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Museum

Vol XXV, n° 1/2, 1973

Musées et environnement
museum
Museum, qui sucdde Mouseion, est pub&
A Paris par l'organisation des Nations
Unies pour l'tducation, la science et la
culture. Museum, revue trimestrielle, est la
fois un ptriodique d'information et un
instrument de recherche dans le domaine
de la mustographie. Les opinions exprimtes
'par les auteurs ne reflktent pas ntcessai-
tement celles de l'Unesco. .

ÉDITEURS

editeur en chef: Conrad Wise


Gditeur adjoint : Anne Erdös

COMITÉ CONSULTATIF

Om Prakash Agrawal
Sid Ahmed Baghli
Raymonde Frin
Jan Jelinek
Michael Kustow
Grace McCann Morley
Georges Henri Rivitre
Mario Vásquez
+ directeur de l'Icom, ex oj%o

0 Unesco 1973
SHC.~Z/IV.I16/F
Presses Centrales S.A., Lausanne
I

Musée et
environnement ‘cz,

Kjell Engström Zditorial z


Harold Jefferson Coolidge L ’humanité adozird ’hzi 3
Martin Wyatt Holdgate L’impact de la civilisation hzmaine sm- les écos_ystèmesda globe 4

Le musée : instrument de conservation


Sydney Dillon Ripley Le nzusée e t le patrinzoine naturel IO
Garry Thomson Conznzent organiser la présertlation de notre patrimoine cztlturel I5
I

Le musée : instrument pour la prise de conscience des problèmes


de l’environnement
Georges Henri Rivière Rôle du musée d’art e t dii ntzisée de sciences hiintaìnrs e t sociales 26
Jean Rose et Charles Pene1 Rôle di{ musée de science e t de techniqsre indzistrielle 4 j
AlfG. Johnels Rôle dal ntude d’histoire natzirelle 5 4

Monographies représentatives
Boris Savel’ev Le Misée des sciences de la terre de I’ Uniuersité de Moscoii 5 9
Bent Jsrgensen Le nouveazt illzisée xoologiqzie de Copenhague 6 3
Wilhelmina H. Ica1 Le Alzisée des tropiqzies, Ainsterdam 69
Thomas Dominic Nicholson L ’exposition Man in A€rica, azt Muée américain d’histoire natzwelle, New York 74
FranSois Moniot L’écon“ de Afarquè~e,Sabres, dans le cadre dct Parc naturel régional des Landes de
Gascogne 79
Ralph H. Lewis Édication e t recherche en ntatìh-e d’environnement dans de Parc national de
Yellowstone 8 5
Kjell Engström Les expositions tentporaires e t itinératites :an myen d’infool;ilantionpoidr la protection
de l’environnentent 8 9
Nils-Gustav Gejvall L a destrztction de l’emironnenient à l’époque de la préhistoire, Lertze (Grèce) 93
Bengt Hubendick Miisées d’histoire naturelle, naladies tropicales e t taxonomie 97
Grace McCann Morley Le Misée de NagarJinakonda I o I
Grete Mostny Les nzusées e t les problèmes de la vie qziotidienfze Io8
Jan Jelinek Cotzclkrìon I I 2

Documents annexes
Programme adopté par I’Icont lors de sa sixiènze Conférence générale, L a Hqe, 19 62
(extraits) I I6
Conférence des Nations Uraies szir l’enviromzement, Stockhoh z , 1972
(Kjell Engström), e t la Déclaration sztr l’environnemefjt I 17
Colloqtie N M i d e e t enuironnement >>, organisé par I’Iconz, Bordeazix, Istres,
Lozirnzarin, Paris, 2 ~ - 3o septembre 1972 (extraits) I I 9
Conventiott e t recommandation concernant la protection dzt patrimoine nzondial czijturel
e t naturel adoJtées par la Conférence générale de l’Unesco d sa dix-septième session,
paris, I 6 novembre 1972 (extrait) I 2 I
Recommandation concernant la protection, sztr le plan national, dn patrimoine cidtiirel
e t natiirel IZI
Bibliographie sélective I 2 2
2

Éditorial

Kjell Engström

L'avenir de l'homme sur la terre est devenu depuis peu un sujet fréquent de
discussion : nous envisageons sérieusement les conséquences d'une augmen-
tation explosive de la population mondiale. Plus que jamais, chaque société
exploite ses ressources naturelles afin d'élever son niveau social et culturel. Mais
cela veut dire aussi que nous diminuons les chances de satisfaire le besoin
croissant de nourriture et de matières premières. De plus en plus, la question
suivante est posée : combien de temps dureront les ressources de la planète et
comment pouvons-nous planifier notre développement de fason à éviter une
catastrophe ?
Ce n'est pas en se contentant de formuler des théories sur l'avenir que l'on
résoudra des problèmes de ce genre. Nous devons examiner notre situation
*
actuelle et son arrière-plan historique dans une perspective à laquelle nous ne
sommes peut-être pas accoutumés. La terre elle-même a quatre à cinq milliards
d'années d'existence. Des organismes vivants l'habitent depuis un peu plus
de la moitié de cette période et l'on y trouve des créatures qu'on peut qualifier
d'êtres humains depuis seulement un millième environ de la période durant
laquelle la vie a existé. On pourrait donc penser que l'homme n'est qu'au début
de son développement ; or nous discutons déjà de nos chances de survie et l'on
exprime sérieusement la crainte que nous ne soyons entraînés vers notre perte
et vers la mort de la planète.
C'est dans cette perspective que les problèmes actuels doivent être envisagés.
Nous devons tirer parti de toute notre expérience pour dresser des plans pour
l'avenir. C'est toute I'évolution de l'homme en tant qu'être biologique qu'il
faut prendre en considération et nous devons reconnaître que nous ne pouvons
nous libérer de notre héritage et de notre environnement biologiques. I1 y a
beaucoup à apprendre des succès et des échecs rencontrés précédemment par
l'homme lorsqu'il a essayé de cultiver la terre et d'améliorer la société et les
diverses formes de culture : l'étude de l'ascension et du déclin des civilisations
du passé nous permet souvent de comprendre les problèmes actuels.
Nous pouvons trouver dans les musées la base des connaissances dont nous
avons besoin : elle est constituée par les matériaux rassemblés au prix de grands
efforts par les géologues, les paléontologistes, les biologistes, les archéologues,
les spécialistes de l'histoire de l'art, les ethnologues, les historiens, les socio-
logues et beaucoup d'autres. Ces matériaux et l'information qu'ils engendrent
sont inestimables pour ceux qui cherchent un point de référence par rapport
auquel juger les effets de l'activité et de la planification humaines sur l'environ-
nement. I1 est donc naturel d'essayer de présenter dans Mzmztm les possibilités
qui s'offrent d'utiliser les musées pour examiner nos rapports avec ce qui nous
entoure et pour préparer la solution des problèmes actuels à la lumière de
l'expérience du passé.
Les musées remplissent traditionnellement une triple fonction : documen-
tation, recherche et instruction. Nous espérons que les articles qui suivent
montreront comment la communauté peut utiliser ces fonctions pour tenter de
résoudre le problème et qu'en même temps les musées s'orienteront vers
diverses formes d'activités qui contribueront à enrichir la connaissance de 1

nos rapports avec notre environnement. Nous avons toute raison de penser
que ce vaste panorama des possibilités qu'offrent les musées incitera les
f

spécialistes de la planification sociale et les responsables du développement des


musées à coopérer plus étroitement et à utiliser plus activement les musées
pour analyser et mettre en lumière les répercussions du développement de
notre société sur l'environnement naturel, social et culturel.

L'humanité aujourd'hui
Harold Jefferson Coolidge

La présence de l'homme sur la terre remonte à quelque deux millions et demi


d'années. Pendant presque tout ce temps, la nature et l'environnement physique
lui ont fait la guerre, mais on a assisté soudain à un renversement de la situation
et c'est aujourd'hui l'homme qui livre bataille à l'environnement. Sa victoire
s'affirme de jour en jour. Malheureusement, ce faisant, il risque de se suicider.
L'environnement total n'est pas un ennemi implacable qu'il s'agit de détruire,
mais un allié sans lequel l'homme ne saurait survivre. Cette guerre changea
d'aspect quand les Européens apprirent à industrialiser. Ils purent ainsi vivre
plus nombreux, d'où l'explosion démographique. Cet accroissement de la popu-
lation fut encore favorisé par la médecine moderne, qui réduisit considérable-
ment la mortalité infantile et prolongea la vie d'une multitude de gens.
Cette expansion démographique se poursuit encore et l'industrialisation
s'étend de plus en plus rapidement dans le monde entier. Des matières premières
irremplasables sont consommées à une cadence accélérée et bien des ressources
vitales seront épuisées dans un très proche avenir. Les inines et carrières trans-
forment le paysage en désert quand il n'est pas recouvert de constructions
humaines : logements, usines, routes, aéroports, etc. Les cours d'eau charrient
tous les détritus de l'humanité et le vaste océan lui-même est en passe d'être
asphyxié par les déchets empoisonnés et recouvert d'un manteau de pétrole.
Même dans les régions telles que les parcs nationaux, où le milieu naturel a les
meilleures chances de survivre, les secteurs qui accueillent de nombreux visi-
teurs sont menacés de dégâts irréparables.
Et pourtant, l'espoir renaît car les gouvernements et bien des organisations
internationales et nationales commencent à se préoccuper de la qualité de la vie
autrement que par de simples paroles. L'intérêt, l'inquiétude aussi se déve-
loppent très rapidement. Une action est entreprise à l'échelon local, régional
et mondial pour préserver les ressources naturelles de la terre à des fins à la fois
économiques et esthétiques.
E n tant que président de l'Union internationale pour la conservation de la
nature et de ses ressources, je suis fier du rôle que nous avons joué, en étroite
collaboration avec l'Unesco, qui fut parmi nos fondateurs, ainsi qu'avec
d'autres organisations, dans le domaine de l'éducation et en menant une cam-
pagne en vue de l'utilisation rationnelle des ressources naturelles, c'est-à-dire
en œuvrant dans les secteurs de la recherche, de la planification et de l'aménage-
ment de l'environnement. Plus précisément, nous nous sommes occupés active-
ment, à l'échelle mondiale, de la protection de la faune et de la flore en danger
ou en voie d'extinction, ainsi que des paysages naturels, grâce à l'extension des
parcs nationaux et réserves équivalentes ;ces zones revêtent un intérêt croissant
sur le plan écologique et peuvent servir de banques de matériel génétique pour
les recherches futures, surtout en liaison avec les musées d'histoire naturelle.
Tout homme est éphémère, mais l'important pour lui est de léguer à ses succes-
seurs un patrimoine varié, exaltant et abondant !
[Tmdiiitde Z'aighis]
4

L'impact de la civilisation humaine


sur les écosystèmes du globe

Martin Wyatt Holdgate

On dit souvent des écosystèmes qu'ils font tous preuve d'un équilibre dyna-
mique, c'est-à-dire que leur aspect reste pratiquement le même au cours des
années ; mais cette stabilité apparente est faite d'innombrables et d'incessants
changements internes, qui s'effectuent à un rythme très variable. Dans tout
système écologique, de nombreuses substances parcourent constamment un
cycle plus rapide que le cycle de vie des organismes individuels. L'eau, le car-
bone, l'azote, l'oxygène, le phosphore, le soufre et beaucqup d'autres composés
ou Cléments sont continuellement absorbés par le tissu vivant et libérés de
nouveau par les processus de la respiration et de la décomposition. De la matière
organique est créée sans cesse, mais son accumulation est généralement contre-
balancée par sa transformation en matière inorganique de sorte que la présence
de quantités de tourbe, de charbon ou d'humus - même considérables - est
l'exception plutôt que la règle.
Ces cycles sont un aspect seulement du dynamisme que masque I'équilibre
apparent. D'autres cycles de courte durée comportent la naissance, la croissance,
' la maturation, la reproduction et la mort d'organismes individuels, dans l'en-

semble complexe de la flore et de la faune. I1 n'y a aucune garantie que le


nombre total d'individus de chaque espèce demeure constant dans un système
particulier au cours d'une période donnée : les fluctuations numériques sont, au
contraire, très courantes. En général, toutefois, dans les systèmes apparemment
stables comme les forêts, les marécages, la bruyère alpine ou la toundra, les
espèces demeurent les mêmes et l'abondance temporaire de l'une, qui s'accroît
pour prendre la place laissée vacante par la régression d'une autre, sera suivie
ultérieurement par un mouvement compensateur en sens contraire.
Cette impression d'équilibre peut cependant être fallacieuse. Elle tient en
partie au fait que la vie humaine est brève par rapport au temps que prennent
pour s'effectuer la plupart des changements naturels. Le point d'équilibre, la
structure des écosystèmes changent constamment à une vitesse et pour des
raisons qui varient considérablement. Les changements naturels les plus rapides
sont facilement p e r p par les hommes : par exemple, l'ensablement des lacs, la
transformation de marécages où poussent des roseaux en bourbiers puis en
broussaille et en forêt, ou encore l'occupation des espaces laissés vides dans les
forêts par des orages ou des incendies. Nous séparons ces courtes étapes succes-
sives de ce que les écologistes appellent le climax, l'état apparemment stable de
forêt auquel aboutissent tous ces processus qui, d'ailleurs, ralentissent à mesure
qu'ils s'en rapprochent.
Mais ces climax eux-mêmes sont dans un état de flux tout au long des époques
géologiques. Ils réagissent à deux groupes de facteurs. L'un est physique. Les
climats ont changé avec une rapidité prodigieuse (du point de vue géologique)
dans les zones tempérées et polaires au cours des trois ou quatre derniers mil-
lions d'années, à mesure que les calottes glaciaires se formaient et se dissolvaient
en poussant devant elles la toundra, les forêts boréales et les zones tempérées.
Nous ignorons ce qui cause ces changements. La maturation des sols à l'état
I. L'auteur du présent article est directeur de la
Central Unit on Environmental Pollution du
brut dégagés par le retrait de la glace ou l'altération de nouvelles coulées vol-
Deputment of the Environment, Londres, et ancien caniques, ou le dépôt de sédiments dans le lit des fleuves, entraînent une modi-
directeur adjoint de la British Nature Conservancy.
Les vues exprimées p z l'auteur sont les siennes et íïcation de la vie qui leur est associée. Les bouleversements tectoniques, plus
non pas nécessairement celles de l'un ou l'autre de
ces deux organismes. lents, plus fondamentaux ont des effets sur le climat et le sol, et provoquent
L‘impact de la civilisation humaine sur les écosystèmes du globe 5

l’élargissement du fond des océans, la dérive des blocs continentaux, le regrou-


pement de masses de terre, la constitution de plissements montagneux sont
ainsi la cause de I’évolution des espèces et des écosystèmes.
L‘autre groupe de facteurs est de nature biologique. L’évolution crée sans
cesse de nouveaux génotypes dont certains, répondant aux possibilités nou-
velles offertespar l’évolution de la terre ou supplantant, grâce à une compétition
plus efficace, des formes antérieures, en viennent à dominer et à transformer les
écosystèmes. Nous ne savons pas si l’établissement réussi d‘une nouvelle espèce
exige en général - comme cela semble se passer avec certaines espèces qui ont
envahi des îles océaniques -un bouleversement préalable, c’est-à-dire un chan-
gement rapide du système dans lequel une trouée se trouve ainsi pratiquée.
Mais que de grands changements soient survenus dans la composition des
espèces des fortts tropicales ou tempérées, du plancton marin, et de tous les
autres écosystèmes, c’est ce dont témoignent les fossiles.
I1 est rare qu’un écosystème soit dominé par une seule espèce. Lorsqu’une
seule espèce joue un rôle clé, c’est d’ordinaire une plante dominante ; ce peut
être parfois un stabilisateur ou un premier colon en une succession assez rapide,
comme le phragmite (ou roseau commun) sur la rive d‘un lac, ou la brousse
lors de la repousse de la végétation de Krakatau. Elle peut parfois accéder à
cette position en chassant la plupart des autres espèces de leur habitat insulaire,
comme c’est le cas des touffes d’herbe géantes de la région subantarctique. Les
animaux clés sont, en général, d‘importants herbivores qui, à leur tour, four-
nissent une abondante nourriture à des formes de vie situées plus haut dans la
chaîne alimentaire : cela est vrai du plancton dans les mers antarctiques et du
lemming de la toundra. I1 est rare, toutefois, que la composition et l’aspect d‘un
écosystème soient maintenus par une seule espèce d’animal, et encore plus rare
que le rôle dominant soit joué par un seul prédateur.
On peut supposer que les premiers hommes, omnivores, ont eu une influence
négligeable sur l‘apparition et la composition des espèces présentes dans les
écosystèmes dont ils faisaient partie. Comment en sont-ils venus à dominer les
divers écosystèmes de la planète tout entière?
Au début, l’homme est sans doute devenu chasseur lorsyu’il commensa à se
servir d‘outils même rudimentaires comme la massue en os et le gourdin affilé
et que l’idée lui vint de creuser des pièges dans le sol, ce qui fit de lui un pré-
dateur dangereux pour les gros animaux. L‘énorme quantité de nourriture
d’excellente qualité dont il disposa ainsi lui permit de passer moins de temps à
chercher sa subsistance, augmenta sans doute ses chances de survie et, de ce
fait, le nombre des humains s’accrût. A force d’être harcelés, de gros herbivores
à la démarche lente comme le mylodon de Patagonie ou les lourds mais plus
agiles mammouths et mastodontes finirent probablement par disparaître à cette
époque. Et pourtant, l’homme doit alors avoir, dans l’ensemble, été loin de
tuer toutes les proies qui s’offraient à lui, le nombre de ses victimes étant infé-
rieur à celui susceptible d‘être atteint chaque année grace à la reproduction.
Cela a certainement été le cas des espèces les plus petites qui se reproduisent le
plus vite. Celles qui succombaient étaient probablement déjà sur leur déclin et
elles ne se reproduisaient plus à un rythme suffisant pour reconstituer leurs
effectifs qui étaient, pour reprendre le langage du rapport de l’Institut de
technologie du Massachusetts, ((à la limite de la croissanceD et ne pouvaient
supporter un accroissement continu de la mortalité. L‘animal de proie
constamment pourchassé par l’homme a un système de défense naturel qui
empêche toute extermination. En effet, la chasse poussée à l’extrême rend la
proie moins abondqnte : le chasseur se tourne alors vers une autre espèce ou
périclite lui-même. Le rapport entre le chasseur et sa proie tend ainsi vers
un équilibre.
Le feu, découvert et utilisé très tCt, peut toutefois avoir eu des effets hors de
proportion avec l’intérêt direct qu’il présentait pour l’homme, et il en a eu sans
conteste lorsque celui-ci est devenu éleveur et agriculteur. On peut encore
6 Martin Wyatt Holdgate

discuter de la question de savoir si le feu a été utilisé de bonne heure pour attirer
les proies vers des pièges ou des marécages où elles seraient plus faciles à tuer
mais, s'il en a été ainsi, le système écologique a pu dès lors commencer à être
perturbé sur une très vaste échelle. Car le feu modifie profondément la végé-
tation, il finit par remplacer les broussailles et la forêt par des herbages et des
prairies résistant au feu (souvent d'une faible valeur nutritive et riches en
silices), ce qui à son tour modifie l'abondance de la population animale. Le feu
a peut-être joué un autre rôle dans l'évolution de l'homme: quand celui-ci
commensa à faire cuire sa nourriture, il put utiliser une gamme plus large
d'aliments dont certains devinrent ainsi plus faciles à digérer et donc meilleurs
pour l'organisme.
C'est en défrichant les forêts que l'homme a le plus marqué la planète de son
empreinte. Le feu et la hache ont été les instruments des changements opérés
par lui. I1 s'agissait de créer des pâturages pour les herbivores de taille moyenne,
qui se reproduisaient rapidement, dont l'homme fit d'abord sa proie et qu'en-
suite il domestiqua, et de dénuder le sol pour y faire de la culture. Biologique-
ment, il y a d'énormes différences entre la forêt et les herbages. Une forêt est un
des écosystèmes les plus stables. Ses arbres dominants vivent longtemps, ils
sont tout à fait capables de supporter des fluctuations temporaires du climat
pendant des années tout en conservant la faculté de se reproduire lorsque le
moment est favorable. La plupart des forêts naturelles sont peuplées de nom-
breuses espèces, de sorte qu'un facteur qui en freine ou en élimine une, pro-
voque un accroissement compensateur de l'autre. Sous les ombrages de la forêt
se trouve créé un microclimat qui, en soi, augmente la stabilité et offre une
meilleure protection aux plantes et aux animaux les plus petits qui en dépendent.
Dans les forêts, d'immenses réserves de matière organique et inorganique sont
concentrées dans la végétation permanente, c'est-à-dire dans le bois et les
feuilles, et la végétation annuelle est faible par rapport à cette réserve.
Comparons avec une prairie. Les racines y sont moins capables de protéger
le sol contre l'érosion de l'eau. Elle ne crée guère de microclimat. Elle offre
moins de possibilités d'hébergement pour d'autres organismes. La végétation
permanente est bien moins importante que la végétation annuelle, c'est-à-dire
que le cycle de la matière et des organismes vivants est beaucoup plus rapide.
Elle est plus vulnérable au feu ou à une succession d'années défavorables et elle
réagit plus rapidement aux facteurs extérieurs. En remplasant les forêts par des
pâturages, l'homme des premiers âges a mis en branle un processus, qui se
poursuit encore, et qui a pour effet d'accroître l'instabilité et la vulnérabilité
écologiques. A un stade plus avancé de son développement technologique, il a
étendu son emprise sur un autre écosystème important, les marécages, et, en
les asséchant, il a modifié le mode d'écoulement de l'eau vers les grands fleuves
et transformé d'immenses surfaces qui, en raison de leur inaccessibilité, de leur
invulnérabilité au feu et de leur résistance, avaient conservé jusqu'alors leurs
caractéristiques naturelles.
I1 est intéressant de noter que les variétés d'herbes choisies par l'homme pour
faire des pâturages - et les herbacées et autres plantes cultivées par lui - ne
sont pas nécessairement celles qui maintiennent la plus haute activité biologique
sur la terre qu'il a défrichée. Un marécage où poussent des roseaux peut fort
bien produire plus de végétation vivante par année qu'un champ de blé ou de
pommes de terre. Mais l'homme a naturellement favorisé une production qui
lui est utile à lui et au petit nombre d'herbivores qu'il a domestiqués.
I1 est remarquable que ces herbivores soient si peu nombreux. Ils sont tous
paléoarctiques, c'est-à-dire qu'ils appartiennent à des espèces originaires de la
zone tempérée ou subtropicale de l'Ancien Monde : bovins, chèvres, moutons,
porcs et chevaux. L'homme les a transportés dans d'autres régions, mais il ne
s'ensuit pas qu'ils soient les mieux aptes à procurer le plus de viande même après
l'amélioration des pâturages. Des recherches effectuées en Afrique orientale ont
donné à penser qu'une plus grande quantité de viande par hectare pouvait y
L'impact de la civilisation humaine sur les écosystèmes du globe 7

être fournie par les antilopes du pays que par le bétail importé. Cela tient à ce
que six ou sept espèces d'antilopes sont habituées à se nourrir des différentes
plantes de l'habitat naturel. Dans ces conditions, la stabilité écologique a aussi
de meilleures chances d'être maintenue dans un milieu en transformation que
lorsqu'une seule espèce importée, les bovins, se nourrit d'une gamme de plantes
plus limitée. Même dans l'Europe tempérée, lieu d'origine des bovidés, les
cerfs sauvages des collines écossaises produisent plus de protéines que les mou-
tons ou les bœufs. Des recherches récentes ont révélé que ces cerfs sauvages,
de mCme que des antilopes africaines plus grosses (notamment l'clan) ou le
bœuf musqué d'Amérique du Nord, sont faciles à domestiquer. D'autres études
sont nécessaires, mais on s'apercevra peut-être que le bétail domestique tra-
ditionnel de l'homme est bien loin de représenter une exploitation rationnelle
de toute la diversité des types d'animaux, comme on le fait pour les bovins et
les moutons depuis des siècles. On pourrait tirer des phturages sauvages
un rendement plus élevé en protéines sans compromettre la stabilité éco-
logique.
L'homme primitif, en tout cas, en défrichant les forêts, en cultivant toute une
gamme de plantes alimentaires et en favorisant les animaux de pacage, a provo-
qué des modifications de l'environnement qui ont souvent m i s en péril la
stabilité écologique. En excluant délibérément d'autres prédateurs et en laissant
augmenter le nombre des animaux de pacage bien au-delà du niveau le plus
productif et écologiquement raisonnable, l'homme a encouragé la détérioration
de l'habitat dans les terres semi-arides en particulier. E n brûlant la végétation
à plusieurs reprises pour en faciliter la repousse, il a fait appardtre des herbages
résistant au feu, d'un goût désagréable et, dans certaines régions, où l'herbe a
été broutée à l'excès, le désert a gagné du terrain. Des problèmes réels, comme
celui de l'exploitation de notre ressource la plus rare, la terre utilisable, ont ainsi
été créés inutilement. On estime qu'à l'heure actuelle, plus de la moitié des
terres cultivables dans le monde sont effectivement cultivées et notre empiète-
ment sur le reste est rapide. Souvent, les pionniers qui s'installent sur des terres
vierges sont pauvres, manquent de connaissances et d'équipement et ne savent
pas protéger les sols ou conserver des ceintures de forêts pour assurer la stabilité
de l'environnement, et ils ont tendance à répéter les erreurs de leurs ancêtres.
Cela est encore un des problèmes majeurs de l'environnement.
Le développement de l'agriculture ouvrit immédiatement de nouvelles pers-
pectives. Lorsque les hommes devinrent plus sédentaires et capables de pro-
duire de la nourriture au rythme de leur choix et en plus grande quantité
qu'avant, ils purent former des communautls. Le développement des cultures
vivrières permit en outre de retirer de la même superficie davantage de nourri-
ture par tête d'habitant, ce qui conduisit à l'adoption de régimes alimentaires
extrêmement pauvres en protéines par rapport à ceux des populations s'adon-
nant à la chasse. Les agglomérations et la technologie sont le résultat direct de
ce contrôle de la production alimentaire. Ces développements eurent des effets
sur la santé de l'homme, c'est-à-dire sur le taux de natalité et de mortalité et, par
conséquent, sur la population.
Les premières agglomérations n'ont sans doute pas été des endroits très sains.
De nouvelles maladies apparurent en raison de la promiscuité qui favorisait
la multiplication et la transmission des microbes. La contamination de l'eau et
des habitations par les matières fécales a sans aucun doute facilité le transfert
I
des micro-organismes et des parasites. En revanche, l'amélioration de la nour-
riture a augmenté les chances de survie, et celle des moyens de production a
laissé du temps pour de nouvelles activités comme la fabrication d'outils et
d'ustensiles et la construction d'habitations. I1 ne fait pas de doute que la nata-
lité l'a emporté sur la mortalité du fait de l'accroissement des populations
urbaines. Aujourd'hui, l'amélioration des méthodes d'agriculture a libéré
l'homme, dans une mesure encore jamais atteinte, de la tâche primordiale de la
production alimentaire. Au Royaume-Uni, par exemple, 3 % seulement de la
8 Martin Wyatt Holdgate

main-d'œuvre travaillent dans l'agriculture pour satisfaire la moitié des besoins


alimentaires de la nation. S'il y avait plus de surfaces cultivables - car là est le
facteur limitatif - 6 yo de la main-d'œuvre, ou peut-être moins, pourraient
nourrir toute la population. Le reste serait disponible pour d'autres sortes
d'activité.
Les progrès considérables de la médecine au cours des dernières années ont
fait pencher la balance en faveur de la natalité - avant tout en abaissant le taus
de la mortalité - dans une mesure sans précédent, ce qui a déclenché une explo-
sion démographique : la technologie médicale a, en effet, été exportée dans des
pays essentiellement agricoles alors que d'autres formes de technologie, qui
favorisent un niveau de vie élevé et un faible taux de natalité, sont loin d'avoir
été exportées dans les mêmes proportions. La pollution, le troisième Clément
dans la triple interaction avec la population et les ressources, est une consé-
quence directe de la technologie. Certes, l'homme primitif déversait ses déchets
dans l'environnement, mais il s'agissait de déchets organiques : matières fécales,
urine, cadavres, restes de nourriture. Ceux-ci ne posaient pas de problème sauf
lorsque leur accumulation excessive risquait de compromettre les ressources
en eau ou, dans les grandes agglomérations, d'empuantir et de désoxygéner
les rivières au détriment de la vie aquatique. Le problème posé aujourd'hui par
les eaux d'égout est de taille, mais lorsque les déchets peuvent être conve-
nablement dilués et dispersés, l'environnement peut en venir à bout.
Mais l'homme a créé deux autres sortes de pollution. I1 a redistribué les
substances naturelles sur une grande échelle. Certaines étant des aliments bio-
logiques, comme le phosphate et le nitrate, favorisent l'éclosion de la vie là où
elle n'est pas souhaitée, notamment dans les rivières, les lacs et les réservoirs
où elles sont déversées sous forme d'effluents ou d'eaux de ruissellement prove-
nant de terres auxquelles on a ajouté des engrais en quantité excessive ou à un
moment inopportun. I1 peut en résulter une désoxygénation et des modifica-
tions de la vie aquatique. Une autre forme de pollution (( redistributrice )) est
l'exploitation minière car, très souvent, elle provoque la concentration de
métaux dans les déchets ou la présence de grandes quantités de matières
toxiques dans le sol, la végétation, les aliments ou l'eau. Mais, et cela est plus
grave, l'homme a créé des substances nouvelles avec lesquelles ni lui ni les
autres organismes n'ont été en contact au cours de l'évolution et il les a déver-
sées dans l'environnement sans en avoir étudié pleinement les effets. C'est là
un aspect du problème de la pollution qui fait maintenant l'objet d'un examen
très sérieux et qu'il importera de ne pas négliger dans l'avenir.
La pollution peut avoir des effets directs sur l'homme ou sur son cheptel et ses
récoltes. En un sens, c'est là qu'il est le plus facile d'intervenir car ces effets
se font sentir immédiatement. Et, s'ils entraînent la mort ou la maladie d'êtres
humains, des pertes de récolte ou de cheptel, ou une sérieuse corrosion, leur
caractère nocif est alors si évident qu'une action pour y remédier est facile à
justifier. Mais nous abordons aujourd'hui une nouvelle étape de l'évolution de
l'homme : ses déchets, en se répandant dans la biosphère, peuvent avoir sur le
climat ou sur des organismes comme le plancton marin des effets moins évi-
dents, plus lents, et provoquer des changements écologiques dificiles à distin-
guer des variations naturelles du mlieu mais susceptibles, finalement, de com-
promettre la stabilité des principaux écosystèmes. Les mesures pour remédier
à ces effets tardifs peuvent, elles aussi, traîner en longueur. Donc, si les effets
directs sur l'homme se corrigent en général d'eux-mêmes rapidement, ces
autres effets, eux, risquent de créer une situation irréversible et de causer des
dégâts inacceptables, même si des mesures de redressement sont prises dès le
début. Face à une telle éventualité - et je ne crois pas, je tiens à bien le souli-
gner, que ce soit autre chose pour l'instant -le seul parti raisonnable à prendre
est d'essayer de déceler ces changements pendant qu'il est encore temps d'en
prévenir les dégâts. C'est là un problème d'une importance majeure pour la
communauté mondiale.
L'impact de la civilisation humaine sur les écosystèmes du globe 9

Le monde est, assurément, une mosaïque. Dans certaines parties du globe -


les détroits de Magellan ou d'Aysen, le désert de Kalahari ou les forêts de
l'Amazonie - l'homme demeuré chasseur vit toujours en harmonie avec la
nature, la quantité de plantes et d'espèces animales qu'il consomme est très
inférieure à celle dont il dispose. Par endroits, le type de société pastorale et
agricole de nos lointains ancêtres subsiste encore. Dans trop de régions, le
défrichage irréfléchi de la forêt vierge et l'implantation de villes sordides et
misérables abîment l'environnement et sont préjudiciables aux individus. Ail-
leurs, sous la conduite des gouvernements et d'organisations comme l'Organi-
sation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), l'agricul-
ture a fait d'énormes progrès et elle est en passe d'atteindre un niveau élevé de
productivité. Ailleurs encore, on voit clairement les conséquences d'un urba-
nisme et d'une technologie tantôt éclairés, tantôt peu judicieux. Peut-être
sommes-nous tous dans le même bateau, mais nous ne voyageons pas tous dans
la même classe. Ce dont nous avons tous besoin, c'est d'une meilleure définition
de nos priorités communes - variables selon les régions - et de meilleures
connaissances scientifiques sur lesquelles fonder une action tant nationale
qu'internationale.
En conclusion, de nombreuses régions du monde sont actuellement dans une
situation de déséquilibre. L'accroissement de la population, les besoins des
hommes en ressources naturelles non renouvelables, et la pollution augmentent
rapidement. Nous disposons des moyens nécessaires pour y faire face. La
technologie, si elle est cause de pollution, nous a donné les moyens de la pré-
venir ou d'y remédier. Nous pouvons contrôler les naissances au lieu de comp-
ter sur la mortalité infantile pour freiner l'accroissement démographique. Nous

' pouvons réduire le taux d'utilisation des ressources. La question fondamentale,


comme Dennis Meadows l'a dit, est de savoir si nous pouvons nous acheminer
sans heurt vers la stabilité ou si une situation irréversible, une diminution des
ressources et une mortalité massive sont inévitables. Cette question va de pair
I
avec celle de savoir si des facteurs physiques ou liés au comportement limiteront
en fin de compte l'accroissement démographique. Notre planète étant finie
dans ses dimensions nous arriverons forcément à une stabilisation. Chez les
hommes primitifs, les limites étaient imposées de l'extérieur par des facteurs
d'environnement. Le seul parti socialement acceptable maintenant est de faire
en sorte - contrairement à ce qui se passe pour la plupart des organismes dont
le nombre est limité par le comportement - qu'un excédent de jeunes ne soient
pas chaque année obligés de quitter les habitats qui leur conviennent pour aller
dans des régions périphériques où ils souffriront de la faim. Ce changement
sera quelque chose qu'aucune espèce n'a accompli - mais aucune autre espèce
n'a non plus accompli les autres réalisations de l'homme - et il n'y a aucune
raison fondamentale pour que nous ne l'accomplissions pas volontairement
comme une conséquence directe d'une meilleure compréhension de nous-
mêmes et du monde.
Nous sommes donc arrivés au moment où l'impact de l'homme sur l'envi-
ronnement s'est accentué au point de modifier les écosystèmes sur une grande
partie habitable du globe. Nous sommes dans la nécessité de veiller à notre
impact et de faire en sorte que ces écosystèmes conservent la stabilité et la pro-
ductivité dont nous dépendons. Nous sommes arrivés au point où, pour la
première fois, nos déchets peuvent menacer non seulement des groupes d'indi-
vidus, des édifices, du cheptel, mais la stabilité des écosystèmes de l'ensemble
du globe. I1 nous faut trouver les moyens d'aménager la terre, sans nous laisser
' envahir par ces déchets. Mais, surtout, nous devons nous occuper de l'homme et
nous comporter de manière à avoir un nombre d'individus en rapport avec les
ressources de la planète et à laisser une part suffisante de ces ressources à chacun
*'
I
1 pour lui permettre de vivre et non pas simplement d'exister.
i
IO

Le musée :instwment de consewation


I

L'.me des princ+aies fonctions des fnusèes est de traiter e t de classer, gr2ce à leurs
collections e t à des docw~zentsvariés, des échantillons représentant divers environnenzents
e t événements. Cette activité ne sazvait néanmoins se limiter au simple stochge d'objets
e t defaifs: ìl f a a t azmi z m effort continu pow préserver les divers élénzents e t envi-
ronnenzents czilturels e t ?es dqendre contre ?es effets ou iny%ences nuisibles. Dans ?e
secteur de l'histoire natzo-elle, par exemple, cette règle fie vatit pas sedenient pow la
docmzentation concernant des rnìliezrx naturels quì risquent de disparaître; ?es "?es
- ce terine étant pris dans son acception la plus darge - remplissent azwi une fonction
vitale en étudìant les rapports de cause à effet de fagon à les rendre intelligibles au
pztblic, e t en agissant pour sauver de l'extinction les espèces animales e t vkétales rares.

Le musée et le patrimoine naturel

Sydney Dillon Ripley

Le musée en tant qu'instrument de conservation est habituellement considéré


comme un lieu destiné à éduquer le public. L'éducation du public est une
question qui prend de plus en plus d'importance et qui est encore mal
comprise. A l'avenir, on pourrait obtenir les meilleurs résultats dans ce
domaine au moyen de présentations et d'expositions spectaculaires dans un
cadre tel que celui d'un musée, surtout dans les villes. I1 y a plus d'un siècle
que le problème de la compréhension de la nature par les communautés
urbaines préoccupe les éducateurs. Les perspectives d'avenir demeurent, à
cet égard, inquiétantes et énigmatiques. I1 n'est pas certain que les êtres
humains entassés dans les villes souhaiteront connaître le monde de la nature.
Au cours des dix dernières années, les spécialistes de l'éducation vraiment
pénétrés de la gravité de leur tâche ont été fortement encouragés par l'éveil
général de l'inquiétude populaire devant la disparition des ressources naturelles
de la planète. La Conférence des Nations Unies sur l'environnement, qui a eu
lieu à Stockholm en juin 1972, a marqué l'aboutissement d'une partie de ce
mouvement. De même, des musées, des jardins zoologiques, des parcs natio-
naux et beaucoup d'autres institutions s'intéressant à l'éducation ont commencé
à adopter une attitude plus positive à l'égard de ce problème.
Par sa nature même, le musée d'histoire naturelle peut être à la fois un instru-
ment d'éducation du public et le dépositaire des vestiges du passé, voire d'un
passé récent. D'une fason générale, ces dernières années, la fonction de collecte
des musées a perdu de son caractère actif, étant donné l'extension de l'exploi-
tation et de l'aménagement de l'environnement dans le monde entier. A l'ère *
de l'exploration et de l'étude systématique semble devoir succéder Père de la
( 1.
conservation et du dépistage des données.
On considère de plus en plus les musées d'histoire naturelle comme des
banques de données pouvant laisser présager la transformation de l'environ-
Le musée et le Datrimoine naturel II

nement et sauvegarder un matériel témoin de cette transformation. Les collec-


tions des musées seront de plus en plus utiles à l'avenir pour prévoir ou
enregistrer les changements subis par l'environnement. La qualité des mers, des
lacs et des forêts adjacentes ne cessant de baisser, nous pouvons tenir la présence
ou l'absence de certaines espèces témoins pour des indicateurs de ces taux de
changement. I1 s'agit là d'un service d'alerte que les musées peuvent assurer en
liaison avec les nouvelles institutions de protection de l'environnement qui se
créent à l'échelon international. Les organisations telles que le Projet de plan
vigie, qui doit être établi en corrélation avec les activités des Nations Unies,
devraient faire largement usage des ressources muséologiques. Les systèmes
internationaux de surveillance devraient suivre attentivement l'état de l'envi-
ronnement de notre planète et pouvoir utiliser facilement les données relatives
aux ressources naturelles que détiennent les musées.
Plusieurs musées ont également pris d'autres initiatives en vue de jeter un
pont entre les citadins et l'environnement naturel, et entre l'objet inanimé et
l'organisme vivant. L'appui apporté par les musées aux activités des centres de
recherche situés au cœur de zones naturelles se révèle de plus en plus fructueux.
Les responsables des musées d'histoire naturelle, sans doute mieux que ceux
de toute autre institution, savent à quelle rapidité se dégrade l'environnement
et quelle était dans le passé la répartition des habitats et des espèces ; ils con-
naissent la valeur de l'information qui ne peut être recueillie que sur le terrain
et n'ignorent pas que toute chose ne peut ni ne doit être recueillie en vue d'être
stockée dans quelques édifices. Pour eux, la conservation de zones naturelles a
donc une valeur considérable. La priorité accordée à la préservation de ces
zones pour la recherche scientifique en interdit l'utilisation pour le genre de
loisirs préconisé dans les parcs nationaux. Mais les musées deviennent de plus
en plus experts dans l'art de traduire les Cléments d'information recueillis dans
ces habitats inaccessibles au grand public et de les présenter à ce dernier sous
une forme attrayante et éducative. Des écosystèmes extrêmement fragiles,
comme ceux qu'on trouve sous les tropiques ou dans des îles océaniques telles
que les îles Galapagos ou Aldabra, méritent particulièrement de retenir l'atten-
tion de ces musées. De même l'étude et la conservation des habitats groupant
des espèces menacées d'extinction devraient faire l'objet d'efforts spéciaux.
I1 n'est que trop facile aux musées, pour ne point parler du grand public,
d'oublier l'utilisation toujours plus abusive qui est faite des océans et des orga-
nismes marins. Cependant, certains musées organisent actuellement des
recherches et des activitks éducatives spécialement axées sur ces vastes biomes
malheureusement si peu connus. Nous voulons espérer que leurs initiatives ne
sont ni trop restreintes ni trop tardives.
Les musées qui se spécialisent dans les études sociales telles que l'ethnologie,
l'archéologie et l'anthropologie s'efforcent aussi davantage à l'heure actuelle
de mieux expliquer la relation qui existe entre I'homme et son environnement.
Les tribus et autres groupes primitifs ont vécu et continuent de vivre en bien
plus grande harmonie avec leur milieu naturel. Mieux nous comprenons les
mécanismes qui aboutissent à un tel équilibre plus il nous est facile de faire
prendre conscience au citadin qui vient au musée à quel point il est coupé du
monde naturel. Certaines institutions, en particulier celles qui s'occupent de
jardins botaniques, misent beaucoup sur les nouveaux moyens de préservation
du matériel génétique. Les espèces sauvages dont est issue la flore cultivée
risquent sans doute encore plus que d'autres organismes de souffrir de la dégra-
dation générale de l'environnement. C'est pourtant cette flore sauvage qui est
indispensable à la culture d'autres plantes plus résistantes et plus productives.
La connaissance et la conservation des spécimens est le propre des musées qui
devraient jouer un rôle prépondérant dans la conservation des réserves
génétiques.
Quelques organismes, comme la Smithsonian Institution, qui dirigent et
administrent un certain nombre de musées s'occupent aussi de la gestion de
I2 S. Dillon Ripley

jardins zoologiques qui sont intéressants à un double titre: on y accorde une


importance capitale à l'éducation du public et le spectacle d'animaux vivants
captive aussi bien les enfants que les adultes. Mais les activités éducatives des
jardins zoologiques sont encore embryonnaires. Relativement peu d'efforts ont
été faits - en particulier dans les villes où les zoos sont bondés -pour conce-
voir un cadre approprié dans lequel il suffirait au visiteur d'ouvrir les yeux pour
s'instruire au lieu d'avoir à lire les pancartes. La contemplation de deux pandas
enfermés dans une cage n'est pas très enrichissante quel que soit le nombre de
pancartes, d'inscriptions ou même de dispositifs audio-visuels dont ils sont
entourés. I1 faut espérer que les futurs zoos exposeront un moins grand nombre
d'animaux par rapport à l'espace qui leur sera offert. L'un des objectifs de
l'éducation serait de montrer un choix restreint d'espèces menacées de dispari-
tion dans un décor naturaliste et d'appeler ainsi l'attention du public sur
l'écologie et les problèmes liés à l'enyironnement.
Tandis que les zoos, dans leur ensemble, traversent cette phase de transition,
le public continue à avoir les mêmes exigences, ce qui crée une tension entre,
d'une part, les propriétaires de petits zoos qui veulent toujours être à même de
montrer des animaux vivants, d'offrir un spectacle au public et, d'autre part,

I
NATIONAL ZOOLOGICAL PARK,
Washington, D.C. Ling Ling, l'un des
deux pandas, donnés récemment aux
Etats-Unis par la République populaire de
Chine, qui attirent les foules.

ceux des zoos plus importants et plus connus qui ont le sentiment de poursuivre
un objectif national, voire international, en élevant des animaux. De telles
institutions sont vigilantes et à l'avant-garde de la lutte contre le trafic inter-
national d'animaux rares ou menacés. Bien souvent; les zoos moins importants
se désintéressent de cette action ou bien, par pur chauvinisme et espérant en
retirer un avantage matériel, ils s'adonnent à la contrebande ou favorisent
inconsidérément de dangereuses tractations.
L'exemple des pandas est révélateur, tant du désir qu'éprouve le public
d'observer des animaux vivants que du charme et de l'attrait des animaux
vivants eux-mêmes. Le panda figure sur la liste des espèces rares et menacées.
Son habitat, peu connu et inaccessible, est situé sur les pentes montagneuses
couvertes de forêts de quatre des provinces de la République populaire de
Chine les plus proches de sa frontière occidentale. La biologie reproductive du
panda géant n'est encore guère connue. Nous savons cependant que le zoo de
Le musée et le Datrimoine naturel

2
SAN DIEGOZoo, San Diego. Cerfs de race
PPre David.
3
L'oie de Hawaï, un exemple des especes
menacées de disparition, préservées et
élevies en captivité, puis rendues à l'état
sauvage.
2

Pékin a obtenu plus d'un résultat positif dans l'élevage des pandas, mais il
reste à déterminer dans quelle mesure et de quelle fason il sera possible de
mener à bien l'élevage d'animaux captifs dans un tel environnement.
Que désire voir le public ? Au cours des mois qui se sont écoulés depuis
l'arrivée de ces pandas au Zoo national de Washington, D.C., le nombre des
visiteurs a augmenté de moitié (fig. I). Pendant cette période, le musée d'histoire
naturelle voisin du zoo, qui a fait beaucoup de publicité autour de l'exposition
dans la salle des mammifères d'un panda empaillé, a constaté que cette initiative
n'éveillait pas le moindre intérêt. Au même moment, l'installation dans ce même
édifice, d'un zoo d'insectes rassemblant des abeilles, des fourmis, des cancrelats
et d'autres insectes a attiré beaucoup plus de visiteurs. I1 semble que, pour être
intéressants, les pandas doivent être vivants ;mais pour avoir valeur éducative,
ils doivent être présentés au public dans un environnement ressemblant à leur
propre territoire et de nature à illustrer la diversité et la variété de notre planète.
Ainsi se trouve posée la question générale des fonctions qui peuvent être
confiées aux jardins zoologiques en dehors de leur rôle éducatif. En principe,
un zoo devrait pouvoir servir de réserve génétique, de centre où des animaux
en captivité de lignée rare pourraient être conservés en vue de leur élevage et
de leur éventuel retour à l'état sauvage si, à l'avenir, les conditions de vie à l'état I
sauvage pouvaient être réunies. C'est ainsi que, grâce à la prévoyance de l'un
des ducs de Bedford, nous avons préservé un troupeau de cerfs de la race Père
David. I1 existe également, en captivité, dans la Réserve Bialowieza en Pologne,
un troupeau de bisons sauvages de l'espèce européenne. Certains jardins zoolo-
giques possèdent d'autres bisons sauvages, mais la plupart d'entre eux ne sont
pas vraiment élevés en vue de la reproduction ; il existe aussi, dans certains
jardins zoologiques, d'autres cerfs Père David (fig. z), mais la plupart ne pour-
raient servir à reconstituer une nouvelle harde. Au cas où seraient à nouveau
réunies, en Chine, les conditions favorables à la .création d'une importante
réserve sur un terrain de type marécageux, semi-aride et semi-forestier dont le .
cerf Père David est originaire, un troupeau de cerfs de cette lignée pourrait, en
principe, être rendu à l'6tat sauvage. De la même fason, il serait possible, grâce
à un aménagement des parcs européens, de faire revivre les bisons à I'état semi-
naturel ou sauvage. L'oie de Hawaii (fig. j),l'oiseau national de l'île, a aujour-
d'hui, grace à l'élevage, atteint un stade de développement qui permettrait de la
relâcher dans la nature. On peut citer d'autres exemples de ce genre au sujet
du bison et du pronghorn (antilope) d'Amérique ainsi que de l'antilope et du
zèbre d'Afrique du Sud. On s'efforce également, par voie de reproduction
14 S.Dillon Ripley

4 d'animaux captifs, de constituer un troupeau auxiliaire de grues huppées


SANDIEGOZoo, San Diego. Rhinocéros
blanc, antilope noire, chamois du Cap et d'Amérique du Nord et d'oryx arabes.
zkbre dans la réserve d'animaux sauvages I1 est à remarquer que ces tentatives se sont presque toujours déroulées dans
de San Diego.
des réserves d'animaux sauvages plutôt que dans des jardins zoologiques. A
l'heure actuelle, tout zoo qui se propose d'élever des animaux menacés de
disparition doit disposer d'un parc assez vaste pour un troupeau entier d'ani-
maux de ce type. Le seul zoo actuel de ce type aux États-Unis est celui de San
Diego (Californie) qui a fait aménager un grand parc à la campagne à quelque
distance de ses installations citadines (fig. 4). La London Zoological Society
a été un précurseur à cet égard car elle a déjà créé son propre parc à Whipsnade.
De même, le Muséum de Paris a créé à Fontainebleau un centre d'élevage de
lémures. Tous ces projets entraînent des dépenses considérables, exigent des
capitaux et beaucoup d'espace et, dans la plupart des cas, la présentation au
public devient secondaire. L'emploi de trains ou de cars pourrait être envisagé,
mais en réalité les efforts sont davantage axés sur les animaux eux-mêmes que
sur le public qui vient les contempler. D'autre part, le spectacle d'animaux
placés dans un tel cadre provoque l'effet éducatif que j'ai évoqué plus haut.
C'est seulement dans un décor naturel, ou que l'on s'efforcera de rendre tel, que
le public sera en mesure de dépasser le stade de la perception pour atteindre
celui de la réflexion et de prendre conscience, pour ainsi dire involontairement,
de la notion de conservation.
Car, en fait, les jardins zoologiques sont bien des instruments de conserva-
tion. Leur fonction idéale serait, en sauvegardant une lignée reproductrice
d'animaux rares et en éduquant le public, d'établir un lien entre le musée,
dont la vocation principale est de conserver des vestiges et des spécimens de
choses mortes, et les régions du monde où l'on peut encore trouver une flore
et une faune sauvages ou des biotopes naturels. Les jardins zoologiques
contribueraient à rapprocher l'homme de son environnement et à lui faire
prendre conscience des dangers de la poursuite d'une exploitation inconsidérée
de notre planète.
Comment organiser la préservation
de notre patrimoine culturel I Garry Thomson

Notre information sur le passé est le plus souvent exprimée par des mots et des
images qui nous parviennent par l’intermédiaire des livres, du cinéma et des
écrans de télévision. On s’attache sans cesse à mettre au point de meilleures
méthodes de classement et de présentation de ces témoignages du passé. Malgré
cela, pour de multiples raisons que nous n’avons pas à étudier ici, il reste néces-
saire de conserver et d’exposer des objets anciens réels. Ce n’est pas seulement
parce que, scientifiquement parlant, la mise en réserve entraîne nécessairement
une perte d‘information, car cette raison n’explique pas pourquoi les gens font
la queue pendant des heures pour voir le trésor de Tout Ankh Amon, ni pour-
quoi le prix d’un chef-d‘œuvre atteint aujourd’hui des millions de dollars.
Les musées ont été créés a) pour présenter des objets réels, beaux et intéres-
sants provenant du passé, b) pour renseigner le visiteur sur leur sens profond,
et c) pour protéger ces objets contre la destruction.
Si, à un moment quelconque, un musée ne présente pas ses collections de
fason à les mettre en valeur, ou ne se soucie pas de savoir ce que le public veut
voir ou connaître, il ne remplit pas son rôle, mais aucun dommage irréparable
n’en résulte. Au contraire, s’il laisse sa collection se détériorer par négligence,
le dommage sera en grande partie irréparable, et des objets uniques en leur
genre risqueront de disparaître à jamais. On est donc fondé à conclure que le
premier devoir de l’administration d‘un musée est de veiller à ce que ses col-
lections soient dûment conservées. Mais le caractère prioritaire de ce devoir
n’implique pas que l’administrateur principal doive être un expert en matière
de conservation. En fait, comme sa tâche consiste essentiellement à choisir, à
acquérir et à présenter, il vaut mieux, de fason générale, qu’il soit spécialisé
dans l’histoire de l’art, l’archéologie, les sciences, etc., suivant la nature de ses
principales collections. Ainsi, la décision capitale qui condamne un objet cultu-
rel à disparaître rapidement, ou qui lui donne une chance sCrieuse de survivre
dans un musée, appartiendra à un administrateur, qui, on peut l’espérer, sera
un homme cultivé et un homme de goût, qui ne se laissera pas trop influencer
par des modes passagères.
Le processus de choix intervient indépendamment de la volonté du technicien
de la conservation, mais il ne lui est pas pour autant étranger, car c’est à ce choix
qu’est lié l’intérêt porté par le public à la préservation des œuvres : s’il voit
tomber en poussière de magnifiques chefs-d’œuvre anciens, il s’irritera de cette
négligence. Si, au contraire, les musées se remplissent d‘une multitude d’Oeuvres
I. Les illustrations de ce texte sont de Marcus Rees-
anciennes ou modernes Sans intérêt ni Valeur, il se trouvera sûrement quelqu’un Roberts. Elles refl&tentl’impression qui lui est propre
et qui n’est g u h e flatteuse de la façon dont la jeune
pour crier au gaspillage d‘argent, et les conservateurs n’obtiendront plus les genkration voit la que j,ai essaye de deCrire.
16 Garrv Thomson

moyens matériels qui leur sont nécessaires. Les peintAres et les objets d'art
décoratif datant de deux siècles ou plus ne posent pas de problèmes, car, sous
l'effet d'un processus naturel inévitable, ils sont déjà devenus beaucoup trop
rares. Au contraire, les peintures contemporaines (parfois de dimensions exces-
sives), acquises par les musées en posent déjà un. Le choix se heurte aussi à
une deuxième difficulté qui tient aux opérations de sauvetage archéologique à
engager à temps pour récupérer des objets anciens avant qu'ils soient détruits
par les machines servant à construire des routes, ou sous l'effet d'autres change-
ments de l'environnement. Des monceaux de tessons peuvent être de précieux
témoignages historiques, mais ne se prêtent guère à l'exposition dans un musée.
Les pays économiquement pauvres qui possèdent un riche patrimoine cultu-
rel ont à résoudre un troisième problème, celui du choix du petit nombre de
monuments et de sites que leurs maigres ressources leur permettent de préserver.
Mais les techniques de conservation, qui sont l'objet de cet article, sont un
domaine trop vaste pour que nous puissions en dire davantage sur ce problème
du choix, quelles qu'en soient les conséquencespour notre travail. De même, les
mesures de protection contre le vol, bien que directement liées à la conserva-
tion, relèvent maintenant d'une autre spécialisation.
Ce n'est qu'assez récemment (depuis la deuxième guerre mondiale) qu'il s'est
peu à peu créé, en muséologie, une profession dont les membres ont pour tâche
d'empêcher, autant que possible, les collections de se détériorer. Comment
appeler les personnes qui remplissent ce rôle essentiel? On continuera sans
doute à employer le terme ambigu de (( conservateur )) 2, bien qu'il désigne tra-
ditionnellement, en Europe, les administrateurs de musées, et que, de façon
plus générale, le mot conservation )) paraisse s'appliquer aujourd'hui à la sau-
vegarde de tous les aspects de l'environnement (sauf le contenu des musées!).
I1 ne faut pas oublier que le mot (( conservateur D, et aussi les autres termes
employés pour désigner les administrateurs de musées (comme l'anglais
czmzfor), ont toujours signifié (( qui préserve )) ou (( qui protège D, à cela près
qu'on admettait autrefois que cet aspect du travail n'exigeait aucune connais-
sance, compétence, ou activité particulière. Mais les choses ont changé et la
somme des connaissances disponibles s'est accrue à tel point que la conserva-
tion, au sens originel du mot, nécessite les services d'un spécialiste, dont la
connaissance des processus de détérioration permet d'en réduire les effets au
minimum.
Mais notre propos commence à ressembler à l'un de ces récits trop bien
construits et trop simplifiés qui n'ont qu'un lointain rapport avec la réalité !
La conservation ne s'est pas développée de cette façon. Elle n'a même pas encore
atteint, à notre époque, le stade évoqué plus haut. Comme il y a toujours des
objets en mauvais état, la conservation, depuis ses débuts, a toujours consisté
essentiellement à réparer, de sorte que la plupart des conservateurs peuvent être,
à juste titre, appelés (( restaurateurs )) et se considèrent eux-mêmes essentielle-
ment comme des artisans spécialisés. Même le groupe de professionnels
suivant, dans l'ordre d'importance numérique, ne s'occupe qu'accessoirement
de prévenir la détérioration : ce sont les analystes auxiliaires des services de res-
tauration, qui associent très souvent à leurs tâches d'analyse les aspects plus
particulièrement techniques du travail de restauration.
Le développement de la profession de conservateur n'a pas échappé aux
règles que suit habituellement celui d'un nouveau service, qui commence par se
développer sans ordre, pour répondre à des besoins mal définis. On trouve dans
I'histoire des exemples de ce phénomène dans toutes les professions - méde-
cine, éducation, droit, science, etc. A un certain stade de l'évolution de ces
professions, il est devenu nécessaire de se faire une vue d'ensemble - en tout
t . Par exemple, ce mot est utilisé par les deux
cas moins (( au ras du sol )> - de chacune d'elles, d'en modifier les objectifs et
principales organisations internationales de techniciens de lui imposer une certaine forme d'organisation.
de la conservation : l'Institut international pour la
conservation des objets d'art et d'histoire (IIC), et le Bien que les professionnels soient les meilleurs juges de ce qui peut être fait,
Comité pour la conservation du Conseil international
des musées (Icom). la question de savoir ce qui doit l'être ne peut être résolue que par un dialogue
Comment organiser la préservation de notre patrimoine culturel 17

J
La conservation dépassée par la reparation.

entre le fournisseur du service en cause et son utilisateur. Ce dialogue est très


souvent précédé d'un article ou d'un discours - c'est-à-dire un monologue -
plein d'arguments persuasifs, mais entachés de parti pris et qui, de ce fait, pro-
voquent la réplique. C'est ce que je voudrais essayer de faire, à ma modeste
fason dans le présent article, enhardi par le fait que, quoique taxés de philisti-
nisme, les hommes de science sont devenus au moins aussi perspicaces que
leurs confrères face aux nombreux dilemmes de la vie moderne.
Nous devrons partir de l'hypothèse que les crédits disponibles sont mal répar-
tis dans le monde des musées. L'esprit d'acquisition étant la marque principale
de la société occidentale d'aujourd'hui, les moyens d'acquisition dont disposent
les musées n'ont cessé d'augmenter depuis la f k de la dernière guerre, bien que,
comme partout, on ne les juge pas encore satisfaisants. A une époque où un
avion de chasse à réaction, un kilomètre d'autoroute ou un beau tableau
reviennent chacun à plus d'un million de dollars, nul ne saurait prktendre qu'il
soit impossible de trouver les fonds nécessaires pour assurer la conservation
d'objets anciens précieux.
Si l'industrie comprend parfaitement qu'il importe d'entretenir les biens
d'équipement coûteux, les musées n'ont pas encore réussi à se faire considérer
comme autre chose que des dépositaires de biens délaissés. La raison en est
qu'aucun pays n'a encore élaboré un système de conservation satisfaisant.
Voyons donc ce que pourrait être un tel système.
La conservation peut être organisée sous trois aspects : le contrôle de l'envi-
ronnement, la restauration et l'analyse.

Le contrôle de l'environnement
Cet aspect doit être examiné d'abord, bien que la restauration soit, historique-
ment, bien plus ancienne, parce que tout musée, même s'il n'envisage pas de se
doter d'un service de restauration, doit prendre très au sérieux le problème du
contrôle de son environnement interne, de fason à réduire au minimum, avec
les moyens dont il dispose, la détérioration de ses collections. Nous n'entrerons
pas dans le détail des facteurs qui interviennent, en nous bornant à noter que le
contrôle doit porter sur l'humidité relative, la lumière, les rayonnements ultra-
violets, la pollution de Yair par les gaz et les matières particulaires, et la tem-
pérature.
L'humiditC relative - c'est-à-dire l'hygrométrie - doit être maintenue à une
valeur constante (située vers le milieu de l'échelle) pour éviter, d'une part,
18 Garrv Thomson

qu'apparaissent des moisissures et, d'autre part, que la sécheresse rende les
objets d'une fragilité excessive. Idéalement, le taux d'hygrométrie doit rester
constant pour éviter tout changement dimensionnel ou déformation de maté-
riaux hydrophiles, comme le bois, les textiles et le papier. Le taux générale-
ment recommandé est de j 5 ola, mais il peut être un peu abaissé en hiver en cas
de difficulté.
Les surfaces changent de couleur lorsqu'elles sont exposées aux rayonne-
ments visibles ou ultra-violets. Certaines surfaces s'érodent. Le rayonnement
ultra-violet est particulièrement intense pendant la journée, et il faut en pro-
téger les objets au moyen de filtres spéciaux en matière plastique. L'intensité
de la lumière ne doit jamais dépasser le niveau nécessaire pour qu'on puisse bien
voir les objets. La durée d'une illumination doit être aussi réduite que possible3.
La présence de poussières en suspension dans l'air rend nécessaire le net-
toyage des objets de temps à autre, avec tous les risques que cela comporte.
L'air peut être dépoussiéré au moyen de filtres, mais il faut pour cela l'y amener
par des conduites, comme on le fait pour extraire le dioxyde de soufre, principal
polluant gazeux. I1 existe néanmoins des moyens d'empêcher les poussières et
le dioxyde de soufre de pénétrer dans les vitrines d'exposition 4.
Le chauffage local doit être évité et la température ambiante ne doit pas dépas-
ser le niveau compatible avec le confort des personnes présentes.
I1 est impossible de contrôler efficacement l'environnement sans un système
de conditionnement d'air, mais la plupart des situations vraiment dangereuses
peuvent être évitées par des méthodes moins onéreuses.
I1 y a un an ou deux, Duncan Cameron a exposé un nouveau mode d'agence-
ment des musées 5. Les conditions optimales de conservation ne sont pas réali-
sables dans les salles d'exposition qu'il faut éclairer pour mettre les œuvres en
valeur et chauffer pour le confort des visiteurs. De plus, l'accession des visiteurs
fait entrer de l'air empoussiéré, alors que la conservation exige l'absence de
toute pollution, de toute forme d'énergie (lumière ou chaleur) génératrice
éventuelle de réactions chimiques, et des conditions constantes. I1 est assez
facile de créer à peu près cette situation dans un magasin de réserve, mais
beaucoup moins de le faire dans une salle. Cameron proposait donc de cons-
truire un magasin central maintenu à assez basse température et très peu éclairé.
S'il se trouvait au centre du bâtiment, il serait moins sensible aux variations cli-
matiques et l'on pourrait plus facilement en maintenir l'hygrométrie à j j %,
même par temps très froid. Ceux qui ont pour principe que tout doit être
exposé en permanence aux yeux du public n'admettront évidemment pas ce
système, selon lequel on n'exposerait qu'un nombre limité d'objets tirés du
magasin central et changés de temps à autre. Mais ce système aurait un incon-
vénient : même du point de vue de la conservation, il obligerait à déplacer les
objets plus souvent que dans le cas d'une exposition permanente. Cela dit, n'en
déplaise aux conservateurs, il est de mode, actuellement, de renouveler de
temps en temps les œuvres exposées. Le public a le goût du changement. Le
travail de Cameron aura au moins le mérite d'attirer l'attention sur la pressante
nécessité d'améliorer les conditions de mise en réserve. I1 est d'usage, depuis
longtemps, de n'exposer que pendant de courtes périodes les objets délicats,
3 . Lighting of urt ga1Lerie.r und xzuserms, vol. III,
Londres, Engineering Society (York House, comme les aquarelles et les gravures en couleur. C'est dans des cas de ce genre,
Westminster Bridge Road, London SEI),1970. ainsi que pour la conservation des archives, qu'une amélioration des conditions
(Technical report, 14.)
Garry THOMSON, Consemation und ilrtrtsertm l&$t¡ng, d'emmagasinage aurait le plus d'utilité.
Londres, Museums Association, 87 Charlotte Street,
London \VIP zBX, 1970.(Museums Association Pour ce qui est du contrôle de l'environnement, on peut adopter un moyen
Information Sheet.) terme entre les positions extrêmes de ceux qui voudraient que les œuvres ori-
R. L. FELLER,(( Contrôle des effets d6térioiants de
la lumière sur les objets de m u s k P, Museum, ginales soient conservées dans des magasins de réserve, dans des conditions
vol. XVII, no z, 1gG4.
4.Tim PADFIELD, (( The control of relative humidity optimales, et qu'on n'expose que des copies, et de ceux qui partagent l'avis du
and air pollution in show-cases and picture frames D,
Studies in conservation, vol. II,1gG6. lord Crawford qui aurait déclaré en I y 23 (( qu'il ne croyait pas à la vertu des
5 . D. CAMERON, (( Environmental control :a produits de remplacement, et était partisan d'utiliser les bonnes choses de la
theoretical solution )), Museum ncws, mai 1968, p. 17.
6. Cité par N. S. BROMMELLE, (( The Russell and terre telles que le Tout-Puissant nous les a données, sans trop nous sacrifier
Abney Report on the Action of Light on Water
Colours )), Studies in coxsermfiox, vol. 9 , 1964,p. 140. pour la postérité D 6.
Comment organiser la préservation de notre patrimoine culturel I9

Restauration

Pour désireux qu’on soit de voir arriver cet âge d‘or de rêve où les objets
seraient si bien conservés qu’ils n’auraient pas besoin d‘être réparés, il faut bien
reconnaître que c’est de spécialistes de la restauration que les musées manquent
!e plus actuellement.
Les problèmes de formation sont beaucoup plus simples pour les professions
clairement définies et institutjonnalisées, comme celles de médecin et de juriste.
Or on a bien du mal, actuellement, à en arriver à ce stade pour la conservation
des œuvres du passé, ce qui donne toute son importance au rôle des organisa-
tions de conservateurs, parmi lesquelles l’Institut international pour la conser-
vation des objets d’art et d‘histoire (IIC),. le Conseil international des musées
(Icom) et le Centre international des études pour la conservation et la restaura-
tion des biens culturels, à Rome, sont les plus connues dans les milieux inter-
nationaux, 1’IIC s’intéressant plus directement aux normes de la profession. La
communication entre les conservateurs des différents pays s’est, en fait, déve-
loppée de telle fason qu’on se retrouve souvent dans la situation classique qui
consiste à mettre la charrue devant les bœufs. Aux réunions internationales, les
conservateurs s’obstinent à proposer des programmes de coopération nécessi-
tant, dans chaque pays, des infrastructures qui n’existent pas. Les normes de
formation sont un bon exemple de cette situation. Selon le cours habituel des
choses, une profession s’organise d‘abord dans le cadre du pays, mais seule-
ment beaucoup plus tard et de fason beaucoup plus lâche au niveau interna-
tional. Malgré le désir qu’on peut avoir de passer directement à des normes de
formation internationalement reconnues, il semble qu’on ne puisse éviter de
suivre, pour le moment, les étapes traditionnelles et que, pour commencer, les
grands pays doivent définir chacun ses normes et qualifications profession-
nelles, comme le font actuellement les États-Unis. On pourra ainsi corriger bien
des erreurs avant qu’il soit trop tard.
L’urgence des besoins en matière de restauration est en raison inverse des
moyens financiers dont on dispose. Au sommet même de l’échelle, dans les
grands musées des capitales du monde occidental, il reste encore beaucoup à
faire, mais les besoins sont encore plus grands dans les pays pauvres en res-
sources matérielles, mais riches de leur héritage culturel. Consciente de cette
situation, l’Unesco a constitué des centres régionaux de formation à Jos
(Nigéria), à Mexico, à New Delhi et à Honolulu. Ces centres dispenseront une
formation de base, mais les restaurateurs devront, pour acquérir des qualifica- 6
tions plus poussées, trouver le moyen de se faire admettre dans l’un des rares Soins de beauté.
centres europkens ou nord-américains.
La restauration est parfois affaire de mode, mais il y a de bonnes et de mau-
vaises fasons d‘opérer. On continuera longtemps à discuter du point de savoir
si des manques importants ou d’étendue réduite doivent ou non être reconsti-
tués de fason à rester indécelables. Ces questions peuvent avoir une certaine
importance quand il s’agit de chefs-d’œuvre, mais la situation est bien plus
grave quand l’œuvre originale est altérée dans sa nature par une opération de
restauration. Par exemple, repeindre entièrement un arrière-plan de fason à
isoler le sujet d‘une partie d‘un grand tableau est peut-être une faute de goùt,
mais cette faute n’est pas, en principe, irréparable. En revanche, une tentative
de consolidation d‘une sculpture par imprégnation, même si le travail est en
apparence indécelable, risque d’avoir de graves conséquences si elle entraîne,
plusieurs années plus tard, un effritement de la pierre.
I1 faut utiliser, dans la restauration, des méthodes qui donnent des résultats
vraiment durables, mais il doit toujours rester possible d‘enlever les matériaux
utilisés. La consolidation par des techniques irréversibles d’objets archéolo-
giques de peu de valeur qui, sans cela, se dégraderaient irrémédiablement,
n’infirme en rien ce principe général. Au pire, la restauration n’est rien de plus
20 Garry Thomson

7
Opération de sauvetage archéologique.

qu'un traitement d'embellissement un peu éphémère, administré pour le plaisir


immédiat du propriétaire de l'objet.
Les grands musées de la plupart des pays possèdent maintenant un service
spécialisé. Des travaux de restauration sont nécessaires dans tous les musées,
mais tous n'ont pas besoin d'une équipe de restaurateurs à demeure, et ils
doivent pouvoir faire appel, de temps en temps, à des concours extérieurs. Ce
système peut donner des résultats tout à fait satisfaisants, à condition que le
musée conserve, dans ses archives, un relevé complet des travaux réalisés. Une
autre solution, qui fait intervenir une organisation plus poussée, consiste à
charger un centre régional de pourvoir aux besoins d'un groupe de musées, ce
centre pouvant, dans certains cas, desservir tout un pays.
L'archéologie a fait de grands progrès, mais il n'y a pas si longtemps que
les premières fouilles étaient des opérations de pillage ; du reste, l'archéologie
sous-marine en est encore à ce stade primitif. Peut-on considérer que l'archéo-
logie a atteint l'âge de raison quand on songe que des artefacts sont encore
déterrés en si grand nombre qu'on n'arrive pas à faire le nécessaire pour empê-
cher qu'ils se détériorent? On oublie trop souvent, dans les opérations de
sauvetage archéologique, les impératifs de la conservation.
Pour que les conservateurs puissent tabler, dans leurs travaux futurs, sur les
données qui leur sont indispensables, il faut que chaque travail de restauration
soit consigné sur une fiche. Un dossier complet doit comprendre un relevé des
restaurations antérieures, des précisions sur la fagon dont l'objet a été créé, sur
les détériorations qu'il a subies et sur le traitement de restauration auquel on le
soumet présentement avec des listes des matériaux utilisés et des photographies
de l'opération aux divers stades de son déroulement. Cette question des dos-
siers nous amène à parler des travaux d'analyse et de la fagon dont ils peuvent
contribuer à la conservation.

Analyse
I1 n'est pas sans intérêt, sur le plan de l'histoire, d'examiner pourquoi les musées
ont commencé à s'assurer les services d'hommes de science. Dans certaines
opérations de restauration, telles que l'élimination de la corrosion sur les
métaux, une connaissance de la chimie était indispensable. I1 a fallu aussi adap-
ter les nouveaux matériaux et les nouvelles techniques, comme les résines
synthétiques et les rayons X, de fason à en tirer parti en muséologie. Les
hommes de science recourentà l'analyse dans tous leurs travaux. Nos conceptions
Comment organiser la préservation de notre Datrimoine culturel 21

sont à tel point pénétrées de l'esprit de la révolution scientifique que le


simple fait de ne pas savoir quelque chose est devenu une raison suffisante pour
l'apprendre. I1 est désormais possible de se ménager les services d'opérateurs
et de machines qui produiront, sans grand effort, une somme considérable
d'informations analytiques. Cela dit, un bon analyste est celui qui fournit des
informations exactes et utiles. Heureux le musée qui en possède un.
L'analyse scientifique est utile à un triple égard dans un musée. En premier
lieu, le restaurateur est mal équipé pour s'acquitter de sa tâche s'il ne sait pas
de quoi est fait l'objet sur lequel il travaille. Les connaissances traditionnelles
et les expériences suffisent rarement. En second lieu, l'analyse peut fournir des
données importantes aux muséologues, ce qui a été mis en évidence par l'his-
toire de la métallurgie. Toutefois, l'histoire des techniques de peinture est un
domaine d'étude fascinant et relativement nouveau pour l'historien-analyste.
Enfin, sans une analyse chimique assez poussée, l'homme de science désireux
de bien comprendre les processus de détérioration n'ira pas loin, car les chan-
gements qui ont mis des siècles à se produire ne peuvent être reproduits, dans
de bonnes conditions, par les méthodes de simulation accélérée en laboratoire.
Comme c'est le cas pour la restauration, les musées ne peuvent pas tous avoir
leur analyste, et la présence d'un de ces spécialistes dans leur personnel est bien
plus rare que celle d'un restaurateur. I1 faut donc centraliser ces services dans
une certaine mesure si l'on veut qu'au moins quelques musées du pays puissent
en bénéficier. Cette question mérite d'être examinée, car les dispositions qu'on
a fini par adopter ont été le plus souvent prises au petit bonheur.
Bien que les travaux élémentaires d'analyse puissent se faire à très bon
compte, un travail de premier ordre nécessite beaucoup de matériel coûteux,
qui doit être exploité de fason suivie pour être rentable. Un certain système
commence à se dessiner. Les laboratoires qui se sont fait une bonne réputation
ont pu mieux s'outiller et leurs services sont très souvent demandés. Cette
demande crée de nouveaux besoins d'équipement, car le laboratoire peut alors
travailler plus vite et fournir des informations qu'il ne donnait pas jusqu'alors.
Mais la situation est loin d'être satisfaisante, car les travaux du muste qui pos-
sède le laboratoire ont toujours la priorité, les autres étant retardés ou ne rece-
vant pas toute l'attention qu'ils méritent. Les musées mal desservis veulent
alors avoir leur laboratoire à eux, et il en résulte des doubles emplois.
Comme pour tant d'aspects de la conservation, la situation peut se comparer
à ce qui se passe en médecine. J'imagine que les médecins se plaignent beau-
coup du caractère impersonnel de leurs relations avec les services d'analyse des

8
Faire k h e c au temps.
22 Garry Thomson

hôpitaux et du nombre d‘imprimés qu’on les astreint à remplir ; de leur côté,


les analystes critiquent la fason dont les échantillons ont été prélevés et l’insuf-
fisance des précisions utiles qui leur sont données. I1 n’empêche que ces services
prennent de plus en plus d‘importance.
Idéalement, l’analyste travaillant pour un musée a, pour ainsi dire, l’objet
entre les mains et exécute toute l’opération. I1 a également la possibilité de pré-
lever d‘autres échantillons, en s’inspirant de ce qu’il a appris. La réalisation
intégrale de l‘opération devrait encore étre possible dans les grands musées qui
possèdent un matériel d‘analyse très perfectionné. Mais elle ne l’est pas dans les
autres. L‘analyste d’un petit musée ou d‘un centre régional de conservation
devra envoyer des échantillons au laboratoire central d’analyse, si bien que la
plus grande partie de l’opération lui échappera et que, de son côté, le laboratoire
central n’aura pas directement accès à l’objet.
Si le musée ne dispose pas, pour la prise des échantillons, d’une personne
possédant ne serait-ce que des notions élémentaires d‘analyse, la situation
devient presque impossible. Elle est comparable à celle d‘une mère qui pique-
rait son enfant avec une épingle pour envoyer un échantillon de son sang à
l’hôpital. On voit combien il importe que des notions élémentaires d‘analyse
soient prévues dans tous les cours de restauration.
I1 paraît possible, dans un monde imparfait, d’organiser comme suit un bon
9 service central d’analyse. I1 y aurait deux types principaux de services : le ser-
Comment le public imagine le spkcialiste vice complet et le service accéléré. Dans le service complet, sans doute limité
des musées.
à la propre collection du musée, un seul analyste ou une seule équipe assure
l’intégralité de l’opération, a accès à l’objet et entretient des contacts avec les
autres personnes intéressées. Quant au service accéléré, l’une de ses qualités
essentielles est (comme son nom l‘indique) la rapidité. Si le laboratoire attend
trop longtemps pour traiter les échantillons, il perd sa bonne réputation. Tou-
tefois, puisque : a) il s’agit d’un service limité, et b) le laboratoire dispose d’un
équipement moderne, il n’y a pas de raisons de retard. La vitesse suppose une
limitation et une normalisation de l’information. On déteste en général remplir
des imprimés, mais c’est indispensable dans ce cas, non seulement pour indi-
quer les résultats des analyses, mais surtout pour donner au laboratoire central
les informations de base qui lui sont indispensables. Ce système n’est pas le
seul envisageable ; on pourra adopter des dispositions différentes.
I1 n’y a pas lieu ici d‘examiner si les services doivent êtue fournis à titre oné-
reux ou gratuit. Cela dépend entièrement des hommes qui gouvernent le pays
et de leurs idées politiques.

Recherche
Les hommes de science sont des tard-venus dans les musées, et ils y sont placés
sous l’autorité de non-scientifiques. Ces deux faits ne sont pas sans consé-
quence. Tout d‘abord, la rentabilité de l’emploi d‘un personnel scientifique est
périodiquement remise en question ; ensuite, ceux qui dirigent ce personnel
connaissent mal la nature des services qu’il peut rendre et commettent presque
inévitablement l’erreur soit de l’orienter vers des tâches inappropriées, soit de
lui laisser trop d‘autonomie. De leur côté, les scientifiques ont le sentiment
qu’ils doivent perpétuellement justifier leur présence en produisant des torrents
de données analytiques, en faisant la chasse aux faux ou en s’occupant avant
tout de problèmes à court terme du même genre. I1 va de soi que la quête
de résultats immédiats pour se mettre en valeur ou pour conserver la sécurité
de son emploi est courante dans tous les milieux. Mais ce dont la muséologie
a le plus besoin, c’est d‘hommes qui sachent élaborer des plans à long terme et
jeter des semences dont leurs successeurs seront heureux de recueillir les fruits.
I1 faudra attendre une génération pour qu’apparaissent véritablement aussi
bien l’effet du lent processus de détérioration des objets originaux de musée que
le résultat de certains traitements appliqués pour les conserver. Cela dit, la
Comment organiser la préservation de notre patrimoine culturel 23

restauration est souvent une nécessité urgente et il n'est pas possible dans
certains cas, de remettre l'opération à cinq ans - ni, à plus forte raison, à un
quart de siècle plus tard. Bien des conservateurs déploient des trésors d'énergie
et d'habileté pour s'attaquer à de tels problèmes. Mais est-on assuré que la
génération qui leur succédera trouvera dans leurs dossiers les renseignements
dont elle aura besoin ?
Prenons un exemple d'actualité : la dégradation des sculptures exposées en
plein air à la pollution atmosphérique a suscité de nombreuses rivalités entre
partisans de tel ou tel traitement de la pierre. On injecte actuellement les mix-
tures les plus étranges dans des ouvrages de pierre de grande valeur ; une ou
deux se révéleront peut-être un élixir de longue vie. Les autres risquent de
causer des dommages insoupçonnés au départ. On ne peut qu'espérer que les
conservateurs de demain pourront mettre la main sur des données les infor-
mant de l'état de la pierre au moment de l'application du traitement, de la
composition des substances de consolidation, de la manière dont elles ont été
appliquées et des facteurs externes auxquels la pierre a été soumise depuis son
traitement.
Un autre exemple, celui des couleurs des peintures et de la manière dont elles

IO
D'abord nous crkons, puis nous dktruisons.

s'altèrent, montre de fason encore plus évidente combien des dossiers auraient
pu nous &re utiles aujourd'hui si l'on avait pensé à les constituer il y a plusieurs
décennies.
La difficulté vient de ce que les résultats ne s'obtiennent que lentement. La
formation d'un scientifique tend à le pénétrer de l'idée que, lorsqu'il ne com-
prend pas un phénomène, il doit en établir un modèle dans un laboratoire et
l'expérimenter.
I1 serait vain de nier que les expériences en laboratoire ont compté pour beau-
coup dans les progrès de la science et continueront à remplir un rôle capital
dans la science de la conservation. Toutefois, comme les réactions en labora-
toire interviennent infiniment plus vite que le changement opéré au cours des
siècles, on devra, dans l'étude des détériorations, s'attacher tout particulière-
ment à observer et à mesurer minutieusement les phénomènes réels, soit en
analysant des échantillons anciens, soit en observant et en consignant les chan-
gements survenus sur place.
Les méthodes d'analyse ne manquent pas, mais, pour consigner les change-
ments subis par des objets réels, qu'il s'agisse de monuments, de tableaux ou
d'artefacts de métal, il est indispensable, pour chaque catégorie considérée, de
passer successivement par les sept stades suivants :
I. Identifier les facteurs qui se modifient.
2 . Choisir des paramètres permettant de mesurer l'ampleur et la cadence des
modifications. Par exemple, si le facteur qui change est la couleur, on peut
choisir, comme ensemble de paramètres, les facteurs de réflexion pour un
certain nombre de longueurs d'ondes.
3. Construire un appareil permettant de mesurer ces paramètres avec le plus
haut degré possible d'exactitude et d'une manière normalisée.
24 Garry Thomson

4. Consigner la valeur des paramètres à intervalles réguliers - peut-être tous


les cinq ou dix ans, selon la rapidité des modifications.
j . Noter parallèlement, de fason suivie, tous les facteurs externes qui peuvent
influer sur l'ampleur et la cadence des modifications.
6. Examiner les données ainsi réunies, pour établir des relations quantitatives
de cause à effet.
7. Grâce aux connaissances ainsi acquises, régler les conditions d'environne-
ment de manière à minimiser les changements.
Nous chercherons donc à dégager une relation entre deux systèmes, celui de
l'environnement et celui de l'objet qui se détériore ; à découvrir les facteurs
de l'environnement qui causent les modifications de l'objet (certains facteurs
peuvent être présents dans l'objet lui-même, par exemple les chlorures dans le
bronze) ; et à établir entre ces facteurs une relation quantitative. Chaque caté-
gorie d'objets demandera une approche différente, mais la difficulté principale
sera, le plus souvent, de trouver les bons paramètres et les méthodes permet-
tant de les mesurer aussi exactement que possible.
Ce qui rend ingrat ce genre de travail, c'est que l'homme de science ne peut
asseoir sa réputation sur l'œuvre de son successeur et qu'il hésite donc à s'enga-
ger dans ce genre de recherche.

Situation en cas de guerre


Comme les conservateurs ont déjà fort affaire pour s'occuper du flot d'objets
qui ont besoin d'être réparés, il est normal que ces tâches immédiates, plutôt
que les incertitudes de l'avenir, soient au premier plan de leurs préoccupations.
Nous avons parlé du processus de dégradation lente et de la manière de le
mesurer. Examinons aussi le cas où le dommage est total et survient en quelques
minutes, c'est-à-dire celui qui résulte de l'explosion d'un engin nucléaire. I1
faut s'arrêter à cet aspect de la question, car il est permis de penser qu'en cas
de guerre nucléaire une partie de la population survivra, alors que tous les
trésors artistiques d'une nation seront peut-être anéantis.
Si l'on jette un coup d'œil sur le plan des principales villes du monde, on
constate - pour ne citer que les principaux sites ou musées qui viennent tout
d'abord à l'esprit - que l'Acropole, 1'Alte Pinakothek, le British Museum, le
Musée du Caire, l'Ermitage, le Louvre, le Metropolitan Museum, les National
Galleries de Londres et de Washington, le Musée de l'Ancien Palais impérial de
Pékin, le Prado, le Rijksmuseum et la plus grande partie de Venise, se trouve-
raient soit dans le périmètre du cratère lui-même, soit à l'intérieur de la boule de
feu créés par une bombe de 20 mégatonnes explosant au-dessus du centre des
villes attaquées.
Des abris souterrains protégeraient mieux qu'on ne l'imagine communément.
Ce n'est pas ici le lieu d'examiner ce point en détail 7, et nous nous bornerons
à faire observer que la protection des œuvres d'art contre les effets de la guerre
est l'un des devoirs des conservateurs de musée.
La plupart des travaux que suppose la conservation, que ce soit de sites
urbains entiers, d'ensembles de temples, d'une miniature ou d'un bijou,
consistent à ôter les parties ajoutées, à ressouder les morceaux et à remplacer
les parties manquantes. Comme ce sujet a déjà été abondamment étudié, je me
suis efforcé ici de mettre l'accent sur certains aspects fondamentaux, mais rela-
tivement moins évidents, de la conservation, ainsi que sur les bases qu'il serait
possible d'établir dès aujourd'hui pour l'action de demain. Je n'entends pas
.; S. GLASSTONE, The ejects of micifur weapons, dire que l'orientation générale est mauvaise, mais simplement qu'il faudrait axer
edition revue, United States Atomic Energy
Commission, 1964. une petite partie des efforts dans d'autres directions.
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de protection des biens cuitnrels PN cas de conyit armh, Paris, Certes, nombreux sont les conservateurs en chef qui élaborent des plans pour
Unesco, 1954.(Musees et monuments, VITI.) diminuer l'écart entre l'offre et la demande de travaux de restauration en créant
G. THOMSON, " A a r attack and the re.rpoirsahihYe.r
ofthe cormrc'ator, paper delivered at the ICOM New des centres de formation ou des centres régionaux de conservation. L i encore,
York meeting (1g67), available from the Rome Centre,
256 via Cavour, Rome, 00184. il est inutile que je m'étende.
Comment organiser la préservation de notre patrimoine culturel 25

Trois problèmes demeurent : les moyens d'analyse, la recherche sur les phé-
nomènes de détérioration et la protection des biens en temps de guerre. Sur
ce dernier point, pourtant d'une importance qui défie l'imagination, je me bor-
nerai à souhaiter le succès au conservateur qui serait assez courageux pour se
lancer à l'assaut des redoutables bastions politiques de notre époque.
I1 y aura toujours un rapport étroit entre l'analyse et l'étude des phénomènes
de détérioration, de sorte que tout organisme qui se consacrera à l'une sera
nécessairement utile à l'autre. En fait, tout service central d'analyse devrait
comporter une section d'étude des phénomènes de détérioration.
Le secteur où des progrès sont le plus nécessaires est celui de l'étude des
phénomènes de détérioration. I1 faudrait jeter, dès maintenant, des bases
solides pour l'acquisition future des connaissances' qui permettront de préser-
ver le mieux notre patrimoine culturel.

Bibliographie [Trahit de rol'atgZais]

(Par ordre chronologique inversé dans chaque section. Aucun ouvrage antérieur à
1960.)

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26

Le nzzlsée: instrimvent pour ZLZ prise de conscience des


pt-oblèmes de I'environn ement

L a plan@catiotz da .futzir prészqpose zíiz acqzh d'exphrience dci passé. A cet égard,
l'optìque ri long terme propre a m mztsées pezt jòurnir aztx spécialistes de la plani-
jîcation sociale les if$ormatìons nécessaires sur les effets posit@ e t n&at$s du dévelop-
pement actuel e t lezir offrir m e doczii~zetztatione t m e anabse cotastantes toitchant l'évo-
lidtion de la strz/ctt/re sociale. Le recows siyndtané aztx exposìtions e t azitres nioyens
d'i?$orinatiova dont disposent les iinwées perit permettre au pzìblic de mieux comprendre
lesproblèmes sociaux e t peztt par conséquent améliorer lespossibilités de solzttionsposìtives.

Rôle du musée d'art et du musée


de sciences humaines et sociales

Georges Henri Rivière

Musée et environnement naturel et humain


L'environnement, c'est 1 ' ensemble
~ des conditions énergétiques, physiques et
biologiques qui règnent au voisinage immédiat des organismes vivants B, c'est
aussi (( le milieu concret construit par l'homme )) I. Science de l'environnement,
l'écologie témoigne d'une même dualité. ecologie naturelle et écologie
humaine, toutefois, tendent à se compénétrer, voire à se confondre. Autour
notamment, de nos jours, de graves et urgents problèmes concernant le sort de
toute l'humanité, tels que l'épuisement des ressources naturelles et minérales,
la pollution, la croissance industrielle ou démographique continue 2.
Une telle dualité, une telle convergence des disciplines de l'écologie ont-elles
leurs correspondants dans le système des musées? Peut-on parler d'un envi-
ronnement naturel, domaine des musées de sciences exactes et naturelles ?
Peut-on parler d'un environnement humain, domaine des musées de sciences
humaines et sociales et des musées de technologie avancée? La situation est
complexe, ici encore, comme il ressott d'un premier tour d'horizon.
Le musée de sciences exactes, le plus souvent, fait cause commune avec le
musée de technique industrielle, auquel il fournit un substrat mathématique,
physique et chimique. Ce dernier assume une certaine dose de techniques
archaïques, tirée de l'histoire et de l'ethnologie. La dose d'archaïsme devient-
elle massive, le musée de technique industrielle se convertit en musée d'histoire
technique, branche du musée d'histoire culturelle 3. Environnement naturel et
environnement humain, de part et d'autre, sont incorporés.
I. Pierre GEORGE, Dictiutinuire de /u géographie,
p. 133. Paris, Presses universitaires de France. Voir Le musée de sciences naturelles, s'il s'intéresse à l'homme physique en tant
également les mots : Ecology, Animal Ecology,
Human Ecology, Population, dans Etigdupuediu que sommet de l'arbre de vie, s'intéresse à l'homme culturel en tant que pré-
Britunnicu, New York, 19Gq. dateur de l'environnement naturel.
2. Edward J. I<ORMONDY, Co,rccpt~ of ecu/osJ,
Englewood Cliffs Prentice Hall, I&. Les musées de sciences humaines et sociales ne s'intéressent pas qu'à l'envi-
3. Telle est la position du Deutsches Museum,
Munich. ronnement humain, ils s'intéressent à l'environnement naturel, tel que l'homme
Rôle du musée d’art et du musée de science humaines et sociales 27

II

II
La peinture, en tant qu’interprète de l’environnement. MUSÉE DES ARTS ET TRADITIONS POPULAIRES,
Paris. Des artisans affiliés à une organisation
Les peititwes des petits maîtres, trop soimnt encore, sont écartées de la polìtìqite dite du Tour de France conduisent en
cérémonie un de leurs camarades, à son
d’acquisitìotz, o u relégikes dam les réserves du ?nusée d’art. Ressortissant à des wusées départ pour une nouvelle &tapedu Tour.
d’as&es dìsciplines, dam la ” r e , surtout, OB elles traduìsent des emiromzeinents L’un d‘eux et le compagnon partant
boivent ensemble, selon le rituel
cotztei?zporains, elles peu~ent,jouerufz rôle notg moins important. compagnonnique. On voit pleurer la petite
amie du compagnon partant. Monuments,
scènes du port et bateaux sont figurés
avec précision. Tout un environnement
humain disparu, traduit par un artiste
populaire. Daté 18.26, signé Leclair.
I2
MUSBEDU VIN DE BOURGOGNE, Beaune.
Jusque vers la fin du X I X ~sikcle, dans le
vignoble de Beaune, en Bourgogne, la
vigne était liée à des supports verticaux, les
échalas. Au début de la mauvaise saison,
le vigneron arrachait ces supports et les
disposait en tas, comme on le voit sur cette
peinture, témoin d‘un environnement de
nature humanisée, disparue depuis près
d’un siècle. Datée 1883, signée
Félix Naigeon.

I2
28 Rôle du musée d'art et du musée de science humaines et sociales

le vit, agit sur lui et le pense. Cela sous leurs formes respectives de musées
(( couverts )) et de parcs historiques 4.

Voué à l'art historique, le musée d'art contribue à la sauvegarde de l'envi-


ronnement humain. Voué à l'art historique et à l'art contemporain, il rend
compte de l'environnement naturel et humain, tel que le persoit et l'imagine
l'artiste créateur (fig. II, 12) 5.
Nouvelles formes de musées, le musée de voisinage et l'écomusée ont un
caractère interdisciplinaire et mettent l'accent sur l'écologie 6 .

Expression de l'environnement humain, à l'aide d'objets et de


modèles, dans les musées de sciences humaines
Deux moyens traditionnels s'offrent aux musées de sciences humaines, pour
l'expression de l'environnement humain : les (( choses réelles )) isolées ou
intégrées ; les (( modèles )) concrets ou abstraits.
Les choses réelles unitaires ou sérielles, ce sont les objets collectés un à un
par le musée, sur programme dans la meilleure hypothèse. Munis d'informa-
tions pertinentes, décodés par le visiteur, ils témoignent à leur manière de
l'environnement humain. Un harpon dira le sous-environnement technique, et
une statuette le sous-environnement religieux ou artistique de l'homme néo-
lithique. Un masque du X X ~siècle dira le sous-environnement social, religieux
ou artistique d'un groupe ethnique africain. Figurant une scène de luttes, une
peinture franqaise du X I X ~siècle dira le sous-environnement social et ludique
d'un groupe ethnique breton. Les choses réelles intégrées, ce sont les objets
ayant participé d'un même milieu, acquises dans leur intégrité ou regroupées
par le musée, qu'on peut dire (( unités écologiques P. Interprétés de même,
décodés par le visiteur, ils témoignent de l'environnement humain, avec plus
d'intensité que ne le font les choses réelles isolées. Tel le contenu complet
d'un intérieur domestique (period room), d'un navire, d'une tombe, transféré au
musée, avec ou sans son sous-environnement d'architecture domestique, navale
ou funéraire.
De telles unités peuvent être indisponibles, ou l'espace peut faire défaut, ou
les conditions techniques faire obstacle, pour les présenter au musée. D'où
l'emploi de modèles concrets de la taille des originaux, ou de modèles agrandis
ou réduits. Ainsi, à l'échelle réelle, le moulage d'une statuette préhistorique
ou le fac-similé d'un manuscrit. Ou, à échelle agrandie, le modèle d'une mon-
naie gauloise. Ou, à échelle réduite, la maquette d'un château, d'un site archéo-
logique, historique ou rural.
Des aspects de l'environnement humain sont à évoquer, que leur caractère
abstrait empêche de traduire à l'aide de choses réelles. Un modèle ethnolo-
gique, par exemple, pourra montrer l'articulation des travaux et des fêtes
calendaires et saisonnières dans une communauté villageoise.

Les moyens audio-visuels : un champ nouveau, pour l'expression


de l'environnement
Les moyens audio-visuels, désormais, pénètrent le musée d'art et les musées de
sciences humaines. Le rôle en est précieux, pour inscrire l'oeuvre d'art dans son
environnement naturel et humain. 4. Voix dans le present article le hors-texte
concernant le Mustie de Biskupin, en Pologne.
Appliqués aux laboratoires, aux auditoriums, aux organes de consultation des .
j THEENVIRONMENT.4L COlrfAIITTKK, AhLERICAN
ASSOCIATION OF MUSEUMS, dIi/sertms and the entvrotzmetit:
musées, ces moyens ont déjà leurs modèles, tels le film d'art et le film scienti- a hatidbookfor edicatioti, New York, hrkville Press,
1971.(voir plus prkcistiment l'article de Charles
fique. I1 ne s'agit que de multiplier et de perfectionner ces modèles, qu'ils PARKHUST, directeur adjoint de la National Gallery
concernent ou non le patrimoine du musée. de \Vashiugton, p. 161-164.).
6. Duncan F. CahfmoN, (( A view point: The
Appliqués à la présentation dans le musée ou hors du musée, ils prennent les museum as a communication system and implications
for museum education n, Curutor (New York), vol. II,
formes, qui ne sont pas exclusivement propres au musée, loin de là, d'ambiances no I, 1968,p. 33-40.
Georges Henri Rivière 29

sonorisées, de programmes de magnétophones, de visionneuses et de magné-


toscopes à écrans incorporés ou séparés, de murs d'images, de kif^ 7, de vidéo-
cassettes. Ils y prennent aussi la forme de systèmes (( son et lumière)) appliqués
à des unités écologiques.
Une galerie de musée, toutefois, n'est ni un laboratoire, ni un organe de
documentation tel que bibliothèque, iconothèque, ou photothèque, ni un
auditorium. Elle est un lieu où passent les visiteurs suivis d'autres visiteurs,
venus pour regarder plus encore que pour consulter, et dont la participation
est sollicitée. D'où la nécessité de limiter à une durée raisonnable les pro-
grammes audio-visuels destinés à des galeries de musée. D'où la nécessité de
sélectionner informations verbales et sonores, de manière à permettre au visi-
teur de percevoir et de (( décoder le message D, dans le temps imparti.
L'émission visuelle et sonore des appareils risque toutefois de nuire à l'envi-
ronnement d'objets et de modèles, composantes majeures de l'exposition. D'où
la nécessité de réaliser l'isolement acoustique ou optique des champs à couvrir
par les émissions.
Le déroulement d'un programme audio-visuel ne saurait être continu dans
une galerie de musée. Sinon, il en résulterait une usure trop rapide du matériel
à insérer dans les appareils. Inconvénient non moins sérieux, le produit audio-
visuel muséal deviendrait assimilable à un produit audio-visuel pour la propa-
gande et la publicité. Le mieux est que le déclenchementen soit provoqué par le
visiteur ou, dans les cas extrêmes, par un gardien, à sa demande : l'adhésion du
visiteur au moyen, c'est déjà la participation.
Les appareils audio-visuels et leur charge culturelle sont fragiles. D'où la
nécessité d'en contrôler le fonctionnement, par les soins d'un technicien habile
et consciencieux *. D'où la nécessité, en outre, de prévoir le renouvellement du
matériel inséré en voie d'usure, à partir de matrices soigneusement préservées.
Un style nouveau de documents audio-visuels est à rechercher, pour l'inter-
prétation des faits culturels et naturels dans une galerie de musée d'art et de
sciences humaines, dépouillé de tout caractère publicitaire et contraignant,
inscrit dans les thèmes de la présentation.

Systèmes de communication dont dispose le musée pour la


connaissance de l'environnement
Le musée, de plus en plus, pratique un système complexe, propre à la fois à
satisfaire ses objectifs de recherche et d'enseignement et ses objectifs d'éduca-
tion et de culture. I1 consiste à répartir entre quatre organes coordonnés les
biens culturels dont il dispose, à savoir :
Une galerie ou un ensemble de galeries, qu'on peut dire <( culturelles n, destinées
au public global, comportant les pièces d'intérêt majeur et un premier choix
de pièces représentatives ;
Une galerie ou un ensemble de galeries, qu'on peut dire <( scientifiques )) 9,
comportant un deuxième choix de pièces représentatives, destinées à un
public d'experts, d'apprentis experts et, en général, à tout visiteur désireux
d'approfondir ses connaissances ;
Un ou plusieurs organes de communication des objets facilement transportables,
et des documents écrits, visuels, sonores et audio-visuels (phonothèque,
photothèque, etc.), à des fins culturelles et scientifiques ;
Un ou plusieurs magasins, dans lesquels seraient conservés le reste des objets
7. Mallettes-expositionscirculant aupres
classés et référencés de manière à pouvoir être consultés par des utilisateurs
d'organisations d'enseignement et de culture. qualifiés.
8. Moyen à la port& d'un musée aux ressources
importantes. Dans le cas contraire, le musee se L'expression de l'environnement demande de l'espace pour se faire selon la
contenterait d'un technicien extérieur, requis en cas
de besoin.
dose, Ia qualité et les techniques désirables. La galerie culturelle se pr2te mieux
y. Le système des deux galeries est en c o u s de aux moyens audio-visuels à écoute/vision collective. De même que le labora-
réalisation, pour n'en citer que trois exemples, aux
dipartements de peinture du Musée du Louvre et toire et les salles de conservation, la galerie scientifique se prête mieux à
du Rijksmuseum d'Amsterdam, et au Musée des arts
et traditions populaires de Paris. l'écoutelvision individuelle.
30 Georges Henri Rivitre

Biskupin : exploration et mise en valeur écologique d‘un site


archéologique polonais.
Décozivert en 1933 par titi maître d’éCole, ce site a.f¿zit l’objt.t de i~ombremes
caítqagnes de foziilles, avatzt e t après la gtierre. Les ré.rultats, qzii ont ité iinportatzts,
ontj e t é de noa~~elles
lwzières, notamment szir les orbgìkes de la cìvilìsation protoslave az!
débnt de l’iìge du fer, e t szdr celles de Z’Étatpolomìs diirant le haut ” p z &e.
Unparc archéologique tzational a été atnémgé, comportant la reconstitzrfioia 8unt
partie de l’apremière cité de l’&ge dzdjèr, e t zdn misée dzi sìte. Les vestbges or&i/iaux
restent inzmergés, pow raison de conservation. Il est possible de les mettre d sec diirant
uiz tentps litnité, à des j a s d’éttde.

Un système aussi développé, certes, ne saurait convenir qu’a un musée dis-


posant de ressources importantes. Réduit à une salle d’exposition, à une salle
de consultation de documents et à un magasin d‘objets accessible aux personnes
qualifiées, aidé au besoin du concours d’organisations locales d‘enseignement,
un musée modeste jouerait un rôle estimable, dans l’œuvre d‘initiation à l’envi-
ronnement de son ressort.

Musée d‘art
L’environnement, on l’a déjà marqué, est sujet à programme pour le musée
d’art. I1 peut s’ouvrir à l‘architecture et à l’urbanisme, arts de l’espace ; il peut
rejoindre le musée d‘histoire et le musée de sciences dans leur œuvre d‘initiation
IO. Charles op. rit., p. 163.
PARKHUSY, à l’environnement 10.
Rôle du musée d'art et du musée de science humaines et sociales 31

13
MuzEuhf W BISKUPINIE, Biskupin.
Palissade, rempart et portail reconstruits
de la premiire cité ( 5 50-400 avant notre
ère).
14
MUZEUM W BISKUPINIE, Biskupin. Rue
et maison reconstituées de la première cité.
IJ
MUZEUM W BISKUPINIE, Biskupin. Musée
du site : intérieur reconstitué d'une maison
de la premikre cité.
16
MUZEUM W BISKUPINIE, Biskupin. Musée
du site : présentation d'objets de fouille et
de documents.

En écho au musée d'histoire, il peut ajouter à la présentation des œuvres une


expression des milieux dont elles sont issues, ainsi que des concepts des artistes
qui les ont créées ;il peut aider le visiteur à se sentir concerné, en le rapprochant
d'une manière ou de l'autre de l'artiste dont le sépare une grande distance
d'espace ou de temps ll.
En écho au musée de sciences, il peut présenter une interprétation des maté-
riaux et des techniques de réalisation d'un choix d'œuvres particulièrement
représentatives à cet égard 12.
I I . Duncan F. CAMBRor?, (( The language of museum
interpretation n, dans ilfnde, soci&d, connaisance,
Musée d'histoire no special de Cehiers d'histoire mondiale I Cdtures
(Paris), no XIV, p. 48-57.
Le musée d'archéologie et le musée d'histoire ont longtemps évoluk séparément. 12. Exposition Brnegbel et son nionde, Bruxelles, 1969.
Musires royaux d'art et d'histoire (un catalogue a &ti
Le premier musée d'archéologie, le Musée du Capitole, apparaît à Rome, a
32 Georges Henri Rivière

l'aube de la Renaissance italienne, composé d'cr antiques )> découverts en Italie.


A partir du X I X ~siècle, le musée d'archéologie, progressivement, recule son
domaine dans le temps, et l'étend dans l'espace. Défini culturellement, son
matériel est longtemps artistique, il tend désormais à couvrir tout le champ
culturel. Défini techniquement, ce matériel provient essentiellement de fouilles.
Ces fouilles sont longtemps sommaires, elles obéissent de nos jours à un prin-
cipe d'exhaustivité, selon lequel rien d'important n'est négligé dans le gisement
exploré, niveau par niveau, que les vestiges soient humains, animaux, végétaux
ou minéraux. Le produit de ces fouilles, désormais, est soumis à des analyses
physico-chimiques, permettant d'en préciser la datation. Une conquête de plus
en plus étendue, de plus en plus rigoureuse sur l'environnement humain et
naturel des sociétés à l'origine de ce matériel : telle apparaît en somme, définie à
grands traits à travers le temps, l'évolution du musée d'archéologie (fig. 13-16).
Cependant, une telle évolution s'est, en général, manifestée jusqu'ici avec
une intensité inégale selon les périodes concernées. Plus ancienne est la culture
observke, et plus l'environnement humain et naturel en a été considéré par
l'archéologue, et inversement. I1 en résulte, par exemple, que la présentation
d'une période néolithique peut illustrer davantage les manières de chasser, de
pêcher, de cultiver, de transformer la matière, que ne le font les périodes plus
récentes. Avec ces dernières périodes, le climat devient artistique, les objets
sont répartis et interprétés davantage par catégories techniques de fabrication
(telles la peinture, la sculpture, la céramique, la verrerie, etc.), qu'en fonction
de leur signification sociale ou idéologique. Le satyre peut être figuré en train
de danser sur la paroi de l'œnochoé, ce n'est pas la danse qui compte, ou quelque
aùtre comportement culturel ou social, mais seulement, le plus souvent encore,
les caractéristiques du matériau et le coup de pinceau.
Quant au musée d'histoire, les échantillons les plus anciens en voient le jour
dans l'Europe du X V I I ~siècle, sous la forme de galeries de portraits. L'environ-
nement, c'est alors la vêture, l'attitude, les accompagnateurs, les accessoires de
la personne figurée.
Son premier grand échantillon d'histoire nationale apparaît sous la France de
la Révolution, et son second sous la France de Louis-Philippe. Tous deux,
curieusement, sacrifient quelque peu à l'écologie : le premier, avec ses vestiges
de monuments ruinés ou désaffectés, bricolés dans une ambiance de pré-
romantisme ; le second, tout événementiel qu'en soit le principe, avec ses
grandes peintures figurant des batailles, ses médailles commémoratives. Entre-
temps, la plupart des musées d'histoire s'engagent dans une voie de nationa-
lisme ou de régionalisme, selon les domaines géographiques dont ils traitent.
A programme national ou régional, les musées d'histoire, dans leurs formes
traditionnelles, répugnent le plus souvent à mettre en lumière les aspects glo-
baux de la société, ils présentent leurs matériels par formes techniques et
artistiques, au détriment de la signification économique, sociale, culturelle, idéo-
logique de ces matériels. Et s'ils expriment cette signification, c'est ordinaire-
ment à l'aide de témoins artistiques qu'ils le font. Enfin, dans la mesure où ils
mettent l'accent sur la société, ils méconnaissent le rôle de la société dominée,
ils réduisent l'expression de l'environnement social. Ce qui compte trop sou-
vent, c'est le grand événement, ce sont les personnalités. Le musée du palais
royal raconte les batailles, les bâtiments, les amours du souverain, il tait le
paysan, cet homme dont le labeur a tant contribué à faire construire le palais,
cet homme de haute culture, lui aussi.
Dans les pays développés, les musées régionaux à programmes pluridiscipli-
naires répartissent le plus souvent ces programmes par départements, tels ceux
d'histoire naturelle, d'archéologie, d'histoire, d'art et de folklore, il n'y a guère
de corrélation entre eux. On y voit bien le portrait du seigneur, on n'y voit pas
13. Le roi Henri IV, roi de France, avait souhaite la corvée. On y voit bien la marmite, on n'y voit pas la (( poule au pot )) 13, ni
que chaque paysan de son royaume puisse manger la
poule au pot z i son repas du dimanche. les gallinacés de la région 14. On y voit bien le bâton du pasteur bambara, on
14.Dans ce genre de musées, les animaux
domestiques sont le plus souvent oubliés. n'y voit rien du mode d'élevage et des rituels, dans cette partie de l'Afrique.
Rôle du musée d’art et du musée de science humaines et sociales 33

17
KONINKLIJK INSTITUUT VOOR DE TROPEN,
Amsterdam. Gamelang javanais, dont une
animatrice démontre le fonctionnement
devant un public d’enfants.
IR
KONINKLIJK INSTITUUTVOOR DE TROPEN,
Amsterdam. Public d’enfants invités à la
pratique du gamelang par une animatrice
du musee.

Le Musée des tropiques, à Amsterdam : un instrument pour la


connaissance de l’homme des tropiques, considéré dans son
environnement économique, social et culturel, sous ses aspects de
patrimoine et de développement.
Le ~lliiséedes tropiques est m e branche de J’Instìtí~troJd des tropiques -
(Kovzitiklilk Instit.wtf uoor de TropefL) d’ AT/isferdatz, organisatiopr coopérative de
rechellerche, de -formatioji e t d’éd?6catio~.Jorn des formes sans cesse retzoidudée r, il réalise
des expositìoiis airtoirr de régiom e t de th21~es,de ,brograt//nm d ’actisités de participation
e t de créa%%, des expositiom rircda?ites e t des kits.
Accheillis pnr m e détmmtratrìre, des uisitcim da tm&e s’essaient Ci la pratiqLie
dzt gatmlatg, orchestre dzt théiître d ’ o h - e s irzdonésien.
34 Georges Henri Rivière

19
Expression de l’environnement social, à l’aide d’un modèle MUSEUM OF NATURAL HISTORY, New York.
Modèle sociologique tridimensionnel
tridimensionnel. concernant l’organisation sociale en
Afrique, présenté B l’entrée de la galerie
Les musées d ’ethnologie e t de sciences natttrelles présentent L’envirotmnietzt social, Mata ita Africa. Des tiges et des signes
Le plus sonvent, à l’aide de photographies associées 2 des objets, ou de dioramas. de couleurs et de formes diverses montrent
comment s’articulent les uns aux autres,
Il reste très exceptio”? qdih le fassetzt à l’aide de modèles sociologiques théoriquement, dans telle ou telle nation
trìdi~?ze?zsìor¿~gels. africaine, les systtmes de la tribu, du clan,
du lignage, du sous-lignage et de la famille,
selon les sexes et les individus morts ou
vivants.
Rôle du musée d'art et du musée de science humaines et sociales 3J

Dans les pays en voie de développement, les musées centraux pluridiscipli-


naires et monodisciplinaires manifestent une même faiblesse de corrélation
entre leurs secteurs d'exposition, tels que, le plus souvent, sciences naturelles,
archéologie, histoire, ethnologie.
Musées d'archéologie et musées d'histoire, toutefois, tendent à se rapprocher.
On en citera seulement quelques exemples, observés en Orient ou en Occident.
Depuis une vingtaine d'années, si je ne me trompe, au Musée de l'Ermitage,
deux secteurs de la partie archéologique, concernant l'un la culture scythe, et
l'autre la culture slave, tranchent résolument avec les autres secteurs de cette
partie, et traitent de thèmes sociaux, économiques et culturels, complétés d'une
cartographie raffinée.
Créé en 1964 par la Smithsonian Institution, le grand et magnifique Musée
d'histoire et de technologie des États-Unis, bien plus que l'histoire événemen-
tielle et politique, concerne l'histoire technique, économique, sociale, démo-
graphique et culturelle du peuple américain.
Dans la nouvelle version, inaugurée vers 1968, le Département des antiquités
grecques et romaines du British Museum renonce à la formule classique des
subdivisions techniques à contenu sériel, en faveur de périodes à contenu com-
plexe et sélectionné. Ainsi, avec ses thèmes d'économie, de technique, de
société, de cultures indigènes et romaines confrontées, d'écologie humaine, ce
qui m'a semblé Stre le secteur le plus remarquable de ces galeries rénovées est
le Roman Britanny.
Renonsant à son tour à ses subdivisions techniques, le département des anti-
quités grecques et romaines du Musée du Louvre prépare une présentation
nouvelle, comportant d'une part une succession de périodes à contenu com-
plexe et sélectionné et, d'autre part, des séries d'étude.
A force de se rapprocher, musées d'archéologie et musées d'histoire finissent
par se confondre avec un système continu de périodes à contenus complexes,
des origines à nos jours. J'en donnerai pour finir quelques exemples.
Dès l'entre-deux-guerres, en Union soviétique, et après la deuxième guerre
mondiale, dans les démocraties populaires, bon nombre de musées locaux
obéissent à une périodisation du modele suivant : société préféodale, société
féodale, société capitaliste, société socialiste.
La frontière est également abolie, depuis la dernière guerre, dans des musées
de plus grande taille. Ainsi, à Varsovie, à Copenhague, à Stockholm, avec des
musées d'histoire urbaine, et à Budapest, avec le Musée national d'histoire de
Hongrie.
De mEme à Rennes avec le Musée de Bretagne, réalisé à partir de 1946. De
fason générale, ce ne sont pas les collections disponibles à l'avance qui y ont
déterminé les sous-thèmes des périodes, mais les structures de l'histoire. Dans
son dernier secteur inauguré, celui des origines de la Bretagne, un premier sous-
thème traite de la Bretagne avant l'homme, et les périodes humaines y sont
traitées dans un contexte d'environnement naturel. A l'heure actuelle en prépa-
iation, le dernier secteur traitera de la Bretagne contemporaine et prospective 15.
Un grand département d'histoire des Pays-Bas a été inauguré en 1971, à
Amsterdam, dans le cadre du Rijksmuseum. Des périodes d'histoire humaine
à contenu complexe S'JT succèdent. L'expression artistique y est retenue de pré-
férence, on y constate le rôle des structures populaires de la société. La futuro-
logie des Pays-Bas y est présentée, dont témoigne un riche ensemble de dia-
grammes réalisés par les services nationaux de planification. Un musée national
d'histoire de l'Algérie est à l'étude à Alger,- dont les huit périodes vont des
temps géologiques à la prospective, dans un contexte développé et constant
d'écologie naturelle IS. Jean Yves VEILLARD, (( Le problème du musCe
d'histoue, 2 partir de l'expérience du Musée de
Bretagne, I Rennes )), hf#mim, vol. XXIV, n o 4, 1972,
De cette compétition entre musées d'archéologie et musées d'histoire, dont j'ai P. 193-203.
16. S. A. BAGHLI,(( Les musées d'histoire et leur
évoqué quelques aspects, je tenterai de dégager quelques conclusions. contribution au développement des pays du tiers
On ne voit pas comment tracer entre les deux formes de musees une frontière ~ ~ ~ $ G22;TrF
) ~ 9 ~ ~ no;
de
36 Georges Henri Rivière

20
Culture cévenole en terrasse : un aspect
de l’environnement naturel humanisé, en
régression, dans les .Cévennes .
traditionnelles. Des échantillons réels en
seront observés, au cours d’excursions
écologiques organisées à travers les
Cévennes et le causse, à l’intention des
jeunes du pays et des touristes. Un
échantillon réel en est visible d’une terrasse
du musbe. Un autre en sera présenté
en maquette, au Musée cévenol, dans une
des salles traitant du Parc national.
2r
MUSÉE CÉVENOL, Le Vigan. L’un des
corps de bâtiment du musée. Au premier
plan, pont du X I I ~siècle, qu’on aperçoit
aussi d‘une terrasse du musée.
22
Ferme cévenole abandonnée, restaurte
btnévolement par l’association des
Compagnons du cap, selon des techniques
et des matériaux traditionnels conformes
aux recommandations du Parc national.
Elle sert dtsormais de refuge aux
randonneurs. Une vue en sera projetée au
Musée cévenol, dans une des salles
consacrées au parc. Le musée, en effet, aux 20
cótés du Parc national, entend encourager
la maintenance ou la restauration attentive
de constructions rurales condamnées par la Le Musée cévenol : présentation d’un environnement naturel et
révolution industrielle, et qu’un tourisme humain en cours de changement rapide, dans un musée
culturel bien orienté peut convertir en
abris de randonneurs, foyers culturels ou pluridisciplinaire de taille modeste, porte du Parc national des
résidences secondaires. C’evennes.
Créé en 19 63 par la petite ville diL Vigas (Gard, France), le Mzisée révetzol a p o w
cadre ime ancienne jlatzire de soie de la j n d ~XVIIP
i siècle,jointe 2 un ancien
monastère de bétzédictìns. Il réalìse progessìvement son programme d’écologìe des
Cévennes. Il le fait d@is 1970a m l’aide dzi Parc national.

21 22

i
Rôle du musée d'art et du musée de science humaines et sociales 37
___

23
MUSPECÉVENOL, Le Vigan. (( Dtfense
contre les loups D, (( Le cochon )) : deux
thèmes de la salle d'ethnographie.
24
M L I S ~CÉVENOL,
E Le Vigan. Cocons de
ver à soie, sur des branches de bruyère :
éléments du thème (( Sericulture )), dans la
salle d'ethnographie.
21
M U S É E C ~ V E N O L ,Le Vigan. Foyer d'une
salle commune, dans une maison rurale.
CCvennes, d&butdu X X sikcle ~ : diorama.
26
MUSÉE cÉvENoL, Le Vigan. Métier à bas
de soie : dément du thkme (( Industrie de la
soie )), dans la salle d'ethnographie. Cet
appareil est témoin d'une industrie
régionale florissante depuis le X I X ~sikcle.
27
MUSSECPvENoL', Le Vigan. Haches
néolithiques découvertes dans le causse de
Blandas : éléments de la salle d'histoire.
28
MUSSECÉVENOL, Le Vigan. Entrte de la
salle dédiée à André Chanson, &crivain
contemporain originaire des Cévennes.

26
38 Georges Henri Rivière

chronologique, autrement qu'en dents de scie, et quelles dents, vu l'extrême


diversité des modèles de développement des cultures à travers le monde. Que
de différences à cet égard, pour s'en tenir à ces seuls exemples, entre Europe
et Amérique indienne, entre Maghreb et Nouvelle-Guinée.
Le critère de la fouille s'estompe, en raison du développement des fouilles
modernes. Une source s'ajoute désormais aux sources classiques de l'objet, de
l'iconographie, du texte écrit, pour la connaissance de l'environnement : la
source orale, en tant qu'expression de traditions pouvant remonter à un lointain
passé. La connaissance de la société fransaise traditionnelle dans son état du
X I X ~siècle, par exemple, est liée à l'interprétation conjointe du produit de
fouilles anciennes ou modernes, d'objets recueillis directement dans la société,
de documents iconographiques de périodes variées, de traditions orales, dans
le cadre de cette société et, au besoin, au-delà de cette société. I1 est difficile,
ici encore, d'établir une frontière entre les deux formes de musée.
Faire déboucher sur l'avenir la période contemporaine d'un musée d'histoire
est l'un des moyens les plus efficaces pour exciter l'intérêt du visiteur et, plus
largement, celui de la communauté qui supporte le musée. Veut-il s'ouvrir à
l'avenir, le musée d'archéologie devrait se convertir en musée d'histoire.
La théorie, toutefois, compte moins en l'espèce que la pratique, et il n'existe
pas de règlement international des musées qui oblige tel ou tel musée à rallier
telle ou telle catégorie de musée au nom de telle ou telle définition, de telle ou
telle terminologie. Les formules varient, dépendantes qu'elles sont du système
local, régional ou national des musées, déterminées qu'elles sont par les aspira-
tions de la population, les experts disponibles, les possibilités matérielles.
L'essentiel, que le musée se dise d'archéologie ou d'histoire, est que la com-
munauté qui le supporte se sente concernée. Qu'elle resoive une explication
de son patrimoine historique, en tant que rampe de lancement de son déve-
loppement. Qu'elle apprenne à mieux connaître, le musée aidant, son environ-
nement humain et naturel.

Musée d'ethnologie
L'ethnologie est la science des groupes humains, considérés dans leurs parti-
cularités 17.
Un nombre élevé de musées sont concernés par cette discipline, à travers le
monde. Les premiers échantillons en sont apparus durant le dernier tiers du
X I X ~siècle, selon les trois modèles qui les caractérisent le plus souvent : musée
d'ethnologie générale, musée d'ethnologie régionale, musée de plein air.
Beaucoup de problèmes que soulèvent les musées de cette discipline ont leur
écho dans les musées d'histoire. Je n'y reviendrai pas, sinon pour souligner
quelques rôles d'intérêt majeur, propres à ces musées : a ) enseigner la compré-
hension mutuelle des cultures et des peuples, dans leurs convergences et leurs
particularités (fig. 17, 18) ; lutter contre les préjugés raciaux ; b) exprimer la
culture sous ses aspects variés, qu'ils soient techniques, économiques, sociaux
ou esthétiques, matériels ou immatériels, dans leur environnement humain et
17. A. LEROI-GOURHAN, (( L'expérience

ethnologique D, Ethnologic géiiérale, Encyclopédie de la naturel, dans leur univers vécu, agi, ou pensé l8 ; c) illustrer le patrimoine
Plbiade, 1968, p. 1816-1818. Voir aussi G. H. RIVIBRE,
Sf'minaire nwséologique national, Alger, f;;wier 19 69, culturel des populations vivantes, en tant que rampe de lancement du dévelop-
p:45-53, Paris, Icom, 1969 (multigraphik). pement ; d9 aider les populations des pays ayant accédé récemment à l'indé-
18. A. LEROI-GOURHAN, op. cit., p. 1817.
19. Le h h 6 e de Niamey est l'un des exemples les pendance, pour la prise de conscience de leur identité nationale lB.
plus retentissants parmi les musées ethnologiques de
plein air, pour l'expression de l'environnement humain
(Mfmmi,vol. XXIV, n o 4). On trouve dans le present
numéro la relation d'une expérience exceptionnelle, Musée de sciences sociales
consistant en la structurisation majeure d'une galerie
d'ethnologie, autour d'un principe icologique (voir
l'article sur la nouvelle exposition hfan it1 Africa, La sociologie a pour rôle (( de préétablir des cadres qui permettent de rendre
p. 124.126). L'environnement est evoqui: dans le
Musée rCnové d'ethnologie genérale, récemment clairs les traits par lesquels tel groupe particulier s'insère dans un modèle
inauguré 1 Berlin-Ouest. social 2o )).Face à une définition aussi large, les musées de sciences sociales font
20. LEROI-GOURHAN, op. cif., p. 1818.
Z.I. Peu de musées de sciences sociales, seulement, figure d'oiseaux rares dans le répertoire international des musées 21. I1 est ten-
sont signalés dans la documentation du Centre
Unesco-Icom. tant d'en rechercher les raisons.
Rôle du musée d’art et du musée de science humaines et sociales 39

Discipline abstraite, la sociologie ne semble pas s’intéresser au langage de


l’objet, cette G chose réelle n dont la communication visuelle est l’un des attri-
buts majeurs du musée. Si elle pratique le diagramme, elle le fait le plus souvent
sous la forme duodimensionnelle, en raison de la préférence que manifeste cette
discipline pour le langage écrit. Elle ne dispose pas actuellement du nombre
relativement élevé de tribunes populaires dont disposent l’archéologie et
l’ethnologie, avec la presse, la radio et la télévision. Elle éprouve peu encore
le besoin de se doter d’un langage verbal de grande diffusion, transposition d’un
langage verbal scientifique peu accessible au profane. Autant de circonstances,
peut-être, qui expliquent le petit nombre d’expositions sociologiques, la fai-
blesse des rapports entre sociologie et muséologie, et cette rareté d’échantillons
muséaux dans ce domaine, dont j’ai parlé 28. Réserve faite, assurément, des réa-
lisations d‘une branche sociologique du musée, le musée pédagogique.
La sociologie, à vrai dire, si elle ne se sert pas du musée, sert au musée. Dans
la mesure, au moins, où le musée en utilise les méthodes rigoureuses, pour éva-
luer les réactions de son public réel, et évaluer son public potentiel z3.
Quoi qu’il en soit, la multiplication des musées de sciences sociales et l’inser-
tion plus fréquente de thèmes sociologiques dans l’exposition historique, artis-
tique ou ethnologique, contribueraient au rayonnement d‘une discipline utile à
la société moderne, auprès du grand public qui l’ignore trop souvent, quand il
ne l’assimile pas à la technocratie.
De nouveaux moyens de diffusion s’offriraient à la sociologie, visuels et
audio-visuels, ceux-là même dont le musée dispose déjà, adaptés aux besoins
propres de la sociologie : modèles tridimensionnels statistiques et struc-
turels (fig. 19) z4, diagrammes audio-visuels graphiques animés sous la forme
de diapositives superposées ou de films cinématographiques ; expressions
figuratives à la faSon des bandes illustrées ; (( choses réelles )) jouant le rôle
de symboles concrets et vivifiants, enchâssés dans la communication socio-
logique visuelle.

Musées de voisinage
Mzisezuti a rendu compte de cette nouvelle forme de musée, déjà passée du stade
de l’expérience à celui du plein succès. L’Anacostia Neighborhood Museum en
est un échantillon remarquable, fondé à ‘riashington avec l’aide de la Smith-
sonian Institution”, au service d’une communauté du ghetto noir de
Washington.
Ce musée de voisinage n’est pas un musée dans le sens traditionnel du mot.
A la suite de l’acquisition d‘une division mobile et grâce aux moyens supplé-
mentaires permettant d‘y loger à la fois un centre d’artisanat et un centre de
recherche ainsi qu’une bibliothèque, il est N devenu à la fois un musée, un
centre multi-media, un moyen de formation aux arts appliqués, un lieu de
22. Le Musee des arts et traditions populaires (Paris)
rencontre pour groupes communautaires et un centre culturel artistique 27 D.361
annonce une exposition temporaire sur la famille.
On danse, on chante, on travaille, on discute de questions sociales, on étudie
et On crée la culture afro-américaine, on met la main la pâte muséographique,
:::
tridimensionnel figurant en tetede l’exposition A h
in ,-lfiicu, à I’American Museum of Natural History
dans ce vivant musée de voisins : un musée multidisciplinaire d‘écologie de New York.
25. Zorn B. MARTIN, (( Urban ecology and the
urbaine, ceuvre d‘une communauté pauvre, à citer en exemple a de puissants inner city hiuseum )>,~ ~ I J p Nand I R c12gi,.onnlEtl,,
~ ~ op. cit.,
musées. p. 16s-171.Le Musée d’rlnacostia a fait l’objet d‘une
communication auprès de 1’Icom en 1971,présenté
avec un film, par son directeur John Kinard.
26. [...I (( is not a museum in the tradition sense of
Du musée ethnologique de plein air à l’écomusée the nord. Following the acquisition of a mobile
division and the additional facilities to house both an
arts and crafts centre and a research centre and library
L’écomusée: un nom nouveau; une notion qu’on ne saurait dire nouvelle, et dont [...I became at OnCe a museum. a multi-media centre,
a skills training facility, a meeting place for
il existe Sà et 18le germe, voire bien plus que le germe, dans l’univers des musées. community groups, and a cultural arts centre. ))
Le musée de plein air en est l’ancêtre le plus évident : une collection d‘élé- , S ; a ~ ~ ~ ~ ~ ~
ments d’architecture traditionnelle, rurale principalement ; transférés dans un organisée à la denlande de la commission des jeunes
du musee, This t h i q called juxx, l’autre circulante,
parc avec leurs équipements domestiques, agricoles, artisanaux, etc., ou garnis réalis& pa des enfants, des adolescents et des adultes
de la communauté, The raaf: mam’ imikd uflictio?i.
d‘équipements équivalents ; dotés, le cas écliéant, d’un minimum d’environne- J~~~~.~,,,,~, XXIV, no I, 1972.
40 Georges Henri Rivière

CONSTANTINE

Bou Salda

Biskra

I a Ghardaia
I

L’Écomusée de Bou-Saâda: un projet de taille moyenne, dans une


oasis du Sahara algérien.
I-
Un orientaliste français, É t i e m e Dinet, a peint les gens e t leJ paysages de Boit-Saâda, I

vers le début dii XXe siècle. Il y a ve“, il sly est converti à l’ìdam. Ily a son
tombe ai^,face an désert. Ua mwée devait être consacré ri ce peìtztre, dam cette oasis.
On envisage ri présent que ce tmisée prenne la forme d’zdn écofnnsée de conception
n@rienne aittozir du programne mìvant :
I . D a m ztn bâtiment à constritirt?à cette j r z , d ‘ililspirationa&ko-saharìenne :
présetztation cotljoitzte, en ordre chronnlogiqiie, de la ivie e t de l’cetcv+e artìstique
e t littéraire d’€%enae Dinet (jig. 3 o).
2. Dam le t?zênte bâtinient :présetztation de l’histoire natiwelle e t himaine de
Bou-Saâda, des t e m p gé0logiques à la prospectizit?,en trois périodes sttccessives :
aziant, pendant, e t depth le tenqs d’€?tienne Dinet (jg. 3 I, 3 2).
3. Azi voisinage de cet éd$ce, aim coqfïvzs de l’oasis e t did désert :maìntenance de Ia
maison, ditjardin e l de la tombe d’Étienne Dinet ;aniémgenzent d’arèties taìllées
dans le roc, lieu dc rencontres e t de présentations, destiné à da poptilation de
Bozi--Sazda e t à ses hòtes (jg. 29, 33-41).
4. A travers l’oasìs e t son enviroaneinent :réseau de chetnìm desservant des
monzinzents, des qtsartiers, des paysages natimls e t humains rtprésentatifs.
Tom les myens seront recherchés, en général, pour que la popidation de Bots-Saiìda
se sente concernée par l’éconizisée :la présentation dzi patrimoine e t dzi développement
29
Situation de Bou-Saáda, Algkrie. local :lr participation de lajeunesse à la mnaiatemznre d’échantíllons d’architectttpe
30 traditiontzelle ;la proniotion d’me architectidre rioitvelle inspirée de la tradition
Femme de Bou-Saâda. Peinture signte
Etienne Dinet. régionale ;zin tourisme czdtiirel de palité, projtable à Bozdadda.
Rôle du musée d'art et du musée de science humaines et sociales 41

32

31 34
Bou-Saàda, l'oasis, en bordure de l'oued. Pistolet ayant appartenu à Abdel-Kader
Des falaises se profilent à l'horizon. (1808-1883), haute figure de la rksistance
32 algérienne, qui vécut un certain temps à
Rose des sables : cristallisation de gypse Bou-Saâda.
qui se rencontre, notamment, dans le
désert environnant, Bou-Saâda.
31
Maison et tombeau d'Étienne Dinet, aux
confins de l'oasis et du désert, Bou-Saâda.
34
42 Georges Henri Rivière
Rôle du musée d'art et du musée de sciences humaines et sociales 43

.? 8
Groupe scolaire en cours de rialisation,
Bou-Salida.
47
Façade de la mosquée d'El Harmel, début
du X X siècle,
~ Bou-Salida.
\
40
La tombe d'Étienne Dinet, Bou-Saâda.
41
Portail de la mosquée d'El Harmel,
Bou-Salida.
44 Georges Henri Rivière

ment. Ce genre de musée est particulièrement représenté en Scandinavie, sa


région d'origine. Il en existe dans le monde plusieurs centaines.
A ces ensembles de micro-unités écologiques, le musée ethnologique de plein
air, le plus souvent, ajoute un ou plusieurs bâtiments conservés sur place, ou
construits à dessein, dans lesquels sont exposées des collections complémen-
taires, en permanence ou temporairement : mobiliers, objets d'art populaire,
costumes, etc. Tels par exemple le Musée de plein air de Lingby, près de
Copenhague ; ou le Welsh Folksmuseum de Saint Fagan, branche du Musée
national du pays de Galles ZR.
Issu de ces développements, l'écomusée se compose essentiellement de deux
musées coordonnés, un musée de l'espace, musée (( ouvert )), un musée du
temps, musée (( couvert D. L'idée est née en France et en Algérie, à partir de
données différentes.
Le musée de l'espace comporte un ensemble contrôlé de terrains continus
ou discontinus, unités écologiques représentatives de l'environnement régional,
portant ou non des bâtiments d'intérêt culturel conservés sur place ou trans-
férés, équipés, à l'exemple des musées ethnologiques de plein air.
Le musée du temps expose sous son toit des collections de spécimens d'objets
et de modèles, joints à des programmes audio-visuels représentatifs de cet envi-
ronnement, groupés dans le cadre depériodes, des temps géologiques à nos jours.
La prévision de l'avenir, ou futurologie, n'est pas exclue de l'écomusée, loin
de là. Dans le musée du temps, systématiquement, elle peut se manifester au
terminus des périodes, sous la forme, notamment, de modèles et de programmes
audio-visuels représentatifs de projets adoptés ou en discussion, voire de pro-
jets se contredisant. Dans le musée de l'espace, à l'occasion, elle peut donner
matière à la présentation de réalisations nouvelles ou d'expériences. Ainsi
conSu, l'écomusée paraît bien devoir couvrir l'ensemble des objectifs fonda-
mentaux du musée, à sa manière.
I1 peut être organe d'étude, d'expérience et de rencontres interdisciplinaires,
notamment en matière d'écologie naturelle et humaine 29. I1 peut assurer la
conservation d'échantillons précieux de sites et d'architectures, menacés de
disparition. I1 peut participer à l'éducation et à la culture d'un large public :
public local, qui y trouve un tableau de ses origines, et jusqu'à l'empreinte
encore chaude d'un passé récent, qui s'y sent concerné davantage encore, par
l'évocation de son présent et la prévision de son avenir, que l'écomusée l'en-
courage à construire ;public régional, national et international, auquel il fournit
une explication du pays qui les attire, et des sujets de réflexion par rapport à
leur propre pays ; population scolaire interrégionale ou suprarégionale, con-
z8. Une théorie du musee de plein air a kt6 adopthe duite par les enseignants ;groupes émanant d'organisations professionnelles ou
e n conclusion à un colloque de 1'Icom sur les musées
de plein air. ATorideJ de i'lcanz, vol. II, no I, fevrier syndicales culturelles, conduits par leurs animateurs.
1958, p. 8-11. U f t s e p m I a publié à diverses reprises des Plusieurs écomusées sont en cours de réalisation en France, dans le cadre
articles sur les musées de plein air, notamment dans
son volume X, no I, 1957. ou non de parcs naturels (fig. 20-28) 30. D'autres écomusées sant à l'étude
zg. Loin de nous, soit dit au passage, l'idée que le
principe d'interdisciplinaritéressortit seulement à en France 31. Un écomusée est à l'étude en Algérie, dans une oasis du nord
I'ecomusGe, il le fait à l'égard de musées d'autres
disciplines : tel le biusée tropical d'Amsterdam. du Sahara, à Bou-Saâda (fig. 29-41).
30. Dans le cadre du Parc naturel régional des
Landes de Gascogne : Bcomusée de Marqubze à
Sabres (voir dans le present numéro l'article de
François Moniot, p. 127). Dans le cadre du Parc
Conclusion
naturel regional d'.Armorique : ficomusée de l'ile
d'Ouessant et d'une haute vallée des monts d'Arrée. Étant donné que le sujet de l'écologie humaine est un état plutôt qu'une
Au voisinage du Parc national des Cévennes :
Ecomusée de l'homme industriel. chose [...I cet état, plutôt que les choses qui lui sont subordonnées, est le
3 I. Notamment dans le cadre du Parc national des
Ctvennes, au voisinage du mont Lozère et des sources thème principal d'une exposition écologique 32. D
du Tarn; et sur les rives de l'étang de Berre, à Istres, Présentée par un muséologue américain dans un article traitant des principes
un Gcomusée de l'homme industriel.
32. (( Since the subject of human ecology is a de l'exposition d'environnement, cette recommandation peut servir de conclu-
condition rather than a thing [...I the condition, rather
than the things that exist under the condition, is the sion à mon étude.
central theme of an ecological exhibit D,
G. Carol1 LINDSAY, (( Creating and building
Puissent les musées de sciences humaines et sociales s'en imprégner, et s'ins-
..., pirer des expériences que rappelle cet article, responsables qu'ils sont d'initier
t ~the crrvirOnmertt
environmental exhibits )), I V h ~ e ~ muizd
op. cit., p. 131.
3 3 . Voir en gtinéral - déjà cité à propos du musée leurs communautés aux problèmes locaux et universels de l'environnement
d'art- l'ouvrage issu de I'herican Association of
Museums, dlt/seti~mund the erii&vrimeizt.. . humain, voire de l'environnement naturel, tant les deux domaines sont intégrés 33.
Rôle du musée de science et
de technique industrielle

lean Rose et Charles Pene1

On ne compte plus les publications consacrées aux problèmes de l'environne-


ment ; ceux-ci ont pris une telle importance que les divers aspects de ce sujet
continuent dans le monde entier à faire l'objet de colloques de plus en plus
fréquents où des spécialistes de diverses disciplines se réunissent pour étudier
les conséquences sur la société de I'utilisation inconsidérée des progrès de la
science. Citons par exemple, parmi les plus récents, les symposiums organisés
à Bâle, par Hoffmann-La Roche, sous le titre Le d$ de la vie, à Washington,
sous les auspices de la Fondation Kennedy, sous le titre Dilemme jour tzos
cotzsciemes... Ces réunions ont, bien entendu, une importance capitale ; elles
permettent de faire le point des connaissances acquises dans le cadre de diverses
disciplines scientifiques, qu'il s'agisse des sciences exactes ou des sciences
humaines ; elles permettent aussi et surtout d'engager des discussions entre les
spécialistes afin de trouver, autant que faire se peut, les solutions les meilleures
aux problèmes qui se posent.
Mais, si importantes soient-elles, ces réunions d'étude ne constituent qu'un
aspect de tous les facteurs qui doivent conduire réellement aux solutions que
l'on est en droit d'attendre. I1 serait en effet illusoire, dans ce domaine, de cher-
cher à toujours mieux connaître toutes les données des problèmes et de découvrir
des solutions à ces problèmes si l'on devait se contenter d'en conserver seule-
ment une satisfaction de l'esprit ; il ne serait pas raisonnable de s'offrir le luxe
de mettre en œuvre tous les moyens qui permettent de connaître aussi bien un
tel sujet sous tous ses aspects et les meilleures solutions qui peuvent être rete-
nues, si l'on n'avait pas en même temps la ferme intention de mettre en œuvre
ces solutions ; le courage aussi, car celles-ci conduiront sans aucun doute à une
modification importante de nos conditions de vie et probablement à une dimi-
nution du confort auquel nous sommes habitués. Une telle politique ne pour-
rait, tôt ou tard, se traduire que par un sentiment de cuIpabiIité et certainement
par une accusation des générations futures qui ne manqueraient pas de relever,
de souligner et d'accuser notre imprévoyance.
Il ne faut pas oublier en effet que nous nous précipitons à des vitesses sans
cesse croissantes vers des horizons que l'on dit apocalyptiques, que l'on dessine
avec toujours de plus en plus de précisions. Nous connaissons le danger et en
même temps nous constatons notre impuissance. Qui va freiner notre véhicule ?
Qui va l'orienter vers d'autres directions ?
I1 faut donc agir et agir vite. Mais comment ? Pour tenter de dégager une
solution, rappelons d'abord les rouages de la mécanique en jeu.
A la base de I'évolution à laquelle nous assistons, il y a d'abord la recherche
fondamentale qui nous permet de découvrir les grandes lois de la nature ; la
connaissance de ces lois permet ensuite à la recherche appliquée d'inventer des
produits nouveaux, de mettre au point des méthodes nouvelles qui sont ensuite
utilisées par les entreprises du secteur industriel dans le but d'améliorer les
conditions matérielles de notre existence.
Devant ce mécanisme le public est un observateur, un utilisateur confiant qui
laisse aux pouvoirs chargés de le représenter le soin de prendre les décisions
qui devront construire l'avenir dans les meilleures conditions. Pourtant ce
même public réagit et réagit parfois violemment lorsqu'il s'apeqoit que les
conséquences d'une politique ou d'une absence de politique lèsent ses intérêts
46 Jean Rose et Charles Penel

42
PALAIS DE LA DÉCOUVERTE, Paris. Une
partie de la salle d'énergie nucléaire est
réservée aux problèmes relatifs aux effets
nocifs des rayonnements sur l'organisme et
aux méthodes de protection.

directs : or, dans le domaine de l'environnement, les plus graves conséquences,


celles qui le toucheront le plus, ne se feront sentir qu'à longue ou très longue
échéance. I1 est donc indispensable qu'il soit informé et suffisamment éclairé
sur tous les problèmes qui touchent l'environnement pour aider et décider les
pouvoirs publics à prendre des mesures ; celles-ci ne sauraient d'ailleurs être
prises autrement puisqu'elles auront des répercussions sur le niveau de vie de
tous et il faudra choisir.
I1 est donc important d'assurer l'information. La Conférence des Nations
Unies sur l'environnement, organisée du j au 16 juin 1972 2. Stockholm, n'a
pas manqué de donner à cet aspect du problème une grande importance. Tous
les moyens doivent être mis en ceuvre : la presse, la radiodiffxion, la télévision
bien entendu, mais aussi et surtout les musées qui, grâce aux méthodes qui leur
sont propres peuvent non seulement retenir efficacement l'attention de leurs
visiteurs mais aussi engager un dialogue et remplir une mission éducative
(fig. 43).
Ce rôle des musées et surtout, dans le cas présent, celui des musées de sciences
exactes et naturelles, a été particulièrement mis en valeur non seulement au
cours de réunions telles que celles qui ont été organisées à Nice, en mai 1770,
par la Commission nationale fransaise pour l'Unesco, à Grenoble, en septembre
1971, par le Conseil international des musées, mais aussi depuis fort longtemps
par des hommes de science qui avaient pressenti la nécessité de faire connaître
au public l'intérêt, le développement de la recherche scientifique et les consé-
quences de celle-ci sur notre civilisation. C'est ainsi que le Palais de la Décou-
verte fut créé en 1937 par Jean Perrin, prix Nobel, entouré des savants les plus
distingués de l'époque.
Le problème est trop vaste pour qu'en ces quelques lignes il soit possible de
rappeler l'ensemble des sujets de nos préoccupations. I1 est toutefois nécessaire
d'en retenir les principaux aspects afin de voir comment les musées peuvent
intervenir.
La terre est un vaisseau spatial. Son faciès, sa structure ont considérablement
évolué au cours des ères géologiques. La vie est apparue il y a plusieurs cen-
taines de millions d'années. Les conditions climatiques ont fait varier l'aspect
de la vie sur la terre ; des espèces sont nées puis ont disparu ; d'autres sonc
apparues mais l'équilibre biologique de la planète a été conservé ; cet équilibre
naturel n'a été troublé que par l'apparition de l'Hoilro sapiem, il y a environ
deux millions d'années. Depuis son apparition, celui-ci n'a cessé de modifier
l'environnement terrestre. Très lentes à l'origine, ces modifications se sont
Rôle du musée de science et de technique industrielle 47

accélérées au fur et à mesure des progrès réalisés dans la découverte de cet


environnement ; grâce à son ingéniosité, l’homme a construit des outils tou-
jours de plus en plus perfectionnés afin d’exploiter au maximum les ressources
naturelles et a inventé des produits nouveaux soit pour guérir les maladies, soit
pour se protéger d‘espèces gênantes, soit pour ainéliorer les rendements natu-
rels, tout cela dans le but de se créer une vie matérielle toujours meilleure.
Mais cette course folle à (( l’indice de croissance D à laquelle nous assistons
actuellement, est-elle vraiment la solution ?
Dans l’optique du sujet qui nous intéresse ici, les résultats de cette évolution
ont conduit à une situation dont les points les plus alarmants concernent : les
altérations et le diséquilibre du milieu naturel ; la pollution du milieu naturel ;
I’épuisement des ressources naturelles ; l’explosion démographique.
Ces sujets ne sont d’ailleurs pas indépendants, bien au contraire ; en explo-
rant de près n’importe quel écosystème, l’écologiste se heurte invariablement
à une grande complexité et à un réseau de rapports réciproques. Ces rapports
devront donc être illustrés autant que possible dans la présentation des thèmes
choisis.
Les altérations du milieu naturel commencèrent dès que l’homme utilisa

43
PALAIS DE LA DÉCOUVERTE, Paris. L’intCrét
port6 par deux jeunes élèves sur l’un des
problèmes exposés dans le cadre de
l‘exposition L’eair e t la vie, prtsentée en
1971,suffirait à montrer - s’il en était
besoin - l’importance de la mission
éducative des musées.

DIf
48 Jean Rose et Charles Penel

le feu. La destruction des forêts fut le début de son action sur l’érosion du sol
et la pollution de l’air. Les forêts brûlées furent remplacées par des herbages
qui eurent pour conséquence une augmentation du nombre des herbivores. La
transformation des herbages en terres cultivées et la réalisation de barrages
d‘irrigation permirent la production de récoltes qui, stockées en quantités
suffisantes, furent des réserves de vivres pour toute l’année. C’est ainsi que des
populations se fixèrent dans les vallées fertiles ; mais ces concentrations de
population eurent comme conséquences l’éclosion d’épidémies ; la fumée des
foyers pollua l’atmosphère, l’érosion du sol des pacages pollua les nappes d’eau.
Plus tard, à la destruction de plus en plus importante des forêts, à la diminu-
tion de la fertilité des terres s’ajouta la destruction de vastes espaces au bénéfice
d’extractions minières : charbon, gaz naturel, pétrole, uranium. Mais ces
extractions ont pris de telles proportions que 1,011 estime l’épuisement de ces
ressources à un délai de quelques générations. C’est ainsi que les importants
gisements d’uranium récemment découverts dans le massif du Hoggar ne
seront probablement exploités que dans une décennie, période considérée
comme le début de la pénurie en uranium. De plus, ce n’est pas l’uranium qui
permettra une prolongation notable de ce délai puisque, d’une part, le rende-

44
PALAIS DE L A D~COUVERTE, Paris. Vue
d‘une exposition réalisée par le Palais de la
Découverte, sur la lutte contre la pollution
atmosphérique (1964).

- - . - .

ment de son utilisation est très faible et que, d’autre part, il constitue une source
de contamination radiochimique et thermique (fig. 42) telle que des sociétés de
défense de la nature ont pu retarder la construction de nombreuses centrales ;
aux États-Unis, par exemple, sur dix centrales nucléaires prévues pour être
mises en fonctionnement l’année dernière, deux seulement y sont parvenues.
Si d’autres sources d’énergie non polluantes n’étaient pas trouvées en rempla-
cement, il faudrait donc, dans ces conditions, s’attendre à une stabilisation de la
consommation d’énergie électrique, ce qui constituerait évidemment un
obstacle à la marche du progrès. Mais la radio-activité n’est pas la seule source
de pollution ; la pollution chimique n’a cessé de croître à mesure que la civili-
sation progressait. Déjà à l’époque romaine, on a montré que l’utilisation du
plomb pour confectionner des conduites d’eau, fabriquer des peintures, garnir
des récipients était une source d’intoxications. La pollution de l’eau a commencé
à prendre de grandes proportions au début de ce siècle avec le développement
de l’industrie chimique, non seulement au niveau de l’usine, mais également
à celui du public qui dispose, par exemple, de quantités de détergents de plus
en plus grandes ; la consommation industrielle et privée ne faisant que croître,
Rôle du musée de science et de technique industrielle 49

il faudra bien, tót ou tard, prendre des mesures pour conserver et protéger l'eau.
Ajoutons à ce développement industriel, l'utilisation toujours de plus en
plus grande du pétrole comme source d'énergie, et nous avons là les principales
sources de pollution de l'air que nous respirons ; l'air de nos villes contient
non seulement de plus en plus de gaz et de vapeurs toxiques tels que l'oxyde
de carbone, l'anhydride sulfureux, provenant des moteurs à combustion, des
chaudières, des réactions industrielles, mais aussi une foule de particules solides
telles que la suie, l'amiante provenant des garnitures de freins... Tous ces
déchets, nuisibles à la santé de l'homme, sont aussi capables d'attaquer la pierre
et le métal des constructions. Les monuments historiques subissent ainsi de
graves dommages qui rendent de plus en plus difficile la conservation de notre
patrimoine culturel. Parallèlement, l'atmosphère s'appauvrit en oxygène car la
quantité produite par photosynthèse ne compense plus la consommation : des
produits tels que le DDT, les herbicides si largement utilisés pour tuer les
plantes sont des vecteurs capables de bloquer le cycle de l'oxygène (fig. 44).
De plus, la pollution de l'air ne se limite pas à la dilution de substances toxiques,
le bruit constitue également un facteur important de perturbations qui peuvent
considérablement altérer la santé de l'homme.
Tous ces problèmes ne font que s'aggraver au fur et à mesure de l'accrois-
sement de la population du globe ; or, grâce aux progrès de la médecine, cet
accroissement atteint actuellement une accélération telle qu'il est impossible
que notre planète puisse le supporter au-delà d'un délai de quelques dizaines
d'années.
II n'est pas dans notre intention de relever tous les sujets qui ont été traités
par les musées de science sur ces problèmes de l'environnement ; nous nous
contenterons d'illustrer quelques-uns d'entre eux, notamment ceux qui ont
fait l'objet d'une partie de l'activité du Palais de la Découverte.
Rappelons d'abord les buts des musées et les moyens qu'ils mettent en œuvre.
Les musées de sciences doivent de plus en plus devenir les (( antennes j) de la
recherche scientifique ;ils constituent de véritables services de (( relations exté-
rieures j) d'une grande efficacité. Ils peuvent en effet préparer le public aux opé-
rations (( porte out-erte j) en jouant le róle du troisième homme )) ; ils sont
non seulement des centres d'information actifs ouverts en permanence mais
aussi des centres éducatifs.
Le Palais de la Découverte a été l'un des premiers établissements culturels
créés dans cette optique. Chaque jour, de jeunes universitaires présentent aux
visiteurs une centaine d'expériences scientifiques avec le souci de la plus grande
rigueur et en s'effoqant de donner toutes les explications voulues en termes
'
clairs et précis pour être compris de tous les auditeurs quel que soit le niveau
de culture de ceux-ci. Des expositions sur les thèmes choisis comportent non
seulement des tableaux, des textes illustrés de schémas et de photographies, des
maquettes, des pièces de collection mais aussi des expériences scientifiques
commentées régulièrement auxquelles, dans toute la mesure du possible, le
visiteur peut participer. A cette occasion, une documentation est sélectionnée,
des brochures rédigées par des spécialistes sont publiées, des films sont présen-
tés, des conférences-débats sont organisees pour différents publics, non seule-
ment au siège de l'établissement mais aussi dans les établissements scolaires et
les centres éducatifs. Toute cette animation est ouverte au plus large public au
sein duquel les élèves des établissements d'enseignement, les membres d'asso-
ciations éducatives bknéficient de visites en groupe spécialement organisées.
Dans toute la mesure du possible, ces expositions sont prévues pour être iti-
nérantes afin de donner le masimum de rentabilité aux efforts investis. La
mission d'information de telles operations est complétée par une mission édu-
cative surtout auprès des jeunes à qui on propose un programme d'occupation
de leurs loisirs comportant des travaux de laboratoire, des excursions scienti-
fiques d'observation de la nature, de récolte d'échantillons analysés et collec-
tionnés, des réunions-débats ; la curiosité d'esprit ainsi éveillée est stimulée
jo Jean Rose et Charles Penel

II par des prix récompensant les contributions les plus originales sous forme de
PALAISDE LA DÉCOUVERTE, Paris. Des
expériences sciemihques présentées devant travaux personnels ou de groupe. Les exemples qui suivent constituent des
le public et le plus souvent possible avec applications récentes de ces concepts.
sa participation retiennent l'attention du
visiteur, éveillent la curiosité et donnent Du I > février au 31 août 1971, une exposition intitulée L'eatt e t la vie a été
aux exposés une valeur éducative réalisée avec la participation de nombreux organismes publics et industriels.
incomparable. Cette photographie
représente une vue du banc expérimental Cette exposition comportait plusieurs parties qui traitaient : de l'importance
de l'exposition Bels, décÈbels e t phones, de la nature et des propriétés de l'eau des points de vue physique, chimique,
réalisée par le Palais de la Découverte et le
Národni Technické Museum de Prague. biologique ; du cycle de l'eau ; des ressources et des besoins ; des méthodes
On aperçoit le tableau de perception des d'extraction ; de la pollution des eaux superficielles et souterraines et des eaux
sons par l'homme en fonction de In
fréquence et de l'intensité (1971). marines ; de la lutte contre la pollution ; du traitement et de l'épuration des
eaux usées. Elle a donné lieu à la publication d'une brochure constituant une
mise au point de l'état actuel des problèmes concernant l'eau et dans laquelle
on trouve un chapitre sur l'information et la documentation, la propagande
faite en faveur de la protection des eaux, l'éducation du public et surtout des
jeunes et une importante bibliographie (périodiques spécialisés, ouvrages de
base, films, centres de documentation). Des conférences avaient été pronon-
cées sur : Une politique de la protection des milieux naturels, La pollution des
rivières, La mer et l'homme, L'eau, milieu biologique ... De nombreux films
avaient été projetés ; des exposés illustrés d'expériences avaient été faits dans
des centres professionnels ou d'animation culturelle.
Une autre exposition intitulée Bels, décibels e t phones (fig. 4 j ) , exemple de
coopération internationale puisqu'elle a été réalisée en collaboration avec le
Národni Technické Muzeum de Prague, a été présentée au Palais de la Décou-
verte du 3 0 août 1971 au 3 janvier 1972, et en France dans plusieurs maisons de
la culture. En 1973, elle circulera en Tchécoslovaquie et dans plusieurs autres
pays. Comme on le rappelle dans le livret publié à cette occasion, le thème de
cette exposition sur l'onde sonore est une introduction à une étude plus géné-
I
rale qui intéresse chacun de nous au premier chef car il s'agit d'une part
importante de la construction, de la modification et de l'évolution de notre
cadre de vie. L'air est un milieu conducteur des sons et des bruits ; c'est lui qui
permet l'audition des œuvres musicales les plus remarquables ; c'est lui aussi
qui transmet les bruits de plus en plus divers, de plus en plus violents produits
par notre civilisation technique en pleine expansion. La pollution de l'air ne se
Rôle du musée de science et de technique industrielle II

limite pas aux seules substances toxiques en suspension ou en dilution. Les


conséquences des perturbations sonores de notre environnement sont tout
aussi néfastes ; ces nuisances et leurs conséquences ont en particulier fait l’objet
d‘un rapport d’une commission technique qui, dès 19j7, était chargée, en
France, de l’étude du bruit.
Une exposition intitulée L’homwe e t l’imwtr (fig. 44 a été présentée au Palais
de la Découverte, du er mars au 17 septembre 1972.Elle doit circuler pendant
deux ans dans plusieurs villes fransaises. Elle comporte cinq grandes parties
qui concernent : la place occupée par l’homme et par l’insecte dans l’écosps-
tème, une étude des milieux naturels, la présentation des milieux aménagés, les
formes d’aménagement, les méthodes de la lutte biologique et de la lutte
intégrée dans le cas des milieux intensivement exploités. Cette lutte biologique
est précisément I”des exemples proposés par les biologistes et les écologistes
pour résoudre des problèmes avec le souci de sauvegarder l‘environnement.
Une brochure publiée à cette occasion constitue, là encore, une mise au point,
donne les principales sources de documentation sur ces questions (revues,
monographies, films, centres de documentation.. .) et montre l‘intérêt porté à
ces questions par la Délégation générale à la recherche scientifique et technique

46
PALAIS DE LA DÉCOZIVERTE, Paris. Une
vue de l’exposition L’honzme e t l’inmtc,
présentée du l e r mars au 17 septembre
1972.Le public observe un klevage de
piérides du chou, au cours d‘un exposé sur
les principes de la lutte biologique.
5.2 lean Rose et Charles Pene1

qui a su, dès le IVe Plan, mettre en place et animer une <( action concertée )) sur
les problèmes de la lutte biologique.
En octobre prochain sera présentée une autre exposition consacrée à la pro-
tection de l'environnement. Cette exposition qui traite des formes principales
de la pollution au Canada et des actions entreprises par les pouvoirs publics
a été consue par les services du Ministère canadien des affaires extérieures à
l'occasion de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement, à Stock-
holm. Elle met tout particulièrement en lumière l'importance d'une collabora-
tion internationale pour que soit sauvegardé le patrimoine humain commun et
conservés intacts les biens culturels et naturels qui constituent pour notre civi-
lisation une richesse inestimable.
47 Et pour illustrer l'importance des clubs scientifiques, notons enfin que chaque
PALAIS
DE LA Paris. Un
DÉCOUVERTE,
jeune garçon, lauréat du Prix scientifique année sont présentées au Palais de la Découverte plusieurs études réalisées par
Philips pour les jeunes, décerné par le des jeunes et récompensées par des prix provenant d'une dotation de la Com-
Palais de la Découverte, est félicité par le
professeur Pierre Auger et le professeur pagnie Philips ; cette année trois d'entre elles, particulièrement remarquées,
Louis Leprince-Ringuet. En 1972, trois avaient pour thème une étude écologique (fig. 47).
contributions portaient sur des pzobltmes
de l'environnement. Ainsi, en remplissant activement la mission qui leur a été confiée, les musées
de sciences exactes et naturelles peuvent jouer un grand rôle dans la gamme des
actions qui doivent être entreprises pour sauvegarder notre environnement. I1
est à souhaiter que les pouvoirs publics puissent les aider à remplir cette mission
car, en même temps, leur tâche n'en sera que plus aisée, non seulement pour
faire voter les textes législatifs qui s'imposent mais aussi et surtout pour les
faire appliquer et respecter. Le rôle de la culture dans la société moderne et la
nécessité d'en étendre l'accès au plus grand nombre a été maintes fois souligné.
Encore faut-il, comme l'a rappelé récemment Augustin Girard1, que cette
politique culturelle devienne enfin réellement opérationnelle.

Bibliographie

h.i O N O G R A P H I E S

THE ENVIRONMENTAL COMMITTEE, AMERICAN ASSOCIATION OF ~IUSEUMS. 1Muse2477zs


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photogr.
ExempZes de conf~re}~cespi4bZiées
par le palais de l'a Dicouverte :
COLAS, René. L'eazd dam l'e monde. Paris, Palais de la Découverte, 1963. 35 p. (Collec-
tion : Les conférences du Palais de la Découverte, A 290.)
ROSE,Dr Yves. L'emnpozssih-age broncho-pdmonaire. Paris, Palais de la Découverte, 1966.
48 p. (Collection : Les conférences du Palais de la Découverte, A 321.)
ROUSSEL, Dr André. L a polhtion atnzosphériqz4e. Paris, Palais de la Découverte, 1961.
20 p. (Collection : Les conférences du Palais de la Découverte, A 273.)

ARTICLES DE P É R I O D I Q U E S

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DUBOS, René. L'étendue de notre ignorance, p. I 8-29 2.
CARTER,Luther J. Écologie et développement économique, p. 41-48 2.
COLE,LaMont C. Survivance : la course est engagée z.
TEMKO, Allan. Quel guide vers la terre promise, p. 30-40 z.
WYLIE,Philip. L'exemple des Everglades, p. 49-5 8 2.

CATALOGUES

I. Augustin GIRARD, Di'celoppemeiit czi/ture/: PARIS.PALAISDE LA DÉCOUVERTE. L'eaJL e t la vie, exposition présentée au Palais de la
expi&izceJ et pu/¿fiqlleJ, Paris, Unesco, 1972.
2. Dialogue (Washington), vol. 2, no 2, 1971. p. 3-58,
Découverte du 16 février au z j juillet 1971. Paris, Sté Prodec, 1971. 136 p., fig.,
photogr. photogr., bibliogr.
Rôle du musée de science et de technique industrielle 13

PARIS.PALAIS DE LA DÉCOUVERTE. Bels, décibels e f phorles, exposition franco-tchécoslo-


vaque. Paris, Palais de la Découverte, 1972. 28 p., fig., photogr.
PARIS.PALAIS DE LA DÉCOWERTE. L’hoiznze et l’insecfe. Une exposition du palais de la
Découverte et de l’Ofice pour l’information entomologique présentCe du 26 février
au 17 septembre 1972.Paris, Palais de la Découverte, 1972. 56 p.,photogr., bibliogr.

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GRASSE,
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LEFEUVREet RICHARD.L’eau, milieu biologiqtie. 26 juin 1971.

EXPOSITION (( L’HOMME ET L’INSECTE ))

BALACHOWSKY, Alfred Serge. Exploration des milieux nafiirels : L a Gzpzne franfaise.


er mars,19p.
BILIOTTI,Emile. LJhonznzecontre les insectes. I I mars 1972.
BUSNEL, Marie-Claire. Hiérarchie sociale e t compétition a/inzetzfairechex zin insecte. I 9 avril
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DEMOLIN,Guy. L a processiontzaire dta pif2 coinme exemple de contplexìté écologiqzie. 3 mai
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HURPIN, Bernard. Ltltfe microbìologìqzde contre les insectes. I 2 avril I 972.
LECOMTE, Jacques. Les iltsectes e t lesjears. 17 mai 1972.
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THIBAULT, Max. Les insectes des em4x couranfesà sahonidés. I O mai 1972.
54

Rôle du musée d'histoire naturelle

AIE G. Johnels

En dehors des milieux scientifiques, on a tendance à n'accorder de l'importance


aux découvertes des sciences naturelles que si elles aboutissent à des résultats
dont on peut tirer un parti pratique dans la vie. La méthode scientifique est
pourtant le seul moyen de comprendre les processus physiques, chimiques et
biologiques qui se déroulent sur notre planète. Les seules connaissances solides
que nous ayons de la réalité qui nous entoure viennent des sciences naturelles.
Peut-être ne sommes-nous pas assez pénétrés de l'idée que cette réalité nous
reste en grande partie inconnue.
Des sciences comme la physiologie et l'écologie supposent une connaissance
approfondie et détaillée de la structure de la matière vivante, telle qu'elle appa-
raît dans des unités biologiques dénommées espèces et sous-espèces. Les musées,
en tant que foyers de recherche systématique, ont puissamment contribué à
développer cette connaissance, mais il reste beaucoup à faire, notamment en ce
qui concerne les mammifères inférieurs et les plantes, qui ont souvent un rôle
dominant dans les écosystèmes. L'étude des fossiles a de l'importance parce
qu'elle aide à mieux comprendre, non seulement les structures et les fonctions
des organismes vivants de notre époque, mais aussi les raisons de la répartition
géographique des animaux et des plantes, depuis longtemps sujet d'études
utiles dans les musées d'histoire naturelle.
Les conditions géologiques ont une influence déterminante sur les formes de
vie et leur développement dans toutes les parties du monde. Là encore, les
musées d'histoire naturelle ont joué un grand rôle, comme ils l'ont fait dans la
localisation, l'identification et l'exploitation des nombreuses ressources que
recèle la croûte terrestre et dont l'homme tire parti. Le progrès technique -
surtout peut-être dans le domaine des communications -a été si extraordinaire
que l'homme moderne a cessé de considérer notre terre cornme sans limites.
On ne peut plus juger inépuisables les réserves naturelles de minéraux utiles,
de pétrole, d'eau, etc. L'aptitude du sol, de l'air et de l'eau à absorber des
déchets n'est pas à ce point considérable que les activités de l'homme ne puissent
la compromettre. En effet, l'évolution scientifique et technique a accru, à une
cadence sans précédent, notre capacité d'épuiser les ressources à une vitesse
accélérée et de polluer le sol, l'air et l'eau par toutes sortes de déchets. L'activité
humaine a toujours eu des incidences sur l'environnement. Cependant ces
incidences n'ont jamais été aussi profondes - tant s'en faut - qu'elles le sont
à notre époque, et elles augmentent à une vitesse croissante.
I1 n'est nullement besoin du secours d'un historien pour comprendre que le
monde où nous vivons est en pleine évolution. Les réalisations techniques, éco-
nomiques et sociales de la collectivité humaine ont amélioré nos conditions de
vie de fason si évidente qu'on n'a pas, jusqu'à une date récente, accordé une
attention suffisante aux inconvénients dont ce progrès s'accompagnait. Certains
de ses effets inattendus sont si graves qu'une action s'impose sans conteste :
l'esprit de l'homme aura beau progresser dans la conquête de l'espace, il ne
peut subsister hors de son milieu biologique. En fin de compte, la destinée de
l'homme est liée à celle de la terre et si les besoins biologiques essentiels de
l'homme ne peuvent plus être pleinement satisfaits, il faudrait réorienter le
cours du développement sur cette planète et rétablir des conditions de vie tolé-
rables là où elles se sont dégradées.
Rôle du musée d'histoire naturelle 55

La destruction menace bien souvent des ressources qui ne peuvent &re


reconstituées, du moins à la cadence à laquelle elles s'épuisent. C'est le cas des
ressources pétrolières, minérales et métalliques. En revanche, il paraît possible
de régénérer certaines ressources naturelles vivantes, et l'on s'efforce, dans
diverses parties du monde, de reconstituer un environnement naturel qui a été
détruit ou détérioré. Malheureusement, la dégradation a été souvent si rapide
et si profonde qu'il ne subsiste à peu près rien de la faune et de la flore origi-
nelles. On s'est alors apersu qu'on pouvait tirer des collections des musées
d'histoire naturelle des informations utiles sur les conditions antérieures, mais
il faut évidemment que des spécimens intéressant le domaine en question aient
déjà été rassemblés ; malheureusement, ils ne l'ont pas toujours été dans la
mesure nécessaire. Dans certains cas, ce qu'on sait des besoins de tel ou tel
organisme en matière d'environnement apporte une somme surprenante d'in- Teneur en mercure
formations sur ce qu'ont dû être les conditions mésologiques à l'époque oh les en mg/kg
spécimens ont été réunis. I1 se peut, par exemple, que l'environnement d'un 20-
-
oiseau à l'époque de la reproduction doive répondre à certaines conditions ;un
morceau de mousse peut fournir des indications précises sur le pH du lieu où
il a été trouvé, etc. On pourra s'inspirer de ces données dans des tentatives
15-
éventuelles de restauration. 11 semble particulièrement important, à notre
époque, de donner de plus en plus aux musées d'histoire naturelle la possibilité
de fournir des données, à l'avenir, en rassemblant des spécimens dans des zones
affectées, d'une fason ou d'une autre, par l'activité humaine. I1 est d'une extrême
importance que les hommes de science de demain disposent de tels spécimens ;
malheureusement, il n'y a guère de commune mesure entre les ressources des
musées d'histoire naturelle et l'intérêt de ce genre d'information.
La pollution du sol et de l'eau, en particulier dans les pays industrialisés,
retient beaucoup l'attention depuis quelque temps. Mais il faut songer qu'il
existe de nombreux types de pollution et il semble particulièrement opportun,
actuellement, de se préoccuper des effets persistants des produits toxiques émis 1 = 3f
-
délibérément, sous forme de pesticides ou, sans que le rejet soit vraiment voulu, 1815 1840 1865 1890 1915 1 o 1

par des entreprises industrielles. Le DDT et les produits organo-chlorés du 4J


m&megenre sont des pesticides bien connus ; les polychlorobipliényles (PCB) Teneur en mercure des plumes d'autours
femelles tukes près de leur nid au cours des
comptent parmi les produits rejetés par les entreprises industrielles. Les uns mois d'avril à juin, du dtbut du X I X ~siècle
comme les autres introduisent du mercure dans l'environnement. à nos jours. Les résultats obtenus depuis
1966 (année où l'emploi de l'alkyle
On a mis au point en Suède, vers 1940, une méthode de désinfection des mercure a été interdit) sont indiques par
semences par un produit à base d'alkyle-mercure (on utilisait déjà, dans les une ligne en pointillt (n = 12). Teneur en
mercure mg/kg ; n = nombre de sptcimens
années vingt, des substances inorganiques au mercure et l'emploi du phényle- étudiés.
mercure a été introduit pendant les années trente). La désinfection à l'alkyle-
mercure était devenue d'usage courant en Suède dès 19jo. L'étude des plumes
des oiseaux conservés dans des musées (Johnels et Westermark, 1969) a permis
d'en préciser la teneur en mercure, des premières années du X I X ~siècle jusqu'à
notre époque. On a constaté, au cours de ces recherches, que l'introduction de
l'alkyle-mercure avait été suivie partout d'un accroissement de la teneur en
mercure des plumes de certaines espèces d'oiseaux. Ces constatations - asso-
ciées à d'autres (Borg, Wanntorp, Erne et Hanko, 1969) - ont conduit les
autorités, au début de 1966, à prendre diverses mesures et, notamment, à
interdire l'emploi de l'alkyle-mercure comme désinfectant. A la suite de cette
interdiction et du remplacement de ce produit par d'autres substances àbase de
mercure (alkoxy-alkyle-mercure), la teneur a très vite diminué pour retomber
presque à son niveau des années 1800 (fig. 48).
Toutefois, les désinfectants au mercure ont surtout eu des effets sur la faune
champêtre qui se nourrit de produits contaminés par ce métal, et sur les ani-
maux prédateurs, l'autour par exemple, qui vivent de cette faune. Une analyse
t
d'aigrettes (Jobnels, Olsson et Westermark, 1968)~oiseaux qui se nourrissent
presque exclusivement (à 99 "/o) de poisson, a montré que l'eau peut être aussi
contaminée d'autres manières par le mercure (fig. $9). Alors que c'est pendant
I
les années quarante qu'on a relevé une forte augmentation (chez l'autour, par
56 Alf. G. Johnels

Teneur en mercure Teneur en mercure


n mglkg en mglkg
20

15

10

Aigrette
49
Teneur en mercure des plumes d'aigrette
et de grèbe, du dtbut du X I X ~ siècle à nos
jours. Données portant sur des périodes
de vingt-cinq ans. Le poisson constitue
yg % de la nourriture de l'aigrette, et
l'alimentation du grèbe huppé comprend
au moins 75 yo d'organismes aquatiques ;
n = nombre de spbcimens étudiés. O -
66

exemple), on a constaté, chez certaines espèces qui tirent de l'eau leur nourri-
ture, comme l'aigrette et le grèbe à grande crête, que la teneur en mercure avait
progressivement augmenté depuis le début du siècle, l'évolution suivant en
Suède celle du développement industriel du pays. Le mercure a de nombreux
emplois dans l'industrie et l'on a constaté, à l'expérience, que c'était l'eau qui
était le plus contaminée par les effluents industriels (rejetés directement dans
l'atmosphère ou dans les eaux résiduaires). Le problème des effets du mercure
sur l'environnement n'est donc pas simplement conditionné par la présence
de ce produit dans les désinfectants employés en agriculture, mais aussi par les
incidences beaucoup plus complexes du développement industriel.
Le mercure, comme plusieurs autres substances (l'arsenic, le plomb, les
autres métaux lourds) qui doivent être évoquées dans le débat sur la sauve-
garde de la nature, est une substance très répandue qui, si l'on pousse assez loin
l'analyse, peut être décelée presque partout. On en constate la présence dans
l'atmosphère par diffusion naturelle, après une éruption volcanique, par
exemple. C'est pourquoi lorsqu'on étudie dans quelle mesure le problème géné-
ral du mercure est lié à l'activité de l'homme, il faut avoir une idée de la pro-
portion normale de ce produit dans l'environnement naturel. Pour la déter-
miner, et, par-là, calculer la part imputable à l'homme, les spécimens des
musées ont eu leur utilité, comme on l'a montré plus haut. Cela dit, il faut inter-
préter avec la plus grande prudence les résultats relevés en pareil cas, de faGon
à éliminer toute possibilité de contamination ultérieure des spécimens. L'in-
dustrie a évidemment beaucoup contribué à la pollution de l'environnement
par le mercure depuis le début du siècle.
De nombreuses espèces d'oiseaux - comme l'aigrette et d'autres oiseaux
aquatiques - émigrent sur de longues distances au printemps et à l'automne.
Ces migrations les font passer, au cours de leur vie, par des milieux naturels
souvent très différents. Leur plumage s'use peu à peu et doit être remplacé.
Les oiseaux de proie doivent pouvoir voler continuellement afin de trouver
leur nourriture : les plumes dont ils se servent pour voler disparaissent successi-
vement au long de leur vie, certaines sont formées dans la région où l'oiseau
fait son nid, tandis que d'autres se développent ailleurs. Si l'on étudie de près
le processus de remplacement des plumes, leur analyse chimique éclairera le
problème du mercure dans diverses parties du monde, la teneur des plumes en
mercure étant liée à celle du sang à l'époque de leur poussée. I1 faut aussi con-
naître exactement le trajet normalement suivi par les oiseaux dans leurs migra-
tions, information que l'on obtient essentiellement par le baguage, souvent
Rôle du musée d'histbire naturelle
~
57

opéré pour le compte di? musées. Le Musée suédois d'histoire naturelle a pré-
cisément fait une étude s$éciale de la mue chez I'aigrette pour étudier ces possi-
bilités (Edelstam, 1969). Si l'on compare la teneur en mercure des tiges de
plumes chez un jeune oiseau pris au nid à ce qu'elle est dans celles d'un oiseau
âgé, dont certaines plumes ont été remplacées lors d'une visite à ses quartiers
d'hiver en Afrique, on obtient le rapport entre l'exposition au mercure en
Suède et l'exposition là où l'oiseau prend ses quartiers d'hiver (fig. 10).
Lorsque Jensen démontra que certaines des pointes qui apparaissent dahs les
chromatogrammes servant au calcul de la teneur en DDT étaient en réalité
imputables au PCB, il utilisa des spécimens de musée pour prouver que ces
%
pointes existaient dans les matériaux biologiques avant que le DDT ait été
emplo~récomme insecticide (Jensen, 1972) ; elles ne pouvaient donc résulter
de produits de décomposition du DDT, comme on l'avait cru jusqu'alors.
En 1967, Ratcliffe montra que, pendant les dernières années quarante, les
coquilles d'oeufs des oiseaux de proie d'Angleterre avaient été moins épaisses
que pendant les décennies précédentes. Ce phénomène est apparu au cours de
la période pendant laquelle les pesticides chlorés sont devenus d'usage courant
dans le pays, et peut résulter d'un effet sur le système hormonal qui régularise

Teneur en Oiseau àg6 JO


mercure 5 juillet 1964 Teneur en mercure de certaines tiges de
en mg/kg Göksholm, St. Mellösa remiges chez deux aigrettes (oiseau âgé
Narke en haut, jeune oiseau pris au nid en bas).
25 4 Pour le jeune oiseau, la teneur est voisine
de 20 mg/kg ou légèrement idérieure,
ce qui donne une idée de la teneur générale
en mercure du milieu aquatique. En ce
qui concerne l'oiseau ágé, deus plumes
(4et 8) ont poussb. en Suède. Les plumes
I et 5 et 2 et 6 constituent deux paires
qui ont éte remplacées en Afrique, où la
teneur moyenne en mercure des aliments
est beaucoup plus faible. Les plumes de la
paire 3 et 7 se sont dkveloppées i peu prks
deus mois après que l'oiseau a quittb. la
Suède, ce qui donne une idée de la vitesse
avec laquelle le mercure est éliminb. du
corps de l'oiseau.

Régime

Teneur en Jeune oiseau (un mois %)


mercure 7 juillet 1965
en m g l k g Stava, Osteraker

i
Uppland

10

O5

- RBgime no
5s Alf. G. Johnels

la reproduction. Là encore, on a utilisé les œufs de collection de musée pour


déterminer les effets d'importance fondamentale d'un pesticide sur les oiseaux.
E n analysant la teneur en plomb de mousses prélevées dans des collections
de plantes ayant poussé à des périodes différentes, Ruehling et Tyler ont pu
montrer, en 1968, que la teneur en plomb de l'environnement avait augmenté
du X I X ~siècle à nos jours. Ce plomb a dû pénétrer dans les mousses par l'atmo-
sphère. Son accroissement est attribué, en partie, au fait que les combustibles
fossiles contiennent de petites quantités de plomb, facilement décelables, qui
sont libérées et hffusées dans l'atmosphère par les fumées et, en partie, dans
les composés du plomb ajoutés à l'essence pour en élever l'indice d'octane. Ce
ne sont que quelques exemples. Bien d'autres usages des collections de musées
seront sans doute découverts.
Nous avons déjà évoqué la nécessité de méthodes rationnelles d'établisse-
ment des collections, qui permettent à nos musées d'offrir aux chercheurs des
spécimens utiles. En raison du travail et des dépenses que nécessitent la col-
lecte, le rangement et la conservation des spécimens, on ne devra garder que
des spécimens d'assez haute qualité. On recherchera des méthodes permettant
de satisfaire aux exigences d'ordre quantitatif et qualitatif et de pratiquer, après
essai, des méthodes nouvelles de conservation.
Le progrès scientifique ouvrira bientôt, sans doute, au chercheur de demain
des possibilités beaucoup plus grandes qu'elles ne le sont actuellement de tirer
des informations de spécimens anciens ou morts. Ce chercheur aura aussi des
exigences dont nous n'avons guère idée actuellement. Dans le choix des
spécimens qu'il collecte, le conservateur de musée d'aujourd'hui doit être doté
d'une sorte de prescience s'il veut répondre comme il convient à ce qu'attend
de lui la science de demain.
Les rejets délibérés ou accidentels de substances toxiques dans l'environne-
ment, dont ils mettent en dange; la flore et la faune, ne posent pas seulement un
problème de protection de la nature ou de choix entre les espèces qu'on laissera
disparaître. Les symptômes que manifestent les organismes dans leur environ-
nement naturel après exposition à des toxiques donnent aussi une idée d'une
menace qui risque de peser sur l'humanité tout entière. La recherche dans les
musées a donc, sur le bien-être public, une incidence plus directe et plus forte
qu'on ne l'imagine généralement. \
On pourrait évidemment citer d'autres aspects de l'intérêt que présentent les
musées d'histoire naturelle. Mais ces quelques pages auront su% pour montrer
que la création de collections suppose, chez le chercheur, une compétence
scientifique étendue et un esprit ouvert sur l'avenir. Sans une impulsion scien-
tifique de haut niveau et des ressources adéquates, les musées d'histoire natu-
relle ne pourront s'acquitter du rôle qui leur revient en tant que centres de
futures activités de recherche.

Références
BORG,IC. ; WANNTORP, H. ; ERNE,I<. ; HANKO,E. 1969. AlkyZ-mercury pois0iriiz.g itr
terrestrial Swedish wiZdlge.
EDELSTAM, c. I 969. Ruggologi euer Fåglarnas fjäderbyte. Forsknzkg OCA Framsteg,
no 3, 1969.
JENSEN,S. 1972. How PCB was discovered. Ambio, vol. I, no 4. (Voir aussi ATeiv
Scietztist, no 3 2 , 1966.)
JOHNELS, A. G. ; OLSSON, M. ; WESTERMARK, T. 1968. Esox lucius and some other
organisms as indicators of mercury contamination in Swedish lakes and rivers.
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JOHNELS, A. G. ;WESTERMARK, T. 1969. Mercury contamination of the environment
in Sweden. Dans : M. W. MILLERet G. G. BERG(ed.). Chemicalfallatit. Carrrefrt
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RATCLIFFE, D. A. 1967. Decrease in eggshell weight in certain birds of prey. Natm,
no 215.
R~HLING, a. ; TYLER, G. 1968. An ecological approach to the lead problem. Bot.
Notiser, n o 121.
59

Mon ograpbìes rep résen tdtìves

Selon diverses modalités, de nombreztx mm!es fond des recherches stir Zes problèmes de
l'environnement ON encoztrageat 2 'itfornm'ion s w ce stljet par des expositionsper/lzanentes
oz! temporaires. A ce propos, notts nzofztronspar des exeiqdes cornmefzt des /muées de
diuers opes se ser-lwt, dans différentes r&ions dza monde, des mcyens dont ils disposent
p o w diffser des informatiom szir lt.s pestions essentìeles à la con.réhensiotz des
problèmes de I'environlaement ON pow orìetiter lettrs recherches vers des obiectqs direc-
tement liés aux rapports entre I 'honime e t sot) environnement.

Le Musée des sciences de la terre


de l'université de Moscou
Boris Savel'ev

Le Musée des sciences de la terre a été inauguré en 195 5, année du bicentenaire


de l'Université de Moscou. Les travaux préparatoires ont demandé cinq années
d'efforts persévérants de son personnel et des facultés de géologie, de géogra-
phie et de biologie. Plus de 700 savants de l'Université de Moscou, des acadé-
mies des sciences de l'URSS et des ripubliques fédérées, et d'autres institutions JI
scientifiques du pays ont contribué à l'élaboration du programme scientifique MUZEJZEMLEVEDENIJA MOSKOVSKOGO
GOSUDARSTVENNOGO UNIVERSITETA,
de l'exposition. Plus de zoo artistes (fig. JI) et dessinateurs moscovites ont col- Moskva. . ~ 7 l a ~ m z o i ~sculpture
fh, de
laboré à son montage. V. A. Batagin.
Le musée a pour objet de faire connaître la nature très variée de notre pla-
nète, son histoire, sa composition, sa structure, les phénomènes qui se pro-
duisent dans ses profondeurs, à sa surface et dans l'espace circumterrestre. I1 a
fallu pour cela codifier un énorme volume d'informations accumulées par les
nombreuses sciences dont relève la terre. Tel qu'il est aujourd'hui, le musée
informe le public des phénomènes planétaires et régionaux et poursuit des
travaux de recherche approfondie dans divers domaines scientifiques.
Le Musée des sciences de la terre est un établissement scientifique éducatif
d'un type nouveau. I1 a été créé avant tout à des fins d'enseignement, en vue de
former des spécialistes hautement qualifiés et de grande culture. Un matériel
documentaire important complète l'exposition. A côté des vitrines, de multiples
diagrammes, cartes, coupes, profils et schémas expliquent les origines des
objets présentés, le mécanisme de leur développement, leurs causalités et leur
répartition géographique. Des paysages peints par des artistes éminents donnent
une représentation graphique des phénomhes de la nature. L'unité du contenu
de l'exposition et la cohésion du mode de présentation des objets, des graphies
et des œuvres d'art invitent à l'étude de sujets scientifiques, ce qui constitue une
forme nouvelle d'enseignement.
La plupart des sujets traités se rattachent aux cours et séminaires de l'Uni-
versité de Moscou et d'autres établissements d'enseignement supérieur du pays.
60 Boris Savel'ev

L'activité du musée s'exerce principalement dans trois domaines : l'enseigne-


ment, la recherche scientifique (fig. j z ) et la diffusion des connaissances. Ces
trois sortes d'activité permettent au musée, d'une part, d'établir de nombreux
contacts avec des savants soviétiques et, d'autre part, de trouver une large
audience parmi les catégories les plus variées du public.
L'activité scientifique du musée comprend l'étude théorique des thèmes
d'cuposition, des travaux de laboratoire, et des expéditions sur le terrain. La
variété des sujets traités et leur complexité nécessitent un personnel composé
de spécialistes hautement qualifiés dans les divers domaines des sciences
naturelles.
Le musée est systématiquement amélioré et complété car les renseignements
concernant notre planète continuent d'affluer. Les dernières doctrines, hypo-
thèses et idées sur la structure et la composition des géosphères et sur leur
développement se reflètent dans l'exposition. De très importantes dkouvertes
ont été faites ces vingt dernières années en Arctique, en Antarctique, dans les
océans et dans l'espace circumterrestre. Les recherches entreprises au cours de
l'Année géophysique internationale et de l'Année internationale du soleil calme
ont fourni de précieux renseignements. Pour en rendre compte, il a fallu trans-
former en partie le musée. E n I 96 I, une nouvelle section intitulée Origine et
structure de la Terre a été ouverte. Cette même année, les collections de paléon-
tologie ont été réorganisées selon un mode d'exposition monographique et
stratigraphique, les sections traitant des processus endogènes et exogènes et de
la paléogéographie de la genèse de l'homme ont été sensiblement agrandies,
et des cartes uniques ont été mises au point telles que : Les fiziizéraax zttiles
détectés en URSS, L a composìtioiz dzt sol dans la partie eztropéeme de L'URSS, etc.
P Pour renouveler et compléter les collections du musée, le personnel participe
1vUZEJ ZEMLEVEDENIJ.4 hfOSKOVSKOG0
GOSUDARSTVENNOGO UNIVERSITETA, à des expéditions organisées par diverses facultés. La combinaison des travaux
Moskva. Un membre du personnel d'exposition et de recherche est pour lui un important facteur de progrès scien-
scientifique du musée ttudie des os de
mammouth. tifique. Les résultats des recherches sont présentés non seulement dans les
expositions du musée (fig. j3), mais aussi dans les articles publiés dans
diverses revues scientifiques, et dans le bulletin annuel du musée, intitulé Lca
viu dc la Terre.
Le Conseil savant du musée, divisé en conseils de géologie et de géographie,
est chargé d'examiner les plans annuels et perspectifs d'exposition et d'enseigne-
ment, et d'évaluer les résultats des travaux de recherche et autres activités du
personnel.
Actuellement le musée comprend les sept sections suivantes : I. Les origines
et la structure de la Terre (fig. 14); 2. Les processus endogènes ; 3. Les proces-
sus de formation des minéraux ; 4. Les processus exogènes et l'histoire de la
Terre (fig. jj, j6) ; j. Les zones naturelles ; 6. Les régions physico-géogra-
phiques de l'URSS et du monde ; 7. La progression des sciences exactes et
naturelles à l'université de Moscou, E n plus, il dispose d'un laboratoire de
recherche et d'une section de préparation des expositions.
Étant donné l'étendue de l'activiti du musée en URSS et à I'étranger et le
niveau élevé des expositions et des conférences qu'il organise, le Ministère de
la culture et le Ministère de l'instruction supérieure et secondaire spécialisée
de l'URSS en ont fait une organisation de tête parmi les musées d'histoire natu-
relle et les musées des hautes écoles du pays. En cette qualité, il est appelé
à coordonner les travaux de recherche et les activités éducatives des musées
d'histoire naturelle du pays et à leur apporter une aide méthodologique. Le
musée organise régulièrement des consultations avec le personnel des musées
dont il est garant. I1 resoit en stage des membres du personnel scientifique des
musées régionaux d'histoire naturelle. I1 organise aussi des séminaires natio-
naux en vue de coordonner la recherche scientifique, l'enseignement dispensé
aux écoliers et étudiants, la vulgarisation scientifique, l'élaboration d'une
méthodologie et de techniques modernes pour le montage d'expositions scien-
tifiques, d'intensifier la collecte du matériel d'exposition.
Le Musée des sciences de la terre de l'université de Moscou 61

13
h1UZEJ ZEhfLEVEDENIJA b~OSKOVSItOG0
GOSUDARSTVENNOGO UNIVERSITETA,
Moskva. Public devant les vitrines
consacrtes aux recherches dans l'Arctique.
J'f
MUZEJZEMLEVEDENIJA h I O S K O V S K O G 0
GOSUDARSTVENNOGO UNIVERSITETA,
hloskva. Partie de l'exposition consacrke
à l'écorce terrestre et à l'espace proche de
la terre.
JI, r6
hIU2EJ ZEhfLEVEDENIJA bIOSKOVSKOG0
GOSUDARSTVENNOGO UNIVERSITETA,
Moskva. Exposition sur la vie aux temps
prthistoriques.
62 Boris Savel'ev

Il appartient également au musée de coordonner l'étude de problèmes


d'actualité et de présenter ceux-ci dans ses expositions. Les niusées régionaux
participent, eux aussi, à cette activité. Parmi ces problèmes il convient de citer
celui des ressources naturelles auquel se rattache celui de la protection de la
nature et de sa transformation, les problèmes de l'espace terrestre, des océans.
Les expositions de ce musée central doivent expliquer les mesures scientifiques
et administratives qu'il convient de prendre pour assurer une exploitation
judicieuse des ressources naturelles, notamment l'ensemble des tâches d'ordre
géographique nécessaires à leur mise en valeur, l'amélioration des méthodes
statistiques pour leur évaluation et l'intensification de la régénération de celles
qui peuvent être régénérées. La coordination de la vaste activité scientifique
des musées d'histoire naturelle permettra d'évaluer les ressources naturelles -à
l'échelle planétaire et régionale, d'élaborer les principes de leur exploitation
rationnelle, compte tenu de l'accroissement des populations et des besoins de
l'homme. Jusqu'à maintenant, les efforts de l'homme étaient essentiellement
orientés vers l'utilisation des ressources naturelles. Peu d'attention était
accordée à leur régénérescence, bien que ce soit un problème de première
importance. Selon la loi fondamentale de la vie, cette régénérescence doit
devancer l'accroissement des populations dont les besoins augmentent à mesure
que s'élève leur niveau culturel.
Les musées d'histoire naturelle sont appelés, par leurs expositions, à donner
un point de vue optimiste sur la nature et à démontrer que, à condition que
ses ressources soient scientifiquement exploitées, celle-ci peut assurer à l'homme
un niveau de vie normal même quand la population sera bien plus nombreuse
qu'à notre époque.
Chaque année, environ ~j o00 étudiants des facultés de géologie, de géo-
graphie, de biologie et de pédologie de l'Université de Moscou et d'autres
écoles supérieures de la capitale et d'ailleurs suivent des cours au musée
(fig. ~7), des centaines d'enseignants et autres spécialistes y font des stages de
recyclage et de formatiOD avancée. Les méthodes d'enseignement les plus
modernes y sont appliquées. Plus de 1 5 o00 écoliers visitent chaque année le
J7
MUZET ZEMLEVEUENITA MOSKOVSKOGO musée et y assistent à des conférences.
G O S U ~ A R S T V E N N O G O ÜNIVERSITETA, Le musée poursuit également une intense activité de vulgarisation scien-
Moskva. Etudiante préparant un travail
personnel en vue d'un examen. tifique. On peut y entendre des conférences sur des thèmes tels que (( Les
météorites et l'exploration de l'espace D, (( Déjections volcaniques, séismes et
exploitation des richesses naturelles de l'écorce terrestre D, (( Régions polaires
du monde et glaciers explorés par des savants soviétiques n, Les minéraux et
leur utilisation dans l'économie nationale D, (( Le développement de la vie sur la
Terre D, K Les mers, leurs richesses et leur mise en valeur )), ((Le sol et sa
fertilité D, (( Les zones naturelles de l'URSS et leur mise en valeur D, (( La nature
doit s'enrichir D, (( Les ressources naturelles de l'URSS et leur mise en valeur D,
(( Quoi de nouveau dans la nature de l'URSS ? D, etc. Le musée resoit chaque

année la visite de plus de I 5 0 o00 Soviétiques venus de différentes régions du


pays et de plus d'un millier de spécialistes et touristes étrangers.
Les sept sections du musée comptent 290 stands d'exposition avec des mil-
liers de documents graphiques. Les spécimens d'histoire naturelle sont groupés
en plusieurs centaines de collections thématiques qui comprennent des dizaines
de milliers d'échantillons géologo-minéralogiques, des centaines de mono-
lithes et spécimens de sols et une multitude d'herbiers, d'animaux empaillés et
de préparations zoologiques. Au-dessus des stands d'exposition, une collection
de tableaux d'histoire naturelle est présentée, 240 au total. Dans les salles,
90 bustes et bas-reliefs ainsi que 4 j peintures représentent de grands savants
de notre pays et de l'étranger.
[TrLlrltlit du mm]
Le nouveau Musée zoologique u 1

de Copenhague
Bent Jmgensen

Pendant les douze mois qui ont suivi son inauguration le z novembre 1970~le
nouveau Musée zoologique de Copenhague (fig. j 8 , j 9 ) a resu 460 o00 visiteurs
- presque autant qu'en avait accueilli en dix ans le vieux musée, qui avait
fermé ses portes en 1967.
Pour une ville d'un million d'habitants, ce chiffre est impressionnant. I1
montre que la direction du musée était fondée à penser que, comme les autres
moyens d'information de masse - la ttlévision, la radio, les livres, les jour-
naux, etc. - un musée n'attire les foules que si son message est exprimé d'une
fason que l'homme de la rue puisse comprendre. Quand le musée est un musée
de la nature, il doit absolument être en mesure de communiquer les connais-
sances dont dépend, entre autres choses, notre aptitude à conserver à l'environ- 18
UNIVERSITETETS ZOOLOGISK MUSEUM,
nement la qualité voulue. Une initiation élémentaire de la population aux lois IGabenhavn. Le musée dispose, aux deux
de la biologie et aux relations naturelles peut être le point de départ d'une derniers & t a pde cet immeuble situt dans
le parc de YUniversitC, d'une surface de
volonté politique de traiter ce qui subsiste de notre environnement comme j 590 metres carrts pouvant servir à des
l'exigent les principes de l'écologie. expositions (1970).
Pour créer cet état d'esprit, le Musée zoologique de Copenhague a presque
entièrement renoncé aux méthodes d'exposition en usage, traditionnellement,
dans les musées européens d'histoire naturelle et en particulier dans le vieux
Musée de Copenhague. Lorsque ce dernier ouvrit ses portes le z novembre I 870
-exactement un siècle avant l'inauguration du nouveau -il avait essentielle-
ment pour objet de présenter des animaux. Entre I 870 et 1970, notre connais-
sance de la vie animale a progressé à tel point que nous avons dtsormais beau-
coup à offrir dans des domaines où les zoologistes du X I X ~siècle arrivaient les
mains à peu près vides.
Le musée ne recourt à la présentation systématique traditionnelle de la . / . - . . . '

faune - qui groupe les mammifères, puis les oiseaux, les poissons, etc., en des J9
UNIVERSITETETS ZOOLOGISK MUSEUM,
points différents - que dans ce que nous appelons les collections systématiques Ibbenhavn. Cette salle, d'une surface de
33 j metres carrés, devait abriter l'exposition
d'étude. Ces collections offrent un apersu tridimensionnel clair et complet du permanente du musée sur L a f)ie amkale
monde animal du Danemark, dont n'importe qui -une personne, par exemple, dans les océam (1969).
qui a vu un oiseau inconnu ou trouvé un coquillage curieux lors d'une prome-
nade du dimanche - peut faire son profit. Des étudiants en zoologie qui
peuvent répondre aux questions, identifier les animaux et, d'une manière géné-
rale, aider les visiteurs, sont attachés à ces collections, qui sont un centre d'acti-
vités très utiles, où même les enfants sont accueillis à bras ouverts. Les objets
exposés peuvent être copiés, dessinés ou peints (fig. do), des livres et des pério-
diques sur les animaux et la nature sont aussi à la disposition des visiteurs. Ces
collections d'étude offrent aussi un cadre où l'on peut organiser, pour les
enfants, des jeux passionnants de détection et de découverte.
Quiconque veut être sûr de voir tel ou tel animal de la faune danoise doit
visiter les collections d'étude, car les autres expositions permanentes du musée
ont essentiellement pour thème central des animaux destinés à illustrer certains
phénomènes biologiques.
Lorsque le musée fut ouvert, en novembre I 970, on n'avait encore organisé
que le premier groupe d'expositions permanentes. Jusqu'ici, toutes ces expo-
sitions ont eu pour thème la faune du Danemark. Dans celle qui est appelée
Le m o i d e atimal du Datienzark, le visiteur se promène dans des paysages danois
ou parmi des reproductions de biotopes mettant en scène la faune des bois, des
64 Bent Jorgensen

60
UNIVERSITETETS ZOOLOGISK MUSEUM,
Kobenhavn. Dans les collections d'étude
du musée ouvertes au public, un
département spécial prête aux jeunes des
livres, des revues et des modbles à
dessiner, grandeur nature.

landes, de la côte, de la mer, des lacs et des cours d'eau, des prés, des champs
et des villes. Pour que le visiteur sache exactement où il se trouve, chaque
paysage est présenté dans un diorama qui cherche à en dégager l'atmosphère.
La section consacrée à la faune forestière danoise présente le diorama d'un
61, 63
ZOOLOGISK
UNIVERSITETETS MUSEUM, bois de hêtres en juin ; on garde aux feuilles leur couleur verte et leur fraîcheur
& b x h a v n . Ce diorama ouvert prksente et des rayons de soleil persant le feuillage des arbres font sur le sol des effets
une image stylisée de la vie animale dans
les divers biotopes d'eau douce (1970). d'ombre et de lumière. Une technique tout à fait nouvelle de construction de
Le nouveau Musée zoologique de Copenhague 65

6.2
UNI'ITERSITETETS ZOOLOGISK MUSEUM,
ICmbenhavn. Diorama représentant un
bois de hêtres au Danemark, en juin ; on a
utilisé une technique nouvelle de
construction de plans à l'aide d'Cléments
photographiks éclairts du fond (1970).

plans à l'aide d'éléments photographiés crée l'illusion de plonger le regard


dans les profondeurs des bois (fig. 62). Une technique analogue se retrouve
dans le diorama d'un paysage d'eau douce, à travers lequel le visiteur circule
sur un pont jusclu'en son milieu et peut laisser errer son regard vers un horizon
de marais, de lacs et d'îlots, sans avoir besoin de verres spéciaux. Ce diorama
ouvert de la vie animale au bord de l'eau, agrémenté du chant du rossignol et
du croassement des grenouilles, est idyllique (fig. 6r, 63). Le visiteur en sort
66 Bent Jorgensen

6,
UNIVERSITETETS ZOOLOGISK MUSEUM,
K~benhavn.La vitrine consacrée aux
(( Ennemis de la souris )) montre comment
on peut expliquer les lois biologiques en
quelques mots à l'aide d'objets d'exposition
instructifs.
66
UNIVERSITBTETS ZOOLOGISK MUSEUM,
Ihbenhavn. Le panneau sur (( La faune
souterraine )) illustre - entre autres sujets
- la biologie de la taupe. En touchant une
taupe empaillée, le visiteur peut constater
par lui-même comme sa peau est lisse et
commmt
. .-
elle lui permet de se déplacer
aussi facilement en avant qu'en arrilrc
dans ses galeries souterraines.
Le nouveau Musée zoologique de Copenhague 67

67
UNIVERSITETETS ZOOLOGISK hfUSEUhf,
ICobenhavn. L’exposition temporaire,
en datage, (I 97 I 172) présentait les
Aiai??~asr.~
espkces en voie de disparition au Danemark
- illustration de la destruction progressive
de la nature (1971).

pour se trouver face à la hideuse réaIité d‘une mare nauséabonde, pleine de 68


poissons morts et de boites de conserve rouillées, tandis qu’une inscription lui UNIVERSITETETS ZOOLOCISK MUSEUM,
ICobenhavn. L’exposition temporaire,
annonce que la génération qui nous suivra devra aller dans un musée pour Anihaiix etz datger (rg71/72) montre que le
apprendre ce qu’est la nature si la nôtre n’arrive pas à mettre un terme à la bruit des moteurs des navires chasse les
marsouins. Les visiteurs peuvent
pollution. personnellement entendre des
enregistrements qui montrent comment les
L’exposition est agencée de telle sorte que tous les stands, toutes les vitrines, sons émis par ces animaux sont couverts
toutes les planches, soient évocateurs par eux-mêmes. Mais on s’est attaché, en par le bruit des moteurs.
même temps, à en montrer l’interdépendance de fason que le visiteur pergoive
la complexité des relations de temps et de lieu existant dans la nature. Au dio-
rama de la faune forestière, par exemple, il voit d‘abord, dans une première
vitrine, comment l’insecte adapte sa couleur à celle du feuillage ; une autre
68 Bent Jorgensen

présente des araignées et leurs méthodes de chasse ;il apersoit ensuite plusieurs
petits oiseaux insectivores et, enfin, un épervier au nid. Chaque élément du
diorama est évocateur en lui-même, mais la succession des diverses parties
révèle le mécanisme de la chaîne alimentaire, où l'oiseau de proie vit de petits
oiseaux, qui vivent d'insectes divers et d'araignées, qui vivent eux-mêmes
d'insectes plus petits. Vient ensuite un autre stand, où la signification biolo-
gique de cette chaîne alimentaire est expliquée à l'aide de signaux lumineux
(fig. 64); il illustre l'incidence de l'emploi des insecticides sur le taux de nata-
lité chez les oiseaux de proie, bien que ces prédateurs ne se nourrissent pas
d'insectes.
La visite de l'exposition Le inonde animd dzi Danemark donne un aperrp de
l'ensemble de cette faune, des protozoaires aux cervidés, apprend beaucoup sur
la relation des animaux entre eux et avec leur habitat, et aide à comprendre à
quel point une intervention profonde de l'homme - en bien ou en mal -
a affecté le milieu de vie naturel du Danemark.
* Deux expositions permanentes en préparation - D 'un pôle Li l'autre et Les
océam - conduiront les visiteurs à travers le monde, pour leur montrer
comment les animaux s'adaptent aux conditions de vie très diverses des pro-
fondeurs de l'océan et des différentes zones climatiques. En outre, une grande
exposition permanente mettra en lumière le thème essentiel sous-jacent à toutes :
la place de l'homme dans la nature et ses devoirs envers elle.
Une partie du musée est réservée à ce qui constitue une présentation suivie,
par l'image et par l'objet, de questions d'intérêt biologique (fig. 6,r, 66). En
1971172, on a organisé une exposition temporaire sur la faune en voie de dis-
parition au Danemark, évocatrice de la destruction de la vie dans le milieu
naturel (fig. 67, 68). En 1972173, une autre exposition aura pour thème la
. menace qui plane sur la vie animale dans le monde. A la différence des présenta-
tions permanentes, ces expositions spéciales, qui changent fréquemment,
apportent toujours du nouveau, qui élargit les connaissances des visiteurs régu-
liers du muste sur le milieu naturel où nous vivons et dont nous sommes tri-
butaires.
[Traduii dtt danois]
Le Musée des tropiques, Amsterdam
Wilhelmina H. Ka1

Bien qu’il doive être considéré comme un musée d’ethnologie, le Musée des
tropiques occupe dans cette catégorie une place particulière. Comme le Musée
d‘outre-mer de Brême, par exemple, ce fut à l’origine un musée des colonies
ayant pour but général de rassembler et de diffuser des connaissances concer-
nant les territoires (néerlandais) d‘outre-mer, et pour but particulier d‘agir en
faveur des intérêts commerciaux, agricoles, industriels et autres découlant des
possessions coloniales, aussi bien pour la métropole que pour les colonies.
Le Musée des tropiques, alors nilusée des colonies, fut fondé à Haarlem en
1864. En 1910, il fut transféré à Amsterdam. Quarante ans plus tard, en 1950,
en raison de la modification des rapports entre les Pays-Bas et ses ex-colonies,
ses objectifs furent modifiés et étendus aux régions tropicales et subtropicales
en général.
Dès sa fondation, le Musée des tropiques a donc toujours été un musée qui
s’efforce de rassembler des informations actuelles et de donner une image plus
ou moins complète des sociétés non occidentales, en prêtant avant tout une
attention particulière au processus d’acculturation.
II veut présenter une image globale de la vie quotidienne de l’homme dans
le monde tropical et subtropical qui évolue si rapidement ; il veut donner une
image des problèmes devant lesquels cet homme se voit placé dans sa lutte
pour une existence meilleure et de l’aide que l’occident lui apporte dans ce
domaine, ou qu’il peut et doit lui apporter.
Dans les expositions comme dans les activités annexes telles que les confé-
rences, la projection de films, les visites guidées, les discussions, les programmes
pour enfants, c’est l’homme qui constitue le centre d‘intérêt.

69
TROPENMUSEUM, Amsterdam. Exposition
temporaire, 1966 : Le riz, fouci potidiett.
La culture du riz en terrain sec dans la
forêt vierge est reprtsentée au moyen de
découpages d’agrandissements
photographiques d’arbres entre lesquels
on a dispos6 de vrais plants de riz et
d‘autres plantes tropicales.
70 Wilhelmina H.Ka1
\

\Le Musée des tropiques, Amsterdam

71 73 /Y
Quelles sont les possibilités dont l'homme dispose dans sa situation spéci- 73
TRoPENhfusEu?d, Amsterdam. Exposition
fique, comment répond-il au défi du milieu physique, culturel et social qui temporaire, 1971 : Les Samos, IIN peuple
l'entoure ? Cette idée directrice, projetée autant que possible sur l'arrière-plan de la sauane en uoie de déveZoppement. Le
forgeron au travail.
du passé, dans l'actualité et orientée vers l'avenir, forme la base des expositions 74
plus ou moins permanentes aussi bien que des expositions temporaires. TROPENWUSEUM, Amsterdam. Exposition
temporaire, 1971 : Les Samos, gin peiqle
Mais les sociétés deviennent de plus en plus complexes et les liens d'inter- de La sakrane en mie I développement.
dépendance à l'intérieur de ce monde ne cessent de se renforcer. Cela pose des Présentées cóte à cóte, la façon
traditionnelle de coudre les vétements
problèmes croissants à une institution comme le Musée des tropiques, qui veut (découpage photographique) et la manière
toujours montrer l'actualité. En effet, des sujets tels que l'urbanisation, l'indus- dont, de plus en plus, les Samos vont
coudre : A la machine. A l'arrikre-plan sont
trialisation, l'emploi, pour n'en mentionner que quelques-uns qui sont caracté- projetées des diapositives qui donnent une
ristiques de beaucoup de sociétés actuelles des régions tropicales et subtropi- image gtnérale du village et des habitants.
7)'
cales, se prêtent à peine à une présentation niuséographique, c'est-à-dire sous TROPENMLJSEUn;I, Amsterdam. Exposition
la forme d'expositions ayant pour base des objets authentiques. Les photo- temporaire, 1968 : L'Inde d'atdjozird'bzLi.
La production d'objets en papier mâché
graphies, les films, les bandes sonores prendront une importance croissante, est représentée par les différents stades de
bien qu'ils doivent rester des moyens auxiliaires permettant une représentation fabrication et d'ornementation d'une petite
boîte en papier mâché et par la présentation
aussi diverse, aussi précise et aussi objective que possible. des matériaux nécessaires.
Les expositions temporaires organisées dans le hall central (800 mètres) sont
72 Wilhelmina H. Ka1

un exemple frappant de cette tendance. Ces grandes expositions qui changent


généralement une fois par an portent le plus souvent sur une région ou un
thème, par exemple : Le ri?, s o i ~ qz~otidiex
i (fig. 69, 7 0 ) , Artisanat e f com~ierre
dans le monde arabe, Les Samos, zlnpez@le de la sauaize en voie de détwloppe,vietif (fig. 71-
74), L’Inde d’az!jozdhai (fig. 7~-77), etc.
C‘est surtout lors de l’exposition de 1971 sur les Samos, un peuple de Haute-
Volta, que le personnel du musée s’est rendu compte de la difficulté de donner
au grand public, d’une part, une idée de la manière dont un peuple technologi-
quement peu développé dépend de l’environnement naturel et, d‘autre part, de
faire comprecdre les causes et les raisons d’un développement aussi lent aux
yeux d‘un Occidental.
Cette exposition vise dans la mesure du possible à établir une communication
entre le visiteur occidental et le Samo, créateur et utilisateur des objets exposés,
à lui montrer comment les Samos, représentés par des agrandissements photo-
graphiques (zoo y: 200 cm) et des diapositives, peuvent à grand-peine se
procurer le minimum nécessaire pour subsister, à moins de partir vers la ville
ou les pays voisins pour travailler dans l’industrie. Ces départs ont toutefois
des conséquences pour ceux qui restent, pour les familles qui devront une fois
de plus se passer de bras pour travailler la terre.

77 78
On peut se demander s’il n’est pas préférable de filmer un tel sujet. Cela
paraît effectivement possible. Toutefois, l’exposition est irremplasable en ce
sens qu’elle permet au visiteur de se familiariser individuellement et à son ,
propre rythme, par exemple avec les problèmes qui se posent aux Samos, mais
aussi avec leur ingéniosité, qui s’exprime notamment dans leur artisanat, avec
leur religion, leur musique, leur danse. De tels aspects, qui forment un tout
fonctionnel, se prètent particulièrement à une exposition. Dans une exposition,
le visiteur peut se placer dans la situation montrée, s’identifier aux personnages,
alors que dans un film il reste toujours une distance entre le spectateur et les
personnages qu’il voit sur l’écran.
Un film ou une série de diapositives permet de donner un aperp. Dans une
exposition où il ne s’agit pas en premier lieu de montrer de beaux objets mais
de présenter un problème, comme chez les Samos celui des possibilités et des
difficultés du développement de l’agriculture dans la savane, une vue d‘ensemble
succincte est indispensable, surtout dans le cas d‘une exposition importante.
C‘est ce qui ressort également d‘une enquête menée en 1971/72 au Musée
des tropiques. Cette enquête visait à déterminer, d‘abord, dans quelle mesure
les informations que le musée diffuse par les expositions et les moyens audio-
visuels atteignent le visiteur et, ensuite, dans quelle mesure ces informations
exercent une influence favorable sur l’idée que le visiteur se fait des hommes
des régions tropicales et subtropicales, et par conséquent du problème du
développement.
>‘
!
i
\
,Le Musée des tropiques, Amsterdam 73
,

76
TRoPm”bEukr, Amsterdam. Exposition
temporaire, 1968 : L ‘hide d’aijhrd’hi.
Autant que possible les objets sont montrés
tels qu’ils sont utilisks. Un métier à tisser
est exposé dans cette petite maison.
77
TROPENMUSEUM, Amsterdam. Exposition
temporaire, I 968 : L’ltide d’azQor4rd ’hui.
Le forgeron ambulant au travail. Tous les
objets exposés sont authentiques, ce que le
visiteur peut vtrifier lui-m2me sur des
agrandissements photographiques.
7J
TRoPEmwsEuh5, Amsterdam. Exposition
temporaire, 1968 : L’Inde d’azjoirrd’biii. Les
diffkrences dans le vitement en Inde sont
prCsenttes au moyen de mannequins-
silhouettes dont certains sont placGs sur
une plate-forme qui tourne lentement. Des
photos montrent différentes formes de
moyens de transport et de construction.
En appuyant SUT le bouton dispos6 sur la
boite visible à l‘avant-plan, le visiteur peut
entendre la musique du charmeur de
79 serpent.
L‘enquête a été faite, entre autres, à l’exposition consacrée aux Samos. Un 79
TROPENMUSEUM, Amsterdam. Exposition
premier groupe a été interrogé avant la visite, un deuxième groupe après la temporaire, 1968 : L’Inde d’atjowd’hiri. La
visite et un troisième groupe après que le parcours de la visite eut été modifié vie villageoise en Inde est montrée au
moyen de dtcoupages d’agrandissements
de manière à présenter d‘abord sur l’écran multiple (sept écransr le montage de photographiques, de quelques
diapositives résumant ce que l’exposition se proposait de montrer. De plus, le reproductions de maisons et de certains
éléments authentiques : ici le puits.
texte écrit avait été remplacé dans ce cas par un texte parlé. I1 est intéressant de
constater que c’est de ce dernier montage que presque tous les visiteurs ont tiré
le plus d‘informations au sujet de cette exposition.
La relation entre l’homme et son milieu, aussi bien physique que culturel et
social, a souvent une grande influence sur son mode de vie. Cela est valable
notamment dans les pays tropicaux et subtropicaux dont le Musée des tropiques
s’occupe en premier lieu.
Je suis persuadée que les musées ont un rôle à jouer pour faire connaître les
problèmes qui découlent de ces relations, mais ils doivent le faire de la manière
qui leur est propre, c’est-à-dire par la présentation d’objets authentiques,
étayée et renforcée au moyen de photographies, de films, de textes explicatifs, etc.
I Cela impose des restrictions aux musées, mais dans ces limites leur façon de
présenter les choses est unique en son genre. En dehors de cela, ils devront lais-
ser la communication avec le grand public aux moyens tels que la tklévision,
la radio, la presse. Ce qui ne veut pas dire que les musées ne peuvent pas col-
laborer étroitement avec ces organes d’information, voire posséder leur propre
studio de télévision ou publier un bulletin.
L’important est que les éléments spécifiques et particuliers d’une exposition
de musée ne cèdent pas le pas aux.écrans de télévision, aux journaux lumineux,
aux projections de films et de diapositives sur écrans multiples. [ Traditit da néerlandais]
74

L'exposition Man in A f y i c d ,
au Musée américain d'histoire
Thomas Dominic Nicholson naturelle, New York
81
THEAhrBRICAN 1hfUSEUhr O F NATURAL
HISTORY, New York. L'homme en Afriqzie.
Vue prise pendant l'amknagement du hall,
depuis la galerie du haut, en direction de
l'entrée sud. L'étendue de la surface des
toits aide à masquer la galerie d'en bas et
leur forme contribue à créer la couleur
locale. On voit au premier plan la hutte A,
qui contient le diorama de la savane, et au
deuxième plan la hutte B, où se trouve le
diorama de la foret équatoriale. A droite,
la hutte C renferme des vitrines montrant
les symboles du pouvoir et de l'autoritt:
dans les structures sociales depuis la famille
jusqu'au royaume, tandis que dans la
petite hutte D, à gauche, sont présentés des
objets qui illustrent l'importance du
monde des esprits. La case ronde située
tout au fond est la hutte E, qui contient le
diorama du désert, face à l'entrée sud ;
derrière le diorama se trouvent des vitrines
de grandes dimensions consacrées aux
costumes et à la danse.

, chaque entrée de l'exposition permanente Man in Africa (L'homme en


4
Afrique) est apposée une inscription qui en résume ainsi le message :(< L'Afrique
est un continent de contrastes. De même que son paysage peut brusquement
passer de la montagne neigeuse au désert brûlant, à la savane et à la forêt, les
caractères physiques et l'organisation sociale des Africains varient avec le cli-
mat. Sans pouvoir dire de l'environnement qu'il détermine les caractères
so physiques ou la culture de l'homme, on ne peut nier qu'il contribue consi-
THEAMERICAN MUSEUM OF NATURAL dérablement à faire de l'humanité ce qu'elle est. L'être humain est, en fait, partie
HISTORY, New York. L'homme et! Afrique.
Plan du hall, montrant la disposition des intégrante de la nature. Nous essayons ici de donner une idée de la relation
vitrines, des dioramas et des différentes entre les principales sociétés africaines traditionnelles et les divers milieux
zones écologiques. Les sections
rectangulaires sont subdivisées en alvéoles naturels : déserts, forêts, prairies et vallées. La société africaine a toujours été
relativement isolés où plusieurs groupes le produit d'une interaction dynamique de l'homme et du monde qui l'entoure ;
peuvent recevoir des explications.
I. Entrée nord-est ; 2. Couloir conduisant
la tradition est en grande partie oubliée, mais il en subsiste assez pour assurer
au foyer de la salle de spectacles ; la vitalité et l'individualité des jeunes nations. D
3. Expositions temporaires ; 4. Vallées
fluviales ; 5 . Savane ; 6 . Forêt équatoriale Telle est la grande idée dont cette exposition voudrait être l'interprète, en
et régions boisées de l'Ouest 7. Désert; présentant des chefs-d'œuvre de l'art africain provenant des collections du
8. Entrée sud ; 9. Affiches
photographiques ; IO. Hutte A : diorama de musée qui compte plus de 40 o00 objets, dans un décor mettant en lumière le
la savane ; I I. Hutte B : diorama de la rapport entre ces artefacts et l'homme, et entre l'homme lui-même et son envi-
forêt ; 12.Hutte C ; 13. Hutte D : le monde
des esprits ; 14.Hutte E : diorama du ronnement. Ces artefacts et leur cadre constituent un mode de présentation
désert ; I 5 . Costumes de cérémonies plus empirique que didactique, multidimensionnel plutôt que linéaire. Ils sont
d'initiation ; IG. Expositions temporaires ;
17. Arbre ; 18. Homme-léopard. l'expression concrète des formes traditionnelles des civilisations africaines, non
pas sur le plan de la tribu, mais par l'évocation d'Cléments du système social
tels que la famille et le droit coutumier. Les formes, les structures, les maté-
riaux, le son, les odeurs mêmes concourent à recréer les différents environnements.
On a l'illusion d'entrer dans un village africain. La fason dont sont placés
les dioramas (fig. 82-84) et disposées les vitrines évoque une enceinte où
se trouverait circonscrite la vie quotidienne. Plusieurs sections sont consues
pour rappeler la forme arrondie des habitations d'Afrique orientale (fig. RI).
Le tapis vert du sol, le rythme des mélopées africaines et des bouffées d'odeur
L'exposition r l 4 m in Africa, au Musée américain d'histoire naturelle, New York 75

évoquant celle de l'herbe ou d'un sous-bois renforcent l'impression éprouvée 82


THEAMERICAN MUSEUM OF NATURAL
par les sens. L'éclairage et les couleurs sont nuancés de fason à souligner le HISTORY, New York. L'homme en Afriqne.
(( Chasseur de la forit D, diorama de la
passage d'un environnement à un autre. D'autre part, le souci qu'on a eu de
hutte B, section forit équatoriale, grandeur
présenter les artefacts de fason à mettre en valeur, dans chaque environnement, nature. La scène représente la for& de
certaines institutions sociales, religieuses, politiques, économiques et familiales, l'Ituri, dans le nord-est du Congo, sur la
rive nord de la riviere Lelo. Le feuillage
donne son unité à l'ensemble (fig. Sj-88). et les arbres viennent de la forêt de
La conception et la présentation diversifiées des objets exposés ne contri- Budongo (Ouganda), qui fait suite à celle
de l'l'turi. Les Pygmées mbuti de l'Ituri
buent pas seulement à créer une atmosphère, elles font aussi de cette exposition fournissent un exemple typique d'adaptation
un véritable instrument d'enseignement. Plusieurs groupes scolaires peuvent physique et sociologique au milieu. Leur
petite taille (1,45metre environ pour un
s'instruire simultanément en diverses parties de la salle sans se voir ni s'en- adidte) et leur peau assez claire leur
tendre, tandis que les étudiants et visiteurs isolés peuvent tirer profit d'autres permettent de se déplacer facilement sans
attirer l'attention. La société mbuti étant
sections, ou traverser l'exposition pour gagner d'autres parties du musée sans axée sur la chasse, peu d'outils sont
les gêner vraiment. L'acoustique, la ventilation et l'aménagement spatial ont nécessaires et l'on ne pratique ni
l'agriculture ni l'élevage. La cellule de base
été consus de fason à permettre l'enseignement collectif, sans pour autant sacri- est la famille ; cependant, l'effectif de
fier l'atmosphère ou affaiblir le thème général. chaque (( bande n est limité par
l'importance des ressources alimentaires
I1 est d'autant plus remarquable qu'on ait pu créer un climat s'harmonisant l o d e s . Tous les membres de la bande
avec les objets esposés et les environnements représentés que cette exposition peuvent partir à la chasse ensemble, mais
ils se divisent rapidement en petits
a été installée dans le plus ancien des vingt bâtiments communicants qui forment groupes : les hommes posent les filets et se
le musée, dont la construction a été achevée en 1878. L'organisateur, Henry tiennent à l'affût avec des lances, les jeunes
gens restent en arrière pour tirer des
Gardiner, membre du personnel du musée, a été gêné dans sa tâche, non seule- fleches, les femmes et les enfants
ment par la vétusté du bâtiment, mais aussi par les inconvénients d'un local rabattent le gibier vers les filets, cueillent
des champignons, des racines et des fruits
rectangulaire long et étroit (48 x ~j mètres), bordé par une galerie à une cer- ou récoltent du miel comme aliment
taine hauteur. Mais sa conception a été si ingénieuse que le visiteur ne s'aper- d'appoint. La bande ne doit pas rester
plus d'un mois dans la mime zone pour
Goit ni de la vétusté du bâtiment, ni de la forme de la salle, ni même de l'exis- Gviter la disparition du gibier.
tence de cette galerie (fig. Sa, SI).
L'élaboration du projet, les recherches et la sdection des objets ont été diri-
gées par Colin Turnbull, conservateur et spécialiste d'éthologie africaine, qui
fut le conseiller scientifique de l'exposition. Pendant les sept années qu'il fallut
pour organiser et installer l'exposition et bien avant même (en fait pendant
seize ans au total), Turnbull a étudié la vie tribale en Afrique, notamment à
l'occasion de cinq longs voyages dans diverses régions du continent. Une
grande partie des objets exposés ont été rassemblés spécialement pour
cette exposition par Colin Turnbull et W. Gurnee Dyer, vice-président du
76 Thomas D. Nicholson

83
THEAMERICAN MUSEUM OF NATURAL
HISTORY, New York. L'bomize en Afviqtfe.
(( Nomades du désert )), diorama de la
hutte E, section désert, grandeur nature.
La scene se passe au Maroc dans le
Saghru, au sud de l'Atlas, peu avant
l'aube en été. Souvent montagneux et
rocailleux plutôt que sablonneux, ce désert
peut paraitre sterile ; pourtant il nourrit
des moutons ou des chkvres, et l'on peut y
faire un peu de culture pres des oasis
auxquelles la fonte des neiges de la
montagne apporte de l'eau au printemps et
en éte. Les nomades berberes reprtsentés
ici ne restent que quelques jours au mSme
endroit, le temps d'en exploiter les
ressources ; quand les pâturages sont
tpuisés, ils sont obligts d'aller ailleurs. La
lutte pour la vie dans le désert amkne
chaque groupe à s'efforcer de dtfendre son
(( territoire )), ce qui entraîne des frictions
constantes et des risques de conflits. La vie
des nomades est fondte sur la famille,
mais les Berbkres se groupent souvent
sous la protection d'un chef, dont la
forteresse (ksar) leur sert de refuge en cas
de danger.
L'exposition Mata it2 Africa, au Musée américain d'histoire naturelle, New York 77

84
THEAXERICAN MUSEUM OF NATURAL
HISTORY, New York. L 'hoim/e em Afriqm.
(( Cultivateurs de la savane D, diorama de la

hutte A, section savane, grandeur nature.


La scène se passe dans le nord-est du
Kenya, au nord de Sigor, dans le rift, d'où
l'on aperçoit à l'ouest la falaise de
Goo mktres qui s'élève jusqu'au plateau de
Karimojong en Ouganda. Chez les Pokot
qui habitent cette rtgion, comme chez la
plupart des peuples de la savane,
l'agriculture est aussi importante que
l'élevage, sur le plan tconomique, mais ce
dernier est ttroitement associé à la notion
de richesse et de prestige et rattacht à des
valeurs religieuses. Une des activités
quotidiennes consiste à tirer sans douleur
une petits quantité de sang du cou des
jeunes bœufs, opération inoffensive pour la
bête puisque chacune n'est saignCe qu'une
fois tous les mois ou tous les deux mois.
L'agriculture est confiée aux femmes, mals
l'élevage est l'affaire des hommes. Ceux-ci
sont divists en groupes d'àge différenciés
par leur façon de parler et leurs v&tements,
chaque groupe ayant une fonction bien
définie. Plusieurs groupes peuvent
travailler ensemble comme c'est le cas lors
de l'opération représentée ici, mais ils ont
aussi des activités distinctes.
81
THEAMERICAN hIUSEUhl O F NATURAL
HISTORY,New York. L'homme e n 4 f i i q ~ e .
Des sculptures en bois tvoquent la religion
et la vie économique des Dogons, peuple
assez isolé habitant la savane (vitrine 84,
section dtsert). Etant bien adaptés à leur
milieu, les Dogons disposent de loisirs
qu'ils ont utilisés pour enrichir leur vie
religieusc plutót que pour édifier une
structure sociale complexe. Ils s'intéressent
davantage à la source de leurs moyens
d'existence qu'à la mise en œuvre de ces
moyens et ils forment des communautés
locales organisées de façon stable et
durable, sans avoir besoin d'une autoritt
centrale puissante. Les objets exposés ici
sont des statues d'ancctres (à droite et ?i
gauche au fond), un poteau de case
sculpté (deuxième objet à partir de la
gauche), des biitons de cértmonials (à
l'arrière-plan au centre), et un pot à beurre
pour les offrandes rituelles (au premier
plan à droite).

86
THE~ A I E R I C A NhlUSECW OF NATURAL
HISTORY, New York. L'homme et2 ktfiiqne.
Objets illustrant le rblc de l'esclavage et du
servage dans la vie traditionnelle africaine.
A gauche : poteau de case en bois sculpt6
(Mum) représentant un captif enchaini,
symbole de l'intégration des prisonniers
de guerre et des criminels à une nouvelle
famille, et plus tard du róle jout par la
traite des esclaves dans les petits royaumes.
Au centre : le Coran (Haoussa), symbole
de l'islam apporté aux peuples africains
par les Arabes en m&metemps que
l'esclavage. En haut à droite : coiffure en
bois sculpté (Ibo), montrant un captif
enchaîné par un Europten. En bas à
droite : bijoux en bronze (Yorouba) qui
ornaient les chevilles, les bras et le COLI
des serfs et des esclaves pour montrer la
richesse et la génerosité de leurs maîtres.

86
78 Thomas D. Nicholson

87 88

87 conseil d‘administration du musée. Pendant toute la durée des opérations,


THEAMERICAN MUSEUM O F NATURAL
HISTORY, New York. L’Bom.vze en A.friqm. Turnbull s’est ménagé le concours et les avis de personnalités et d’érudits
Bronze du Bénin (Dahomey) ; une afro-américains de la communauté new-yorkaise.
procession royale, où l’on voit un chef
entouré de serviteurs et de musiciens ; les Les autorités du musée étaient convaincues, en préparant cette exposition,
figurines ont environ I Z , ~centimktres de qu’elle offrait une occasion magnifique de remédier, en Amérique, à une pro-
haut. Ce groupe (vitrine 80, section forêt et
savane) illustre l’importance accordée à la fonde méconnaissance des modes de vie traditionnels africains. Pour arriver
musique, dans la société africaine : à ce résultat, on s’est attaché à montrer comment et pourquoi, dans différentes
celle-ci est jugée plus éloquente que le
langage, et elle crée un lien non circonstances, les divers peuples africains se sont adaptés à leur environnement
seulement entre les hommes, mais aussi d’une fason qui a permis leur survie, comment la société africaine a gagné ainsi
entre l’homme et les dieux ; c’est l’un des
meilleurs moyens dont on dispose pour se en force et en complexité et comment, en fait, une société africaine tribale a
faire une idée de la volonté des esprits et trouvé la stabilité et a acquis des caractéristiques morales et sociales souvent
pour se concilier leurs bonnes grices. La
musique accompagne tous les épisodes de considérées comme l’apanage du monde occidental.
l’existence, mais les rois sont Pour reprendre les termes de Turnbull, l’impression d’ensemble que Man h z
particulikrement conscients de ses
nombreux usages, par exemple pour attirer A-frica laisse au visiteur est sans doute celle de l’immense diversité du conti-
l’attention des foules à l’occasion des fêtes, nent africain - diversité de ses populations et de ses systèmes sociaux qui n’a
comme dans la scène représentée ici.
87 d‘égale que sa diversité géographique. Mais le visiteur qui pourra s’attarder
THEAMERICAN M~JSEUM OF NATURAL un peu à l’exposition en tirera mille enseignements qui l’éclaireront davantage
New York. L ’B0112me en Afrique.
HISTORY,
Détail de la vitrine consacrée aux sur le fonctionnement et la raison d’être des différents types de sociétés tradi-
((Danses et croyances n, section forêt tionnelles et sur la voie que chacune a empruntée pour apporter la meilleure
équatoriale : costumes pour les ctrémonies
d’initiation, grandeur nature. La danse fait solution possible au problème de sa survie.
partie intégrante de la vie religieuse L‘exposition a pour thème essentiel les grandes traditions du passé de
africaine, même lorsqu’elle semble avoir un
caractère uniquement récréatif. Le danseur l’Afrique, mais elle illustre également l’apport des influences extérieures à la
est parfois couvert de la tête aux pieds culture traditionnelle, dont témoignent manifestement beaucoup des objets
pour cacher son identité, car il devient un
ktre spirituel et doit renoncer à son exposés. Elle fait aussi sa place au présent. Près de l’une des deux entrées, une
humanité propre. Au premier plan, on voit série de photographies représentant l’Afrique moderne met en lumière les
un danseur kofyar (nord du Nigéria)
habillé de tissus non traditionnels problèmes liés au changement social ainsi que les effets du changement sur la
ressemblant au drapeau britannique, pour tradition. On a fait remarquer que, tandis que ses populations passaient si vite
augmenter la frayeur qu’inspire la danse
tourbillonnante de Junkai, esprit terrifiant du stade de la tribu à celui de la nation, l’Afrique voyait disparaître une grande
qu’il faut tenir à distance. Au fond à partie de son passé. Mais elle en garde assez pour conserver leur caractère
gauche, un danseur dodo de la rtgion des
Barawa (nord du Nigéria) est presque propre aux nations nouvelles et, dans le Nouveau Monde, conférer‘ leur indi-
entièrement recouvert de feuilles de vidualité aux Afro-Américains. Tout en étant surtout axée sur le passé, l’expo-
bananier ; il représente l‘esprit ancestral
de la mort. sition Ma% iiz Africa contribuera peut-être à une meilleure compréhension du
présent.
Plusieurs autres expositions permanentes ont été ouvertes ou prévues dans
le cadre des activités organisées pour le centenaire du Musée américain d‘his-
toire naturelle. L’exposition Alan in Africa a été inaugurée au cours de la Célé-
[Tradait de l’anglais] bration de ce centenaire en 1gG9.
79

L'écomusée de Marquèze, Sabres,


dans le cadre du Parc naturel rigional
des Landes de Gascogne
Franqois Moniot

Diverses considérations telles que l'intérêt historique et esthétique, la menace


de disparition par destruction ou altération, les possibilités pour le tourisme
et l'éducation, ont fait naître un plan de sauvegarde de l'habitat et de l'archi-
tecture rurale traditionnelle dans les Landes. L'ceuvre entreprise depuis plus
d'un demi-siècle par les Scandinaves et, à leur suite, dans de nombreux pays,
fournissait un exemple à méditer et à adapter au milieu landais. L'opération
menée aujourd'hui n'est pas tout à fait unique puisque d'autres régions (Armo-
rique, Brière) entreprennent des projets analogues, mais il est permis d'y voir
une expérience sans précédent en France par son ampleur et sa complexité. Les
sciences de la nature et les sciences de l'homme tendent en effet, pour la pre-
mière fois peut-être, à intégrer leurs programmes respectifs dans une œuvre
commune : la mise en évidence des relations de l'homme avec le milieu nature1
dans un pays nettement défini.

Historique du projet
L'idée d'un musée de plein air landais, si elle est neuve dans sa conception
actuelle, n'est pas absolument récente puisqu'un projet avait connu un début
de réalisation à Hossegor durant les années quarante à quarante-cinq. Elle fut
reprise en 1962 à Labouheyre sur la route nationale IO, principal axe routier
traversant le massif forestier landais, mais n'aboutit pas.
En 1968 enfin, le lancement d'un parc naturel régional asé sur la vallée de la
Leyre, au cœur de la Grande Lande, fournit l'occasion de repenser ce vieux
projet. L'élaboration du programme scientifique, technique et administratif est
alors demandée au Musée d'Aquitaine installé à Bordeaux, dont la vocation
régionale a été affirmée en 1962. Cette étude permet d'esquisser une première
typologie des bâtiments et de désigner plusieurs d'entre eux particulièrement
représentatifs et remarquables ; conclut à la nécessité d'implanter le musée sur
un airial, au cœur de la forêt et de la lande ; propose enfin un site toui à fait
caractéristique et bien conservé à Marquète, sur la commune de Sabres.

Base du programme
La région landaise a paru à double titre justifier la création d'un musée de plein
air. Elle se signale en effet par un type d'habitat original, dont l'airial est
l'expression la plus visible, et par une architecture, peut-être plus qu'ailleurs,
adaptée au milieu naturel.
L'aire de diEusion de cet habitat est le triangle compris entre l'embouchure
de la Gironde, celle de l'Adour et les confins agenais. L'airial désigne dans cette
région la vaste pelouse, en général non close, parsemée de chênes, au sein de
laquelle sont disséminées en ordre lâche une ou plusieurs maisons avec leurs
nombreuses dépendances. Cet ensemble constitue un environnement cohérent
et parfaitement démonstratif. Au sein de la lande, et aujourd'hui du N pignada D,
l'airial est un îlot privilégié où l'on s'efforqait jusqu'à une date récente de tout
produire pour la consommation courante.
L'architecture y est remarquable, tant par le plan er l'orientation des
80 FranGois Moniot

bâtiments que par les matériaux et la facture. Deux grands types de maions,
avec plusieurs variantes, coexistent.
Le premier, de plan approximativement carré dans la Grande Lande, comporte
un toit à trois eaux et une fasade sur pignon ouvrant à l’est généralement par un
auvent (fig. 89, 90). Le plan au sol est le plus souvent symétrique de part et
d’autre de deux pièces à feu. On peut y lire, comme en projection, la structure
socio-économique du pays, et y voir l’expression architecturale d‘une société
archaïque de type patriarcal d‘agriculteurs-pasteurs.
Le second présente une faGade sous mur goutterot et un plan rectangulaire
sous un toit à quatre pentes dont l’une descend en appentis à l’arrière (fig. 91).
Dans la quasi-totalité des cas, le bâtiment présente sa faGade principale au
levant et l’arrière aux vents dominants et aux pluies d’ouest. La technique de
construction accorde une place privilégiée à la charpente dont le réseau serré
s’étend du sol au faîte (fig. 92). Le remplissage est fait dans la plupart des cas
en torchis, parfois d’un empilage de fragments de tuileaux et briquettes de
remploi (fig. 94). Les bâtiments d’exploitation sont nombreux, allant du
très petit édifice (fig. 93, y), tel le poulailler perché, à des constructions plus
importantes, comme les parcs à faible pente couverts en tuiles-canal (fig. 9 8 ) ou
les bordes à toit aigu en chaume (fig. 96).

89 90
Conception générale
Dans un tel contexte, il a paru très vite essentiel de sauvegarder non seulement
des exemples des principaux types de bâtiments, mais également le site dans
lequel ils s’inscrivent : le choix de l’airial de Marquèze y incitait pleinement.
Sur ces bases a été précisée la conception d’un (( musée de l’espace D mon-
trant à un moment de l’histoire (la fin du siècle dernier approximativement) les
89 exploitations correspondant à sept maisons avec leurs dépendances et leurs
ECOMUSÉEDE MARQUÈZE,
Sabres. Maison
à trois eaux, en colombage et torchis, à terroirs, soit trente-sept Cdifices au total si l’on inclut les petits éléments. Les
pignon-façade avec auvent central, dite
agro-pastorale, datée I 824, en place sur exemples retenus, pour réduire au maximum l’artifice inhérent à tout transfert,
l’airial, restaurke en 1968-1970. proviennent uniquement de la Grande Lande et de ses marges, c’est-à-dire de la
%O
ECOMUSÉEDE MARQUÈZE, Sabres. Maison partie centrale des Landes où se trouve Sabres. A une collection de maisons, on
à trois eaux, à pignon-façade avec auvent a préféré la constitution d‘ensembles organiques reproduisant d‘anciennes
central, dite agro-pastorale, datke I 772,
provenant de Sabres - Le Mineur, ~
exploitations dont le cadastre de 1836 et les archives permettent d‘avoir une
transférée à Marquèze en 1970171. Etat à idée. D’oh le nom d‘écomusée, attaché à l’ensemble du Musée de Marquèze.
l’achat, en 1968, inoccupée depuis quinze
ans. Maisons et bâtiments d’exploitation recevront dès que possible l’équipement
Écomusée de Marcluèze. Sabres

domestique, artisanal et agricole sans lesquels ils perdraient une grande partie
de leur signification.
Cependant, les bâtiments ne constituent qu'un élément du musée de l'espace :
ils sont considérés comme des outils de l'exploitation du sol. Aussi les différents
paysages qui les entouraient, notamment les cultures, seront Cgalement pré-
sentés. I1 est prévu aussi, bien que cela pose des problèmes aigus, d'entretenir
une partie du cheptel indispensable au fonctionnement d'une exploitation
moyenne. Ce faisant on ne prétendra pas maintenir réellement en fonction de 9.2
production des exploitations archaïques, mais présenter quelques aspects essen- ECOMUSÉEDE MARQUÈZE, Sabres. Maison
i trois eaux, à pignon-façade avec auvent
tiels d'un type d'économie rurale afin d'en analyser le fonctionnement. Le central, datGe 1772,provenant de Sabres -
propos du musée de l'espace est la mise en évidence dans une perspective éco- Le Mineur. Travaux de remontage de la
charpente à Marquhe. Cliché pris depuis
logique de la transformation du milieu par l'homme et des échanges entre l'ani- une p i k e latérale vers l'auvent.
mal, le végétal et le minéral. Un programme aussi vaste ne peut être mis en 9.3
ECOMUSÉE
DE MARQUÈZE, Sabres. Four à
œuvre, on l'aura compris, que par une équipe pluridisciplinaire. pain, à proximitt de la maison datte 1824.
Le musée de l'espace n'illustrera qu'une période limitée et relativement En place sur l'airial, restaur6 en 1969/70.
récente de l'histoire : celle qui précède l'avènement de la société industrielle ;il gttail du matériau de remploi servant,
suppose donc à ses côtés pour être bien compris l'existence d'un musée du avec le torchis, au remplissage des pans
de mur : fragments de tuiles, briques et
temps n. Celui-ci sera implanté à une certaine distance de l'airial, à proximité carreaux. Ousse-Suzan, Cazade.

71
Maison i quatre eaux, avec façade sous mur
goutterot, dite agro-sylvicole, situte i
Sabres - Le Mineur. Cet exemplaire,
représentatif du deuxikme grand type de
maison landaise, sera transftrt bient6t sur
l'airial de blarquèze, à l'emplacement
d'une maison disparue.
93 94
82 Fransois Moniot

9/
Four à pain : détail de la voù.te intérieure
en brique pleine. Saint-lkger -d e-Balson.
bourg (Gironde).

des services d'accueil, d'animation et de conservation, dans un bâtiment


moderne climatisé, présentant toutes les possibilités de flexibilité et d'exten-
sibilité. I1 traitera de L a natztre e t I'hoiniize landais des origiies à nos j o w s , en
cinq périodes de plus en plus courtes rendant sensible <( l'accélération de l'his-
toire )) en montrant des mutations de plus en plus rapides. Ces divisions, for-
cément quelque peu arbitraires, présenteront entre elles des chevauchements.
Le programme s'efforcera de replacer l'histoire landaise dans un cadre plus
large ; l'aire géographique en sera, pour cette raison, plus étendue que celle
du musée de l'espace : elle inclura l'ensemble des pays landais et fera souvent
référence à la périphérie. La présentation mêlera les Cléments les plus divers :
objets originaux à trois dimensions, documents d'archives ou figurés, documents
élaborés, maquettes, spécimens, programmes audio-visuels.
Musée de l'espace et musée du temps trouveront un complément dans le
domaine de la petite industrie sur la commune voisine de Luxey avec la mise
en valeur d'une distillerie de résine dont l'équipement, particulièrement bien
conservé, permettra d'analyser un système de transformation et d'échanges
plus vaste.

Bilan, problèmes, perspectives


L'application d'un tel programme suppose de longues et nombreuses études
dans les différentes disciplines concernées : l'histoire, la géographie, l'ethno-
logie, la botanique et la zoologie sont amenées à confronter en permanence
leurs points de vue. Le Musée d'Aquitaine exerce un rôle de conseil scienti-
fique et technique, et siège au sein d'un groupe de travail chargé d'établir la
programmation annuelle 1. Le financement des investissements est assuré pour
la plus grande part par la Mission interministérielle pour l'aménagement de la
côte Aquitaine par l'intermédiaire de la SCETO (Société centrale pour l'équi-
pement touristique), tandis que des subventions sont allouées par différents
ministères. Le fonctionnement, assuré jusqu'en 1971 par le département des
Landes, est pris en charge depuis cette année par le Syndicat mixte de réalisation
et de gestion du Parc naturel régional des Landes de Gascogne, propriétaire du
musée.
La réalisation commence par les acquisitions foncières et immobilières. Sur
le plan foncier, l'étendue de 70 hectares définie en 1968, a été porde à 150 hec-
I. Ce groupe se compose d'experts régionaux et tares en I970 : c'est en effet ce qui a paru nécessaire aux différents spécialistes
nationaux, sous la présidence de Georges Henri
Rivière. pour assurer une représentation suffisante des divers paysages programmés et
Écomusée de Marquèze, Sabres 83

une implantation des bâtiments conforme à la réalité landaise. A ce jour une


vingtaine d'hectares ont pu &re acquis dont les trois quarts de l'airial.
Dans le domaine immobilier, il a été possible d'aller plus loin puisque quatre
cinquièmes des acquisitions prévues ont été réalisées. Nous avons eu la chance
de pouvoir sauver deux des plus belles maisons à auvent de la Grande Lande,
toutes deux datées et des plus représentatives (fig. - 89,90). Parmi les bâtiments
d'exploitation, des Cléments de première valeur ont pu être acquis, en parti-
culier un des tout derniers moulins à eau en fonction (fig. ~ 8 )ainsi, qu'un très
beau parc d'airial (fig. 96).
Les travaux d'architecture traditionnelle consistent en restauration de bâti-
ments en place pour un quart et en transfert ou édification (dans le cas des
constructions pour la chasse) pour trois quarts. Ces opérations sont précédées
de relevés détaillés permettant de restituer au mieux les déformations. A ce
jour, sur huit bâtiments de l'airial, cinq ont été restaurés (dont deux maisons) ;
en ce qui concerne les transferts, trois ont été réalisés (dont une maison), deux
sont en cours ; sept bâtiments importants restent en attente. D'importants
aménagements du site sont prévus, mais en ce domaine tout ou presque reste
à faire ;ils restent conditionnés par une extension foncière. La construction des
services et du musée du temps en constitue une large part. Les dispositifs de
clôture, de sécurité, de climatisation, d'entretien du sol prennent ici une impor-
tance particulière. Ils entraînent l'installation en sous-sol d'un réseau électrique 96
et d'adduction d'eau. Accès et cheminements, tant pour le service que pour le
public, appellent des aménagements particuliers et une signalisation norma-
lisée. Jusqu'à présent, seules des installations sommaires provisoires ont été
réalisées. En fait ni la sécurité, ni l'entretien du site ne sont encore pleinement
assurés, et c'est là un souci permanent pour les organisateurs.
Depuis 1969, en effet, le public (groupes scolaires et associations durant toute
l'année, touristes pendant l'été) est invité à visiter le musée en cours d'élabo-
ration, à pénétrer sur Ie chantier ; il peut ainsi d'année en annee en suivre les
progrès à travers de multiples tâtonnements. Des expositions temporaires lui
sont présentées dans divers bâtiments de l'airial' complétées par une ébauche 97
de sentier d'initiation au paysage landais. Un livret-guide est m i s à jour chaque
année ; des questionnaires de sondage sont à la disposition du public. Sur le 96
plan de l'animation, une vaste opération a lieu auprès des écoles : les nombreux Borde à couverture de chaume. Campagne,
Lapoueyne. Un exemplaire analogue sera
dessins d'enfants recueillis après la visite de l'airial sont pleins d'enseignement transféré sur l'airial de Marqukze.
sur leur fason de percevoir l'environnement. 97
É c o m x É B DE MARQUÈZE, Sabres. Moulin
à eau, sur piliers de bois, en colombage,
torchis et tuileaux, avec toit à quatre
pentes, initialement situé à Geloux,
Poussade. Démontt, en cours de transfert
sur I'Escamat, à proximité de I'airial de
Marquèze.
98
Parc à ovins d'airial, datt 1799,Luxey,
Dedelay. Sur le cott, bardage de brandes
(bruyères). Un exemplaire analogue est en
cours de remontage sur I'airial de
Marquèze.
84 Franqois Moniot

L'ouverture du musée au plus large public présente un danger certain pour le


site tant qu'une extension foncière et les importants aménagements qui en
découlent ne sont pas réalisés. Mais on doit reconnaître que l'afflux sans cesse
croissant de visiteurs curieux et même passionnés prouve à l'évidence que
l'existence d'un tel musée en France répond à un besoin.

Bibliographie sommaire sur les Landes


OUVRAGES DE BASE
SARGOS, Roger. Coiitribution à l'histoire du Ooisenzenf des Lades de Gascogtie. Bordeaux,
Delmas, 1949. 836 p., ill.
BOUCHET, Charles. Lzgos, comnzune des Lades de Gascogpie. (Deux siècles d'évol'ution
éco~zomiquee t sociale). Bordeaux, Delbrel, 191I. 250 p., ill.
CUZACQ, René. Géographie historipe des Landes : Les pays landais. ¡Vont de Marsan,
Lacoste, 1953. 84p.
ENJALBERT, Henri. Les p q s aquitains, les modelés e t l'es sols. Bordeaux, Bière, 1960.
618 p., ill.
DUBOURG, Gabriel. Le pays lapldais e t sa latzgue. Bordeaux, Dubourg, 1957. 286 p., ill.
CATALOGUES, G U I D E S
SABRES.Parc tiaturel r%ional des Landes de Gascogze. Ecomusée de Marquèxe. Exposition
1972,guide du visiteur. Collectq. Paris, SCETO, 1972, 47 p., ill.
A R T I C L E S ET P É R I O D I Q U E S
RIVIÈRE,Georges Henri. Le musée de plein air des Landes de Gascogne ;expérience
française d'un musée de l'environnement. EthzoZogie fraqaise (Paris), vol. I, janvier
1972, p. 87-95, ill. .
ILIONIOT,François. Les maisons landaises. Maisons paysatmes de France, no 2, mars-
avril 1970, p. 13-18, ill.
RAPPORT
MONIOT,François. Musée de plein air des Landes de Gascogne :programine scieiatijque,
technique e t administratg. Bordeaux, Centre de documentation d'ethnographie
d'Aquitaine, Musée d'Aquitaine, I 968, 75 p. (multigraphié).
Éducation et recherche en matière d’environnement
dans le Parc national de Yellowstone

En 1872, un petit groupe de citoyens éclairés persuada au Congrès des États- Ralph H. Lewis
Unis d’ériger en parc national une région sauvage de la (( frontière )> d’une
superficie d‘environ 7 800 kilomètres carrés. Ils avaient v u de leurs yeux les
merveilles naturelles de la région de Yellowstone, et avaient acquis la conviction
que ni eux-mêmes, ni personne d’autre n’avaient le droit d’exploiter cette
région à des fins de profit personnel. La loi portant création du Parc national
de Yellowstone stipulait que cette zone devait être préservée dans son état
naturel (( dans l’intérêt du peuple
- - américain et pour qu’il - -puisse en jouir B. Sa
promulgation a constitué un précédent, des centaines de pays s’en sont inspirés
pour créer des parcs dans les cent années qui ont suivi. Un siècle d‘expérience
au Parc de Yellowstone a permis de faire l’essai de bien des politiques et de
bien des techniques de protection et d‘utilisation des parcs. Yellowstone est un
musée dans la mesure où il permet de préserver, d’étudier et de présenter au
public une collection d’objets naturels et d’intérêt historique. Les controverses
passionnées qu’a suscitées, entre les spécialistes des musées, le débat entre l’inté-
rêt public et l’intérêt des objets paraissent ici hors de propos. I1 est en effet
manifeste depuis longtemps que, si le Parc n’était pas préservé avec soin, les
visiteurs ne pourraient pas vraiment en jouir, auquel cas il perdrait sa raison
d’Ctre. I1 faut donc répondre à la fois aux besoins du public et aux impératifs de
la conservation des objets. Bien gérer un parc, c’est essentiellement maintenir -
ce qui est délicat - un équilibre dynamique entre ces deux types d‘exigences
en évolution constante.
La présentation du Parc de Yellowstone fait intervenir une action éducative
que les responsables du Parc appellent (( interprétation D. Le public ne se con-
tente pas d‘assister au jaillissement des geysers ou de voir des animaux à l’état
sauvage. I1 veut des explications, il cherche à comprendre. C‘est pourquoi
l’interprétation a été, depuis I 920, l’un des principaux soucis de l’administration
du Parc de Yellowstone. La méthode la plus simple a consisté, et consiste
encore, à organiser la communication directe entre le visiteur et un membre
informé du personnel du Parc. Trois naturalistes travaillent à plein temps à 99
instruire et à diriger un groupe de cinquante à soixante (( interprètes n qui tra-
vaillent l’été dans le Parc, mais dont beaucoup enseignent les sciences pendant
~public à comprendre~le mécanisme du ~
l’année scolaire. Ils répondent à d’innombrables questions, font des exposés ~~f~~~~~ ~ ~ ~
aux sites principaux du Parc, organisent des promenades et des veillées autour Norris, que les visiteurs peuvent regarder
de feux de camp. Grâce à eux, des milliers de visiteurs peuvent chaque année de la du Ou de plus près*
approfondir leur connaissance des merveilles qu’ils voient et se faire au moins
une idée des relations complexes qui s’établissent autour d‘eux entre les phé-
nomènes de la géologie et les phénomènes de la vie, où intervient l’action sou-
vent destructrice de l’homme.
Les naturalistes chargés de faire mieux comprendre Yellowstone ne tardèrent
pas à s’apercevoir qu’il leur fallait pour cela des moyens complémentaires. Ils
mirent en place des musées, des panneaux d’exposition et des panneaux expli-
catifs au bord des chemins, firent imprimer des publications et recoururent à
différents moyens auditifs et audio-visuels à mesure qu’ils pouvaient en dis-
poser. En 1935’ le Parc contenait une série de cinq musées : l’un était consacré
à l’ensemble du Parc ; les autres étaient situés aux principaux points d’intérêt
pour les visiteurs - dans le bassin du Norris Geyser (fig. 99,I O O O ) , à Madison
Junction, où les explorateurs, réunis autour de feux de camp, avaient coutume
de dresser des plans pour faire de ’I’ellowstone un parc national ;près du geyser
86 Ralph Lewis

roo a

IO0
NORRISMUSEUM, Yellowstone National
Park. a) Salle d'exposition sur la géologie
du bassin du geyser, telle qu'elle Ctait
aménagée en 1931; O) La mème salle, telle
qu'elle a étt. aménagée en 1971.Les
panneaux, plus grands et moins détaillés,
ont plus d'utilité lorsqu'il y a affluence.
IOI
Panneau explicatif installb. au bord du
chemin, prks de YObsidian Cliff,
Yellowstone National Park. En 1930, ce
panneau répondait bien aux besoins des
visiteurs. La circulation automobile et les
habitudes du public lui ont bté de son
inté&.
rnn h

Old Faithful et près du Fishing Bridge, au voisinage de l'émissaire du lac de


Yellowstone. Complétés par plusieurs panneaux d'exposition placés au bord
des chenins, près de sites tels que celui de l'obsidian Cliff (fig. IOI), par des
panneaux explicatifs érigés en divers autres points, par quelques sentiers pour
promeneurs et par un nombre croissant d'ouvrages et de brochures destinés à
donner aux visiteurs de tous âges plus d'informations sur le Parc, les musées
de Yellowstone ont constitué pendant les années trente, un excellent moyen
de répondre aux besoins d'interprétation de la nature.
Mais les besoins ont évolué depuis la deuxième guerre mondiale. Plus de
deux millions de personnes envahissent le Parc chaque année, surtout pendant
les trois mois d'été. Ce sont d'ordinaire des citadins qui connaissent mal l'envi-
Éducation et recherche en matière d'environnement, Parc national de Yellowstone 87

ronnement naturel de l'homme. Ils sont habitués à voyager vite et sont prati- I02
CANYON VISITORCENTER,Yellowstone
quement rivés à leur automobile. C'est pour répondre aux besoins de cette National Park. a) E n partant de ce centre,
nouvelle génération de touristes que les responsables du Parc de Yellowstone ont les visiteurs peuvent suivre en voiture une
route B sens unique, faire une excursion
revu certains des moyens d'information offerts et en ont élaboré de nouveaux. en autocar, ou faire une promenade B pied
Ils ont tout d'abord pris des mesures énergiques pour atténuer les effets d'un kilomètre et demi pour admirer le
splendide panorama offert par les chutes
nuisibles de l'envahissement du Parc par les foules de fason que les touristes et le canyon. 6) L'exposition installee en
sentent encore l'impact de la nature sauvage. Les bâtiments construits au bord 1978 dans le Musée du Canyon donne aux
visiteurs une interpretation de ce .qu'ils
du Yellowstone Canyon ont été démolis et remplacés par d'autres, qui ne sont voient le long de la Yellowstone River.
pas visibles dans les panoramas (fig. 102 a, 6). Près de I'extrtmité occidentale du L'approche est à la fois concrete et
didactique.
lac de Yellowstone, Grant Village a pris la place de constructions qui en dépa-
raient la rive. Dans ce village, un musée nouveau incite certains visiteurs à
s'aventurer dans les vastes zones du Parc dépourvues de routes, et donne
à beaucoup d'autres une idée de ce que peut être la nature sauvage. A
Norris, la route en bordure du bassin où jaillit le geyser passe maintenant
assez loin derrière le musée. Les visiteurs peuvent quitter leur voiture et tra-
verser le musée (où sont de nouvelles salles d'exposition) avant d'atteindre les
sources thermales (fig. r o o 6). A la hauteur du geyser Old Faithful, spectacle
le plus populaire du parc, la route a été déviée. De nombreux bâtiments, et
notamment l'ancien musée, qui déparaient le paysage, ont été démolis (fig. 103).
Les panneaux d'exposition, moins nombreux et refaits de manière à ne donner
que les informations les plus pertinentes, sont érigés en plein air. Un nouveau
centre de tourisme, caché parmi les arbres, comporte un service où le touriste
peut obtenir des renseignements utiles, et possède trois cabines identiques
d'information audio-visuelle, dans chacune desquelles est projeté, à des heures
différentes, un court métrage explicatif sur les geysers.
On a aussi installé de nombreuses plaques d'un graphisme discret donnant
aux visiteurs, dans les sites non gardés, des renseignements dont ils ont besoin
(fig. 1-04). Ces plaques ont remplacé les panneaux explicatifs placés le long des
chemins et ont un rôle plus large. Les visiteurs qui s'approchent de certains
sites particulièrement intéressants peuvent aussi bCnéficier d'informations et de
conseils qu'ils entendent sur les postes de radio de leur voiture.
Une bonne interprétation des phénomènes suppose qu'on les ait bien Ctudiés.
I1 a fallu d'abord déterminer ce que le Parc contenait. On a rassemblé des spéci-
mens de plantes, d'animaux, de roches et de minéraux aux fins d'identification
et de référence. Les naturalistes ont participé activement à cette tâche avant que
le service des visiteurs finisse par occuper tout leur temps. Les collections
d'étude qui figurent dans le Musée central du Parc sont, en grande partie, le
88 Ralph Lewis

104
103 fruit de leurs efforts. Des spécialistes, invités, ont beaucoup contribué aux
Old Faithful Geyser, Yellowstone National
Park. Avant les rtcents aménagements, le travaux de collecte et d’identification de spécimens. I1 était stipulé, dans le
public ne pouvait pas vraiment jouir du ’ permis qu’ils recevaient, que les spécimens devaient être remis à des musées
spectacle qui s’offrait à ses yeux en raison
de la multitude de véhicules et du nombre publics. Depuis les années trente, la recherche a surtout porté, dans le Parc,
de bâtiments se trouvant à proximité sur les interrelations et les processus naturels. C’est aussi de ces études qu’on
immédiate du geyser.
104 a tiré l’essentiel du contenu des panneaux explicatifs et des publications ou
Interpretive marker, Yellowstone National causeries destinées au public.
Park. Ces plaques non protégées, disposées
partout dans le parc, sont en fonte Un programme intensif de recherche écologique est indispensable à la pré-
d’aluminium revktue d’un panneau dense servation de Yellowstone. Quatre biologistes travaillent actuellement à plein
de fibres dures, décoré B l’écran de soie ;
une peinture-Cmail du type utilisé pour les temps à l’étude des problèmes de gestion des ressources végétales et animales
véhicules automobiles en assure la (bison, grizzli, wapiti). D’autres services officiels collaborent à des programmes
durabilité. Ces panneaux donnent, sous
une présentation attrayante, des conseils concrets du même genre. Par exemple, le Bureau of Sport Fisheries and Wildlife
qui permettent aux visiteurs de s’orienter étudie de fason suivie les lacs et les cours d’eau du Parc. L’administration de
eux-mêmes.
Yellowstone encourage aussi les hommes de science à faire des recherches per-
sonnelles sur les problèmes d‘environnement particuliers au Parc.
Les recherches ont également un autre intérêt, car la préservation, dans une
I
assez large mesure, de l’état naturel où se trouvait initialement le Parc, per-
mettra peut-être d’en tirer des connaissances qu’il n’est plus possible d‘obtenir
ailleurs. En 1971,des hommes de science envoyés par vingt-huit collèges et
universités ainsi que par cinq organismes du gouvernement fédéral y sont venus
[Traduit de l’aitzgais] pour tenter de faire des découvertes de ce genre.
Les expositions temporaires et itinérantes :
un moyen d’information
pour la protection de l’environnement

1Cjel.l Engström

Pour la protection de l’environnement, les années soixante ont été décisives.


Dès la fin de la décennie précédente, l’utilisation de plus en plus répandue des
produits chimiques dans l’industrie, l’agriculture et l’exploitation forestière
avait suscité des discussions. Mais c’est en 1962 que le public a commencé à
s’intéresser sérieusement à ces questions, après le cri d‘alarme lancé par Rachel
Carson dans son livre Primkqbs silemieztx où elle montrait les risques que pré-
sente l’utilisation de plus en plus fréquente des produits chimiques. En Suède,
on a observé une diminution du nombre des oiseaux de proie et de nombreux
oiseaux qui se nourrissent de graines ; les recherches ont montré que ce phé-
nomène était causé par les composés alkyl-mercuriques employés pour désin-
fecter les graines. On a constaté que la chair des poissons renfermait un taux
inquiétant de mercure dû principalement à l’usage de ce produit pour la fabri-
cation industrielle de la pâte à papier et il a été question d’interdire la vente des
poissons pêchés dans les eaux les plus contaminées. De même, les dégâts causés
par le DDT et d’autres insecticides ont commencé à se manifester. Cependant,
les milieux industriels affirmaient que toute mesure tendant à restreindre ou à
interdire entièrement l’usage de ces pesticides risquerait d’avoir de lourdes
conséquences écononiques pour l’agriculture, la pêche et l’industrie.
, C‘est alors qu’a eu lieu, en I 96 5 , la réorganisation du Musée national d’his-
toire naturelle de Stockholm, où a été créée une division chargée spécialement
des expositions et des activités éducatives. L‘une des tâches les plus importantes
de cette division a été, bien entendu, d’informer le public des problèmes actuels
concernant la pollution de l’environnement.
Aussi sa première grande exposition a-t-elle eu pour thème : Sommes-now en
train d’empoisowier la m t w e ? Cette exposition temporaire, présentée d‘abord au
musée, a ensuite circulé dans le pays. I1 s’agissait de faire comprendre au public
ce qu’est le cycle écologique, de lui montrer comment la perturbation de l’envi-
ronnement peut influer sur ce cycle et aussi de lui présenter de manière concrète
et de lui expliquer un débat souvent confus, même pour les spécialistes. L’expo-
sition commensait par une présentation évoquant l’équilibre dans la nature,
les interactions entre les animaux prédateurs et leurs proies ainsi qu’entre les
parasites et les organismes dont ils vivent, la manière dont la résistance se
développe, etc. On trouvait ensuite une description des pesticides les plus
courants et des explications sur les dommages qu’ils peuvent causer. La manière
dont les substances toxiques sont absorbées aux différents stades du cycle de la
nutrition ainsi que les effets de cette absorption sur les oiseaux et sur les poissons
étaient présentés en détail, de même que les dangers auxquels l’homme est
;

I
90 Kjell EngstrÖm

exposé. Les visiteurs pouvaient voir dans les vitrines des oiseaux appartenant à
des espèces menacées d'extinction, des faisans saisis par les convulsions typiques
de l'empoisonnement au mercure, ou les pesticides les plus courants (fig. I O J ) .
IOI
NATURHISTORISKA RIKSMUSEET, Le musée a dû, évidemment, tenir l'exposition à jour pour suivre les progrès
Stockholm. L'exposition intitulée rapides de la recherche. I1 a fallu constamment remplacer les informations péri-
Sommes-nom eti train d 'empoisotitzer la nature 2
(Orebro, septembre 1966) montrait mées par de nouvelles informations portant par exemple sur les mesures
notamment certains des oiseaux de proie récentes d'interdiction de certains pesticides, sur les lacs dont les poissons
qui sont menacés d'extinction du fait de la
présence de poisons dans leur avaient été déclarés impropres à la consommation ou sur les résultats des
environnement.

106
NATLJRHISTORISKA RIKSMUSEET,
Stockholm. Exposition Sziruie, 1970. La
pollution et l'empoisonnement de la mer
Baltique étaient ainsi illustrés sous le titre
(( La p&chedans la Baltique D. Des
panneaux en matitre plastique transparente
portant les noms des poisons qu'on trouve
maintenant dans la mer apparaissent et
disparaissent sur un arritre-plan montrant
un paysage c6tier idyllique. Lorsqu'il retire
ses lignes, le visiteur risque de prendre
non pas du poisson, mais une carcasse
d'automobile, des dttritus provenant de
bateaux, des munitions immergées, des
oiseaux empoisonnés par le pktrole, etc.
A gauche, pendu au mur, un cygne mort
sous l'effet du pétrole. Sur le mur oppose
figurent des cartes d'intensitk de la
pollution dans la mer Baltique et des
textes expliquant les dangers qui menacent
les poissons.

I
Les expositions temporaires et itinérantes : information pour la protection de-l'environnement

recherches relatives aux effets des substances toxiques et à leur apparition dans
la nature. Le fait que le musée soit à la fois un organisme de recherche et un
organisme éducatif a été utile. Les résultats obtenus par la division de la
recherche où une équipe spéciale s'occupait de ces problèmes, ont été immkdia-
tement incorporés au contenu de l'exposition, souvent même avant d'être
publiés.
Toutefois, il ne sufisait pas de préparer et d'organiser une exposition, encore
fallait-il s'en servir pour toucher le grand public. Naturellement, le premier
groupe visé a été celui des élèves des écoles. Les enfants ont participé à des
travaux dirigés qui leur ont permis de comprendre l'essentiel de l'exposition ;
des films ou des diapositives ont été mis à la disposition des enseignants. Afin
de compléter l'esposition, une brochure de 16 pages a été imprimée. Ce n'était
pas un catalogue mais un a p e r p des éléments les plus importants de manière
à être utile même aux personnes qui n'ont pas v u l'exposition.
D'autre part, pour atteindre le grand public, le musée s'est efforcé d'agir
auprès des secteurs directement concernés. Quand l'exposition se trouvait dans
une zone agricole, on a organisé des discussions gknérales sur l'utilisation des
persticides dans l'agriculture. Sur le littoral, là o ù il était interdit de vendre du
poisson pêché dans les eaux côtières par suite de sa forte teneur en mercure, les
pêcheurs ont eu l'occasion de s'entretenir de la question avec des représentants
de l'industrie, des centres de recherche et de l'administration. Ailleurs, on a
organisé des visites d'études, des cours, des excursions, des collectes d'échan-
tillons, etc. Dans plusieurs cas, l'exposition a été complétée par des éléments
relatifs aux problèmes locaux. Par conséquent, l'exposition servait de base de
discussion tout en jouant un rôle de catalyseur pour la réalisation d'activités
liées aux problèmes particuliers de la région ; elle avait ainsi de plus grandes
chances de toucher directement le public.
L'action que nous avons menée a l'occasion de cette exposition nous a
convaincus que ce genre de manifestation est un bon moyen de donner des
informations sur la protection de l'environnement et, depuis, nous nous
sommes d maintes reprises engagés dans la même voie. En 1970,le Conseil de
l'Europe a célébré l'Année européenne de la conservation de la nature. Entre
autres manifestations, des expositions ont été organisées à ce titre en Suède ;
nos efforts ont porté à la fois sur la préparation d'une exposition itinérante -
conjointement avec l'Office national des expositions et l'Of3ice central des anti-
quités - et sur l'organisation, dans notre propre musée, de l'exposition &mie.
Cette dernière avait pour but de replacer l'humanité dans sa perspective tem-
porelle et de montrer comment l'homme, en transformant son environnement,
a exterminé un grand nombre d'animaux et a fini par se mettre lui-même en
danger (fig. 106).II s'agissait aussi d'esquisser des solutions possibles. Pour la
mise au point de cette section, nous avons consulté le Musée des techniques, qui
organisait parallèlement une exposition sur les moyens actuels et futurs de com-
battre les effets nocifs du progrès technique. Cette annke-là, les établissements
scoIaires ont accordé beaucoup d'attention aux problèmes de l'environnement
et, pour compléter leur enseignement, ils ont largement utilisé les possibilités
offertes par cette exposition et par celle qui parcourait encore le pays, sous le
titre Somnmemou en train. d 'emnpoìsomer la t-lattlre 2
Le débat sur la protection de I'environnement n'a rien perdu de son actualité
et la grande Conférence des Nations Unies sur ce sujet a retenu particulièrement
l'attention. Nous avons essayé de soutenir l'intérêt éveillé dans le grand public
en organisant diverses expositions. Celle qui a été présentée dans notre musée
sous le titre Vivre avec la ?iaf.ure a constitué aussi la contribution de la Suède
à l'exposition mondiale de la chasse organisée à Budapest en 1971.Cette expo-
sition, pour laquelle différents services et organisations s'intéressant à la pro-
tection de la nature, à la chasse, à la pèche, à la sylviculture, etc., avaient conju-
gué leurs efforts, donnait des exemples de dégâts causés à l'environnement
(fig. 1 0 7 )tout
~ en indiquant comment il est possible d'exploiter les ressources
97- Kjell Engstr6m

IO?
Contribution suédoise intitulke Vivre avec
la nafim, à l'Exposition mondiale de la
chasse qui s'est tenue à Budapest en 1971,
actuellement en tournée à travers la Suède.
Le présent stand expose les résultats des
recherches faites par le Musée suédois
d'histoire naturelle sur l'accumulation de
poisons dans la chaîne alimentaire, i partir
de l'environnement. On reconnaìtra en bas,
à droite, un diagramme dû à A. G. Johnels
(@. fig. 48, p. 5 5 du présent volume).
En bas, à gauche, dans la boîte en verre,
présentation d'un faisan figé dans l'attitude .
convulsive typique de l'empoisonnement
par le mercure.

naturelles sans causer de dommage. Cette exposition circule actuellement en


province ;à cet égard, l'expérience que nous avions acquise avec les expositions
itinérantes précédentes nous a beaucoup servi. Des groupes de travail locaux
mettent en place l'exposition et organisent diverses manifestations, notamment
des débats, des exposés ou des excursions en rapport avec les problèmes qui
intéressent la localité dans le domaine de la protection de la nature.
L'expérience que nous avons acquise au cours de ces années en organisant
des expositions temporaires et des expositions itinérantes relatives à la pro-
tection de la nature nous a convaincus de la valeur des expositions pour l'édu-
cation et l'information du public. I1 serait toutefois erroné de penser que l'effort -
s'arrête lorsque s'ouvrent les portes de l'exposition. A elle seule, une exposition
itinérante ne peut pas éveiller l'intérêt de toutes les catégories du public auquel I
elle est présentée. Elle ne produit son plein effet que si elle est prolongée par
des activités permettant à chacun de saisir les problèmes propres à sa localité
et en rapport avec son expérience et les sujets qui l'intéressent. A cette condi-
tion, une exposition peut frapper suffisamment l'opinion publique pour que I

soient prises les décisions politiques et administratives nécessaires à une meil-


leure protection de l'environnement.
93

La destruction de l’environnement
à l’époque de la préhistoire, Lerne (Grèce)

Nils-Gustav Gejvall

Toutes les formes de vie, si primitives soient-elles, provoquent une certaine


destruction de leur environnement immédiat, du fait que leurs déchets doivent
être éliminés, enlevés ou neutralisés pour assurer la survie des êtres restants. La
consommation d‘énergie qui en résulte crée, tôt ou tard, une situation de pénurie,
parfois latente et indécelable, mais qui risque d‘avoir des incidences profondes.
L’intervention de l’homme dans le biotope des mammifères et des oiseaux
sauvages y a toujours entraîné des changements, souvent pour le pire. La
domestication d‘animaux sauvages tels que l’auroch et le sanglier a commencé
par la capture de bêtes adultes, après quoi il a été possible de s’emparer de leurs
petits. Cette domestication - on a pu dire que les animaux capturés devenaient
un garde-manger vivant - n’a entrainé, du moins initialement, que des chan-
gements morphologiques insignifiants ; mais il est apparu, dès la deuxième
génération, une limitation directe et frappante des variations génotypiques qui
existaient chez les animaux à l’état sauvage. Peut-être certaines bêtes furent-elles
choisies spécialement pour être domestiquées ; peut-être J- eut-il des tentatives
d’élevage sélectif, comme le donne à penser la pratique très ancienne de la
castration. Un gène récessif peut alors passer à l’état homozygote et manifester
son action (Berry, 1969). Ce n’est qu’après des croisements délibérés ayant
pour résultat d’affaiblir à l’extrême le courant initial de gènes que les modifica-
tions morphologiques auraient un effet cumulatif et qu’apparaîtraient divers
types domestiques.
Les mammifères et les oiseaux réagissent très différemment sur un point
particulier, aux changements introduits dans le biotope : d‘une manière géné-
rale, les premiers ont une capacité d’adaptation considérable, alors que les
seconds se bornent à migrer.
Pour les raisons indiquées ci-dessus, la grande quantité d)ossements d‘ani-
maux que les fouilles archéologiques permettent de découvrir en des points
et à des périodes où l’homme essayait de domestiquer des espèces sauvages
peut apporter une précieuse contribution aux progrès de nos connaissances en
écologie préhistorique, sujet qui n’a été qu’effleuré dans le débat actuel sur
l’environnement.
L‘archéologue Carl W. Blegen, récemment décédk, célèbre par les fouilles
qu’il a entreprises à Troie en 1932-1938, et qui ont fait de lui le digne succes-
seur de Schliemann et de Dörpfeld, avait proposé, il y a vingt ans, de faire des
fouilles dans les ruines qui entourent Lerne, en Argolide (Péloponnèse). Lerne,
située au voisinage de la ville de Myloi, avait été, d’après la mythologie grecque,
l’habitat de l’hydre qu’Hercule extermina. John 1,. Caskey, élève de Blegen
94 Nils-Gustav Gejvall

auquel il succéda comme chef du Département des études classiques de l'Uni-


versité de Cincinnati (Ohio) a donné suite à cette proposition (Caskey, 1955,
1956, 1957, 1958-1959, 1960). Bien que les fouilles n'aient porté que sur
environ 5 o/o de la surface bâtie autrefois, elles ont permis de découvrir de
précieux matériaux, notamment deux tonnes de fragments d'os d'animaux et
de restes de repas, dans au moins sept établissements humains nettement discer-
nables, allant du néolithique (environ o00 av. J.-C.) à l'époque classique
(environ 500 av. J.-C.).
L'auteur du présent article a été invité à étudier ces matériaux, qui se sont
révélés contenir près de 25 o00 fragments identifiés individuellement et plus
de 900 combinaisons, ainsi que des milliers d'éclats de nature indéterminée.
Les mesures et les datations effectuées ont permis à l'auteur de publier dans
The ArgoZid (Gejvall, 1969) une monographie intitulée : Lema, a precZassical site,
qui a servi de base à l'étude ci-après des aspects liés à l'environnement.
La région de Lerne est entièrement tributaire de l'irrigation. On y pratique
par endroits des cultures fruitières, mais sa faune, jadis riche, est maintenant
très appauvrie. Des études paléobotaniques (Hopf, 1962) ont montré que les
pentes des montagnes étaient couvertes de forêts de chênes et de pins aux

Extrait dc Froshins och Franrsteg.,no J. 1970, page II.

k.
a
O

: e
ö6
3

I 3000 ans
:IV. J.-C.
II
Postpluvial z
II+III Humide 3000 .
III
III+IV
-------- L ,?.+OO.

IV 2000.

IV+V Postpluvial 3
V SCC,chaud
IrOO.
VI .
VII+V+
-----_____
1'ostplurinl-c 850
1100

Commc 500.
VIII+ + actuellcmcnt av. J.-C.

temps préhistoriques. On a trouvé des restes brûlés ou carbonisés de ces bois,


utilisés par des artisans ou comme combustible à tous les niveaux d'excavation,
mais surtout à Lerne III (début de l'helladique II),détruite par le feu peu après
l'an z j o o av. J.-C.
Lerne I et II appartiennent à la période néolithique. Lerne III a été édifiée
sur leurs ruines, et ses constructions les plus importantes, faites de brique, ont
été jugées d'un tel intérêt par les experts qu'on les a protégées, pour la postérité,
La destruction de l'environnement à l'époque de la préhistoire, Lerne (Grèce) 9j

B C

Echelle: A, B, C = 1/2,5
A
D,E= 112

par un revêtement d'acier et de béton. On trouve dans d'autres sites archéolo- I O 8


u. Mitacarpien de petite vache sauvage
giques importants de Grèce - Tirpns, Asine, Zygories, Aghios I'osmas et de Lerne III ;b. Metacarpien de vache
peut-être Corinthe - les traces d'un phénomène violent analogue à celui qui a domestique de Lerne V ; c. ï'létatarsien
de vache domestique de Lerne VI (noter
détruit Lerne III. la gracilité !) ; d. Quatrième métatarsien
C'est à Lerne IV, d'où a été tiré près du tiers des ossements, que l'on a décou- de sanglier de Lerne IV ; e. Troisikme
métatarsien de porc domestique de
vert les premières poteries tournées. I1 semble que la nouvelle population y ait Lerne VI. (D'aprts Gejvall, r9G9.)
vécu pendant moins de cinq à six générations et ait apporté cet art avec elle.
Le passage à Lerne V a été moins brusque. On n'a découvert aucun signe de
destruction. Mais ce nouvel établissement subit diverses influences extérieures
qui y introduisirent, notamment, des rites nouveaux de sépulture, rapidement
passés dans les meurs (Caskey).
I1 n'y a pas grand-chose à ajouter, à cet égard, en ce qui concerne Lerne VI
et VI1 (helladique tardif, I, II et III respectivement). On a trouvé assez peu
d'ossements à ces niveaux.
Les ossements d'animaux découverts à Lerne offrent plusieurs exemples de
destruction progressive de l'environnement, en particulier des changements
dont s'est accompagnée la domestication des aurochs et, localement, des por-
cins, ainsi que des changements dans la composition de l'avifaune locale.
Les petits aurochs de Lerne III, hauts d'environ 142 centimètres au garrot,
marquaient déjà une transition par rapport à la race plus grande existant à
l'époque de Lerne I ; la domestication primitive avait déjà commencé plus à
l'est, en Asie Mineure, mais on relève, à Lerne I, des indices très nets de la
domestication de cette espèce. La hauteur au garrot n'était plus que de IO^
à 108 centimètres à l'époque de Lerne IV ; elle avait encore diminué à l'époque
de Lerne VI (environ IOO centimètres au garrot, fig. 108~2-c). Les sangliers do-
mestiqués à l'époque de Lerne IV devaient mesurer environ I I y centimètres, alors
que les porcs de Lerne VI ne dépassaient pas 70 centimètres (fig. I o 8 d-e).
Concurremment, le volume des restes de repas, témoignage d'une consom-
mation minimale d'animaux domestiques les plus importants (moutons,
chèvres, porcs et bovins), augmentait à un point qui dénote un accroissement
rapide de la population humaine. J. L. Angel, le plus connu des spécialistes
américains de la paléodémographie pour cette partie du monde, a calculé en
1971 que, pendant cette période, la densité de la population est passée de
96 Nils-Gustav Gejvall

O,I à I 5 habitants par kilomètre carré. A cela peuvent s'ajouter les importantes
données paléobotaniques et paléoclimatologiques qu'on peut tirer du tableau I.
Ce tableau ordonne les espèces d'oiseaux identifiées à Lerne à la fois dans le
sens vertical, en plasant en haut les découvertes les plus anciennes, et dans le
sens horizontal, en commensant par les oiseaux aquatiques et les échassiers
avec, ensuite, l'autour et le faucon pèlerin, puis la perdrix bartadelle et les
spécimens de volailles domestiques les plus anciens qu'on ait découverts en
Europe (à Lerne V) ; viennent ensuite les grands gallinacés, devenus rares, et
la grande outarde, le pigeon, le grand-duc, le corbeau et la corneille. A partir
de la perdrix bartadelle, ces espèces peuvent être considérées comme caracté-
ristiques d'un biotope plus sec que les espèces antérieures. Le paléoclimatolo-
giste Butzer a calculé, en 1 9 ~ 7 qu'un
, climat plus sec et plus chaud avait régné
dans toute cette région à partir de 2400 ap. J.-C. environ (postpluvial 3). Il
ressort du tableau que c'est précisément vers cette époque qu'il s'est produit un
changement dans l'avifaune, c'est-à-dire l'apparition d'espèces adaptées à un
biotope plus sec. Si nous ajoutons à cela le déboisement dont témoignent les
restes de bois carbonisé découverts aux divers niveaux, le nanisme progressif
des bovins et des porcins domestiqués, et l'accroissement du nombre des mou-
tons et des chèvres - avec la surcharge des pâturages qui en est résulté - on
garde l'impression générale que le biotope s'est considérablement dégradé
localement, tandis que s'abaissait le niveau de la nappe phréatique et que l'envi-
ronnement génétique interne se détériorait au même degré. De toutes les espèces
domestiques, ce sont les moutons et surtout les chèvres qui se sont le mieux
comportés, grâce à leur capacité d'adaptation.
L'aperp que nous avons donné est peut-être un peu trop schématique et
insuGsamment nuancé, mais il offre un exemple, parmi beaucoup d'autres qu'on
pourrait citer dans diverses parties du monde, de civilisations qui sont nées,
ont fleuri et ont disparu aux époques préhistoriques et dans lesquelles l'homme
a été, comme il l'est si souvent, un agent de destruction de l'environnement.

Bibliographie
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Londres, Gerald Duckworth 81 Co., 3 Henrietta Street, London, W.C.2.
BUTZER,I<. W. I 9 57, Late glacial and postglacial climatic variation in the Near East.
Erdkmde (Bonn), vol. XI, no I.
CASKEY, J. L. 1955. Excavations at Lerna, 1954. Hesperia, vol. XXIV, no I.
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-. 19j9. Activities at Lerna, 1918-1959. Ibid.,vol. XXVIII, no 3.
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GEJVALL, N.G. 1969. Lema, apreclassicalsite ria the Argolid. Vol. I : Thefazmz. Prince-
ton (New Jersey), The American School of Classical Studies at Athens.
-. 1970. Förhistorisk mi#b$örstöring. Forskning och Framsteg, no 5 .
Hopf, M. 1962. Nutzpflanzen vom Lernäischen Golf. Jahrb. Ram. Ger. Zentr. Mus.
97

Musées d'histoire naturelle,


maladies tropicales et taxonomie
Bengt Hubendick

Il était une fois un jeune zoologue qui préparait sa thèse de doctorat. C'était
un travail fastidieux et une nuit, alors qu'il veillait fort tard, il éprouva le besoin
de se détendre. Comme il était dans un musée, il fit un tour dans la pièce où l'on
conservait les spécimens d'invertébrés et inspecta divers objets qui s'y trou-
vaient. Il remarqua un pot contenant des tubes en verre qui renfermaient un
type de mollusque gastéropode pulmoné dont l'anatomie, il le savait, &ait
inconnue. Cela éveilla soudain sa curiosité scientifique et il voulut savoir com-
ment ces mollusques étaient constitués. Pour meubler ses loisirs, il entreprit dès
lors d'étudier leur anatomie. II obtint quelques résultats imprévus et intéres-
sants, mais bientôt, il dut consacrer de nouveau toute son attention à sa thèse.
Après qu'il eut passé son doctorat, il trouva un emploi au département des
invertébrés du grand musée national d'histoire naturelle de son pays. C'était
exactement ce qu'il avait toujours souhaité. I1 partagea son temps à égalité
entre ses fonctions de conservateur et ses travaux de recherche. I1 obtint la
possibilité de poursuivre son étude des escargots pulmonés, pouvant utiliser
les collections du musée et empruntant du matériel supplémentairs à plusieurs
musées étrangers. En peu de temps, il rédigea un article assez substantiel sur la
question. L'article fut publié et il en obtint un certain nombre d'exemplaires
qu'il envoya à des spécialistes.
Bientôt d'autres spécialistes lui écrivirent en lui demandant son texte. Cette
fois, cependant, il ne s'agissait pas d'experts en escargots, mais de spécialistes
d'une maladie tropicale appelke bilharziose ou schistosomiase. C'est alors que
notre jeune zoologue se rendit compte que les escargots qu'il avait étudiés pos-
sédaient le pouvoir funeste de transmettre ce fléau (fig. 109). 109
Notre homme poursuivit son étude des gastéropodes d'eau douce, de leur Illustration du cycle biologique de
Schisfosoma, le ver qui provoque la
anatomie, de leur taxonomie, de leurs variétés, de leur distribution et de leur bilharziose. Des ceufs de Schisfosoma
écologie. I1 travaillait sur des spécimens conservés dans le musée et, dans une quittent leur hôte humain dans les fkces (I)
ou l'urine. Si les œufs sont déposés ou
certaine mesure, sur des animaux vivants, pendant l'été. I1 acquit ainsi progres- entrainés dans l'eau douce (2) ils éclosent,
donnant naissance à une minuscule larve
ciliée qui nage librement, le miracidium (3).
Pour survivre, cette larve doit pénétrer
dans les heures qui suivent à l'intérieur de
certains types d'escargots. Dans
l'escargot (& un cycle de reproduction
végétative aboutit à des centaines de
larves à queue fourchue appelées
cercaires ( 5 ) . Ces cercaires montent à la

. surface de l'escargot et s'échappent dans


l'eau. Elles nagent activement et, si eues
entrent en contact avec la peau humaine,
elles peuvent y pénétrer au moyen de
sécrétions provenant de cellules
glandulaires (6). Les vers entrent alors
dans le sang, sont transportés jusqu'au
cœur, pompés dans les poumons, puis
dirigés vers la veine porte dans le foie.
Une fois adultes, elles s'accouplent (7) et
émigrent vers les veinules mésentériques (8)
du rtseau de la veine porte ou vers les
vaisseaux de la vessie, où les femelles
déposent des œufs en grandes quantitês.
Quelques œufs traversent les parois de
l'intestin ou de la vessie et sont évacuks
de l'organisme dans les f6ces ou l'urine.
Ainsi s'achkve le cycle biologique du ver.
Bengt Hubendick

sivement une certaine compétence et un certain jugement dans son domaine de


recherche, voire quelque notorikté internationale.
Du moins fut-il en droit de le penser lorsqu'il resut un jour une lettre de
l'organisation mondiale de la santé (OMS), à Genève, lui demandant s'il serait
disposé à faire partie d'une équipe qui devait se rendre aux Philippines pour y
évaluer la situation de la bilharziose et formuler des propositions en vue de
nouvelles mesures de lutte contre cette maladie.
C'était exaltant. Le jeune zoologue avait resu une formation en vue de la
conservation des collections de musée et de l'exécution des travaux de
recherche, surtout de recherche taxonomique, c'est-à-dire portant sur la classi-
fication et la systématique zoologiques, fondées sur ces collections. Or, voici
qu'il découvrait soudain que l'on avait besoin de ses compétences particulières
pour résoudre des problèmes liés à une grave maladie tropicale.
I1 se rendit aux Philippines, se familiarisa avec de multiples aspects de la
bilharziose et de la lutte contre cette maladie, entreprit des études écologiques
sur le terrain et collecta des spécimens pour poursuivre ses recherches taxo-
nomiques dans son musée (fig. 110). Moins de six mois après son retour des
Philippines, il fut invité au Venezuela pour y étudier la taxonomie des mol-
lusques qui transmettent la maladie sous diverses formes dans ce pays, et aussi
pour y faire des conférences sur ses travaux de recherche.
De retour à son musée, il se mit à étudier les nombreux spécimens qu'il avait
rapportés du Venezuela. I1 en résulta un document de taxonomie et, en outre,
le manuscrit d'un guide destiné aux agents des services sanitaires et autres
personnes participant à la lutte contre la maladie (fig. TII). Le manuscrit ne fut
pas publié, mais son auteur l'envoya par la suite à l'organisation mondiale de
la santé, ce qui aboutit à la création d'un organe portant le titre de Groupe de
travail de l'organisation panaméricaine de la santé et de l'organisation mon-
diale de la santé pour l'tlaboration de directives en vue de l'identification des
planorbidés américains. Entre-temps, le zoologue, qui n'était déjà plus très jeune,
fut envoyé en Gambie et dans la Sierra Leone par le British Medical Research
Council, puis à Porto Rico par l'OMS pour poursuivre des travaux de mala-
cologie médicale. Bien entendu, il assista également à divers congrès et réunions.
Pour poursuivre ses travaux, le Groupe de travail à l'appellation interminable
avait besoin de toute une documentation de base. Notre zoologue fut envoyé
par l'OMS et l'organisation panaméricaine de la santé dans des musées à
Londres, Paris, Bruxelles, Francfort, Philadelphie, Washington, Ann Arbor et
ailleurs, pour y étudier les spécimens et collections. Sans de telles études, il eût
été impossible de démêler les problèmes de taxonomie et de nomenclature qui
rendaient à cette époque presque impossibles l'identification et la,désignation
des mollusques vecteurs. Après des réunions à Washington, Rio de Janeiro
et Belo Horizonte, des séjours à Recife, la Nouvelle-Orléans, Missoula, Dahlo-
II0
nega et autres lieux pour des entretiens, grâce à une vaste correspondance avec
L'tquipe d'enquête sur la bilharziose ses collègues et, surtout, à de nouvelles études de collections de musée, le 1
dans la forêt, aux Philippines, en 1952 zoologue contribua à l'achèvement du guide pour l'identification des escargots. /,
(à droite, l'auteur). L'activitk sur le terrain
est normalement à l'origine du materiel La possibilité d'inspecter les collections anciennes se trouvant dans les musées j '
dont les musées ont besoin. d'histoire naturelle de nombreux pays avait permis de fournir aux malaco- /
I
logues, aux agents des services de la santé publique et à d'autres personne$
s'occupant d'une fason ou d'une autre de la lutte contre la bilharziose un instrÚ-
ment répondant à cette nécessité fondamentale de pouvoir identifier les
mollusques vecteurs.
La classification ou taxonomie zoologique, fondée sur la systématique zoo-
logique et tributaire de la nomenclature zoologique, a souvent été considérée
comme une sorte de violon d'Ingres scientifique ou une branche peu enviable
de la science n'offrant qu'un intérêt et une importance limités. Pourtant, la
systématique zoologique pure est une science du plus haut intérêt sur le plan de
la connaissance parce que le système zoologique n'est pas typologique mais
repose, en les reflétant, sur les relations phylogénétiques naturelles entre les
Musées d'histoire naturelle, maladies tropicales et taxonimie 99

- 5"

Fig. 52. Reproductive system of nioiiiplinkirki plii!¡p~iimo(Duiihcr) from Brazil III


See p. 110 for key to abbrrvhtions. Page extraite du guide s u r les mollusques
hôtes de la bilharzie dans les Amériques.

animaux et les groupes d'animaux, de sorte qu'il brosse un tableau de l'évolu-


tion organique qui s'est produite au cours des âges.
La taxonomie zoologique, de son côté, suppose l'application de la systéma-
tique zoologique à des fins d'identification et de classification. Qu'elle soit ou
non déconsidérée, une telle activité scientifique est l'auxiliaire indispensable de
toutes sortes de recherches zoologiques et en toutes circonstances où il est
question de matériel zoologique. Bien des fois, l'absence d'un service taxono-
mique compétent a ôté toute valeur à des études zoologiques, nul ne sachant au
juste quel matériel avait été utilisé. Si l'on avait conservé du matériel documen-
taire, il eût été possible d'entreprendre ultérieurement une identification
appropriée. Cependant, en général, il n'est pas possible d'emmagasiner du maté-
riel documentaire dans des universités ou des instituts de recherche. Dans la
recherche sur l'environnement, pour I'écologie, la biologie halieutique, la
parasitologie, pour l'étude des insectes nuisibles et de la protection contre
ceux-ci, bref, dans toutes les branches de la zoologie, le traitement taxonomique
approprié du matériel rev&tune importance primordiale. Pour que l'homme
puisse bien comprendre l'ensemble écologique dont il fait partie et dont il
dépend, pour qu'il soit capable d'utiliser de fason rationnelle les ressources
naturelles renouvelables, pour qu'il se prémunisse contre la concurrence des
rongeurs, des insectes et autres organismes, en un mot pour que l'homme
puisse survivre sur cette planète, il doit connaître les applications de la taxo-
nomie zoologique, comme celles de la taxonomie botanique ou micro-
biologique.
Le spécialiste de la taxonomie a grandement besoin de matériel de référence
aux fins de comparaison. Il lui faut souvent inspecter du matériel documentaire
IO 0 Bengt Hubendick

tel que les spécimens d’un type donné. I1 peut aussi avoir constamment besoin
de grandes séries de matériel soigneusement conservé qui reflète de faS.on
appréciable certaines formes de diversité : stades de développement, de dimor-
phisme sexuel, polymorphisme, autres variations à l’intérieur des populations
ou variations géographiques. Or ce type de matériel ne se trouve pratiquement
que dans les musées (fig. 113). Par conséquent, pour mener à bien sa tâche, le
spécialiste de la taxonomie est largement tributaire des musées. De même, les
collections de ce genre conservées dans les musées sont un instrument indis-
pensable pour assurer le service taxonomique nécessaire.
Le matériel dépouillé par le spécialiste doit être conservé comme matériel
documentaire. I1 doit rester disponible pour de nouvelles vérifications et rééva-
luations. I1 se peut que de nouvelles découvertes ou des travaux de recherche
taxonomique aboutissent à des conclusions différentes de celles que l’on avait
tirées du matériel ancien. Par suite des changements qui interviennent dans la
nature, qu’ils soient spontanés ou provoqués par l’homme, les comparaisons
entre collections provenant de diverses époques peuvent se révéler indispen-
sables. I1 importe donc au plus haut point que le musée dispose d’un espace
suffisant pour accumuler du matériel documentaire.
Aujourd’hui, l’homme connaît les parasites du paludisme, qu’il s’agisse des
sporozoaires microscopiques dans les cellules sanguines ou des moustiques qui
les transmettent. Cette connaissance taxonomique fut l’une des conditions
II2
préalables qui rendit possible la défense contre les parasites. De même, pour
Une partie de la collection de gastéropodes protéger l’homme dans ses activités, il est nécessaire d’acquérir une connais-
conservés dans l’alcool au Musée sance taxonomique des autres protozoaires, douves, ténias et ascarides qui sont
d‘histoire naturelle de Göteborg. Ces
collections de musée proviennent des des parasites de l’homme et des animaux domestiques ou qui endommagent
activités sur le terrain et sont conservées en les denrées alimentaires, ainsi que des mouches, poux, puces, punaises et tiques
vue de travaux de recherche ultérieurs.
Ainsi, l’activité sur le terrain et la recherche qui provoquent des dégâts de toutes sortes, comme de bien d‘autres organismes
dans les musées sont l’une et l’autre vivants. L‘homme doit assurer sa protection en coopérant avec la nature, et
indispensables pour mieux connaìtre et
comprendre notre environnement. non en la combattant : c’est là un autre point important, mais qui dépasse le
cadre de notre histoire.
De nos jours, le service taxonomique qui est assuré principalement dans les
musées d‘histoire naturelle a élargi son champ d’application en perfectionnant
ses méthodes et ses techniques. Le service taxonomique revêt une importance
croissante par exemple pour divers types d‘enquêtes sur la faune. Celles-ci, à
leur tour, sont de plus en plus utiles pour enregistrer les modifications que
l’activité humaine imprime à la nature, directement ou indirectement. L’impor-
tance de cet aspect est illustré d’autre part dans le présent numéro. Les tech-
niques taxonomiques appliquées aujourd’hui couvrent un large éventail depuis
les méthodes morphologiques et morphométriques jusqu’aux techniques histo-
logiques et sérologiques hautement spécialisées. Dans certains musées, tels que
le British Museum (histoire naturelle) à Londres et le Musée de zoologie d‘Am
Arbor (Michigan), des sections spéciales ont été créées pour un service taxo-
nomique fondé partiellement ou intégralement sur les méthodes histologiques
et/ou biochimiques.
Pour en revenir à la bilharziose, on a découvert que les schistosomes, de
même que les escargots qui leur servent de vecteur, se répartissent d‘une
manière très complexe entre différentes races et souches ayant chacune un com-
portement distinct. La susceptibilité et la résistance varient de l’une à I7autre,
ces caractéristiques pouvant être déterminées par un seul gène ou tout au plus
quelques-uns. C’est dire que la taxonomie doit pouvoir établir des distinctions
tout à fait mineures entre des formes très voisines, ce qui ne rend pas la tâche
plus aisée. Quoi qu’il en soit, notre jeune zoologue qui, d’ailleurs, n’est plus
très jeune, s’est orienté dans une tout autre voie puisqu’il est aujourd’hui un admi-
nistrateur ayant connu le sort de tant d’autres hommes de science. I1 est chargé
de l’administration d’un musée d‘histoire naturelle, mais participe aussi d’une
manière très active aux expositions, ce qui est en quelque sorte une tâche d’&du-
cation : il était donc tout naturel qu’on lui demandât de rédiger le présent article.
IO1
-

Le Musée de Nagarjunakonda Grace McCann Morley

Le rapport existant entre le musée de site et les monuments ou les fouilles


auxquels il est associé peut présenter de multiples aspects, selon la nature des
édifices et du site lui-même, les objets m i s au jour et les mesures qu'exigent leur
conservation et leur présentation. Bien que le musée de site soit aujourd'hui
généralement consu comme un local permettant non seulement d'abriter, mais
aussi de montrer, en les mettant en valeur, les objets qui ne peuvent Stre exposés
en toute sécurité dans leur lieu d'origine, même si on le connaît, ce musée rem-
plit très souvent une fonction de sauvegarde. Tel était bien son but au départ et,
dans certains endroits, il continue à jouer ce rôle. Dans bien des cas, il revêt
la forme d'un simple abri protégeant des sculptures contre les intempéries ;
parfois, il n'est qu'une enceinte à ciel ouvert, assurant au moins une protection
contre le vol.
Tel qu'on le consoit aujourd'hui, le musée de site n'a plus seulement pour
fonction d'abriter et de protéger. I1 doit aussi présenter, commenter et expli-
quer. Par un déploiement de cartes, plans, diagrammes, croquis de reconstruc-
II3
tions, photographies des fouilles divers stades, etc., accompagnés d'explica- Nagarjunakonda. L~ riyi&reKrishna a
tions détaillées, et par la présentation méthodique des objets mis au jour, le l'endroit 0ì1 elle forme le Nagariuna
faisant une île de la colline de Nagarjuna
musée de site devient le complément et I'ihstration des fouilles et monuments (vue prise du haut de la colline).
I02 Grace McCann Morley

auxquels il est associé ; bref, il n'a plus seulement pour but de conserver, mais
aussi d'interpréter.
Aucune autre région du monde n'a une histoire aussi longue que celle de
l'Asie où se sont succédé bien des civilisations, chacune laissant derrière elle
une quantité de vestiges de monuments, accompagnés des objets qu'on y
trouve habituellement. I1 existe déjà dans plusieurs pays d'Asie bon nombre
d'excellents exemples de musées de site qui non seulement remplissent bien
leur fonction de sauvegarde, mais fournissent aussi une N interprétation D de
haute qualité.
Mais c'est assurément à Nagarjunakonda, en Inde, que se trouve le musée
de site le plus remarquable, qui n'a peut-être son pareil nulle part ailleurs :
on a réussi à y conserver de précieux témoignages du passé qui risquaient fort
de disparaître complètement et l'on a transporté et reconstitué à proximité les
monuments qui s'élevaient sur le site originel. On trouve exposés dans ce musée
les objets découverts au cours des travaux de déblaiement et de fouille systé-
matique et, avec ses neuf monuments reconstruits sur une colline proche, deve-
nue une île, il vise non seulement à protéger et à présenter avec goût le matériel
recueilli, mais aussi à l'expliquer.
Nagarjunakonda est située dans la vallée de la rivière Krishna ;les monuments
et vestiges archéologiques qui y subsistent proviennent d'un haut lieu du
bouddhisme en plein essor dans la seconde moitié du I I I ~siècle après Jésus-
Christ. Des trésors artistiques uniques au monde ont été sauvés de la destruc-
tion que risquait d'entraíner la modernisation de la région. Pour assurer l'irri-
gation et le développement hydro-électrique, la construction d'un grand barrage
sur la rivière avait été entreprise juste au-dessous du site. Le fond de la vallée
où se dressait ce grand centre bouddhique, capitale de la dynastie Ikshvaku
encore florissante au moyen âge, allait être complètement submergé, ce qui eût l
entraîné une perte considérable pour l'art et pour l'histoire. I1 fallait donc,
I
avant la mise en eau du réservoir, non seulement sauver les objets d'art mais
aussi recueillir autant de renseignements que possible sur les monuments dont
ils provenaient, leur architecture, les inscriptions qu'ils portaient, etc. Le Service
d'inspection archéologique de l'Inde, qui entreprit en 1 9 ~ la 4 réalisation de ce
programme de sauvetage, décida de déblayer et de fouiller systématiquementles
lieux pour récupérer tout ce qu'on y trouverait. Les édifices de la période boud-
dhique étaient pour la plupart construits en brique et ornés de pierres sculptées.
Beaucoup de vestiges architecturaux avaient conservé leur forme originelle
dont on pouvait déduire l'usage auquel les édi-fices étaient destinés. Cela permit
aussi de se faire une idée du plan de ce centre religieux et de la capitale voisine.
Des quantités de pierres de revêtement et de frises de stoupas, finement sculp-
tées, des représentations du bouddha provenant de mausolées étaient dispersées
sur le sol, les marches en pierre de lune et les balustrades sculptées des perrons
du monastère étant restées en place. Une fois terminés les travaux de déblaie-
ment et de fouille, il fallut photographier les lieux, faire des dessins cotés des
vestiges architecturaux et établir le relevé de l'emplacement des monuments
avant de les transporter et de les reconstruire au-dessus de la ligne de montée
des eaux
Nagarjunakonda (la colline de Nagarjuna ; konda signifie colline en télegou,
la langue locale) est située à environ 170 kilomètres par la route de Hyderabad,
dans l'Andhra Pradesh, au sud de l'Inde. Elle emprunte son nom au philosophe
bouddhiste Nagarjuna, qui aurait vécu au I I ~siècle après Jésus-Christ, mais
dont l'association avec ces lieux est purement légendaire. Elle se nommait à
l'origine Vijayapuri et devint, pendant le deuxième quart du I I I ~siècle, la capi-
tale de la dynastie Ikshvaku, conquérants et successeurs des Satavahanas qui
avaient régné sur la région et bien au-delà, pendant plusieurs siècles. Ce sont les
Satavahanas qui firent ériger le grand stoupa d'Amaravati et l'ornèrent de
magnifiques pierres sculptées, de l'an I Z J à l'an 240 aprts Jésus-Christ. Ce
stoupa est situé à 176 kilomètres de Nagarjunakonda, un peu en aval sur la
Le Musée de Nagarjunakonda 103

114
NAGARJUNAKONDA MUSEUM,
Nagarjunakonda. Plaque de revctement
d'un tambour de stoupa, où sont
représentés les Cléments de la décoration
du stoupa dont provient la plaque. Le
sculpteur a représenté en haut de la plaque
le stoupa avec un tambour vertical contre
lequel est placée aux quatre points
cardinaux une plate-forme ayaka surmontée
des cinq piliers caracttristiques des stoupas
de la région. Sur le tambour s'élève le
dóme du stoupa, revêtu d'autres plaques
de pierre sculptte. La paroi en pente qui
surmonte ces plaques et les diverses frises
de pierre sont ornées de guirlandes,
festons, mtdaillons, etc., en stuc. Tout en
haut se trouve le harmika, sorte de
plate-forme couronnée par une
représentation stylisée de parasol, qui
servait parfois de reliquaire. Les
personnages volants qui remplissent les
écoinçons sont des adorateurs apportant
des offrandes. Au bas de la plaque est
représentée la balustrade délimitant le
déambulatoire, qu'on suivait pour faire le
tour du stoupa dans le sens des aiguilles
d'une montre. La balustrade est percée
d'une porte encadrée des dieux assis.
A l'extérieur de la balustrade se dressaient
parfois des piliers surmontés d'un
emblème bouddhique comme celui qu'on
voit ici. La statue du bouddha assis paraît
etre simplement un motif décoratif. Les
objets exposés au musée sont des parties
de ces divers éltments en pierre sculptée
du stoupa, des fragments architecturaux de
portes de monastkres, quelques statues et
des inscriptions.

rive sud de la rivière ICrishna. Découvert en 1797, la plupart de ses pierres


sculptées, qui risquaient d'être utilisées comme matériau de construction ou
calcinées pour en faire de la chaux, furent épargnées. Ce stoupa est célèbre par
les nombreuses sculptures qui ornent ses panneaux, ses pierres de revêtement,
la tablette de la balustrade qui l'entourait, et par d'autres fragments architec-
turaux, qui sont d'excellents exemples de l'art ancien de l'Inde et font l'admi-
ration des visiteurs du British Museum à Londres, depuis 1880 1, et du Musée
de Madras, depuis une date un peu plus tardive 2.
Les vestiges beaucoup plus nombreux de Nagarjunakonda, ses monuments
bouddhiques considérés comme un prolongement de l'art sculptural $Amara-
vati dans sa dernière période, n'ont pas encore fait l'objet d'une étude aussi
détaillée car les archéologues en ignorèrent l'existence jusqu'en 1926. Le site de
I. Douglas BARRETT, Scrllptmsfrom Anzarur,uati ir2
Vijayapur couvrait une superficie d'environ 23 miles carrés sur la rive sud de la t 5 e British Afusewz, Londres, Trustees of the British
rivière Krishna. I1 était limité de trois côtés par la chaîne de montagnes Nalla- Museum, 1914,76 p., 48 pl.
2. C. S I v A R A ~ i A h m R r I ,(( Amaravati sculptures in
malai et, du quatrième, par la rivière. Les travaux de déblaiement et de fouille the Madras Governmcnt Museum n, Bdletiii of the
Aladrux Gotariment Miswm, New Series, General
furent commencés en 1927 par le Service d'inspection archéologique, ils se Section, vol. IV, hiadras, Madras Government Press,
poursuivirent jusqu'en 1731 et furent repris pour peu de temps en 1938 *. On 1942 (2" éd., 19>6), 376 P.. 41 Pl.
3. A. H. LONGHURST, (( The Buddhist antiquitits of

édifia un petit musée sur une colline de faible altitude dominant la vallée pour Nagarjunakonda, Madras Presidency )), lzIemoires of
the ,4rrhaeological Siirisey of Ilidia (Calcutta), no j4, 1938.
p abriter les nombreuses pierres sculptées qu'on avait découvertes. I1 restait 4. T. N. R,4hfACHANDRAN, (( Nagarjunakonda,
1938 n, Alenloires of the .4rchaeolg~icaical Sriruey of Itzdiu
encore beaucoup à faire pour découvrir d'autres vestiges bouddhiques, des (Calcutta), 1956.
I04 Grace McCann Morley

k '1'

II rb

III
Nagarjunakonda. Monuments reconstruits
sur l'île. u) Vestiges de l'abside d'un
temple et statue du bouddha. b) Le
Mahachaitaya (grand stoupa). Le plus
ancien des monuments avec plate-forme
ayaka et fragments de colonnes, mais ne
portant pas de sculptures. Ce stoupa de
27,5 mètres de diamètre a ttt: construit en
une vingtaine d'années sous le patronage de
Chamtasri, sœur bouddhiste du roi
vichnouiste Chantamula. c) Enceinte
entourant un stoupa.

IIJC

stoupas et des monastères, ainsi que des vestiges de la capitale voisine


d'Ikshvaku et des monuments de la période médiévale. Le site demeura tou-
tefois protégé et bien entretenu, jusqu'en 19j4,date à laquelle le Service d'ins-
pection l a q a son opération de sauvetage au moment où la construction d'un
barrage sur la rivière Krishna allait transformer cette partie de la vallée en un
vaste réservoir, faisant ainsi disparaître à jamais les témoignages d'une lointaine
et importante époque de l'art et de l'histoire de l'Inde.
Le Service d'inspection entreprit de déblayer et de fouiller systématiquement
toute la vallée et les collines avoisinantes situées au-dessous de la future ligne
de montée des eaux. Les travaux durèrent six ans et aboutirent à la découverte
de plus de IOO sites depuis le début de l'âge de la pierre jusqu'à la fin du moyen
âge. Tous les vestiges d'habitat humain, tous les fragments architecturaux et
tous les objets découverts furent transportés en lieu sûr après qu'on en eut fait
des dessins cotés et un inventaire photographique complet dans leur état ori-
ginel sur le site même.
' Outre ces vestiges bouddhiques, on a trouvé à Nagarjunakonda de nombreux
témoignages d'époques préhistoriques successives - depuis des outils de l'âge
Le Musée de Nagarjunakonda 105

paléolithique fabriqués il p a presque deux cent mille ans, des lieux de peuple-
ment et de sépulture néolithique, des ustensiles en poterie grise, de nombreux
récipients à bec datant de 3 o00 ans avant Jésus-Christ, jusqu’à des sépultures
mégalithiques avec leurs poteries noir et rouge et leurs objets de fer, et même
des bijoux d’or datant de la deuxième moitié du Ier millénaire avant Jésus-
Christ. Ce furent toutefois le vaste site bouddhiste et les ruines d’Ilrshvaku, la
capitale, fondée dans le deuxième quart du I I I ~siècle, qui retinrent surtout
l’attention. On fut renseigné sur cette cité par les ruines de la citadelle, par des
bassins amquels on accédait par des gradins, des puits, des citernes, un sys-
teme d’égouts, le plan de la ville avec ses maisons en moellons cimentés avec
de la boue. L’atelier d’un orfèvre et d‘autres artisans, quelques temples hindous
apparemment dépourvus de sculptures. Mais c’est sur le site bouddhiste que
l’on découvrit les vestiges les plus importants. Certains stoupas, comme le
grand stoupa d’Amaravati, étaient ornés de plaques de pierre richement sculp-
tées, dont la forme et la dimension variaient selon leur emplacement sur le
monument. L‘usage auquel servaient les stoupas est révélé par leur représen-
tation sur de nombreuses plaques de pierre entourant leur tambour. Cependant,
tous les stoupas n’étaient pas ainsi ornés. Le plus ancien, appelé le Mahachaitya,
dans lequel on a trouvé une relique, ne portait pas de sculptures. A part cela,
il était construit sur le méme plan que celui d’Amaravati et de nombreux stou-
pas de l’Inde méridionale qui existent encore : ils ont tous la m&meplate-forme
saillante aux quatre points cardinaux, surmontée de cinq piliers.
Contrairement à celui $Amaravati, les stoupas de Nagarjunakonda ne
semblent pas avoir eu de balustrades de pierre sculptée, bien que sur leurs
plaques de revêtement, comme sur celles d’Amaravati, figurent des balustrades
qu’on pensait peut-être ajouter plus tard (fig. 114). A d‘autres égards, ce type
de plaques de revêtement et maints autres fragments architecturaux ressemblent
beaucoup, par le sujet représenté et par le décor, à ceux d‘Amaravati, dont ils
semblent prolonger l‘art sculptural dans sa dernière période.
Le fond de la vallée, les collines et les hautes rives surplombant le lit de la
rivikre, qui avaient été creusés profondément au cours des millénaires et allaient
étre submergés une fois le barrage terminé, furent explorés minutieusement.
La tâche la plus difficile consista à démonter les monuments, à les transporter
pierre par pierre dans des lieux sûrs où l’eau ne les atteindrait pas, et à les
reconstituer ensuite. Certains monuments intéressants, mais moins étroitement
associés aux principaux stoupas et vestiges de monastères, furent installés sur
les collines de la rive est du réservoir. Neuf des plus typiques et des plus impor-
tants, en tant que témoignages de la vie et de l’art bouddhiques, furent trans-
plantés (fig. I I J a, b, c) sur une colline isolée dominant le fond de la vallée et
qui, après la construction du barrage et la mise en eau du réservoir, devint une

116
II6
NAGARJUNAKONDA MUSEUM,
Nagarjunakonda. Vue d’ensemble du
nouveau bjtiment inauguré en 1966 au
sommet de la colline. Du fait de la
formation du Nagarjuna Sagar (Sagar =
mer ou grande nappe d’eau), à la suite de
la construction d‘un barrage sur la rivikre
de Krishna, la colline est devenue une íle.
L’aspect du musée rappelle les formes
architecturales des palais et des portes
monumcntales de ville de l’tpoque, telles
qu’on les voit sur les sculptures de
Nagarjunakonda.
I 06 Grace McCann Morley
-___

'17
NAGARJUNAKONDA MUSEUM,
Nagarjunakonda. Hall d'entrée.
a) Vue d'ensemble. Les murs des salles
sont peints en rose pâle, sur lequel se
détache la teinte verdâtre des sculptures en
calcaire. Les pikdestaux et les socles des
vitrines sont en teck poli brun foncé,
matériau utilisé dans les musées indiens
à cause de sa solidité et de sa résistance aux
attaques des insectes. Au milieu, sur un
piédestal rond et bas, un bouddha debout
et une dalle du type pierre de lune qui
fermait le seuil d'un temple. Le long des
murs, de chaque côté, des fragments de
frises. Au fond à gauche, vitrines d'objets
préhistoriques. 6) Coin gauche au fond :
vitrines où sont riunis des outils en pierre
datant de diverses époques prkhistoriques,
avec des notices indiquant leur emploi.
rr8
NAGAR JUNAKONDA MUSEUM,
Nagarjunakonda. Galerie principale : du
fond de la travée centrale, on aperçoit à
l'extrémité opposée le bouddha du hall
d'entrée auquel cette galerie est
perpendiculaire. Fragments de statues
représentant sans doute le bouddha.
Au deuxième plan, sur un piédestal, un
parasol qui abritait à l'origine un bouddha.
Des vitrines contenant des pikces plus
petites sont placées autour des piliers ou
entre eux.
119
NAGARJUNAICONDA MUSEUM,
Nagarjunakonda. Galerie de l'est, travée
latérale : grande jarre en terre cuite sur
piédestal ; contre le mur, tambour de
stoupa et plaques de revstement de dôme.
Le Musée de Nagarjunalsonda 107

île (fig. 119). Là aussi, on construisit un grand musée qui a été inauguré en
1966 (fig. 116). Son aménagement intérieur dans lequel la teinte verdâtre des
grandes plaques de pierre sculptées se détache sur un fond rose pâle offre un
remarquable exemple de technique muséologique moderne, tant du point de
vue esthétique que du point de vue didactique (fig. 117-119). L'île tout entière
est ainsi devenue musée de plein air où sont présentés des monuments typiques,
bien sélectionnés, portant des étiquettes explicatives très détaillées. AU centre
s'élève le grand musée, qui abrite les plaques sculptées des stoupas et plusieurs
centaines d'autres pièces, depuis des objets de l'ère préhistorique jusqu'à des
images sculptées hindoues et djaïnes de la période médiévale.
Le musée a été c o n p pour servir d'introduction aux monuments et il est
pourvu d'inscriptions, de graphiques, de diagrammes, de photos, de dessins,
et même d'assemblages de fragments disposés de fason à bien montrer la place
qu'ils occupaient à l'origine sur les monuments. Une petite salle du musée
contient une maquette à l'échelle de six mètres de long (I centimètre = 960
mètres) représentant la vallée et ses environs et indiquant l'emplacement topogra-
phique de quelque cent vingt sites m i s au jour. Autour de cette grande maquette
gravitent cinquante petites maquettes des -principaux monuments 5 (fig. 12 I ) .

I20
NAGARJUNAKONDA MUSEUM,
Nagarjunakonda. Maquette des
monuments situés près du musée.

1. C a l c i ~ h .The Nogarjunakorida Miseuin, par. I<. R.


Les monuments situés sur l'île et avoisinant le musée sont reliés entre eux Vijayaraghavan, Superintending Archaeologist, Head,
par un chemin qui permet de les visiter en une heure environ. On peut s'assurer Museums Branch Archaeological Survey of India,
1972(encore inkdit mais prdtk gracieusement).
les services d'un guide, mais des notices explicatives sont placées à côté de 6. N. S.4RKAR et B. N. MISR.A, AGgaijwakorrda.
New Delhi, Archaeological Survey of India, 1966, ill.
chaque monument. On a planté des arbres et des arbustes et aménagé des jar- 7. Voir aussi: Afr,scum, vol. XVIII, no -1.. 1965,
dins près du musée pour rendre les lieux plus agréables et plus attrayants et les p. 191-219,fig. 57-j9:((Les m u s h de l'Inde )); et
vol. XIX, no 4, 1966, p. zj9-272: ((Le stage d'&'rudes
situer dans un décor spectaculaire au milieu du grand lac. On a installé sur l'île sur les musées: un stimulant et un evemple )>.
des lieux de repos de diverses catégories àproximité du musée et sur le parcours
des visiteurs, mais ils ne nuisent en rien à l'harmonie du site. I1 existe un service
de ferry-boat, mais il n'est assuré, avec une fréquence suffisante, que le
dimanche et les jours fériés, où un grand nombre de visiteurs se déversent dans
l'île. Ce sont surtout des touristes indiens venus admirer le barrage et le grand
réservoir, le Nagarjuna Sagar. La visite du musée et de l'exposition en plein air
des monuments reconstitués fait partie de l'excursion. Cet ensemble est encore
pratiquement inconnu des touristes étrangers. Le Service d'inspection archéolo-
gique a publié un excellent petit guide sur le site, le musée et les monuments. Le
rapport scientifique relatifà l'ensemble de l'opération sera publié prochainement.
Comme les autres musées de site, qui sont maintenant au nombre d'une
vingtaine en Inde, le musée de Nagarjunakonda ainsi que les monuments
reconstruits sur l'île et sur les collines avoisinantes sont l'oeuvre de la Section
de muséologie du Service d'inspection archéologique de l'Inde 7, qui en assure
la gestion. [Tradziif de I'aagJais]
108

Les musées et les problèmes de la vie quotidienne


Grete Motsny

La dlffusion : élément permanent de la culture


Lorsqu'on étudie les inventions et les innovations depuis les temps préhisto-
riques, on constate qu'elles sont apparues dans des foyers restreints et se sont
diffusées ensuite par cercles de plus en plus larges. C'est pourquoi les anthropo-
logistes culturels considèrent la diffusion comme une loi fondamentale de la
culture.
Le mode de diffusion des traits culturels a varié selon les ethnies et les
époques. Dans un lointain passé, le contact direct, physique, entre l'auteur et le
récepteur de l'innovation était nécessaire ; avec la découverte de l'écriture, de
l'imprimerie et des moyens modernes de diffusion de la pensée, ce contact est
devenu indirect, ce qui lui a fait perdre sa puissance de conviction et la finesse
des nuances, mais l'a rendu accessible à un nombre très supérieur d'individus ;
de la tribu, l'œkoumène s'est agrandi aux dimensions de tout le globe.
Ces possibilités ont permis l'avènement d'une culture mondiale, aux traits
fondamentaux identiques, et à laquelle appartiennent les pays développés et les
couches supérieures des nations en voie de développement. Cette culture
mondiale constitue pour la plupart des gens un idéal auquel ils aspirent en rai-
son des avantages, surtout techniques, qu'elle offre. I
Mais les technologies ne sont que des créations. Le créateur est toujours
l'homme dont l'acceptation ou le refus décide de leur transfert. Or l'homme
est un être complexe : son intelligence le rend avide d'en savoir davantage, de ,
1
remplacer le connu par le nouveau, en sorte qu'il confond changement et pro-
grès ; mais l'homme est aussi mû par des sentiments puissants, notamment par
la peur de l'inconnu, qui le fait hésiter à accepter des idées et techniques nou-
velles de nature à introduire des changements - donc une insécurité - dans
son existence. Cette ambiguïté, que tout individu porte en lui, présente cer-.
taines nuances : dans les sociétés intégrées à la culture technologique mondiale,
et dans les couches les plus privilégiées qui participent à cette culture et qui se
sentent plus sûres d'elles-mêmes, prévaut un profond désir de changement
dont elles attendent des avantages encore plus grands. Les sociétés tradition-
nelles et les couches moins favorisées, en revanche, se sentent menacées par
l'innovation, quelle qu'en soit la nature, et la considèrent comme une atteinte
à leur sécurité, déjà précaire. L'attrait du nouveau est contrebalancé par la
crainte de l'inconnu. Tout en étant conscientes de leurs besoins, elles ignorent
comment agir pour les satisfaire et se réfugient dans la coutume et la tradition.
Elles ne savent à qui s'adresser pour dissiper leurs doutes.
Les musées et les problèmes de la vie quotidienne 103

Les musées, agents de la diffusion


Les musées, qui, comme la plupart des institutions contemporaines,:traversent
une crise idéologique et matérielle, sont par nature des moyens de diffusion'
massive de la pensée qui, à leurs messages, ajoutent une troisième dimension,
celle de l'objet.
Rares sont les conservateurs de musées et plus rares encore les autorités
publiques qui ont pris conscience des possibilités immenses qu'ouvre une telle
qualité et de la façon dont les musées peuvent aider les gens à améliorer leur
vie quotidienne, à découvrir de nouveaux horizons, à acquérir de nouvelles
motivations et curiosités, à s'informer, à répondre à leurs besoins et à choisir
les techniques qui leur permettront de forger le plus efficacement leur propre
destin. Le musée est peut-être la seule institution dont la vocation soit à la fois
d'informer le grand public et de répondre aux goûts et aux besoins de chaque
individu.
Pour accomplir sa tâche d'animateur et d'informateur de la communauté,
offrir davantage que des connaissances - louables en soi - sans lien avec la
vie quotidienne, le musée doit adopter des méthodes modernes conformes aux
tendances actuelles, c'est-à-dire utiliser, pour ses buts propres, des méthodes
qui ont déjà été appliquées dans d'autres branches du savoir 1.
Un moyen serait de faciliter le transfert des techniques, qu'il s'agisse de pro-
cédés ou de matériels.
Dans un monde vociférant qui a fait de la publicité une science, l'homme
est continuellement assailli d'affirmations lui vantant la valeur de tel système
philosophique ou même d'un simple détergent ; on sensibilise ainsi sa cons- Enero 1972 Museo NacionaI de Historia Naturai
S
cience. Ces sollicitations sont si nombreuses et si contradictoires qu'il en vient,
soit à ne plus écouter personne, soit à vivre dans la perpétuelle incertitude du
parti à prendre. I1 doit alors savoir qu'il existe, non loin, un musée où il pourra
trouver, sous forme d'une exposition, d'une conférence ou d'un cours, l'infor-
mation qu'il cherche et où son intérêt sera éveillé et motivé, ce qui lui permettra
de porter un jugement personnel sur ce que le monde extérieur veut lui impo-
ser. De là à essayer ce qui lui paraît convenir, il n'y a qu'un pas et, une fois
convaincu, il adoptera tout naturellement cette solution.

Le musée en action ))
<(

y la BatstUa de fa €on&
Dans cette perspective, le Musée national d'histoire naturelle de Santiago
t (Chili) a organisé un stage d'initiation à la science destiné aux adultes. Ce stage AUSPIC1AN
a rassemblé, après leur journée de travail, une dizaine de personnes, pour la
plupart ouvriers et ménagères. Quatre thèmes avaient été retenus : d'abord,
I donner un aperçu général du musée, de ses salles d'exposition, ateliers et labo-
III
ratoires afin de montrer que le musée est un service de la communauté auquel &fUSEO L HISTORIA
N A C I O N A DE NATUnAL,
on peut recourir lorsqu'on le désire, ce qui permettait de répondre à la ques- Santiago (Chile). Affiche annonpnt le
premier cours d'étC pour travailleurs sur
tion inévitable: que fait toute la journée le personnel d'un musée? Sous le les ressources naturelles renouvelables et la
L
titre (( Un monde dans une goutte d'eau)), le deuxième thème consistait à faire lutte pour l'édification du Chili.
observer au microscope une goutte d'eau du robinet et une autre provenant
d'un petit bassin situé en face du musée. C'était la première fois que les parti-
cipants se servaient d'un microscope. Cette expérience nouvelle se doublait,
pour eux, d'une autre découverte : la goutte d'eau apparemment transparente
du bassin était pleine d'organismes vivants dont ils n'avaient jamais soupsonnk
l'existence. Spontanément, ils décidèrent de faire désormais bouillir toute eau
qui ne proviendrait pas du robinet, parce qu'ils avaient compris pourquoi les
médecins et les responsables de la santé publique insistaient tant sur ce point.
Cette simple expérience avait permis de leur communiquer la (( technique de
l'eau bouillie n et de la leur faire adopter. Le troisième thème portait sur les I. Cette necessitt a ,ongucment discutee au couIs
champignons ; 1; encore, grande fut la surprise des stagiaires en constatant, de la table ronde dc I'Unesco sur l'adaptation des
mnstes au monde contsmporain (Santiago, Chili,
au microscope, que la levure d'usage domestique n'est qu'un champignon. De mai 197+).
IIO Grete Motsny

même, ce qu’ils considéraient comme une petite tache grise inoffensive dans le
pain se trouvait être un champignon, la moisissure, dangereux pour la santé.
La transformation de l’image d’objets et de substances de leur vie quotidienne
éveilla leur intérêt et leur curiosité et ils voulurent savoir ce qu’il en était du
sucre, de cheveux, de produits détersifs, qu’ils apportèrent pour les regarder
et les admirer à travers l’objectif magique. Ils arrivèrent ainsi à la dernière séance
avec un esprit ouvert, et pénétrés de l’idée que la science avait aussi un message
pour des gens sans grande instruction comme e u ; car on ne leur avait pas
demandé s’ils savaient lire et écrire avant de les placer devant le microscope.
La nécessité de protéger les ressources naturelles renouvelables et la pollution
atmosphérique, dont ils avaient déjà entendu parler, formaient le thème de cette
dernière séance. Ces gens modestes auxquels s’adressait ce stage très simple
ont non seulement manifesté leur satisfaction, mais ils ont demandé à être
convoqués pour le prochain.
Une expérjence analogue a été faite à l’occasion du cours d’été pour travail-
leurs que le musée a organisé en collaboration avec l’Université technique de
l’État (fig. 121). Pendant ce cours, qui portait sur les ressources naturelles, les

122
MUSEO DE HISTORIA
NACIONAL NATURAL,
Santiago (Chile). a) Une petite exposition
réalisée avec des moyens trts simples par
le groupe de professeurs-guides du Musée
national d‘histoire naturelle à l’occasion de
la IIIe Conférence des Nations Unies sur le
commerce et le dCveloppement (CNUCED)
a attiré un nombreux public ;
en outre, une brochure fournissait aux
visiteurs des renseignements de base sur la
IIIe CNUCED. b) L’un des montages de
matériel graphique consacrés à la
IIIe CNUCED. Les illustrations avaient
été découpées dans d’anciens numéros de
périodiques et les légendes étaient écrites à
la main. c) Carte du monde montrant la
situation géographique des pays
participants ; on peut y voir le drapeau de
chacun d‘eux et des données de base le
concernant.

I22b I22 G
Les musées et les problèmes de la vie quotidienne III

participants ont visité divers lieux afin qu’ils puissent constater personnelle- 123
M U S E O N.4CIONAL DE HISTORIA
NATURAL,
ment les atteintes portées à la nature par l‘intervention inconsidérée de I’homme. Santiago (Chile). Vitrine contenant des
Une autre initiative du musée s’est déroulée à la campagne, non loin de la outils préhistoriques de pierre ; à côté de
chaque pike, on a reprksenté par un dessin
capitale. Il s’agissait - à la demande de paysans - de leur indiquer les noms l’outil moderne correspondant, ce qui
des éléments composant la flore et la faune qui les entouraient ;à cette occasion établit un lien entre la vie prkhistorique
et la vie quotidienne d’aujourd‘hui.
furent aussi élaborées des règles simples sur des questions présentant pour eux 124
un intérêt pratique. HISTORIA
hILlSE0 N . ~ C I O N A LDE NATURAL,
Santiago (Chile). hlallettes scientifiques
I1 y a quelques mois, au moment où devait se réunir à Santiago la IIIe Confé- consacrées à divers sujets. Elles contiennent
rence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), la du matériel didactique confectionné par
des muséologues formés au Centre national
population tout entière, mise au courant par les moyens d‘information du grand de muséologie pour etre preté aux écoles et
public, s’est intéressée à cet événement; pour répondre à de nombreuses coIlèges.
demandes et interrogations, le Service éducatif du musée organisa une petite
exposition dont le but était de préciser la signification du sigIe CNUCED, où
avaient eu lieu les deux précédentes réunions, quels en étaient les objectifs, ce
que représentait le tiers monde, etc. (fig. 122 a , b, c) ; outre cette illustration
sous forme graphique du thème de l’exposition, une brochure contenant les
principales informations sur la question fut remise aux visiteurs. Enfants et
adultes se pressaient devant les vitrines et la mappemonde et le musée tout
entier résonnait des conversations animées de petits groupes qui discutaient -
en experts - de la IIIe Conférence des Nations Unies sur le commerce et le
développement.
Ces quelques exemples montrent comment un musée, quel qu’il soit, peut
s’intégrer à la vie de la communauté, non seulement dans des circonstances
particulières, mais à propos des problèmes de la vie quotidienne qui, en fin
de compte, sont ceux qui préoccupent le plus la population (fig. 123, 124) ;
comment un musée peut donner à son public, surtout aux couches de la popu-
lation les moins favorisées, l’impression réconfortante qu’elles participent elles
aussi au développement culturel, scientifique et technique de la société, en
éveillant leur intérêt et leur curiosité, en leur transmettant des connaissances et,
grâce à ces connaissances, une plus grande assurance et l’optimisme indispen-
sable pour mener une vie active et satisfaisante. Le musée peut donner à la
population l’espoir d‘accéder elle aussi, dans l’avenir, aux avantages de la
technologie dont jouissent les pays développés et les couches favorisées des
pays en voie de développement. C‘est ainsi que se constitue la base humaine
dont dépend l’adaptation des techniques nouvelles.
Et c’est ainsi également que le musée peut se rendre indispensable, susciter
des inquiétudes légitimes par le biais de l’interprétation de l’environnement
naturel et culturel, se présenter au public comme une institution au sein de
laquelle celui-ci sait qu’il trouvera l’appui dont il a besoin et un accueil véri-
tablement amical.
[Tradziit de I’espapol]
* II2

Conclusion

Jan Jelinek Une vue rétrospective de l’évolution des musées montre que ceux-ci n’utilisent
pleinement toutes leurs possibilités d’action que lorsqu’ils participent réelle-
ment aux grands problèmes actuels de la vie de la société. On trouve de mul-
tiples exemples de ce fait : à la suite de la diffusion de l’instruction dans la
population tout entière, fruit de la Révolution fransaise, les musées se sont
développés comme centres du renouveau national, institutions d‘éducation,
lieux de création et de culture pour la jeunesse, centres de documentation, etc.
Les musées sont des institutions au service de la société et ce n’est qu’ainsi qu’ils
peuvent continuer d‘exister et d’agir.
L’un des problèmes contemporains les plus importants et qui, faute d‘une
action urgente, pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour l’huma-
nité tout entière est celui de l’écologie, ou plus généralement des relations
entre des diverses communautés, ainsi qu’à l’intérieur de chacune d‘entre elles.
Je veux dire par là qu’il ne s’agit pas seulement des relations entre communau-
tés biologiques mais aussi de celles qui s’établissent à l’intérieur de la société
humaine, en fonction de I’évolution de la culture et de la civilisation. Dans ses
rapports avec le milieu naturel qui l’entoure, l’homme a adopté, tout au long
de son évolution, ún comportement d‘ccexploiteur~ à courte vue, dont
témoignent son attitude hostile, anthropocentrique, et son incompréhension
de sa dépendance à l’égard de l’équilibre naturel régnant dans son milieu. Alors
mème qu’il continue à dépendre pour une part, biologiquement et culturelle-
ment, du milieu naturel, il s’ingénie à créer lui-mème, artificiellement, un milieu
culturel dont il dépend également, biologiquement et culturellement.
Le problème est donc devenu plus vaste et plus complexe, dans la mesure
où le milieu de vie se compose aujourd’hui tout à la fois du milieu naturel et
du milieu culturel, avec les multiples conséquences qui en découlent. L’expres-
sion (c écologie humaine N parfois employée n’est certainement pas la plus
adéquate, car elle conduit à faire des activités humaines des phénomènes physio-
logiques, alors qu’elles ne sont évidemment pas un simple reflet des processus
biologiques. Elles sont aussi et pour une large part le résultat de l’évolution
culturelle et technologique de l’homme : en tant que telles, l’homme peut s’en
rendre maître et les réglementer, à la condition qu’il comprenne leur nature
et leurs causes. Une approche exclusivement << physiologique )> du problème
pourrait facilement conduire à l’idée erronée que l’homme est placé en présence
de forces qu’il est incapable d’orienter et de maîtriser, à la merci desquelles il
est donc fatalement livré et qui pourraient éventuellement mettre un terme
catastrophique à son existence. Certes ce risque existe, mais il n’est pas inéluc-
table. L’immense faculté d’adaptation de l’homme, qui assure la continuité de
son évolution, ne s’applique évidemment pas uniquement à son milieu naturel
régional, mais aussi à celui qu’il a créé lui-même. S’il en était autrement,
l’homme n’aurait pu atteindre son stade actuel d’évolution, il n’aurait pu passer
de son état premier d‘Homo erectmy qui découvrait les avantages du feu, la
possibilité de s’abriter et la protection du groupe, à la société actuelle avec
tous ses problèmes. C‘est seulement dans le cas où l’homme ne pourrait s’adap-
ter aux effets divers de sa propre activité -c’est-à-dire à son milieu culturel qui
joue également un rôle biologique dans son évolution actuelle - qu’il se
trouverait dans la situation du brontosaure, incapable de s’adapter biologique-
ment au changement de son milieu naturel. Mais nous n’en sommes pas encore
là. Le fait même de discerner cette situation et d’en prendre conscience nous
permet d’adopter des mesures correctives.
Conclusion 113

Appréciation de la situation
L'homme a détérioré et continue de détériorer son milieu naturel: il empoi-
sonne l'atmosphère par des gaz, des fumées, des goudrons, voire par des radia-
tions ;il ébranle son propre système nerveux par des bruits artificiels ; il pollue
et empoisonne les eaux, potables ou utilitaires, et les rivières qu'il transforme
en égouts. On a maintes fois décrit les conséquences de la pollution des lacs et
des océans. I1 ne s'agit pas seulement des conséquences économiques directes,
qui sont considérables, mais aussi des effets sur le psychisme et le système
nerveux. La pollution de l'atmosphère, des eaux et des mers peut être maltrisée
par diverses mesures techniques, par une réglementation de la production, par
la législation et aussi, bien entendu, par l'éducation. Sans un effort d'éducation,
aucune des mesures prises n'aurait de sens.
L'exploitation inconsidérée des sources de matières premières non renou-
velables peut elle aussi être endiguée par une réglementation : il faut avant tout
instaurer une économie rationnelle et freiner la course au profit ;il faut enrayer ,

l'accumulation croissante de déchets. Ceux qui produisent ces derniers doivent


participer à leur destruction ou à leur recyclage. I1 faut aussi empêcher la dis-
parition incontrôlée d'expèces animales et végétales. Certes, en dépit de tous les
efforts, l'équilibre naturel sera toujours soumis à des processus inconnus ou
mal compris, qui constituent un grave problème permanent. Laisser libre cours
à ces processus, les abandonner sans contrôle au bon vouloir d'individus ou de
groupes poursuivant leurs propres intérêts, pourrait léser l'humanité tout
entière. Cela ne vaut pas seulement pour l'écologie, d'autres problèmes se
--. posent dans le milieu de vie de l'homme, plus restreint. L'urbanisation, avec
l'expansion de villes de béton aux dimensions insensées, l'environnement arti-
ficiel avec sa climatisation et son éclairage : est-ce un milieu approprié pour
l'homme? Et la situation actuelle de notre planète, envahie de surfaces béton-
nées ou asphaltées, blessée par les lacs et les barrages artificiels, par les travaux
de drainage, par tant d'interventions arbitraires sur une nature où tout dépend
de tout et s'équilibre mutuellement ;tout cela ne compromet-il pas un équilibre
précaire ? Et encore, puisque nous avons parlé d'urbanisme, notre habitat lui-
même, le mode et le cadre de vie, n'est-ce pas une question d'environnement?
Même après un a p e r p aussi bref, il est clair que la situation actuelle de dété-
rioration et de dévastation de l'environnement relève aussi bien des sciences
naturelles que des sciences sociales. Cependant aucune des atteintes qui lui
sont portées n'est inaccessible ni irrémédiable.

Les conséquences
Toute activité humaine irréfléchie a des conséquences multiples et diverses.
Ce qui nous préoccupe ici, ce sont les atteintes à la santé des hommes, atteintes
qui pourraient entraîner une liquidation définitive de la race humaine. I1 faudrait
énumérer ici toute la gamme de ces atteintes, depuis les troubles causés aux
individus, qui sont souvent d'origine professionnelle, jusqu'à l'empoisonne-
ment massif par les déchets industriels ou les retombées atomiques, en passant
par la consommation croissante de médicaments. De plus, le viol des lois de la
nature, la mauvaise organisation de la grande production industrielle comme
de toutes nos activités affament ou appauvrissent des individus, des groupes,
des populations entières. Dès lors, des questions se posent. Quel est le prix
de la pollution, de la destruction du milieu naturel et du milieu de vie, d'une
production irréfléchie et inconsidérée, de la guerre, mode de destruction le
plus important et le plus radical du milieu de vie?
Le seul moyen efficace de lutte est l'éducation qui fait prendre aux hommes
conscience de ces problèmes et leur apprend à assumer leurs responsabilités,
qui permet la constitution d'une opinion publique, instrument le plus puissant
et base la plus sûre d'un redressement de la situation.
1I 4 Conclusion

Le rôle des musées


Les musées sont traditionnellement des institutions éducatives dont le rôle,
compte tenu des besoins actuels de l’éducation, prend sans cesse une impor-
tance accrue. Afin de pouvoir mener à bien leurs activités éducatives, les musées
doivent poursuivre des programmes de recherche et de documentation, l’en-
semble étant lié d‘une manière ou d‘une autre aux problèmes du milieu naturel
et du milieu de vie.
Ainsi l’environnement est devenu un thème essentiel de l‘action des musées
dans le monde entier. Dans le domaine des sciences humaines, c’est évidemment
l’histoire contemporaine qui doit être au centre des musées d’aujourd‘hui.
Mais, nous dira-t-on, des musées de ce genre sont bien rares ! En effet, il ne
s’agit pas ici de musées de sciences et de techniques ou de musées d’histoire des
techniques qui ne concernent qu’un aspect de l’histoire culturelle. Nous vou-
lons parler de musées qui présentent les problèmes et les besoins de la société
. actuelle dans leur perspective historique puisqu’il s’agit d’un processus qui
évolue dans le temps.
L’écologie, de même que la biologie, la physiologie, la génétique ou la socio-
logie, étudie des relations et des processus : les expositions faisant appel à ces
disciplines sont de nature complexe et utilisent des ensembles d‘objets appar-
tenant à de nombreux domaines différents, objets qui peuvent, après la clôture
de l’exposition, être replacés dans leurs collections systématiques d‘origine.
Naturellement, on peut créer des musées spécifiquement écologiques ou
sociologiques, d’ampleur plus ou moins grande, consacrés aux problèmes de
l’environnement. Mais ce qui importe ici est le sujet lui-même et les activités ,
éducatives qui en découlent. Les musées, qu’ils soient situés en dehors des
grandes agglomérations - relevant de la recherche écologique - ou qu’ils
soient au cœur de ces agglomérations - relevant alors de la recherche socio-
logique - sont en général particulièrement bien placés pour la recherche de
terrain. A notre époque, en effet, une collection ne se constitue pas autrement
si l’on veut qu’elle réponde aux exigences scientifiques les plus actuelles. De
plus, tout critère scientifique nouveau exige une nouvelle recherche sur le ter-
rain et l’acquisition de nouvelles collections.
Une documentation moderne et adéquate est la seule base pour les études
écologiques et sociologiques ; pour ces deux disciplines, le terrain joue le rôle
de laboratoire. Les musées, et plus particulièrement les petits musées situés sur
le terrain même de la recherche, sont les mieux placés pour le rassemblement
et l’exploitation de la documentation sur un sujet déterminé et limité. Dans le
domaine de l’environnement, ils peuvent devenir des sortes de centres-relais
de documentation, car la documentation du milieu naturel et du milieu de vie
ainsi que la conservation de celui-ci font partie de leur programme de travail.
En outre, grâce à leurs propres recherches et à la documentation qu’ils auront
constituée, ils auront les moyens de traiter le sujet de leur choix dans le cadre
de leur action éducative. Le musée moderne doit suivre constamment les muta-
tions qui affectent le milieu, dans sa région ; ses collections biologiques ou
sociologiques doivent illustrer, entre autres, les processus de mutation, car
elles ne sont plus composées comme par le passé d‘objets uniques et isolés,
mais bien d’échantillons représentatifs dont la valeur de témoignage est diffé-
rente, beaucoup plus large.
Pour étudier les problèmes de l’écologie et pour promouvoir leur étude, les
jardins zoologiques et botaniques, lorsqu’ils sont consus de .fason moderne,
prennent une importance particulière. Ce sont des musées écologiques spécia-
lisés bien qu’ils soient encore trop souvent de simples cabinets de curiosités,
vestiges des temps révolus. Dans leur conception traditionnelle en effet, les
collections d’organismes vivants n’étaient que rarement liées à une recherche
scientifique dont le point de vue était plus large. On exposait la totalité des
collections, sans distinguer entre collection de base et collection d‘étude, et la
Jan Jelinek 11J

présentation, de même que l'activité éducative, n'était que très simplifiée,


même rudimentaire, se bornant généralement à montrer l'objet sans l'accom-
pagner de l'information suffisante. Cependant, les meilleurs parmi les jardins
zoologiques et botaniques ont des programmes de recherches très précis, ils
entreprennent l'élevage ou la culture d'organismes vivants dans des réserves
ou banques de gènes permettant une étude approfondie et la conservation
d'espèces particulières, voire de (( populations D entières. Ces cultures, comme
la présentation moderne de spécimens représentatifs de diverses espèces, se
font dans des conditions qui sont les plus proches possible du milieu orga-
nique d'origine. De telles institutions sont les meilleurs auxiliaires dans la lutte
pour la conservation de l'environnement et de son équilibre. Elles auront sans
aucun doute à jouer un rôle scientifique éducatif et économique considérable.
Si nous comparons un jardin zoologique moderne avec un musée d'art ou
d'ethnographie, et si nous prenons plus particulièrement en considération les
méthodes d'acquisition des collections de base de ces institutions, il est aisé
de faire ressortir clairement les principes essentiels de la muséologie moderne.
D'une manière générale, ni la recherche scientifique ni I'éducation ne sont la
responsabilité exclusive du musée ; plusieurs autres institutions existantes en
sont aussi chargées. La spécificité du musée réside dans le fait que toutes ses
activités s'appuient sur un matériel à trois dimensions. I1 en résulte que la
formation des collections, en tant que système de documentation, est la seule
fonction où le musée ne fait double emploi avec aucune autre institution. C'est
seulement dans le musée que la recherche est d'une manière générale liée à la
création des collections, à leur classification, à leur explication ; de ces collec-
tions découle naturellement toute l'activité de présentation et d'éducation.
Le chercheur, au cours de son travail, rassemble une collection d'étude.
L'élaboration de cette collection est habituellement à la base d'une publication
scientifique. I1 y a déjà là un certain choix parmi le matériel disponible mais,
une fois que le problème scientifique posé a été résolu, on peut, à partir de la
collection d'étude, choisir à nouveau un échantillon représentatif plus limité,
ou les spécimens qui contiennent à eux seuls la quantité d'informations requise.
Ce nouveau choix entre alors dans la collection de base. Le processus de sélec-
tion décrit ici peut être appelé t( muséalisation )) et l'objet sélectionné acquiert
une valeur de (( muséalité D.
I1 est évident que toute sélection, dont nous avons vu qu'elle est à l'origine
de la création des collections de base, doit reposer sur des points de vue, des
critères et des codes qui lui sont propres. Nous devons donc accorder une
importance fondamentale à l'établissement du code selon lequel seront déter-
minées la nature et la quantité des informations nécessaires en vue de la sélec-
tion des objets. Cela représente l'une des parties les plus importantes de la
muséologie en tant que discipline autonome et démontre que l'objet même de
celle-ci est constitué par les collections et par les objets appartenant à ces
collections.
Pour en revenir au sujet de I'écologie et de la sociologie, du milieu naturel
et du milieu de vie, il est évident que l'on ne peut plus parler de collections
spécialisées au sens des disciplines scientifiques classiques, mais qu'elles doivent
plutôt représenter les relations et les processus à l'intérieur de ces disciplines et
entre elles. C'est pourquoi elles e i g e n t des codes particuliers établis unique-
ment en vue de leur constitution. La clef de ces codes est constituée par les
questions auxquelles les collections de base doivent être à même d'apporter
une réponse.
Je souhaite que cet article contribue à éclairer les moyens par lesquels un
musée moderne peut aider, par la recherche, la documentation et la présen-
tation, à résoudre les problèmes de l'environnement naturel et culturel dont
l'importance pour la société contemporaine est fondamentale.
Docaments unnexes

Programme adopté par 1'Icom


lors de sa sixième Conférence générale,
La Haye, 1962 (extraits)'

Moyens qui s'offrent aux musées, devant l'expansion rapide de plus exactement ceux d'entre eux qui, associés à des musées, par-
la civilisation industrielle, d'aider à préserver l'héritage naturel tagent des préoccupations, des habitudes de travail, ont en
et culturel de l'humanité : commun la charge de conserver des biens, d'éduquer et d'orien-
On assiste de notre temps à l'expansion sans cesse accélérée du ter un public. L'Icom a en outre vocation de favoriser entre
machinisme. I1 n'est pas question, certes, d'en nier les bienfaits. pays à des stades de développement divers, à l'aide du puissant
Mais ses progrès, d'autre part, mettent en péril un irremplaçable levier qu'est le musée, des échanges d'intérêt mutuel.
patrimoine de nature et de culture, nécessaire à l'kquilibre et au Les occasions doivent donc être saisies de convier de tels
bonheur de l'homme. experts à confronter leurs expériences et leurs aspirations, àaider
La mise en valeur des terrains en friche, l'application d'engins à la recherche des solutions à proposer aux pouvoirs publics,
mécaniques à l'exploitation des richesses du sol, à la peche, à la solutions auxquelles ils habitueront l'opinion de leurs pays
chasse, à l'agriculture, à l'élevage, à la circulation, l'ouverture respectifs. Ils pourront ensuite contribuer à leur application
de routes et de canaux, l'aménagement du lit des fleuves, la cons- dans un esprit de coopération, après avoir pu en proclamer,
truction de grands ouvrages et d'usines, l'extension des villes unanimes, la ntcessité du haut de la tribune de l'Icom.
bouleversent les équilibres naturels, polluent les airs et les eaux, 1.6 Un colloque sera organisé à ce sujet par l'Icom, auquel seront
réduisent le précieux empire de la nature sauvage et en dimi- conviés des experts des musées venus de divers pays, représen-
nuent les chances d'étude. tatifs des principales disciplines intéressées : experts auxquels
Les mêmes causes entraînent la destruction des gisements seront invités à se joindre des représentants d'autres organisa-
archéologiques - avant que des fouilles stratigraphiques aient tions internationales et, bien entendu, de l'Unesco et de son
permis d'en réaliser l'étude et d'en recueillir les témoins - la Comité des monuments ainsi que du Centre de Rome et de la
destruction ou la mutilation d'édifices ruraux ou urbains, de vil- Campagne pour la sauvegarde des monuments de Nubie.
lages ou de quartiers de ville, la destruction ou le déracinement 1.7 Vu la complexité des préparatifs à prévoir, le colloque se dérou-
d'innombrables éléments mobiliers, témoins des techniques et lera en 1965, le lieu en serait déterminé, au plus tard, lors de la
des arts antérieurs à l'ère industrielle. Des cultures disparaissent session de juillet 1963 du Comité exécutif de 1'Icom. Un crédit
avec l'éclatement des systèmes économíques et sociaux qui de base d'un montant de 3 o00 dollars sera inscrità cet effet dans
étaient la condition de leur existence. Il arrive même que le budget de 1365.Des ressources supplémentairessont escomp-
périssent des groupes humains, victimes d'une aveugle et trop tées du pays hóte et aussi d'organisations nationales dont on
soudaine acculturation. Que de pertes pour les sciences sait déjà qu'elles ont un préjugé favorable à l'égard du projet.
humaines telles que l'histoire de l'art, l'histoire, l'archéologie, Ainsi, somme toute, l'objectif est-il à la fois modeste et ambi-
l'ethnologie! Que de frustrations, que de malheurs pour tieux : convier à une rtflexion commune quelques hommes qua-
l'homme! lifiés et de bonne volontk pour déclencher, on l'espère, l'Unesco
La nécessité apparaît de plus en plus d'une politique de contrôle aidant, de plus puissantes actions. Procédure qu'encouragent de
et de protection concernant ces domaines. Dans cette (( part du précédentes et heureuses expériences.
feu)) qu'il faut se résigner à prévoir, comment imposer, à
l'avance et à temps, l'étude et les sauvetages indispensables ?
Oh et comment dresser l'infranchissable barrière, protectrice
des réserves sacrées ?
Pour atteindre de tels buts, une coopération s'impose, sous
l'égide des pouvoirs publics ; une compréhension doit être
recherchée entre représentants des diverses disciplines scienti-
fiques intéressées, et les équipes d'agronomes, d'ingénieurs,
d'urbanistes, d'architectes, de juristes, etc., que groupent les
services publics ou compagnies industrielles responsables de la
conception et de la mise en œuvre des programmes économiques
et techniques. I1 faut aussi saisir l'opinion. Or l'Icom - qu'on
n'oublie pas d'ailleurs la brillante participation des musées
scientifiques et techniques à son développement - rassemble
des experts qualifiés de la plupart de ces disciplines. I1 rassemble

I. Nottuelles de I'lcam (Paris), vol. V, n o 17, no 516, oct.-déc. 1962.


Documents annexes 117

Conférence des Nations Unies sur l'environnement,


Stockholm, 1972

La grande Conférence des Nations Unies sur l'environnement s'est prendre position dans les rapports nationaux qu'ils ont présent& à la
tenue à Stockholm du 5 au 16 juin 1972.Outre les 114 délégations conférence. La très large publicité qui a entouré les travaux a évidem-
gouvernementales participantes, 300 représentants d'organisations ment contribué à attirer l'attention du grand public sur ces problkmes,
non gouvernementales et plus de I loo représentants de la presse, tandis que le vif intérst manifest6 par les moyens de communication
de la radio et de la télévision ont suivi les travaux de la conférence. de masse, l'homme de la rue, les diverses organisations, etc., contri-
La préparation a dure deux ans, pendant lesquels les gouvernements buait nécessairement à persuader les délégués et les responsables que
participants ont établi des rapports sur les problèmes et les activités la prise en charge des problèmes de l'environnement à l'échelon inter-
liés à l'environnement dans leurs pays respectifs et une commission national était considérée comme un événement majeur par l'ensemble
préparatoire, dont les membres venaient de 27 pays différents, a ras- de la société.
semblé les rapports et les comptes rendus d'expériences avec l'aide Les (( confkrences parallbles )) organisées à Stockholm pendant la
de spécialistes de la protection de la nature appartenant à différentes meme période ont eu des effets analogues. La plus importante était
parties du monde. De ce travail préparatoire sont issues plus de peut-être le Forum sur l'environnement, où ont eu lieu des discus-
I 00 propositions de recommandations, réparties en six grands sions animées, portant principalement sur les problèmes des pays en
domaines : I. Aménagement et gestion des établissements humains ; voie de développement, la population mondiale et la protection de la
2. Gestion des ressources naturelles du point de vue de l'environne- faune et de la flore. Des débats, des projections de films et des confé-
ment ;3. Détermination des polluants d'importance internationale et rences ont également été organisés sur ces sujets dans le cadre du
lutte contre ces polluants ; 4.Aspects éducatifs, sociaux et culturels Forum populaire, patronné par diverses associations politiques et
de l'environnement et problème de l'information ; 5 . Dkveloppement groupes de protection de la nature.
et environnement ; 6. Conséquences internationales et institution- I1 n'est évidemment pas facile de dire à l'avance quels seront exac-
nelles des mesures proposkes. Les recommandations adressées aux tement les effets de la conférence. I1 faut remarquer qu'elle n'a pas
Nations Unies, aux gouvernements et à d'autres organismes ont été seulement abouti à des résolutions et à des recommandations sur la
élaborées dans trois commissions séparées avant d'être discutées et politique à suivre en matière d'environnement, mais qu'elle a pro-
adoptées en séance plénibre. Pendant toute la conférence, on a tra- posé de créer, dans le cadre des Nations Unies, une organisation
vaillé aussi àla rédaction définitive de la Déclaration sur l'environne- permanente - un conseil d'administration des programmes relatifs
ment, qui a été examinée le dernier jour en séance plénibre et qui est à l'environnement - et donné des indications sur la façon dont le
reproduite ci-aprks. travail de ce nouvel organisme pourrait être coordonné avec les
On a beaucoup discuté sur la valeur de cette conférence et des autres activités des Nations Unies.
opinions très divergentes ont été exprimées. Les partisans les plus Cependant, les résultats réels de tous ces efforts dépendront de la
ardents et les plus radicaux de la protection de la nature ont trouvk volonté de chaque gouvernement d'agir dans le sens indiqué par la
les recommandations et les résolutions beaucoup trop vagues et pas conférence. Les particuliers, les organisations et les établissements
assez contraignantes. Ils ont aussi fait remarquer que bien des peuvent jouer un rôle important à cet égard. En empèchant la dis-
problèmes brûlants n'avaient mSme pas été effleurés. On ne pouvait cussion de retomber et en faisant un travail d'information et d'édu-
cependant pas attendre de cette conférence, la premiere du genre, cation à l'égard des problbmes de l'environnement, ils contribueront
qu'elle apportit des solutions aux problkmes extrèmement nombreux à accroître la pression de l'opinion publique sur les hommes poli-
et complexes que soulève actuellement l'environnement. Le simple tiques et à favoriser ainsi l'adoption de mesures de protection de la
fait qu'elle ait pu avoir lieu constituait un premier résultat positif, car nature plus efficaces et mieux coordonnées.
cela a obligé tous les gouvernements participants à faire l'inventaire
des problkmes que pose, dans leur pays, la protection de la nature et à KJELLENGSTRÖM

2. La protection et l'amélioration de l'environnement sont une


Déclaration de la Confkrence des Nations question d'importance majeure qui affecte le bien-Ctre des popula-
Unies sur l'environnement tions et le développement économique dans le monde entier ; elle
correspond au vœu ardent des peuples du monde entier, et constitue
t La Conférence des Nations Unies sur l'environnement, un devoir pour tous les gouvernements.
3. L'homme doit constamment faire le point de son expérience et
S'itarat rimie à Stockholm du j au 16 juin 1972, et continuer à découvrir, à inventer, à créer et à avancer. Aujourd'hui,
ce pouvoir qu'a l'homme de transformer le milieu dans lequel il vit,
Ayatzf examitzd la nécessité d'adopter une conception commune et des s'il est utilise avec discernement, peut apporter à tous les peuples les
principes communs qui inspireront et guideront les efforts des bienfaits du développement et la possibilité d'améliorer la qualité de
peuples du monde en vue de préserver et d'améliorer l'environ- la vie. Utilisé abusivement ou inconsidérément, ce m&mepouvoir
nement, peut causer un mal incalculable aux êtres humains et à l'environne-
Proclame ce qui suit : ment. Les exemples de dommages, de destruction et de dévastation
provoqués par l'homme se multiplient sous nos yeux en de nom-
I.L'homme est à la fois créature et créateur de son environnement, breuses régions du globe : on constate des niveaux dangereux de pol-
qui assure sa subsistancephysique et lui offre la possibilitk d'un déve- lution de l'eau, de l'air, de la terre et des ètres vivants ;des perturba-
loppement intellectuel, moral, social et spirituel. Dans la longue et tions profondes et regrettables de l'équilibre écologique de la bio-
laborieuse évolution de la race humaine sur la terre, le moment est sphere ;la destruction et l'épuisement de ressources irremplaçables ;
venu où, grâce aux progrès toujours plus rapides de la science et de enfin de graves déficiences qui sont dangereuses pour la santé phy-
la technique, l'homme a acquis le pouvoir de transformer son envi- sique, mentale et sociale de l'homme, dans l'environnement qu'il
ronnement d'innombrables manitres et à une échelle sans précédent. crée, et en particulier dans son milieu de vie et de travail.
Les deux éléments de son environnement, I'klément naturel et celui 4. Dans les pays en voie de développement, la plupart des pro-
qu'il a lui-meme créé, sont indispensables à son bien-Ctre et à la blbmes de l'environnement sont causés par le sous-développement.
pleine jouissance de ses droits fondamentaux, y compris le droit à la Des millions d'hommes continuent à vivre bien au-dessous des
vie m@me. niveaux les plus bas compatibles avec une vie humaine décente, pri-
II8 Documents annexes

vés du nécessaire en ce qui concerne l'alimentation, le vktement, le 3 . La capacité du globe de produire des ressources renouvelables
logement, l'éducation, la santé et l'hygiène. En conséquence, les essentielles doit être préservée et, partout où cela est possible, rétablie
pays en voie de développement doivent orienter leurs efforts vers le ou améliorée.
développement, en tenant compte de leurs priorités et de la nécessité 4. L'homme a une responsabilité particulière dans la sauvegarde
de préserver et d'améliorer l'environnement. Dans les pays industria- et la sage gestion du patrimoine constitué par la flore et la faune
lisés, les problèmes de l'environnement sont généralement liés à sauvages et leur habitat, qui sont aujourd'hui gravement menacés
l'industrialisation et au développement des techniques. Dans le par un concours de facteurs défavorables. La conservation de la
même but, les pays industrialisés doivent s'efforcer de réduire l'éart nature, et notamment de la flore et de la faune sauvages, doit donc
entre eux et les pays en voie de développement. tenir une place importante dans la planification pour le développe-
5 . L'augmentation naturelle de la population pose sans cesse de ment économique.
nouveaux problèmes pour la préservation de l'environnement et il 5 . Les ressources non renouvelables du globe doivent être exploi-
faudrait adopter, selon que de besoin, des politiques et des mesures tées de telle façon qu'elles ne risquent pas de s'épuiser et que les avan-
appropriées pour régler ces problèmes. Les hommes sont ce qu'il y a tages retirés de leur utilisation soient partagés par toute l'humanité.
de plus précieux au monde. C'est le peuple qui anime le progrks 6. Les rejets de matières toxiques ou d'autres matières et les déga-
social et crée la richesse de la société, qui développe la science et la gements de chaleur en des quantités ou sous des concentrations telles
technique et, par son dur travail, transforme sans cesse l'environne- que l'environnement ne puisse plus en neutraliser les effets doivent
ment. Avec le progrès social et l'évolution de la production, de la être interrompus de façon à éviter que les écosystèmes ne subissent
science et de la technique, l'aptitude de l'homme à améliorer son des dommages graves ou irréversibles. La lutte légitime des peuples
environnement se renforce chaque jour. de tous les pays contre la pollution doit être encouragée.
6. Nous sommes à un moment de l'histoire où nous devons orien- 7. Les Rtats devront prendre toutes les mesures possibles pour
ter nos actions dans le monde entier en songeant davantage à leurs empècher la pollution des mers par des substances qui risquent de
répercussions sur l'environnement. Nous pouvons, par ignorance ou mettre en danger la santé de l'homme, de nuire aux ressources bio-
par négligence, causer des dommages considCrables et irréversibles à logiques et à la vie des organismesmarins, de porter atteinte aux agré-
l'environnement terrestre dont dépendent notre vie et notre bien- ments naturels ou de nuire A d'autres utilisations légitimes de la mer.
ètre. En revanche, en approfondissant nos connaissances et en agis- 8. Le développement économique et social est indispensable si l'on
sant plus sagement, nous pouvons assurer, à nous-mêmes et à notre veut assurer un environnement propice àl'existence et au travail de
postérité, des conditions de vie meilleures dans un environnement l'homme et créer sur la terre des conditions nécessaires à l'améliota-
mieux adapté aux besoins et aux aspirations de l'humanité. I1 existe tion de la qualité de la vie.
de larges perspectives pour l'amélioration de la qualité de l'environ- 9. Les déficiences de l'environnement imputables à des conditions
nement et la création d'une vie heureuse. I1 faut de l'enthousiasme, de sous-développement et à des catastrophes naturelles posent des
mais aussi du sang-froid ; des efforts intenses, mais aussi une action problèmes graves, et le meilleur moyen d'y remédier est d'accélérer
ordonnée. Pour jouir librement des bienfaits de la nature, l'homme le développement par le transfert d'une aide financière et technique
doit tirer parti de ses connaissances en vue de créer, en coopération substantielle pour compléter l'effort national des pays en voie de
avec elle, un environnement meilleur. Défendre et améliorer l'envi- développement et l'assistance fournie en tant que de besoin.
ronnement pour les générations présentes et à venir est devenu pour IO. Pour les pays en voie de développement, la stabilité des prix
l'humanité un objectif primordial, une tâche dont il faudra coordon- et une rémunération adéquate pour les produits de base et les matières
ner et harmoniser la réalisation avec celle des objectifs fondamentaux premières sont essentielles pour la gestion de l'environnement, les
déjà fixés de paix et de développement économique et social dans le facteurs économiques devant être retenus au même titre que les pro-
monde entier. cessus écologiques.
7. Pour que ce but puisse être atteint, il faudra que tous, citoyens et I I. Les politiques nationales d'environnement devraient renforcer
collectivités, entreprises et institutions, à quelque niveau que ce soit, le potentiel de progrks actuel et futur des pays en voie de développe-
assument leurs responsabilités et se partagent équitablement les ment, et non l'affaiblir ou faire obstacle à l'instauration de meilleures
tâches. Les hommes de toutes conditions et les organisations les plus conditions de vie pour tous. Les fitats et les organisations interna-
diverses peuvent, par les valeurs qu'ils admettent et par l'ensemble tionales devraient prendre les mesures voulues pour s'entendre sur
de leurs actes, déterminer l'environnement de demain. Les autorités les moyens de parer aux conséquences économiques que peut avoir,
locales et les gouvernements auront la responsabilité principale des au niveau national et international, l'application de mesures de pro-
politiques et de l'action à mener en matière d'environnement dans les tection de l'environnement.
limites de leur juridiction. Une coopération internationale n'est pas 12. Il faudrait dégager des ressources pour préserver et améliorer
moins nécessaire pour réunir les ressources nécessaires afin d'aider l'environnement, compte tenu de la situation et des besoins parti-
les pays en voie de développement à s'acquitter de leurs responsabi- culiers des pays en voie de développement et des dépenses que peut
lités dans ce domaine. Un nombre toujours plus élevé de problèmes entrainer l'intégration de mesures de préservation de l'environne-
d'environnement, de portée régionale ou mondiale ou touchant au ment dans la planification de leur développement, et aussi de la néces-
domaine international commun, exigeront une coopération étendue sité de mettre à leur disposition à cette fin, sur leur demande, une
entre les pays et une action de la part des organisations internatio- assistance internationale supplémentaire, aussi bien technique que
nales dans l'intérèt de tous. La Conférence demande aux gouverne- financière.
ments et aux peuples d'unir leurs efforts pour préserver et améliorer I 3. Afin de rationaliser la gestion des ressources et ainsi d'améiio-
l'environnement, dans l'intérêt des peuples et des générations futures. rer l'environnement, les &ats devraient adopter une conception inté-
grée et coordonnée de leur planification du développement, de façon
que leur développement soit compatible avec la nécessité de protéger
et d'améliorer l'environnement dans l'intérêt de leur population.
PRINCIPES
14.Une planification rationnelle est un instrument essentiel si l'on
Exprime la conviction commune que : veut concilier les impératifs du développement et la nécessité de
prkserver et d'améliorer l'environnement.
I. L'homme a un droit fondamental à la liberté, à l'égalité et à des I 5 . En planifiant les établissements humains et l'urbanisation, il
conditions de vie satisfaisantes, dans un environnement dont la qua- faut veiller à éviter les atteintes à l'environnement et à obtenir le
lité lui permette de vivre dans la dignité et le bien-Stre. I1 a le devoir maximum d'avantages sociaux, économiques et écologiques pour
solennel de protéger et d'améliorer l'environnement pour les généra- tous. A cet égard, les projets conçus pour maintenir la domination
tions présentes et futures. A cet égard, les politiques qui encouragent du colonialisme et du racisme doivent être abandonnés.
ou qui perpétuent l'apartheid, la ségrégation raciale, la discrimina- 16.Dans les régions où le taux d'accroissement de la population
tion, les formes, coloniales et autres, d'oppression et de domination ou sa concentration excessive sont de nature à exercer une influence
étrangères, sont condamnées et doivent être éliminées. défavorable sur l'environnement ou le développement, et dans celles
2. Les ressources naturelles du globe,.y compris l'air, l'eau, la où la faible densité de population risque d'empêcher toute améliora-
terre, la flore et la faune, et particulièrement les échantillons repré- tion de l'environnement et de faire obstacle au développement, il
sentatifs des écosysttmes naturels, doivent être préservés dans l'in- faudrait mettre en œuvre des politiques démographiques qui res-
térêt des générations présentes et à venir par une planification ou une pectent les droits fondamentaux de l'homme et qui soient jugées
gestion attentive selon que de besoin. adéquates par les gouvernements intéressés.
Documents annexes 119

17. I1 convient que des institutions nationales appropriées soient de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage
chargées de planifier, de gérer ou de rtglementer l'utilisation des à l'environnement dans d'autres Etats ou dans des régions ne rele-
ressources de l'environnement dont disposent les Etats, en vue vant d'aucune juridiction nationale.
d'améliorer la qualité de l'en~ironnement. 22. Les &ats doivent coopérer pour développer encore le droit
18. I1 convient de recourir à la science et à la technique, dans le international en ce qui concerne la responsabilité et l'indemnisation
cadre de leur contribution au développement économique et social, des victimes de la pollution et d'autres dommages écologiqyes que
pour déceler, éviter ou limiter les dangers qui menacent l'environ- les activités menées dans les limites de la juridiction de ces Etats ou
nemem et résoudre les problèmes qu'il pose, et d'une manière géné- sous leur contrôle causent à des régions situtes au-delà des limites de
rale pour le bien de l'humanité. leur juridiction.
19. I1 est essentiel de dispenser un enseignement sur les questions 23. Sans préjudice des critères qui pourront itre retenus par la
d'environnement aux jeunes gtnérations aussi bien qu'aux adultes, en communauté internationale, ni des normes qui devront etre définies
tenant dfiment compte des moins favorisés, afin de développer les à l'échelon national, il faudra dans tous les cas tenir compte des
bases nécessaires pour éclairer l'opinion publique et donner aux échelles de valeurs prévalant dans chaque pays et de l'applicabilité
individus, aux entreprises et aux collectivités le sens de leurs respon- de normes qui sont valables pour les pays les plus avancés mais qui
sabilités en ce qui concerne la protection et l'amelioration de l'envi- peuvent ne pas &re adaptées aux pays en voie de développement, et
ronnement dans toute sa dimension humaine. I1 est essentiel aussi $tre pour ces pays d'un coht social injustifié.
que les moyens d'information de masse évitent de contribuer à la 24. Les questions internationales se rapportant à la protection et à
dkgradation de l'environnement et, au contraire, diffusent des infor- l'amélioration de l'environnement devraient être abordées dans un
mations de caractère éducatif sur la ntcessité de protéger et d'amélio- esprit de coopération par tous les pays, grands ou petits, sur un pied
rer l'environnement afin de permettre à l'homme de se développer d'égalite. Une coopération par voie d'accords multilatéraux ou bila-
à tous égards. téraux ou par d'autres moyens appropriés est indispensable pour limi-
20. On devra encourager dans tous les pays, notamment dans les ter efficacement, prtvenir, rCduire et eliminer les atteintes à l'environ-
pays en voie de développement, la recherche scientifique et les acti- nement résultant d'activités exercées dans tous les domaines, et ce
vités de mise au point technique, dans le contexte des probltmes dans Ie respect de la souveraineté et des intérêts de tous les Etats.
d'environnement, nationaux et multinationaux. A cet égard, on 2 y . Les Etats doivent veiller à ce que les organisations internatio-
devra encourager et faciliter la libre circulation des informations les nales jouent un rôle coordonrd, efficace et dynamique dans la préser-
plus récentes et le transfert des données d'expérience, en vue d'aider vation et l'amélioration de l'environnement.
d la solution des problèmes d'environnement ; on devra mettre les 26. I1 faut épargner à l'homme et à son environnement les effets
techniques intéressant l'environnement à la disposition des pays en des armes nucléaires et de tous autres moyens de destruction massive.
voie de développement, à des conditions qui en encouragent une Les Etats doivent s'efforcer, au sein des organes internationaux
large diffusion sans constituer pour eux une charge économique. appropriés, d'arriver, dans les meilleurs délais, à un accord sur Yéli-
21. Conformément à la Charte des Nations Unies et aux principes mination et la destruction complète de telles armes.
du droit international, les Gtats ont le droit souverain d'exploiter
leurs propres ressources selon leur politique d'environnement et ils 2r e séame plénisre
ont le devoir de faire en sorte que les activités exercees dans les limites 16jihi 1972

Colloque Musée et environnement (( )) I

organisé par l'Icom, Bordeaux, Istres, Lourmarin, Paris, 2j-30 septembre 1972

LES F O N C T I O N S D U M U S B E
Extraits des conclusions
L a recherche et la docitmetitation
LA P L A C E D U h f U S É E
9. La recherche sur l'environnement ne peut se contenter d'une
5 . Le muste est l'un des instruments dont se dotent les sociétés simple collaborationentre science?de la nature et sciences de l'homme
humaines pour étudier les problèmes du monde moderne, leur cher- (celles-ci incluant Ia sociologie et I'économie). I1 devrait y avoir inté-
cher des solutions et communiquer au public les éléments ainsi ras- gration des objectifs, des programmes et des méthodes.
semblés. Parmi ces problèmes, l'altération accélérée de l'environne- IO. L'importance de la typologieltaxonomie doit Stre soulignée et
ment est l'un des plus graves : le musée doit donc lui consacrer ses renforcée ; cette importance, loin de diminuer avec le temps, ne fait
\ efforts. qu'augmenter au fur e t à mesure que de nouvelles méthodes d'étude
\ 6. Le musée est une institution au service de la communauté ; il de l'environnement apparaissent. Cependant l'acquisition de spéci-
\ peut prendre des formes diverses, musée construit traditionnel ou mens, d'origine naturelle ou culturelle, ne prend tout son sens que si
I
musée en plein air, comprenant la grande majorité des institutions elle s'accompagne du rassemblement de toute l'information corres-
existantes, ou encore musée éclaté, musée de quartier, ces deux types pondante sur I'écologie et la fonction de chaque spécimen.
d'institutions recherchant en priorité une symbiose totale avec la I I. Il a été constaté que la recherche ne suit pas toujours d'assez
communauté desservie. L'emplacement du musée dans sa commu- près les conséquences du développement économique et des trans-
nauté et ses relations avec celle-ci sont en tout état de cause d'une formations culturelles ou sociales. Elle est aussi trop souvent sans
importance primordiale pour l'efficacitk du rôle joué par ce musée lien avec les problèmes les plus urgents, donc incapable de contri-
au service de cette communauté. buer à la solution de ceux-ci. I1 semble de la plus haute importance
7. Le contenu d'un musée n'affecte en rien la vocation de celui-ci que certains ensembles de phénomènes (retombées de la croissance,
en matière d'environnement. Ce qui préctde et ce qui suit s'applique urbanisation, modification des relations sociales, exploitation des
7 tgalement, mtfafismidatidis, aux musées d'art, d'histoire, de sciences ressources naturelles particulièrement celles du tiers monde, etc.)
naturelles et exactes, et de technologie, aux musées spécialisés ou fassent l'objet d'études systématiques, de manière aussi opération-
multidisciplinaires, aux musées de site ou aux parcs zoologiques, nelle que possible.
jardins botaniques, etc.
L a pédagogie et Z'actìon Pdrrcatkw
I, Rapjorf j%al et co~zc/i~sions,Collaqfie (( hh't ef eizr~ironfieuieizt)), Irom, octobre 1972
(7z/ENV. 17). Ces conclusions constituent un texte de hase pour les futures 12. I1 est urgent et essentiel que l'éducation, et notamment celle que
discussions des membres de !'Icom à ce sujet. le musée peut dispenser avec l'aide de son propre langage, s'applique
I20 Documents annexes

à faire comprendre les problèmes de l’environnement, tant rural 22. Les considerations qui précèdent s’appliquent plus particulière-
qu’urbain, sous leurs aspects à long comme à court terme, à l’en- ment aux musées de tous programmes, situés dans des environne-
semble de la population, jeune et adulte, dont l’aliénation vis-à-vis ments ruraux ou urbains, dont les programmes ne coïncident pas
de l’espace où elle est amenée à vivre normalement ne fait que croître. avec ces environnements. Elles s’appliquent également, en leur qua-
13. Le but d‘une telle éducation est, non pas de faire accepter des lité de principes généraux, aux nouveaux types de musées dont il
conclusions ou des doctrines préfabriquées, mais de fournir à chaque sera question plus loin.
individu et à chaque groupe le maximum d’déments d’information,
obtenus scientifiquementet tenant compte des facteurs sociaux, éco-
nomiques et politiques. Cette information, aussi liée que possible aux L’ÉC0hfUSk.E
faits réels, doit permettre au public de dégager, en toute indépendance
d‘esprit, à la fois une problématique et des solutions motivées. Pour uti m u é e spéc@qtie de I ’environnenient
14.C’est pourquoi il est souhaitable que le musée et ses respon-
sables disposent de l’autonomie nécessaire pour être en mesure 23. A tout musée ayant son siège dans un environnement rural ou
d’assurer au mieux ce rôle d’éducation et d‘information du public. urbain et dont le programme coïncide avec cet environnement, il est
I j. D’une manière générale, il convient d‘éviter la présentation par demandé, selon les possibilités de l‘institution :
le musée de thèmes et de problèmes répondant au seul choix subjectif u) De réaliser ou d’aider une étude intensive de cet environnement,
du muséologue et qui seraient sans rapport avec les préoccupations de caractère interdisciplinaire, sous ses aspects de patrimoine et de
et les besoins réels du public. Dans la constitution, au jour le jour, de développement culturels et naturels, mettant l‘accent sur les trans-
la documentation, comme dans les programmes d’activités, il est formations des systkmes de relations qui constituent l’environ-
important de suivre de près l’activité immédiate et d‘y réagir sans nement ;
retard. Les solutions musCographiques les moins coûteuses doivent 6 ) De réaliser ou d‘aider à rkaliser des fonds de documents concer-
être recherchées, de manière à limiter la dépendance des moyens nant cet environnement, revétant les diverses formes décrites plus
financiers. haut, créés par le musée ou empruntés à d’autres sources utiles,
16. La pédagogie du musée doit évoluer parallèlement à la péda- mais accessibles à tous ;
gogie scolaire, qu’il s’agisse de la structure de l’institution, de ses c) D’entreprendre, ou d‘aider à entreprendre, une politique d‘acqui-
activités, ou de la formation de son personnel éducatif spécialisé (ce sitions de séries typologiques et d‘ensembles écologiques d‘objets
dernier étant en tout état de cause absolument nécessaire). De même et de spécimens, représentatifs de cet environnement ;
que l’école (( sans murs )) connaît actuellement une vogue grandis- d) De communiauer au Dublic les biens culturels et naturels ainsi
sante, de m&mele musée ne devrait pas être considéré comme un rassemblés : directement, sous la forme de prksentations perma-
bhtiment, mais comme un ensemble d’activités de nature éducative, nentes, temporaires et circulantes, et de (( kits D, complétés le cas
reposant sur les autres fonctions habituelles de l’établissement. échéant de moyens audio-visuels, de manikre à évoquer cet envi-
17. Parmi les formules nouvelles, il convient de noter (et de pro- ronnement dans le temps et dans l’espace et à susciter la participa-
mouvoir en les perfectionnant) les itinéraires ruraux, urbains ou tion active des destinataires de ces manifestations ;indirectement,
mixtes d’initiation et d’observation, reliés à un musée qui en assure sous la forme de textes écrits et verbaux, d‘émissions radiodiffu-
le commentaire didactique initial, ainsi que les centres d‘accueil ou les sées et télévisées et d’autres mass media ;
musées de sites archéologiques et historiques, liés à un ensemble plus D’encourager la population de cet environnement à réagir à
vaste d‘environnement protégé. toutes ces entreprises du musée, et à concourir à l’élaboration
18. I1 faut répéter que l’action éducative du musée en matitre Dermanente de cet environnement :
d‘environnement ne peut s’envisager qu’en étroite coordination et f) De mener ces diverses actions, avec toute l’ampleur désirable :
coopération avec les autres institutions, spécialisées ou non, comme dans les murs du musée, auprès de son public ; hors des murs du
avec les moyens modernes de communication. musée, par des contacts avec les hommes vivant dans cet envi-
19.Le personnel spécialisé, chargé de l’animation et de l’éducation, ronnement.
devrait, dans toute la mesure du possible, soit être issu de la commu- 24. Ainsi conçue, organisée, éclatée, une nouvelle forme de musée
nauté culturelle qu’il doit servir, soit au moins agir en étroite sym- serait créée, spécifiquement et pleinement écologique, propre à rece-
biose avec cette communauté. voir le nom d‘écomusée.
20. Bien qu’une priorité doive être donnée aux problèmes immé- 21. L’écomusée deviendrait le lieu où se rencontrent ceux qui
diats de l’environnement local, tout cloisonnement serait dangereux agissent sur l’environnement, ceux qui le subissent et ceux qui y
et les échanges d’expériences doivent être encouragés avec des sec- réfléchissent.
teurs géographiques et culturels différents. C‘est ainsi que le musée 26. En raison de la complexité des problkmes que ces muskes sont
devrait placer son action éducative à des niveaux successifs, local, appelés à traiter, du caractère multidisciplinaire de leurs activités, de
national, régional, international, permettant des comparaisons et des l’absence de formation spkcifique existante, les responsables des éco-
perspectives fructueuses. musées devront etre choisis, en règle générale, pour leur engagement
21. Un rôle particulier doit être attribué au musée d‘art contem- personnel dans la cause de l’environnement et pour leur compréhen-
porain. L’artiste, en effet, peut rendre compte, par sa recherche sion des problèmes de la communication, plus que pour leurs quali-
visuelle, d’un environnement qu’il perçoit selon son imagination, sa fications de spécialistes de telle ou telle discipline. La nature même
sensibilité propres. Le musée, dépositaire et instrument de communi- de leurs tâches et de leurs responsabilitésleur imposera d’ailleurs un
cation de ces témoignages, encourage la créativité et contribue à travail d’équipe.
ouvrir l’esprit du public sur des critères, souvent nouveaux pour lui,
d’appréciation de l’environnement.
I21

Convention concernant la protection du patrimoine


mondial culturel et naturel
Adoptée par la Conférence générale de l’Unesco à sa dix-septitme session, Paris, 16 novembre 1972 (extrait)

VI. P R O G R Ahlhi E S 6D U C A T I F S

Article 27 Article 28
I. Les États parties à la présente Convention s’efforcent par tous les Les États parties à la présente Convention qui reçoivent une assis-
moyens appropriés, notamment par des programmes d’éducation et tance internationale en application de la Convention prennent les
d’information, de renforcer le respect et l’attachement de leurs mesures nécessaires pour faire connaître l’importance des biens qui
peuples au patrimoine culturel et naturel défini aux articles I et 2 ont fait l’objet de cette assistance et le rôle que cette dernitre a joué.
de la Convention.
2 . Ils s’engagent à informer largement le public des menaces qui
pèsent sur ce patrimoine et des activités entreprises en application
de la présente Convention.

Recommandation concernant la protection, sur le plan


national, du patrimoine culturel et naturel
Adoptée par la Conférence générale de l’Unesco à sa dix-septikme session, Paris, 16 novembre 1972 (extrait)

VI. ACTION É D U C A T I V E ET C U L T U R E L L E

60. Des cours réguliers, des conférences, des stages d’études, etc., 63. Toute intervention en faveur des biens du patrimoine culturel
sur l’histoire de l’art, l’architecture, l’environnement et l’urbanisme et naturel devrait tenir compte de cette valeur culturelle et éducative
devraient Ctre donnés par les universités, les établissements d’ensei- qui résulte de leur qualit6 de témoins d’un environnement, d’une
gnement à tous les niveaux et ceux qui se consacrent à l’éducation architecture et d’un urbanisme à la mesure et à l’échelle humaine.
permanente. 64. Des organisations bénévoles devraient ètre crétes afin d’eiicou-
61. Une action éducative devrait Ctre entreprise par les États rager les autorités nationales et locales àuser pleinement de leurs pou-
membres en vue d‘éveiller l’esprit de la population et de développer voirs en matière de protection, à les soutenir et éventuellementà leur
leur respect à l’égard du patrimoine culturel et naturel. Un effort procurer des fonds. Ces organismes devraient entretenir des rapports
continu devrait être poursuivi pour informer le public sur les réalités avec les sociétés historiques locales, les sociétés d’embellissement, les
de la protection du patrimoine culturel ou naturel et pour lui incul- comités d’initiative, les organismes s’occupant du tourisme, etc. ;
quer l’appréciation et le respect des valeurs qu’il comporte. A cet elles pourraient également organiser pour leurs membres des visites
effet, il faudrait faire appel, selon les besoins, à tous les moyens d’in- et des promenades commentées dans des biens culturels et naturels.
formation. 65. Des centres d’initiative, des musées et des expositions pour-
6 2 . Tout en prenant en considtration la grande valeur économique raient être organisés, pour expliquer les travaux entrepris sur les
et sociale du patrimoine culturel et naturel, des mesures devraient biens culturels et naturels réanimés.
être prises pour promouvoir et renforcer la haute valeur culturelle et
éducative de ce patrimoine qui constitue la motivation fondamen-
tale de sa protection, de sa conservation et de sa mise en valeur.
I22

Bibliographie sélective I

A . ÉCOLOGIE, ENVIRONNEMENT, MUSÉE FLAHIVE,Mary. Island idyll. A learning experience : ecology on the
coast of Maine. The explorer (Cleveland), vol. 13, no I, Spring 1971,
Bon nombre d'otivrages et d'articles sont cités dans cette liste sélective, concer- p. 11-14, ill. (A summer program of the Cleveland Museum of
nant le mirfée, dans ses rapports avec l'écologie e t l 'environnemmt. Telle qti 'elle Natural History to give young people a new kind of ecological
se présetzte, cette liste rie pent manquer de comporter de sérielises lacmes, qtre experience.)
nom serions hairem de combler avec l'aide de nos lecteiirs. GROBMAN, Arnold B. Museums and the biosphere. Aí'usermz neivs
(Washington), vol. 48, n o 8, April 1970, p. 24-29, ill.
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xv + 261 p., ill. nz14seer (Luleå), no I, 1970, p. 3-14, ill. (A propos de quatre expo-
BASEL.KUNSTHALLE. D a s offene flflseimz - die Stadt. Basel, Kunst- sitions consacrées à l'environnement, organisées par les musées de
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(Cape Town), vol. 9, no I I , June 1970, p. 36g-376. (Presidential in the service of mati :today and tomorrow. The misetmz's edzlcational and
address to the South African Museums Association, Bloemfontein,
April 1970.)
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cultural role Papers from the 9th General Coigerence of I C O M [ Le
musée at4 service des homines, aiijoiird'hzli e t demain. L e ròle édzrcafìf e t
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Les airtetirs

Harold Jefferson COOLIDGE. Né à Boston Kjell ENGSTR~M. Né en 1929. Études de de 1937 et de 1938, membre de l'équipe de
en 1904 ; B.Sc., Harvard, 1927 ; Université, zoologie, de botanique et de géographie à l'université de Cincinnati qui a fait des
de Cambridge, 1927-1928 ; D.Sc., l'Université de Stockholm, docteur ès fouilles i Troie et, pendant l'hiver,
Université George Washington, I 9 3 9 ; sciences et professeur en 1963. Secrétaire de conservateur de dermoplastique au Musée
Université nationale de Séoul, 1965. la Société suédoise pour la protection de d'histoire naturelle de Stockholm. De 1939
Zoologie comparée, Harvard, 1929-1946. la nature et rédacteur en chef de sa revue à 1945, sert dans les forces armées et les
Directeur du Pacific Science Board, (SvensÆa Natitrs~ydd~öret?it?geti),
I 95 3-19> 7. services civils ; délégué de la Croix-Rouge
National Academy of Science-NRC, 1946. Enseigne la zoologie à l'Université de internationale en Grtce en 1944. Reprend
Collaborateur de l'United States National Stockholm depuis 1955 : chargé de cours des études d'ostéologie après la deuxième
Park Service depuis 1948. Secrétaire de de 1959 à 1964, professeur adjoint (docent) guerre mondiale. Conservateur du
1' American Commission of International en 1964 et 1965. Directeur du Département Département d'ostéologie du Musée
Wild Life Protection depuis 1930 et public du Musée suédois d'histoire d'histoire et d'antiquités de Stockholm de
président de cet organisme depuis I 95 I. naturelle [Naturhistoriska Riksmuseet] 1945 à 1963. DiplGme de cand. mag. en
Conservateur du Musée Bernice P. Bishop depuis 1965. A publié des ouvrages 1947. Ph.D., 1960. Créateur du Laboratoire
depuis 1953. Président de l'Union 1
scientifiques et de vulgarisation en matière de datation au C - I ~ Stockholm,
> 1953.
internationale pour la conservation de la d'ornithologie, d'écologie, de conservation Depuis 1957, chef du Laboratoire de
nature et de ses ressources depuis 1966. de la nature et d'histologie. recherches ostéologiques de l'université de
Président de l'International Commission for Stockholm. Ph.D., 1960, Mémoire intitulé
National Parks, 1958-1963 ; secrétaire <(Westerhus, mediaeval population and

gCnCral du Xe Congrès scientifique du Nils-Gustav GEJVALL. Né en 1911 à church in the light of skeletal remains )) et
Pacifique, Honolulu, 1961. Auteur de Påryd, district de Kalmar (Suide). Études monographie sur le même sujet, Stockholm,
publications scientifiques sur les primates, de zoologie, de botanique, etc. BSc. de 1960. Chargt: de recherches d'archto-
la conservation internationale, etc. l'Université de Lund, 1936. Pendant l'été ostéologie à l'université de Stockholm de
1963 à 1969. Depuis 1969, professeur naturelle [Naturliistoriska Rilismuseet]. créée et élabore un plan d'enquetes
associé à l'Université de Stockholm ; Depuis 1965, directeur de recherches au systtmatiques pour l'Aquitaine. Participe
I I 5 communications scientifiques ou musée. Travaux antérieurs portant sur en 1964 comme stagiaire à la Recherche
articles de vulgarisation. l'anatomie comparée, l'histologie et sur la coopérative sur programme (RCP) Aubrac,
systématique et l'écologie des poissons. En organisée par le CNRS. A partir de 1968,
Martin Wyatt HOLDGATE. Né en 1931. 1950, mission en Gambie (Afrique se consacre au programme général du
Queen's College, Cambridge, B.A. occidentale). Depuis le milieu des années Musée des Landes et en suit la rtalisation
Cantab., 1952 ; M.A., 1956 ; Ph.D., 1955 ; soixante, divers travaux ayant des aspects au titre de conseiller scientifique et
F. Inst. Biol. 1967. Responsable kcologiques sur la présence de certaines technique. Entreprend une thèse de
scientifique de la Gough Island Scientific substances toxiques dans la nature. 3e cycle sur (( L'habitat et l'architecture
Survey (1955-1956). Chargé de cours en landaise traditionnelle dans la Grande lande
zoologie, Université de Manchester Bent JORGENSEN. Né en 1933 et les pays limitrophes D.
(1956-1957) ; chargé de cours en zoologie, Bornholm, île danoise de la mer Baltique.
Durham Colleges (1957-1960) ; chef de A étudié la zoologie à l'Université de Grace MCCANNMORLEY. Née en 1900 à
l'expédition de la Royal Society au Chili Copenhague, dont il est sorti en 1964 San Francisco (Calif.). Docteur ès lettres,
méridional (I 95 8-1 95 9) ; sous-directeur de titulaire d'un diplôme cand. mag., avec Paris, 1926. LI. D. honoris causa, Mills
la recherche au Scott Polar Research spécialisation dans la psychologie animale. College, 1937, D. F. A., L. H. D. Chef de
Institute, Cambridge (1960-1963) ; A été nommé la meme année chef de la la Division des musées à l'Unesco, 1947-
biologiste principal de la British Antarctic Section des expositions au Musée 1949. Directeur du San Francisco iliuseum
Survey (1963-1966). Secrétaire, Working zoologique de Copenhague et a organisé, of Arts;1935-1956. Expert du
Group on Biology, Scientific Committee on depuis lors, les programmes de nouvelles gouvernement pour l'application du Leader
Antarctic Research, de 1964 à 1968. expositions. A écrit des articles sur des Programme du Département d'Etat
Président de la British Schools Exploring questions scientifiques dans de nombreux concernant l'Orient et l'Afrique centrale,
Society depuis 1967. Directeur adjoint quotidiens scandinaves, ainsi que plusieurs le Pakistan, le Cambodge, l'Australie et la
(pour la recherche) de la Nature ouvrages de vulgarisation sur la géologie. Nouvelle-Zélande (décembre 1955 - mars
Conservancy depuis 1966. Publications : Est rédacteur en chef de l'hebdomadaire 1956). Déltgut des Etats-Unis à la
Moz4~fainsin the sea, The sfory of the Goigh Xaftirens verdeti et dirige également une IIIe Biennale, São Paulo (Brésil), 1955.
Island Expeditiotz (195 8) ; (Co-dir.) émission populaire sur la nature, diffusée Directeur adjoint du Guggenheim
Atararctic biolo,g (I 964) ; (dir.) Atitarctic toutes les semaines par la radio danoise. Museum, New York, 1956-1960. Directeur
ecology (1969) ; nombreux articles dans des Secrétaire de la Commission nationale du National Museum, New Delhi, 1960-
revues consacrées à la biologie et ouvrages danoise pour l'Icom, de 1966 à 1972. 1966. Actuellement directeur de l'Agence
sur l'Antarctique. En 1971, a été élu prhsident du Icom pour le Sud-Est asiatique. Ouvrages
IIe Comité international de l'Icom et conférences sur l'art contemporain et sur
(Comité des mustes d'histoire naturelle). les civilisations de l'Amérique latine.
Bengt HUBENDICK. Né en 1916 ; Ph.D. à
Uppsala en 1946, travaux de recherche et
de conservation au Musée national : Wilhelmina H. KAL.Études Grete MOSTNY. Études à l'Université de
d'histoire naturelle de Stockholm, d'anthropologie culturelle à l'université Vienne (Autriche) et à l'université de
1947-1958. Directeur du Musée d'histoire libre d'Amsterdam. Termine ses études en Bruxelles (Belgique) où elle a obtenu le
naturelle de Göteborg (Suède) depuis 1959. 1967 alors qu'elle était déjà attachée depuis grade de docteur en philologie et histoire
Travaux de recherche sur la bilharziose trois ans au Muske des tropiques, à orientales. Nommée en 1939 chef du
et de lutte contre cette maladie, en partie Amsterdam, dont elle est devenue depuis Service d'anthropologie du Musée national
pour l'OMS, aux Philippines, au Venezuela, conservatrice. Par l'intermédiaire de d'histoire naturelle de Santiago (Chili),
à Porto Rico, en Gambie, en Sierra Leone l'Association des musées des Pays-Bas, est dirige ce service depuis 1964. Fondatrice
et au Brésil. A publié plus d'une centaine invitée à travailler pendant six mois au et directrice du Centre national de
de mémoires scientifiques, la plupart sur les musée Carnegie, à Pittsburgh, où elle muséologie (1968). Professeur
mollusques ;plus d'un millier d'articles étudie le développement des techniques de d'anthropologie culturelle et de préhistoire
dans des journaux et revues ; et présentation et du travail éducatif dans les du Chili à l'Université du Chili. Secrétaire
cinq ouvrages sur la vulgarisation, les pro- musées américains. A l'occasion de cette du Comité international pour la formation
blèmes de l'environnement, les voyages, etc. étude, visite le musée d'anthropologie de de personnel (muséologie, 1968) et membre .
jlT
Mexico. Chargée de la région indonésienne du Conseil exécutif de l'Icom (1971).
et de l'organisation d'expositions au MusGe Auteur de nombreux travaux sur la I
Jan JELINEK. Ph.D. anthropologue. des tropiques. préhistoire du Chili.
Créateur de l'Institut Anthropos
(département du iMusée morave de Brno, Ralph H. LEWIS.B.A., M. A. (biologie)
Tchécoslovaquie) et de son exposition sur Thomas Dominic NICHOLSON. B.A.,
Université de Rochester. A étudié les St. John's University, 1950 ; R.T.S.,
l'origine et l'évolution de l'homme. méthodes muséologiques en qualité
Directeur du Musée morave de Brno Fordham University, 1953 ; Ph.D., 1962.
d'étudiant puis en qualité de boursier de la Officier de pont sur les lignes
(depuis 1958). Chef du Département de Fondation Rockefeller, Musée des sciences
muséologie de l'Université de Brno, fondé Moore-McCormack (1941-1946) ; chargé
de Buffalo. Entré en 1935 au National Park de cours en sciences navales et assistant du
en 1962. Fondateur, en 1962, et rédacteur Service, dans le département chargé des
en chef de la revue internationale directeur du département, United States
mushes, y est resté jusqu'à sa retraite, en Merchant Marine Academy (1946-195 3) ;
A ~ t h o p o s .Auteur de nombreuses 1971. Sous-directeur du département des
publications traitant d'anthropologie. conférencier, American-Museum Hayden
musées, de 1947 à 1953 ; directeur de ce Planetarium, New York (1952-1953) ;
Président du Comité international de département (1954-1964) ; directeur du
l'Icom pour les musées régionaux et, astronome associé (1953-1957) ; astronome
Département des activités muséologiques, depuis 1917, président depuis 1964 ;
depuis le début de 1964, également de 196j à 1971 ; collaborateur pour les
président du Conseil exécutif de l'Icom. chargé de cours en astronomie, United
activités muséologiques depuis 1971. States Military Academy, Yale, N.Y.U. ;
S'intéresse particulièrement aux musées de opérations de géodésie dans l'Arctique en
Alf G. JOHNELS. Ne en 1916. Docteur en site et à la conservation des collections. 195 6, dans la calotte glaciaire du Groenland
zoologie de l'Université de Stockholm en en 1958. Directeur de l'dmerican Museum
1948 ; maître de conférences la m&me François MONIOT. Licencié ès lettres à of National History. Membre de l'AAAS,
année. A exercé ces fonctions à l'université l'Université de Bordeaux. Entre en 1962 au de la Royal Astronomical Society, de
jusqu'en 1958, année oh il a été nommé Musée d'Aquitaine comme chargé de la l'American Astronomical Association.
professeur titulaire de zoologie des section d'histoire contemporaine et Auteur (avec J. M. Chamberlian) de
vertébrés au Musée national d'histoire d'ethnographie régionale nouvellement Plaaets, stars a d space, I 9 5 7 ; Adventure
I
i with stars, 1958 ;auteur de nombreux national des art5 et traditions populaires, qu'a l'étranger. Depuis onze ans, directeur
i Paris, dont il a constitué les collections du plus grand musée d'histoire naturelle
'' articles. Rédacteur en chef d'Astronomj
highlights. Collaborateur 2i Natural history. et la documentation, avec l'aide d'une de l'URSS.
vaillante tquipe, et pour lequel il a préparé
! le programme de l'édifice qui l'abrite Garry THOMSON. NC en 1925. M.A.
Charles PENEL.Diplôme d'ingénieur de
Plhole supérieure du laboratoire (ESL). actuellement au bois de Boulogne. Conseiller scientifique auprts des Trustees
Ingénieur des installations scientifiques et De 1947 A 1965, directeur du Conseil et directeur du Département scientifique,
, 'techniques au palais de la Découverte, international des musées (Icom) dont il est National Gallery de Londres, depuis 1960.
Paris. Chef d'expériences ; chef du Service depuis le conseiller permanent. Depuis 1970, B.A. (First Class Honours) avec option
, études et rtalisations ; sous-directeur du chargé de cours de muséologie générale en sciences, Cambridge, 195 I. Directeur
contemporaine auprts des universités de la série (( Technical Publication )) de
! palais de la Découverte. Secrétaire général Paris-I et Paris-IV. Auteur de nombreux l'Institut international pour la conservation.
1 de l'Association des écrivains scientifiques
de France. écrits qui restent la base de Chimiste chargé de recherche à la
l'enseignement de cette discipline nouvelle. National Gallery, 195 5-1960. Rédacteur
en chef de Studies in conservatiott, périodique
Sydney Dillon RIPLEY.Ne à New York en
de I'IIC, 1959-1967. Consultant auprts de
1913 ; B.A., Yale, 1936 ; M.A., 1961 ; Jean ROSE.Docteur t s sciences, Université l'Unesco pour les problèmes de
Ph.D., Harvard, 1943 ;D.H. L. Mailboro de Paris. Maître de conférences à la Faculté conservation dans plusieurs pays.
College, 1965 ;'D.Sc., George Washington des sciences de Paris, directeu de Rapporteur sur les problèmes d'éclairage au
University, 1966, Catholic University, 1968, recherche au Centre national de la recherche Comité de l'lcom pour la conservation.
U.D., Dickinson College, 1963, Hofstra scientifique (CNRS). Directeur général des Principal sujet ,d'intérêt : effets de
University, 1968. Membre du personnel laboratoires du CNRS à Bellevue. Directeur l'environnement sur la détérioration des
de 1'Academy of Natural Science, du palais de la Découverte, Paris. peintures et autres objets d'art anciens.
Philadelphie (I 93 6-1 939). Assistant Vice-président de l'Association française
bknévole à l'American Museum of Natural de cristallographie. Président de la Société
History, New York (1939-1940). Maître Photographiex
française de minéralogie et cristallographie.
assistant, Harvard (1941-1942). Membre du conseil d'administration du I, 3, National Zoological Park,
Conservateur adjoint de la Smithsonian Deutsches Museum. Auteur de livres et Washington, D.C. ; 2, 4, San Diego Zoo,
Institution, Washington, en 1942 ; publications scientifiques portant sur San Diego (Ron Garrison) ; J-zo, M$rcus
secrétaire de cet organisme depuis 1964. l'optique des rayons X, la détermination Rees-Roberts, L o n d o r wM e s arts
Chargé de cours, conservateur adjoint, des structures cristallines, la réalisation et traditions populaires, Paris ; 12, Georges
Yale (1946-1952) ;professeur adjoint, d'appareils de radiocristallographie. Stevignon, Beaune ; 13-16, J. Bimiewski,
1949-1955 ; conservateur depuis 1952 ; Warszawa ; 17, 18, Kon. Instituut vor de
professeur associé de zoologie, 195 5-1961 ; Tropen, Amsterdam ; 19, American
professeur de biologie depuis 1961. Boris SAVEL'EV. Né en 1912, à Moscou. Museum of Natural History, New York ;
Directeur du Peabody Museum of Natural fitudes à l'Université de Moscou jusqu'en 20-28, Musée cévenol, Le Vigan;
History, 1959-1964. Directeur de I y 3 5 . Docteur ès géologie et minéralogie, 30, Musées nationaux, Paris ; 32, Unesco ;
TAmerican Security and Trust Company ; 1951. Depuis 1952, professeur de physique, 31,jj-41, J.-D. Lajoux, Paris ; 42-47, Palais
président du Conseil international pour la chimie et mécaniques des roches dures Sijanovskij,
de la Découverte, Paris; J I - J ~ , ~ .
préservation des oiseaux. Auteur des gelées (cours créé par lui-même) à la APN 1972 ; ~ 8 - 6 8 , Universitetets
ouvrages suivants : Trail of the money Faculté de géologie, et depuis 1954 à la Zoologisk Museum, Kabenhavn ;
paddling of ducks, 1957 ; (en coll. avec Faculté de géographie de l'université de 69-79, Tropenmuseum, Amsterdam ;
L. Schribner) OrnithologicaZ hooks in Yale Moscou. Chef d'expéditions importantes et 80-88, American Museum of Natural
Library ; Syn0psi.r of fbe birds in India and in complexes. A fait des recherches dans History, New York ; 89-98, Musée
Pakistan, 1961 ; Lane and wildlge of Tropical sept lieux d'hivernage en Arctique, d'Aquitaine, Bordeaux ; 99-zo4, National
Asia, 1964 ; (en coll. avec Salem Ali) notamment à la station en dérive Park Service (fitats-Unis d'Amérique) ;
A handbook of birds of India and Pakistan, (( Pôle nord-4 )), et dirigé Péquipe de ZOJ, Ake Ahlstrand, Orebro ; zo6, 107,
1968 ; The sacredgrove, 1969. glaciologues de la quatrième expédition Naturhistoriska Riksmuseet, Stockholm ;
antarctique compréhensive. E n r g 9,~ a rio, Bengt Hubendick, Göteborg ;
Georges Henri RIVIBRE.Né en 1897. dirigt l'expédition intercontinentale sur le zzz, Naturhistoriska Museet, Göteborg ;
A dirigé, aux côtés du professeur Rivet, circuit Mimy-Komsomolskaia-Vostok- ZI~-ZZJ, Archaeological Survey of India,
l'installation au palais de Chaillot, Paris, pôle Sud réalisée d'après le programme Government of India ;116-120, Department
du Musée de l'homme, dont il a été qu'il avait élaboré. Auteur de 84 ouvrages of Archaeology, Government of India ;
le sous-directeur de 1928 à 1937. Nommé scientifiques dont 3 grandes monographies 121-z.q~ Museo nacional de historia
ensuite conservateur en chef du Musée et 2 livres connus aussi bien en URSS natural, Santiago (Chili).

Avis au lecferrr l'université Loránd Eötvös, Budapest, où Alaoui du Bardo, à Tunis, il y a réalisé de .
elle obtint son diplôme en 1969. Travaille très importantes transformations. Grâce à la
Ake SETTERWALL, ex-directeur des Kungliga au Musée ethnographique de Budapest en nouvelle technique qu'il avait mise au
Husgeradskammaren,nous demande de faire qualité de muséologue au Département des point pour la manipulation des mosaïques
remarquer que, contrairement à ce qui a été musées ethnographiques en plein air, oti antiques, il a réussi à mener à bien la
imprimé à la fin du texte, ce n'est pas lui elle s'occupe des questions de la culture dépose et la pose du fameux baptisttre dit
l'auteur de l'article intitulé ((Les salles du populaire, de la maison et de l'habitat. de Kélibia, joyau de ce musée. Aprts un
Trésor, Palais Royal, Stockholm )) mais Thèse de doctorat : (( Culture de la maison séjour à Versailles, dans les cadres de la
M. Sven Ivar LIND,architecte du Palais. )) et de l'habitat dans la région d'urség B. Direction générale de l'architecture, il a été
Publications : L a maison et I'habifat des serfs détaché au Niger en juin 1958.
Les notes suivantes auraient dû paraître dans dans le village Sxalafö en drség (1969) ;
Museum, vol. XXIV, no 4 : Problèmes de la culfure bourgeoise-paysonne de
l'habitat dans iln village d'drség (1970). Jean-Yves VEILLARD. Né en 1939 à
Alfred0 BARRERA. Directeur du Musée Rennes. fitudes supérieures d'histoire et de
d'histoire naturelle, México, D.F. Pablo TOUCET. A conçu et réalisé le géographie (licence, DES, CAPES).
Musée de Niamey dont il est conservateur. Conservateur du Musée de Bretagne, ii
Friderika BIR& Née en 1943 à Budapest. Avant son arrivée au Niger, chargé des Rennes, depuis 1967. Thèse d'8tat en cours
&des aux facultés d'ethnologie et de fouilles punico-romaines d'Utique sur (( L'urbanisme, les architectes et
langue et littérature hongroises ii (Tunisie). Affecté plus tard au Musée l'architecture ii Rennes au SIX^ siècle )).

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