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Étude transversale des œuvres-Faire croire

1. De l'art de "faire croire"


A] Intrigues et impostures
a. De la ruse à la tromperie
Ruser n'est pas mentir, mais manipuler dans le sens d'un détournement, pour servir un objectif

Ruse de lorenzo

Afin de tuer le duc, Lorenzo fait exprès d'égarer la cotte de maille que celui-ci ne quitte jamais. La ruse n'est même pas
particulièrement bien dissimulée puisque le duc s'en rend compte mais semble ne pas y accorder trop d'importance, tandis
que Giomo son écuyer voit plus clair dans le jeu de Lorenzo

"Que le diable t'emporte ! c'est toi qui l'a égarée." (acte II, scène 6, p105)

Valmont et le jeu des apparences

Lorsqu'il s'aperçoit que la ruse féminine (lettre XV)(de Mme de Tourvel) l'a fait suivre par un espion, il décide de tourner la
situation à son avantage en réalisant une bonne action qui sera rapportée à la présidente par son espion (lettre XXI)

"Tout calculé, je me félicitais de mon invention" (lettre XXI, page 120)

Cette supercherie fonctionne, comme le témoigne la lettre suivante de la présidente

"S'il n'est que cela (=un libertin sans retour) et se conduit ainsi, que restera-t-il au aux honnêtes gens?" (lettre XXII, p.
122)

Le mystificateur doit être tenu pour sincère

Du côté des Liaisons dangereuses, le souci de la vraisemblance est abordé dès la préface du rédacteur, qui regrette ne
pas avoir pu "ôter une partie des défauts"

"On m'a objecté (...) qu'il serait autant contre la vraisemblance que contre la vérité que (toutes les personnes qui ont
concouru à cette correspondance) eussent écrit avec une égale pureté"
Cependant, ce pseudo aveu est lui même une mise en scène puisque, comme l'éditeur le soupçonne et en averti le
lecteur, il s'agit en fait d'un roman.

Par ailleurs selon Arendt:

"L'efficacité de la tromperie et du mensonge dépend entièrement de la notion claire de la vérité que le menteur et le
trompeur entendent dissimuler" (M.P. p.48)

Enfin, Musset s'inspire d'une véritable conspiration historique pour dépeindre les incertitudes politiques de son époque de
manière indirecte.

La ruse apparaît donc comme un moyen tactique pour parvenir à ses fins, qui permet de préserver les apparences

b. Inspirer confiance pour mieux manipuler?


Il faut inspirer la confiance pour faire croire
La confiance prend la forme de confidences souvent
Fiabilité = stabilité

Idée de confiance = récurrente


Dans Lorenzaccio:

"Pour plaire à mon cousin (...); pour devenir son ami, et acquérir sa confiance, il fallait baiser sur ses lèvres épaisses
tous les restes de ses orgies." (P.128, Lorenzo à Philippe Strozzi)

Dans les liaisons Dangereuses:

La marquise a travaillé longtemps son attitude: "Cette froideur apparente fut par la suite le fondement inébranlable de
son aveugle confiance" (Lettre LXXXI, p.265)

Il faut mériter la confiance

Parfois nécessité d'un gage de confiance:

La clef de la petite maison que la Marquise de Merteuil confie au chevalier (Lettre X). Le rendant maître, elle gagne
sa confiance (alors qu'elle a un double des clefs). "Je ne l'ai eu que pour vous, lui dis-je; il est juste que vous en
soyez maître" (p.102)
Confiance que Valmont accorde à Merteuil, et espère obtenir la sienne en retour: "Dépositaire de tous les secrets
de mon cœur" (p.85). Au sens matériel et immatériel (elle dispose physiquement de ses lettres)
CF Lorenzo plus haut: embrasser les habitues d'Alexandre

La confiance se manifeste souvent par des confidences

Cf confiance de Valmont

Confidences dans Lorenzaccio:

Lorenzo au Duc: "Venez donc un peu ici que je vous parle à l'oreille" (p.106) Celui-ci semble oublier sa cotte de maille
disparue: le tour est joué

Fiabilité doit engendrer stabilité

Sur le plan politique, l'abus des "déclarations mensongères", "la tromperie consciente" (p.12 M.P.) brisent la confiance
accordée au gouvernement. Selon elle, il n'est pas possible de vivre dans un monde où la folie l'emporte: "Une
atmosphère digne d'Alice au pays des merveilles" (p.34 MP)

c. L'écrit, une preuve compromettante


Les documents agissent comme des preuves indéniables dans certains cas:
Chez Arendt:

"Les documents du Pentagone posent surtout le problème des dissimulations, des contre-vérités et du rôle du mensonge
délibéré" (MP, p. 25)

Chez Laclos:

Danceny confie les correspondances de Valmont à Rosemonde:


"N'en croyez pas mes discours mes lisez, si vous en avez le courage, la correspondance que je dépose entre vos mains."
(lettre CLXIX, p.498)
"Je serais vraiment peinée qu'il restât aucune trace d'un évènement qui n'eût jamais dû exister." (La présidente supplie
Valmont de lui rendre cette lettre) (lettre XXVI, p.132)

Chez Musset:

La proclamation des Huit de Florence se fait par écrit

Cadre plus personnel : la lettre semble être garante d'authenticité et de véracité, car associée à l'intimité

"Une lettre est le portrait de l'âme." (Danceny à la marquise, lettre CL, p. 464 )
Bilan:
Lorsqu'un n'est pas sincère, il vaut mieux parler que d'écrire, car les écrits peuvent se retourner contre leurs auteurs

B] Manipuler le langage
a. Parler pour faire croire

Faire croire est intimement lié au langage

Grande importance accordée aux mots:

Arendt cite régulièrement les Pentagon Papers et relève des termes:

"C'est nous qui soulignons" (MP)

Le langage permet de persuader le cœur et manipuler les désirs

Conseils de la marquise à Cécile : "Vous voyez bien que, quand vous écrivez à quelqu'un, c'est pour lui et non pas pour
vous : vous devez donc moins chercher à lui dire ce que vous pensez, que ce qui lui plaît davantage." (lettre CV)

Puissance du menteur

"Puisque le menteur est libre d'accommoder ses 'faits' au bénéfice et au plaisir, ou même au simples espérances de
son public, il y a fort à parier qu'il sera plus convaincant que le diseur de vérité" (VP, p.320)

L'éloquence

Le langage vaut comme action. Lorenzo et métaphore de la toupie (à Venturi)

"Vous ne connaissez pas la véritable éloquence. On tourne une grande période autour d'un beau petit mot, pas trop
court ni trop long, et rond comme une toupie." etc. (p.91)

La marquise de Cibo:

"Ceux qui mettent les mots sur leur enclume, et qui les tordent avec un marteau et une lime, ne réfléchissent pas
toujours que ces mots représentent des pensées, et ces pensées des actions" (Acte I, scène 3)

b. Faire parler

Il ne s'agit pas seulement d'utiliser le langage pour faire croire mais également pour faire parler, obtenir des
aveux

Le Cardinal de Cibo tente d'obtenir des aveux de la Marquise mais se fait démasquer, révélant le véritable enjeu de
l'échange

"La Marquise: Du Duc! - Eh bien ! si vous le savez, pourquoi voulez-vous me le faire dire ?
Le Cardinal: Pourquoi refusez-vous de le dire ? Cela m'étonne.
La Marquise: Et qu'en voulez-vous faire, vous, mon confesseur ?" (Acte II, scène 3, p. 83)
Merteuil quant à elle arrive à obtenir les naïves confidences de Cécile, désignée régulièrement comme une "enfant"

Le mensonge peut permettre la recherche de la vérité

Merteuil fait parler son confesseur grâce à un mensonge


"Je m'accusai d'avoir fait tout ce que font les femmes. Ce fut mon expression ; mais en parlant ainsi je ne savais en vérité
quelle idée j'exprimais" (Lettre LXXXI autobiographique)
Ainsi Arendt formule une conclusion:
"Si nous concevons l'action politique en termes de moyens et de fins, nous pouvons même parvenir à la conclusion, qui
n'est paradoxale qu'en apparence, que le mensonge peut fort bien servir à établir ou à sauvegarder les conditions de la
recherche de la vérité" (VP p.291)

Pouvoir d'unification du langage

Tebaldeo s'extasie en entendant Valori:

"Trouver sur les lèvres d'un honnête homme ce qu'on a soi-même dans le cœur, c'est le plus grand des bonheurs qu'on
puisse désirer" (Acte II, scène 2, p.72)

c. Silence et secret

Parfois, nécessité du silence

Philippe Strozzi regrette que Léon ait parlé :

"Qu'y aurait-il de changé pour Louise et pour nous-mêmes, si tu n'avais rien dit à mes enfants ? La vertu d'une Strozzi
ne peut-elle oublier un mot d'un Salviati ?" (Acte II scène 5)

Ce qui surprend Arendt:

Pour certains faits, le public peut "en interdire la discussion publique et les traiter comme s'ils étaient ce qu'ils ne sont
pas - à savoir des secrets" (VP p. 300)

Contraindre au silence pour dissimuler des vérités honteuses

Le secret n'existe que dans une tension/pacte entre individus


La marquise de Merteuil expose comment elle a obtenu la discrétion de sa femme de chambre, grâce aux conseils de son
chasseur

"Quant au secret (...), à quoi servira-t-il de lui faire promettre, puisqu'elle ne risquera rien à nous tromper ? Lui en
reparler ne ferait que lui mieux apprendre qu'il est important, et par là lui donner plus d'envie d'en faire sa cour à sa
maîtresse" (lettre XLIV)

Secret d'état

Arendt ne remet pas en cause le secret d'état, mais considère qu'ils peuvent empêcher le peuple de "se former une
opinion"

Cependant "les documents du Pentagone n'ont guère apporté de révélations inédites ou significatives au lecteur
habituel des quotidiens et des hebdomadaires" (MP, p.65)

Le principal secret révélé est plutôt celui du mode de fonctionnement des décisions politiques, et son rapport à la vérité de
fait.

C] Jeux de masques
a. Le règne de l'ambiguïté

Personnages difficiles à saisir

Le duc présente Lorenzo comme une "anguille" sans se douteur qu'il est lui même dupé

"Croyez que son entremise, si elle nuit à quelqu'un, ne me nuira pas." (Acte I, scène 4)

La marquise de Merteuil se plaît à ce jeu de rôle


"Non contente de ne plus me laisser pénétrer, je m'amusais à me montrer sous des formes différentes (Lettre LXXXI)"

Différence entre être et paraître

Les masques se matérialisent chez Musset lors du bal de la deuxième scène (en didascalies)

"les masques sortent de tous côtés" (Acte I, scène 2, p.39)

b. Le goût de la mise en scène


c. Vertiges de l'identité mensongère

Jeux de masques > question de l'identité et de sa stabilité

Valmont qui semble se laisser affecter plus qu'il ne voudrait le laisser paraître, Merteuil le lui fait remarquer:

"Ecartons sa dangereuse idée ; que je redevienne à moi-même"(lettre XCVI)


"Je ne sortis de ses bras que pour tomber à ses genoux, pour lui jurer un amour éternel ; et, il faut tout avouer, je
pensais ce que je disais" (CXXV p. 408)
"Je dis l'amour car vous êtes amoureux" (La marquise à Valmont)

Dans Lorenzaccio, le personnage éponyme déconstruit lui même l'image qu'on a de lui

"Si l'on vous a dit que j'étais un soldat, c'est une erreur ; je suis un pauvre amant de la science" (Acte I, scène 4)

A tel point qu'il n'est plus sûr de savoir qui il est vraiment:

"Je ne puis ni me retrouver moi même ni laver mes mains, même avec du sang !" (IV,5)
"Il est trop tard-je me suis fait à mon métier. Le vice a été pour moi un vêtement, maintenant il est collé à ma peau"(p.
133)

Malgré les espoirs de Philippe, la métamorphose n'a pas lieu

"tu jetteras ce déguisement hideux qui de défigure et tu redeviendras d'un métal aussi pur que les statues de bronze
d'Harmonius et d'Aristogiton." (III,3 Philippe à L)
"Je suis plus creux et plus vide qu'une statue de fer-blanc" (V, 7)

Pour Arendt, le mensonge à soi est bien plus grave et dangereux que le simple mensonge:

"le menteur de sang-froid reste au fait de la distinction entre le vrai et le faux, et qu'ainsi la vérité qu'il est en train de
cacher aux autres n'a pas été éliminée complètement du monde" (VP, P.324)
"les trompeurs ont commencé par s'illusionner eux-mêmes" (MP, p.53)

2. Faire croire: un enjeu de pouvoir


A] L'intelligence : une alternative à la violence?
a. Un art métaphorique de la guerre : chercher la victoire par d'autres armes
b. Goût de la toute-puissance et tyrannie
Chercher la victoire ne suffit pas, il faut gouverner à tout prix, contrôler les pensées et les actes

"les dirigeants élus" (...) "croient en la toute-puissance de la manipulation sur l'esprit des hommes et pensent qu'elle peut
permettre de dominer réellement le monde" (MP, p.31)

La maîtrise de soi laisse espérer le contrôle des autres

"Faire de ces hommes si redoutables le jouet de mes caprices ou de mes fantaisies ; ôter aux uns la volonté, aux autres la
puissance de me nuire ; (...) attacher à ma suite ou rejeter loin de moi 'ces Tyrans détrônés devenus mes esclaves'" (lettre
LXXXI)
Chez musset, c'est davantage le Cardinal que le duc qui est un tyran: il prend les décisions seul, "sans nous consulter" (V, 1) (le
conseil des Huit). D'ailleurs, il prend le pouvoir à la fin de la pièce en devenant régisseur

B] Ravir l'esprit
a. La force de l'opinion
Importance de l'opinion

L'image de soi est importante : Lutte nouvelle présentée par Arendt

"Faire de la présentation d'une certaine image la base de toute une politique - chercher, non pas la conquête du
monde, mais à l'emporter dans une bataille dont l'enjeu est l'esprit des gens" (p.30 MP) Image = seul objectif =>
arrogance du pouvoir

Marquise de Merteuil au Vicomte de Valmont: "Certes, vous êtes riche en bonne opinion de vous-même : mais
apparemment je ne le suis pas en modestie ; car j'ai beau me regarder, je ne peux pas me trouver déchue jusque là"
(Lettre CXXVII) Arrogance des libertins : la richesse c'est l'opinion pour eux

C'est surtout l'image diffusée qui importe

Marquise : "Ces reconnaissantes Duègnes s'établirent mes apologistes, et leur zèle aveugle, pour ce qu'elles
appelaient leur ouvrage, fut porté au point qu'au moindre propos qu'on se permettait sur moi, tout le parti prude criait au
scandal et à l'injure." (Lettre LXXXI, p.267)

Echange entre Mme de Volanges et la présidente de Tourvel à propos de Valmont

"Vous serez sans doute bien aise, Madame, de connaître un trait de M. de Valmont, qui contraste beaucoup, ce me
semble, avec tous ceux sous lesquels on vous l'a représenté" (Lettre XXII, de la présidente, p.121)

Devenir la fable de la ville est source de déshonneur

Utilisé comme une arme par Gercourt (lettre II) visant les deux roués

Mère de Lorenzo à Catherine: "N'as-tu pas entendu répéter cette fatale histoire de Lorenzo? Le voilà la fable de
Florence" (p.61)

Cependant, le duc incite Maurice à ne pas y croire, laissant entendre que la droiture d'esprit ne devrait pas céder aux
rumeurs. C'est pourtant ce qui cause sa perte puisqu'il n'écoute pas les avertissements

"Et vous aussi, brave Maurice, vous croyez aux fables? Je vous croyais plus homme que cela." (p.178)

Opinion et vérité

Opposition chez Arendt entre la vérité du philosophe et la vérité du citoyen. Singulier VS Pluriel. C'est l'opinion qui dirige le
citoyen et donc la vie en société.

"De là vint que le contraire de la vérité fut la simple opinion, donnée comme l'équivalent de l'illusion" Pourtant, c'est
"l'opinion et non la vérité (qui) est une des bases indispensables de tout pouvoir" (p.296 VP)
La force de l'opinion provient du nombre d'individus qui la partagent

Rejoint la stabilité de 1A]b. La force de l'opinion commune est ce qui permet de trouver un accord : dans Lorenzaccio:

"Comme on n'osait pas faire ce qu'il voulait, on a dit qu'on doutait de lui et qu'on le soupçonnait de fausseté dans ses offres"
(p.200, L'orfèvre à propos de Corsini) Problème de confiance de l'opinion publique

b. Individu et collectif : vers la question de la liberté


Gradation Laclos/Musset/Arendt dans l'échelle du mensonge
Menteur privé devient mensonge organisé (évolution chronologique chez Arendt)
"Le mensonge traditionnel ne concernait que des particuliers et ne visait jamais à tromper littéralement tout le monde; il
s'adressait à l'ennemi et ne voulait tromper que lui." (p.322 VP)

En effet, dans le roman épistolaire, les liens n'ont lieu qu'entre 2 personnes à la fois, même s'ils sont multiples.

"Qui pourrait ne pas frémir en songeant aux malheurs que peut causer une seule liaison dangereuse"

Dans Lorenzaccio, les tromperies entre les individus ont une fin politique

=="Pour gouverner Florence en gouvernant le duc, vous vous feriez femme tout à l'heure, si vous pouviez"== (p.163, La
marquise de Cibo au Cardinal)

Chez Arendt, tromperie de grande échelle qui peut se retourner contre elle même

"tout un groupe de gens, et même des nations entières, peuvent s'orienter d'après un tissu de tromperies auxquelles leur
dirigeants souhaitaient soumettre leur opposants" (p.325 VP)

Il en résulte que l'ennemi devient le diseur de vérité, qui tente de détruire l'image:

"Je voulais agir seul, sans le secours d'aucun homme. Je travaillais pour l'humanité" (p.127) Musset porte un regard
clairvoyant et désabusé sur une république trop jeune (parallèle entre les époques). Ce qui aurait pu insuffler le changement
est perçu comme un danger par ceux qui aurait pu tirer profit du tyrannicide. Le diseur de vérité devient ennemi de ceux-là
mêmes qu'il essaie de délivrer.

Dès lors, la question de la liberté se pose.

La capacité à mentir et à déformer les faits, "fait partie des quelques données manifestes et démontrables qui confirment
l'existence de la liberté humaine" (p.319 VP) Mais donne l'ascendant au menteur.

=> Importance d'institutions indépendantes, de l'éducation

Arendt défend "toutes les institutions d'enseignement supérieur, auxquelles l'Etat confie l'éducation de ses futurs citoyens"
(p.332 VP)
"une presse libre et non corrompue a une mission d'une importance considérable à remplir, qui lui permet à juste titre de
revendiquer le nom de quatrième pouvoir" (p.66 MP)

OPPOSITION avec la figure des bannis dans Lorenzaccio, et au meurtre des étudiants qui tentent de protester

"Citoyens, venez ici ; on méconnaît vos droits ; on insulte le peuple"

c. Les ressources de l'imagination


Le rêve d'une autre réalité est un moteur

Celui de Lorenzo a été de "jur(er) qu'un des tyrans de (s)a patrie mourrait de (s)a main" (III, 3)

l'action est liée à "la faculté de nous écarter par la pensée de notre environnement et d'imaginer que les choses pourraient
être différentes de ce qu'elles sont en réalité"(MP, p.14)

Imagination permet la construction des images, dont Tourvel est prisonnière:

"votre imagination se crée des monstres" (lettre LVIII) Valmont tente de la rassurer

C]
a. L'empire du mal
Lorenzo s'interroge "suis-je Satan"
Les libertins quant à eux semblent prendre un malin plaisir à la souffrance d'autrui

"Quand j'y aurais mis un peu de malice, il faut bien s'amuser 'les sots sont ici bas pour nos menus plaisirs'"(LXIII) (Citation
tirée d'une pièce intitulée "le méchant")

Fausse bonne action de Valmont


Volanges est elle obsédée par l'idée de la faute

"Si c'était pour quelque chose de mal, sûrement je ne le ferais pas" (XVIII)
mentir en vue d'un bien?

"Si nous concevons l'action politique en termes de moyens et de fins, nous pouvons même parvenir à la conclusion, qui
n'est paradoxale qu'en apparence, que le mensonge peut fort bien servir à établir ou à sauvegarder les conditions de la
recherche de la vérité"(VP, p.291)

3. Faire croire: en quête de vérité


A] Chercher la certitude
a. La question du savoir

Le mensonge peut permettre la recherche de la vérité, c.f. ia)b.

Merteuil fait parler son confesseur grâce à un mensonge


"Je m'accusai d'avoir fait tout ce que font les femmes. Ce fut mon expression ; mais en parlant ainsi je ne savais en vérité
quelle idée j'exprimais" (Lettre LXXXI autobiographique)
Ainsi Arendt formule une conclusion:
"Si nous concevons l'action politique en termes de moyens et de fins, nous pouvons même parvenir à la conclusion, qui
n'est paradoxale qu'en apparence, que le mensonge peut fort bien servir à établir ou à sauvegarder les conditions de la
recherche de la vérité" (VP p.291)

Rapport de la marquise au monde : "Observer et réfléchir" (LXXXI)


Le savoir ne peut être purement abstrait, ce qui pourrait revenir à une forme de croyance, un biais : "Ils étaient incapables
d'apprécier la réalité en elle-même, car ils avaient toujours à l'esprit quelque parallèle qui les 'aidait' à l'interpréter" (MP, p.59)
Philippe semble lui même éprouver cette distorsion entre connaissance théorique et réalité humaine

"Qu'il t'es facile à toi, dans le silence du cabinet, de tracer d'une main légère une ligne mince et pure comme un cheveu sur
ce papier blanc ! qu'il t'est facile de bâtir des palais et des villes avec ce compas et un peu d'encre ! Mais l'architecte qui a
dans son pupitre des milliers de plans admirables ne peut soulever de terre le premier pavé de son édifice, quand il vient se
mettre à l'ouvrage avec son dos voûté et ses idées obstinées"(II,1)

Son savoir le paralyse, il déclare à Lorenzo:

"Je m'épuise, vois-tu, j'ai trop réfléchi ici-bas, j'ai trop tourné sur moi-même, comme un cheval de pressoir - je ne vaux plus
rien pour la bataille" (III,1)

b. Une raison faillible


"Par hasard, espérez-vous prouver à cette femme qu'elle doit se rendre? Il me semble que ce ne peut être là qu'une vérité
de sentiment, et non de démonstration ; et que pour la faire recevoir, il s'agit d'attendrir et non de raisonner" (XXII) la
marquise à Valmont

"La tromperie n'entre jamais en conflit avec la raison, car les choses auraient pus se passer effectivement de la façon dont le
menteur le prétend. Le mensonge est souvent plus plausible, plus tentant pour la raison que la réalité, car le menteur
possède le grand avantage de savoir d'avance ce que le public souhaite entendre ou s'attend à entendre. Sa version a été
préparée à l'intention du public, en s'attachant tout particulièrement à la crédibilité, tandis que la réalité a cette habitude
déconcertante de nous mettre en présence de l'inattendu, auquel nous ne nous étions nullement préparés" (MP p. 16)

b. Une raison faillible


c. Foi et vérité révélée
Arendt évoque "la vérité de la religion révélée" traitée comme un "embarras majeur"(VP, p.299-300) par les penseurs politiques
du XVIIe siècle.
Des discours irrationnels peuvent découler :

Le marchand qui tente d'expliquer la mort du duc par des forces sataniques
"Vous ne voyez pas ce qui résulte de ces combinaisons surnaturelles que j'ai l'honneur de vous expliquer ?"(Acte V, scène
5, p.198)

La fois n'est qu'un apparat pour certains:


"Ce n'est pour moi qu'une affaire de dévotion, et que cela suffise pour mon salut, c'est tout ce qu'il me faut" avoue sans
vergogne une femme à sa voisine (I.5)

Quant à eux, les libertins ne font pas semblant, mais se moquent bel et bien de la religion
Merteuil se vante de créer une "espèce de catéchisme de débauche" pour Cécile
Tandis que "Lorenzo est un athée ; il se moque de tout" (I.4) affirme Sire Maurice

B] Le regard posé sur la réalité


a. L'obstacle du fait
"les faits et les évènements sont choses infiniment plus fragiles que les axiomes, les découvertes et les théories - même les
plus follement spéculatifs - produits par l'esprit humain" (VP, p. 295)

Les faits peuvent être niés

"refus délibéré et obstiné, depuis plus de vingt-cinq ans, de toutes les réalités, historiques, politiques et géographiques" (MP,
p. 49)

C'est ainsi que "les spécialistes de la solution des problèmes ont quelques chose en commun avec les menteurs purs et
simples : ils s'efforcent de se débarrasser des faits et sont persuadés que la chose est possible du fait qu'il s'agit de réalités
contingentes" (MP, p.24)

Lorenzo déforme la réalité du Duc:

"Je roule votre baudrier autour de votre épée, et je la mets sous votre chevet. Il est bon d'avoir toujours une arme sous la
main."
Mais en didascalies "Il entortille le baudrier de manière à empêcher l'épée de sortir du fourreau"

Les faits sont en un sens supérieur au pouvoir:

"les faits sont au-delà de l'accord et du consentement" (VP, p. 307)


"dans leur opiniâtreté, les faits sont supérieurs au pouvoir"(VP, p.329)

Témoins = pierre angulaire de ce rapport à la vérité de fait

b. Le dialogue comme socle du monde commun


c. La question du récit : "dire du vrai"
La narration des faits leur donne une lumière particulière

"aucune permanence, aucune persistance dans l'être ne peut être imaginée sans des hommes voulant témoigner de ce qui
est et leur apparaît parce que cela est" (VP, p.291)

Différentes manières de rapporter un même évènement : subjectivité nécessaire des lettres

"les chagrins" mais "la joie et la félicité, également, deviennent supportables et significatives pour les hommes seulement
quand ils peuvent en parler et les raconter comme une histoire (VP, p. 333-334)"

Historien et romancier : fonction politique, ils sont nécessaires


Cette nécessité se manifeste sous les traits de Tebaldeo

"L'art, cette fleur divine, a quelquefois besoin de fumier pour engraisser le sol et le féconder" (II, 2)

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