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SYLLABUS DU COURS

*INTITULE DU COURS : Etude des fonctions du langage : acquisition de


compétences de présentation orale
*Type : Cours magistral
*Volume horaire : 10 H
UE de rattachement : UE de méthodologie
*Niveau du cours : LICENCE 2
*Département : LETTRES MODERNES
*Semestre : 3
*Nom de l’enseignant : KOUADIO Kobenan N’guettia M. (PT)
*Les objectifs
L’étudiant devra être capable de comprendre les principes régissant la théorie
fonctionnelle de Roman Jakobson.
*Les objectifs spécifiques
- Définir les facteurs de la communication conformément à la théorie de la
communication de Roman Jakobson
- Définir et identifier les fonctions du langage dans un texte et en montrer le rôle
spécifique joué par chacune d’elle
-Etudier la fonction poétique en rapport avec la littérarité qui en émane (dans un
texte littéraire donné)
Les pré-requis
- Connaissances de base en linguistique générale et en grammaire normative
- Visée argumentative et stratégie argumentative
-Figures de rhétorique
*Le contenu

Les facteurs de la communication et fonctions du langage


I- : Le destinateur et la fonction émotive
II- : Le destinataire et la fonction conative
III- : Le canal et la fonction phatique
IV- : Le code et la fonction métalinguistique
V- : Le contexte et la fonction référentielle
VI- : Le message et la fonction poétique

*Les références bibliographiques


HUBAT-BLANC Anne-Marie, Poésie et poétiques, Amiens, Centre régional de
documentation pédagogique de l’académie d’Amiens, 1998.
JAKOBSON Roman, Essais de linguistique générale, Paris, Minuit, 1963.

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KOUADIO Kobenan N’Guettia Martin, Valeur stylistique des fonctions émotive,
conative et référentielle dans Chants pour Manou de Louis Akin (Mémoire de
Maîtrise, dirigé par ZADI Zaourou Bernard, Université d’Abidjan – Cocody)
-ZADI ZAOUROU Bernard, Césaire entre deux cultures, NEA, Abidjan-Dakar, 1978

Etude des fonctions du langage : acquisition de compétences de présentation


orale

Introduction
La notion de fonction renvoie au rôle joué par le discours dans tout acte de
communication. Dans les faits, le discours n’est jamais passif. Dans le but de spécifier l’objet
assigné au langage en action, Jakobson a déterminé six facteurs impliqués dans l’acte de
communication : le destinateur, le destinataire, le contexte ou référent, le message, le contact
(canal) et le code. La combinaison de tous ces facteurs permet la libre circulation ainsi que
l’efficacité du discours.
Dans l’étude des fonctions du langage, le stylisticien demande à tous ces facteurs de
l’informer non seulement de l’identité du code (quel est le code utilisé ?) mais aussi de la
qualité du canal, de l’efficacité du discours sur la base des résultats visés (les effets de
signification sont-ils denses ou faibles ?). Ainsi, au message correspond la fonction poétique,
il s’agit du plaisir suscité par le message pour son propre compte. Au destinateur se rapporte
la fonction émotive ou expressive. Au destinataire, la fonction conative ; le référent coïncide
avec la fonction référentielle ou dénotative ou cognitive. Au contact (canal) est rattachée la
fonction phatique. Au code fait suite la fonction métalinguistique.
I- La fonction émotive ou expressive
On parle de fonction émotive lorsqu’un sujet parlant oriente le discours vers lui-
même ; il devient la matière ou la préoccupation de son propre discours. Le faisant, il se
dévoile (épanchement, exaltation, confessions émues, confidences…). C’est comme s’il nous
donnait de nous incarner en lui-même afin de le découvrir. Un tel discours est appelé discours
de la première personne et il n’apparaît que lorsque le locuteur demande au langage de
dévoiler les sentiments et les émotions qui lui sont propres. D’un autre point de vue, celui qui
parle, oriente le discours vers lui-même. En le faisant, tout ce qu’il dit de lui-même se
rapporte à la fonction poétique. A cette fonction, sont liées certaines constantes
grammaticales. Ces constantes constituent des facteurs de repérage de la fonction émotive.

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Cependant, elles ne sont pas rigides. Selon le contexte donné, un message qui ne serait pas
caractérisé par ces constantes peut avoir une coloration émotive.
- Généralement, on établit que la fonction émotive se manifeste par le présent de
l’indicatif,
- Elle correspond à l’emploi des pronoms de la première personne (je, nous)
- Elle met en exergue les interjections, les répétitions, les exclamations, les adjectifs
qualificatifs et les adverbes d’appréciation.
Centrée donc sur l’émetteur du message, elle lui permet de communiquer ses impressions,
ses émotions, ses jugements sur le contenu de son message.
II- La fonction conative
Dans l’acte de communication, le locuteur peut choisir d’être le sujet et l’objet de son
discours. D’un autre point de vue, il peut s’en servir pour attirer l’attention de l’interlocuteur.
Cette orientation du message vers l’interlocuteur ou le destinataire fonde en théorie la
fonction conative. Il s’agit d’un discours adressé au 2e agent de la communication : le
destinataire (le premier étant le destinateur). Ce discours peut viser plusieurs objectifs. Il peut
vouloir simplement informer ce récepteur-là. Il peut en outre vouloir lui intimer un ordre, lui
demander un soutien, il peut aussi chercher à l’émouvoir, le supplier, l’exhorter à l’action, le
consoler ou lui demander de l’aide. Le but du propos, dans ces conditions, consiste à placer le
destinataire du message au centre du propos. Cette fonction admet comme la première un
certain nombre de constantes grammaticales.
- On rencontre assez fréquemment l’impératif ou des formes grammaticales à valeur
impérative telles que l’apostrophe et l’interrogation.
- On y décèle la présence de pronoms personnels et d’adjectifs possessifs de la 2e
personne (vous, tu, ton, ta, tes, …).
III- La fonction phatique
Il se peut que le message n’ait d’autre but que d’établir, de maintenir ou de couper le
contact. La fonction phatique est centrée sur le contact et manifeste essentiellement le besoin
ou le désir d’établir, de maintenir ou de rompre le contact. D’après le mot grec phèmi qui
signifie parler, la fonction phatique reflète les conditions de la communication. Elle s’illustre
par des formules comme « allo ! Vous m’entendez ? Parlez plus fort ; taisez-vous. N’est-ce
pas ? Eh bien euh… ». Citons également les formules de politesse ou les questions sur la santé
ou sur le temps qui n’ont d’autre objet que de meubler le discours en affirmant une présence
et en établissant un contact. Du point de vue linguistique, à la fonction phatique correspondent

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l’affaiblissement de la densité significative du langage et le recours aux formes vides de sens
précis.
IV-La fonction métalinguistique
Dans le procès de communication, il arrive que le discours soit tourné vers le code (langue)
comme si la langue s’objectivait, c’est-à-dire comme si elle prenait de la distance par rapport
à elle-même et se parlait à elle-même. La fonction métalinguistique infère des définitions de
termes et l’usage de la synonymie à valeur explicative. Le locuteur semble demander au
langage de lui préciser la nature du code qui est en train d’être utilisé et auquel personne ne
semble rien comprendre : il s’agit de la fonction métalinguistique. Les définitions et les
explications à valeur explicative ont pour but de rendre le code plus explicite.
V- La fonction référentielle
Elle est aussi nommée fonction cognitive, fonction dénotative ou fonction référentielle par
Jakobson. Les termes « référent » et « dénotatif » renvoient au monde évoqué dans et par le
message. Le mot « cognitif » signifie ce dont on a une connaissance. En décrivant le réel, on
donne des informations (d’où la suppression du je). Le pronom « il » marque l’objectivité par
excellence et exprime mieux la fonction cognitive. Ce pronom exprime en effet la
distanciation de celui qui parle à l’égard de ce dont il parle.
Pour rendre compte du réel, on emploie le plus souvent le passé. Cette fonction est donc
centrée sur les réalités évoquées (les référents) et renvoie dans un message aux différents
référents textuels. Du point de vue linguistique, les marques les plus significatives de la
fonction référentielle sont les pronoms de la 3e personne (il animé ou inanimé ou conceptuel)
et un large éventail de temps verbaux, en particulier l’usage des temps du passé.
VI-La fonction poétique

La fonction poétique fait partie des six fonctions du langage issues de la théorie de Roman
Jakobson. Il s’agit des fonctions émotive (centrée sur le destinateur), conative (qui porte sur le
destinataire), métalinguistique (rattachée au code), référentielle (découlant du contexte) et
(phatique ancrée dans le canal). Elles permettent d’analyser, chacune à sa manière, différents
types de discours suivant des objectifs particuliers assignés au message.
Contrairement aux autres, la fonction poétique est plus étendue et plus complexe.
Jakobson la rattache au message. Ses manifestations sont multiples du fait de la spécificité de
ses marques. Celles-ci sont en rapport avec la nature du texte donné.

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Pour Jakobson, « la visée (einstellung) du message en tant que tel, l’accent mis sur le
message pour son propre compte, est ce qui caractérise la fonction poétique du langage » (p.
218).
C’est que justement la fonction poétique se préoccupe du langage dans sa beauté. Elle
révèle les moyens formels sinon stylistiques porteurs de l’esthétique du texte. En d’autres
termes, l’objet de la fonction poétique, c’est avant tout, de répondre à la question : « qu’est-
ce qui fait d’un message verbal une œuvre d’art ? » (p. 210)
Certains usagers de la parole peuvent se servir d’elle pour dire des choses de manière
prosaïque. D’autres peuvent, en plus de l’idée qu’ils veulent exprimer, donner une certaine
beauté ou un certain relief à leur message :
Demain dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai, vois-tu je sais que tu m’attends.
(…)
Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur

Tout l’enjeu du débat sur la fonction poétique est de pouvoir dégager les indices
linguistiques qui mettent en relief la beauté du texte, et de révéler comment ceux-ci, en
contribuant à accroître cette beauté, renforcent, par la même occasion, la signification du
message. Il est certes question de rechercher la beauté du texte. Mais il est aussi question de
montrer comment celle-ci nourrit le dessein de contribuer au rayonnement sémantique du
texte.
Cela veut dire, en d’autres termes, qu’en plus de mettre en lumière l’esthétique du
texte, ces moyens, lorsqu’ils sont analysés avec sérieux, doivent être mis en adéquation avec
la production de la signification dont ils sont porteurs.
En aucune façon il n’est question de mener une analyse thématique. La stylistique est
une science qui emploie ses propres matériaux pour parvenir à un objectif précis. Dire une
chose sans en apporter la preuve, c’est se prêter au jeu de la prestidigitation. Justement, c’est
parce que la stylistique fait partie intégrante de la linguistique qu’elle lui emprunte certains de
ses outils et sa démarche.

Toute étude de la fonction poétique est mue par des questions fondamentales :
1) Quelles sont les marques formelles les plus pertinentes dans le texte à analyser,
que celui-ci soit un poème, une œuvre théâtrale, un texte romanesque … ?
2) Ces marques ont-elles un impact véritable au point d’être les moyens par lesquels
la beauté et la signification du texte sont mises en valeur ou en relief ?

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3) Si oui, comment contribuent-elles à mettre en évidence les valeurs esthétique et
sémantique du texte ? En d’autres termes, comment les indices recensés
permettent-ils de démontrer cela ?
La réponse à de telles préoccupations permet d’être en phase avec la démarche qu’exige
l’analyse stylistique du texte pour révéler les marques de sa beauté sinon de sa poéticité.
Il s’agit d’un travail soucieux de prendre en compte toutes les marques formelles
pertinentes par lesquelles le fragment à étudier produit un effet sur celui qui le lit.
L’organisation du travail suit plusieurs étapes :
- La première consiste à relever, après la lecture attentive du texte (trois ou 5 fois), tous
les indices formels pertinents (dans l’engendrement de la poéticité ou de la
signification)
- Organiser les différents éléments répertoriés dans un plan cohérent établi en deux ou
trois grandes parties.
- Rédiger le tout dans une argumentation pertinente qui prenne en compte le pourquoi et
le comment des ces indices dans la production de la signification. En d’autres termes,
il n’est pas question de faire un simple relevés d’indices sans dire ni démontrer le rôle
joué par ces éléments dans le texte. Quelle peut être leur valeur esthétique et
sémantique ?
Tout travail non démonstratif n’aura aucune valeur scientifique car si Jakobson dit de la
fonction poétique qu’elle met en exergue le côté palpable des signes, cette manière
particulière d’être du texte n’est pas inutile. Elle sert une cause. Elle permet, par de telles
configurations, d’apprécier la valeur littéraire de ce qu’on lit ; cette valeur n’est valeur que
parce qu’elle concourt à accorder au texte une mise en évidence plus accrue de ce que son
auteur a voulu dire. Or cette manière de dire ne prend forme que dans la fonction poétique,
c’est-à-dire l’art verbal.
Conclusion
La notion de fonction du langage se résume globalement au rôle assigné au discours dans
des circonstances bien précises : le discours peut avoir pour objet de dévoiler le destinateur
dans ce qu’il pense de lui-même. L’émetteur peut s’adresser à un interlocuteur pour le
supplier ou l’exhorter à agir dans un sens comme dans l’autre. Le message produit peut faire
connaître une ou des réalités, c’est-à-dire ce dont on parle et ce qu’on en dit. En d’autres
circonstances, l’objet du propos consiste en une explicitation du code utilisé pour le rendre
plus clair, plus compréhensible ou plus saisissable. Enfin, le discours peut fonctionner sans

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prétendre livrer des informations précises : l’affaiblissement de la signification l’emporte sur
toute autre préoccupation. Dans le cas de la fonction poétique, le message s’appréhende
comme une forme d’art : l’art du langage.
Il faut noter qu’en situation réelle de communication, plusieurs fonctions du langage
peuvent se retrouver dans un texte. Elles s’imbriquent. La préoccupation de l’analyste doit
être la suivante : à partir des indices renvoyant à telle ou telle fonction du langage, peut-on
considérer que ceux-ci impriment leurs marques au fragment où ils se manifestent ? Si oui,
quel est le but d’un tel discours se manifestant de cette manière particulière ?

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