Vous êtes sur la page 1sur 4

Revue d’Alsace

147 | 2021
Patrimoine et mémoire de l'industrie

KOENIG (Geoffrey), « L’armée tiendra jusqu’au


dernier ». L’armée allemande dans la poche de
Colmar (novembre 1944-février 1945)
Paris, L’Harmattan, 2020, 258 p.

Benoît Rondeau

Édition électronique
URL : https://journals.openedition.org/alsace/4865
DOI : 10.4000/alsace.4865
ISSN : 2260-2941

Éditeur
Fédération des Sociétés d'Histoire et d'Archéologie d'Alsace

Édition imprimée
Date de publication : 1 décembre 2021
Pagination : 377-379
ISSN : 0181-0448

Référence électronique
Benoît Rondeau, « KOENIG (Geoffrey), « L’armée tiendra jusqu’au dernier ». L’armée allemande dans la
poche de Colmar (novembre 1944-février 1945) », Revue d’Alsace [En ligne], 147 | 2021, mis en ligne le
01 janvier 2022, consulté le 05 décembre 2022. URL : http://journals.openedition.org/alsace/4865 ;
DOI : https://doi.org/10.4000/alsace.4865

Tous droits réservés


Comptes rendus

Les deux professeurs d’économie qui ont dirigé la dissertation


de l’abbé Jules Frick passent par contre à la trappe. Il s’agit pourtant
de Georg Friedrich Knapp (1842-1926), qui fait la réputation de
l’Université de Strasbourg, beau-père de Theodor Heuss, futur président
de la République fédérale d’Allemagne (Marcel Thomann, NDBA, 21,
1993, p. 2019) et de Werner Wittich (1867-1937), « l’Allemand qui
a le mieux compris l’Alsace, selon R. Redslob (Léon Strauss, François
Uberfill, Clauss Wittich, NDBA, 40, 2002, p. 4 277-4 279). Forcément,
on ne trouve que peu d’indications sur Auguste Hertzog (1857-1924),
originaire de Gueberschwihr, cité p. 77, économiste, administrateur de 377
l’hôpital de Colmar, historien (Henri Fleck, NDBA,16, 1990, p. 1 561).
L’affaire de Saverne est évoquée sans mention des conclusions de
Jean-Noël Grandhomme et de Pierre Vonau dans leur direction d’ouvrage
paru en 2017. On ne trouvera par ailleurs aucune allusion climatique, ni
de données de rendements fournis par Médard Barth, alors qu’ils sont
très faibles à cette époque, ni d’allusions aux procès liés aux fraudes où
apparaît le nom de Sartorius, ni des tourments vignerons qui s’étalent
dans les Haussbücher (Claude Muller, Chronique de la viticulture alsacienne au
XIXe siècle, 1991 et … au XXe siècle, 1, 1995).
Une remarque pour terminer. Dans la conclusion, p. 107, Christian
Busse affirme : « Ohne Zweifel hat Elsass-Lothringen gesamtwirtschaftlich
durch die Annexion gewonnen. » Le recenseur ne conteste pas
fondamentalement cette assertion. Mais la manière dont la démonstration
a été menée le laisse très dubitatif.
Claude Muller

Koenig (Geoffrey), « L’armée tiendra jusqu’au dernier ».


L’armée allemande dans la poche de Colmar (novembre 1944-février
1945), Paris, L’Harmattan, 2020, 258 p.
G. Koenig entend brosser le tableau de l’armée allemande enfermée
dans la poche de Colmar, zone pour laquelle les travaux ne sont pas légion.
Même si on n’apprend en fait rien d’original sur la Wehrmacht et la Waffen
SS à ce stade de la guerre, le grand mérite est de mettre en lumière une
armée méconnue, à savoir la 19e armée, qui fait partie de l’Armeegruppe G,
qui a retraité depuis le sud et le sud-ouest de la France jusqu’en Alsace et
Revue d’Alsace — 2021

en Lorraine, un groupe d’armée qui a suscité beaucoup moins d’intérêt


que le Heeresgruppe B, qui affronte les Alliés en Normandie. Le moins qu’on
puisse dire est que cette 19e armée, ponctionnée sans cesse au profit du
front de l’Invasion, n’est plus que l’ombre d’elle-même lorsqu’elle se
repositionne en Alsace après la retraite consécutive au débarquement en
Provence et, surtout, de la percée d’Avranches.
L’auteur nous offre une étude sociologique fine d’une armée
allemande à un moment critique : celui du rétablissement in extremis
378 – au début de l’automne 1944 – sur une ligne défensive qui court de la
frontière suisse à la mer du Nord. On apprécie l’accent mis sur le caractère
hétérogène de cette armée (mais cela n’est pas nouveau et on peut déjà le
noter en début de guerre) et sur son manque de cohésion, la piètre qualité
des nouveaux incorporés étant caractéristique de la période. La question
des groupes primaires et les difficultés subies pour l’encadrement sont
bien expliquées. Certaines formations comme la 2. Gebirgs-Division,
semblent particulièrement solides, même s’il est à douter de l’intérêt
réel de l’expérience de la toundra arctique pour le combat dans les Vosges
couvertes de forêts… Les moyens de cette armée restent toutefois
faibles (les chiffres donnés semblent parfois correspondre à ceux des
seuls effectifs en combattants en ligne – Kampfstärke), tant du point de
vue des effectifs que des Panzer, le type d’opérations, de fortifications, les
enjeux et l’ampleur des combats ne pouvant par ailleurs pas se comparer
à d’autres secteurs du front, comme la Normandie, la Hollande, la forêt
de Hürtgen, les Ardennes, voire la Lorraine. Le caractère représentatif
de la 19e armée pour l’ensemble de la Westheer est indéniable, mais il a
donc de fait ses limites. Cette armée est par ailleurs spécifique pour une
raison : elle finit sous la coupe du Reichsführer SS Himmler et elle défend
alors l’Alsace, terre conquise mais considérée comme partie prenante du
Vaterland.
Toutefois, l’auteur cherche ce que cette 19e armée allemande a
de représentatif. Ce faisant, il ne peut passer sous silence la question de
l’idéologie et de la nazification de cette armée (les pages consacrées aux
NSFO et au serment de fidélité sont particulièrement intéressantes, même
si les conséquences concrètes ne sont guère envisagées), de même que la
question du moral et de la propagande (même s’il aurait été préférable,
pour plus de clarté, que tous les aspects liés à la propagande des deux
camps soient regroupés). Puisque la narration de la campagne n’est pas
l’objet du récit, on aurait aimé davantage de détails du quotidien et des
Comptes rendus

rapports avec les civils (avec les Alsaciens, les liens avec la famille étant
abordés dans un intéressant passage consacré au courrier), même si ces
questions ne sont pas éludées, le passage consacré au climat étant assez
développé.
Au final, un bon livre qui nous explique la « politique jusqu’au-
boutiste » de l’armée allemande et l’idéologie sous-jacente. Une volonté
de se battre jusqu’au dernier homme qui a pourtant été accompagnée
d’une déliquescence de l’armée, comme le montre l’auteur. Bizarrement,
dans une introduction dans laquelle G. Koenig déplore que l’armée 379
allemande reste un sujet d’étude peu investi par les auteurs français, il ne
cite pas l’ouvrage du rédacteur de ces lignes, Être soldat de Hitler, qui porte
précisément sur le soldat allemand. On n’attend plus qu’avec impatience
de lire sa thèse consacrée à l’idéologie nazie et l’armée allemande sur le
front de l’Ouest, lorsqu’elle sera publiée.
Benoît Rondeau

Libera (Martial), Diplomatie patronale aux frontières. Les


relations des chambres de commerce frontalières françaises avec
leurs homologues allemandes (1945 - milieu des années 1980),
Genève, Droz, 2020, 471 p.
Cet ouvrage important constitue la version remaniée d’une
habilitation à diriger les recherches en histoire contemporaine consacrée
à la politique des chambres de commerce alsaciennes et mosellanes
(Colmar, Metz, Mulhouse et Strasbourg) vis-à-vis de leurs homologues
du Bade-Wurtemberg (Fribourg-en-Brisgau, Lahr, Karlsruhe, Stuttgart),
de la Sarre (Sarrebruck) et du Palatinat (Trêves et Coblence), de 1945 au
milieu des années 1980. Grâce à de patients dépouillements dans des fonds
d’archives français et allemands souvent inédits, à l’étude des positions
défendues par leurs présidents, vice-présidents et secrétaires-généraux
(un précieux dictionnaire biographique figure en annexe), l’auteur nous
montre que, loin d’échanger sur des questions techniques uniquement,
les chambres de commerce françaises qui ont leurs objectifs propres,
construisent, grâce à un actif lobbying et à la constitution de réseaux, une
véritable « diplomatie patronale aux frontières » à différentes échelles.
Après une utile présentation comparée des chambres de commerce et
d’industrie de part et d’autre du Rhin (statuts, fonctions, originalité au

Vous aimerez peut-être aussi