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énie
Véronique Messager
Préface de Bernadette Lecerf-Thomas
Postface de Françoise Engrand
Coacher
une équipe agile
Guide à l’usage des ScrumMasters,
chefs de projets, managers… et de leurs équipes !
G énie •
logiciel
> Quels outils et méthodes pour la création logicielle ?
AU SOMMAIRE
Le contexte d’une transformation agile • Valeurs agiles et comportements associés •
Coach certifiée HEC, accréditée
3 exemples de situations réelles • Le changement vécu comme une menace • Prendre en compte
Process Com, Véronique Messager les émotions, les freins personnels • Initier le changement • Cadre contractuel : demande et
accompagne, depuis près objectif de coaching, engagements mutuels • Responsabiliser les acteurs du changement :
de quinze ans, des équipes projet autoévaluation, décision de changer • Faciliter le processus de désapprentissage/apprentissage
et des organisations en phase • Sécuriser la démarche de transformation • Créer un cadre sécurisé : dimension humaine,
confiance • Outils et techniques de coach : synchronisation, empathie, écoute active • Coacher
de transition agile. Accordant
l’équipe agile • Étapes de constitution de l’équipe • Création et structuration : vision commune,
une part essentielle à la dimension rôles et responsabilités, règles du jeu • Confrontations et tensions : résolution de conflits,
humaine, elle leur propose confrontation positive, communication pacifique • Régulation et normalisation • Synergie
un support organisationnel et performance : autonomie, engagement, intelligence collective, bien-être • Dissolution et
et méthodologique, et surtout séparation • Coacher le ScrumMaster • Un leader au service de l’équipe • Aborder son propre
changement • Développer ses qualités d’écoute • Trouver le bon positionnement vis-à-vis de
un accompagnement personnalisé,
l’équipe • Développer son leadership • Animer les cérémonies agiles • Conclusion : faut-il
afin de faciliter l’adoption des bons former les responsables au coaching ou faire appel à un coach externe ? Annexes • Glossaire •
réflexes comportementaux. Certifiée Bibliographie.
ScrumMaster, Véronique Messager
est également l’auteur de Gestion
de projet agile, aux Éditions Eyrolles
(3e édition, 2010).
ISBN 978-2-212-13414-8
Coacher
une équipe agile
CHEZ LE MÊME ÉDITEUR
Du même auteur
Méthodes agiles
Y. Constantinidis. – Mémento Cahier des charges A. Altinier. – Accessibilité web. Normes et bonnes pratiques
informatique. pour des sites plus accessibles.
N°13289, 2011, 14 pages. N°12889, 2012, 340 pages (collection Accès libre).
D. Moisand, F. Garnier de Labareyre. – CobiT. Pour une X. Delengaigne, P. Mongin. – Boostez votre efficacité
meilleure gouvernance des systèmes d’information. avec FreeMind et Freeplane. Bien démarrer avec le Mind
N°12427, 2009, 258 pages (collection Solutions d’entreprise). Mapping.
N°12696, 2e édition, 2010, 280 pages.
C. Dumont. – ITIL pour un service informatique optimal.
Mis à jour avec ITIL v3 et la norme ISO 20000. R. Hertzog, P. Habouzit. – Mémento Git à 100%.
N°12102, 2e édition, 2007, 378 pages (collection Solutions N°13438, 2012, 18 pages.
d’entreprise).
C. Schillinger. – Intégration web : les bonnes pratiques. Le I. Canivet & J.-M. Hardy. – La stratégie de contenu en
guide de survie de l’intégrateur. pratique. 30 outils passés au crible.
N°13370, 2012, 380 pages. N°13510, 2012, 170 pages.
Coacher
une équipe agile
Guide à l’usage des ScrumMasters,
chefs de projets, managers… et de leurs équipes !
ÉDITIONS EYROLLES
61, bd Saint-Germain
75240 Paris Cedex 05
www.editions-eyrolles.com
En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage,
sur quelque support que ce soit, sans l’autorisation de l’Éditeur ou du Centre Français d’exploitation du droit de copie,
20, rue des Grands Augustins, 75006 Paris.
© Groupe Eyrolles, 2012, ISBN : 978-2-212-13414-8
Dans de nombreuses organisations, la pertinence des méthodes agiles pour mener des
transformations de façon dynamique et innovante ne fait plus de doute. Si les méthodes
agiles sont performantes pour innover et pour réaliser des changements avec moins d’alé-
as que les méthodes traditionnelles, elles sont vécues comme plus exigeantes concernant
la communication entre les acteurs des projets.
L’agilité fonctionnelle et technique demande de l’agilité mentale de la part des équipes
projet. La complexité des contextes projet et la complexité des comportements humains,
quand elles sont combinées, peuvent engendrer des moments difficiles à vivre par ceux
qui ne sont pas suffisamment armés pour conduire le changement.
Composée d’acteurs de différentes spécialités, l’équipe agile forme un bouquet de com-
pétences où chacun porte la responsabilité de sa délégation. Concurrents et partenaires
au sein d’une même équipe projet, ses membres expriment ainsi les divergences de point
de vue des différentes parties prenantes de l’organisation. Les équipiers vivent, de ce fait,
une tension inhérente à leur fonction. Ils apportent une partie de la solution et ils prennent
une part dans les responsabilités et les risques liés aux projets et aux transformations qui
en résultent. La structure du projet agile amène chacun à être en même temps partenaire
(pour la qualité du résultat) et concurrent (pour le choix des options, des priorités, des
mises en forme) au sein des interactions de co-création, tentant d’avoir le pouvoir sur
l’autre sans être pleinement conscient de la force des enjeux.
Ces enjeux sont de plusieurs natures :
• systémique, provenant de la pression exercée par l’entreprise ;
• psychologique, liée à la constitution du matériel psychique : le cerveau a des particu-
larités de fonctionnement cognitif créant des perturbations émotionnelles, qui s’exa-
cerbent dans les situations où la créativité est sollicitée ;
• technique, liée au manque de compétences et d’outils en communication interperson-
nelle et en négociation pour de nombreux acteurs.
Pour le scrummaster non expérimenté, le défi est considérable. Il doit vivre plusieurs
changements simultanément : celui lié aux objectifs du projet – créer une nouvelle solu-
tion –, celui lié à l’acquisition d’une nouvelle méthodologie – abandonner la sécurité des
acquis méthodologiques anciens et entrer dans l’expérimentation d’une nouvelle manière
de conduire les opérations de façon beaucoup plus interactive –, et enfin, celui lié à la
conduite de ce type de projet – être capable d’adopter un comportement managérial tout
en agilité (ou souplesse) relationnelle !
Pour le scrummaster expérimenté, le défi reste conséquent. À chaque fois, il doit mettre
en mouvement une nouvelle équipe constituée de personnes plus ou moins aguerries à
la co-création et gérer quotidiennement les tensions et les doutes inhérents à ce type de
processus dans un environnement en perpétuelle évolution.
Dans son ouvrage Gestion de projet agile, Véronique Messager a posé les bases des
connaissances méthodologiques nécessaires aux équipes agiles. Elle propose aujourd’hui
le complément indispensable à l’adoption d’une posture relationnelle agile pour les
membres de ces équipes. La double compétence qu’elle offre ainsi aux professionnels
prend efficacement en compte la complémentarité des savoirs techniques et des métho-
dologies, et les attitudes adaptées à la mise en performance des compétences humaines.
Bien qu’ayant appris à travailler seul, il suffirait à chacun d’entre nous de se réunir en
équipe pour savoir collaborer et co-élaborer de nouvelles solutions innovantes ! Cette
croyance est largement répandue. La coopération est pourtant un sport exigeant. Créer
à plusieurs permet de trouver des solutions mieux adaptées à la complexité des enjeux,
mais engendre des tensions et des conflits susceptibles de nuire à la production d’idées
nouvelles. Pour travailler avec les autres de façon productive, il vaut mieux avoir appris
les particularités des différents types de comportements et savoir interagir de façon pro-
ductive.
Véronique Messager guide les coéquipiers sur les points clés de cette compétence : être
capable d’accepter les différences de perceptions et de besoins relationnels. Savoir intera-
gir avec autrui exige que les acteurs acceptent les différences comportementales et soient
à même de s’adapter à cette réalité, sans nier leurs propres besoins.
Le contexte de l’agilité crée une condition favorable et une difficulté particulière. Conduire
un processus fondé sur l’essai-erreur est plus naturel pour l’esprit humain que chercher à
tout définir à l’avance. Cependant, ce type de processus peut s’avérer anxiogène pour des
personnes inquiètes de garantir une performance à toute épreuve, les mettant ainsi sous
stress. Les méthodes agiles posent le défi du droit au tâtonnement. La créativité poten-
tielle issue de ce type de travail est remarquable. Ce tâtonnement permet de construire
de nouvelles représentations, d’élaborer en expérimentant, de finaliser en utilisant. Il n’y
a pas mieux pour un cerveau humain, car il est plus imaginatif quand il a le droit d’explo-
rer que quand il vise la maîtrise du résultat à tout prix. Quand il cherche à contrôler sa
production, il entre dans un processus d’exclusion de ce qui lui semble incertain. Autant
dire qu’il se prive de créativité et cadenasse l’imagination.
Véronique Messager donne aux scrummasters un accès aux outils et à la posture du
coach, qui ont été développés pour permettre aux personnes de donner le meilleur d’elles-
mêmes. Elle apporte aux acteurs de projets agiles les moyens de prendre en compte la
complexité humaine, de créer les conditions managériales propices à la production col-
lective, et de mettre en place des ambiances et les conditions de confiance qui incitent
chacun à se dépasser.
Elle rappelle que, pour conduire un processus agile, il ne suffit pas d’une méthode, il faut
aussi de l’agilité dans la posture managériale et dans les relations entre les coéquipiers.
Elle donne à chacun la possibilité de s’améliorer dans ce domaine de compétence.
Bernadette Lecerf-Thomas1
Superviseur en coaching d’organisation
Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
Quels sont les objectifs de l’ouvrage ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
À qui l’ouvrage est-il destiné ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
Comment l’ouvrage est-il organisé ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
Comment lire cet ouvrage ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
À propos de l’auteur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
Première partie
CHAPITRE 1
Valeurs agiles et comportements associés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
Valeurs et pratiques agiles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
Fonctionnement d’une équipe agile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
Management d’une équipe agile. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
Comportements attendus. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
CHAPITRE 2
Qu’observe-t-on en réalité ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
Équipe Alpha. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Le contexte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
La demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Vu et entendu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Équipe Bêta . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
Le contexte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
La demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
Vu et entendu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
Équipe Gamma . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
Le contexte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
La demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
Vu et entendu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
Réalité et comportements observés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
CHAPITRE 3
Comment expliquer ce qui se passe ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
Le changement est vécu comme une menace. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
Les changements induits. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
Le mécanisme de l’homéostasie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
Un passage obligé : le renoncement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
Nous sommes des êtres d’émotions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
Quelles sont nos émotions ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
La peur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
L’émotion est notre GPS interne. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
Nos freins personnels : les messages contraignants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
Conséquences sur nos comportements. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
L’absence de confiance. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
Conséquences sur nos comportements. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
Deuxième partie
Initier le changement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
CHAPITRE 4
Créer un cadre contractuel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
L’entretien préliminaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
La grille RPBDC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
La demande et l’objectif de coaching . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
La demande de coaching . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
L’objectif du coaching. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
La demande de coaching prescrit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
La demande ambiguë ou composite. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
Accepter ou non la mission ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
CHAPITRE 5
Responsabiliser les acteurs du changement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
Prendre conscience. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
S’autoévaluer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
Accueillir ses émotions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
Décider de changer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62
Un nombre critique de volontaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62
Des comportements inadaptés qu’il faut changer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
Désapprendre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
CHAPITRE 6
Faciliter le processus de désapprentissage/apprentissage . . . . . . . . . . . . . . . 69
Le coach est un miroir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
Le coach est en position basse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
Le coach est un facilitateur. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
Troisième partie
CHAPITRE 7
Créer un cadre sécurisé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
Un cadre où la dimension humaine est prise en compte. . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
Un espace où l’on peut exprimer qui l’on est . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
Un espace où l’on se connaît. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
Un cadre où l’on a confiance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84
Comment créer la confiance ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
Quels sont les bienfaits de la confiance ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
Les cadres d’intervention du scrummaster . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92
CHAPITRE 8
Maîtriser des outils et des techniques de coach. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
La synchronisation ou « check-in » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
Pourquoi se synchroniser ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
L’éclairage de la Process Communication. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
La synchronisation verbale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96
L’empathie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
L’écoute active. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100
La reformulation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
L’art du questionnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102
Le silence . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 104
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106
Quatrième partie
CHAPITRE 9
Comment l’équipe se constitue-t-elle ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111
Les étapes de constitution de l’équipe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112
À quelle étape se situe l’équipe ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116
CHAPITRE 10
Création et structuration. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117
Définir une vision commune . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117
Pourquoi partager une vision ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118
Qu’est-ce que la vision ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118
Comment élaborer la vision ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119
Quels sont les bénéfices pour l’équipe ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123
Préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124
Déterminer les rôles et responsabilités. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124
Fixer les règles du jeu. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 129
CHAPITRE 11
Confrontations et tensions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131
Les premières tensions. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131
CHAPITRE 12
Régulation et normalisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
Améliorer le processus. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155
Ajuster les relations. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157
Repérer les attitudes « écoutricides » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157
Métacommuniquer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158
Accepter le feedback de l’autre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160
Développer l’esprit d’équipe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164
CHAPITRE 13
Synergie et performance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165
Une équipe performante. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166
Autonomie et auto-organisation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166
Responsabilité et sens de l’engagement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169
Intelligence collective . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172
Plaisir et bien-être . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 176
CHAPITRE 14
Dissolution et séparation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179
Le traumatisme de la séparation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179
Vivre ensemble les derniers instants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
Le rôle protecteur du coach . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181
Cinquième partie
CHAPITRE 15
Pourquoi coacher un scrummaster ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185
Qui est le scrummaster ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185
Quelles sont ses compétences ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185
Quels sont ses besoins en coaching ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 186
CHAPITRE 16
Scrummaster, un autre style de leadership . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187
Au service de l’équipe. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188
Et vous, quel est votre style de leadership ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191
Les questions à se poser. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191
Analysez vos résultats. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 198
CHAPITRE 17
Aborder son propre changement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201
Pas à pas, sur la pyramide de Dilts. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 202
Être congruent. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204
Définir son contrat d’évolution personnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206
CHAPITRE 18
« En tant que scrummaster, je veux
développer mes qualités d’écoute ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209
Écouter plus. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 210
Écouter mieux. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 214
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217
CHAPITRE 19
« En tant que scrummaster, je veux
trouver le bon positionnement vis-à-vis de l’équipe ». . . . . . . . . . . . . . . . . 219
Adopter une position basse. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 220
Apprendre à déléguer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221
CHAPITRE 20
« En tant que scrummaster, je veux
développer mon leadership » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 235
Développer sa capacité d’influence. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 235
Donner du sens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 236
Inspirer confiance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237
Motiver ses coéquipiers. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239
La finalité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239
La maîtrise. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 239
Le code SACRÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 240
Obtenir l’engagement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 244
Le rôle de notre « joueur intérieur ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 245
La théorie du sandwich ou les trois lois de l’entraîneur. . . . . . . . . . . . . . . . . . 245
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 247
CHAPITRE 21
« En tant que scrummaster, je veux
apprendre à animer les cérémonies agiles » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249
Les constats et les dysfonctionnements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 250
O = Objectif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
La solution globale OPALE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251
P = Participants. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 252
A = Agenda. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 254
L = Livrable(s) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 255
E = Environnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 255
Animer efficacement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 256
Préparer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 256
Accueillir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 256
Animer. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 259
Gérer les situations difficiles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 259
Évaluer et clore . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 260
Ce que nous avons appris. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262
Épilogue. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
Équipe Alpha. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
Rappel du contexte d’intervention et de la demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . 265
Mission effectivement menée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
Résultats visibles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 265
Équipe Bêta . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 266
Rappel du contexte d’intervention et de la demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . 266
Mission effectivement menée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 266
Résultats visibles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 267
Équipe Gamma . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 267
Rappel du contexte d’intervention et de la demande officielle. . . . . . . . . . . . . . . 267
Mission effectivement menée. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 268
Résultats visibles. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 268
Conclusion. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 269
Doit-on former tous les managers ou leaders d’équipe
au coaching ou bien faire appel à un coach externe ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 269
Dans quelle configuration faire appel à un coach externe ?
Y a-t-il une mission de coaching type ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271
Et dans le cadre d’une transformation globale ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 272
Postface. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 275
ANNEXE A
Les outils du coach . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 277
ANNEXE B
Manifeste Agile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 281
Manifeste pour le développement Agile de logiciels. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 281
Principes sous-jacents au manifeste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 282
ANNEXE C
Check-list d’Henri Kniberg. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 285
Check-list Scrum non officielle d’Henri Kniberg. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 285
ANNEXE D
Glossaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 289
ANNEXE E
Bibliographie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 293
Coaching. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 293
Gestion du changement. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 294
Leadership, management. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 294
Développement personnel, Process Communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 295
Méthodes agiles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 296
Index. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 297
J’ai compris l’intérêt d’introduire la pratique du coaching dans mon domaine d’activités,
la conduite de projets en mode agile, dès 20071. En effet, le lien avec l’humanisme des
méthodes agiles m’est apparu évident : nous sommes des êtres d’émotions avant d’être
développeurs, business analysts, chefs de projet, scrummasters ou product owners. Ce
n’est d’ailleurs pas par hasard que le Manifeste Agile2 met en avant sa première valeur :
« Priorité aux interactions entre les individus sur les processus et les outils. »
J’ai alors ressenti la nécessité de revisiter la façon dont j’accompagnais mes équipes pro-
jets : non plus en chef de projet classique mais en coach, non plus en experte mais en
facilitateur.
Aujourd’hui, avec cette troisième casquette – les deux autres étant celles de consultante
et de formatrice –, je me définis comme un « agent du changement », dans un contexte
d’évolution méthodologique et culturelle, que représente une transformation agile.
Aborder une transformation agile, c’est découvrir les méthodes agiles (valeurs, principes,
philosophie) et mettre en place une nouvelle organisation, de nouvelles pratiques et de
nouveaux outils ; c’est aussi apprendre à travailler et à communiquer différemment… Une
transformation agile constitue donc plusieurs transformations en parallèle (figure 0-1).
Figure 0-1
Les transformations
agiles
Acquisition de nouveaux savoirs
Transformation agile
Figure 0-2
Les différentes Organisation
échelles
d’observation Management
du changement
Équipe
Individu
Dès lors que l’on introduit le concept de changement, on lui associe souvent les termes
« conduite » ou « accompagnement », ce qui laisse entendre que le changement doit être
accompagné. Plus précisément, ceux qui doivent l’être sont les individus, les équipes, les
managers et les organisations vivant ce changement. Peuvent alors intervenir accompa-
gnants et facilitateurs chargés de rendre la transformation effective, avec une démarche
adaptée à chacun des niveaux de l’échelle.
Cet ouvrage est un guide de la conduite du changement dans le contexte d’une transfor-
mation agile, avec mon point de vue de coach : cela signifie que je n’aborde pas tous les
aspects d’une transformation (formation, déploiement d’outils, mise en place des pra-
tiques agiles…). Certains diront que la description du coaching agile qui est proposée ici
est incomplète, parce que bien plus large en réalité… Peut-être. Mon parti pris, ici, est de
décrire la conduite d’une transformation agile sous l’angle du coaching exclusivement,
afin de bien faire comprendre au lecteur la spécificité du métier et ses bénéfices.
Quant aux grilles de lecture proposées, elles aideront chacun à mieux saisir la dimension
humaine d’une transformation et à comprendre ce qui se passe sur le plan des relations
interpersonnelles, souvent difficiles à décoder.
L’objectif ultime est, bien entendu, de contribuer à la réussite des projets en permettant
à chaque individu d’être pleinement acteur, responsable, engagé voire épanoui dans ses
missions.
– peut-être pour certains – comment le changement est vécu « sur le terrain », ils pour-
ront ainsi mettre en place les rouages adaptés au fonctionnement optimal des équipes
agiles.
• Enfin, certains coachs professionnels pourront y trouver une application illustrée des
techniques de coaching dans un contexte particulier.
Les outils de coaching présentés sont nombreux (il y en a plus de 40) : concepts, grilles de
lecture, trucs et astuces, questionnaires, guides… (Ils sont signalés par un pictogramme
représentant des outils en marge du texte.) Tous ne sont évidemment pas utilisables sys-
tématiquement. Il reviendra à chacun, en fonction du contexte et des acteurs impliqués,
mais aussi en accord avec sa propre sensibilité, de retenir ceux qui paraissent le plus
appropriés. Et puis, il faut laisser une part belle à la spontanéité des échanges, au natu-
rel de la relation qui s’établit entre le coach et le coaché, sans qu’il y ait nécessairement
besoin d’un outillage particulier.
Prérequis
Un postulat de départ, dans cet ouvrage, est que les pratiques d’ingénierie et organisa-
tionnelles des méthodes agiles sont connues du lecteur. Si tel n’était pas le cas, je l’invite
à lire mon premier ouvrage :
Véronique Messager Rota, Gestion de projet agile avec Scrum, Lean, eXtreme Program-
ming…, Eyrolles, 3e édition, 2010
Cher lecteur, nous savons tous que dans une transformation agile, l’agilité n’est pas un
objectif en soi ; c’est le chemin pour y parvenir qui est fondamental, le coach étant le
compagnon de route sur ce chemin.
Alors, je vous propose de parcourir, dans ces pages, un petit bout du chemin ensemble.
Bonne lecture !
À propos de l’auteur
Coach certifiée HEC, accréditée Process Com, Véronique Messager accompagne, depuis
plus de quinze ans, des équipes projet et des organisations en phase de transition. Chaque
mission, chaque projet, chaque équipe sont uniques parce que chaque personne, acteur de
ces projets, est unique et vit la transition de façon spécifique ; c’est pourquoi la prise en
compte de la dimension humaine est essentielle dans l’approche proposée par Véronique
à ses clients. Outre un support organisationnel et méthodologique, notamment dans la
mise en place des méthodes et pratiques agiles, elle leur propose surtout un accompa-
gnement personnalisé de type coaching, afin de faciliter l’adoption des bons réflexes
comportementaux.
Certifiée scrummaster, Véronique Messager est également l’auteur de Gestion de projet
agile, paru aux éditions Eyrolles (3e édition, 2010).
Remerciements
S’engager dans la rédaction d’un ouvrage n’est pas un acte léger ; durant quelques mois,
en ce qui me concerne, rien n’a autant mobilisé mon temps, mes pensées, mon énergie…
C’est donc avec beaucoup de gratitude que je remercie, d’abord, ceux qui m’entourent,
qui ont supporté cette indisponibilité passagère et qui m’ont soutenue.
Sans le groupe Eyrolles, ce projet n’aurait sans doute pas abouti aussi vite ; merci donc à
Karine Joly, éditrice du secteur informatique, qui m’a, une nouvelle fois, fait confiance.
Je suis également infiniment reconnaissante à mes relecteurs ; avec justesse et bienveil-
lance, ils ont pratiqué l’art du feedback constructif, en me poussant toujours plus loin
dans la recherche de la qualité et de la clarté des propos.
Merci à mon amie coach Magali Baton3 ; merci à mes confrères Laurent Morisseau4 et
Arnaud Villenave… et une mention spéciale pour Christophe Addinquy5, fidèle relecteur
depuis le premier ouvrage et toujours aussi intraitable !
Merci à Laurent Sarrazin, responsable du Centre Agile de SG-CIB (BFI de la Société
Générale) pour m’avoir proposé le concours du BookClub qu’il co-anime avec Jean-
Claude Grosjean6 ; vos retours ont été si précieux. Merci donc à Myriam Roux, Émilie
Leducq, Gilles Philippart et Jean-Marc Decouleur.
Je ne peux oublier de citer mes confrères coachs (souvenir de Grenoble avec Madeleine
Zalkind, Véronique Brenner, Patrick Le Go, Michel Cezon et Joël Conti) ni Fabrice Ai-
metti, qui ont aimablement nourri ma réflexion sur le titre de l’ouvrage.
Je remercie Gilles Charest7 pour s’être prêté à l’exercice de l’interview sur la sociocratie,
Romain Vignes pour son témoignage, Yves Blanc, Gérard Collignon et Michaël Aguilar,
pour m’avoir autorisée à faire référence à leurs outils que j’utilise régulièrement dans mes
missions.
Merci, enfin, à deux femmes talentueuses, qui ont accepté spontanément de rédiger une
préface et une postface, associant ainsi leurs noms à mon projet : merci à Bernadette
Lecerf-Thomas et à Françoise Engrand.
3. http://www.seikacoaching.com
4. Auteur de Kanban pour l’IT, Dunod, 2012
5. http://addinquy.tumblr.com
6. http://www.qualitystreet.fr
7. http:/www.sociogest.ca
Le contexte d’une
transformation agile
Les méthodes agiles1 véhiculent des valeurs qui sont censées
induire des pratiques et des comportements collaboratifs. Or,
l’expérience sur le terrain montre que la réalité est souvent diffé-
rente de ce qui est décrit dans la littérature : en effet, les compor-
tements observés ne sont pas toujours ceux attendus.
Pourquoi ? Parce que l’introduction de nouvelles pratiques col-
laboratives et managériales implique, en premier lieu, certains
changements individuels. Cela engendre des peurs, amplifiées
dans un contexte où la confiance ne règne pas toujours entre les
membres d’une même équipe ; et nos freins personnels ralen-
tissent voire paralysent le processus d’adaptation qui devrait se
mettre en place.
L’agilité met en avant des valeurs et des principes humanistes, ainsi que de nombreuses
pratiques collaboratives ; les comportements attendus restituent une image d’Épinal
d’équipes soudées, auto-organisées, engagées, solidaires…
Étroite collaboration
Cette collaboration est nécessaire à l’équipe, notamment pour qu’elle puisse définir,
en toute autonomie, son « processus de fabrication », le « comment » (par rapport au
« quoi » exprimé par le client ou son représentant, le product owner1) ; la synergie et la
complémentarité entre les membres donnent à ces derniers cette capacité à déterminer
leur organisation et leur mode de fonctionnement. Plus précisément, lors du sprint plan-
ning meeting2, l’ensemble des coéquipiers découpe les fonctionnalités à développer en
tâches, estime celles-ci et se les répartit.
Engagement
En contrepartie de cet espace de liberté pour s’autogérer, l’équipe agile est responsable du
résultat sur lequel elle s’engage de façon collective. Cet engagement ne porte que sur le
périmètre d’un sprint ; il est possible parce que l’équipe évolue dans un cadre collaboratif
qui favorise sa performance et parce qu’elle est propriétaire de son processus.
En cas de doute, l’équipe agile ose ; elle accepte de ne pas toujours tout savoir ou tout
contrôler pour avancer. Elle bénéfice d’un droit à l’erreur, donné par le management, qui
favorise l’apprentissage.
Amélioration continue
L’équipe agile enclenche, dès le démarrage, un mécanisme d’amélioration continue, afin
d’ajuster au plus tôt son processus de fabrication, de rôder ses pratiques et de réguler ses
interactions ; cela lui donne une forte adaptabilité.
Les pratiques collaboratives fluidifient la communication entre les membres et vis-à-vis
des acteurs externes, et elles évitent les situations de blocage grâce à l’entraide et la soli-
darité entre coéquipiers : cela garantit une forte disponibilité des membres.
Transparence
Enfin, l’équipe travaille en toute transparence : l’avancement des tâches de chacun ou du
projet est connu de tous et communiqué quotidiennement.
Comportements attendus
Qu’attend-on concrètement des membres d’une équipe agile et de son leader, en termes
de comportements associés aux valeurs véhiculées ?
Reprenons ces valeurs et ces pratiques (tableau 1-1).3
Tableau 1-1 Valeurs agiles et comportements attendus
3. Le daily stand-up meeting ou scrum est une réunion courte (quinze minutes) quotidienne pour faire le
point sur l’avancement des tâches. Le protocole veut que l’on se tienne debout en cercle, pour éviter qu’elle
ne dure trop longtemps et pour que chacun communique avec l’ensemble des coéquipiers.
Autonomie Chacun profite de cette autonomie pour prendre des initiatives, proposer
des solutions, innover, sans attendre passivement les directives du chef.
Chaque membre est proactif.
Sens de l’engagement Chaque membre est soucieux de respecter les décisions prises ensemble,
notamment vis-à-vis du client, sur le résultat attendu. Tout est mis en œuvre
pour honorer le contrat. Il n’y a pas de situation de blocage. Et tous parti-
cipent activement au daily stand-up meeting, qui se tient chaque jour pour
s’assurer que l’engagement sera tenu.
Droit à l’erreur Prendre des risques, innover, itérer, apprendre constituent les fondements
d’une approche agile. Chacun accepte de se tromper, potentiellement,
puisque les erreurs ne sont ni jugées ni sanctionnées. En effet, sur des
cycles courts, les erreurs ont moins de conséquences. Tous apprécient de
s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue et voient les rétros-
pectives4 comme une opportunité de corriger. Ce qui est important, c’est
apprendre de ses erreurs.
Apprentissage Chaque membre de l’équipe accepte de démarrer sans tout maîtriser, avec
une part d’inconnu. L’apprentissage fait partie du travail quotidien, par la dé-
couverte, l’autoformation, la programmation en binôme (pair-programming)
ou le transfert de compétences entre membres.
Transparence Chacun communique quotidiennement et spontanément son estimation du
travail restant à faire, sans se sentir contrôlé ; personne n’hésite à alerter ses
coéquipiers sur un obstacle rencontré, y compris une difficulté personnelle.
Adaptabilité Le changement est accepté, les remises en question fréquentes et indo-
lores, puisqu’elles ne portent pas sur les personnes.
Exemplarité Porteur lui-même des valeurs et principes agiles, le manager sait les par-
tager et s’assure de leur respect et de leur bonne application. Il fait preuve
d’exemplarité.
Courage Les membres de l’équipe ont du courage pour accepter de démarrer un pro-
jet sans avoir tous les éléments, tout en sachant que l’on devra sans doute
défaire, refaire, améliorer, adapter ; il leur en faut pour accepter les prises de
risques les remises en question, la transparence, l’appropriation collective
du produit…
Respect Il leur faudra également du respect, les uns envers les autres et pour le
travail de leurs coéquipiers. Le manager qui délègue la responsabilité à son
équipe fait preuve de respect à son égard.
Disponibilité Elle est particulièrement vraie pour le manager, « leveur d’obstacles », dont
le rôle est dédié à son équipe pour l’aider à progresser.
Note
Cette liste n’est pas exhaustive. 4
4. Une rétrospective est une réunion en fin de sprint ou de release pour dresser le bilan intermédiaire et voir
comment on peut améliorer le fonctionnement de l’équipe. Une rétrospective est également organisée à la
fin du projet.
Afin d’illustrer tout ce qui suit, j’aimerais vous raconter trois histoires. À travers ces
trois instantanés de trois contextes différents, nous découvrirons que les comportements
observés ne sont pas toujours ceux auxquels on s’attend dès lors qu’on s’engage dans une
transformation agile.
Précision
Les personnages et les situations de ces trois récits sont purement fictifs ; cependant,
toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé
n’est pas fortuite.
☞ Aide
Un récapitulatif de ces trois exemples (caractéristiques de chaque équipe, objectifs, ac-
teurs, etc.) est présenté en troisième de couverture, afin que vous puissiez y avoir accès
facilement tout au long de la lecture de cet ouvrage.
Équipe Alpha
Le contexte
Patrick a 44 ans ; il est le scrummaster d’une équipe de sept personnes. Sa société a
décidé de s’engager dans une transformation agile il y a neuf mois.
Patrick travaille dans cette société depuis plus de dix ans ; il a une double compétence
technique et fonctionnelle, et une certaine autorité naturelle. C’est un « gaillard » impo-
sant, jovial, qui s’exprime avec force et vigueur.
Le responsable Qualité & Méthodes, à l’origine de l’orientation vers l’agilité, considère que
Patrick n’exerce pas de façon optimale ses nouvelles fonctions, en dépit d’une formation
certifiante de scrummaster. Il considère que les membres de l’équipe de Patrick sont peu
autonomes, fuient les responsabilités et ont du mal à s’engager sur des livraisons à date fixe.
La demande officielle
Le responsable Qualité & Méthodes et Patrick me confient la mission d’amener l’équipe
à davantage d’implication, de responsabilité et d’engagement.
Sans a priori, je propose d’assister – en observatrice – à quelques cérémonies agiles (daily
stand-up meeting, sprint planning meeting, rétrospective) et de mener, en parallèle, un
entretien avec chaque membre de l’équipe Alpha.
Je proposerai ensuite l’accompagnement personnalisé de Patrick.
Vu et entendu
Verbatim
« Pourquoi nous demander des estimations ? C’est bien le rôle du chef de projet, non ? »
(développeur)
« On vous demande des estimations, sans savoir vraiment ce qu’il y a à faire ; et puis
après, on vous tape sur les doigts si vous vous êtes trompé. » (développeur)
« C’est au chef de projet d’assumer ; moi, je n’ai pas sa paie ! » (développeur)
« On est contrôlé tous les jours ; je ne comprends pas pourquoi on ne nous fait pas
confiance. » (développeur)
« À quoi ça sert, ces rétrospectives ? On n’est pas là pour se poser des questions méta-
physiques. En plus, on nous répète tout le temps de nous secouer pour livrer plus vite ;
alors, ce n’est pas une perte de temps ça ? » (développeur)
« Heureusement que j’ai ce background technique, sinon je ne sais pas comment ils
feraient… » (scrummaster)
« Avant, on ne se posait pas la question de savoir qui était responsable ; c’était le chef
de projet et ça marchait comme sur des roulettes. » (scrummaster)
Ce que j’ai vu
• J’assiste à un release planning meeting1 : les membres de l’équipe doivent évaluer le ni-
veau de complexité des user stories du product backlog2 pour les ventiler sur les quatre
sprints3 de la release 4 . Tous les prétextes sont invoqués pour ne pas donner d’estima-
tion. Le scrummaster finit par proposer un chiffre, validé par les membres de l’équipe.
• J’observe que Patrick est souvent sollicité, pour ci, pour ça ; il semble incontournable,
compte tenu de son ancienneté et de ses compétences. Il est ravi, d’ailleurs, de pouvoir
aider les membres de son équipe.
• Il est également très souvent appelé par la direction pour rendre compte de l’avan-
cement ; il redescend généralement préoccupé puis s’en prend systématiquement à
l’équipe pour qu’elle « se ressaisisse ». Des contrordres modifient souvent l’organisation
du travail.
• Deux ou trois membres sont absents à certaines cérémonies. En fait, des développeurs
travaillent sur deux, voire trois projets en même temps. Je découvre que la direction
préempte facilement les ressources pour faire face aux priorités changeantes.
• J’assiste à un daily Scrum meeting : je suis assez surprise de constater que chaque par-
ticipant s’adresse unilatéralement à Patrick, comme s’il avait des comptes à lui rendre.
Et pendant ce temps, les autres attendent passivement !
• Lors de la rétrospective, je constate peu de participation ; certains membres de l’équipe
s’échappent sur leur smartphone, d’autres, alternativement, répondent à leurs courriels
sur leur portable. Patrick peine à obtenir une réaction ou un retour d’expérience ; alors,
il résume les faits marquants de l’itération, propose une ou deux amélioration(s), rapi-
dement validée(s) par l’équipe. Puis la rétrospective est close.
• Patrick suit l’avancement de « son » projet sur un diagramme de Gantt.
1. Le release planning meeting est une réunion de planification d’une version majeure de l’application.
2. Le product backlog est la liste des exigences du client exprimées sous forme d’usages du système (user
stories).
3. Un sprint ou itération est une « tranche » de temps d’une durée de deux à trois semaines.
4. Une release est une version majeure de l’application, qui regroupe généralement plusieurs sprints.
Équipe Bêta
Le contexte
L’équipe Bêta compte cinq personnes, dont une scrummaster, Catherine. Tous ses
membres sont de brillants ingénieurs, chacun expert dans son domaine, y compris la
scrummaster.
Les méthodes agiles ont été introduites depuis plusieurs mois dans cette organisation ;
cette équipe, récemment constituée pour mener un projet de quelques mois, assez straté-
gique, applique donc cette approche.
Le directeur du projet, qui supervise ce projet et d’autres, constate cependant que l’équipe
n’en est pas vraiment une, puisque chaque membre travaille plutôt isolément. La perfor-
mance collective n’est par conséquent pas optimale. Elle pourrait sans doute être améliorée.
La demande officielle
Le directeur de projet suggère aux membres de l’équipe l’intervention d’un coach pour les
amener à mieux collaborer et tirer profit de l’efficacité du groupe.
Je propose, dans un premier temps, un entretien avec chacun des membres. Je proposerai,
ensuite, un accompagnement collectif de l’équipe.
Vu et entendu
Verbatim
« Pourquoi cette réunion debout chaque jour ? Je n’ai rien à faire des tâches des autres. »
(développeur)
« Je sais m’organiser tout seul, je n’ai pas besoin que d’autres m’aident à découper mes
tâches et les estiment à ma place. Et puis, je suis le seul à maîtriser cette technique. »
(développeur)
« Oui, on est une équipe agile, puisque toutes les compétences sont intégrées dans
l’équipe. » (scrummaster)
« Je n’ai pas envie de coder à deux ; je vais plus vite tout seul. » (développeur)
« Chacun son domaine ! » (développeur)
« On n’est pas obligé d’appliquer la méthode à la lettre… » (scrummaster)
« On ne comprend pas vraiment pourquoi on vous fait intervenir. » (développeurs)
Ce que j’ai vu
• Ma première observation lorsque j’arrive pour le premier entretien, c’est la grande concen-
tration des ingénieurs ; je suis frappée par l’ambiance laborieuse et le silence « assourdis-
sant » qui règne dans la salle : chacun est devant son écran, un casque sur la tête.
• Je constate qu’il n’y a pas de scrumboard5 pour visualiser l’avancement des tâches.
• À l’heure du déjeuner, la scrummaster peine à organiser un daily stand-up meeting qui
réunisse tout le monde. Elle-même est en retard par rapport à l’horaire annoncé. Un
second retardataire arrive au milieu de la réunion.
• J’apprends, par hasard, que la dernière livraison s’est mal déroulée, puisque aucun test
d’intégration n’avait été mené durant la précédente itération.
• La rétrospective n’a pas eu lieu, car il a fallu très rapidement trouver l’origine des bo-
gues et procéder d’urgence à une nouvelle livraison. Puis l’itération suivante a démarré.
Équipe Gamma
Le contexte
Cette troisième équipe n’est pas agile ; il s’agit d’un département Études & Développe-
ments dans une grande organisation, qui maintient des applications en production et gère
de nouveaux projets. Onze personnes composent cette équipe.
L’organisation est en train de mener une réflexion sur l’opportunité d’introduire des pra-
tiques agiles dans le processus de développement.
La demande officielle
Le responsable de l’équipe, Bruno, très en amont de la démarche et en prévention de
certaines résistances, souhaite s’entourer d’un coach pour anticiper les difficultés prévi-
sibles.
L’objectif est d’amorcer une transformation en prenant en considération les personnes qui
sont au cœur du processus.
Je propose de dresser un « état des lieux » et de mener une étude stratégique en intégrant
les facteurs humains. Cette intervention commence par un entretien avec chacun des
membres de l’équipe et avec leur interlocuteur marketing.
Vu et entendu
Verbatim
« Une nouvelle mode, ces méthodes agiles ! » (développeur)
« Je ne comprends pas pourquoi on veut tout changer, alors que ça ne marche pas si
mal, aujourd’hui. » (testeur)
« On voudrait nous faire porter le chapeau pour tous les dysfonctionnements ! Alors on
nous impose ces méthodes. » (développeur)
« Je crains que ce ne soit la prise de pouvoir assurée par les développeurs. » (marketing)
« Ca ne marchera jamais chez nous, ça. » (analyste)
« Je doute de la coopération au sein de cette équipe ; il y en a qui tirent toujours la cou-
verture à eux ! » (développeur)
« Qu’on nous laisse faire tranquillement notre boulot ; je le connais, cela fait dix ans que
je suis là. » (technicien)
« Je monterais bien en compétences sur d’autres techniques, mais ceux qui la maîtrisent
ne veulent pas la partager ; c’est comme si on les dépossédait de quelque chose ! » (déve-
loppeur)
Ce que j’ai vu
• Je vois peu de communication ouverte entre les membres de cette équipe. Je sens plutôt
des échanges « souterrains », en aparté ou sous forme de sous-entendus, a fortiori entre
l’équipe et le représentant marketing, et entre les membres de l’équipe et leur manager.
• Je note un décalage entre le manager de l’équipe, impatient, passionné, qui souhaite
avancer vite, et ses collaborateurs, plutôt réticents.
• Je ressens d’ailleurs une certaine méfiance à mon égard.
• Je constate que les personnes sont souvent interrompues par des demandes toujours
plus urgentes les unes que les autres de la part du centre de contacts clients.
• J’assiste à certaines de leurs réunions de travail et j’observe très peu d’écoute entre les
participants. Lorsqu’ils interviennent, j’ai l’impression qu’ils s’expriment sous contrôle
du manager.
• Je prends connaissance d’un conflit non réglé entre deux personnes : celui-ci pèse clai-
rement sur l’ambiance au sein de l’équipe.
• Un jeune ingénieur, Nicolas, vient d’être recruté au sein de l’équipe (il y a deux mois) ;
visiblement, celui-ci est peu intégré par ses coéquipiers, excepté par Sylvie, une analyste
fonctionnelle. Souvent en retrait, il est peu sollicité pour donner un avis. Lui semble favo-
rable à une évolution du processus de développement ; il est donc « suspect ».
Ces trois situations feront l’objet d’une analyse et constitueront le support pour la mise en
œuvre d’outils de coaching (d’équipe ou individuel) tout au long des pages de cet ouvrage.
Malentendu
Souvent, j’entends des clients affirmer qu’ils ont adopté l’agilité. Ils sont persuadés de la
pratiquer, mais il s’agit en réalité de ScrumButs6 : une méthode Scrum aménagée, mais
dénaturant considérablement la méthode originale. Les pratiques ne sont alors pas cor-
rectement implémentées ; a fortiori, les (nouveaux) comportements associés ne sont pas
adoptés. D’où l’intérêt de doubler une intervention auprès des personnes (coach) par un
audit méthodologique (expertise).
6. http://www.scrum.org/scrumbut
Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons
pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles.
Sénèque, philosophe latin
Quels sont ces changements ? Quelles sont les nouvelles pratiques qui apparaissent ? Que
faut-il faire évoluer dans les comportements ?
Pour l’équipe
• Constituer une équipe intégrée, multidisciplinaire et travailler avec d’autres corps de métier.
• Accepter une prise de risque (notamment par l’introduction du développement itératif).
• S’engager sur un résultat collectif, à partir d’estimations fournies par l’équipe ; par
conséquent, introduire une interdépendance entre les coéquipiers.
• Prendre des décisions de façon autonome et responsable.
• Accepter le droit à l’erreur pour soi, mais aussi pour les autres, sans condamner.
• Être transparent sur l’avancement de son travail, quotidiennement.
• S’inscrire dans une démarche d’amélioration continue.
• Être solidaire de ses coéquipiers.
• Adopter une communication sincère et honnête excluant les jeux politiques et les calculs.
Les hommes doivent pouvoir être authentiques, à l’aise, exprimer spontanément une dif-
ficulté, livrer une préoccupation ou manifester leur désaccord avec une décision prise.
• Etc.
Pour le leader
• Développer des qualités d’écoute liées à la nature des échanges facilitant l’expression
de ressentis ; développer son sens de l’empathie pour des problématiques relationnelles
et moins techniques.
• Lâcher son expertise technique et passer à un autre métier pour favoriser les interac-
tions au sein de l’équipe, et entre l’équipe et les interlocuteurs extérieurs ; « d’apporteur
de solutions » ou donneur d’ordres, il devient « leveur d’obstacles ». Il doit accepter de
ne plus « faire » mais de « faire faire ».
• Déléguer et accepter le droit à l’erreur, faire preuve d’humilité pour soi-même, marquer
la confiance et le respect envers ses collaborateurs.
• Garantir un processus, la bonne application de la méthode, sans décider des pratiques
à adopter.
• Au-delà de sa propre évolution personnelle, accompagner et soutenir la transformation
de son équipe en facilitateur et non en chef.
• Etc.
Ces changements ne sont que des exemples et ne constituent pas une liste définitive.
Synthèse
Tableau 3-1 Synthèse des changements induits
Figure 3-1
Positions face
au changement
80 %
10 % 10 %
Les résistances au changement : les indécis (la majorité) vont dans le sens de ceux qui ont le
plus d’influence ; il faut donc agir sur les extrêmes, pour qu’ils soient moteurs et promoteurs du
projet et que les opposants ne nuisent pas à ce dernier.
Le mécanisme de l’homéostasie
Lorsque nous sortons d’un bâtiment chauffé à 20 °C pour affronter le grand froid hiver-
nal avec -15 °C, se déclenche – sans que nous le maîtrisions – un mécanisme d’adaptation
à l’agression extérieure, qui s’appelle l’homéostasie.
C’est la capacité de l’organisme à maintenir un état de viabilité, à se protéger contre tout
ce qui menace son intégrité ou son équilibre. Et chacun réagit différemment au froid ;
certains s’adaptent rapidement, d’autres plus lentement, d’autres encore renonceront à
sortir, ne pouvant affronter ce trop gros écart.
La reconnaissance de son
expertise technique
Un rôle central gratifiant Une indépendance totale
d’« apporteur de solu- Son impatience motrice
L’exclusivité d’une expertise
tions »
Pour le et d’un savoir-faire Un certain confort lié à
manager Un certain paternalisme l’évitement des conflits
Une compétitivité entre
vis-à-vis de ses collabo-
membres
rateurs
Une certaine tranquillité
Des pratiques anciennes
de gestion et de contrôle
du projet
Comment les membres de ces équipes peuvent-ils renoncer à ce à quoi ils sont attachés,
consciemment ou inconsciemment ?
2 Colère 6 Projection
3 Marchandage
5 Rebond
4 Tristesse
La remise La
en question remobilisation
Ce processus de deuil3 sera vécu par chacun à un rythme qui lui est propre. Il comporte
sept étapes.
1. Il commence par le déni. On refuse la réalité : « Ce n’est pas possible, ce n’est pas le
moment, ce n’est pas pour nous. »
2. Puis vient la colère. On se révolte, on accuse, on en veut à tout le monde ; on cherche
« le coupable » à l’origine du changement.
3. Une phase de marchandage. Pour changer, il va falloir obtenir quelque chose : « Qu’ai-
je à y gagner ? »
La peur
Dans le cadre d’une transformation, les émotions sont encore plus aiguës. En particulier, la
peur, souvent non exprimée, est présente au quotidien sous forme de stress, de doute, d’an-
xiété, d’incertitude…, et sous forme plus violente, parfois, dans un contexte de transition.
Exemple
Revenons à nos trois équipes Alpha, Bêta et Gamma. Après avoir recensé les changements
induits pour les membres des équipes et leur leader, en général, citons à présent ce que
peuvent être leurs craintes (tableau 3-3).
Toutes ces peurs et d’autres encore renvoient à la peur de perdre. En effet, tant que l’on n’a
pas « gagné » en retour, que l’on n’a pas obtenu une compensation ou l’assurance d’une
issue avantageuse, la perte est difficile à vivre. On est au milieu du gué.
La perte sera d’autant plus lourde si elle renvoie à des événements similaires vécus dans
le passé, car nous mémorisons plus rapidement et plus durablement les épisodes doulou-
reux de notre vie.
Sans entrer dans la sphère privée de chacun, la prise en compte des émotions individuelles,
et en particulier des peurs, nous aide dans la compréhension des comportements visibles.
Exemple
Illustrons notre propos : un leader annonce à son équipe l’introduction de méthodes agiles et
une nouvelle organisation. Un des membres de l’équipe objecte et exprime son scepticisme
ainsi : « Cela ne marchera pas chez nous et cela ne sert à rien ; c’est une nouvelle mode qui
ne durera pas. » Le leader reçoit (mal) cette objection, remarque le regard vindicatif de son
collaborateur, ressent des battements du cœur et sent monter sa température interne. Sa
perception de l’objection s’est transformée en émotion (de la colère ? De la peur ?), qui s’est
manifestée physiologiquement. Son analyse de la situation va influencer sa réaction : attaque
(agressivité), fuite (indifférence) ou repli (renoncement) et, par voie de conséquence, altérer la
qualité de sa relation avec ce contradicteur et les autres membres présents.
Autrement dit, si le leader analyse la réaction de son collaborateur comme une contestation
de sa décision ou comme une opposition, voire une remise en cause de son autorité ou
encore de sa personne, il y a de fortes chances pour que sa réponse soit inadaptée.
S’il analyse la réaction de son coéquipier comme l’expression possible d’une peur, sa ré-
ponse sera tout autre : « Je ne sais pas si ça durera. Essayons pour voir : recensons nos
besoins en formation, en accompagnement, fixons-nous des échéances… » Déjà, il a peut-
être (un peu) rassuré l’équipe.
Une émotion fait suite à une perception ou à une observation. Elle nous alerte en se
manifestant souvent par des signaux physiologiques (bouffées de chaleur, palpitations,
mains moites…). Elle précède une réaction de notre part, fondée sur notre analyse de
la situation, puis nous affichons un comportement particulier. À partir du moment où
ce comportement est visible – même s’il s’agit d’une absence de réaction –, il affecte le
niveau de qualité de la relation avec les autres (figure 3-3). Nos comportements sont les
manifestations visibles d’émotions souvent mal assumées ou non exprimées.
Figure 3-3
L’influence de nos Perception Émotion Réaction
Comportement
Relation
visible
émotions
En tant qu’indicateurs, nos émotions nous renseignent sur ce qui est « bon » pour nous.
Elles nous aident à mieux comprendre et à appréhender notre environnement, puisqu’elles
motivent directement l’action ou l’inaction.
Ainsi, nous verrons que nous avons intérêt à accueillir nos émotions, pour mieux les
« entendre » et mieux les exploiter.
Des freins personnels peuvent également entraver notre processus d’adaptation au chan-
gement.
• Fais plaisir : je dois faire plaisir pour être apprécié, je ne dois pas décevoir en refusant,
je ne dois pas dire non (« Si je ne réponds pas à sa demande, il va croire que je ne sers
à rien » ou « Ils vont être déçus »).
• Sois parfait : tout ce que je fais doit être parfait, je dois être irréprochable (« Il faut que
je contrôle tout » ou « Si je prends la parole, les autres vont me juger »).
• Sois fort : je dois me débrouiller seul, j’ai la capacité de tout gérer, je suis fort (« Si je de-
mande de l’aide, je perds ma crédibilité » ou « Ils n’ont qu’à se débrouiller tout seuls ! »).
• Fais un effort : il faut travailler dur, il faut transpirer pour mériter, je dois m’acharner
pour y arriver.
• Dépêche-toi : je vais y arriver si je me dépêche, je dois (me) mettre la pression.
Exemples
Prenons le cas de nos équipes Alpha, Bêta et Gamma.
Patrick, dans l’équipe Alpha, a probablement un message contraignant « Sois parfait » pour
tout (sur)contrôler et que rien ne lui échappe.
Parmi les développeurs de l’équipe Bêta, où l’individualisme est prédominant, le message
contraignant « Sois fort » doit vraisemblablement peser dans les relations : chacun se dé-
brouille, quitte à rester bloqué un certain temps sur un bogue, sans risquer d’apparaître faible
aux yeux des autres.
Pourquoi un membre de cette équipe dont le message contraignant serait « Sois parfait »
accepterait-il de travailler en mode itératif, de montrer un travail inachevé, imparfait, et de voir
ainsi sa compétence, voire sa légitimité contestées ?
Quant à notre manager de l’équipe Gamma, il pourrait être victime de son message contrai-
gnant « Dépêche-toi » : impatient de nature, il pourrait mettre la pression à ses collaborateurs
pour qu’ils s’adaptent vite aux nouvelles méthodes de travail !
L’absence de confiance
Pourquoi n’ose-t-on pas aborder les événements, les difficultés relationnelles ou les obs-
tacles rencontrés au quotidien sous un angle émotionnel ?
Au-delà du fait que nous sommes peu habitués dès l’enfance à nous exprimer sur ce
registre, on constate que le manque de confiance est le premier des dysfonctionnements
au sein des équipes.
Patrick Lencioni4 explique les conséquences nuisibles du manque de confiance au sein
d’une équipe (figure 3-4) : les membres ont une attitude autoprotectrice pour cacher leur
vulnérabilité, ce qui les amène à ajuster leur comportement et à masquer leurs difficultés.
Ceci crée un climat de tension, voire de méfiance, dans lequel tout le monde ne s’exprime
pas, par crainte du conflit (ou de simple désaccord). Si un conflit se déclenche, il est géné-
ralement mal géré : les échanges portent rarement sur les faits mais sur des réactions ou
des attaques personnelles.
La conséquence est que, si chaque membre de l’équipe n’a pu ou n’a pas osé s’exprimer, il
lui est particulièrement difficile de s’engager sur un objectif commun auquel il n’adhère
pas. Le manque d’engagement incite alors à fuir ses responsabilités et à considérer le
manager comme la seule autorité.
Dans ce cas, le « chacun pour soi » prédomine et l’on se laisse facilement détourner des
résultats.
Figure 3-4
Les dysfonctionnements
d’une équipe
Une posture de coach s’avère être la plus appropriée pour traiter ces problématiques
humaines. Le coach initie le changement en associant toutes les parties prenantes. C’est
l’objet de la deuxième partie.
Initier le changement
Initier le changement, c’est avant tout comprendre ce que ce
dernier représente pour chaque personne ; en effet, on ne peut
généraliser une démarche d’accompagnement, puisque chaque
individu appréhende le changement en fonction de sa personna-
lité, de son histoire, de son référentiel personnel et de son capital
émotionnel.
Accompagner le changement et, plus précisément, les personnes
qui le vivent, c’est écouter et faire preuve d’empathie, pour per-
mettre à chacun d’exprimer plus facilement la façon dont il ap-
préhende le changement et ses renoncements associés.
Pourquoi, dans ce contexte, faire appel à un coach ? Le coach
aide à adopter de nouveaux comportements : il amène la per-
sonne ou l’équipe coachée à prendre conscience de la nécessité
d’évoluer, lui propose de définir comment elle souhaite évoluer
et, enfin, l’accompagne dans son objectif de changement.
Voyons comment il intervient auprès des personnes ou des
équipes qu’il accompagne, dans un cadre contractuel qui fait
suite à une demande explicite. Découvrons aussi comment il
déclenche le processus de changement avec une posture bien
particulière.
Contexte
Nous nous situons davantage, ici, dans le cadre d’une mission d’accompagnement par
un coach externe ; néanmoins, les éléments et outils présentés dans ce chapitre peuvent
tout à fait aider le scrummaster à endosser la posture de coach vis-à-vis des membres
de son équipe. Ces entretiens peuvent se mener de façon plus informelle entre le scrum-
master et les membres de l’équipe : c’est le volet « leadership » de sa fonction.
L’entretien préliminaire
Avant d’aborder une démarche de coaching, un entretien préliminaire (ou plusieurs) est
nécessaire pour mieux cerner la demande du client et ses objectifs. C’est une forme de
diagnostic ou d’étude d’opportunité.
La grille RPBDC
Nous utilisons, pour cela, la grille d’entretien proposée par Vincent Lenhardt1, appelée
grille RPBDC, dont le sigle signifie : Réel, Problème, Besoin, Demande et Contrat. Cette
grille vise à recueillir quelques éléments prérequis pour cerner la demande du client et
comprendre son besoin pour mieux se positionner.
R Réel Quelle est la situation, le contexte du client ? Sa réalité ? Qui est concerné ?
Depuis quand ? Où ?
Ces questions visent à explorer la réalité du client, qui a parfois du mal à
clarifier sa vision, son analyse et, par conséquent, à identifier la solution à
son problème.
P Problème Quel est le problème ? En quoi la situation exposée est-elle un problème ?
Pour qui ? Quelles sont les conséquences ? Pourquoi le client n’arrive-t-il
pas à régler ce problème en particulier ? Quel est l’écart entre la situation
aujourd’hui et la situation voulue ?
Ce questionnement vise à amener le client à formuler clairement son prob-
lème ou à identifier un problème derrière le problème.
B Besoin Quel est le premier diagnostic ? Quel est le besoin ? Que faudrait-il faire ?
Cette étape peut être partagée ou pas avec le client, qui ne sait précisément
pas toujours quel est son besoin. S’il le savait, il ne ferait pas appel à un
coach !
D Demande Quel est le résultat attendu par le client ? Quelle est sa demande vis-à-vis
du coach ?
Au-delà du problème exposé, le client doit formuler clairement une demande
pour se (re)mettre en situation de responsabilité ou d’autonomie vis-à-vis du
coach.
C Contrat Quel processus est envisagé pour aborder le changement ? Quels sont les
rôles de chacun (coach et coaché) ?
Le contrat est l’aboutissement de ce processus de découverte et précède le
démarrage de l’accompagnement.
Lors de cet entretien, le coach cherche à mieux appréhender l’univers de son interlo-
cuteur. Son objectif est de mieux cerner la relation entre la personne ou l’équipe et sa
problématique (figure 4-1).
1. Vincent Lenhardt, Les responsables porteurs de sens, Insep Consulting Éditions, 3e édition, 2010
Figure 4-1
L’action du coach
scrummaster
Équipe
Alpha
Action
du coach
Coach : « Sur quel exemple vous appuyez-vous pour dire qu’ils fuient les responsabilités ? »
Patrick : « Je ne sais pas, moi, ils ne veulent pas s’engager, tout simplement. »
Coach : « S’engager sur quoi ? »
Patrick : « Sur tout. Si je ne suis pas là pour les pousser un peu… »
Coach : « Pousser à quoi ? »
Patrick : « Pour tout, ce n’est pas dans leur mode de fonctionnement. C’est tout. Ce sont des
assistés ! »
Dans cet exemple, on distingue trois éléments : Patrick le scrummaster, son équipe et la per-
ception ou l’analyse qu’il fait de son équipe. Le coach, dans sa compréhension du contexte,
ne s’intéresse pas davantage à l’équipe ; il ne cautionne pas l’analyse de Patrick, il ne cherche
pas à valider par lui-même la perception de Patrick. Il souhaite comprendre en quoi cette
équipe pose un problème à Patrick pour atteindre son objectif (rappel de la demande offi-
cielle : amener l’équipe à davantage d’implication, de responsabilité et d’engagement). Si
le coach ne s’intéresse qu’à l’équipe, le risque est de laisser Patrick penser qu’il ne peut
rien faire, que seule l’équipe doit changer. Or, en tant que leader, ses interactions avec son
équipe vont lui permettre de l’influencer et, peut-être, avec l’aide du coach, de la faire évoluer
(figure 4-1).
Le coach est le partenaire du coaché (Patrick, dans notre exemple) ; c’est lui qui va agir et
résoudre ainsi sa problématique, et non le coach, qui n’intervient pas à sa place.
Lors de cet entretien préliminaire, le coach repère les sabotages éventuels, conscients
ou inconscients, opposés par le coaché. C’est particulièrement le cas lorsque le coaché
n’a pas de demande vis-à-vis du coach et se voit imposer un entretien de coaching. Les
sabotages, souvent attachés à des croyances, rendent l’objectif du coaching difficile à
atteindre, voire impossible.
Exemple
Dans notre exemple, Patrick accepte de se faire coacher, mais ses sabotages (en résumé :
« Si je ne suis pas là, ils n’y arrivent pas ») empêchent sa progression vers l’objectif. II part
vaincu avant même d’avoir démarré !
La demande de coaching
Une demande de coaching est une demande d’aide ou d’accompagnement pour aller vers
un changement souhaité. Une demande explicite est donc indispensable pour orienter le
coaching (l’objectif) et formaliser un contrat d’évolution ou de changement.
Exemple
Dans l’exemple de l’équipe Alpha, la demande qui m’est formulée en tant que coach est
« d’amener l’équipe à davantage d’implication, de responsabilité et d’engagement ». Après
un ou deux entretiens préliminaires avec le scrummaster Patrick, nous finissons par déter-
miner son objectif de changement : le coaching a pour but de l’aider à trouver un autre po-
sitionnement par rapport à son équipe, à faire confiance à ses coéquipiers et à travailler
sur son « lâcher prise » technique pour déléguer davantage et développer ses capacités à
motiver. Ces objectifs sont validés par le responsable Qualité & Méthodes.
Ces entretiens auront permis de montrer que le changement initial doit provenir du scrum-
master lui-même, alors que l’on aurait pu spontanément vouloir coacher et intervenir auprès
de l’équipe.
☞ L’exemple du contrat d’évolution personnelle de Patrick est présenté au chapitre 17, dans
la cinquième partie.
L’objectif du coaching
Marcheur, il n’y a pas de chemin.
Le chemin se construit en marchant.
Antonio Machado
Cependant, l’objectif reste général, car il se peut qu’il évolue en cours de route. En effet,
le travail mené précisément lors des séances de coaching ou les événements parallèles
durant le projet amènent à préciser, parfois à ajuster l’objectif. Celui-ci n’est, en fait,
qu’une « porte d’entrée du coaching » 2.
De même que les besoins émergent au fil d’un projet et que les changements sont accueil-
lis favorablement (grâce aux retours ou feedback du client), l’objectif général de coaching
est évolutif : c’est la démarche de coaching elle-même qui fait émerger l’objectif. Par le
questionnement et l’effet miroir du coach (boucle de feedback), le « symptôme » auquel
on s’attache en premier se transforme en objectifs plus spécifiques au fil de l’eau. Tout
comme le principe de la sérendipité (le fait de trouver par hasard ce que l’on ne cherche
pas), la démarche de coaching peut être une aventure pleine de surprises, nécessitant des
recadrages permanents.
Exemple
L’objectif de Patrick est de travailler sur la délégation, la confiance et sur son « lâcher prise »
technique. La mission d’accompagnement de Patrick aura ouvert des voies nouvelles vers de
nouveaux axes de travail : sa propre confiance en soi, son besoin de reconnaissance et son
rapport à l’erreur – axes non identifiables de façon évidente au début.
Exemples
C’est le cas de nos deux équipes Alpha et Bêta : dans le premier cas, le responsable
Qualité & Méthodes demande un accompagnement du scrummaster, Patrick ; dans le
deuxième, c’est le directeur de projet qui prescrit un coaching pour l’équipe. Dans l’équipe
Alpha, le bénéficiaire accepte le coaching ; dans l’équipe Bêta, certains membres ne sont
ni demandeurs, ni favorables au coaching. Enfin, dans le cas de l’équipe Gamma, Bruno, le
patron du département Études & Développements formule une demande d’expertise et non
d’accompagnement.
Le directeur reçoit le coach et lui explique que, selon lui, le scrummaster n’a pas d’autorité,
qu’il doit développer son leadership pour « booster » les membres de l’équipe, qu’il a un style
de management trop « mou » et qu’il « se fait balader » par ses collaborateurs qui « se la
coulent douce ». Bref, la demande formulée au coach est d’« aider le scrummaster à être plus
ferme, assertif et autoritaire et influencer la productivité de l’équipe ».
Le coach rencontre le scrummaster, qui n’a pas connaissance des objectifs de ce coaching
et qui n’en voit, d’ailleurs, pas l’intérêt immédiat.
Que fait le coach, dans ce cas ?
Il entrevoit le risque de manipulation, si le scrummaster ne souhaite pas évoluer dans le sens
désiré par le directeur. Peut-être, après tout, que le scrummaster souhaite conserver son
style de management qui lui convient ?
Le coach organise un entretien préalable tripartite afin de définir un objectif commun officiel.
Le directeur doit expliquer clairement ses attentes vis-à-vis du scrummaster en termes d’évo-
lution, et le scrummaster doit clairement accepter ou refuser le coaching, en fonction de ses
objectifs personnels, dans ce contexte.
Le coach accepte ou refuse la mission.
Question au coach :
Comment convaincre ceux qui résistent ou s’opposent à une transformation agile
(ouvertement ou pas, d’ailleurs) ?
Par conséquent, une première étape de sécurisation à traiter par le coach est la rencontre
avec le prescripteur, d’une part, et avec le(s) bénéficiaire(s), d’autre part. Au cours de ces
entretiens préliminaires, le coach explore le contexte, l’origine de la demande, l’objectif
général du coaching et les changements attendus ; il mesure les enjeux si l’objectif n’est
pas atteint et il évalue la communauté de vision sur les objectifs entre prescripteur et
bénéficiaire(s).
À l’issue de ces entretiens, le coach et le(s) bénéficiaire(s) peuvent avoir développé un pre-
mier niveau de relation, et donc de confiance. Le coach s’assure que le(s) bénéficiaire(s)
est (sont) favorable(s) ou au moins non opposé(s) au coaching. Reste à s’entendre sur
l’objectif du coaching au cours d’une réunion tripartite de validation.
Figure 4-2
Ce que n’est pas Je vous
le coach n Un consultant
conseille de
mettre ça en
place…
Consultant Client
Je vous
enseigne les
connaissance
n Un formateur
de base
Formateur Client
D’où vient
votre
n Un psychothérapeute rapport à
l’autorité ?
Psychothérapeute Client
J’ai fait
ça…
n Un mentor
Essayez
Mentor
çà... Client
Si une demande de coaching agile exprimée par une organisation peut être ambiguë, elle
doit être explicitée ; le coach doit éclaircir cette demande pour savoir si elle entre dans
l’espace de coaching et/ou dans un autre espace.
Figure 4-3
Complémentarité
des facilitateurs oirs es
es
u r l n ts
e
sav Aid ortem
r t de teur) p h)
po
Ap (form
a com (coac
A Objectif de changement B
A pp
o
con rt de Ap p
s ort
(ex eils d’ex de reto
pe r
t) pé urs
(me rience
ntor
)
Malheureusement, l’usage intempestif du terme par les consultants experts ne milite pas
en faveur de cette complémentarité pourtant nécessaire et si bénéfique pour le client.
Les acteurs de l’accompagnement, eux-mêmes, entretiennent la confusion !
C’est le coaché qui doit être acteur de son propre changement et évoluer, pas le coach ;
même si le travail est une co-construction vers l’objectif.
Ainsi, le coach qui répond au moins un « non » à l’une des questions court un risque
dans lequel il entraîne le bénéficiaire ; il doit, dès lors, s’interroger sur l’opportunité de
démarrer cette mission.
dont il (elle) a besoin pour changer, le rôle du coach est de permettre au coaché d’accéder
à ses ressources.
Responsable du cadre
Le cadre est l’environnement dans lequel sont mis en place les conditions, les outils et les
techniques afin de rendre le changement possible. Le coach, en créant ce cadre, permet
au coaché de passer de l’intention à l’action. Le premier pas vers l’objectif est en effet
capital pour initier le changement, au travers d’actions concrètes, visibles et planifiées.
Le coach invite le coaché à exercer son « pouvoir ».
Lorsque le coach accompagne une équipe dans sa transformation agile (objectif), celle-
ci devra préciser sa demande d’aide : le coach a alors la responsabilité de mettre tout en
œuvre pour que cette équipe devienne ce qu’elle souhaite devenir et fonctionne selon
les modalités qu’elle a définies. Le coach n’apporte aucun avis sur l’objectif de l’équipe ;
en revanche, il s’engage à créer les conditions pour que l’équipe l’atteigne grâce aux
moyens, techniques et outils qu’il met à sa disposition. Par exemple, il veille à la qualité
des échanges entre les membres et intervient en tant que régulateur des tensions pos-
sibles. Ou bien il amène l’équipe à prendre du recul sur ses règles de fonctionnement et à
réévaluer leur adaptation à l’objectif visé. En aucun cas, il n’exprime un point de vue sur
le bien-fondé de telle ou telle règle. Il favorise ainsi la responsabilisation et l’autonomie
de l’équipe agile qu’il accompagne. Il n’est pas un expert, puisqu’il a une position basse.
Figure 4-4
Le rôle du coach : Puissance
les 3 P
Permission Protection
Puissance : le coach libère le potentiel de son coaché pour qu’il accède à sa pleine puis-
sance. Grâce à un sentiment de confiance et de sécurité, le coaché accède à toutes ses
ressources.
Permission : grâce aux « permissions » données par le coach, le coaché s’autorise à
penser, à ressentir. Il ose renoncer à certaines croyances limitantes, agir ou réagir diffé-
remment et lâcher prise.
Croyances limitantes
Les croyances limitantes sont des idées généralisées qui induisent une sous-estime de
soi ou une incapacité à faire certaines choses.
Protection : la bienveillance du coach sert en outre à protéger son coaché afin qu’il
mesure les conséquences de ses choix et qu’il ne prenne pas de décisions trop risquées.
Vous pourrez vous reporter à ce triangle dès lors que vous vous interrogerez sur la perti-
nence de votre action ou sur votre rôle auprès d’une personne ou d’une équipe.
• Votre action développe-t-elle le potentiel de la personne/l’équipe ?
• Cette action participe-t-elle de la protection de la personne/l’équipe, sans tomber dans
le sauvetage ?
• Est-ce que vous ne faites pas prendre à la personne/l’équipe de risque démesuré qui
pourrait (lui) être préjudiciable ?
• Avez-vous bien créé les conditions pour que cette personne/équipe se sente libre et ne
se censure pas ?
• Est-ce que vous n’agissez pas à la place de la personne/l’équipe elle-même ?
Voici quelques questions à vous poser régulièrement.
Responsable du processus
Le coach reste maître, quoi qu’il arrive, du processus relationnel dans lequel prend place
le coaching ; c’est dans ce cadre que s’installe le contenu du travail et que prend naissance
le changement. Lyssa Adkins5 parle du container (contenant) créé par le coach, permet-
tant ainsi à l’équipe ou à la personne coachée de produire le contenu. En tant que facili-
5. Lyssa Adkins, Coaching Agile Teams: A Companion for Scrummasters, Agile Coaches, and Project Ma-
nagers in Transition, Addison Wesley, 2012
L’engagement du bénéficiaire
Le coaché, lui, s’engage à être responsable et à ne pas faire pression sur le coach pour
exiger de lui un savoir qu’il n’est pas censé avoir. Autrement dit, l’équipe accompagnée
ne demande pas la solution au coach ; elle peut le faire auprès d’un consultant expert.
Le coaché ne doit donc pas exercer une pression du résultat sur le coach.
Le coach n’est là que pour créer le cadre. La personne ou le groupe coaché(e) est expert(e)
de son changement. D’ailleurs, le regard porté par le coach sur le coaché, différent de
celui du consultant expert, valorise et responsabilise la personne ou l’équipe. Celle-ci peut
alors exprimer tout son potentiel et s’engage à le faire.
6. Op. cit.
• Le coaché s’engage, lui, à être acteur ou auteur de son changement, en toute responsa-
bilité.
• Enfin, nous avons vu que le scrummaster qui adopte une posture de coach peut utiliser
les outils présentés pour s’interroger sur son rôle et sur la pertinence de son action.
« L’erreur initiale »1 souvent commise est de penser que « ce qui est bon pour moi, l’est
pour tout le monde ». Cela nous fait passer à côté des interrogations et des peurs des per-
sonnes touchées par le changement.
Intégrer facilement un changement et s’y engager nécessite une prise de conscience per-
sonnelle, l’accueil de ses émotions et le renoncement à certaines certitudes bien ancrées.
Seule la personne qui l’a décidé pourra aborder le changement et s’inscrire dans un pro-
cessus de désapprentissage puis d’apprentissage.
Prendre conscience
La prise de conscience et l’acceptation de nos émotions, puis des renoncements néces-
saires, constituent une première étape pour aiguiller son énergie de façon positive et
trouver son nouvel équilibre.
1. Charles-Henri Russon & Carole Lalonde, Management du changement, Panorama des approches, tech-
niques et principes utiles, IFEAS, 2012
S’autoévaluer
Plutôt que de tirer moi-même des conclusions ou émettre des hypothèses (toujours) sub-
jectives suite à mes observations et mes entretiens individuels, j’apprécie la complémen-
tarité de la technique de l’autoévaluation.
Lors d’une situation de coaching d’équipe, l’objectif est d’amener ses membres à prendre
conscience des changements nécessaires et à définir les axes d’amélioration pour devenir
une équipe (plus) agile, ou comment mettre l’agilité au service de la performance de
l’équipe.
Lors d’un atelier dédié, chaque membre de l’équipe est sollicité, soit à titre individuel,
soit collectivement, pour évaluer un certain nombre de critères sur une échelle de 1 à
10 (figure 5-1). Les questions posées, pour chacun des critères, sont : selon vous, cette
valeur est-elle présente au sein de l’équipe ? Comment se manifeste-t-elle concrètement ?
Pourquoi et comment pourrait-on s’améliorer ?
Les résultats peuvent être recueillis globalement ou individuellement. Ils sont alors ex-
ploités soit comme support d’un atelier avec l’équipe, soit comme support d’un entretien
individuel avec le leader de l’équipe.
L’intérêt est d’amener les membres de l’équipe à échanger leurs points de vue sur la base
de comportements visibles. Ils prennent alors conscience de leur « degré d’agilité » ; ils
prennent la mesure de leurs comportements, de leurs forces et de leurs axes de progrès.
Précision
Il ne s’agit ni d’un diagnostic, ni d’une prescription de changements à mener élaborée
par un expert ! Nous reviendrons sur « l’effet miroir » de ce type d’exercice, basé sur le
ressenti exprimé par les membres de l’équipe.
Transparence Autonomie
Sens de
Droit à l'erreur
l'engagement
Le trac
Lorsque nous avons le trac, nous tremblons, nous avons des maux de ventre, la bouche
sèche. Cette sensation traduit une émotion de peur… peur de ne pas être à la hau-
2. Jacques Salomé, Le Magicien des Peurs, in Contes à guérir, contes à grandir, Albin Michel, 1993
teur, très probablement. En l’acceptant, nous pouvons décider de mieux préparer notre
intervention, de nous isoler et de nous détendre, de relativiser l’enjeu de la prestation…
Chacun a sa propre réponse.
Le trac, forme de peur, peut traduire le désir d’être parfait, d’être reconnu, d’être célèbre…
Par conséquent, prendre conscience de nos émotions et les accepter nous permet de mieux
comprendre notre réaction et d’en analyser la nature. Accueillie et contrôlée, l’émotion
peut être un puissant levier d’action, pour le changement précisément : « Et si je réagis-
sais autrement dorénavant, par rapport à telle situation ? », afin de se débarrasser de
certaines sensations désagréables qui nous encombrent.
Et la solution à bien des malaises, discordes, conflits est à trouver en nous, en particulier
dans la satisfaction de nos besoins psychologiques, sur lesquels nous aurons l’occasion de
revenir dans la troisième partie (chapitre 7, « Créer un cadre sécurisé »).
En effet, pour nous motiver et donner un sens à notre vie, nous recherchons la satisfaction
de nos besoins et le respect de nos valeurs. Cela signifie que nous ressentons une émotion
positive et agréable lorsque nous satisfaisons nos besoins psychologiques, et une émotion
négative et désagréable si ceux-ci sont « malmenés ». De même qu’une valeur, chère à
nos yeux, qui ne serait pas respectée pourra engendrer une réaction de révolte.
L’acceptation de nos émotions et la connaissance de soi nous aident à nous mettre sur le bon
chemin pour vivre le changement comme nous le souhaitons, lorsque nous l’avons décidé.
Décider de changer
Dans une transformation agile, le constat que les comportements ne sont pas tous ceux
qui sont attendus démontre que les compétences collectives et relationnelles ne sont pas
spontanément déployées. Elles se fondent, nous l’avons vu, sur des relations de confiance.
Or, dans une équipe, a fortiori récemment constituée, règne plutôt de prime abord une
ambiance neutre et attentiste, voire de méfiance entre les membres.
Et pourtant, n’est-il pas plus confortable de travailler dans la confiance ? Ne collaborons-
nous pas plus efficacement lorsque nous échangeons de façon positive et constructive
avec nos coéquipiers, sans arrière-pensée ? Sans aucun doute. Cependant, cette colla-
boration n’est pas spontanée. Nombreuses sont les équipes que j’accompagne qui y par-
viennent, un peu pour certaines, un peu plus progressivement ou très bien pour d’autres…
suffisant de personnes volontaires ayant décidé de s’engager vers le changement avait été
nécessaire. Cela signifie qu’une seule personne, aussi charismatique soit-elle, ne suffit
pas à emmener l’équipe vers le changement. En effet, l’amorce d’un changement ne pou-
vant provenir que de chacun, c’est la juxtaposition de plusieurs volontés individuelles qui
rendra possible le changement de l’équipe.
Exemple
Prenons l’exemple de notre scrummaster Patrick (équipe Alpha) : il souhaite rendre son
équipe plus autonome et la responsabiliser davantage.
Or, aujourd’hui, il est intrusif, directif, incontournable sur bien des sujets ; son comportement
n’est pas adapté à son objectif, puisque même s’il invite son équipe à prendre plus de respon-
sabilités, le résultat n’est pas à la hauteur de ses attentes.
S’il prend conscience que le changement doit, dans un premier temps, être initié par lui, il a
fait l’essentiel du chemin. Son changement de comportement va inévitablement susciter des
réactions, des ajustements de la part de ses collaborateurs. Il progressera vers son objectif.
Cette prise de conscience est la première étape pour initier le changement (figure 5-2).
Compétence Compétence
non acquise acquise
0 3
Je ne sais pas
Je ne sais pas
que je ne sais
que je sais
pas Inconscient
• Étape 0 : je n’ai pas conscience que je n’ai pas le bon comportement ou la bonne com-
pétence.
• Étape 1 : je prends conscience que je n’ai pas le bon comportement ou la bonne com-
pétence et qu’il en existe peut-être de plus appropriés.
• Étape 2 : je m’ouvre à d’autres représentations, je développe de nouvelles compétences,
j’expérimente de nouveaux comportements en toute conscience.
• Étape 3 : j’ai développé de nouvelles compétences et les mets en application spontané-
ment, sans même m’en rendre compte.
Cette prise de conscience individuelle ou collective est la clé, contrairement à une invite
ou une injonction, voire une sommation de changer venant d’autrui.
Désapprendre
Le changement est à la fois un processus
de désapprentissage et d’apprentissage.
Jacques-Antoine Malarewicz
Ne rejette-t-on pas fréquemment celui qui n’est pas d’accord, en amalgamant l’idée et la
personne qui l’a proposée ? En effet, il est plus facile de rejeter la nouveauté que de faire
l’effort de remettre en cause notre propre jugement, ou d’intégrer cette nouvelle idée et
bousculer notre propre vision de la situation. Nos croyances peuvent en effet limiter notre
capacité à voir et à analyser les choses différemment, donc à changer.
Cependant, désapprendre ne veut pas dire nier et rejeter tout ce que nous croyons au-
jourd’hui. Par exemple, dans le cadre d’une transformation agile, désapprendre signifie
remettre en cause certains comportements liés à des compétences et innover dans ses
pratiques (figure 5-3, page suivante). Remettre en cause ses comportements ne signifie
pas que nos compétences ne sont pas réellement acquises ou qu’elles sont devenues inu-
tiles. Il s’agit juste de prendre conscience qu’il y a un nouveau contexte et de nouveaux
besoins, et par conséquent, qu’il peut être opportun de modifier la façon dont nous met-
tons en pratique nos compétences, afin de les adapter à la situation, voire de les compléter.
Exemple : l’expert
L’expert sait estimer ses tâches et a un taux élevé de fiabilité. Il a d’ailleurs toujours été sol-
licité précisément pour son expertise et cité en exemple par son chef de projet. Il n’a donc
jamais eu l’opportunité de comparer ses estimations.
Désapprendre, dans ce cas, n’est pas renoncer à sa compétence, mais c’est l’exploiter autre-
ment : s’ouvrir à l’idée que ses estimations peuvent être discutées avec d’autres, que son
processus de découpage des tâches et d’estimation peut intéresser ses coéquipiers, bref,
que mettre son expertise au service de l’équipe lors des planning games3 peut être profitable
pour l’ensemble de l’équipe.
Ces compétences restent acquises et sont sans doute très précieuses pour la suite !
Il ne s’agit pas d’opposer compétences acquises et nouvelles compétences à acquérir ; au
contraire, il s’agit bien de les relier. 3
Comment capitaliser ?
Comment assembler les
deux ?
3. Le planning game ou planning poker est une séance d’estimation et de planification collective, à l’aide
d’un jeu de cartes.
Dans l’équipe Alpha, Patrick est confiant dans ses compétences fonctionnelles, techniques et
de gestionnaire. Ses coéquipiers alimentent cette certitude puisqu’il est très sollicité.
Désapprendre pour Patrick consiste à faire le deuil de son omnipotence et de son omni
science, de sa gestion classique à l’aide de diagrammes de Gantt, pour expérimenter une
plus grande délégation ainsi qu’un pilotage plus agile. Ses compétences, sa rigueur, son
sens de l’organisation sont acquis et non remis en cause, mais peuvent être exploités diffé-
remment pour responsabiliser son équipe. Ses compétences de gestionnaire sont toujours
utiles, mais il responsabilisera l’équipe pour qu’elle s’implique davantage dans le pilotage ;
ses compétences techniques lui seront également utiles pour challenger les développeurs
sur d’autres solutions techniques possibles.
Une autre erreur souvent constatée consiste à mettre en avant les défauts, les dysfonction-
nements ou l’inadéquation de l’existant par rapport à la situation visée.
Aujourd’hui : un expert s’organise depuis des années en gérant lui-même son travail. Son
chef de projet lui demande une estimation, la valide et le laisse gérer la tâche. Il s’enquiert
régulièrement de l’avancement et le développeur termine sa tâche généralement à temps.
Demain : l’expert ne doit plus travailler seul. Il doit fournir une liste de tâches de granularité
fine et communiquer le travail restant à faire chaque jour.
Dans cet exemple, non seulement l’expert doit modifier sa façon de travailler, alors qu’il ne
voit pas nécessairement l’intérêt de cette nouvelle approche, mais il peut de surcroît inter-
préter ces changements comme une perte de confiance (et de temps). Si on lui présente la
transformation de façon négative (« Tu ne peux plus travailler tout seul dans ton coin ; ce n’est
pas l’esprit agile »), on renforce sa probable résistance.
Accompagner le changement, c’est par conséquent reconnaître, valoriser et transformer des
acquis en atouts pour changer : « Grâce à ton expérience dans l’estimation des tâches, tu vas
pouvoir aider les autres jeunes développeurs lors des séances de planning poker ».
Il s’agit de penser différemment pour agir différemment, remettre en question ses modes
de pensée et les confronter avec d’autres pour élargir sa vision. L’assemblage des deux
facilite ainsi l’apprentissage et le développement de comportements plus pertinents dans
le nouveau contexte.
Malheureusement, cette prise de conscience et le désapprentissage ne sont pas faciles :
« Mettre en concurrence au sein de notre référentiel des stratégies plus ou moins perfor-
mantes est un défi pour notre modestie et notre souplesse d’esprit. » 4
C’est pourquoi une aide extérieure peut s’avérer bénéfique.
Si cette démarche n’est pas facile, une aide extérieure peut nous prêter main forte. Elle
peut être apportée par celui ou celle qui adopte une posture de coach, non pas pour
fournir une solution toute faite, mais pour faciliter le processus de désapprentissage et
d’apprentissage.
Nous avons vu que le changement est un processus de deuil. L’énergie consommée dans
les premières étapes du processus est utilisée par la personne « endeuillée » pour se
défendre et compenser sa frustration.
Pour une équipe ou une organisation, le phénomène est identique. Le mécanisme d’ho-
méostasie se déclenche de la même façon : on observe des tensions, des non-dits, des
clans apparaissent, des alliances se nouent, des rumeurs circulent… Voilà les manifesta-
tions visibles du processus d’adaptation du système vivant.
L’objectif pour le coach est d’exploiter cette énergie utilement pour que la personne ou
l’équipe franchisse le gué et devienne l’acteur de son propre changement.
Nous avons vu également que le processus d’apprentissage se déroulait en quatre étapes
(figure 5-2) : le coach intervient principalement aux étapes 1 et 2, c’est-à-dire dans la
prise de conscience et dans l’apprentissage.
C’est sa posture de coach, sur laquelle il travaille lui-même en profondeur, qui garantit le
succès de la démarche : en miroir et en position basse, il facilite le passage de l’intention
à l’action.
Revenons à notre transformation agile et prenons le cas d’un développeur qui refuse de
travailler en binôme, soit en rejetant ouvertement l’idée, soit en s’y soustrayant de façon
inefficace.
En dialoguant avec le développeur, le coach aide celui-ci à décrire ce qui ne lui convient pas
dans le pair-programming, à identifier ce qu’il craint, à imaginer ce qui lui conviendrait et à
proposer des actions. Le coach comprend que le développeur a peur de ne pas être à la hau-
teur et qu’il craint le jugement de l’autre développeur. Grâce au coaching et à l’effet miroir du
coach, le développeur prend conscience que ses craintes peuvent être relativisées.
Un autre, qui a peur de perdre l’exclusivité de son expertise, réalisera que cette peur peut être
dépassée en gagnant une reconnaissance des autres pour ses qualités de pédagogue et en
conservant un rôle de référent sur ce domaine.
☞ Voir aussi le chapitre 19, « En tant que scrummaster, je veux trouver le bon position-
nement vis-à-vis de l’équipe ».
Figure 6-1
De l’intention Situation A Situation B
à l’action (problématique) (cible)
Le coach facilite
la progression
sur le chemin.
Exemple
Pour notre scrummaster, Patrick, il s’agit d’être moins intrusif et de déléguer davantage la
prise de décision à son équipe.
Nous observerons, dans la cinquième partie, comment cette prise de conscience est pos-
sible grâce au questionnement du coach.
Figure 6-2
L’aide du coach
à trois niveaux
Prendre
conscience Définir quel Lancer une
de la changement action
nécessité de apporter concrète
changer
Sécuriser la démarche
de transformation
Focalisées sur des enjeux économiques, organisationnels et
technologiques, souvent sous pression, les personnes en charge
de la conduite du changement ne créent pas toujours les condi-
tions favorables pour prendre en considération le volet humain
d’une transformation.
L’objectif d’amélioration ou de changement visé par une per-
sonne, une équipe ou une organisation n’est pas celui du coach.
En revanche, ce dernier est responsable du cadre dans lequel
évoluent les acteurs.
Formé, équipé d’outils spécifiques, le coach prend en compte la
dimension humaine des projets de transformation et instaure la
confiance entre les acteurs. Il travaille ainsi à la sécurisation et à
la pérennisation de la démarche.
Le cadre est le « décor » dans lequel vont jouer les acteurs. À partir d’un contrat (cadre
contractuel), dans lequel l’objectif de l’accompagnement est défini et les engagements
mutuels précisés, le coach est responsable de la mise en place des conditions qui vont faci-
liter le changement ; il s’assure de la prise en compte de la dimension humaine des projets
et crée un climat de confiance (cadre relationnel). C’est le socle sur lequel se construit le
processus de changement.
Le coach est chargé d’encadrer la démarche de changement pour que tous s’y sentent en
sécurité. Il cherche à mettre en avant les acteurs : c’est eux qui exercent leur pouvoir, au
sens noble du terme, c’est-à-dire qu’ils peuvent exprimer librement ce qu’ils sont vraiment
et aborder le changement en confiance, de la façon la mieux appropriée.
tements sont le reflet de ce qu’elle est et ne sont pas uniquement conditionnés par son
environnement. Dans le cas d’une équipe, il veille à ce que son identité émerge et qu’elle
prenne en considération la personnalité de chaque membre.
Un développeur est en réunion avec son équipe. Il a une idée à proposer ou un avis à faire
partager. S’il n’ose s’exprimer, c’est que le poids de l’environnement fait pencher la balance
du côté gauche. Cela démontre que son être a du mal à apparaître au grand jour et que sa
dimension personnelle ne pèse pas assez. Sans doute ne s’affirme-t-il pas assez par rapport
au regard de l’autre ou à la crainte de son jugement.
Figure 7-1
Intégrer
la dimension
humaine
Être
Environnement
C’est pourquoi, le coach veille à ce que les personnes qu’il accompagne progressent vers
une plus grande connaissance de soi et des autres ; cette connaissance mutuelle favorise
les comportements authentiques et la qualité des interactions.
Figure 7-2
L’intelligence
émotionnelle
L’immeuble de personnalité2
Chaque personne a une structure constituée de six types de personnalités : c’est notre
« immeuble de personnalité » (© Taibi Kahler2, figure 7-3).
Figure 7-3
Exemple
d’un profil
de personnalité
Notre « base » constitue les fondations de notre personnalité. Puis nous pouvons vivre
des tranches de vie successives appelées « phases », auxquelles sont associés des besoins
psychologiques qui sont nos sources de motivation. Nous le constatons tous, ces sources
de motivation peuvent évoluer avec notre histoire et notre cheminement personnels.
1. Taibi Kahler, Ph.D., Manager en personne, Kahler Communication, Inc., Little Rock, Arkansas, 1988,
1992, 2000, 2004
2. Taibi Kahler, Ph.D., L’immeuble de personnalité, Séminaire Process Communication Management, Taibi
Kahler Associates, Inc., Little Rock, Arkansas, octobre 1982, 1996
Exemple de profil
Dans l’exemple de la figure 7-3, la personne a une base Travaillomane et elle est en
phase Empathique. Cela signifie qu’aujourd’hui, elle cherche à satisfaire ses besoins de
reconnaissance de la personne et ses besoins sensoriels, sources de motivation du type
de personnalité Empathique.
Type de personnalité
Besoin psychologique
(phase)
Travaillomane Reconnaissance du travail et structuration du temps
Persévérant Reconnaissance du travail et des convictions
Empathique Besoins de reconnaissance en tant que personne, satisfactions sensorielles
Rebelle Contacts
Rêveur Solitude
Promoteur Excitation
Identifier nos propres besoins psychologiques (et ceux de nos interlocuteurs) nous permet
de comprendre ce qui nous (les) motive. C’est d’autant plus important que notre énergie
provient en grande partie de la satisfaction de ces besoins. Cette connaissance nous aide,
3. Taibi Kahler, Ph.D., Manager en personne, Kahler Communication, Inc., Little Rock, Arkansas, 1988,
1992, 2000, 2004
4. Id.
en outre, à anticiper des comportements négatifs, car lorsque ces besoins ne sont pas
satisfaits ou s’ils sont malmenés, nous avons des difficultés à communiquer avec autrui.
Nous aurons l’occasion ultérieurement de présenter les modes de communication asso-
ciés aux types de personnalités (voir le chapitre 8, « Maîtriser des outils et des techniques
de coach »).
––Parmi la liste affichée des points forts associés aux types de personnalités (ta-
bleau 7-1), chaque membre identifie ceux de chacun de ses coéquipiers pour n’en
retenir qu’un et essayer ainsi de déterminer sa base.
––Un tour de table donne à chaque participant l’opportunité d’envoyer un message posi-
tif à chacun de ses coéquipiers : « Ce que je considère comme point fort chez toi,
c’est... Je m’appuie pour cela sur tel ou tel comportement observé ou tel ressenti. »
• 3e étape : découverte du profil de l’équipe (figure 7-4). L’équipe découvre son profil
dans son ensemble, avec la proportion de chaque type de personnalité : « Notre équipe
est-elle globalement plutôt de type Empathique ? Plutôt de type Promoteur ? Ce profil
est-il en adéquation avec notre métier ? Quels sont nos points forts ? Quels sont les
points forts à développer ensemble ? Comment s’appuyer sur un type de personnalité
moins représenté globalement, incarné par l’un des membres ? »
Figure 7-4
Exemple
d’un profil
d’équipe
Cet atelier ludique offre aux membres de l’équipe un moyen de mieux se découvrir et de
se constituer un référentiel et un langage communs.
Exemples
Dans l’équipe Bêta, Paul a besoin de solitude (type Rêveur) et, par conséquent, s’isole régu-
lièrement pour être au calme ou participe peu activement lors des réunions. Si l’équipe le
comprend, elle ne le prendra pas pour un « autiste », un « timide » ou un « prétentieux ».
Cela vaut tout particulièrement pour Catherine, la scrummaster de la même équipe, qui, elle,
a besoin de contacts (type Rebelle), de travailler dans une ambiance ludique et qui s’ennuie
rapidement.
Comprendre que Patrick, notre scrummaster de l’équipe Alpha, apprécie qu’on le sollicite,
qu’on lui demande systématiquement son point de vue (base Persévérant) et qu’il est ainsi
plus performant, engagera les autres à le solliciter dans toute discussion. Le débat n’en sera
que plus riche.
Bruno, le responsable de l’équipe Gamma ne tient pas en place car il a besoin d’action (base
Promoteur) et il prend (trop) rapidement des décisions. Quand les autres auront compris son
côté fonceur, peut-être pourront-ils en tirer profit dans certains cas !
Comprendre que Sylvie (équipe Gamma), qui, avec un côté agaçant pour certains, veille
au confort de la salle de travail, au bien-être de chacun et ne rate aucune occasion de faire
plaisir aux autres (base Empathique), est le « garde-fou » pour préserver des relations cha-
leureuses et humaines au sein de l’équipe.
Admettre enfin que Jacques (équipe Alpha) est pointilleux sur les délais et rarement satisfait
de lui (base Travaillomane) parce qu’il est exigeant, voire perfectionniste, peut précisément
constituer un point fort pour une équipe projet qui a un planning et des engagements à res-
pecter.
Les chaudoudoux
S’il a lieu au tout début d’un projet, cet atelier crée une confiance minimale pour com-
mencer à travailler ensemble. S’il est organisé après plusieurs mois de collaboration, on
s’aperçoit que l’on ne se connaît pas toujours vraiment et qu’avec le modèle proposé, on
peut mettre des mots sur des situations et des comportements connus. L’objectif n’est pas
tant de deviner la base que de permettre à chacun d’envoyer un « chaudoudou » 5 à ses
coéquipiers. On est parfois agréablement surpris de ce que pensent les autres de soi et ça
fait du bien !
Définition
Les chaudoudoux sont des signes chaleureux et positifs que l’on s’échange. Je fais réfé-
rence au conte de Claude Steiner, psychologue, dans lequel les habitants d’un village
sont heureux parce qu’ils s’échangent des chaudoudoux sans compter. Les chaudou-
doux procurent des sensations douces et chaleureuses.
Travailler sur les points forts des individus qui forment un groupe stimule l’énergie posi-
tive. Chacun prend conscience des ressources de ses coéquipiers et des atouts de l’équipe.
Cette prise de conscience renforce l’esprit d’équipe et la solidarité et constitue un socle
pour construire des relations de confiance.
5. Claude Steiner, Le conte chaud et doux des chaudoudoux, InterEditions, 1984, 2004
Cependant, la confiance ne se décrète pas et elle n’est pas permanente ; elle nécessite du
temps pour se développer et se consolider, puis elle s’entretient. C’est au fil du projet, pro-
gressivement, qu’une relation de confiance peut s’instaurer entre la personne ou l’équipe
coachée et le coach lui-même.
Indispensable, cette confiance donne une légitimité au coach pour créer, ensuite, les
conditions d’une plus grande confiance entre les membres de l’équipe, entre l’équipe et
le scrummaster, et entre l’équipe et ses différents interlocuteurs, product owner compris.
Un enjeu majeur réside donc dans ce premier niveau de confiance, qui doit être institué
pour que chacun puisse exercer ses pleines capacités et pour que l’équipe s’appuie sur ce
socle pour se construire.
La confiance, au sein de l’équipe, et donc la qualité des relations dépendent, entre autres,
de l’image que chacun se fait de lui-même et de la considération qu’il porte aux autres.
La grille de lecture offerte par les « positions de vie », concept de l’analyse transaction-
nelle6, nous permet de décoder nombre de nos comportements (figure 7-5).
L’axe vertical représente l’estime de soi ou l’état circonstanciel dans lequel on se trouve
(je suis « OK » ou je suis « Non OK ») ; l’axe horizontal matérialise la considération
portée à l’autre (il est « OK » ou « Non OK », selon moi).
Domination Coopération
L’autre est – L’autre est +
Non OK OK
Retrait Dévalorisation
Exemples
Je peux être énervé après avoir passé deux heures dans les embouteillages (Non OK) ; je
peux régulièrement douter de moi et me sentir souvent maladroit (Non OK) ; je peux globale-
ment me sentir « bien dans mes baskets » (OK), je peux aussi me considérer (inconsciem-
ment) supérieur aux autres (OK). Je peux détester celui-ci pour je ne sais quelle raison (Non
OK), comme je peux être naturellement bien, en phase avec un autre (OK) ; je peux aussi être
mal à l’aise avec l’un (Non OK) et en connivence avec un autre (OK)…
Exemple
• La position -/+ (Non OK/OK) : c’est une position qui se traduit par une dévalorisation de
soi. Les autres sont beaucoup mieux que moi, ils y arrivent mieux, « Ils sont heureux et je
ne le serai jamais... », « Je ne vaux pas grand-chose, n’importe qui vaut plus que moi »...
Exemple
• La position +/- (OK/Non OK) : je pense que je vaux mieux que l’autre. Cela se mani-
feste de deux façons différentes : soit j’envisage l’autre de manière condescendante :
« Mon pauvre, tu n’es pas capable d’y arriver ; laisse, je vais le faire », soit je l’envi-
sage d’une manière hautaine, voire agressive « T’es trop nul, t’es un incapable, pousse-
toi de là que je le fasse » ou « T’es trop nul, fais comme je te dis et pas autrement ».
C’est une position de dévalorisation de l’autre ou de domination, d’arrogance vis-à-vis
de l’autre.
Exemple
• La position -/- (Non OK/Non OK) : « Je ne vaux rien et vous non plus », j’ai une
image négative de moi-même et du monde. Il n’y a plus rien à faire, je subis.
Exemple
L’un des deux développeurs considère que cette proposition de travailler en binôme ne sert
à rien (« De toute façon, le projet est en train de capoter, l’équipe est médiocre, le client est
insupportable ; je préférerais qu’on me laisse tranquille à me dépatouiller avec mon code
plein de bogues… »).
Exemple
Membre de l’équipe : « Il est vraiment nul, Philippe ; à cause de lui, on n’a pas pu livrer. »
Coach : « Peux-tu nous dire la même chose en +/+ ? »
Membre de l’équipe : « OK. Philippe a eu un problème ; il a été retardé, du coup on n’a pas
pu livrer. Comment peut-on éviter ça lors du sprint suivant ? »
La pression quotidienne, les tensions, le stress, la peur… sont autant de facteurs pouvant
dégrader le climat +/+. La réalité nous montre en effet que nous pouvons facilement tom-
ber dans le -/+ ou le +/- dans certaines situations.
Apprendre à métacommuniquer
La métacommunication est l’une des conditions pour entretenir de bonnes relations au
sein de l’équipe : il s’agit de la capacité à échanger sur sa façon de communiquer (forme),
indépendamment du sujet (fond).
Les interlocuteurs sortent du dialogue, prennent alors de la hauteur (comme s’ils étaient
devenus spectateurs de la scène) et conscience de leurs comportements : ils s’attachent,
dans ce cas, davantage à la relation établie entre eux plus qu’au contenu. Ils sont parties
prenantes de leurs interactions.
Lors d’un sprint planning meeting, deux coéquipiers ont un débat animé sur l’estimation de la
complexité d’une user story :
« N’importe quoi, c’est simple à développer. Comment peux-tu savoir, toi qui débutes sur
cette technologie ? » (position +/-)
« Je te dis que c’est complexe, puisque j’ai déjà eu un cas similaire sur un autre projet… »
(position +/+ ou -/+)
Cette métacommunication peut être déclenchée par l’un des acteurs de la conversation
(qui se sent agressé, par exemple, et qui le fait savoir à l’autre) ou bien par un tiers, scrum-
master, coéquipier ou encore le coach en situation. Il s’agit d’avoir le courage de dire que
quelque chose ne va pas dans la qualité de l’échange en cours. Cette aptitude à métacom-
muniquer évite la détérioration de la communication et prévient de nombreux conflits.
Elle permet, de plus, de revenir à un climat +/+, favorisant la coopération.
Figure 7-6
Le cercle vertueux
de la confiance
Confiance
Fierté
Ouverture
Estime de
Authenticité
soi
Collaboration
Résultats
Efficacité
Cette confiance est à créer en premier lieu entre l’équipe et le coach. Elle participe du
cadre, de cette « enveloppe culturelle minimale » dont il est responsable.
Figure 7-7
Les cadres 2. Cadre relationnel
d’intervention
du scrummaster
Vision 1. Cadre organisationnel et
PO Produit méthodologique
Organisation
Équipe Produit
Vision
Équipe
3. Interfaces
Une équipe agile a un produit à délivrer, en conformité avec la vision qu’en a le product
owner. Pour délivrer ce produit, s’il a été décidé d’utiliser la méthode Scrum, le scrum-
master est garant de la bonne application de la méthode. À ce titre, il est responsable du
cadre organisationnel et méthodologique (1).
Le scrummaster est au service de l’équipe de développement.
En tant qu’équipe de réalisation auto-organisée, elle est souveraine pour élaborer sa vi-
sion d’équipe et construire son identité, définir son organisation et ses règles de fonction-
nement, et procéder à des choix tactiques pour déterminer son processus de fabrication :
dans ce contexte, le scrummaster est, pour sa part, responsable du cadre relationnel (2)
qui permet à l’équipe d’atteindre ses objectifs. Il lève les obstacles qui pourraient l’entra-
ver et anime, si nécessaire, les cérémonies agiles pour faciliter le travail de l’équipe.
Il est également l’interface (3) entre l’équipe et le product owner (et l’organisation dans
son ensemble) en veillant à la qualité et l’efficacité des interactions.
Le scrummaster n’intervient donc pas sur le contenu des échanges, mais bien sur le pro-
cessus et le cadre dans lequel les interactions ont lieu.
Le coach a une fonction miroir qui aide le coaché à prendre conscience de la nécessité de
changer. Avec une position basse, il amène celui-ci à élaborer une solution. Enfin, avec
la casquette de facilitateur, il permet de passer de l’intention à l’action et d’enclencher
le changement. Toutes ces fonctions interviennent dans un cadre relationnel dont il est
responsable.
Pour adopter cette posture, le coach s’appuie sur des outils. Le premier d’entre eux, c’est
lui-même, puisqu’il crée une relation avec la personne ou l’équipe coachée. Les autres
outils sont essentiellement fondés sur l’écoute.
Précision
Chaque coach a sa personnalité et ses propres outils. Dans ce chapitre, nous allons
présenter les outils de base de tout coach, indépendamment de son bagage, et tout à fait
utilisables par un leader d’équipe.
La synchronisation ou « check-in »
Si le principal outil du coach, c’est lui-même, alors il doit être totalement présent et dis-
ponible. La synchronisation permet de se rendre totalement disponible pour son coaché.
Pourquoi se synchroniser ?
En premier lieu, la synchronisation a pour objectif de créer un « sas de décompression »
entre ce que chacun des protagonistes vient de vivre et le moment qu’il s’apprête à parta-
ger. Une rencontre entre un coach et son (ses) coaché(s) demande de la concentration, de
l’écoute, de la sérénité, autrement dit, une disponibilité totale.
Rappelons qu’en tant que responsable du cadre, le coach crée cet espace sécurisé, favo-
risant la prise de contact.
• Le canal interruptif : il est utilisé lorsqu’une personne vit une émotion avec difficulté
ou pour interrompre une situation de mécommunication. Celui qui émet cette offre
invite à se calmer, à se détendre, par exemple.
« Calmez-vous. Respirez profondément. Regardez-moi. »
• Le canal directif : il est utilisé pour donner un ordre sur un mode impératif.
« Travaillez en binôme, tous les deux ; vous saurez trouver la solution. »
• Le canal ludique/émotif : il est utilisé pour exprimer des émotions, des envies, de
l’enthousiasme.
« Ça vous tente ? Génial, non ? »
« Quelle horreur ! »
« Cool ! »
1. Taibi Kahler, Ph.D., Séminaire Process Communication Management, Taibi Kahler Associates Inc., Little
Rock, Arkansas, octobre 1982, 1996
2. Taibi Kahler, op. cit.
Exemples
Voici quelques exemples illustrant l’aide précieuse de cet outil pour se mettre sur la même
longueur d’ondes.
Détecter que le responsable de l’équipe Gamma, Bruno, a probablement une base Promo-
teur me fera gagner du temps, car j’aborderai directement la situation sous l’angle des pro-
blèmes qu’il rencontre dans la mise en œuvre de ses actions. En effet, tout ce qui le freine
pour progresser est problématique : « Racontez-moi, décrivez-moi, dites-moi, allons droit au
but… » (canal directif).
Repérer, dans l’équipe Bêta, qu’une bonne partie des ingénieurs est vraisemblablement de
base Rêveur, m’aide à comprendre leur individualisme apparent ; ils aiment travailler seuls.
Je sais d’emblée que si je suis amenée à accompagner cette équipe, je pourrai obtenir des
informations sur leur mode de fonctionnement, sans les brusquer, mais en étant ferme et
précise : « Décrivez-moi la façon dont vous êtes organisés. Expliquez-moi comment se dé-
roulent vos réunions quotidiennes… » (canal directif). Je sais que si nous devons apporter
des changements avec la scrummaster, Catherine, celle-ci devra utiliser un canal directif
pour fixer, avec les ingénieurs, les objectifs et les échéances : « Analysons le périmètre défini
par le product owner, ce matin, et estimons la complexité cet après-midi. »
En revanche, avec Catherine, j’utiliserai un ton moins sérieux, avec un vocabulaire plus ima-
gé, et sans doute me permettrai-je quelques plaisanteries légères.
Comprendre enfin qu’au sein de l’équipe Gamma, certains, de base Empathique, ont besoin
d’être avant tout rassurés, me conduit à utiliser mon canal nourricier : « Je suis très sensible
à ce que vous exprimez ; je suis là pour vous aider. »
Nous verrons, dans les deux parties suivantes, que cet outil est d’une réelle puissance
pour améliorer la communication entre les différents acteurs eux-mêmes.
Nous avons vu ce qu’est la synchronisation des canaux de communication. Elle peut
également s’accompagner d’une synchronisation physique, verbale et sémantique : on ne
dialogue pas avec une personne debout, l’autre assise, l’une chuchotant, l’autre hurlant.
La synchronisation verbale3
La synchronisation verbale consiste à repérer, par exemple, les mots utilisés par son
interlocuteur. En Programmation neuro-linguistique3 (PNL), notre perception du monde
extérieur est synthétisée au travers de l’acronyme VAKOG, en relation avec nos cinq
sens :
• V pour Visuel : la personne qui utilise ce canal de perception a un vocabulaire lié à
la vision : « Je vois… », « ma vision des choses », « j’ai observé que… », « en un clin
d’œil… », etc.
L’empathie
Chacun a sa propre vision du monde. Si vous demandez à plusieurs personnes de vous
décrire le paysage qu’elles ont sous leurs yeux, chacun ira de son détail, qui de sa descrip-
tion… Nous voyons et analysons, nous filtrons le monde en fonction de qui nous sommes,
de nos valeurs, de notre passé, de notre ressenti.
Discrimination visuelle
Observez l’image de Boring (figure 8-1, page suivante). Que voyez-vous ? Une jeune
femme au profil gracieux ou bien une vieille dame au nez crochu ? Cette image illustre
notre facilité à voir et notre difficulté à changer de point de vue. Même en ayant changé
de vision, la réversibilité est souvent difficile !
Figure 8-1
L’image
de Boring :
que voyez-vous ?
Exemple
Bruno, responsable de l’équipe Gamma : « Je ne comprends pas ce qui peut les freiner tous
à aller vers l’agilité ; c’est pourtant un superbe défi que je leur propose… »
Coach : « Comment leur avez-vous présenté le projet ? Sur quels constats avez-vous justifié
votre réflexion de changer de méthode de développement ? Combien de temps avez-vous
passé avec eux pour le leur expliquer ? »
Dans ce cas, Bruno va, peu à peu, prendre conscience que tout le monde n’avance pas au
même rythme (surtout le sien !) et qu’avant de s’engager, contrairement à lui qui passe faci-
lement à l’action et qui aime les challenges, d’autres ont besoin d’informations, de réflexion,
d’analyses avant d’agir.
Faire preuve d’empathie, c’est « chausser les lunettes de l’autre » pour voir le monde
comme il le voit : c’est se déplacer dans son monde et partager sa vision.
Faire preuve d’empathie, c’est ne pas projeter notre propre vision sur une situation don-
née. C’est ne pas prêter à l’autre des raisonnements qu’il n’a pas. C’est ne pas juger l’autre.
C’est accepter la différence de système de représentation.
Exemple
Développeur de l’équipe Alpha : « Pourquoi nous demande-t-on des estimations ? C’est bien
le rôle du chef de projet, non ? »
Attitude non empathique : « Eh bien, non, dans une démarche agile, c’est aux développeurs
de donner ces estimations ; je vais vous expliquer le principe d’un planning game. »
Attitude empathique : « Qu’est-ce qui vous gêne, précisément, dans le fait de donner des
estimations ? » ou « Et si demain, c’est vous qui donnez ces estimations, que se passe t-il ? »
ou bien « Que vous manque-t-il pour pouvoir donner ces estimations ? »
Dans la première attitude, le postulat est que le développeur n’a pas compris ; on va lui expli-
quer (position haute). Dans la seconde attitude, on cherche à comprendre ce qui se cache
derrière cette interrogation de l’ingénieur : mauvaise compréhension ? Manque de moyens ?
Peur de la sanction, s’il se trompe ? Peur de ne pas savoir ? Perte totale de repères ?
Une attitude empathique permet à l’autre de (mieux) s’exprimer.
L’empathie est la condition première pour être en position basse. Le consultant « sachant »,
attendu par le client pour son expertise, court le risque d’avoir plus facilement tendance à
tirer des conclusions hâtives, en plaquant un modèle déjà expérimenté chez un autre client.
Consultant : « Je pense que, dans votre contexte, compte tenu de ce que vous m’avez pré-
senté et que je comprends parfaitement, une durée de deux semaines pour les itérations
serait un bon rythme. Qu’en pensez-vous ? »
Coach : « Quel rythme avez-vous déterminé pour la durée d’une itération ? (réponse : deux
semaines) Bien. Quels en sont les avantages par rapport à une durée de trois semaines ?
Quels risques avez-vous identifiés ? »
Vincent Lenhardt et Philippe Bernard4 précisent qu’en tant que coachs, nous devons
pratiquer « l’ascèse permanente, qui consiste à prendre constamment ce recul ». Cela
suppose que le coach s’impose une discipline et qu’il renonce à son propre cadre de réfé-
rence. Grâce à son empathie, il aide l’autre à lui communiquer le sien.
Cette prise de recul est possible grâce à l’écoute active. Elle permet au coach non seu-
lement de comprendre la réalité du coaché, mais aussi d’obtenir de sa part davantage
d’écoute puisqu’il aura lui-même déjà été écouté. Avec confiance, ses défenses éven-
tuelles seront limitées.
4. Vincent Lenhardt et Philippe Bernard, L’intelligence collective en action, Pearson, 2e édition, 2009
L’écoute active
Nombreuses sont nos attitudes « écoutricides »5, celles qui démontrent que nous n’écou-
tons pas vraiment, que nous sommes déjà dans le jugement, l’évaluation, l’interprétation
ou la recherche d’une réponse.
La position basse du coach, qui accepte de ne plus être un « sachant » pour l’autre, favo-
rise cette écoute active. Débarrassé de cette envie pressante de montrer qu’il sait, qu’il a
une solution ou qu’il a une opinion, le coach est totalement centré sur le coaché et il est à
son écoute. Ainsi, il peut s’intéresser à ce qui est exprimé, explicitement ou non, avec les
mots et avec le corps, ce qu’on appelle la communication non verbale.
On distingue le langage paraverbal (ton, rythme) du langage non verbal ou corporel (mi-
mique, tremblement, haussement d’épaule, moue...). Un message émis passe à hauteur de
7 % par le langage verbal, de 38 % par le paraverbal et de 55 % par le corporel. Ce mode
de communication peut représenter une part importante comparé à la communication
verbale et en dit souvent plus long que de longs discours !
En position basse, le coach peut écouter et observer ; il peut rebondir sur le choix de tel
ou tel mot, grâce à sa technique de questionnement.
La reformulation
La reformulation s’avère également un outil efficace de communication et d’écoute active.
Reformuler n’est pas répéter ce que l’autre a dit ; il s’agit de valider que l’on s’est bien
compris. La reformulation améliore l’écoute, met parfois en valeur ce qui vient d’être dit,
permet de nuancer un propos, de relever subtilement un excès de langage. La reformula-
tion a un effet miroir, puisque le coaché s’entend répéter ce qu’il vient d’exprimer.
Reformuler, c’est commencer sa phrase par « Si j’ai bien compris… », « En d’autres
termes… », « Pour résumer… ».
Attention aux pièges du langage (tableau 8-2, page suivante) ! Une écoute passive laisse
passer des informations précieuses.
« Sachez écouter. Malheur à celui qui, sans la ramasser, laisse tomber une parole d’or
de la bouche d’autrui. »
(Jules Renard)
Une écoute active rebondit sur les mots, relance les idées. Elle permet de repérer les im-
précisions dans ce qui est exprimé (les omissions, les généralisations et les suppositions)
et ainsi d’éviter les incompréhensions, sources fréquentes de mauvaise communication.
Objectifs Questionnement
Imprécisions Exemples
visés possible
Équipe Gamma :
« Qu’entendez-vous par
« Je doute de la coopéra-
Nom imprécis Expliciter coopération ? Pourquoi
tion au sein de cette
doutez-vous ? »
équipe. »
Équipe Alpha :
Verbes non
« On est contrôlé tous les Préciser « Contrôlés, dites-vous ? »
Omissions spécifiques
jours. »
Retrouver la
Équipe Alpha : « Pourquoi ? Au nom de
cause
Règles « C’est au chef de projet quelle règle ? Qui en a
Préciser la
d’assumer ! » décidé ainsi ? »
conséquence
Équipe Gamma :
« Jamais ? Pourquoi ? Et si
Adverbes « Chez nous, ça ne Relativiser
ça marchait un jour ? »
marchera jamais ! »
Équipe Gamma :
Suppositions Lecture de Retrouver « Qu’est-ce qui vous fait
« Je doute de la coopéra-
l’origine de dire ça ? Pourquoi en
pensée tion au sein de cette
l’information doutez-vous ? »
équipe ! »
L’art du questionnement
Dans son ouvrage sur l’écoute, Yves Blanc nous interpelle sur l’évolution de notre ques-
tionnement au fil du temps : « Pourquoi les enfants posent-ils des questions ouvertes ?
Parce qu’ils veulent tout savoir ! Pourquoi les adultes posent-ils des questions fermées ?
Parce qu’ils pensent tout savoir ! »
Il est intéressant, en effet, de constater qu’en posant des questions ouvertes, les enfants
n’ont aucun a priori. Ils sont curieux de tout, ils sont prêts à tout entendre : « Pourquoi
ça ? Comment ça ? Et si... ? »
En revanche, dès lors que nous construisons notre propre référentiel, que nous nous for-
geons des certitudes, nous avons tendance à poser des questions fermées, qui portent déjà
en elles la réponse et qui n’appellent qu’un oui ou un non.
Exemple
Suite de l’entretien avec Bruno, responsable de l’équipe Gamma, à propos des réticences
des membres de son équipe.
Questions fermées : « Leur avez-vous expliqué que la méthode allait les responsabiliser ?
Leur avez-vous démontré qu’ils allaient être beaucoup plus impliqués ? Je peux vous donner
d’autres arguments, si vous voulez. Avez-vous organisé une réunion d’information ? Est-ce
que vous avez compris qu’ils sont face à un changement ? »
Questions ouvertes : « Quel type de relation entretenez-vous avec votre équipe et chacun de
ses membres ? Comment pourriez-vous prendre en considération leurs réticences ? Com-
ment abordez-vous ce changement, vous ? Quel est votre rôle dans ce changement ? Quels
sont les points de rencontre que vous avez avec votre équipe ? »
Avec des questions fermées, le coach/consultant « donne du poisson » à Bruno mais ne lui
apprend pas à pêcher. Va-t-il s’approprier ces arguments pour les transmettre à son équipe ?
Le postulat de départ, en lui posant des questions fermées, est qu’il ne sait pas quoi faire.
Avec un questionnement ouvert, le postulat de départ est qu’il est capable de trouver la solu-
tion.
Avec des questions ouvertes, le coach invite Bruno à s’arrêter quelques instants dans sa
course, à prendre du recul, à s’interroger, peut-être à revisiter sa façon d’interagir avec son
équipe. De base Promoteur (selon le modèle Process Com), Bruno ne consacre certainement
pas beaucoup de temps à échanger avec ses collaborateurs, à les écouter. Le questionne-
ment ouvert va très probablement, ici, amener Bruno à remettre en question sa capacité
d’écoute. N’oublions pas que la demande initiale est précisément d’anticiper les difficultés
sur le plan humain !
Exemple
Bien sûr, le coach veille à ce que le questionnement ne soit pas inquisiteur. La qualité du
questionnement est fondamentale pour la qualité de la relation qui s’établit entre le coach
et le coaché. Il ne s’agit pas d’un interrogatoire !
Le silence
Écouter activement, c’est aussi savoir se taire. La nature ayant horreur du vide, nous
sommes, pour la plupart, mal à l’aise avec le silence :
• soit parce que nous avons la sensation d’être attendu, pour analyser, proposer, suggérer,
conseiller..., et cela nous « met la pression » (voir l’exemple 1) ;
• soit parce que la question que nous venons de poser met mal à l’aise (l’autre) et que nous
souhaitons « nous racheter » en « comblant ce vide » (voir l’exemple 2) ;
• soit encore parce que nous ressentons un malaise que nous souhaitons masquer… alors
nous « meublons » également.
Scrummaster : « Oui, on est une équipe agile, puisque toutes les compétences sont inté-
grées dans l’équipe. »
Coach : silence.
Scrummaster : « Enfin, ce que je veux dire, c’est qu’il y a un analyste, un concepteur, un
développeur et un testeur ; c’est ça une équipe intégrée, non ? »
Coach : silence.
Scrummaster : « Enfin, intégrée… c’est vrai qu’ils ne travaillent pas vraiment ensemble, donc
elle n’est pas vraiment intégrée finalement. Vous avez raison. »
Coach : « Je n’ai rien dit, moi. C’est vous qui considérez que l’équipe n’est pas vraiment
intégrée. Quelle serait votre définition d’une équipe intégrée ? »
Il eut été facile, dans ce cas, d’expliquer au scrummaster ce qu’est une équipe intégrée et
de lui démontrer que son équipe était loin de l’être. Le silence lui a permis de revenir sur
son affirmation et de déclencher un mécanisme d’évaluation et de réflexion, sans avoir à le
mettre volontairement face à un dysfonctionnement. Le même exercice est possible face à
une équipe : devant le silence du coach, plusieurs personnes auraient exprimé leur point de
vue et un échange aurait démarré sur la définition qu’elles donnent d’une équipe intégrée.
Coach : « Vous m’avez dit tout à l’heure que vous n’avez pas envie de coder à deux et que
vous allez plus vite tout seul… Pourquoi n’en avez-vous pas envie ? »
Développeur : « Euh… »
Scénario 1
Scénario 2
Coach : silence.
Développeur : « En fait, j’aime décortiquer un problème, me faire des croquis et coder seul. »
Dans le scénario 1, le coach induit une réponse comme s’il voulait faire dire au développeur
quelque chose qui n’est pas nécessairement à l’origine de son attitude. Dans le scénario 2,
le silence du coach pousse le développeur à réfléchir et à obtenir plus facilement le fond des
choses.
Être attentif aux silences, aux hésitations, aux gestes, voire aux mimiques (langage non
verbal) participe de cette écoute active.
Respecter le silence de l’autre, c’est aussi respecter son rythme. C’est particulièrement
important avec les personnes de type Rêveur, qui sont posées, qui aiment considérer les
choses dans leur globalité. En effet, ces personnes réfléchissent avant de parler, prennent
leur temps pour « faire le tour de la question » ; elles ont souvent un débit de parole lent.
Le coach ne doit pas s’impatienter. Le silence est son allié ; il est l’expression de l’autre.
Le consultant « sachant » aura tendance à souffler la réponse à la question.
Le silence peut aussi être utile face à ce qui peut être ressenti comme une attaque agres-
sive ou une intrusion provocatrice, pour se donner le temps de l’accueillir, de préparer
une parade, de s’exprimer avec authenticité et justesse, tout simplement.
Laisser le silence faire son travail, cela permet d’en profiter pour repérer un signe de
communication non verbale, un geste ou toute manifestation du corps : changement de
position, froncement de sourcils, accélération du rythme de la respiration, regard fuyant,
etc. En effet, un froncement de sourcils peut manifester une difficulté, un blocage, un
refus d’explorer une piste.
• La synchronisation avec les canaux de communication Process Com ou les canaux sen-
soriels (VAKOG)
• L’empathie
• Les outils de l’écoute active (questionnement, reformulation, silence).
Nous avons compris en quoi l’intervention d’un coach, ou l’adoption d’une posture de
coach, pouvait compléter celle d’autres facilitateurs et apporter un réel bénéfice dans une
démarche de changement et de transformation agile en particulier. Nous avons découvert
la posture qu’il adopte et les outils sur lesquels il s’appuie. Observons-le à présent en
action, auprès d’une équipe (quatrième partie) et auprès d’un scrummaster (cinquième
partie).
Coacher l’équipe
Nous savons tous, à nos dépens, que réunir les meilleurs joueurs
des meilleurs clubs ne signifie pas constituer la meilleure équipe
nationale ! On sait également que ce n’est pas parce que l’on
regroupe, au sein d’une équipe projet, les éléments les plus com-
pétents que le succès du projet est assuré.
Si l’objectif d’une équipe agile est de devenir performante via la
coopération, la créativité, l’autonomie et la responsabilité, il n’en
faudra pas moins plusieurs étapes pour que celle-ci se constitue
en développant des compétences collectives et relationnelles.
Le rôle du coach est de l’accompagner tout au long de cette évo-
lution, pour l’aider à se consolider.
Une équipe (agile) performante est une structure de coopération, mobilisée par un enjeu
collectif fort, animée par un niveau d’exigence réciproque élevé (valeurs communes,
règles de fonctionnement), avec une part belle donnée à la créativité, tant dans ce qu’elle
produit que dans le processus de production. Cette équipe est autonome, responsable,
auto-organisée (voir le chapitre 1, « Valeurs agiles et comportements associés »).
Avant d’être une équipe performante, le groupe de personnes, ou « pseudo-équipe »,
devra traverser plusieurs étapes. Ses membres doivent apprendre à mieux se connaître
et à développer des compétences collectives et relationnelles. Reposant sur une vision
partagée, l’esprit d’équipe agile pourra alors se consolider.
Le coach accompagne l’équipe aux différentes étapes de son évolution, comme un parent
guide son enfant à chaque âge de sa vie, ou comme un jardinier prend soin de sa plante
aux différentes phases de sa croissance.
Avec tact et intuition, et en fonction de la demande, le coach sait prendre plus ou moins
de distance vis-à-vis de l’équipe : en protection rapprochée au début (étapes Création et
structuration, Confrontations et tensions), il laisse peu à peu l’équipe prendre son envol
vers son autonomie (étapes Régulation et normalisation, Synergie et performance), tout
en demeurant un repère pour tous, avant de préparer la Dissolution et la séparation de
l’équipe.
Par tâtonnements successifs, cette équipe va progresser, régresser parfois, mais restera
sur sa trajectoire, encadrée par le coach.
Question au coach :
Qui coache l’équipe ?
☞ Nous verrons dans la cinquième partie pourquoi et comment ce leader peut lui-même être
coaché par un coach externe pour mieux adopter cette posture.
Ces étapes offrent un repère intéressant pour le coach puisqu’elles lui permettent de
mesurer le degré de maturité de l’équipe et de trouver ainsi son propre positionnement.
Quelles sont ces étapes (figure 9-1) ?
Figure 9-1
Les cinq étapes Dissolution et
séparation
de constitution
d’une équipe
Synergie et
performance
Régulation et
normalisation
Confrontations
et tensions
Création et
structuration
Ce peut être aussi une équipe ou un département existant, dont les membres se connaissent ;
un nouveau projet, une nouvelle méthodologie sont l’occasion de travailler différemment,
tout en maintenant une activité classique en parallèle.
Sur le même principe que la grille d’autoévaluation qui mesure son degré d’agilité (voir
chapitre 5), je propose de prendre un instantané de l’équipe et de mesurer son niveau de
maturité. Ce radar me permet de mieux appréhender les contours de ma mission d’accom-
pagnement et les axes de travail prioritaires.
Figure 9-2
Le niveau
de maturité
de l’équipe
passage au stade supérieur, dans le modèle de Tuckman. Vous pouvez tout à fait utiliser
la liste que je propose dans le radar (figure 9-2), qui recense, selon moi, les principaux
critères d’analyse.
Ensuite, je vous invite à préparer les questions à vous poser ou à poser aux membres de
l’équipe pour « évaluer » chaque critère.
• L’équipe a-t-elle une vision partagée ? Une identité ?
• Les rôles sont-ils clairement définis ? Comment organise-t-on le travail ? Qui alloue les
tâches ?
• Existe-t-il des règles du jeu ? Une charte ?
• Y a-t-il des jeux de pouvoir ou « politiques » ? Comment les confrontations sont-elles
gérées ?
• Comment communique-t-on ? Comment s’écoute-t-on ? Les membres de l’équipe
ont-ils la capacité de se dire les choses en position +/+ ? Échange-t-on du feedback ?
À quelle fréquence ? Sous quelle forme ?
• Les membres de l’équipe sont-ils sensibles à l’atteinte des résultats ? Se sentent-ils res-
ponsables ? Ont-ils le sens de l’engagement ?
• Une joie de vivre se dégage-t-elle de cette équipe ?
• Existe-t-il une intelligence collective ?
Il est important que les réponses aux questions soient justifiées par des observations
réelles et des éléments tangibles.
Exemple : évaluation
Si l’équipe considère qu’elle a des règles de fonctionnement, sur un axe de 0 à 10, vous valori-
serez le critère à 8 ou 9, voire 10 si elle est en mesure de vous montrer un code ou une charte
respectés par tous. Si elle dispose de règles tacites mais réelles, vous pourrez valoriser à 5.
Voyons à présent comment coacher une équipe agile et trouver le juste positionnement,
aux différentes étapes de son évolution.
Cette première étape a pour objectif de poser les fondations sur lesquelles l’équipe va
se construire. Le coach tient un rôle clé pour l’aider à définir le cadre dans lequel elle
va évoluer ; sa priorité est de créer la confiance entre l’équipe et lui-même et entre les
membres de l’équipe. Cette confiance est un prérequis pour qu’une réflexion puisse être
menée par le groupe sur sa vision, la répartition des rôles et ses règles de fonctionnement.
Avoir une vision commune, partagée, est structurant et est un préalable au bon fonction-
nement d’une équipe performante. Elle constitue cette « enveloppe culturelle minimale »
évoquée dans le chapitre 4, « Créer un cadre contractuel ».
1. Vincent Lehnardt et Philippe Bernard, L’intelligence collective en action, Pearson, 2e édition, 2009
• Les priorités stratégiques : ce niveau s’applique moins bien à une équipe, car les prio-
rités stratégiques d’une équipe agile sont guidées par celles du client et par la création
de valeur. On peut cependant envisager un projet en parallèle, celui de la transforma-
tion agile, et considérer que, dans une démarche itérative, les pratiques agiles et les
comportements associés sont introduits, petit à petit, par ordre de priorité.
• Les plans d’action : « Quelle organisation et quelles pratiques devons-nous mettre en
place sur le plan opérationnel ? » Ici également, la question sous-jacente est « Com-
ment ? »
Le rôle du coach, par son questionnement, est d’amener les membres de l’équipe à prendre
conscience et à être partie prenante active dans la définition de leur cadre.
2. Pierre Barrère et Jean-Claude Montauzé, Pari sur les hommes : Le management par la vision partagée,
L’Harmattan, 2009
le travail porte alors davantage sur ce que le coaché visualise ou entend, ou sur ce qu’il
ressent.
L’étape suivante consiste à décomposer le chemin parcouru depuis la situation A de dé-
part, à repérer les « petits » succès qui l’ont jalonné et à identifier les obstacles contournés.
À la fin de l’exercice, l’objectif est plus facilement accessible, le chemin à parcourir
moins difficile, puisqu’il a déjà été vécu et que les solutions de contournement des obs-
tacles ont déjà été trouvées.
Cette technique a l’avantage de faire appel à l’imaginaire et d’ouvrir ainsi le champ des
possibles. La permission de se projeter hors de la réalité, donnée par le coach, amène la
personne ou l’équipe coachée à envisager de nouveaux horizons, d’autres solutions qui
n’auraient peut-être pas été examinées, à cause des croyances limitantes.
La visualisation sollicite l’intuition, le symbolique, et met « en sourdine les limitations
du cerveau gauche pour favoriser l’émergence du potentiel créatif du cerveau droit » 3. En
effet, l’hémisphère gauche est le siège de la méthode, de la raison, alors que l’hémisphère
droit héberge les sentiments et l’imagination. La partie droite est généralement moins
souvent stimulée chez les ingénieurs.
Ce principe a été repris dans la conception de l’innovation game 4 intitulé « Remember
the future ».
• Qu’est-ce qu’une équipe pour nous ? Une équipe agile ? Quelle équipe souhaitons-nous
être ? Quelles sont nos valeurs ?
• Quels sont nos freins (pour mieux exercer notre mission) ?
• Quelle pourrait être notre slogan ? (en une phrase ou quelques mots)
L’étape 1 consiste à mener cette réflexion individuellement. Chacun laisse libre cours à
son imagination.
À l’étape 2, chacun réalise à l’aide de matériel que vous aurez fourni (magazines, ci-
seaux, feutres, colle…) un panneau représentant sa vision de l’équipe, sa team vision box
(figure 9-1, par exemple).
Figure 10-1
La team vision box
Vient l’étape 3, au cours de laquelle chacun présente sa vision aux autres membres.
Simultanément, vous notez sur trois tableaux différents les mots-clés permettant de re-
présenter la vocation, l’ambition et les valeurs de l’équipe. Il est intéressant de repérer à
Le choix de telle ou telle technique varie selon le temps disponible, le profil des collabo-
rateurs de l’équipe, la culture de l’entreprise…
Attention !
Vous ne devez pas avoir de vision pour l’équipe ! Vous créez un espace ludique et créatif ;
vous aidez les membres de l’équipe à ouvrir le champ des possibles, sans se censurer,
en travaillant avec leur imaginaire.
Si cet exercice d’élaboration d’une vision commune peut apparaître déroutant pour cer-
tains, c’est normal. En effet, dans une équipe de développement logiciel, on est peu habi-
tué à faire des découpages et du collage ! Et si la vision n’est pas toujours tout à fait claire
à l’issue d’un premier atelier, ce qui est le plus important c’est le chemin à parcourir
ensemble, plus que le but en soi. La vision émergera au fil du temps.
L’outil de visualisation peut également être utilisé en coaching individuel (voir la cin-
quième partie, chapitre 17).
Scrummaster : « Je dois faire évoluer mon style de management, mais cela fait dix ans que
je pratique ainsi ; cela va être difficile. »
Coach : « Demain, en imaginant que vous vous réveillez et que vous avez atteint votre objec-
tif, quel manager êtes-vous ? Observez-vous en situation, vous êtes devenu ce nouveau
manager : comment êtes-vous ? Que faites-vous ? Que voyez-vous ? Que ressentez-vous ? »
Scrummaster : « Je me vois à l’aise, en train d’animer des cérémonies passionnantes, je
me vois passer beaucoup de temps avec mes coéquipiers ; il se dégage une bonne am-
biance… »
Coach : « Qu’avez-vous fait pour devenir ce nouveau scrummaster ? Si l’on regarde ce qui
s’est passé entre aujourd’hui et cette situation future, quels ont été les faits marquants ? Les
obstacles que vous avez réussi à contourner ? »
Rappelons qu’une équipe agile doit devenir autonome, responsable, auto-organisée. Par
conséquent elle est souveraine pour faire émerger son identité, celle qui sera en adéqua-
tion avec sa mission.
Préliminaires
Le travail autour de la construction de la vision initie le travail de co-création et de res-
ponsabilisation. Les membres de l’équipe sont amenés à prendre conscience, déjà lors de
l’exercice, des forces et des axes de progrès pour mieux fonctionner ensemble.
Pierre Barrère et Jean-Claude Montauzé parlent de « préliminaires », souvent négli-
gés alors que c’est grâce à eux que les personnes se découvrent, se parlent, travaillent
ensemble avec empathie et s’apprécient, le cas échéant. Chacun est invité à sortir de la
croyance que tout est joué d’avance et à ne pas se contenter d’être un wagon mais vouloir
être une locomotive.
La technique utilisée présente l’avantage de combiner expression individuelle et réflexion
collective. Elle crée une rupture par rapport aux pratiques habituelles : s’appuyant sur
l’imagination, l’intuition, les ressentis, elle est un entraînement à la créativité dont chacun
devra faire preuve tout au long du projet pour trouver des solutions.
La vision initiale pourra se transformer avec les aléas et les évolutions du projet.
Le coach a comme mission de créer les conditions de l’émergence (le cadre), d’insuffler
et de maintenir la dynamique du départ, le « façonnage » de la vision appartenant aux
membres de l’équipe.
Les rétrospectives sont des occasions données régulièrement à l’équipe pour s’interroger
sur sa vision, le respect de ses valeurs et ses pratiques.
Compétences et rôles
Souvent, les équipes sont constituées en amont par une autorité, externe au projet, à
partir d’une liste de compétences déjà connues et associées à chaque personne. On
sait que Pierre est architecte et non testeur ; on sait que Jacques est développeur PHP
et non .Net. Cependant, le fait de s’attribuer les rôles participe de la responsabilisation
de chacun.
Figure 10-2
La matrice des
compétences de
l’équipe
• Quelles sont les compétences disponibles chez l’un des membres de l’équipe que j’ai-
merais développer et que je considère comme un point fort pour le projet ?
Cette troisième question est peut-être la plus importante !
Attention ! Si les membres de l’équipe ne se connaissent pas du tout, cette démarche est
risquée. Généralement, nous ne sommes pas à l’aise pour communiquer, ni sur nos points
forts, ni a fortiori sur nos points faibles ! Cette réunion peut être différée dans le temps
après quelques premières réalisations et lorsque les membres de l’équipe se connaissent
un peu plus.
Vous pouvez aussi renouveler l’expérience régulièrement afin de prendre en compte les
différentes montées en compétences.
Si la confiance est créée au sein de l’équipe, cet exercice peut être très enrichissant, utile
et créateur de lien. Il participe de la meilleure connaissance de soi et des autres (voir le
chapitre 7, « Créer un cadre sécurisé ») et est utile pour accepter sa singularité et celle
des autres.
Vision commune partagée et rôles répartis, les membres de l’équipe s’attachent égale-
ment à définir les modalités de leur fonctionnement.
Ce référentiel commun garantit la sécurité des acteurs. Il les protège et est utile notam-
ment dans la prévention des conflits.
Toutefois, il ne s’agit pas de tout réglementer ni de rigidifier le cadre. Le coach, en tant
que responsable du cadre, ne fait qu’inviter les personnes à s’interroger sur leurs modes
de fonctionnement et leurs règles de communication. Cette réflexion est une première
brique posée pour élaborer le cadre relationnel dans lequel elles vont se côtoyer. Chacun
a l’occasion de s’exprimer sur ces règles du jeu communes et s’engage à les respecter.
On élaborera une Charte des droits et devoirs au sein de l’équipe, par exemple ; c’est le
« Manifeste » de l’équipe. Ce peut être également la Charte des droits et devoirs entre
l’équipe et le product owner (tableau 10-1).
Droits
Product owner Équipe
Participer aux daily Scrums meetings. Négocier les changements, le périmètre,
les priorités.
Féliciter, encourager les membres de l’équipe.
Connaître la vision.
Être informé et avoir une bonne visibilité.
Obtenir des clarifications sur les spécifications.
Comprendre ce qu’est la dette technique ou une
technical story. Disposer des moyens adéquats.
Bénéficier d’une délégation de la maîtrise d’ouvrage Droit à l’erreur.
ou du comité de pilotage.
Définir son processus/ses outils.
Obtenir des estimations de l’équipe.
Accéder facilement au product owner.
Modifier le product backlog et les priorités.
Régler la dette technique ou réaliser des technical
Obtenir des résultats tangibles. stories.
Équipe dédiée, sans préemption.
Lab day/Free day5 entre les sprints.
Explorer, investiguer (spikes) 6.
Participer à la démo.
5. Lab (Laboratory) day ou Free day : l’équipe bénéficie régulièrement d’une journée libre pour faire de la
recherche, se former, se documenter…
6. Un spike est une tâche d’étude ou d’exploration lorsque l’on ne peut estimer précisément un élément du
product backlog ; c’est en quelque sorte un crédit recherche limité et non un chèque en blanc.
Devoirs
Product owner Équipe
Partager la vision du produit. Être transparent.
Être disponible pour l’équipe. Définir la notion de « ready » (user story).
Participer aux réunions de planification. Respecter ses engagements.
Être le représentant des utilisateurs. Livrer des user stories respectant la définition
du « done ».
Apporter des réponses, prendre des décisions.
Estimer le product backlog.
Créer le product backlog priorisé, le mettre à jour
tout au long du projet. Entraide entre les membres.
Livrer des user stories « ready ».
Préciser ses critères d’acceptation « done ».
Valider le produit.
La première pierre étant posée, l’équipe a démarré les premiers sprints : les personnalités
se révèlent, les premières difficultés opérationnelles apparaissent, la pression du client
sur la qualité ou les délais augmente… On sent des tensions, ici ou là ; des confrontations
ont lieu, d’autres sont évitées.
Ce qu’on observe est assez classique dans le schéma d’évolution d’une équipe. En effet,
ces confrontations sont normales, elles doivent même avoir lieu, car elles peuvent s’avérer
utiles afin que l’équipe ajuste ses modes de fonctionnement.
Toutefois, les confrontations doivent rester positives. Pour cela, l’équipe a souvent besoin,
dans ces premières étapes, d’un « régulateur » qui facilite l’apprentissage des confronta-
tions positives et la pratique d’une communication pacifique.
Situations difficiles
Observons d’un peu plus près quelques situations relationnelles difficiles, vécues par nos
trois équipes Alpha, Bêta et Gamma. 1
J’assiste à une revue de backlog, sans le product owner, indisponible. Je suis le témoin d’une
scène où les ingénieurs et Patrick discutent de la compréhension d’une exigence ; manifeste-
ment, ils n’en ont pas la même interprétation. À un moment donné, le ton monte, surtout de la
part de Patrick, qui fait valoir ses années d’expérience et son ancienneté pour défendre avec
virulence son point de vue. Je m’attends à ce qu’il impose son interprétation ; sans surprise,
il affirme en effet qu’il détient la vérité et qu’il ne supporte pas que Christophe, un membre
de l’équipe, mette sa compétence en doute. Finalement, ses collaborateurs, connaissant
Patrick, qui est susceptible et s’emporte facilement, se résignent à ne pas le contredire.
Précision
Cet épisode est survenu avant le travail effectué en coaching avec Patrick et avant qu’il
ne prenne conscience de la nécessité de déléguer davantage.
Lors d’une des rares rétrospectives menées au sein de l’équipe Bêta, qui démarre en retard,
j’assiste à une entrée en matière on ne peut plus inadaptée. Catherine, la scrummaster, inter-
pelle ses collaborateurs : « Alors, bandes d’autistes, je vous propose le petit jeu ESTP1 pour
démarrer cette rétrospective. Ça vous tente ? » Je sens que les ingénieurs n’apprécient pas
beaucoup la provocation et je les vois tous s’enfermer dans le silence. Catherine est exaspé-
rée. Impulsive, elle poursuit : « Bon, je vois que mon petit jeu ne vous plaît pas. Vous êtes
des mollassons, il n’y a pas moyen de vous faire réagir ! »
J’assiste à une réunion de travail dont l’objectif est de trouver l’origine d’un bogue. Il faut
savoir que cette tâche avait été confiée au jeune ingénieur Nicolas (qui vient d’être embau-
ché) pour qu’il découvre l’application, justement. Malheureusement, il n’a pas réussi à trouver
la réponse.
La réunion est commencée. Sylvie, qui arrive dix minutes en retard, s’excuse mille fois et
se fait rabrouer par Bruno, le leader de l’équipe, visiblement énervé. Sylvie, vexée, se met à
rougir ; je la sens au bord des larmes. Bruno poursuit la réunion en rappelant l’objectif, mais
se fait interrompre par un des membres de l’équipe, Matthieu, qui lance des sous-entendus
sur l’incompétence de certains et fait allusion plus précisément à Nicolas. Bruno continue
et lance un tour de table pour recueillir les analyses des uns et des autres sur le bogue en
question. Personne ne s’écoute ; chacun impose son idée, rejetant celle des autres de façon
caustique. Nicolas est maintenant ouvertement critiqué par Matthieu. C’est alors que Sylvie
intervient pour prendre sa défense en invoquant son arrivée récente et sa jeune expérience.
Elle se fait à nouveau rabrouer ; on ne l’entendra plus de toute la réunion. Au bout d’un certain
temps, Bruno, las de tous ces échanges, tranche et confie la tâche de débogage à un autre
ingénieur, plus expérimenté.
Des clés de lecture pour comprendre ces différentes situations sont proposées dans les
paragraphes suivants.
2. http://www.kilmann.com/conflict.html
Figure 11-1
Les cinq attitudes Rivaliser Collaborer
Affirmation de soi
de résolution
de conflits
Chercher un
compromis
Éviter Céder
Coopération
Le modèle décrit cinq attitudes fondées sur une tendance plus ou moins orientée, soit
vers la défense de ses propres intérêts (affirmation de soi), soit vers le respect des intérêts
de l’autre (coopération). Le comportement fondé sur la détermination et l’assertivité est
le signe que la personne privilégie plutôt le résultat ou l’objectif ; le comportement fondé
sur la coopération manifeste un souci de privilégier la relation. En découlent les cinq
attitudes suivantes, ni tout à fait bonnes ni tout à fait mauvaises, selon la situation, la
fréquence et la qualité de la relation.
• Céder (« Tout ce que tu voudras ») : la personne qui a cette attitude montre peu d’asser-
tivité et néglige ses propres besoins ou, en donnant à penser qu’elle abdique, recherche
la collaboration avec l’autre. Cette attitude peut donner la sensation de se sacrifier, mais
elle peut aussi se justifier pour reconnaître une erreur ou faire preuve de générosité ou
de désintérêt.
Les réactions visibles peuvent être : on fait des concessions injustifiées, on ne fait pas
preuve de créativité.
• Rivaliser (« C’est comme ça et pas autrement ! ») : à l’opposé, la personne qui agit
ainsi « passe en force ». Inflexible, elle fait preuve d’autorité et veut gagner à tout prix.
Elle peut aussi tout simplement faire valoir des droits ou défendre son point de vue.
Les réactions visibles peuvent être : imposer ses idées, couper la parole, attaquer
les idées des autres, voire les autres personnellement, insulter ses interlocuteurs ; on
s’écoute peu, on est péremptoire.
• Éviter (« On verra plus tard ») : c’est une forme de dérobade ou de retrait, à moins que
ce soit juste un moyen de temporiser ou d’éviter un conflit vraiment inutile.
Les réactions visibles peuvent être : changer de sujet de conversation, s’enfermer dans
le silence, ravaler ses mots, en parler plutôt à un tiers, faire circuler des rumeurs.
• Collaborer (« On est plus intelligent à deux ») : cette attitude, plutôt constructive, vise
à trouver une issue gagnant-gagnant tout en s’appuyant sur la collaboration avec l’autre.
Situation A
La confrontation est positive, jusqu’à ce que Patrick (base Persévérant) entre en situation
de stress et commence à partir en croisade pour défendre son point de vue. Patrick met son
masque d’attaquant. Il est en position +/- et adopte l’attitude « Rivaliser ». L’effet est dévasta-
teur pour que l’équipe gagne en autonomie et s’engage davantage !
Situation B
Situation C
Catherine (base Rebelle) aime jouer de la provocation ; elle doit être mal à l’aise dans cette
équipe constituée d’ingénieurs majoritairement de base Rêveur, donc appréciant la solitude
et les longs moments de réflexion. Catherine, quant à elle, recherche le contact, quitte à
provoquer ; elle apprécie ce qui est ludique, d’où la proposition de jeu. Elle fait face à des
réactions plutôt passives ; pourtant, elle aurait pu être confrontée à des réactions plus agres-
sives en réponse à sa provocation. Elle affiche plutôt une attitude de type « Rivaliser » ou,
de façon moins évidente, de type « Céder ». Les ingénieurs, eux, adoptent plutôt une attitude
« Éviter ».
Situation D
La réunion est stérile puisqu’elle n’a pas fait avancer la réflexion et que l’on se retrouve au
point de départ. Bruno (base Promoteur) veut des décisions rapides ; si la solution n’a pas été
trouvée durant la réunion, il décide unilatéralement de confier la tâche à quelqu’un d’autre.
Sylvie se sent culpabilisée et affiche un masque de victime (position -/+) dès son arrivée ;
puis elle se pose en « sauveur », face au « bourreau » Matthieu qui s’attaquait à Nicolas.
Néanmoins, elle finit avec le rôle de victime à nouveau. Ses réactions sont classiques pour
une personne de base Empathique ; elle adopte une attitude de type « Céder » ou « Éviter ».
Quant à Bruno, il choisit clairement l’attitude « Collaborer » au départ, puis passe rapidement
en mode « Rivaliser ».
L’objectif est, pour Patrick, de prendre conscience, a posteriori, qu’il a eu une part de respon-
sabilité dans la mauvaise gestion de la confrontation, de voir s’il s’agit d’un comportement
exceptionnel ou automatique et d’en mesurer les effets négatifs.
Lors d’un entretien en face à face, il serait bon de l’interroger sur les points suivants, pour
faciliter sa prise de conscience.
• Comment avez-vous réagi ? Pour quelles raisons ?
• Quel a été le déclencheur ?
• Quelle a pu être votre émotion à ce moment-là ? (Éventuellement, lui soumettre une liste
d’émotions positives et négatives ; notre vocabulaire est souvent pauvre en la matière !)
• Pourquoi cette émotion a-t-elle déclenché cette réaction ?
• Quelles sont les autres réunions ou situations où vous avez réagi de la même façon ?
• Quels ont été les effets à court terme ? À long terme ?
• Dans cette situation, a posteriori, comment auriez-vous pu réagir ? Quelle attitude aurait
été la plus appropriée ?
• Comment et quand pensez-vous pouvoir adopter cette nouvelle attitude ?
L’objectif est, pour l’équipe, d’éviter à l’avenir de revivre ce type de confrontation, agréable ni
pour les membres de l’équipe, ni pour leur scrummaster.
Vous pouvez proposer aux membres de l’équipe d’établir leur inventaire de personnalités
Process Com. Au-delà de l’incident de la réunion, il me semble opportun de remonter à
sa probable origine, c’est-à-dire le profil des acteurs. Prendre conscience pour les uns que
Catherine a un besoin de contact pour être motivée (base Rebelle) et, pour Catherine, que
les ingénieurs de l’équipe ont un besoin de solitude (base Rêveur) serait déjà un grand pas,
le premier pour comprendre et accepter l’autre et sa différence.
Dans ce cas, on aurait également pu revenir sur la réunion en question et permettre à chacun
d’exprimer son ressenti ; mais l’exercice semble plus difficile avec ces deux types de profils
(Rêveur et Rebelle).
L’atelier « Attentes »
Un autre type d’outil peut être proposé comme alternative à l’équipe Bêta : un atelier
« Attentes ».
L’étape suivante consiste à afficher et à présenter oralement ces attentes. Chaque destina-
taire est ensuite invité à se prononcer sur sa capacité à répondre favorablement ou pas à
la demande. Un plan d’actions est ensuite établi.
Génératrices de stress, chez soi et chez l’autre, sources de démotivation, les attitudes
conflictuelles nuisent à la bonne croissance de l’équipe et à sa performance. C’est pour-
quoi, nous avons tout intérêt à développer de nouvelles compétences relationnelles pour
gérer positivement les confrontations.
Réguler
« Réguler », c’est en quelque sorte purger tous les non-dits qui ont pu s’empiler. Patrick
Lencioni invite les membres d’une équipe à jouer les « mineurs » pour « extraire les
désaccords enfouis dans les souterrains » 3.
Après une altercation, par exemple, c’est oser aborder le sujet, même s’il dérange ; c’est
en parler vraiment, de façon authentique, et en parler jusqu’au bout, sans éliminer préci-
sément ce qui est fâcheux et gênant. En effet, on peut vouloir, mais ne pas oser en parler.
On peut en parler, mais prendre trop de précautions, qui finalement dénaturent le propos,
puis on peut omettre certains éléments, sans que le problème soit finalement résolu.
Un outil particulièrement performant facilite la régulation de certains conflits, ouverts ou
latents. Il s’agit du « jeu de cartes », dont le principe est d’organiser, par binômes au sein
d’une équipe, une session d’échange de feedback.
Si, au sein d’une équipe qui a déjà vécu quelques sprints, vous sentez des tensions, vous
pouvez – à condition que la confiance soit instaurée – proposer un jeu de cartes autre que
le planning poker, dans le cadre d’un atelier dédié.
Il s’agit, pour chaque membre de l’équipe, de renseigner une carte pour chacun de ses
coéquipiers et de répondre aux quatre questions suivantes.
• Que fait-il bien ?
• Que peut-il améliorer ?
• Quelles sont les difficultés que je rencontre avec lui (elle) ?
• Quand je rencontre ces difficultés, que puis-je faire, à mon niveau ?
Ensuite, vous devez prévoir une heure ou deux durant lesquelles chaque membre ren-
contre en face à face tous ses coéquipiers ; ainsi, en binôme, ils échangent réciproquement
sur le contenu de leur carte.
Au cas où la communication serait rompue entre deux personnes, vous pouvez proposer
votre aide. Rappelez-vous que vous êtes, de façon générale, Protecteur (3 P), c’est-à-dire
le gardien de la qualité et de la bienveillance des échanges. À ce titre, vous devez être
vigilant sur tout dérapage éventuel.
Le résultat est généralement surprenant et vaut toutes les actions de team building. En
effet, une fois encore, on est souvent surpris de ce que pense l’autre. D’abord, chacun
reçoit un feedback positif, puis un autre non pas négatif mais suggestif pour s’améliorer.
Et surtout, chacun prend conscience que, dans la gestion de la relation difficile, la solu-
tion à trouver réside d’abord en soi (question n° 4 : « Quand je rencontre ces difficultés,
que puis-je faire, à mon niveau ? »).
Attention !
L’exercice n’est pas facile. Il est donc impératif de vous assurer de certains prérequis :
confiance et bienveillance entre les membres, volontariat des participants, temps dispo-
nible, faible pression sur le projet.
Le rôle du coach, plus globalement, est de donner à chaque membre de l’équipe les
moyens de s’exposer plus en confiance dans une confrontation. Il propose de déjouer les
jeux de pouvoir ; il éclaire sur les réactions prévisibles de ses coéquipiers et il entraîne à
la pratique de la communication pacifique.
Victime
Le triangle met en scène trois personnages dans une relation dynamique et dans un jeu
souvent inconscient.
• La victime : elle subit une « persécution ». Elle vit une situation dont elle n’est pas
responsable, mais pour laquelle il y a nécessairement un coupable. Elle se plaint et
reste souvent passive. Elle a tendance à rechercher de l’aide, mais aucune solution n’est
adaptée à son cas (« Oui, mais… ») : elle est en position de vie -/+ ou -/-.
• Le persécuteur ou « bourreau » : il veut souvent se venger d’une frustration et prendre
sa revanche. Il peut être agressif, ironique. Il n’écoute généralement pas et ne cesse de
faire des reproches. Il a besoin d’une victime et veut dominer : il est en position de
vie +/-.
Remarque
Le persécuteur est perçu de façon négative par une victime, mais il peut être un inno-
vateur, un initiateur, la source d’une salutaire remise en question, sans comportement
dominant ni agressif, ni intention de persécuter.
• Le sauveteur : c’est le « héros », celui qui protège, qui doit absolument faire quelque
chose pour la victime, même si on ne lui a rien demandé. Il pense savoir ce qui est bon
pour la victime et se sent donc indispensable et irremplaçable : il est en position de
vie +/-.
Remarque
Le sauveteur est souvent guidé par la pitié, la culpabilité ou l’anxiété. Il est donc animé
d’une bonne intention ; il croit bien faire.
Nous sommes généralement attirés inconsciemment par l’un de ces trois rôles : nous
jouons la victime parce ce que nous obtenons de l’attention de la part des autres, nous
jouons le persécuteur pour avoir l’illusion du pouvoir ou le sauveur pour soigner notre
image. Et nous passons d’un rôle à l’autre, souvent sans nous en apercevoir.
Lors de la réunion organisée par Bruno, le jeune développeur Nicolas est critiqué par Mat-
thieu. Sylvie intervient pour prendre sa défense.
Le persécuteur ou bourreau est celui qui critique, Matthieu. La victime est Nicolas, qui ne
demande rien. Le sauveteur est Sylvie. Cependant, cette dernière se fait à nouveau rabrouer.
Elle devient donc une nouvelle victime.
Un nouveau persécuteur devient possible, en la personne de Nicolas (ex-victime), qui n’ap-
précie pas les arguments invoqués par Sylvie : « C’est bon, Sylvie, je suis assez grand,
non ? » Ou bien le même persécuteur, persévérant dans son rôle : « Toi, Sylvie, tu ne t’en es
pas mieux sortie, je crois… » Ou encore un tiers, Bruno, par exemple, attiré par le jeu auquel
il assiste et appréciant de trouver une victime pour démontrer son pouvoir : « Sylvie, on ne t’a
pas demandé ton avis ! »
D’ailleurs, dans la suite de l’histoire, un autre jeu se dessine, lorsque Bruno choisit de confier
la tâche à un autre développeur plus chevronné ; ce dernier pourrait bien devenir le nouveau
persécuteur de Nicolas qui, s’il ne fait rien, risque de devenir le bouc-émissaire de l’équipe.
En tant que responsable du cadre, le coach doit veiller à ce qu’aucun jeu ne soit entretenu,
notamment en invitant les protagonistes à reformuler en mode +/+ ce qui vient d’être dit.
Le coach protège les acteurs pour qu’une confrontation ne se transforme pas en conflit,
mais il ne surprotège pas les victimes. Enfin, il n’entre pas lui-même dans un jeu vers
lequel il pourrait être attiré subrepticement.
Une fois que vous avez détecté un jeu, il est essentiel de chercher à établir un autre
mode relationnel entre les personnes et à revenir en mode +/+ (voir chapitre 7). Invitez
la victime à développer sa responsabilité, à exprimer ce qu’elle ressent, à argumenter, à
proposer une solution, à prendre conscience de sa valeur.
Vous devez amener le sauveteur à se poser les questions suivantes : « Ai-je une demande
de la victime ? », « Ai-je envie de l’aider ? », « Suis-je compétent pour l’aider ? » et « Ma
victime va-t-elle pouvoir se prendre en charge ? »
Enfin, face à un persécuteur, invitez-le à chercher une nouvelle façon de communiquer,
moins agressive ou plus explicite, tenant compte du profil de ses interlocuteurs.
Question au coach :
5. Gérard Collignon, Pascal Legrand, Coacher avec la Process Communication, InterEditions, 2006
6. Taibi Kahler, Ph.D., Manager en personne, Kahler Communication, Inc., Little Rock, Arkansas, 1988,
1992, 2000, 2004
Taibi Kahler, Ph.D., Process Communication Management Seminar, Kahler Communication, Inc., Little
Rock, Arkansas, octobre 1982, 1996
7. Taibi Kahler, Ph.D., The Advanced PCM Seminar, Kahler Communication, Inc., Little Rock, Arkansas,
1997
Travaillomane Ne parle que du travail lors des Adresser des félicitations sur la qua-
pauses et déjeuners, s’approprie les lité du travail ou son utilité.
idées des autres, se surmène, perd
du temps sur des détails. Proposer un agenda, des dates, des
échéances et les respecter.
Impose ses exigences temporelles,
refuse l’improviste, est agressif avec
ceux qui le dérangent.
Cette connaissance des canaux de communication, des « portes d’entrée » et des besoins
psychologiques participe non seulement de la meilleure connaissance de soi et des autres,
mais aussi de l’amélioration des relations au sein de l’équipe. Elle facilite grandement les
confrontations positives.
Afin d’accompagner les membres d’une équipe à pratiquer une communication paci-
fique et des confrontations positives, nous pouvons nous inspirer de l’humanisme de la
Communication NonViolente® (CNV), créée par Marshall B. Rosenberg. L’objectif est
de développer des relations authentiques, bienveillantes et respectueuses pour aborder
sereinement ces confrontations.
Il est compréhensible que, pour certains, aborder les relations interpersonnelles sous cet
angle dans la sphère professionnelle puisse être inconfortable. Cependant, je constate
quotidiennement qu’il suffit qu’une personne modifie son comportement dans une équipe
pour que les autres adaptent le leur. Alors, qui doit commencer ? Soi-même ou les autres ?
En tant que responsable du cadre relationnel, il est essentiel d’amener chacun à prendre
conscience de sa part de responsabilité dans la qualité de ses relations avec les autres.
L’énergie positive ainsi dégagée est d’autant mieux exploitée : nous nous affirmons
davantage, nous savons dire non, nous valorisons les objections et gérons sereinement
l’agressivité.
Le fondement d’une relation de qualité avec les autres s’appuie sur une démarche en
quatre étapes, transposable à de nombreuses situations (figure 11-3).
Figure 11-3
Les quatre étapes
de la communica-
tion efficace
1. Observer les faits : lorsque nous décrivons une situation vécue, nous devons nous
contenter des faits et non des impressions ou des interprétations. Nous devons être
vigilants sur la forme (ton, position, regard…), qui peut en dire plus long que les faits.
« Je me suis senti mal à l’aise lorsque tu as changé de ton. J’étais frustré et j’avais envie de
me mettre en colère aussi. Puis finalement, je me suis senti découragé, avec un sentiment
d’amertume. »
3. Exprimer des besoins : comme nous l’avons vu dans le chapitre 3, les émotions sont
le reflet de nos besoins psychologiques. Nous avons des émotions positives lorsque nos
besoins psychologiques sont satisfaits et des émotions négatives s’ils ne le sont pas. Par
conséquent, il est important d’être à l’écoute de nos émotions et d’en analyser l’origine
pour viser leur satisfaction. Par ailleurs, accepter que nos émotions ne sont pas cau-
sées par les autres mais qu’elles sont bien un indicateur, l’expression de nos besoins,
disculpe l’autre et renforce notre propre responsabilité.
« J’ai besoin que l’on m’écoute, car j’ai des opinions que je souhaite faire valoir aussi ; et
dans notre discussion, je n’ai pas pu l’exprimer jusqu’au bout. »
4. Formuler une demande : une demande formulée à l’autre précisément peut viser soit
la qualité de la relation, soit une action, un objectif.
Cette démarche témoigne d’une position de vie +/+, constructive, d’égal à égal, et incite
l’interlocuteur à se connecter également en mode +/+.
et déstabilisante pour l’ensemble de l’équipe. De plus, quelqu’un qui agresse n’est pas en
position de vie +/+, ce qui rend la communication inefficace, voire impossible.
Le rôle du coach de l’équipe se situe à deux niveaux. Son intervention peut aider un membre
de l’équipe soit à mieux gérer l’agressivité des autres à son encontre, soit à mieux gérer sa
propre agressivité. Son action peut également porter sur le fonctionnement de l’équipe elle-
même face à l’agressivité (nous traiterons cet exemple dans le chapitre suivant).
Le plus important face à l’agressivité est de ne pas répondre par l’agressivité. Plusieurs
cas de figure se présentent (tableau 11-3).
Moi L’autre
Je suis en +/+. L’autre m’agresse, il est en +/- ou
-/+, voire -/-.
Scénario 1 Je réagis en +/-, j’agresse aussi. L’autre surenchérit dans
l’agressivité.
Résultat scénario 1 +/- contre +/- : la communication ne peut pas être efficace.
« L’empathie est une qualité d’écoute et de présence à l’autre, à ses sentiments et à ses
besoins, sans vouloir l’amener quelque part et sans souvenir du passé. » (Marshall
B. Rosenberg)
Figure 11-4
Le traitement Identifier et
Valoriser Traiter Réévaluer
des objections analyser
l’objection l’objection
l’objection
l’objection
Assertivité collective
L’assertivité collective, c’est-à-dire l’affirmation et la reconnaissance de l’équipe vis-à-vis
de l’extérieur, ne sera envisageable que si l’équipe a développé sa véritable identité, si
ses membres ont un sentiment d’appartenance et s’ils ont démontré des comportements
solidaires.
• Repérez, lors des cérémonies, si les acteurs sont mal à l’aise à l’idée de devoir se
confronter. Exprimez votre ressenti ou votre impression et invitez les participants à en
faire de même.
« Je sens quelques tensions suite à ce qui vient d’être dit ou décidé. Quelqu’un partage-
t-il mon ressenti ? Qui aurait envie de s’exprimer ? »
• Veillez, lors d’une discussion, à ce que l’on ne s’éloigne pas du sujet qui fâche, tant qu’il
n’a pas été réglé. Mettez les acteurs face à leurs responsabilités.
« J’aimerais revenir au point précédent : considérez-vous que tout le monde s’est ex-
primé sur le sujet ? Pourquoi ne pas faire un tour de table ? Peut-on faire une synthèse ?
Disposez-vous de tous les éléments, tous les points de vue pour décider ? »
• Invitez une personne (peu affirmée) qui serait la seule à s’opposer à une décision, à
expliciter son « non ». De même, autorisez celui qui se sent blessé ou diminué par un
« non » à exprimer ce qu’il ressent.
« J’aimerais que nous écoutions Annabelle qui semble être d’un avis différent. Anna-
belle, quels sont les motifs qui t’amènent à dire non ? »
« Jérôme, je sens que le non que vient d’exprimer Annabelle suscite en toi une réaction.
Voudrais-tu la partager avec nous ? »
• N’hésitez pas à mettre en avant le droit à dire non. Tout en protégeant celui qui dit non,
sans pour autant le « sauver », vous permettez ainsi que ne s’installent ni non-dits ni
ressentiments.
Dire ce que l’on a à dire de façon authentique est un signe de transparence, valeur chère
à l’agilité. D’ailleurs, être à l’aise dans le face-à-face est l’un des douze principes du
Manifeste Agile.
Lorsque ces confrontations sont positivement gérées, on observe qu’elles renforcent les
relations entre les membres de l’équipe : chacun apparaît plus authentique et cette authen-
ticité est une brique de base pour construire la confiance.
Question au coach :
Ce mode de communication est-il toujours possible, y compris lorsque nous sommes
en présence de prestataires externes, du product owner ou de toute autre personne
étrangère à l’équipe ?
Il est vrai que certaines conditions ne favorisent pas ce climat d’authenticité et de transpa-
rence. On peut tout à fait avoir réussi à le créer au sein de l’équipe mais dès lors qu’un élé-
ment extérieur intervient, l’équilibre est fragile.
Cela signifie sans doute que l’équipe n’a pas encore atteint un tel niveau de maturité et de
confiance, au point d’être imperturbable : nous sommes, rappelons-le, à l’étape 2 du modèle
de Tuckman.
Dans un cadre où l’on retrouve à la fois des clients et des prestataires, le jeu peut être faussé,
à cause des enjeux économiques et politiques. Cependant, si les coéquipiers sur le terrain
parviennent à communiquer de façon constructive et à s’affirmer, la coopération n’en sera
que meilleure et la distinction entre prestataires et non prestataires ne sera plus visible.
Je me souviens d’une équipe qui avait décidé de n’accepter que les membres de l’équipe
lors des rétrospectives, afin de « laver leur linge sale en famille ». Ils n’ouvraient le cercle à
d’autres personnes que dans la dernière partie de la rétrospective. Cette équipe sentait son
équilibre menacé dès lors que des éléments externes étaient présents … et pas totalement
bienveillants.
Quoi qu’il en soit, c’est encore une fois au coach de veiller à la sécurité des échanges et à leur
encadrement par des règles claires.
Après la tempête, le beau temps ! Cette étape « Confrontations et tensions » a fait surgir
les difficultés, mais a également donné l’occasion d’ajuster le mode de fonctionnement de
l’équipe, qui se normalise.
Améliorer le processus
Au rythme des sprints, l’équipe agile met en place un processus continu d’amélioration.
Responsabilisée et sur le chemin de l’auto-organisation, elle adopte une démarche empi-
rique, qui vise à apprendre chemin faisant, à faire régulièrement le constat de ce qui a
plus ou moins bien fonctionné et à apporter les ajustements nécessaires. C’est le fonde-
ment de la rétrospective.
1. Une timebox ou « boîte de temps » est une tranche de temps, c’est-à-dire un sprint ou une release avec
une échéance de fin fixe.
2. http://blog.crisp.se/2007/11/14/henrikkniberg/1195064820000
3. http://www.fabrice-aimetti.fr/dotclear/public/traductions/Scrum-checklist-FR.pdf
Jugements péremptoires
Manque d’attention
Impatience
Manque de disponibilité
Manque d’ouverture
Absence de curiosité
A priori
Imposer
Couper la parole
« Oui, mais… »
Procès d’intention
Monologue
Manque de tolérance
Manque de temps
Tendance à interpréter
Attention !
Cet atelier ne peut être mené qu’avec l’acceptation des participants. Si c’est le cas, il
améliore grandement la communication et il participe de la pratique de la métacommu-
nication.
Métacommuniquer
Je rappelle que la métacommunication est la démarche qui consiste à faire dialoguer les
membres de l’équipe sur la façon dont ils communiquent, indépendamment de la teneur
de leurs messages. En effet, la forme du message est souvent bien plus significative que
le fond.
Prendre une position « méta », c’est prendre de la distance par rapport à ce qui se vit ou
vient d’être vécu. C’est être attentif non seulement au contenu des échanges, mais égale-
ment au processus relationnel qui s’établit avec l’autre. On peut être en position méta en
tant qu’acteur soi-même ou en tant qu’observateur, comme le coach ou le scrummaster,
par exemple.
L’objectif, sur le même mode de la rétrospective, est d’améliorer le processus de commu-
nication entre deux personnes ou au sein d’une équipe.
Cette distance n’est possible qu’à partir du moment où l’on est authentique et juste soi-
même et que l’on croit à la sincérité de l’autre. Ce n’est donc possible qu’avec un mini-
mum de confiance, donc de vécu commun. La métacommunication est par conséquent
plus facile à pratiquer au cours de cette troisième étape de Régulation et normalisation.
M’appuyant sur le modèle de la Process Com, j’invite les membres de l’équipe à prendre
connaissance des canaux de communication de chacun d’eux. Nous avons vu (tableau 8-1)
que chaque type de personnalité a un canal de communication préférentiel. Pour être plus
précis, il a un canal qu’il utilise (émission) ou apprécie particulièrement qu’on utilise (récep-
tion) pour entrer en communication, et il a d’autres canaux éventuellement ouverts ou fermés,
avec lesquels il est plus ou moins à l’aise dans ses interactions avec les autres.
Une fois le profil de personnalité connu de tous les membres, il est intéressant de travail-
ler en complément sur cette découverte des canaux ouverts et fermés au sein de l’équipe
(tableau 12-2).
En observant ce tableau-miroir, les coéquipiers découvrent leurs canaux de communication
respectifs ; ils réalisent ainsi pourquoi la communication interpersonnelle avec tel ou tel coé-
quipier est plus ou moins facile.
Être sensible au canal Interrogatif/Informatif pour Paul, Pablo, Alexis et Rodrigue est com-
préhensible ; c’est leur canal préférentiel en émission. En revanche, le canal Ludique/Émotif
qu’utilise Catherine, la scrummaster, est fermé pour tous. Tous comprennent enfin pourquoi
le contact a du mal à s’établir entre l’équipe et la scrummaster !
Attention !
Cet outil nécessite une maîtrise de la Process Com. Il est donc préférable de s’entourer
d’un coach certifié.
L’autre
connaît
Cette matrice contient tout ce que nous sommes : nos connaissances, nos émotions, nos
croyances, nos souvenirs, nos objectifs, nos sentiments, notre insconscient, etc. On y dis-
tingue « ce que je connais de moi » (partie gauche) et « ce que j’ignore » (partie droite),
d’une part, et « ce que les autres connaissent de moi » (partie supérieure) et « ce que les
autres ignorent de moi » (partie inférieure), d’autre part.
• une zone de libre-échange : c’est notre « vitrine ». Elle correspond à ce que l’autre et
moi connaissons de moi, c’est-à-dire mes comportements observables. Plus cette zone
est ouverte, plus je suis authentique, transparent et ouvert aux autres ;
• la zone dite espace intime, qui n’est connue que de moi-même. Il s’agit de mon espace
réservé : le siège de mes émotions, de mes peurs, de mes doutes, de mes sentiments,
que je ne souhaite pas livrer aux autres ;
« La possibilité de vivre commence dans le regard de l’autre. » (Michel Houellebecq)
• la zone aveugle : elle représente ce que les autres connaissent ou voient en moi sans
que j’en aie conscience. Par exemple, on vient de me faire savoir que je n’écoutais pas
et que je coupais sans cesse la parole, sans que je m’en aperçoive ! « Ouf ! Maintenant
je le sais ! »
• la zone inconnue : inconnue de moi et des autres, il s’agit de notre inconscient. Que
savons-nous de notre comportement face à telle ou telle situation inconnue ?
Exemples de feedback
« Corinne, j’ai beaucoup apprécié ton sang-froid lorsque le gros problème de plantage du
serveur nous est tombé sur la tête. Merci. »
« John, je réagis assez mal lorsque, régulièrement, en milieu de sprint, tu paniques à l’idée
que nous n’y arriverons pas. Je ressens ça comme du pessimisme qui me fout le moral à
zéro ; désolée. »
Si le feedback est positif, le bénéfice est collectif. Si le feedback est négatif, je vous pro-
pose de traiter la problématique en aparté avec les personnes concernées.
Il faut ensuite systématiquement demander à la personne concernée, destinataire du feed-
back, de classer celui-ci dans la fenêtre de Johari et d’en tirer une conclusion : en avait-
elle connaissance ? Ce feedback va-t-il lui être utile ? Comment va-t-elle l’exploiter ?
Il est impératif que tous soient dans une position de vie +/+. Et cette démarche est pro-
posée, jamais imposée.
Généralement, cet outil assez sensible peut commencer à être utilisé à l’étape « Régula-
tion et normalisation », mais il le sera encore plus facilement à l’étape suivante, « Syner-
gie et performance » (voir le chapitre suivant).
Question au coach :
Ne dépasse-t-on pas la frontière de la collaboration d’équipe pour entrer dans un
univers de développement personnel ?
En effet, on peut considérer que ces exercices proposés – et non imposés – relèvent d’un tra-
vail de développement personnel, qui consiste à mieux se connaître, à prendre conscience de
ses talents, à se défaire de ses freins, à comprendre l’origine de ses comportements, à réali-
ser ses désirs… C’est généralement une démarche que l’on entreprend dans la sphère privée
avec un spécialiste de l’accompagnement (coach, psychothérapeute, psychanalyste…).
Le danger peut être précisément que le coach ne sache pas respecter la frontière. Il doit pro-
poser et non imposer. Et cela marche dans certains environnements mais pas dans d’autres,
ou bien seulement après quelques mois de collaboration.
Cependant, l’intérêt réside dans l’opportunité qu’a le collaborateur de développer son identité
à la fois personnelle et professionnelle.
Le coach, tout en respectant le « jardin secret » de chacun, éclaire le coaché sur l’intérêt
qu’il a, parfois, à s’ouvrir un peu en osant exprimer, par exemple, une colère, un doute, une
crainte… même dans le milieu professionnel. En résumé, il l’invite à être authentique et à
s’affirmer, à ouvrir un peu plus son espace intime (ce qui appartient à l’espace intime passe
dans la zone de libre-échange et devient donc visible).
Exemple
Analyste : « Mon travail n’est plus de produire des spécifications et de rédiger un document
d’analyse. Mon travail est de documenter les fonctionnalités que nous sommes en train de
développer en ce moment. Ce que je produis est utile au développeur et au testeur avec
lesquels je travaille. »
• L’envie : même si certains sont plus individualistes ou solitaires que d’autres, nous
avons tous un besoin d’appartenance à un groupe, une équipe, une organisation, une
communauté ou une société. Nous sommes des êtres sociaux en interaction avec leur
environnement et leurs pairs. De ce besoin de socialisation naît le sentiment collectif.
Si, en outre, chacun trouve au sein de cette équipe les éléments qui nourrissent ses be-
soins psychologiques (tableau 7-2), sources de motivation, l’envie de collaborer est sti-
mulée. Celle-ci est d’autant plus aiguisée que l’équipe produit des résultats visibles et
mesurables. Les membres de l’équipe sont fiers d’appartenir à cette équipe ; ils partagent
leur satisfaction et communiquent aisément à l’extérieur de l’équipe. Et si les résultats ne
sont pas au rendez-vous, ce sentiment collectif soutient les coéquipiers pour l’attente de
jours meilleurs.
Les conditions sont réunies pour une parfaite synergie entre les membres et leur perfor-
mance collective.
L’esprit et la main n’appartiennent au même corps que si le cœur bat pour tous.
Vincent Lenhardt, Président de Transformance Pro
d’évolution
de la performance Synergie
et performance
Régulation
et normalisation
Dissolution
et séparation
Confrontations
et tensions
Création et
structuration
Temps
Autonomie et auto-organisation
L’équipe auto-organisée se caractérise par l’autonomie de ses membres. En effet, elle
n’a pas le réflexe de solliciter un chef pour prendre une décision ou pour arbitrer un
différend. Elle n’a plus besoin d’un régulateur central (le chef) : les différents éléments
se régulent les uns les autres, à condition d’être dans un cadre régi par des règles du jeu.
Cette liberté ne s’applique que dans la ligne du projet global, avec une discipline, une
rigueur et une interdépendance entre les membres. Comme dans un orchestre de jazz,
tout le monde joue le même morceau, mais une part belle est donnée à l’improvisation.
Dans l’équipe, cela se mesure à l’initiative dont font preuve les coéquipiers.
Ceux-ci se considèrent d’ailleurs davantage comme des associés, qui fonctionnent en
réseaux. Transparence, fluidité de l’information, réactivité et implication témoignent de
cette auto-organisation.
En termes de gouvernance, une équipe agile auto-organisée peut trouver opportun d’in-
troduire un mode sociocratique. Pour nous expliquer les principes de ce mode de mana-
gement, voici une interview de Gilles Charest1, directeur de la formation et de la consul-
tation au Centre Mondial de Sociocratie.
1. Gilles Charest travaille comme conseiller en entreprise depuis 1971. Il est président de Sociogest. Il oc-
cupe, au Centre Mondial de Sociocratie, le poste de directeur de la formation et de la consultation. Il y pilote
l’implantation des centres sociocratiques dans le monde francophone. Depuis 2003, il dirige l’École Interna-
tionale des Chefs, qui fait la promotion de la sociocratie dans le monde, ainsi que l’équipe de professeurs qui
animent le programme intensif DIRIGER, selon le mode de gouvernance sociocratique. Pour découvrir les
ouvrages dont il est l’auteur, rendez-vous sur : http://www.sociogest.ca/Boutique/Livres/tabid/84/language/
fr-CA/Default.aspx.
G. Charest (GC) : Parlons d’abord du mode de gouvernance : il s’agit d’une façon d’exercer le
pouvoir. La sociocratie propose, précisément, un changement dans les rapports de pouvoir.
Elle repose sur cette découverte scientifique que la structure de communication et de prise
de décision dans laquelle vivent les individus conditionne leurs comportements.
GC : Je veux dire que si je vis dans une structure dominant/dominé, mes comportements ne
peuvent être que la fuite, la révolte ou la soumission. Ces rapports dominants/dominés sont
d’ailleurs de plus en plus présents dans nos vies et la conséquence en est l’augmentation des
risques psychosociaux.
GC : La sociocratie repose sur les principes qui régissent l’auto-organisation des systèmes
vivants, principes qui ont été mis en évidence nommément par les recherches en cyberné-
tique :
• pas de contrôle mutuel des éléments du système ;
• une source d’énergie extérieure ;
• ouverture au feedback de l’environnement.
GC : Oui et non.
Oui, nous n’implantons pas le mode de gouvernance sociocratique là où il ne vit pas déjà
dans la volonté des dirigeants et des collaborateurs. Si le projet ne met pas en avant la res-
ponsabilité des collaborateurs, le mode sociocratique de gouvernance entre en conflit avec
les valeurs de l’organisation et lèvera des résistances insurmontables.
Non… La méthode sociocratique est un contenant vide. Elle peut être utilisée par n’importe
quelle organisation : famille, association, entreprise, organisme gouvernemental voire poli-
tique. Elle n’exige pas de talents particuliers de la part des gestionnaires et des collabora-
teurs.
GC : Le mode de prise de décision interdit la domination des uns sur les autres. Il va donc
limiter fortement le débat. Toute forme d’argumentation pour convaincre ou pour convertir
les autres à son point de vue est exclue. Dans un cercle sociocratique, on discute sans se dis-
puter. On additionne les points de vue, on ne les oppose pas. De cet empilement des points
de vue va émerger, si le processus est respecté, un point de vue qui les intègre tous, une
proposition qui ne rencontrera aucune objection de la part des membres du groupe. Nous
prendrons donc nos décisions sur la base du consentement mutuel.
VM : Une grande confiance entre les membres de l’équipe est indispensable, n’est-ce
pas ?
VM : On parle aussi d’un mode d’élection sans candidat ; ne pourrait-on pas l’appliquer
à l’élection du scrummaster de l’équipe, par exemple ? Voyez-vous d’autres applica-
tions dans une équipe ou une organisation agile ?
GC : Pas seulement au scrummaster, mais à l’affectation des membres de l’équipe dans tous
les mandats.
le temps du projet. Les deux approches visent la coopération. L’une se limite à la conduite
d’un projet, l’autre vise un changement pérenne au niveau de l’organisation.
C’est pour cette raison que les agilistes qui rêvent d’une organisation qui vivrait selon les
principes agiles ne peuvent que reconnaître les vertus de la sociocratie.
Anticipation et proaction
Dans ses choix tactiques et techniques, l’équipe exerce également sa responsabilité au
travers de sa capacité d’anticipation. Dans son modèle d’agilité2, Jérôme Barrand définit
la capacité d’anticipation comme l’aptitude à prévoir les ruptures de son environnement
et à prendre conscience des conséquences de ses actes et de ses décisions précisément sur
son environnement (principe de rétroaction). On ne prend pas des décisions à la légère !
L’intuition peut être un atout pour être dans la proaction. Faire jouer l’intuition, c’est faire
davantage confiance à notre faculté de percevoir et de mémoriser de nombreuses infor-
mations qui sont traitées de manière inconsciente, pour élargir le champ des possibles et
imaginer des solutions nouvelles.
Démontrer sa proaction revient, pour l’équipe, à analyser les risques et les conséquences
de ses choix et à mettre en place un plan d’actions formalisé.
Co-responsabilité et interdépendance
Être co-responsable veut dire que chacun répond de soi et de ses actes, mais aussi de
ses coéquipiers et de leurs choix collectifs (a fortiori si les décisions ont été prises sur
un mode sociocratique). Les succès comme les échecs sont assumés individuellement
et collectivement. Tenir quelqu’un pour responsable d’une action n’est pas le considérer
comme coupable, si l’action s’avère être une erreur par la suite.
La co-responsabilité et l’interdépendance qui lient les membres de l’équipe ne sont pos-
sibles que si l’on a fixé des objectifs clairs à court terme, dont on peut aisément mesurer
l’avancement ; une totale transparence est également nécessaire (on voit ce que font les
autres et ce que je fais), ainsi que l’acceptation du feedback des autres. Si l’on supprime
l’une de ces conditions – l’objectif clair ou la transparence – la co-responsabilité se vola-
tilise immédiatement.
On se rend ainsi compte du caractère ô combien indispensable de la brique de base qu’est
la confiance, mais aussi qu’il aura fallu plusieurs étapes pour parvenir à cette co-respon-
sabilisation !
La responsabilité individuelle s’appuie d’abord sur les ressources disponibles pour
chaque coéquipier : ressources professionnelles (compétences, expérience, opportunités
d’apprentissage…) et ressources personnelles (estime de soi, confiance en soi et dans les
autres, optimisme…).
2. Jérôme Barrand, Le manager agile : Agir autrement pour la survie des entreprises, Dunod, 2e édition,
2012
Solidarité
La co-responsabilité induit également une solidarité entre les membres, tous engagés sur
un résultat à une échéance fixe. Par conséquent, les coéquipiers acceptent d’être parfois
pressés par un collaborateur, qui rappellera, si nécessaire, le délai ou une règle à respec-
ter. En effet, on ose dire ou attirer l’attention d’un collaborateur sur les conséquences de
ses actes ou de son comportement sur l’engagement pris collectivement. Si l’on ose, c’est
que tous les membres, co-responsables, se mettent régulièrement au défi et ont le souci
des résultats de l’équipe.
Ne pas oser illustrerait clairement l’absence de confiance. Dans ce cas, chacun se dé-
fausse sur les autres, prévoit des « parapluies » en amont, fuit les confrontations et s’en
remet à l’autorité incarnée par le chef !
D’autres facteurs peuvent freiner la responsabilisation : membres à temps partiel, disper-
sion géographique, résistances des personnes elles-mêmes, style de management appli-
qué dans l’organisation ou encore système de récompenses individuelles injustes.
Question au coach :
Que se passe-t-il si un membre de l’équipe ne joue pas le jeu collectif ou s’il est trop
négatif ou trop individualiste ?
La question sous-jacente est souvent : « Peut-on exclure un membre, “mauvais” élément qui
pourrait nuire au développement de l’esprit d’équipe et de la performance ? »
Il s’agit, avant tout, de prendre connaissance de la situation (les faits et les ressentis) :
• soit la personne en question réalise correctement son travail, bien qu’elle ait un comporte-
ment « non agile » et l’équipe s’en accommode tant bien que mal ;
• soit la personne s’oppose ouvertement aux nouvelles pratiques, résiste, a des comporte-
ments pénalisants et freine la transformation de l’équipe.
Quelles sont alors les conséquences sur le fonctionnement de l’équipe ? Sur les coéqui-
piers eux-mêmes ? Comment réagissent-ils ? Ces comportements ont-ils des conséquences
néfastes sur les résultats des sprints ?
Le sujet sera abordé en rétrospective (à l’initiative d’un des membres ou du scrummaster).
S’il n’est pas soulevé, parce que le niveau de confiance n’est pas suffisamment élevé, c’est
au scrummaster ou au coach de proposer une discussion. En effet, en tant que responsable
du cadre, il en est aussi le protecteur (3 P). Par conséquent, si l’attitude de la personne en
question menace l’intégrité d’une autre personne, de l’équipe, voire du projet, il a le devoir
d’intervenir. Il aura préalablement eu un entretien individuel avec la personne en question,
notamment pour comprendre les motifs de sa résistance.
Le coach aide l’équipe à explorer cette situation, en restant très factuel ou en évoquant les
ressentis. Quelle que soit la décision du groupe, il n’est pas de son devoir de la valider ou
de l’invalider, mais bien d’attirer l’attention des membres sur ses conséquences. Le coach, à
défaut d’être un médiateur, peut intervenir en tant que modérateur, afin d’éviter un « lynchage
généralisé ».
Il est généralement difficile d’aborder ce type de sujet, d’une part parce que très peu d’équipes
parviennent durablement à cette quatrième étape, où l’on peut être totalement transparent et
sincère ; d’autre part, parce qu’il concerne une personne (non anonyme) et non un problème
technique ou d’organisation, plus extérieur à chacun.
Dans les équipes que j’ai accompagnées, il est arrivé que certains coéquipiers ne jouent
pas le jeu collectif. Il se trouve que, très souvent, ces personnes avaient une forte expertise
ou une connaissance historique du capital applicatif ; elles étaient donc des personnes clés
pour le succès du projet, voire l’avenir de l’organisation dans son ensemble. La décision, ou
plus exactement la non-décision, a privilégié le laisser-faire et cautionné les comportements
de ces deux ou trois électrons libres, dans l’intérêt global. Cela fait partie des contraintes
contextuelles, parfois.
Selon l’enjeu et l’objectif de la transformation agile, ces personnes peuvent être des obstacles
plus ou moins critiques. Après plusieurs vaines tentatives pour régler la situation au niveau
de l’équipe, la décision relève de la responsabilité du management intermédiaire, voire supé-
rieur. On trouvera sans doute un projet mieux adapté à cette personne.
Intelligence collective
L’intelligence collective est répartie et non centralisée. Elle est « la conjugaison des intel-
ligences individuelles qui se fusionnent en intelligence globale, bien plus importante que
la somme de l’intelligence de chacun » 3.
Une équipe dotée d’une intelligence collective apprend, sait se remettre en cause et ne
reste pas bloquée devant une situation. Elle innove constamment dans la résolution de
problèmes, dans l’expérimentation de nouvelles idées et solutions. Cependant, elle innove
juste lorsque c’est nécessaire. C’est la « justinnovation », évoquée par Jérôme Barrand4,
qui crée de la valeur mais n’en supprime pas. On n’innove pas pour innover, si cela n’est
pas nécessaire.
Cette « justinnovation » s’appuie sur la « rébellion constructive » et la pédagogie dont
font preuve les coéquipiers. Ils savent en effet dépasser leurs connaissances, sortir de leur
cadre de référence pour y puiser de l’originalité et de la nouveauté par rapport à leurs
standards (rébellion constructive), et ils savent aussi faire comprendre et promouvoir
leurs découvertes (pédagogie).
Créativité
Edward de Bono a mis au point une technique de créativité, la technique des six cha-
peaux, qui peut être tout à fait pertinente dans un processus de recherche de solutions et
de prise de décision, notamment pour ne pas tomber dans le paradoxe d’Abilène.
3. Vincent Lenhardt, Les responsables porteurs de sens, Insep Consulting, 3e édition, 2010
4. Op. Cit.
On rencontre parfois ce paradoxe lorsqu’une décision est prise par un groupe alors qu’elle
ne convient à personne. En fait, la proposition est acceptée par tous parce que les diffé-
rents membres pensent qu’elle convient aux autres et n’osent donc pas s’y opposer ! Ce
phénomène arrive rarement à ce stade de maturité, car le niveau de confiance est tel que
les coéquipiers osent s’affirmer.
La technique des six chapeaux permet d’explorer les conséquences des décisions prises
en explorant différents points de vue, qui font découvrir la solution sous d’autres angles.
On obtient au final une image polychrome.
Quel en est le principe ? Il s’agit d’inciter les participants à modifier leur mode de ré-
flexion spontané. En empruntant successivement des chapeaux de couleurs différentes,
chacun est amené à jouer un rôle et à adopter une autre façon de penser. À chaque couleur
de chapeau est associé un mode de pensée.
N.B. Les chapeaux tournent !
• Chapeau blanc : l’objectif. L’objectif se base sur des faits, sur des données objectives.
Il recense les informations disponibles ou manquantes (sans interprétation). Attention,
il faut bien distinguer les faits des hypothèses !
• Chapeau rouge : l’émotif. L’émotif ou l’intuitif se base sur des sensations, des ressen-
tis, des pressentiments. Il donne son sentiment sans avoir à le justifier ou à le démon-
trer. Il s’appuie aussi sur son intuition.
• Chapeau noir : le pessimiste. Le pessimiste envisage la solution sous de mauvais
auspices, en anticipant des scénarios catastrophe ou toute autre difficulté pour adopter
et mettre en œuvre la décision.
• Chapeau jaune : l’optimiste. C’est le rayon de soleil qui éclaire la solution de façon
positive, constructive. L’optimiste identifie tous les motifs de satisfaction, les avantages
et toute la valeur ajoutée de la mise en œuvre de la solution retenue.
• Chapeau vert : le créatif. Le créatif, lui, ne se censure pas. Toutes les idées à prendre
sont bonnes, dès lors qu’on sort des sentiers battus (pensée latérale).
• Chapeau bleu : le chef d’orchestre. Le chef d’orchestre organise la réflexion, facilite
les échanges, questionne, synthétise, prend note, soulève les contradictions… C’est le
coach.
L’équipe Gamma est en réflexion sur une question d’ordre organisationnel : « de quel côté »
les analystes métier doivent-ils se placer ? Côté product owner ou côté équipe de développe-
ment ? Voici les avis des différents chapeaux.
Chapeau blanc : l’objectif
« Si les analystes sont intégrés dans l’équipe de développement, on rapproche analyse,
développements et tests. Les coéquipiers travaillent tous sur le même sujet, les mêmes user
stories ; ils participent aux sprints planning meetings. »
Chapeau rouge : l’émotif
« Je sens que ça va coincer du côté des product owners ; moi analyste, ça me fait plaisir,
mais j’ai un peu peur de la réaction des analystes en place. »
Chapeau noir : le pessimiste
« Vous allez voir que du coup les specs vont être ralenties. Les développeurs risquent d’at-
tendre qu’elles sortent. On augmente la taille de l’équipe qui dépasse 10 personnes, donc
on ne va plus pouvoir avoir des réunions quotidiennes de 15 minutes efficaces. »
Chapeau jaune : l’optimiste
« On supprime cette “guéguerre” entre les analystes. Ils se sentiront plus impliqués dans les
résultats. On aura peut-être moins de documentation. »
Chapeau vert : le créatif
« Et si on séparait l’équipe globale en deux équipes fonctionnelles séparées ? Et si on ne
faisait plus de specs ? »
La décision finale a bien été d’intégrer les analystes dans l’équipe, de conserver un « corres-
pondant analyste » auprès des product owners et de supprimer certains documents devenus
inutiles.
Prise de risques
Cette équipe sait prendre des risques parce qu’elle sait que le droit à l’erreur lui est recon-
nu. Ce droit lui est accordé pour deux raisons.
• Parce qu’il porte sur des cycles courts : l’équipe ne se trompe donc pas sur de longues
périodes et les erreurs sont, pour la plupart, réversibles.
• Parce qu’elle sait exploiter et tirer des enseignements de ses erreurs. Elle capitalise.
Elle est en reconfiguration permanente, puisque les nouvelles solutions mises en œuvre
et les apprentissages deviennent de nouvelles connaissances, puis sont intégrées en
nouvelles compétences.
Cette intelligence collective ne peut se développer qu’au prix de changements progressifs
apportés dans les représentations et les comportements de chacun, au cours des étapes
précédentes. Elle émerge peu à peu, une fois que le lien est établi entre les membres de
l’équipe, que ceux-ci ont dépassé leur expertise (ils n’ont plus rien à prouver aux autres)
et qu’ils sont solidaires.
Plaisir et bien-être
Cette équipe performante est attrayante, n’est-ce pas ? Pourtant, des sondages réguliers
font état d’une faible proportion d’entre nous qui ont évolué ou évoluent dans ce type
d’équipe. Et ceux qui l’ont vécu ne l’ont généralement pas vécu deux fois ! Cela démontre
la difficulté pour une équipe à atteindre cette quatrième étape, à plus forte raison si elle
n’est pas accompagnée.
Et pourtant, le plaisir de travailler ensemble, la joie d’atteindre ses objectifs et de fêter
« la victoire », le bonheur d’être « à la bonne place au bon moment avec les bonnes
compétences » procurent des sensations comparables à celles d’un match gagné ! Ces
sensations participent à l’accomplissement personnel de chacun.
En outre, l’enthousiasme des collaborateurs déborde au-delà de l’équipe, au-delà des
frontières de l’organisation et gagne finalement les clients. Alors, on peut mettre en place
toute une série de métriques pour mesurer la performance d’une équipe. En définitive,
n’est-ce pas cet « indice du bonheur » mis en place par Henri Kniberg, chez Crisp5, qui
est le plus cher à tout le monde et le plus influent sur la performance individuelle et col-
lective ? Et, finalement, n’est-ce pas lui qui influe sur la fidélisation des collaborateurs,
puis dans une moindre mesure, moins évidente, sur la croissance du chiffre d’affaires et
la pérennité de l’organisation ?
Question au coach :
Finalement, dans cette quatrième étape, on n’a plus besoin ni de coach,
ni de leader ?
Dans cette quatrième étape, le rôle du coach est, en effet, plus léger. Son rôle est comme
celui de l’entraîneur d’un champion déjà performant. Il doit entretenir la motivation, stimuler,
proposer de nouveaux challenges et de nouvelles performances : augmenter la vélocité,
réduire le nombre de bogues, réduire la durée des cérémonies, implémenter de nouvelles
techniques…
Il aide l’équipe à oser davantage : oser penser autrement, oser faire preuve de rébellion
constructive, oser faire confiance à son intuition, oser prendre des risques.
Il l’aide à développer sa capacité « méta », sans laquelle elle aura du mal à mettre en œuvre
son intelligence collective : prendre conscience des acquis et les partager, prendre quelques
minutes pour dresser le mini-bilan de chaque réunion, ne pas sacrifier les rétrospectives,
métacommuniquer sans hésiter…
5. http://blog.crisp.se/2011/10/19/anderslaestadius/the-happiness-metric-and-a-few-others
Son rôle protecteur lui permet de toujours réguler avec l’extérieur et maintenir la dynamique
du groupe, au rythme des sprints.
De là à le faire disparaître ? C’est sans doute une mission moins prenante, autorisant un
temps partiel, éventuellement. (Attention ! Cela n’est envisageable que si l’équipe est arrivée
à cette quatrième étape, seulement.)
Cependant, il ne faut pas minimiser trois risques : celui de l’illusion ou de l’idéalisation, celui
de l’égocentrisme et celui du « putschisme ».
• L’illusion ferait que les relations entre les coéquipiers sont idéalisées ou qu’un écart est
perceptible entre le discours et le vécu dans la réalité.
• L’égocentrisme excessif empêcherait l’équipe d’avoir une position méta vis-à-vis d’elle-
même. Le phénomène de l’homéostasie (voir chapitre 3) pourrait avoir tendance à ramener
l’équipe à son état d’équilibre : toute remise en question ou autorégulation y serait difficile.
• Enfin, la « prise du pouvoir » par l’un des membres de l’équipe constitue un autre risque,
surtout si l’équipe traverse une crise ou une difficulté passagère.
La présence d’un leader, en posture de coach, même s’il est plus distant, est donc encore
nécessaire à cette étape de développement.
Cette évolution de l’équipe n’est pas nécessairement linéaire. En effet, l’équipe est un
système vivant : en modifiant sa structure, avec l’intégration d’un nouveau membre ou
avec le départ d’un coéquipier, le phénomène d’homéostasie se déclenche.
L’équipe performante peut alors connaître un passage régressif, avec le retour provisoire
à l’une des étapes précédentes : par exemple, devoir définir de nouvelles règles ou vivre
des tensions qu’elle ne parvient pas à réguler facilement.
Par conséquent, la courbe de maturation de l’équipe peut prendre la forme d’une boucle
itérative, jusqu’à l’ultime étape, qui marque la fin d’un cycle et la dissolution possible de
l’équipe.
La fin d’un projet peut signifier la dissolution de l’équipe et la séparation de ses membres.
Cette épreuve constitue parfois un traumatisme pour certains. Il est par conséquent es-
sentiel d’anticiper cette étape et de « boucler la boucle » convenablement. Le coach a,
dans ce contexte, un rôle capital pour protéger et préparer en douceur la fin d’un cycle.
Le traumatisme de la séparation
L’équipe constituée pour un projet a entamé un cycle de vie et traversé différents stades
de maturité ; mais ce cycle de vie a une fin. De même que la mort est l’aboutissement de
la vie, la dissolution d’une équipe projet est inexorable lorsque le projet prend fin.
Précision
La fin d’un projet au sein d’un département ou d’un service ne marque pas nécessaire-
ment la dissolution de l’équipe, mais néanmoins la fin d’un cycle, la fin d’une certaine
configuration, une fin quoi qu’il en soit.
La performance de l’équipe et la qualité des relations entre les coéquipiers ne sont pas ap-
parues soudainement au moment de la constitution. Chacun aura investi dans son travail,
dans ses comportements, dans ses apprentissages, au prix d’efforts souvent éreintants.
L’équipe est devenue auto-organisée et responsable ; il y règne la confiance, la synergie
et, de surcroît, une excellente ambiance.
Son rôle est de valoriser l’expérience vécue et chacune des contributions ; ainsi, chacun
doit repartir fier, conscient qu’il est plus riche qu’au départ et doté d’une plus grande
estime de soi. En effet, si le cycle du projet prend fin, cela signifie aussi le démarrage
d’autre chose, une opportunité pour rebondir et se développer toujours.
« La séparation est la reconstruction, la rupture est une déchirure, une amputation. »
(Marcel Rufo, pédopsychiatre)
L’anticipation et la préparation de la séparation font gagner du temps dans l’amorce du
changement suivant. La courbe des étapes du deuil a déjà été évoquée dans le chapitre 3 ;
à l’aube du nouveau changement, grâce à cette vigilance et au travail de dédramatisation,
les phases de colère, de déni et de marchandage peuvent être aisément raccourcies, voire
évitées (figure 14-1). La personne s’inscrit alors plus rapidement dans une spirale positive.
Figure 14-1
Les étapes
du deuil
Coacher le scrummaster
Nous avons suivi l’évolution d’une équipe agile à travers les
cinq étapes qui constituent son cycle de vie. Tout au long de ces
étapes, nous avons vu quel était le rôle et le niveau d’implica-
tion, avec plus ou moins de distance, du coach en charge de son
accompagnement.
Abordons, dans cette dernière partie, le coaching du scrum-
master.
Les visions du rôle de scrummaster sont multiples, les déno-
minations ou autres métaphores utilisées pour le décrire égale-
ment (sheepdog, firewall, servant leader, coach, facilitateur…).
Les façons d’exercer le métier sont nombreuses et varient d’un
individu, d’une équipe, voire d’une organisation à l’autre. C’est
donc ma propre vision de la fonction de scrummaster que je vous
présente ici.
Le scrummaster est confronté à deux changements : celui de son équipe (voir la partie
précédente) et son propre changement.
Alors, le scrummaster, comme bon nombre d’exemples que j’ai rencontrés, risque de
s’interroger : « Suis-je à la hauteur ? », « Y arriverai-je ? », « Et si je ne suis plus ou pas
reconnu ? », « Saurai-je persévérer si je n’y arrive pas ? », « Que vont penser les autres,
s’ils voient que je tâtonne ? », « Comment être un bon scrummaster ? », etc. En réalité, il
aura avant tout à utiliser autre chose que des savoirs : ses savoir-être.
Avec le meilleur leader au-dessus d’eux, les gens savent à peine qu’il
existe. Le meilleur leader parle peu. Il ne parle jamais négligemment.
Il œuvre sans intérêt personnel. Et ne laisse aucune trace. Quand tout
est fini, les gens disent : « Nous l’avons fait par nous-mêmes ».
Lao Tseu, sage chinois
Le rôle de scrummaster présente différentes facettes. Je vous invite à vous référer au Scrum
Guide1 ou au Scrummaster Manifesto2 pour (re)découvrir les définitions « officielles ».
Voici une synthèse générale, non exhaustive, de ses principales responsabilités :
• relayer la vision produit du product owner ;
• recentrer les activités et les décisions sur la valeur ajoutée pour le client ;
• animer, soutenir et protéger l’équipe ;
• lever les obstacles et créer la confiance ;
• optimiser la communication ;
• favoriser l’autonomie, la responsabilisation, l’adaptation et l’apprentissage des membres
de l’équipe ;
1. http://www.scrum.org/storage/scrumguides/Scrum%20Guide%20-%20FR.pdf#view=fit
2. http://www.scrummastermanifesto.org/scrummaster-manifesto/A_ScrumMaster_Manifesto.html
L’objectif est de donner une orientation, un cadre dans lequel chacun trouvera sa propre
identité et son propre style de leadership. C’est précisément avec l’aide d’un coach que le
scrummaster peut, avec du recul, travailler sur cette recherche identitaire.
Quelles que soient ses prérogatives, le scrummaster n’est pas seulement garant du proces-
sus, il est aussi un leader au service de son équipe.
Au service de l’équipe
Le scrummaster est au service de son équipe : il est un servant leader.
Rappelons que les méthodes agiles, et Scrum en particulier, ont comme objectif premier
la satisfaction du client et la création de valeur pour celui-ci. Qui crée la valeur ?
« La vraie valeur est créée dans l’interaction des employés et de leurs clients. Par
conséquent, en privilégiant les employés, un changement fondamental peut être
amené dans la façon dont une entreprise produit et fournit une valeur unique
pour ses clients (…). En associant des employés engagés et un management
responsable (…). »4
C’est en ces termes que Vineet Nayar justifie une nouvelle approche du management
dans son entreprise de plusieurs milliers de collaborateurs : en mettant le management
au service des employés, qui apportent de la valeur, plutôt que de concentrer du pouvoir
entre les mains de managers auxquels on rend des comptes.
On parle alors de « pyramide inversée », dans laquelle le « pouvoir » est concentré sur
les opérationnels. Dans ce cas, on ne parle pas de pouvoir, au sens « autorité » ; on parle
de potentiel, de capacités, de facultés et de responsabilité… que les membres de l’équipe
sont autorisés à exprimer et à développer.
Cela ne signifie pas qu’il n’existe plus de hiérarchie. Les managers intermédiaires et ceux
au sommet de la hiérarchie restent chargés de la mise en œuvre des décisions stratégiques
de l’organisation, de la mise à disposition des ressources nécessaires et des arbitrages.
Cela signifie que la prise de décision est décentralisée auprès des managers de proximité
et de petites cellules réduites, c’est-à-dire des scrummasters auprès d’équipes constituées
de huit à dix personnes maximum, qui se partagent les responsabilités :
• des responsabilités collectives : l’engagement sur les résultats, la création de valeur ;
• une responsabilité individuelle : le cadre, les moyens et le processus, pour le scrum-
master, qui facilite l’engagement de l’équipe.
Le concept de servant leadership n’est pas apparu avec les méthodes agiles. Robert
Greenleaf a, dès les années 1970, mis en avant sa vision d’un management plus éthique
et moins autoritaire, orienté vers les personnes. Prenant sa suite, en 1990, Larry Spears
a complété le modèle en décrivant les dix comportements à adopter par le servant leader.
1. Écouter les idées, les suggestions des collaborateurs, prêter attention aux non-dits,
pratiquer le silence.
2. Faire preuve d’empathie à l’égard des collaborateurs, pour prendre de bonnes décisions
collectives, en respectant les aspirations de chacun, même si l’on n’est pas d’accord.
3. Être disponible et proposer un espace de soutien moral (healing) si le collaborateur en
exprime le besoin.
4. Prendre conscience de soi, de ses émotions, de ses propres freins éventuels, afin de
pouvoir aborder ses collaborateurs.
5. Éliminer toute forme d’autoritarisme et utiliser sa capacité de persuasion pour favori-
ser un engagement durable de la part des collaborateurs.
6. Développer sa capacité à « voir grand », au-delà des problèmes quotidiens, et à donner
une perspective motivante pour les membres de l’équipe.
7. Anticiper l’avenir en tirant les leçons du passé et considérer que même les erreurs
éclairent le futur.
8. Être dévoué et fournir l’intendance nécessaire pour servir les intérêts des collaborateurs.
Figure 16-1
La recherche
de l’équilibre
Question 1
Je plaisante régulièrement avec les collaborateurs de l’équipe.
Votre évaluation …
Question 2
Je suis obligé de trancher en permanence.
Votre évaluation …
Question 3
Je fixe les échéances pour la fin des travaux que je confie à mes collaborateurs.
Votre évaluation …
Question 4
Je n’aime pas contrôler le travail des autres.
Votre évaluation …
Question 5
J’organise souvent des déjeuners ou des pots.
Votre évaluation …
Question 6
J’apprécie de discuter avec mes collaborateurs pour prendre les bonnes décisions.
Votre évaluation …
Question 7
Je passe beaucoup de temps avec mes collaborateurs.
Votre évaluation …
Question 8
Je donne les directives, ensuite mes collaborateurs se débrouillent comme ils veulent.
Votre évaluation …
Question 9
J’ai du mal à prendre des décisions.
Votre évaluation …
Question 10
Je n’aime pas faire des critiques à mes collaborateurs sur leur travail.
Votre évaluation …
Question 11
J’ai besoin qu’on me rende compte de l’avancement du travail.
Votre évaluation …
Question 12
J’écoute les remontées d’information de mes collaborateurs.
Votre évaluation …
Question 13
J’ai horreur des conflits dans l’équipe.
Votre évaluation …
Question 14
On est au bureau pour travailler.
Votre évaluation …
Question 15
J’ai des convictions et j’apprécie de les faire valoir, au même titre que les autres.
Votre évaluation …
Question 16
Lorsqu’une décision est prise par la Direction, on n’a pas le choix : il faut l’appliquer,
sans sourciller.
Votre évaluation …
Question 17
Les réunions m’ennuient profondément.
Votre évaluation …
Question 18
Pour résoudre un conflit, j’ai besoin de toutes les informations pour comprendre les
vraies causes.
Votre évaluation …
Question 19
J’ai horreur de ceux qui me dérangent sans cesse pour un oui ou pour un non.
Votre évaluation …
Question 20
J’ai suffisamment d’expérience pour savoir ce qu’on doit faire.
Votre évaluation …
Figure 16-2
Les quatre styles
de management
Quels sont les caractéristiques et les comportements types des quatre styles de mana
gement ?
• Style directif : celui qui adopte ce style de management indique la voie, maintient le
cap. Il organise le travail, donne des ordres et des directives, contrôle et demande des
comptes. Il se focalise sur la tâche et les résultats, donne peu d’autonomie et met au
second plan les personnes et la créativité.
• Style informatif : ce manager suscite les interactions avec lui et au sein de son équipe.
Il sollicite l’information, favorise la réflexion, mais conserve l’autorité et prend les déci-
sions.
• Style participatif : le manager participatif est plus orienté vers les personnes que le
travail. Les ressentis et la qualité de la relation favorisent la qualité du résultat. Il invite
ses collaborateurs à travailler dans un esprit d’équipe et il développe un sentiment
d’appartenance.
• Style délégatif : ce manager délègue et invite les collaborateurs à exercer leurs respon-
sabilités. Il se place sur le même plan qu’eux et considère qu’ils savent ce qu’ils ont à
faire.
5. Taibi Kahler, Ph.D, Manager en Personne, Kahler Communication, Inc., Little Rock, Arkansas, 1988,
1992, 2000, 2004
6. Source : Christian Becquereau, Process Com pour les managers, Eyrolles, 2008
7. Gérard Collignon, Pascal Legrand, Coacher avec la Process Communication, InterEditions, 2006
ritairement juniors, vous pourrez être davantage directif, alors qu’avec des profils plus
expérimentés, vous pourrez déléguer facilement et être plus en retrait.
Sachez que le style Autocratique est particulièrement adapté au type de personnalité
Rêveur, car celui-ci a besoin de savoir clairement ce qui est attendu de lui, mais aussi au
type Promoteur, car étant fonceur par nature, il a besoin de connaître la cible et parfois
d’être freiné et recadré. Sinon, il est à éviter avec tous les autres types.
S’il s’agit bien ici de management personnalisé, il peut s’avérer utile de prendre égale-
ment en considération la situation plus globale du niveau de maturité de l’équipe.
de l’équipe aux décisions. Si ceux-ci n’ont pas encore la maturité pour prendre eux-
mêmes les décisions, ils s’habituent à exprimer leur point de vue. Les tensions qui appa-
raissent nécessitent d’avoir aussi un style Bienveillant pour ne pas envenimer certaines
situations de mécommunication.
2. Progressivement en retrait, le scrummaster pratique le style Laisser-faire pour favori-
ser l’autonomie de l’équipe. Il délègue petit à petit l’animation des cérémonies, la prise
de décision, la résolution de problèmes, etc.
3. Il veillera à réutiliser un style Bienveillant à la fin du cycle, avant la séparation des
membres de l’équipe.
Ainsi, il n’y a pas de bon ou de mauvais style de management ; il y a des personnes et des
situations dont il faut tenir compte pour choisir le style le mieux approprié. Le scrum-
master efficace sait doser son degré d’interventionnisme : être présent sans être envahis-
sant, déléguer sans fuir les responsabilités, être directif sans être autoritaire…
Une démarche d’accompagnement avec un coach peut aider le scrummaster à expérimen-
ter et à développer de nouveaux styles de management.
Nous avons vu qu’un coaching doit démarrer par une demande clairement formulée par
la personne coachée (voir chapitre 4). Coacher un scrummaster n’a pas vraiment de sens
si l’on n’a pas défini l’objectif.
Généralement, ce type d’accompagnement facilite la prise de fonction, l’adoption d’une
nouvelle posture et l’évolution des pratiques managériales. Toutefois, quel est le point de
départ ? Et le point d’arrivée ?
Les questions que se posent les scrummasters que je rencontre sont souvent : « Saurai-je
animer l’équipe ? », « Quel style de leadership dois-je adopter ? », « Quel est le niveau
de maturité de l’équipe ? », « Quelles sont les attentes de la hiérarchie vis-à-vis de mon
rôle ? », « Quelle est la définition officielle du poste ? », etc.
On le voit bien, sans passer par cette incontournable étape préliminaire, le coach et son
coaché sont condamnés à se fourvoyer ou à errer dans une démarche totalement inefficace.
Dans le chapitre 4, nous avons évoqué la nécessité d’un entretien préliminaire ; j’avais
présenté à cet égard, la grille RPBDC (voir tableau 4-1). Cet entretien permet de dégrossir
la problématique du coaché, de déterminer son objectif et de définir les différents axes
de travail. Lorsque le coaching à proprement parler démarre, la première étape porte sur
l’identité du scrummaster.
☞ Cette étape correspond au travail de visualisation présenté dans le cadre du coaching
de l’équipe (voir chapitre 10), mais appliqué au niveau individuel.
Une fois l’objectif clarifié et rendu tangible, le scrummaster s’engage sur un contrat d’évo-
lution personnelle.
Figure 17-1
La pyramide
de Dilts
Identité : elle reflète ce que nous sommes, ce qui est différent de ce que nous faisons.
Coach : « Quel scrummaster voulez-vous devenir ? Comment pouvez-vous vous décrire ?
Comment vous distinguez-vous des autres scrummasters ? Quelle est votre spécificité ? »
Croyances et valeurs : nos croyances, qui ne sont pas les croyances religieuses, sont les
conclusions ou généralisations que nous tirons de nos expériences (« J’apprécie le tra-
vail en équipe » ou « Les gens ne savent pas communiquer », par exemple). Les valeurs
sont nos facteurs de motivation et de démotivation (liberté, travail, justice, etc., sont des
exemples). Nos valeurs et nos croyances influencent grandement nos comportements et
nous poussent à agir (ou ne pas agir) dans un certain sens.
Coach : « Quelles valeurs votre identité sert-elle ? Pour quelle cause êtes-vous prêt à
vous battre ? Quelles règles vous appliquez-vous généralement ? Qu’est-ce qui est bien
et mal, selon vous ? »
Capacités et compétences : il s’agit de nos talents et de nos atouts qui nous permettent
d’être légitime.
Coach : « Sur quoi vous appuyez-vous pour être ou pour devenir ce scrummaster ?
Quelles sont vos compétences clés (acquises à ce jour ou à développer) ? Quel est
votre domaine de compétence privilégié ? En quoi va-t-il être utile ? Qu’est-ce que vous
appréciez chez les autres et que vous n’avez pas ? »
N’oubliez pas qu’il s’agit d’un exercice de visualisation, donc de projection dans l’avenir
puis d’analyse du chemin parcouru (voir chapitre 10).
Une fois que le coaché a élaboré sa pyramide, proposez-lui d’observer si tous les niveaux
sont alignés. Cela signifie qu’en revenant dans le présent, il s’interroge sur ses comporte-
ments actuels, ses capacités et son environnement pour mesurer l’écart entre sa vision du
futur et la réalité actuelle.
Coach : « Vos comportements actuels sont-ils en conformité avec vos valeurs ? Votre
environnement est-il celui dans lequel vous êtes le plus à l’aise ? Disposez-vous de
toutes les compétences nécessaires pour être le scrummaster que vous avez décrit ? »
L’objectif de cette comparaison est de repérer les progrès à mener et les aménagements à
apporter, dans le but de trouver une vraie congruence.
Être congruent
Dans notre contexte, la congruence est l’alignement des pensées, des paroles et des actes.
Figure 17-2
La congruence
Sur la figure 17-2, la zone de congruence est l’intersection de trois cercles représentant
respectivement la pensée ou les valeurs de la personne, les actes visibles et les paroles
audibles. Lorsque la personne congruente s’exprime, ce qu’elle dit est bien le reflet de ce
qu’elle est, ce qui est renforcé par ses actes.
☞ Je renvoie le lecteur à la figure 7-1 dans la troisième partie : être congruent, c’est pré-
cisément montrer sa vraie dimension humaine.
Les bénéfices de la congruence sont multiples. D’une part, la personne est intègre, ce qui
est une source de bien-être (n’avez-vous jamais eu à appliquer une décision qui heurtait
vos valeurs ?). D’autre part, son authenticité inspire confiance et ses relations avec les
autres n’en sont qu’améliorées.
Un scrummaster congruent sera d’autant plus crédible face à son équipe s’il fait ce qu’il
dit, en conformité avec ce à quoi il aspire.
L’exercice sur les niveaux logiques est un moyen de rechercher sa congruence par rapport
à son objectif, ainsi qu’un travail préparatoire pour l’élaboration de son contrat d’évolu-
tion personnelle.
Reprenons notre équipe Alpha et, plus précisément, l’accompagnement individuel de Patrick.
Rappelons que Patrick est le scrummaster de cette équipe. Âgé de 44 ans, il anime donc une
équipe de sept personnes qui s’est engagée dans l’agilité il y a neuf mois. Il a une grande
1. Rhena Branch, Rob Willson, Béatrice Millêtre, Exercices de thérapies comportementales et cognitives
pour les nuls, First Editions, 2010
expérience, à la fois sur les plans technique et fonctionnel, ce qui lui confère considération et
respect de la part de son entourage. Il a, de surcroît, une autorité naturelle, peut-être due à
sa stature imposante et à son intonation de voix assez forte.
Le coaching de Patrick, suggéré par le responsable Qualité & Méthodes, s’est déroulé sur six
mois, à raison d’une séance individuelle toutes les deux ou trois semaines environ.
La demande officielle est d’amener l’équipe à être davantage impliquée, responsabilisée et
plus engagée sur les résultats. Un entretien fait émerger des objectifs plus explicites : trouver
un autre positionnement par rapport à son équipe (en écoutant davantage), faire confiance à
ses coéquipiers et travailler sur son « lâcher prise » technique afin de mieux déléguer et de
développer ses capacités à motiver.
Quelques séances ont également permis de dresser l’inventaire Process Com de Patrick
(base Persévérant) et d’identifier son style de management prédominant (Démocratique,
devenant Autocratique sous stress).
Voici un exemple de contrat d’évolution personnelle (CEP) élaboré par le scrummaster
Patrick (figure 17-3, page suivante).
Le CEP évolue
Le contrat est une feuille de route. On sait, par expérience, que le chemin se découvre
en marchant. Par conséquent, ce contrat peut être mis à jour régulièrement durant un
accompagnement.
• La pyramide de Dilts
• Le contrat d’évolution personnelle
Commençons à présent le travail avec Patrick, afin qu’il développe ses qualités d’écoute
et son servant leadership, trouve son juste positionnement et délègue davantage l’anima-
tion des cérémonies agiles. Les titres de chapitres reprennent les objectifs de son CEP.
Figure 17-3
Exemple
de contrat
d’évolution
personnelle
En tant que leader au service de son équipe, nous avons vu qu’une grande disponibilité
et une écoute maximale étaient nécessaires pour faire émerger le potentiel des collabo-
rateurs.
En suivant le cheminement de Patrick dans son travail avec le coach, nous allons dé-
couvrir qu’il existe plusieurs types d’écoute et que l’écoute se pratique dans différentes
conditions.
Coach : « Si j’ai bien compris votre demande, Patrick, vous souhaitez développer vos qua-
lités d’écoute ? »
Patrick : « En effet. Je me rends compte que je n’écoute pas assez mes coéquipiers. »
Coach : « Qu’entendez-vous par ‘je n’écoute pas assez mes coéquipiers’ ? »
Patrick : « D’une part, je me rends compte que je ne consacre pas assez de temps à l’équipe.
Je suis disponible, mais généralement lorsqu’on vient me solliciter pour une demande d’info
ou une aide. Par ailleurs, j’ai l’impression de ne pas savoir bien écouter. »
Coach : « Pas assez de temps ? Combien cela représente-t-il, sur une semaine, par
exemple ? »
Patrick : « Je ne sais pas, avec certains quelques minutes, avec d’autres, s’ils ont un pro-
blème, une demi-heure ou une heure… »
Coach : « Vous consacrez du temps à vos collaborateurs, uniquement lorsqu’il y a un pro-
blème ? »
Patrick : « Oui. Sinon, ils savent ce qu’ils ont à faire et on n’est pas là pour parler de la pluie
et du beau temps ! »
Coach : « Si je comprends bien, vous discutez avec vos collaborateurs uniquement pour
évoquer des problèmes ? »
Patrick : « Ben, oui… enfin, aussi lors des cérémonies agiles. »
Coach : « Et là, lors des cérémonies agiles, vous les écoutez davantage ? »
Patrick : « Bof, c’est moi qui anime, alors… Et j’ai souvent un peu de mal à les bouger. »
Coach : « Nous reviendrons ultérieurement sur l’animation des cérémonies agiles, si vous
voulez bien [voir chapitre 21]. Revenons sur le ‘pas assez de temps consacré à l’équipe’ :
considérez-vous que vous devriez passer plus de temps avec elle ? »
Patrick : « Je crois, oui. »
Coach : « Dans quel but, Patrick ? »
(…)
Coach (ayant validé que Patrick a de bonnes raisons de passer plus de temps avec ses col-
laborateurs) : « Alors, comment pourriez-vous leur consacrer plus de temps ? »
Écouter plus
Patrick est très souvent sollicité ; c’est même un réflexe chez ses coéquipiers de l’interpel-
ler systématiquement, dès qu’une difficulté se présente. Fort de son expertise technique,
Patrick apporte généralement la réponse ou oriente sur de bonnes pistes, laissant finale-
ment peu de latitude à ses interlocuteurs pour mener eux-mêmes la réflexion et trouver la
solution. La conséquence est que Patrick, dont l’emploi du temps est grandement occupé
par ces résolutions de problèmes, n’a plus le temps de gérer ses activités et consacrer du
temps à l’équipe pour autre chose que les cérémonies et les problèmes.
Le coach amène Patrick à prendre conscience qu’il peut dégager du temps là où il se rend
systématiquement incontournable. Ensuite, il l’aidera à définir comment il peut écouter
davantage.
Précision
Le cheminement de Patrick est ici simplifié. Nous avons également travaillé ensemble
sur les raisons qui l’amènent à donner systématiquement la solution et sur les difficultés
qu’il a à réfréner son envie de répondre (besoin de reconnaissance, confiance en lui…).
(…)
Coach : « Maintenant que vous dégagez du temps, revenons à ma question initiale : com-
ment pourriez-vous leur consacrer plus de temps ? »
Une première action est définie par Patrick : arrêter de répondre aux sollicitations en
donnant systématiquement la réponse et questionner son interlocuteur pour faire émerger
celle-ci de sa propre réflexion. Celui-ci et ses coéquipiers prendront davantage confiance
en eux et seront, petit à petit, moins enclins à consulter Patrick. Ce dernier dégagera de
plus en plus de temps utile.
Voyons, à présent, comment il va utiliser ce temps.
Patrick : « J’aimerais passer un peu de temps, comme ça, de façon informelle, sans objectif
précis. »
Coach : « C’est ce qu’on appelle le MBWA, le Management By Wandering Around. Qu’est-ce
qui vous en empêche ? »
Patrick : « Rien, si ce n’est le manque de temps. »
Coach : « Si vous en dégagez sur la résolution de problèmes, quand et combien de temps
pourriez-vous consacrer à cette activité ? »
Patrick : « Si je passe chaque matin ou chaque début d’après-midi auprès de mes coéqui-
piers, je peux y consacrer une demi-heure à une heure. »
Coach : « Et pour y faire quoi ? »
Patrick : « Ben parler de tout et de rien, je ne sais pas vraiment faire, moi ! »
Coach : « Quand commencez-vous ? »
Patrick : « Demain matin ! »
Coach : « OK ; on verra lors de la prochaine séance de quoi vous avez parlé ! »
Une deuxième action est listée par Patrick : « descendre dans l’arène » et improviser
chaque jour « une promenade sans but » (wandering) auprès de ses collaborateurs, pour
maintenir le contact, créer plus de liens, s’enquérir de leur état d’esprit, échanger à bâtons
rompus sur un sujet professionnel ou extraprofessionnel, communiquer une bonne nou-
velle, donner ou recueillir du feedback, féliciter… Bref, écouter ses collaborateurs. Dans
ce cas, le risque étant quasi inexistant, le coach invite Patrick à se lancer, sans planifier
en détail les thèmes de conversation à aborder… et à voir ce qui se passe.
Cette deuxième action évoque le Gemba Walk. Cette « marche de valeur », dans l’univers
du Lean, est une pratique qui consiste, pour un manager, à se déplacer sur les chaînes de
fabrication ou dans les ateliers afin de mieux comprendre le processus de fabrication, et
donc de création de valeur. C’est l’occasion d’échanger avec les personnes qui produisent,
de recueillir leurs idées, ainsi qu’un moyen d’améliorer le processus. Patrick, en se rap-
prochant de ses coéquipiers, peut les entraîner à régler chaque jour un petit problème.
Tous au même endroit
Attention ! Le scrummaster est censé se trouver dans la même salle que son équipe,
ce qui crée des conditions favorables à l’écoute – lorsqu’on a une équipe colocalisée,
évidemment.
Coach : « En dehors de ces ‘petites balades’, qui créent des contacts en groupe, comment
pourriez-vous envisager un contact plus personnalisé ? »
Patrick : « Pour ça, il y a l’entretien d’évaluation annuel. »
Coach : « Et c’est suffisant, vous semble- t-il ? En cours d’année, il ne vous arrive jamais
d’avoir à organiser un entretien non planifié ? »
Patrick : « Si, lorsqu’il y a un problème. »
Coach : « Ah, encore une fois, s’il y a un problème ! »
Patrick : moue dubitative.
Coach : « Qu’est-ce que ça vous apporte, Patrick, nos séances de coaching, tous les deux ? »
Patrick : « Ça me fait du bien de parler de certaines de mes difficultés et de trouver des idées
nouvelles. Je décompresse ; ça me soulage de mon stress… »
Coach : « Ah oui ? Et vos collaborateurs, ils sont stressés aussi, mais ils ne bénéficient pas
de séances de coaching individuel, eux… »
Patrick : « Oui, mais ils savent où et quand me trouver. »
Coach : « Oui, lorsqu’ils ont des problèmes ! Et s’ils avaient envie de parler d’autre chose,
de leur évolution, de leurs progrès, de leurs attentes ? Et s’ils avaient envie de vous entendre
dire que vous êtes satisfait de leur travail ou de leur comportement, autrement que devant
tout le monde, en trois minutes lors des rétrospectives ? Qu’en pensez-vous ? »
Patrick : « Je pourrais être leur coach ! »
Coach : « Bonne idée ! Sous quelle forme ? »
Patrick : « Sous la forme d’un entretien en face à face d’un quart d’heure ou vingt minutes
tous les quinze jours, par exemple. »
Coach : « Et pour y faire quoi ? »
Patrick : « Faire le point sur les questions que se pose le collaborateur, sur ses objectifs, ses
difficultés à les atteindre… Je fais ça régulièrement avec mon fiston de treize ans et il est
ravi, même si à cet âge-là, il trouvait ça ringard au début. Mais ça rapproche. »
Coach : « Eh oui, ça crée de la confiance et chacun se sent écouté ! Comme vous, en ce
moment, avec votre coach ! »
Une troisième action est identifiée par Patrick : accorder régulièrement, à chaque colla-
borateur, un entretien en face-à-face afin de donner de son temps, d’établir ou de renfor-
cer une relation privilégiée de confiance. Les bénéfices sont multiples, à la fois pour le
collaborateur et pour le scrummaster : le collaborateur se sent écouté et reconnu et peut
progresser grâce au feedback du leader qui, lui, connaît mieux ses coéquipiers et ajuste,
en conséquence, sa façon de mener l’équipe.
Il reste maintenant à Patrick à s’améliorer sur sa façon d’écouter.
Écouter mieux
Mise en situation de coaching individuel avec Patrick :
une situation de mécommunication
Coach : « Patrick, j’aimerais revenir sur l’impression que vous avez exprimée au début, de ne
pas vraiment savoir écouter. Dans quelles conditions avez-vous cette impression ? »
Patrick : « En fait, il y a des personnes qui me relatent un événement ; j’essaie de mieux les
comprendre en les interrogeant, mais j’ai l’impression que l’on n’est pas sur la même lon-
gueur d’ondes. Du coup, je n’écoute plus. »
Coach : « Auriez-vous un exemple ? »
Patrick : « L’autre jour, Amandine, qui travaille dans mon équipe, vient me confier qu’elle a
un différend avec Serge, qui est désagréable avec elle. Bref, elle se sentait mal et j’ai fait
l’effort de l’écouter… parce que moi, vous savez, ce genre de problèmes... on n’est pas à la
maternelle ! »
Coach : « Comment l’avez-vous accueillie ? »
Patrick : « Accueillie ? »
Coach : « Oui, comment ? Et que lui avez-vous répondu lorsqu’elle vous a décrit la situa-
tion ? »
Patrick : « Ben, d’abord, je lui ai dit que ça ne servait à rien de se mettre dans un état pareil
pour si peu. Ensuite, j’ai voulu rester neutre et je lui ai demandé ce qui s’était passé exacte-
ment, en restant factuel : que lui a-t-il dit ? Qu’a-t-elle répondu ? Comment a-t-il réagi ? Bref,
comprendre ce qui s’est réellement passé. »
Coach : « Et vous avez eu l’impression de ne pas savoir écouter Amandine, c’est ça ? »
Patrick : « En effet. Elle me regardait en écarquillant les yeux, en essayant de se remémo-
rer les échanges qu’elle avait eus avec Serge. Elle ne se souvenait pas vraiment. Et plus
j’essayais d’être neutre et factuel, plus elle bredouillait. »
Coach : « Patrick, vous êtes de base Persévérant, vous utilisez un canal informatif/interroga-
tif, votre style de management est Démocratique et parfois Autocratique. Qu’est-ce qui ne
colle pas avec la situation que vous me décrivez ? »
La Process Communication, nous l’avons vu, nous donne un éclairage sur les moyens de
mieux communiquer, en nous connectant sur le bon canal (voir le chapitre 8, « Maîtriser
des outils et des techniques de coach ») et en visant la bonne « porte d’entrée » de nos
interlocuteurs (voir le chapitre 11, « Confrontations et tensions »). Nous avons découvert,
également, les différents styles de management à développer selon les personnes et les
situations.
L’analyse du coach
Dans le cas présent, je fais l’hypothèse qu’Amandine est une personne de type Empathique.
Qu’est-ce que cela induit ?
1. Elle a un canal de communication Nourricier : elle apprécie qu’on manifeste de la chaleur
humaine, qu’on lui témoigne de la compréhension et de la sympathie, et non qu’on la ren-
voie à des faits en « niant » ce qu’elle vient exprimer.
2. Sa porte d’entrée est l’émotion : lui parler de faits, d’actes ou de paroles ne résonne pas
chez elle. En revanche, elle aurait été sensible à l’attention portée à ses ressentis.
3. Ce type de personne apprécie un style de management Bienveillant : là encore, Patrick,
avec son style Démocratique, n’est pas centré sur les personnes, mais sur les faits.
Un autre outil permet d’éviter les décalages de communication ; il s’agit d’un modèle
définissant quatre types d’écoute, auxquels est associé un mode de questionnement spé-
cifique (figure 18-1) 1.
Figure 18-1
Les quatre types
d’écoute
• L’écoute analytique porte sur les faits, sur le « quoi » et vise l’analyse d’un problème.
Elle s’attache plus au fond qu’à la forme. C’est une écoute qui se focalise sur les détails.
C’est le type d’écoute activé par Patrick.
• L’écoute pragmatique recherche l’efficacité, l’action, l’organisation. Elle porte sur le
« comment » et les mises en œuvre concrètes.
Cette écoute aurait porté sur les solutions envisagées par Amandine.
• L’écoute empathique porte sur les ressentis ; c’est la qualité de la relation qui compte,
plus que le contenu. Elle se situe dans le partage d’émotions. On n’est plus dans l’action
immédiate.
C’est sans doute le type d’écoute auquel aurait été sensible Amandine (au moins dans un
premier temps) : d’abord évacuer ses émotions, se sentir écoutée, avant d’analyser et de
partir en action.
• L’écoute stratégique est celle des visionnaires, ceux qui imaginent l’avenir et/ou qui
voient le problème dans son ensemble.
Amandine n’aurait pas été plus sensible à ce mode d’écoute, puisque ce qui lui tient à
cœur, c’est d’être entendue, ici et maintenant, sur un registre émotionnel.
Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : adapter son type d’écoute
Coach : « Patrick, quel aurait été le ‘bon’ scénario pour écouter efficacement Amandine ? »
Patrick : « Découvrant ce modèle, je pense qu’une écoute empathique aurait été plus appro-
priée au départ, pour permettre à Amandine d’exprimer ses émotions. Ensuite, revenir sur
les faits avec une écoute analytique, puis rapidement vers la recherche de solution, à l’aide
d’une écoute pragmatique. Et enfin, une écoute stratégique, plus aérienne, lors d’un éven-
tuel deuxième entretien pour évoquer la situation avec recul et détachement par rapport à
l’émotionnel. »
Entraînez-vous à poser des questions visant soit à comprendre des faits détaillés, soit à
entrer en empathie avec une personne, soit à rechercher des solutions pratiques, en fonc-
tion du contexte.
Avec l’aide d’un coach ou en vous coachant vous-même, vous pouvez analyser a poste-
riori ces situations vécues et déterminer, compte tenu de la situation et des acteurs en jeu,
le juste type d’écoute qu’il fallait utiliser.
L’oiseau croit qu’il volerait plus vite sans l’air qui le freine.
L’évolution du rôle de chef de projet qui commande et contrôle vers celui d’un scrum-
master au service de son équipe (servant leader) constitue une difficulté majeure pour de
nombreux leaders, qu’ils soient expérimentés ou débutants. En effet, le système éducatif,
tout comme le fonctionnement des organisations, alimente depuis toujours le réflexe de
faire usage de l’autorité et de se conforter derrière un titre, dès lors qu’on est investi d’une
responsabilité.
L’objectif du coaching est précisément d’accompagner le scrummaster, expérimenté ou
débutant, à trouver le bon positionnement vis-à-vis de son équipe en n’étant ni trop, ni trop
peu présent, ni trop, ni trop peu directif et en interagissant avec elle de façon positive.
Patrick, notre scrummaster, s’est fixé comme objectif de trouver la « bonne posture »,
reconnaissant lui-même qu’il est trop directif ou interventionniste et qu’il est très attaché
à son expertise technique. Voyons comment ses séances de coaching l’aident à trouver sa
nouvelle légitimité et son juste positionnement.
Coach : « Patrick, quelle est votre difficulté à vous positionner vis-à-vis de votre équipe ? »
Patrick : « Ma difficulté, c’est d’avoir de l’expérience, plutôt plus que les membres de l’équipe,
et de ne pas pouvoir la mettre à profit. »
Coach : « Comment ça, ne pas la mettre à profit ? »
Patrick : « Eh bien, lorsque je sais ce qu’il faut faire, lorsque je sais que j’ai raison et que l’on
risque de partir dans une autre direction, je ne peux pas m’empêcher de leur dire qu’ils ont
tort. »
Coach : « Et comment leur dites-vous qu’ils ont tort ? »
Patrick : « Ça dépend… (silence). Je sais que parfois je m’emporte. Mais mince, soit ils n’ont
pas d’avis, soient ils se fourvoient. »
Coach : « Ils n’ont donc jamais raison ? »
Patrick : « Mais si, bien sûr. »
Coach : « Ah ! Ils sont donc compétents ? »
Patrick : « Bien sûr, je les ai recrutés pour ça. Et en plus, depuis neuf mois maintenant, ils
connaissent l’appli. Mais… »
Coach : « Donc, vous reconnaissez leur compétence. Vous disiez deux choses : soit ils n’ont
pas d’avis, soit ils se fourvoient. S’ils sont compétents, pourquoi n’ont-ils pas d’avis ? Obser-
vez comment cela se passe lorsque vous avez des discussions : qui s’exprime le premier,
sous quelle forme, quelle est la réaction des autres… »
Patrick : « Oui, je sais que j’affirme souvent mon point de vue avant tout le monde. »
Coach : « C’est normal pour une personne de base Persévérant : son besoin psychologique
est la reconnaissance de ses opinions ! Peut-être que ce qui peut changer, c’est le ‘avant
tout le monde’. Qu’en pensez-vous ? »
Patrick : « En effet. Et s’ils se fourvoient dans une mauvaise direction, il faut quand même
que je le leur dise… »
Coach : « En discutant, vous avez tout à fait la possibilité de faire valoir votre point de vue,
au même titre que les autres, en présentant les avantages et les inconvénients, en faisant
remarquer les risques à adopter telle ou telle solution ; c’est une discussion. En fait, c’est
juste la façon d’aborder le sujet qui vous donne une nouvelle posture. Comment allez-vous
aborder la prochaine discussion de ce type ? »
Patrick : « Par exemple, en faisant un tour de table ; et je m’exprimerai en dernier. »
Coach : « Pour qu’on retienne cette dernière proposition ? »
Patrick : « Non, pas nécessairement. »
Coach : « Vous êtes en train de me dire qu’une proposition émise par l’un de vos collabora-
teurs pourra être retenue, même si ce n’est pas la vôtre ? »
Patrick : « Oui, essayons, voyons. »
Coach : « Et si c’est une proposition dangereuse, présentant des risques, que faites-vous ? »
Patrick : « J’interviens pour expliquer en quoi elle est risquée. »
Patrick doit comprendre que son point de vue a toujours autant de valeur et que son expé-
rience doit évidemment être mise à profit. Ce n’est pas parce que l’équipe est dorénavant
auto-organisée et qu’elle prend ses propres décisions que le scrummaster ne participe
plus à ce processus de décision. La valeur de son avis est relativisée.
La première action de Patrick consiste donc à adopter une autre posture lors des dis-
cussions, en organisant un tour de table, en valorisant le point de vue de chacun ou en
revenant a posteriori sur le choix judicieux de telle solution proposée par un membre. Son
rôle n’est plus de savoir pour tout le monde ; il est de développer le potentiel de ses colla-
borateurs, en les autorisant à avoir un point de vue, même différent, tout en les protégeant
(voir les 3 P sur la figure 4-4). En effet, le scrummaster a la responsabilité de ne pas faire
prendre de risque inconsidéré à l’équipe.
C’est la position basse du coach (voir chapitre 6) : avec davantage d’humilité, le scrum-
master fait émerger ce potentiel et progresser ses coéquipiers, à condition de croire a
priori en leurs capacités. Lors de la séance de coaching, le coach a fait reconnaître et
formuler à Patrick la compétence de ses coéquipiers, ce qui est très important !
L’adoption de cette position basse par le scrummaster est la condition première pour
accepter de déléguer une partie de sa responsabilité. En effet, ce n’est plus lui qui décide
et qui fait faire : il amène l’équipe à décider et à faire.
Il peut alors être confronté à deux difficultés : celle de ne pas savoir déléguer et celle
d’être confronté à une équipe passive, qui fuit sa responsabilité.
Apprendre à déléguer
Nous avons vu que Patrick avait des réticences à déléguer la prise de décision, considé-
rant que ses collaborateurs « fuient leurs responsabilités », estimant qu’« ils ne veulent
pas s’engager » ou les jugeant comme des « assistés ».
Dans un premier temps, il importait qu’il mesure la nécessité d’adopter une position
basse et d’humilité par rapport à ses coéquipiers et qu’il reconnaisse leurs compétences.
Ensuite, apparaissent concrètement les freins à la délégation. Le travail en coaching
consiste à faire prendre conscience au scrummaster de ses propres craintes vis-à-vis de
la délégation et à en entrevoir les bénéfices.
Figure 19-1
Chemin vers
la passivité
Question au coach :
Comment gérer les personnes passives ? On ne peut pas les contraindre à réagir !
Il a par ailleurs un message contraignant « Sois parfait » : cela signifie qu’il est extrêmement
exigeant avec ses collaborateurs et que ceux-ci n’ont de valeur à ses yeux, surtout en situa-
tion de stress, que s’ils sont parfaits. Comme nul n’est parfait, il n’est pas enclin à déléguer
spontanément.
Le coaching lui a permis de prendre conscience que cette expertise pourra toujours être
valorisée, soit en s’exprimant lors des discussions techniques, soit en étant pédagogue avec
ses collaborateurs les moins expérimentés.
La poursuite du coaching va permettre de travailler sur son droit à l’erreur et les bénéfices
qu’il peut tirer à déléguer.
Coach : « Patrick, vous me dites que cela vous ennuie de déléguer votre responsabilité à vos
collaborateurs, parce qu’ils risquent de se tromper. Auriez-vous un exemple précis d’erreur
commise par l’un d’eux ? »
Patrick : « Oui, c’est souvent le cas, notamment sur les estimations. J’en ai assez de consta-
ter que certaines tâches ont été mal estimées et que certaines user stories n’ont pas été
livrées à la fin des sprints. »
Coach : « Que se passe-t-il dans ces cas-là ? »
Patrick : « Le product owner est mécontent, il lui arrive de râler ; on passe pour des nuls. »
Coach : « Des nuls ? Parce que les estimations sont une science exacte ? »
Patrick : « Allez expliquer ça au product owner ou au comité de pilotage, vous ! »
Coach : « Qui est confronté au product owner et au comité de pilotage, généralement ? »
Patrick : « Ben c’est moi ! Toujours agréable ! Je dois couvrir leurs âneries. »
Coach : « Comment restituez-vous ça à l’équipe ? Comment faites-vous remarquer à l’équipe
qu’il y a eu erreur ? »
Patrick : « Ils le voient, de toutes façons, avec les user stories non achevées. Et puis, quand
je redescends du comité de pilotage, ils entendent parler de moi ! »
Coach : « C’est-à-dire ? »
Patrick : « Eh bien, je les sermonne sec. Alors là, il n’y a plus personne, on ne les entend
plus. »
Coach : « Du coup, quelles décisions prenez-vous ? »
Patrick : « Maintenant, généralement, c’est moi qui estime lors des sprint planning meetings.
De toute façon, lorsque je leur demande leur avis, ils ne répondent rien ou valident mes esti-
mations. Comme ça, il y a moins d’erreurs. »
Coach : « Moins, dites-vous ? »
Patrick : « Oui, moins qu’avant, lorsque j’ai essayé de les laisser estimer. »
Coach : « Et maintenant, c’est vous qui estimez et il y a encore des erreurs ? »
Patrick : « Oui, l’erreur est humaine ! »
Coach : « Ah oui, et pour tout le monde d’ailleurs ! Il faut se planter pour pousser ! »
Patrick : « Pardon ? »
Coach : « Oui, connaissez-vous quelqu’un qui ne se trompe jamais ? A fortiori si c’est quelque
chose qui est nouveau pour lui ? »
Patrick : « Non, en effet, il faut se tromper souvent plusieurs fois avant de réussir quelque
chose, comme mon fils lorsqu’il apprenait à faire du vélo. »
Coach : « Alors, si on transpose ça à vos ingénieurs qui doivent estimer des tâches ? »
Patrick : « Oui, mais leurs erreurs coûtent cher ! »
Coach : « N’est-ce pas le prix à payer pour qu’ils apprennent et qu’ils sachent ? »
Patrick : « Allez expliquer ça à la Direction ! Expliquez que mes ingénieurs ne savent pas
estimer ! »
Coach : « S’ils ne l’ont jamais fait, comment pourraient-ils savoir ? Comment pourriez-vous
les aider à apprendre ? »
Patrick : « Peut-être en les laissant découper leurs tâches eux-mêmes et les estimer sans
que j’intervienne, puis faire une passe avec eux et leur donner mon point de vue. »
Coach : « Vous voyez, votre point de vue est toujours important ! Et vos coéquipiers commen-
ceraient à être autonomes. »
Patrick : « Puis, à la fin des sprints, analyser plus en détail les écarts et tirer les leçons. »
Coach : « C’est ce qu’on appelle l’amélioration continue. En plus, vous pouvez constater
qu’ainsi, vous commencez à déléguer une partie de vos activités. »
Patrick, pourtant formé à la méthode Scrum, comprend qu’il doit accorder le droit à
l’erreur. En fait, l’expertise technique du scrummaster, s’il en a une, est toujours valori-
sée, mais différemment. En laissant les ingénieurs estimer, ils apprennent, ils se respon-
sabilisent et ils s’impliquent davantage. S’ils commettent des erreurs, plus fréquentes au
début de leur apprentissage, ils s’améliorent au fur et à mesure qu’ils en tirent les leçons.
Rappelons que dans une démarche d’amélioration continue, qui vise à trouver la juste
pratique ou le bon processus, l’expérimentation est un droit ; l’erreur est donc acceptée,
ainsi que le droit à reconnaître ses erreurs. Ceci s’applique aux membres de l’équipe… et
au leader, qui, dès lors, a aussi le droit à l’erreur !
La position basse du scrummaster est de leur faire confiance a priori et de les encourager,
comme Patrick a dû le faire, naturellement, avec son fils qui apprenait à faire du vélo.
Patrick a donc retenu comme deuxième action de se mettre peu à peu en retrait lors des
sprints planning meetings (il m’est même arrivé de le sortir manu militari de la salle
durant les séances d’estimation collectives, afin qu’il n’interfère pas dans le processus !)
et de s’impliquer dans l’analyse à la fin des sprints.
Le constat que l’on peut faire est que la délégation n’est pas un choix aussi binaire qu’on
pourrait le penser, à savoir : soit le scrummaster délègue, soit il ne délègue pas. Il y a
en effet plusieurs niveaux de délégation, ce qui lui permet d’ajuster, là encore, son degré
d’intervention.
2. Jurgen Appelo, Management 3.0, Leading Agile Developers, Developing Agile Leaders, Addison-Wesley,
2011
Question au coach :
Et si le scrummaster délègue trop ? En d’autres termes, sous prétexte que l’équipe
est auto-organisée, si le scrummaster ne prend aucune décision, ne procède à aucun
arbitrage et se contente d’animer les cérémonies ?
Le risque, dans ce cas, est que le scrummaster n’endosse qu’une partie de la fonction, à
savoir celle concernant la garantie du processus, sans mettre en œuvre son rôle de manager
et de leader.
Le scrummaster de ce type se contente d’appliquer la méthode, souvent à la lettre, sans
apporter ni son âme ni sa personnalité. Il anime les cérémonies, formalise la documentation,
le cas échéant, assure les interfaces éventuelles, mais n’anime pas. Et l’on se retrouve avec
des équipes « molles ».
Cela peut s’avérer confortable pour un scrummaster n’ayant soit pas d’expérience, soit pas
d’autorité effective.
Ce cas peut devenir caricatural d’une mauvaise interprétation des méthodes agiles et, tout
simplement, le prétexte d’un rejet de la démarche.
J’ai vu chez un client, au bout de quelques mois d’implémentation, le titre de scrummaster
disparaître au profit de celui de project leader : l’idée était ainsi de réintroduire, au moins de
façon symbolique, la dimension managériale dans la fonction, pour entraîner et motiver les
coéquipiers. Il est vrai que, chez ce client, une forte expertise technique des ingénieurs ne les
incitait pas à prendre des responsabilités. Au contraire, ce qu’ils souhaitaient, c’était pouvoir
gérer la complexité technologique liée à leur composant, sans préoccupation de l’intérêt col-
lectif. Dans cette configuration, le scrummaster avait donc une mission plus fédératrice pour
gérer la complexité au niveau global et donner une dynamique à l’ensemble.
Donner du feedback signifie littéralement « nourrir en retour ». Nous avons tous besoin
d’être alimentés en signes de reconnaissance pour continuer à avancer. C’est une question
de survie, même si les retours sont négatifs ; en effet, les individus les préfèrent généra-
lement à l’absence de signes de reconnaissance. En fait, lorsqu’une personne manque de
signes de reconnaissance, elle a tendance à en chercher, mais en entrant dans des jeux
psychologiques (voir chapitre 11).
Éric Berne 3 définit six modes d’échanges de signes de reconnaissance, du plus pauvre au
plus riche. C’est ce qu’il appelle la structuration du temps, une grille de répartition du
temps consacré à chaque type d’échange de signes de reconnaissance au sein de l’équipe.
1. Retrait : aucun signe de reconnaissance n’est échangé. Chacun est seul à son poste de
travail.3
2. Rituel : c’est le minimum vital de la relation. On échange des rituels, des banalités,
des politesses (« Bonjour, comment allez-vous ? »).
3. Passe-temps : on partage davantage sur des sujets qui rapprochent (l’actualité, le
match de foot de la veille…). Il s’agit de discussions de salon.
4. Activité : les échanges ont une finalité, une activité en commun. On fait quelque chose
ensemble.
5. Jeu psychologique : les jeux de pouvoir ou jeux psychologiques manifestent souvent
la satisfaction négative du besoin de signes de reconnaissance (voir figure 11-2).
6. Intimité : relation de confiance, dans laquelle chacun se respecte et ose donner des
signes de reconnaissance positifs.
Bien entendu, plus on avance ensemble dans l’équipe, mieux on se connaît et plus on
s’autorise à se donner des signes de reconnaissance. On peut même en déduire que plus
les signes de reconnaissance positifs sont échangés, plus la performance de l’équipe est
grande. En effet, Berne a démontré la corrélation entre ces étapes et la productivité glo-
bale d’une équipe : celle-ci serait de 30 % en phase de retrait ou de rituel, de 50 % en
phase de passe-temps, de 95 % en phase d’activité, pour régresser à 75 % en phase de
jeux psychologiques et enfin, optimale à 120 %, en phase d’intimité.
On devine aisément que du temps soit nécessaire pour parvenir à l’étape ultime, l’équipe
traversant différentes étapes de maturation relationnelle (voir la quatrième partie).
Coach : « Patrick, selon vous, qu’ont voulu exprimer vos collaborateurs, lors de la dernière
rétrospective ? »
Patrick : « OK, je sais, ils voudraient qu’on les félicite à chaque fois qu’ils ont écrit un bout
de code sans bogue ! »
Coach : « Oui, et alors ? Vous ne le faites pas ? »
Patrick : « Vous imaginez ? Ce n’est pas possible. Ils sont sept, en plus. Et puis, c’est normal
de bien faire son boulot. »
Coach : « Et lorsqu’ils effectuent une tâche exceptionnelle ou qu’ils arrivent à traiter un pro-
blème ? »
Patrick : « Oui, je me fends d’un “Bravo”. »
Coach : « Et lorsqu’ils commettent une erreur, vous disiez que vous les sermonniez sec, c’est
ça ? »
Patrick : « Oui, enfin, euh… »
Coach : « Quel effet cela a-t-il sur les personnes concernées, à votre avis ? »
Patrick : « Je sais, peut-être que je devrais y mettre un peu les formes… »
Coach : « Par exemple, si quelqu’un vous montre un document qui ne vous semble pas clair,
comment pourriez-vous le lui dire ? »
Patrick : « Euh… c’est un peu brouillon et touffu ; il faudrait reprendre telle partie. Je ne sais
pas, moi ! »
Coach : « Et, de façon plus positive ? »
Patrick : « La lecture est difficile ou… »
Coach : « Oui, c’est déjà plus positif. Et “J’ai eu du mal à lire pour telles et telles raisons”,
qu’en pensez-vous ? »
Patrick : « Oui, je pourrais essayer. »
Coach : « Et pour une félicitation alors, sur ce même document, que diriez-vous ? »
Conditionnels Scrummaster : « Nous avons at- Scrummaster : « Nous n’avons pas at-
teint l’objectif. Félicitations ! » teint l’objectif. Comment nous amélio-
(Ce qu’il fait) rer pour le sprint suivant ? »
Équipier : « Le code de Nathalie
est de très bonne qualité, bien Équipier : « J’ai trouvé ton code trop
commenté, propre. Cela m’a été peu commenté, Fabien, pour que je
bien utile. » puisse le reprendre sans difficulté.
J’aimerais qu’on en discute ensemble,
pour la prochaine fois. »
Inconditionnels Scrummaster : « J’ai confiance scrummaster : « Vous êtes des fainé-
en vous ; vous êtes une équipe ants, je ne suis pas du tout satisfait. »
(Ce qu’il est) responsable. »
Équipier : « Fabien est nul, il n’a pas
Équipier : « J’ai plaisir à travailler le niveau. »
avec Luc ; il m’a beaucoup fait
rire durant ce sprint. »
Question au coach :
Comment donner des signes de reconnaissance lorsqu’ils sont négatifs ? Ce n’est
pas facile.
En effet, ce n’est pas facile. D’ailleurs, donner des signes positifs n’est pas toujours plus
facile !
Sans en abuser, il est indispensable que chaque membre de l’équipe développe également
sa capacité à « nourrir en retour » ses collègues et leur témoigne des signes de recon-
naissance.
Dire ce que l’on pense à ses collaborateurs est le plus beau cadeau qu’on puisse leur
faire : ils peuvent ainsi ajuster leur comportement ou leur travail… à condition qu’il ne
s’agisse pas d’un jugement sur leur personne ! Ne pas oser dire manifeste un manque de
confiance ou peut être interprété comme de l’indifférence ou du désintérêt (voir aussi la
fenêtre de Johari, figure 12-1).
• La structuration du temps
• Les signes de reconnaissance
Patrick, scrummaster de l’équipe Alpha, s’est défini comme objectif de développer son
leadership, afin d’obtenir l’engagement de ses coéquipiers. Je rappelle que la demande
initiale de coaching part du constat que les membres de l’équipe sont peu autonomes,
qu’ils fuient les responsabilités et qu’ils ont du mal à s’engager sur les livraisons.
Comment Patrick peut-il agir à son niveau pour obtenir cet engagement ? Nous allons
découvrir comment il peut développer sa capacité d’influence pour motiver et entraîner
ses coéquipiers à s’engager sur l’atteinte des objectifs.
Coach : « Patrick, aujourd’hui vous êtes respecté, reconnu pour votre expertise technique et
votre riche expérience, n’est-ce pas ? »
Patrick : « Oui, en effet. »
Coach : « Vous vous êtes engagé, lors d’une précédente séance, à adopter une position
basse, c’est-à-dire à vous mettre davantage en retrait afin de faire émerger le potentiel de
vos coéquipiers, notamment sur le plan technique, n’est-ce pas ? »
Patrick : « Oui, en effet. En déléguant davantage pour qu’ils soient plus autonomes. »
Coach : « Alors, à présent, comment allez-vous précisément assurer votre rôle de leader
auprès de votre équipe ? Sur quoi allez-vous baser votre leadership ? »
Patrick : « Si je dois mettre mon expertise technique en sourdine, ce qui va être difficile a
priori… » (Patrick fait une moue dubitative.)
Coach : « Attention, il ne s’agit pas de la mettre en sourdine, comme vous dites, mais simple-
ment de laisser de l’espace à vos coéquipiers pour qu’ils puissent élaborer eux-mêmes des
solutions, avec votre aide. L’un de vos objectifs est d’obtenir leur engagement. Qu’est-ce
qui, dans votre comportement, peut faire évoluer vos coéquipiers ? »
Patrick : « L’influence que j’exerce sur eux. »
Coach : « Et comment s’exerce cette influence, concrètement, si vous ne leur donnez plus
les réponses toutes faites ni les solutions ? »
Patrick : « En donnant et maintenant le cap. »
Coach : « Et qu’est-ce qui fait qu’ils vous suivent dans cette direction ? »
Patrick : « Ils ont confiance en moi. »
Coach : « Si je comprends bien, vous allez exercer votre influence en indiquant régulière-
ment à vos coéquipiers le sens de leur mission et de leurs activités et vous appuyer sur la
relation de confiance établie avec eux. »
Donner du sens
En tant que leader adoptant une posture de coach, le scrummaster aide l’équipe à tenir
son cap, c’est-à-dire à aller dans le sens de la vision.
☞ La vision du produit constitue l’objectif commun et la finalité du projet, la vision de
l’équipe étant un moyen d’y parvenir. J’invite le lecteur à se référer au chapitre 10, « Créa-
tion et structuration ».
Cette vision donne le sens, la direction à suivre : le scrummaster est garant du cadre et
des conditions pour que l’équipe progresse vers cet objectif et ne s’en éloigne pas. Il re-
centre en permanence l’équipe sur la valeur ajoutée pour le client. Son influence s’exerce
ainsi au niveau de la direction à prendre, pour éviter d’avancer en ordre dispersé.
Inspirer confiance
Au fil des sprints, les membres de l’équipe développent une relation de confiance envers
le scrummaster, et réciproquement. Trois conditions sont nécessaires pour gagner la
confiance de ses coéquipiers (figure 20-1).
Figure 20-1
Les trois
conditions
de la confiance
• Les compétences : le leader doit être doté de compétences fortes (métier, techniques
et/ou relationnelles). Il doit bénéficier d’une riche expérience et d’un savoir-faire recon-
nu qu’il met au service de l’équipe.
• La fiabilité : le leader qui inspire confiance tient ses engagements. Son exemplarité
est essentielle pour obtenir l’engagement des coéquipiers. Les Anglo-Saxons nomment
cette qualité Walk The Talk, autrement dit la mise en cohérence des paroles et des actes
– ce qu’on appelle également la congruence (voir chapitre 17).
• La fidélité : ce même leader est loyal envers son équipe. Il ne la trahit pas. Il est sin-
cère, authentique et transparent. Cette fidélité se mesure lors des échanges formels ou
informels, dans la résolution des conflits ou encore dans la gestion des interfaces avec
l’extérieur.
Dans le cas de l’équipe Alpha, celle-ci peut très probablement faire confiance à Patrick.
Premièrement, cela fait plusieurs mois que Patrick et son équipe travaillent ensemble. Par
ailleurs, de base Persévérant, Patrick est vraisemblablement attaché au respect des valeurs,
loyal et engagé. Notons que la question existentielle des personnes de type Persévérant est
« Suis-je digne de confiance ? » : de fait, Patrick aura à cœur d’être respectueux et fidèle ;
il est sans doute un leader « éthique ».
Question au coach :
L’influence n’est-elle pas une forme de manipulation ?
Influence Manipulation
La relation est basée sur la confiance réciproque. Il y a généralement abus de confiance.
Les objectifs sont clairs et explicites. On avance masqué : les objectifs sont flous, non
annoncés ou délibérément faux.
Il n’y a pas d’intention pour l’autre. Il y a emprise : il y a une intention de faire en-
treprendre à l’autre des actions sans que celui-ci
s’en aperçoive.
Elle s’appuie sur des valeurs, des principes, La fin justifie les moyens.
des informations réelles, sans se réclamer de
l’autorité.
L’autre est conscient de l’influence ; elle est ac- Il y a prise de contrôle sur l’autre : la personne
ceptée ou rejetée. La personne garde son libre- perd sa capacité de jugement ou de discerne-
arbitre. ment.
Bienveillance. Généralement malveillance.
Si l’objectif (le produit à développer) est défini par le client et si l’équipe est responsable de
définir son processus pour y arriver, le scrummaster ne peut avoir d’intention pour l’équipe.
Tout comme le coach n’a pas d’intention pour son coaché, le scrummaster n’a que la respon-
sabilité du cadre et des conditions du succès.
La finalité
Un premier levier de motivation est « la mise sur orbite » de chacun des membres de
l’équipe. En effet, chacun a besoin de connaître et de comprendre le sens de ses actions :
la finalité du projet, de l’équipe ou de la mission sur ce projet doit être claire.
La maîtrise
Le deuxième levier de motivation est la maîtrise. La loi des 3 P1 (Préférences, Pra-
tique, Performance) – à ne pas confondre avec les 3 P de la posture du coach – stipule
que nous avons tous des préférences (P) dans notre travail, des activités que nous préfé-
rons faire à d’autres ; si nous les pratiquons (P), nous prenons du plaisir et nous sommes
performants (P). Alors, nous sommes fiers.
Il est par conséquent essentiel, pour le leader, de veiller à ce que les membres de l’équipe
se répartissent, si possible, les tâches selon leurs goûts et leurs capacités.
Si malheureusement certains travaux ne correspondent ni aux attentes ni aux compé-
tences d’un coéquipier, le scrummaster sera vigilant de ne pas mettre durablement le col-
laborateur en situation d’échec, puis de démotivation. Dans ce cas, il doit s’interroger sur
la disponibilité des compétences ; si les compétences ne sont pas disponibles, les moyens
de les acquérir doivent être mis en œuvre (c’est l’engagement de moyens). On envisage
également des actions de formation, de mentoring ou de transfert de connaissances et de
travail en binôme.
Quoi qu’il en soit, cette affectation doit rester provisoire pour le coéquipier auquel le
leader devrait pouvoir présenter d’autres perspectives possibles pour la suite. L’avantage,
dans le découpage des activités d’un sprint, c’est que les tâches même les plus ingrates
sont de petite taille et durent donc peu de temps.
La personne peut également ne pas disposer des compétences, mais désirer les dévelop-
per grâce à cette opportunité : le leader doit alors être disponible pour accompagner la
personne dans sa montée en compétences.
☞ Voir également la matrice des compétences de l’équipe (figure 10-2).
Le code SACRÉ 2
Mise en situation de coaching individuel avec Patrick : déterminer le code SACRÉ
des coéquipiers
Patrick : « Le problème, c’est que c’est difficile de motiver tout le monde ; chacun a ses
motivations personnelles. Il faut un temps fou pour comprendre ça pour chaque personne et
ensuite satisfaire ses attentes. »
Coach : « En effet, vous avez tout à fait raison : chaque personne a ses propres leviers de
motivation. Vous voyez, nous parlions de management situationnel, adapté à chaque situa-
tion et à chaque personne ! »
Patrick : « Je suppose que c’est ça aussi développer ses compétences relationnelles ! »
Coach : « En effet. Vous vous souvenez de l’engagement que vous avez pris de passer
quotidiennement du temps auprès de vos collaborateurs, puis de consacrer régulièrement à
chacun un entretien en face à face ? » (voir chapitre 18).
Patrick : « Oui, tout à fait. ».
Coach : « Et vous vous demandiez de quoi vous pourriez bien parler, en dehors des pro-
blèmes rencontrés. Eh bien, l’un des objectifs de ces échanges plus ou moins formels pour-
rait être de déterminer le code SACRÉ de chacun des membres de l’équipe. »
Patrick : « Le code SACRÉ ? »
Coach : « Oui, pour entrer en communication avec chacun d’eux et identifier ses leviers de
motivation. »
Patrick : « ??? »
• Sécurité : tout ce qui permet de réduire les peurs et les risques est source de motiva-
tion.
• Appartenance : le lien social, les relations, l’ambiance de travail, la chaleur humaine
sont essentiels pour avancer.
• Confort : tout ce qui simplifie la vie est source de motivation ; ce peut être un confort
matériel, la clarté des objectifs, l’existence de procédures, les horaires aménagés….
• Reconnaissance : les personnes ayant soif de reconnaissance fonctionnent de façon
optimale lorsqu’elles reçoivent des retours positifs.
• Épanouissement : l’épanouissement, le développement ou le dépassement de soi, le
défi ou la nouveauté constituent un autre axe de motivation.
Besoin Destructeurs
Sécurité Rumeurs : délocalisation, fusion-acquisition, change-
ment de direction, déménagement, réorganisation…
Manque d’information, manque de transparence.
Plan social, chômage partiel.
Appartenance Éloignement géographique, distance.
Absence de rencontre physique, absence d’échanges.
Mise au placard.
Mauvaise ambiance, tensions, conflits.
Confort Sentiment d’indifférence de la direction au bien-être
des collaborateurs.
Localisation du lieu de travail : zone industrielle,
distance domicile/travail.
Aménagement du lieu de travail.
Aucune commodité (transport, restaurant
d’entreprise…).
Mauvaises conditions de travail (bruit, éclairage,
température…).
Vétusté, complexité de l’équipement de travail.
Absence d’assistance (hotline, formation…).
Reconnaissance Absence de signes de reconnaissance élémentaires :
merci, bonjour, félicitations.
Critiques permanentes.
Humiliations, maltraitance, harcèlement.
Exclusion d’une décision, d’une réunion.
Absence de concertation.
Développement de soi et épanouissement Ennui, habitude, lassitude.
Absence de défis, de nouveautés.
Obtenir l’engagement
L’engagement se fonde sur l’appropriation des enjeux et des objectifs d’une mission par le
collaborateur. L’exécution « parce qu’on me l’a demandé » n’est ni durable, ni optimale.
Un engagement n’est possible que si « j’en ai envie », « j’ai compris », « j’ai les compé-
tences » ou « je peux/je veux les acquérir ».
Coach : « Patrick, vous êtes à la fin d’un sprint planning meeting. Comment obtenez-vous
l’engagement de tous les coéquipiers sur le nombre de story points ou le nombre de user
stories, bref, sur le périmètre défini ? »
Patrick : « Ben, justement, cet engagement n’est pas formel. Et lorsque je leur demande de
lever la main pour s’engager ou sinon d’exprimer les raisons de leur désaccord, c’est mou,
c’est tiède. Je n’ai pas l’impression qu’ils mesurent l’importance ou tout simplement l’utilité
de la pratique. »
Coach : « Vous me disiez que, souvent, c’est vous qui estimiez les tâches parce que les esti-
mations de vos collaborateurs n’étaient pas fiables ; et qu’ils finissaient toujours par valider
ces estimations. N’est-ce pas ? »
Patrick : « Oui. À un moment, il faut trancher. En tout cas, je pensais qu’il fallait trancher. J’ai
évolué depuis. »
Coach : « Oui. Et alors ? »
Patrick : « Eh bien, je pense qu’il faut les laisser estimer, éventuellement se tromper, analyser
a posteriori et comprendre pourquoi, s’améliorer la fois suivante. J’ai mieux compris mon
rôle de soutien, de guide si nécessaire, pour leur apporter un éclairage sans leur donner la
solution, ma solution… »
Coach : « Qu’est-ce que ça va changer, ce nouveau comportement, à votre avis ? »
Patrick : « Justement, si c’est eux qui réfléchissent, qui estiment et qui décident, ils s’enga-
geront d’autant mieux. Encore faut-il qu’ils acceptent cette responsabilité ! »
Coach : « Que pouvez-vous commencer à faire, vous ? »
Patrick : « Leur faire confiance et adopter cette fameuse position basse. Il faut aussi que je
règle cette difficulté que j’ai avec le droit à l’erreur et surtout le fait de l’assumer vis-à-vis de
mes supérieurs. »
Patrick réalise qu’il a un rôle clé dans l’implication et l’engagement de ses coéquipiers.
Il se rend compte que leur passivité ou leur « mollesse » n’est pas inéluctable et qu’il existe
d’autres moyens d’obtenir leur engagement que de compenser en décidant lui-même.
Patrick : « Je lui rappelle ses points forts, qu’il a déjà gagné, qu’il a déjà battu cet adver-
saire… »
Coach : « Oui, des signes de reconnaissance conditionnels positifs. »
Patrick : « Je lui indique ses points de progrès : par exemple, qu’il est trop raide sur ses
jambes et qu’il devient facile à déséquilibrer ou qu’il se fait surprendre en début de match en
avançant trop vers son adversaire… »
Coach : « Oui, des signes de reconnaissance conditionnels négatifs. »
Patrick : « Puis, je lui dis que j’ai confiance en lui, qu’il va y arriver, que je crois en lui et que
je suis fier qu’il en soit arrivé là. »
Coach : « Oui, un signe de reconnaissance inconditionnel positif. Exactement les trois lois de
l’entraîneur ou la théorie du sandwich ! »
Patrick : « ??? »
Coach : « Oui : un peu de positif, ce qu’il est possible d’améliorer... et, dernière couche, les
encouragements ! Un peu de négatif entre deux couches positives. Alors, avec vos coéqui-
piers, comment procédez-vous ? »
Le scrummaster, en tant que leader, est cet entraîneur à la veille d’un match, lorsqu’il
clôture un sprint planning meeting au lancement du sprint.
Plus généralement, le scrummaster leader met en cohérence les objectifs du projet avec
les objectifs individuels qu’il prend en considération. Il met en avant les contributions
de chacun ; il félicite, il donne des signes de reconnaissance, il donne les moyens et ne
sanctionne pas. Il fait en sorte que les réussites soient célébrées et les échecs analysés. Il
intervient aussi bien sur le plan collectif qu’individuel.
• Le code SACRÉ
• La théorie du sandwich ou trois lois de l’entraîneur
Parce qu’elles sont essentielles à la fois dans l’application du processus et dans la fédéra-
tion de l’équipe (outil de développement d’une équipe), les réunions agiles ou cérémonies
doivent être menées efficacement. La façon dont on les anime affecte grandement les
interactions au sein de l’équipe ; et pourtant, force est de constater que nombre de scrum-
masters ne sont pas spontanément de bons animateurs.
On voit de plus en plus, dans les manifestations autour de l’agilité, des ateliers fondés sur
des agile ou innovation games. Il est vrai que l’agilité offre l’occasion d’introduire un peu
d’amusement dans la conduite des projets. Et cela ne fait pas de mal !
Cependant, on ne doit pas pour autant en oublier la rigueur du processus et le rôle central
des cérémonies qui ponctuent les sprints.
Si une démarche agile s’adapte au contexte de l’organisation, du projet ou de l’équipe, je
constate trop souvent, chez certains clients, des implémentations approximatives : on re-
porte sine die la rétrospective en prétextant un manque de temps, on ne tient pas le daily
stand-up meeting tous les jours, par exemple. On dit qu’on fait de l’agilité, mais… on en
oublie certains fondamentaux, indispensables au succès de la démarche, en particulier
dans l’animation des cérémonies.
Devant le constat que les réunions sont peu efficaces, nous organisons un atelier, animé
par Patrick, au cours duquel tous les membres de l’équipe Alpha sont invités à réfléchir sur
l’amélioration de leur efficacité en réunion. Je suis observatrice.
N.-B. : J’ai passé un moment au préalable avec Patrick pour lui apporter quelques éclairages
méthodologiques et m’assurer qu’il adopterait une position basse lors de l’atelier lui-même.
Étape n° 1
1. http://www.scrum.org/scrumbut
Étape n° 2
Après le constat assez unanime que les cérémonies ne sont pas optimisées, l’équipe recons-
tituée réfléchit et propose des actions correctives. L’objectif est de définir, à partir de chaque
dysfonctionnement, la solution à mettre en place pour l’éliminer.
Il s’agit d’un exercice qui responsabilise chaque membre en l’impliquant dans l’identifi-
cation des solutions ad hoc. Deux questions leur sont posées : « Que pouvez-vous faire à
votre niveau individuel pour améliorer l’efficacité des cérémonies auxquelles vous par-
ticipez ? » et « Quelles actions collectives proposez-vous ? ». Ainsi, la posture basse de
Patrick leur permet d’identifier eux-mêmes les solutions apportées et, par là, de s’impli-
quer davantage dans le processus.
Ce qui est intéressant, de surcroît, dans cet exercice, c’est que Patrick s’entraîne à la posture
de coach en animant une réunion portant précisément sur l’amélioration des réunions !
Le partage des réflexions nous amène à élaborer une grille synthétique et mnémotechnique,
OPALE.
O = Objectif
Il est essentiel de fixer un objectif unique à chaque réunion. Il existe, dans une démarche
agile, des cérémonies incontournables, bien identifiées, dont l’objectif et le résultat atten-
du sont prédéfinis. Puis, en marge de ces cérémonies, d’autres réunions peuvent bien sûr
être organisées lorsque le besoin s’en fait sentir.
Quel est l’objectif de ces différentes réunions ?
• Ce peut être le recueil ou la diffusion d’informations ; à cet égard, la première partie
d’un sprint planning meeting, par exemple, a vocation à clarifier le périmètre du sprint
qui démarre et à obtenir du product owner toutes les informations nécessaires pour
démarrer.
• Ce peut être une réunion d’échanges ou de brainstorming visant à faire émerger des
axes de réflexion ou des idées, voire des actions ; c’est l’objectif d’une rétrospective.
• Le daily stand-up meeting est l’occasion de faire un point d’avancement (en détectant,
le cas échéant, des obstacles aux progrès de l’équipe, et non en apportant des solutions
à ces difficultés rencontrées ; ce sera l’objet d’une autre réunion).
• La production d’un livrable projet, tel qu’un sprint backlog, est l’objectif de la deu-
xième partie du sprint planning meeting.
• D’autres réunions peuvent avoir lieu pour résoudre un problème ou bien prendre une
décision par rapport à un événement.
L’objectif est le cap à suivre ; il doit être communiqué, clarifié si nécessaire, affiché, vi-
sible par tous et validé en début de réunion. Il est ainsi plus facile, lorsqu’on s’en éloigne,
de le rappeler à l’esprit de chacun. On gagnera du temps !
Tout ce qui ne concourt pas à l’atteinte de l’objectif doit être noté sur un paper board, et
sera traité ultérieurement, lors d’une autre réunion. C’est le parking lot.
Jacques rencontre un obstacle (troisième question) ; Christophe lui suggère une solution,
mais Magali pense qu’il a tort (« Non, il existe un moyen bien plus simple… »).
Stop ! La discussion technique sert-elle l’objectif de mesurer l’avancement de l’équipe ? Non.
Elle doit faire l’objet d’une autre réunion, dédiée. Patrick, qui anime la réunion, doit poliment
interrompre le débat et proposer aux trois protagonistes de se réunir après le daily meeting.
P = Participants
Le choix des participants est fonction de l’objectif ; dans une cérémonie agile, il est assez
simple puisqu’en théorie, toute l’équipe participe, plus d’autres interlocuteurs selon le
thème.
Question au coach :
Tous les membres de l’équipe doivent-ils être mobilisés durant une demi-journée,
voire plus, lors d’un sprint planning meeting ?
J’aurais tendance à répondre par l’affirmative, puisqu’une équipe agile est intégrée et que
l’engagement est collectif, quels que soient les corps de métier. On anticipera ainsi plus faci-
lement les problématiques d’interfaces entre les deux couches.
Cependant, cette question est très intéressante car elle en soulève une autre : a-t-on de
« bonnes » user stories fonctionnelles, sans référence aux tâches techniques sous-jacentes ?
N’a-t-on pas des user stories déjà formulées par domaines de compétences techniques ? Car
si l’on a des user stories bien rédigées, purement fonctionnelles, dans ce cas, tous les corps
de métier doivent être présents.
Une autre question se pose : dans le cas de feature teams (équipes organisées par fonction-
nalités), doit-on bloquer toute l’équipe lorsque le product owner présente les user stories d’un
domaine fonctionnel particulier ?
Dans ce cas, je propose une réunion en plusieurs temps : une introduction en plénière, suivie
de sessions en sous-groupes par domaines fonctionnels, puis une synthèse générale.
Ainsi, tous les participants ne sont pas mobilisés durant toute la cérémonie et l’on évite l’ennui
et la lassitude.
En tout état de cause, la liste des participants (experts, décideurs, personnes en charge de
la validation) doit être définie en amont afin de disposer de toutes les forces vives pour
atteindre l’objectif durant la cérémonie.
Un autre moyen évitant à certains participants de s’ennuyer et les motivant à rester est de
leur déléguer un rôle actif !
Rôles délégués
Cette suggestion s’appuie sur le modèle des réunions déléguées2 développé par Alain
Cardon, maître coach certifié de l’International Coach Federation.
En effet, pourquoi concentrer toutes les fonctions entre les mains d’une seule personne ?
L’animateur (en général, le scrummaster) devient alors le pivot central et porte tout le
processus sur ses épaules. Il doit animer, distribuer la parole, prendre des notes, veiller
au temps qui passe… Quelle charge !
Les participants s’ennuient ? Qu’ils deviennent actifs ou acteurs ! Ils trouvent ça trop
long ? Qu’ils contrôlent les dérives ! Les réunions sont stériles ? Qu’ils recadrent vers
l’objectif !
Cette délégation des rôles au sein d’une réunion va dans le sens de l’auto-organisation
et de la responsabilisation de l’équipe : le scrummaster délègue certaines fonctions de
l’animation.
2. Voir http://www.metasysteme.fr/docshow.php?nid=325&language=1
A = Agenda
Quel que soit le type de réunion et l’objectif, un agenda doit être défini : soit en lien avec
le contenu de la réunion (sujet A, sujet B…), soit en lien avec la démarche proposée (étape
n° 1 : brainstorming, étape n° 2 : mise en commun, étape n° 3 : sélection…).
N’oublions pas que le principe du timeboxing est la base du développement itératif !
Chaque thème/sous-thème abordé doit être évalué en termes de durée.
Cet agenda garantit de rester centré sur l’objectif à atteindre ou de mettre en exergue le
fait qu’on ne l’atteindra pas dans le temps imparti. C’est le plan de la réunion.
Il est affiché dans la salle et validé par l’ensemble de participants. Communiqué avant la
réunion, il peut induire des actions préparatoires pour les participants.
L = Livrable(s)
Comment évaluer le succès de la réunion ? Comment savoir si l’objectif est atteint ? En
listant, a priori, le ou les livrables à produire : s’agit-il d’un sprint backlog (pour un sprint
planning meeting) ? D’un plan d’actions (à l’issue d’une rétrospective) ? D’une charte
(atelier Ready/Done) ?
Ainsi, tout ce qui ne contribue pas directement ou indirectement à la production du ou
des livrables est une digression. Il ne s’agit pas d’éviter les sujets connexes, tout aussi
importants ; il s’agit de respecter le périmètre défini (le périmètre d’un sprint n’est-il pas
figé ?). En se focalisant sur l’objectif (O) et en respectant le périmètre, le résultat de la
cérémonie (L) sera d’autant plus facilement atteint.
E = Environnement
En fonction de l’objectif, de la durée de la réunion et du nombre de participants, on déter-
mine la taille et la configuration de la salle (un U, des tables séparées pour le travail en
sous-groupes…). On prévoit les aspects logistiques et matériels (vidéoprojecteur, Post-it,
feutres…).
On convient de la technique d’animation qui sera utilisée. Les agile games ou innova-
tion games3 sont, à cet égard autant d’outils à notre disposition pour rendre efficaces ces
réunions.
Citons quelques innovation games : « Remember the future », « Product Box », « Buy a
feature » ou « Speed Boat ».
Animer efficacement
Si certains conseils paraissent évidents, voire simplistes, je constate que les pratiques
les plus élémentaires sont souvent sacrifiées : par ignorance (tout le monde n’a pas suivi
de formation sur la conduite de réunions !), par gêne, par maladresse ou par manque de
temps.
Sont listées ci-après des actions et des pratiques fondamentales pour l’efficacité des réu-
nions. Il convient de les rappeler au scrummaster ou à tout autre membre de l’équipe
amené à animer. Elles concernent à la fois le cadre et le processus et constituent une clé
pour le succès de la démarche.
Préparer
Préparer chaque cérémonie est un gage de succès. On n’arrive pas à la réunion en décou-
vrant le sujet, sauf s’il s’agit d’un brainstorming ou d’un sujet de discussion ouvert.
La backlog review
Nombreuses sont les réactions des coéquipiers qui arrivent au sprint planning meeting
sans avoir eu le temps de prendre connaissance des user stories venant dans la suite du
product backlog. La réunion est alors abordée avec une matière inconnue de tous, sauf
du product owner ! Ne nous étonnons pas si les participants sont passifs !
Régulièrement, dans les projets de transformation que j’accompagne, les membres des
équipes finissent par ressentir la nécessité de planifier une cérémonie supplémentaire,
celle de la backlog review. Il s’agit, en fait, de planifier en sprint n, une réunion de deux à
trois heures pour anticiper et avoir des échanges sur le contenu du sprint n+1. Ne faisant
pas partie du processus principal, cette cérémonie est pourtant extrêmement utile pour
identifier les risques et familiariser l’équipe avec ce qui va suivre. Les participants arrivent
alors au sprint planning meeting suivant plus avisés, et donc plus actifs.
La préparation porte, en outre, sur le processus, sur les outils, ce qu’on a appelé « l’envi-
ronnement », et sur la gestion de la documentation (convocations, ordre du jour, docu-
ments prérequis…).
Accueillir
L’accueil ou synchronisation (voir chapitre 8) est essentiel ; il donne le « la » pour la
suite. En plus de la nécessaire ponctualité, la synchronisation permet de s’assurer que
tout le monde est bien là. L’animateur invite chaque participant à se recentrer sur l’objec-
tif de la réunion : un tour de table pour que chacun livre un mot, une phrase, un ressenti…
La technique du photolangage
Cette technique est utilisée pour communiquer au sein d’un groupe au travers de photo-
graphies. Elle peut servir pour la synchronisation ou check-in.
La technique ESTP
L’outil de synchronisation ou check-in a été évoqué dans le chapitre 8, « Maîtriser des
outils et des techniques de coach ». ESTP (Explorer – Shopper – Tourist – Prisoner) est
un exemple d’outil de synchronisation (figure 21-1).
Quel en est le principe ? Au démarrage d’une cérémonie, notamment lorsque des tensions
se font jour, voici un bon moyen de prendre la température !
Chacun doit se prononcer (de façon anonyme ou non) sur son état d’esprit avant de com-
mencer la cérémonie :
• E = Explorateur : j’arrive en explorateur, je suis impatient d’apprendre et de découvrir
quelque chose ;
• S = Shopper ou Acheteur : j’arrive en acheteur, je suis preneur d’une bonne idée ou
d’une information utile ;
• T = Touriste : j’arrive en touriste, je n’attends rien de particulier de cette réunion ;
• P = Prisonnier : j’arrive en prisonnier, car on m’a contraint à participer à cette réunion.
Le résultat reflète l’état d’esprit général d’une assemblée de participants à une réunion
qui démarre.
Figure 21-1
La prise
de « température »
Agenda
L’étape suivante consiste à balayer et à valider avec les participants l’agenda affiché.
Règles et discipline
Ensuite, on convient ensemble des règles ou on rappelle les règles convenues : pas de
téléphone portable, respect et écoute, pas d’autocensure, faire des interventions brèves
pour ne pas monopoliser la parole, rester centré sur l’objectif, écouter sans juger…
Présenter et afficher les règles permet de solliciter chacun et d’inviter les éventuels
détracteurs à s’exprimer. Dès lors qu’il n’y a pas d’opposition aux règles, celles-ci sont
applicables par tous. Il est alors plus aisé de les rappeler, en cas de non-respect.
Lors d’une rétrospective, par exemple, il n’est pas inutile de rappeler la prime directive
de Norman Kerth :
« Indépendamment de ce que nous allons découvrir, nous devons croire fermement
que chacun de nous a donné le meilleur de lui-même, compte tenu de ce qu’il connais-
sait au début, de ses compétences et capacités et de la situation du moment. »
Rôles
On se répartit les rôles (comme indiqué dans la section précédente).
Animer
La légitimité du scrummaster est à présent fondée sur sa capacité à animer et à dynami-
ser l’équipe, mais aussi à permettre à celle-ci de gagner en autonomie. Par conséquent,
ses qualités d’écoute sont fondamentales. Et l’on n’écoute pas qu’en ouvrant grand ses
oreilles ; écouter, c’est aussi questionner, reformuler, observer.
Situations Action
L’équipe perd de vue l’objectif. Si des digressions peuvent s’avérer nécessaires pour maintenir une
forme de dynamique, l’animateur ou le pousse-décision doit repren-
dre le contrôle en reformulant les échanges et en posant des ques-
tions de recentrage (« Sommes-nous en train de progresser vers
notre objectif, qui est… je vous le rappelle ? »).
Certains membres sont passifs. S’agit-il de désintérêt ? De crainte de s’exprimer ?
1re stratégie : poser des questions simples et directes (« Alain, que
pensez-vous de ce qui vient d’être dit ? » ou « Émilie, pourquoi ne
répondez-vous pas à la question ? »).
2e stratégie : laisser le silence faire effet, peut-être que le groupe va
s’animer de lui-même.
Ou bien un changement de rythme est nécessaire : proposer une
pause, raconter une anecdote, proposer de faire autre chose…
La discussion est animée, voire L’animateur doit veiller à la bienveillance des échanges ; on reste
emportée. en +/+. Rappeler les règles (affichées !), le respect, l’écoute.
La contradiction est positive ; ne vous sentez pas personnellement
mis en cause.
Noter les points d’accord et les points de divergences, les inscrire au
tableau, reformuler.
Des apartés monopolisent Si ce phénomène dure, arrêter les débats (avec des gestes) et de-
quelques personnes. mander à ceux qui discutent à part de partager leurs opinions.
S’ils ne souhaitent pas partager car cela n’a rien à voir avec le sujet du
groupe, insister sur le fait qu’on a besoin d’eux, que leur avis compte
pour l’atteinte de l’objectif de la réunion.
Un participant monopolise la Savoir l’interrompre, reformuler ce qu’il vient de dire et relancer les
parole ou « sait tout ». échanges avec le groupe, en évitant son regard.
Évaluer et clore
Le scrummaster résume les échanges en s’appuyant sur l’agenda et rappelle les temps
forts de la réunion ; il liste les décisions prises ou décrit le résultat obtenu (livrable).
Précision
Le pousse-décision ou le scribe peut également se charger de cette tâche, si ce rôle lui
a été attribué en début de réunion.
Il demande à chacun de s’exprimer si des éléments n’ont pas été évoqués ou si des points
restent encore en suspens. Le parking lot (points relevés, non évoqués) recense les points
à traiter.
Grâce à l’observateur, qui s’est mis en position « méta », le groupe a un « miroir », qui
a du recul. Après sa restitution au groupe, l’équipe peut consacrer cinq ou dix minutes
pour s’interroger ; l’idée est de mener une mini-rétrospective de la cérémonie agile, sur
les points suivants.
• Avons-nous atteint l’objectif (O) ? Avons-nous produit les livrables (L) attendus ?
• L’agenda (A) a-t-il été respecté ?
• La présence (P) de tous était-elle nécessaire ?
• La réunion elle-même était-elle nécessaire ?
• Cette réunion aura-t-elle une suite ? Laquelle ?
• Sur le processus de prise de décision : avons-nous réussi à prendre des décisions ? Ont-
elles été débattues ? Sont-elles le résultat d’un débat ? D’un compromis ? D’une négo-
ciation ? D’un raisonnement logique ? Sont-elles le résultat d’un vote ? D’une pression ?
Tout le monde a-t-il eu l’occasion de s’exprimer ?
• Sur les comportements concernant la qualité des échanges : l’atmosphère était-elle
détendue ? Comment avons-nous géré les divergences ? Les échanges étaient-ils spon-
tanés ?
• Comment pouvons-nous améliorer le déroulement de cette cérémonie ?
Évaluer la cérémonie participe de la démarche d’amélioration continue d’une équipe
agile.
Figure 21-2
Le ROTI
Patrick, malgré son expérience, a tiré profit du rappel des B.A.-Ba de l’animation de
réunion. Il a mis en application ces apports méthodologiques, puis nous avons dédié, a
posteriori, une séance de coaching individuel au débriefing et à l’analyse de sa prestation
d’animateur.
• Le scrummaster doit adopter une position basse pour animer les cérémonies et laisser
ainsi plus de place pour les échanges et l’implication des participants ; il doit, en outre,
savoir gérer certaines situations difficiles.
• Enfin, toute cérémonie bénéficie d’une mini-rétrospective permettant d’en améliorer
continuellement l’efficacité.
Équipe Alpha
Contexte d’intervention
L’équipe de sept personnes est engagée dans un projet agile depuis neuf mois. Le respon-
sable Qualité & Méthodes considère que Patrick, le scrummaster, n’exerce pas de façon
optimale ses nouvelles fonctions ; en effet, les membres de l’équipe sont peu autonomes,
fuient les responsabilités et ont du mal à s’engager.
Demande officielle
Le responsable Qualité & Méthodes et le scrummaster souhaitent amener l’équipe à da-
vantage d’implication, de responsabilité et d’engagement. Comment aider Patrick avec
des séances de coaching ?
Résultats visibles
Patrick a manifestement fait évoluer son style de leadership, rendant ainsi ses collabo-
rateurs plus autonomes ; cela peut s’observer lors des sprint planning meetings, animés
aujourd’hui à tour de rôle par un membre de l’équipe.
S’il subsiste encore des écarts de performance à la fin des sprints, entre ce qui était prévu
et ce qui est réellement réalisé (done), les coéquipiers sont de plus en plus à l’aise avec le
découpage des tâches et les estimations.
Ils résolvent la plupart de leurs problèmes, généralement ensemble, sans solliciter systé-
matiquement Patrick.
Ce dernier continue à progresser dans l’adoption de sa nouvelle posture, grâce aux
séances de coaching et de supervision qu’il a encore régulièrement ; celles-ci lui sont
bénéfiques pour ajuster plus précisément encore son degré d’intervention.
Il est par ailleurs plus convivial dans sa façon de communiquer avec ses coéquipiers,
s’appuyant sur son capital jovialité, qu’il avait encore peu développé dans sa fonction !
Une ambiance plus détendue règne au sein de l’équipe et les résultats en fin de sprints
s’améliorent.
Équipe Bêta
Contexte d’intervention
Une équipe récemment constituée de cinq ingénieurs de haut niveau, chacun avec une
expertise bien spécifique, mène un projet stratégique en appliquant une démarche agile.
Le directeur du projet, qui supervise plusieurs projets en parallèle, constate sur celui-ci
que l’équipe n’en est pas vraiment une, puisque chaque membre travaille isolément. Par
conséquent, la performance collective n’est pas optimale.
Demande officielle
Le directeur de projet formule une demande visant à aider les coéquipiers à mieux col-
laborer et à tirer profit de l’efficacité du groupe, sans avoir d’a priori sur le dispositif à
mettre en place.
En accord avec le directeur de projet et la DRH, Catherine a bénéficié par la suite d’un
coaching individuel, pour mieux endosser son rôle de leader et adapter son style de mana-
gement au profil de son équipe. En effet, elle a pris conscience qu’elle n’avait pas adopté
une posture de leader et qu’il lui était dès lors difficile de fédérer cette équipe.
Résultats visibles
En capitalisant sur le profil Rebelle de Catherine (créatif, spontané et ludique) et grâce
à l’introduction d’innovation games, l’accompagnement a permis d’amener progressi-
vement les membres de l’équipe à sortir de leur isolement ; ils se sont pris au jeu et on
constate aujourd’hui qu’ils apprécient de se rencontrer plus régulièrement, même s’ils
travaillent sur des technologies bien distinctes.
L’un des développeurs, particulièrement en retrait lors des premières cérémonies, ex-
prime aujourd’hui plus facilement ses opinions, tout à fait constructives pour l’équipe.
Catherine provoque beaucoup moins ses coéquipiers, car elle a appris à accepter leur
différence et à utiliser le « bon » canal et la « bonne » porte d’entrée. Ses séances de
coaching lui ont permis de prendre ses responsabilités de leader et de mettre à profit sa
capacité à créer une ambiance détendue pour créer du lien au sein du groupe.
Équipe Gamma
Contexte d’intervention
L’équipe de R&D est composée de onze personnes et n’applique pas encore une dé-
marche agile. Justement, le responsable de l’équipe mène une réflexion et réalise une
étude d’opportunité sur l’introduction des méthodes agiles.
Demande officielle
La demande exprimée par ce responsable est de bénéficier de l’éclairage d’un coach pour
anticiper les difficultés prévisibles sur le plan humain, en vue de possibles résistances au
changement.
Précision
Il s’agit ici d’une demande d’expertise auprès d’un coach et non d’une demande
de coaching.
Résultats visibles
Bruno a été largement sensibilisé aux risques de la transformation, sur le plan humain.
Il a mesuré l’importance, pour lui, de se faire accompagner de façon rapprochée pour
minimiser ces risques, par des séances de coaching individuel.
Avec le soutien de la DRH, il est en train de déployer un plan de communication et de
formation important auprès de l’équipe et de l’organisation dans son ensemble.
Un coach travaille plus précisément sur la transformation de l’équipe, en l’aidant en ce
moment à construire sa vision d’équipe et à fixer ses règles de fonctionnement et de com-
munication.
Grâce à cet effort d’anticipation, le contexte est beaucoup moins critique pour aborder
cette transformation : les entretiens ont permis de commencer à informer, à faire passer
des messages et à dédramatiser les conséquences du changement. Les actions sont mieux
adaptées et ciblées pour chacun des acteurs. Le succès de la transformation agile est en
bonne voie.
L’objectif de cet ouvrage était de vous faire découvrir et apprécier l’intérêt d’une posture
de coach dans une démarche de transformation agile : incarnée par le leader de l’équipe,
en l’occurrence le scrummaster, ou apportée par un coach externe, vous avez pu mesurer
sa complémentarité avec les autres approches et les bénéfices considérables que peuvent
en tirer les équipes.
En effet, ceux-ci étant les leviers du changement et de la performance, c’est aux ressentis
et aux relations interpersonnelles que le coach s’intéresse, davantage qu’aux méthodes et
aux outils. Il devient un facilitateur incontournable pour la conduite du changement, au
même titre que d’autres intervenants.
Le coaching n’est plus un luxe réservé aux seuls dirigeants ou managers privilégiés du
haut de la hiérarchie. Ce n’est plus un phénomène de mode, mais bien un dispositif mana-
gérial innovant pour sécuriser une démarche de transformation. Le coaching est devenu
une composante indispensable dans les organisations désireuses de pérenniser le succès
de la démarche, avec, à la clé, la responsabilisation, l’engagement, la motivation et la
fidélisation des collaborateurs, acteurs du changement et créateurs de valeur.
qui rend les résultats du coaching durables pour la personne ou l’équipe accompagnée
dans son objectif de changement.
La pratique du coaching présente, en outre, d’autres dangers. En effet, la « matière pre-
mière » du coach est la personne, ses émotions, ses freins, ses craintes, ses désirs… – une
matière fragile sur laquelle on peut difficilement calquer des modèles ou reproduire des
solutions toutes faites. Le coach lui-même est une personne, avec ses propres ressentis,
peurs, envies ou souvenirs… Le risque est grand de projeter sur le coaché ses propres
émotions ou de filtrer, c’est-à-dire d’interpréter ou d’analyser rapidement ce qu’il entend
ou ce qu’il observe, en fonction de lui-même.
C’est la raison pour laquelle, si l’on considère que le coach lui-même est un outil au
service de ceux qu’il accompagne, il doit régulièrement affûter ses outils et ajuster sa
posture. Comme l’on confiait autrefois ses ustensiles au rémouleur, le coach « aiguise »
périodiquement son savoir-être et son savoir-faire avec un superviseur. Ainsi, il se pro-
tège et protège son ou ses coachés. Grâce à cette supervision et à un éventuel travail de
développement personnel, le coach prend du recul sur sa pratique, analyse a posteriori ses
actions d’accompagnement et développe son identité professionnelle. Cette construction
identitaire et cet ajustement le prémunissent contre de possibles dérives du coaching et
autres risques de manipulation.
Si en tant que scrummaster, chef de projet ou manager, vous avez relevé la pertinence et
la nécessité d’adopter une posture de coach, c’est une prise de conscience positive. Bravo,
c’est la première étape ! Ensuite, pour aborder votre propre changement, au-delà de votre
lecture, le mieux est de commencer par vous faire accompagner par un coach qui sera, en
quelque sorte, votre superviseur. Puis, en découvrant les joies et les difficultés du métier,
vous aurez peut-être envie d’aller plus loin et de vous former aux concepts et techniques
de base du coaching. Il existe pléthore d’organismes dédiés.
Néanmoins, retenez que l’on n’apprend pas à être coach ; on le devient avec le temps,
grâce au vécu et à la supervision. C’est une posture spécifique et utiliser quelques outils
de coach ne signifie pas qu’on l’a définitivement adoptée !
Attention !
Ce n’est pas le nombre de cordes à l’arc du coach qui fait sa compétence. Beaucoup
d’outils existent, mais rien ne compte plus que son savoir-faire, sa créativité, son imagina-
tion et sa spontanéité, pour les utiliser et les adapter au contexte dans lequel il intervient.
N’est-il pas lui-même son premier outil ?
J’ajouterai que, dans un contexte de changement, avec des enjeux et des risques poli-
tico-économico-organisationnels, le professionnalisme du coach est un premier niveau
de sécurisation, même si, en parallèle, on peut envisager une formation, un transfert de
compétences et une supervision du leader en charge de l’équipe, avec un retrait progressif
du coach externe.
Le coach externe a d’autant plus de neutralité et respecte d’autant plus facilement la confi-
dentialité des échanges qu’il a une distance affective avec les personnes et les équipes
qu’il accompagne et qu’il a signé une charte de déontologie.
Précision
Ne sont pas prévus dans cette estimation la formation aux méthodes, l’audit des pra-
tiques existantes, les préconisations organisationnelles ni la mise en place des outils. Il
s’agit simplement, à titre indicatif, de l’accompagnement des personnes, c’est-à-dire du
coaching à proprement parler, d’une équipe et de son leader.
Nous avons parlé essentiellement de coaching avec la toile de fond d’une transformation
agile, parce que la philosophie agile s’y prête particulièrement bien.
Cependant, cette démarche d’accompagnement n’est évidemment pas exclusive à ce
contexte. Le coaching tel qu’il est décrit, c’est-à-dire le coaching d’une équipe face à un
changement ou l’accompagnement d’un leader face à deux changements, est applicable à
bien d’autres contextes.
1. Voir http://www.aecoaching.eu/medias/fichiers/referentiels_competences.pdf ou
http://www.sfcoach.org/professionnalisation/referentiel-de-competences.html
Ce qu’il faut retenir, c’est que le coach et le coaching ne sont pas une baguette magique.
Il ne faudrait d’ailleurs pas que le mot « coach » véhicule trop d’espoirs, trop d’attentes
déçues, là où d’autres facilitateurs ont échoué en agissant seulement sur certains leviers.
Le coach est un allié complémentaire : il agit sur les savoir-être, là où les autres facili-
tateurs du changement interviennent sur les savoirs et les savoir-faire, absolument indis-
pensables ; le coach ne se substitue pas aux autres intervenants.
Scrummasters, chefs de projet, team leaders, managers, coachs (agiles ou non), acteurs
des projets et coéquipiers, j’espère tout simplement que vous aurez trouvé des éléments
vous permettant de mieux comprendre, au moins partiellement, comment nous, indivi-
dus, fonctionnons en tant qu’êtres émotionnels et comment progresser dans la gestion des
interactions avec les autres.
Puissent nos dirigeants, nos DRH, nos responsables hiérarchiques être sensibles à cette
approche, pour le succès de nos transformations agiles !
J’ai connu Véronique lorsqu’elle se formait au coaching dans notre prestigieux établisse-
ment d’HEC.
Lors de notre première rencontre, je me souviens de m’être interrogée, comme pour
beaucoup de nos élèves, sur sa prédisposition à être en position basse, celle du coach.
Comme tous les consultants et formateurs, ce n’était pas gagné d’avance !
Heureusement, en tant que formateur et coach, nous apprenons à aller au-delà des appa-
rences pour découvrir le potentiel et les forces cachées de chacun.
Agile ? Oui, Véronique le fut tout au long de l’année, pour développer sa créativité tout en
exploitant sa rigueur. Elle a même adouci son « look » au cours des mois… comme quoi
on évolue de l’intérieur, et dans le même temps, de l’extérieur !
Je crois en sa valeur en tant que coach, car elle a démontré sa capacité à définir et à
maintenir le cadre. Il faut beaucoup « d’agilité » pour ramener dans les rails un propos
qui s’égare, pour saisir la petite étincelle qui, activée, déclenchera la motivation, pour dis-
cerner le petit bout du « fil d’Ariane » qui facilitera la sortie du labyrinthe des problèmes
et conduira vers une solution.
Le coaching agile ouvre sur l’accompagnement de la créativité dans un cadre structurant
la pensée.
Le coach accompagne un individu (ou une équipe) pour que celui-ci trouve ses solutions,
découvre son potentiel, renoue avec ses valeurs essentielles (les valeurs communes,
quand il s’agit d’une équipe), s’installe à sa « juste » place, cultive son équilibre.
Centré sur le ressenti, le coaching agile apporte des outils et des méthodes pour faciliter
l’avancée de chacun dans l’équipe au bénéfice du groupe, dans son métier, dans sa voie,
dans sa vie.
Et Véronique met bien en évidence, pour le coaching agile, les trois principes qui faci-
litent les interrelations et sous-tendent la progression d’une équipe efficace :
• le principe de Protection de ses membres, en sécurisant la réflexion grâce aux règles de
fonctionnement et aux jalons posés dans le déroulé des rencontres ;
• le principe de Permission, en offrant un espace de liberté structuré et en validant l’au-
dace, l’ouverture et le franchissement de portes ;
• le développement de la Puissance, en accompagnant l’évolution du potentiel de chacun
et en valorisant les réussites.
Le manager agile est décrit comme un « leveur d’obstacles ». L’écoute « active » et la fi-
nesse d’observation du coach ne peuvent que faciliter son action. Compléter les méthodes
agiles par une approche de coach ne peut que les renforcer et les rendre encore plus effi-
caces dans un environnement en constante transformation.
Françoise Engrand1
Art-thérapeute et coach, formateur et superviseur de coachs
1. Françoise Engrand, ancien professeur au CRC-HEC, a formé de nombreux coachs au CESA Coaching.
Elle a animé des stages et des formations autour de « l’art et le management », « l’art et le coaching »,
notamment dans la prévention des risques psycho-sociaux.
Elle a rédigé de nombreux articles sur la gestion des conflits, la négociation commerciale, le management
d’équipes et a participé à l’ouvrage collectif du CRC, Les équipes intelligentes, en 1999.
* Niveau :
Facile : vous pouvez utiliser cet outil assez facilement, sans être coach.
Avancé : vous pouvez utiliser cet outil en ayant déjà adopté une posture de coach; entraînez-vous avant de l’utiliser.
Coach professionnel : seul un coach certifié peut utiliser l’outil ; cependant, n’hésitez pas à étudier les apports qu’il
aurait dans votre contexte, en faisant appel à un coach externe, par exemple.
Les individus et leurs interactions plus que les processus et les outils ;
1. http://agilemanifesto.org
Abréviations utilisées :
PO : Product Owner
SM : ScrumMaster
PBL : Product Backlog
DoD : Definition of Done
Firewall
Littéralement, pare-feu. Terme employé parfois pour désigner le scrummaster.
Go/no-go
Éléments permettant de décider si l’on poursuit ou l’on arrête une action, un processus ou
une étape déterminée d’un projet.
Innovation game
Atelier ludique organisé avec l’équipe, soit à des fins pédagogiques, lors d’une session
de formation par exemple, soit à des fins d’efficacité opérationnelle, pour formaliser une
vision, dresser un bilan…
Itération ou sprint
« Tranche de temps » répétitive – une boucle ou timebox – de quelques semaines, au
cours de laquelle une ou plusieurs fonctionnalités sont développées ; tous les acteurs y
sont impliqués. L’utilisateur visualise un résultat tangible à la fin. Il restitue son feedback.
Lab day (Laboratory day)/Free day
Principe (facultatif mais ô combien profitable !) d’aménager un espace temps pour
l’équipe, dédié à l’exploration, l’investigation, l’(auto-)formation, la recherche… réguliè-
rement, tous les trois ou quatre sprints, par exemple.
Mentoring
Le mentoring, à la différence du coaching, est un transfert de compétences, entre un pro-
fessionnel expérimenté et un « junior ». Le mentor témoigne de son expérience.
Métacommunication
Capacité à échanger sur sa façon de communiquer (forme), indépendamment du sujet (fond).
Pair-programming (programmation en binôme)
L’une des pratiques phares de l’eXtreme Programming, qui consiste à faire travailler les
développeurs en binôme, sur un même poste de travail.
Parking lot
Liste des points non évoqués, relevés à la fin d’une cérémonie (réunion).
Planning game (ou planning poker)
Réunion de planification à laquelle participent le client et l’équipe de réalisation ; le client
décrit les fonctionnalités, puis l’équipe estime le coût d’implémentation en listant et en
évaluant les activités nécessaires. Cette réunion a lieu avant chaque sprint. Ses particu-
larités sont d’être une démarche collective d’estimation et de planification, sous forme
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Programming…, Eyrolles, 3e édition, 2010
T facilitateur 51, 52 V
organisation 272
technical story 127, 292 VAKOG 96
transparence 12
technique des six chapeaux 172 valeur agile 11, 13
triangle dramatique de Karpman
théorie du sandwich 245 Vignes, Romain 123
140
Thomas-Kilmann (modèle) 133 visualisation 119, 201
trousse de Steiner 52
timebox 156
Tuckman, Bruce 112
timeboxing 292 W
transformation agile 1
cadre sécurisé 77 U Wilson, Rob 205
contexte 9, 17 user story 19, 292
Contexte d’intervention
Le responsable Qualité & Méthodes considère Le directeur du projet constate que l’équipe L’équipe n’applique pas encore une démarche
que Patrick n’exerce pas de façon optimale ses n’est pas vraiment une équipe, puisque chaque agile. Son responsable mène une réflexion et
nouvelles fonctions de scrummaster ; il considère membre travaille isolément. Par conséquent, la réalise une étude d’opportunité sur l’introduction
que les membres de l’équipe sont peu autonomes, performance collective n’est pas optimale. des méthodes agiles.
fuient les responsabilités et ont du mal à
s’engager.
Acteurs
Patrick est le scrummaster : 44 ans, 10 ans Catherine est le scrummaster. Bruno est le responsable de l’équipe.
d’ancienneté, double expertise fonctionnelle
Type de personnalité Process Com : base Type de personnalité Process Com : Base
et technique, formation certifiante Scrum reçue,
Rebelle (besoin de contacts). Promoteur.
personnalité imposante, joviale et directive.
Autres membres : Driver ou message contraignant
Type de personnalité Process Com : Base
Persévérant. Paul (base Rêveur, besoin de solitude) prédominant : Dépêche-toi.
Driver ou message contraignant Pablo Autres membres :
prédominant : Sois parfait Parent. Alexis Sylvie (base Empathique)