitre 3, les émotions sont
le reflet de nos besoins psychologiques. Nous avons des émotions positives lorsque nos
besoins psychologiques sont satisfaits et des émotions négatives s’ils ne le sont pas. Par
conséquent, il est important d’être à l’écoute de nos émotions et d’en analyser l’origine
pour viser leur satisfaction. Par ailleurs, accepter que nos émotions ne sont pas cau-
sées par les autres mais qu’elles sont bien un indicateur, l’expression de nos besoins,
disculpe l’autre et renforce notre propre responsabilité.

Messager-Livre.indb 147 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
148
Quatrième partie

Exemple : le même développeur (base Persévérant)

« J’ai besoin que l’on m’écoute, car j’ai des opinions que je souhaite faire valoir aussi ; et
dans notre discussion, je n’ai pas pu l’exprimer jusqu’au bout. »

4. Formuler une demande : une demande formulée à l’autre précisément peut viser soit
la qualité de la relation, soit une action, un objectif.

Exemple : le même développeur

« Je souhaiterais, si tu en es d’accord, pouvoir m’exprimer jusqu’au bout lorsque j’ai une


opinion à faire partager à l’équipe ou un avis à donner ; et je souhaiterais que les échanges
dans l’équipe soient moins tendus, parfois. »

Cette démarche témoigne d’une position de vie +/+, constructive, d’égal à égal, et incite
l’interlocuteur à se connecter également en mode +/+.

Comment utiliser cet outil ?


Attention ! Si l’objectif, dans cette phase de confrontations et tensions, est d’apprendre
à l’équipe à réguler ses échanges, votre rôle est de veiller à les encadrer. En effet, les
membres d’une équipe ne sont généralement pas habitués à s’exprimer de façon aussi
authentique ; ils peuvent donc avoir la sensation de baisser un peu leur garde.
Vous devez être vigilant et sécuriser le cadre pour qu’aucun des acteurs ne fasse les frais
de ces échanges, qui ne doivent pas être exploités de façon malveillante, sur-le-champ
ou ultérieurement. Vous pouvez, par exemple, préciser que l’expression d’un ressenti est
facultative.
Si la régulation est collective, vous ferez remarquer qu’aucune raillerie n’est tolérée, vous
veillerez à ce que tout le monde puisse s’exprimer sans être interrompu…
Si la régulation se déroule entre deux personnes et si vous êtes le médiateur, vous pren-
drez garde à bien répartir le temps de parole, sans privilégier l’une ou l’autre, sans prendre
parti vous-même.
N’hésitez pas à demander une reformulation en mode +/+, le cas échéant.
La démarche s’applique tout particulièrement dans les situations d’agressivité ou d’objec-
tions.

Savoir gérer l’agressivité


L’agressivité est une réaction émotionnelle excessive. Au-delà du fait qu’elle doit être
canalisée, l’origine doit en être rapidement analysée, car cette réaction est peu productive

Messager-Livre.indb 148 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
149
Chapitre 11

et déstabilisante pour l’ensemble de l’équipe. De plus, quelqu’un qui agresse n’est pas en
position de vie +/+, ce qui rend la communication inefficace, voire impossible.
Le rôle du coach de l’équipe se situe à deux niveaux. Son intervention peut aider un membre
de l’équipe soit à mieux gérer l’agressivité des autres à son encontre, soit à mieux gérer sa
propre agressivité. Son action peut également porter sur le fonctionnement de l’équipe elle-
même face à l’agressivité (nous traiterons cet exemple dans le chapitre suivant).

Exemple : mise en situation de coaching individuel

Équipe Alpha, coaching de Patrick, scrummaster, suite à la situation A


Patrick : « Un développeur de l’équipe m’a fait remarquer que j’avais haussé le ton, lors de la
dernière revue de backlog, et que j’avais même agressé Christophe, un membre de l’équipe.
J’aimerais que vous m’aidiez à être moins agressif. »
Les faits :
Coach : « Que s’est-il passé exactement ? Pouvez-vous vous remémorer le déroulement
précis de la revue, avant et après l’incident ? »
Le ressenti :
Coach : « Qu’avez-vous ressenti, à ce moment-là, précisément ? Pouvez-vous vous rappeler
une sensation ? Comment étiez-vous ? Debout, assis… ? »
Les besoins :
Coach : « Que signifie cette colère, selon vous ? Qu’est-ce qui, en vous, a déclenché cette
sensation ? Qu’est-ce qui vous a déplu dans la situation que vous avez vécue ? Pourquoi ?
Cela vous arrive-t-il souvent ? Pouvez-vous me raconter d’autres situations similaires, où
vous auriez ressenti la même chose ? Quel est le point commun entre ces différentes situa-
tions ? »
La demande :
Coach : « Maintenant que vous avez identifié l’origine de votre agressivité, qu’allez-vous
faire ? Quelle est la demande que vous pourriez vous adresser à vous-même ? Comment
pourriez-vous gérer, à l’avenir, cette même situation ? Qu’auriez-vous envie de faire vis-à-vis
de ce développeur ? »

Le plus important face à l’agressivité est de ne pas répondre par l’agressivité. Plusieurs
cas de figure se présentent (tableau 11-3).

Messager-Livre.indb 149 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
150
Quatrième partie

Tableau 11-3 Scénarios possibles face à l’agressivité

Moi L’autre
Je suis en +/+. L’autre m’agresse, il est en +/- ou
-/+, voire -/-.
Scénario 1 Je réagis en +/-, j’agresse aussi. L’autre surenchérit dans
l’agressivité.
Résultat scénario 1 +/- contre +/- : la communication ne peut pas être efficace.

Scénario 2 Je réagis en -/+, je suis tétanisé,


je perds mes moyens.
Résultat scénario 2 -/+ contre +/- : je fais le jeu de l’autre, il y trouve son compte ; la com-
munication ne peut pas être efficace.

Scénario 3 Je réagis en +/+, j’exprime à 1. Soit l’autre a conscience de son


l’autre que je me sens agressé. agressivité (volontaire). Il est satis​
fait de l’effet de son agressivité, il
persiste.
Ou bien il se sent démasqué, il
arrête.
2. Soit l’autre n’a pas conscience
de son agressivité (involontaire) :
il en prend conscience et y met
fin.
Résultat scénario 3 +/+ contre +/- : je n’entretiens pas le jeu de l’agresseur, je le ramène
en +/+ et la communication est possible, ou alors il persiste dans
l’agressivité et je refuse la communication.

À partir du moment où la communication est possible, la démarche en quatre étapes vue


précédemment peut être entreprise.

Valoriser les objections


Il nous arrive en permanence de devoir faire face à des objections du type « Non, non »,
« Je ne suis pas d’accord », « C’est faux », « Ce n’est pas tout à fait vrai » (péremp-
toire), « Ah bon, pourquoi donc ?» (dubitatif), « Je ne comprends pas, où voulez-vous en
venir ? », « La question n’est pas là »…
Les objections sont, la plupart du temps, ressenties comme une opposition à soi, plus qu’à
ce que l’on dit ou à ce que l’on pense. Nous prêtons d’ailleurs beaucoup plus d’attention à
la forme des objections qu’au fond lui-même, surtout si elles sont agressives !
Une objection est souvent l’expression d’un besoin psychologique. Recevoir une objection
est par conséquent une opportunité de mieux connaître l’autre et d’entrer en communica-
tion avec lui, à condition de faire preuve d’empathie.

Messager-Livre.indb 150 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
151
Chapitre 11

« L’empathie est une qualité d’écoute et de présence à l’autre, à ses sentiments et à ses
besoins, sans vouloir l’amener quelque part et sans souvenir du passé. » (Marshall
B. Rosenberg)
Figure 11-4
Le traitement Identifier et
Valoriser Traiter Réévaluer
des objections analyser
l’objection l’objection
l’objection
l’objection

1. Dans un premier temps, il convient d’identifier et d’analyser l’objection : s’agit-il d’une


objection sincère ? Il peut s’agir d’un prétexte, tout simplement, qui exprime une peur,
une méfiance, une réserve, de la mauvaise foi. Dans ce cas, quel besoin psychologique
cache-t-elle ? Est-elle fondée ? Peut-être y a-t-il une incompréhension, un manque d’in-
formations, un préjugé ?
2. Quoi qu’il en soit, une objection doit être valorisée, en la prenant en considération,
en la reformulant ou en remerciant son émetteur de donner l’occasion d’apporter une
réponse.
3. Elle est ensuite traitée et une réponse est proposée avec des arguments qui l’étayent.
4. Puis, l’objection est réévaluée, ce qui permet de vérifier que l’objection a été correcte-
ment traitée, même si son émetteur n’a pas nécessairement changé d’avis.

Comment utiliser cet outil ?


Lors d’une cérémonie agile, par exemple, si une objection est émise par l’un des membres,
prenez le temps de vous y arrêter. Invitez l’émetteur à la reformuler en position +/+ si
nécessaire, puis proposez au destinataire de suivre la démarche ci-dessus pour traiter
l’objection en question.
Prendre le temps de pratiquer l’exercice régulièrement améliore la qualité des relations ;
les objections, mal acceptées au début, sont alors de mieux en mieux accueillies.
Une fois encore, en dissociant l’objection et la remise en cause personnelle, nous sommes
disponibles pour des confrontations positives et des échanges constructifs.

Favoriser l’affirmation de soi


L’affirmation de soi ou assertivité est la capacité à afficher ses positions ou à défendre ses
droits, sans anxiété, dans le respect de ceux des autres.
Le manque d’assertivité est précisément à l’origine des confrontations négatives. En effet,
une personne qui n’a pas développé sa capacité à s’affirmer sereinement est tentée par la
passivité ou la soumission, la fuite ou l’agressivité.

Messager-Livre.indb 151 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
152
Quatrième partie

Dans l’accompagnement de l’équipe, en particulier dans cette étape de confrontations et


de tensions, le coach facilite le développement de l’affirmation individuelle des membres
de l’équipe ; il a pour cela posé un cadre et il entretient la confiance instaurée.

Assertivité collective
L’assertivité collective, c’est-à-dire l’affirmation et la reconnaissance de l’équipe vis-à-vis
de l’extérieur, ne sera envisageable que si l’équipe a développé sa véritable identité, si
ses membres ont un sentiment d’appartenance et s’ils ont démontré des comportements
solidaires.

Comment utiliser cet outil ?


Si vous souhaitez favoriser l’assertivité des membres de l’équipe, voici quelques pistes.
• Veillez à ce que chacun s’exprime en son nom, c’est-à-dire que chacun doit s’efforcer
de parler à la première personne du singulier : « je » et non pas « on », comme c’est
souvent le cas.
Non OK : « Souvent, on sent des tensions lors des réunions. »
OK : « Souvent, je sens des tensions lors des réunions. »

• Repérez, lors des cérémonies, si les acteurs sont mal à l’aise à l’idée de devoir se
confronter. Exprimez votre ressenti ou votre impression et invitez les participants à en
faire de même.
« Je sens quelques tensions suite à ce qui vient d’être dit ou décidé. Quelqu’un partage-
t-il mon ressenti ? Qui aurait envie de s’exprimer ? »

• Veillez, lors d’une discussion, à ce que l’on ne s’éloigne pas du sujet qui fâche, tant qu’il
n’a pas été réglé. Mettez les acteurs face à leurs responsabilités.
« J’aimerais revenir au point précédent : considérez-vous que tout le monde s’est ex-
primé sur le sujet ? Pourquoi ne pas faire un tour de table ? Peut-on faire une synthèse ?
Disposez-vous de tous les éléments, tous les points de vue pour décider ? »

• Invitez une personne (peu affirmée) qui serait la seule à s’opposer à une décision, à
expliciter son « non ». De même, autorisez celui qui se sent blessé ou diminué par un
« non » à exprimer ce qu’il ressent.
« J’aimerais que nous écoutions Annabelle qui semble être d’un avis différent. Anna-
belle, quels sont les motifs qui t’amènent à dire non ? »
« Jérôme, je sens que le non que vient d’exprimer Annabelle suscite en toi une réaction.
Voudrais-tu la partager avec nous ? »

• N’hésitez pas à mettre en avant le droit à dire non. Tout en protégeant celui qui dit non,
sans pour autant le « sauver », vous permettez ainsi que ne s’installent ni non-dits ni
ressentiments.

Messager-Livre.indb 152 12/10/12 09:38


Confrontations et tensions
153
Chapitre 11

Dire ce que l’on a à dire de façon authentique est un signe de transparence, valeur chère
à l’agilité. D’ailleurs, être à l’aise dans le face-à-face est l’un des douze principes du
Manifeste Agile.
Lorsque ces confrontations sont positivement gérées, on observe qu’elles renforcent les
relations entre les membres de l’équipe : chacun apparaît plus authentique et cette authen-
ticité est une brique de base pour construire la confiance.

Question au coach :
Ce mode de communication est-il toujours possible, y compris lorsque nous sommes
en présence de prestataires externes, du product owner ou de toute autre personne
étrangère à l’équipe ?

Il est vrai que certaines conditions ne favorisent pas ce climat d’authenticité et de transpa-
rence. On peut tout à fait avoir réussi à le créer au sein de l’équipe mais dès lors qu’un élé-
ment extérieur intervient, l’équilibre est fragile.
Cela signifie sans doute que l’équipe n’a pas encore atteint un tel niveau de maturité et de
confiance, au point d’être imperturbable : nous sommes, rappelons-le, à l’étape 2 du modèle
de Tuckman.
Dans un cadre où l’on retrouve à la fois des clients et des prestataires, le jeu peut être faussé,
à cause des enjeux économiques et politiques. Cependant, si les coéquipiers sur le terrain
parviennent à communiquer de façon constructive et à s’affirmer, la coopération n’en sera
que meilleure et la distinction entre prestataires et non prestataires ne sera plus visible.
Je me souviens d’une équipe qui avait décidé de n’accepter que les membres de l’équipe
lors des rétrospectives, afin de « laver leur linge sale en famille ». Ils n’ouvraient le cercle à
d’autres personnes que dans la dernière partie de la rétrospective. Cette équipe sentait son
équilibre menacé dès lors que des éléments externes étaient présents … et pas totalement
bienveillants.
Quoi qu’il en soit, c’est encore une fois au coach de veiller à la sécurité des échanges et à leur
encadrement par des règles claires.

Ce que nous avons appris


• Nous avons vu que lorsque des tensions apparaissent au sein d’une équipe, elles sont
légitimes et ne doivent pas être dissimulées.
• Nous avons découvert les différentes stratégies possibles dans la gestion de ces tensions
ou conflits.
• Nous avons compris, au travers d’exemples de situations difficiles, ce qui pouvait se
jouer entre les membres d’une équipe : jeux de pouvoir, comportements négatifs sous
stress prévisibles, manque d’affirmation de soi…

Messager-Livre.indb 153 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
154
Quatrième partie

• Dans ce contexte, le coach a un rôle de régulateur ; il a la responsabilité de sécuriser les


échanges et leurs conséquences éventuelles, en canalisant les tensions.
• Le coach accompagne les acteurs de l’équipe pour qu’ils abordent ces situations plus
sereinement. Nous avons vu comment ils apprennent à éviter les jeux psychologiques,
comment ils anticipent les réactions de leurs coéquipiers, puis comment ils développent
leur capacité à s’affirmer face aux objections, au refus ou à l’agressivité.
• La Process Com nous donne, ici encore, un éclairage sur les moyens de mieux viser les
« portes d’entrée » pour entrer en communication avec l’autre.

Outils du coach proposés

• Les cinq attitudes de résolution de conflit (modèle Thomas-Kilmann)


• La régulation avec le jeu de cartes
• Le triangle dramatique de Karpman
• La Process Communication et les réactions prévisibles sous stress
• Les quatre étapes de la Communication NonViolente
• Le traitement des objections et l’assertivité

Après la tempête, le beau temps ! Cette étape « Confrontations et tensions » a fait surgir
les difficultés, mais a également donné l’occasion d’ajuster le mode de fonctionnement de
l’équipe, qui se normalise.

Messager-Livre.indb 154 12/10/12 09:38


12
Régulation et normalisation

L’esprit d’équipe… c’est des mecs qui sont une équipe,


ils ont un esprit ! Alors ils partagent !
Coluche

La troisième étape de maturation de l’équipe voit celle-ci gagner en confiance. En effet,


un cadre commun, accepté par tous, commence à bien se dessiner, son identité émerge,
l’esprit d’équipe s’y développe ; les règles de fonctionnement s’améliorent et les relations
se normalisent.
Dans ce contexte, le coach de l’équipe est un peu plus en retrait que dans l’étape précé-
dente. Il l’accompagne dans sa progression vers la performance collective tout en main-
tenant une présence protectrice, les acquis demeurant fragiles.

Améliorer le processus
Au rythme des sprints, l’équipe agile met en place un processus continu d’amélioration.
Responsabilisée et sur le chemin de l’auto-organisation, elle adopte une démarche empi-
rique, qui vise à apprendre chemin faisant, à faire régulièrement le constat de ce qui a
plus ou moins bien fonctionné et à apporter les ajustements nécessaires. C’est le fonde-
ment de la rétrospective.

Messager-Livre.indb 155 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
156
Quatrième partie

La rétrospective, organisée à la fin de chaque timebox1 (release ou sprint) dresse le bilan :


grâce au feedback concernant le vécu et le ressenti de chaque membre, l’équipe peut
améliorer son processus. Il s’agit de :
• trouver les moyens d’améliorer les pratiques ;
• identifier ce qui fonctionne bien ;
• comprendre les raisons pour lesquelles les objectifs n’ont pas été atteints, le cas échéant ;
• ne pas laisser une situation se dégrader, remédier rapidement à un dysfonctionnement
ou résoudre un conflit ;
• prendre des décisions.
Le coach peut être amené à animer une rétrospective. L’enjeu majeur est de sensibiliser
les membres de l’équipe, peu habitués parfois, à être artisans de leur processus, à l’intérêt
qu’ils ont à s’impliquer dans la démarche. Au-delà de l’animation de la cérémonie agile,
c’est la facilitation de l’expression de chacun et de la régulation des difficultés qui est au
cœur du dispositif.
Afin d’aider l’équipe à progresser dans l’adoption des pratiques agiles, j’utilise la check-
list d’Henri Kniberg2, traduite par Fabrice Aimetti3, qui figure en annexe C.

Comment utiliser cet outil ?


Vous pouvez, soit lors d’une rétrospective, soit lors d’un atelier dédié, utiliser cette grille
pour mesurer comment évolue le degré d’agilité du processus de l’équipe.
Vous pouvez procéder par lots en sélectionnant quelques pratiques. Le principe est de les
afficher et d’inviter les membres de l’équipe à s’exprimer sur l’implémentation de chaque
pratique : considère-t-il qu’elle est parfaitement implémentée (gommette verte), moyen-
nement bien implémentée (gommette orange) ou alors pas du tout ou mal implémentée
(gommette rouge) ?
Ce qui est intéressant, ce sont les divergences de point de vue et les propositions d’amé-
lioration ou de suppression soumises par chacun. Ainsi, l’équipe ajuste son processus et
chacun de ses membres est impliqué dans son amélioration.
Vous pouvez mener cet atelier régulièrement en intégrant de nouvelles pratiques.
Enfin, si la rétrospective porte, bien souvent, sur les pratiques et les outils, sa valeur ajou-
tée réside aussi (et surtout !) dans la régulation des relations.

1. Une timebox ou « boîte de temps » est une tranche de temps, c’est-à-dire un sprint ou une release avec
une échéance de fin fixe.
2. http://blog.crisp.se/2007/11/14/henrikkniberg/1195064820000
3. http://www.fabrice-aimetti.fr/dotclear/public/traductions/Scrum-checklist-FR.pdf

Messager-Livre.indb 156 12/10/12 09:38


Régulation et normalisation
157
Chapitre 12

Ajuster les relations


Nous avons vu, dans l’étape précédente, que le coach avait un rôle majeur de régulateur.
Dans cette troisième étape, l’équipe prend peu à peu de l’autonomie pour s’autoréguler.
Elle sait de mieux en mieux résoudre ses problèmes de communication interpersonnelle
et métacommuniquer. Par ailleurs, ses membres deviennent progressivement lucides
sur leurs comportements négatifs et recherchent peu à peu le feedback bienveillant des
autres, considérant que c’est l’opportunité de s’améliorer.

Repérer les attitudes « écoutricides »4


Sans toujours nous en rendre compte, nous avons parfois des comportements anti-écoute.
Qui n’a pas émis un jugement péremptoire ? Qui n’a pas abordé un entretien avec un a
priori qui conditionne son approche de l’autre ? Qui ne coupe jamais la parole ?
L’effet de ces comportements peut être dommageable pour construire l’esprit d’équipe.
Prendre conscience de ses attitudes « écoutricides » ou, mieux encore, accepter que l’autre
nous les fasse positivement remarquer dénote un climat constructif au sein de l’équipe.
Le coach peut aider les membres de l’équipe à repérer ces comportements, à partir d’une
liste d’attitudes anti-écoute (tableau 12-1).

Tableau 12-1 Évaluer les comportements anti-écoute5

Comportements Mon évaluation Évaluation par


mon coéquipier

Jugements péremptoires

Manque d’attention

Impatience

Manque de disponibilité

Manque d’ouverture

Absence de curiosité

A priori

Imposer

Couper la parole

« Oui, mais… »

4. Yves Blanc, Le Manager à l’écoute, Dunod, 2e édition, 2005


5. Yves Blanc, op. cit.

Messager-Livre.indb 157 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
158
Quatrième partie

Attitude défensive ou négative

Procès d’intention

Absence de questions ouvertes

Monologue

Manque de tolérance

Tendance à faire les questions et les réponses

Manque de temps

Tendance à interpréter

Tendance à penser la réponse pendant que l’autre parle

Comment utiliser cet outil ?


Vous pouvez proposer cet exercice soit à la suite d’un différend entre membres de l’équipe,
comme outil de régulation, soit tout simplement comme entraînement à la communica-
tion, à titre préventif et ludique.
• 1re étape : à partir d’une liste que vous fournissez (tableau 12-1), chacun, individuel-
lement, évalue ses comportements anti-écoute, en notant le comportement selon sa
fréquence : 1 = rarement, 3 = parfois, 5 = (très) souvent.
• 2e étape : en binôme, les coéquipiers s’échangent leur feedback ; la colonne « Mon
évaluation » est masquée. Le coéquipier B note, à son tour, le comportement du coéqui-
pier A dans la colonne « Évaluation par mon coéquipier » et réciproquement.
• 3e étape : s’ensuit un échange constructif, preuves et illustrations à l’appui !

Attention !
Cet atelier ne peut être mené qu’avec l’acceptation des participants. Si c’est le cas, il
améliore grandement la communication et il participe de la pratique de la métacommu-
nication.

Métacommuniquer
Je rappelle que la métacommunication est la démarche qui consiste à faire dialoguer les
membres de l’équipe sur la façon dont ils communiquent, indépendamment de la teneur
de leurs messages. En effet, la forme du message est souvent bien plus significative que
le fond.

Messager-Livre.indb 158 12/10/12 09:38


Régulation et normalisation
159
Chapitre 12

Prendre une position « méta », c’est prendre de la distance par rapport à ce qui se vit ou
vient d’être vécu. C’est être attentif non seulement au contenu des échanges, mais égale-
ment au processus relationnel qui s’établit avec l’autre. On peut être en position méta en
tant qu’acteur soi-même ou en tant qu’observateur, comme le coach ou le scrummaster,
par exemple.
L’objectif, sur le même mode de la rétrospective, est d’améliorer le processus de commu-
nication entre deux personnes ou au sein d’une équipe.
Cette distance n’est possible qu’à partir du moment où l’on est authentique et juste soi-
même et que l’on croit à la sincérité de l’autre. Ce n’est donc possible qu’avec un mini-
mum de confiance, donc de vécu commun. La métacommunication est par conséquent
plus facile à pratiquer au cours de cette troisième étape de Régulation et normalisation.

Exemple : mise en situation de coaching d’équipe (équipe Bêta)

M’appuyant sur le modèle de la Process Com, j’invite les membres de l’équipe à prendre
connaissance des canaux de communication de chacun d’eux. Nous avons vu (tableau 8-1)
que chaque type de personnalité a un canal de communication préférentiel. Pour être plus
précis, il a un canal qu’il utilise (émission) ou apprécie particulièrement qu’on utilise (récep-
tion) pour entrer en communication, et il a d’autres canaux éventuellement ouverts ou fermés,
avec lesquels il est plus ou moins à l’aise dans ses interactions avec les autres.
Une fois le profil de personnalité connu de tous les membres, il est intéressant de travail-
ler en complément sur cette découverte des canaux ouverts et fermés au sein de l’équipe
(tableau 12-2).
En observant ce tableau-miroir, les coéquipiers découvrent leurs canaux de communication
respectifs ; ils réalisent ainsi pourquoi la communication interpersonnelle avec tel ou tel coé-
quipier est plus ou moins facile.
Être sensible au canal Interrogatif/Informatif pour Paul, Pablo, Alexis et Rodrigue est com-
préhensible ; c’est leur canal préférentiel en émission. En revanche, le canal Ludique/Émotif
qu’utilise Catherine, la scrummaster, est fermé pour tous. Tous comprennent enfin pourquoi
le contact a du mal à s’établir entre l’équipe et la scrummaster !

Tableau 12-2 Les canaux de communication de l’équipe

Membre de Canaux ouverts Canaux fermés


l’équipe
Bêta
Catherine Ludique/Émotif Nourricier
Paul Interrogatif/Informatif Ludique/Émotif
Directif Nourricier
Pablo Interrogatif/Informatif Ludique/Émotif
Directif
Nourricier

Messager-Livre.indb 159 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
160
Quatrième partie

Alexis Interrogatif/Informatif Ludique/Émotif


Directif Nourricier
Rodrigue Interrogatif/Informatif Ludique/Émotif
Nourricier
Directif

© Process Communication, Quality Team®

Comment utiliser cet outil ?


Après cette prise de conscience, le travail du coach, en accord avec les protagonistes,
consiste à les aider à s’accorder. Ainsi, en revivant certaines scènes vécues ensemble
ou dans la perspective de telle autre, ils analysent les raisons de leur incompréhension ;
chacun exprime ce qui lui a déplu, ce qui l’a heurté et comment il aurait apprécié qu’on
s’adresse à lui (elle) (voir à ce sujet le chapitre précédent sur les quatre étapes de la CNV).
On ne discute plus du fond, mais de la qualité de l’échange. Le coach les entraîne ensuite
à utiliser le bon canal.
Vous pouvez mener cet exercice dans le cadre d’un entretien individuel, en binôme ou, de
façon plus ludique, avec l’ensemble de l’équipe.

Attention !
Cet outil nécessite une maîtrise de la Process Com. Il est donc préférable de s’entourer
d’un coach certifié.

Enfin, métacommuniquer, c’est aussi accepter le feedback de l’autre !

Accepter le feedback de l’autre


La connaissance de soi et des autres est un facteur d’amélioration de la confiance et de la
collaboration au sein d’une équipe. Qu’y a-t-il de plus naturel que de solliciter le retour
des autres, en particulier sur nos comportements et nos savoir-être, afin de mieux nous
connaître et de savoir comment nous sommes perçus ?
Malheureusement, l’un des freins à l’authenticité et à la spontanéité dans les relations
est la crainte de la réaction et du jugement des autres. Et souvent, dans le doute, la vraie
nature de la personne est refoulée, ce qui engendre stress, mécommunication et démoti-
vation.
La fenêtre de Johari (figure 12-1) est un outil permettant de représenter la connaissance
que l’on a de soi et celle qu’ont les autres à notre endroit.

Messager-Livre.indb 160 12/10/12 09:38


Régulation et normalisation
161
Chapitre 12

Figure 12-1 Moi


La fenêtre Ce que je connais de moi Ce que j’ignore de moi
de Johari
Ce qu’il Zone de libre-échange Zone aveugle

L’autre
connaît

Ce qu’il Espace intime Inconnu


ignore

Source : Joseph Luft et Harington Inghane

Cette matrice contient tout ce que nous sommes : nos connaissances, nos émotions, nos
croyances, nos souvenirs, nos objectifs, nos sentiments, notre insconscient, etc. On y dis-
tingue « ce que je connais de moi » (partie gauche) et « ce que j’ignore » (partie droite),
d’une part, et « ce que les autres connaissent de moi » (partie supérieure) et « ce que les
autres ignorent de moi » (partie inférieure), d’autre part.
• une zone de libre-échange : c’est notre « vitrine ». Elle correspond à ce que l’autre et
moi connaissons de moi, c’est-à-dire mes comportements observables. Plus cette zone
est ouverte, plus je suis authentique, transparent et ouvert aux autres ;
• la zone dite espace intime, qui n’est connue que de moi-même. Il s’agit de mon espace
réservé : le siège de mes émotions, de mes peurs, de mes doutes, de mes sentiments,
que je ne souhaite pas livrer aux autres ;
« La possibilité de vivre commence dans le regard de l’autre. » (Michel Houellebecq)
• la zone aveugle : elle représente ce que les autres connaissent ou voient en moi sans
que j’en aie conscience. Par exemple, on vient de me faire savoir que je n’écoutais pas
et que je coupais sans cesse la parole, sans que je m’en aperçoive ! « Ouf ! Maintenant
je le sais ! »
• la zone inconnue : inconnue de moi et des autres, il s’agit de notre inconscient. Que
savons-nous de notre comportement face à telle ou telle situation inconnue ?

Comment utiliser cet outil ?


Je vous invite à présenter la fenêtre de Johari à l’équipe, qui la laisse affichée dans la salle
du projet. Régulièrement, vous pouvez organiser des sessions de feedback au cours des-
quelles chacun, de façon facultative, exprime, à l’un des membres de l’équipe, un motif
de satisfaction ou d’insatisfaction.

Messager-Livre.indb 161 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
162
Quatrième partie

Exemples de feedback

« Corinne, j’ai beaucoup apprécié ton sang-froid lorsque le gros problème de plantage du
serveur nous est tombé sur la tête. Merci. »
« John, je réagis assez mal lorsque, régulièrement, en milieu de sprint, tu paniques à l’idée
que nous n’y arriverons pas. Je ressens ça comme du pessimisme qui me fout le moral à
zéro ; désolée. »

Si le feedback est positif, le bénéfice est collectif. Si le feedback est négatif, je vous pro-
pose de traiter la problématique en aparté avec les personnes concernées.
Il faut ensuite systématiquement demander à la personne concernée, destinataire du feed-
back, de classer celui-ci dans la fenêtre de Johari et d’en tirer une conclusion : en avait-
elle connaissance ? Ce feedback va-t-il lui être utile ? Comment va-t-elle l’exploiter ?
Il est impératif que tous soient dans une position de vie +/+. Et cette démarche est pro-
posée, jamais imposée.
Généralement, cet outil assez sensible peut commencer à être utilisé à l’étape « Régula-
tion et normalisation », mais il le sera encore plus facilement à l’étape suivante, « Syner-
gie et performance » (voir le chapitre suivant).

Question au coach :
Ne dépasse-t-on pas la frontière de la collaboration d’équipe pour entrer dans un
univers de développement personnel ?

En effet, on peut considérer que ces exercices proposés – et non imposés – relèvent d’un tra-
vail de développement personnel, qui consiste à mieux se connaître, à prendre conscience de
ses talents, à se défaire de ses freins, à comprendre l’origine de ses comportements, à réali-
ser ses désirs… C’est généralement une démarche que l’on entreprend dans la sphère privée
avec un spécialiste de l’accompagnement (coach, psychothérapeute, psychanalyste…).
Le danger peut être précisément que le coach ne sache pas respecter la frontière. Il doit pro-
poser et non imposer. Et cela marche dans certains environnements mais pas dans d’autres,
ou bien seulement après quelques mois de collaboration.
Cependant, l’intérêt réside dans l’opportunité qu’a le collaborateur de développer son identité
à la fois personnelle et professionnelle.
Le coach, tout en respectant le « jardin secret » de chacun, éclaire le coaché sur l’intérêt
qu’il a, parfois, à s’ouvrir un peu en osant exprimer, par exemple, une colère, un doute, une
crainte… même dans le milieu professionnel. En résumé, il l’invite à être authentique et à
s’affirmer, à ouvrir un peu plus son espace intime (ce qui appartient à l’espace intime passe
dans la zone de libre-échange et devient donc visible).

Messager-Livre.indb 162 12/10/12 09:38


Régulation et normalisation
163
Chapitre 12

En favorisant le feedback entre membres d’une équipe, le coach concourt à l’établissement


d’un climat bienveillant. Cela permet souvent de se découvrir une qualité, perçue par les
autres, mais ignorée ou non acceptée par la personne elle-même (ce qui appartient à la zone
aveugle passe dans la zone de libre-échange). L’objectif est de réduire cette zone aveugle.

En résumé, recevoir et accepter le feedback des autres accroît la conscience de soi et


l’authenticité de chacun. Et plus la zone de libre-échange est grande, plus la communica-
tion est efficace pour développer un véritable esprit d’équipe.

Développer l’esprit d’équipe


L’esprit d’équipe ne se prescrit pas ; il se construit peu à peu. C’est dans cette troisième
étape de régulation et de normalisation que l’on observe les premiers signaux d’un esprit
d’équipe naissant.
Trois conditions sont nécessaires pour le faire émerger : le cadre dans lequel évolue
l’équipe, l’interdépendance entre ses membres, mais aussi l’envie des personnes.
• Le cadre : rappelons qu’il est constitué d’un ensemble d’éléments et de conditions qui per-
mettent de créer la confiance entre les membres : une vision et une identité pour l’équipe,
des valeurs, des règles de fonctionnement et de communication, une bonne connaissance
des uns et des autres… Ces ingrédients « enveloppent » et sécurisent l’équipe.
• L’interdépendance entre les membres : dans une équipe agile, on rassemble toutes
les compétences nécessaires au développement du produit. On parle d’équipe inté-
grée ou pluridisciplinaire, par opposition à une équipe monométier et des individus
qui travaillent en silos. Ce groupement de différents métiers a un objectif commun,
à court terme (sprint) et à plus long terme (projet). Le sens et le rythme donnés par
le développement itératif renforcent cette interdépendance : chacun mesure le sens
de sa contribution individuelle à très court terme. De plus, le résultat est rapidement
visible.

Exemple

Analyste : « Mon travail n’est plus de produire des spécifications et de rédiger un document
d’analyse. Mon travail est de documenter les fonctionnalités que nous sommes en train de
développer en ce moment. Ce que je produis est utile au développeur et au testeur avec
lesquels je travaille. »

• L’envie : même si certains sont plus individualistes ou solitaires que d’autres, nous
avons tous un besoin d’appartenance à un groupe, une équipe, une organisation, une
communauté ou une société. Nous sommes des êtres sociaux en interaction avec leur
environnement et leurs pairs. De ce besoin de socialisation naît le sentiment collectif.

Messager-Livre.indb 163 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
164
Quatrième partie

Si, en outre, chacun trouve au sein de cette équipe les éléments qui nourrissent ses be-
soins psychologiques (tableau 7-2), sources de motivation, l’envie de collaborer est sti-
mulée. Celle-ci est d’autant plus aiguisée que l’équipe produit des résultats visibles et
mesurables. Les membres de l’équipe sont fiers d’appartenir à cette équipe ; ils partagent
leur satisfaction et communiquent aisément à l’extérieur de l’équipe. Et si les résultats ne
sont pas au rendez-vous, ce sentiment collectif soutient les coéquipiers pour l’attente de
jours meilleurs.

Ce que nous avons appris


• Nous avons vu qu’après une phase de tensions, les relations se stabilisent et se norma-
lisent au sein de l’équipe.
• Celle-ci procède en permanence à l’ajustement de son processus de travail et cherche
activement à résoudre ses problèmes de communication interpersonnelle.
• Pour cela, nous avons vu que les coéquipiers tentaient de repérer leurs attitudes anti-
écoute, qu’ils recouraient facilement à la métacommunication et qu’ils appréciaient le
feedback mutuel.
• Ainsi peut se développer un véritable esprit d’équipe, fondé sur trois ingrédients : le
cadre sécurisé, l’interdépendance entre les membres et l’envie de travailler ensemble.

Outils du coach proposés

• La check-list d’Henri Kniberg


• La liste des comportements anti-écoute
• La métacommunication et les canaux de communication
• La fenêtre de Johari

Les conditions sont réunies pour une parfaite synergie entre les membres et leur perfor-
mance collective.

Messager-Livre.indb 164 12/10/12 09:38


13
Synergie et performance

L’esprit et la main n’appartiennent au même corps que si le cœur bat pour tous.
Vincent Lenhardt, Président de Transformance Pro

Cette quatrième étape d’évolution marque l’aboutissement du travail de maturation de


l’équipe et d’accompagnement du coach. L’équipe étant pleinement performante, le rôle
du coach y est, de fait, moins prépondérant (figure 13-1).

Figure 13-1 Efficacité /


La courbe Performance

d’évolution
de la performance Synergie
et performance

Régulation
et normalisation

Dissolution
et séparation

Confrontations
et tensions

Création et
structuration

Temps

Messager-Livre.indb 165 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
166
Quatrième partie

Une équipe performante


Une équipe performante démontre que ses membres travaillent de façon efficace, avec
plaisir et animés par un stress positif. Cet esprit d’équipe évoqué précédemment, accom-
pagné d’un fort sentiment d’appartenance, libère les initiatives individuelles ; on constate
une forte émulation entre les membres et une réelle synergie.
Il y a synergie lorsque les résultats de l’action de l’équipe sont supérieurs à la somme des
résultats individuels, autrement dit, 1 + 1 = 3. Non seulement chaque coéquipier atteint
ses objectifs individuels, mais son travail est valorisé par celui des autres.
L’équipe qui a mûri a le visage suivant : elle est auto-organisée, ses membres, respon-
sables, ont le sens de l’engagement, une saine émulation leur permet de développer une
réelle intelligence collective et il y fait bon vivre.

Autonomie et auto-organisation
L’équipe auto-organisée se caractérise par l’autonomie de ses membres. En effet, elle
n’a pas le réflexe de solliciter un chef pour prendre une décision ou pour arbitrer un
différend. Elle n’a plus besoin d’un régulateur central (le chef) : les différents éléments
se régulent les uns les autres, à condition d’être dans un cadre régi par des règles du jeu.
Cette liberté ne s’applique que dans la ligne du projet global, avec une discipline, une
rigueur et une interdépendance entre les membres. Comme dans un orchestre de jazz,
tout le monde joue le même morceau, mais une part belle est donnée à l’improvisation.
Dans l’équipe, cela se mesure à l’initiative dont font preuve les coéquipiers.
Ceux-ci se considèrent d’ailleurs davantage comme des associés, qui fonctionnent en
réseaux. Transparence, fluidité de l’information, réactivité et implication témoignent de
cette auto-organisation.
En termes de gouvernance, une équipe agile auto-organisée peut trouver opportun d’in-
troduire un mode sociocratique. Pour nous expliquer les principes de ce mode de mana-
gement, voici une interview de Gilles Charest1, directeur de la formation et de la consul-
tation au Centre Mondial de Sociocratie.

1. Gilles Charest travaille comme conseiller en entreprise depuis 1971. Il est président de Sociogest. Il oc-
cupe, au Centre Mondial de Sociocratie, le poste de directeur de la formation et de la consultation. Il y pilote
l’implantation des centres sociocratiques dans le monde francophone. Depuis 2003, il dirige l’École Interna-
tionale des Chefs, qui fait la promotion de la sociocratie dans le monde, ainsi que l’équipe de professeurs qui
animent le programme intensif DIRIGER, selon le mode de gouvernance sociocratique. Pour découvrir les
ouvrages dont il est l’auteur, rendez-vous sur : http://www.sociogest.ca/Boutique/Livres/tabid/84/language/
fr-CA/Default.aspx.

Messager-Livre.indb 166 12/10/12 09:38


Synergie et performance
167
Chapitre 13

Avis de l’expert : Gilles Charest

V. Messager (VM) : J’ai entendu parler de la sociocratie comme mode de gouvernance


et de prise de décision. Pouvez-vous nous en dire plus ?

G. Charest (GC) : Parlons d’abord du mode de gouvernance : il s’agit d’une façon d’exercer le
pouvoir. La sociocratie propose, précisément, un changement dans les rapports de pouvoir.
Elle repose sur cette découverte scientifique que la structure de communication et de prise
de décision dans laquelle vivent les individus conditionne leurs comportements.

VM : Que voulez-vous dire ?

GC : Je veux dire que si je vis dans une structure dominant/dominé, mes comportements ne
peuvent être que la fuite, la révolte ou la soumission. Ces rapports dominants/dominés sont
d’ailleurs de plus en plus présents dans nos vies et la conséquence en est l’augmentation des
risques psychosociaux.

VM : Quels sont les principes de la sociocratie ?

GC : La sociocratie repose sur les principes qui régissent l’auto-organisation des systèmes
vivants, principes qui ont été mis en évidence nommément par les recherches en cyberné-
tique :
• pas de contrôle mutuel des éléments du système ;
• une source d’énergie extérieure ;
• ouverture au feedback de l’environnement.

VM : Il n’y aurait plus de hiérarchie, alors ?

GC : La sociocratie établit des rapports d’équivalence entre les membres de l’organisation, et


ce, dans le respect de la hiérarchie. C’est totalement révolutionnaire par rapport aux modèles
qui veulent abolir la hiérarchie ou inverser la pyramide, comme on dit.

VM : Faut-il une organisation particulière pour fonctionner en mode « sociocrate » ?

GC : Oui et non.
Oui, nous n’implantons pas le mode de gouvernance sociocratique là où il ne vit pas déjà
dans la volonté des dirigeants et des collaborateurs. Si le projet ne met pas en avant la res-
ponsabilité des collaborateurs, le mode sociocratique de gouvernance entre en conflit avec
les valeurs de l’organisation et lèvera des résistances insurmontables.
Non… La méthode sociocratique est un contenant vide. Elle peut être utilisée par n’importe
quelle organisation : famille, association, entreprise, organisme gouvernemental voire poli-
tique. Elle n’exige pas de talents particuliers de la part des gestionnaires et des collabora-
teurs.

VM : Comment se déroule très concrètement la prise de décision ?

GC : Le mode de prise de décision interdit la domination des uns sur les autres. Il va donc
limiter fortement le débat. Toute forme d’argumentation pour convaincre ou pour convertir

Messager-Livre.indb 167 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
168
Quatrième partie

les autres à son point de vue est exclue. Dans un cercle sociocratique, on discute sans se dis-
puter. On additionne les points de vue, on ne les oppose pas. De cet empilement des points
de vue va émerger, si le processus est respecté, un point de vue qui les intègre tous, une
proposition qui ne rencontrera aucune objection de la part des membres du groupe. Nous
prendrons donc nos décisions sur la base du consentement mutuel.

VM : Consentement, et non consensus ?

GC : Le consensus appartient au mode de gouvernance démocratique. On cherche à élargir


la base majoritaire. On parle alors de large consensus pour finalement faire taire la minorité. Il
s’agit en sociocratie de prendre nos décisions sur la base du consentement. On ne demande
pas aux membres du cercle s’ils sont d’accord avec la proposition soumise à leur décision,
mais s’ils ont des objections. Les objections seront utilisées pour améliorer la proposition. On
parle ici d’objection insurmontable, c’est-à-dire de limite à ne pas dépasser pour maintenir
l’intégrité et la cohésion de l’ensemble. L’objection n’est pas une préférence. Je peux très bien
préférer la solution A et ne pas objecter à la solution B.

VM : Sur quel type de décision ce mode de fonctionnement peut-il porter ?

GC : Le cercle sociocratique est responsable de trois choses :


• réaliser la mission qui lui est confiée ;
• s’améliorer constamment ;
• assurer sa pérennité par l’éducation permanente de ses membres.
On réunira donc le cercle quand une décision devient nécessaire pour mieux remplir ces trois
responsabilités ; par exemple, fixer des objectifs, changer une méthode de travail, réorganiser
les contributions et les affectations des membres, résoudre un conflit, etc.

VM : Une grande confiance entre les membres de l’équipe est indispensable, n’est-ce
pas ?

GC : La confiance n’est pas un préalable à la mise en œuvre de la méthode, mais le résultat


de cette mise en œuvre. La confiance ne peut se développer que là où règne la sécurité.
En instituant les règles du mode de gouvernance sociocratique, on crée le cadre qui va
garantir la sécurité psychologique des personnes et éviter l’exclusion arbitraire de certains.

VM : On parle aussi d’un mode d’élection sans candidat ; ne pourrait-on pas l’appliquer
à l’élection du scrummaster de l’équipe, par exemple ? Voyez-vous d’autres applica-
tions dans une équipe ou une organisation agile ?

GC : Pas seulement au scrummaster, mais à l’affectation des membres de l’équipe dans tous
les mandats.

VM : En quoi voyez-vous une proximité ou une complémentarité évidente entre socio-


cratie et démarche agile ?

GC : En sociocratie, on change ouvertement les règles de communication et de prise de


décision pour créer un environnement coopératif. L’agilité procède par des jeux coopératifs
dans lesquels la règle de prise de décision est subtilement changée pour le temps du jeu,

Messager-Livre.indb 168 12/10/12 09:38


Synergie et performance
169
Chapitre 13

le temps du projet. Les deux approches visent la coopération. L’une se limite à la conduite
d’un projet, l’autre vise un changement pérenne au niveau de l’organisation.
C’est pour cette raison que les agilistes qui rêvent d’une organisation qui vivrait selon les
principes agiles ne peuvent que reconnaître les vertus de la sociocratie.

VM : Quelles sont les limites de la sociocratie ?

GC : Implanter le mode de gouvernance sociocratique, c’est conduire un changement qui


est dans les faits un programme d’éducation à la liberté et à la responsabilité. Est-ce que les
humains veulent vraiment être libres ? Responsables ? Tous n’en perçoivent pas toujours les
avantages. Maintenir vivant l’intérêt pour la liberté et la responsabilité, c’est le plus grand défi
de ceux qui les accompagnent !

Le recrutement d’un coéquipier


Dans le prolongement de l’entretien avec Gilles Charest, on peut s’interroger sur l’op-
portunité de faire participer l’équipe au recrutement d’un des leurs. Finalement, les
coéquipiers qui s’apprêtent à accueillir un nouveau collaborateur ne sont-ils pas les mieux
placés pour définir leurs besoins en compétences et valider le profil d’un candidat en adé-
quation avec leurs valeurs et leur mode de fonctionnement ?
Néanmoins, la politique de recrutement d’une organisation relève de considérations stra-
tégiques et a une portée à long terme, vision que n’a pas nécessairement une équipe au
plan opérationnel. Par conséquent, si les membres de l’équipe sont associés à ce recru-
tement, il doit s’agir d’une étape dans un processus mené par la DRH et le management,
encadrée par des règles et des critères stricts définis à l’avance.

Responsabilité et sens de l’engagement


Dans une équipe agile, chaque collaborateur est responsable, ou plutôt co-responsable.
Rappelons que l’équipe est autonome pour déterminer son processus : elle décompose
les tâches à réaliser pour les user stories retenues et elle en estime la charge. Elle engage
alors sa responsabilité pour les réaliser et les livrer à l’échéance de fin du sprint qu’elle
considère comme réaliste.
L’équipe est responsable du « comment » (par rapport au « quoi » défini par le product
owner) : elle est en conséquence souveraine pour retenir les solutions ad hoc, prendre les
décisions qu’elle juge utiles et apporter tous les aménagements qu’elle considère oppor-
tuns pour mieux travailler, dans les limites des contraintes structurelles liées à son envi-
ronnement. En effet, ses choix tactiques doivent être alignés, là encore, avec les choix
stratégiques de l’organisation.

Messager-Livre.indb 169 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
170
Quatrième partie

Anticipation et proaction
Dans ses choix tactiques et techniques, l’équipe exerce également sa responsabilité au
travers de sa capacité d’anticipation. Dans son modèle d’agilité2, Jérôme Barrand définit
la capacité d’anticipation comme l’aptitude à prévoir les ruptures de son environnement
et à prendre conscience des conséquences de ses actes et de ses décisions précisément sur
son environnement (principe de rétroaction). On ne prend pas des décisions à la légère !
L’intuition peut être un atout pour être dans la proaction. Faire jouer l’intuition, c’est faire
davantage confiance à notre faculté de percevoir et de mémoriser de nombreuses infor-
mations qui sont traitées de manière inconsciente, pour élargir le champ des possibles et
imaginer des solutions nouvelles.
Démontrer sa proaction revient, pour l’équipe, à analyser les risques et les conséquences
de ses choix et à mettre en place un plan d’actions formalisé.

Co-responsabilité et interdépendance
Être co-responsable veut dire que chacun répond de soi et de ses actes, mais aussi de
ses coéquipiers et de leurs choix collectifs (a fortiori si les décisions ont été prises sur
un mode sociocratique). Les succès comme les échecs sont assumés individuellement
et collectivement. Tenir quelqu’un pour responsable d’une action n’est pas le considérer
comme coupable, si l’action s’avère être une erreur par la suite.
La co-responsabilité et l’interdépendance qui lient les membres de l’équipe ne sont pos-
sibles que si l’on a fixé des objectifs clairs à court terme, dont on peut aisément mesurer
l’avancement ; une totale transparence est également nécessaire (on voit ce que font les
autres et ce que je fais), ainsi que l’acceptation du feedback des autres. Si l’on supprime
l’une de ces conditions – l’objectif clair ou la transparence – la co-responsabilité se vola-
tilise immédiatement.
On se rend ainsi compte du caractère ô combien indispensable de la brique de base qu’est
la confiance, mais aussi qu’il aura fallu plusieurs étapes pour parvenir à cette co-respon-
sabilisation !
La responsabilité individuelle s’appuie d’abord sur les ressources disponibles pour
chaque coéquipier : ressources professionnelles (compétences, expérience, opportunités
d’apprentissage…) et ressources personnelles (estime de soi, confiance en soi et dans les
autres, optimisme…).

2. Jérôme Barrand, Le manager agile : Agir autrement pour la survie des entreprises, Dunod, 2e édition,
2012

Messager-Livre.indb 170 12/10/12 09:38


Synergie et performance
171
Chapitre 13

Solidarité
La co-responsabilité induit également une solidarité entre les membres, tous engagés sur
un résultat à une échéance fixe. Par conséquent, les coéquipiers acceptent d’être parfois
pressés par un collaborateur, qui rappellera, si nécessaire, le délai ou une règle à respec-
ter. En effet, on ose dire ou attirer l’attention d’un collaborateur sur les conséquences de
ses actes ou de son comportement sur l’engagement pris collectivement. Si l’on ose, c’est
que tous les membres, co-responsables, se mettent régulièrement au défi et ont le souci
des résultats de l’équipe.
Ne pas oser illustrerait clairement l’absence de confiance. Dans ce cas, chacun se dé-
fausse sur les autres, prévoit des « parapluies » en amont, fuit les confrontations et s’en
remet à l’autorité incarnée par le chef !
D’autres facteurs peuvent freiner la responsabilisation : membres à temps partiel, disper-
sion géographique, résistances des personnes elles-mêmes, style de management appli-
qué dans l’organisation ou encore système de récompenses individuelles injustes.

Question au coach :
Que se passe-t-il si un membre de l’équipe ne joue pas le jeu collectif ou s’il est trop
négatif ou trop individualiste ?

La question sous-jacente est souvent : « Peut-on exclure un membre, “mauvais” élément qui
pourrait nuire au développement de l’esprit d’équipe et de la performance ? »
Il s’agit, avant tout, de prendre connaissance de la situation (les faits et les ressentis) :
• soit la personne en question réalise correctement son travail, bien qu’elle ait un comporte-
ment « non agile » et l’équipe s’en accommode tant bien que mal ;
• soit la personne s’oppose ouvertement aux nouvelles pratiques, résiste, a des comporte-
ments pénalisants et freine la transformation de l’équipe.
Quelles sont alors les conséquences sur le fonctionnement de l’équipe ? Sur les coéqui-
piers eux-mêmes ? Comment réagissent-ils ? Ces comportements ont-ils des conséquences
néfastes sur les résultats des sprints ?
Le sujet sera abordé en rétrospective (à l’initiative d’un des membres ou du scrummaster).
S’il n’est pas soulevé, parce que le niveau de confiance n’est pas suffisamment élevé, c’est
au scrummaster ou au coach de proposer une discussion. En effet, en tant que responsable
du cadre, il en est aussi le protecteur (3 P). Par conséquent, si l’attitude de la personne en
question menace l’intégrité d’une autre personne, de l’équipe, voire du projet, il a le devoir
d’intervenir. Il aura préalablement eu un entretien individuel avec la personne en question,
notamment pour comprendre les motifs de sa résistance.
Le coach aide l’équipe à explorer cette situation, en restant très factuel ou en évoquant les
ressentis. Quelle que soit la décision du groupe, il n’est pas de son devoir de la valider ou
de l’invalider, mais bien d’attirer l’attention des membres sur ses conséquences. Le coach, à
défaut d’être un médiateur, peut intervenir en tant que modérateur, afin d’éviter un « lynchage
généralisé ».

Messager-Livre.indb 171 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
172
Quatrième partie

Il est généralement difficile d’aborder ce type de sujet, d’une part parce que très peu d’équipes
parviennent durablement à cette quatrième étape, où l’on peut être totalement transparent et
sincère ; d’autre part, parce qu’il concerne une personne (non anonyme) et non un problème
technique ou d’organisation, plus extérieur à chacun.
Dans les équipes que j’ai accompagnées, il est arrivé que certains coéquipiers ne jouent
pas le jeu collectif. Il se trouve que, très souvent, ces personnes avaient une forte expertise
ou une connaissance historique du capital applicatif ; elles étaient donc des personnes clés
pour le succès du projet, voire l’avenir de l’organisation dans son ensemble. La décision, ou
plus exactement la non-décision, a privilégié le laisser-faire et cautionné les comportements
de ces deux ou trois électrons libres, dans l’intérêt global. Cela fait partie des contraintes
contextuelles, parfois.
Selon l’enjeu et l’objectif de la transformation agile, ces personnes peuvent être des obstacles
plus ou moins critiques. Après plusieurs vaines tentatives pour régler la situation au niveau
de l’équipe, la décision relève de la responsabilité du management intermédiaire, voire supé-
rieur. On trouvera sans doute un projet mieux adapté à cette personne.

Intelligence collective
L’intelligence collective est répartie et non centralisée. Elle est « la conjugaison des intel-
ligences individuelles qui se fusionnent en intelligence globale, bien plus importante que
la somme de l’intelligence de chacun » 3.
Une équipe dotée d’une intelligence collective apprend, sait se remettre en cause et ne
reste pas bloquée devant une situation. Elle innove constamment dans la résolution de
problèmes, dans l’expérimentation de nouvelles idées et solutions. Cependant, elle innove
juste lorsque c’est nécessaire. C’est la « justinnovation », évoquée par Jérôme Barrand4,
qui crée de la valeur mais n’en supprime pas. On n’innove pas pour innover, si cela n’est
pas nécessaire.
Cette « justinnovation » s’appuie sur la « rébellion constructive » et la pédagogie dont
font preuve les coéquipiers. Ils savent en effet dépasser leurs connaissances, sortir de leur
cadre de référence pour y puiser de l’originalité et de la nouveauté par rapport à leurs
standards (rébellion constructive), et ils savent aussi faire comprendre et promouvoir
leurs découvertes (pédagogie).

Créativité
Edward de Bono a mis au point une technique de créativité, la technique des six cha-
peaux, qui peut être tout à fait pertinente dans un processus de recherche de solutions et
de prise de décision, notamment pour ne pas tomber dans le paradoxe d’Abilène.

3. Vincent Lenhardt, Les responsables porteurs de sens, Insep Consulting, 3e édition, 2010
4. Op. Cit.

Messager-Livre.indb 172 12/10/12 09:38


Synergie et performance
173
Chapitre 13

On rencontre parfois ce paradoxe lorsqu’une décision est prise par un groupe alors qu’elle
ne convient à personne. En fait, la proposition est acceptée par tous parce que les diffé-
rents membres pensent qu’elle convient aux autres et n’osent donc pas s’y opposer ! Ce
phénomène arrive rarement à ce stade de maturité, car le niveau de confiance est tel que
les coéquipiers osent s’affirmer.
La technique des six chapeaux permet d’explorer les conséquences des décisions prises
en explorant différents points de vue, qui font découvrir la solution sous d’autres angles.
On obtient au final une image polychrome.
Quel en est le principe ? Il s’agit d’inciter les participants à modifier leur mode de ré-
flexion spontané. En empruntant successivement des chapeaux de couleurs différentes,
chacun est amené à jouer un rôle et à adopter une autre façon de penser. À chaque couleur
de chapeau est associé un mode de pensée.
N.B. Les chapeaux tournent !

• Chapeau blanc : l’objectif. L’objectif se base sur des faits, sur des données objectives.
Il recense les informations disponibles ou manquantes (sans interprétation). Attention,
il faut bien distinguer les faits des hypothèses !
• Chapeau rouge : l’émotif. L’émotif ou l’intuitif se base sur des sensations, des ressen-
tis, des pressentiments. Il donne son sentiment sans avoir à le justifier ou à le démon-
trer. Il s’appuie aussi sur son intuition.
• Chapeau noir : le pessimiste. Le pessimiste envisage la solution sous de mauvais
auspices, en anticipant des scénarios catastrophe ou toute autre difficulté pour adopter
et mettre en œuvre la décision.
• Chapeau jaune : l’optimiste. C’est le rayon de soleil qui éclaire la solution de façon
positive, constructive. L’optimiste identifie tous les motifs de satisfaction, les avantages
et toute la valeur ajoutée de la mise en œuvre de la solution retenue.
• Chapeau vert : le créatif. Le créatif, lui, ne se censure pas. Toutes les idées à prendre
sont bonnes, dès lors qu’on sort des sentiers battus (pensée latérale).
• Chapeau bleu : le chef d’orchestre. Le chef d’orchestre organise la réflexion, facilite
les échanges, questionne, synthétise, prend note, soulève les contradictions… C’est le
coach.

Comment utiliser cet outil ?


Si vous êtes confronté à une situation nécessitant une réflexion collective pour la réso-
lution d’un problème ou la recherche de solutions, pensez à cette technique des six cha-
peaux.

Messager-Livre.indb 173 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
174
Quatrième partie

Exemple : l’équipe Gamma applique la technique des six chapeaux

L’équipe Gamma est en réflexion sur une question d’ordre organisationnel : « de quel côté »
les analystes métier doivent-ils se placer ? Côté product owner ou côté équipe de développe-
ment ? Voici les avis des différents chapeaux.
Chapeau blanc : l’objectif
« Si les analystes sont intégrés dans l’équipe de développement, on rapproche analyse,
développements et tests. Les coéquipiers travaillent tous sur le même sujet, les mêmes user
stories ; ils participent aux sprints planning meetings. »
Chapeau rouge : l’émotif
« Je sens que ça va coincer du côté des product owners ; moi analyste, ça me fait plaisir,
mais j’ai un peu peur de la réaction des analystes en place. »
Chapeau noir : le pessimiste
« Vous allez voir que du coup les specs vont être ralenties. Les développeurs risquent d’at-
tendre qu’elles sortent. On augmente la taille de l’équipe qui dépasse 10 personnes, donc
on ne va plus pouvoir avoir des réunions quotidiennes de 15 minutes efficaces. »
Chapeau jaune : l’optimiste
« On supprime cette “guéguerre” entre les analystes. Ils se sentiront plus impliqués dans les
résultats. On aura peut-être moins de documentation. »
Chapeau vert : le créatif
« Et si on séparait l’équipe globale en deux équipes fonctionnelles séparées ? Et si on ne
faisait plus de specs ? »
La décision finale a bien été d’intégrer les analystes dans l’équipe, de conserver un « corres-
pondant analyste » auprès des product owners et de supprimer certains documents devenus
inutiles.

Prise de risques
Cette équipe sait prendre des risques parce qu’elle sait que le droit à l’erreur lui est recon-
nu. Ce droit lui est accordé pour deux raisons.
• Parce qu’il porte sur des cycles courts : l’équipe ne se trompe donc pas sur de longues
périodes et les erreurs sont, pour la plupart, réversibles.
• Parce qu’elle sait exploiter et tirer des enseignements de ses erreurs. Elle capitalise.
Elle est en reconfiguration permanente, puisque les nouvelles solutions mises en œuvre
et les apprentissages deviennent de nouvelles connaissances, puis sont intégrées en
nouvelles compétences.
Cette intelligence collective ne peut se développer qu’au prix de changements progressifs
apportés dans les représentations et les comportements de chacun, au cours des étapes

Messager-Livre.indb 174 12/10/12 09:38


Synergie et performance
175
Chapitre 13

précédentes. Elle émerge peu à peu, une fois que le lien est établi entre les membres de
l’équipe, que ceux-ci ont dépassé leur expertise (ils n’ont plus rien à prouver aux autres)
et qu’ils sont solidaires.

Plaisir et bien-être
Cette équipe performante est attrayante, n’est-ce pas ? Pourtant, des sondages réguliers
font état d’une faible proportion d’entre nous qui ont évolué ou évoluent dans ce type
d’équipe. Et ceux qui l’ont vécu ne l’ont généralement pas vécu deux fois ! Cela démontre
la difficulté pour une équipe à atteindre cette quatrième étape, à plus forte raison si elle
n’est pas accompagnée.
Et pourtant, le plaisir de travailler ensemble, la joie d’atteindre ses objectifs et de fêter
« la victoire », le bonheur d’être « à la bonne place au bon moment avec les bonnes
compétences » procurent des sensations comparables à celles d’un match gagné ! Ces
sensations participent à l’accomplissement personnel de chacun.
En outre, l’enthousiasme des collaborateurs déborde au-delà de l’équipe, au-delà des
frontières de l’organisation et gagne finalement les clients. Alors, on peut mettre en place
toute une série de métriques pour mesurer la performance d’une équipe. En définitive,
n’est-ce pas cet « indice du bonheur » mis en place par Henri Kniberg, chez Crisp5, qui
est le plus cher à tout le monde et le plus influent sur la performance individuelle et col-
lective ? Et, finalement, n’est-ce pas lui qui influe sur la fidélisation des collaborateurs,
puis dans une moindre mesure, moins évidente, sur la croissance du chiffre d’affaires et
la pérennité de l’organisation ?

Question au coach :
Finalement, dans cette quatrième étape, on n’a plus besoin ni de coach,
ni de leader ?

Dans cette quatrième étape, le rôle du coach est, en effet, plus léger. Son rôle est comme
celui de l’entraîneur d’un champion déjà performant. Il doit entretenir la motivation, stimuler,
proposer de nouveaux challenges et de nouvelles performances : augmenter la vélocité,
réduire le nombre de bogues, réduire la durée des cérémonies, implémenter de nouvelles
techniques…
Il aide l’équipe à oser davantage : oser penser autrement, oser faire preuve de rébellion
constructive, oser faire confiance à son intuition, oser prendre des risques.
Il l’aide à développer sa capacité « méta », sans laquelle elle aura du mal à mettre en œuvre
son intelligence collective : prendre conscience des acquis et les partager, prendre quelques
minutes pour dresser le mini-bilan de chaque réunion, ne pas sacrifier les rétrospectives,
métacommuniquer sans hésiter…

5. http://blog.crisp.se/2011/10/19/anderslaestadius/the-happiness-metric-and-a-few-others

Messager-Livre.indb 175 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
176
Quatrième partie

Son rôle protecteur lui permet de toujours réguler avec l’extérieur et maintenir la dynamique
du groupe, au rythme des sprints.
De là à le faire disparaître ? C’est sans doute une mission moins prenante, autorisant un
temps partiel, éventuellement. (Attention ! Cela n’est envisageable que si l’équipe est arrivée
à cette quatrième étape, seulement.)
Cependant, il ne faut pas minimiser trois risques : celui de l’illusion ou de l’idéalisation, celui
de l’égocentrisme et celui du « putschisme ».
• L’illusion ferait que les relations entre les coéquipiers sont idéalisées ou qu’un écart est
perceptible entre le discours et le vécu dans la réalité.
• L’égocentrisme excessif empêcherait l’équipe d’avoir une position méta vis-à-vis d’elle-
même. Le phénomène de l’homéostasie (voir chapitre 3) pourrait avoir tendance à ramener
l’équipe à son état d’équilibre : toute remise en question ou autorégulation y serait difficile.
• Enfin, la « prise du pouvoir » par l’un des membres de l’équipe constitue un autre risque,
surtout si l’équipe traverse une crise ou une difficulté passagère.
La présence d’un leader, en posture de coach, même s’il est plus distant, est donc encore
nécessaire à cette étape de développement.

Ce que nous avons appris


• Après avoir traversé plusieurs étapes incontournables, nous avons pu découvrir ce
qu’est une équipe agile performante.
• Auto-organisée, l’équipe peut adopter un mode de gouvernance basé sur la sociocratie,
dont nous avons compris les principes.
• Engagés sur des résultats, les coéquipiers sont co-responsables de l’atteinte des objec-
tifs.
• Dotée d’une intelligence collective, source de créativité et d’innovation, cette équipe se
remet en question régulièrement.
• Elle dégage une image de plaisir partagé.
• Quoique plus en retrait, durant cette étape, nous avons démontré le rôle du leader,
essentiel dans la stimulation de cette équipe : motiver, proposer de nouveaux défis et la
protéger de certains risques.

Outil du coach proposé

• La technique des six chapeaux (E. de Bono)

Messager-Livre.indb 176 12/10/12 09:38


Synergie et performance
177
Chapitre 13

Cette évolution de l’équipe n’est pas nécessairement linéaire. En effet, l’équipe est un
système vivant : en modifiant sa structure, avec l’intégration d’un nouveau membre ou
avec le départ d’un coéquipier, le phénomène d’homéostasie se déclenche.
L’équipe performante peut alors connaître un passage régressif, avec le retour provisoire
à l’une des étapes précédentes : par exemple, devoir définir de nouvelles règles ou vivre
des tensions qu’elle ne parvient pas à réguler facilement.
Par conséquent, la courbe de maturation de l’équipe peut prendre la forme d’une boucle
itérative, jusqu’à l’ultime étape, qui marque la fin d’un cycle et la dissolution possible de
l’équipe.

Messager-Livre.indb 177 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 178 12/10/12 09:38
14
Dissolution et séparation

Il est fort dangereux de s’accoutumer


à une bonne compagnie ; la séparation en est étrange.
La Marquise de Sévigné

La fin d’un projet peut signifier la dissolution de l’équipe et la séparation de ses membres.
Cette épreuve constitue parfois un traumatisme pour certains. Il est par conséquent es-
sentiel d’anticiper cette étape et de « boucler la boucle » convenablement. Le coach a,
dans ce contexte, un rôle capital pour protéger et préparer en douceur la fin d’un cycle.

Le traumatisme de la séparation
L’équipe constituée pour un projet a entamé un cycle de vie et traversé différents stades
de maturité ; mais ce cycle de vie a une fin. De même que la mort est l’aboutissement de
la vie, la dissolution d’une équipe projet est inexorable lorsque le projet prend fin.
Précision
La fin d’un projet au sein d’un département ou d’un service ne marque pas nécessaire-
ment la dissolution de l’équipe, mais néanmoins la fin d’un cycle, la fin d’une certaine
configuration, une fin quoi qu’il en soit.

La performance de l’équipe et la qualité des relations entre les coéquipiers ne sont pas ap-
parues soudainement au moment de la constitution. Chacun aura investi dans son travail,
dans ses comportements, dans ses apprentissages, au prix d’efforts souvent éreintants.
L’équipe est devenue auto-organisée et responsable ; il y règne la confiance, la synergie
et, de surcroît, une excellente ambiance.

Messager-Livre.indb 179 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
180
Quatrième partie

Le chemin parcouru a été le théâtre d’aventures individuelles et collectives, avec des


réussites, des tensions, des difficultés, des échecs parfois, des joies partagées…
Et maintenant ? Et après ? Vers quel avenir chacun va-t-il s’engager ? Dans quel inconnu
va-t-il plonger ? La perspective de devoir à nouveau affronter un changement déclenche,
de façon plus ou moins intense, le phénomène d’homéostasie (voir chapitre 3). La nou-
veauté, si attrayante pour certains, peut en effrayer d’autres, d’autant plus si un équilibre
personnel, au-delà de l’épanouissement professionnel, a été trouvé au sein de l’équipe.
La séparation peut constituer une épreuve douloureuse accompagnée d’un sentiment de
perte. La perspective de l’inconnu peut provoquer une perturbation émotionnellement
forte et la déstabilisation éventuelle de certains peut avoir des répercussions sur d’autres
membres au sein de l’équipe.

Vivre ensemble les derniers instants


C’est pourquoi cette étape doit être anticipée et préparée, tout simplement en en parlant :
il est important d’évoquer cette échéance avant les premiers départs, qui peuvent s’éche-
lonner sur plusieurs semaines.
Quels que soient les résultats du projet, un bilan ou une analyse post-mortem est indis-
pensable, afin que chacun mesure ce qu’il a appris, ce qu’il a gagné et ce qu’il a apporté
au projet et à l’équipe. Une rétrospective spécifique est alors organisée.
On célèbre la fin ; en effet, il est plus agréable de se séparer dans un moment de convivia-
lité, qui laisse des souvenirs chaleureux, que de se quitter dans la tristesse ou l’indiffé-
rence. C’est l’occasion de se remercier et de se donner des signes de reconnaissance. Ces
échanges peuvent être informels ou planifiés lors de la rétrospective de projet.
Dans ce cas, en complément du bilan technique du projet, on réserve un moment pour un
volet « relations » ou « contributions ». Souvent négligée, la rétrospective de fin de projet
est un ultime moment de partage à préserver.

Le rôle protecteur du coach


Le coach sait que chacun aborde cette étape en fonction de son parcours personnel et
selon la façon dont ont été vécues les séparations qui jalonnent la vie.
Pour ceux qui vivent cette expérience comme un deuil dans la douleur, le coach a un
devoir de protection ; en effet, certaines personnes ont besoin d’être écoutées ou de béné-
ficier d’une attention particulière. Par conséquent, il est vigilant et reste disponible, si
nécessaire (voir le chapitre 16, à propos du rôle de soutien moral ou « cicatrisant » du
servant leader).

Messager-Livre.indb 180 12/10/12 09:38


Dissolution et séparation
181
Chapitre 14

Son rôle est de valoriser l’expérience vécue et chacune des contributions ; ainsi, chacun
doit repartir fier, conscient qu’il est plus riche qu’au départ et doté d’une plus grande
estime de soi. En effet, si le cycle du projet prend fin, cela signifie aussi le démarrage
d’autre chose, une opportunité pour rebondir et se développer toujours.
« La séparation est la reconstruction, la rupture est une déchirure, une amputation. »
(Marcel Rufo, pédopsychiatre)
L’anticipation et la préparation de la séparation font gagner du temps dans l’amorce du
changement suivant. La courbe des étapes du deuil a déjà été évoquée dans le chapitre 3 ;
à l’aube du nouveau changement, grâce à cette vigilance et au travail de dédramatisation,
les phases de colère, de déni et de marchandage peuvent être aisément raccourcies, voire
évitées (figure 14-1). La personne s’inscrit alors plus rapidement dans une spirale positive.

Figure 14-1
Les étapes
du deuil

Ce que nous avons appris


• La fin d’un projet peut marquer la dissolution de l’équipe et la séparation de ses membres.
• Nous avons pris conscience que cette dernière étape peut constituer une épreuve trau-
matisante pour certains et qu’il est, par conséquent, important de l’anticiper pour la
vivre au mieux.
• En parler ouvertement, dresser un bilan, célébrer la fin, partager l’aventure vécue, se
remercier et se donner des signes de reconnaissance sont essentiels dans les derniers
instants vécus ensemble.
Être vigilant et maintenir l’équipe jusqu’au bout dans une dynamique positive et promet-
teuse pour le changement relève de la responsabilité du coach.

Messager-Livre.indb 181 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 182 12/10/12 09:38
Cinquième partie

Coacher le scrummaster
Nous avons suivi l’évolution d’une équipe agile à travers les
cinq étapes qui constituent son cycle de vie. Tout au long de ces
étapes, nous avons vu quel était le rôle et le niveau d’implica-
tion, avec plus ou moins de distance, du coach en charge de son
accompagnement.
Abordons, dans cette dernière partie, le coaching du scrum-
master.
Les visions du rôle de scrummaster sont multiples, les déno-
minations ou autres métaphores utilisées pour le décrire égale-
ment (sheepdog, firewall, servant leader, coach, facilitateur…).
Les façons d’exercer le métier sont nombreuses et varient d’un
individu, d’une équipe, voire d’une organisation à l’autre. C’est
donc ma propre vision de la fonction de scrummaster que je vous
présente ici.

Messager-Livre.indb 183 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 184 12/10/12 09:38
15
Pourquoi coacher un scrummaster ?

Le scrummaster est confronté à deux changements : celui de son équipe (voir la partie
précédente) et son propre changement.

Qui est le scrummaster ?


En effet, il peut être un chef de projet traditionnel devenu scrummaster dans un contexte
de transformation agile. Il peut être un jeune ingénieur nouvellement nommé scrum-
master, sans expérience du management d’équipe, ou encore scrummaster expérimenté
mais dans un nouveau contexte… Quoi qu’il en soit, il est amené à changer, à faire
évoluer sa posture et ses pratiques managériales.

☞ Rendez-vous dans la première partie « Le contexte d’une transformation agile » pour


comprendre plus précisément les changements induits.

Quelles sont ses compétences ?


Quelques connaissances de base sur le fonctionnement des personnes et la prise en main
d’outils spécifiques vont l’aider ; néanmoins, empiler les savoirs ne résout pas tout.
Responsable du cadre autour d’une équipe auto-organisée, la dimension relationnelle est
prépondérante dans le périmètre d’intervention du scrummaster. En effet, il n’est plus
attendu sur son expertise technique, mais davantage sur des compétences relationnelles
et sur sa capacité à mener l’équipe (leadership).

Messager-Livre.indb 185 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
186
Cinquième partie

Alors, le scrummaster, comme bon nombre d’exemples que j’ai rencontrés, risque de
s’interroger : « Suis-je à la hauteur ? », « Y arriverai-je ? », « Et si je ne suis plus ou pas
reconnu ? », « Saurai-je persévérer si je n’y arrive pas ? », « Que vont penser les autres,
s’ils voient que je tâtonne ? », « Comment être un bon scrummaster ? », etc. En réalité, il
aura avant tout à utiliser autre chose que des savoirs : ses savoir-être.

Quels sont ses besoins en coaching ?


Une démarche personnalisée de coaching l’aidera à se connecter avec son être profond
pour y trouver des ressources (parfois inconnues de lui) et déployer ses savoir-être. Il n’y
a pas de recette toute prête qui consisterait à « enfiler la panoplie du scrummaster » !
C’est d’autant plus vrai qu’il y a une infinité de contextes et de configurations différents,
liés aux organisations, aux personnes, bref, à la complexité des situations, qui rendent la
transition plus ou moins confortable.
De plus, considérant qu’un scrummaster adopte une posture de coach vis-à-vis de son
équipe, il a lui-même besoin d’être accompagné, comme un coach l’est par son supervi-
seur.
À titre d’exemple, nous suivrons, dans cette cinquième partie, les étapes du coaching
dont a bénéficié Patrick, scrummaster de l’équipe Alpha. Ainsi, nous nous appuierons
sur les axes de travail qui lui ont permis de progresser dans la construction de son iden-
tité professionnelle, c’est-à-dire de « prendre le chemin » dans le sens du scrummaster
qu’il souhaitait devenir. Nous aborderons successivement le développement des qualités
d’écoute, l’adoption d’une posture basse, le développement du leadership et l’apprentis-
sage dans l’animation des cérémonies.
Toutefois, avant d’aborder le cas de Patrick, voyons quel type de team leader est le scrum-
master.

Messager-Livre.indb 186 12/10/12 09:38


16
Scrummaster, un autre
style de leadership

Avec le meilleur leader au-dessus d’eux, les gens savent à peine qu’il
existe. Le meilleur leader parle peu. Il ne parle jamais négligemment.
Il œuvre sans intérêt personnel. Et ne laisse aucune trace. Quand tout
est fini, les gens disent : « Nous l’avons fait par nous-mêmes ».
Lao Tseu, sage chinois

Le rôle de scrummaster présente différentes facettes. Je vous invite à vous référer au Scrum
Guide1 ou au Scrummaster Manifesto2 pour (re)découvrir les définitions « officielles ».
Voici une synthèse générale, non exhaustive, de ses principales responsabilités :
• relayer la vision produit du product owner ;
• recentrer les activités et les décisions sur la valeur ajoutée pour le client ;
• animer, soutenir et protéger l’équipe ;
• lever les obstacles et créer la confiance ;
• optimiser la communication ;
• favoriser l’autonomie, la responsabilisation, l’adaptation et l’apprentissage des membres
de l’équipe ;

1. http://www.scrum.org/storage/scrumguides/Scrum%20Guide%20-%20FR.pdf#view=fit
2. http://www.scrummastermanifesto.org/scrummaster-manifesto/A_ScrumMaster_Manifesto.html

Messager-Livre.indb 187 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
188
Cinquième partie

• gérer les interfaces avec les autres acteurs de l’organisation, etc.


La définition du rôle du scrummaster fait généralement l’objet de débats pour établir une
fiche de poste spécifique dans chaque organisation où je suis intervenue. Il n’y a pas, en
effet, deux scrummasters ayant exactement les mêmes responsabilités. Voici ce que je
considère comme un tronc commun à tous les scrummasters.
Quelle que soit la vision qu’on peut en avoir, elle fait émerger un nouveau style de leadership.

Transformation des modèles de management


On observe, autour et en-dehors de l’agilité, des mouvements3 qui tendent à émerger
pour transformer radicalement les modèles de management au niveau des organisa-
tions. Et les turbulences créées par le Manifeste Agile en 2001 dans la sphère informa-
tique semblent, dix ans plus tard, avoir des effets de bord non négligeables en dehors
de cette sphère.

L’objectif est de donner une orientation, un cadre dans lequel chacun trouvera sa propre
identité et son propre style de leadership. C’est précisément avec l’aide d’un coach que le
scrummaster peut, avec du recul, travailler sur cette recherche identitaire.
Quelles que soient ses prérogatives, le scrummaster n’est pas seulement garant du proces-
sus, il est aussi un leader au service de son équipe.

Au service de l’équipe
Le scrummaster est au service de son équipe : il est un servant leader.
Rappelons que les méthodes agiles, et Scrum en particulier, ont comme objectif premier
la satisfaction du client et la création de valeur pour celui-ci. Qui crée la valeur ?
« La vraie valeur est créée dans l’interaction des employés et de leurs clients. Par
conséquent, en privilégiant les employés, un changement fondamental peut être
amené dans la façon dont une entreprise produit et fournit une valeur unique
pour ses clients (…). En associant des employés engagés et un management
responsable (…). »4
C’est en ces termes que Vineet Nayar justifie une nouvelle approche du management
dans son entreprise de plusieurs milliers de collaborateurs : en mettant le management

3. Stephen Denning, Radical Management :


http://www.stevedenning.com/Radical-Management/default.aspx
Management 3.0 : http://www.management30.com
Stoos Network : http://www.stoosnetwork.org
4. Vineet Nayar, Les employés d’abord, les clients ensuite. Comment renverser les règles du management,
Éditions Diateino, 2011

Messager-Livre.indb 188 12/10/12 09:38


Scrummaster, un autre style de leadership
189
Chapitre 16

au service des employés, qui apportent de la valeur, plutôt que de concentrer du pouvoir
entre les mains de managers auxquels on rend des comptes.
On parle alors de « pyramide inversée », dans laquelle le « pouvoir » est concentré sur
les opérationnels. Dans ce cas, on ne parle pas de pouvoir, au sens « autorité » ; on parle
de potentiel, de capacités, de facultés et de responsabilité… que les membres de l’équipe
sont autorisés à exprimer et à développer.
Cela ne signifie pas qu’il n’existe plus de hiérarchie. Les managers intermédiaires et ceux
au sommet de la hiérarchie restent chargés de la mise en œuvre des décisions stratégiques
de l’organisation, de la mise à disposition des ressources nécessaires et des arbitrages.
Cela signifie que la prise de décision est décentralisée auprès des managers de proximité
et de petites cellules réduites, c’est-à-dire des scrummasters auprès d’équipes constituées
de huit à dix personnes maximum, qui se partagent les responsabilités :
• des responsabilités collectives : l’engagement sur les résultats, la création de valeur ;
• une responsabilité individuelle : le cadre, les moyens et le processus, pour le scrum-
master, qui facilite l’engagement de l’équipe.
Le concept de servant leadership n’est pas apparu avec les méthodes agiles. Robert
Greenleaf a, dès les années 1970, mis en avant sa vision d’un management plus éthique
et moins autoritaire, orienté vers les personnes. Prenant sa suite, en 1990, Larry Spears
a complété le modèle en décrivant les dix comportements à adopter par le servant leader.
1. Écouter les idées, les suggestions des collaborateurs, prêter attention aux non-dits,
pratiquer le silence.
2. Faire preuve d’empathie à l’égard des collaborateurs, pour prendre de bonnes décisions
collectives, en respectant les aspirations de chacun, même si l’on n’est pas d’accord.
3. Être disponible et proposer un espace de soutien moral (healing) si le collaborateur en
exprime le besoin.
4. Prendre conscience de soi, de ses émotions, de ses propres freins éventuels, afin de
pouvoir aborder ses collaborateurs.
5. Éliminer toute forme d’autoritarisme et utiliser sa capacité de persuasion pour favori-
ser un engagement durable de la part des collaborateurs.
6. Développer sa capacité à « voir grand », au-delà des problèmes quotidiens, et à donner
une perspective motivante pour les membres de l’équipe.
7. Anticiper l’avenir en tirant les leçons du passé et considérer que même les erreurs
éclairent le futur.
8. Être dévoué et fournir l’intendance nécessaire pour servir les intérêts des collaborateurs.

Messager-Livre.indb 189 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
190
Cinquième partie

9. S’engager à développer le potentiel de ses collaborateurs selon leurs propres désirs et


dans l’intérêt collectif.
10. Créer une communauté avec ses collaborateurs, dans laquelle chacun s’exprime de
façon authentique, s’engage et contribue à la performance générale.
En servant les intérêts, les besoins et les aspirations de ses coéquipiers, le scrummaster
est un vecteur de développement personnel (pour chaque collaborateur) et collectif (pour
l’équipe).
Sans être un « serviteur corvéable », il s’engage moralement et met au service de l’équipe
des qualités telles que le respect, l’humilité ou l’exemplarité. Il développe un style de
management adapté à chacun des membres. À l’écoute, disponible, rassurant, il inscrit
son action dans la durée et donne du temps à ses coéquipiers, en dépit des pressions
quotidiennes et stressantes. Certes, les objectifs des fins de sprints sont à court terme,
mais l’essentiel ne réside pas uniquement dans le résultat immédiat ; il repose aussi sur la
capacité de chaque membre de l’équipe à trouver sa place et à développer son potentiel.
Le servant leader est soucieux de favoriser la construction de l’équipe dans la durée ; il
est attentif à sa performance et à la qualité de ses résultats… ce qui nécessite du temps.
Ce leadership et cette disponibilité favorisent l’innovation : l’environnement de travail
créé par le scrummaster influence, stimule et libère la créativité. Il autorise les collabo-
rateurs à avoir des idées, à émettre des propositions, à s’opposer à une décision, dans un
cadre protecteur.
Cette description n’est pas sans rappeler le triangle des 3 P (voir figure 4-4), qui synthé-
tise la posture du coach : le scrummaster n’est-il pas un coach au service de son équipe ?
En recherchant la juste proportion entre l’épanouissement individuel de chacun, clé pour
la collaboration et la performance de l’équipe, la recherche de résultats et la satisfaction
du client, il est aussi un équilibriste.

Figure 16-1
La recherche
de l’équilibre

Messager-Livre.indb 190 12/10/12 09:38


Scrummaster, un autre style de leadership
191
Chapitre 16

Et vous, quel est votre style de leadership ?


Que vous soyez leader expérimenté ou débutant, je vous invite à répondre à ces quelques
questions afin de faire votre autodiagnostic en matière de leadership.

Répondez spontanément et franchement : il s’agit de votre pratique habituelle et non de


celle que vous souhaiteriez avoir idéalement. Si vous êtes débutant, il s’agit de la pratique
que vous pensez avoir si la situation se présente.
Règle du jeu – Pour chaque affirmation, évaluez votre pratique avec trois valeurs : 5 si
c’est toujours votre pratique, 3 si c’est parfois votre pratique et 1 si c’est rarement votre
pratique. Si ce n’est jamais votre pratique, passez à la suivante.
Ensuite, à l’issue de la dernière question, vous reporterez les valeurs dans le tableau 16-1,
dans la section « Analysez vos résultats ».

Les questions à se poser

Question 1
Je plaisante régulièrement avec les collaborateurs de l’équipe.
Votre évaluation …

Question 2
Je suis obligé de trancher en permanence.
Votre évaluation …

Question 3
Je fixe les échéances pour la fin des travaux que je confie à mes collaborateurs.
Votre évaluation …

Question 4
Je n’aime pas contrôler le travail des autres.
Votre évaluation …

Question 5
J’organise souvent des déjeuners ou des pots.

Messager-Livre.indb 191 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
192
Cinquième partie

Votre évaluation …

Question 6
J’apprécie de discuter avec mes collaborateurs pour prendre les bonnes décisions.
Votre évaluation …

Question 7
Je passe beaucoup de temps avec mes collaborateurs.
Votre évaluation …

Question 8
Je donne les directives, ensuite mes collaborateurs se débrouillent comme ils veulent.
Votre évaluation …

Question 9
J’ai du mal à prendre des décisions.
Votre évaluation …

Question 10
Je n’aime pas faire des critiques à mes collaborateurs sur leur travail.
Votre évaluation …

Question 11
J’ai besoin qu’on me rende compte de l’avancement du travail.
Votre évaluation …

Question 12
J’écoute les remontées d’information de mes collaborateurs.
Votre évaluation …

Question 13
J’ai horreur des conflits dans l’équipe.
Votre évaluation …

Messager-Livre.indb 192 12/10/12 09:38


Scrummaster, un autre style de leadership
193
Chapitre 16

Question 14
On est au bureau pour travailler.
Votre évaluation …

Question 15
J’ai des convictions et j’apprécie de les faire valoir, au même titre que les autres.
Votre évaluation …

Question 16
Lorsqu’une décision est prise par la Direction, on n’a pas le choix : il faut l’appliquer,
sans sourciller.
Votre évaluation …

Question 17
Les réunions m’ennuient profondément.
Votre évaluation …

Question 18
Pour résoudre un conflit, j’ai besoin de toutes les informations pour comprendre les
vraies causes.
Votre évaluation …

Question 19
J’ai horreur de ceux qui me dérangent sans cesse pour un oui ou pour un non.
Votre évaluation …

Question 20
J’ai suffisamment d’expérience pour savoir ce qu’on doit faire.
Votre évaluation …

Analysez vos résultats


Reportez les valeurs attribuées à chaque question dans le tableau qui suit, puis faites la
somme des valeurs par colonne.

Messager-Livre.indb 193 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
194
Cinquième partie

Tableau 16-1 Analysez vos résultats

Style n° 1 Style n° 2 Style n° 3 Style n° 4


Question 2 : … Question 6 : … Question 1 : … Question 4 : …
Question 3 : … Question 12 : … Question 5 : … Question 8 : …
Question 11 : … Question 14 : … Question 7 : … Question 9 : …
Question 16 : … Question 15 : … Question 10 : … Question 17 : …
Question 20 : … Question 18 : … Question 13 : … Question 19 : …
Total : … Total : … Total : … Total : …

Le total le plus élevé correspond à votre style de leadership prédominant et d’encadre-


ment préférentiel. Comment analyser vos résultats ?

Le modèle de Blake et Mouton


Le modèle de Blake et Mouton définit quatre styles de management. Chacun d’eux s’ap-
puie, plus ou moins, sur deux orientations : la priorité donnée aux tâches/résultats ou la
priorité donnée aux relations (figure 16-2).

Figure 16-2
Les quatre styles
de management

Quels sont les caractéristiques et les comportements types des quatre styles de mana­
gement ?
• Style directif : celui qui adopte ce style de management indique la voie, maintient le
cap. Il organise le travail, donne des ordres et des directives, contrôle et demande des
comptes. Il se focalise sur la tâche et les résultats, donne peu d’autonomie et met au
second plan les personnes et la créativité.
• Style informatif : ce manager suscite les interactions avec lui et au sein de son équipe.
Il sollicite l’information, favorise la réflexion, mais conserve l’autorité et prend les déci-
sions.

Messager-Livre.indb 194 12/10/12 09:38


Scrummaster, un autre style de leadership
195
Chapitre 16

• Style participatif : le manager participatif est plus orienté vers les personnes que le
travail. Les ressentis et la qualité de la relation favorisent la qualité du résultat. Il invite
ses collaborateurs à travailler dans un esprit d’équipe et il développe un sentiment
d’appartenance.
• Style délégatif : ce manager délègue et invite les collaborateurs à exercer leurs respon-
sabilités. Il se place sur le même plan qu’eux et considère qu’ils savent ce qu’ils ont à
faire.

Comment analyser vos résultats ?


Voici à quoi correspondent les styles dans le tableau 16-1 :
• style n° 1 : directif ;
• style n° 2 : informatif ;
• style n° 3 : participatif ;
• style n° 4 : délégatif.
Vous pouvez ainsi aisément identifier votre style prédominant. Sans être le résultat d’une
analyse scientifique, la tendance qui se dégage doit vous aider à mener une réflexion sur
votre identité professionnelle de leader d’équipe. Aucun leader n’adopte un style unique ;
chacun exerce alternativement l’un des quatre styles, selon les situations (management
situationnel) et les personnes.

L’éclairage de la Process Communication


La Process Communication définit également quatre styles de management5, que l’on
peut mettre en correspondance avec ceux présentés dans le modèle de Blake et Mouton
(tableau 16-2).
Tableau 16-2 Les quatre styles de management6

Modèle Blake & Mouton Modèle Process Com


Directif Autocratique
Informatif Démocratique
Participatif Bienveillant
Délégatif Laisser-faire

5. Taibi Kahler, Ph.D, Manager en Personne, Kahler Communication, Inc., Little Rock, Arkansas, 1988,
1992, 2000, 2004
6. Source : Christian Becquereau, Process Com pour les managers, Eyrolles, 2008

Messager-Livre.indb 195 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
196
Cinquième partie

On entend par Autocratique un style qui consiste à dire clairement au collaborateur ce


qui est attendu de lui, en lui précisant le délai à respecter et les résultats attendus ; c’est
un style positif et respectueux de l’autre, basé sur une authentique position de vie +/+.
Le style Démocratique pratique le travail d’équipe ; sa fonction est de consulter et
d’échanger avec ses collaborateurs avant de prendre une décision à laquelle les collabo-
rateurs adhèreront d’autant plus qu’ils auront été consultés à ce sujet.
Le style Bienveillant est fondé sur la croyance qu’une bonne ambiance dans l’équipe
favorise la synergie, la coopération et donc l’efficacité.
Enfin, le manager de style Laisser-faire est en retrait, pour responsabiliser ses coéquipiers.
Il n’y a pas de bon ou de mauvais style : chacun présente des avantages et des inconvé-
nients, en fonction des personnes ou des situations.

Prendre en compte la personne


La Process Com établit qu’à chaque type de personnalité correspond un style de mana-
gement préférentiel, c’est-à-dire que la personne pratique elle-même et apprécie qu’on
pratique avec elle un style de management particulier (tableau 16-3).
Tableau 16-3 Les types de personnalités et les styles de management7

type de personnalité Style de management


du collaborateur
À adopter À éviter
Empathique Bienveillant Autocratique
Travaillomane Démocratique Autocratique
Persévérant Démocratique Autocratique
Rêveur Autocratique Laisser-faire
Rebelle Laisser-faire Autocratique
Promoteur Autocratique Démocratique

Particularité du type Rêveur


Seul le type de personnalité Rêveur pratique un style de management différent de celui
qu’il faut pratiquer avec lui ; tandis qu’il pratique le style Démocratique, on pratiquera avec
lui le style Autocratique.

Comment utiliser cet outil ?


Il est important de savoir adapter votre style de management au profil de vos collabora-
teurs et de l’équipe dans son ensemble. Avec une équipe dont les membres sont majo-

7. Gérard Collignon, Pascal Legrand, Coacher avec la Process Communication, InterEditions, 2006

Messager-Livre.indb 196 12/10/12 09:38


Scrummaster, un autre style de leadership
197
Chapitre 16

ritairement juniors, vous pourrez être davantage directif, alors qu’avec des profils plus
expérimentés, vous pourrez déléguer facilement et être plus en retrait.
Sachez que le style Autocratique est particulièrement adapté au type de personnalité
Rêveur, car celui-ci a besoin de savoir clairement ce qui est attendu de lui, mais aussi au
type Promoteur, car étant fonceur par nature, il a besoin de connaître la cible et parfois
d’être freiné et recadré. Sinon, il est à éviter avec tous les autres types.

Exemple : clôture d’un sprint planning meeting

Un scrummaster clôture un sprint planning meeting ; il souhaite obtenir l’engagement de tous


les membres de l’équipe. Il s’adresse à chacun différemment selon le type de personnalité
du collaborateur.
Travaillomane : « S’il te plaît, Henri, peux-tu nous dire, premièrement, si tu es satisfait du
résultat de la réunion et, deuxièmement, si tu t’engages pour la fin du sprint ? Tu as trois
minutes. » Style Démocratique, canal Interrogatif.
Empathique : « Nathalie, nous serions heureux d’avoir ton ressenti sur le résultat de la réu-
nion et si tu te sens prête à t’engager. » Style Bienveillant, canal Nourricier.
Rêveur : « Maxime, donne-nous s’il te plaît ta vision des choses, dis-nous si le résultat te
convient et si tu imagines bien la fin du sprint pour t’engager. » Style Autocratique, canal
Directif.
Promoteur : « Yann, dis-nous si c’est OK pour toi de relever le défi de la fin du sprint » Style
Autocratique, canal Directif.
Persévérant : « Claudine, peux-tu nous donner ton point de vue sur le résultat de la réunion ?
À ton avis, tu peux t’engager ? » Style Démocratique, canal Interrogatif.
Rebelle : « OK, cool, Claudine. Et toi, Jean-Marc, tu es OK pour t’engager ? Après, tu gères
tes tâches comme tu veux, hein ! » Style Laisser-faire, canal Ludique.

S’il s’agit bien ici de management personnalisé, il peut s’avérer utile de prendre égale-
ment en considération la situation plus globale du niveau de maturité de l’équipe.

Prendre en compte les étapes de constitution de l’équipe


N’est-il pas en effet pertinent d’adapter son style de management à la maturité de l’équipe,
tout en ayant en parallèle un leadership de proximité, plus personnalisé en fonction des
types de personnalités de chacun ? Ce serait une erreur d’avoir toujours le même compor-
tement managérial, quelles que soient les circonstances.
Si l’on reprend les cinq étapes de constitution d’une équipe, nous entrevoyons la perti-
nence d’adopter un management contextuel ou situationnel, adapté à chaque étape.
1. Plus directif au départ, lors des étapes « Création et structuration » et « Confrontations et
tensions », afin de donner le cap, de faire respecter le cadre défini et d’éviter les dérives
conflictuelles, le leader est également Démocratique pour associer très tôt les membres

Messager-Livre.indb 197 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
198
Cinquième partie

de l’équipe aux décisions. Si ceux-ci n’ont pas encore la maturité pour prendre eux-
mêmes les décisions, ils s’habituent à exprimer leur point de vue. Les tensions qui appa-
raissent nécessitent d’avoir aussi un style Bienveillant pour ne pas envenimer certaines
situations de mécommunication.
2. Progressivement en retrait, le scrummaster pratique le style Laisser-faire pour favori-
ser l’autonomie de l’équipe. Il délègue petit à petit l’animation des cérémonies, la prise
de décision, la résolution de problèmes, etc.
3. Il veillera à réutiliser un style Bienveillant à la fin du cycle, avant la séparation des
membres de l’équipe.
Ainsi, il n’y a pas de bon ou de mauvais style de management ; il y a des personnes et des
situations dont il faut tenir compte pour choisir le style le mieux approprié. Le scrum-
master efficace sait doser son degré d’interventionnisme : être présent sans être envahis-
sant, déléguer sans fuir les responsabilités, être directif sans être autoritaire…
Une démarche d’accompagnement avec un coach peut aider le scrummaster à expérimen-
ter et à développer de nouveaux styles de management.

Ce que nous avons appris


• En prenant ses fonctions, le scrummaster est confronté à deux changements : celui de
l’équipe qu’il accompagne et son propre changement.
• En effet, qu’il soit un chef de projet traditionnel ou un scrummaster débutant ou expé-
rimenté, il devra faire évoluer sa pratique managériale.
• Nous avons vu, en effet, que le style de leadership du scrummaster est novateur, en
rupture avec le management classique, dans le sens où il devient un servant leader,
c’est-à-dire un leader au service de son équipe et de ses collaborateurs.
• Le servant leader est soucieux des besoins et des attentes de ses coéquipiers. Il veille
au développement de leurs compétences, facilite l’innovation et inscrit son action dans
le temps, tout en s’attachant aux résultats et à la création de valeur.
• Nous avons proposé un outil de réflexion pour analyser votre propre style de mana​gement.
• Cela nous a permis de démontrer la nécessité d’avoir un management pluriel pour adap-
ter son style aux différentes personnes et aux cinq étapes de maturité de l’équipe.

Messager-Livre.indb 198 12/10/12 09:38


Scrummaster, un autre style de leadership
199
Chapitre 16

Outils du coach proposés

• Les styles de leadership (modèle de Blake et Mouton, modèle Process Com)


• Le questionnaire d’autoévaluation des styles de management

Voyons à présent comment développer et mettre en œuvre ce nouveau style de manage-


ment, en nous appuyant sur le cas de Patrick (équipe Alpha).

Messager-Livre.indb 199 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 200 12/10/12 09:38
17
Aborder son propre changement

Il faut rêver sa vie et vivre son rêve.


Antoine de Saint-Exupéry

Nous avons vu qu’un coaching doit démarrer par une demande clairement formulée par
la personne coachée (voir chapitre 4). Coacher un scrummaster n’a pas vraiment de sens
si l’on n’a pas défini l’objectif.
Généralement, ce type d’accompagnement facilite la prise de fonction, l’adoption d’une
nouvelle posture et l’évolution des pratiques managériales. Toutefois, quel est le point de
départ ? Et le point d’arrivée ?
Les questions que se posent les scrummasters que je rencontre sont souvent : « Saurai-je
animer l’équipe ? », « Quel style de leadership dois-je adopter ? », « Quel est le niveau
de maturité de l’équipe ? », « Quelles sont les attentes de la hiérarchie vis-à-vis de mon
rôle ? », « Quelle est la définition officielle du poste ? », etc.
On le voit bien, sans passer par cette incontournable étape préliminaire, le coach et son
coaché sont condamnés à se fourvoyer ou à errer dans une démarche totalement inefficace.
Dans le chapitre 4, nous avons évoqué la nécessité d’un entretien préliminaire ; j’avais
présenté à cet égard, la grille RPBDC (voir tableau 4-1). Cet entretien permet de dégrossir
la problématique du coaché, de déterminer son objectif et de définir les différents axes
de travail. Lorsque le coaching à proprement parler démarre, la première étape porte sur
l’identité du scrummaster.
☞ Cette étape correspond au travail de visualisation présenté dans le cadre du coaching
de l’équipe (voir chapitre 10), mais appliqué au niveau individuel.

Messager-Livre.indb 201 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
202
Cinquième partie

Une fois l’objectif clarifié et rendu tangible, le scrummaster s’engage sur un contrat d’évo-
lution personnelle.

Pas à pas, sur la pyramide de Dilts


Pour initier le travail identitaire du scrummaster, je m’appuie sur un outil : les niveaux
logiques ou la pyramide de Dilts (figure 17-1). Cet outil a été élaboré par Robert Dilts,
consultant en Programmation neuro-linguistique.

Figure 17-1
La pyramide
de Dilts

Comment utiliser cet outil ?


Cet outil peut être utilisé pour accompagner une personne vers son objectif d’évolution,
tel un membre de l’équipe, solitaire et individualiste, qui se fixerait comme cible de déve-
lopper ses compétences relationnelles et de devenir un coéquipier sociable, pédagogue
et plus convivial.
Sur le principe du jeu de la marelle, invitez la personne à se projeter dans l’avenir, puis
à se déplacer entre les différents niveaux de la pyramide pour visualiser son objectif et
mieux concrétiser les changements qu’elle aura à opérer. Pour chaque niveau de la pyra-
mide, vous pouvez aider le scrummaster en lui posant des questions ouvertes.
But : il donne un sens à la démarche, sa raison d’être.
Coach : « Pour quelle raison êtes-vous ici ? Quel souvenir aimeriez-vous laisser après
votre départ ou à la fin du projet ? »

Identité : elle reflète ce que nous sommes, ce qui est différent de ce que nous faisons.
Coach : « Quel scrummaster voulez-vous devenir ? Comment pouvez-vous vous décrire ?
Comment vous distinguez-vous des autres scrummasters ? Quelle est votre spécificité ? »

Messager-Livre.indb 202 12/10/12 09:38


Aborder son propre changement
203
Chapitre 17

Croyances et valeurs : nos croyances, qui ne sont pas les croyances religieuses, sont les
conclusions ou généralisations que nous tirons de nos expériences (« J’apprécie le tra-
vail en équipe » ou « Les gens ne savent pas communiquer », par exemple). Les valeurs
sont nos facteurs de motivation et de démotivation (liberté, travail, justice, etc., sont des
exemples). Nos valeurs et nos croyances influencent grandement nos comportements et
nous poussent à agir (ou ne pas agir) dans un certain sens.
Coach : « Quelles valeurs votre identité sert-elle ? Pour quelle cause êtes-vous prêt à
vous battre ? Quelles règles vous appliquez-vous généralement ? Qu’est-ce qui est bien
et mal, selon vous ? »

Capacités et compétences : il s’agit de nos talents et de nos atouts qui nous permettent
d’être légitime.
Coach : « Sur quoi vous appuyez-vous pour être ou pour devenir ce scrummaster ?
Quelles sont vos compétences clés (acquises à ce jour ou à développer) ? Quel est
votre domaine de compétence privilégié ? En quoi va-t-il être utile ? Qu’est-ce que vous
appréciez chez les autres et que vous n’avez pas ? »

Comportements : les comportements correspondent à tout ce que nous disons et faisons,


conformément à nos valeurs.
Coach : « En quoi vos comportements (actuels ou à venir) illustrent-ils vos valeurs et
votre identité ? Comment vos comportements vous aident-ils à atteindre votre but ? Com-
ment voyez-vous en action le scrummaster que vous êtes ? »

Environnement : il s’agit du contexte physique dans lequel la personne évolue (endroit,


entourage, temps..) et est à l’aise.
Coach : « Dans quel environnement votre identité s’épanouit-elle ? Pouvez-vous le dé-
crire ? Avec qui évoluez-vous dans cet environnement ? Quel est le moment de la jour-
née où vous êtes le plus efficace ? »

N’oubliez pas qu’il s’agit d’un exercice de visualisation, donc de projection dans l’avenir
puis d’analyse du chemin parcouru (voir chapitre 10).
Une fois que le coaché a élaboré sa pyramide, proposez-lui d’observer si tous les niveaux
sont alignés. Cela signifie qu’en revenant dans le présent, il s’interroge sur ses comporte-
ments actuels, ses capacités et son environnement pour mesurer l’écart entre sa vision du
futur et la réalité actuelle.
Coach : « Vos comportements actuels sont-ils en conformité avec vos valeurs ? Votre
environnement est-il celui dans lequel vous êtes le plus à l’aise ? Disposez-vous de
toutes les compétences nécessaires pour être le scrummaster que vous avez décrit ? »

L’objectif de cette comparaison est de repérer les progrès à mener et les aménagements à
apporter, dans le but de trouver une vraie congruence.

Messager-Livre.indb 203 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
202
Cinquième partie

Être congruent
Dans notre contexte, la congruence est l’alignement des pensées, des paroles et des actes.

Figure 17-2
La congruence

Sur la figure 17-2, la zone de congruence est l’intersection de trois cercles représentant
respectivement la pensée ou les valeurs de la personne, les actes visibles et les paroles
audibles. Lorsque la personne congruente s’exprime, ce qu’elle dit est bien le reflet de ce
qu’elle est, ce qui est renforcé par ses actes.
☞ Je renvoie le lecteur à la figure 7-1 dans la troisième partie : être congruent, c’est pré-
cisément montrer sa vraie dimension humaine.

Les bénéfices de la congruence sont multiples. D’une part, la personne est intègre, ce qui
est une source de bien-être (n’avez-vous jamais eu à appliquer une décision qui heurtait
vos valeurs ?). D’autre part, son authenticité inspire confiance et ses relations avec les
autres n’en sont qu’améliorées.
Un scrummaster congruent sera d’autant plus crédible face à son équipe s’il fait ce qu’il
dit, en conformité avec ce à quoi il aspire.
L’exercice sur les niveaux logiques est un moyen de rechercher sa congruence par rapport
à son objectif, ainsi qu’un travail préparatoire pour l’élaboration de son contrat d’évolu-
tion personnelle.

Messager-Livre.indb 204 12/10/12 09:38


Aborder son propre changement
205
Chapitre 17

Définir son contrat d’évolution personnelle


Le contrat d’évolution personnelle (CEP) est un contrat entre le scrummaster et le coach,
mais surtout un contrat avec lui-même. Il précise les objectifs de la démarche de coa-
ching, les résultats attendus et les moyens mis en œuvre pour y parvenir. La formalisation
d’un contrat écrit donne une réalité au projet d’évolution personnelle.
Pour tirer profit le plus possible d’une démarche de coaching, le scrummaster doit être
précis sur ses objectifs.
« Ceux qui ne savent pas où ils vont sont surpris d’arriver ailleurs. »
(Pierre Dac)
Le coach l’aide à préciser des objectifs SPORT1 :
• Spécifiques : les objectifs sont spécifiques lorsqu’ils sont totalement définis par la per-
sonne coachée elle-même, en accord avec son être. On comprend aisément qu’ils ne
peuvent être standardisés ou définis par un tiers, même si une fiche de poste définit de
façon générique les missions du scrummaster au niveau de l’organisation.
• Positifs : formulés de façon positive, ils donnent l’élan initial nécessaire pour démarrer.
En pratique
Objectif négatif : ne plus me dérober face aux objections ou dans les situations de conflit.
Objectif positif : être assertif dans l’accueil des objections et acquérir des réflexes de
stratégie dans la gestion des conflits.

• Observables : les objectifs visent des changements de comportements visibles (par


soi-même et par les autres) et mesurables.
• Réalistes : les objectifs réalistes sont ceux que l’on peut atteindre et qui dépendent de
changements opérés soi-même.
• Temporels : une échéance doit être fixée. Le projet de changement est balisé (nombre
de séances de coaching, fréquence des séances…).
À partir de là, le contrat peut être établi. Il est essentiel de bien préciser les engagements
mutuels.

Exemple : mise en situation de coaching individuel

Reprenons notre équipe Alpha et, plus précisément, l’accompagnement individuel de Patrick.
Rappelons que Patrick est le scrummaster de cette équipe. Âgé de 44 ans, il anime donc une
équipe de sept personnes qui s’est engagée dans l’agilité il y a neuf mois. Il a une grande

1. Rhena Branch, Rob Willson, Béatrice Millêtre, Exercices de thérapies comportementales et cognitives
pour les nuls, First Editions, 2010

Messager-Livre.indb 205 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
202
Cinquième partie

expérience, à la fois sur les plans technique et fonctionnel, ce qui lui confère considération et
respect de la part de son entourage. Il a, de surcroît, une autorité naturelle, peut-être due à
sa stature imposante et à son intonation de voix assez forte.
Le coaching de Patrick, suggéré par le responsable Qualité & Méthodes, s’est déroulé sur six
mois, à raison d’une séance individuelle toutes les deux ou trois semaines environ.
La demande officielle est d’amener l’équipe à être davantage impliquée, responsabilisée et
plus engagée sur les résultats. Un entretien fait émerger des objectifs plus explicites : trouver
un autre positionnement par rapport à son équipe (en écoutant davantage), faire confiance à
ses coéquipiers et travailler sur son « lâcher prise » technique afin de mieux déléguer et de
développer ses capacités à motiver.
Quelques séances ont également permis de dresser l’inventaire Process Com de Patrick
(base Persévérant) et d’identifier son style de management prédominant (Démocratique,
devenant Autocratique sous stress).
Voici un exemple de contrat d’évolution personnelle (CEP) élaboré par le scrummaster
Patrick (figure 17-3, page suivante).

Le CEP évolue
Le contrat est une feuille de route. On sait, par expérience, que le chemin se découvre
en marchant. Par conséquent, ce contrat peut être mis à jour régulièrement durant un
accompagnement.

Ce que nous avons appris


• Avant de démarrer une démarche d’évolution personnelle accompagnée par un coach,
le scrummaster doit définir précisément ses objectifs, afin de construire son identité.
Ces objectifs doivent être SPORT (Spécifiques, Positifs, Observables, Réalistes, Tem-
porels).
• Nous avons découvert un outil utilisé par le coach pour permettre au scrummaster de
se projeter dans l’avenir et de visualiser de manière tangible quel scrummaster il est
devenu : il s’agit de la pyramide de Dilts, qui l’aide à formaliser ses objectifs de chan-
gement.
• Les différents niveaux de la pyramide se doivent d’être alignés pour exploiter plei-
nement les ressources du coaché ; c’est ce qu’on appelle la congruence, qui favorise
l’authenticité de la personne dans ses comportements quotidiens et dans ses relations
avec autrui. Ainsi, la dimension humaine du scrummaster est prise en considération.
• Enfin, nous avons découvert un exemple de contrat d’évolution personnelle (CEP).

Messager-Livre.indb 206 12/10/12 09:38


Aborder son propre changement
207
Chapitre 17

Outils du coach proposés

• La pyramide de Dilts
• Le contrat d’évolution personnelle

Commençons à présent le travail avec Patrick, afin qu’il développe ses qualités d’écoute
et son servant leadership, trouve son juste positionnement et délègue davantage l’anima-
tion des cérémonies agiles. Les titres de chapitres reprennent les objectifs de son CEP.

Figure 17-3
Exemple
de contrat
d’évolution
personnelle

Messager-Livre.indb 207 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 208 12/10/12 09:38
18
En tant que scrummaster, je veux
développer mes qualités d’écoute

Si parler est un besoin, écouter est un art.


Goethe

En tant que leader au service de son équipe, nous avons vu qu’une grande disponibilité
et une écoute maximale étaient nécessaires pour faire émerger le potentiel des collabo-
rateurs.
En suivant le cheminement de Patrick dans son travail avec le coach, nous allons dé-
couvrir qu’il existe plusieurs types d’écoute et que l’écoute se pratique dans différentes
conditions.

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : quel temps d’écoute ?

Coach : « Si j’ai bien compris votre demande, Patrick, vous souhaitez développer vos qua-
lités d’écoute ? »
Patrick : « En effet. Je me rends compte que je n’écoute pas assez mes coéquipiers. »
Coach : « Qu’entendez-vous par ‘je n’écoute pas assez mes coéquipiers’ ? »
Patrick : « D’une part, je me rends compte que je ne consacre pas assez de temps à l’équipe.
Je suis disponible, mais généralement lorsqu’on vient me solliciter pour une demande d’info
ou une aide. Par ailleurs, j’ai l’impression de ne pas savoir bien écouter. »
Coach : « Pas assez de temps ? Combien cela représente-t-il, sur une semaine, par
exemple ? »

Messager-Livre.indb 209 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
210
Cinquième partie

Patrick : « Je ne sais pas, avec certains quelques minutes, avec d’autres, s’ils ont un pro-
blème, une demi-heure ou une heure… »
Coach : « Vous consacrez du temps à vos collaborateurs, uniquement lorsqu’il y a un pro-
blème ? »
Patrick : « Oui. Sinon, ils savent ce qu’ils ont à faire et on n’est pas là pour parler de la pluie
et du beau temps ! »
Coach : « Si je comprends bien, vous discutez avec vos collaborateurs uniquement pour
évoquer des problèmes ? »
Patrick : « Ben, oui… enfin, aussi lors des cérémonies agiles. »
Coach : « Et là, lors des cérémonies agiles, vous les écoutez davantage ? »
Patrick : « Bof, c’est moi qui anime, alors… Et j’ai souvent un peu de mal à les bouger. »
Coach : « Nous reviendrons ultérieurement sur l’animation des cérémonies agiles, si vous
voulez bien [voir chapitre 21]. Revenons sur le ‘pas assez de temps consacré à l’équipe’ :
considérez-vous que vous devriez passer plus de temps avec elle ? »
Patrick : « Je crois, oui. »
Coach : « Dans quel but, Patrick ? »
(…)
Coach (ayant validé que Patrick a de bonnes raisons de passer plus de temps avec ses col-
laborateurs) : « Alors, comment pourriez-vous leur consacrer plus de temps ? »

Écouter plus
Patrick est très souvent sollicité ; c’est même un réflexe chez ses coéquipiers de l’interpel-
ler systématiquement, dès qu’une difficulté se présente. Fort de son expertise technique,
Patrick apporte généralement la réponse ou oriente sur de bonnes pistes, laissant finale-
ment peu de latitude à ses interlocuteurs pour mener eux-mêmes la réflexion et trouver la
solution. La conséquence est que Patrick, dont l’emploi du temps est grandement occupé
par ces résolutions de problèmes, n’a plus le temps de gérer ses activités et consacrer du
temps à l’équipe pour autre chose que les cérémonies et les problèmes.

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : dégager du temps

Patrick : « Il faudrait que je dégage du temps, d’abord. »


Coach : « Comment pourriez-vous en dégager sur la résolution de problèmes, par exemple ? »
Patrick : « ??? »

Messager-Livre.indb 210 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux développer mes qualités d’écoute
211
Chapitre 18

Coach : « Prenons l’exemple du dernier problème apporté par un coéquipier : étiez-vous le


seul à détenir la solution ? »
Patrick : « Non, sans doute. Il aurait pu trouver aussi en se creusant un peu les méninges. »
Coach : « Pourquoi ne s’est-il pas creusé les méninges ? »
Patrick : « Parce qu’il savait que je lui donnerais la réponse ! Facile ! »
Coach : « Ah, et si vous ne la lui aviez pas donnée ? »
Patrick : « On aurait perdu du temps. »
Coach : « Qui aurait perdu du temps ? »
Patrick : « Lui, l’équipe… »
Coach : « Et vous ? »
Patrick : « Moi, j’en aurais gagné ! »
Coach : « Ça tombe bien, vous vouliez dégager du temps ! Peut-être pour le consacrer à un
autre coéquipier pour autre chose que la résolution d’un problème ? »

Le coach amène Patrick à prendre conscience qu’il peut dégager du temps là où il se rend
systématiquement incontournable. Ensuite, il l’aidera à définir comment il peut écouter
davantage.

Précision
Le cheminement de Patrick est ici simplifié. Nous avons également travaillé ensemble
sur les raisons qui l’amènent à donner systématiquement la solution et sur les difficultés
qu’il a à réfréner son envie de répondre (besoin de reconnaissance, confiance en lui…).

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : arrêter de répondre


aux sollicitations

Coach : « Comment pourriez-vous, demain, traiter la même demande de la part de votre


coéquipier qui vous apporte un problème ? »
Patrick : « Peut-être en m’assurant qu’il ne sait pas. »
Coach : « Comment ? »
Patrick : « Tout simplement en lui posant des questions du type : qu’est-ce que tu ne com-
prends pas exactement ? Qu’est-ce qu’il te manque précisément ? Qu’est-ce que tu ne sais
pas et que je peux t’aider à trouver ? Quel est ton obstacle ? Qu’as-tu déjà essayé ? Quelle
est ton idée, à toi ? »
Coach : « Ah, je vois que vous commencez à écouter davantage ! Et quand commencez-
vous ? »
Patrick : « Dès la prochaine sollicitation. »

Messager-Livre.indb 211 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
212
Cinquième partie

(…)
Coach : « Maintenant que vous dégagez du temps, revenons à ma question initiale : com-
ment pourriez-vous leur consacrer plus de temps ? »

Une première action est définie par Patrick : arrêter de répondre aux sollicitations en
donnant systématiquement la réponse et questionner son interlocuteur pour faire émerger
celle-ci de sa propre réflexion. Celui-ci et ses coéquipiers prendront davantage confiance
en eux et seront, petit à petit, moins enclins à consulter Patrick. Ce dernier dégagera de
plus en plus de temps utile.
Voyons, à présent, comment il va utiliser ce temps.

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : le MBWA

Patrick : « J’aimerais passer un peu de temps, comme ça, de façon informelle, sans objectif
précis. »
Coach : « C’est ce qu’on appelle le MBWA, le Management By Wandering Around. Qu’est-ce
qui vous en empêche ? »
Patrick : « Rien, si ce n’est le manque de temps. »
Coach : « Si vous en dégagez sur la résolution de problèmes, quand et combien de temps
pourriez-vous consacrer à cette activité ? »
Patrick : « Si je passe chaque matin ou chaque début d’après-midi auprès de mes coéqui-
piers, je peux y consacrer une demi-heure à une heure. »
Coach : « Et pour y faire quoi ? »
Patrick : « Ben parler de tout et de rien, je ne sais pas vraiment faire, moi ! »
Coach : « Quand commencez-vous ? »
Patrick : « Demain matin ! »
Coach : « OK ; on verra lors de la prochaine séance de quoi vous avez parlé ! »

Une deuxième action est listée par Patrick : « descendre dans l’arène » et improviser
chaque jour « une promenade sans but » (wandering) auprès de ses collaborateurs, pour
maintenir le contact, créer plus de liens, s’enquérir de leur état d’esprit, échanger à bâtons
rompus sur un sujet professionnel ou extraprofessionnel, communiquer une bonne nou-
velle, donner ou recueillir du feedback, féliciter… Bref, écouter ses collaborateurs. Dans
ce cas, le risque étant quasi inexistant, le coach invite Patrick à se lancer, sans planifier
en détail les thèmes de conversation à aborder… et à voir ce qui se passe.
Cette deuxième action évoque le Gemba Walk. Cette « marche de valeur », dans l’univers
du Lean, est une pratique qui consiste, pour un manager, à se déplacer sur les chaînes de
fabrication ou dans les ateliers afin de mieux comprendre le processus de fabrication, et

Messager-Livre.indb 212 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux développer mes qualités d’écoute
213
Chapitre 18

donc de création de valeur. C’est l’occasion d’échanger avec les personnes qui produisent,
de recueillir leurs idées, ainsi qu’un moyen d’améliorer le processus. Patrick, en se rap-
prochant de ses coéquipiers, peut les entraîner à régler chaque jour un petit problème.
Tous au même endroit
Attention ! Le scrummaster est censé se trouver dans la même salle que son équipe,
ce qui crée des conditions favorables à l’écoute – lorsqu’on a une équipe colocalisée,
évidemment.

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : coacher ses coéquipiers

Coach : « En dehors de ces ‘petites balades’, qui créent des contacts en groupe, comment
pourriez-vous envisager un contact plus personnalisé ? »
Patrick : « Pour ça, il y a l’entretien d’évaluation annuel. »
Coach : « Et c’est suffisant, vous semble- t-il ? En cours d’année, il ne vous arrive jamais
d’avoir à organiser un entretien non planifié ? »
Patrick : « Si, lorsqu’il y a un problème. »
Coach : « Ah, encore une fois, s’il y a un problème ! »
Patrick : moue dubitative.
Coach : « Qu’est-ce que ça vous apporte, Patrick, nos séances de coaching, tous les deux ? »
Patrick : « Ça me fait du bien de parler de certaines de mes difficultés et de trouver des idées
nouvelles. Je décompresse ; ça me soulage de mon stress… »
Coach : « Ah oui ? Et vos collaborateurs, ils sont stressés aussi, mais ils ne bénéficient pas
de séances de coaching individuel, eux… »
Patrick : « Oui, mais ils savent où et quand me trouver. »
Coach : « Oui, lorsqu’ils ont des problèmes ! Et s’ils avaient envie de parler d’autre chose,
de leur évolution, de leurs progrès, de leurs attentes ? Et s’ils avaient envie de vous entendre
dire que vous êtes satisfait de leur travail ou de leur comportement, autrement que devant
tout le monde, en trois minutes lors des rétrospectives ? Qu’en pensez-vous ? »
Patrick : « Je pourrais être leur coach ! »
Coach : « Bonne idée ! Sous quelle forme ? »
Patrick : « Sous la forme d’un entretien en face à face d’un quart d’heure ou vingt minutes
tous les quinze jours, par exemple. »
Coach : « Et pour y faire quoi ? »
Patrick : « Faire le point sur les questions que se pose le collaborateur, sur ses objectifs, ses
difficultés à les atteindre… Je fais ça régulièrement avec mon fiston de treize ans et il est
ravi, même si à cet âge-là, il trouvait ça ringard au début. Mais ça rapproche. »
Coach : « Eh oui, ça crée de la confiance et chacun se sent écouté ! Comme vous, en ce
moment, avec votre coach ! »

Messager-Livre.indb 213 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
214
Cinquième partie

Une troisième action est identifiée par Patrick : accorder régulièrement, à chaque colla-
borateur, un entretien en face-à-face afin de donner de son temps, d’établir ou de renfor-
cer une relation privilégiée de confiance. Les bénéfices sont multiples, à la fois pour le
collaborateur et pour le scrummaster : le collaborateur se sent écouté et reconnu et peut
progresser grâce au feedback du leader qui, lui, connaît mieux ses coéquipiers et ajuste,
en conséquence, sa façon de mener l’équipe.
Il reste maintenant à Patrick à s’améliorer sur sa façon d’écouter.

Écouter mieux
Mise en situation de coaching individuel avec Patrick :
une situation de mécommunication

Coach : « Patrick, j’aimerais revenir sur l’impression que vous avez exprimée au début, de ne
pas vraiment savoir écouter. Dans quelles conditions avez-vous cette impression ? »
Patrick : « En fait, il y a des personnes qui me relatent un événement ; j’essaie de mieux les
comprendre en les interrogeant, mais j’ai l’impression que l’on n’est pas sur la même lon-
gueur d’ondes. Du coup, je n’écoute plus. »
Coach : « Auriez-vous un exemple ? »
Patrick : « L’autre jour, Amandine, qui travaille dans mon équipe, vient me confier qu’elle a
un différend avec Serge, qui est désagréable avec elle. Bref, elle se sentait mal et j’ai fait
l’effort de l’écouter… parce que moi, vous savez, ce genre de problèmes... on n’est pas à la
maternelle ! »
Coach : « Comment l’avez-vous accueillie ? »
Patrick : « Accueillie ? »
Coach : « Oui, comment ? Et que lui avez-vous répondu lorsqu’elle vous a décrit la situa-
tion ? »
Patrick : « Ben, d’abord, je lui ai dit que ça ne servait à rien de se mettre dans un état pareil
pour si peu. Ensuite, j’ai voulu rester neutre et je lui ai demandé ce qui s’était passé exacte-
ment, en restant factuel : que lui a-t-il dit ? Qu’a-t-elle répondu ? Comment a-t-il réagi ? Bref,
comprendre ce qui s’est réellement passé. »
Coach : « Et vous avez eu l’impression de ne pas savoir écouter Amandine, c’est ça ? »
Patrick : « En effet. Elle me regardait en écarquillant les yeux, en essayant de se remémo-
rer les échanges qu’elle avait eus avec Serge. Elle ne se souvenait pas vraiment. Et plus
j’essayais d’être neutre et factuel, plus elle bredouillait. »
Coach : « Patrick, vous êtes de base Persévérant, vous utilisez un canal informatif/interroga-
tif, votre style de management est Démocratique et parfois Autocratique. Qu’est-ce qui ne
colle pas avec la situation que vous me décrivez ? »

Messager-Livre.indb 214 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux développer mes qualités d’écoute
215
Chapitre 18

Patrick : « Je constate juste qu’on est en décalage. »


Coach : « Oui, vous êtes en situation de mécommunication. »

La Process Communication, nous l’avons vu, nous donne un éclairage sur les moyens de
mieux communiquer, en nous connectant sur le bon canal (voir le chapitre 8, « Maîtriser
des outils et des techniques de coach ») et en visant la bonne « porte d’entrée » de nos
interlocuteurs (voir le chapitre 11, « Confrontations et tensions »). Nous avons découvert,
également, les différents styles de management à développer selon les personnes et les
situations.

L’analyse du coach

Dans le cas présent, je fais l’hypothèse qu’Amandine est une personne de type Empathique.
Qu’est-ce que cela induit ?
1. Elle a un canal de communication Nourricier : elle apprécie qu’on manifeste de la chaleur
humaine, qu’on lui témoigne de la compréhension et de la sympathie, et non qu’on la ren-
voie à des faits en « niant » ce qu’elle vient exprimer.
2. Sa porte d’entrée est l’émotion : lui parler de faits, d’actes ou de paroles ne résonne pas
chez elle. En revanche, elle aurait été sensible à l’attention portée à ses ressentis.
3. Ce type de personne apprécie un style de management Bienveillant : là encore, Patrick,
avec son style Démocratique, n’est pas centré sur les personnes, mais sur les faits.

Un autre outil permet d’éviter les décalages de communication ; il s’agit d’un modèle
définissant quatre types d’écoute, auxquels est associé un mode de questionnement spé-
cifique (figure 18-1) 1.

Figure 18-1
Les quatre types
d’écoute

1. Yves Blanc, Le Manager à l’écoute, Dunod, 2003, 2005

Messager-Livre.indb 215 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
216
Cinquième partie

• L’écoute analytique porte sur les faits, sur le « quoi » et vise l’analyse d’un problème.
Elle s’attache plus au fond qu’à la forme. C’est une écoute qui se focalise sur les détails.
C’est le type d’écoute activé par Patrick.
• L’écoute pragmatique recherche l’efficacité, l’action, l’organisation. Elle porte sur le
« comment » et les mises en œuvre concrètes.
Cette écoute aurait porté sur les solutions envisagées par Amandine.
• L’écoute empathique porte sur les ressentis ; c’est la qualité de la relation qui compte,
plus que le contenu. Elle se situe dans le partage d’émotions. On n’est plus dans l’action
immédiate.
C’est sans doute le type d’écoute auquel aurait été sensible Amandine (au moins dans un
premier temps) : d’abord évacuer ses émotions, se sentir écoutée, avant d’analyser et de
partir en action.
• L’écoute stratégique est celle des visionnaires, ceux qui imaginent l’avenir et/ou qui
voient le problème dans son ensemble.
Amandine n’aurait pas été plus sensible à ce mode d’écoute, puisque ce qui lui tient à
cœur, c’est d’être entendue, ici et maintenant, sur un registre émotionnel.

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : adapter son type d’écoute

Coach : « Patrick, quel aurait été le ‘bon’ scénario pour écouter efficacement Amandine ? »
Patrick : « Découvrant ce modèle, je pense qu’une écoute empathique aurait été plus appro-
priée au départ, pour permettre à Amandine d’exprimer ses émotions. Ensuite, revenir sur
les faits avec une écoute analytique, puis rapidement vers la recherche de solution, à l’aide
d’une écoute pragmatique. Et enfin, une écoute stratégique, plus aérienne, lors d’un éven-
tuel deuxième entretien pour évoquer la situation avec recul et détachement par rapport à
l’émotionnel. »

Comment utiliser cet outil ?


À partir de ce modèle, vous pouvez analyser votre type d’écoute préférentiel ; en effet,
nous avons, en fonction de notre profil de personnalité, un type d’écoute avec lequel nous
sommes spontanément le plus à l’aise.
Afin de pouvoir nous adapter à nos interlocuteurs et aux situations vécues, nous devons
développer les quatre types d’écoute. Ainsi, cet outil vous permet de repérer le style
d’écoute de votre interlocuteur et d’activer le mode de questionnement associé.

Messager-Livre.indb 216 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux développer mes qualités d’écoute
217
Chapitre 18

Entraînez-vous à poser des questions visant soit à comprendre des faits détaillés, soit à
entrer en empathie avec une personne, soit à rechercher des solutions pratiques, en fonc-
tion du contexte.
Avec l’aide d’un coach ou en vous coachant vous-même, vous pouvez analyser a poste-
riori ces situations vécues et déterminer, compte tenu de la situation et des acteurs en jeu,
le juste type d’écoute qu’il fallait utiliser.

Ce que nous avons appris


• Nous avons vu comment un scrummaster, en écoutant et en questionnant davantage,
peut stimuler la réflexion de ses collaborateurs pour qu’ils trouvent eux-mêmes les
solutions à leurs problèmes.
• La conséquence est une plus grande responsabilisation des membres de l’équipe ; sou-
lagé, le scrummaster dégage ainsi du temps, qu’il peut utilement exploiter, pour se
concentrer sur sa mission de leader.
• Nous avons vu qu’il peut planifier davantage de rencontres informelles avec les membres
de l’équipe ; le Management By Wandering Around (MBWA) ou la Gemba Walk, mis
en application quotidiennement, créent et maintiennent le contact avec l’équipe.
• Il peut également organiser plus fréquemment des entretiens individualisés avec cha-
cun de ses collaborateurs, à la manière d’un coach, pour évoquer, par exemple, le déve-
loppement de son potentiel.
• Nous avons également découvert que l’écoute doit être plurielle, c’est-à-dire s’adapter
à son interlocuteur. Nous avons à notre disposition quatre types d’écoute (analytique,
pragmatique, empathique et stratégique) en utilisant les bons canaux de communica-
tion et les perceptions de chacun.

Outil du coach proposé

• Les quatre types d’écoute

Messager-Livre.indb 217 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 218 12/10/12 09:38
19
En tant que scrummaster, je veux
trouver le bon positionnement
vis-à-vis de l’équipe

L’oiseau croit qu’il volerait plus vite sans l’air qui le freine.

L’évolution du rôle de chef de projet qui commande et contrôle vers celui d’un scrum-
master au service de son équipe (servant leader) constitue une difficulté majeure pour de
nombreux leaders, qu’ils soient expérimentés ou débutants. En effet, le système éducatif,
tout comme le fonctionnement des organisations, alimente depuis toujours le réflexe de
faire usage de l’autorité et de se conforter derrière un titre, dès lors qu’on est investi d’une
responsabilité.
L’objectif du coaching est précisément d’accompagner le scrummaster, expérimenté ou
débutant, à trouver le bon positionnement vis-à-vis de son équipe en n’étant ni trop, ni trop
peu présent, ni trop, ni trop peu directif et en interagissant avec elle de façon positive.
Patrick, notre scrummaster, s’est fixé comme objectif de trouver la « bonne posture »,
reconnaissant lui-même qu’il est trop directif ou interventionniste et qu’il est très attaché
à son expertise technique. Voyons comment ses séances de coaching l’aident à trouver sa
nouvelle légitimité et son juste positionnement.

Messager-Livre.indb 219 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
220
Cinquième partie

Adopter une position basse


Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : changer de posture

Coach : « Patrick, quelle est votre difficulté à vous positionner vis-à-vis de votre équipe ? »
Patrick : « Ma difficulté, c’est d’avoir de l’expérience, plutôt plus que les membres de l’équipe,
et de ne pas pouvoir la mettre à profit. »
Coach : « Comment ça, ne pas la mettre à profit ? »
Patrick : « Eh bien, lorsque je sais ce qu’il faut faire, lorsque je sais que j’ai raison et que l’on
risque de partir dans une autre direction, je ne peux pas m’empêcher de leur dire qu’ils ont
tort. »
Coach : « Et comment leur dites-vous qu’ils ont tort ? »
Patrick : « Ça dépend… (silence). Je sais que parfois je m’emporte. Mais mince, soit ils n’ont
pas d’avis, soient ils se fourvoient. »
Coach : « Ils n’ont donc jamais raison ? »
Patrick : « Mais si, bien sûr. »
Coach : « Ah ! Ils sont donc compétents ? »
Patrick : « Bien sûr, je les ai recrutés pour ça. Et en plus, depuis neuf mois maintenant, ils
connaissent l’appli. Mais… »
Coach : « Donc, vous reconnaissez leur compétence. Vous disiez deux choses : soit ils n’ont
pas d’avis, soit ils se fourvoient. S’ils sont compétents, pourquoi n’ont-ils pas d’avis ? Obser-
vez comment cela se passe lorsque vous avez des discussions : qui s’exprime le premier,
sous quelle forme, quelle est la réaction des autres… »
Patrick : « Oui, je sais que j’affirme souvent mon point de vue avant tout le monde. »
Coach : « C’est normal pour une personne de base Persévérant : son besoin psychologique
est la reconnaissance de ses opinions ! Peut-être que ce qui peut changer, c’est le ‘avant
tout le monde’. Qu’en pensez-vous ? »
Patrick : « En effet. Et s’ils se fourvoient dans une mauvaise direction, il faut quand même
que je le leur dise… »
Coach : « En discutant, vous avez tout à fait la possibilité de faire valoir votre point de vue,
au même titre que les autres, en présentant les avantages et les inconvénients, en faisant
remarquer les risques à adopter telle ou telle solution ; c’est une discussion. En fait, c’est
juste la façon d’aborder le sujet qui vous donne une nouvelle posture. Comment allez-vous
aborder la prochaine discussion de ce type ? »
Patrick : « Par exemple, en faisant un tour de table ; et je m’exprimerai en dernier. »
Coach : « Pour qu’on retienne cette dernière proposition ? »
Patrick : « Non, pas nécessairement. »

Messager-Livre.indb 220 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux trouver le bon positionnement vis-à-vis de l’équipe
221
Chapitre 19

Coach : « Vous êtes en train de me dire qu’une proposition émise par l’un de vos collabora-
teurs pourra être retenue, même si ce n’est pas la vôtre ? »
Patrick : « Oui, essayons, voyons. »
Coach : « Et si c’est une proposition dangereuse, présentant des risques, que faites-vous ? »
Patrick : « J’interviens pour expliquer en quoi elle est risquée. »

Patrick doit comprendre que son point de vue a toujours autant de valeur et que son expé-
rience doit évidemment être mise à profit. Ce n’est pas parce que l’équipe est dorénavant
auto-organisée et qu’elle prend ses propres décisions que le scrummaster ne participe
plus à ce processus de décision. La valeur de son avis est relativisée.
La première action de Patrick consiste donc à adopter une autre posture lors des dis-
cussions, en organisant un tour de table, en valorisant le point de vue de chacun ou en
revenant a posteriori sur le choix judicieux de telle solution proposée par un membre. Son
rôle n’est plus de savoir pour tout le monde ; il est de développer le potentiel de ses colla-
borateurs, en les autorisant à avoir un point de vue, même différent, tout en les protégeant
(voir les 3 P sur la figure 4-4). En effet, le scrummaster a la responsabilité de ne pas faire
prendre de risque inconsidéré à l’équipe.
C’est la position basse du coach (voir chapitre 6) : avec davantage d’humilité, le scrum-
master fait émerger ce potentiel et progresser ses coéquipiers, à condition de croire a
priori en leurs capacités. Lors de la séance de coaching, le coach a fait reconnaître et
formuler à Patrick la compétence de ses coéquipiers, ce qui est très important !
L’adoption de cette position basse par le scrummaster est la condition première pour
accepter de déléguer une partie de sa responsabilité. En effet, ce n’est plus lui qui décide
et qui fait faire : il amène l’équipe à décider et à faire.
Il peut alors être confronté à deux difficultés : celle de ne pas savoir déléguer et celle
d’être confronté à une équipe passive, qui fuit sa responsabilité.

Apprendre à déléguer
Nous avons vu que Patrick avait des réticences à déléguer la prise de décision, considé-
rant que ses collaborateurs « fuient leurs responsabilités », estimant qu’« ils ne veulent
pas s’engager » ou les jugeant comme des « assistés ».
Dans un premier temps, il importait qu’il mesure la nécessité d’adopter une position
basse et d’humilité par rapport à ses coéquipiers et qu’il reconnaisse leurs compétences.
Ensuite, apparaissent concrètement les freins à la délégation. Le travail en coaching
consiste à faire prendre conscience au scrummaster de ses propres craintes vis-à-vis de
la délégation et à en entrevoir les bénéfices.

Messager-Livre.indb 221 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
222
Cinquième partie

Les freins à la délégation


Quels peuvent être les freins à la délégation ?
• « On n’est jamais aussi bien servi que par soi-même » ou « On ne peut pas compter sur
les autres » : outrecuidance, perfectionnisme ou individualisme ?
• l’hypercentralisation ou la sensation de perdre le contrôle ou la maîtrise du résultat ;
• l’absence de confiance envers ses collaborateurs ;
• le sentiment d’être irremplaçable : « cela ne sera jamais aussi bien fait » ;
• la crainte de la compétition ;
• la perte de reconnaissance ;
• la perte de temps : expliquer, suivre, assister, évaluer… avant que la personne ne soit
autonome.

Déléguer face à une équipe passive


La passivité est précisément ce que Patrick reprochait à son équipe avant de démarrer les
séances de coaching. Pascal Legrand1 explique le cheminement souvent effectué par les
personnes passives ou en retrait (figure 19-1).

Figure 19-1
Chemin vers
la passivité

Assez naturellement et spontanément, les personnes seraient portées à coopérer : elles


fourniraient ou demanderaient de l’information, poseraient des questions, exécuteraient
volontiers leur travail. Cependant, le parcours personnel ou professionnel et la vie d’une
équipe créent des désillusions, des frustrations, des révoltes. Le comportement d’un
manager engendre des rancœurs ou l’organisation déçoit. Dans ce cas, les personnes
réagissent, s’opposent frontalement ou de façon masquée. Si elles n’obtiennent pas répa-
ration et si cela est répétitif, elles en arrivent, avec le temps, à se mettre en retrait.

1. Master Trainer Process Com

Messager-Livre.indb 222 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux trouver le bon positionnement vis-à-vis de l’équipe
223
Chapitre 19

Une personne en retrait (qui pratique le « présentisme », voire l’absentéisme) se protège ;


elle n’offre pas de prise, elle est neutre, elle acquiesce, elle a acheté la paix et devient
passive.
Attendre de cette personne qu’elle coopère est un travail de longue haleine ; elle ne sor-
tira pas de son retrait pour coopérer sans passer par la case opposition, d’autant plus si
elle s’est mise en retrait depuis de nombreuses années. Une extériorisation de ce qui n’a
pas été correctement digéré est nécessaire, en adoptant la stratégie des petits pas.

Question au coach :
Comment gérer les personnes passives ? On ne peut pas les contraindre à réagir !

Premièrement, il s’agit d’observer en situation si c’est le comportement du scrummaster qui


induit cette passivité (forte personnalité, autoritarisme, sectarisme…) ou, à l’inverse, si son
comportement est une parade devant la passivité caractéristique de son équipe. Si je n’ai
pas accès à l’équipe, j’amène le scrummaster à prendre du recul sur les situations vécues, à
décrire comment elles se passent précisément, ses actions de relance, les réactions…
Il est également opportun de mesurer le niveau de maturité de l’équipe (voir quatrième partie).
Il est en effet difficile pour certains de s’exprimer lorsqu’on ne se connaît pas ! L’absence de
confiance peut expliquer ces réticences. Dans ce cas, je propose des actions de coaching
d’équipe, à base de jeux, par exemple, qui peuvent briser la glace.
Pour certaines personnes, s’exprimer devant le groupe est tout simplement une difficulté ; on
peut la contourner en faisant travailler les personnes en binôme, par exemple.
J’invite également le scrummaster à endosser lui-même le costume de coach et à provoquer,
de façon formelle ou informelle, un face-à-face avec chaque personne. En toute transpa-
rence, la question est évoquée avec le collaborateur, sans jugement. Le scrummaster ins-
taure un climat de confiance, essaie de comprendre ce qui n’a pas été digéré, le cas échéant.
Il cherche à identifier les leviers de motivation du coéquipier et lui propose son aide. En-
semble, si le collaborateur le souhaite, ils élaborent un plan d’actions pour retrouver le chemin
de la coopération. Le simple fait d’avoir eu « une porte ouverte » permet au collaborateur de
se sentir entendu et reconnu.
Ensuite, si malgré plusieurs actions de relance, rien n’a changé, essayez de comprendre la
culture de l’organisation, le passé de l’équipe, la politique de rémunération, bref, l’environne-
ment de l’équipe pour mesurer l’influence que celui-ci peut avoir sur les comportements…
Ces points sont traités en séances individuelles avec le scrummaster puis évoqués avec la
direction, si nécessaire.

Exemple : Patrick doit apprendre à déléguer

Patrick, étant de base Persévérant, a clairement un besoin de reconnaissance de son travail


au travers de ses opinions. Il a une expertise technique qu’il voudrait continuer à mettre en
avant. Il craint que cette expertise ne soit plus reconnue ou qu’elle soit mise en concurrence
avec les compétences de ses collaborateurs.

Messager-Livre.indb 223 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
224
Cinquième partie

Il a par ailleurs un message contraignant « Sois parfait » : cela signifie qu’il est extrêmement
exigeant avec ses collaborateurs et que ceux-ci n’ont de valeur à ses yeux, surtout en situa-
tion de stress, que s’ils sont parfaits. Comme nul n’est parfait, il n’est pas enclin à déléguer
spontanément.
Le coaching lui a permis de prendre conscience que cette expertise pourra toujours être
valorisée, soit en s’exprimant lors des discussions techniques, soit en étant pédagogue avec
ses collaborateurs les moins expérimentés.
La poursuite du coaching va permettre de travailler sur son droit à l’erreur et les bénéfices
qu’il peut tirer à déléguer.

La délégation soulève en effet, inévitablement, la question du droit à l’erreur : que se


passe-t-il si le collaborateur se trompe ? Quelles en sont les conséquences ?

Accorder le droit à l’erreur


Le coach peut aider le scrummaster à réfléchir sur cette gestion de l’erreur.
Erreur ou faute ?
Je distingue erreur et faute. La faute est intentionnelle, alors que l’erreur est fortuite,
même si parfois elle pourrait être évitée (erreur d’étourderie, par exemple).
« Une erreur ne devient une faute que lorsqu’on ne veut pas en démordre. »
(Ernst Jünger, écrivain allemand)

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : l’erreur est humaine !

Coach : « Patrick, vous me dites que cela vous ennuie de déléguer votre responsabilité à vos
collaborateurs, parce qu’ils risquent de se tromper. Auriez-vous un exemple précis d’erreur
commise par l’un d’eux ? »
Patrick : « Oui, c’est souvent le cas, notamment sur les estimations. J’en ai assez de consta-
ter que certaines tâches ont été mal estimées et que certaines user stories n’ont pas été
livrées à la fin des sprints. »
Coach : « Que se passe-t-il dans ces cas-là ? »
Patrick : « Le product owner est mécontent, il lui arrive de râler ; on passe pour des nuls. »
Coach : « Des nuls ? Parce que les estimations sont une science exacte ? »
Patrick : « Allez expliquer ça au product owner ou au comité de pilotage, vous ! »
Coach : « Qui est confronté au product owner et au comité de pilotage, généralement ? »
Patrick : « Ben c’est moi ! Toujours agréable ! Je dois couvrir leurs âneries. »
Coach : « Comment restituez-vous ça à l’équipe ? Comment faites-vous remarquer à l’équipe
qu’il y a eu erreur ? »

Messager-Livre.indb 224 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux trouver le bon positionnement vis-à-vis de l’équipe
225
Chapitre 19

Patrick : « Ils le voient, de toutes façons, avec les user stories non achevées. Et puis, quand
je redescends du comité de pilotage, ils entendent parler de moi ! »
Coach : « C’est-à-dire ? »
Patrick : « Eh bien, je les sermonne sec. Alors là, il n’y a plus personne, on ne les entend
plus. »
Coach : « Du coup, quelles décisions prenez-vous ? »
Patrick : « Maintenant, généralement, c’est moi qui estime lors des sprint planning meetings.
De toute façon, lorsque je leur demande leur avis, ils ne répondent rien ou valident mes esti-
mations. Comme ça, il y a moins d’erreurs. »
Coach : « Moins, dites-vous ? »
Patrick : « Oui, moins qu’avant, lorsque j’ai essayé de les laisser estimer. »
Coach : « Et maintenant, c’est vous qui estimez et il y a encore des erreurs ? »
Patrick : « Oui, l’erreur est humaine ! »
Coach : « Ah oui, et pour tout le monde d’ailleurs ! Il faut se planter pour pousser ! »
Patrick : « Pardon ? »
Coach : « Oui, connaissez-vous quelqu’un qui ne se trompe jamais ? A fortiori si c’est quelque
chose qui est nouveau pour lui ? »
Patrick : « Non, en effet, il faut se tromper souvent plusieurs fois avant de réussir quelque
chose, comme mon fils lorsqu’il apprenait à faire du vélo. »
Coach : « Alors, si on transpose ça à vos ingénieurs qui doivent estimer des tâches ? »
Patrick : « Oui, mais leurs erreurs coûtent cher ! »
Coach : « N’est-ce pas le prix à payer pour qu’ils apprennent et qu’ils sachent ? »
Patrick : « Allez expliquer ça à la Direction ! Expliquez que mes ingénieurs ne savent pas
estimer ! »
Coach : « S’ils ne l’ont jamais fait, comment pourraient-ils savoir ? Comment pourriez-vous
les aider à apprendre ? »
Patrick : « Peut-être en les laissant découper leurs tâches eux-mêmes et les estimer sans
que j’intervienne, puis faire une passe avec eux et leur donner mon point de vue. »
Coach : « Vous voyez, votre point de vue est toujours important ! Et vos coéquipiers commen-
ceraient à être autonomes. »
Patrick : « Puis, à la fin des sprints, analyser plus en détail les écarts et tirer les leçons. »
Coach : « C’est ce qu’on appelle l’amélioration continue. En plus, vous pouvez constater
qu’ainsi, vous commencez à déléguer une partie de vos activités. »

Messager-Livre.indb 225 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
226
Cinquième partie

Patrick, pourtant formé à la méthode Scrum, comprend qu’il doit accorder le droit à
l’erreur. En fait, l’expertise technique du scrummaster, s’il en a une, est toujours valori-
sée, mais différemment. En laissant les ingénieurs estimer, ils apprennent, ils se respon-
sabilisent et ils s’impliquent davantage. S’ils commettent des erreurs, plus fréquentes au
début de leur apprentissage, ils s’améliorent au fur et à mesure qu’ils en tirent les leçons.
Rappelons que dans une démarche d’amélioration continue, qui vise à trouver la juste
pratique ou le bon processus, l’expérimentation est un droit ; l’erreur est donc acceptée,
ainsi que le droit à reconnaître ses erreurs. Ceci s’applique aux membres de l’équipe… et
au leader, qui, dès lors, a aussi le droit à l’erreur !
La position basse du scrummaster est de leur faire confiance a priori et de les encourager,
comme Patrick a dû le faire, naturellement, avec son fils qui apprenait à faire du vélo.
Patrick a donc retenu comme deuxième action de se mettre peu à peu en retrait lors des
sprints planning meetings (il m’est même arrivé de le sortir manu militari de la salle
durant les séances d’estimation collectives, afin qu’il n’interfère pas dans le processus !)
et de s’impliquer dans l’analyse à la fin des sprints.
Le constat que l’on peut faire est que la délégation n’est pas un choix aussi binaire qu’on
pourrait le penser, à savoir : soit le scrummaster délègue, soit il ne délègue pas. Il y a
en effet plusieurs niveaux de délégation, ce qui lui permet d’ajuster, là encore, son degré
d’intervention.

Les sept niveaux de délégation ou d’autorité 2


Nous avons vu que, suivant les niveaux de maturité de l’équipe, le scrummaster fait évo-
luer son style de management. La délégation des tâches et des responsabilités suit cette
même courbe d’évolution : selon le degré d’autonomie de l’équipe, le scrummaster peut
déléguer plus ou moins de responsabilités. Ainsi, on distingue sept niveaux d’autorité/de
délégation :
• Niveau 1 : Dire. Le scrummaster prend une décision et la communique à l’équipe (il
ne s’agit pas vraiment de délégation).
• Niveau 2 : Vendre. Le scrummaster prend une décision. Il tente de persuader les col-
laborateurs et d’obtenir leur engagement sur la mise en œuvre de la décision.
• Niveau 3 : Consulter. Le scrummaster sollicite les coéquipiers avant de prendre sa
décision.
• Niveau 4 : Consentir. Le scrummaster associe les collaborateurs à une discussion

2. Jurgen Appelo, Management 3.0, Leading Agile Developers, Developing Agile Leaders, Addison-Wesley,
2011

Messager-Livre.indb 226 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux trouver le bon positionnement vis-à-vis de l’équipe
227
Chapitre 19

pour obtenir un consensus.


• Niveau 5 : Conseiller. Le scrummaster s’autorise à donner un avis à ses collaborateurs,
qui prennent la décision.
• Niveau 6 : Se renseigner. Le scrummaster laisse l’équipe prendre la décision, mais
exprime le souhait d’être informé après.
• Niveau 7 : Déléguer. Le scrummaster délègue totalement la responsabilité à l’équipe.
Lorsqu’un scrummaster peine à déléguer, le coach l’invite à se déplacer dans les diffé-
rents étages, pour voir ce qui est plus ou moins « délégable ». Une fois de plus, le niveau
de délégation varie avec le niveau de maturité de l’équipe.

Les bénéfices de la délégation


Si le scrummaster accepte d’adopter une position basse et de se mettre en retrait, même
si cela représente souvent un investissement (en l’occurrence le coût de l’apprentissage de
ses collaborateurs), il a saisi alors tout l’intérêt de savoir déléguer.
Tableau 19-1 Bénéfices de la délégation

Bénéfices pour le scrummaster Bénéfices pour les collaborateurs


Gain de temps. Développement des compétences.
Se consacrer à des tâches critiques relevant de Accroissement de la confiance.
la levée d’obstacles ou de la gestion des inter-
faces externes à l’équipe. Développement de l’autonomie et de l’initiative.

Développement de ses compétences relation- Apprentissage par la pratique.


nelles et managériales. Motivation et implication.
Reconnaissance de l’entourage, y compris de Fidélisation du personnel.
la hiérarchie, pour l’exercice de la fonction telle
qu’elle doit être exercée.
Se libérer d’une partie de stress.

Un scrummaster qui ne déléguerait pas ne serait pas un (bon) scrummaster. Le coach


l’accompagne dans l’apprentissage de la délégation, qui n’est pas optionnelle.

Messager-Livre.indb 227 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
228
Cinquième partie

Question au coach :
Et si le scrummaster délègue trop ? En d’autres termes, sous prétexte que l’équipe
est auto-organisée, si le scrummaster ne prend aucune décision, ne procède à aucun
arbitrage et se contente d’animer les cérémonies ?

Le risque, dans ce cas, est que le scrummaster n’endosse qu’une partie de la fonction, à
savoir celle concernant la garantie du processus, sans mettre en œuvre son rôle de manager
et de leader.
Le scrummaster de ce type se contente d’appliquer la méthode, souvent à la lettre, sans
apporter ni son âme ni sa personnalité. Il anime les cérémonies, formalise la documentation,
le cas échéant, assure les interfaces éventuelles, mais n’anime pas. Et l’on se retrouve avec
des équipes « molles ».
Cela peut s’avérer confortable pour un scrummaster n’ayant soit pas d’expérience, soit pas
d’autorité effective.
Ce cas peut devenir caricatural d’une mauvaise interprétation des méthodes agiles et, tout
simplement, le prétexte d’un rejet de la démarche.
J’ai vu chez un client, au bout de quelques mois d’implémentation, le titre de scrummaster
disparaître au profit de celui de project leader : l’idée était ainsi de réintroduire, au moins de
façon symbolique, la dimension managériale dans la fonction, pour entraîner et motiver les
coéquipiers. Il est vrai que, chez ce client, une forte expertise technique des ingénieurs ne les
incitait pas à prendre des responsabilités. Au contraire, ce qu’ils souhaitaient, c’était pouvoir
gérer la complexité technologique liée à leur composant, sans préoccupation de l’intérêt col-
lectif. Dans cette configuration, le scrummaster avait donc une mission plus fédératrice pour
gérer la complexité au niveau global et donner une dynamique à l’ensemble.

La suite du coaching de Patrick a permis, en outre, de mettre en évidence qu’il avait du


mal à rester solidaire de son équipe vis-à-vis de sa hiérarchie, lorsqu’il avait à gérer les
erreurs de ses collaborateurs. À l’heure où paraît cet ouvrage, Patrick est en train d’abor-
der cet aspect au cours de son coaching.
Déléguer doit, à terme, aider les collaborateurs à développer leur potentiel et à prendre
davantage de responsabilités et de risques. Les signes de reconnaissance sont alors les
bienvenus.

Savoir donner des signes de reconnaissance


Le principe même du développement itératif est de recueillir le feedback du client le plus
régulièrement possible, afin d’améliorer la qualité du produit en cours de réalisation.
Donner des signes de reconnaissance relève du même principe : le collaborateur, dont le
potentiel se développe tout au long du projet, a besoin du feedback de son manager et de ses
coéquipiers pour renforcer, améliorer ou corriger sa façon de faire ou ses comportements.

Messager-Livre.indb 228 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux trouver le bon positionnement vis-à-vis de l’équipe
229
Chapitre 19

Donner du feedback signifie littéralement « nourrir en retour ». Nous avons tous besoin
d’être alimentés en signes de reconnaissance pour continuer à avancer. C’est une question
de survie, même si les retours sont négatifs ; en effet, les individus les préfèrent généra-
lement à l’absence de signes de reconnaissance. En fait, lorsqu’une personne manque de
signes de reconnaissance, elle a tendance à en chercher, mais en entrant dans des jeux
psychologiques (voir chapitre 11).
Éric Berne 3 définit six modes d’échanges de signes de reconnaissance, du plus pauvre au
plus riche. C’est ce qu’il appelle la structuration du temps, une grille de répartition du
temps consacré à chaque type d’échange de signes de reconnaissance au sein de l’équipe.
1. Retrait : aucun signe de reconnaissance n’est échangé. Chacun est seul à son poste de
travail.3
2. Rituel : c’est le minimum vital de la relation. On échange des rituels, des banalités,
des politesses (« Bonjour, comment allez-vous ? »).
3. Passe-temps : on partage davantage sur des sujets qui rapprochent (l’actualité, le
match de foot de la veille…). Il s’agit de discussions de salon.
4. Activité : les échanges ont une finalité, une activité en commun. On fait quelque chose
ensemble.
5. Jeu psychologique : les jeux de pouvoir ou jeux psychologiques manifestent souvent
la satisfaction négative du besoin de signes de reconnaissance (voir figure 11-2).
6. Intimité : relation de confiance, dans laquelle chacun se respecte et ose donner des
signes de reconnaissance positifs.
Bien entendu, plus on avance ensemble dans l’équipe, mieux on se connaît et plus on
s’autorise à se donner des signes de reconnaissance. On peut même en déduire que plus
les signes de reconnaissance positifs sont échangés, plus la performance de l’équipe est
grande. En effet, Berne a démontré la corrélation entre ces étapes et la productivité glo-
bale d’une équipe : celle-ci serait de 30 % en phase de retrait ou de rituel, de 50 % en
phase de passe-temps, de 95 % en phase d’activité, pour régresser à 75 % en phase de
jeux psychologiques et enfin, optimale à 120 %, en phase d’intimité.
On devine aisément que du temps soit nécessaire pour parvenir à l’étape ultime, l’équipe
traversant différentes étapes de maturation relationnelle (voir la quatrième partie).

Comment utiliser cet outil ?


Il peut être intéressant de mesurer la fréquence des échanges de signes de reconnaissance
au sein de l’équipe, globalement.

3. Fondateur de l’analyse transactionnelle.

Messager-Livre.indb 229 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
230
Cinquième partie

Commencez par vous-même. Vous pouvez représenter votre propre structuration du


temps : quelle est la proportion de mon temps que je consacre aux rituels, aux passe-
temps, etc. dans une journée ou une semaine, en tant que leader de mon équipe ? Cet
indicateur peut vous servir à évaluer le niveau de maturité de l’équipe ou la profondeur
de l’esprit d’équipe.
Patrick n’a pas nécessairement mesuré l’importance de ces signes et certains de ses co­
équipiers lui en ont fait part lors d’une rétrospective. La demande n’est pas explicite mais
ils constatent que Patrick ne réagit que lorsqu’il y a quelque chose qui ne va pas.

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick :


faire un retour à ses collaborateurs

Coach : « Patrick, selon vous, qu’ont voulu exprimer vos collaborateurs, lors de la dernière
rétrospective ? »
Patrick : « OK, je sais, ils voudraient qu’on les félicite à chaque fois qu’ils ont écrit un bout
de code sans bogue ! »
Coach : « Oui, et alors ? Vous ne le faites pas ? »
Patrick : « Vous imaginez ? Ce n’est pas possible. Ils sont sept, en plus. Et puis, c’est normal
de bien faire son boulot. »
Coach : « Et lorsqu’ils effectuent une tâche exceptionnelle ou qu’ils arrivent à traiter un pro-
blème ? »
Patrick : « Oui, je me fends d’un “Bravo”. »
Coach : « Et lorsqu’ils commettent une erreur, vous disiez que vous les sermonniez sec, c’est
ça ? »
Patrick : « Oui, enfin, euh… »
Coach : « Quel effet cela a-t-il sur les personnes concernées, à votre avis ? »
Patrick : « Je sais, peut-être que je devrais y mettre un peu les formes… »
Coach : « Par exemple, si quelqu’un vous montre un document qui ne vous semble pas clair,
comment pourriez-vous le lui dire ? »
Patrick : « Euh… c’est un peu brouillon et touffu ; il faudrait reprendre telle partie. Je ne sais
pas, moi ! »
Coach : « Et, de façon plus positive ? »
Patrick : « La lecture est difficile ou… »
Coach : « Oui, c’est déjà plus positif. Et “J’ai eu du mal à lire pour telles et telles raisons”,
qu’en pensez-vous ? »
Patrick : « Oui, je pourrais essayer. »
Coach : « Et pour une félicitation alors, sur ce même document, que diriez-vous ? »

Messager-Livre.indb 230 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux trouver le bon positionnement vis-à-vis de l’équipe
231
Chapitre 19

Les signes de reconnaissance ou strokes ne sont ni des critiques, ni des juge-


ments. Ils sont factuels, authentiques et gratuits et sont exprimés à la première
personne, « je ».

Tableau 17-2 Les types de signes de reconnaissance4

Signes de Positifs Négatifs


reconnaissance

Conditionnels Scrummaster : « Nous avons at- Scrummaster : « Nous n’avons pas at-
teint l’objectif. Félicitations ! » teint l’objectif. Comment nous amélio-
(Ce qu’il fait) rer pour le sprint suivant ? »
Équipier : « Le code de Nathalie
est de très bonne qualité, bien Équipier : « J’ai trouvé ton code trop
commenté, propre. Cela m’a été peu commenté, Fabien, pour que je
bien utile. » puisse le reprendre sans difficulté.
J’aimerais qu’on en discute ensemble,
pour la prochaine fois. »
Inconditionnels Scrummaster : « J’ai confiance scrummaster : « Vous êtes des fainé-
en vous ; vous êtes une équipe ants, je ne suis pas du tout satisfait. »
(Ce qu’il est) responsable. »
Équipier : « Fabien est nul, il n’a pas
Équipier : « J’ai plaisir à travailler le niveau. »
avec Luc ; il m’a beaucoup fait
rire durant ce sprint. »

Il existe des signes de reconnaissance conditionnels (sur un comportement, un acte, une


parole) et d’autres inconditionnels (liés à ce qu’est la personne). Ils peuvent être négatifs
ou positifs. Ils ne doivent pas avoir d’autres objectifs que de féliciter ou d’exprimer un
ressenti positif, de modifier ou d’améliorer un comportement. Les signes de reconnais-
sance inconditionnels négatifs sont à proscrire.
En pratique
Inconditionnel négatif : « Tu es trop timide en réunion. »
Conditionnel négatif : « Je trouve que tu ne participes pas assez en réunion. » ou « J’ai-
merais bien t’entendre davantage en réunion. »

Question au coach :
Comment donner des signes de reconnaissance lorsqu’ils sont négatifs ? Ce n’est
pas facile.

En effet, ce n’est pas facile. D’ailleurs, donner des signes positifs n’est pas toujours plus
facile !

4. Stroke est un terme provenant de l’analyse transactionnelle.

Messager-Livre.indb 231 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
232
Cinquième partie

La confiance créée au sein de l’équipe doit faciliter l’échange de signes de reconnaissance.


Ce cadre sécurisé nous donne le droit :
• de donner des signes de reconnaissance ;
• de les recevoir ;
• de les accepter ou de les refuser ;
• de les demander ;
• de se les donner à soi-même.
Comment va réagir la personne face à un signe négatif ? Elle peut être surprise, contrariée,
déçue, opposée, de mauvaise foi, mais aussi l’accepter.
La forme étant souvent plus significative que le fond, interrogeons-nous sur la façon dont
nous avons exprimé ce feedback, sur le contexte dans lequel il a été envoyé (ne subissons-
nous pas, nous-même, une pression qui altère notre discernement ?).
Anticipons la réaction en identifiant bien le type de personnalité (on ne s’adressera pas à une
personne de type Empathique comme à une autre de type Travaillomane).
Envisageons, a priori, différentes hypothèses et les parades possibles, en restant toujours
factuel.
Et surtout, ne renonçons pas à les exprimer ; les non-dits sont encore pires !

Sans en abuser, il est indispensable que chaque membre de l’équipe développe également
sa capacité à « nourrir en retour » ses collègues et leur témoigne des signes de recon-
naissance.
Dire ce que l’on pense à ses collaborateurs est le plus beau cadeau qu’on puisse leur
faire : ils peuvent ainsi ajuster leur comportement ou leur travail… à condition qu’il ne
s’agisse pas d’un jugement sur leur personne ! Ne pas oser dire manifeste un manque de
confiance ou peut être interprété comme de l’indifférence ou du désintérêt (voir aussi la
fenêtre de Johari, figure 12-1).

Comment utiliser cet outil ?


Comment se donner des signes de reconnaissance, au sein de l’équipe ? Lors des rétros-
pectives, par exemple, vous pouvez proposer systématiquement un moment réservé à
l’échange de signes de reconnaissance : remerciements ou félicitations. Cela est facul-
tatif : il arrive qu’à certaines rétrospectives, personne n’émette de signe particulier. Un
signe de reconnaissance doit être sincère ; on ne se force donc pas à en donner si l’on n’a
pas envie d’en donner !
L’atelier sur la découverte mutuelle des profils Process Com (voir chapitre 7) est une autre
occasion de s’échanger des signes de reconnaissance positifs.

Messager-Livre.indb 232 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux trouver le bon positionnement vis-à-vis de l’équipe
233
Chapitre 19

Lorsqu’il s’agit de signes négatifs, je suggère de les délivrer en aparté, directement à la


personne concernée. Quelles que soient les précautions oratoires prises pour exprimer un
signe négatif, l’exprimer en public peut perturber le destinataire ou d’autres personnes
présentes et créer un malaise, néfaste à l’épanouissement au sein de l’équipe.
Dans le cas d’une réunion de régulation collective, des messages conditionnels négatifs
peuvent être échangés, mais ils doivent être factuels et non des jugements. De plus, ils
doivent être exprimés avec bienveillance, dans un esprit constructif.

Ce que nous avons appris


• Nous avons vu que, pour trouver un bon positionnement par rapport à l’équipe, le
scrummaster doit avant tout adopter une position basse, qui consiste à réfréner tout
abus de position dominante ou toute tentation de savoir mieux ou plus que les autres.
• L’acceptation de cette position basse par le scrummaster est un prérequis pour qu’il
apprenne à déléguer une partie de sa responsabilité opérationnelle à l’équipe. Il doit
parfois dépasser ses freins personnels. Il peut être aussi confronté à la passivité des
membres de l’équipe.
• Déléguer suppose d’accorder le droit à l’erreur, en particulier à des coéquipiers qui n’ont
pas été habitués à être responsabilisés. En fonction précisément du niveau de maturité
et d’autonomie de l’équipe, le niveau de délégation peut varier sur une échelle de 1 à 7.
• Cette retenue ne doit évidemment pas signifier absence ou retrait. Elle n’a pas d’autre
objectif que de faire émerger et de valoriser le potentiel des collaborateurs.
• Déléguer s’accompagne de signes de reconnaissance, pour féliciter ou pour permettre
d’améliorer le travail ou le comportement d’un collaborateur. Nous avons vu que
l’échange de feedback était vital pour tous. Positifs ou négatifs, ces retours sont préfé-
rables à l’absence de signes. Attention, ils doivent être sincères, factuels et ne pas être
des critiques ou des jugements, notamment sur les personnes elles-mêmes.
• Le rôle du scrummaster, en tant que responsable du cadre, est de créer les conditions
pour favoriser ces échanges.

Outils du coach proposés

• La structuration du temps
• Les signes de reconnaissance

Messager-Livre.indb 233 12/10/12 09:38


Messager-Livre.indb 234 12/10/12 09:38
20
En tant que scrummaster, je veux
développer mon leadership

Le leadership, c’est l’art de faire faire à quelqu’un quelque chose


que vous voulez voir fait, parce qu’il a envie de le faire.
Dwight Eisenhower

Patrick, scrummaster de l’équipe Alpha, s’est défini comme objectif de développer son
leadership, afin d’obtenir l’engagement de ses coéquipiers. Je rappelle que la demande
initiale de coaching part du constat que les membres de l’équipe sont peu autonomes,
qu’ils fuient les responsabilités et qu’ils ont du mal à s’engager sur les livraisons.
Comment Patrick peut-il agir à son niveau pour obtenir cet engagement ? Nous allons
découvrir comment il peut développer sa capacité d’influence pour motiver et entraîner
ses coéquipiers à s’engager sur l’atteinte des objectifs.

Développer sa capacité d’influence


Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : l’influence par la confiance

Coach : « Patrick, aujourd’hui vous êtes respecté, reconnu pour votre expertise technique et
votre riche expérience, n’est-ce pas ? »
Patrick : « Oui, en effet. »

Messager-Livre.indb 235 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
236
Cinquième partie

Coach : « Vous vous êtes engagé, lors d’une précédente séance, à adopter une position
basse, c’est-à-dire à vous mettre davantage en retrait afin de faire émerger le potentiel de
vos coéquipiers, notamment sur le plan technique, n’est-ce pas ? »
Patrick : « Oui, en effet. En déléguant davantage pour qu’ils soient plus autonomes. »
Coach : « Alors, à présent, comment allez-vous précisément assurer votre rôle de leader
auprès de votre équipe ? Sur quoi allez-vous baser votre leadership ? »
Patrick : « Si je dois mettre mon expertise technique en sourdine, ce qui va être difficile a
priori… » (Patrick fait une moue dubitative.)
Coach : « Attention, il ne s’agit pas de la mettre en sourdine, comme vous dites, mais simple-
ment de laisser de l’espace à vos coéquipiers pour qu’ils puissent élaborer eux-mêmes des
solutions, avec votre aide. L’un de vos objectifs est d’obtenir leur engagement. Qu’est-ce
qui, dans votre comportement, peut faire évoluer vos coéquipiers ? »
Patrick : « L’influence que j’exerce sur eux. »
Coach : « Et comment s’exerce cette influence, concrètement, si vous ne leur donnez plus
les réponses toutes faites ni les solutions ? »
Patrick : « En donnant et maintenant le cap. »
Coach : « Et qu’est-ce qui fait qu’ils vous suivent dans cette direction ? »
Patrick : « Ils ont confiance en moi. »
Coach : « Si je comprends bien, vous allez exercer votre influence en indiquant régulière-
ment à vos coéquipiers le sens de leur mission et de leurs activités et vous appuyer sur la
relation de confiance établie avec eux. »

Patrick est en train de prendre conscience que la reconnaissance de ses coéquipiers en


tant que leader va s’appuyer sur d’autres leviers que ses compétences techniques. En effet,
ce sont ses compétences relationnelles et la qualité des échanges qu’il établit avec les
membres de l’équipe qui vont avoir une influence notable sur les comportements.

Donner du sens
En tant que leader adoptant une posture de coach, le scrummaster aide l’équipe à tenir
son cap, c’est-à-dire à aller dans le sens de la vision.
☞ La vision du produit constitue l’objectif commun et la finalité du projet, la vision de
l’équipe étant un moyen d’y parvenir. J’invite le lecteur à se référer au chapitre 10, « Créa-
tion et structuration ».

Cette vision donne le sens, la direction à suivre : le scrummaster est garant du cadre et
des conditions pour que l’équipe progresse vers cet objectif et ne s’en éloigne pas. Il re-
centre en permanence l’équipe sur la valeur ajoutée pour le client. Son influence s’exerce
ainsi au niveau de la direction à prendre, pour éviter d’avancer en ordre dispersé.

Messager-Livre.indb 236 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux développer mon leadership
237
Chapitre 20

Patrick est expérimenté ; il a emmagasiné de nombreuses connaissances qui peuvent être


utilement exploitées pour orienter l’équipe. Les (jeunes) développeurs sont parfois des
explorateurs qu’il convient de guider. En libérant son savoir, non pas en donnant ses solu-
tions mais en questionnant pour ouvrir le champ des possibles, en remettant en question
les solutions trouvées, il offre des perspectives de progrès.
En ouvrant ces nouvelles voies potentielles, il entraîne et donne envie qu’on le suive
pour évoluer, pour explorer, pour être meilleur. Sachant dans quelle direction progresser,
l’équipe s’en remet au leader, en qui elle a confiance.

Inspirer confiance
Au fil des sprints, les membres de l’équipe développent une relation de confiance envers
le scrummaster, et réciproquement. Trois conditions sont nécessaires pour gagner la
confiance de ses coéquipiers (figure 20-1).

Figure 20-1
Les trois
conditions
de la confiance

• Les compétences : le leader doit être doté de compétences fortes (métier, techniques
et/ou relationnelles). Il doit bénéficier d’une riche expérience et d’un savoir-faire recon-
nu qu’il met au service de l’équipe.
• La fiabilité : le leader qui inspire confiance tient ses engagements. Son exemplarité
est essentielle pour obtenir l’engagement des coéquipiers. Les Anglo-Saxons nomment
cette qualité Walk The Talk, autrement dit la mise en cohérence des paroles et des actes
– ce qu’on appelle également la congruence (voir chapitre 17).

Messager-Livre.indb 237 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
238
Cinquième partie

• La fidélité : ce même leader est loyal envers son équipe. Il ne la trahit pas. Il est sin-
cère, authentique et transparent. Cette fidélité se mesure lors des échanges formels ou
informels, dans la résolution des conflits ou encore dans la gestion des interfaces avec
l’extérieur.

Exemple : faire confiance à Patrick

Dans le cas de l’équipe Alpha, celle-ci peut très probablement faire confiance à Patrick.
Premièrement, cela fait plusieurs mois que Patrick et son équipe travaillent ensemble. Par
ailleurs, de base Persévérant, Patrick est vraisemblablement attaché au respect des valeurs,
loyal et engagé. Notons que la question existentielle des personnes de type Persévérant est
« Suis-je digne de confiance ? » : de fait, Patrick aura à cœur d’être respectueux et fidèle ;
il est sans doute un leader « éthique ».

☞ Reportez-vous au chapitre 7, « Créer un cadre sécurisé » pour (re)découvrir les


moyens de développer la confiance.

Question au coach :
L’influence n’est-elle pas une forme de manipulation ?

À cette question fréquemment posée, je réponds que l’influence et la manipulation décrivent


toutes deux la capacité qu’a un individu ou un groupe d’individus de faire agir une autre
personne ou un groupe dans le sens souhaité. Cependant, cette capacité s’exerce dans des
conditions différentes (tableau 20-1).

Tableau 20-1 Influence ou manipulation ?

Influence Manipulation
La relation est basée sur la confiance réciproque. Il y a généralement abus de confiance.
Les objectifs sont clairs et explicites. On avance masqué : les objectifs sont flous, non
annoncés ou délibérément faux.
Il n’y a pas d’intention pour l’autre. Il y a emprise : il y a une intention de faire en-
treprendre à l’autre des actions sans que celui-ci
s’en aperçoive.
Elle s’appuie sur des valeurs, des principes, La fin justifie les moyens.
des informations réelles, sans se réclamer de
l’autorité.
L’autre est conscient de l’influence ; elle est ac- Il y a prise de contrôle sur l’autre : la personne
ceptée ou rejetée. La personne garde son libre- perd sa capacité de jugement ou de discerne-
arbitre. ment.
Bienveillance. Généralement malveillance.

Si l’objectif (le produit à développer) est défini par le client et si l’équipe est responsable de
définir son processus pour y arriver, le scrummaster ne peut avoir d’intention pour l’équipe.
Tout comme le coach n’a pas d’intention pour son coaché, le scrummaster n’a que la respon-
sabilité du cadre et des conditions du succès.

Messager-Livre.indb 238 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux développer mon leadership
239
Chapitre 20

Visionnaire (dans le sens de « relayeur de la vision ») et inspirant confiance, le scrum-


master influence pour atteindre l’objectif. Il suscite enthousiasme et passion. Il est le
moteur qui met ses coéquipiers en mouvement.

Motiver ses coéquipiers


Aviez-vous remarqué que l’origine du mot « motivation » (movere signifie « se dépla-
cer ») était commune à d’autres termes tels que motion, mouvement, moteur, mobile,
émotion… ?
Motiver est donc l’art de mettre en mouvement, dans le but d’obtenir quelque chose ou
d’atteindre un but. Autrement dit, la motivation, c’est ce qui meut et émeut. On reste bien
dans le domaine de la dynamique impulsée par le leader, qui donne l’orientation ou le
sens de l’action et qui protège (en instaurant la confiance).

La finalité
Un premier levier de motivation est « la mise sur orbite » de chacun des membres de
l’équipe. En effet, chacun a besoin de connaître et de comprendre le sens de ses actions :
la finalité du projet, de l’équipe ou de la mission sur ce projet doit être claire.

La maîtrise
Le deuxième levier de motivation est la maîtrise. La loi des 3 P1 (Préférences, Pra-
tique, Performance) – à ne pas confondre avec les 3 P de la posture du coach – stipule
que nous avons tous des préférences (P) dans notre travail, des activités que nous préfé-
rons faire à d’autres ; si nous les pratiquons (P), nous prenons du plaisir et nous sommes
performants (P). Alors, nous sommes fiers.
Il est par conséquent essentiel, pour le leader, de veiller à ce que les membres de l’équipe
se répartissent, si possible, les tâches selon leurs goûts et leurs capacités.
Si malheureusement certains travaux ne correspondent ni aux attentes ni aux compé-
tences d’un coéquipier, le scrummaster sera vigilant de ne pas mettre durablement le col-
laborateur en situation d’échec, puis de démotivation. Dans ce cas, il doit s’interroger sur
la disponibilité des compétences ; si les compétences ne sont pas disponibles, les moyens
de les acquérir doivent être mis en œuvre (c’est l’engagement de moyens). On envisage
également des actions de formation, de mentoring ou de transfert de connaissances et de
travail en binôme.

1. Voir le modèle Team Management System (TMS).

Messager-Livre.indb 239 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
240
Cinquième partie

Quoi qu’il en soit, cette affectation doit rester provisoire pour le coéquipier auquel le
leader devrait pouvoir présenter d’autres perspectives possibles pour la suite. L’avantage,
dans le découpage des activités d’un sprint, c’est que les tâches même les plus ingrates
sont de petite taille et durent donc peu de temps.
La personne peut également ne pas disposer des compétences, mais désirer les dévelop-
per grâce à cette opportunité : le leader doit alors être disponible pour accompagner la
personne dans sa montée en compétences.
☞ Voir également la matrice des compétences de l’équipe (figure 10-2).

Le code SACRÉ 2
Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : déterminer le code SACRÉ
des coéquipiers

Patrick : « Le problème, c’est que c’est difficile de motiver tout le monde ; chacun a ses
motivations personnelles. Il faut un temps fou pour comprendre ça pour chaque personne et
ensuite satisfaire ses attentes. »
Coach : « En effet, vous avez tout à fait raison : chaque personne a ses propres leviers de
motivation. Vous voyez, nous parlions de management situationnel, adapté à chaque situa-
tion et à chaque personne ! »
Patrick : « Je suppose que c’est ça aussi développer ses compétences relationnelles ! »
Coach : « En effet. Vous vous souvenez de l’engagement que vous avez pris de passer
quotidiennement du temps auprès de vos collaborateurs, puis de consacrer régulièrement à
chacun un entretien en face à face ? » (voir chapitre 18).
Patrick : « Oui, tout à fait. ».
Coach : « Et vous vous demandiez de quoi vous pourriez bien parler, en dehors des pro-
blèmes rencontrés. Eh bien, l’un des objectifs de ces échanges plus ou moins formels pour-
rait être de déterminer le code SACRÉ de chacun des membres de l’équipe. »
Patrick : « Le code SACRÉ ? »
Coach : « Oui, pour entrer en communication avec chacun d’eux et identifier ses leviers de
motivation. »
Patrick : « ??? »

2. Michaël Aguilar, L’art de Motiver, Dunod, 2009

Messager-Livre.indb 240 12/10/12 09:38


En tant que scrummaster, je veux développer mon leadership
241
Chapitre 20

Michaël Aguilar a mis au point un moyen pour résumer le « profil motivationnel » de


chacun. Ce profil comporte cinq dimensions.

• Sécurité : tout ce qui permet de réduire les peurs et les risques est source de motiva-
tion.
• Appartenance : le lien social, les relations, l’ambiance de travail, la chaleur humaine
sont essentiels pour avancer.
• Confort : tout ce qui simplifie la vie est source de motivation ; ce peut être un confort
matériel, la clarté des objectifs, l’existence de procédures, les horaires aménagés….
• Reconnaissance : les personnes ayant soif de reconnaissance fonctionnent de façon
optimale lorsqu’elles reçoivent des retours positifs.
• Épanouissement : l’épanouissement, le développement ou le dépassement de soi, le
défi ou la nouveauté constituent un autre axe de motivation.

Comment utiliser cet outil ?


Nous avons tous plusieurs sources de motivation. Nous sommes des êtres complexes, qui
vivons de surcroît plusieurs vies en une, qui peuvent évoluer avec le temps.
Le principe est de valoriser chaque dimension sur une échelle de 1 à 5, de façon à obtenir
un code SACRÉ tel que 12445 ou 55412, par exemple.
Comment pouvez-vous interpréter un code ?
La personne dotée du code 12445 a un faible besoin de sécurité (1 sur 5) et d’apparte-
nance (2 sur 5). En revanche, elle a besoin d’un environnement de travail confortable (4
sur 5), de signes de reconnaissance (4 sur 5) et elle recherche activement l’épanouisse-
ment d’elle-même ou la nouveauté (5 sur 5).
Le deuxième code est celui d’une personne ayant un fort besoin de sécurité (peut-être
qu’en phase de changement, elle nécessitera une proximité plus marquée de la part du
scrummaster et de ses collègues), alors que ses besoins de reconnaissance et d’épanouis-
sement sont moins développés.
Il ne s’agit pas de réduire des personnes à des codes ! Cependant, pour ceux qui sont sou-
cieux de modéliser ou de formaliser leurs idées, ce moyen peut être utile pour capitaliser
la connaissance que le leader enregistre sur chacun. Il n’y a pas de questionnaire formel.
Ce code s’élabore au fil du temps. Et comme il n’y a d’ailleurs aucune raison pour que ce
soit un code secret, vous pouvez même l’utiliser comme un moyen ludique d’échanger sur
ce qui motive vos coéquipiers.

Messager-Livre.indb 241 12/10/12 09:38


Coacher une équipe agile
242
Cinquième partie

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : comment ne pas démotiver ?

Patrick : « Le problème, c’est que ça prend du temps ! »


Coach : « C’est sur la durée, tout au long du projet, que le code se précise. Et puis, il n’est
qu’une grille de décodage, un support éventuel de discussion, en aucun cas un prérequis
incontournable à mettre au dossier de chaque collaborateur. Je suis sûre que vous êtes déjà
en mesure de donner un premier code pour chacun de vos collaborateurs. Et puis, est-il si
important, ce code ? Est-ce que le plus important, finalement, n’est pas tout simplement le
fait que vous vous demandiez ce qui motive chacun de vos collaborateurs ?»
Patrick : « On pourrait organiser un jeu d’équipe autour de ça, pour mieux nous connaître. »
Coach : « Génial, Patrick ! Pourquoi pas, avec tout le recul qu’il convient de prendre par
rapport au résultat ? Une fois de plus, ce n’est pas le résultat qui compterait, mais juste
l’occasion de se retrouver, de se découvrir et de donner des signes de reconnaissance. »
Patrick : « Oui, mais ensuite, une fois qu’on connaît le code, on fait comment pour motiver ?
On ne peut pas satisfaire tous les besoins. »
Coach : « Peut-être, mais au moins vous les connaissez mieux. C’est un plus. Peut-être pou-
vez-vous commencer par éviter de démotiver, dans un premier temps. »
Patrick : « C’est-à-dire ? »
Coach : « Malheureusement, nous utilisons tous des destructeurs de motivation. »
Patrick : « ??? »
Coach : « Oui. Par exemple, une personne a un fort besoin de confort et d’appartenance ;
or, son bureau est éloigné du reste de l’équipe et elle se sent exclue. Peut-être pouvez-vous
faire en sorte qu’elle rejoigne le groupe. Un autre exemple : Stéphane adore les défis ; ne
peut-on pas le sortir, au moins de temps en temps, de la maintenance de cette vieille appli-
cation ? »
Patrick : « Oui, mais on ne s’en rend pas toujours compte ! »
Coach : « Justement, avec cette grille, on prend conscience des erreurs que l’on commet
parfois ou des conditions qui sont inappropriées pour la motivation de la personne, qui n’ose
pas toujours s’exprimer. »
Patrick : « OK ! Par exemple, Jacques, l’un des ingénieurs, a un profil de base Travaillomane.
Il a un besoin développé de signes de reconnaissance de ses compétences (R = 5) et est
exigeant sur le respect des délais (C = 5). J’ai un comportement “démotivationnel” si je ne le
félicite jamais et si on démarre ou termine toutes les réunions en retard ! »
Coach : « Exactement ! Avant de motiver, il peut être intéressant de repérer vos attitudes
destructrices de motivation. » (Voir tableau 20-2.)

Messager-Livre.indb 242 12/10/12 09:39


En tant que scrummaster, je veux développer mon leadership
243
Chapitre 20

Tableau 20-2 Les destructeurs de motivation

Besoin Destructeurs
Sécurité Rumeurs : délocalisation, fusion-acquisition, change-
ment de direction, déménagement, réorganisation…
Manque d’information, manque de transparence.
Plan social, chômage partiel.
Appartenance Éloignement géographique, distance.
Absence de rencontre physique, absence d’échanges.
Mise au placard.
Mauvaise ambiance, tensions, conflits.
Confort Sentiment d’indifférence de la direction au bien-être
des collaborateurs.
Localisation du lieu de travail : zone industrielle,
distance domicile/travail.
Aménagement du lieu de travail.
Aucune commodité (transport, restaurant
d’entreprise…).
Mauvaises conditions de travail (bruit, éclairage,
température…).
Vétusté, complexité de l’équipement de travail.
Absence d’assistance (hotline, formation…).
Reconnaissance Absence de signes de reconnaissance élémentaires :
merci, bonjour, félicitations.
Critiques permanentes.
Humiliations, maltraitance, harcèlement.
Exclusion d’une décision, d’une réunion.
Absence de concertation.
Développement de soi et épanouissement Ennui, habitude, lassitude.
Absence de défis, de nouveautés.

Si le scrummaster, en développant ses qualités d’écoute, parvient à détecter les leviers


motivationnels de chacun de ses collaborateurs, il maximise ses chances d’obtenir de
leur part un vrai engagement. Et l’on sait combien dans une démarche agile, la notion
d’engagement sur le résultat du sprint est un élément-clé.

Messager-Livre.indb 243 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
244
Cinquième partie

Obtenir l’engagement
L’engagement se fonde sur l’appropriation des enjeux et des objectifs d’une mission par le
collaborateur. L’exécution « parce qu’on me l’a demandé » n’est ni durable, ni optimale.
Un engagement n’est possible que si « j’en ai envie », « j’ai compris », « j’ai les compé-
tences » ou « je peux/je veux les acquérir ».

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick :


obtenir l’engagement de l’équipe

Coach : « Patrick, vous êtes à la fin d’un sprint planning meeting. Comment obtenez-vous
l’engagement de tous les coéquipiers sur le nombre de story points ou le nombre de user
stories, bref, sur le périmètre défini ? »
Patrick : « Ben, justement, cet engagement n’est pas formel. Et lorsque je leur demande de
lever la main pour s’engager ou sinon d’exprimer les raisons de leur désaccord, c’est mou,
c’est tiède. Je n’ai pas l’impression qu’ils mesurent l’importance ou tout simplement l’utilité
de la pratique. »
Coach : « Vous me disiez que, souvent, c’est vous qui estimiez les tâches parce que les esti-
mations de vos collaborateurs n’étaient pas fiables ; et qu’ils finissaient toujours par valider
ces estimations. N’est-ce pas ? »
Patrick : « Oui. À un moment, il faut trancher. En tout cas, je pensais qu’il fallait trancher. J’ai
évolué depuis. »
Coach : « Oui. Et alors ? »
Patrick : « Eh bien, je pense qu’il faut les laisser estimer, éventuellement se tromper, analyser
a posteriori et comprendre pourquoi, s’améliorer la fois suivante. J’ai mieux compris mon
rôle de soutien, de guide si nécessaire, pour leur apporter un éclairage sans leur donner la
solution, ma solution… »
Coach : « Qu’est-ce que ça va changer, ce nouveau comportement, à votre avis ? »
Patrick : « Justement, si c’est eux qui réfléchissent, qui estiment et qui décident, ils s’enga-
geront d’autant mieux. Encore faut-il qu’ils acceptent cette responsabilité ! »
Coach : « Que pouvez-vous commencer à faire, vous ? »
Patrick : « Leur faire confiance et adopter cette fameuse position basse. Il faut aussi que je
règle cette difficulté que j’ai avec le droit à l’erreur et surtout le fait de l’assumer vis-à-vis de
mes supérieurs. »

Patrick réalise qu’il a un rôle clé dans l’implication et l’engagement de ses coéquipiers.
Il se rend compte que leur passivité ou leur « mollesse » n’est pas inéluctable et qu’il existe
d’autres moyens d’obtenir leur engagement que de compenser en décidant lui-même.

Messager-Livre.indb 244 12/10/12 09:39


En tant que scrummaster, je veux développer mon leadership
245
Chapitre 20

Le rôle de notre « joueur intérieur »


Timothy Gallwey3 s’est intéressé, au départ, aux obstacles qui nuisaient à la performance
des joueurs de tennis et s’est aperçu que leur véritable adversaire était en fait celui qu’ils
portaient en eux.
Il considère que « Performance = Potentiel - Interférences » : autrement dit, la perfor-
mance d’un joueur ou d’un collaborateur (si l’on transpose cette équation au monde de
l’entreprise) est altérée par des interférences ou obstacles internes tels que le manque
de confiance en soi, la peur de l’échec, le stress, le doute, les critiques contre soi, les
croyances limitantes...
Nous aurions un « moi inné », spontané, intuitif, prêt à s’exprimer et à libérer notre poten-
tiel, limité par un « moi mental » qui juge et freine.
Qu’est-ce qui empêche les coéquipiers de Patrick de s’engager plus fermement dans l’at-
teinte des objectifs ? On peut évoquer des obstacles externes comme le manque d’encou-
ragement, le poids des structures, la culture de l’entreprise, la politique de rémunération,
la culture de la sanction qui inhibe la prise de risques et place spontanément les colla-
borateurs sur la défensive… Et l’on peut évoquer l’obstacle interne universel : la peur de
l’échec (voir chapitre 3).

La théorie du sandwich ou les trois lois de l’entraîneur


Patrick l’a dit : il doit faire confiance a priori à ses coéquipiers. C’est cette confiance en
soi et la confiance des autres qui permettent d’éliminer les interférences et de libérer le
potentiel.

Mise en situation de coaching individuel avec Patrick :


application des trois lois de l’entraîneur (ou théorie du sandwich)

Coach : « Patrick, comment concrètement pouvez-vous démontrer votre confiance à vos


coéquipiers ? »
Patrick : « Euh, je ne sais pas, moi... en le leur disant tout simplement. »
Coach : « Oui, et encore plus concrètement ? Prenez l’exemple de votre fiston dont vous me
parliez l’autre jour. Il est à la veille d’un examen ou d’un match de tennis, par exemple. Que
lui dites-vous ? »
Patrick : « Il fait du judo, lui. »
Coach : « Parfait. Alors, à la veille d’un tournoi, que lui dites-vous pour éliminer ‘ses interfé-
rences’ ? »

3. W. Timothy Gallwey, The Inner Game of Tennis, 1972

Messager-Livre.indb 245 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
246
Cinquième partie

Patrick : « Je lui rappelle ses points forts, qu’il a déjà gagné, qu’il a déjà battu cet adver-
saire… »
Coach : « Oui, des signes de reconnaissance conditionnels positifs. »
Patrick : « Je lui indique ses points de progrès : par exemple, qu’il est trop raide sur ses
jambes et qu’il devient facile à déséquilibrer ou qu’il se fait surprendre en début de match en
avançant trop vers son adversaire… »
Coach : « Oui, des signes de reconnaissance conditionnels négatifs. »
Patrick : « Puis, je lui dis que j’ai confiance en lui, qu’il va y arriver, que je crois en lui et que
je suis fier qu’il en soit arrivé là. »
Coach : « Oui, un signe de reconnaissance inconditionnel positif. Exactement les trois lois de
l’entraîneur ou la théorie du sandwich ! »
Patrick : « ??? »
Coach : « Oui : un peu de positif, ce qu’il est possible d’améliorer... et, dernière couche, les
encouragements ! Un peu de négatif entre deux couches positives. Alors, avec vos coéqui-
piers, comment procédez-vous ? »

Le scrummaster, en tant que leader, est cet entraîneur à la veille d’un match, lorsqu’il
clôture un sprint planning meeting au lancement du sprint.
Plus généralement, le scrummaster leader met en cohérence les objectifs du projet avec
les objectifs individuels qu’il prend en considération. Il met en avant les contributions
de chacun ; il félicite, il donne des signes de reconnaissance, il donne les moyens et ne
sanctionne pas. Il fait en sorte que les réussites soient célébrées et les échecs analysés. Il
intervient aussi bien sur le plan collectif qu’individuel.

Quelles sont les conséquences de ce changement sur l’engagement


des coéquipiers ?
Chacun apprécie d’être pris en considération en tant qu’individu et mesure combien on
a besoin de ses compétences et de lui-même dans le projet. Chacun des membres de
l’équipe se sent valorisé. L’équipe prend conscience de sa responsabilité : « Nous avons
le choix de faire, nous avons le choix de la solution, nous devons notre réussite à nous-
mêmes ». Chacun réalise qu’il y a une part de lui-même dans le résultat global ; l’ego est
flatté, le coéquipier est fier (voir le chapitre 7 sur les bienfaits de la confiance, et plus
particulièrement la figure 7-6).
Au final, il est plus facile de s’engager.

Messager-Livre.indb 246 12/10/12 09:39


En tant que scrummaster, je veux développer mon leadership
247
Chapitre 20

Ce que nous avons appris


• Nous avons vu que développer son leadership pour obtenir l’engagement de ses coéqui-
piers, c’est améliorer sa capacité à les influencer.
• L’influence, différente de la manipulation, est cette aptitude à faire agir une personne
ou un groupe de personnes dans un sens donné, mais sans intention cachée ni malveil-
lance.
• L’influence s’exerce grâce au sens donné par le leader aux missions de ses coéquipiers
et à la confiance qu’il inspire. Cette confiance s’appuie sur trois conditions : la compé-
tence, la fiabilité et la fidélité.
• Grâce à cette capacité d’influence, le scrummaster déclenche une dynamique qui mo-
tive ses coéquipiers : ils ont la finalité (savoir pourquoi on fait) et la maîtrise (avoir les
compétences ou les moyens pour faire).
• Le leader doit ensuite veiller à satisfaire d’autres besoins, variables selon les individus,
que l’on peut regrouper sous forme d’un acronyme ou code SACRÉ (Sécurité, Apparte-
nance, Confort, Reconnaissance, Épanouissement). Il doit veiller, de surcroît, à ne pas
avoir d’attitude destructrice de motivation.
• Enfin, il appartient au leader de faire en sorte que chacun gagne confiance en soi et
dans les autres, en éliminant ces interférences négatives qui entravent l’expression du
potentiel (théorie du sandwich ou trois lois de l’entraîneur). En effet, en plus des obs-
tacles extérieurs inhérents à l’organisation ou à l’environnement, nous avons tous un
« joueur intérieur » plus ou moins actif, qui nous freine dans nos actions. Débarrassés
de ces mauvaises influences, motivés et guidés, les membres de l’équipe peuvent plus
facilement s’engager sur des objectifs ou un résultat concret.

Outils du coach proposés

• Le code SACRÉ
• La théorie du sandwich ou trois lois de l’entraîneur

Messager-Livre.indb 247 12/10/12 09:39


Messager-Livre.indb 248 12/10/12 09:39
21
En tant que scrummaster, je veux
apprendre à animer
les cérémonies agiles
Il n’y a rien de plus ennuyeux qu’une réunion électorale.
Un jour, je me suis endormie pendant mon propre discours !
Simone Veil, femme politique française, académicienne

Parce qu’elles sont essentielles à la fois dans l’application du processus et dans la fédéra-
tion de l’équipe (outil de développement d’une équipe), les réunions agiles ou cérémonies
doivent être menées efficacement. La façon dont on les anime affecte grandement les
interactions au sein de l’équipe ; et pourtant, force est de constater que nombre de scrum-
masters ne sont pas spontanément de bons animateurs.
On voit de plus en plus, dans les manifestations autour de l’agilité, des ateliers fondés sur
des agile ou innovation games. Il est vrai que l’agilité offre l’occasion d’introduire un peu
d’amusement dans la conduite des projets. Et cela ne fait pas de mal !
Cependant, on ne doit pas pour autant en oublier la rigueur du processus et le rôle central
des cérémonies qui ponctuent les sprints.
Si une démarche agile s’adapte au contexte de l’organisation, du projet ou de l’équipe, je
constate trop souvent, chez certains clients, des implémentations approximatives : on re-
porte sine die la rétrospective en prétextant un manque de temps, on ne tient pas le daily
stand-up meeting tous les jours, par exemple. On dit qu’on fait de l’agilité, mais… on en
oublie certains fondamentaux, indispensables au succès de la démarche, en particulier
dans l’animation des cérémonies.

Messager-Livre.indb 249 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
250
Cinquième partie

☞ J’invite le lecteur à se référer à l’article de Scrum.org, au sujet du fameux ScrumBut1 !


L’une des responsabilités du scrummaster est donc d’animer efficacement ces cérémo-
nies, en adoptant, là encore, une position basse qui permet aux membres de l’équipe
d’être plus actifs.
Nous allons voir, à travers le cas de l’équipe Alpha et de Patrick, quels sont les a priori
souvent négatifs qui sont exprimés par les membres des équipes et les dysfonctionnements
constatés dans le déroulement des réunions. Nous aborderons ensuite la préparation et
l’animation de ces réunions à proprement parler, avec quelques apports méthodologiques.

Les constats et les dysfonctionnements


Patrick se plaint régulièrement de la passivité des membres de l’équipe. Peu actifs, cer-
tains, présents physiquement, sont en fait absents et très peu participatifs ; d’autres ar-
rivent systématiquement en retard ou ne viennent simplement pas. Nous décidons d’orga-
niser un atelier sur l’animation des cérémonies.

Mise en situation de coaching d’équipe : un atelier sur l’animation des cérémonies

Devant le constat que les réunions sont peu efficaces, nous organisons un atelier, animé
par Patrick, au cours duquel tous les membres de l’équipe Alpha sont invités à réfléchir sur
l’amélioration de leur efficacité en réunion. Je suis observatrice.
N.-B. : J’ai passé un moment au préalable avec Patrick pour lui apporter quelques éclairages
méthodologiques et m’assurer qu’il adopterait une position basse lors de l’atelier lui-même.

Étape n° 1

En binômes, les coéquipiers et Patrick lui-même recensent les dysfonctionnements. Une


mise en commun permet de recueillir ces quelques verbatims :
« Je m’ennuie. » « C’est trop long. »
« Il y en a trop. » « On n’a pas besoin de se réunir tous les jours. »
« Les horaires ne sont jamais respectés. »
« Je ne me sens pas concerné par toute la réunion. »
« Les rétrospectives sont souvent reportées. »

1. http://www.scrum.org/scrumbut

Messager-Livre.indb 250 12/10/12 09:39


En tant que scrummaster, je veux apprendre à animer les cérémonies agiles
251
Chapitre 21

« Il y a trop de monde, parfois. »


« Certains arrivent toujours en retard. »
« C’est souvent mal préparé. »
« Certains ne participent pas. » « Certains sont sur leur smartphone en permanence. »

Étape n° 2

Après le constat assez unanime que les cérémonies ne sont pas optimisées, l’équipe recons-
tituée réfléchit et propose des actions correctives. L’objectif est de définir, à partir de chaque
dysfonctionnement, la solution à mettre en place pour l’éliminer.

Il s’agit d’un exercice qui responsabilise chaque membre en l’impliquant dans l’identifi-
cation des solutions ad hoc. Deux questions leur sont posées : « Que pouvez-vous faire à
votre niveau individuel pour améliorer l’efficacité des cérémonies auxquelles vous par-
ticipez ? » et « Quelles actions collectives proposez-vous ? ». Ainsi, la posture basse de
Patrick leur permet d’identifier eux-mêmes les solutions apportées et, par là, de s’impli-
quer davantage dans le processus.
Ce qui est intéressant, de surcroît, dans cet exercice, c’est que Patrick s’entraîne à la posture
de coach en animant une réunion portant précisément sur l’amélioration des réunions !
Le partage des réflexions nous amène à élaborer une grille synthétique et mnémo​technique,
OPALE.

La solution globale OPALE

O = Objectif
Il est essentiel de fixer un objectif unique à chaque réunion. Il existe, dans une démarche
agile, des cérémonies incontournables, bien identifiées, dont l’objectif et le résultat atten-
du sont prédéfinis. Puis, en marge de ces cérémonies, d’autres réunions peuvent bien sûr
être organisées lorsque le besoin s’en fait sentir.
Quel est l’objectif de ces différentes réunions ?
• Ce peut être le recueil ou la diffusion d’informations ; à cet égard, la première partie
d’un sprint planning meeting, par exemple, a vocation à clarifier le périmètre du sprint
qui démarre et à obtenir du product owner toutes les informations nécessaires pour
démarrer.
• Ce peut être une réunion d’échanges ou de brainstorming visant à faire émerger des
axes de réflexion ou des idées, voire des actions ; c’est l’objectif d’une rétrospective.

Messager-Livre.indb 251 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
252
Cinquième partie

• Le daily stand-up meeting est l’occasion de faire un point d’avancement (en détectant,
le cas échéant, des obstacles aux progrès de l’équipe, et non en apportant des solutions
à ces difficultés rencontrées ; ce sera l’objet d’une autre réunion).
• La production d’un livrable projet, tel qu’un sprint backlog, est l’objectif de la deu-
xième partie du sprint planning meeting.
• D’autres réunions peuvent avoir lieu pour résoudre un problème ou bien prendre une
décision par rapport à un événement.
L’objectif est le cap à suivre ; il doit être communiqué, clarifié si nécessaire, affiché, vi-
sible par tous et validé en début de réunion. Il est ainsi plus facile, lorsqu’on s’en éloigne,
de le rappeler à l’esprit de chacun. On gagnera du temps !
Tout ce qui ne concourt pas à l’atteinte de l’objectif doit être noté sur un paper board, et
sera traité ultérieurement, lors d’une autre réunion. C’est le parking lot.

Exemple de daily meeting

Jacques rencontre un obstacle (troisième question) ; Christophe lui suggère une solution,
mais Magali pense qu’il a tort (« Non, il existe un moyen bien plus simple… »).
Stop ! La discussion technique sert-elle l’objectif de mesurer l’avancement de l’équipe ? Non.
Elle doit faire l’objet d’une autre réunion, dédiée. Patrick, qui anime la réunion, doit poliment
interrompre le débat et proposer aux trois protagonistes de se réunir après le daily meeting.

P = Participants
Le choix des participants est fonction de l’objectif ; dans une cérémonie agile, il est assez
simple puisqu’en théorie, toute l’équipe participe, plus d’autres interlocuteurs selon le
thème.

Question au coach :
Tous les membres de l’équipe doivent-ils être mobilisés durant une demi-journée,
voire plus, lors d’un sprint planning meeting ?

La question pose le problème de la mobilisation des ingénieurs en charge de l’IHM, par


exemple, lorsqu’on liste et estime les tâches liées au middleware.

Messager-Livre.indb 252 12/10/12 09:39


En tant que scrummaster, je veux apprendre à animer les cérémonies agiles
253
Chapitre 21

J’aurais tendance à répondre par l’affirmative, puisqu’une équipe agile est intégrée et que
l’engagement est collectif, quels que soient les corps de métier. On anticipera ainsi plus faci-
lement les problématiques d’interfaces entre les deux couches.
Cependant, cette question est très intéressante car elle en soulève une autre : a-t-on de
« bonnes » user stories fonctionnelles, sans référence aux tâches techniques sous-jacentes ?
N’a-t-on pas des user stories déjà formulées par domaines de compétences techniques ? Car
si l’on a des user stories bien rédigées, purement fonctionnelles, dans ce cas, tous les corps
de métier doivent être présents.
Une autre question se pose : dans le cas de feature teams (équipes organisées par fonction-
nalités), doit-on bloquer toute l’équipe lorsque le product owner présente les user stories d’un
domaine fonctionnel particulier ?
Dans ce cas, je propose une réunion en plusieurs temps : une introduction en plénière, suivie
de sessions en sous-groupes par domaines fonctionnels, puis une synthèse générale.
Ainsi, tous les participants ne sont pas mobilisés durant toute la cérémonie et l’on évite l’ennui
et la lassitude.

En tout état de cause, la liste des participants (experts, décideurs, personnes en charge de
la validation) doit être définie en amont afin de disposer de toutes les forces vives pour
atteindre l’objectif durant la cérémonie.
Un autre moyen évitant à certains participants de s’ennuyer et les motivant à rester est de
leur déléguer un rôle actif !

Rôles délégués
Cette suggestion s’appuie sur le modèle des réunions déléguées2 développé par Alain
Cardon, maître coach certifié de l’International Coach Federation.
En effet, pourquoi concentrer toutes les fonctions entre les mains d’une seule personne ?
L’animateur (en général, le scrummaster) devient alors le pivot central et porte tout le
processus sur ses épaules. Il doit animer, distribuer la parole, prendre des notes, veiller
au temps qui passe… Quelle charge !
Les participants s’ennuient ? Qu’ils deviennent actifs ou acteurs ! Ils trouvent ça trop
long ? Qu’ils contrôlent les dérives ! Les réunions sont stériles ? Qu’ils recadrent vers
l’objectif !
Cette délégation des rôles au sein d’une réunion va dans le sens de l’auto-organisation
et de la responsabilisation de l’équipe : le scrummaster délègue certaines fonctions de
l’animation.

2. Voir http://www.metasysteme.fr/docshow.php?nid=325&language=1

Messager-Livre.indb 253 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
254
Cinquième partie

Quels rôles peut-on envisager ?


• Le facilitateur : c’est le chef d’orchestre, chargé de gérer l’énergie collective. Il veille
à la participation de tous, fluidifie les échanges. Il sait doser entre être présent et être
plus distant, par rapport au débat ; il doit savoir être ferme. Il est assisté par les rôles
présentés ci-après.
• Le timekeeper ou cadenceur : il veille au respect des séquences prévues ; il indique
régulièrement le temps passé et le temps restant. Si le temps est dépassé, il ne lui
incombe pas d’obliger l’équipe à arrêter les débats. C’est à l’équipe que revient cette
décision. C’est en quelque sorte une « horloge parlante ».
• Le pousse-décision ou scribe : il provoque et enregistre les décisions prises. Il invite
l’équipe à se concentrer sur son objectif. Comment ? En reformulant ce qui vient d’être
échangé, en interrogeant l’équipe pour savoir si elle a suffisamment d’éléments pour
prendre la décision ou en alertant qu’une décision n’a pas été prise.
• L’observateur : en position « méta », l’observateur note des comportements non vi-
sibles par les participants activement concentrés sur le contenu de la réunion. Sans por-
ter de jugement de valeur ni montrer du doigt, il restitue à l’équipe ce qu’il a observé et
propose des suggestions d’amélioration. Son rôle est essentiel dans la démarche d’amé-
lioration continue dans laquelle s’inscrit une équipe agile.

Comment utiliser cet outil ?


Vous pouvez faire tourner les rôles délégués parmi les membres de l’équipe : cela les res-
ponsabilise (co-responsabilité), leur apprend à sortir de l’anonymat et les implique. Cela
leur permet aussi de développer de nouvelles compétences. Et le temps passe plus vite !
Vous pouvez également faire l’acquisition de quatre tee-shirts de couleurs différentes en
taille XL : le rouge pour le timekeeper, le bleu pour l’observateur, le vert pour le facilita-
teur et le jaune pour le pousse-décision. Ainsi, spontanément, au début des cérémonies,
vous proposez à quatre membres de l’équipe d’enfiler un tee-shirt et de s’autodésigner
observateur, timekeeper ou autre.
Ce sera le signe que votre équipe est responsable, auto-organisée et performante !

A = Agenda
Quel que soit le type de réunion et l’objectif, un agenda doit être défini : soit en lien avec
le contenu de la réunion (sujet A, sujet B…), soit en lien avec la démarche proposée (étape
n° 1 : brainstorming, étape n° 2 : mise en commun, étape n° 3 : sélection…).
N’oublions pas que le principe du timeboxing est la base du développement itératif !
Chaque thème/sous-thème abordé doit être évalué en termes de durée.

Messager-Livre.indb 254 12/10/12 09:39


En tant que scrummaster, je veux apprendre à animer les cérémonies agiles
255
Chapitre 21

Cet agenda garantit de rester centré sur l’objectif à atteindre ou de mettre en exergue le
fait qu’on ne l’atteindra pas dans le temps imparti. C’est le plan de la réunion.
Il est affiché dans la salle et validé par l’ensemble de participants. Communiqué avant la
réunion, il peut induire des actions préparatoires pour les participants.

Agenda d’une rétrospective


Une rétrospective n’est pas une discussion de salon pour refaire le monde. Tout en fai-
sant varier les supports d’animation, une rétrospective doit comporter trois volets : le pre-
mier porte sur la description des faits et l’expression des ressentis du passé (45 minutes),
le deuxième sur l’analyse du passé et/ou la recherche de solutions (90 minutes), et enfin,
le troisième est l’élaboration du plan d’actions (30 minutes). Si l’agenda est bien établi,
on balisera la cérémonie en allouant tant de minutes à tel ou tel volet, selon la criticité
du contexte.

L = Livrable(s)
Comment évaluer le succès de la réunion ? Comment savoir si l’objectif est atteint ? En
listant, a priori, le ou les livrables à produire : s’agit-il d’un sprint backlog (pour un sprint
planning meeting) ? D’un plan d’actions (à l’issue d’une rétrospective) ? D’une charte
(atelier Ready/Done) ?
Ainsi, tout ce qui ne contribue pas directement ou indirectement à la production du ou
des livrables est une digression. Il ne s’agit pas d’éviter les sujets connexes, tout aussi
importants ; il s’agit de respecter le périmètre défini (le périmètre d’un sprint n’est-il pas
figé ?). En se focalisant sur l’objectif (O) et en respectant le périmètre, le résultat de la
cérémonie (L) sera d’autant plus facilement atteint.

E = Environnement
En fonction de l’objectif, de la durée de la réunion et du nombre de participants, on déter-
mine la taille et la configuration de la salle (un U, des tables séparées pour le travail en
sous-groupes…). On prévoit les aspects logistiques et matériels (vidéoprojecteur, Post-it,
feutres…).
On convient de la technique d’animation qui sera utilisée. Les agile games ou innova-
tion games3 sont, à cet égard autant d’outils à notre disposition pour rendre efficaces ces
réunions.
Citons quelques innovation games : « Remember the future », « Product Box », « Buy a
feature » ou « Speed Boat ».

3. Voir Luke Hohmann, Innovation games, Addison-Wesley, 2007.

Messager-Livre.indb 255 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
256
Cinquième partie

Animer efficacement
Si certains conseils paraissent évidents, voire simplistes, je constate que les pratiques
les plus élémentaires sont souvent sacrifiées : par ignorance (tout le monde n’a pas suivi
de formation sur la conduite de réunions !), par gêne, par maladresse ou par manque de
temps.
Sont listées ci-après des actions et des pratiques fondamentales pour l’efficacité des réu-
nions. Il convient de les rappeler au scrummaster ou à tout autre membre de l’équipe
amené à animer. Elles concernent à la fois le cadre et le processus et constituent une clé
pour le succès de la démarche.

Préparer
Préparer chaque cérémonie est un gage de succès. On n’arrive pas à la réunion en décou-
vrant le sujet, sauf s’il s’agit d’un brainstorming ou d’un sujet de discussion ouvert.
La backlog review
Nombreuses sont les réactions des coéquipiers qui arrivent au sprint planning meeting
sans avoir eu le temps de prendre connaissance des user stories venant dans la suite du
product backlog. La réunion est alors abordée avec une matière inconnue de tous, sauf
du product owner ! Ne nous étonnons pas si les participants sont passifs !
Régulièrement, dans les projets de transformation que j’accompagne, les membres des
équipes finissent par ressentir la nécessité de planifier une cérémonie supplémentaire,
celle de la backlog review. Il s’agit, en fait, de planifier en sprint n, une réunion de deux à
trois heures pour anticiper et avoir des échanges sur le contenu du sprint n+1. Ne faisant
pas partie du processus principal, cette cérémonie est pourtant extrêmement utile pour
identifier les risques et familiariser l’équipe avec ce qui va suivre. Les participants arrivent
alors au sprint planning meeting suivant plus avisés, et donc plus actifs.

La préparation porte, en outre, sur le processus, sur les outils, ce qu’on a appelé « l’envi-
ronnement », et sur la gestion de la documentation (convocations, ordre du jour, docu-
ments prérequis…).

Accueillir
L’accueil ou synchronisation (voir chapitre 8) est essentiel ; il donne le « la » pour la
suite. En plus de la nécessaire ponctualité, la synchronisation permet de s’assurer que
tout le monde est bien là. L’animateur invite chaque participant à se recentrer sur l’objec-
tif de la réunion : un tour de table pour que chacun livre un mot, une phrase, un ressenti…

Messager-Livre.indb 256 12/10/12 09:39


En tant que scrummaster, je veux apprendre à animer les cérémonies agiles
257
Chapitre 21

La technique du photolangage
Cette technique est utilisée pour communiquer au sein d’un groupe au travers de photo-
graphies. Elle peut servir pour la synchronisation ou check-in.

Comment utiliser cet outil ?


Au moment de démarrer la cérémonie, présentez, au milieu de la table, des photographies
représentant des personnages, des paysages, des objets, des situations… Vous invitez
ensuite chaque participant à en sélectionner une. Puis à tour de rôle, en montrant la photo
retenue, chacun décrit sa « météo du jour » en expliquant son choix.
L’intérêt de cette technique est multiple : la prise de contact, l’expression de tous, la faci-
lité de prise de parole, l’écoute attentive (voire curieuse), la découverte de l’autre (qui peut
choisir une photo de montagne et exprimer de la nostalgie par rapport à un souvenir de
vacances ou nous indiquer qu’il a la passion du parapente), le travail sur la symbolique
ou sur l’imaginaire.

La technique ESTP
L’outil de synchronisation ou check-in a été évoqué dans le chapitre 8, « Maîtriser des
outils et des techniques de coach ». ESTP (Explorer – Shopper – Tourist – Prisoner) est
un exemple d’outil de synchronisation (figure 21-1).
Quel en est le principe ? Au démarrage d’une cérémonie, notamment lorsque des tensions
se font jour, voici un bon moyen de prendre la température !
Chacun doit se prononcer (de façon anonyme ou non) sur son état d’esprit avant de com-
mencer la cérémonie :
• E = Explorateur : j’arrive en explorateur, je suis impatient d’apprendre et de découvrir
quelque chose ;
• S = Shopper ou Acheteur : j’arrive en acheteur, je suis preneur d’une bonne idée ou
d’une information utile ;
• T = Touriste : j’arrive en touriste, je n’attends rien de particulier de cette réunion ;
• P = Prisonnier : j’arrive en prisonnier, car on m’a contraint à participer à cette réunion.
Le résultat reflète l’état d’esprit général d’une assemblée de participants à une réunion
qui démarre.

Messager-Livre.indb 257 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
258
Cinquième partie

Figure 21-1
La prise
de « température »

Comment utiliser cet outil ?


Vous pouvez utiliser cet outil soit de façon transparente, soit de façon anonyme. Si vous
l’utilisez de façon transparente, chacun exprime sa position à voix haute ou coche la lettre
correspondante sur une feuille commune sur le paper board ; si vous l’utilisez de façon
anonyme, chacun remplira un papier en y inscrivant l’initiale de son état d’esprit, puis
vous relèverez l’ensemble des papiers, pour en faire une restitution au groupe.
Si vous obtenez une majorité de T et de P, arrêtez tout ! C’est le symptôme d’un malaise
dans l’équipe, d’une tension, d’une démobilisation ou tout simplement d’une incompré-
hension sur les objectifs de la réunion. Il est impératif de clarifier la situation et de ne pas
prendre le risque d’animer une réunion avec une majorité de réfractaires qui seront peu
productifs !
L’indisponibilité ou la préoccupation de certains participants peut être détectée dès cet
accueil ; un moment (voire toute la réunion si nécessaire) peut être consacré à une régu-
lation ou à la résolution d’un problème.

Agenda
L’étape suivante consiste à balayer et à valider avec les participants l’agenda affiché.

Règles et discipline
Ensuite, on convient ensemble des règles ou on rappelle les règles convenues : pas de
téléphone portable, respect et écoute, pas d’autocensure, faire des interventions brèves
pour ne pas monopoliser la parole, rester centré sur l’objectif, écouter sans juger…
Présenter et afficher les règles permet de solliciter chacun et d’inviter les éventuels

Messager-Livre.indb 258 12/10/12 09:39


En tant que scrummaster, je veux apprendre à animer les cérémonies agiles
259
Chapitre 21

détracteurs à s’exprimer. Dès lors qu’il n’y a pas d’opposition aux règles, celles-ci sont
applicables par tous. Il est alors plus aisé de les rappeler, en cas de non-respect.
Lors d’une rétrospective, par exemple, il n’est pas inutile de rappeler la prime directive
de Norman Kerth :
« Indépendamment de ce que nous allons découvrir, nous devons croire fermement
que chacun de nous a donné le meilleur de lui-même, compte tenu de ce qu’il connais-
sait au début, de ses compétences et capacités et de la situation du moment. »

Rôles
On se répartit les rôles (comme indiqué dans la section précédente).

Animer
La légitimité du scrummaster est à présent fondée sur sa capacité à animer et à dynami-
ser l’équipe, mais aussi à permettre à celle-ci de gagner en autonomie. Par conséquent,
ses qualités d’écoute sont fondamentales. Et l’on n’écoute pas qu’en ouvrant grand ses
oreilles ; écouter, c’est aussi questionner, reformuler, observer.

Écouter, questionner, reformuler


Nous avons vu dans le chapitre 18 comment adapter son écoute selon la situation et la ou
les personnes écoutées.
Savoir questionner : le questionnement de l’animateur est une valeur ajoutée puisqu’il
suppose que l’équipe sait, connaît la solution ou va trouver la réponse. Par un questionne-
ment fermé, la réponse est induite, elle limite la réflexion et la créativité de l’équipe. Cela
suppose d’adopter une posture basse et non de sachant.
Reformuler, en exprimant ce qui a été dit, de façon plus concise ou en reprenant exac-
tement les termes utilisés, permet de vérifier la bonne compréhension du message et de
faire progresser la réflexion. Les malentendus sont ainsi déjoués.

☞ Reportez-vous au chapitre 8 pour (re)découvrir les outils du coach à utiliser lors de


l’animation de ces cérémonies.

Gérer les situations difficiles


Le scrummaster peut être confronté à certaines situations difficiles. Comment les gérer ?
Le tableau 21-1, page suivante, présente quelques-unes de ces situations rencontrées le
plus fréquemment au cours des cérémonies, avec des solutions pour s’en sortir.

Messager-Livre.indb 259 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
260
Cinquième partie

Tableau 21-1 Les situations difficiles au cours des cérémonies

Situations Action
L’équipe perd de vue l’objectif. Si des digressions peuvent s’avérer nécessaires pour maintenir une
forme de dynamique, l’animateur ou le pousse-décision doit repren-
dre le contrôle en reformulant les échanges et en posant des ques-
tions de recentrage (« Sommes-nous en train de progresser vers
notre objectif, qui est… je vous le rappelle ? »).
Certains membres sont passifs. S’agit-il de désintérêt ? De crainte de s’exprimer ?
1re stratégie : poser des questions simples et directes (« Alain, que
pensez-vous de ce qui vient d’être dit ? » ou « Émilie, pourquoi ne
répondez-vous pas à la question ? »).
2e stratégie : laisser le silence faire effet, peut-être que le groupe va
s’animer de lui-même.
Ou bien un changement de rythme est nécessaire : proposer une
pause, raconter une anecdote, proposer de faire autre chose…
La discussion est animée, voire L’animateur doit veiller à la bienveillance des échanges ; on reste
emportée. en +/+. Rappeler les règles (affichées !), le respect, l’écoute.
La contradiction est positive ; ne vous sentez pas personnellement
mis en cause.
Noter les points d’accord et les points de divergences, les inscrire au
tableau, reformuler.
Des apartés monopolisent Si ce phénomène dure, arrêter les débats (avec des gestes) et de-
quelques personnes. mander à ceux qui discutent à part de partager leurs opinions.
S’ils ne souhaitent pas partager car cela n’a rien à voir avec le sujet du
groupe, insister sur le fait qu’on a besoin d’eux, que leur avis compte
pour l’atteinte de l’objectif de la réunion.
Un participant monopolise la Savoir l’interrompre, reformuler ce qu’il vient de dire et relancer les
parole ou « sait tout ». échanges avec le groupe, en évitant son regard.

Évaluer et clore
Le scrummaster résume les échanges en s’appuyant sur l’agenda et rappelle les temps
forts de la réunion ; il liste les décisions prises ou décrit le résultat obtenu (livrable).
Précision
Le pousse-décision ou le scribe peut également se charger de cette tâche, si ce rôle lui
a été attribué en début de réunion.

Il demande à chacun de s’exprimer si des éléments n’ont pas été évoqués ou si des points
restent encore en suspens. Le parking lot (points relevés, non évoqués) recense les points
à traiter.
Grâce à l’observateur, qui s’est mis en position « méta », le groupe a un « miroir », qui
a du recul. Après sa restitution au groupe, l’équipe peut consacrer cinq ou dix minutes

Messager-Livre.indb 260 12/10/12 09:39


En tant que scrummaster, je veux apprendre à animer les cérémonies agiles
261
Chapitre 21

pour s’interroger ; l’idée est de mener une mini-rétrospective de la cérémonie agile, sur
les points suivants.
• Avons-nous atteint l’objectif (O) ? Avons-nous produit les livrables (L) attendus ?
• L’agenda (A) a-t-il été respecté ?
• La présence (P) de tous était-elle nécessaire ?
• La réunion elle-même était-elle nécessaire ?
• Cette réunion aura-t-elle une suite ? Laquelle ?
• Sur le processus de prise de décision : avons-nous réussi à prendre des décisions ? Ont-
elles été débattues ? Sont-elles le résultat d’un débat ? D’un compromis ? D’une négo-
ciation ? D’un raisonnement logique ? Sont-elles le résultat d’un vote ? D’une pression ?
Tout le monde a-t-il eu l’occasion de s’exprimer ?
• Sur les comportements concernant la qualité des échanges : l’atmosphère était-elle
détendue ? Comment avons-nous géré les divergences ? Les échanges étaient-ils spon-
tanés ?
• Comment pouvons-nous améliorer le déroulement de cette cérémonie ?
Évaluer la cérémonie participe de la démarche d’amélioration continue d’une équipe
agile.

Le ROTI (Return On Time Invested)


Un vote avec les cinq doigts de la main, des gommettes ou des feutres, est utilisé pour
évaluer, sur une échelle de 1 à 5, le degré de satisfaction de chaque participant (figure
21-2). Chacun est invité à mesurer son « retour sur investissement » par rapport au temps
passé.
• 5 : « Je suis totalement satisfait, j’ai obtenu plus que ce que j’en attendais. »
• 4 : « Je suis assez satisfait. »
• 3 : « Je suis moyennement satisfait, mais je n’ai pas perdu mon temps. »
• 2 : « Je ne suis pas satisfait, j’ai perdu du temps. »
• 1 : « J’ai complètement perdu mon temps, je n’ai rien appris ni rien obtenu. »
À l’issue du vote, on peut demander à ceux qui sont insatisfaits ce qui a manqué ou ce
qu’ils auraient changé dans la conduite de cette réunion.

Messager-Livre.indb 261 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
262
Cinquième partie

Figure 21-2
Le ROTI

Patrick, malgré son expérience, a tiré profit du rappel des B.A.-Ba de l’animation de
réunion. Il a mis en application ces apports méthodologiques, puis nous avons dédié, a
posteriori, une séance de coaching individuel au débriefing et à l’analyse de sa prestation
d’animateur.

Ce que nous avons appris


• Animer une cérémonie agile avec la bonne posture ne s’improvise pas. Pourtant, ces
réunions opérationnelles sont essentielles pour le développement et la fédération de
l’équipe, d’où l’effet plus ou moins positif de l’animation sur la qualité des échanges.
• On constate souvent trop de frustrations ou de temps perdu à l’issue des cérémonies.
Il est donc nécessaire d’optimiser leur efficacité en s’appuyant sur des pratiques élé-
mentaires, souvent sacrifiées, regroupées sous l’acronyme OPALE.
• Ces pratiques consistent à bien définir l’Objectif, lister les Participants (en leur délé-
guant éventuellement un rôle actif, principe des réunions déléguées), définir un Agenda
précis, lister les Livrables ou résultats attendus et préciser l’Environnement (techniques
d’animation, besoins matériels et logistiques).
• Nous avons vu également qu’il importait de bien préparer la cérémonie, avant de dé-
marrer par un exercice de synchronisation, nécessaire pour s’assurer que tous les parti-
cipants sont bien disponibles. Après cet exercice, il convient de communiquer l’objec-
tif, l’agenda et les règles et de les faire valider par tous.

Messager-Livre.indb 262 12/10/12 09:39


En tant que scrummaster, je veux apprendre à animer les cérémonies agiles
263
Chapitre 21

• Le scrummaster doit adopter une position basse pour animer les cérémonies et laisser
ainsi plus de place pour les échanges et l’implication des participants ; il doit, en outre,
savoir gérer certaines situations difficiles.
• Enfin, toute cérémonie bénéficie d’une mini-rétrospective permettant d’en améliorer
continuellement l’efficacité.

Outils du coach proposés

• La grille de préparation OPALE


• Les réunions déléguées
• Le photolangage
• L’ESTP
• Le ROTI

Messager-Livre.indb 263 12/10/12 09:39


Messager-Livre.indb 264 12/10/12 09:39
Épilogue
Nous avons partagé quelques moments en compagnie des protagonistes de nos trois
équipes. Où en sont-ils aujourd’hui ?

Équipe Alpha

Rappel du contexte d’intervention et de la demande officielle

Contexte d’intervention
L’équipe de sept personnes est engagée dans un projet agile depuis neuf mois. Le respon-
sable Qualité & Méthodes considère que Patrick, le scrummaster, n’exerce pas de façon
optimale ses nouvelles fonctions ; en effet, les membres de l’équipe sont peu autonomes,
fuient les responsabilités et ont du mal à s’engager.

Demande officielle
Le responsable Qualité & Méthodes et le scrummaster souhaitent amener l’équipe à da-
vantage d’implication, de responsabilité et d’engagement. Comment aider Patrick avec
des séances de coaching ?

Mission effectivement menée


Une phase d’observation de quelques semaines, en participant à différentes cérémonies
agiles, a été menée et chaque membre de l’équipe a été interviewé. Puis, une offre de
coaching individuel du scrummaster, Patrick, a été retenue.

Résultats visibles
Patrick a manifestement fait évoluer son style de leadership, rendant ainsi ses collabo-
rateurs plus autonomes ; cela peut s’observer lors des sprint planning meetings, animés
aujourd’hui à tour de rôle par un membre de l’équipe.

Messager-Livre.indb 265 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
266

S’il subsiste encore des écarts de performance à la fin des sprints, entre ce qui était prévu
et ce qui est réellement réalisé (done), les coéquipiers sont de plus en plus à l’aise avec le
découpage des tâches et les estimations.
Ils résolvent la plupart de leurs problèmes, généralement ensemble, sans solliciter systé-
matiquement Patrick.
Ce dernier continue à progresser dans l’adoption de sa nouvelle posture, grâce aux
séances de coaching et de supervision qu’il a encore régulièrement ; celles-ci lui sont
bénéfiques pour ajuster plus précisément encore son degré d’intervention.
Il est par ailleurs plus convivial dans sa façon de communiquer avec ses coéquipiers,
s’appuyant sur son capital jovialité, qu’il avait encore peu développé dans sa fonction !
Une ambiance plus détendue règne au sein de l’équipe et les résultats en fin de sprints
s’améliorent.

Équipe Bêta

Rappel du contexte d’intervention et de la demande officielle

Contexte d’intervention
Une équipe récemment constituée de cinq ingénieurs de haut niveau, chacun avec une
expertise bien spécifique, mène un projet stratégique en appliquant une démarche agile.
Le directeur du projet, qui supervise plusieurs projets en parallèle, constate sur celui-ci
que l’équipe n’en est pas vraiment une, puisque chaque membre travaille isolément. Par
conséquent, la performance collective n’est pas optimale.

Demande officielle
Le directeur de projet formule une demande visant à aider les coéquipiers à mieux col-
laborer et à tirer profit de l’efficacité du groupe, sans avoir d’a priori sur le dispositif à
mettre en place.

Mission effectivement menée


Chaque membre de l’équipe a été interviewé avant le démarrage d’un coaching collectif,
en partenariat avec la scrummaster, Catherine.
De nombreux ateliers de régulation ont été nécessaires pour faciliter la prise de parole
des quatre coéquipiers de Catherine.

Messager-Livre.indb 266 12/10/12 09:39


Épilogue
267

En accord avec le directeur de projet et la DRH, Catherine a bénéficié par la suite d’un
coaching individuel, pour mieux endosser son rôle de leader et adapter son style de mana-
gement au profil de son équipe. En effet, elle a pris conscience qu’elle n’avait pas adopté
une posture de leader et qu’il lui était dès lors difficile de fédérer cette équipe.

Résultats visibles
En capitalisant sur le profil Rebelle de Catherine (créatif, spontané et ludique) et grâce
à l’introduction d’innovation games, l’accompagnement a permis d’amener progressi-
vement les membres de l’équipe à sortir de leur isolement ; ils se sont pris au jeu et on
constate aujourd’hui qu’ils apprécient de se rencontrer plus régulièrement, même s’ils
travaillent sur des technologies bien distinctes.
L’un des développeurs, particulièrement en retrait lors des premières cérémonies, ex-
prime aujourd’hui plus facilement ses opinions, tout à fait constructives pour l’équipe.
Catherine provoque beaucoup moins ses coéquipiers, car elle a appris à accepter leur
différence et à utiliser le « bon » canal et la « bonne » porte d’entrée. Ses séances de
coaching lui ont permis de prendre ses responsabilités de leader et de mettre à profit sa
capacité à créer une ambiance détendue pour créer du lien au sein du groupe.

Équipe Gamma

Rappel du contexte d’intervention et de la demande officielle

Contexte d’intervention
L’équipe de R&D est composée de onze personnes et n’applique pas encore une dé-
marche agile. Justement, le responsable de l’équipe mène une réflexion et réalise une
étude d’opportunité sur l’introduction des méthodes agiles.

Demande officielle
La demande exprimée par ce responsable est de bénéficier de l’éclairage d’un coach pour
anticiper les difficultés prévisibles sur le plan humain, en vue de possibles résistances au
changement.

Précision
Il s’agit ici d’une demande d’expertise auprès d’un coach et non d’une demande
de coaching.

Messager-Livre.indb 267 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
268

Mission effectivement menée


Tous les membres de l’équipe et de leur « client » interne ont été interviewés pour dresser
un état des lieux des relations interpersonnelles et de la qualité de la communication au
sein de l’équipe et avec son principal interlocuteur externe.
Un rapport recensant les points forts de l’équipe et les foyers de résistance potentiels a été
remis, puis une liste d’actions préventives a été préconisée.
À la suite de cette première étape a pu démarrer un accompagnement de l’équipe et de
son responsable, Bruno, par un binôme de coachs, avec la définition du profil de person-
nalité pour chaque membre.

Résultats visibles
Bruno a été largement sensibilisé aux risques de la transformation, sur le plan humain.
Il a mesuré l’importance, pour lui, de se faire accompagner de façon rapprochée pour
minimiser ces risques, par des séances de coaching individuel.
Avec le soutien de la DRH, il est en train de déployer un plan de communication et de
formation important auprès de l’équipe et de l’organisation dans son ensemble.
Un coach travaille plus précisément sur la transformation de l’équipe, en l’aidant en ce
moment à construire sa vision d’équipe et à fixer ses règles de fonctionnement et de com-
munication.
Grâce à cet effort d’anticipation, le contexte est beaucoup moins critique pour aborder
cette transformation : les entretiens ont permis de commencer à informer, à faire passer
des messages et à dédramatiser les conséquences du changement. Les actions sont mieux
adaptées et ciblées pour chacun des acteurs. Le succès de la transformation agile est en
bonne voie.

Messager-Livre.indb 268 12/10/12 09:39


Conclusion

L’objectif de cet ouvrage était de vous faire découvrir et apprécier l’intérêt d’une posture
de coach dans une démarche de transformation agile : incarnée par le leader de l’équipe,
en l’occurrence le scrummaster, ou apportée par un coach externe, vous avez pu mesurer
sa complémentarité avec les autres approches et les bénéfices considérables que peuvent
en tirer les équipes.
En effet, ceux-ci étant les leviers du changement et de la performance, c’est aux ressentis
et aux relations interpersonnelles que le coach s’intéresse, davantage qu’aux méthodes et
aux outils. Il devient un facilitateur incontournable pour la conduite du changement, au
même titre que d’autres intervenants.
Le coaching n’est plus un luxe réservé aux seuls dirigeants ou managers privilégiés du
haut de la hiérarchie. Ce n’est plus un phénomène de mode, mais bien un dispositif mana-
gérial innovant pour sécuriser une démarche de transformation. Le coaching est devenu
une composante indispensable dans les organisations désireuses de pérenniser le succès
de la démarche, avec, à la clé, la responsabilisation, l’engagement, la motivation et la
fidélisation des collaborateurs, acteurs du changement et créateurs de valeur.

Doit-on former tous les managers ou leaders d’équipe


au coaching ou bien faire appel à un coach externe ?
On peut distinguer deux approches dans les organisations : celle qui considère que le
coaching est pratiqué par des « experts » du coaching, externes ou internes, et celle qui
voit, pour les managers, une opportunité d’évoluer vers la posture de « manager-coach »,
en s’appropriant des pratiques de coach.
Attention ! Adopter une posture de coach est rarement un réflexe spontané, en particulier
pour les détenteurs d’une position hiérarchique ou de subordination, a fortiori si cela
dure depuis plusieurs années. La position basse du coach est pourtant le fondement d’une
relation entre son coaché et lui-même. Or, tous les coachs le savent bien, nous travaillons
dur pour ne pas nous laisser tenter par la position haute du sachant. Cette posture est ce

Messager-Livre.indb 269 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
270

qui rend les résultats du coaching durables pour la personne ou l’équipe accompagnée
dans son objectif de changement.
La pratique du coaching présente, en outre, d’autres dangers. En effet, la « matière pre-
mière » du coach est la personne, ses émotions, ses freins, ses craintes, ses désirs… – une
matière fragile sur laquelle on peut difficilement calquer des modèles ou reproduire des
solutions toutes faites. Le coach lui-même est une personne, avec ses propres ressentis,
peurs, envies ou souvenirs… Le risque est grand de projeter sur le coaché ses propres
émotions ou de filtrer, c’est-à-dire d’interpréter ou d’analyser rapidement ce qu’il entend
ou ce qu’il observe, en fonction de lui-même.
C’est la raison pour laquelle, si l’on considère que le coach lui-même est un outil au
service de ceux qu’il accompagne, il doit régulièrement affûter ses outils et ajuster sa
posture. Comme l’on confiait autrefois ses ustensiles au rémouleur, le coach « aiguise »
périodiquement son savoir-être et son savoir-faire avec un superviseur. Ainsi, il se pro-
tège et protège son ou ses coachés. Grâce à cette supervision et à un éventuel travail de
développement personnel, le coach prend du recul sur sa pratique, analyse a posteriori ses
actions d’accompagnement et développe son identité professionnelle. Cette construction
identitaire et cet ajustement le prémunissent contre de possibles dérives du coaching et
autres risques de manipulation.
Si en tant que scrummaster, chef de projet ou manager, vous avez relevé la pertinence et
la nécessité d’adopter une posture de coach, c’est une prise de conscience positive. Bravo,
c’est la première étape ! Ensuite, pour aborder votre propre changement, au-delà de votre
lecture, le mieux est de commencer par vous faire accompagner par un coach qui sera, en
quelque sorte, votre superviseur. Puis, en découvrant les joies et les difficultés du métier,
vous aurez peut-être envie d’aller plus loin et de vous former aux concepts et techniques
de base du coaching. Il existe pléthore d’organismes dédiés.
Néanmoins, retenez que l’on n’apprend pas à être coach ; on le devient avec le temps,
grâce au vécu et à la supervision. C’est une posture spécifique et utiliser quelques outils
de coach ne signifie pas qu’on l’a définitivement adoptée !
Attention !
Ce n’est pas le nombre de cordes à l’arc du coach qui fait sa compétence. Beaucoup
d’outils existent, mais rien ne compte plus que son savoir-faire, sa créativité, son imagina-
tion et sa spontanéité, pour les utiliser et les adapter au contexte dans lequel il intervient.
N’est-il pas lui-même son premier outil ?

J’ajouterai que, dans un contexte de changement, avec des enjeux et des risques poli-
tico-économico-organisationnels, le professionnalisme du coach est un premier niveau
de sécurisation, même si, en parallèle, on peut envisager une formation, un transfert de
compétences et une supervision du leader en charge de l’équipe, avec un retrait progressif
du coach externe.

Messager-Livre.indb 270 12/10/12 09:39


Conclusion
271

Le coach externe a d’autant plus de neutralité et respecte d’autant plus facilement la confi-
dentialité des échanges qu’il a une distance affective avec les personnes et les équipes
qu’il accompagne et qu’il a signé une charte de déontologie.

Dans quelle configuration faire appel à un coach externe ?


Y a-t-il une mission de coaching type ?
Comme je l’ai décrit dans l’ouvrage, il est opportun d’accompagner une équipe et son
leader en parallèle. Cependant, déontologiquement, il est souhaitable de faire appel à
deux coachs différents afin de ne pas faire d’un coach unique une « courroie de transmis-
sion » entre les deux, qui pourrait perdre sa neutralité de point de vue.
1. L’équipe doit être accompagnée aux étapes clés de son évolution, qui suit le cycle de
vie du projet. Je préconise l’intervention d’un coach externe, dans les débuts du projet,
au rythme des sprints.
a. Vision, identité, rôles et responsabilités, règles de fonctionnement doivent être défi-
nis au démarrage, puis ajustés si nécessaire, lors des rétrospectives, par exemple.
b. Les rétrospectives peuvent être co-animées par le coach externe et le scrummaster
ou tout autre membre de l’équipe.
c. Le coach peut assister à d’autres cérémonies en tant qu’observateur puis faire un
feedback à l’équipe pour lui permettre de bénéficier d’un œil externe.
d. Et en cas de tensions ou de conflits, ou tout simplement à titre de prévention et
pour développer le réflexe de métacommunication, des ateliers de régulation à la
demande peuvent être organisés.
Combien de temps cela prend-il ?
Au total, pour un projet d’une durée de trois à six mois, l’intervention d’un coach externe
pour l’équipe, en soutien du scrummaster, qui doit être le véritable coach, peut repré-
senter quelques jours au démarrage, puis une demi-journée ou une journée lors des
cérémonies clés des deux ou trois premiers sprints, puis une journée d’observation ou
de régulation au besoin.

2. En parallèle, l’accompagnement du scrummaster ou du leader de l’équipe peut com-


mencer par une mini-formation sur des concepts et outils de base pour mieux intégrer
la dimension humaine de la fonction. Puis, elle est suivie de cinq à dix séances de
coaching individuel toutes les deux ou trois semaines.
En résumé, pour l’accompagnement d’une équipe et de son leader, l’intervention d’un
coach externe peut représenter une dizaine de jours pour l’équipe et entre une huitaine et
une dizaine de jours pour le scrummaster.

Messager-Livre.indb 271 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
272

Précision
Ne sont pas prévus dans cette estimation la formation aux méthodes, l’audit des pra-
tiques existantes, les préconisations organisationnelles ni la mise en place des outils. Il
s’agit simplement, à titre indicatif, de l’accompagnement des personnes, c’est-à-dire du
coaching à proprement parler, d’une équipe et de son leader.

Et dans le cadre d’une transformation globale ?


On observe que l’adoption d’une posture de coach peut révéler et susciter de nouvelles
vocations, en particulier lorsque, d’une équipe agile en transformation, on passe à une
généralisation au niveau d’une organisation, donc à plusieurs équipes, à plusieurs scrum-
masters, à grande échelle – c’est-à-dire lorsque l’agilité dépasse les frontières de la DSI !
Dans ce contexte, on voit émerger des coachs qui se prennent au jeu du coaching : je
les invite fortement à se former pour développer de réelles compétences de coach1 et à
s’entourer d’un superviseur.
Cela suppose souvent une sensibilité et une volonté au niveau global de l’organisation
dans sa stratégie managériale et sa culture de la délégation depuis le top management, en
passant par les DRH qui doivent souvent intervenir auprès des managers intermédiaires
pour les sensibiliser.
Cela nécessite, en outre, un dispositif de coachs spécialisés en organisation pour accom-
pagner la démarche. Une équipe de coachs est particulièrement recommandée dans le
coaching d’organisation, notamment pour offrir une diversité d’intervenants et adapter
l’accompagnement à la grande variété des personnes en action.
Attention !
Ne sous-estimez pas l’effet de masse et la multiplication des effets de groupe dans une
transformation d’organisation ! Les enjeux sont démultipliés, le coaching d’organisation
est très spécifique.

Nous avons parlé essentiellement de coaching avec la toile de fond d’une transformation
agile, parce que la philosophie agile s’y prête particulièrement bien.
Cependant, cette démarche d’accompagnement n’est évidemment pas exclusive à ce
contexte. Le coaching tel qu’il est décrit, c’est-à-dire le coaching d’une équipe face à un
changement ou l’accompagnement d’un leader face à deux changements, est applicable à
bien d’autres contextes.

1. Voir http://www.aecoaching.eu/medias/fichiers/referentiels_competences.pdf ou
http://www.sfcoach.org/professionnalisation/referentiel-de-competences.html

Messager-Livre.indb 272 12/10/12 09:39


Conclusion
273

Ce qu’il faut retenir, c’est que le coach et le coaching ne sont pas une baguette magique.
Il ne faudrait d’ailleurs pas que le mot « coach » véhicule trop d’espoirs, trop d’attentes
déçues, là où d’autres facilitateurs ont échoué en agissant seulement sur certains leviers.
Le coach est un allié complémentaire : il agit sur les savoir-être, là où les autres facili-
tateurs du changement interviennent sur les savoirs et les savoir-faire, absolument indis-
pensables ; le coach ne se substitue pas aux autres intervenants.
Scrummasters, chefs de projet, team leaders, managers, coachs (agiles ou non), acteurs
des projets et coéquipiers, j’espère tout simplement que vous aurez trouvé des éléments
vous permettant de mieux comprendre, au moins partiellement, comment nous, indivi-
dus, fonctionnons en tant qu’êtres émotionnels et comment progresser dans la gestion des
interactions avec les autres.
Puissent nos dirigeants, nos DRH, nos responsables hiérarchiques être sensibles à cette
approche, pour le succès de nos transformations agiles !

Messager-Livre.indb 273 12/10/12 09:39


Messager-Livre.indb 274 12/10/12 09:39
Postface

La valeur d’un être humain ne dépend pas de ses dons ou


de ses talents naturels, mais de l’usage qu’il en fait.
Luc Ferry, résumant l’approche des « Modernes »

J’ai connu Véronique lorsqu’elle se formait au coaching dans notre prestigieux établisse-
ment d’HEC.
Lors de notre première rencontre, je me souviens de m’être interrogée, comme pour
beaucoup de nos élèves, sur sa prédisposition à être en position basse, celle du coach.
Comme tous les consultants et formateurs, ce n’était pas gagné d’avance !
Heureusement, en tant que formateur et coach, nous apprenons à aller au-delà des appa-
rences pour découvrir le potentiel et les forces cachées de chacun.
Agile ? Oui, Véronique le fut tout au long de l’année, pour développer sa créativité tout en
exploitant sa rigueur. Elle a même adouci son « look » au cours des mois… comme quoi
on évolue de l’intérieur, et dans le même temps, de l’extérieur !
Je crois en sa valeur en tant que coach, car elle a démontré sa capacité à définir et à
maintenir le cadre. Il faut beaucoup « d’agilité » pour ramener dans les rails un propos
qui s’égare, pour saisir la petite étincelle qui, activée, déclenchera la motivation, pour dis-
cerner le petit bout du « fil d’Ariane » qui facilitera la sortie du labyrinthe des problèmes
et conduira vers une solution.
Le coaching agile ouvre sur l’accompagnement de la créativité dans un cadre structurant
la pensée.
Le coach accompagne un individu (ou une équipe) pour que celui-ci trouve ses solutions,
découvre son potentiel, renoue avec ses valeurs essentielles (les valeurs communes,
quand il s’agit d’une équipe), s’installe à sa « juste » place, cultive son équilibre.
Centré sur le ressenti, le coaching agile apporte des outils et des méthodes pour faciliter
l’avancée de chacun dans l’équipe au bénéfice du groupe, dans son métier, dans sa voie,
dans sa vie.

Messager-Livre.indb 275 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
276

Et Véronique met bien en évidence, pour le coaching agile, les trois principes qui faci-
litent les interrelations et sous-tendent la progression d’une équipe efficace :
• le principe de Protection de ses membres, en sécurisant la réflexion grâce aux règles de
fonctionnement et aux jalons posés dans le déroulé des rencontres ;
• le principe de Permission, en offrant un espace de liberté structuré et en validant l’au-
dace, l’ouverture et le franchissement de portes ;
• le développement de la Puissance, en accompagnant l’évolution du potentiel de chacun
et en valorisant les réussites.
Le manager agile est décrit comme un « leveur d’obstacles ». L’écoute « active » et la fi-
nesse d’observation du coach ne peuvent que faciliter son action. Compléter les méthodes
agiles par une approche de coach ne peut que les renforcer et les rendre encore plus effi-
caces dans un environnement en constante transformation.

Françoise Engrand1
Art-thérapeute et coach, formateur et superviseur de coachs

1. Françoise Engrand, ancien professeur au CRC-HEC, a formé de nombreux coachs au CESA Coaching.
Elle a animé des stages et des formations autour de « l’art et le management », « l’art et le coaching »,
notamment dans la prévention des risques psycho-sociaux.
Elle a rédigé de nombreux articles sur la gestion des conflits, la négociation commerciale, le management
d’équipes et a participé à l’ouvrage collectif du CRC, Les équipes intelligentes, en 1999.

Messager-Livre.indb 276 12/10/12 09:39


A
Les outils du coach

Liste des outils du coach, par chapitre et niveau

N° Outil Chapitre Niveau* Objectifs /Contextes d’usage

Étapes du deuil (courbe de Comprendre le processus de deuil ou


1 3 Avancé
Kübler-Ross) de renoncement lié au changement.

Mieux se connaître, décoder les com-


Messages contraignants
2 3 Avancé portements inadaptés et comprendre
ou « drivers »
l’origine de nos automatismes.

Grille RPBDC (Réel, Pro- Identifier le besoin d’accompagnement


3 blème, Besoin, Demande, 4 Facile ou d’aide et comprendre la demande
Contrat) de son interlocuteur.
Apprécier le risque de s’engager dans
Trousse de Steiner
4 4 Facile l’accompagnement d’une personne ou
ou « go/no-go » du coach
d’une équipe.
Comprendre le rôle du coach/scrum-
Triangle des 3 P master vis-à-vis de son équipe ou
(Puissance, Permission, d’une personne accompagnée.
5 4 Facile
Protection) : rôle du coach/
scrummaster Ajuster son positionnement et adapter
ses actions.
Autoévaluation ou mesure S’autoévaluer, à l’aide d’une échelle,
6 du degré d’agilité de 5 Facile sur différents critères. Permet de
l’équipe dresser un état des lieux.

Messager-Livre.indb 277 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
278
Annexes

Repérer où en est notre interlocuteur


par rapport à l’adoption d’un nouveau
comportement ou d’une nouvelle
Cycle et étapes compétence.
7 5 Facile
d’apprentissage
Adapter l’action d’accompagnement
appropriée au stade de conscience et
de compétence.
Posture du coach : Trouver le bon positionnement par
8 miroir, position basse, 6 Avancé rapport à la personne ou à l’équipe
méta-position coachée.
Process Communication :
Coach Mieux se connaître, décoder les
immeuble de personnalité,
9 7 profes- comportements inadaptés, mieux
points forts, besoins psy-
sionnel communiquer.
chologiques
Comprendre les difficultés relation-
10 Positions de vie 7 Facile nelles, améliorer la communication.
Gérer l’agressivité.

Améliorer la qualité des échanges,


11 Métacommunication 7 Facile
préserver le cadre relationnel.

Se « brancher », se « câbler » sur


Synchronisation et canaux
12 8 Facile la même longueur d’onde entre
de communication
interlocuteurs.

VAKOG (Programmation Se synchroniser avec l’autre, adapter


13 8 Avancé
neuro-linguistique) son mode de communication.

Comprendre la vision de l’autre, savoir


14 Empathie 8 Avancé faire abstraction de sa propre vision ou
perception d’une situation.

Écouter, comprendre, découvrir,


décoder, sans juger, sans savoir à
15 Écoute active 8 Avancé
la place de, sans censurer : écouter
efficacement.
Niveaux de maturité Repérer la maturité de l’équipe et
16 d’une équipe (modèle 9 Facile mesurer son évolution, pour adapter le
de Tuckman) niveau d’intervention.
Imaginer et rendre le futur possible,
Visualisation et vision dépasser une situation de blocage.
17 10 Facile
de l’équipe (visioning) Élaborer la vision d’équipe, construire
son identité.
Savoir qui fait quoi, qui sait faire quoi,
qui a envie de faire quoi…
18 Matrice des compétences 10 Facile Organiser la montée en compétences,
le partage de connaissances et
favoriser la multicompétence.

Messager-Livre.indb 278 12/10/12 09:39


Les outils du coach
279
Annexe A

Définir les droits et devoirs entre


Charte des droits et de- membres d’une équipe, entre membres
19 voirs, atelier « Ready/ 10-11 Facile d’une équipe et product owner.
Done », atelier « attentes » Préciser les attentes et les engage-
ments mutuels entre deux groupes.

Cinq attitudes de résolution


Identifier la bonne stratégie de gestion
20 de conflit (modèle Thomas- 11 Avancé
d’un conflit.
Kilmann)

Régulation avec le jeu Réguler les relations, s’adresser du


21 11 Facile
de cartes feedback positif et constructif.

Décoder les jeux de pouvoir, les diffi-


Triangle dramatique
22 11 Avancé cultés relationnelles entre les membres
de Karpman
d’une équipe.
Anticiper les réactions prévisibles
Process Communication : Coach des coéquipiers.
23 les réactions prévisibles 11 profes-
sous stress sionnel Éviter les situations
de mécommunication.
Quatre étapes de la
communication efficace
24 11 Facile Dénouer une situation conflictuelle.
(Communication
NonViolente ou CNV®)

Traitement des objections/ Accueillir, valoriser et savoir traiter les


25 Affirmation de soi ou 11 Avancé objections.
assertivité Oser s’affirmer.
12 Faciliter l’amélioration du processus en
26 Check-list de H. Kniberg Facile
Annexe C impliquant les membres de l’équipe.

Comportements Repérer et améliorer ses comporte-


27 12 Avancé
anti-écoute ments « anti-écoute ».

Découvrir les canaux


Coach de communication ouverts
Métacommunication et
28 12 profes- et fermés pour chaque coéquipier.
canaux de communication
sionnel
Adapter sa communication.
S’échanger du feedback, mieux se
29 Fenêtre de Johari 12 Avancé
connaître.
Technique des six
30 13 Facile Améliorer le processus de créativité.
chapeaux
Questionnaire
Analyser et améliorer son style de
31 d’autoévaluation des styles 16 Avancé
management/leadership.
de management/leadership
32 Pyramide de Dilts 17 Avancé Se fixer un objectif d’évolution.
Contrat d’évolution
33 17 Avancé Formaliser son objectif d’évolution.
personnelle

Messager-Livre.indb 279 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
280
Annexes

Développer une écoute plurielle.


34 Quatre types d’écoute 18 Avancé Repérer le style d’écoute préférentiel
de ses interlocuteurs.
Mesurer le niveau de maturité
et d’intimité de l’équipe.
35 Structuration du temps 19 Avancé Mesurer la proportion de temps
consacrée à l’échange de signes
de reconnaissance positifs.
S’échanger du feedback,
36 Signes de reconnaissance 19 Facile
mieux se connaître.

Déterminer les sources de motivation


37 Code SACRÉ 20 Facile
des coéquipiers.

Théorie du sandwich Motiver et obtenir l’engagement


38 20 Facile
ou trois lois de l’entraîneur des coéquipiers.

Grille de préparation Optimiser la préparation et l’animation


39 21 Facile
OPALE des cérémonies agiles.

Réunions déléguées Impliquer et responsabiliser les partici-


40 21 Facile
(A. Cardon) pants des cérémonies agiles.

Accueillir l’ensemble des participants


Synchronisation : lors d’une cérémonie, prendre
41 photolangage, technique 21 Facile la « température » du groupe,
ESTP se découvrir autrement.
Réguler d’éventuelles tensions.

Évaluer le retour sur investissement


42 ROTI 21 Facile
du temps passé lors d’une réunion.

* Niveau :
Facile : vous pouvez utiliser cet outil assez facilement, sans être coach.
Avancé : vous pouvez utiliser cet outil en ayant déjà adopté une posture de coach; entraînez-vous avant de l’utiliser.
Coach professionnel : seul un coach certifié peut utiliser l’outil ; cependant, n’hésitez pas à étudier les apports qu’il
aurait dans votre contexte, en faisant appel à un coach externe, par exemple.

Messager-Livre.indb 280 12/10/12 09:39


B
Manifeste Agile1

Manifeste pour le développement Agile de logiciels

Nous découvrons comment mieux développer des logiciels


par la pratique et en aidant les autres à le faire.
Ces expériences nous ont amenés à valoriser :

Les individus et leurs interactions plus que les processus et les outils ;

Des logiciels opérationnels plus qu’une documentation exhaustive ;

La collaboration avec les clients plus que la négociation contractuelle ;

L’adaptation au changement plus que le suivi d’un plan.


Nous reconnaissons la valeur des seconds éléments,
mais privilégions les premiers.

1. http://agilemanifesto.org

Messager-Livre.indb 281 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
282
Annexes

Kent Beck James Grenning Robert C. Martin


Mike Beedle Jim Highsmith Steve Mellor
Arie van Bennekum Andrew Hunt Ken Schwaber
Alistair Cockburn Ron Jeffries Jeff Sutherland
Ward Cunningham Jon Kern Dave Thomas
Martin Fowler Brian Marick

Principes sous-jacents au manifeste

Nous suivons ces principes :


Notre plus haute priorité est de satisfaire le client en livrant rapidement
et régulièrement des fonctionnalités à grande valeur ajoutée.
Accueillez positivement les changements de besoins, même tard dans le projet.
Les processus Agiles exploitent le changement pour
donner un avantage compétitif au client.
Livrez fréquemment un logiciel opérationnel avec des cycles de quelques
semaines à quelques mois et une préférence pour les plus courts.
Les utilisateurs ou leurs représentants et les développeurs doivent
travailler ensemble quotidiennement tout au long du projet.
Réalisez les projets avec des personnes motivées.
Fournissez-leur l’environnement et le soutien dont ils ont besoin
et faites-leur confiance pour atteindre les objectifs fixés.
La méthode la plus simple et la plus efficace pour transmettre de l’information
à l’équipe de développement et à l’intérieur de celle-ci est le dialogue en face à face.
Un logiciel opérationnel est la principale mesure d’avancement.
Les processus Agiles encouragent un rythme de développement soutenable. Ensemble,
les commanditaires, les développeurs et les utilisateurs
devraient être capables de maintenir indéfiniment un rythme constant.
Une attention continue à l’excellence technique
et à une bonne conception renforce l’Agilité.

Messager-Livre.indb 282 12/10/12 09:39


Manifeste Agile
283
Annexe B

La simplicité – c’est-à-dire l’art de minimiser


la quantité de travail inutile – est essentielle.
Les meilleures architectures, spécifications et conceptions
émergent d’équipes auto-organisées.
À intervalles réguliers, l’équipe réfléchit aux moyens de devenir plus
efficace, puis règle et modifie son comportement en conséquence.

Messager-Livre.indb 283 12/10/12 09:39


Messager-Livre.indb 284 12/10/12 09:39
C
Check-list d’Henri Kniberg

Check-list Scrum non officielle d’Henri Kniberg


http://www.crisp.se/scrum/checklist

Version 2.1 (17/08/2009).


Traduite le 10/02/2010 par Fabrice Aimetti, mise en forme par Ivan Salam.

Abréviations utilisées :
PO : Product Owner
SM : ScrumMaster
PBL : Product Backlog
DoD : Definition of Done

Messager-Livre.indb 285 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
286
Annexes

Messager-Livre.indb 286 12/10/12 09:39


Check-list d’Henri Kniberg
287
Annexe C

Messager-Livre.indb 287 12/10/12 09:39


Messager-Livre.indb 288 12/10/12 09:39
D
Glossaire

Cérémonie (mauvaise traduction de ceremony, en anglais)


Une cérémonie agile est une réunion de toute l’équipe avec le product owner et le scrum-
master ; on en dénombre quatre, au minimum (sprint planning meeting, daily stand-up
meeting, demo et rétrospective).
Daily stand-up meeting
Réunion courte (quinze minutes) quotidienne pour faire le point sur l’avancement des
tâches. Le protocole veut que l’on se tienne debout en cercle, pour éviter qu’elle ne dure
trop longtemps et pour que chacun communique avec l’ensemble des coéquipiers. Voir
aussi Scrum.
Done ou DoD (Definition of Done)
« Done » est l’état d’une exigence ou d’une fonctionnalité lorsqu’elle est globalement accep-
tée par toutes les parties prenantes et lorsqu’elle satisfait aux attentes du client: développée,
testée, documentée, validée et potentiellement mise en production. La définition d’une user
story « Done » est à mettre au point dans chaque équipe avec le product owner ; lui seul
peut considérer une user story acceptable ou conforme à ses attentes. Cette définition fait
souvent l’objet d’un atelier dédié en début de projet. Voir aussi « Ready ».
Feedback
L’une des valeurs essentielles des méthodes agiles : recueillir, le plus fréquemment pos-
sible, les appréciations, les impressions, les remarques, le ressenti, des acteurs du projet
sur la qualité du produit, sur les conditions de réalisation, sur la méthodologie, sur les
relations au sein de l’équipe… On l’obtient grâce à la confiance et à la collaboration.

Messager-Livre.indb 289 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
290
Annexes

Firewall
Littéralement, pare-feu. Terme employé parfois pour désigner le scrummaster.
Go/no-go
Éléments permettant de décider si l’on poursuit ou l’on arrête une action, un processus ou
une étape déterminée d’un projet.
Innovation game
Atelier ludique organisé avec l’équipe, soit à des fins pédagogiques, lors d’une session
de formation par exemple, soit à des fins d’efficacité opérationnelle, pour formaliser une
vision, dresser un bilan…
Itération ou sprint
« Tranche de temps » répétitive – une boucle ou timebox – de quelques semaines, au
cours de laquelle une ou plusieurs fonctionnalités sont développées ; tous les acteurs y
sont impliqués. L’utilisateur visualise un résultat tangible à la fin. Il restitue son feedback.
Lab day (Laboratory day)/Free day
Principe (facultatif mais ô combien profitable !) d’aménager un espace temps pour
l’équipe, dédié à l’exploration, l’investigation, l’(auto-)formation, la recherche… réguliè-
rement, tous les trois ou quatre sprints, par exemple.
Mentoring
Le mentoring, à la différence du coaching, est un transfert de compétences, entre un pro-
fessionnel expérimenté et un « junior ». Le mentor témoigne de son expérience.
Métacommunication
Capacité à échanger sur sa façon de communiquer (forme), indépendamment du sujet (fond).
Pair-programming (programmation en binôme)
L’une des pratiques phares de l’eXtreme Programming, qui consiste à faire travailler les
développeurs en binôme, sur un même poste de travail.
Parking lot
Liste des points non évoqués, relevés à la fin d’une cérémonie (réunion).
Planning game (ou planning poker)
Réunion de planification à laquelle participent le client et l’équipe de réalisation ; le client
décrit les fonctionnalités, puis l’équipe estime le coût d’implémentation en listant et en
évaluant les activités nécessaires. Cette réunion a lieu avant chaque sprint. Ses particu-
larités sont d’être une démarche collective d’estimation et de planification, sous forme

Messager-Livre.indb 290 12/10/12 09:39


Glossaire
291
Annexe D

ludique si l’on utilise le « jeu de poker ».


Product backlog (product ou iteration ou sprint)
Liste d’exigences priorisées et grossièrement estimées formalisées par des user stories.
Product owner
Représentant de la maîtrise d’ouvrage, du client et des utilisateurs, qui a la responsabilité
du product backlog : recensement des items, priorisation en fonction de l’apport de valeur
ajoutée, ajout/suppression ou modification d’items et validation des user stories livrées.
Product (vision) box
Représentation graphique et visuelle du produit final attendu, souvent construite lors d’un
innovation game.
« Ready »
La définition de « Ready » est le pendant de « Done » : il s’agit, pour l’équipe, de définir
dans quelles conditions d’avancement ou de description elle peut accepter « d’embar-
quer » une user story dans un sprint ; en effet, celle-ci doit remplir certaines conditions
qu’il convient de préciser en amont afin d’éviter tout blocage lors du sprint à cause d’une
mauvaise précision.
Release
Version majeure de l’application. Une release regroupe généralement plusieurs sprints.
Release planning meeting
Réunion de planification d’une version majeure de l’application.
Rétrospective
Réunion menée à chaque fin de sprint au cours de laquelle un bilan est dressé : l’équipe
s’interroge sur la façon dont elle a travaillé et sur les adaptations éventuellement néces-
saires à apporter pour améliorer le processus.
Roadmap
Présentation des dates de sortie des versions majeures d’un produit.
Scrum
Réunion quotidienne de quinze minutes, c’est la « mêlée », au cours de laquelle l’équipe,
le scrummaster et le product owner font le point sur ce qui a été fait la veille, ce qui va
être fait le jour même et les difficultés rencontrées par chacun.
Scrumboard
Tableau mural affichant l’avancement des tâches.

Messager-Livre.indb 291 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
290
Annexes

Scrummaster (ou ScrumMaster)


Personne chargée de veiller à la bonne application des pratiques de la méthode Scrum,
de « protéger » l’équipe des éléments perturbateurs externes et de lever tous les obstacles
rencontrés dans la réalisation.
Servant leader
Leader au service de l’équipe. Concept mis au point par Robert Greenleaf dans les an-
nées 1970 et complété par Larry Spears en 1990. (Voir chapitre 16.)
Sheep dog
Littéralement, chien de berger. Terme employé parfois pour désigner un scrummaster.
Spike
Tâche d’étude ou d’exploration lorsque l’on ne peut estimer précisément un élément du
product backlog ; c’est en quelque sorte un crédit-recherche limité et non un chèque en
blanc.
Sprint
Itération de deux à trois semaines généralement, dont le résultat est un ensemble de fonc-
tionnalités validées par le client.
Sprint backlog (ou iteration backlog)
Liste des user stories retenues dans le sprint et des tâches correspondantes pour leur
implémentation.
Sprint planning meeting
Réunion de planification d’une itération ou sprint, dans la méthode Scrum.
Timeboxing
Principe consistant à définir une échéance fixe pour développer et livrer un ensemble de
fonctionnalités. Si le travail planifié n’est pas achevé, on ne décale pas la date de fin, mais
on analyse les raisons expliquant ce retard pour apporter rapidement des adaptations.
Technical stories
Tâches techniques qui ne sont pas directement liées à la réalisation d’une user story
(mise en place de l’environnement, développement d’un framework commun…)
User stories
Usages du système constituant une exigence du client dans le product backlog.

Messager-Livre.indb 292 12/10/12 09:39


E
Bibliographie

Voici une bibliographie non exhaustive dans les thèmes retenus.

Coaching
Philippe Bigot, Le coaching orienté solution, Eyrolles, 2010
Pierre Blanc-Sahnoun, L’Art de Coacher, InterEditions, 2006
Bruno Chaintron, Coaching pour changer avec plaisir : Innovez !, Eyrolles, 2007
Gérard Collignon & Pascal Legrand, Coacher avec la Process Communication,
InterEditions, 2006
Danièle Darmouni & Philippe Gabilliet, Artisans du devenir : 16 coachs témoignent
de leurs méthodes et de leur expérience, Pearson, 2011
Émilie Devienne, Le grand livre de la supervision, Eyrolles, 2010
Fédération Francophone de Coachs Professionnels, Agir en coach : Les bonnes pratiques
d’un coaching professionnel, ESF, 2007
Roland Gori & Pierre Le Coz, L’empire des coachs : Une nouvelle forme de contrôle
social, Albin Michel, 2006
Florence Lamy & Michel Moral, Les outils du coach, InterEditions, 2011
Susanne Madsen, The Project Management Coaching Workbook: Six Steps to
Unleashing Your Potential, Management Concepts Press, 2012

Messager-Livre.indb 293 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
294
Annexes

Jacques-Antoine Malarewicz, Réussir son coaching : Une approche systémique,


Village Mondial, 2e édition, 2007
Isabelle Vitte-Blanchard, Invitation au coaching : Le monde des possibles, EMS,
2010
John Whitmore, Le guide du coaching, Maxima, 2008

Gestion du changement
François Dupuy, Sociologie du changement : Pourquoi et comment changer les organi-
sations, Dunod, 2004
Spencer Johnson, Qui a piqué mon fromage ou comment s’adapter au changement au
travail, en famille et en amour, Michel Lafon, 2000
John Kotter & Holger Rathgeber, Alerte sur la banquise ! Réussir le changement
dans n’importe quelles conditions, Pearson, 2008
Françoise Kourilsky, Du désir au plaisir de changer, 4e édition, 2008
Bernadette Lecerf-Thomas, Neurosciences et management : Le pouvoir de changer,
Éditions d’Organisation, 2009
Mary Lynn Manns & Linda Rising, Fearless Change: Patterns for Introducing New
Ideas, Addison-Wesley, 2005
Charles-Henri Russon & Carole Lalonde, Management du changement : Panorama
des approches, techniques et principes utiles, IFEAS, 2012
Arnaud Tonnelé, 65 outils pour accompagner le changement individuel et collectif,
Eyrolles, 2011
Paul Watzlawick, Le langage du changement : Éléments de communication thérapeu-
tique, Éditions du Seuil, 1980

Leadership, management
Michaël Aguilar, L’Art de Motiver, Dunod, 2009
Jérôme Barrand, Le manager agile : Agir autrement pour la survie des entreprises,
Dunod, 2e édition, 2012
Pierre Barrère & Jean-Claude Montauzé, Pari sur les hommes : Le management par
la vision partagée, L’Harmattan, 2009

Messager-Livre.indb 294 12/10/12 09:39


Bibliographie
295
Annexe E

Eric Berne, Structure & dynamique des Organisations et des Groupes, Éditions
d’Analyse transactionnelle, 2005
Yves Blanc, Le Manager à l’écoute, Dunod, 2e édition, 2003, 2005
Alain Duluc, Leadership et confiance : Développer le capital humain pour des organi-
sations performantes, Dunod, 2e édition, 2008
Jean-Christian Fauvet, L’élan sociodynamique, Éditions d’Organisation, 1996, 2004
Jason Fried & David Heinemeier Hansson, Rework : Réussir autrement, Maxima,
2012
W. Timothy Gallwey, The Inner Game of Tennis, Random House Trade, 1997
Luke Hohmann, Innovation Games, Addison-Wesley, 2007
Patrick Lencioni, Optimisez votre équipe, Un monde différent, 2006
Vincent Lenhardt, Les responsables porteurs de sens, Insep Consulting Éditions,
3e édition, 2010
Vincent Lenhardt & Philippe Bernard, L’intelligence collective en action, Pearson,
2e édition, 2009
Franck Martin, Managez humain, c’est rentable ! Comment humaniser les relations
professionnelles, De Boeck, 2008
Vineet Nayar, Les employés d’abord, les clients ensuite : Comment renverser les règles
du management, Éditions Diateino, 2011
Daniel H. Pink, La vérité sur ce qui nous motive, Leduc.S Editions, 2011
Gérard Rodach, Faire appliquer ses décisions, Eyrolles, 2009

Développement personnel, Process Communication


Christian Becquereau, Process Com pour les managers : Communiquer et travailler
avec (presque) tout le monde grâce à PCM, Eyrolles, 2008
Rhena Branch, Rob Willson & Béatrice Millêtre, Exercices de thérapies comporte-
mentales et cognitives pour les nuls, First Editions, 2010
Marcus Buckingham & Donald Clifton, Découvrez vos points forts, Pearson, 2008
Isabelle Filliozat, Cahier de travaux pratiques pour apprendre à gérer ses émotions,
Marabout, 2011

Messager-Livre.indb 295 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
296
Annexes

Taibi Kahler, Process Communication Management : Communiquer, motiver, mana-


ger en personne, InterEditions, 2006
Jérôme Lefeuvre, S’entraîner à la Process Communication au quotidien : 30 jours
d’exercices pour en maîtriser la pratique, InterEditions, 2008
Lucy Leu, Manuel de Communication Non Violente : Exercices individuels et collectifs,
La Découverte, 2005
Kerry Patterson, Joseph Grenny, Ron McMillan & Al Switzler, Confrontations
cruciales, Ixelles Éditions, 2010
Claude Steiner, Le conte chaud et doux des chaudoudoux, InterEditions, 1984, 2004
Marc Vilcot & Hugues Poissonnier, Se connaître pour être plus performant, PUG,
2012

Méthodes agiles
Lyssa Adkins, Coaching Agile Teams: A Companion for ScrumMasters, Agile Coaches,
and Project Managers in Transition, Addison Wesley, 2012
Jurgen Appelo, Management 3.0: Leading Agile Developers, Developing Agile Leaders,
Addison-Wesley, 2011
Claude Aubry, Scrum : Le guide pratique de la méthode agile la plus populaire, Dunod,
2e édition, 2011
Mathieu Boisvert & Sylvie Trudel, Choisir l’agilité, du développement logiciel à la
gouvernance, Dunod, 2011
Rachel Davies & Liz Sedley, Agile Coaching, Pragmatic Programmers, 2009
Véronique Messager Rota, Gestion de projet agile : avec Scrum, Lean, eXtreme
Programming…, Eyrolles, 3e édition, 2010

Messager-Livre.indb 296 12/10/12 09:39


Index

3 P (permission, protection, puis- Berne, Éric 86, 229 chaudoudou 84


sance) 54 Bigot, Philippe 47 check-in 94, 257
3 P (préférences, pratique, per- Blake et Mouton (modèle) 194 check-list de Kniberg 156, 285
formance) 239 Blanc, Yves 100, 102, 157 chef de projet 185
charte des droits et devoirs 127 Branch, Rhena 205 CNV (Communication
matrice des compétences 125 NonViolente) 146
objectif SPORT 205 C coach 5
action 45
cadre 77 agile 3, 50
A
confiance 84, 89, 237 effet miroir 70
affirmation de soi 151 Cardon, Alain 253 facilitateur 51, 72
agile game 249, 255 cérémonie agile 249, 289 go/no-go 52, 290
agressivité 148 agenda 254 outils 93, 277
Aguilar, Michaël 241 animation 256 position basse 51, 71, 220
Aimetti, Fabrice 156, 285 clôture 260 posture 2, 220
amélioration continue 12, 261 difficultés 259 protection 54, 180
analyse transactionnelle 35, 85, environnement 255 responsabilités 53
140, 142, 229, 231 livrable 255 rôle 54
anticipation 170 objectif 251 scrummaster 190
Appelo, Jurgen 226 participant 252 techniques 93
apprentissage (étapes) 64 réunion déléguée 253 coaché 5
assertivité 151 changement 2, 25 engagement 56
atelier accompagnement 2, 46 coaching
Attentes 137 cadre 54 cadre contractuel 43
Ready/Done 128 conduite 2 contrat 53
auto-organisation 166 désapprentissage/apprentissage demande 46, 48, 50
autoévaluation 60, 114, 191 66, 69 engagements mutuels 53
autorégulation 157 dimension psychologique 27 entretien préliminaire 43
facilitateur 72 équipe 109, 271
B frein personnel 35 objectif 47, 205
processus d’adaptation 29 organisation 272
Barrand, Jérôme 170, 172 résistance 28
Barrère, Pierre 119, 124 scrummaster 183
scrummaster 201 code SACRÉ 240
Becquereau, Christian 195 Charest, Gilles 166
Bernard, Philippe 99 collaboration 12, 155

Messager-Livre.indb 297 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
298

Collignon, Gérard 143, 196 E taille critique 62


communication 138, 159 tensions 131
écoute 259
canaux 94 vision commune 117, 123, 236
active 100
non violente 146 esprit d’équipe 163
comportements anti- 157
pacifique 131, 146 ESTP (technique) 257
qualité 209
compétence relationnelle 27
types 215
comportement 23, 36, 38, 63 F
émotion 32, 34, 61
agile 13
empathie 97 feedback 47, 139, 160, 228, 289
anti-écoute 157
engagement 12, 169 boucle 47
congruence 204
Engrand, Françoise 276 fenêtre de Johari 160
servant leader 189
entraîneur (trois lois de l’) 245 firewall 290
confiance 37, 84, 89
équipe agile 11 Free day 127, 290
conflit 37
auto-organisation 166
comportements prévisibles 143
autonomie 166 G
régulation 138
bien-être 175
résolution 133 Gallwey, Timothy 245
cérémonie 249
confrontation 131 Gemba Walk 212
coaching 109
positive 138 Greenleaf, Robert 189
confiance 237
congruence 204, 237 grille RPBDC 44
construction 190
container 55
co-responsabilité 169, 170
contrat 43, 53
dissolution 179 H
d’évolution personnelle 205
droits et devoirs 127
co-responsabilité 169, 170 hiérarchie 189
engagement 244
courbe de Kübler-Ross 30 homéostasie 28, 69, 180
environnement 223
créativité 172
esprit d’équipe 163
croyance limitante 55, 65 I
étapes de constitution 111, 197
intelligence collective 172 indice du bonheur 175
D jeux de pouvoir 140 innovation 172, 190
daily stand-up meeting 252, 289 loi des 3 P (motivation) 239 game 120, 249, 255, 290
de Bono, Edward 172 management 12 intelligence
délégation 47, 221 passivité 222 collective 172
animation des réunions 253 performance 165, 166 émotionnelle 79
niveaux 226 positionnement du itération 19, 290
Denning Stephen 188 scrummaster 219
désapprentissage 65, 66 prise de risque 174 J
deuil (étapes) 30, 181 processus d’amélioration 155
Dilts, Robert 202 recrutement 169 jeu de cartes 139
dimension humaine 77 règle du jeu 126
discrimination visuelle 97 régulation 155 K
drivers 35, 145 relations 157
Kahler, Taibi 80, 81, 143, 144
droit à l’erreur 174, 224 responsabilités 124
Process Com 80
rôles 124
types de personnalités 80
solidarité 171
Karpman, Stephen 140
synergie 166

Messager-Livre.indb 298 12/10/12 09:39


Index
299

Kerth, Norman 259 P S


Kilmann, Thomas 133
pair programming 70 sabotage 46
Kniberg, Henri 156, 175, 285
parking lot 252, 260, 290 Salomé, Jacques 61
Kourilsky, Françoise 120
passivité 222 Satir, Virginia 100
Kübler-Ross, Elisabeth 30
personnalité (type) 80, 95, 143, scrumboard 21
196, 232 scrummaster 12, 54, 89, 183,
L peur 32 185, 187
Lab day 127, 290 photolangage 257 animation des cérémonies 249
langage (pièges du) 102 planning game 66, 290 cadre d’intervention 91
leadership 187, 188, 191, 235 PNL (Programmation neuro- capacité d’influence 235
questionnaire 191 linguistique) 96 cérémonies difficiles 259
Lecerf-Thomas, Bernadette VII, positions de vie 86 changement 201
27, 29, 67 prise de risque 174 coach 190
Legrand, Pascal 143, 196, 222 proaction 170 contrat d’évolution personnelle
Lencioni, Patrick 138 Process Communication 80, 94, 205
Lenhardt, Vincent 56, 99, 118, 143, 195, 232 délégation 221, 253
165, 172 processus relationnel 55 écoute 259
product identité 202
M backlog 19, 291 leadership 187, 235
owner 12, 291 position basse 220, 221
Malarewicz, Jacques-Antoine 65 droits et devoirs 127 positionnement 219
Manifeste Agile 281 (vision) box 118, 291 responsabilité 187
MBWA (Management By protection 54, 221 Scrum (méthode) 12, 24
Wandering Around) 212 pyramide ScrumBut 250
mécommunication 94, 142, 143 de Dilts 202 séparation 179
menace 25 inversée 189 servant leader 13, 188, 189, 219
mentoring 125, 290 signe de reconnaissance 228
message contraignant 35, 144 Q silence 104
métacommunication 88, 158 sociocratie 166
Millêtre, Béatrice 205 questionnement 102 solidarité 171
Montauzé, Jean-Claude 119, 124 Spears, Larry 189
Moral, Michel 70 R spike 127
motivation 239 sprint 19, 292
reconnaissance (signe de) 228
reformulation 101 backlog 292
N release 19 planning meeting 251, 252,
planning meeting 19 292
Nayar, Vineet 188
renoncement 29 Steiner, Claude 52, 84
résolution de conflit 133 stroke 231
O structuration du temps 229
responsabilité 169
objection 150 rétrospective 155, 251, 291 style de management 194, 196,
OPALE (solution) 251 finale 180 197
Rosenberg, Marshall B. 146, 151 synchronisation 94, 256
ROTI (Return On Time verbale 96
Invested) 261

Messager-Livre.indb 299 12/10/12 09:39


Coacher une équipe agile
300

T facilitateur 51, 52 V
organisation 272
technical story 127, 292 VAKOG 96
transparence 12
technique des six chapeaux 172 valeur agile 11, 13
triangle dramatique de Karpman
théorie du sandwich 245 Vignes, Romain 123
140
Thomas-Kilmann (modèle) 133 visualisation 119, 201
trousse de Steiner 52
timebox 156
Tuckman, Bruce 112
timeboxing 292 W
transformation agile 1
cadre sécurisé 77 U Wilson, Rob 205
contexte 9, 17 user story 19, 292

Messager-Livre.indb 300 12/10/12 09:39


Aide-mémoire pour la compréhension des exemples cités
Équipe ALPHA Équipe BÊTA Équipe GAMMA
Équipe de 7 personnes Équipe de 5 personnes Équipe R&D de 11 personnes
Caractéristiques de l’équipe
Engagée dans une transformation agile depuis Brillants ingénieurs avec une expertise Département Études & Développement, dans
9 mois. spécifique, qui travaillent isolément ; récemment une grande organisation, qui maintient des
constituée pour un projet stratégique, elle applications en production et gère de nouveaux
applique une démarche agile. projets.

Contexte d’intervention
Le responsable Qualité & Méthodes considère Le directeur du projet constate que l’équipe L’équipe n’applique pas encore une démarche
que Patrick n’exerce pas de façon optimale ses n’est pas vraiment une équipe, puisque chaque agile. Son responsable mène une réflexion et
nouvelles fonctions de scrummaster ; il considère membre travaille isolément. Par conséquent, la réalise une étude d’opportunité sur l’introduction
que les membres de l’équipe sont peu autonomes, performance collective n’est pas optimale. des méthodes agiles.
fuient les responsabilités et ont du mal à
s’engager.

Demande officielle de coaching


Amener l’équipe à davantage d’implication, Aider les coéquipiers à mieux collaborer et à tirer Donner un éclairage à l’étude d’opportunité
de responsabilité et d’engagement. profit de l’efficacité du groupe. pour anticiper les difficultés prévisibles
sur le plan humain.
N.B. : Il s’agit ici d’une demande d’expertise et
non de coaching.

Acteurs
Patrick est le scrummaster : 44 ans, 10 ans Catherine est le scrummaster. Bruno est le responsable de l’équipe.
d’ancienneté, double expertise fonctionnelle
Type de personnalité Process Com : base Type de personnalité Process Com : Base
et technique, formation certifiante Scrum reçue,
Rebelle (besoin de contacts). Promoteur.
personnalité imposante, joviale et directive.
Autres membres : Driver ou message contraignant
Type de personnalité Process Com : Base
Persévérant. Paul (base Rêveur, besoin de solitude) prédominant : Dépêche-toi.
Driver ou message contraignant Pablo Autres membres :
prédominant : Sois parfait Parent. Alexis Sylvie (base Empathique)

Style de management : démocratique Rodrigue Nicolas, jeune ingénieur


devenant autocratique sous stress. Matthieu
Autres membres :
Jacques, développeur, base Travaillomane
Christophe
Magali

Vous aimerez peut-être aussi