Système de drainage par un géocomposite triplanaire de l’Installation de Stockage de

Déchets Non Dangereux (ISDND) permettant l'élimination de la contamination chimique

du réservoir de Flix
Drainage system with triplanar geocomposite in the landfill for the remediation of the
chemical contamination in Flix’s reservoir

Résumé :

Après le dernier épisode de forte mortalité des poissons survenu le 25 décembre 2001 en
aval du barrage de Flix, l'Agence des déchets et l’Agence de l'eau de Catalogne ont mené
diverses études sur la composition des sédiments du réservoir de Flix, dont la dernière,
datée de novembre 2003, prouve l'existence d'une contamination historique issue de
l'activité industrielle, faisant apparaître des niveaux élevés d'organochlorés, de métaux
lourds et de radionucléides. On peut en conclure l'existence d'une contamination importante
des sédiments du lit du réservoir et de dépôts anthropiques sur la rive droite. Pour remédier
à cela, le Ministère Espagnol de l'Agriculture, de l'Alimentation et de l'Environnement a
chargé la société publique Aguas de las Cuencas Mediterráneas (Acuamed) de la
conception et la réalisation d'une opération visant à l'élimination de la contamination
chimique du réservoir de Flix. Parmi les travaux nécessaires pour entreprendre ce projet
pionnier, il a fallu construire une Installation de Stockage de Déchets pour entreposer les
matières draguées du fleuve, après séchage et traitement adéquat. Les directives
européennes relatives aux Installations de Stockage de Déchets rendent obligatoires la
conception d'un système de drainage pour le contrôle des eaux et la gestion des lixiviats. À
cet effet, on a recouru à un géosynthétique de dernière génération capable de supporter des 1
charges élevées de façon permanente (> 40 m de déversement sur le géocomposite) et de
garantir une capacité de drainage suffisante à long terme. Le présent article détaille la
conception et l'utilisation d'un géocomposite drainant formé d'un géoespaceur triplanaire en
PEHD (pour le drainage) associé à deux géotextiles en PP (pour la filtration, la séparation et
la protection) offrant des prestations mécaniques élevées, dont une résistance au
poinçonnage statique supérieure à 2,3 kN, une perméabilité supérieure à 60 l/m²s et un
grammage de 200 g/m². Considérant le peu de références existantes pour cette application
en Espagne et les exigences techniques élevées qu'elle requiert, il s'agit d'une intervention
singulière dans le domaine des géosynthétiques.

Abstract:

After the hard last episode of high fish mortality happened downstream the Flix dam on 25th
December 2001, the Catalan Generalitat, the Waste agency and Catalan Water Agency
conducted several studies over Flix reservoir sediments composition where last one,
November 2003, shows the existence of historical pollution from the industrial activity. The
contaminants detected were mainly organochloride compounds, heavy metals and
radionuclides. As result was concluded the existence of significant pollution sediments in the
reservoir bed and anthropogenic deposits just on the right hand of the river. To remedy the
problem, the Ministeriode Agricultura, Alimentación y Medio Ambiente del Gobierno de
España (MMA, Spanish Ministry of agri-culture and Environment) entrusted to the State
owned society Aguas de lasCuencasMediterráneas, SA(AcuaMed) the design of the
necessary actions for the elimination of the chemical pollution of Flix’s reser-voir. Amongst
these actions of this pionery project, it was required to build a controlled landfill in order to
store the dredged material from the river once dried and properly treated. According to the
European landfill Directives, it is mandatory to design a drainage system for water control
and leachate management. The solu-tion chosen for this purpose was a last generation
geosynthetic which was able to withstand high dead loads (>40 m of sludge over the
geocomposite) and to ensure an adequate long-term flow capacity. This article details the
design and use of this drainage geocomposite composed of a tri-planar HDPE geonet
(drainage) combined with two PP geotextiles (filtration, separation and protection) with high
mechanical properties whose resistance to static puncture exceeds 2,3 kN, a permeability
over 60 l/m²s and a mass of 200 g/m². This is a singular project in the geosynthetics world,
given the scarce existing references for this application in Spain and the high technical
requirements of this remediation.

1. INTRODUCTION
Le réservoir de Flix, situé dans la partie basse de l'Èbre, retient actuellement dans sa cuvette
des centaines de milliers de mètres cubes de boues, probablement rejetées par une usine
chimique établie sur sa rive droite. Ce sont des éléments résiduels, constitués de composés
chimiques mélangés à d'autres composés de nature inerte. Les contaminants appartiennent
à trois groupes principaux : organochlorés, métaux lourds (principalement du mercure) et
radionucléides. Ils se trouvent dans des concentrations pour le moins relativement élevées,
qui sont susceptibles de transmettre leur contamination à l'eau circulant dans le fleuve ; une
transmission qui semble s'être déjà produite, si l'on en juge par l'historique d'épisodes
ponctuels de franchissement des seuils de tolérance de la teneur en composants nocifs pour
l'écosystème. Face à cette situation, les pouvoirs publics ont décidé d'initier un processus
consistant à concevoir, analyser, développer, comparer et choisir parmi les différentes
solutions d'intervention propres à résoudre le problème ou à éviter ou atténuer la
transmission à l'environnement de ces éléments nocifs.

En conséquence, une des interventions prioritaires et urgentes confiées par le Ministère

Espagnol de l'Agriculture, de l'Alimentation et de l'Environnement à la société publique 2
Aguas de las Cuencas Mediterráneas (Acuamed) a été l'élimination de la contamination
chimique du réservoir de Flix.

Figure 1. Localisation.
2. CONTEXTE DE L'INTERVENTION
Comme pour d'autres pays développés, la législation espagnole relative aux rejets a évolué
au fil du temps vers plus d'exigence, obligeant ceux qui produisent des déchets à se
conformer à des limites toujours plus strictes. Mais la simple accumulation au fil du temps de
rejets autorisés peut mener à tout instant à des situations non prévues de création et de
pérennisation de masses de déchets qui rendent l'écosystème vulnérable à des
phénomènes naturels concrets, tels que crues, vents ou brusques variations de température.

La fabrication de produits chimiques sur les berges du réservoir a débuté à la fin du XIXème
siècle, générant depuis de nombreux produits variés, en fonction des avancées
technologiques et des tendances de la demande.

Les processus initiaux reposaient sur la production de chlore et de soude obtenus à partir du
sel par électrolyte au mercure. Plus récemment, on a introduit l'apatite comme matière
première supplémentaire pour produire du phosphate bicalcique ; cette apatite contient à
l'état naturel un certain pourcentage de radionucléides, se concentrant physiquement dans
les rejets au cours du processus. D'autre part, on ne peut exclure que l'une des matières
contaminantes déposées ait son origine dans les matières arrachées directement au lit du
fleuve en amont.

La morphologie elle-même du
fleuve Èbre a évolué de façon
significative dans cette zone
tout au long du siècle passé. À
chaque nouvelle construction
d'un barrage sur un fleuve, la 3
conséquence immédiate est
que le bras mort engendre une
sédimentation plus importante
des matières solides arrachées
qu’emporte habituellement le
courant ; les lacs de barrage
ont ainsi tendance à se
colmater. En cela, le barrage
de Flix n'est pas différent, ainsi,
la force d'érosion et
d'arrachement des matières du
lit du fleuve entretenue
naturellement par l'Èbrea été
impactée et réduite par la
construction du barrage. Si
auparavant, la plupart des
rejets de l'usine étaient
charriés par le courant vers
l'aval, ensuite, la grande
majorité d'entre eux se sont
vus retenus dans la cuvette du
barrage.
Figure 2. Vue aérienne en 1970.
 On peut donc dénombrer trois agents fondamentaux qui interviennent dans le colmatage du
réservoir de Flix au fil du temps : les effluents de l'usine, les matières arrachées aux
sédiments de l'Èbre et de la stagnation des eaux du fleuve par le barrage, qui sont tous liés à
l'intervention de l'Homme.
C'est sur la base de l'ensemble de ces
considérations que l'on s'est engagé dans la
recherche de solutions pour éviter le risque de
contamination continue ou sporadique.

2.1. Processus générateurs de déchets

Les matières formant actuellement la rive du

réservoir à hauteur de l'usine proviennent, en
grande partie, des déchets issus de l'activité de
l'usine elle-même. Les processus ayant pu
engendrer la majeure partie de ces matières
amoncelées ou sédimentées sur la rive sont les
suivants :

a) Combustion du charbon.

b) Dissolution du sel.

c) Trichloréthylène.

d) Perchloréthylène et tétrachlorure de
carbone.
4
e) Phosphate bicalcique.

Figure 3. Vue aérienne en 1985.

2.2. Processus potentiellement contaminants

Comme nous l'avons déjà indiqué, les contaminants en présence relèvent de trois groupes
principaux : les radionucléides, les composés organiques et les métaux lourds
(principalement le mercure).

Métaux  Mercure
lourds Ce sont les composés organiques qui peuvent
avoir les provenances les plus diverses issus
notamment des processus du DDT (de 1945 à
1975), du PER-TETRA (depuis 1972), des PCB
 PCB
(de 1959 à 1987) ou du tétrachlorure de
Organochlorés  DDT
carbone (de 1947 à 1972).
 Hexachlorobenzène

Radionucléides  D’origine naturelle

Figure 4. Contaminants principaux.

3. SOLUTION ADOPTÉE
Les études réalisées ont permis de proposer deux solutions, selon que les déchets restent
dans le réservoir (solutions in situ) ou sont, au contraire, extraits et transférés (solutions ex
situ).

Diverses raisons techniques (les deux solutions différant peu au plan économique) ont
permis de conclure que la solution dite ex situ était la solution optimale.

Les travaux à accomplir peuvent être catégorisés en :

3.1. Travaux préliminaires

• Construction d'un mur de

palplanche en double
alignement de 1300 m de long,
clôturant l'enceinte des travaux
contre la rive droite du réservoir
pour isoler le fleuve des boues
contaminées (cet élément est
commun aux deux solutions
proposées).

L'intérêt principal étant ici de créer 5

une enceinte abritée (en eau
calme) et indépendante des eaux
vives de l'Èbre, de sorte que
durant l'opération sur le réservoir,
le débit du fleuve puisse être
maintenu sous la forme d'un canal
sur la rive gauche du réservoir et
que tout incident potentiel au
cours du chantier puisse être
confiné sans que la contamination
ne se propage en aval. Figure 5. Photographie d'ensemble et de détail du
réservoir de Flix. On remarquera la barrière bloquant
la propagation des déchets chimiques

• Construction d'un mur écran de pieux sécants de 1100 m de long sur la berger droite du
réservoir pour éviter le risque de sapement de la côte, dû au retrait de la retenue, que
constituent les déchets et, simultanément, éviter tout flux du sous-sol de l'usine vers le
réservoir.

• Construction d'un collecteur intercepteur des écoulements d'effluents présents dans

l'usine.

• Construction, dans l'enceinte de l'usine, de divers entrepôts pour abriter les installations
de traitement des matières et de l'eau extraites, ainsi que d'unités de stockage.
• Mise en conformité et imperméabilisation d'une Installation de Stockage de Déchets de
classe II à Racó de la Pubilla, obéissant à des critères d'exigence supérieurs à ceux
qu'impose la réglementation en vigueur.

• Construction de sept puits pour l'approvisionnement en eau des localités situées en aval.
Leur utilisation étant exclusivement réservée aux cas d'urgence.

3.2. Travaux de production

Une fois l'enceinte réalisée, on pourra procéder à l'extraction des déchets (à plus petite
échelle, cette activité fait partie de la solution in situ).

L'extraction de la fraction submergée sera effectuée au moyen de dragages écologiques au

sein d'une seconde enceinte constituée de rideaux plastiques flottants. Ceci permettra de
réduire la mobilisation des contaminants et de créer une dépression dans la zone de
dragage évitant à l'eau de s'échapper. On complètera cela par la mise en place d'une petite
pompe pouvant fonctionner lors d'interruptions du dragage. Pour éviter toute mobilisation des
contaminants, il est nécessaire qu'elle garde un rendement faible.

Une fois extraite, la matière doit faire l'objet d'un traitement, dont l'objectif (dans la solution
ex situ) est l'obtention de déchets suffisamment propres pour les rendre admissibles au
confinement final dans la décharge prévue à cet effet.

Le traitement respect les étapes ci-dessous :

• Tri granulométrique, à l'aide de cribles et d'hydrocyclones, suivi d'une déshydratation

des boues au moyen de cuves de décantation et de filtres-presses.

• La fraction solide sera triée en fonction des concentrations de contaminants présents, les 6
fractions les plus propres étant acheminées vers la décharge et celles qui ne satisfont pas
aux critères de mise en décharge bénéficiant d'un traitement spécifique. Après étude, les
traitements suivants ont été adoptés (alternativement ou consécutivement) :

– Désorption thermique (élimination des composés organiques) : les

matières sont introduites dans un four de désorption à moins de 350ºC pour
éviter toute évaporation de mercure.

– Oxydation : si les principaux contaminants des boues déshydratées sont

des composés volatils en concentrations modérées, celles-ci sont oxydées
dans une cuve à mélange par l'adjonction de réactif et d'eau. Après le
mélange, les matières passent dans des cuves de réaction et produisent, au
bout de 2 heures, un composé inerte non soluble dans l'eau et prêt à la mise
en décharge.

– Stabilisation (élimination des métaux lourds) : si les boues en sortie affichent

une concentration en mercure et autres métaux lourds élevée, elles sont traitées
en usine de stabilisation.
En passant par des trémies, les boues se mélangent à l'eau, au ciment et à des
additifs spécifiques, permettant la stabilisation du mercure pour éviter sa
présence dans l'éventuel lixiviat des boues.

• L'eau du processus est envoyée à la station d'épuration (EDAR), qui produit autour de
cent litres par seconde.

Le schéma ci-dessous illustre l'importance cruciale des contrôles de contamination pour que
chaque processus puisse être approuvé avant passage à l'étape suivante de la chaîne de
décontamination. De la même façon, des normes strictes de sécurité sont suivies pour la
manipulation des boues afin d'éviter toute atteinte des personnes ou de l'environnement.

Gaz filtrés

Gaz filtrés

Gaz filtrés
Usine de Atmosphère
désorption

Station boues ISDND de

Extraction Centre de tri
Hangar
écologique des déchets d’oxydation classe II

Usine de Station eau

Enceinte
stabilisation d’épuration palplanche
Captation des composés
soufrés à l’aide de filtres à
charbon actif

Point de contrôle & Laboratoire

d’analyse
Matière
Processus de
décontamination décontaminée

7
Figure 6. Processus de traitement des boues contaminées.

Après traitement, la matière est convoyée par camion vers l’Installation de Stockage de
Déchets Non Dangeureux (ISDND) de classe II. (Le déchet n'est ni toxique ou dangereux, ni
inerte).

3.3. Travaux de démantèlement

- Fermeture de l’ISDND

- Démontage de la paroi de palplanche

- Démantèlement des intercepteurs des eaux de surface et remise en place du déversement

dans le réservoir des collecteurs d'eaux de pluie et d'effluents industriels

- Dépose des éléments mécaniques et mobiles de la station d'épuration

- Démantèlement du bâtiment de la station et des éléments fixes qu'il contient

- Renforcement de la stabilisation au moyen d'un talus d'enrochements en grosses pierres.

4. CONCEPTION INITIALE DU SYSTÈME DE DRAINAGE DE l’ISDND

Dans cet article, nous nous focaliserons sur le système de drainage de la décharge qui,
comme indiqué plus haut, doit satisfaire aussi bien aux directives européennes qu’aux
normes de l'état membre où est réalisée l'opération.
Ces deux normes nécessitent la conception et la réalisation d'un système de drainage pour
la collecte des lixiviats générés au sein de l’ISDND puis expédier dans un bassin à lixiviats
où ils seront ultérieurement traités.

Considérant les caractéristiques et l'impact social et environnemental de l’ISDND, il a été

prévu dans ce projet la mise en place des couches suivantes pour la construction du
nouveau casier de l’ISDND.(figure 5) :

- Système principal de drainage pour les lixiviats situé sur la géomembrane imperméable en
PEHD (GMB-P) servant à l'imperméabilisation secondaire.

- Système de drainage pour la détection des fuites situé entre la GMB-P de

l'imperméabilisation principale et la GMB-P de l'imperméabilisation secondaire.

Les deux couches de drainage étaient à l'origine étudiées selon la conception classique
prévue pour ces réalisations :

- Couche de gravier de 50 cm d'épaisseur réalisant la fonction

du drainage (récupération des fluides).

- Géotextiles en PP sur les parties supérieure et inférieure de la couche de gravier. Le

géotextile placé en position supérieure réalise les fonctions de séparation et de
filtration permettant d'éviter le colmatage du gravier, tandis que le géotextile placé en
dessous protège la barrière imperméabilisante d'éventuels poinçonnements dus au
gravier.

- Système de tuyaux rainurés en PEHD disposés en arête de poisson pour récupérer

les lixiviats de la couche de gravier et les acheminer vers le bassin à lixiviats pour 8
stockage et traitement.

- Le drainage du système de sécurité pour la détection des fuites se composerait d'une

couche de gravier de 30 cm d'épaisseur assortie de géotextiles en PP disposés
respectivement au-dessus et en dessous pour la protection de la géomembrane
imperméable

- .
Figure 7. Section type de l’ISDND de Flix selon le projet de construction
Une fois cette cellule constituée, les déchets à haute densité sont déposés par couche de
2.80m d’épaisseur complétées chacune par une couche de 20 cm assurant la séparation et
le drainage, réalisée dans un matériau de l’ouvrage lui-même et présentant une teneur en
particules fines inférieure à 20 %. On disposera donc au total de 16 couches de 3 m
d’épaisseur chacun, tenant compte une fermeture future de la décharge (figures 6).

Figure 8. Section type de la décharge de Flix selon le projet de construction d'origine.

5. CONCEPTION FINALE DU SYSTÈME DE DRAINAGE PAR 9

GÉOSYNTHÉTIQUES DANS L’ISDND
5.1. Les raisons d'une nouvelle conception

La conception initiale, en dépit de sa perfection technique, imposait certaines restrictions à la

réalisation des ouvrages, détaillées ci-dessous :

- Couvrir le fond de l’alvéole de l’ISDND d'une couche de 30 cm sur une surface de plus de
63 000 m2 nécessiterait 19 000 m3 de gravier.

- Cette grande quantité de matériau granulaire présente une double complication : d'une
part, la nécessité de trouver une telle quantité de matériau à une distance raisonnable du
chantier et, d'autre part, la nécessité de créer des aires de stockage de taille conséquente.

- Le système de retenue de l’ISDND est constitué de matériaux argileux, présentant une

section type trapézoïdale de 3 m de haut, une largeur de crête de 3 m et des talus avec
une pente de 2H– 1V à l'intérieur et 2,5H – 1V à l'extérieur (figure 6). Du fait de l'angle de
friction interne du gravier, le rendement de l'épandage et du compactage diminuent
fortement sur les talus présentant une pente supérieure ou égale à 2,5H– 1V, comme c'est
le cas ici.

C'est pour ces raisons que l'entreprise de construction en charge des travaux a fait appel à
un fabricant de géosynthétiques spécialisé dans le drainage en vue de trouver une solution
technique permettant de réduire ces difficultés.
5.2. Géosynthétiques et géocomposites de drainage

Selon la norme NF-EN ISO 10318-2006, un géosynthétique est un terme générique

désignant un produit, dont au moins l’un des constituants est à base de polymère
synthétique ou naturel, se présentant sous forme de nappe de bande ou de strucutre
tridimensionnelle, utilisé en contact avec le sol ou avec d’autres matériaux dans les
domaines de la géotechnique et du génie civil.

Les premières références aux produits géosynthétiques datent des années 70 (Koerner,).
Aujourd'hui, il s'agit d'une industrie réglementée, à la technologie de pointe et à l'expérience
et à la réussite largement démontrés. En Espagne, la réglementation technique spécialisée
part du Real Decreto 1481/2001, de la norme UNE-EN 13257 (Géotextiles et produits
apparentés) qui décrit les conditions requises pour leur utilisation dans les Installations de
Stockage de Déchets et de la norme UNE 104425 qui décrit les critères de leur mise en
œuvre dans les systèmes d'imperméabilisation des décharges par des feuilles de
polyéthylène haute densité.

Bien qu'ils soient très courants dans certaines spécialités de la construction, comme les
décharges ou les mines, ces matériaux demeurent de grands inconnus pour la majorité des
professionnels de la construction.

Sans trop rentrer dans les détails, on trouve des produits géosynthétiques pour les
applications suivantes au sein d'une ISDND:

- Séparation, filtration et protection : pour ces fonctions, on utilisera des géotextiles en

polypropylène (PP) ou en polyester (PET), qui sont les géosynthétiques les plus
connus, au vu de la large utilisation qui en est faite dans les travaux publics et le
bâtiment. 10

- Imperméabilisation : barrières géosynthétiques pouvant être des géomembranes en

polyéthylène haute densité (PEHD) ou en caoutchouc éthylène-propylène-diène
(EPDM), ou des géocomposites en bentonite.

- Consolidation des talus : géosynthétiques prenant la forme de géogrilles extrudées

ou tissées, fabriquées en PP, en PEHD ou en PET.

- Contrôle de l'érosion des talus : géocomposites volumétriques fabriqués dans

différents polymères pour favoriser la restauration de la couverture végétale.

- Drainage : grille extrudée en PEHD appelée géoespaceur ou géocomposite de

drainage lorsque le géoespaceur est combiné à un ou plusieurs géotextiles.

Par la suite, cet article abordera les géocomposites de drainage utilisés dans le chantier qui
nous intéresse, mais il nous a paru opportun dans un premier temps de vous présenter
brièvement les différentes possibilités qu'offrent les géosynthétiques.

5.3. Solution adoptée dans l’ISDND de Flix

Tout changement dans la solution initiale du projet devait nécessairement satisfaire les
exigences suivantes :

- Législatives : satisfaire aux conditions fixées par la directive 1999/31/CE et le Real

Decreto 1481/2001. Par conséquent, la capacité de débit de la nouvelle solution
devait être supérieure ou égale à celle d'une couche de gravier de 50 cm d'épaisseur.
 - Structurelles : le fait d’avoir plus de 43 m de haut de déchets chimiques à haute
densité sur le système de drainage, ce dernier doit donc être en mesure de supporter
une pression dépassant les 600 kPa.

- En termes de stockage : éliminer le besoin de vastes aires de stockage.

- En termes d'installation : des rendements adéquats aussi bien pour le fond que pour
les talus.

Après avoir méticuleusement étudié toutes ces contraintes, nous avons opté pour un
géocomposite de drainage offrant des prestations élevées et constitué de :

- Un géoespaceur triplanaire en PEHD de 7 mm d'épaisseur à haute résistance à la

compression.

- Un géotextile en polypropylène (PP) offrant des prestations mécaniques élevées,

dont une résistance au poinçonnage statique supérieure à 2,3 kN, une perméabilité
supérieure à 60 l/m².s et un grammage de 200 g/m², servant d'élément de protection
de la couche d'imperméabilisation en GMB-P sur la face inférieure du géoespaceur
triplanaire.

- Un géotextile résistant aux rayonnements ultraviolets (UV), aux propriétés identiques

que précédemment, disposé sur la face exposée aux intempéries.

Ces trois produits géosynthétiques sont arrivés de l'usine assemblés en un même produit par
laminage de façon à former un produit monolithique unique, capable de remplir des fonctions 11
de drainage, de séparation, de filtration et de protection (figure 7).

Figure 9. Géocomposite triplanaire drainant en PEHD à haute résistance à l'écrasement.

Un essai de capacité de débit dans le plan (NF-EN ISO 12958) a permis de démontrer que le
géocomposite proposé était capable de drainer davantage de fluide qu'une couche de 50 cm
de gravier.

En outre, une étude technique a été réalisée conformément à la réglementation GRI GC8
(du Geosynthetics Research Institute) pour démontrer que la capacité de débit à long terme
(durant la vie utile de l'ouvrage) du géocomposite triplanaire proposé restait supérieure à
celle d'une couche de 50 cm de gravier fraîchement posée. À cet effet, on a tenu compte des
facteurs de réduction définis par la réglementation pour l'insertion de géosynthétiques
adjacents dans le géoespaceur, du fluage aussi bien du géoespaceur que des
géosynthétiques adjacents (Giroud et al., 2000), du colmatage chimique ou de la
précipitation de substances chimiques dans le géoespaceur, ainsi que du colmatage
biologique dans le géoespaceur (Koerner, 2012).

Afin de démontrer la conformité avec l'exigence structurelle, il a été réalisé un essai de

résistance à la compression suivant la norme NF-EN ISO 604:2003, qui a permis d'obtenir
un facteur de sécurité bien supérieur à 2, par rapport aux 600 kPa requis.

On notera que pour fournir le matériau nécessaire pour couvrir les 150 000 m² de l'ouvrage,
il n'aura que 23 camions de produits géocomposites triplanaires. En plus, comme
l'approvisionnement en matériau se faisait au fur et à mesure des besoins, l'aire de stockage
nécessaire est restée dans des proportions réduites.

Par la même occasion, on doit mentionner comme avantages supplémentaires aux

géocomposites de drainage leur extraordinaire facilité d'installation, offrant un rendement
élevé (>2000 m²/jour en moyenne sur l'ensemble des phases), leur sécurité accrue (ils ne
requièrent aucune présence de machinerie lourde, ce qui est particulièrement délicat dans
des zones à forte pente), ils ne génèrent pas de surcharge supplémentaire sur le sol. De
plus ils permettent d'accroître la capacité de stockage del’ISDND grâce à leur épaisseur
réduite et, étant des produits industriels homogènes et reconnus ils bénéficient d'un
marquage CE et sont soumis à un contrôle qualité strict qui permet de garantir leur
comportement.

12

Figure 10. Vues aériennes du système de drainage de Flix en phase de construction.

Les facteurs exposés succinctement dans les paragraphes précédents ont démontré la
faisabilité de l'emploi de ces produits géosynthétiques de nouvelle génération pour une
application dans les fonds de casiers ISDND. C'est pour cela qu'il a finalement été décidé de
réaliser la décantation en utilisant du géocomposite drainant de structure triplanaire en
PEHD en lieu et place de la traditionnelle solution des graviers.

Toutes les couches de l’ISDND de Flix ont été réalisées à l'aide ce géocomposite de
drainage triplanaire pour permettre de recueillir les lixiviats générés au sein cette décharge
pour un traitement adéquat a posteriori.

6. CONCLUSIONS
Il existe un certain nombre d'applications impliquant des exigences élevées de résistance à
la compression, comme la construction de systèmes de drainage dans les créations
d’alvéoles d’ISDND ou encore le drainage mis en place sous les remblais ou les bassins de
décantation et la lixiviation en TAS dans l'industrie minière.

Tous les géocomposites présents sur le marché ne conviennent pas à ces applications, la
conception structurelle de chacun d'entre eux limitant leur résistance à la compression. De
fait, seuls les géocomposites basés sur des géoespaceurs triplanaires en PEHD sont à
même de garantir un fonctionnement adéquat à long terme dans de telles conditions.

Les géocomposites triplanaires ont été largement utilisés dans le monde entier ces dernières
années pour ces applications, ce qui prouve que non seulement ils se justifient d'un point de
vue technique, mais qu'en plus leur choix est justifié par l'expérience. L'utilisation d'un
géocomposite triplanaire dans la décharge contrôlée pour éliminer la contamination chimique
du réservoir de Flix démontre la faisabilité de ce procédé dans les ouvrages à hautes
exigences techniques. 13

Les ingénieurs travaillant dans cette typologie de projets avec des géosynthétiques ne
devraient pas se contenter de s'assurer que leur capacité de drainage est suffisante, mais
devraient aussi tenir compte de leur résistance à la compression de façon à pouvoir assurer
un fonctionnement correct à long terme dans de telles conditions de charge. Dans le cas de
Flix, les charges permanentes exercées sur le géocomposite dépassent les 600 kPa.

Pour résoudre en partie un grave problème pour l'environnement, pas moins de 150 000 m²
de géocomposite triplanaire ont été installés à Flix entre 2012 et 2013.
 RÉFÉRENCES

NF EN ISO 10318 (2006). Géosynthétiques. Termes et définitions (ISO 10318:2005)

Directive 1999/31/CE du Conseil concernant la mise en décharge des déchets.
“Eliminación de la contaminación química en el embalse de Flix” (Élimination de la
contamination chimique du réservoir de Flix) Article de la revue RETEMA, mai – juin 2013.
Giroud, J. P., Zhao, A., y Richarson, G. N. (2000). Effect of Thickness reduction on
Geosynthetic Hidraulic Transmissivity (Effet de la réduction de l'épaisseur sur la
transmissivité hydraulique des géosynthétiques).
Geosynthetic International, vol.7 n°4-5, p. GRI Standard GC8. (2008). Standard Guide
for Determination of the Allowable Flow Rate of a Drainage Geocomposite (Guide standard
de la détermination du débit admissible d'un géocomposite de drainage). Geosynthetic
Institute.
Proyecto 07/07 constructivo para la eliminación de la contaminación química en el
embalse de Flix (Tarragona). Ministerio de Medio Ambiente (Projet de construction 07/07
pour l'élimination de la contamination chimique du réservoir de Flix (Tarragone). Ministère
espagnol de l'Environnement).
Real Decreto 1481/2001, de 27 de diciembre, por el que se regula la eliminación de
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réglementant l'élimination des déchets par la mise en décharge).
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Auteur: Jorge Gutiérrez & Joaquim Castelo – Intermas Nets , S.A – Ronda de
Collsabadell,11 (Pol ind) 08450 llinars del Vallées (Barcelone) –
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