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Arthur Schopenhauer

Lettres

TOME SECOND

Édition établie et annotée


par Arthur Hübscher

Traduit de l’allemand
par Christian Sommer et
révisé par Natacha Boulet

Gallimard
LETTRES
231. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Dans votre honorée lettre, vous m’avez fait une proposition que je ne puis accepter, car je
refuse résolument toute édition à compte d’auteur, au point que je préfère laisser reposer mon
manuscrit jusqu’à ce qu’il soit un posthumum que les éditeurs s’arracheront aussitôt. Je sais bien
qu’il en va tout autrement pour l’instant ; cela n’est pas un reproche à adresser à mes œuvres,
mais au public.
Entre-temps, puisque que vous ne pouvez pas vous charger de cet ouvrage, j’ai songé que
vous auriez peut-être la bonté de le recommander à un de vos collègues à Leipzig, sous condition
qu’il utilise votre imprimerie, ce que je pourrais ensuite également stipuler dans le contrat :2

ainsi, nos desseins à tous deux seraient satisfaits et vous auriez particulièrement obligé

Francfort s. M. votre
le 8 juillet tout dévoué
1850. Arthur Schopenhauer

P. S. Par ailleurs, cela n’est pas urgent : je viens encore de commencer une ultime révision
du manuscrit, et je trouve qu’elle n’est pas tout à fait inutile ; je vais donc la mener à terme.
232. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

je vous prie de m’excuser de vous importuner de nouveau avec la même affaire : elle n’est
quand même pas si insignifiante pour qu’elle ne vaille pas quelques lettres.
Depuis votre dernière lettre de refus, je n’ai contacté aucun autre éditeur, démarche qui à
vrai dire me déplairait, mais j’ai au contraire poursuivi l’ultime révision de tout le manuscrit,
déjà mentionnée, en pensant que « le temps portera conseil ». Le retardement était même
bienvenu, car ces dernières retouches ont fait le plus grand bien à la chose. Mais à présent j’ai
avancé au point que j’aurai terminé à la fin de ce mois ; ensuite il ne faudra plus que je le
regarde, pour ne pas l’aggraver par des corrections, et j’aimerais donc me débarrasser du
manuscrit. Cela m’est très difficile de faire des demandes auprès d’éditeurs que je ne connais
pas, tel un toilier qui vient d’achever son tissage. Je ne l’ai proposé qu’à Suchsland , qui ne
2

dispose pas des moyens adéquats, sans quoi il l’aurait pris en charge.
Comme je l’ai déjà évoqué, j’ai banni l’édition à compte d’auteur. Je vous propose donc à
nouveau mon texte et cette fois-ci gratuitement. Si vous ne le prenez pas dans ces conditions,
vous commettez une faute. Car vous ne pouvez pas y faire de pertes, mais seulement y gagner
beaucoup. Pensez ce que bon vous semble à mon sujet : j’affirme que mes écrits sont ce que le
siècle a produit de mieux, et je ne suis pas le seul à le dire. Une fois que la résistance passive de
la corporation des professeurs de philosophie sera brisée, on imprimera alors encore souvent tous
mes ouvrages. Mais à cela s’ajoute que l’ouvrage en question est de loin le plus populaire, c’est
en quelque sorte mon « philosophe pour le monde », comme vous pouvez en juger d’après la
3

table des matières. Je vous prie donc de réfléchir encore à cette affaire et j’attends votre aimable
réponse en demeurant avec ma haute considération
4

Francfort s. M. votre
le 3 sept. tout dévoué
1850. Arthur Schopenhauer
P. S. Je pourrais vous envoyer tout de suite environ ¾ du manuscrit, et le reste en tout cas
avant la fin du mois.
233. À DIETERICH, GÖTTINGEN 1

À la librairie Dieterich à Göttingen.

Je me permets de vous proposer l’édition de mes petits écrits philosophiques dont je joins la
table des matières au verso de la présente. Vous pourrez déjà y voir que cet ouvrage, du moins
selon la majeure partie de son contenu, est de loin plus populaire que les précédents : je pourrais
même l’appeler mon « philosophe pour le monde ». Ceci sera favorable à la vente. L’ayant à
peine terminé, après six ans de travail, j’aimerais à présent l’envoyer dans le monde. Je ne
demande pas d’honoraires, à condition que vous choisissiez une typographie convenable, pas
plus petite que la deuxième édition de mon ouvrage paru chez Brockhaus, et que vous
m’envoyiez d’abord un échantillon de l’impression ; que vous n’imprimiez pas plus de 750
exemplaires et que vous renonciez explicitement à une deuxième édition ; et enfin que vous
m’envoyiez chaque feuille pour la correction, ainsi que le manuscrit correspondant — une
condition indispensable.
En attendant votre aimable réponse

Francfort s. M. tout dévoué


le 8 sept. Dr. Arthur Schopenhauer
1850.
PARERGA ET PARALIPOMENA
Petits écrits philosophiques par A. S.

Table, avec l’estimation du nombre de pages, calculé d’après l’impression


et le format de ma deuxième édition de chez Brockhaus

Premier tome (qui contient 6 traités).


I. Esquisse d’une
histoire de la
25 pages
doctrine de
l’idéal et du réel
II. Fragments d’histoire 100 "
de la
philosophie
III. Sur la philosophie 55 "
universitaire

IV. Spéculation
transcendante
sur
l’intentionnalité 22 "
apparente dans
le destin de
l’individu

V. Essai sur les "


apparitions et
88
les faits qui s’y
rattachent
VI. Aphorismes sur la 165 "
sagesse dans la
vie
455 pages

Deuxième tome.

Des pensées éparses sur divers sujets, mais ordonnées systématiquement.


[divisé en chapitres]

Chap. 1. Sur la 14 pages


philosoph
ie et sa
méthode
2. De la logique et 15 "
de la
dialectiqu
e
3. Les pensées
touchant à
l’intellect
en général 28 "
4. Considérations 21 "
sur
l’oppositi
on de la
chose en
soi et du
phénomè
ne
5. Quelques mots 2 "
sur le
panthéism
e
6. De la
philosoph
ie et des
sciences
de la
nature 55 "
7. De la théorie des 32 "
couleurs
8. De l’éthique 34 "
9. Du droit et de la 24 "
politique
10. De la doctrine
de
l’indestru
ctibilité
de notre
être par la
mort 14 "
11. De la doctrine
de la
néantité
de
l’existenc
e 5 "
12. De la doctrine
de la
souffranc
e du
monde 8 "
13. Sur le suicide 3 "
14. De la doctrine
de
l’affirmati
on et
négation
de la
volonté
de vie 7 "
15. Sur la religion 55 "
16. De la littérature 5 "
sanskrite
17. Quelques
remarque
s
archéolog
iques 3 "

Chap. 18. Quelques


considérat
ions
mythologi
ques 6 pages
19. De la
métaphysi
que du
beau et de
l’esthétiq
ue 35 "
20. Sur le jugement,
la
critique,
l’approbat
ion et la
gloire 26 "
21. Sur l’érudition 9 "
et les
érudits
22. Penser par soi- 10 "
même
23. Sur l’écriture et 33 "
le style
24. Sur la lecture et 7 "
les livres
25. Sur le langage et 8 "
les mots
26. Remarques 26 "
psycholog
iques
27. Sur les femmes 17 "
28. Sur l’éducation 8 "
29. De la 8 "
physiono
mie
30. Sur le vacarme 3 "
et le bruit
31. Métaphores, 6 "
paraboles
et fables
Quelques vers
531 pages
234. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher Dr. Frauenstädt !

D’abord, je dois encore une réponse à votre lettre de décembre, ce que j’avais toujours
remis à plus tard, dans l’attente de voir votre article sur Dorguth dans les Literarische Blätter
2

pour ensuite vous faire part de mon avis : sed frustra ! J’impute cela à ces rédactions qui souvent
3

laissent traîner horriblement longtemps les articles reçus, et même maintenant, je n’abandonne
donc pas tout espoir. Cependant j’ai lu vos recensions plus anciennes que j’avais demandées,
mais elles ne me sont plus présentes à l’esprit. En revanche, j’ai lu avec grand plaisir dans la
dernière Hallische Literaturzeitung votre critique de L’Esprit dans la nature d’Ørsted , où vous
4

jouez tout à fait selon ma note fondamentale, et je ne saurais manquer d’en être satisfait ; de
manière générale, elle est bonne et louable. J’aurais seulement voulu que vous considériez aussi
un autre côté de la chose, à savoir l’opposition de son ESPRIT dans la nature à ma VOLONTÉ dans la
nature (son titre imite le mien, tout comme L’Esprit de l’homme dans la nature de Schubart
1849). Sa pensée fondamentale (d’après ce que je sais selon 3 ou 4 recensions, car je n’ai pas lu
son livre) est de montrer qu’il existe dans tous les êtres naturels quelque chose d’analogue à la
connaissance et à l’intellect humains : voilà la vieille erreur fondamentale. Alors que moi, j’ai
montré que le noyau de tous les êtres correspond à ce qui en nous est la volonté, et que c’est
seulement à partir de la nature animale qu’elle se présente dotée d’un intellect. Voilà ce que vous
auriez dû mettre en avant et expliquer, et ainsi vous auriez pu être brillant. Cet Ørsted est célèbre
dans le monde entier parce qu’il s’est livré à une expérience que je n’ai jamais pu admirer, des
centaines d’autres l’ayant faite avant lui, mais en pratique, cela a été riche en conséquences.
J’espère que vous avez regardé le livre que vous m’aviez signalé auparavant, du Dr. Mayer
à Mayence, auparavant à Alzei, sur la rachialgie, 1849, dans lequel il a consacré quelques pages
à ma philosophie, en me portant aux nues. Cependant il y blâme mes attaques contre les
professeurs, mais lorsqu’il m’a rendu visite cette année, il est revenu sur sa parole en disant que
j’avais raison et que le comportement des professeurs était ignoble. Il était en effet
particulièrement indigné de ne pas avoir trouvé le moindre mot sur ma philosophie dans la 3 e

édition de l’Histoire de la philosophie de Reinhold. Cet été, von Doss m’a rendu visite 2 fois , 5

lors de son aller et retour à Bruxelles, d’abord avec le duc de… sur le chemin de l’aller et ensuite
tout seul, en restant quelques jours uniquement pour me voir, et il m’a par conséquent beaucoup
sollicité. Quoi que vous puissiez penser, il est plein de ferveur et très attaché à moi. Je lui ai
donné un exemplaire de l’Éthique pour Perner , conseiller à la cour de Munich, le célèbre
6

président de toutes les associations de protection des animaux, qui en retour m’a écrit une
missive élogieuse, très enthousiaste ; il a l’intention de me rendre visite. Becker a été nommé à
Mayence, comme juge.
Comme c’est étrange, vous vous êtes rendu à Holstein avec la veuve de l’ami de mon
enfance ! Mais de tels voyages sont pour vous instructifs et agréables à la fois, et par conséquent
7

je vous en félicite.
À présent, pensez donc et écoutez ! Mes opera mixta, après 6 ans de travail quotidien, sont
prêts et achevés, c’est-à-dire manum de tabula ! Et je ne trouve pas d’éditeur. Voilà
8

l’aboutissement de la résistance passive des professeurs. J’ai proposé l’ouvrage ici même à la
librairie Hermann, à Brockhaus, à la librairie Dieterich à Göttingen, toujours gratuitement et sans
honoraires — ils n’en veulent pas. En revanche Brockhaus imprime les 2 tomes de Chalybäus , 9

L’Éthique. Sur la famille, l’État et les mœurs religieuses (avec une omelette en supplément),
Rosenkranz a publié un Système de la Science, du bavardage hégélien, et les absurdités de
Herbart seront publiées dans une édition complète en 12 tomes ! Mon accident est fâcheux, mais
non pas humiliant, car les journaux rapportent à l’instant que Lola Montès a l’intention d’écrire
10

ses Mémoires et que des éditeurs anglais lui ont tout de suite proposé de grosses sommes. Nous
savons donc à quoi nous en tenir. Mais je ne sais vraiment pas ce que je pourrais encore faire et
si mes opera mixta ne sont pas plutôt destinés à devenir un posthumum ; les éditeurs ne sauraient
alors manquer. En attendant, je vous écris maintenant pour vous demander si vous ne voudriez
peut-être pas tenter, vous qui êtes mon véritable Théophraste et Métrodore , de dénicher un
11

éditeur parmi les nombreux libraires de Berlin. Au cas où vous voudriez bien vous en occuper, je
joins la table des matières. On peut déjà y voir que le livre est de loin plus populaire que mes
précédents, et qu’il pourrait donc plus facilement trouver un éditeur. D’après sa majeure partie,
je pourrais l’appeler en quelque sorte mon « philosophe pour le monde ». Je pose comme seule
condition qu’on choisisse une typographie allemande, non pas latine, pas plus petite ni plus
étroite que mes 2 éditions , et qu’on m’envoie chaque feuille pour la correction, ce qui est
es 12

indispensable. Il pourra imprimer 750 exemplaires, mais dans le contrat il devra renoncer à tous
droits concernant une deuxième édition. Je ne demande pour moi que 10 exemplaires sur beau
papier. Avant, il faudrait m’envoyer un échantillon de l’impression pour approbation. C’est en
premier lieu des libraires qui ont leur propre imprimerie qu’on pourrait espérer quelque chose. Si
vous réussissiez, vous auriez vraiment bien mérité de moi et de ma philosophie. J’ai banni pour
toujours l’édition à compte d’auteur, et le posthumum pourra encore attendre un moment, car ma
santé est excellente et je suis toujours aussi agile que jadis, quand je vous ai entraîné dans une
promenade de nuit, dans la neige et la tempête . J’espère que vous me répondrez bientôt, et
13

n’affranchissez jamais pour moi, car vous m’écrivez toujours au sujet de ma philosophie, et donc
de mon affaire principale. Laissez-moi entendre quelque chose de réjouissant concernant vos
personalibus, c’est ce que souhaite de tout cœur

Francfort s. M., votre vieil ami


le 16 sept. 1850. Arthur Schopenhauer.
235. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher Dr. Frauenstädt !

Vous êtes vraiment un ami fidèle et optime meritus de nobis et philosophia nostra , à tout
2

point de vue. Je vous remercie chaleureusement de vos efforts et de votre empressement pour
trouver un éditeur ! J’espère qu’il fera une bonne affaire, car beaucoup de choses sont très
3

populaires, notamment les Aphorismes sur la sagesse dans la vie, qui remplissent presque la
moitié du premier tome. Mais la faute en revient à l’époque s’il est tellement difficile de trouver
un éditeur pour ce genre de livres. Tout est encore empêtré jusqu’aux oreilles dans la politique.
Il est raisonnable de ne pas envoyer le manuscrit avant que le contrat ne soit signé de part et
d’autre et que je n’aie vu un échantillon de l’impression. Ce n’est qu’après que je l’enverrai
directement à l’éditeur. La toute dernière révision, qui m’occupe depuis plus de 3 mois, sera
terminée certo certius d’ici 8 jours. Si jamais, pour une raison quelconque, l’éditeur voulait
4

commencer l’impression un peu plus tard, je préférerais, au lieu de laisser le manuscrit chez lui,
le garder pendant ce temps, car je pourrais toujours trouver quelque chose à changer ou à ajouter.
Je ne me sépare pas volontiers de ce dernier ouvrage, car le reste est silence.
Lisez les conditions du contrat à Hayn d’une voix tonitruante. Je n’en dévierai pas. J’exige
vraiment peu pour un ouvrage qui a demandé 6 ans de travail quotidien (les 2 premières heures
5

de la matinée) et dont les travaux préparatoires se sont amassés pendant 30 ans, car ce que j’écris
se laisse difficilement obtenir en un tournemain. Existe-t-il un seul livre dans la littérature
allemande qu’on puisse ouvrir où l’on veut pour recevoir plus d’idées qu’on n’est capable d’en
saisir, si ce n’est mon 2 tome du Monde ? (Pouah ! mon vieux, ne te vante pas !) Enfin, l’éditeur
e

devra promettre dans le contrat de ne pas ajouter de louanges, de recommandations ou d’autres


commentaires dans ses annonces ; en revanche, il est libre d’y imprimer la table des matières.
Votre intention de traîner l’herbartianisme dans une lessive caustique est très méritoire :
6

vous « répondez ainsi à un besoin général ». Car il est insupportable de voir comment Drobisch , 7

Hartenstein et consorts continuent obstinément à vouloir vendre ce tissu d’absurdités au public et


aux étudiants en le faisant passer pour la vraie et authentique philosophie. Ma connaissance de sa
philosophie n’est que générale, puisque j’ai toujours perdu patience en lisant ses écrits ; car
accompagner la démarche de pensée d’une telle tête de mule relève pour moi de la plus grande
pénitence. Mais voilà ce dont je me rappelle : 1) pour lui, l’homme a une âme qui est une
monade, un être essentiellement et originairement CONNAISSANT et rien d’autre. Elle n’a pas du
tout de volonté en tant que telle, mais le vouloir n’y est que le résultat de la pensée et de la
représentation. Ce pqxsom wetdoy est une absurdité sans pareille. 2) Cette âme est l’arène où les
8

représentations, selon leurs propres lois mécaniques, s’entravent, se gênent, se stimulent


mutuellement et font d’autres choses encore. C’est sur ces données PUREMENT IMAGINAIRES qu’il
base des calculs difficiles, analytiques, comme si l’important c’était les QUANTA et non pas la
QUODDITÉ ! En vérité, le calcul sert à conférer une apparence de rigueur à la chose et à s’occuper
malgré tout en faisant croire qu’on tient quelque chose. 3) Tous les concepts fondamentaux
recèleraient des contradictions, mais celles-ci ont été introduites par de misérables sophismes, un
peu comme celles de Zénon d’Élée. Ce qui est tiré de l’intuition pure ne contient jamais de
contradictions. Ses Lettres sur la liberté de la volonté sont particulièrement misérables. Voilà ce
que je lis dans des notes prises il y a longtemps : « Un exemple des Points principaux de la
9

métaphysique, 1808, de Herbart nous montre à quel point il est erroné, en philosophie, de partir
de concepts tout prêts et non pas de l’intuition. D’emblée, une question préliminaire se pose :
“Comment des causes peuvent-elles être liées à des conséquences ?” Au lieu d’essayer
d’examiner le rapport entre la cause et la conséquence donnée dans un cas particulier, de
connaître le genre de rapport entre la cause et la conséquence — ce qui signifierait précisément
qu’on partirait de l’intuition —, il raisonne à partir des concepts généraux de cause et de
conséquence ; il ne pourra donc en sortir autre chose que ce qu’il y a déjà dans les concepts
généraux — ça ne peut pas prendre. Et plus loin, il procède de la même façon avec les concepts
de TRANSFORMATION et de FORCE. § 7 et 8, le temps et l’espace se trouvent même déduits de
CONCEPTS ; déduction que ces derniers présupposent déjà tout naturellement ; car dans le cas
contraire, ces concepts n’auraient aucun sens. Le jeu dialectique avec les concepts les plus
abstraits, qui caractérise toute cette métaphysique, semble avoir été le prélude de l’hégélianisme,
et fournit la preuve qu’en philosophie, on n’arrive à rien en partant de l’abstrait au lieu de
l’intuitif . » Je remarque encore qu’il dit quelque part, avec son constant souci de nous insuffler
10

le théisme per fas et nefas , que « Kant a montré que la preuve physico-théologique n’est pas
11

entièrement concluante ni suffisante » : c’est un mensonge, parce qu’il l’applique et la valide.


Kant a montré que la pensée fondamentale de la preuve physico-théologique n’était pas légitime.
La réfutation entière de cette preuve, de façon thétique, par la voie positive et non uniquement
négative, se trouve dans la Volonté dans la nature, qui est comme l’antithèse de cette preuve ; et
Dorguth, dans son dernier écrit, souligne élogieusement ma métaphore de la bouteille de bière
tome 2, p. 330 : en cela il fait véritablement preuve de tact.
12

Votre Langenbeck doit être le fils de celui de Göttingen dont je fréquentai les cours
13

d’anatomie en 1809 et qui les donne toujours, à ma consolation. Vous devriez consulter ce vieux
chirurgien célèbre par écrit en demandant la meilleure méthode pour enlever les cils. En vous
souhaitant de tout cœur d’être libéré de ce mal,

Francfort s. M., votre ami


le 30 sept. 1850. A. Schopenhauer.
236. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher Dr. Frauenstädt !

Je suis tout étonné de n’avoir plus eu de vos nouvelles, après vous avoir écrit une longue
lettre le 30 sept., et j’attends depuis que vous m’envoyiez le contrat de l’éditeur avec
l’échantillon de l’impression, en m’indiquant la date à laquelle il doit recevoir le manuscrit. Je
suis dans la même situation qu’une femme enceinte qui attend l’accoucheuse. Je m’épuise à
conjecturer sur les causes possibles de votre silence, en espérant qu’elles ne soient pas
malheureuses, en quelque sens que ce soit, car c’est à ces dernières qu’il faut d’abord penser, en
ce monde charmant. Je vous prie donc de bien vouloir me tirer au plus vite de mes doutes, à
moins que votre lettre ne soit déjà en chemin.
Après coup, je vous fais encore remarquer diverses choses à propos de votre dernière lettre.
Par ex., vous ne m’avez pas vraiment compris concernant votre recension d’Ørsted . Ce n’est pas
2

ma doctrine de l’« intellect » que vous auriez dû expliquer, bien plutôt le fait que l’analogie et le
rapport immédiat entre notre conscience et la nature dénuée de connaissance n’est pas à
chercher, comme le font Ørsted et tous les autres, dans l’intellect, auquel elle serait censée
correspondre, etc., mais dans la VOLONTÉ, comme je l’ai montré dans la Volonté dans la nature,
ce petit ouvrage très important d’un point de vue PARTICULIER, ouvrage qu’on étouffe par le
silence, alors qu’on fait des croassements grandiloquents autour des banalités d’Ørsted. Ah, mon
traité sur la philosophie universitaire ressemble maintenant au cheval de bataille qui hennit dans
l’écurie : il veut sortir ! Les professeurs de philosophie vont avoir leur fête : ils auront
l’impression qu’il pleut des gifles. Mais si vous ne nous aidez pas à accéder à la lumière, eh bien,
ce serait dommage. À présent, tout a été revu, satis superque ; le manuscrit est là devant moi et
3

attend l’ordre de marche, et vous vous taisez.


À propos des bêtises de Herbart, je voudrais encore noter l’idée doucereuse, usée et
misérable de fonder la morale sur l’esthétique. Si lui n’est pas une tête de mule !
Dans la revue de Göttingen , Botz et Lotz s’étendent en duo sur l’important ouvrage d’un
4 5 6

certain Monsieur Waitz . Ils n’ont pas besoin de l’occulter, ils le laissent vivre pour vivre eux-
7

mêmes !
Ce qui est beaucoup plus important, c’est que mon caniche brun , qui a maintenant 17 mois,
8

est aussi grand et de la même taille que le défunt que vous avez connu, tout en étant le chien le
plus vivace que j’aie jamais vu. Et sur ce, je vous salue cordialement

Francfort s. M., votre ami


le 16 octobre 1850. Arthur Schopenhauer.
237. CONTRAT POUR LES PARERGA ET PARALIPOMENA 1

Entre le libraire et propriétaire d’imprimerie Monsieur A. W. Hayn à Berlin et Monsieur le


Dr. Arthur Schopenhauer à Francfort a été arrêté le contrat ci-après.
§I

Monsieur le Dr. Schopenhauer remet à Monsieur Hayn pour édition un manuscrit en deux
tomes, intitulé Parerga et Paralipomena.
§ II

La première édition sera tirée à 750 exemplaires et Monsieur l’auteur ne perçoit pas
d’honoraires pour cette édition sauf 10 exemplaires gratuits sur papier vélin. Si une deuxième
édition s’avérait nécessaire, le droit de propriété reviendrait à Monsieur l’auteur, libre de trouver
un accord avec l’éditeur.
§ III

L’échantillon qui doit être fait de l’impression vaut comme norme pour l’ouvrage et la
typographie doit suivre ce dernier et continuer sans interruption dès réception de tout le
manuscrit.
§ IV

Monsieur l’auteur effectuera la deuxième correction et pour ce faire chaque feuille et le


manuscrit correspondant lui seront envoyés à son domicile à Francfort s. M.
§V

Les éventuelles annonces de l’ouvrage ne doivent pas être accompagnées par des louanges
ou des recommandations ; au besoin, la table des matières peut être indiquée. Les deux parties
renoncent à tous les points contraires à ce contrat.

Berlin et Francfort s. M., [signé]


octobre 1850 Arthur Schopenhauer
[signé]
Adolph Wilhelm Hayn.
238. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Veuillez recevoir encore une fois, cher ami, mes chaleureux remerciements pour vos efforts
fructueux. Je me réjouis vraiment de pouvoir encore assister à la naissance de mon dernier
enfant, par quoi je considère ma mission en ce monde comme achevée. Je me sens vraiment
débarrassé d’un poids que j’ai porté sur moi depuis ma 24 année et qui m’a lourdement pesé.
e

Personne ne peut s’imaginer ce que c’est réellement.


Le contrat et le manuscrit ont été expédiés à Hayn, l’échantillon de l’impression est
excellent, les conditions exactes. Je l’ai prié de vous envoyer feuille par feuille l’exemplaire sur
vélin qui vous revient. Cela vous amusera et vous donnera même parfois l’occasion de rire.
Quant à votre diatribe psychologique , ne m’en voulez pas si je ne puis la louer. C’est que je
2

suis sincère. Il me semble que vous devenez un optimiste littéraire. Tout est magnifique, tout est
beau ! Mais mon Gracián dit : « Celui pour qui rien n’est mauvais, pour celui-là rien n’est bon
non plus. » C’est là que vous louez le mauvais livre de Hartmann ! Ce misérable n’a pas connu,
3

ou a ignoré, son grand et inoubliable prédécesseur Cabanis , Des rapports du physique au moral,
4

que tout homme doué de pensée se doit de lire. C’est précisément ce qui est révoltant, quand de
grandes têtes clarifient un objet par le travail de toute une vie et qu’arrivent de tels bousilleurs et
ouvriers, recommençant comme si de rien n’était et vendant leur âneries sur le marché. Ensuite
vous louez Waitz : je ne l’ai pas lu, mais d’après les deux recensions dans la revue de Göttingen,
5

il est évident que c’est un mauvais livre ; comment en serait-il autrement, quand on s’appuie sur
les absurdités et les bouffonneries de Herbart ? Il nous aurait, dites-vous, entièrement libéré de la
doctrine de la liberté. Or c’est m’ignorer, comme ce cher professeur de philosophie (soit dit en
passant : je soupçonne qu’au grand rassemblement de l’Église philosophique à Gotha , on a 6

secrètement donné le mot d’ordre de ne « jamais prononcer mon nom »). Vous souscrivez à
l’indivisibilité de l’âme et autres fables et fatras. Et soudain, vous intercalez quelques phrases de
ma philosophie, mais elles ne s’accordent nullement avec ces fariboles ; vous êtes alors obligé
d’opposer la volonté à l’âme ; personne n’y comprendra rien, parce qu’une âme inclut la
7

volonté. Il est impossible de comprendre quoi que ce soit de l’être humain tant qu’on n’a pas
reconnu la différence radicale entre la volonté et l’intellect, et la nature secondaire de ce dernier.
Voyez-vous, on ne peut vénérer à la fois Dieu et le diable : il faut être conséquent et décidé, il
faut avoir une conviction et l’exprimer, sans lanterner ni délirer comme un feu follet. Vous ne
vous ferez pas d’ennemis en exposant les choses telles qu’elles sont. Lisez avec assiduité la
Critique de la raison pure et les Prolégomènes, ainsi que mes ouvrages si peu volumineux, et
restez propre. Il est honteux de voir comment Waitz et ses critiques de Göttingen ignorent ou
écartent KANT.
Je sais et je n’oublie pas tout ce que vous avez dit et fait pour mon affaire. Cependant, cette
mercuriale est fondée et mettez-la au bon compte de
8

Francfort s. M., votre ami


le 23 oct. 1850. Arthur Schopenhauer.
239. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens, j’ai eu l’honneur de vous écrire le 7 oct. pour vous signaler
qu’au 1 octobre, je n’avais pas reçu le deuxième acompte des 2 000 Rth qui me reviennent par le
er

legs de ma sœur, comme cela aurait dû être le cas, après avoir reçu le premier acompte le 1 avril er
de cette année, suite à mon avis de retrait du 20 sept. 1849. Et depuis, je l’ai espéré en vain, ainsi
qu’une réponse de votre part, que j’attendais pourtant fermement. Je dois d’autant plus regretter
ce retard qu’avec le danger politique actuel, je pourrais investir l’argent à merveille dans des
titres de créance d’État à 80 %. Je vous prie en tout cas de bien vouloir m’expliquer pourquoi je
ne reçois pas une somme à laquelle j’ai droit, car la bonne volonté et encore moins les moyens ne
sauraient vous manquer pour me l’envoyer.
Le Dr. Emden n’a pas encore réalisé le projet évoqué . Il rencontre beaucoup de difficultés,
2

parce qu’il ne connaît pas les formes et les clauses exigées par le droit français pour cette affaire.
Il vous prie de bien vouloir charger votre homme d’affaires de rédiger de son côté un tel projet,
et ainsi, en comparant les deux, le dossier pourrait être réalisé de manière à vous mettre à l’abri
de toute contestation. Je vous serais très reconnaissant si vous vouliez bien le faire. Votre homme
d’affaires connaît parfaitement ces clauses.
J’espère que les nuages noirs, qui assombrissent actuellement l’horizon politique et
annoncent la menace d’un grand malheur général, se dissiperont et disparaîtront bientôt . 3

En vous priant encore une fois de ne plus m’abandonner à l’avenir à une incertitude
embarrassante, je demeure avec l’expression de ma considération distinguée votre serviteur
dévoué

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 10 nov.
1850.
240. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens, en vous remerciant beaucoup je vous renvoie ci-joint le tiré
à part de votre procuration pour M. Abegg, après l’avoir copié pour un éventuel usage ultérieur.
Concernant l’acompte que je vous réclame, je dois vous faire remarquer que vous vous
trompez légèrement, dans la mesure où vous croyez que j’aimerais recevoir dès maintenant ce
qui m’échoit seulement en mars, pour acheter des titres de créance d’État. Je ne me permettrais
pas une chose pareille. La situation est plutôt celle-ci : d’après le titre de créance, vous devez
vous acquitter du capital par des acomptes annuels de 500 Rth. Cependant, le 15 sept. 1849, vous
m’avez écrit ceci : « Vous n’avez qu’à m’adresser votre avis de retrait, et dans 6 mois, d’après la
date de ce dernier, je vous remettrai le premier acompte de 500 Rth., ainsi que les intérêts de
l’ensemble depuis le 25 août, 6 mois après le deuxième acompte avec les intérêts de ¾ du capital
à partir du premier jour du premier paiement, etc. » Je vous ai alors immédiatement signalé que,
d’après le titre de créance, votre acquittement devait seulement se faire par acomptes annuels.
Mais vous en êtes restée là, et après avoir donné mon avis de retrait le 20 sept., vous m’avez
payé le premier acompte et les intérêts le 1 avril de cette année, conformément à votre projet.
er

Qu’aurais-je pu penser d’autre, sinon que je recevrais le 2 acompte le 1 oct. de cette année ?
e er
Mais si vous voulez le payer seulement en mars, je m’en contenterai aussi bien. Je comprends
parfaitement que vos importantes procédures aient évincé de votre mémoire cette affaire qui en
2

comparaison est tout à fait insignifiante.


Mais à présent, je vous prierais tout de même de bien vouloir prêter attention à ce qui suit et
qui se rapporte à votre noble intention de m’assurer l’affermage d’Ohra, qui m’a été cédé à vie,
même dans le cas où je vous survivrais. À cet effet, le Dr. Emden a étudié en profondeur le
Code* français et a trouvé que votre part légitime serait de ¾ de votre fonds, parce que vous avez
plus de 3 enfants, et si les éléments constitutifs s’avéraient insuffisants, on pourrait contester ce
qui m’a été légué comme étant un don gratuit*. Il a donc conçu l’affaire dans une autre forme
qui pourrait s’y soustraire : il s’agit d’un COMPROMIS entre vous et moi. Celui-ci sera amené de la
façon suivante : supposons que j’ai contesté votre acquisition de cette part de terrain, pour la
raison qu’en tant que fils aîné privilégié, j’ai fait la concession à ma sœur de vendre le terrain
pour 3 570 Rth, mais non pas de prendre à la place une rente viagère, parce que j’aurais toujours
pu hériter de cette somme, mais non pas de la rente viagère ; elle a acheté cette dernière à mon
insu et sans ma volonté. À cela s’ajoute qu’elle est décédée après réception d’un seul semestre de
la rente viagère. C’est pourquoi j’aurais exigé, grâce à mon droit de prévente, de vous restituer le
semestre et de reprendre le terrain, et j’aurais ensuite porté plainte. Vous auriez alors reconnu
partiellement le poids de mes arguments, en avouant que j’ai été mené à mal dans ce
marchandage. Voilà la raison pour laquelle vous vous seriez engagée dans le présent compromis,
selon lequel je suis pour ma part à l’écart de tout litige, et quant à vous, considérant mon âge
avancé, vous me cédez les affermages à vie et par ailleurs vous m’assurez également les
montants de ces derniers, au cas où vous vendriez le terrain. L’affaire devient ainsi consistante :
certes, pour la rendre parfaite, il faudrait que je dépose réellement une plainte contre vous, en
expliquant à la première audition que nous avons trouvé un compromis, ce qui conférerait une
valeur juridique au compromis qui deviendrait ainsi inébranlable. Je le ferais volontiers, mais
vous ne serez pas d’humeur à jouer cette comédie, car vous avez déjà suffisamment de procès.
Aussi, le Dr. Emden pense qu’il suffirait de rédiger le compromis in duplo, de le faire ratifier par
nous deux et de le faire certifier par acte notarial. Le Dr. Emden rédigerait le document du
compromis et exprimerait ce qui a été dit plus haut dans le jargon juridique. Je crois qu’avec
cela, nous avons enfin trouvé la forme requise que nous cherchions pour l’affaire et je vous prie
donc de me faire bientôt savoir votre avis, si cela vous satisfait, pour que nous puissions enfin
terminer cette affaire.
Avec mon respect le plus sincère je demeure votre serviteur dévoué

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 21 nov.
1850.
241. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher et vieil apôtre.

Ne nous disputons pas , cela ne nous rendrait pas plus sages que la Prusse et l’Autriche ;
2 3

une réputation dont nous allons quand même nous garder. Que celui qui aime se rendre ridicule
n’hésite pas à le faire. Donc, comme dit P. Pilate, a cecqaua cecqaua et on en reste là. Je vous
4

envoie ci-joint la lettre d’un autre apôtre , parce que vous m’aviez demandé de vous faire signe si
5

je tombais sur des livres qui sont de votre ressort. C’est à vous de juger s’il faudra tenir compte
ou non de l’avertissement apostolique qu’on y donne.
En souhaitant pour vous une bonne santé et une vue claire, et pour le monde la paix et un
peu d’entendement humain

Francfort s. M., votre


le 1 déc. 1850.
er
Arthur Schopenhauer.
242. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Mon cher Monsieur Becker,

Je vous remercie cordialement de m’avoir fait part de votre découverte ; l’intérêt que vous
2

portez à ma cause depuis déjà quelques années me fait grand bien, eu égard à la négligence
générale. Je n’ai pas encore vu le livre, et j’ai demandé à la librairie de me l’envoyer dès qu’elle
l’aura reçu. Entre-temps, j’ai envoyé votre lettre à Frauenstädt et j’espère qu’elle l’incitera à faire
une recension. Ce qui fait défaut à présent, ce sont les journaux littéraires : s’ils venaient à
manquer aux Allemands comme les sources en été, la situation serait bien avancée, ainsi que la
barbarie dont les signes ont toujours été les barbes.
Je vous remercie pour votre aimable offre et j’en ferais eventualiter usage. Le D Emden,r

après quelques hésitations, a accepté votre proposition et a ajouté, pour ma part, une raison
matérielle à sa plainte, et l’affaire sera ainsi beaucoup plus crédible. Je l’ai donc soumise à la
dame en question et j’attends sa réponse, avec une incertitude dans laquelle on ne saurait
3

manquer d’être plongé dès qu’on a affaire à des femmes, comme vous le savez. Pour toutes
choses, elles ne suivent que leurs humeurs et elles n’écrivent que quand elles en ont envie.
Avec mon respect sincère

Francfort s. M. entièrement vôtre


le 2 déc. 1850. Arthur Schopenhauer.
243. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami.

Je crois que vous avez entièrement raison dans ce que vous écrivez sur les trois périodes de
ma philosophie , mais il est douteux que je sois encore en vie pour la troisième. Je suppose que le
2

chapitre en question de Fichte vous aura incité à en faire une recension. Il ment comme le diable,
surtout quand il dit que mes doctrines se trouveraient chez Herbart ou Schleiermacher. Mais son
« toujours ferme » me convient, tout comme la « clarté si pénétrante » de Dorguth , et d’autres
3 4

choses encore.
Pour les contributions, je vous conseille les Heidelberger Jahrbücher ; dans le dernier
numéro, un certain Monsieur von Stockmar a cloué au pilori de la crasse ignorance le misérable
hégélien Hinrichs , comme il le mérite : c’est vraiment à lire ! Le monde va enfin comprendre
5

avec quelles créatures Altenstein a occupé toutes les chaires de Prusse.


6

J’espère que Hayn n’imprimera pas sans m’envoyer la correction . Je lui ai également
7

rappelé la commande concernant votre épreuve. Je vous prie d’aller voir sur place et de lui
demander des explications ; dites-lui que vous êtes le médiateur de cette affaire et qu’il vous a
compromis, ou tout autre argument percutant qui pourrait vous venir à l’esprit : du point de vue
de l’honneur d’un commerçant, c’est tout aussi grave que de ne pas satisfaire à des paiements ou
à des engagements pris. Mais nous ne devons pas oublier qu’il détient entre ses pattes mon
manuscrit dont la perte serait à jamais irréparable, car je n’en ai pas de copie et je ne serais pas
capable de l’écrire à nouveau. Agissez donc, très cher, avec sagesse, force et ferveur. Ne le
quittez pas sans repartir avec la promesse ferme du début immédiat de l’impression.
Avec une entière confiance en votre bonne volonté et avec mes meilleurs vœux pour votre
santé

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 10 janv. 1851.
244. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur Becker,

Selon votre aimable autorisation, je vous envoie le contrat du compromis rédigé à la suite
2

de vos conseils, après que Madame Mertens, ici même et en votre présence, a exprimé son
accord de vive voix. Comme le Dr. Emden, qui l’a composé, ne connaît pas bien le droit français,
je vous prie de bien vouloir réfléchir s’il y correspond, s’il tient debout et s’il est valide, ou s’il
faut encore ajouter d’autres clauses ou formes ou je ne sais quoi, et de noter vos remarques
éventuelles en marge, car le Dr. Emden recopiera l’ébauche, après quoi je l’enverrai à la dame.
C’est lui qui a barré certains §§ à ma demande, car il faut éviter toute précision trop évidente et
toute condition trop onéreuse. Je vous ai fait part verbalement de l’humour qui sous-tend en
vérité cette affaire, et vous ne l’aurez pas oublié.
En même temps, nous souhaiterions que vous nous disiez s’il est suffisant que chacun des
deux contractants signent le compromis et que la signature soit certifiée par acte notarial, ou s’il
est nécessairement exigé de le faire sous la forme d’un protocole notarial ; ce qui serait difficile à
cause de l’éloignement des domiciles.
Ad philosophica ! ce qui procure tout de suite un soulagement. J’ai lu le chapitre de Fichte
et j’ai trouvé ce que vous dites à ce sujet tout à fait juste et fondé. Même s’il déforme, gauchit et
malmène au possible les choses, je préfère encore cela à l’ignorance sournoise et butée. Sa
malice de professeur est amusante, lorsque, apparemment sans le vouloir, il cite précisément les
passages qui offensent avec vigueur toute cette philosophie de quenouilleurs et leur morale
scolaire pour enfants, et qui sont donc tout à fait hérétiques. Mais tout cela me convient.
Je vous prie de ne procéder à cette corvée* que nous exigeons de vous que si vous en avez
le bon loisir, car ce n’est pas particulièrement urgent, et je demeure avec mes amitiés cordiales

Francfort s. M. votre
le 17 janv. serviteur dévoué
1851,
eheu, fugaces, Arthur Schopenhauer
Posthume, Posthume,
labuntur anni !3

245. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens, c’est avec une joie redoublée que je vous écris, après que
notre récente entrevue* chez Monsieur Spelz nous a permis de renouer contact. À la suite de
2

votre aimable approbation, sous forme d’un compromis conclu entre nous, je vous en envoie ci-
joint l’ébauche, rédigée par le Dr. Emden. Il a utilisé toutes les formes rigoureuses et autres
clauses nécessaires pour que cela vaille comme un véritable compromis juridique et, dans le cas
où je devrais vraiment vous survivre, pour me donner les moyens de m’assurer le revenu* que
vous avez aimablement mis de côté. Or il ne suffit pas que ce document soit signé par vous et
moi et que nos signatures soient attestées par un notaire, mais il est nécessaire que le document
soit rédigé par le notaire lui-même, que nous le signions en sa présence (par devant notaire*) et
qu’il le conserve, alors que nous recevrons seulement les tirés à part certifiés conformes. Il doit
donc être rédigé entièrement à Bonn ou ici : la partie manquante (vous ou moi) sera alors
remplacée par le biais d’une procuration spéciale, grâce à laquelle quelqu’un signera à sa place.
Si vous souhaitez que cela se déroule ici, vous pourriez par exemple donner une procuration à
Monsieur Spelz, spécialement pour signer ce document, dont vous pouvez même annexer
l’ébauche scellée à la procuration, pour éviter qu’on ne signe autre chose. Si vous souhaitez que
cela se déroule à Bonn, alors que je n’ai aucune connaissance là-bas, il faudrait que je vous prie
de me proposer un mandataire, par ex. le cousin Mertens, qui signerait à ma place, par l’effet
d’une procuration qui l’y autorise. C’est évidemment un peu long et compliqué, mais le Dr.
Emden affirme que c’est indispensable pour la validité du document. Je demande donc votre
aimable avis sur ce point, et nous pourrons alors enfin nous défaire et nous débarrasser de cet
objet si longuement discuté, en remettant le reste à Dieu.
Le 5 janv., Friedrichsen m’a écrit, avec l’envoi de mon affermage : les nouvelles des 3
procès sont favorables, ce qu’il vous a sans doute également fait savoir. Il m’a ensuite aussi fait
3

part de l’affaire du chemin de fer . Vous savez à quel point je lui suis peu favorable, mais cette
4

fois-ci, il me semble qu’il procède de manière tout à fait sincère et je ne crois pas qu’il cherche à
nous duper. Peut-être avez-vous également changé votre opinion sur ce point ; en tout cas,
j’attendrai votre avis et votre décision avant de lui faire une procuration pour laquelle il va
m’envoyer le formulaire. Or ce qui m’inquiète, c’est qu’il n’a pas spécifié les parts de terrain,
mais qu’il a parlé seulement de façon générale. Il est possible qu’il ait cédé encore plus de
terrain. Je propose donc que nous le spécifions à sa place dans nos procurations. C’est sans doute
M. Abegg qui fait la vôtre ? Je demande votre avis sur ce point, ce que vous m’avez de toute
façon déjà promis.
En attendant donc avec espoir toutes vos résolutions, et si possible avec de bonnes nouvelles
concernant vos propres affaires, je demeure avec mon plus grand respect votre serviteur dévoué

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 21 janv.
1851.
246. PROJET DE CONTRAT
POUR SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Ci-devant moi le notaire royal de Prusse xx se sont présentés xx et ont déclaré ce qui suit :
Au mois de janvier de l’année 1849, la sœur de Monsieur le Dr. phil. Arthur Schopenhauer,
Mademoiselle Adèle Schopenhauer, a demandé et obtenu auprès de Monsieur son frère, en
qualité de copropriétaire doté du droit de prévente, l’accord pour la vente de 3/9 de sa part des
terrains schopenhauériens à Ohra près de Dantzig à Madame la veuve Sibylla Mertens-
Schaaffhausen à Bonn, pour le prix d’achat de 3 700 Th. pr. crt.
Or, après le décès de Mademoiselle Schopenhauer en août 1849, on constata que cette
dernière n’avait pas vendu sa part de terrain à Madame Sibylla Mertens-Schaaffhausen pour la
somme sus-indiquée, mais l’avait cédée en échange d’une rente viagère, ce à quoi Monsieur le
Dr. A. Schopenhauer n’a jamais consenti et, comme, en tant qu’héritier unique de sa sœur, cette
part d’héritage lui aurait été ainsi retirée, il n’aurait d’ailleurs jamais donné son accord pour ce
dessaisissement. C’est pourquoi ce dernier s’est estimé en droit d’avoir recours à la justice pour
remettre en cause la légitimité de son accord et donc également la vente du terrain de sa sœur,
contre l’acheteuse, dans l’intention de racheter la part de terrain en question, grâce à son droit de
prévente et par la restitution de la rente viagère que Madame Mertens-Schaaffhausen avait payé
pendant un unique semestre à sa sœur. Il a signifié immédiatement cette intention à Madame
Mertens-Schaaffhausen, suite à quoi les exigences de Monsieur le réclamateur, après les
négociations habituelles, ont trouvé un arrangement à l’amiable et une liquidation définitive, par
le compromis ci-après, établi entre d’une part Madame la veuve Mertens-Schaaffhausen à Bonn,
d’autre part Monsieur le Dr. phil. Arthur Schopenhauer de Dantzig, remplacé par son mandataire
Monsieur xx.
ART. 1. Madame Sybilla Mertens-Schaaffhausen reconnaît comme légalement et
factuellement exactes les raisons avancées plus haut par Monsieur le Dr. A. Schopenhauer pour
les réclamations concernant ce contrat de rente viagère, et s’engage à verser les
dédommagements correspondants à Monsieur le Dr. A. Schopenhauer par voie
d’accommodement, pour la privation d’héritage causée par la vente non autorisée moyennant un
contrat de rente viagère.
À cette fin, Madame la veuve Sibylla Mertens-Schaaffhausen transmet et remet à Monsieur
le Dr. Arthur Schopenhauer, pour le restant de ses jours, tous les droits pour user sans exception
des 3/9 de part de terrain d’Ohra achetés par sa sœur, et cède par conséquent à Monsieur le Dr.
Arthur Schopenhauer le droit pour l’usufruit à vie, à déclarer comme charge locative de la part
de terrain sus-nommée.
ART. 2. Monsieur le Dr. Arthur Schopenhauer accepte l’usufruit à vie de ces 3/9 de part de
terrain de sa sœur cédé et octroyé par Madame Sybilla Mertens-Schaaffhausen, et déclare être
entièrement satisfait et dédommagé pour l’abandon de son droit de prévente causé par
l’altération unilatérale de son accord de vente, et reconnaît en échange la vendeuse Madame
Sibylla Mertens-Schaaffhausen comme étant l’unique propriétaire légitime des 3/9 de part de
terrain d’Ohra, et renonce pour sa part à toutes les réclamations et procédures concernant cette
vente de terrain par sa sœur.
ART. 3. Cet usufruit à vie octroyé à Monsieur le Dr. Arthur Schopenhauer pour les 3/9 de
part de terrain appartenant dès lors à Madame Mertens-Schaaffhausen concerne — étant donné
que l’ensemble du complexe foncier est sous bail et en partie sous bail emphytéotique, le bailleur
général étant Daniel Friedrichsen, agent à Dantzig — la jouissance des intérêts emphytéotiques
de ces 3/9 de la part, à payer pro rata par le bailleur général, qui s’élève à la somme annuelle de
cent cinquante thalers pr. crt. et doit être payée directement à Monsieur le Dr. Schopenhauer par
le bailleur principal Friedrichsen ; Madame Mertens-Schaaffhausen s’engage à cette fin à faire
parvenir les directives et l’autorisation exigées aussi bien à l’actuel bailleur principal qu’à son
successeur.
ART. 4. Si un jour Madame Mertens-Schaaffhausen, ses héritiers ou ses successeurs
légitimes devaient préférer une autre forme d’exploitation des parts de terrain que celle d’un bail,
on a trouvé juste, considérant les circonstances particulières, que même dans ce cas, le montant
annuel de 150 th. pr. crt. doive continuer à être versé et garanti à Monsieur le Dr. A.
Schopenhauer.
ART. 5. Si Madame Mertens-Schaaffhausen, ses héritiers ou ses successeurs légitimes
devaient être incités à vendre cette part de terrain pendant l’existence de cet usufruit, Monsieur le
Dr. A. Schopenhauer ne serait tenu de libérer l’usufruit de cette part de terrain qui lui revient que
si Madame Mertens-Schaaffhausen garantissait par d’autres moyens le montant des intérêts
emphytéotiques ou autres revenus de la part de terrain par sécurité hypothécaire ou en l’absence
d’objets hypothécaires correspondants.
ART. 6. Les deux parties renoncent à toutes objections éventuelles contre ce compromis et
l’usufruit, en particulier l’objection du laesio enormis au-dessus ou en dessous de la moitié de la
valeur réelle, ainsi qu’aux objections de persuasion, d’erreur ou de mécompréhension de ce qui a
été écrit.
247. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

[…] Parfois, je suis également préoccupé par des conjectures, comme le fait qu’il pourrait
par exemple abuser de mon manuscrit, le communiquer à d’autres personnes qui me voleraient
des pensées. Et combien de bonnes et belles pensées j’aurais pu encore y insérer durant ces trois
mois, s’il s’était trouvé chez moi et non chez lui ! Oh.
2

Francfort s. M., le 30 janv. 1851


248. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens, vous aurez reçu ma lettre du 21 janv., dans laquelle j’avais
eu l’honneur de vous envoyer le formulaire du compromis conclu entre nous . J’attends toujours
2

de recevoir vos objections concernant la procuration d’expropriation de Friedrichsen , objections


3

que vous m’aviez annoncées de vive voix. Mais je ne peux pas le faire attendre plus longtemps,
je demande donc à nouveau votre avis, et si cela ne se fait pas sous 8 jours, je lui exposerai mon
accord , mais avec des indications spécifiques concernant les arpents et les routes, comme il les a
4

cités dans sa lettre : l’affaire me semble d’ailleurs dénuée de toute arrière-pensée.


Si éventuellement vous deviez croire, comme il y a un an, que quelqu’un m’aurait payé sur
place les 150 Rth en question, je me permets de remarquer que cela n’a pas été le cas.
Je vous souhaite de tout cœur de gagner et de réussir votre procès — au cas où vous
5

n’agiriez pas à la fin comme l’empereur Louis le Pieux qui, dans la chapelle d’Élisabeth qui se
6

trouve toujours ici, avait pardonné à ses fils repentants et rebelles, ce que nous admirons encore
après 1 000 ans.
En demeurant respectueusement votre serviteur dévoué

Francfort s. M. le 28 févr. Arthur Schopenhauer.


1851.
249. PROCURATION
POUR DANIEL FRIEDRICHSEN 1

Procuration spéciale.

Je soussigné, en qualité de copropriétaire du terrain à Ohra, numéro trente-huit du livre des


hypothèques, donne procuration par la présente à Monsieur Daniel Friedrichsen, agent à
Dantzig, pour vendre et transférer, en vue de la construction du chemin de fer de Dirschau, les
parts de terrains suivantes :
1) la part de terrain prise à bail par le jardinier Behrend, une part d’environ trente verges
carrées, au prix d’achat de cent seize thalers pr. c .
t

2) la part prise à bail par le fermier Frahsmann, une part de quarante-cinq à cinquante
verges carrées, au prix d’achat de cent soixante-quinze thalers, avec cent thalers de
dédommagement pour une fermette qui se trouve sur place. Monsieur le mandataire doit être
autorisé à recevoir le prix d’achat et à l’acquitter en mon nom et légalement.
J’autorise explicitement par la présente tout ce que Monsieur le mandataire a fait concernant
la vente des parts de terrain sus-mentionnées, les accessoires et les pièces constitutives, à la
Direction des Chemins de fer de l’Est et j’autorise en particulier toutes les négociations faites
avec la Direction des Chemins de fer de l’Est concernant la vente et je demande de pouvoir
dresser ces négociations pour Monsieur Daniel Friedrichsen.

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer,


le 11 mars Dr. ph. cum jure legendi
1851. in Univ. Berol.

250. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami.

J’ai suffisamment confiance en vous pour vous laisser lire mon livre ½ année avant sa
parution , mais vous êtes le seul à qui j’accorde ce privilège : c’est pourquoi je vous demande de
2

ne surtout pas prêter ces feuilles ni de les lire à PERSONNE, pour que je ne sois pas victime d’un
vol de pensées — ce dont les gens sont par ailleurs très capables. Vous êtes exempt de tout
soupçon de ce genre, mais gardez-vous de procéder comme jadis avec la préface du roman
japonais .
3

Une fois que nous serons plus avancés, j’aimerais apprendre ce que vous pensez
sincèrement des petites choses de cette olla podrida : la variété n’y manquera en tout cas pas, car
4

il s’agit d’un pâté composé des choses les plus diverses. Dans le 2 tome se trouvent également
e
des passages comiques, du moins les dialogues. Je suis très content du typographe : il est attentif
et fidèle — ce que je vous prierais de lui dire à l’occasion.
Ici, l’hiver n’a pas eu lieu, on n’a vu aucune neige ni glace, de sorte que nous avons tous
lancé des regards inquiets vers la Sorbetto-Boutique dans l’allée, en pensant à la chaleur estivale.
Avec mes vœux sincères pour le parfait rétablissement de vos palpebrarum 5

Francfort s. M., votre ami


le 26 mars 1851. Arthur Schopenhauer.

251. À JOHANN EDUARD ERDMANN 1

Très honoré Monsieur le Professeur,

Comme le but dans lequel vous avez l’intention d’utiliser les renseignements que vous
m’avez demandés dans votre chère lettre m’est nécessairement bienvenu, j’ai en quelque sorte un
devoir de justice qui m’oblige à satisfaire votre demande, même si je n’approuve pas la tendance
du public à passer de la chose même à la personne, et que j’ai toujours laissé de côté ma propre
personne. Conformément à cela, je vous présente quelques traits biographiques fondamentaux
qui, je pense, pourraient à peu près correspondre à vos intentions.
Je suis né le 22 février 1788 à Dantzig, où mon père était l’un des commerçants les plus
respectés de la ville, et ma mère était Johanna S., qui plus tard devait devenir célèbre par ses
écrits. Passant outre l’envangelium infantiae qui devait nous conduire en France et en Angleterre,
je vous signale que je suis entré à l’Université de Göttigen en 1809, où j’ai fréquenté des cours
de sciences de la nature et d’histoire, avant d’être éveillé à la philosophie durant le 2 semestre,
e

par les cours de G. E. Schulze, Enésidème. Celui-ci me conseilla sagement de consacrer mes
efforts personnels d’abord exclusivement à Platon et à Kant, et de ne pas en regarder d’autres,
notamment Aristote ou Spinoza, avant d’en être arrivé à bout. En suivant ce conseil, je me suis
trouvé très bien. En 1811, j’ai déménagé à Berlin, en espérant qu’avec Fichte, je ferais la
connaissance d’un philosophe authentique et d’un grand esprit, mais ce respect a priori se
transforma bientôt en mépris et en raillerie. Je suivis quand même son cours. En 1813, j’ai
préparé ma thèse de doctorat à Berlin, mais chassé par la guerre, je me suis retrouvé en Thuringe
en automne sans pouvoir revenir, et j’ai donc dû présenter ma thèse de doctorat sur le principe de
raison suffisante à Iéna. J’ai ensuite passé l’hiver à Weimar, où j’ai eu la chance de fréquenter de
près Goethe, qui m’était devenu aussi intime que le permettait alors notre différence d’âge de 39
ans, et qui a eu une influence bénéfique sur moi. En même temps, l’orientaliste Friedrich Majer 2

m’introduisit à la pensée de l’Inde antique, ce qui m’influença de façon essentielle. De 1814 à


1818, je vécus de mes rentes à Dresde, utilisant la bibliothèque et les collections d’art pour des
études diversifiées, tout en suivant mes pensées, dans cette belle région. Un épisode de mon
travail d’alors fut la parution, en 1816, de mon traité De la vision et des couleurs. C’est pendant
ce séjour de 4 ans à Dresde que mon système philosophique se constitua dans ma tête, pour ainsi
dire sans mon intervention, tel un cristal dont les rayons convergent vers le centre, et c’est sous
cette forme que je l’ai fixé, sans tarder, dans le premier tome de mon ouvrage principal. Ce ne
sont pas les livres qui m’ont fécondé, mais le monde. Tout de suite après avoir remis le
manuscrit à l’éditeur, en automne 1818, je fis un voyage à Rome et à Naples. À mon retour au
printemps 1820, je posai ma candidature pour un poste de professeur à l’Université de Berlin, où
je fus alors également inscrit dans le livre des docteurs enseignants de l’université. J’ai dispensé
des cours le premier semestre et ensuite plus jamais. À la place, j’ai plutôt voyagé de nouveau en
Italie au printemps 1822, revenant à Berlin en 1825, date depuis laquelle je figurai dans le
catalogue des cours, mais sans en donner. En 1830, je rédigeai, à l’usage de l’étranger, une
présentation remaniée en latin de mon traité De la vision et des couleurs, qui trouva une place
dans le 3 tome des Scriptores ophthalmologici minores, éd. Justus Radius. En 1831, j’ai évité le
e

choléra qui avançait sur Berlin en me réfugiant provisoirement ici, mais depuis j’y suis resté, car
le climat me convient et le confort du lieu me plaît. Comme je n’avais rien publié depuis 1818,
exception faite du remaniement en latin évoqué plus haut, mais que j’avais observé un silence
indigné en raison de l’ignorance de mon œuvre conjuguée avec la Hegelgloria, j’ai écrit ici, en
1836, mon traité De la volonté dans la nature, un traité dont le poids est peu important dans
l’absolu, mais grand d’un point de vue spécifique, car il expose de façon plus profonde qu’aucun
autre le noyau de ma métaphysique, le véritable nervus probandi de la chose. Ensuite, en 1838 &
39, j’ai répondu aux deux questions scandinaves mises à concours, qui ont paru en 1841 comme
Problèmes fondamentaux de l’éthique. En 1844 suivit la 2 édition, augmentée du double, de mon
e

ouvrage principal et en 1847 celle, très améliorée, de ma thèse de doctorat.


J’ai eu la chance inestimable, pour un homme de mon espèce, de toujours avoir une
existence assurée et de n’avoir jamais été obligé de travailler pour de l’argent, ou de chercher un
emploi. Ceci m’a permis de disposer paisiblement de mon temps et de mes forces en me donnant
en outre cette attitude probe sans laquelle des ouvrages comme les miens n’auraient pas pu se
faire.
J’espère, cher Monsieur le Professeur, que ce que je vous ai donné dépassera vos besoins,
pour que vous puissiez choisir ce qui convient à vos fins. Comme vous m’avez déclaré que vos
intentions étaient honnêtes, j’ai voulu vous satisfaire au possible et je demeure avec la plus haute
considération

Francfort, votre
le 9 avril serviteur dévoué
1851. Arthur Schopenhauer.
252. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher apôtre !

C’est bien parce que vous occupez ce rôle que je me sens en quelque sorte obligé de vous
faire part du courrier ci-joint , qui vous donnera beaucoup à rire et parfois à penser ; ce qui ne
2

nécessite pas mon commentaire. Votre prophétie au sujet de la deuxième période de ma


philosophie semble se réaliser : aux deux professeurs qui nous ont déjà fait allégeance , d’autres
3

vont venir s’ajouter, car ils sont tous fait du même bois. Sans doute votre trombone et la
trompette de Dorguth ont-ils largement contribué à les déranger dans leur tranquillité et à les
convoquer. Le Dr. Emden en a beaucoup ri. J’ai envoyé le curriculum vitae demandé à Monsieur
le Professeur. Ne vient-il pas à moi dans sa lettre comme un jeune homme athénien qui rejoint le
Minotaure ? ou comme Leporello avec son « Ô toi, statue de bronze et de pierre, mes jambes
tremblent » ?
4

Vous savez à présent ce que je pense de Herbart . Parerga doit précisément signifier œuvres
5

annexes : car c’est ce qu’elles sont. Cosmos, prolégomènes, propédeutique, etc., sont également
6

des titres grecs. Il va de soi que j’écris d’abord pour les savants, d’où les citations grecques et
latines. Les gens cultivés verront bien ce qu’il pourront en tirer. Cela devrait suffire. Mais ce
n’est que DANS CETTE MESURE que je suis populaire, c’est-à-dire condescendant.
J’aimerais bien apprendre vos autres remarques. Dans le 2 tome, il y aura un autre passage
e

hautement comique sur le Dieu semi-transcendant . La comédie que vous avez l’intention
7

d’écrire ressemblera à celle, amusante, parue il y a 12 ans ; je crois qu’elle s’appelait Les
8

Hegelingen ou quelque chose dans ce genre, avec une taverne « Chez l’esprit concret » — très
9

bon ! Plus tard, Rosenkranz en a fait une, pas très amusante : Le Tir philosophique aux oiseaux , 10

je crois. Cela doit donc être très amusant et très précis, sinon cela ne sert à rien. Mesurez bien
vos forces avant de tirer.
Le livre de Fichte se trouve sans doute à la Bibliothèque royale. Vous devriez essayer
11

d’obtenir, par une recommandation, l’accès à la SALLE DE LECTURE ROYALE (j’espère qu’elle
12

existe toujours) : il y a là tous les livres récents achetés par la bibliothèque, fraîchement reliés,
pendant 6 semaines, et TOUTES les revues spécialisées. Le plus souvent, j’y étais seul, à côté du
général Schlabberndorf.
Ceux qui ne veulent pas que je les mette à bas n’auront pas mes critiques : on en reste là . 13

Par ailleurs, votre petite recension de Link est assez bonne — pas seulement parce que j’y suis
14

mentionné. Dans le 2 tome, ce Link sera durement puni , comme il se doit pour des péchés très
e 15

graves : pour moi, le gaillard est mort !


Ne vous plaignez pas de la confusion du manuscrit ! c’est plus loin, dans le passage sur la
16

vision des fantômes, que les difficultés viendront ! Vous en resterez bredouille* ! et pourtant on
trouve très bien son chemin, à condition de garder les yeux ouverts. Mais je vous prie d’aider un
peu le typographe et de veiller à ce qu’il n’omette rien. Tout est exact et précis et sans aucune
négligence. Mais ouvrez l’oculos !
Avec mes souhaits cordiaux pour votre santé !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 12 avril 1851.

253. À LA RÉDACTION
DU KONVERSATIONS-LEXIKON
DE MEYER 1

Conformément à votre demande, je vous envoie la note ci-après sur ma vie qui
correspondra, je l’espère, à vos intentions et au grand public. J’accepte volontiers votre offre
d’imprimer ce qui aura été dit sur moi.
Note sur ma vie.

Je suis né à Dantzig le 22 février 1788. Mon père, Heinrich Floris Sch., était un commerçant
aisé dans cette ville et ma mère était Johanna Sch., qui plus tard devait devenir célèbre par ses
écrits. J’ai fait mes études universitaires de 1809 à 1813 à Göttingen et à Berlin : cette dernière
université accueillait les cours de Fichte, la première ceux de G. E. Schulze Enésidème. En 1813,
j’ai publié ma thèse de doctorat De la quadruple racine du principe de raison suffisante dont la 2e

édition très améliorée et augmentée a paru ici à Francfort en 1847. Après avoir fréquenté
intimement Goethe durant l’hiver 1813-14 à Weimar, j’ai déménagé à Dresde pour y vivre de
mes rentes jusqu’à fin 1818, en fréquentant la bibliothèque et les collections d’art. En 1816
devait paraître mon traité De la vision et des couleurs et à la fin de l’année 1818 mon ouvrage
principal Le Monde comme volonté et représentation, tel qu’il se présente dans le premier tome.
Après l’avoir remis à l’éditeur, j’ai entrepris un voyage en Italie où je suis allé plus loin que
Naples. À mon retour, en 1820, j’ai posé ma candidature pour un poste de professeur à
l’université de Berlin, mais je n’ai dispensé de cours qu’au premier semestre, même si je fus
toujours recensé dans le programme des cours jusqu’en 1831, sans compter les années d’absence.
C’était alors l’époque où prospérait l’hégélianisme. En 1822, je fis un nouveau voyage en Suisse
et en Italie, ne revenant à Berlin qu’en 1825. C’est là que j’ai rédigé, en 1830, une présentation
améliorée en latin de ma théorie des couleurs, parue d’abord en allemand, et qui fut publiée sous
le titre Theoria colorum physiologica, eademque primaria dans le 3 tome des Scriptores
e

ophthalmologici minores édités par Justus Radius. Lorsqu’en 1831, le choléra toucha pour la
première fois l’Allemagne, je me suis réfugié provisoirement ici, à Francfort. Comme cet endroit
resta épargné et que je trouvai que le climat et le confort me convenaient particulièrement, j’y
suis resté ; j’y demeure depuis déjà 21 ans en tant qu’étranger vivant de ses rentes. En 1836, j’ai
fait paraître mon petit traité De la volonté dans la nature, auquel j’attache une valeur
particulière, car j’y expose de façon plus profonde et claire que n’importe où ailleurs le noyau
authentique de ma métaphysique. Peu après, j’ai répondu à deux questions morales mises à
concours, l’une par la Société norvégienne des Sciences, l’autre par la Société danoise. Seule la
première a été couronnée, mais les deux ont été publiées ensemble, sous le titre Les Deux
Problèmes fondamentaux de l’éthique. Enfin, en 1844, j’ai fait paraître la 2 édition de mon
e

ouvrage principal, augmenté du double et en 2 tomes.


J’ai eu la chance de passer ma vie dans une totale indépendance, avec la jouissance illimitée
de mon temps et de mes forces, comme cela était exigé pour faire des études diversifiées et pour
l’élasticité et la liberté d’esprit que réclamaient mes ouvrages.

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 28 mai
1851.
254. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami.

Je crois vraiment que je ne vous ai pas écrit depuis votre lettre du 17 avril, qui pourtant m’a
fait grand plaisir, surtout les histoires diverses sur Erdmann et en particulier sur Fichte, et le reste
aussi. Il est probable que vos scrupules concernant ma théorie de la providence seront à peu près
2

levés vers la fin. Soit dit en passant : si l’on cite Goethe , il ne faut pas le faire d’après le tome et
3

le numéro de page des éditions récentes, mais il faut nommer L’ŒUVRE, avec le livre et le chapitre
correspondants ; c’est ainsi que j’aurais pu vérifier votre citation. Par ailleurs, comme le premier
tome des Parerga est terminé, j’aimerais savoir ce que vous en pensez, sans la moindre réserve
et sans enjolivement. Vous vous serez également aperçu qu’il s’agit donc seulement de parerga,
comme le déclare la préface en toute sincérité. L’impression est bonne et tout est à peu près
correct, opera nostra .
4

Cet été, j’ai lu plusieurs de vos critiques dans les Literarische Blätter, qui étaient très
bonnes dans leur genre et il n’y a rien à redire. Dans les feuilles de correction, j’ai cru entendre
quelques échos venant des prêtres anglais et de Copernic : système du monde. Cela ne vaut pas la
peine. J’aimerais vous voir signer de votre nom, au lieu du 22, surtout parce que dans mon 2 e

tome, un orage se déchaîne contre tout anonymat, mais il ne faudra pas que vous le preniez à
cœur. Mais regardez donc ces misérables tartufferies dans les Göttinger Gelehrten Anzeigen : un
gaillard dénigre le grand Voltaire, un autre les commentaires du Kosmos par Cotta (qui
contiennent une maxime de moi) et d’autres choses encore. Tout cela de façon anonyme. Les
5

Münchner Gelehrten Anzeigen ne font pas mieux . Il revient un véritable mérite à Fallmerayer
6 7

pour avoir publiquement rossé cet infâme Ringseis . 8

À propos, juste après la demande biographique d’Erdmann, il y en a eu une autre, sous


forme de circulaire imprimée, de la part du Konversations-Lexikon de Meyer à Hildburghausen.
Je leur ai envoyé une notice un peu plus courte. C’est tout comme s’ils travaillaient déjà à ma
nécrologie. Mais attendez donc un peu.
Vous pourriez à présent me rendre un service personnel, en demandant à l’occasion aux
ateliers de sculpture de Wichmann , Schadow , Rauch (s’ils existent toujours) s’ils possèdent
9 10 11

encore la matrice du BUSTE DE KANT réalisé par HAGEMANN et s’ils peuvent m’en faire un
12

moulage en plâtre, et combien cela coûterait avec la livraison à MON DOMICILE, payé à réception.
J’aimerais le poser sur mon pupitre. Dans le temps, j’ai vu le buste chez Schadow ou chez
Wichmann. Mais si cela vous est trop importun ou inconvenant, n’en faites rien.
Donnez-moi des nouvelles de vos yeux et aussi de votre santé et de votre bien-être, et si
elles sont bonnes, cela réjouirait vraiment

Francfort s. M., votre ami


le 30 août 1851. Arthur Schopenhauer.
255. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Ce que je n’aime pas du tout, mon cher ami, c’est que vous me croyiez capable de rouspéter
contre vous sans aucune raison : c’est mal me connaître. Je vous porte une grande estime, car
2

vous êtes le champion le plus fervent et le plus actif de ma philosophie, comme Métrodore pour
Épicure. J’espère aussi qu’un jour vous en récolterez les honneurs. En quoi la bonne volonté de
Dorguth et l’acclamation silencieuse de Becker et de Doss pourraient-elles m’aider ? Ne pensez
donc pas que je rouspète facilement contre vous, ou même que je pourrais rompre notre relation.
Vos réflexions sur mon livre sont peut-être justes dans l’ensemble, mais elles ne vont pas en
profondeur. Malheureusement, et selon toute apparence, vous avez uniquement pris en
considération les Aphorismes sur la sagesse dans la vie, et vous suivez en cela le public dont la
connaissance se limite toujours aux choses les plus récentes et nouvelles. Mais venons-en à la
réplique. Comme je ne parle que de ce que je connais par mon expérience intérieure et
extérieure, mes aphorismes sur la sagesse dans la vie contiennent forcément beaucoup de choses
subjectives. Le retour au génie et à ce qui s’ensuit s’est effectué en toute conscience et avec
préméditation. Car je suis le premier à avoir approfondi l’essence véritable du génie et donc à
l’avoir expliqué clairement. Les meilleurs avant moi, notamment Jean Paul dans son Esthétique,
et Diderot, Du génie, sont restés à la surface. C’est pourquoi il était nécessaire de ne rien garder
de mes pensées sur le sujet, quitte à faire seulement eadem sed aliter , une nouvelle présentation
3

et un nouvel éclairage porté sur la chose. Ici, comme dans de nombreux cas, j’ai pénétré la chose
beaucoup plus profondément que les autres. Pour ce qui est des répétitions, je dis avec
Empédocle : diy jai sqiy sa jaka .
4

Je ne m’étonne pas que les Kielois aient renvoyé votre article , mais bien plutôt que vous le
5

leur ayez remis, et de surcroît avec un titre pareil ! alors que vous voyez bien qu’à présent tous
les professeurs, sur ordre suprême, rivalisent en dévotion et en piété : les Göttinger Anzeigen
sont les plus ignobles, sous l’égide d’une Académie des SCIENCES ! Mais quand on veut s’occuper
du bon Dieu, il faut toujours avoir à l’esprit : suaviter in modo, fortiter in re , et donc ne pas
6

choisir ce genre de titre. Ce que Liebner a écrit sur le péché est misérable : un jeune homme qui
ne sait pas encore écrire. Je ne connais pas HARMS , il est sans doute le fils du vieux Klaus . Donc
7 8

« que le chemin soit jonché de roses et le tourment oublié ». Cette revue mensuelle de
9

Schwetschke, comme la Deutsche Monatsschrift , ne vaut rien. Ce sont là des considérations


10

oiseuses faites par des gens oiseux à propos de choses oiseuses. S’ils étaient comme ceux qui
jadis écrivaient dans le Spectator ! Mais ce sont tous des pécheurs ! Ce qui est extrêmement
répugnant et écœurant, c’est la tendance naturalisante de ce C. , tout à fait ignorant et incapable ;
11

tout comme les éloges du lamentable Chalybäus dans les Literarische Blätter de Brockhaus. Ces
12

dernières également ne sont plus ce qu’elles étaient, il y a beaucoup de choses misérables à


l’intérieur. Un certain Monsieur n 69 y écrit de façon appliquée et futée. Il y aurait grand besoin
o

d’une revue littéraire solide et honnête.


Le Literarisches Central-Blatt n’est pas mauvais du tout et le nombre de ses pages devrait
être multiplié par 6.
En vous remerciant beaucoup, je vous renvoie ci-joint la feuille de la Gegenwart . Ce n’est
13

pas ce que cette crapule raconte à mon sujet qui m’agace, mais ce qu’il dit de KANT : sa
philosophie survivrait encore seulement chez quelques pasteurs de campagne et quelques maîtres
d’école ; la sagesse hégélienne serait la lumière du monde ! Quels fieffés fripons ! Quant à savoir
qui il est, je peux seulement dire qu’il est TRÈS probablement celui qui jadis avait fait une
recension correcte à mon sujet dans les Hallische Jahrbücher ; car ici comme là, il s’emporte
14

parce que j’ai affirmé que ma philosophie était une Thèbes aux 100 portes : c’est ce qu’il
n’arrive pas à digérer, alors que c’est là une métaphore dénuée de toute arrière-pensée, pour faire
comprendre que l’étude de ma philosophie peut être commencée à partir de n’importe quel bout
— ce qui n’a choqué personne sauf lui. On peut seulement avancer au sujet de cet homme qu’il
est de cette ville, parce qu’il fait allusion à mon caniche. Le Dr. Emden en soupçonne tantôt un,
tantôt un autre, fermement convaincu qu’il est d’ici. Voilà donc les fruits splendides de
l’anonymat.
On m’a fait savoir qu’on parle de moi dans 2 nouveaux livres : 1. Les Penseurs
15

d’Allemagne (Dessau). 2. Livre de la sagesse du monde (Leipzig). Avant-hier, à l’Hôtel


d’Angleterre, un certain Dr. Oelsner-Monmerqué est venu à moi, ci-devant rédacteur au
16

Ministère des Affaires étrangères de l’Empire d’Allemagne*, c’est-à-dire de l’archiduc Jean-


sans-terre, en me demandant la liste de mes écrits. Car il y avait à Paris Laromiguière , 17

professeur, et à présent son élève, un certain Monsieur du Chevrier ou approchant ; entre autres,
ils sont opposés à Cousin . Ils ont chargé le Dr. sus-nommé de faire un exposé sur la philosophie
18

allemande la plus récente. C’est la raison pour laquelle il veut m’étudier ; son exposé paraîtra
sans doute dans le Journal des Débats. Je lui ai tout de suite écrit la liste. Cela sera un beau bazar
! Allons-y ! je n’ai rien contre. Il sait l’allemand et le français, les deux aussi PARFAITEMENT, ce
dont j’ai pu me convaincre. Son père a écrit en 1809 une Histoire de Mahomet*.
Je vous remercie fraternellement de vos efforts faits pour le buste de Kant : je vous prie
donc de bien vouloir me le commander. 5 thalers, c’est très cher pour un buste en plâtre, mais
qu’il en soit ainsi. Seulement, exigez qu’il me soit livré intact et sans dommages ici à Francfort
et que je ne sois pas obligé de payer en plus le transport et l’emballage. Après vérification, je
paierai tout de suite 5 thalers à ordre. Exhortez-le à procéder avant tout TRÈS SOIGNEUSEMENT
(cela est très important) en disant que le buste est destiné au vrai et authentique héritier du trône
de Kant, même si cela devait prendre quelques jours de plus. Mon adresse est Schöne Aussicht n o

17. La révolution a fait appliquer de nouveaux numéros sur les maisons : la seule chose d’elle qui
mérite de rester. Comme il me regardera, du haut de son pupitre !
Je connais le monument de Frédéric le Grand depuis longtemps par une gravure sur cuivre,
19

mais pour cette raison je ne peux en juger que du point de vue de la composition, donc : le roi ne
savait rien ou presque de Kant . Quant à Lessing, le Dr. Passavant , qui a mon âge, me racontait
20 21
récemment que, dans sa jeunesse, la sœur de Lessing lui avait parlé d’une audience de son frère
chez le roi, et qu’en rentrant il était tellement désespéré qu’il s’était arraché la perruque et l’avait
jetée à terre dans un geste de colère. Mais il est scandaleux et révoltant que le véritable ami et
frère spirituel du roi fasse défaut, le grand, le magnifique, l’immortel Voltaire. Qu’il se soit
brouillé avec le roi n’est pas une excuse : car cela n’a pas empêché ce dernier de rédiger lui-
même son éloge* à sa mort en 1776 et de le lire en qualité d’académicien à l’Académie
berlinoise. Moses Mendelssohn aurait également dû y figurer : le roi l’avait fait venir plusieurs
fois pour s’entretenir avec lui. Mais ils ont agi comme le lieutenant de Poméranie qui n’avait pas
laissé entrer Mendelssohn à l’opéra. Allez donc voir vers minuit « l’homme en bronze et en
pierre » et demandez-lui : qui n’a pas voulu céder une place à son ami et qui est responsable de
22

cette colossale farce d’Abdérite ? Il fait alors un signe de la tête et une voix sourde et caverneuse
se fait entendre : « Les taquins. »
Les nombreux ouvrages populaires sur l’histoire de la philosophie, comme par ex. ceux
évoqués plus haut (4 ou 5 ont paru cette année, auxquels s’ajoute celui d’Erdmann), qu’on
fabrique de nos jours malgré les difficultés éditoriales, sont l’une des conséquences du déclin de
la foi : on se tourne vers les philosophes.
Avec mes souhaits cordiaux pour votre santé et votre bien-être

Francfort s. M., votre ami


le 26 sept. 1851. Arthur Schopenhauer.
256. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami !

Je vous remercie de vous être occupé de l’affaire kantienne : il faudra donc que j’avale la
pilule , puisque je me suis mis cette idée dans la tête et que l’occasion est là. Commandez donc le
2

buste, je paierai même l’affranchissement et la caisse ; si vous pouviez en faire baisser le prix,
j’en serais aise, mais dans tous les cas, convenez avec Rauch que le buste soit envoyé à ses
risques, c’est-à-dire que je le paierai seulement si je le vois INTACT ET ENTIER devant moi, car je
ne donnerai rien pour des morceaux. Aussi devront-ils prendre le temps nécessaire pour faire le
moulage AVEC SOIN et pour le laisser sécher, cela est très important : entre tel moulage et un
autre, il y a une différence énorme, c’est pourquoi on apprécie tellement les moulages de Mengs
à Dresde. Je paierai à la personne indiquée par Rauch, statim , mais je voudrais ouvrir la caisse
3

moi-même : pour voir si on n’a pas essayé de me duper.


J’ai vu et lu ce qui me concerne dans les deux ouvrages populaires sur l’histoire de la
philosophie évoqués dans ma dernière lettre. Tous deux parlent de moi en des termes favorables,
mais de façon succincte, alors qu’ils font de longs exposés sur tout ce fatras de crapules — ex
more . Je m’en tire le mieux dans le Buch der Weltweisheit, 2 tomes, 1851, dont la conclusion
4

affirme qu’une nouvelle période de la philosophie commencerait à présent, une philosophie qui
ne partirait plus, comme l’ancienne depuis Kant, de la « conscience » (intellect) mais de la
VOLONTÉ, et dont je serais le coryphée et l’auteur. Très bien. Comme c’est agréable d’avoir 64
ans et d’être présenté au monde comme un nouveau-né ! Voici un passage étrange sur lequel
j’espère que vous pourrez me renseigner : « Arthur Schopenhauer, auquel se rattachent
Voigtländer et Frauenstädt comme promulgateurs de sa doctrine, et Reiff et Plank comme
5 6 7

fondateurs d’un nouveau réalisme idéal à partir du principe de volonté, etc. » Mais qui, je vous le
demande, pourrait bien être ce VOIGTLÄNDER, dont jamais de ma vie je n’ai rien entendu ni lu ???
Si vous savez quoi que ce soit à son sujet, ou si vous pouvez apprendre quelque chose sur lui, je
vous prie de me le faire savoir quam primum , si ce n’est par télégraphe, au moins par poste
8

cochère. Aurais-je sans le savoir un apôtre actif qui vous est comparable, voire préférable ? Ah,
je crains qu’il ne s’agisse là d’une erreur grossière. Mais apportez-moi des éclaircissements là-
dessus. Et de façon générale, vous devez lire tout ce qui s’écrit sur moi : cela est nécessaire.
Les bonshommes évoqués plus haut ne manquent pas non plus de fournir des notes
9

biographiques sur moi, aussi bien qu’ils le peuvent, par ex. le nom de jeune fille de ma mère.
Pour les autres ils ne le font pas, sauf pour Kant et Jacobi. Est venu pour m’ennuyer pendant
deux heures le lieutenant et Dr. von Bruchhausen qui a l’intention de mettre au monde un écrit
10

philosophique, avec pour titre Panmonothéisme — le bon gaillard n’a lu ni Kant ni moi.
Dans les Münchner Gelehrten Anzeigen se trouve une longue recension qui chante les
louanges de l’Éthique de Chalybäus : le produit de ce pécheur est donc magnifié et glorifié dans
tous les journaux. Rendez-vous compte que mon Éthique, au contraire, n’a été annoncée dans
aucun des nombreux journaux littéraires qui florissaient à l’époque, excepté dans le Leipziger
Repertorium (qui EST OBLIGÉ de tout recenser), et ce de façon brève, avec la mauvaise intention
de le livrer à la négligence comme un produit insignifiant. Et je ne devrais pas parler de coquins
méprisables* ? Mais, quos ego , mon traité sur la philosophie universitaire sort tout juste du four.
11

Ils le méritent !
Quand l’impression de mon deuxième tome sera achevée, je vous prierai d’exhorter Hayn
d’envoyer mes 9 exemplaires sur vélin (le 10 vous revient) LE PLUS VITE ET LE PLUS TÔT POSSIBLE
e

possible, pour que je puisse les offrir.

Francfort s. M., Avec mes vœux les plus cordiaux


le 10 oct. 1851. Arthur Schopenhauer.
257. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami.

Kant repose sur mon pupitre, sain et sauf, et aussi comme un souvenir durable de votre
obligeance. Cependant il est difficile d’y reconnaître la grandeur de son esprit. Il a été réalisé
alors qu’il avait 70 ans. Mais il me plaît quand même. Je ne puis vous refuser un daguerréotype . 2

Vous l’avez bien mérité ; j’en ajouterai donc un la prochaine fois. Il manque le meilleur parmi
les 4 que vous connaissez : j’ai dû le donner à Madame Mertens-Schaaffhausen à Bonn, car je
3

lui suis très obligé. Elle a l’intention de léguer ses collections d’antiquités et d’art à des
institutions publiques spécialisées, de sorte que mon portrait se retrouvera dans tous les cas en un
lieu digne et ne tombera pas entre les mains de philistins et d’ignorants. Je vous prie d’y veiller
également pour celui que je vais vous envoyer . Je laisserais volontiers en faire une ½ douzaine,
4

mais le daguerréotypeur que nous avons actuellement ici est un rustre, un goujat si
5

insupportable, si indescriptiblement répugnant, que sa présence suffit déjà à répandre la


mauvaise humeur sur mon visage. L’été d’il y a deux ans, j’étais déjà assis devant sa machine,
mais il a eu un tel comportement que je me suis levé d’un coup en saisissant mon chapeau et ma
canne, et que je suis sorti. Il est le seul ici à posséder de bonnes machines. Je rage de voir qu’il
en est ainsi. D’autres m’ont fait 2 grandes photographies : elles sont très soigneusement
6

colorisées, mais ce sont d’ignobles caricatures. C’est étrange, car en regardant l’une d’entre elles
avec attention, lorsqu’elle était encore neuve, je me suis trouvé une ressemblance avec
Talleyrand, monsieur que j’ai pu voir souvent et avec facilité en 1808. Quelques jours après,
j’étais attablé à côté d’un vieil Anglais ; après un échange de conversation et de confidences, il
me dit : « Sir, dois-je vous dire à qui vous ressemblez ? À Talleyrand que j’ai souvent fréquenté
et vu dans mes jeunes années. » C’est curieux, mais littéralement vrai. Je ne voudrais pas vous
envoyer ces grimaces : vous aurez donc un daguerréotype, fait en même temps que celui de Mad.
Mertens : j’y ai l’air indignabundus , comme si je venais de terminer le traité sur la philosophie
7

universitaire. Gardez-le avec soin, car je ne serai plus jamais daguerréotypé aussi jeune. Si le ciel
pouvait nous envoyer un daguerréotypeur français ! avec les Allemands, rien à faire, ces ânes
grossiers.
J’ai pu me renseigner en librairie sur le livre de Voigtländer et je l’ai commandé avant
l’arrivée de votre lettre. Je ne l’ai pas encore reçu, malheureusement je suis déjà engagé. Si c’est
un apôtre, alors c’est Judas. Je me souviens maintenant, d’après les passages que vous avez cités,
l’avoir regardé et feuilleté à sa parution : il attaque comme étant nouvelle et erronée la
proposition selon laquelle toute chose peut être pensée abstraitement sauf l’espace ; or cela se
trouve plusieurs fois dans la Critique de la raison pure et c’est une vérité a priori que seul un
idiot pourrait nier. Je n’avais rien lu d’autre dans le livre. Dans les Heidelberger Jahrbücher,
novembre et décembre 1850, Monsieur Reichlin-Meldegg , p. 907, nous enseigne que l’espace
8

est « la simple relation des choses entre elles ». Ce faisant, il ne vise pas Kant, et ne fait pas mine
non plus de l’ignorer : non, il est simplement et en toute sincérité UN IGNORANT qui ne connaît pas
même l’ABC de la philosophie kantienne. Des gaillards pareils VIVENT de la philosophie ! Si
seulement j’étais le duc du pays de Bade ! Qu’arriverait-il si un étudiant zélé nourri de Kant
prenait à part Monsieur le Professeur en disant : « Cher ami, s’il en était ainsi, il faudrait que,
quand on élimine les objets, l’espace disparaisse également ! » Mais toute cette canaille est ainsi,
du premier au dernier. Ne rien apprendre, ni penser, ni savoir, mais abuser le public depuis sa
chaire, comme un apprenti cordonnier : on avale la nourriture et on s’abreuve grâce à son métier,
pour ensuite parler sans s’y connaître. Dans le même passage, le monsieur en question attaque la
proposition d’Ørsted selon laquelle « tous les corps sont de l’espace rempli de force », comme si
c’était nouveau, et il ne sait pas que c’est là une proposition kantienne connue, que Kant a
malheureusement dérobée à Priestley , comme je l’ai montré. Il fait donc avec Ørsted ce que
9

Voigtländer fait avec moi. Et c’est ainsi que toute cette racaille en chaire a fait régresser la
philosophie de 70 ans, en oblitérant peu à peu et en faisant oublier la grande découverte de Kant,
pour se mettre lourdement à abuser le public, comme si Kant n’avait jamais existé, car il n’y
avait aucun bon Dieu qui sortait de sa philosophie.
En ce qui concerne ce que vous avez relevé dans mon 2 tome, je remarque brièvement 1) p.
e

234 , vous dites que, pour vous, « sans connaissance » serait identique à « sans conscience ».
10

C’est précisément pour cela qu’en ce passage il est dit de façon essentielle : « M ÊME SI nous (et
vous aussi) ne pouvons nous représenter un état QUI N’EST PAS SANS CONSCIENCE autrement que
comme un état de CONNAISSANCE, il en va différemment en dehors du phénomène, donc dans le
monde de la chose en soi, où POURRAIT exister un état qui sans être cognitif (et donc scindé en
sujet et objet) ne serait pas pour autant sans conscience. » C’est là la paraphrase du passage en
question. Il y est dit : « pourrait » : toute la proposition est donc problématique. Et elle doit l’être,
car tout le thème en question est transcendant.
2) D’abord il faut vous faire remarquer que je ne suis pas Philalèthe : plus loin, dans la
11

longue conversation, j’incarne aussi bien Démophèle que Philalèthe. Ce dernier doit batailler
comme il peut avec Trasymache : aussi, l’ensemble est une sorte de farce. Du reste, vous
trouverez que ce qu’il dit correspond avec ma philosophie, si vous voulez bien vérifier dans le
Monde comme volonté et représentation, tome 1, p. 318 , tome 2, p. 501 et sq. , et p. 635 où la
12 13 14

question de la profondeur des racines de l’individualité est citée parmi celles qui sont insolubles,
mais sa solution décide dans quelle mesure l’individu est un simple phénomène et dans quelle
mesure il est éternel : l’un ou l’autre côté peuvent alors être considérés de plus près, du moins
dans une controverse.
3) On doit distinguer entre « s’ennuyer » et « être ennuyé par les autres ». C’est à cette
15

DERNIÈRE éventualité que les esprits subtils sont facilement exposés, car des conversations ou des
jeux qui suffisent aux autres peuvent les ennuyer à mourir ; on les ennuie donc facilement, mais
s’ils sont seuls, ils ne connaissent pas l’ennui. C’est le contraire avec les gens du commun qui
s’ennuient uniquement en leur propre compagnie ; c’est pourquoi ils préfèrent encore ruiner leur
santé plutôt que d’aller se promener SEULS (alors que les esprits subtils le font volontiers).
Chamfort raconte qu’un homme doué d’esprit disait de BLANCHARD , le premier aéronaute, mais
16

qui était un simple : « Avec cet esprit-là il doit bien s’ennuyer là-haut*. »
J’ai lu la première partie de votre article sur Feuerbach et je vous remercie de m’avoir fait
17

l’honneur de me mentionner. L’exposition et le style de la première page m’ont fait beaucoup


penser à J. G. Fichte, et je ne suis pas loin de supposer que vous étiez alors en train de lire ses
écrits. Que vous vous en preniez au théisme, soit, mais j’aurais aimé que vous portiez plus
d’attention au suaviter in modo : il ne faut pas provoquer de choc, cela effarouche les gens ;
18

après, on peut tout dire. Je trouve que les propositions que vous établissez sont exprimées de
manière trop absolue : la plupart sont vraies uniquement avec des réserves. Si l’on dit plus que ce
qui est exactement vrai, on porte préjudice à son crédit auprès du lecteur.
Je suis sans feuilles de correction depuis 11 jours, alors que jusqu’alors, j’en avais reçu 4 en
l’espace de 2 jours ! Eh bien, nous approchons de la fin. Il y a là des choses qui en irriteront plus
d’un. J’aimerais que vous m’écriviez ce que vous entendrez à ce sujet. Ce fut une erreur de votre
part d’avoir jadis, dans l’exposé à mon sujet , omis de mentionner Dorguth, en quelques lignes,
19

comme il l’aurait mérité. Car pour un article isolé, il n’est vraiment pas assez intéressant. Je vous
avais alors tout de suite réprimandé . À présent, le vieux bonhomme est fâché. Errare humanum
20

est.
Demeurez en bonne santé et joyeux !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 30 oct. 1851.

258. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Me voici, mon cher ami, et je me permets de vous faire savoir que je suis arrivé sain et sauf.

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 10 novembre 1851.
259. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami.

Votre lettre m’a beaucoup amusé, mais il n’y a pas grand-chose à répondre. Mes
exemplaires sont arrivés. Ils sont chez le relieur ; Dorguth, Becker, le Dr. Mayer à Mayence,
2

Emden, l’Académie de Trondheim et von Doss en recevront un exemplaire.


Pensez-vous que si j’avais le moindre doute sur la justesse de la théorie goethéenne des
couleurs, je risquerais mon honneur littéraire pour l’amour du vieux et défunt Monsieur ? C’est
sur le Dr. Clemens que portait l’anecdote très amusante que je vous avais racontée devant la
3

Porte de l’Obermain, à savoir que quelqu’un avait dit que le patient était décédé d’un delirium
Clemens (tremens).
Le Dr. Oelsner est un fanfaron, il voudrait à présent faire une petite annonce* de mes
Parerga, et 6 mois plus tard son exposé* ! Tout cela est du vent, de la paresse, nullement du
travail sérieux. Mais je l’ai invité à traduire la théorie des couleurs de Goethe.
J’ai lu la deuxième partie de votre critique de Feuerbach. Quel fatras grossier et brutal les
hommes sont donc capables de publier ! Le matérialisme le plus massif et borné. Mais avec ses
sophismes et son bavardage verbeux, il n’attirera pas de prosélytes. Fruits de l’hégélianisme que
tout cela.
La résurrection des journaux littéraires semble s’annoncer, car en janvier paraîtra à nouveau
le Literaturblatt de Menzel .
4

Je dois conclure. Donnez donc bientôt de vos nouvelles, à la prochaine occasion, à

Francfort s. M., votre ami


le 28 nov. 1851. Arthur Schopenhauer.
260. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens. Encore une fois, je vous prie instamment de bien vouloir
me renvoyer ma lettre de Friedrichsen. Si je ne la reçois pas par retour de courrier, je serai dans
l’obligation de lui écrire ce qu’il en est et de lui demander de m’écrire à nouveau la lettre, afin
que je puisse y répondre ; comme je suis en devoir de le faire.
Avec ma haute considération, votre serviteur dévoué

Francfort Arthur Schopenhauer.


le 28 nov.
1851.

261. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens. Je ne puis manquer de vous souhaiter un bon


rétablissement, car pendant la longue absence de votre réponse, mon inquiétude que vous
pourriez être malade s’était presque transformée en certitude. Malheureusement vous gardez
encore la chambre, et je sais que vous avez depuis toujours cette tendance ; j’aimerais que vous
n’y cédiez pas. Car la chose la plus indispensable pour la santé, c’est le mouvement à l’air libre.
Il a été prouvé que deux maux terribles, la lithiase et l’hydropisie poitrinaire, ont pour cause le
manque de mouvement à l’air libre, et bien d’autres encore. J’attribue ma santé inébranlable,
outre ma bonne constitution, au fait que chaque jour et quel que soit le temps, je fais de la
marche rapide, pendant 1 heure ½ ou 2 heures, et au fait que même maintenant, alors que j’ai
bientôt 64 ans, je dors 7 à 8 heures par nuit. Je suppose que votre belle maison comprend
également un jardin, dans lequel je vous conseille avec insistance de faire une promenade
quotidienne. C’est cela la vraie source de la santé.
Je suis entièrement d’accord avec votre jugement sur l’affaire d’Ohra, et j’admire à quel
point vous avez pénétré toute cette affaire et à quel point vous y voyez clair. Je suppose que c’est
la gestion de votre grande fortune qui vous a donné beaucoup d’exercice et d’adresse dans ce
genre de choses, et vous faites preuve également d’un entendement subtil. Je ne suis pas très
compétent pour ce genre de choses, je m’en tiendrai donc à votre décision. Seulement, je ne sais
pas très bien ce que vous entendez par expropriation forcée* : toute notre vente pour le chemin
de fer en est une. Je suppose donc que vous voulez parler du rachat du bail emphytéotique pour 2

un montant multiplié par 20, et dans tous les cas, je préfère m’en tenir là et garder les 685 Rth.
On pourrait tout au plus donner 200 à 300 Rth. à la veuve, pour donner suite à son bail
emphytéotique. J’attends donc vos explications et décisions, pour très probablement les
approuver. J’ai écrit aujourd’hui une lettre provisoire à Friedrichsen, pour ne pas le faire attendre
davantage, j’ai seulement dit que vous et moi trouvions exorbitante la proposition de rachat pour
685 Rth, et que j’attendais vos résolutions pour lui faire part des miennes. (Vous avez
certainement raison, avec vos carpes !) Concernant l’autre procuration qu’il a exigée, je lui ai
3

écrit qu’elle me semblait superflue, car comme je l’ai mandaté pour vendre les parts de terrains à
la société des chemins de fer, je ne puis, s’il l’exécute, m’en tenir à sa caution* je n’ai donc pas
besoin de lui donner décharge à cause de cela. Si seulement vous m’aviez dit aussi un petit mot
de cela ! Au cas où votre lettre à Abegg ne serait pas encore partie, je vous prie instamment de lui
demander s’il a rédigé pour vous une telle procuration pour donner décharge d’une caution, afin
que je puisse m’ajuster en conséquence. Qui sait à quels abus ce document peut donner lieu.
Dans l’espoir d’entendre bientôt des nouvelles favorables au sujet de votre complète
convalescence, je demeure votre serviteur dévoué

Francfort Arthur Schopenhauer.


le 2 déc.
1851.

262. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur et ami,

Ci-joint deux exemplaires de mon novissimum opus, dans un double sens : je vous prie d’en
2

accepter un et de remettre l’autre à Monsieur le Dr. Meier avec mes compliments dévoués.
Comme je ne vous ai pas vu depuis longtemps, j’espère que vous viendrez ici cet hiver, pour
me parler de votre impression au sujet de ces petites choses. Avec ma haute considération

Francfort s. M. Votre serviteur dévoué


3 déc. Arthur Schopenhauer.
263. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon vieil ami fidèle.

Concernant votre aversion pour Corvey , j’aimerais vous répéter tout ce que je vous avais dit
2

en 1847, lorsque vous aviez pris le billet postal. Dites à votre démon qu’il se la ferme et laissez
parler la raison. Une place de sinécure, avec 1 000 thalers, un logement et du bois, c’est pour un
savant le sort le plus heureux sur terre, s’il n’est pas fortuné dès la naissance comme moi ; vous y
trouverez loisir, calme et liberté : avec cela, on peut faire de bonnes choses. Vous vous sentez
peut-être lié à ce misérable Berlin, qui m’a toujours été un lieu détestable. Si vous n’êtes pas
encore prêt à rejoindre le chœur des sages beata solitudo, sola beatitudo , alors vous pourrez
3

vous y marier et vous aurez bientôt des relations, plus qu’il n’en faut. In summa : si vous avez
encore un quelconque espoir auprès du duc, et si vous ne tentez pas tout ce qui est imaginable
pour le réaliser, alors vous faites une bêtise que vous regretterez, car
hoc et te manet, ut pueros elementa docentem
occupet extremis in vicis balba senectus .
4

Dixi et animam salvavi . 5

Ce qui m’afflige maintenant, c’est une coquille insidieuse qui sera seulement remarquée par
les plus avisés et que les autres avaleront comme une absurdité. Elle se trouve tome 1, p. 393, l.
9 , « gloire » au lieu de « richesse ! » hoc me male habet . Voilà pourquoi je vous réponds de
6 7

façon si prompte. Car ne pourriez-vous pas faire suivre votre recension déjà expédiée d’une 8

insertion, en 2 lignes, pour blâmer la coquille ? Mais il ne faudrait surtout pas qu’on ait
l’impression que la correction vienne de moi, sinon un public mal intentionné penserait tout de
suite que toute la recension est sous mon influence.
Pour le § 173, qui donne effectivement à réfléchir , je vous renvoie au tome 1 de mon
9

ouvrage principal, p. 174 et 430 . Concernant la dissolution mythique, il suffit de vous rappeler
10

la doctrine de notre très sainte religion, à savoir que l’Accompli victorieux est passé par toutes
les figures animales dans lesquelles il a dû vivre et ensuite par 500 vies humaines (ce qui nous
est révélé dans les Jatakas , et en partie par Tsang-lun ), jusqu’à naître enfin comme le vrai
11 12

Bouddha accompli, sortant de la reine Maya et du ventre maternel, faisant 7 pas et s’écriant
triomphalement : « Ceci est ma dernière naissance ! »
Le Dr. Lindner m’envoie son petit écrit Meyerbeers Prophet als Kunstwerk et me dit qu’il
13

a été docent en philosophie à Breslau, mais a été destitué de ses fonctions pour manque de
christianisme, qu’il s’est à présent tourné vers la philosophie kantienne et a fait ma connaissance
par les Parerga, au bon moment. Il a l’intention d’étudier ma philosophie, et me prie de lui dire
dans quel ordre il devrait lire mes ouvrages, et éventuellement de lui fournir plus tard quelques
explications. Je refuserai cette dernière chose et je le renverrai à vous.
Votre dernier article sur Feuerbach est assez bon, mais un peu prolixe : c’est dans le sens
14

de mon Démophèle, et on sent quelque peu les feuilles de correction derrière ; cela ne fait rien.
15

L’autre jour, un étudiant de Giessen, qui venait à peine de lire une partie des Parerga, m’a
rendu visite ; c’était un petit-neveu de Lotte Werther . On voit que les effets commencent à se
16

faire sentir. Mais cette fichue populace ne lit toujours que ce qui est nouveau.
J’ai feuilleté les Lettres psychologiques d’Erdmann : du fatras insipide et stupide. Il y a un
an, dans ses conférences de philistin sur le rire et les pleurs, qui ont été publiées après, ce très
cher a exposé ma théorie des pleurs sans me nommer. Arracher les plumes. Si vous voulez un
exemple complet de tout ce que je reproche aux professeurs de philosophie, lisez la deuxième
partie éthique de l’Encyclopédie de la philosophie, du Professeur Fischer à Erlangen ! De
17

même, L’Idée de Dieu , par Sengler . Les deux sont tout récents. Ces crapules tombent de plus
18 19 20

en plus bas, et ma Philosophie universitaire leur donne le coup de grâce.


Dorguth est aussi très touché par « Intentionnalité dans le destin », il m’écrit que mes
21

cheveux se dresseraient sur la tête si je connaissais l’histoire de sa vie. Vos petites anecdotes
m’amusent. C’est à Jagemann , dite von Heigendorf, que j’ai raconté il y a 18 ans cette histoire
22

de porcs épics que je venais de trouver, et elle s’en était également beaucoup réjouie. Elle et
23

moi, nous étions les derniers de la période glorieuse de Weimar.

Francfort s. M., Bonne année !


le 2 janv. 1852. Arthur Schopenhauer.
264. À ERNST OTTO LINDNER 1

Honoré Monsieur le docteur !

Je vous remercie pour l’envoi de votre petit écrit, que j’ai lu avec plaisir, même si mon
aversion pour la musique de Meyerbeer est si grande que je n’ai jamais voulu voir Le Prophète,
et votre écrit ne m’encourage pas vraiment à le faire.
Je me réjouis de rencontrer en vous un homme qui a été trop honnête pour faire de la
philosophie universitaire, et j’apprécie votre intérêt pour mes œuvres, surtout parce que vous
venez d’étudier celles de Kant, car chez moi, on dit lgdeiy ajamsigoy eirisx . Pour répondre à
2

votre aimable demande, l’ordre dans lequel il faut lire mes écrits est le suivant :
1) De la quadruple racine du principe de raison suffisante. 2 éd., 1847.
e

2) Le Monde comme volonté et représentation, 2 tomes. 2 éd., 1844.


e

3) De la volonté dans la nature. 1836.


4) Les Deux Problèmes fondamentaux de l’éthique. 1841.
5) Parerga.
À l’exception du n 2 & 5, ces écrits sont peu volumineux, mais pour connaître de façon
o

approfondie ma philosophie, il est requis de les lire tous, car j’ai évité au possible les répétitions.
Le traité sur la vision et les couleurs n’en fait pas nécessairement partie, mais il est quand même
utile de le lire aussi. Je ne puis consentir à fournir des explications par courrier, car de telles
discussions tendent toujours à être très étendues, et comme j’ai déjà 64 ans, le temps devient
court et précieux. En revanche, je vous recommande pour cela le Dr. Frauenstädt, l’un des
meilleurs connaisseurs de ma philosophie ; il s’y sent entièrement chez lui et témoigne également
d’une ferveur si grande qu’il vous donnera volontiers toutes les explications.
Avec l’expression de ma considération distinguée, je demeure

Francfort s. M., votre serviteur dévoué


le 5 janvier 1852. Arthur Schopenhauer.
265. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je ne puis manquer, mon cher ami, d’attirer votre attention sur la première critique véritable
de mes Parerga, car elle se trouve là où personne n’irait la chercher, à savoir dans les
Jahreszeiten, Hamburger neue Modenzeitung , n 51, 17 décembre : la rédaction a eu la
2 o

gentillesse de m’envoyer l’article. La recension remplit plus de 2 colonnes d’un grand format de
dictionnaire imprimé en petits caractères. Elle est très élogieuse d’un bout à l’autre, presque
enthousiaste, et assez joliment rédigée. Il vous sera facile de trouver l’article à Berlin : surtout
lisez-le, cela vous réjouira. Le Dr. Oelsner rédige une petite annonce des Parerga pour le
Journal des Débats. Le temps où l’on aboyait et où l’on bavassait est terminé. À présent tout le
monde doit se tourner vers la littérature.

Francfort s. M., En espérant bientôt


le 11 janv. 1852. une réponse
Arthur Schopenhauer.
266. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens. C’est avec beaucoup de regrets que je vois que vos affaires
importantes mais malheureusement fastidieuses vous empêchent d’examiner en détail nos
bagatelles d’Ohra. C’est pourquoi j’ai fait un effort et j’ai d’abord communiqué les lettres de
Friedrichsen à mon ami le Dr. Emden. Il m’en a fait un rapport détaillé que j’ai utilisé pour
rédiger ma lettre à Friedrichsen, de laquelle je vous envoie ci-joint en copie les passages
concernés. Vous y verrez que le Dr. E. rejoint entièrement votre point de vue : il partage
également votre avis sur les grosses carpes. Vous et moi devons absolument agir de concert*, car
avec 5/9 nous avons la majorité. Je vous prie par conséquent d’écrire tout de suite à Friedrichsen
de manière forte et énergique afin d’appuyer ma lettre ; ainsi nous ferons impression. Dans sa
dernière lettre, il m’a fait savoir qu’Abegg lui a écrit le 17 janv., qu’il est de son avis, et qu’il dit
également qu’il aurait accepté votre procuration par complaisance, sans même vous connaître. Il
y a 4 ans, M. Mertens m’a dit qu’il avait l’intention un jour de faire un voyage à Dantzig. Cela
serait merveilleux !
Friedrichsen m’a envoyé 2 formulaires pour des procurations : le premier pour mandater sa
femme, afin qu’elle reçoive sa part de l’argent des dédommagements, même si son 1/9 nous est
nanti comme caution de son affermage. J’ai rédigé cette procuration et je vous prie d’en faire de
2

même, pour que l’argent des dédommagements puisse être distribué. Il a annexé le formulaire de
la procuration pour la veuve Dietrich et les 685 Rth, que bien entendu je n’ai pas complété.
J’accueillerai avec une chaleureuse gratitude les paiements annoncés pour mars. Que tous
les dieux de la paix se dépêchent chez vous pour apporter une fin supportable à la fâcheuse
dispute avec vos gendres rebelles, c’est ce que vous souhaite de tout cœur
3
Francfort s. M. votre serviteur dévoué
le 3 févr. Arthur Schopenhauer.
1852.

P. S. Le Dr. Emden utilise le droit commun, c’est-à-dire le droit romain et ne connaît pas le
droit spécifique à la Prusse, mais vos avocats de là-bas devraient le connaître. Le droit prussien
se base sur le droit romain.
267. PROCURATION
POUR DANIEL FRIEDRICHSEN 1

Procuration spéciale.

Dans le contrat de fermage du 4 févr. 1840 pour le terrain à Ohra, n 38 du livre des
o

hypothèques, Madame Laura Ernestine Wilhelmine, épouse de l’agent Friedrichsen, née Döring,
qui possède 1/9 du terrain à Ohra n 38 du livre des hypothèques, s’est portée caution pour moi,
o

copropriétaire du terrain sus-mentionné, pour l’exécution des obligations de fermage de son


époux fixés dans le contrat de fermage.
En cette qualité d’ayant droit de caution, je mandate explicitement par la présente l’agent
Monsieur Daniel Friedrichsen à Dantzig afin d’autoriser :
la séparation des parcelles vendues à la Direction royale du Chemin de fer de l’Est, à savoir
environ 30 verges carrées du terrain tenu à bail par le jardinier Behrend et
45 à 50 verges carrées du terrain tenu à bail par le tenancier Frahsmann
du terrain principal Ohra n 38 du livre des hypothèques, ainsi que l’imputation des parcelles
o

vendues dans le livre des hypothèques, et pour autoriser également que Madame Friedrichsen
reçoive sans tarder sa part de l’argent des parcelles vendues et acquittées en bonne et due forme.

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


le 4 févr. 1852 Dr. phil. c. jure legendi
in Univers. Berolinensi.
268. À FRIEDRICH DORGUTH 1

[…] rentrer.

Mais je ne lis pas saint Göschel : rupture ! Je ne connais pas Rey de Moranda . Si vous
2 3

voulez voir, en tant que sympathisant bienveillant, une recension bonne et très élogieuse de mes
Parerga, vous la trouverez dans les Jahreszeiten, Hamburger neue Modenzeitung, 17 déc. 1851.
La rédaction, qui m’est totalement inconnue, a eu la gentillesse de m’envoyer l’article. On m’y
compare à Montaigne. Vous voulez […]
Je vous souhaite de tout cœur encore de nombreuses années de santé et de force
Francfort s. M. votre
le 23 févr. serviteur dévoué
1852. Arthur Schopenhauer.
269. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami.

Veuillez recevoir mes remerciements pour la nouvelle glorification à laquelle vous m’avez
associé dans votre recension . L’exposé est bon, soigné et, plus généralement, répond à ce que
2

j’attends de vous ; je crois également qu’il aura beaucoup d’effet, surtout parce qu’on sent que
vous êtes sincèrement convaincu. Il n’y a qu’une chose qui m’a contrarié, à savoir que vous
prétendiez que l’ignorance et l’occultation dont j’ai été la victime seraient en partie ma faute, à
cause de mes attaques contre les professeurs de philosophie. Or ces attaques ne datent que de
1847 (jusque-là, seuls quelques petits sarcasmes m’avaient échappé), après que j’ai attendu en
vain, de 1813 à 1847, que ces crapules me rendent justice d’une façon ou d’une autre, donc après
3

34 ans de patience ! Rappelez-vous seulement de votre propre étonnement, lorsque par hasard
vous avez découvert mon existence. En 1813 je suis entré en scène, théorie des couleurs en 1816,
l’ouvrage principal fin 1818, etc. Une telle ignorance méthodique de ce qui est pourtant digne
d’attention, et une telle célébration de ce qui est mauvais, pendant 34 ans, est sans précédent. Et
encore, j’ai été beaucoup trop clément avec ces crapules. J’espère que vous corrigerez votre
erreur à une quelconque occasion.
Malheureusement, on a oublié d’insérer votre correction de la coquille : très fâcheux. Je dois
aussi vous faire remarquer que vous dites à tort de ma Philosophie universitaire qu’elle est peu
réjouissante. Par son mode d’exposition, sa vivacité et sa véhémence, elle est très divertissante,
elle est peut-être même la plus belle invective écrite depuis Cicéron, In Verrem. (Seules les
crapules sont modestes .) Et enfin, je n’aime pas que vous ayez cité la phrase des coups de bâton
4

devant la garde principale . Un cas aussi extrême n’est supportable que rapporté au reste, qui
5

l’introduit, mais si on l’arrache de l’ensemble, c’est choquant. Voilà donc la tige de ce lotus.
Vous aurez vu la recension perfide dans le Literarisches Centralblatt de janvier : c’est
6

sûrement un docent : eh oui, le ver se tord quand on l’écrase.


J’espère que cette fatale histoire inquisitoriale de Leipzig n’a pas eu d’autres conséquences,
7

mais vous comprenez maintenant à quel point j’avais raison de vous conseiller d’être modéré et
suaviter in modo . Ces histoires pourraient même vous nuire auprès du duc de Ratibor. J’aimerais
8

volontiers savoir si vos démarches auprès de lui ont été couronnées de succès : si tel n’est pas le
cas, j’espère que vous aurez au moins essayé le nécessaire.
Dorguth m’écrit qu’il me fera parvenir ce mois encore une épître , et m’en donne des
9

extraits : elle sera donc imprimée.


L’annonce d’Oelsner de Monmerqué dans les Débats n’a toujours pas paru, alors qu’il l’a
certainement envoyée. Il s’est plaint auprès de moi, parce qu’il a affirmé, dans un cercle
d’hommes de lettres et autres du même genre, qu’ici vivait quelqu’un à qui l’on élèverait un jour
un monument, et qu’après m’avoir nommé, tout le monde ou presque s’est moqué de lui. Pas
étonnant.
Mon vieil ami Römer qui, suivant mon conseil, traduit Moratin de l’espagnol (il a été
10 11

longtemps en Espagne jusqu’à peu), est enthousiasmé par mes Parerga et il vient de me dire,
comme vous, que ce livre fournissait de la lecture pour toute une vie. Quand Doss a reçu mon
exemplaire, il avait déjà acheté le premier arrivé à Munich.
Je souhaiterais vivement que vous lisiez Theologica, deutsch, 1851, qui vient d’être publié à
Stuttgart, tiré à 256 exemplaires. C’est là la première édition authentique de la Deutsche
Theologie D’APRÈS UN MANUSCRIT DE 1496 en vieil allemand, précis comme la diplomatie. Elle a
déjà connu 60 rééditions mais toutes sont CORROMPUES. C’est ce qui m’a permis de connaître
véritablement pour la première fois cet ouvrage célèbre. La concordance avec ma philosophie est
merveilleuse. En 1350, il habita en face de chez moi, dans la Maison allemande, à
Sachsenhausen. Surtout lisez-le : cela ne coûte que 24 sgr.
Donnez-moi bientôt de vos nouvelles, et de bonnes si possible.

Francfort s. M., Portez-vous bien !


le 11 mars 1852. Arthur Schopenhauer.

270. À FRIEDRICH DORGUTH 1

[…] par là vous me feriez plaisir. Je suis étonné que vous n’ayez rien dit sur «
L’intentionnalité apparente dans le destin », puisque vous en étiez touché si intimement. Votre
style d’écriture me fait beaucoup penser à HAMANN. Votre défaut, c’est que vous pensez
exclusivement à vous et à moi, en perdant de vue ce grand animal sauvage et inconnu aux yeux
ronds, le public, qui un jour présidera et tout […]
[…] fieri . C’est ce que vous souhaite de tout cœur
2

Francfort s. M. votre
le 18 mars serviteur sincèrement dévoué
1852. Arthur Schopenhauer.
271. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur et ami,

Dans votre chère lettre du 6 janv., j’ai pu constater à regret que vos rhumatismes et vos
affaires vous tracassent au point de déranger votre culte des Muses, qui malheureusement
s’accomplit toujours en silence ; que votre visite prévue n’ait toujours pas eu lieu ne laisse pas
présager une amélioration. Je pensais que votre magistrature vous donnerait plus de loisir que le
barreau.
Ci-joint une lettre de Doss qu’il m’a envoyée avec une missive de 8 FEUILLES. Cela m’a fait
plaisir : non seulement il témoigne d’une connaissance précise de ma philosophie, mais aussi
d’une réelle pénétration, avec un profond sérieux et un enthousiasme sans bornes. Comme j’ai
été abandonné par mes contemporains, vous savez que je considère l’intérêt qu’un individu peut
me porter comme un indice de celui que j’espère avoir dans les temps à venir.
La demande que vous a présentée Doss correspond tout à fait à la ferveur, voire à la minutie
angoissée avec laquelle, depuis des années, il collectionne absolument tout ce qui concerne ma
philosophie, chaque pamphlet et chaque recension, aussi crapuleuse soit-elle. Il voit à présent
que mon activité littéraire tend vers sa fin et il voudrait en rassembler toutes les pièces. Je
souhaiterais donc que vous donniez satisfaction à sa demande et je ne doute pas un instant qu’il
vous remboursera immédiatement les frais occasionnés, puisqu’il m’écrit que « même si les frais
d’écriture n’étaient pas minimes, il ne craindrait aucune dépense s’il s’agissait d’enrichir sa
compréhension dans un domaine aussi vital ». Mais je vous prierais de prendre un copiste dont
on ne puisse craindre qu’il fasse en plus une deuxième copie pour lui-même ; quelqu’un qui soit
assez innocent, comme celui de Wiesbaden, qui (sur un pari) a rédigé sa propre condamnation à
mort sans même s’en trouver affecté.
N’auriez-vous pas les COPIES des lettres que vous m’avez écrites ? Dans le cas contraire, il
faudra que je vous envoie ces dernières, pour que la correspondance puisse être classée dans le
bon ordre.
Je vous prie d’accepter le produit ci-joint du bon Dorguth : il m’a envoyé 6 exemplaires,
2

que je peux seulement offrir à des amis entièrement convaincus et sympathisants, car les autres
considéreraient cela comme une vanité impardonnable. Pour vous encourager à le lire, je vous
cite le curiosum que le prof. Boeckh de Berlin m’a raconté avant-hier, à savoir qu’il était allé
3

voir Humboldt pour prendre congé et l’avait trouvé en train d’étudier le produit en question. Le
4

vieux s’est empressé de lui demander où j’étais — et il ne le savait pas. Depuis peu je recueille
des applaudissements inhabituels, venant de domaines curieux, par ex. dans les Jahreszeiten,
Hamburger Modenzeitung du 17 décembre, une recension très correcte que la rédaction m’a
même envoyée. C’est peut-être que lorsque les gens croient que l’exit se fera très prochainement,
ils voudraient bien encore placer un plaudite .
5

En espérant des nouvelles réjouissantes de votre part

Francfort, votre
le 20 avril serviteur dévoué
1852. Arthur Schopenhauer
272. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens. C’est avec mes remerciements les plus sincères que je vous
accuse réception des Rth. 1 258,10 sgr., par lesquels vous avez amorti les 1 000 Rth. restants de
l’héritage de ma sœur, avec tous les intérêts, ainsi que sa part de l’affermage d’Ohra que vous
m’avez aimablement cédée. Je joins par conséquent une quittance générale concernant le legs de
ma sœur. Mais à présent il me semble que vous avez commis une grande erreur de calcul à votre
désavantage. Car pour les 1 000 Rth vous comptez 100 Rth d’intérêts annuels, alors que ceux-ci
ne font que 50 Rth, et vous comptez 8 Rth. 10 sgr. pour un mois, alors qu’ils s’élèvent seulement
à 4 Rth. 5 sgr. À moins de me tromper considérablement, vous m’avez donc expédié 54 Rth. 5
sgr. en trop. Si à présent vous reconnaissez cette erreur de calcul, ce dont je ne doute pas un
instant, je vous prierais de me faire savoir si je dois remettre ces 54 Rth. 5 sgr. à quelqu’un qui se
trouve ici, ou si je dois vous les envoyer, ou les garder jusqu’à votre venue que j’espère pour
bientôt.
Je me réjouirais de tout cœur de vous voir bientôt ici , où nous pourrons également prendre
2

une décision pour l’affaire de Dantzig, si seulement vous pouviez obtenir le rapport d’un juriste
authentiquement prussien et spécialiste, d’autant plus que ce cas a forcément déjà dû se produire.
Hier, j’ai consulté un juge régional de Mayence, qui est un très bon juriste et apôtre de ma
philosophie, mais il ne peut en décider, car d’après le droit français, il n’y a pas d’emphytéose, et
il ne connaît donc pas cette situation.
Avec ma plus haute considération, je demeure votre serviteur dévoué

Francfort Arthur Schopenhauer.


le 26 avril
1852.
273. À CARL RUDOLF KOSACK 1

Monsieur,

L’envoi de votre traité Über die Entwickelung der Geometrie aus der Anschauung m’a
beaucoup réjoui, et je l’ai étudié d’un bout à l’autre avec le plus grand intérêt. Il ne peut qu’être
satisfaisant de voir enfin les principes fondamentaux, que j’avais publiés dès 1813, reconnus et
démontrés par un mathématicien, et ce de façon aussi rationnelle qu’originale. Continuez donc
votre exposé, avec toute la géométrie élémentaire, bien que les difficultés augmentent à chaque
pas, mais vous pourrez vous faire un nom avec cela.
Cependant, j’ai remarqué dans votre traité que de tous mes travaux, vous disposiez
seulement du traité sur le principe de raison suffisante. Et comme mon ouvrage principal contient
d’autres développements et nombre de considérations sur le traitement de la géométrie, je prends
la liberté de vous expédier Le Monde comme volonté et représentation par voie de libraire,
ouvrage que je vous prie d’accepter comme signe de gratitude et de reconnaissance pour votre
travail. Je joins aussi mon traité De la volonté dans la nature, qui ne contient rien de
mathématique, mais des explications importantes pour ma métaphysique. J’ai remis le paquet à
la librairie Hermann ici même, qui l’expédiera au libraire Förstemann dans votre ville, auprès
duquel vous ferez bien de le réclamer d’ici 1 ou 2 semaines.
Avec le plus sincère respect je demeure

Francfort s. M. votre
le 2 mai serviteur dévoué
1852. Arthur Schopenhauer.
274. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Mon bon et cher Monsieur Becker !

Votre magister matheseos m’oblige à vous faire part du PROGRAMME suivant, qui m’a été
2 3

envoyé récemment. Car vous verrez alors :


1) que quelqu’un d’autre a déjà tenté la même chose que vous, et, semble-t-il, sans grand
succès. Peut-être qu’à la rigueur votre schéma représente la chose, mais il est un meuble fabriqué
par l’accolement d’un nombre diabolique de pièces, qui se brise à l’usage, et si l’on veut ajouter
une pièce, une autre glisse immédiatement des mains. On en devient tout confus. Quelle
différence par rapport à mon schéma si simple, qui satisfait vraiment le cœur. Mais tout cela
dépend de l’égalité des surfaces : sans elle, l’affaire est terriblement difficile, sinon impossible.
J’ai souvent essayé.
2) à quel point je dois être satisfait de constater que les vérités que j’ai envoyées dans le
monde en 1813, alors que j’étais encore à moitié étudiant, assis dans une auberge à Rudolstadt,
se trouvent proclamées, confirmées et appliquées maintenant, en 1852, et ce dans les mêmes
termes ! Mais c’est vraiment comme si le plaudite s’efforçait à présent de précéder encore
rapidement l’exit. Et il vient effectivement des deux plus grands extrêmes et antipodes de la
littérature, d’un journal de mode et d’un programme scolaire. Mais je compte bien les berner :
j’empoche le plaudite et ils pourront encore tenter de prédire l’exit pendant plus de 20 ans. Mais
M. Kosack semble avoir disposé seulement de ma Quadruple Racine. C’est pourquoi je lui
envoie mon ouvrage principal et De la volonté dans la nature ; je lui ai écrit une lettre aimable et
encourageante.
Vous abordez de façon tout à fait juste et pertinente les doutes et les questions de Doss, et je
souhaiterais que vous lui disiez la même chose , lorsque vous lui ferez parvenir les copies.
4

Frauenstädt aussi s’est heurté à la « conscience sans connaissance », et pourtant c’est juste ; bien
qu’elle se trouve à la limite du transcendant et qu’elle s’y tienne en équilibre. Pour cela, on doit
prendre en compte ce que j’ai dit dans le 2 tome de mon ouvrage principal p. 273, 74 . Parmi
e 5

tous mes apôtres, vous êtes celui qui finalement me comprend toujours le mieux. Cela dit sans
flatterie aucune. Mais malheureusement vous avez une phobie obstinée de l’encre d’imprimerie !
Voilà pourquoi parmi 4 apôtres , je n’ai que 2 évangélistes , et ceux-ci sont comme Dieu les a
6 7

faits.
Je vais vraiment tenter de suivre à la trace cette histoire d’Akakia ; je n’en ai pas encore eu
8

l’occasion. Je vous prie de me renvoyer le programme dans une semaine et je demeure avec ma
plus haute considération

Francfort votre
le 5 mai serviteur dévoué
1852. Arthur Schopenhauer
275. À ADAM VON DOSS 1

Mon cher Monsieur von Doss !

Votre longue lettre que j’ai lue 2 fois avec la plus grande attention, m’a fait grand plaisir.
Votre intérêt fervent, votre réelle conviction et votre reconnaissance de la valeur des choses me
touche, me récompense et représente pour moi un gage de l’influence qu’auront mes écrits dans
un temps futur ; surtout parce que les trois autres apôtres que vous connaissez vont dans la même
direction, chacun à sa manière ; comme par exemple Dorguth, âgé de presque 75 ans, qui
m’écrivait récemment qu’il aimerait connaître le jour de mon anniversaire, afin de le fêter avec
2

ses 3 filles. Mais quant à la ferveur de l’intérêt, vous les dépassez tous. Becker, qui est
maintenant juge régional à Mayence, est récemment venu me rendre visite. Il a emporté les
lettres de son ancienne correspondance avec moi, et il les fera recopier pour vous, avec celles que
je vous avais adressées, dans un ordre et un enchaînement convenables. Il a également amené
avec lui votre longue missive, et l’a ensuite renvoyée, avec des remarques très justes sur les
questions transcendantes que vous m’aviez posées ; il demande par ex. « des précisions sur
l’histoire de la chose en soi ». Vous savez que je n’ai pas de réponse à ce genre de questions, et il
faudrait que je m’y prenne comme Goethe, à qui un étudiant avait également demandé plus qu’il
ne pouvait lui dire, Goethe lui écrivant alors dans son album : « Le bon Dieu a peut-être créé les
noix, mais il ne les a pas cassées . »
3

Le Programme de Pâques du Lycée de Nordhausen, qu’on m’a envoyé dernièrement, m’a


fait particulièrement plaisir, car il contient un traité sur la méthode d’enseignement de la
géométrie rédigé par Kosack, qui enseigne là-bas les mathématiques et la physique, 30 p. 4 et un
o

tableau : ce traité se base entièrement sur le 6 chapitre de mon traité sur la Quadruple Racine,
e

dont il reproduit les arguments, pour la plupart dans les mêmes termes que moi (comme je les ai
écrits en 1813, alors que j’étais encore à moitié étudiant). Il affirme que grâce à moi l’affaire est
irrévocablement résolue et qu’à partir de maintenant, la géométrie devrait être enseignée d’après
ma philosophie et celle de Kant ; et il en donne ensuite un échantillon tout à fait réussi. Cela
vaudrait la peine que vous le commandiez. Comme je sais à quel point vous prêtez attention à
tout ce qui concerne ma philosophie, je vous signale d’abord le nouveau petit écrit de Dorguth,
Sur la philosophie de Schopenhauer, une missive, au cas où vous ne l’auriez pas encore reçu.
Ensuite, une critique très correcte des Parerga dans les Jahreszeiten, Hamburger Modenzeitung,
n 51, 17 déc. 1851, qu’on m’a également fait parvenir. Et enfin un court mais très bon article sur
o

moi dans la Didaskalia, le supplément du Frankfurter Journal, 14 avril. Ici même, des
4

personnes m’ont étonnamment témoigné de leur intérêt personnel et m’ont rendu hommage. Je
suis presque amené à croire que les gens veulent vite placer leur plaudite, pensant que l’exit est
proche.
Je vous prie de saluer cordialement de ma part le conseiller à la cour Perner : j’ai bien reçu
sa lettre et ses autres envois imprimés, je me réjouis de ses acclamations, et qu’il n’oublie surtout
pas, comme il me l’a promis, de me rendre visite lorsqu’il passera par ici. C’est un monsieur tout
à fait méritant et vénérable : personne n’apprécie cela autant que nous autres bouddhistes ! Vous
pourriez lui faire part des p. 310-312 du 2 tome des Parerga . Je souhaite et j’espère le
e 5

rétablissement du prince von Altenburg, notre respectable président, qui l’autre fois m’a même
fait l’honneur de me faire transmettre ses salutations. Et vous, mon cher, j’espère bien vous
revoir, car à en juger d’après ma santé et ma robustesse parfaites, je peux encore vivre au moins
20 ans. Je demeure en tout cas, en vous souhaitant bonheur et santé,

Francfort votre ami


le 10 mai 1852. Arthur Schopenhauer.
276. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Vieil ami fidèle.

Je dois encore vous remercier pour l’envoi des tirés à part de vos recensions dans les Blätter
de Brockhaus. J’ai également reçu votre lettre du 1 avril, et je ne répliquerai pas aux arguments
er

qui y sont avancés pour justifier les passages inconvenants de votre dernière recension , tout en
2

vous priant de ne surtout pas croire que je les laisserais passer. Le Dr. Emden s’est heurté
exactement aux mêmes passages, et il a véritablement été irrité par le passage des coups : c’est la
vérité ! La scène avec la police vous servira de mise en garde salutaire, après que vous avez
3

dédaigné la mienne.
Aujourd’hui, je vous écris pour vous mettre au courant de ce qui se passe, par-ci par là,
autour de ma philosophie, car je ne saurais présupposer que vous connaissez déjà tout et je pense
qu’en qualité de champion, vous devez être un peu au fait* de ces choses. Vous aurez donc lu les
Remarques mêlées de Dorguth : c’est sa façon de faire, mais quelques passages m’ont vraiment
fait du bien, par ex. p. 6, et surtout p. 10, sur ma renaissance. Vous n’avez pas vraiment ses
faveurs, parce que vous aviez oublié de le mentionner, comme je vous l’avais alors prédit. Von
Doss m’a écrit une lettre de 8 feuilles que j’ai lue 2 fois avec le plus grand intérêt et avec une
4

réelle émotion. Vous seriez étonné de voir à quel point ce jeune homme est ravi par ma doctrine,
et avec quel sérieux il aborde la chose. La lettre est pour moi un gage de mon influence sur les
générations futures.
Becker est venu de Mayence, uniquement pour me voir. Il désapprouve la critique que
Dorguth a fait de mon code d’honneur de chevalier, qui au contraire lui plaît bien. Le vieux
Dorguth est dans sa 75 année, il m’écrit qu’il voudrait connaître le jour de mon anniversaire,
e

pour le fêter avec ses 3 filles (qui étudient également mes écrits). Cela ne fait-il pas beaucoup ?
Dans la Didaskalia du 14 avril (le feuilleton en supplément du Frankfurter Journal) se trouve un
court mais très bon article sur moi, dont l’auteur m’est inconnu. Il y a ici un commis voyageur
d’une grande maison , déjà vieillissant, très littéraire, voire à moitié érudit, qui en 1847, après
5

avoir lu ma Quadruple Racine, m’avait abordé sur la Promenade pour m’exprimer son
6

admiration et pour parler avec moi ne serait-ce qu’une seule fois. Je ne l’avais plus jamais revu
depuis. À présent, il est venu 3 fois dans notre cercle de lecture (dont il n’est PAS membre),
espérant m’y trouver. Après m’avoir finalement rencontré, il m’a dit qu’il était seulement venu
dans l’intention de me remercier pour tout ce que j’avais écrit : il a acheté tous mes ouvrages,
même la théorie des couleurs, et les étudie assidûment avec son fils de 21 ans, qui fréquente le
7

Lycée et doit entrer à présent à l’Université, et qui lui traduit les passages en grec et en latin. Ce
genre de choses me fait vraiment plaisir, c’est authentique, c’est autre chose que de la
camaraderie. Doss m’a aussi parlé d’un fils de brasseur qui, bien qu’il ait fait des études, est
quand même devenu brasseur et bien qu’il n’achète pas de livres, s’est pourtant procuré mon
ouvrage principal après avoir lu le chapitre sur l’amour sexuel. Mais ce qui m’a causé la plus
grande joie, c’est le Programme du Lycée de Nordhausen, pour les examens publics du 5 et 6
avril qui contient l’essai Sur le développement systématique de la géométrie à partir de
l’intuition rédigé par Kosack, enseignant de mathématiques et de physique. On y raconte les
longues tentatives pour changer la méthode euclidienne, jusqu’à ce que j’arrive pour apporter à
l’affaire une solution à jamais irrévocable ; suivent alors les passages principaux de la Quadruple
Racine sur la raison de l’être, littéralement comme je les avais écrit en 1813 dans une auberge de
Rudolstadt, avec ensuite un échantillon détaillé de la présentation de la géométrie selon moi, en
tout 30 pages 4 et un tableau cuivré. Vous devez absolument le lire, si besoin est vous pouvez
to

même commander ces quelques feuilles. En 1813, ce chapitre avait d’abord attiré sur moi
l’attention de Goethe .
8

La nouvelle Histoire de la philosophie de Fortlage, qui contient 16 pages sur moi, doit vous
être tout juste parvenue. La deuxième moitié du chapitre consiste en des passages recopiés de
mes œuvres, elle est donc très bonne, exception faite de ce pêle-mêle, pot-pourri*, assemblage.
Mais ce qu’il résume et juge lui-même est faux, bancal et mauvais. D’abord ces messieurs
m’ignorent pendant 35 ans, et ensuite ils me rangent parmi toutes ces crapules , comme si j’en
9

faisais partie, en me comparant et en trouvant même des ressemblances avec ce misérable


Beneke, auquel je destine ce Xenion :
Pauvre diable empirique, tu ne sais pas à quel point tu es bête,
Car tu es, qu’on s’en plaigne, si bête a priori !
10

Fortlage procède avec moi comme l’a fait F ICHTE et comme le fera sans aucun doute
Erdmann. Il n’a même pas regardé l’Éthique, comme l’avait fait exclusivement Fichte. Fortlage
est tellement incapable qu’il n’a pas du tout compris la distinction, si facile à saisir, entre les 4
significations du principe de raison suffisante, et qu’il en a fait un résumé entièrement erroné, en
citant de faux exemples, surtout pour la RAISON DE L’ÊTRE qu’il justifie par le rapport entre le
maître et l’esclave !! Si jamais vous deviez recenser son livre, vous pourriez citer comme contre-
exemple humiliant le valeureux enseignant de lycée Kosack, qui a justement compris et pris à
cœur cela et en a fait une nouvelle méthode d’enseignement de la géométrie. Je crois que le livre
de Fortlage est un ouvrage bâclé issu de la fabrique de livres, parce qu’il existe actuellement une
demande pour ce genre de choses : car la FOI s’est perdue et le besoin métaphysique, même celui
du grand public, vise à présent la philosophie, en voulant tout apprendre sans effort ni perte de
temps.
À l’instant, le libraire Hirschwald était chez moi pour me demander, au nom du Dr.
Kormann (le Hongrois que vous avez mentionné), de bien vouloir poser pour deux
11

photographies , l’une de face et l’autre de profil, réalisées à ses frais ; bien entendu j’accepte,
12

mais je ferai plutôt réaliser des daguerréotypes, parce qu’ils sont plus fidèles et authentiques.
Dans l’Europa du 29 janvier se trouvent quelques lignes sur moi, dans un passage sur le
Buch der Weltweisheit.
J’allais presque oublier ! Il est quasiment impardonnable que vous ayez appuyé, très cher, la
parole de cette canaille anonyme du Centralblatt, même de façon aussi discrète et légère, mais il
13

faut être capable de pardonner beaucoup de choses à un vieil ami qui a fait ses preuves. Ma
tirade sur les pachydermes est très belle, et elle le reste.
Finalement vous êtes encore à Holstein avec Madame Godeffroy ! Eh bien, c’est là un
plaisir estival agréable. En tout cas, faites-moi savoir bientôt que vous vous portez bien, ce que
souhaite de tout cœur

Francfort s. M., votre ami


le 10 juin 1852. Arthur Schopenhauer.
277. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami !

Je n’hésite pas à répondre à votre lettre, car aqua haeret et il faut bien vous aider : c’est
2

pourquoi je vais droit à la chose principale. Donc ad 1 . Jamais je n’ai parlé d’une SUBSTANCE de
3

la volonté, car je ne m’abrite pas, comme les pseudo-philosophes, derrière de telles abstractions ;
substance est donc chez moi un simple synonyme pour matière, mais au-delà c’est un concept
illégitime. Il est vrai que dans mon ouvrage principal tome 2, p. 204 on peut lire : « la volonté
4
est la substance de l’homme » ; mais on peut y lire aussi que c’est à comprendre comme « une
image et une métaphore ». Par ailleurs, vous avez relevé avec justesse les passages qui
permettent de réfuter ce reproche de Fortlage ; on pourrait encore y ajouter tome 2, p. 634-36 , 5

surtout 638 sub 4 , et ce passage où j’ai dit qu’à la diastole du monde devait également
6

correspondre une systole ; mais je ne sais pas où cela se trouve . Et aussi ibid. p. 172 « pourquoi
7 8

une force si incommensurable », etc.


Ad 2 . Ici par contre vos réponses ne sont pas les bonnes ; à ce stade, il ne peut pas encore
9

être question de la chose en soi, et la différence entre représentation et objet n’a pas lieu d’être :
le monde est représentation. Cela se passe plutôt comme suit. La déduction fichtéenne du non-
moi à partir du moi est tout à fait abstraite : A = A, ergo moi = moi, et ainsi de suite. Si on s’y
prend abstraitement, alors en posant le sujet on pose immédiatement l’objet. Car être sujet
signifie connaître, ce qui signifie avoir des représentations. Objet et représentation sont la même
chose. Dans la Quadruple Racine, j’ai par conséquent divisé les objets ou représentations en 4
classes, et dans chacune d’entre elles prévaut le principe de raison suffisante, à chaque fois sous
une autre forme, tout en présupposant déjà la classe, voire en se confondant avec elle (Le Monde
comme volonté et représentation, tome 2, p. 17-21 et tome 1, p. 39 ). Or, en réalité, l’existence
10

du sujet de la connaissance n’est pas abstraite, et le sujet n’existe pas en soi et indépendamment,
il n’est pas tombé du ciel ; il se produit bien plutôt comme l’outil d’une manifestation
individuelle de la volonté (animal, homme) dont il doit servir les fins ; cette manifestation se
trouve ainsi dotée d’une conscience d’elle-même, d’une part, et du reste des choses, d’autre part :
se pose alors la question de savoir comment, et à partir de quels ÉLÉMENTS se constitue à
l’intérieur de cette conscience la représentation du monde extérieur. J’ai d’abord répondu à cette
question dans ma théorie des couleurs, puis dans mon ouvrage principal, tome 1, p. 22 sq. et
tome 2, chap. 2 , mais la réponse la plus profonde et détaillée se trouve dans la 2 édition de la
11 e

QUADRUPLE RACINE § 21, où il est montré que ces éléments ont une origine SUBJECTIVE, et c’est
pour cette raison qu’à la fin, je fais explicitement remarquer à quel point tout cela diffère des
fanfaronnades de Fichte. Car toute ma démonstration n’est que l’achèvement de l’idéalisme
transcendantal de Kant. Pour une critique spécifique de la philosophie fichtéenne, je vous
recommande tout particulièrement un article du comte Redern, qui est décédé, « Critique de la
philosophie de Fichte, Schelling et Hegel », dans les Heidelberger Jahrbücher, octobre, cahier
double, 1840, que vous obtiendrez facilement à la bibliothèque ; au sujet de ces messieurs, il
pense la même chose que moi ; cela n’a été imprimé qu’après sa mort : il n’était bien sûr pas
professeur de philosophie. Faites-en usage et jetez donc au visage de Fortlage, avec audace et
vigueur, mes morceaux de bravoure contre Fichte, notamment la FIN du § 21 Quadruple Racine
et Parerga tome 1, p. 90, 91 et 169 : car il faut passer à l’acte avec toute cette clique et nous
12

avons la vérité de notre côté. Mais Fortlage se permet une effronterie inouïe en voulant
réchauffer ces vieilleries éventées. Il veut conférer un nouveau crédit à des absurdités déjà
réglées, pour éviter à tout prix que l’authentique, qui ne connaît pas de Dieu juif, ne fasse
surface. Et il procède avec moi tout à fait à la manière de ces crapules qui, au lieu d’étudier et de
13

pénétrer le sens d’un système, le considèrent de l’extérieur et s’efforcent d’en tirer une
quelconque poutre proéminente, c’est-à-dire une contradiction ou n’importe quelle
inconséquence, afin de le réfuter à très bon marché, avec le confort d’une voie purement logique.
Il a également écrit cette diatribe que je persifle dans Parerga, tome 1, p. 162 : elle se trouvait
14

dans le Deutsches Museum, 1850.


Dans les Blätter für literarische Unterhaltung se trouve une recension signée 71, sur les
triarii , dont je suppose que vous êtes l’auteur ; à la fin, de très mystérieux signes sont envoyés,
15

dont je ne sais pas s’ils me désignent moi ou bien un autre : comment le public le saurait-il ?
C’est un peu comme mon « tu ne devineras jamais ce que j’ai pensé par là, n’est-ce pas » ! Il faut
savoir si l’on veut dire une chose ou non : si c’est le cas, alors le dire de façon claire, ou pas du
tout. Seules les illicita font exception. Que votre traité sur ma critique de la théologie soit mort
16 17

de frayeur, juste après sa naissance, est bien dommage ; mais il aurait répandu une image un peu
étroite à mon sujet. Il est donc préférable que vous attiriez l’attention sur ma métaphysique du
beau . L’amateur d’art von Quandt, qui en 1845 m’écrivit une lettre de 12 pages sur mon œuvre ,
18 19

était tout particulièrement touché par le livre III ; précisément parce qu’il s’y connaît réellement.
Mais il demeure toujours tout à fait étranger au public esthétique, parce qu’il n’est pas compris
dans un opus ad hoc qui aurait pour titre Du Beau ! À la place, le public lit LE FATRAS LE PLUS
DÉPLORABLE, par ex. dans le dernier numéro du Deutsches Museum cet article de Schneider ; et
ce parce que c’est fraîchement imprimé. Mon traité sur la philosophie universitaire, que vous
avez appelé « peu réjouissant », réjouira tous ceux qui connaissent le travail affairé de ces
20

misérables mercenaires, et je regrette seulement de les avoir traités avec trop d’égards.
Vos démonstrations mathématiques sont bonnes et justes, mais celles de Kosack ne sont
21

pas à mépriser non plus. Surtout p. 24, tout en haut, où se trouve un très beau théorème : mais je
ne sais pas s’il en est réellement l’inventeur.
Les écrits de Dorguth produisent sans doute le même effet sur vous que sur tout le monde , 22

même sur Humboldt. Il y a quelques semaines , j’ai rencontré ici même une vieille connaissance
23

de Berlin qui se réjouissait beaucoup de me voir, car avant son départ, en entrant chez
24

Humboldt, cette personne l’avait trouvé assis devant un livre ouvert de Dorguth (certainement
très perplexe), suite à quoi Humboldt lui a demandé très vivement où je me trouvais ; ce à quoi
mon ami n’a pas su répondre ; voilà pourquoi, à son retour, il était content de pouvoir en rendre
compte à Son Excellence, et de lui transmettre de surcroît mes humbles compliments. Le même
jour, quelqu’un d’autre lui avait demandé de mes nouvelles, mais il n’a pas pu se rappeler qui
c’était — vieille gourde ! Je n’ai jamais vu Dorguth. Vous ne pourrez lui faire de plus grand
plaisir que de lui amener mon daguerréotype, pour qu’il le regarde : mais bien emballé !
Je vous remercie de m’avoir communiqué le passage chez Feuerbach que je n’aurais sans
25

doute jamais vu sans cela : la description est tout à fait pertinente. Que Dieu me pardonne, mais
j’ai dû en rire. Ma sœur peignait des fleurs et de petites silhouettes humaines, etc., c’était
réellement très beau. Elle en avait offert à Pückler , qui me les a montrées en 1818 , avec
26 27

émerveillement, en lisant les commentaires qu’elle avait rédigés. Récemment, une dame m’a 28

montré une très belle silhouette réalisée par ma sœur, qu’elle veut faire exécuter al fresco. Vous
devez accrocher « Le jour » DEVANT moi, et « La nuit » DERRIÈRE , car c’est écrit : « Devant moi
29

le jour et derrière moi la nuit » (Faust ). Vous aurez certainement fait un pèlerinage pour voir
30

l’image de saint chez Kormann, et pour me dire si elle fait des miracles.
Vous feriez mieux de ne pas vous compromettre en pestant contre Erdmann : ceux qui 31

l’outragent le font uniquement parce qu’il s’est moqué des beaux événements de 48-49 qu’ils
voudraient voir revenir, ces démocrates larvés !
Le Dr. Lindner vous aura rapporté de chez moi la longue lettre de von Doss , une autre de
32

Becker ainsi qu’un billet . Vous avez alors dû faire sa connaissance, et tous deux celle du Dr.
33 34

Kormann ; ainsi se constitue une communauté tranquille dont je préférerais qu’elle soit plus
bruyante, car vous voyez bien que le blaireau ne se laisse pas tirer de son trou. Aucune invective
n’est trop dure contre des serviteurs qui sont les ennemis du seigneur dont ils mangent le pain, et
c’est là le rapport des professeurs de philosophie à la philosophie.
Je souhaite vivement recevoir de bonnes nouvelles de votre personne et je demeure

Francfort s. M., votre ami


le 12 juillet 1852. Arthur Schopenhauer.

278. À ADAM VON DOSS 1

Mon cher Monsieur von Doss,

J’ai reçu votre beau cadeau avec une véritable émotion ; il montre en effet à quel point vous
pensez à moi, car en voyant cette lithographie, vous vous êtes tout de suite souvenu que les
représentations de chiens constituent la principale décoration de ma chambre . On peut déjà y
2

trouver Mentor, sous verre et encadré, parmi les meilleurs de toute ma collection, qui compte à
présent 16 pièces. Pour des chiens qui se sont distingués de cette manière, il devrait exister une
médaille d’honneur décernée par l’État, avec l’inscription « sauveur d’hommes » qu’ils
porteraient à l’avant sur leur collier, pour les protéger des traitements indignes. Veuillez recevoir
mes chaleureux remerciements pour cette jolie image que je n’avais encore jamais vue jusque-là.
Les questions et doutes philosophiques qui vous préoccupent sont de ceux qui apparaissent
nécessairement chez tout être pensant qui a étudié intimement ma philosophie. Pensez-vous que
si j’avais les réponses, je les retiendrais ? Malheureusement, je ne peux rien faire d’autre que de
renvoyer au tome 2, p. 187 de mon ouvrage principal, où j’ai dit : « Quelle que soit la torche que
3

nous allumions, quel que soit l’espace qu’elle puisse illuminer, notre horizon restera toujours
délimité par une nuit profonde. » Si j’ai réussi à éclairer un peu notre environnement le plus
proche, alors j’ai déjà beaucoup fait : oui, je doute même qu’on puisse me dépasser un jour,
c’est-à-dire en longueur ; en largeur il y aurait beaucoup à faire, en explications, confirmations,
connexions, développements, etc. Vous ne devez jamais perdre de vue ce qu’est véritablement
notre intellect : un simple outil pour les fins misérables des manifestations individuelles de la
volonté ; ce qu’il réussit à faire par ailleurs, il le fait ABUSIVEMENT. Et c’est lui qui serait censé
comprendre en profondeur et épuiser les conditions primordiales de notre existence ?! Il en est
tellement incapable que si ces problèmes se révélaient réellement à nous, nous n’en
comprendrions rien et nous resterions aussi avisés qu’avant. Kant et moi, nous faisons tout un
bout de chemin ensemble : nous disons la même chose, lui subjectivement, moi objectivement.
Le mot de Becker, affirmant que « vous voudriez avoir des renseignements plus précis sur
l’histoire de la chose en soi », est peut-être tourné de façon un peu espiègle, mais non dénué de
vérité.
Je voudrais encore vous faire remarquer que vous parlez d’« un état de la volonté sans
connaissance, et donc en apparence libre » : c’est précisément là qu’elle se trouve dans un état
libre, parce que la connaissance est le médium des motifs, et que ceux-ci agissent avec nécessité.
Mais ce que la volonté peut faire dans cet état est montré par toute la nature organique dont elle
produit sans connaissance tous les rouages excessivement artificiels. Dans la mort, où elle
abandonne le cerveau, elle retourne à cet état (Parerga I, 212), et elle poursuit son chemin EN
LIBERTÉ. Elle n’a besoin d’aucun kalpa pour la délivrance finale, ni de temps du tout : celui-ci
4

doit être éliminé, comme toutes les figures du principe de raison suffisante, quand il est question
de la chose en soi, ce qui est certes difficile, mais nécessaire : c’est précisément pour cette raison
que tout accès à la compréhension nous est verrouillé ; et bien entendu, tout ce qui se passe en
dehors de ces formes nous apparaît comme un miracle. Pourquoi la délivrance d’un individu
n’est pas partagée par tous — c’est ce à quoi nous pourrons répondre lorsque nous saurons
combien est profonde la racine de l’individualité ; comme vous l’aviez jadis vous-même
formulé . Dans la dernière lettre que je vous ai adressée, j’ai oublié de répondre à vos scrupules à
5

propos de la conscience sans connaissance des Parerga II, p. 234 en vous signalant que vous
6

pourriez en trouver une explication au moins indirecte dans mon ouvrage principal II, p. 273 . 7

Vous ne devriez pas autant appréhender votre mutation à la campagne. Ce que vous y
perdez en renseignements sur l’actualité, vous le gagnez en loisir et en paix de l’esprit ; à
supposer que vous ayez alors épousé votre dulcinée . Avec peu de livres, mais bien choisis, et à
8

la rigueur un journal, on arrive à faire beaucoup de choses. L’actualité est souvent un


dérangement inutile.
Votre longue missive apostolique, ainsi que ce que Becker en a écrit, se trouve à Berlin chez
Frauenstädt. Elle a été transportée voici deux semaines, par un certain Dr. Lindner , qui selon ses
9

dires était venu ici uniquement pour me voir, après m’avoir déjà écrit auparavant et s’être
également exprimé à mon sujet dans la Vossische Zeitung dont il est le rédacteur. Peu avant, un
Hongrois qui m’était totalement inconnu, le Dr. med. Korman à Berlin, m’a instamment prié, par
l’intermédiaire d’un libraire qui effectuait ce trajet, de me laisser photographier 2 fois à ses frais,
de profil et de face. C’est fait : il m’a alors écrit une lettre très excentrique et pleine
10

d’enthousiasme, en déclarant qu’il voulait s’en prendre à tous les professeurs de philosophie,
parce qu’il n’a pu me connaître qu’à travers le Zeitgenosse. Belle consolation qu’ils me donnent
là, de savoir qu’après un travail de quarante ans, dans ma 65 année, les étudiants feront peut-être
e

bientôt connaissance avec mon nom. On n’a encore jamais joué un tour aussi mauvais qu’à moi.
Mais même si j’ai peu d’apôtres, 7 jusqu’à présent , autant que je sache, ceux-ci sont au moins
11

entièrement animés par un enthousiasme sans limites pour ma philosophie, tous exactement
comme vous. Ceci me garantit l’influence que j’aurai lorsqu’ils seront 70 000. Le petit article
dans la Didaskalia provient, comme je l’ai découvert par hasard, d’un commis de cette ville, à
12

moitié savant, qui, avec son fils de 21 ans qui s’apprête à entrer à l’Université, a depuis
longtemps étudié toutes mes ouvrages et fait ma connaissance avec un respect tout particulier.
Avant, ils s’étaient contentés d’un exemplaire de chacun de mes ouvrages, mais ils ont racheté
l’ouvrage principal, pour que le fils puisse le prendre à l’Université. Cela veut bien dire quelque
chose !
Laissez-vous embaucher par la légation de cette ville ; nous pourrons alors philosopher,
mais en tout cas restez en bonne santé et pensez avec constance à

Francfort s. M. votre vieil ami


le 22 juillet, 1852. Arthur Schopenhauer.
279. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

À notre cher fidèle !

Car vous l’êtes et vous le restez, même si parfois vous me rendez la vie un peu dure. À
peine ai-je écarté le mieux possible vos doutes et vos scrupules que vous en présentez déjà
d’autres . Cela serait tout à fait légitime et dans l’ordre des choses, si seulement ces scrupules
2

étaient pertinents, mais il s’agit toujours de problèmes que vous pourriez résoudre et arranger par
vous-même, si seulement vous gardiez toujours à l’esprit l’ensemble de mon système, en relisant
périodiquement tous mes écrits peu nombreux, ce qui vous permettrait toujours de faire
correspondre tous les éléments les uns avec les autres, sans tourner autour du pot, à la manière
dont un critique tourne autour d’une statue et voyant un côté, met en doute sa juste proportion
avec l’autre. Car il faut encore et toujours relire mes écrits, afin de toujours pouvoir, à partir d’un
si vaste fondement, embrasser du regard l’ensemble. Vous aviez jadis l’intention de faire un
registre pour mes écrits : ce n’est que maintenant que cela est réalisable, car le cycle est clos ; il
3

faudrait qu’il soit très précis et détaillé. On pourrait alors y chercher conseil à tout moment et
voir comment tout s’accorde.
Eh bien, allons-y ! La liberté intelligible est précisément INTELLIGIBLE, et non pas intuitive :
car elle repose sur le fait que 1) la liberté est un concept négatif dont le contenu n’est que
l’absence de toute nécessité ; 2) la nécessité signifie seulement la « conséquence à partir d’une
raison donnée » ; 3) le principe de raison, dans ses 4 figures, n’est que la forme du phénomène, et
est préformé in cerebro sans se rattacher à la chose en soi ; ergo cette dernière, en tant que telle,
est libre. Que l’individu et son caractère soient l’œuvre de la volonté intelligible, cela suit
uniquement du fait que, alors même que les actions découlent des motifs et du caractère donné
sur lequel ils agissent, nous avons pourtant la conscience la plus claire de notre responsabilité à
leur égard, en tant qu’acteurs de nos actions. Mais nous ne pouvons comprendre intuitivement
tous ces rapports : ils sont uniquement intelligibles.
Ensuite, vous voulez transposer les formes phénoménales en général, et d’abord le operari
sequitur esse , sur la chose en soi : il faudrait qu’elle soit un si , c’est-à-dire qu’elle ait une
4 5

essentia constante. Mais cette nécessité, et toutes les autres qui sont analogues, ne valent que
pour le phénomène, donc pour les choses matérielles de ce monde, et non pas pour toutes celles
qui sont pensables. Car il n’y a pas de veritates aeternae (du moins pas pour nous), seulement
6

des « anticipations de la possibilité d’une expérience en général », qui en tant que telles sont a
priori, et ce uniquement parce qu’elles résultent des fonctions de l’intellect qui sont préformées
in cerebro et seulement valables pour le phénomène, car, morbleu*, nous sommes kantiens, et
non cartésiens — vous et votre aut aut ! C’est précisément dans le vouloir que la volonté ne peut
7

JAMAIS être libre (car c’est là qu’elle est phénomène), mais elle peut se libérer DU vouloir. Vous
avez mis la vérité sur la tête et vous arrivez ainsi à dire que j’aurais laissé dans l’indétermination,
comme KANT, ce qu’est la chose en soi — quae, qualis, quanta ! Autant se donner au diable ! Je
8

n’aurais alors plus qu’à jeter ma philosophie par la fenêtre. C’est là que réside justement ma
grande découverte, à savoir que la chose en soi kantienne est ce que nous trouvons dans notre
conscience de soi comme étant la VOLONTÉ, que celle-ci diffère entièrement de l’intellect et n’en
dépend pas, et qu’elle est donc également présente sans ce dernier, dans tous les êtres. Mais ce
n’est que par rapport au PHÉNOMÈNE que cette volonté est chose en soi ; elle est ce qu’est le
phénomène, indépendamment de notre perception et de notre représentation ; c’est ce que
signifie précisément EN SOI : c’est pourquoi elle est ce qui apparaît dans chaque phénomène, elle
est le noyau de chaque être. C’est en tant que telle qu’elle est volonté, volonté de vie. Sa capacité
à s’affranchir du vouloir se trouve attestée, dans l’ HOMME, par des millénaires d’ascèse en Asie et
en Europe (Monde comme volonté et représentation, tome 1, § 70). Cet affranchissement, ou
plutôt son résultat, est pour nous tout simplement un passage vers le néant (nirvana = néant) ;
mais tout néant est relatif (ibid. § 71). Ce qui transgresse cette connaissance est absolument
transcendant ; c’est là que la philosophie cesse et que la mystique commence. Vous avez cité
avec justesse le passage tome 2 p. 564 : il y en a d’autres ; mais qui pourrait les connaître tous ?
9

Le registre ! Vous devez chercher la chose en soi uniquement dans le PHÉNOMÈNE, comme
n’existant que par rapport à ce dernier, et non pas à Coucouville-les-Nuées , où vous semblez
10

souvent la contempler : nous ne pouvons y aller ; cela signifie qu’elle est transcendante. Ne
perdez jamais de vue ce qu’est l’intellect, un simple outil pour les fins misérables d’une
manifestation individuelle de la volonté. C’est pourquoi Kant en a montré les limites ; mais moi,
j’ai montré l’origine de cette limitation : il l’a fait de façon subjective, moi de façon objective,
parce que j’ai découvert un pot rsx dans la volonté. Ma philosophie n’entreprend pas d’expliquer
comment un monde tel que celui-ci a pu se constituer ; mais seulement comment nous y orienter,
en disant CE QU’IL EST. Cf. Monde comme volonté et représentation, tome 2, p. 187 : « Ainsi ma
11

doctrine… », etc. En vérité, vous voulez aller plus loin que moi, et quand vous voyez que cela ne
marche pas, vous commencez à chercher querelle à ma doctrine.
Vous affirmez que mon ascèse rebute les gens. Je veux bien le croire : elle combat leurs
désirs et le protestantisme, ce christianisme à la pointe cassée. Si seulement la vérité n’était pas
aussi intraitable ! On pourrait alors l’adapter au caprice des gens.
Si la critique des triaires n’est pas de vous, j’aimerais quand même savoir qui est censé être
le grand prophète auquel on fait si mystérieusement allusion à la fin ? Est-ce moi ? Ou n’est-ce
pas moi ?
La Didaskalia vient de rapporter que Mentor (dont le portrait est très beau) a été attrapé par
12

la police, parce qu’il a été trouvé SANS LAISSE, et qu’elle l’a tué, alors que son maître, ce pauvre
comédien, avait proposé 100 fl. de rançon ! Le président de la police munichoise peut s’estimer
heureux que je ne sois pas le roi de Bavière : il verrait bientôt des taches bleues et vertes devant
les yeux, et également ailleurs.
Je vous remercie pour tous les renseignements intéressants dans votre lettre. Le Suédois me13

plaît : vous voyez là comment, selon la parabole des Évangiles, une seule graine (lancée par
vous) vient à pousser immédiatement si elle trouve une terre féconde, et c’est ainsi que bien des
choses sont en train de fleurir sans que nous puissions nous en apercevoir. Mais déjà maintenant
cela se sent considérablement, et partout cette profonde influence et cet enthousiasme.
Récemment, au Casino, l’envoyé russe m’a abordé (le baron Krüdener , fils de Madame von
14

Krüdener qui jadis était si célèbre) en me félicitant pour les Parerga : le livre serait le miroir de
ses pensées, surtout le traité sur le destin. Cela fait quand même beaucoup pour un vieil envoyé
russe, et d’autant plus qu’il est si effroyablement sourd qu’une conversation s’avère presque
impossible, en tout cas dans ce genre d’endroit. Je dirais seulement :
Laisse donc la jalousie et l’envie se consumer !
Elles ne peuvent se défendre contre le Bien.
Dieu merci, c’est une vieille coutume,
Quand le soleil brille, il réchauffe aussi.

G.15

Cela fait contraste avec le silence sournois de ceux dont la profession consiste à parler : ils
continuent sur la même voie, parce qu’ils ne peuvent pas faire autre chose, et ils nous
entretiennent de ces trois fanfarons. Mais ils font de mauvais calculs : je suis en train de percer,
et ils seront tellement mis à nu qu’aucun chien — — —.
Le Dr. Kormann m’a écrit, je vous prie de le saluer et de le remercier pour son intérêt. Les
photographes me vieillissent beaucoup : le même jour on a fait un daguerréotype, où j’ai l’air
d’avoir 20 ans de moins. Ce dernier reproduit mon front et mon nez avec la plus grande
perfection, qui peut-être ne sera plus jamais atteinte : il est inestimable. La peur du Suédois !
16

Memento mori : pour moi, c’est comme si j’avais encore à vivre de nombreuses années ; je suis
aussi bien portant et robuste qu’à l’époque où vous m’avez connu.
Humboldt n’a qu’à consulter Dorguth , c’est-à-dire Moïse et les prophètes, qui le
17

renseignera s’il en a envie. Mais dire que j’aurais dû lui envoyer les Parerga est (venia verbo ) 18

une idée saugrenue. Moi, déposer mes œuvres aux pieds du compilateur ? Vous me croyez
capable de plus d’humilité que je n’en possède. Toutes ces flagorneries des savants à son
encontre sont écœurantes, surtout lorsqu’ils admirent son beau style. Ce dernier a quelque chose
de particulièrement ennuyeux, avec toute sa minutie. Je ne sais toujours pas avec quelle
importante vérité universelle Humboldt a enrichi l’humanité. Que m’importe son influence ? Je
ne demande rien. Je l’ai fait saluer, parce que nous nous connaissons très bien personnellement 19

(nous avons beaucoup traité ensemble en 1826, rien de scientifique) et qu’il a demandé de mes
nouvelles.
Encore une Histoire de la philosophie moderne, par Kuno Fischer ! Voyez ce que
20

ce………… dit de Schelling et Hegel = Platon et Aristote ! et l’enthousiasme avec lequel il


expose la preuve ontologique, pour séduire et tromper cette pauvre jeunesse !
Misérable………… !
Le bon vieux Dorguth m’inquiète avec sa toux, même si cette affaire a un côté ridicule. Et
malgré cela il penche vers l’optimisme !
J’aimerais entendre de tout cœur que vous vous portez bien, et je demeure

Francfort s. M., votre


le 6 août 1852. vieil ami
Arthur Schopenhauer.
280. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je dois, mon cher ami, me représenter les nombreux et grands services que vous m’avez
rendus en faisant connaître ma philosophie, pour ne pas perdre toute ma patience et garder mon
sang-froid avec votre dernière lettre . Le pire, c’est que je dois constater que j’ai perdu mon
2

temps et ma peine en répondant à vos deux lettres précédentes, car de tout ce que j’ai dit, de ce
que j’ai cité, rien n’a été pris en compte, et ce uniquement pour que vous puissiez continuer dans
cette véritable exaltation de l’absurdité sans être dérangé. C’est en vain que je vous ai par ex.
écrit de ne pas chercher la chose en soi à Coucouville-les-Nuées (c’est-à-dire là où réside le Dieu
3

des Juifs), mais dans les choses de ce monde — et donc dans la table sur laquelle vous écrivez,
dans la chaise sous votre très cher. Bien plus, vous dites « qu’il y aurait contradiction lorsque
j’affirme que la chose en soi est irréconciliable avec le concept de la chose en soi ». E XACTEMENT
! Cela sera éternellement irréconciliable avec VOTRE concept de la chose en soi, concept auquel
vous nous offrez l’accès par cette définition vague : la chose en soi est « l’être éternel et originel,
incréé et immuable ». Et c’est CELA qui serait la chose en soi ?! Pourquoi pas le diable aussi ? Je
vais vous dire ce que c’est : c’est le célèbre ABSOLU, c’est-à-dire la preuve cosmologique
masquée que chevauche le Dieu des Juifs. Et vous marchez devant lui comme le roi David
devant l’Arche d’alliance, en dansant et en chantant triomphalement aut aut ! Et pourtant,
4

malgré votre définition donnée ci-dessus, censée être à l’épreuve des balles, c’est Lui qui s’est
fait joliment dépasser par KANT ; en sorte que je ne suis tombé que sur un mort, mais si son odeur
cadavérique me monte au nez, comme dans votre lettre, alors je me fâche. Vous avez voulu le
doter d’un nouveau masque et d’un autre titre, mais comme vous les avez dérobés dans la garde-
robe de Kant, nous protestons. Appelez-le donc comme les autres, vos camarades qui
philosophent comme vous l’entendez, par ex. le Supra-sensible, la DIVINITÉ, l’Infini, l’Éternel, ou
encore mieux, avec Hegel : « La Hidée ! » Finalement nous savons tous très bien ce qui se cache
derrière : c’est Monsieur von Absolut, quand on l’attrape et qu’on lui demande : « D’où viens-tu
mon gaillard ? », il répond : « Question impertinente ! Car je suis Monsieur von Absolut qui ne
doit rendre de compte à personne : c’est ce qui suit “analytiquement de mon nom”. »
C’est Monsieur von Absolut !
C’est donc le vieux Juif
oy epoigre som otqamom jai sgm,
em aqvg algm, algm ! 5

À partir de cette définition, vous poursuivez tranquillement votre argumentation : « ce à


quoi la chose en soi NOUS oblige, car NOUS » (je vous prie de faire usage du singulier), « la
considérons comme l’être originel extra-temporel », etc. Et encore : tout cela suit
ANALYTIQUEMENT du concept de la chose en soi. » Oui, du VÔTRE — que vous êtes allé chercher
dans la synagogue. Et la petite morale de ce long discours, c’est que le bon Dieu ne peut pas
commettre de suicide. Juste ! Comment le pourrait-il ? S’il fait des trilles du genre pamsa jaka
kiam . Soit dit en passant : quelque part , j’ai dit à propos de votre définition vague (de l’Absolu,
6 7

au lieu de la chose en soi), citée ci-dessus, que la MATIÈRE en fournissait une preuve empirique,
étant exactement le definitum de cette définition : et c’est ce que vous avez élogieusement répété
quelque part. Mais tout cela est oublié*, ainsi que toute ma philosophie. Ce que signifie la «
CHOSE EN SOI », vous devez encore l’apprendre dans la Critique de la raison pure : ce qu’elle EST,
dans mes œuvres ; et vous trouverez la brève histoire de cette dernière dans les Parerga, tome 1,
p. 13-19 . Consultez-les !
8

Ma philosophie ne parle jamais de Coucouville-les-Nuées , mais de CE monde, c’est-à-dire


9

qu’elle est IMMANENTE, et non transcendante. Elle déchiffre le monde placé sous nos yeux
comme une table hiéroglyphique (dont j’ai trouvé la clef, dans la volonté), en montrant tout son
système. Elle enseigne ce qu’est le phénomène et ce qu’est la chose en soi. Mais cette dernière
n’est chose en soi que RELATIVEMENT, c’est-à-dire par rapport au phénomène — et celui-ci n’est
phénomène que par rapport à la chose en soi. Par ailleurs le phénomène est une manifestation
cérébrale. Mais je n’ai jamais dit ce qu’était la chose en soi EN DEHORS de cette relation, parce
que je n’en sais rien ; mais DANS cette relation, elle est volonté de vie. J’ai montré empiriquement
que cette volonté peut se supprimer ; j’en ai seulement conclu qu’avec la chose en soi, le
phénomène doit également s’éliminer. La négation de la volonté de vie n’est pas la négation d’un
objet ou d’un être, mais une pure nolonté, qui fait suite à un QUIÉTIF. À comprendre et à retenir !
Mais je n’ai rien dit des ANTÉCÉDENTS de l’affirmation ou des CONSÉQUENCES de la négation de la
volonté (que je ne présente pas non plus comme une SUBSTANCE inerte, c’est-à-dire comme
matière), j’ai plutôt dit à la fin du quatrième livre (je le répète, car vos yeux sont plus sourds que
mon oreille droite) que pour NOUS, la suppression de la volonté est un passage vers le néant.
Maintenant, ce que pourrait être PAR AILLEURS ce que nous connaissons seulement comme
volonté de vie et noyau de ce phénomène, quand ce n’est PLUS ou que ce n’est pas ENCORE
phénomène — cela est un problème transcendant, à savoir un problème dont la solution ne
pourra jamais être appréhendée ou pensée par les FORMES de notre intellect, qui sont seulement
les fonctions d’un cerveau déterminé au service de la manifestation individuelle de la volonté ;
en sorte que si cela nous était vraiment RÉVÉLÉ, nous n’en comprendrions absolument rien. Et
pour finir, bon voyage à Coucouville-les-Nuées ! Transmettez mes salutations au vieux Juif, et
celles de Kant : il nous connaît. Si vous comptez faire part de votre scepticisme au public, pour
révéler que vous avez fait l’éloge de ma philosophie sans la comprendre, alors je ne puis ni vous
en empêcher ni vous le conseiller. Mais ne venez plus m’embêter avec cela : je suis fatigué de
me tracasser avec des malentendus et des interprétations fausses, et d’enlever le fumier des
écuries d’Augias, j’ai bien mieux à faire de mon temps précieux. Je vous renvoie donc vos
commentaires sans les avoir lus et à l’avenir, je vous prie sérieusement de me faire grâce de tous
10

vos scrupules et doutes. Car après avoir exposé ma philosophie à la face du monde avec grand art
et avec une clarté sans pareille, je ne suis vraiment pas disposé à la traiter encore une fois dans
des lettres, ex abrupto, tantôt ce dogme-ci, tantôt ce dogme-là, et dans une ligne ascendante : il
est toujours possible d’adresser des railleries mordantes à n’importe quelle thèse d’un système ; à
condition d’oublier et d’ignorer tout le reste.
Concernant la question : pourquoi un saint ne supprime-t-il pas le monde en vertu de l’unité
métaphysique de la volonté ? Il faut noter en premier lieu que c’est parce que cette unité est
métaphysique, deuxièmement que nous pourrons mieux répondre à la question quand nous
saurons « jusqu’à quelle profondeur vont les racines de l’individualité dans la chose en soi », un
problème que j’ai soulevé, mais que j’ai abandonné comme étant transcendant et donc insoluble.
Je n’ai pas la patience de lire le verbiage de Harms , mais j’ai vu qu’une brume bleue
11

planait au-dessus de chaque page : ces gens-là ne cherchent pas la vérité, mais — Dieu. Qu’ils
aillent donc au diable. Ce qui m’avait déjà agacé, c’est qu’on ait confié la recension d’un livre
sur le magnétisme à un parfait débutant qui ne connaît absolument rien à la chose, un certain
12
Reichlin-Meldegg. Ce Reichlin-Meldegg est une personne tout à fait ignare. Dans une recension
d’Ørsted , dans les Heidelberger Jahrbücher précisément, cahier de nov.-déc. 1850, n 57, cet
13 o

ignorant absolu s’en prend à la thèse vraie, bien connue et célèbre de Kant (mais dont j’ai montré
qu’elle a été DÉROBÉE À PRIESTLEY) — selon laquelle « les corps ne sont que des espaces REMPLIS
DE FORCE » — tel un cireur de chaussures, en révélant ainsi qu’il n’en a jamais entendu parler ; il
pense au contraire que ce serait là l’opinion d’Ørsted, à laquelle il oppose alors la SIENNE, p. 899
sq. et 907 sq., qui n’est autre que celle de la populace : il ne sait rien des Premiers Principes
métaphysiques de la science de la nature de Kant. Ensuite, p. 907, parce qu’Ørsted a parlé DE
L’ESPACE au sens kantien, il parle SUR L’ESPACE comme un garçon paysan qui s’adresserait à sa
charrue : « L’ESPACE EST SEULEMENT LE RAPPORT DES CHOSES ENTRE ELLES. » S’il affirmait cela dans
ses cours pour étudiants, et qu’un étudiant qui aurait lu la Critique de la raison pure prît à part le
professeur en disant : « Mon gaillard, si l’on élimine les choses, il faudrait que l’espace
disparaisse également » — qu’arriverait-il alors ? C’est s’asseoir sur un cheval trop haut. Mais
cet homme et son engeance gagnent leur vie grâce à la philosophie. Qu’il remercie Dieu que je
ne sois pas ministre de Bade. La philosophie de cet homme, comme de beaucoup d’autres, est un
pur bavardage superficiel et spontané, sans aucune connaissance préalable.
Je vous remercie pour les attestations honorifiques que vous me souhaitez et dont vous
14

voulez même me faire bénéficier. Soyez tranquille : l’ordre du mérite et le mérite ne se croisent
pas si facilement : il emprunte donc de bons chemins. Même l’ordre conçu de façon vraiment
noble et sublime, pour les fils de Mars ou des Muses, a déjà manqué à sa HAUTE destinée : le «
pas PLUS de 30 » a été transformé en « pas MOINS de 30 » ; c’est pourquoi une foule de gens peu
méritants portent la même croix que celle que le roi a décernée en guise de récompense au prince
de Prusse pour la répression de la rébellion badoise. La distribution est aux mains d’une
15

chapelle constituée de professeurs qui décorent chaque ancien emeritus de leur guilde, comme
par ex. récemment ce Creuzer pour ses bavardages mythologiques, et beaucoup d’autres encore.
Il faudrait en décerner à l’intérieur du pays avec autant de retenue qu’on le fait à l’étranger, et
seulement à de véritables éminences de l’esprit.
Voilà donc une bonne idée que de vouloir attirer l’attention de Humboldt sur mon jugement
concernant la théorie des couleurs : vous le mettriez dans une belle rage. Dans le 3 tome de son
e

Kosmos, il s’est compromis avec la théorie newtonienne de la façon la plus pitoyable, en parlant
d’un ROUGE VERDÂTRE, c’est comme parler d’un vent est-ouest : il parle donc des couleurs
comme un aveugle. Et de toute façon, où peut-on encore trouver quelqu’un dont je n’aurais pas
encore blessé l’amour-propre ? On ne sert pas à la fois le monde et la vérité. Voilà pourquoi, s’il
pleuvait des croix, aucune ne tomberait sur ma poitrine.
Cette fois-ci, j’ai également blessé votre amour-propre : je ne pouvais faire autrement.
Recevez ce médicament amer des mains de

Francfort s. M., votre ami


le 21 août 1852. Arthur Schopenhauer.
281. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je fais suivre à la lettre que je vous ai adressée, mon cher ami, il y a trois jours, cette
exposition brève et succincte du problème discuté, qui par sa simplicité et sa clarté est tout à fait
propre à vous ramener sur le bon chemin, dont vous avez seulement été écarté par les invectives
de Fortlage. Cette exposition pourra également vous servir pour réfuter ces dernières, une fois
que le resipiscere se sera produit chez vous.
2

L’affirmation et la négation de la volonté de vie est un simple velle et nolle . Le sujet est le
3

même dans les deux cas. En tant que tel, il n’est pas aboli et détruit par ses actus. Nous le
connaissons seulement par ses deux actus. Son velle se présente dans ce monde de l’intuition,
monde qui par là même est le phénomène de sa chose en soi. Par contre nous ne connaissons du
nolle que le phénomène de son occurrence, qui ne peut advenir que dans l’individu : mais celui-
ci appartient déjà avant cela au phénomène du velle. C’est pour cette raison que nous voyons
toujours encore le nolle se produire en lutte avec le velle, tant que dure l’individu. Si en lui le
nolle l’a emporté, et si l’individu a sombré, ce n’est alors qu’une pure indication de l’occurrence
du nolle. Or de ce dernier, nous ne pouvons dire rien d’autre sinon que son phénomène ne peut
pas être celui du velle (le monde est aboli), mais nous ne savons pas en général s’il apparaît,
c’est-à-dire s’il accède à une existence secondaire pour un intellect, qu’il faudrait d’abord qu’il
produise (et à propos de quoi* ?), et nous ne pouvons effectivement rien dire du sujet de ce nolle
; puisque par son actus opposé, le velle, qui produit un intellect, nous en obtenons un savoir
positif, précisément comme chose en soi de son phénomène.
De façon générale cette connaissance (par laquelle vous et les autres semblez de préférence
vous laisser préoccuper) se tient à l’extrême limite du savoir humain, à l’horizon où le jour
s’évanouit dans la nuit et où on dit
Eccty caq mtjsoy se jai glaso eiri jeketϑoi 4

C’est pourquoi on n’y voit pas avec la précision de la clarté de midi.


Le mécanicien Albert a fait de moi 7 petits daguerréotypes , dont 3 qui sont très bons : parmi
5

les 4 autres, Becker s’est choisi le meilleur. J’ai montré à Becker votre annonce de Kosack , il en
6

était très content.

Francfort s. M., En vous saluant


24 août 1852. très le amicalement
Arthur Schopenhauer.
282. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je dois vous exprimer, cher ami, ma gratitude et mon approbation concernant votre article
sur Kosack . Non seulement vous avez réalisé tout ce que la matière permettait de faire, mais
2

encore l’ensemble est particulièrement réussi du point de vue de la forme, de la cohérence et de


l’exposition, et le mot d’esprit final de Börne est excellent. Vous devriez toujours écrire de cette
façon : c’est ainsi que l’on attire l’attention des lecteurs et que l’on se distingue du vulgus des
négligents barbouilleurs allemands.
Quant à votre dernière lettre, je dois vous dire que ce n’était aucunement par mépris que je
vous ai renvoyé vos diatribes sans les avoir lues, mais qu’il s’agissait là d’une conséquence
3

directe de notre débat. Après avoir écarté avec peine et sueur un doute après l’autre, dans
plusieurs lettres de deux pages, je vous avais fait savoir que vous m’empoisonniez la vie, et que
cela suffisait désormais. Mais cela ne vous a pas empêché de m’écrire encore une lettre remplie
de doutes inouïs, de contestations, et même de menaces au cas où je ne vous donnerais pas
satisfaction. En plus de cela, vous y avez joint tout un cahier de scrupules et d’objections vieux
de 5 ans, où un « Anti-Schopenhauer » me sautait immédiatement à la figure. J’ai peut-être
expliqué et enseigné ce qu’était un saint, mais jamais je n’ai affirmé que j’en étais un. J’ai donc
répondu par là à vos derniers scrupules, mais en renvoyant le cahier intact — comme vous ne
pouviez que vous y attendre. Je vous assure que vous pourriez lever tous vos doutes en
consultant mes écrits, si seulement vous rassembliez ce qui est éparpillé. Car mon système, plus
qu’aucun autre, fait preuve d’une cohérence organique, mais il faut toujours avoir chaque phrase
in promptu , pour venir en aide à toute autre phrase isolée lorsqu’elle se trouve attaquée. Je me
4

réjouis de voir que vous en avez désormais une meilleure compréhension, et je souhaite que vous
la consolidiez, en reprenant sans cesse l’étude. Ce que vous proposez d’ajouter est juste dans
l’ensemble, mais prenez garde à ne pas aboutir dans un éon gnostique, en posant derrière la
chose en soi une deuxième dont elle serait le phénomène. Arrivé à un certain point, celui du velle
et du nolle , de l’affirmation et de la négation, nous ne devons pas de surcroît chercher à le fonder
5

sur une substance, mais reconnaître que nous avons atteint les limites de la connaissance
humaine, et même l’exposer au grand jour en butant justement contre ces limites. C’est là
l’unique sagesse, et nous pouvons la revendiquer avec dignité, après avoir montré le lieu qui
engendre les limites, en ayant mis en évidence l’ ORIGINE de l’intellect qui est bien basse et
mesquine : l’organe avec lequel un animal traque sa proie.
Le dictionnaire physiologique de Rudolph Wagner (qui est, soit dit en passant, un tartuffe et
6

un cagot*, auquel je fais allusion dans l’Éthique, p. 245 ) n’était pas disponible en librairie, je ne
7

puis donc lire l’article de Weber : d’ailleurs cela ne me réjouirait aucunement de voir que l’on
8

fait usage de mes vérités sans me nommer. Je vous prie de ne rien écrire sur le rapport de la
physiologie à la psychologie sans avoir converti Cabanis et Bichat in succum et sanguinem : 9

vous pourrez alors vous passer de centaines de barbouilleurs allemands. Mais de façon générale,
il n’y a rien à faire avec la psychologie, parce qu’il n’y a pas de psyché, d’âme, et que l’on ne
peut étudier l’homme isolément, mais seulement corrélativement au monde. lijqojorloy jai
lajqojorloy à la fois — comme je l’ai fait. Et demandez-vous bien si vous maîtrisez
10

véritablement la physiologie et si vous l’avez assimilée : elle présuppose l’anatomie et la chimie.


Jüngken était ici, j’ai dîné avec lui : il m’a tout de suite reconnu, alors que jadis, Raumer et
11

Boeckh ne m’avaient pas reconnu du tout. Récemment, un étudiant de Giessen m’a encore 12

rendu visite, s’est beaucoup plu avec moi, et m’a demandé la permission de revenir à Pâques,
avant de changer d’université. C’est touchant de la part de ces jeunes hommes.
Le nouvel apôtre (l’auteur du petit article dans la Didaskalia), voire le quasi-évangéliste
Kilzer, est vraiment une tête supérieure, et quel dommage qu’il ne soit pas un savant. Il a rédigé
un article sur ma philosophie et ma théorie des couleurs qu’il comptait publier dans la
Didaskalia, mais il a été refusé : elle ne se destine pas en effet à ces choses sérieuses ;
maintenant il ne sait pas où pondre ses œufs. Il y a 8 jours, il a commencé un voyage de trois
semaines au Tyrol. Il m’a dit lui-même qu’il allait retrouver Doss à Munich. Ces visites entre
apôtres me plaisent beaucoup ; il y a là quelque chose de sérieux et de grandiose : « Car là où
deux sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux . » Je me sers de son voyage pour une
13

petite mystification du vieux à Magdebourg (mais si vous le lui dites et que vous abusez de ma
14

confiance, je ne vous le pardonnerai jamais). C’est que j’ai donné à Kilzer un daguerréotype
assez réussi , récent, caractéristique et bien emballé : il y INSCRIT alors l’adresse de Dorguth, il
15

appose SON cachet et dépose le tout, sans aucune lettre, à la poste de Munich. Comme le vieux
sera étonné, et finira par dire : « C’est ou Schopenhauer ou le diable. »
Hier, pour une fois, j’ai été malade, un refroidissement du bas-ventre, j’ai dû rester chez
moi. J’ai pensé à la mort, comme cela se fait à mon âge : aujourd’hui j’en ris et je sors, en
espérant être encore longtemps

Francfort s. M., votre ami


le 12 sept. 1852. Arthur Schopenhauer.
283. À UNE LIBRAIRIE 1

De la part du Dr. Arthur Schopenhauer,


à Francfort s/M

pag. no. Premie Commande


r mot
Du catalogue Rth Gr.
du titre
No 2470 Shelley2 1 25
2472 Coleridge — 25
2627 Poésies — 18

Ne pas dépasser ces prix.


Je vous prie d’envoyer les acquisitions éventuelles à une librairie d’ici (si possible celle de
Hermann) ou par voie de librairie ; je paierai immédiatement, après vérification des livres.

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 17 sept. 1852.
C’est uniquement si mon nom figure sur le catalogue que je suis assuré de le recevoir.
284. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami.

Je m’empresse de vous envoyer ci-joint une recette qui chassera rapidement et


2

définitivement la rage de dents même la plus tenace, dans 9 cas sur 10. Toute la dose doit être
pliée dans une étoffe de LIN, sans la chauffer, et posée ainsi sur la joue. Mais vous devez en faire
usage seulement dans des situations critiques, autrement la nature s’y habitue et diminue ainsi
son effet. Le meilleur moyen préventif contre la rage de dents, c’est de laver, le matin, lentement
et durablement, la partie avant et arrière de tout le COU avec de l’eau glaciale et une éponge, et
PAR AILLEURS de le garder au chaud. Une fois que la rage de dents s’est déclarée, on peut la guérir
en enveloppant 2 à 3 fois le COU (et non pas la tête) d’un long bandage de laine qu’on garde
durant la nuit. Les dents et le COU sont nerveusement sympathiques. Celui qui veut être SÛR
d’attraper une rage de dents n’a qu’à se rendre, en plein été, vêtu d’un pantalon en coton de
Nankin, et SANS CALEÇON, dans la chambre de lecture de la Bibliothèque royale, froide comme
une cave : probatum est .
3

C’était là le pathologicum : venons-en à présent au physiologicum à propos duquel je ne


4

puis vous priver de quelques déclarations, aussi bien intentionnées que celles qui précèdent. La
physiologie est le sommet de toute la science de la nature tout en étant son domaine le plus
obscur. Pour être à la hauteur de la discussion, il faut donc au moins avoir suivi sérieusement
l’entier cursus universitaire de toutes les sciences naturelles existantes et ensuite les garder à
l’œil le reste de sa vie. Ce n’est que dans ce cas que l’on sait vraiment DE QUOI IL EST PARTOUT
QUESTION : dans le cas contraire, NON. C’est ainsi que j’ai procédé, j’ai assisté avec constance aux
cours d’anatomie de Hempel et de Langenbeck, j’ai ensuite suivi tout un séminaire de Rosenthal
sur l’anatomie du cerveau, dans l’amphithéâtre anatomique de la Pépinière à Berlin, je me suis
inscrit 3 fois en chimie, 3 fois en physique, 2 fois en zoologie, en anatomie comparée, en
minéralogie, en botanique, en physiologie, en physiologie générale, en géographie, en
astronomie, etc. ; ensuite, durant toute ma vie, j’ai observé les progrès de toutes ces sciences et
j’en ai étudié les ouvrages principaux, surtout français et anglais, comme en témoignent les
exemplaires annotés de ma bibliothèque (cet été, toute ma bibliothèque était une camera
obscura, remplie de toutes sortes d’instruments optiques). Voilà pourquoi je peux participer à la
discussion et je l’ai fait tout à mon honneur. En 1824, l’Académie de Munich a publié une brève
présentation des progrès en physiologie accomplis en ce siècle, et pour les progrès dans les
organes des sens, elle n’a cité que moi et Purkinje . De façon générale, mes écrits témoignent
5

d’une étude approfondie de la nature, autrement ils seraient tout simplement IMPOSSIBLES.
Mais si, au lieu de cela — comme le petit bourgeois qui va chercher chaque jour ses besoins
ménagers chez l’épicier —, on tire sa connaissance de la nature en lisant des articles d’un
dictionnaire fabriqué par des sous-fifres (ou bien pire), alors il se pourrait que l’on arrive non pas
dans une pharmacie, mais dans un laboratoire de poisons et dans un repaire de brigands. Dans CE
dernier endroit, on rencontre un certain Volkmann qui a le toupet de dire que les œuvres
6

immortelles de Bichat sont superficielles ; et en suivant ce verdict on se tient pour dispensé de la


7

lecture de Bichat, et de Cabanis . Mais moi, je vous dis que si Bichat crachait sur la tête de
8

Volkmann, ce serait encore lui faire trop d’honneur. Bichat a vécu 30 ans, il est mort voilà
bientôt 60 ans et toute l’Europe savante honore son nom et lit ses œuvres. Parmi 50 millions de
bipedes, on ne trouve pas une seule tête pensante comme celle de Bichat. Il est certain que la
physiologie, comme toujours, a réalisé des progrès, bien que ce soit sans le secours des
Allemands, plutôt grâce à Magendie , Flourens , Ch. Bell et Marshall Hall , mais ces progrès ne
9 10 11 12

sont pas tels qu’ils rendraient obsolètes Bichat et Cabanis, et tous ceux que je viens de citer
s’inclinent devant le nom de Bichat. Sortons à présent de cette noble société pour pénétrer le
repaire des brigands allemands. Son arrière-fond ténébreux (vous savez d’où il vient) est
constitué par ce cagotage et tartuffianisme généralisés, pratiqués de nos jours avec tant de zèle
dans toutes les écoles, les lycées, les universités, les livres, les journaux ; mais ces gredins
corrompus sont si ouvertement grossiers, lourdauds comme des ours, se comportent de façon si
empotée, que leur succès sera couronné d’échec, j’en donne ma parole de vivant. Je vous ai déjà
présenté un cagot primaire, ce Tartuffe bien propret R. Wagner. Ô Fallmerayer ! Dormirais-tu ?
Lève-toi donc comme il y a 1 an ½, quand tu as publiquement administré une correction bien
méritée à ce misérable Ringseis, à la consolation de tous les gens honnêtes, et fais la même
13

chose avec celui-là et sa Société de Göttingen. D’un point de vue psychologique, ces messieurs
s’efforcent de montrer comment le corps et l’âme sont deux substances foncièrement différentes
et que la dernière loge uniquement dans la tête : comme elle est immortelle, elle est absolument
simple et indivisible et doit donc concentrer tout son bagage* d’intellect, de sentiment, de
volonté, de passions, etc., là-haut dans une noisette, en un unique point, comme la monade de
Leibniz ; c’est pourquoi les désirs, les passions, etc., ne peuvent se trouver dans les autres
partibus du corps, comme Bichat et moi le soutenons. Ne l’oubliez pas ! On veut faire
TRIOMPHER cette conception, malgré Kant d’une part et les physiologistes français d’autre part.
Avez-vous remarqué quelque chose ? Lisez à présent, dans le dernier Repertorium de Leipzig, la
recension hautement élogieuse de cette indigne machinerie de Lotze (Lotz et Botz, les prétendues
lumina philosophiques de Göttingen !), Psychologie médicinale. Cette crapule anonyme fait
14

l’éloge de la chose en se fiant à son anonymat. Dans ce livre, la doctrine indispensable citée plus
haut est exposée de la façon la plus détaillée et R. Wagner et Volkmann bénéficient de grandes
louanges (ils forment tous une clique*). L’âme est démontrée avec des arguments de vieille
femme. L’impudence avec laquelle ils ignorent K ANT me console de l’impudence avec laquelle
ils m’ignorent. Mais comme l’âme est censée engendrer de façon autonome toute la pensée, la
volonté, etc., ce brigand ne sait que faire avec le cerveau si artificiellement compliqué qui pèse
3-5 livres : il déclare alors qu’il est le simple APPAREIL NUTRITIF des outils des sens !!!!!!! On n’a
peut-être encore jamais prononcé pareille absurdité. Voilà donc les personnes chez qui vous vous
instruisez, et chez lesquelles Bichat passe pour être superficiel. Kant et moi, nous sommes une
paire d’ânes que l’on n’écoute même pas. Voilà la probité allemande.
Ma convergence avec Bichat sur le résultat bien connu, que nous avons atteint tous deux par
des chemins si différents, est l’une des plus belles confirmations de ma vérité ; lorsque je l’ai
remarqué, en 1838 seulement, cela m’a infiniment revigoré le cœur. Mais il vous manque le
courage de parler du point de vue de ma philosophie, alors que vous avez pourtant admis cette
dernière : tantôt vous prêtez l’oreille à celui-là, tantôt à celui-ci, en croyant que ce sont aussi des
personnes importantes. Vous méconnaissez l’aristocratie dans la nature. Bichat et moi, nous nous
étreignons dans un désert.
J’ai lu récemment, je ne sais plus où, une recension sur la téléologie qui témoigne, à travers
le livre et le critique, de la grossièreté incroyable dans laquelle l’on est retombé. J’aimerais que
vous citiez, du premier au dernier mot, mon chapitre sur la téléologie ; car avec la rubrique «
15

Anatomie comparée » dans la Volonté dans la nature, c’est peut-être ce qu’il y a de plus solide et
de profond jamais écrit sur le sujet ; dans l’état actuel des choses, ou même historiquement, cela
pourra très bien orienter les gens. La barbarie s’étend, l’ignorance prend partout la parole, les
Anciens sont mis de côté. Au meurtre ! Au meurtre !
J’ai été étonné de ne pas trouver le moindre mot dans votre lettre sur le fait que (selon la
Postzeitung locale) Brockhaus croupit en prison depuis 3 mois, à cause de la publication de votre
recension de Feuerbach . Cela doit quand même vous faire beaucoup de peine. Si seulement vous
16

aviez écouté mes avertissements, vous auriez été convaincu qu’ils n’étaient pas formulés par
partialité pour
oy epoigre som otqamom jai sgm cgm 17

et qui estima ensuite que c’était très beau.

Mais il faut joliment éviter le sanctissimo officio inquisitionis , quels que soient les habits
18

dans lesquels il apparaît.


Kilzer a posté le portrait à Munich ; le vieux n’a pas encore fait signe : il doit la regarder,
19

tout perplexe, en pensant :


Qu’est-ce que je donnerais si seulement je savais
qui est ce monsieur .
20

Doss a reçu Kilzer de façon très amicale, l’a accompagné jusqu’au train en lui disant que le
chien Mentor vivait toujours. Quelle joie pour moi !
Avec mes meilleurs vœux pour le rétablissement de votre santé,

Francfort s. M., votre ami


le 12 oct. 1852. Arthur Schopenhauer.
285. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens, depuis votre dernière lettre du 3 sept., je n’ai pas eu de vos
nouvelles, alors que vous m’aviez promis dans cette dernière de m’envoyer de Cologne un tiré à
part de la lettre de Moevius, et que le 10 sept. je vous avais envoyé les lettres de l’année 1843
que vous m’aviez demandées , en vous priant en toute confiance de bien vouloir me les renvoyer
2

après inspection, ou eventualiter après en avoir fait des tirés à part. J’attends donc de recevoir
enfin ces deux envois.
Puisque Abegg, apparu comme un deus ex machina pour trancher le nœud gordien de ce
drame ennuyeux intitulé L’Emphytéote, vous a dit que l’argent revenait réellement à
l’emphytéote, et que la réponse à la question de la véritable encaisse de l’emphytéose semble
également affirmative dans les lettres que je vous ai envoyées, il s’ensuit que nous devons
donner à Friedrichsen ce qu’il réclame depuis bien longtemps, la procuration générale pour le
paiement, et je souhaiterais que cela soit enfin réalisé, parce que, rebus sic stantibus , nous avons
3

retenu cette procuration à tort, et je crains que l’emphytéote ne nous adresse réellement une
demande d’indemnisation, ou qu’elle ne nous porte préjudice d’une autre manière.
C’est pourquoi je vous prie de bien vouloir me faire connaître votre intention, ainsi que les
considérations de Moevius, et de m’envoyer enfin les vieilles lettres en question, afin que je
puisse évacuer cette affaire de ma tête en sachant que la paix est enfin rétablie. Vous
reconnaîtrez qu’après tant de délais si longs, le temps est enfin venu, et que les plaintes de
Friedrichsen, devenues de plus en amères, sont pour moi un bien mauvais plaisir, surtout si je
dois penser, me fiant aux propos d’Abegg, qu’il a raison.
J’espère et je souhaite de tout cœur que ce n’est pas à nouveau l’état de votre santé qui est la
cause de votre silence, et je demeure avec mes considérations les plus hautes votre serviteur
dévoué

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 15 oct. 1852.

286. À FRIEDRICH DORGUTH 1

Cher Monsieur et ami !


Ainsi, malgré mon incognito, vous m’avez donc bien reconnu ! Je me suis permis de faire
une petite mystification, en remettant mon portrait à un apôtre qui habite ici, Kilzer, auteur d’un
petit article sur moi, dans la Didaskalia, 14 avril 52, pour qu’il le prenne avec lui à Munich, où
vous l’avez reçu avec un sceau et une graphie que vous ne connaissiez pas : pourtant la difficulté
de me reconnaître ne résidait pas là, mais plutôt dans le fait que, sans aucun doute, vous
m’imaginiez avec une physionomie entièrement différente. L’apôtre en question se trouvait
justement chez moi pour la première fois depuis son retour, lorsque le facteur est entré avec votre
contrecoup*, ce qui nous a causé beaucoup de gaudium . C’est quand même tout à fait autre
2

chose lorsque l’on connaît à peu près l’aspect de quelqu’un, et même ce qu’il écrit et fait est ainsi
plus compréhensible : on le voit sous un autre jour. C’est pourquoi je vous remercie beaucoup
pour le portrait ; il semble qu’il reflète toute votre personne de façon vraiment fidèle ; parce qu’il
paraît si déterminé et caractéristique. Quant au mien, j’ai quelques hésitations. Car même si la
ressemblance des daguerréotypes est certaine a priori, cette ressemblance est horriblement
partiale et des visages très versatiles, comme le mien, n’y trouvent pas leur compte. On a déjà
réalisé de moi au moins 15 daguerréotypes, et ils sont tellement dissemblants que pour certains,
il est à peine croyable qu’ils reproduisent le même homme. Les photographies donnent un
résultat encore moindre. Deux ont été faites de moi cet été, ici même, sur commande et aux frais
d’un Hongrois de Berlin que je ne connais pas ; techniquement elles sont très belles, une de
profil et l’autre en face*, mais elles sont une représentation bien faible de ma personne ; le
peintre, qui a fait des retouches, m’a dit qu’il était presque impossible de me fixer, car je
changeais d’aspect à chaque instant.
Je ne pense pas partager avec vous l’honneur d’être né un dimanche, en tout cas on ne me
l’a jamais dit ; par ailleurs, puisque vous souhaitez le savoir , je suis né le 22 févr. 1788, et à
3

Dantzig, très heureusement honesto loco (ce que pour plaisanter on a appelé les nobili vénitiens
4

de Dantzig), ce qui m’a laissé, en dépit de tous les accidents et tempêtes de ce siècle et de mon
destin, une entière et durable indépendance, de sorte que j’ai pu suivre l’instinct théorique
implanté en moi sans être dérangé, et donner peu à peu le jour à certaines choses. Cela n’aurait
pas été possible si j’avais dû m’occuper de ma personne, travailler, me conformer, m’adapter,
etc. C’est là une preuve pour mon « Sur l’apparente intentionnalité ». Avec une fortune véritable,
cela n’aurait pas porté non plus : le destin a bien heureusement effectué la remise nécessaire ; et
c’est pourquoi en particulier je ne devais pas me marier.
Les connaisseurs et amateurs de ma philosophie croissent peut-être en nombre, mais d’une
façon si lente et dispersée que, si je dois vraiment m’en réjouir un jour, c’est une bonne chose
que ma constitution et ma force vitale me promettent une vie plutôt longue. En vous souhaitant la
même chose, avec une bonne et solide santé et un esprit toujours en éveil, je demeure toujours

Francfort s. M. votre
le 26 oct. ami et serviteur
1852 Arthur Schopenhauer
287. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami.

Je vous remercie de m’avoir indiqué les deux articles publiés dans ce journal
philosophique : sans cela je ne l’aurais pas su si tôt, et j’aurais d’abord dû le commander. Ce qui
2

en ressort de plus important, c’est que les professeurs de philosophie semblent désormais chassés
de la position très fixe qu’ils tenaient, celle qui consistait à se taire et à ignorer. Mais dans toute
autre position, ils ne peuvent que très peu contre moi, car si l’on en arrive à la situation où les
gens ouvrent et regardent un de mes ouvrages, n’importe lequel, alors je suis gagnant. C’est
précisément cela qu’ils ont jusqu’à présent prudemment empêché. C’est à vous que revient
l’honneur de les avoir chassés de cette position fixe, et ensuite au bon Dorguth, dont l’artillerie
ne porte cependant pas aussi loin que la vôtre. Il semble réellement que les graines que vous avez
semées depuis longtemps commencent à germer et à éclore. Dans les deux articles, j’ai vu avec
joie qu’une certaine inquiétude portait sur le fait que l’intérêt provoqué par ma philosophie était
même en train de s’accroître. Quel dommage que les gens se trouvent alors par là écartés et
distraits des travaux subtils des professeurs de philosophie !
Erdmann me traite encore de façon tout à fait honnête. Il a raison de dire que Herbart et moi
sommes diamétralement opposés : non en raison d’une différenciation polarisée de la philosophie
kantienne en deux points de vue, mais simpliciter parce qu’au faux se trouve opposé le vrai.
Herbart est un esprit résolument tordu, il a mis son entendement à l’envers ; en plus c’est un
gaillard prosaïque et plat. Mais qu’est-ce qui pourrait être plus absurde que de me faire passer
pour un acosmique, moi, dont le thème le plus explicite et le plus constant est le MONDE ! Il est
également faux de faire passer Herbart pour un athéiste, parce que ce dernier a fait valoir la
preuve physico-théologique, avec LA DISSIMULATION LA PLUS EFFRONTÉE des raisons véritables de
l’argumentation de Kant, qu’il expose de façon TELLEMENT FAUSSÉE, cette crapule ! Ce Fichte a
3

raison de le lui rappeler, et c’est là l’unique lueur de vérité dans son article.
Ce que dit Erdmann p. 210 est pertinent et vrai, à propos du tragique dans mon destin et du
« scandale » consistant à m’avoir ignoré. Comme la vérité finit par éclater malgré tout ! Magna
est vis veritatis et praevalebit . Par ailleurs, il a gauchi et désarticulé ma doctrine, et ce dans le
4

seul but de suivre sa marotte. Il m’attribue même des expressions que je n’ai pas utilisées du
tout, ou pas dans ce contexte. Vous l’aurez déjà remarqué. Quant à l’article de FICHTE, c’est un
tissu de mensonges, du début à la fin. Il va même jusqu’à se livrer à une véritable falsification, p.
233, où un passage que je n’ai jamais écrit est cité entre guillemets : j’ai immédiatement
remarqué que ce n’était pas ma langue, ni mes expressions ; j’ai tout de même fait des recherches
laborieuses dans tous mes écrits, sans rien trouver. Pouvez-vous la trouver ? L’idée ne m’est bien
sûr pas étrangère. Il y a 6 ou 8 mois, j’ai lu une recension où l’auteur rendait compte de doctrines
philosophiques en s’appuyant uniquement sur les démonstrations de ce Fichte : « Mais il faut
utiliser Fichte avec la plus grande précaution. » Cela ne peut nous étonner, car le caractère est
hérité du père ; ce dernier était « un fanfaron », je veux dire un homme qui vise l’illusion et la
tromperie, mais il s’y entendait, il le faisait donc avec FINESSE. Par contre le fils est un menteur , à
5

cause de sa mère, et un………… en vertu du caractère paternel. Mais il faudrait des lecteurs très
limités pour ne pas remarquer que ce sont uniquement la méchanceté, la bassesse et la jalousie
qui animent le gaillard dans sa démonstration : et désormais des lecteurs qui me connaissent par
ailleurs ! Ce n’est pas à moi qu’il va nuire, mais à lui-même ; même s’il voudrait cacher la vérité
et m’enterrer devant le public, en faisant croire qu’il n’y a rien à voir, qu’il n’y a là que beaucoup
de bruit pour rien. Le gaillard cherche même à me suspecter moralement, il voudrait me
présenter comme un Méphistophélès ! Mais dans l’ensemble, je me console avec ces vers de
Goethe :
Ainsi le roquet, de notre écurie
Voudrait nous suivre partout :
Mais le bruyant écho de ses aboiements
N’est que la preuve que nous sommes en route ! 6

Entre-temps, j’ai moi aussi découvert un article sur les Parerga, intitulé « Un penseur
indépendant », là où je m’y attendais le moins, dans les Unterhaltungen am häuslichen Heerd de
Gutzkow . C’est plein de louanges, mais assaisonnées de quelques blâmes qui, au fond, ne
7

peuvent pas subsister à côté des louanges, et par ailleurs c’est plutôt insipide ; avec quelques
remarques personnelles désobligeantes sans motifs, censées me faire énormément de peine. Dans
l’ensemble c’est plutôt touchant de voir qu’en plus il parle d’une voix de fausset, comme un
piccolo, dans l’orchestre, alors que vous êtes la basse fondamentale. Surtout lisez-le !
Un dimanche matin, il y a environ 4 semaines , Kilzer était chez moi et nous nous
8

demandions ce que le vieux pouvait bien penser du portrait ; c’est là que le facteur est entré avec
un paquet, sans lettre, anonyme : il contenait le portrait, un daguerréotype, d’un vieux monsieur,
dans la même position que j’avais adoptée dans le mien, à savoir la tête appuyée sur la main ; il a
l’air très gentil, ferme et raisonnable. Je lui ai alors écrit, sur la petite mystification à laquelle je
me suis laissé aller, etc. Il a répondu qu’il n’avait pas hésité le moindre instant à identifier la
personne, et que même s’il l’avait reçu d’Amérique, il m’aurait tout de suite reconnu à ma
position méditative et à mon front. À sa demande, je lui ai communiqué la date de mon
anniversaire (qu’il voudrait fêter avec ses filles !) et à présent il veut connaître mon jour de
naissance : il l’a obtenu à l’aide d’un calendrier millénaire, dont il va m’envoyer un exemplaire,
et il en est ressorti que c’était un vendredi. Vous voyez, cela va loin.
Bientôt les libraires feront leurs comptes ; vous me rendriez service si vous pouviez
connaître le nombre d’exemplaires vendus par Hayn : je crois que cela a bien marché. Mais être
toujours mécontent des ventes fait partie de la politique des libraires. Je vous prie également de
demander à l’occasion au Dr. Lindner s’il a reçu des nouvelles de mon vieil ami le baron
Lowtzow — et je vous salue bien cordialement.
9
Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.
le 22 nov. 1852.

288. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami !

Je commence à me faire quelques soucis à votre sujet, car je n’ai pas eu de vos nouvelles
depuis environ 2 mois, alors que dans ma dernière lettre, je vous ai prié de me faire connaître, si
possible, le nombre d’exemplaires des Parerga vendus la première année. Vous ne seriez quand
même pas malade ? Espérons le mieux.
Votre article enfin paru sur la controverse chimico-physique a dépassé toutes mes attentes
2

et il est tout à fait louable. Vous vous êtes rendu maître de votre sujet grâce à une étude assidue,
pour ensuite l’exposer de façon réfléchie et claire, dans un bon style d’écriture, sans négligences,
de sorte que vous vous retrouvez comme un homme tiré à quatre épingles au milieu d’une société
très hétéroclite. Vous avez bien heureusement évité les écueils, que je redoutais, de votre science
lacunaire de la nature, et surtout, vous avez présenté cette dispute très importante, qui fournit un
indice de l’époque, de façon purement objective, impartiale, et même dramatique. C’est
merveille qu’à la fin vous me fassiez intervenir tel un deus ex machina dans son chariot céleste,
non pas pour réconcilier les parties en conflit, mais pour les renvoyer chez elles en leur faisant un
pied-de-nez. Je me plais dans ce rôle. Mais il est vrai que ces messieurs croient que grâce à un
peu de chimie, seule chose qu’ils aient apprise, ils peuvent résoudre les problèmes du monde et
de la vie : c’est alors qu’ils érigent Feuerbach sur leur autel. C’est pourquoi j’aurais aimé qu’en
général vous vous étendiez davantage sur l’embarras de ces naturalistes empiristes, lorsqu’ils
butent contre les limites de leur science et que se révèle l’absence d’études philosophiques, qu’ils
se retrouvent comme des sots, et qu’ils remettant sur le marché des absurdités périmées depuis
des millénaires. Car de quoi s’agit-il d’autre dans toute cette affaire, sinon d’un Democritus
redivivus ? Démocrite connaissait seulement les forces mécaniques, et il en a fait le principe de
3

tout le reste : Mulder connaît seulement les forces chimiques et s’en sert de la même façon. Des
4

personnes comme ce Hollandais et son Moleschott, lorsqu’ils vont au fond des choses, ne
pensent pas un instant à prendre en compte la PARTIE SUBJECTIVE de tous les phénomènes
naturels, car leurs sens sont brouillés par un réalisme cru et stupide. Par conséquent, ils prennent
sans hésiter la matière chimique pour la chose en soi : c’est le principe immuable et éternel ; le
tableau des équivalences de Berzelius tient le rôle du bon Dieu ; l’animal et l’homme
5

apparaissent alors comme des jeux de la nature, des concrétions aléatoires, à la manière des
stalactites. Et tout cela seulement parce que dans leurs études, ils n’ont établi aucun fondement
philosophique, et que ces messieurs, dans leur effronterie empirique, croient que la pensée
bimillénaire des plus sages de toute la race humaine n’a pas obtenu de résultat et qu’elle n’est
qu’une farce : c’est uniquement dans le creuset, la cornue et les amphithéâtres anatomiques qu’il
faudrait chercher la sagesse, croyance soutenue par une belle paresse. La seule métaphysique
qu’ils connaissent est le catéchisme et ils ne sauraient recourir à une autre alternative qu’à celle
du Dieu créateur ou du matérialisme ; comme les Anglais, Parerga II, p. 123 . J’aimerais6

beaucoup que les naturalistes sachent que chez moi, il y a également quelque chose à chercher
pour EUX (comme récemment M. Carrière qui, au milieu de ses sornettes, s’est référé à l’aspect
7

ESTHÉTIQUE de mes œuvres : car chacun ne cherche ce qui l’intéresse que là où une enseigne le
lui annonce). Pour donner une leçon aux physiologues chimistes, le § 27, tome 1, de mon
ouvrage principal convient fort bien et tous leurs agissements y sont déjà prévus ; et en général
toutes les aberrations, qui marquent à présent un côté comme l’autre, le matérialisme et le
tartuffianisme, rendent évidente la nécessité de ma philosophie et montrent combien cela est
salutaire que quelqu’un soit resté fidèle à la doctrine kantienne et qu’il se soit profilé à l’ombre
silencieuse de cette dernière comme son véritable héritier, afin que maintenant, alors que
l’anarchie et la barbarie se sont imposées, il en apparaisse comme le sauveur.
Apprendre bientôt qu’il ne vous est rien arrivé et que vous vous trouvez en bonne santé,
c’est là le souhait

Francfort s. M., de votre ami


le 23 janv. 1853. Arthur Schopenhauer.
289. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami !

Veuillez recevoir mes remerciements les plus chaleureux pour votre envoi et plus encore
pour la rédaction de votre livre . Ce dernier accomplit un pas important pour la propagation de
2

mes doctrines, car dans presque toutes vos recherches esthétiques, on entend ma philosophie
comme une base fondamentale et on y trouve de nombreuses citations bien choisies de mes
œuvres, ce que je considère comme particulièrement propre à m’amener des lecteurs, car cela
demande bien quelque chose avant que les gens se décident à lire ce qui ne sert ni à la
distraction, ni à un profit matériel. Voilà pour le côté subjectif : considéré d’un point de vue
objectif, votre livre mérite des louanges absolues, pour l’exposition et le style : tout est clair,
distinct et déterminé ; ensuite, l’on peut voir que c’est l’œuvre d’une réflexion autonome ; en
outre, il s’agit d’une discussion des problèmes esthétiques fondamentaux qui servira également à
attirer la réflexion des autres sur ce genre d’objets, et de façon générale, le livre contient
beaucoup de choses vraies et justes.
Il est sûr que dans le détail, j’aurais à formuler quelques objections, ce que je serais prêt à
faire de vive voix, car c’est bien trop vaste pour être écrit : je me souviens également que vous
supportez tellement peu les reproches que j’ai entièrement renoncé à critiquer vos œuvres. Mais
par considération pour tous vos nombreux et grands mérites concernant la propagation de ma
philosophie, je veux bien répondre autant que possible à votre souhait d’entendre un jugement
sincère, en ne vous privant pas des critiques principales que j’aurais à faire.
Peut-être réussirai-je
à forcer ma rude nature .
3

1) Dans l’article III , ce sont d’emblée l’introduction et en même temps l’idée fondamentale
4

de tout l’article qui ont été manquées. C’est que Platon, de façon très pertinente et juste, a posé la
différence caractéristique entre l’agréable et le beau en cela que pour le premier, un BESOIN doit
précéder la jouissance, comme étant sa condition ; alors que pour le beau, cela N’EST PAS LE CAS ;
il exclut même, dans l’agréable, les bonnes odeurs, car leur occurrence réjouit sans la précédence
d’un besoin. Passage principal de rep. IX, p. 263 sq. ed. Bip.
2) p. 50. « Une femme parfaite est plus belle qu’un homme parfait » — quae, qualis,
5

quanta ! Vous avez présenté par là un témoignage naïf de votre… instinct sexuel : mais tous les
6

vrais connaisseurs de la beauté en souriront et les malveillants riront. Le contraire se laisse


rigoureusement démontrer, à partir de la constitution de l’homme et de la femme. Il n’en va pas
autrement avec l’espèce humaine qu’avec toutes les espèces animales, le lion, le cerf, le paon, le
faisan, etc., etc. Le sexus sequior est sequior à tous les égards. Attendez d’avoir atteint mon âge
7

pour voir quelle impression vous feront alors ces petites personnes avec les jambes courtes,
épaisses, les épaules étroites et les hanches larges, ornées de mamelons : leurs visages ne sont
RIEN comparés à ceux des plus beaux jeunes hommes, surtout les yeux, sans énergie.
3) La p. 51 m’a considérablement irrité : « il admet lui-même que cette explication est
insuffisante » — et pourquoi pas le diable aussi ! Esthétiquement, mon explication suffit
8

entièrement et toujours : c’est seulement pour les crapauds qu’elle ne suffit pas, parce qu’il n’y
est pas seulement question de déplaisir ESTHÉTIQUE, c’est-à-dire de LAIDEUR, mais d’un horror
énigmatique d’un genre particulier, qui doit reposer sur un fondement MÉTAPHYSIQUE auquel je
fais quelques allusions. Vous avez procédé en cela comme mes ennemis : par un petit
déplacement de l’expression, vous m’avez fait dire ce qui n’a jamais été dans mon intention. Si
vous m’aviez cité LITTÉRALEMENT, comme partout ailleurs, cela n’aurait pas marché.
4) L’article IX ! Dois-je vous dire qu’il est la partie honteuse* de votre livre ? Oh non, vous
9

le savez sans moi, car vous n’y avez pas suivi votre conviction ; c’est en poussant des soupirs
que vous avez été infidèle à ma philosophie : scio meliora proboque, deteriora sequor , c’était là
10

votre maxime ; ce n’est pas la connaissance qui vous a fait défaut, seulement le courage, le
courage de dire, face à un public protestant et rationaliste, optimiste, plat et tordu, le sens
véritable de la tragédie, tel que je l’ai mis en évidence, celui qui a pour fondement tout mon
pessimisme et ma morale ascétique, tout en servant à les confirmer en retour. La terreur et la
pitié d’Aristote relèvent d’une conception très SUPERFICIELLE. Mais moi, je suis allé ici, comme
partout ailleurs, 10 toises plus en profondeur que les autres, et vous le savez. Il est certain que
cela aurait demandé BEAUCOUP DE COURAGE, et aussi beaucoup de papier pour en exposer la base.
La belle et noble maxime de Voltaire : point de politique en littérature ! il faut dire la vérité, et
S’IMMOLER* — n’est que pour les HÉROS, ceux qui disent : « Je dis la vérité, je fais la justice, etc.
» Je vous pardonne donc sincèrement cette infidélité, mais vous ne devez pas penser que je vous
préfère à saint Pierre, lequel a calomnié 3 fois son seigneur et maître, par manque de courage. Et
comme j’ai dû vous plaindre, lorsque je vous ai vu obligé, en ce passage et encore p. 104, de
suivre le principe protestant de la justice poétique — que tous les grands tragiques, Sophocle,
Shakespeare, Calderón, Goethe ont RAILLÉ. Quelle est la faute de Desdémone, d’Ophélie, de
Cordélia ? — celle d’Egmont, du vaillant prince, d’Œdipe ? — même Lear ! une erreur due à la
sénilité. Même Schiller, qui a laissé Don Carlos et Posa se finir de façon misérable, a pu se
moquer de ce principe et impératif catégorique protestant de la justice poétique :
Si le vice se rend, la vertu se met à table .
11

L’effet positif de cet article IX, c’est que j’ai écrit une jolie page sur la justice poétique ;
12

comme tout le reste de ce que j’écris encore maintenant, c’est en vue de nouvelles éditions,
qu’elles soient posthumes ou anthumes. Ce n’est que chez moi que même la comédie, dans son
opposition à la tragédie, reçoit son explication véritable. Nous ne rions aucunement de ses
personnages de façon continue. J’espère que vous pourrez digérer ces critiques et que vous serez
capable de les prendre à cœur.
Il faut encore louer le fait que vous citiez bon nombre d’écrivains anciens et confirmés,
alors que vous ne prenez pas en compte l’esthétique des Quatre Âges du monde de Schelling, ni
Hegel et ses compagnons, ni le douceâtre Monsieur Solger , etc. Mais que vous ayez même lu
13

HELVÉTIUS, le bon Dieu vous le rendra : lui-même lit souvent Helvétius. Cela me réjouit
beaucoup lorsque vous présentez des passages de moi, mais je me réjouirais encore davantage si
vous vouliez bien les regarder de plus près pour les corriger. Vous avez peut-être corrigé la
grande coquille p. 30 dans les errata : mais qui regardera les errata ? Or p. 78 se trouve «
befragen » au lieu de « befragend » ; p. 108 « Brav » au lieu de « Bav » ! p. 140 la première
occurrence de « zu thun » est superflue ; p. 183 « befeindet » (un mot impossible) au lieu de
verfeindet ; et « wenn » au lieu de « dem ».
Si je tombe sur des recensions de votre livre, je vous en ferai part, mais à vrai dire je
consulte bien peu de revues ; depuis 1848, la plupart ont disparu, ou ont été supprimées, du
moins ICI. Cela sera beaucoup plus facile pour vous dans la Salle de lecture royale . Je parie que
14

bon nombre de choses ont été imprimées sur moi alors que je n’en sais rien.
Ce serait une excellente raillerie que de demander à Fichte publiquement , dans une revue,
15

où se trouve le passage de moi qu’il cite, en disant que vous connaissez pourtant assez bien mes
écrits et que vous ne parvenez pas à le trouver, et que d’autre part vous ne pourriez pas croire que
Monsieur le Professeur se soit livré à une falsification. Nous le verrions alors se tordre à faire
pitié. Peut-être ne sait-il pas lui-même d’où il l’a tiré. Soit dit en passant : dans les Münchner
Gelehrten Anzeigen du 9 février, le livre de Fortlage a été humilié et mis à bas par Monsieur
Prantl , qui est lui-même un…………
16
Que vous ne dormiez pas est très grave : le sommeil est la source de toute santé et le gardien
de la vie. Je dors encore mes 8 heures, la plupart du temps sans aucune interruption. Vous devez
absolument marcher d’un pas rapide pendant 1 heure ½ par jour, en prenant sur le temps
consacré aux loisirs sédentaires ; en été, prendre beaucoup de bains froids ; si vous vous réveillez
la nuit, surtout ne pas penser à des choses intelligentes ou intéressantes, mais aux choses les plus
fades avec beaucoup de variations, mais dans un LATIN bon et correct ; c’est là mon remède :
probatum est. La grammaire et la syntaxe embrouillent les sens. Dans le pire des cas, il faut avoir
recours au remède de Franklin : se lever, découvrir le lit et après avoir marché pendant 2
minutes, dans sa chemise de nuit, on se recouche — c’est presque infaillible.
Je vous renvoie la lettre du vieux ; elle aurait pu aussi bien rester là-bas. Déchiffrer cela
revient à casser une noix dure en découvrant ensuite qu’elle est creuse. Vous avez entièrement
raison dans ce que vous dites de lui .
17

En vous souhaitant de tout cœur sommeil et santé

Francfort s. M., votre


le 17 févr. 1853. Arthur Schopenhauer.

290. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Il y a environ huit jours, mon cher ami, vous avez reçu une longue lettre de moi, contenant
également celle de Dorguth. Aujourd’hui, je vous écris seulement pour attirer votre attention sur
un nouveau livre du prof. Noack de Giessen : La Théologie comme philosophie de la religion,
2

250 p. Insignifiant en soi, il a beaucoup d’importance pour ma philosophie. Car pendant les 20
premières pages, on y expose in extenso ma métaphysique et ma philosophie de la nature, peut-
être dans un jargon hégélien, mais en faisant quand même usage de mes expressions (volonté de
vie qui s’objective graduellement, etc.), et même les passages d’Euler et de Goethe que j’avais
cités le sont également, mais malgré tout cela, JE NE SUIS PAS MENTIONNÉ dans tout le livre. Tout
est donné comme si c’était proprio marte ! Ce faisant, l’athéisme de la chose se trouve tellement
souligné que cela paraît téméraire pour un professeur de philosophie.
D’une part, c’est un témoignage éclatant de la violence de ma vérité qu’elle soit connue et
enseignée par ceux qui me détestent au point de répugner à écrire mon nom. Mais d’autre part,
quelle disposition vile ne faut-il pas avoir pour étudier un livre avec tant de sérieux, s’en
approprier le contenu et le reproduire — et pour vouloir en dissimuler l’auteur. Ensuite, quelle
bêtise de croire que de nos jours personne ne s’en apercevra, mais qu’on attribuera la sagesse à
Monsieur CRAPULE ; et enfin, quelle infamie de ne pas s’inquiéter qu’on le découvre — en se
fiant au fait que les professeurs de professeur se croient tout permis à mon égard ; et cela
justifierait la tentative de faire de ma vérité sans plus d’égard un bien commun, afin de remplir la
caisse vide et endettée de la philosophie allemande, pour le plaisir de la nature commune voire
BASSE de ces messieurs, tout en m’ignorant comme auparavant. Avec cela, croyez-vous encore
que j’en aurais trop fait avec les professeurs ?! Regardez leur comportement de 1813 à 1853.
Je souhaiterais beaucoup que vous passiez en revue ce livre, le plus tôt sera le mieux, et en
particulier que vous lisiez les 20 premières pages : j’espère que cela vous décidera à en faire une
recension, car il a toute sa place sur votre forum, et que vous dévoilerez cette infamie en public,
avec sang-froid. Il faut encore noter que cette personne adopte et promulgue uniquement ma
métaphysique, et qu’elle ignore l’éthique et l’esthétique qui en découlent, aussi solidement
enlacées qu’elles soient — comme si quelqu’un capturait un animal, le coupait au milieu, croyant
que la partie avant survivrait toute seule, et voulait donc l’atteler devant son carrosse.
En vous souhaitant un sommeil ferme et par conséquent une bonne santé

Francfort s. M., votre ami


le 26 févr. 1853. Arthur Schopenhauer.
291. AU COMMISSAIRE-PRISEUR LIPPERT 1

Monsieur le commissaire-priseur Lippert, Halle

Monsieur,

Vous ne m’avez pas indiqué la personne à laquelle je devais payer les livres envoyés ; c’est
pourquoi depuis, j’attends en vain vos instructions.
Je ne sais où trouver des autographes. L’année dernière, il y en avait de nombreux et
précieux dans une devanture de la Zeile. St-Goar ou la librairie Hermann pourront vous dire où
c’était. Je ne le sais pas.

Francfort s. M. votre tout dévoué


26 févr. Arthur Schopenhauer
1853.
292. À ERNST OTTO LINDNER 1

Très estimé Monsieur le Dr. Lindner,

Je vous envoie ci-joint une petite photographie , dans l’état où je l’ai trouvée : j’ai déjà
2

donné la plupart de celles qui sont mieux réussies, et je dois garder les autres, car elles ont été
incluses dans ma disposition testamentaire . Contentez-vous donc de celle-ci qui pourra en tout
3

cas vous servir à rafraîchir le souvenir de ma personne.


Mes meilleurs remerciements pour le grand éloge que vous m’avez adressé par 4

l’intermédiaire de la voix retentissante de la tante Voss, ainsi que pour les nouvelles concernant
mon vieil ami Lowtzow .5
Je me réjouis de tout cœur de votre impetus philosophici et du zèle qui s’y rattache, et je
6

vous prie de garder également à l’avenir un souvenir amical de

Francfort s. M. votre serviteur dévoué


le 24 mars 1853. Arthur Schopenhauer.

293. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je ne puis m’empêcher, mon cher ami, de vous adresser mes sincères remerciements pour la
fidélité et la ferveur infatigable avec laquelle vous surveillez tout ce qui se passe autour de ma
philosophie, afin de pouvoir m’en informer, car sinon, je n’aurais rien appris de tout ce que vous
me rapportez, excepté la recension du Dr. Lindner, qu’il m’a envoyée. Je suis très satisfait de
cette dernière, car elle exprime de façon pertinente ce que j’ai en plus : mon être « authentique et
sincère ». Selon son souhait, je lui ai envoyé un daguerréotype, que vous avez vu : comment le
trouvez-vous ?
Si l’on vous fait des éloges, cela me réjouit de tout cœur, même si ce sont de choses que je
blâme, car j’aime volontiers constater qu’on honore le champion de ma philosophie.
Non seulement Kilzer s’est procuré toutes mes œuvres, afin que son fils puisse amener un
exemplaire à l’université, mais il a également passé commande de la PREMIÈRE édition de mon
ouvrage principal, pour les passages éliminés dans la 2 : une tendance au fanatisme tout à fait
e

réjouissante !
Récemment, un prof. de droit de Heidelberg a dîné à la même table que moi, Kilzer, Emden
et d’autres, alors que je n’avais jamais échangé avec lui que quelques mots de politesse ; mais
suite à l’impression que lui avait faite ma personne, il s’est décidé à étudier sérieusement ma
philosophie, et a pour ce faire demandé à Kilzer des instructions écrites. L’autre jour, le neveu de
Noack , étudiant, est venu me voir pour la deuxième fois, en apportant le « livre d’or » qu’il
2

venait d’acquérir, afin que je sois le premier à y laisser ma griffe.


Sur une page et en quelques lignes, l’Histoire de la philosophie de Noack contient une
3

présentation si complète de mon système, en ébauche et en miniature*, qu’il n’aurait pas pu la


rédiger de cette manière sans l’étude constante et approfondie de mes écrits. L’esprit de la vérité
a donc dû s’emparer de lui et tout de suite après, dans sa Théologie, il a exposé sans façons la
chose comme une vérité objective, comme si elle avait poussé sur son propre fumier . Cela 4

restera toujours une injustice, même s’il se décharge de son intention de plagiat en renvoyant à
son Histoire de la philosophie. Laissez-le donc courir, si vous ne voulez pas vous en occuper.
Fichte, à en juger seulement d’après votre rapport, semble donc vouloir concéder, réflexion
faite, qu’on se discrédite en blâmant trop fort ce qui est authentique. Car après m’avoir assimilé
dans le cahier précédent à Feuerbach en tant qu’athéiste, il trouve maintenant ma doctrine «
5 6

spirituelle » ! Dans ma philosophie, il déplore l’absence d’un « espace de jeu pour l’activité
autonome »… des professeurs de philosophie ! Voilà qui serait pour moi une belle confrérie !
Mais moi je suis censé faire le « i » pour que ces messieurs puissent y poser le point. Par ailleurs,
autant je suis persuadé que JAMAIS on ne dépassera ma philosophie dans la dimension
longitudinale, autant elle admet encore, en largeur, beaucoup d’enrichissements, et des
commentaires, explications, éclaircissements, applications, pour toutes ses parties. Si ma manière
de penser n’était pas « singulière », eh bien, elle serait justement celle de ces messieurs, quod
Deus avertat .
7

J’ai découvert que la sus-nommée Theologie als Religionsphilosophie de Noack avait été
rageusement mise à bas dans les Literatur-Blätter de Menzel du 19 mars, sous le titre « Presse
8

anti-chrétienne », uniquement à cause de l’athéisme de son contenu. Cela ne nuit pas au livre : le
monde entier sait que ce Menzel, le dénonciateur, est le cagot le plus misérable, ou le Tartuffe le
plus indigne. On n’y parle pas de moi : celui-là ne connaît pas ma philosophie.
J’ai également reçu et déchiffré une autre longue lettre du vieux : il m’expose son réalisme
et son argument du trébuchement . Heureusement que grâce à une pratique de nombreuses
9

années, il est immunisé contre mon silence.


Je n’ai pas vu d’annonce de votre livre , sauf dans la Monatschrift. Malgré votre vigilance et
10

la mienne, je crois qu’environ ¼ de ce qu’on imprime à mon sujet nous échappe entièrement.
Et maintenant, vieil ami fidèle, à une prochaine fois,

Francfort s. M., Portez-vous bien !


le 30 mars 1853. Arthur Schopenhauer.
294. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Monsieur le Docteur Lindner,

Mes remerciements chaleureux pour vous être donné la peine de vous rendre à Schöneberg
afin de retrouver mon vieil ami, le Baron (tout Schönebaerg, l’ancien comme le nouveau, ne
l’appelle qu’ainsi) ; et de même pour les fruits de sa Muse humoristique, composée d’allégories
avec la prose rimée, et compréhensible seulement pour lui et ses amis, ou ennemis ; c’est
pourquoi il serait meilleur marché pour lui de les leur adresser en privé, mais il appartient aussi à
ses traits de caractère de gaspiller l’argent en suivant n’importe quel caprice, du moment qu’il a
le vent en poupe. Il récite parfois des vers que j’ai prononcés il y a une vingtaine d’années , mais
2

qu’il a peu à peu falsifiés et mutilés dans sa mémoire ; et là où j’aimais à placer une figure de
rhétorique en espagnol, il arrive avec une maxime espagnole dont chaque mot est une
3

approximation, de sorte que ce n’est plus de l’espagnol. Eh bien, je vois qu’il ne m’a pas oublié.
Ce que vous dites sur le peu d’efficacité des articles dans les revues savantes est tout à fait
pertinent et juste. Je ne m’en étais jamais aussi clairement rendu compte. Et il est également très
possible que les articles dans les revues politiques, bien qu’ils ne puissent aller en profondeur,
soient en fait beaucoup plus efficaces.
Si vous écrivez sur la musique, j’espère que vous prendrez en compte ma métaphysique de
la musique, à laquelle j’attache beaucoup de valeur. Noack est le premier à l’avoir exposée,
4

même si c’est très brièvement, dans son manuel d’histoire de la philosophie qui vient de paraître.
Mais si, dans vos articles, vous voulez sérieusement vous référer à ma philosophie, comme
vous le laissez entendre, eh bien, c’est justement maintenant qu’une occasion sans égale se
présente : à savoir les tables tournantes , qui feront véritablement triompher ma philosophie. Car
5

je suis persuadé que la force qui y intervient n’est nullement l’électricité, mais la VOLONTÉ, qui
dans ce cas se montre dans sa caractéristique MAGIQUE, c’est-à-dire par son influence tout à fait
immédiate sur des corps étrangers, comme elle ne le fait d’habitude que sur le corps propre. Ceci
est particulièrement clair dans un article de BONN du 9 avril, repris de la Kölnische Zeitung par le
Konversationsblatt de la Postzeitung d’ici : « la table bougeait selon la VOLONTÉ commune de
ceux qui la touchaient : elle se mit en marche sur ordre, comme le soldat le plus régulier, en
avant, à droite, à gauche, en arrière, elle montait même, aussi bien qu’elle le pouvait », etc. La
lecture de cet article est tout à fait recommandée. Même ici, j’ai entendu des confirmations par
oral du fait que la table était dirigée d’après la volonté intérieure de ceux qui la touchaient. Cela
sera mis partout en évidence, et ainsi l’affaire sera une preuve forte et évidente non seulement de
ce que j’ai dit dans la Volonté dans la nature, plus précisément dans le chap. « Magnétisme
animal et magie », mais également de toute ma métaphysique. J’aimerais que vous lisiez ce
chapitre avec attention ; il faut y ajouter Parerga, tome 1, p. 295 . Dans les tables tournantes, la
6

volonté se montre dans son omnipuissance originaire : si elle dirige le mouvement, elle est
également le moteur. Qu’on ait tout de suite pensé à l’électricité provient simplement d’une
habitude selon laquelle on attribue à l’électricité tout ce que l’on ne sait expliquer, parce que
cette dernière est elle-même un secret évident et inexplicable. Ce n’est qu’ ACCIDENTELLEMENT
que de l’électricité peut se libérer, surtout quand on transforme la table, comme à Kassel, en un
gâteau de résine, enveloppé d’aluminium, et que l’on plonge les mains dans l’eau salée ; on peut
dire alors que l’électricité est tirée par les cheveux, au sens intellectuel comme au sens physique.
Entre-temps, la déviation de l’aiguille d’une boussole, évoquée à la p. 295 citée plus haut, a
également été effectuée publiquement à Londres, par Prudence Bernard, devant beaucoup de
savants, who acted as jurors, parmi eux Brewster, le fils : rapporté par le Galignany’s
messenger, oct. 23, 1851 ; et aussi en Allemagne, par la somnambule Kachler, citée par
Ennemoser, Manuel de pratique mésmérienne, et évoquée par Menzel, Literaturblatt du 23 juin
1852.
En remettant donc l’affaire à votre aimable attention et en me recommandant à votre bon
souvenir

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 17 avril 1853.
295. À ERNST OTTO LINDNER 1

Mon cher Monsieur le Dr. Lindner,

Votre zèle me plonge dans l’étonnement : à peine vous avais-je fait signe et voilà que vous
avez immédiatement rédigé un article considérable dans le sens indiqué, en sacrifiant à ma gloire
2

toute une page de votre widely circulating journal. Eh bien, vraiment, avec de tels apôtres aussi
zélés et actifs, ma philosophie finira immanquablement par s’imposer, malgré toutes les
résistances de ceux qui sont pourtant censés la diffuser. Les symptômes s’en multiplient ; à ce
sujet voir plus bas. Je suis très satisfait de votre article : vous avez bien choisi et utilisé les
citations. Il n’y a qu’une chose dont je regrette l’absence : j’aurais souhaité que vous eussiez
vraiment lu le rapport de Bonn évoqué dans ma dernière lettre, en citant les passages principaux
qui parlent de toutes ces actions et contre-actions de la volonté sur les mouvements de la table ;
c’est cela en premier lieu qui aurait pu fournir un motif véritable à votre article. Eh bien, on ne
manquera pas de découvrir sous peu quelle est la force agissante, car tout le monde se livre à des
expérimentations. S’il s’agissait d’électricité, nous devrions tous être des gymnoti electrici et des
torpedines : mais bien au contraire, l’homme, dans son état normal, n’émet pas d’électricité, car
3

s’il pose sa main sur l’électroscope, ce dernier ne bouge pas, mais s’il frotte ses pieds sur le tapis,
les petites feuilles dorées s’écartent, en indiquant le E produit par cette petite FRICTION et dont le
conducteur est simplement le corps.
L’article qui suit le vôtre est un pêle-mêle et un parfait modèle de ce que j’ai appelé
(Parerga, II, § 284) le style subjectif : cela ne devrait pas être permis dans un journal grand
public.
Ma philosophie vient de prendre pied en Angleterre, ce que j’ai appris par le plus curieux
des hasards : mon seul ami intime d’ici, le Dr. Emden, qui n’a pas coutume de lire les journaux
anglais, avait exceptionnellement pris, parmi les nombreux journaux anglais présents dans le
Grand Club, l’Economist, un hebdomadaire commercial et industriel, et en l’ouvrant, à la p. 399,
mon nom lui a aussitôt sauté aux yeux. Car en guise de dessert, on y donne des comptes-rendus
du contenu des grandes reviews, et l’on y dit que dans la Westminster Review n VI, avril, la 3
o e

recension portait sur moi, en présentant un rapport de 14 lignes de cette dernière, ce qui fait le
4

double de n’importe quelle autre ; mais il n’y a là que des fadaises défavorables, ce qui
n’implique pas que la recension elle-même le soit également. J’ai immédiatement passé
commande de cette review auprès d’Artaria et je devrais la recevoir d’ici le 23 mai. Il est
5

probable qu’on puisse déjà la trouver à Berlin, en premier lieu à la Salle de lecture royale. Si la
recension, qui de façon générale semble tourner autour de MOI, devait être d’une quelconque
importance, alors vous seriez l’homme approprié pour en parler au public allemand, que ce soit
dans l’Ausland, ou ailleurs : car ceux qui comprennent vraiment l’anglais sont toujours encore
rares. Si vous voyez le Dr. Frauenstädt, je vous prie de bien vouloir lui faire part de cette affaire
et de lui dire également de chercher mon nom dans le grand Konversations-Lexikon de Meyer, où
depuis déjà 2 ans se trouve un article remplissant 3 colonnes colossales que lui et moi avons
rédigé ensemble, sans que nous le sachions.
Veuillez recevoir mes remerciements chaleureux pour votre participation active qui un jour
sera digne d’éloges, et que le ciel vous envoie bonheur et santé, comme le souhaite sincèrement

Francfort s. M., votre serviteur dévoué


le 27 avril 1853. Arthur Schopenhauer.
296. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens,

La nouvelle de votre départ pour Rome m’est parvenue de façon si inattendue que je ne puis
2

à présent m’empêcher de vous écrire là-bas au sujet de nos affaires communes, n’ayant pu le
faire plus tôt parce que je n’avais pas votre adresse.
Cela concerne d’abord la lettre de Friedrichsen de l’année 1843, qui m’était adressée, et que
je vous avais envoyée en août dernier en répondant à une demande pressante de votre part, mais
3

tout en remarquant explicitement que cela devait se passer sous une condition, et dans la ferme
confiance qu’après l’avoir examinée et éventuellement copiée, vous alliez me la renvoyer, eu
égard à son importance. Mais vous ne me l’avez pas renvoyée, pas même après que je vous ai
écrit explicitement trois fois à ce sujet ; de plus, vous avez traversé ma région lors d’un voyage
sans me la déposer ou me faire au moins part de votre présence. Or cette lettre contient le
formulaire de notre procuration pour le bail emphytéotique de Dietrich et elle constitue donc un
document nécessaire dans notre conflit actuel à Dantzig. Je dois donc vous demander de me la
faire parvenir de toute urgence de Rome, si vous l’avez emportée avec vous, et dans le cas
contraire, de Bonn, où se trouve certainement quelqu’un qui s’occupe de vos papiers.
À Dantzig, les négociations dans l’affaire de Dietrich ont été amenées devant le tribunal par
la Commission des dédommagements. Le Dr. Emden a rédigé une protestation qui expose de
façon tout à fait éclairante nos droits face aux exigences de la veuve D. et que j’ai envoyée
directement à la Commission ; selon ma proposition le commis R. Abegg a cosigné en votre nom.
Il m’a demandé de vous faire part de cela et de l’affirmation de Dietrich selon laquelle elle serait
propriétaire, car il ne sait où vous séjournez et il est resté sans instructions de votre part. À en
juger d’après sa dernière lettre, il se trouve à présent en Angleterre.
Je n’ai pas encore reçu cette année la part de l’affermage de ma sœur décédée dont vous me
faites aimablement bénéficier jusqu’à la fin de ma vie. Il est exclu que cela soit de votre faute ;
c’est plutôt celle de vos mandataires, et je ne sais de qui il s’agit. J’ai certes trouvé les mots
suivants dans votre lettre du 1 mai 1850 : « J’ai écrit à M. Abegg pour que, aussi longtemps que
er

je possède une part du terrain d’Ohra, il vous verse directement les 150 Rth, surtout si je ne
devais pas me trouver près du Rhin. » Or, comme auparavant, j’ai toujours reçu directement de
vous cette part d’affermage, je ne me croyais pas autorisé à l’exiger d’Abegg, et je lui ai
simplement écrit que je ne l’avais pas reçue cette fois et que cela ne dépendait certainement pas
de vous, mais de ceux qui en étaient mandatés. Comme j’ai bien naturellement compté sur cette
part d’affermage, après vos promesses tant répétées, je dois vous prier de bien vouloir ordonner
qu’on me la verse comme d’habitude.
Avec la plus haute considération j’ai l’honneur d’être

Francfort s. M. votre
le 7 mai serviteur dévoué
1853. Arthur Schopenhauer.
297. À ERNST OTTO LINDNER 1

Très estimé Monsieur le docteur !

Cela réconforte vraiment mon cœur, que dans l’âge où les amis de jeunesse sont presque
tous décédés, on trouve des amis nouveaux et jeunes qui dépassent ceux de jadis en sympathie et
en ardeur, et cela vaut doublement lorsque nous devons ces nouveaux amis non pas au hasard ou
à de communs accords, mais à la part la meilleure et la plus noble de notre être. Je suis tellement
heureux d’avoir acquis quelques-uns de ces jeunes amis, mais parmi tous vous êtes le plus alerte,
car non seulement vous exaucez mes souhaits, mais vous les anticipez avant même que je n’y
pense. C’est donc ainsi que cela s’est passé avec la W. Review, que vous m’avez procurée 3
semaines avant Artaria, et que je vous renvoie ci-joint avec mes remerciements les plus vifs.
L’article m’a fait grand plaisir et je l’ai lu 3 fois. Vous avez entièrement raison dans tout ce que
vous en dites. La chaleur de cet homme est remarquable, et l’on voit qu’il tente de l’estomper,
par peur d’apparaître comme le partisan d’un hérétique athée et diabolique : ses louanges
s’emballent avec lui, il les tient donc en bride et tire le mors, en venant avec des restrictions et
des protestations, tout particulièrement à la fin. Mais les Anglais s’en apercevront et la chose ne
manquera pas de faire mouche. Les passages traduits sont très bons ; la satire de la Quadruple
Racine surtout est rendue de façon tout à fait excellente. Il semble quand même avoir compris,
dans l’ensemble, la philosophie de Kant : la métaphore des lunettes vertes n’est pas mal. La
présentation de mon système est certes très insuffisante, surtout celle de la partie éthique, et de
façon générale l’intégrité et la parfaite unité du système n’y sont pas évoquées ; ni le primat de la
volonté et l’aspect secondaire de tout ce qui est intellect. Ce qu’il y a de mieux, c’est, comme
vous le dites, le début, à savoir la description de mon rapport aux professeurs et de la misère de
ces hommes, surtout le triple nothing. Par common sense, un tel homme entend uniquement tout
philosophème réellement intelligible, par opposition au non-sens des charlatans qui visent la
tromperie. Pour nos professeurs, cet article représente une nouvelle et véritable calamité : ils n’en
feront pas d’annonce, et l’enverront au diable. Cela me réjouirait d’autant plus si vous, excellent
apôtre, trouviez des moyens et une voie pour en faire part plus largement aux Allemands,
puisque vous êtes l’un des rares qui comprennent vraiment l’anglais, et que tous les autres
manquent en cela ou de capacité ou de volonté. Les 6 premières pages mériteraient d’être
traduites en entier, voire la totalité : mais où ? Nous avons en effet de nombreux journaux
littéraires : il y en a 2 qui s’appellent Ausland, ou quelque chose de semblable. Eh bien, je vous
fais confiance. Je crois, ou je suppose, que l’auteur de la Wm est Smith , celui qui a traduit tous
2

les écrits populaires de Fichte, comme on peut le lire sur la couverture du journal, et qui se
mordille les doigts en attendant de me traduire, si seulement le public et les éditeurs étaient
favorables. Sans aucun doute, les prêtres anglais sont d’ores et déjà en colère et en tenue de
combat.
À propos de Kossak , je pense que le commentaire concernant son « défunt » se trouve dans
3

la recension du livre de Frauenstädt, dans le dernier numéro du Repertorium de Leipzig, là où


l’on reproche à Fr. de citer, au lieu des hommes de la « modernité », des écrivains désuets du
passé, dont 3 sont cités en exemple : Helvétius, Kant… et moi ! Car après que les misérables ont
étouffé ma naissance pendant 35 ans, empêchant ma venue au monde, et que j’ai malgré tout
réussi à percer (comme le décrit l’Anglais), ils voudraient désormais m’assassiner vite fait, me
faire passer pour un mort, voire pour le fossile d’un monde lointain. Ne sont-ils donc pas des
crapules ? Mais attendez ! Je vais vous montrer que je ne suis pas mort. En outre, le gaillard du
Repertorium est très probablement Hartenstein, un adepte de Herbart.
La VOLONTÉ comme agent des tables tournantes reçoit une confirmation des plus solides
dans un excellent article d’un Américain important, dans le Galignany du 3 mai, reproduit dans
le Times du 5 mai et dont vous avez sans doute déjà rendu compte ; dans le cas contraire, vous
devriez le faire sur-le-champ : c’est de l’eau pour mon moulin ! Et en général, il y a des progrès
formidables en magie ! Bientôt on dira : « Et maintenant viens, vieux balais, depuis longtemps
déjà tu as été mon valet . »
4

Le Dr. Frauenstädt me prie de lui faire un résumé de la Review anglaise, mais cela me
demanderait d’être trop généreux de mon temps et de mon travail. Ayez l’amabilité de lui dire
que je suis persuadé que s’il vous tient un joli discours comme il faut, en vous faisant
comprendre que vous lui rendriez un grand service non seulement à lui, mais également à moi,
vous pourriez vous résoudre à lui consacrer une heure et à lui lire la chose en allemand ; comme
je le ferais s’il se trouvait ICI.
J’ai reçu hier du conseiller secret John à Naumburg , un vieux camarade d’ÉCOLE, votre page
5

de journal sur la Volonté dans la nature et les tables tournantes, afin que j’en prenne
connaissance : il pense que l’auteur pourrait en être Gruppe. C’est ainsi que les amis jeunes et
vieux se fécondent, et je demeure en toute sincérité

Francfort s. M. votre
le 9 mai 1853. Arthur Schopenhauer.
298. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Monsieur le Dr. Lindner,

Dans mon courrier d’hier, j’ai oublié de vous demander, au cas où vous deviez traduire
quelque chose de la Review, de bien vouloir éviter à tout prix de rendre l’expression
misanthropic. Car suite à la vie retirée que je mène, les mauvaises langues d’ici parlent déjà de
choses semblables ; pour eux, tout est bon pour exercer leur vengeance.
Comme je sais à quel point vous êtes prompt, je me dépêche de vous le rappeler et je vous
salue amicalement

Francfort, Arthur Schopenhauer.


le 9 mai 1853.

299. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Monsieur le Dr. Lindner !

Votre activité apostolique a atteint un niveau qui ne me permet plus de m’estimer tranquille,
en pensant vous avoir dédommagé avec un daguerréotype très moyen. C’est pourquoi je prends
la liberté d’en faire suivre un deuxième, beaucoup plus réussi , même s’il n’est pas encore parfait,
2

et qui de plus sort tout frais du four.


Votre envoi m’a fortement réjoui. D’abord, tous mes remerciements pour Madame votre
3

épouse , qui s’est chargée d’un travail qui doit tout de même être énormément abstrait et
4

métaphysique pour une dame. Et quand je pense à ce jeune couple marié qui sacrifie son temps et
se donne de la peine pour travailler à ma gloire, alors il faut dire que cela est réellement touchant
pour un vieux gaillard.
Les renforts anglais sont arrivés au moment opportun, mais que feraient-ils en Allemagne
sans votre table d’harmonie ? C’est ainsi qu’un certain Ritter de Göttingen (une triste figure)
5

vient de terminer une Histoire de la philosophie depuis Kant , étalée dans 3 longs articles de la
6

Deutsche Monatsschrift, sans prononcer la moindre syllabe à mon sujet, et en assurant en guise
de conclusion que les 3 sophistes postkantiens seront vénérés par la postérité à l’égal de Platon et
d’Aristote. C’est justement pour ce genre de choses que l’Anglais vient au bon moment.
Il est vrai, cependant, que seul un journal comme le vôtre fournit une réclame adéquate, car
il doit compter environ 30 000 lecteurs par rapport auxquels les quelques centaines de lecteurs
d’un journal savant paraissent peu importants. Certes, un public aussi large est nécessairement
très hétéroclite, mais les meilleurs de chaque spécialité s’y retrouveront également. En attendant,
ce grand public est encore limité : premièrement, parce qu’il n’est constitué que de CEUX qui
précisément lisent VOTRE journal, et deuxièmement, parce que ce dernier est cadré presque
exclusivement sur la Prusse et toute l’Allemagne du Nord, mais qu’il arrive très peu en
Allemagne du Sud ; comme le montrent déjà ici nos trois grands Cercles de lecture qui n’en
reçoivent aucun. C’est pour ces raisons, et parce que votre traduction, qui dans l’ensemble est
très bonne et juste, existe effectivement et doit donc être mise à profit, que j’aimerais que vous la
confiiez à un libraire quelconque qui l’imprimera comme il faut pour la vendre comme pamphlet.
Car par cette voie, elle jouira d’une existence plus durable que dans des journaux si éphémères,
et elle pourra également être lue dans un contexte adéquat, et non sous forme de fragments que
presque personne parmi des centaines de lecteurs ne serait capable de rassembler. Ce type
d’impression, qui rassemble ce qui était dispersé dans des journaux, est à présent très courant,
même ce Ritter évoqué plus haut le fait avec son Histoire indiciblement ennuyeuse des
philosophrastes postkantiens ; de même l’auteur de la recension honnête du dictionnaire de
Grimm, dans les Münchner Gelehrten Anzeigen, & & . En ajoutant le peu qui a été omis, un
ca ca

avant-propos, et peut-être quelques notes, pour lesquelles Frauenstädt se fera certainement un


plaisir d’apporter son aide, la chose remplira largement 2 feuilles et peut-être même davantage,
et une vente de 300 exemplaires ne devrait pas manquer de lui être assurée. Hayn ou Brockhaus,
en tant que collaborateurs de ma gloire, seraient les premiers à s’en charger. Et pensez au service
que vous rendriez ainsi à nos professeurs de philosophie ! Au cas où vous devriez donc vous y
résoudre, j’ai vérifié très attentivement toute la traduction, et en marge de l’exemplaire que je
joins au portrait, j’ai essayé d’adapter certains passages de l’original avec plus de fidélité que
7

vous n’avez pu le faire en travaillant à la hâte. Vous en utiliserez autant que bon vous semble : je
vous prie seulement de ne refuser aucune modification sans l’avoir d’abord comparée au texte :
elles sont toutes bien réfléchies, et j’ai vraiment l’impression d’avoir là comme une copie plus
précise de quelque gravure sur cuivre. La ponctuation nécessite également d’être beaucoup
améliorée. J’ai même remis le « misanthrope ». Il faut traduire avec fidélité et honnêteté. Qu’est-
ce que cela peut bien faire à la fin ? Votre épilogue est TRÈS BON : surtout gardez-le. Vous devriez
8

également laisser le titre original de la chose : « Iconoclasme dans la philosophie allemande » —


à la rigueur, on pourrait ajouter « un jugement anglais sur A. S. ». Dans tous les cas, VOUS NE
MENTIONNEREZ PAS que j’ai corrigé la traduction : je dis cela inutilement et uniquement par
précaution et par crainte.
Au besoin, la traduction pourrait également avoir sa place dans le Magazin für Literatur des
Auslandes, où dernièrement se trouvait un compte-rendu, traduit du français, sur les poètes
allemands les plus récents. Mais ils ne voudront peut-être pas d’un texte déjà imprimé.
Quel gâchis que de m’envoyer 25 exemplaires ! Si je les envoyais tous au domicile des
gens, on me prendrait pour l’idiot le plus vaniteux du monde. Ce n’est qu’à une minorité de
sympathisants que je me permettrais d’en donner un — en tant que curiosum. Vous devriez en
9

envoyer un au bon vieux Dorguth, sous enveloppe fermée.


Nous verrons avec Dove ; je n’en attends pas beaucoup : tant que Humboldt vit encore —
10

lequel est compromis en tant que complice et comprend aussi peu de la couleur que des tables
tournantes —, il ne sera pas rendu justice ni à Goethe, ni à moi, dans la théorie des couleurs. Le
monde des savants allemands est une clique de valets de chambre et un compérage d’un bout à
l’autre. Dans le numéro cité de la Monatsschrift, un certain M. Helmholtz , par son article dirigé
11

contre la T. C. de Goethe, implore qu’on lui donne gracieusement un poste.


Avec mes remerciements chaleureux et mes meilleurs vœux pour votre bien-être,

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 9 juin 1853.

P. S. Vous ne confondrez certainement pas les remarques qui accompagnent la traduction et


qui sont destinées À VOUS SEUL avec des corrections. Elles portent toutes un N. B. en tête.
300. À AUGUST GABRIEL KILZER 1

Un pour vous et un pour Monsieur votre fils, avec mes meilleures salutations.

[10 juin 1853] A. Schopenhauer.

301. À UNE CONNAISSANCE 1

Au cas où ce curiosum, qui m’a été envoyé en 25 exemplaires, devait vous intéresser, j’ai
pris la liberté de vous en remettre un.
Avec ma haute considération et dévotion

[juin 1853] A. Schopenhauer.


302. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur et ami,

Votre intérêt pour ma dernière gloriola me réjouit beaucoup, même si je m’y attendais. Le
Dr. Lindner est un homme très jeune qui a été habilité comme privat-docent de philosophie à
Breslau, mais à qui l’on a immédiatement retiré son jus legendi, épinglant son manque de
conviction concernant la religion chrétienne : suite à quoi il est devenu co-rédacteur de la
Vossische Zeitung. Après m’avoir rendu visite il y a un an, il est devenu non seulement un apôtre
zélé, mais aussi un évangéliste actif au service de ma doctrine, qu’il a déjà célébrée plusieurs fois
dans des articles de son journal. Je vous joins l’avant-dernier de ces articles, puisqu’il contient la
meilleure réponse à votre question sur les tables tournantes, lesquelles apportent beaucoup d’eau
à mon moulin. Mais je vous prie surtout de bien vouloir me renvoyer cette page de journal, car je
n’en ai pas d’autres exemplaires. En revanche, il m’a envoyé 25 exemplaires de la traduction de
la Westminster Rev., dont je possède encore la moitié, de sorte que si vous souhaitez en avoir
quelques-uns, il vous suffit de le dire. La traduction a été réalisée par la femme de Lindner, qui
est anglaise, et il l’a ensuite révisée. Dans l’ensemble, la traduction est bonne et juste, excepté
quelques passages. En mai, il l’a administrée à son public, nolenti volenti , pendant 8 numéros,
2

donc par doses ; il a gardé ensuite la typographie et l’a imprimée telle quelle. Le journal compte
11 000 abonnés : je lui ai cependant conseillé de remettre à présent la traduction à un libraire, qui
l’imprimera encore mieux et la vendra comme pamphlet ; nous verrons. Mais n’est-ce pas
touchant qu’un jeune couple marié de Berlin, qui jusque-là m’était entièrement inconnu, sacrifie
son temps et sa peine pour travailler à ma gloire ? Quand une pensée importante fait son entrée
dans le monde, le monde l’accueille froidement et sans faveurs. Mais peu à peu un petit groupe
d’hommes très hétérogènes, qui se rejoignent cependant dans une certaine tendance, se constitue
autour de cette pensée, pour la défendre et la protéger. En vous comptant parmi ceux-là, quoique
dans un sens large, je vous souhaite de tout cœur bonheur, prospérité et santé.

Francfort, le 13 juin Arthur Schopenhauer


1853.
303. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Monsieur le Dr. Lindner,

Vous aurez reçu mon courrier avec le daguerréotype, mais je dois vous écrire encore une
fois, suite à une nouvelle en provenance d’Angleterre, qui est en vérité ancienne.
Hier soir, à l’hôtel, un certain Dr. Mayer de Mayence m’a abordé, un médecin que
Frauenstädt connaît personnellement ; il y a quelques années, il a consacré plusieurs pages à ma
philosophie, dans son livre Sur la rachialgie, en sonnant les trompettes. Nous avons parlé de la
critique de la Westminster, dont il aurait lu l’original, mais il s’est avéré qu’il ne l’a pas lu, et
qu’il se réfère à une tout autre critique qui se trouvait dans le même journal IL Y A UN AN ! Pour
2

satisfaire mon désir, il se dit prêt à le demander au Casino de Mayence, bien que ce dernier ait
été provisoirement fermé, depuis quelques mois, par décret policier. Mais il est en voyage vers
Vienne, et a poursuivi sa route ce matin ; il ne reviendra à Mayence que dans 6 semaines, et a
promis de m’envoyer alors le cahier en question, qu’il espère assurément obtenir auprès du
Casino sous séquestre. Quelle diable d’affaire* ! Si je passe commande chez Artaria, cela
prendra également 5 ou 6 semaines (le nouveau n’est arrivé que le 31 mai), de plus ils ne peuvent
m’indiquer exactement le NUMÉRO. Vous saisissez déjà sans doute le but de mes jérémiades : ne
pourriez-vous pas, une fois de plus, me porter conseil, débusquer le numéro sur place et me
l’envoyer ? S’il s’agit, comme il le dit, de TOUT UN ARTICLE portant uniquement sur moi, je
voudrais alors éventuellement le garder et le payer. Mais sur la couverture de NOTRE numéro avec
l’« Iconoclasm » est indiqué le contenu de tous les numéros de l’année passée ; pourtant il n’y a
là aucun article qui semble faire allusion à moi ou à la philosophie. Il doit donc s’agir d’un des
articles Contemporary Literature of… Germany…, placés à la fin de chacun des 4 numéros.
Mais lequel ? Dois-je donc attendre pendant 6 semaines avec cette puce qui m’a été mise à
l’oreille ? Je sais bien que si pouvez l’empêcher, il n’en sera pas ainsi. En outre, si l’article
s’avérait être bon, vous pourriez joindre une traduction de ce dernier à l’édition-pamphlet de la
traduction existante que je vous ai proposée. Et aussi, grâce à une belle impression, cette dernière
aura un aspect bien plus beau : cela est donc vraiment souhaitable. J’en ai envoyé un exemplaire
à Dorguth sous enveloppe fermée ; sa réponse arrive à l’instant, il me dit qu’il a envoyé ses 4
derniers petits écrits aux Anglais, par l’intermédiaire de la librairie Hinrich, « afin qu’ils se
RÉJOUISSENT de voir que mes mérites sont également reconnus en Allemagne ». Bien sûr qu’ils
s’en réjouiront beaucoup ! What the Deuce may this here non-sense mean ? diront-ils.
3

Et ainsi, en vous lançant des regards pleins d’espoir, et en vous saluant bien cordialement
quite Yours

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 16 juin 1853.

P. S. Cependant je ne puis du tout concilier la présence d’un article antérieur sur moi avec
les premières phrases de notre Iconoclasm. Et pourtant, le Dr. Mayer assure être tout à fait
certain au sujet de cette affaire.
304. À ERNST OTTO LINDNER 1

Doctor indefatigabilis !

Ce titre vous revient de droit, par analogie avec les scolastiques qui se nommaient Dr.
angelicus, Dr. subtilissimus, Dr. irrefragabilis, Dr. resolutissimus , etc. Vous avez en effet
2

déniché avec beaucoup de peine la vieille Review anglaise, et vous l’avez même recopiée in
extenso de votre propre main ! Je vous en remercie cordialement ! et avec la promesse que cela
vous sera rendu dans votre prochaine vie, selon la croyance bouddhiste. La copie est
parfaitement lisible, et ma curiosité est à présent satisfaite. Il est vrai que comparé au dernier,
l’article est faible, et une traduction en serait superflue ; et pourtant je l’accueillerais non sans
quelque plaisir , parce que l’article est très utile pour découvrir la faiblesse et l’indignité des
3

philosophes universitaires et pour montrer, par la citation de Lewes , que la philosophie véritable
4

n’habite pas les universités. Il rend compte exclusivement de mon traité Sur la philosophie
universitaire et de la proportion, ou plutôt de la disproportion, qui se trouve à son fondement et
qui est comparable à la situation où quelqu’un aurait joué et perdu toute la soirée pour s’écrier
tout à coup : « Vous êtes tous des tricheurs ! » Il indique par là qu’il attend des professeurs une
réfutation de l’accusation, et qu’un silence grand seigneur n’est plus suffisant. Mais ils ont gardé
le silence ! pas un mot ! Pourtant, les gifles qu’ils ont reçues ayant attiré leur attention sur ma
présence, ils commencent depuis lors à parler de moi comme d’un homme estimable, unus e
multis , qui pourrait également se ranger à leurs côtés. C’est ce que vient confirmer encore une
5

fois l’article de Fortlage dans le dernier Blatt für literarische Unterhaltung de Brockhaus.
L’Anglais s’y prend de façon plus sérieuse, et reconnaît mes droits dès la première review. Il a
fait ma connaissance par les Parerga, c’est manifeste ; cela l’a poussé à se procurer toutes mes
œuvres, qui l’ont plongé dans un enthousiasme qu’il dissimule aussi bien qu’il peut et doit le
faire. Et tout ceci avec le mépris dont on fait preuve en Angleterre à l’égard de la german
metaphysics, c’est-à-dire de la philosophie universitaire ! Le passage de moi qu’il a traduit est
judicieusement choisi, car il met à nu le germe et le noyau de la nullité de toute philosophie
universitaire et montre pourquoi il n’y a là nécessairement toujours qu’une poupée qui revêt les
habits de la philosophie.
Je ne puis deviner ce qu’il en est de votre innocent mystère, je me console entre-temps en
sachant qu’il se passera ce que je souhaite, mais je suis avide de voir comment cela se passera !
Le public allemand plus distingué doit d’abord être amené à croire, nolens volens , que l’étude de
6

mes écrits est nécessaire pour le salut de son âme : c’est alors qu’il l’abordera, et nous verrons
des miracles et des éditions nouvelles, pour lesquelles j’écris sans cesse à l’avance des
suppléments. Je vous prie de saluer Frauenstädt et de lui rappeler que, depuis quelques semaines,
j’espère qu’il m’apprenne combien d’exemplaires des Parerga ont été vendus.
Je vous remercie beaucoup pour les nouvelles de Lowtzow. Il est vrai qu’il a gardé pendant
une année tous mes manuscrits et qu’il les a consultés, mais c’était il y a 21 ans ! Son projet de
7

se faire entendre en haut lieu, par des vers dans un journal, est aventureux. The wish is the father
to the thought . Cependant j’en conclus que la tante Voss a également ses entrées à la Cour, où je
8

lui souhaite un public attentif lorsqu’elle parle de moi. Soit dit en passant, si j’étais ladite tante,
j’appliquerais à l’occasion à propos de bottes* les vers goethéens suivants :
Un pauvre petit pion
Qui s’agitait à peine,
S’est mis à dos fort grossièrement
Un incroyable impertinent.
Et je* sentis en moi le bonhomme,
And me pleura le bout d’homme,
Et je frappai au rustre Jeannot
Tout de suite la balafre dans la face . 9

Mais quaeritur si ce ne sont pas là des sales periculosi . Mon proverbe espagnol : de tras
10 11

de la cruz está el diabolo — se trouve à présent également confirmé à merveille.


12

Et sur ce, mes remerciements les plus chaleureux, avec mes salutations et ma bénédiction !

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


le 26 juin 1853.
305. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher monsieur et ami,

Je vous avais adressé la page de journal avec l’article sur les TABLES TOURNANTES, en vous
demandant de me le renvoyer : vous avez oublié de le faire ; et si moi-même je l’oublie
également, le document manquera dans mes archives philosophiques.
La traduction de la review paraîtra prochainement sous forme de brochure, avec quelque
chose qu’on me cache encore, probablement cum notis variorum . Lors de son passage, le Dr.
2

Mayer m’a rapporté que déjà l’année dernière, dans la même Westminster Review, se trouvait un
long article sur moi ; c’est exact : j’en ai reçu une copie de Berlin.
Si ce mois-ci vous fréquentez assidûment le concert militaire du vendredi, vous m’y
trouverez à l’occasion ; mais quel vendredi, cela je ne le sais qu’une heure avant. Je remets donc
cela à la bienveillance du destin tout-puissant auquel je recommande sérieusement, ainsi qu’à
tous les dieux, votre bien-être.

Francfort Arthur Schopenhauer


le 6 juillet 1853.
306. À ADAM VON DOSS 1

Cher Monsieur von Doss.

Je souhaite que la photographie ci-jointe vous parvienne intacte et je vous prie de l’accepter
2

comme un cadeau de ma part, car même si j’en avais fait faire une nouvelle pour vous, elle
n’aurait sans doute pas été plus réussie. Cependant les 2 pour le Dr. Kormann étaient
considérablement meilleures en ce qui concerne l’exécution technique, mais pas pour la
ressemblance. Celle-ci n’est pas non plus parfaite à cet égard ; elle date à peu près de l’époque de
votre dernière visite : mais même maintenant, je suis loin d’avoir l’air si vieux. Le retoucheur de
Kormann affirme qu’il serait impossible de me peindre de façon ressemblante, parce que j’aurais
un autre visage à chaque instant. Veuillez donc vous contenter de celle-ci. Les daguerréotypes
qui me représentent sont également très dissemblables entre eux.
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt votre longue lettre et je suis d’accord avec vous en tous
points. Vous avez écrit de façon plutôt raisonnable et convaincante. La comparaison avec Joseph 3

est très bonne. L’Anglais a raison de dire que mon caractère n’est pas des plus doux, mais je
n’aimerais pas qu’il en soit autrement, puisqu’une nature faite de lait et d’eau ne peut produire
d’œuvre : chi non ha sdegno, non ha ingegno dit un proverbe italien, très juste.
4

Ce que vous dites des tables tournantes m’a beaucoup intéressé. Le 23 avril, dans la
Vossische Zeitung, le Dr. Lindner en a fait un long article qui montre comment cela vient
confirmer ma doctrine. Malheureusement, je n’ai toujours pas eu l’occasion de le voir de mes
propres yeux, mais d’après les nombreux récits qu’on m’en a fait, je ne puis en douter : le plus
pertinent, qui est aussi le plus documenté, s’intitule « Les tables tournantes à leur plus haute
puissance », dans la Zeitschrift für die Literatur des Auslands, dernier numéro, qui est de
5

Pétersbourg — absolument convaincant. Faraday et Humboldt se couvrent de ridicule : le 6

dernier le sait et garde le silence.


Comme vous désirez savoir ce qu’on écrit sur moi, j’énumère ce qui me vient encore à
l’esprit : dans la Zeitschrift für Philosophie de Fichte, tome 21, cahier II, 2 longs articles ;7

également quelque chose dans le cahier suivant : les Questions esthétiques de Frauenstädt ;
8

plusieurs articles de ce dernier dans les Blätter für litterarische Unterhaltung, passim ; un long
article sur moi dans le Konversations-Lexikon de Meyer, nouvelle éditition ; une présentation in
nuce, curieusement juste, dans le récent et bref résumé de l’Histoire de la philosophie des temps
modernes par Noack ; dans les Unterhaltungen am häuslichen Herd de Gutzkow, sur les
Parerga ; tout au début, dans le 7 ou 8 numéro : « Un penseur indépendant » ; et dans cette
e e 9

même Westminster Review, de l’année précédente, avril 1852, environ 3 pages sur les Parega, ce
que je viens tout juste d’apprendre et dont j’ai reçu une copie par Lindner. Ce dernier va en
publier la traduction comme pamphlet, dans un texte amélioré, avec Dieu sait quoi, quelque
chose qu’on me cache : on y travaille depuis 3 mois. Beaucoup de choses écrites sur moi
m’échappent. Avant-hier, j’ai reçu une lettre de Hambourg , d’un certain Dr. Abel, ou Dr.
10

Buddel, je n’arrive pas à déchiffrer le nom, et qui s’annonce comme un admirateur enthousiaste
de ma philosophie, comme un nouvel apôtre qui voudrait même devenir évangéliste. Allons-y !
Car à 66 ans on est désormais pressé.
Et vous, mon vieil apôtre, auquel il ne manque que du courage* pour être évangéliste,
continuez à vivre avec bonheur vos fiançailles conclues depuis 3 ans, ce qui est une véritable
aubaine pour vous, car les choses s’apprécient surtout à l’état de projet, et pensez à

Francfort s. M. votre
le 15 août ami
1853. Arthur Schopenhauer
307. À PAUL BATTEL 1

Très cher et estimé Monsieur le Docteur.

Votre intérêt pour ma philosophie m’a sincèrement réjoui. C’est la puissance de la vérité qui
a produit son effet sur vous, comme sur beaucoup d’autres déjà. Car aussi peu nombreux que
puissent être jusqu’à présent les adeptes de ma doctrine, du moins dans la mesure où j’en ai pris
connaissance, ils sont en effet tous habités par le même enthousiasme que vous et dans
l’ensemble ils parlent la même langue. Ils sont tous pour moi la garantie de l’influence dont
bénéficiera un jour ma philosophie, même si cela n’aura lieu qu’à une époque où je ne vivrai
sans doute plus, car je me trouve déjà dans ma 66 année.
e
L’unique conseil que je puis vous donner, c’est de vous livrer à une étude approfondie de la
philosophie kantienne, laquelle est le fondement et la présupposition de la mienne, et ensuite, de
lire tous mes écrits : ils ne sont pas nombreux, et toutes les choses y sont plus ou moins liées
entre elles ; en outre, les répétitions ont été évitées, autant que possible. Lorsque l’on a atteint
une connaissance approfondie et une conviction personnelle, la force pour les porter à
l’expression ne fera jamais défaut.
Avec mes vœux les plus chaleureux pour le bien-être de votre corps et de votre esprit.

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


le 18 août
1853
308. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Apostole primarie !

Cela fait longtemps que je n’ai rien entendu de vous, bien que Lindner m’ait rapporté votre
joie suite à ma glorification anglaise . Cette dernière m’a en effet énormément délecté. Ce qui
2

vous échappe, c’est la grande fidélité et le soin avec lesquels l’Anglais a traduit mes passages,
vraiment con amore, sans faire l’économie de son temps ; tout le contraire des Allemands. Déjà
une année auparavant, l’Anglais avait recensé les Parerga ; ce que je n’aurais peut-être jamais
appris si le Dr. Mayer de Mayence n’était pas passé par hasard.
Les professeurs s’en tiennent toujours à leur vieille méthode contre moi, qui consiste à
fermer leur gueule, et leur crainte devant mon nom est plus grande que celle d’un dévot face au
diable : c’est ainsi par ex. que dans la recension détaillée de vos Questions esthétiques, dans les
Unterhaltungs-Blätter de Brockhaus , on mobilise contre vous tout un arsenal, mais que vous
3

ayez traité la chose d’après mes thèses fondamentales et que vous m’ayez cité d’innombrables
fois — ceci est passé sous silence, alors que c’est l’essentiel : c’est qu’il ne faut pas évoquer mon
nom. Un autre fait la recension de la prétendue Philosophie de la religion de Noack, dans le
Centralblatt, alors que je me suis déjà plaint auprès de vous de ce qu’il exposait le noyau de ma
métaphysique, et de plus avec mes expressions, sans même me nommer : le critique prétend qu’il
s’agit de la doctrine de Reiff, alors qu’il sait pertinemment d’où cela provient. Mais il ne faut pas
me nommer : c’est convenu et juré*. Lâches crapules ! Dans le dernier numéro de la Revue des
4

Deux Mondes se trouve un long rapport sur la philosophie allemande des dernières années : on y
parle en détail des prouesses géniales de Messieurs Rosenkranz, Fichte, Chalybäus, Carrière,
etc., etc. — pas la moindre syllabe à mon sujet. Les Anglais par contre jugent à partir de leurs
moyens propres, et le résultat est tout autre.
Vous aurez vu la triste figure de ce RITTER et de son Histoire de la philosophie depuis Kant,
d’abord dans la Deutsche Monatsschrift, ensuite sous forme de pamphlet : un modèle de la
5

tactique évoquée plus haut qui consiste à fermer sa gueule. Mais ce goujat a eu l’incroyable
6
effronterie de dire dans les Göttinger Gelehrten Anzeigen du 1 janv. 1853, p. 8 — quoi donc ?
er

Écoutez : « Il est impossible de ne pas comprendre que la doctrine de Kant relève du théisme
ordinaire et qu’elle a peu ou pas du tout contribué à transformer les opinions courantes sur Dieu
et son rapport au monde. » Et Monsieur le Professeur n’a pas été contredit. Mais cela montre la
moralité de la philosophie universitaire. Or, s’adonner à des mensonges, des calomnies et des
falsifications littéraires — qu’est-ce que cela mérite ?
Conrad Schwenk m’a rendu visite : nous nous entendons très bien. Il a abandonné son poste
7

de correcteur. Le pro-recteur Rödiger (lycée) m’avait déjà rendu visite auparavant. Il paraît qu’il
8

veut aussi abandonner. Le recteur l’a également fait. Je crois que derrière tout cela se trouve la
kabbale des curés. Les postes sont très bien payés.
J’espère que vous êtes revenu de votre hérésie mécanique au sujet des tables tournantes.
Laissez donc Faraday, Humboldt et d’autres se ridiculiser avec cela comme bon leur semble : j’y
trouve du plaisir. Il s’agit de l’action magique de la volonté. Regardez surtout dans la Zeitschrift
für Literatur des Auslands, début août, « LES TABLES TOURNANTES À LEUR PLUS HAUTE PUISSANCE 9

». Malheureusement je n’ai toujours pas pu le consulter.


J’ai lu votre recension de Fülleborn : elle est très bonne.
10

Faites-moi bientôt savoir que vous allez bien et que votre santé est aussi bonne que celle des
poissons dans l’eau et à Francfort

Francfort s. M., votre ami


le 19 août 1853 Arthur Schopenhauer.
309. À ADAM VON DOSS 1

Je dois vous exprimer, cher Monsieur von Doss, ma gratitude pour votre lettre très
intéressante, instructive et de surcroît remarquablement bien écrite. Vous rendriez service aux
lecteurs si vous consentiez à en publier le contenu, sans les personalia, dans un quelconque
journal, comme la Allgemeine Zeitung ; d’autant plus que bien des choses paraîtront aussi
nouvelles au public qu’elles le sont pour moi, notamment l’experimentum crucis avec l’huile,
2

dirigée contre l’explication mécaniste, et l’influence de l’obscurité. Cela offrirait d’abord un


contrepoids salutaire face aux fanfaronnades sophistiquées et à l’arrogance de Faraday et
consorts, qui ont trouvé un écho fort naïf dans beaucoup de journaux allemands et français ;
ensuite, toute cette affaire donne un subit coup de bride au matérialisme chimique, lequel a
atteint des sommets de pure absurdité, soutenu par l’ignorance incroyable de toute philosophie.
Des hommes qui ne connaissent rien d’autre que leurs cornues, leurs piles galvaniques et leurs
cuisses de grenouille entreprennent d’expliquer avec cela le monde et l’homme.
Vous faites partie de ces rares personnes qui sont trop modestes. Frauenstädt, auquel j’avais
fait part de votre dernière lettre, en écrit la chose suivante : « Par endroits, la lettre de Doss est
classique, et a été très édifiante pour moi. Un tel disciple mérite tous les respects et vous fait
honneur. De façon générale, on peut tirer des disciples une conclusion portant sur le maître. Les
hégéliens et les schellingiens correspondent tout à fait à leurs maîtres : par contre les kantiens et
les schopenhauériens — quelle différence ! » Voyez-vous* ? Quocirca vivite fortes, fortiaque
adversis opponite pectora rebus ! 3

Frauenstädt a écrit un volume, Lettres sur les vérités fondamentales de la philosophie


schopenhauérienne, précédé de la traduction révisée de la recension anglaise. L’impression n’a
pas encore commencé.
Je possède depuis longtemps l’original du livre traduit par Rechenberg et je l’ai lu avec
4

attention. Cela rend très perplexe. Les faits semblent être vrais en grande partie, et ne pas reposer
non plus sur une imposture, mais l’explication part d’opinions préconçues, et présuppose tout de
suite l’existence d’esprits individuels dans l’espace. Les fantômes faits de chiffons*, dans la
chambre à coucher du Dr. Phelps, avec des bibles étalées devant soi, sont un bien mauvais
canular. C’est au temps de venir confirmer les data .5

Avant-hier, un certain Dr. Kriegskotte de Leve-Berg était chez moi, pour me voir et
6

m’exprimer son enthousiasme. Eh oui, les signes de mon influence se multiplient, mais cela se
fait lentement et je dois répéter le proverbe italien :
Bel cavallo non morire,
Ch’ erba deve venire . 7

Que le ciel vous bénisse et vous protège !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer


le 11 sept.
1853

P. S. J’aperçois à l’instant, dans le dernier Litterar. Central-Blatt, une recension du livre de


Rechenberg, débordante de fiel et de hargne, qui doit viser quelqu’un d’autre, car il paraît
désapprouver une erreur. Finalement, on nous assure que le livre arrive trop tard, que toutes ces
choses sont déjà réglées et mises de côté. Cette affirmation selon laquelle ce qui est NOUVEAU
pour le public, et excite donc son attention, relève déjà du passé et a déjà été résolu (par quoi l’on
veut simplement faire avancer le public en l’entraînant par le bras, tel un enfant dans une foire),
est à présent un procédé très apprécié parmi les canailles littéraires ; par ex., ils m’ont déjà
appelé « le défunt S. » en me faisant passer pour un contemporain de Helvétius. Je souhaite donc
8

d’autant plus que vous fassiez part de vos expériences avec audace. Je vois d’ailleurs dans ladite
recension que la traduction de Rechenberg, avec tous ses suppléments, ne compte que 250 p. ;
l’original a 480 p. et coûte 6 f.
310. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami.

Dans votre lettre du 21 août, j’ai vu avec beaucoup de joie que vous aviez rédigé un volume
de Lettres sur ma philosophie . Personne ne peut vous souhaiter plus sincèrement que moi la
2

réussite et le succès. Sans doute en avez-vous eu l’idée par les Lettres sur la philosophie
kantienne de Reinhold , qui à l’époque avaient rencontré beaucoup d’approbation. C’est en effet
3

la meilleure façon de discuter d’un système donné, et d’exposer le pro et contra. Que Brockhaus
veuille bien s’en charger et donc également vous payer des honoraires témoigne du fait que mes
doctrines commencent à intéresser le public ; jugement qu’il porte d’après les chiffres de vente.
Dans les Blätter für literarische Unterhaltung (dont les deux tiers, soit dit en passant, sont
de la poudre aux yeux et un véritable poison, surtout les citations précisément) se trouvait
dernièrement une TRÈS BONNE recension des Leçons sur l’État d’Erdmann , dont l’auteur montre
4

clairement qu’il connaît ma philosophie, même s’il ne me nomme pas : serait-ce vous ?
J’ai encore reçu une longue lettre de 7 pages de Doss, qui est constituée d’un bout à l’autre
de récits et d’expérimentations concernant les tables tournantes, expérimentations qu’il a presque
toutes menées lui-même, avec enthousiasme. Douter de la réalité de la chose est à présent
ridicule, et je me réjouis de voir qu’à ce sujet, les empiristes, auxquels on accordait un crédit
beaucoup trop grand, se sont abondamment couverts de honte, alors qu’en même temps, les curés
l’interdisent comme étant l’œuvre du diable.
Ma colère folle contre les 3 sophistes vient de recevoir une brillante justification, dans la 2
e

édition de l’Antibarbarus logicus de Cajus , qui contient une présentation fondamentale et


5

détaillée, rédigée con amore, de l’insignifiance de toute cette agitation, et en particulier de


l’entière inanité, du vide et du charlatanisme de la philosophie hégélienne : CELA MÉRITE D’ÊTRE
LU ; même si, par ailleurs, l’auteur est un adepte insipide de Herbart, et qu’il parle de tout et de
tous, sauf de moi.
Je vous avais écrit que je n’étais pas nommé dans l’article sur la nouvelle philosophie
allemande, dans la Revue des Deux Mondes : depuis, j’ai vu que j’avais été nommé, mais
seulement nommé, sans plus*. L’article, rédigé par un Tartuffe en chef, est instructif dans la
mesure où l’on y voit vers quoi s’acheminerait la philosophie en Allemagne et en France (dans
les mains de crapules corrompues) — si je n’existais pas.
Les physiciens commencent tout à coup à se lancer dans une polémique contre la théorie des
couleurs de Goethe : pourquoi cela ? L’affaire était déjà entendue il y a 40 ans, et depuis,
personne n’en a soufflé mot. Ils ne me nomment pas, mais nous savons très bien pourquoi. Leur
polémique, y compris celle du vaniteux Dove, est mauvaise et malhonnête. Le choléra est à
Berlin et vous êtes souffreteux. Prenez garde à vous ! C’est un conseil sérieux de votre ami

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 19 sept. 1853.

311. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Très cher ami.

Tout d’abord, je souhaite que la présente vous trouve en bonne santé : vous avez donc eu
une attaque de choléra ! et même si ce n’était qu’une cholérine, cela n’en est pas moins à mes
yeux un incident terrifiant, car je suis un choléraphobe de profession et c’est seulement pour
cette raison que j’habite ici depuis 1831, dans cette citadelle contre le choléra. Prenez surtout
toutes vos précautions et ne buvez pas de bière blanche, plutôt la bière Josty riche en quassine, si
elle existe toujours. Ici, je m’abstiens moi aussi de bière : Kant détestait la bière, il n’en buvait
jamais.
Cela me réjouit beaucoup que votre œuvre soit déjà sous presse et qu’elle vous soit payée ,
2 3

ce qui est bon signe pour ma philosophie, comme je l’ai dit. Bien des gens ont déjà fait des
bénéfices avec cette dernière, sauf moi : comme de raison*. Que vous soyez l’auteur de la
recension en question me réjouit extraordinairement, car elle est excellente et la meilleure
4

contribution que j’ai lue de vous. Si vos Lettres arrivent à l’égaler, alors vous serez un homme
accompli, mais cela exige beaucoup de choses. Je suis très curieux d’en prendre connaissance.
Je vous envoie la lettre de Doss, car je remarque que vos convictions ne sont pas encore très
solides et que vous respectez les empiristes : ils devront bien voir qu’« il y a plus de choses dans
le ciel et sur la terre, etc. ! » Les tables tournantes (Times) sont à présent arrivées dans l’Inde
5

orientale, où elles suscitent en général de l’intérêt. On a attablé des Sepoys (soldats hindous) qui
n’y connaissaient rien, et ils ont reçu un choc terrible lorsque la table a commencé à avancer sous
leurs mains. C’est fort important pour ma doctrine et cela convainc les gens. J’ai en effet trouvé
récemment dans le journal de Gutzkow un article sur les clefs tournantes où l’on disait que tout
cela rejoignait MA doctrine sur la puissance de la volonté. Tiens, tiens ! À cela s’ajoute la magie
du baron Dupotet , due À LA SIMPLE VOLONTÉ : là-dessus Souvenirs de voyage de Paris, par Merk,
6

1852 , dont des extraits se trouvent dans le Konversationsblatt de la Postzeitung locale, plusieurs
7

numéros, début septembre de cette année ; ainsi que C. Scholl, Premiers Regards jetés dans le
monde miraculeux, etc., 1853 ; voilà des choses stupéfiantes : elles arrivent au bon moment.
8

L’Antibarbarus de Cajus, 2 éd. mérite d’être lu, pour la cruelle vivisection de


e

l’hégélianisme. Ces messieurs s’y prêtent très bien. Fichte et Schelling sont également disséqués
en passant.
Il y a 14 jours est venu un certain Dr. Kriegskotte , professeur dans une école du duché de
9

Cleve-Berg , un homme de grande taille, âgé de 40 ans environ, il est entré, m’a regardé
10

fixement au point que je commençais à avoir peur et s’est écrié : je veux vous voir ! il faut que je
vous voie ! je viens pour vous voir ! Il a fait preuve d’un grand enthousiasme. Ma philosophie lui
aurait rendu la vie. Charmant !
En souhaitant de tout cœur que vous soyez bien-portant

Francfort s. M., votre ami


le 23 sept. 1853. Arthur Schopenhauer.

312. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mes meilleurs remerciements, cher ami, pour vos épreuves , qui m’ont beaucoup réjoui.
2

Comme cela rend bien avec ces caractères d’impression ! Cela ira fortement à l’encontre de la
perfidie avec laquelle les professeurs me passent méthodiquement sous silence, toujours et
encore. Mais à présent je voudrais tout de suite vous adresser un blâme, à savoir que dans les
passages cités de mes écrits se trouvent trois vilaines coquilles ; videlicet :

p. 15 l. 12 d. h. au lieu de « jeder » : « jener ».


" 16 " 14 d. h. après « dasselbe » il manque « Wort ».
" — " 3 d. b., « Meinungen » il manque « der Philosophen ».

Cela m’ennuie beaucoup de voir mes mots défigurés à l’impression. J’avais déjà découvert
dans vos Questions esthétiques quelques fautes semblables, voire plus graves encore, et je vous
les avais indiquées. Si vous rencontrez lors de la correction une citation quelconque de mes
œuvres, je vous prie de comparer à chaque fois avec l’original. Ah, si seulement vous aviez le
noble fanatisme de Kilzer ! Cet été, ce dernier m’a sérieusement proposé de fonder une
commission de fidélité, dans le but de veiller constamment à ce qu’on ne change jamais ne
serait-ce qu’une seule syllabe de mes ouvrages. Suite à ce même fanatisme, il a même découvert
QUI habite à présent dans ma maison natale de Dantzig, comme Dorguth l’avait fait auparavant
avec le jour de ma naissance, qui est malheureusement un vendredi. Les voyages et les vacances
de Kilzer relèvent toujours d’une œuvre charitable : partout où il repère une persona litterata, il
l’aborde pour la convertir à ma philosophie. Il voulait absolument avoir la première édition de
mon ouvrage principal, mais Brockhaus n’a plus d’exemplaires. Je vous demande donc
seulement une reproduction précise, entière et non falsifiée de mes mots. J’espère bientôt
recevoir la fin de la traduction. J’aurais aimé que l’on traduise en même temps la recension de
mes Parerga parue une année auparavant dans la même Review.
On trouve dans le Journal des Débats, et traduit dans la Zeitschrift für Literatur des
Auslands de septembre, un article FRAPPANT du comte de Gasparin , pair de France, concernant la
3

PREUVE LA PLUS COMPLÈTE des tables tournantes sous influence de la VOLONTÉ ; article dirigé
contre l’Académie des Sciences, qui dans son effronterie en est arrivée au point de déclarer
qu’elle jetterait au panier toutes les contributions portant sur les tables tournantes. Ceux-là, ainsi
que Faraday et Humboldt, finiront par soupirer : si tacuisses philosophus mansisses ! À mon4

grand regret, je n’ai encore pu saisir aucune occasion pour une autopsie, malgré tous mes efforts.
Quant à Cajus Antibarbarus, il finira par soupirer : nos, non nobis (devise de l’Académie de
5

Norvège). Car avec sa démolition de la philosophie postkantienne, il s’imagine faire place à celle
de HERBART, mais ces sornettes fondamentalement fausses ne peuvent plus tromper personne :
elles sont sans vie, car sans vérité. S’il savait à qui il faisait place par là — à savoir à moi —,
alors il n’aurait pas pris la plume.
Ne cédez surtout pas, mon cher apôtre, à l’idée d’insérer une illustration dans l’Illustrierte
Zeitung ! Di meliora ! Je ne veux pas que ma personne serve à distraire les lecteurs populaciers
6 7

et oisifs. Même un portrait dans un livre n’est de mise qu’après la mort de l’auteur. Je ne connais
aucun grand écrivain qui s’y soit prêté pendant sa vie — comme ces freluquets frivoles, par ex.
Dove, dans sa mauvaise COMPILATION sur la théorie des couleurs. D’où la vieille épigramme : 8

Faites en sorte que de vos traits


reste une image fidèle pour la postérité :
c’est là qu’elle vous regarde, auteurs, avec joie,
alors qu’elle ne vous lit plus depuis longtemps .
9

Par ailleurs, Jean Paul se moque déjà des portraits d’anatomistes et de chimistes à la
10

Bibliothèque générale allemande : il pense que ce ne sont pas ces spécialistes, mais seulement les
poètes et les philosophes qui méritent un portrait.
Dans la note p. 21 , vous avez été injuste avec l’Anglais : toutes les différences données
11

purement a posteriori (donc tout ce qui est purement empirique) prennent leur origine dans les
modifications de la chose en soi, modifications que nous ne connaissons sous cette forme que de
manière très indirecte par l’intermédiaire des sens et de l’intellect ; pour vous éviter de longues
recherches, je vous renvoie simplement à Parerga, II, p. 90-91 et 141 . Si vous crevez les yeux
12

de quelqu’un, il n’est pas étonnant qu’il n’y voit plus rien. Caute incede, per Deos, latet anguis
sub herba .13

Bien sûr que vous auriez dû déménager de votre Rue de la Peste ! Ah, les devoirs envers
14

soi-même sont fortement négligés ! Qu’adviendra-t-il alors des devoirs envers les autres et même
envers Dieu ! Quant à moi, je n’en connais plus qu’un seul envers ce dernier : le devoir de
politesse, et j’espère, avec Brockhaus, que dans vos Lettres, vous l’avez bien respecté .
15

Je me souviens parfaitement avoir lu cette anecdote sur Kant , dans les biographies que je
16

possède : je l’ai cherchée et je n’ai pas pu la trouver. Est-ce important ?


Je viens tout juste de recevoir de la librairie l’Histoire de la spéculation depuis Kant
d’Erdmann , en 2 gros volumes. Il y a là 37 grandes pages sur moi. Je n’ai encore rien lu, je vais
17

m’y mettre maintenant. Et puis vous le lirez également. Cela pourra servir de prodrome pour vos
Lettres — et si avec cela le monde ne lève pas enfin les yeux, alors je lui envoie le… au corps.
Bonne chance, vieil apôtre, et avant tout portez-vous bien

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 15 oct. 1853.
313. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Très estimé Monsieur et ami !

Veuillez recevoir mes remerciements tardifs, mais non moins sincères, pour l’excellente
preuve de la ferveur apostolique dont vous avez témoigné en établissant un rapport d’expertise si
profond et réfléchi de mes affaires, rapport qui est en même temps un véritable modèle
d’exposition claire et intelligible. C’est justement en vertu de cette qualité que mon ami le Dr.
Emden l’a fait recopier, afin de pouvoir l’imiter. Mais il est également responsable du retard de
cette réponse, car il pense avoir découvert un autre aspect de l’affaire, et il m’a fait attendre
jusqu’à aujourd’hui la démonstration écrite de ce dernier : elle se trouve ci-jointe et je vous prie
de bien vouloir me la renvoyer à l’occasion, peut-être en y ajoutant votre avis. Je vous avoue
qu’elle ne m’éclaire pas beaucoup et qu’elle semble relever davantage d’une chicane d’avocat.
Les endroits que j’ai désignés par N. B. m’apparaissent comme des captations. Madame M. savait
parfaitement qu’elle bénéficiait légalement d’un droit sur cet affermage, et elle me l’a cédé non
pas par amitié, mais simplement pour des raisons MORALES, et je l’ai accepté, en expliquant que
je ne bénéficiais peut-être pas d’un droit légal, mais bien d’un droit moral, d’une prétention
légitime à ce propos. Si cela n’est pas un don, alors on peut se demander : qu’est-ce donc ? C’est
là mon avis de profane : peut-être en jugerez-vous autrement.
Selon votre expertise, on devrait trancher en ma faveur : pour moi et le Dr. Emden, la
preuve semble exacte et claire, mais elle avance sur le fil du rasoir et l’arbitraire des juges
trouvera ainsi une certaine marge de manœuvre. Le Dr. Emden redoute que le tribunal de BONN
ne s’en tienne à ses principes français. Nous avons donc décidé d’attendre, si Madame M. revient
habiter ici pour l’hiver, de savoir quels sont ses plans, qui en tout cas dépendent de la vente de sa
maison à Bonn. Pensez-vous que l’on pourrait porter plainte contre elle ici-même, alors qu’elle
habite à Bonn ? C’est ce qui semble résulter de la fin de votre lettre, mais cela m’a quand même
l’air douteux. Au cas où je voudrais porter plainte à Bonn, pourriez-vous me conseiller un avocat
habile à qui je pourrais confier les lettres originales sans me faire de soucis ? Il n’est sans doute
pas possible d’estimer les frais du procès à Bonn, au cas où je le perdrais ?
Et maintenant ad philosophica ! Concernant notre vieille controverse* sur la conciliation
des nécessités de la volonté avec la possibilité de sa négation, un article d’ ASMUS dans le
2

Wandsbecker Boten, que je relisais à l’instant, me semble fort digne d’attention : il s’intitule «
Histoire de la conversion de… » et se trouve dans la 1 partie, p. 114 de l’édition originale. Ce
re

n’est que la première moitié qui est ici pertinente et j’aimerais que vous la lisiez.
À Berlin, un membre de la Faculté a remis à la Vossische Zeitung une brillante nécrologie
du professeur en hégélianisme Gabler , contenant une grande glorification de cet hégélianisme
3

même, digne de l’Académie danoise, ce journal ayant l’habitude d’accueillir les notables
berlinois lorsqu’ils disparaissent. Mon évangéliste Lindner l’a fermement refusée. Ainsi, ma
philosophie lutte donc déjà avec l’hégélianisme dans le bastion de cette dernière, et
victorieusement. Vaillant évangéliste !
En déc. paraissent chez Brockhaus les Lettres sur les vérités fondamentales de la
philosophie schopenhauérienne, de Frauenstädt. J’ai reçu les 2 premières épreuves qui
contiennent l’intégralité de la traduction révisée de la Westminster Review, imprimée avec des
caractères grands et beaux.
Le 2 tome de l’Histoire de la philosophie depuis Kant, par Erdmann, a été publié, il
e

contient une présentation de ma philosophie avec ma biographie en 37 grandes pages. C’est un


fatras confus, avec aussi un peu de malice bien dissimulée, et quelques mensonges. C’est de moi-
même qu’il tient la biographie.
Encore mes meilleurs remerciements, et mes vœux les plus sincères pour votre bien-être !

Francfort, Arthur Schopenhauer


le 25 oct. 1853.

314. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami !

Je me réjouis de voir que votre livre sera terminé ce mois-ci, car je suis avide de le
connaître. Il est admirable de voir à quel point vous vous profilez comme le champion infatigable
de ma doctrine ; or cela produira ses effets et vous rapportera un jour des lauriers.
Concernant la note p. 21 de la traduction de la Review, la situation est la suivante :
l’évangéliste anglais y expose explicitement non pas MA doctrine, mais celle de KANT, tout à fait
comme je l’ai exposée dans les Parerga, I, p. 86, 87 , et dans cette mesure, il a entièrement
2

raison, bien qu’en bas de la p. 87 ce soit MON argumentation qui suive ; c’est précisément cette
dernière que Lindner a fait valoir dans la note, mais il n’y avait aucune raison de le faire. C’est
Kant que l’Anglais expose ici. Quant à moi, j’enseigne que l’essence de la chose en soi ne se
manifeste pas dans les propriétés, qu’elles soient aprioriques ou empiriques. Or les DIFFÉRENCES
spécifiques et individuelles de ces propriétés, les DIFFÉRENCES prises in abstracto, doivent bien
être d’une quelconque façon l’expression de la chose en soi : par ex. non pas la figure, ni la
couleur de la rose, mais le fait que l’une se manifeste avec une couleur rouge, l’autre avec une
couleur jaune ; ou bien, non pas la forme, ni la couleur du visage humain, mais le fait que l’un ait
cette physionomie-ci, l’autre cette physionomie-là.
Quant à la présentation d’Erdmann, voilà ce que je pense ! Les 10 premières pages sont
assez bonnes, car il s’y réfère simplement à ma Quadruple Racine, dont il livre une vue
d’ensemble précise, mais ensuite, il aurait dû consacrer 4 fois plus de place qu’il ne l’a
effectivement fait au reste de ma philosophie. Or la présentation qui suit est un pêle-mêle confus,
qui ne saurait en donner à quiconque une idée adéquate. Il évite mes phrases, mais en les
remplaçant mal ; il n’a pas mis en valeur mes doctrines fondamentales, ni leur particularité, et il
n’a pas dit un mot sur le fait que je me distingue spécifiquement des autres ; je me retrouve donc
là comme un larron de plus parmi les larrons. Avec une malice cachée, il a isolé les propositions
inconvenantes de ma philosophie pour les utiliser hors de leur contexte, et ce dans le but
d’effrayer. Je n’ai trouvé que 2 MENSONGES. 1) J’aurais affirmé que Leibniz n’était pas
philosophe, mais seulement mathématicien et polygraphe, alors que j’ai dit en vérité que Leibniz
était DAVANTAGE mathématicien et polygraphe que philosophe. Une grande différence ! Vous
connaissez sans doute le passage, je ne sais où il se trouve . 2) J’aurais appelé HEGEL « un nigaud
3

de notre époque », alors qu’en vérité ce sont seulement les HÉGÉLIENS que j’appelle ainsi, en
affirmant : « Les nigauds de notre époque en ont tiré satisfaction 20 ans durant. » Mais encore
une fois j’ignore où . Oh, un registre ! La biographie est exacte . Peut-être en ferez-vous une
4 5

recension. Faites surtout l’éloge de l’Antibarbarus : il nous rend d’excellents services, par sa
démolition de la prétendue philosophie postkantienne.
Brockhaus et ses bouffonneries m’ont fortement indigné. Quoi ? une Academia della
6

Crusca allemande, constituée par ces gaillards ouvriers que sont les typographes, donc par des
TÊTES DE NŒUD ? L’ignominie dont se rendent coupables la défiguration de la langue allemande et
la négligence de la ponctuation, et dont les Unterhaltungs-Blätter de Brockhaus sont le non plus
ultra , n’est-elle donc pas encore suffisamment avancée ?! Cela doit-il donc être introduit par
7

force*, par un imprimeur et ses compagnons ? « Orthographe maison » ! Orthographe de têtes de


nœud ! Cet effronté… pense que la fabrique qui tourne en bas est la chose principale, alors
qu’elle est un foutoir que les lecteurs sérieux ignorent ! « Il serait très fâcheux que des
orthographes différentes sortent de la même IMPRIMERIE ! » Ô non, CELA NE FAIT RIEN,
ABSOLUMENT RIEN ! Mais qu’un boutiquier, un imprimeur et ses myrmidons noirs, sortis de leur
trou de barbouilleurs, veuillent régir la langue allemande, voilà qui est non seulement une
situation fâcheuse, mais aussi une infamie. J’écrirais sur-le-champ mon opinion à ce gaillard,
mais c’est votre éditeur, votre organe, et donc il nous est indispensable. Faites-lui part de mon
indignation, autant que vous pouvez le faire sans danger. Au cas où il y aurait, de mon vivant,
une quelconque réédition, et que l’éditeur aurait l’intention de l’imprimer chez lui (arguant de
l’uniformité), alors j’exigerais directement de Brockhaus une promesse écrite afin que mon
orthographe et ma ponctuation soient minutieusement respectées ; sinon, qu’il n’imprime plus
JAMAIS quelque chose de moi. Entre-temps, inculquez-lui le ne sutor ultra crepidam , aussi bien
8

que vous le pourrez. Mais racontez à tout le monde ses pitreries impudentes.
Cet été, 95 exemplaires de la Volonté dans la nature étaient encore disponibles : c’est
seulement lorsqu’ils seront vendus qu’il y aura une 2 édition.
e

À propos des tables tournantes, je remarque selon des récits tout à fait dignes de confiance9

et concordants que la soi-disant CHAÎNE des mains est entièrement superflue, voire dérangeante,
car cette gêne* détourne les forces et l’attention des personnes. Il faut seulement poser librement
les mains sur la table et vouloir avec fermeté. Même le contact avec les pieds et les vêtements
n’est aucunement nuisible. Tout cela relève de balivernes d’électricité qui n’ont rien à faire ici. Il
s’agit ici de magie, de force métaphysique de la volonté. Toute cette affaire est de plus haute
importance pour ma philosophie.
Je vous salue de tout cœur !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 2 nov. 1853.
315. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Estimé Monsieur Becker !

Veuillez recevoir mes chaleureux remerciements pour les efforts incessants par lesquels
vous avez exposé et déduit en toute clarté que l’idée d’Emden était intenable. Je sentais bien
qu’elle était fausse. Le Dr. Emden lui-même défait à présent ses voiles, mais il revient sur sa
vieille idée selon laquelle je devrais bloquer l’affermage à Dantzig et par là fonder un forum
arresti ; ainsi l’affaire de Dantzig serait réglée. Lorsque je vous avais exposé ce projet de vive
voix, vous l’aviez refusé sans hésiter ; par conséquent je le refuse également ; à moins que vous
n’ayez changé d’avis à ce sujet, ce dont vous m’auriez fait part, je suppose. De façon générale,
vous abordez les choses du point de vue du juge, en les regardant d’en haut et en visant la vérité,
c’est pourquoi vous en touchez le fond, alors que le Dr. Emden les considère avec le regard de
l’avocat qui cherche toujours seulement des arguments et en utilise n’importe lequel, non par
souci de la vérité, mais bien plutôt dans le but de mener un combat spectaculaire, ou spéculaire ;
suite à quoi, chez les avocats, la différence entre vrai et faux tend de plus en plus à s’effacer : ils
sont tous des voluptuarii de profession, et de surcroît des sortes de comédiens, dans la mesure où
ils défendent aujourd’hui un crime qu’ils condamnaient encore hier. Votre estimation des frais de
procès à Bonn m’a beaucoup intimidé, et comme là-bas la décision reste encore précaire et
incertaine, il n’est guère probable que je choisisse cette solution. Il ne me reste donc plus qu’à
attendre que M. déménage ici, selon votre projet. Il serait dommage de se priver de ce joli
revenu*.
Que vous lisiez Werner , preuve que ses œuvres sont encore vivantes, me réjouit beaucoup.
2

C’était un ami de jeunesse et il m’a sans doute influencé, et ce positivement. Dans la fleur de ma
jeunesse, j’étais enthousiasmé par ses œuvres, et lorsqu’à l’âge de 20 ans, j’ai pu pleinement
apprécier sa présence, dans la maison de ma mère à Weimar, je me suis trouvé très heureux. Il
avait de l’affection pour moi et m’a souvent parlé, même avec sérieux et philosophiquement. Son
souvenir m’est toujours précieux et s’est gravé en moi. Je pourrais beaucoup vous en parler de
vive voix. À cette époque, il écrivait Wanda , et la pièce a été donnée la première fois pour
3

l’anniversaire de la grande-duchesse. Je l’ai vue plusieurs fois, mais jamais lue, cela dit je
connais encore vaguement par cœur le chant des vierges. Ses drames, malgré leur coloration
subjective, sont toujours incomparablement meilleurs que tout ce qui a été fait depuis dans le
même genre. L’hiver passé je relisais encore son Luther . 4

Encore merci pour vos nombreux efforts, auxquels vous n’avez pu vous livrer que grâce à
votre ferveur apostolique. Vous revoir bientôt ici, malgré l’hiver, c’est ce que souhaite de tout
cœur

Francfort votre ami dévoué


le 3 nov. 1853 Arthur Schopenhauer
316. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Très digne évangéliste en chef !

Vous m’avez vraiment fait le plus grand plaisir qu’on puisse imaginer , et s’il est une chose
2

qui puisse frayer une voie à ma philosophie, c’est bien votre livre ; même si nous voyons à quel
point il est difficile d’amener la canaille humaine à fourrer son nez dans des livres qui ne
promettent ni divertissement ni utilité, alors qu’ils sont susceptibles d’éclairer des choses qui
l’intéressent au plus haut point. L’ennuyeuse vacuité des philosophrastes, durant ½ siècle, lui a
fait perdre le goût des choses de l’esprit et a enlevé toute crédibilité à la philosophie. C’est là que
vous arrivez en faisant feu de vos canons. Bravissimo. J’ai lu votre livre 2 fois avec un plaisir
infini : j’ai l’impression de voir mon image miniaturisée dans un miroir convexe. C’est une
miniature parfaitement ressemblante. Vous avez été capable de le faire non seulement parce que
vous témoignez d’une connaissance et d’une compréhension exhaustives de ma philosophie,
mais encore parce que vous l’avez si profondément pénétrée, repensée et traversée que vous en
savez autant que moi. Ce sont surtout les trois dernières lettres apologétiques qui le montrent ; et
grâce à tant d’études, vous êtes si familier avec mes écrits que vous trouvez dans les coins les
plus isolés ce dont vous avez besoin, souvent des choses rédigées à 40 ans d’intervalle. Mais que
tout cela s’accorde et s’ajointe parfaitement prouve l’unité et la solidité de ma conception de la
vie et du monde. Contrairement à Schelling, par ex., ou même Spinoza ; Kant aussi ; cela ne peut
être fait avec PERSONNE d’autre : ils ont tous vacillé.
Comme il n’y a rien de parfait dans le monde, je vais vous dire ce que je souhaiterais
changer. 1) la base est trop large pour le sommet, c’est-à-dire que dans la première partie des
préliminaires, vous avez exposé en détail le fondement, la méthode, etc., puis la dianologie, le
principe de raison suffisante et tout ce qui en découle. En soi, c’est très bien ; mais alors, la partie
métaphysique, esthétique, éthique aurait dû être aussi détaillée et il aurait fallu que le livre
compte 50 pages de plus. Il est certes vrai qu’on trouve ici tout ce qui est essentiel, mais c’est
succinct. L’exposition de l’esthétique, surtout, est trop courte. Vous vous référez à vos
Questions . D’abord, il n’y a que très peu de personnes qui les ont effectivement sous la main, car
3

le public n’est pas tout à fait le même, et ensuite, vous m’y avez peut-être cité de nombreuses
fois, là où cela vous arrangeait, mais ce sans présenter l’édifice de ma métaphysique du Beau.
Ici, il n’y a rien non plus sur la classification hiérarchique des arts, sur ma métaphysique de la
musique qui m’importe au plus haut point, et tant d’autres choses. Par ailleurs, dans votre
première partie, l’exposition est très systématique, chaque chose en suit une autre, justo ordine,
ratione et numero : si la deuxième partie était également ainsi, nous aurions un bon COMPENDIUM
de ma philosophie. Mais dans cette deuxième partie, l’éthique et l’esthétique sont plutôt jetées
pêle-mêle. Il est vrai que la forme épistolaire permet cela.
2) Concernant la forme, il n’est pas très naturel que vous fassiez répéter à l’ami , souvent
4

exhaustivement, ce qu’il a dit, et même citer à nouveau ce qu’il a cité lui-même. Au lieu de cela,
on devrait y trouver ses propres réponses, quoique RARES ET BRÈVES. Pour justifier ce dernier
point, il doit s’agir d’un amateur distingué qui, sans faire lui-même d’effort, demande qu’on
l’instruise de ces choses, c’est-à-dire qu’on lui les glisse dans la bouche. Le public s’identifie
facilement avec ce genre d’amateur. Et c’est précisément sur cela que reposent en grande partie
les chances de succès et de vente de votre livre : il sera lu par tous ceux qui veulent s’instruire
rapidement et sommairement, alors que les meilleurs d’entre eux seront incités à aller puiser à la
source même. Ensuite, ce sont ceux qui se sont d’ores et déjà ralliés à ma philosophie qui s’en
saisiront ; ils sont malgré tout un certain nombre. Et de façon générale le public préfère les
présentations de seconde main.
Je suis censé vous renvoyer l’exemplaire commentario critico et perpetuo exornatum : vous 5

auriez alors dû le faire aplanir, car ainsi, le commentaire est écrit au crayon à papier, ce qui le
rend très disgracieux. J’ai écrit selon les impulsions du moment, tout cela n’est pas très
important, il ne faut pas le prendre au sérieux et surtout pas à cœur. Je vous prierais seulement de
ne pas y répliquer, car il est possible et aisé de trouver réplique à tout, en particulier quand on
impose à l’autre de dire tout ce que l’on sait déjà soi-même. Plutôt a cecqaua, cecqaua et laissez
6

filer ce que vous n’acceptez pas. Quelques-unes de mes annotations sont seulement de nature
linguistique, vous ne devez pas m’en vouloir : considérez que depuis quelque temps déjà je me
trouve dans un perpétuel état d’irritation, contre l’« époque contemporaine » et son infâme
corruption de la langue qui prend le dessus. La nouvelle de l’« orthographe maison » a aggravé le
mal, jusqu’à une sourde colère : je suis devenu un saigneur de syllabes — comme notre
Napoléon III qui est devenu Constable (au service de la police), lorsqu’en 1848 la populace se
dressait en Angleterre.
Votre livre me procure par ailleurs une impression semblable à celle d’Épicure quand, selon
Sénèque, il appela Métrodore sur son lit de mort pour passer en revue une dernière fois tous ses
dogmes, et gaudebamus ob inventa nostra . J’ai toujours espéré que vous voudriez bien encore
7

faire un peu tourner les tables, mais il n’en est rien. Or ces expériences ont quand même, par
rapport à mon affaire, une « portée incalculable » (pour me servir d’une tournure utilisée par les
crapules). Je chante :
La volonté, qui a fait le monde
Et qui le maintient,
Elle peut aussi le diriger :
Les tables avancent à quatre pattes.

Et à cela s’ajoutent d’une part les anathèmes des curés et d’autre part le ridicule des physiciens !
Dans la Leipziger Illustrierte Zeitung du 19 nov., vous trouverez un long article sur cela, d’un
certain Dr. Schindler, médecin, qui mérite vraiment d’être lu. Il expose les faits de façon précise,
exhaustive et systématique, et sans même connaître ma philosophie (d’où une certaine bêtise qui
vient parfois s’y mêler), il fournit une explication qui joue en faveur de ma philosophie.
L’affaire avec Maupertuis est beaucoup plus importante que je ne le croyais ; à la
8

bibliothèque, j’ai pu tout trouver sur la controverse, sauf précisément ces lettres. À Berlin, vous
êtes près de la source, sur le vieux champ de bataille. Vous avez bien fait de le rajouter, cela
confère à votre livre de l’importance pour l’histoire de la philosophie. Je crois réellement que
Kant en a tiré SON IDÉE PRINCIPALE, cela lui a donné la première indication sur laquelle se fonde
tout le reste. Mais Maupertuis l’AFFIRME seulement, sans le DÉMONTRER ; et qui sait si quelqu’un
ne le lui a pas également soufflé. Que Kant n’ait pas été scrupuleux pour ce genre de choses,
vous le tenez de mon ouvrage principal tome 2, p. 52 . Même vous, mon très cher, vous avez
9

labouré avec la génisse de Becker , qui nous avait permis de débusquer le lièvre ; il le mérite :
10

pourquoi est-il donc un apôtre muet qui ne veut faire rien d’autre que de constituer des dossiers,
et pourquoi met-il la lumière sous le boisseau ? La vérité ne doit-elle pas se manifester ? Vous
avez donc eu raison de le faire.
À propos du fossile d’une glorificatio mei qui a été exhumé. Mon vieil ami de jeunesse von
Quandt de Dresde, qui ne m’avait pas écrit depuis 5 ans, l’a soudainement fait voilà 2 mois , 11

uniquement pour me recopier un passage important de la correspondance, qui vient de paraître,


entre Goethe et le conseiller d’État Schulze, ancien procureur d’université. Goethe y fait l’éloge
de mes capacités et décrit plus précisément la nature de nos fréquentations, il s’agit donc d’un
12

COMPLÉMENT à ce que j’avais dit dans les notes pour Erdmann : cela intéressera la postérité. Vous
devez le LIRE : c’est à la p. 149 . Ce faisant, il me présente comme un adversaire de sa théorie des
13

couleurs, alors que 40 ans après et 22 ans après sa mort, je suis seul à brandir l’étendard de sa
théorie des couleurs, en criant : « Espèce d’ânes, il avait raison ! » — ici même, dans sa vieille
ville de naissance, dans l’album . Mais il ne le fait que parce que j’enseigne également la
14

production du blanc à partir de couleurs, et que sa maxime est :


Et ne t’écarte pas d’un pouce de la voie de Goethe .
15

Düntzer, dans une note, indique à juste titre que l’on peut lire ce que je pense véritablement
de la théorie des couleurs dans les Parerga, p. tant et tant : ensuite il remarque avec érudition
16

que la lettre date de 1816, que j’étais déjà évoqué dans les Jahres- und Tagesblätter de 1816,
mais que ma fréquentation avec Goethe était plus ancienne. Je me suis dit : exact ! mais d’où est-
ce qu’il le sait ? — j’ai alors réfléchi : il le tient de la biographie d’Erdmann.
J’ai feuilleté le tome 2 de l’Éthique de Fichte : tout un SYSTÈME du philistinisme le plus plat
17

! J’ai feuilleté le tome 1 de l’Histoire de la philosophie moderne de Kuno Fischer : ⅔ de 18


SPINOZA19 hégélianisé et présenté avec une foi du charbonnier des plus crasses concernant
Spinoza, comme si c’était SA PLUS FERME ET INTIME CONVICTION, et de surcroît en EXAGÉRANT
certains traits de la MORALE déjà si révoltante de SPINOZA ! Je veux bien croire qu’il avait 100
auditeurs à Heidelberg ; les jeunes accourent pour entendre ce qui s’accorde avec leur avidité et
leurs convoitises malsaines, à savoir qu’il n’y a ni justice ni injustice, ni bien ni mal. Le
ministère de Bade a bien fait de mettre fin à ses agissements . Il se donne comme le DERNIER
20

HÉGÉLIEN et le martyr — de son incapacité de juger : aucun chrétien ne croit aussi aveuglément à
l’Évangile que lui aux deliramenta Spinozae. Il a cru pouvoir substituer cette foi-là à toute
pensée autonome.
Dans l’avant-dernier cahier de la Monatsschrift se trouve une recension de l’Histoire de la
philosophie de Fortlage, dans laquelle, à la fin, on dit du mal de moi : je pense qu’elle a été écrite
par Harms, nisi fallor . Les Anglais viennent de traduire les Leçons de Dresde de Chalybäus, sur
21

l’histoire de la philosophie, et à présent l’Athenaum le raille, cite un passage dément tout à fait
hégélien, texte et traduction, et assure que personne ne peut rien y comprendre. Soit ! Mais alors
pourquoi traduisez-vous cette… ?
Votre livre n’a pas encore paru : la faute en incombe encore une fois à l’« orthographe
22

maison ». J’avais même peur que la censure n’y ait fourré son nez (surtout parce qu’il y a
environ 6 semaines, on rapportait de nouveau dans la Postzeitung locale que l’éditeur des
Literarische Unterhaltungs-Blätter devait croupir 3 mois en prison, à cause de votre recension de
Feuerbach, mais qu’à Berlin, on n’aurait rien entrepris contre vous). Mais Suchsland pense qu’il
s’agit de considérations commerciales.
Donc, vaillant apôtre, mes chaleureux remerciements pour votre acte héroïque, et mes vœux
les plus sincères pour votre bien-être !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 28 janv. 1854.
317. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami !

Je ne puis collaborer à votre projet concernant l’exemplaire . Premièrement, parce que les
2

deux quotidiens d’ici, parfaitement niais et destinés surtout aux femmes, ne conviennent
aucunement pour recenser un livre purement philosophique. Deuxièmement, parce qu’au cas où
je suggérerais à Kilzer ou à quelqu’un d’autre de le faire, on découvrirait aussitôt que cela part de
moi, et tout le monde apprendrait que je travaille ainsi à ma propre glorification. Cela serait,
vous en conviendrez, tout à fait indigne de ma personne ; d’autant plus que je suis le Démocrite
de cet Abdère. L’exemplaire reste donc à votre disposition. Ma vie durant, j’ai été pur de tout
compérage, et je pense le rester jusqu’à la fin. Bel article dernièrement sur la question mise au
concours de Rouen , dans le Unterhaltungsblatt.
3
Fortlage a peut-être blâmé Ritter , mais pas au sujet de ce qui mériterait le plus grand blâme,
4

à savoir qu’il m’ignore, comme à l’accoutumée ; ce qui est stupide et vil à la fois.
Je viens de feuilleter Le Magnétisme dans son rapport à la nature et à la religion
d’Ennemoser, 2 éd. 1853. Il a reproduit plus d’une page de la Volonté dans la nature, en citant
e

de façon honnête et en louant mon traité. Mais par ailleurs, il a repris, précisément à partir de cet
écrit, de nombreuses preuves que j’ai mentionnées, sans me nommer. Certes, il en a le droit, car
même si, en effet, il ne les a pas trouvées et rassemblées lui-même, il aurait cependant très bien
pu le faire. Mais par là, il les a défigurées. Ces messieurs sont tellement pauvres en savoir que
même dans leur propre discipline, là où ils sont spécialistes, ils ramassent les miettes de pain de
ma table. Il fait savoir grossièrement à Humboldt ce qu’il pense des tables tournantes. À ce sujet,
j’ai fait une expérience manquée, avec 4 petites filles : elles étaient sans doute trop jeunes.
Et sur ce, vieil ami, bonne chance !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 4 févr. 1854.
318. À CARL SCHÜTZ 1

Très honoré Monsieur le professeur !

Veuillez recevoir mes remerciements chaleureux pour votre intérêt porté à ma philosophie
et même à mon anniversaire, ainsi que pour votre estimable cadeau.
Ces dernières années, on m’a fait part plusieurs fois de témoignages de cette sorte, et même
d’opinions d’une remarquable ressemblance ; à chaque fois cela me procure une grande joie et
m’encourage, ceci étant pour moi la garantie de l’écho que mes doctrines rencontreront dans les
temps à venir, que je ne vivrai certainement pas moi-même.
Vos traductions du sanskrit m’intéressent au plus haut point, comme tout ce qui est indien,
et je les lirai prochainement. Vos deux anthologies me donneront également bien du plaisir, car
2

elles contiennent beaucoup de littérature moderne et très récente, dans laquelle je ne suis pas très
versé, et je me laisse volontiers recommander par d’autres ce qu’il y a de meilleur.
En vous saluant cordialement et en vous comptant parmi les miens

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 27 févr. 1854.
319. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon cher ami !

Je dois vous mettre au courant des événements les plus récents dans le domaine de ma
philosophie.
Beaucoup de choses me sont arrivées pour MON ANNIVERSAIRE. D’abord, c’est Kilzer qui est
venu me féliciter solennellement. Il m’a fait savoir en même temps qu’il avait réussi à organiser
pour moi une séance absolument INFAILLIBLE de tables tournantes. Von Doss m’a fait parvenir
une lettre de vœux de 6 pages . Mais le courrier ci-joint d’un professeur du Lycée de Bielefeld
2 3

est encore plus remarquable, courrier que je vous prie de me renvoyer prochainement ; il me l’a
envoyé accompagné de ses operibus omnibus : des œuvres poétiques qu’il a traduites du
4

sanskrit, un rapport sur le Lycée précédé d’un poème également traduit du sanskrit, et enfin une
anthologie anglaise et française, joliment reliée, contenant des extraits de la littérature anglaise et
française la plus récente. Ce genre d’hommages signifie bien quelque chose. C’est donc un
nouvel apôtre. Bien naturellement, je lui ai répondu en toute amabilité.
En même temps que votre livre, on a publié à Hambourg : Weigelt , Histoire de la
5

philosophie moderne, à partir de conférences populaires, première partie : mon nom se trouve
déjà sur la couverture, et ¼ du livre, environ 40 pages, contient ma doctrine. Dans l’ensemble, la
présentation est juste et rédigée avec un enthousiasme manifeste, bien entendu non sans défauts ;
mais que peut-on faire en 40 pages ? Il utilise rarement mes mots, et s’il le fait c’est en les
mutilant par des abréviations : il présente les doctrines dans son langage propre, ce qui bien sûr
les appauvrit, mais on voit qu’il m’a étudié avec zèle et qu’il m’a bien compris. Les conférences
ont vraiment eu lieu ; ce sont là les premiers fruits de la communauté de Hambourg. Sans doute
aurez-vous un jour l’occasion d’envoyer une missive apostolique à ces Thessaloniciens.
Mais venons-en à présent aux Enfers et à ses obscurs agissements ! Le nouveau numéro du
Grenzbote contient un article sur votre livre , plein de venin et de bile : nous nous en tirons très
6

mal tous les deux et ce Crapulus anonyme ment comme un bulletin russe. Cela ne fait rien !
7

C’est nécessaire.
Ainsi le roquet, de notre écurie
Voudrait nous suivre partout :
Mais le bruyant écho de ses aboiements
N’est que la preuve que nous sommes en route . 8

G.

Sa fureur lui gâche son jeu : on ne le croira pas.


La séance de tables tournantes évoquée plus haut a été accomplie, devant moi-même et
quelques savants, par une jeune femme tout à fait enfantine, sincère et aimable, qui possède un
don : cela a marché après deux minutes. Le physicien Wagner prétend sans cesse que c’est
9

mécanique. Il est vrai que c’est difficile de faire une distinction, car il réussit à faire la même
chose mécaniquement. Mais après deux heures d’expériences, je me suis persuadé de
l’authenticité de la chose. La différence est visible, mais très subtile. On m’a encore promis une
autre occasion. J’ai la 3 édition des Tables tournantes , par Silas, Delaage et Balzac, 46 pages.
e 10
Vous lirez bien entendu tout ce que je viens de citer, peut-être l’avez-vous même déjà lu, et
vous ferez bientôt parvenir de vos nouvelles à

Francfort s. M., votre ami, presque inquiet


le 4 mars 1854. Arthur Schopenhauer.
320. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur et ami !

Je prends la liberté de vous offrir l’exemplaire ci-joint que Frauenstädt a mis à ma


2

disposition, après que j’ai refusé de l’envoyer à la rédaction d’un journal, comme il l’aurait
souhaité. Mais si par hasard vous deviez déjà posséder ce livre, je vous prierais alors de bien
vouloir me le renvoyer, afin de pouvoir en réjouir quelqu’un d’autre. Cela dit, vous y avez
résolument droit, car on y laboure avec votre génisse , ou mieux, on y tire sur le lièvre que vous
3

avez levé, dans la lettre 14. Vous vous souviendrez qu’après m’avoir rapporté les propos de 4

Voltaire dans Akakia, j’avais cherché en vain les lettres de Maupertuis à la bibliothèque locale.
J’en ai alors fait part à Frauenstädt qui, sans me tenir au courant par la suite, a rassemblé les
documents à Berlin, l’ancien champ de bataille de ces héros, et il en est ressorti que l’importante
doctrine de l’idéalité de l’espace existait avant Kant. Je crois vraiment que K. en a tiré au moins
l’idée fondamentale, pour sa découverte LA PLUS BRILLANTE. M. formule parfaitement la chose,
mais n’en donne aucune preuve : peut-être y a-t-il également un souffleur derrière lui ? Il en
découle que K. entretient le même rapport avec lui que Newton avec Robert Hook . Le premier
5

indice est toujours le plus important. Cette découverte, qui porte grand préjudice à Kant, est très
importante et occupera un endroit assuré dans l’histoire de la philosophie. Or, « vos mérites
restent dans l’ombre ». Vous voyez, voilà ce qui arrive quand on met sa lumière sous le boisseau
6

et qu’on demeure un apôtre muet, au lieu de devenir un évangéliste annonciateur.


Figurez-vous ! Madame Mertens m’a écrit 2 lettres très aimables , dans la dernière elle
7

promet de me transmettre d’ici quelques jours le montant des 2 années d’affermage, et j’attends
donc ce dernier chaque jour. Ergo, nihil desperandum ! La cause de ce soudain retour au devoir
8

n’est pas évoquée, mais elle raconte qu’elle a eu un accès* apoplectique ; ce qui est regrettable
d’un point de vue pathologique, mais à un certain âge, ces accès ont souvent un effet bénéfique,
en tant que stimulants de l’impératif catégorique, car ils font penser à la mort. C’est très bien que
nous n’ayons pas porté plainte.
À présent, on imprime beaucoup de choses sur moi, dont je suppose que je vois à peine la
moitié. Weigelt, Histoire de la philosophie moderne, donne une présentation enthousiaste de ma
doctrine. Dans la Feuerspritze berlinoise du 13 févr., 2 glorifications très fortes . Grenzbote,
9

dernier numéro , un article débordant de venin et de bile, contre Frauenstädt et moi. Je note que
10

les théologiens s’occupent également de moi. Avec cela quelques vigoureux hommages privés,
pour mon anniversaire. Bref, la barque est à flot.
En espérant vous voir bientôt ici,

Francfort s. M. Votre ami dévoué


le 8 mars 1854. Arthur Schopenhauer.

P. S. von Doss a décroché un poste et une femme.


321. À ADAM VON DOSS 1

Veuillez recevoir à votre tour, mon cher Monsieur von Doss, mes vœux les plus cordiaux !
Vous avez donc enfin un poste et vous êtes marié ! Le but de la quête humaine. Ce qui me réjouit
en particulier, c’est qu’après 3 mois de mariage vous parliez toujours de votre femme avec un tel
enthousiasme : cela signifie bien quelque chose et donne beaucoup d’espoir pour l’avenir. Si à
présent vous ne pouvez plus vous consacrer à l’étude, vous avez quand même bien investi votre
loisir antérieur dans ma philosophie, et je vois avec plaisir que cette dernière vous sert de
descifrador, qui explicite et commente vos riches expériences.
En même temps que votre lettre de vœux, j’en ai reçu une autre qui est d’autant plus
étonnante qu’elle provient d’un homme qui m’est entièrement inconnu, C. Schütz, professeur au
Lycée de Bielefeld, rédigée avec un ton des plus respectueux, et accompagnée par ses œuvres
complètes joliment reliées. Ce sont pour la plupart des traductions du sanskrit. De façon
générale, je remarque de plus en plus qu’on commence à me lire et à m’apprécier. Dernièrement
a paru Histoire de la philosophie moderne de Weigelt, à partir de conférences populaires données
à Hambourg. ¼ de la première moitié contient ma philosophie, exposée de façon clairement
enthousiaste. Mais jamais on ne m’a glorifié de façon aussi forte que dans 2 articles de la
Feuerspritze , un hebdomadaire berlinois, daté du 13 février. Frauenstädt, qui me les a envoyés,
2

ne connaît pas personnellement l’auteur, E. Kossak, et ne lui a pas envoyé non plus un
exemplaire de son livre. Quelques désagréments : par ex. un général prussien de Ruppin qui 3

m’envoie le manuscrit de ses poèmes à lire !


J’ai enfin vu les tables tournantes, chez une jeune femme qui est si douée qu’elle déplace
toute seule la table, de façon immédiate et infaillible. J’ai fait des observations pendant 2 heures
et je suis convaincu de l’authenticité de la chose. Mais le célèbre physicien Wagner prétend
obstinément que c’est mécanique. C’était une séance avec des savants, en fait organisée pour moi
par Kilzer. J’espère trouver encore une autre occasion. Il ne s’agissait pas d’une imposture : nous
étions ensuite tous d’accord à ce sujet.
Je suis étonné par votre question concernant la Hindoo-Vindication , car je crois que vous ne
4

savez pas l’anglais. Le livre a été publié en 1808 chez Rodwell à Londres et compte 171 p., avec
des caractères d’impression excessivement grands et larges. Artaria à Mannheim pourrait sans
doute le trouver à London.
Je me réjouirais beaucoup de vous voir un jour ici avec votre femme : d’ici là, mes meilleurs
vœux de bonheur et de santé

Francfort s. M. votre
le 11 mars vieil ami
1854. Arthur Schopenhauer
P. S. Je vous recommande encore un article plein de venin, de bile et de mensonges dans le
dernier numéro du Grenzbote , contre Frauenstädt et moi. C’est NÉCESSAIRE : c’est un
5

accompagnement obligatoire de la gloire.


322. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je vous remercie, mon cher ami, pour les diverses nouvelles que vous m’avez rapportées, et
qui sont toutes intéressantes. La Feuerspritze est une pièce magnifique et surpasse toutes les
glorifications antérieures : il semble que vous ne connaissiez pas encore le clou de l’affaire, à
savoir que l’année passée, ce « Kosak » a dit dans son journal : « et ensuite une citation du
défunt Schopenhauer », ce que Lindner m’avait alors rapporté avec indignation. Mais, comme au
2

ciel, un pécheur repenti vaut mieux que trois fidèles, nous allons le ranger parmi nos troupes de
Cosaques, juste après l’individu de Nordhausen . 3

Surtout envoyez-moi tout ce qui vaut la peine d’être lu et que je ne peux pas trouver ici. Les
frais de port sont à présent peu élevés. L’auteur de cette soupe de mensonges du Grenzbote est
certainement un adepte de Herbart : ce sont les plus venimeux.
Vous aurez sans doute été irrité par la recension de Fortlage , comme moi. Il m’a l’air d’un
4

chien enragé avec une muselière : s’il le pouvait, il serait encore plus méchant avec moi. On y
décèle suffisamment sa perfidie de professeur à mon encontre. Tronquer mes phrases pour
ensuite les critiquer, me faire la leçon et me remettre à ma place, me rabaisser de diverses façons
au niveau des autres, voire à celui de véritables crapules, pour ensuite suggérer au public : « vous
voyez un homme comme beaucoup d’autres », identifier ma négation de la volonté, qui est
5

comme on sait du QUIÉTISME, avec l’ACTIVITÉ pour l’ACTIVITÉ de Fichte , dont l’exemple serait
6

quelqu’un qui sautille dans tous les sens et qui frappe son derrière du talon — voilà tout son art.
Il ne comprend vraiment pas ma philosophie, il a été trop paresseux et trop négligent pour en
faire une étude approfondie. Cela dit, quelques-unes de ses remarques m’ont plu, surtout quand il
trahit par 2 fois son école ; premièrement à propos de la recension occultée de la Volonté dans la
nature : il s’agissait des Heidelberger Jahrbücher, car en 1836, lorsqu’il m’a rendu visite, il a dit
7

qu’il rédigeait une recension pour ces derniers ; il était alors docent à Heidelberg ; et
deuxièmement, à la fin, sa présentation naïve de la politique des professeurs — une confessio
crapulitatis . Vous devez lire Weigelt : on remarque qu’il adopte ma philosophie ; il écrira encore
8

d’autres choses, celui de la Feuerspritze également. Une fois que quelqu’un en est possédé, cela
9

coule de source.
La guerre est aussi une calamité pour la littérature, elle attire à elle toute attention.
10

Salutations à Lindner et portez-vous bien !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 26 mars 1854.
P. S. En qualité d’évangéliste en chef, vous devez connaître tout ce qui se rapporte à ma
philosophie ; j’ajoute donc ce qui suit. Afin de blanchir les professeurs de philosophie, Fortlage
se réfère à une recension de Beneke , ce lamentable nigaud qu’il appelle un « gros-bec » et qu’il
11

met en parallèle avec moi. Cette recension de 1820 était un misérable avorton, une défiguration
et une parodie de ma philosophie truffée de citations MENSONGÈRES, affublées de GUILLEMETS.
Cela m’a incité à envoyer à la rédaction de la Jenaische Literaturzeitung non pas une
anticritique, mais un « Blâme nécessaire pour citations MENSONGÈRES ». Cette dernière l’avait
d’abord transféré à Beneke pour qu’il y réponde. Il est venu me voir deux fois, pour régler
l’affaire de vive voix. Mais quand il entendit pour la deuxième fois « que j’étais présent, mais
qu’il n’était pas possible de me parler », la bonne me rapporta que « le jeune homme était devenu
tout pâle ». Il avait rédigé sa recension sous anonymat, mais j’étais tellement certain de l’avoir
identifié que j’avais ajouté le blâme suivant : « L’auteur de la recension est un certain Dr.
Beneke, âgé de 22 ans, qui l’été dernier assistait encore à mes cours EN QUALITÉ D’ÉTUDIANT. » Ce
menteur crapuleux s’est alors défendu en accusant le typographe : « Ce dernier a placé des
guillemets qui ne se trouvaient pas dans le manuscrit. » Credat Judaeus Apella . Il venait tout
12

juste d’obtenir son titre de docteur et avait l’intention de me miner par cette recension. C’est
donc à cela que se réfèrent ces messieurs, comme digne considération à mon égard. Ils sont tous
faits de la même pâte, et il n’y en a pas un parmi eux qui ne voudrait pas envoyer au diable et
moi et ma philosophie, car nous perturbons leurs manœuvres. Ma philosophie doit pénétrer le
public savant EN DEHORS DES UNIVERSITÉS. Et ensuite : vae victis !13

323. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur et ami,

Voir à quel point vous êtes toujours familier avec ma philosophie et maîtrisez l’ensemble
2

me procure une joie extraordinaire. Le passage de Frauenstädt que vous évoquez m’a également
3

contrarié, et votre réfutation est tout à fait juste. Le rapport entre l’Idée et la chose en soi se
trouve clairement expliqué dans les § 32 et 34 du premier tome de mon ouvrage principal. De
façon générale, je dirais la chose suivante : l’Idée platonicienne n’est en effet que la
représentation intuitive, c’est-à-dire le phénomène même, conçue comme un degré
d’objectivation de la volonté et libérée, par ce biais, de la multiplication générique par l’espace et
le temps, mais aussi libérée de ce qui est précisément impliqué par ces derniers, à savoir le
hasard, les défauts et les imperfections. Sa conception exige l’élimination de la volonté dans la
conscience, élimination qui, en tant que telle, ne peut pas provenir de la volonté elle-même, et
par conséquent n’a lieu que par une prépondérance momentanée de l’intellect. La signification
spécifique des Idées singulières — les figures animales et ses parties et formes, telles que je les
ai expliquées dans la Volonté dans la nature — n’est que la confirmation empirique de la vérité
fondamentale que je présuppose, à savoir que la chose en soi de ce phénomène est la volonté de
vie, que nous voyons ici se produire dans diverses conditions et s’adapter. Chercher des
contradictions chez moi est tout à fait présomptueux : tout est fait d’une seule pièce. Mais il me
semble qu’en voulant faire preuve de perspicacité, le bon Frauenstädt n’ait pu proposer que de
petites critiques pointilleuses. Mais je lui dois beaucoup, quand je pense que ce n’est que grâce à
ses efforts continuels et courageux durant 8 ans que ma philosophie pénètre enfin le public et que
la kabbale des professeurs se trouve contrecarrée.
Si vous vouliez à présent, vous qui m’avez compris le plus profondément, rassembler les
réfutations que vous venez de m’écrire, avec quelques ajouts, en une critique et une recension du
livre de Frauenstädt, et les envoyer par exemple aux Heidelberger Jahrbücher ou à n’importe
quel journal — alors vous seriez également un évangéliste actif et vous ne seriez plus privé de la
gloire de Dieu ! Vous deviendriez ainsi l’authentique évangéliste canonique ! Voulez-vous donc,
4

pour l’amour du ciel, quitter ce monde sans avoir été IMPRIMÉ ? Absit ! Quelle idée effrayante !
5

Vous pourriez également recenser le petit livre de Weigelt, Conférences populaires, ce que vient
d’ailleurs de faire un idiot tout à fait ignare dans les Grenzboten . Voulez-vous rejoindre la
6

neutralité de la Prusse et de l’Autriche qui assistent au spectacle les mains dans les poches ? Oh !
7

je n’en dis pas plus.


J’ai reçu hier une lettre de Frauenstädt : il me prie de bien vouloir lui faire part de ce que
vous pensez de son livre. J’ai l’intention de lui envoyer votre lettre : si cela ne devait pas vous
convenir, vous avez 3 jours pour protester et mettre votre veto.
Doss est devenu greffier au tribunal de la ville. Je lui ai répondu dernièrement.
Madame M. n’a RIEN envoyé, alors que le 23 févr. elle avait promis de me faire parvenir un
8

billet. Nous en sommes restés là.


Je me réjouirais de tout cœur de vous voir bientôt ici, et je demeure avec mes meilleurs
vœux

Francfort le 31 mars 1854. votre ami dévoué


Arthur Schopenhauer
324. À SIBYLLE MERTENS-SCHAAFFHAUSEN 1

Très honorée Madame Mertens, jusqu’à ce jour j’ai attendu en vain ce que vous m’aviez
promis dans votre chère lettre du 23 févr., ainsi que le billet pour les deux ans d’affermage au
nom de Monsieur Rauscher . Je sais que l’entière somme de l’affermage vous a été payée en
2

bonne et due forme, car l’été dernier, Monsieur Abegg, à ma demande, m’avait écrit qu’il avait
transmis cette somme à Cologne, selon votre volonté. Peut-être avez-vous de nouveau oublié
toute cette affaire, ou a-t-elle été négligée par les mandataires. C’est pourquoi, afin de vous éviter
tout effort et tout développement trop long, j’ai pris la liberté de faire tirer un billet de 300 Rth
sur votre nom, à l’ordre de Monsieur B. H. Goldschmidt, ici même. Comme vous avez reconnu la
légitimité de cette exigence et que vous avez exprimé l’intention de payer, je ne puis douter que
vous honorerez également la traite.
Je n’ai pas reçu votre lettre de Rome et elle a sans doute été détournée par votre valet italien
3

; ce dernier, au cas où la lettre était affranchie, l’a certainement considérée comme une petite
douceur* que vous vouliez lui destiner avec délicatesse.
Dans l’affaire de Dietrich, le verdict est tombé à notre désavantage et vous avez été jugée
par défaut. Le bail emphytéotique de Friedrichsen arrive à échéance le 1 oct. et je lui ai écrit que
er

j’attendais sa demande de renouvellement.


Je constate à grand regret que vous avez été victime d’un inquiétant accès apoplectique,
sans doute de nature nerveuse, c’est pourquoi je vous conseille de bouger beaucoup à l’air libre
et de refuser toute tâche fastidieuse. Avec mes meilleurs et sincères vœux de rétablissement, je
demeure avec le plus profond respect votre serviteur dévoué

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 7 avril 1854.
325. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Vieil ami fidèle.

Je vous renvoie ci-joint les deux lettres du vieux que vous auriez aussi bien pu garder
2

auprès de vous, en m’épargnant ainsi la pénitence de le lire. Je ne suis pas suffisamment


revanchard pour joindre, en rendant coup pour coup, une lettre de ce dernier, reçue en mars, où il
m’annonce également son chant des cygnes ou Coup de balai philosophique , ainsi que son 3

article contre la vaccination rédigé pour un journal de médecine. Il a maintenant atteint l’âge du
4

radotage, mais il demeure néanmoins une personne respectable, à savoir le plus ancien
évangéliste. Il apporte malgré tout son aide, en amplifiant au moins les cris de guerre. Par contre,
la lettre ci-jointe de Becker est bien précieuse. Sans que je le lui demande, il y a exprimé son
5

opinion sur votre livre. Je suis entièrement d’accord avec sa critique du passage p. 270 : ce
passage m’a également irrité. Comme cela est admirable, et en même temps flatteur pour moi,
que ce juge régional, surchargé par ses propres affaires, témoigne toujours d’une parfaite
familiarité avec ma philosophie, jusque dans les plus petits détails et subtilités.
Les deux recensions que vous m’avez recommandées sont toutes deux des productions fort
6

pitoyables. Selon moi, celle du Grenzbote n’a pas été rédigée par la crapule qui a commis la
première ; il montre en effet clairement qu’il ne connaît ma philosophie QU’À PARTIR DE CE
7

MAIGRE RÉSUMÉ de Weigelt : et c’est à partir de ce dernier qu’il critique non pas Weigelt, mais
bien MOI, avec la plus grande suffisance*, mais sans faire usage du même venin que la première
crapule. Celui de l’Europa est un faiseur de phrases insipide et prolixe. Or cette vermine est
utile, pour propager ma gloire. Personne ne se fiera à ce genre de gaillard, mais tout le monde
verra qu’il y a là quelque chose.
Je remarque encore à propos du livre de Weigelt que sa présentation de la philosophie
kantienne est mauvaise, surtout parce qu’au lieu de démontrer l’idéalité de l’espace avec les
arguments propres à Kant, aisés à faire comprendre, il cherche à démontrer cela avec son
verbiage superficiel. Il a beaucoup mieux présenté Fichte, ainsi que Jacobi. Même quand il parle
des autres, il trahit son enthousiasme pour moi.
À part cela, je n’ai rien aperçu, et rien ne s’est passé, exceptés quelques étudiants qui se sont
présentés, chacun séparément, alors que je n’étais pas chez moi : ces gens-là poursuivent
immédiatement leur route, sans jamais revenir. Et le jeune Dr. Gwinner , fils du sénateur, m’a
8

également rendu visite, « pour me voir et faire ma connaissance ».


Le Dr. Lindner m’a envoyé la Vossische, avec la nécrologie de Beneke , ce pour quoi je lui
9

suis très reconnaissant. Car la carrière de ce pécheur m’intéresse. Finalement, je crois qu’il a
voulu se faire l’égal d’Empédocle et s’est jeté dans Dieu sait quel trou, où le diable pourra venir
le retrouver. Au lieu des pantoufles en bronze, ce sont les lunettes en or qui en jailliront un jour.
10

On pourrait se demander si c’est un dérangement* de ses « investissements » ou de ses affaires


11

qui l’y a poussé. Beaucoup de suicides à Berlin ? Je veux bien le croire ; c’est un patelin maudit,
physiquement et moralement, et je remercie vivement le choléra de m’en avoir chassé, il y a 23
ans, et de m’avoir amené ici, où le climat est plus clément et la vie plus douce. Bon endroit pour
un ermitage* !
Quant à vous trouver un travail littéraire, celui que je propose dans les Parerga, tome 1, p.
32 pourrait vous convenir, mais cela demande beaucoup d’étude et de temps.
12

Je vous salue cordialement

Francfort s. M., votre ami


le 9 avril 1854. Arthur Schopenhauer.
326. À MARTIN EMDEN 1

Vieil ami fidèle !

Comme souvenir éternel de vos conseils couronnés de succès , je vous prie de bien vouloir
2

accorder à ce miroir d’avocat une place sur votre mur.


3

[22 avril 1854] A. S.


327. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher et vieil ami !

Ne développons pas davantage la controverse autour du passage critiqué par Becker . Si 2

votre livre doit connaître une seconde édition, je vous enverrai encore une fois la lettre de
Becker, afin que vous puissiez clore l’affaire avec sang-froid. Becker est venu ici le 2 jour de
e

Pâques , uniquement pour passer la journée avec moi. Je lui ai montré votre lettre et vos
3
commentaires, mais lui et moi restons d’accord avec ce qui a été dit. Ce qui est curieux, c’est que
le dernier produit du vieux contient également deux passages très significatifs sur le punctum
4

controversiae : il n’a pourtant pas encore lu votre livre. Nihil desperandum, c’est-à-dire qu’une 2 e

édition de votre livre demeure possible, d’autant que selon Börne, c’est une particularité des
Allemands que de lire plus volontiers un livre portant sur un livre que le livre lui-même — et il a
raison en cela.
Quant au produit du vieux, c’est par sentiment du devoir que je me suis infligé la torture
psychique de le lire en entier : radotages d’un vieillard* et quelques peu nombreux intervalla à
moitié lucida. À 78 ans, on ne devrait plus écrire. Mais de surcroît, il m’a écrit une lettre de 12
pages très denses ! Il faut d’abord traverser laborieusement le griffonnage et après le déchiffrage,
on ne trouve que du radotage*. On en sort la tête toute retournée. Je lui ai répondu aimablement,
mais avec brièveté. Terrifiant, quand la prolixité due à l’âge se fait encre. De plus il est devenu
grincheux, au point qu’il cherche des noises même à ma philosophie. Cela n’est point nuisible.
Mais j’avoue avoir été irrité par l’article « La philosophie dans ses nouveaux habits », dans les
Literarische Blätter . Après que ce journal a parlé de moi tant de fois et si grandement, cet auteur
5

arrive en se plaignant qu’actuellement, il ne se passerait RIEN en philosophie, et qu’elle serait bel


et bien morte. N’est-ce pas là vous jeter des mensonges au visage ? Cette ignorance effrontée de
mes contributions ne devrait plus être permise de nos jours, c’est une infamie. J’aimerais que
vous rédigiez un article amusant, par exemple « Réconfort pour Monsieur l’auteur de la
philosophie dans ses nouveaux habits », et ce avec malice.
Je viens de feuilleter le nouveau tome de la Doctrine du droit de Stahl . Avec quelle
6

effronterie un tel Tartuffe cherche à mentir à la jeunesse ! Verbiage grossier, stupide et


misérable. Un tel gaillard ne peut évidemment que m’ignorer jusqu’au dernier moment :
Le petit peuple ne remarque jamais le diable,
Même s’il les tenait par le cou .7

Et pourtant ! Leur cœur tremble lorsqu’ils entendent mon nom. Vous pouvez me croire.
Selon nos habitudes, je joins une lettre d’hommages, de Berne , qui a mis PRESQUE 3 MOIS à
8

arriver, par voie de libraire. Son livre porte sur Le Marchand de Venise, à la façon de Gervini
donc, et il prête à Shakespeare des concepts abstraits, moraux, ce que j’ai raillé dans mes
Parerga. Étude de ma philosophie, dit-il ? Aucunement. Je lui ai cependant répondu
aimablement et avec courtoisie, en lui signifiant très subtilement que ce n’était pas encore tout à
fait cela.
Oh, une farce ! Il y a environ 15 jours, Erdmann arrive de Paris , veut tout de suite
9 10

continuer pour se rendre à Mayence, mais manque le train et doit passer la nuit ici (Sic narrat et
forsitan mentitur ). Alors qu’il a l’intention de descendre dans un hôtel, il se rappelle un passus
11

de votre livre (que Kilzer et moi désapprouvons fortement, mais peut-être est-ce pour lui la chose
la plus intéressante du livre), où il est question de l’Hôtel d’Angleterre , etc. « Il s’y trouve peut-
12

être encore », pense-t-il. J’arrive pour dîner, un homme se lève et se présente comme étant le «
prof. Erdmann de Halle ». Son extérieur est assez avenant : il a une certaine tournure*. Mais je
13

ne suis pas parvenu à mettre en route une conversation correcte et cohérente, car à chaque mot, il
prend la tangente pour raconter une histoire qui n’a aucun rapport avec l’affaire. En face de nous
est assis un quidam ignotus , cigare au bec et barbe, qui écoute d’abord notre conversation et
14

ensuite vient même s’y mêler. Moi, selon ma tactique immuable, je ne lui réponds pas un mot.
Mais Erdmann s’y engage et le discours entre les deux devient de plus en plus vif, de sorte qu’on
semble m’oublier. Je saisis ce moment pour déguster ma moitié de poulet et pour boire ma
chope, et ensuite je me lève soudainement, en me réjouissant d’avoir eu l’honneur de connaître
Monsieur le Professeur, etc. Il n’a pas tout à fait réussi à dissimuler sa surprise et sa perplexité, et
m’a même demandé « l’autorisation de m’aborder si nous devions nous revoir » !!! Je lui ai
demandé de vous saluer de ma part lorsqu’il serait à Berlin. Nous n’avons même pas passé une
heure ensemble, et la plupart du temps j’ai pris mon repas. C’est ainsi qu’il tire profit de
l’occasion.
Une question : un jour, dans les Konversations-Blätter de Brockhaus , Fallmerayer s’est
15

adonné à une terrible exécution de Ringseis, ce vaurien obscurantiste : en quelle année était-ce ?
Si vous le savez : c’est important pour moi.
Vous me RENDRIEZ SERVICE si vous pouviez apprendre de Hayn combien il a vendu
d’exemplaires des Parerga dans la deuxième année, donc dans l’ensemble.
Soyez joyeux et bien-portant !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 11 mai 1854.
328. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur Becker !

Veuillez accepter l’exemplaire ci-joint d’un produit dont je ne saurais vous dire beaucoup
2

de bien : c’est le radotage d’un vieillard*. Ce faisant, je vous prie de bien vouloir me renvoyer le
livre de Weigelt, car vous l’avez depuis 4 semaines, et que j’ai reçu hier une lettre de l’auteur , 3

enthousiaste à l’excès : pour lui répondre, j’aimerais avoir le livre . Mais si vous deviez avoir pris
4

la décision héroïque de faire une recension de ce livre, ainsi que de celui de Frauenstädt, je vous
prierais de le garder selon vos aises, car tout doit céder la place à un aussi grand événement. Cet
été paraîtra une 2 édition de la Volonté dans la nature.
e

Madame M. a payé le billet ! Heureusement que vous m’avez détourné des procédures
juridiques par votre épouvantable estimation des frais ! Cela aurait tout gâché. Pour ses conseils,
j’ai offert au Dr. Emden la grande gravure sur cuivre Le Jugement, sous verre et encadré.
En vous saluant cordialement,

Francfort Arthur Schopenhauer


le 13 mai 1854.
329. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur et ami !

Votre dernière lettre a une nouvelle fois renforcé ma conviction que parmi tous les vivants,
2

vous êtes le plus grand connaisseur de ma philosophie, que vous la comprenez autant que moi-
même, en ayant de surcroît mémorisé les paragraphes, comme ceux de votre corp. juris, de sorte
que pour toute chose, vous pouvez immédiatement citer le passage décisif. Tout ce que vous
dites sur le livre de Weigelt est tellement pertinent que je n’ai pu m’empêcher de lui envoyer la
lettre afin de l’éclairer : j’ai cependant coupé votre nom et Mayence ; ainsi, il ne pourra pas
savoir qui l’a écrite. J’inclus sa lettre fort intéressante , mais je vous prie de me la renvoyer APRÈS
3

2 JOURS, car elle doit ensuite aller à Berlin, chez Frauenstädt. Je vous prie d’accepter (dans l’état
dans lequel il se trouve malheureusement !) le livre de Weigelt que je vous envoie encore une
fois et de le garder définitivement. Je caresse l’espoir que vous vous déciderez quand même à en
faire une recension, car personne d’autre que vous n’est aussi compétent pour écrire sur ma
philosophie. De plus, il n’y a pas urgence au sujet de cette recension. En même temps je vous
fais savoir qu’avec sa lettre, Weigelt m’a envoyé encore une fois son livre, ainsi que 4 petits
tomes de conférences germano-catholiques qui témoignent décidément d’un certain talent. Je
n’ai sollicité l’exemplaire que je vous renvoie à présent que parce que je croyais y avoir
SOULIGNÉ plus de passages, et j’avais l’intention d’en faire usage pour lui répondre. Je voulais
également comparer les exemplaires, car il m’avait signalé que le dernier envoyé était d’une
impression neuve. Je ne remarque aucune différence. Peut-être concerne-t-elle les erreurs
typographiques.
Le Dr. Lindner vient de m’écrire beaucoup de choses concernant l’influence grandissante
4

de mes écrits, et même des choses tout à fait incroyables. Il m’envoie également l’hebdomadaire
berlinois Echo . Eine musikalische Zeitschrift du 7 et 14 mai, où l’on polémique contre les opéras
5

de Richard Wagner, avec des passages sur la musique qui se trouvent dans mes écrits, comme si
c’étaient des paroles oraculaires sacrées. J’ai appris qu’à cause de moi, les professeurs écument
de rage dans leur petite boutique, dans ce journal écrit par et pour les professeurs de philosophie 6

(parce que personne d’autre ne le lit) — je l’ai commandé, nous verrons bien.
Cela s’annonce plutôt bien pour moi, il était temps. En me fiant à votre sympathie, je
demeure

Francfort votre ami dévoué


le 20 mai 1854. Arthur Schopenhauer
330. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Monsieur le Dr. Lindner,

Je vous remercie cordialement pour votre envoi, qui m’a fait grand plaisir. Mais il est tout à
fait superflu d’affranchir ce genre d’envoi, car il s’agit de choses pour lesquelles je serais
volontiers prêt à payer 3 fois les frais d’affranchissement, et qu’avec votre aimable prévenance,
vous en faites déjà suffisamment. Si dans le prochain numéro, où sera publiée la fin de l’article,
devait se trouver encore autre chose sur moi, je vous prie surtout de me l’envoyer, sous
enveloppe fermée. Vous avez oublié que ce Kosak a obtenu son titre de docteur depuis bien
longtemps, et que c’est en tant que converti qu’il a été admis, grâce à sa recension, etc., dans la
Feuerspritze, que vous m’avez vous-même envoyée . Vous avez entièrement raison dans ce que
2

vous dites sur ce genre de tirailleurs et criailleurs à répétition : gutta cavat lapidem, non vi, sed
saepe cadendo . Il ne faut pas se méprendre sur ces gens-là !
3

Mais je regrette que vous ne vous soyez pas exprimé de façon plus explicite sur : « Le
médecin (qui ?) dont le frère (qui ?) a réussi à enthousiasmer toute une garnison prussienne
4 5 6

(où ?) pour ma philosophie (!! hyperbole gris cendre, fabuleuse ! sans doute une simple
plaisanterie) — une physiologie du cerveau basée sur ma philosophie. » Ce passage semble
présupposer des connaissances qui m’échappent entièrement, car ce n’est pour moi qu’une
énigme piquante.
J’ai reçu de Weigelt une lettre très enthousiaste, et même incroyable, que j’envoie
aujourd’hui à Frauenstädt , en souhaitant que vous la lisiez également. Il s’annonce comme un
7

évangéliste très actif, con fanatismo, et talentueux.


S’il vous reste un exemplaire de votre livre sur l’opéra , je l’accepterais volontiers, je le
8

lirais également en vous disant ce que j’en pense, mais au cas où les exemplaires sont rares, je ne
voudrais pas qu’en me l’envoyant, vous en priviez ceux qui sont plus proches de vous, ou de la
chose, que je ne le suis.
Sur ce, en vous saluant cordialement,

Francfort s. M. votre
le 22 mai 1854. Arthur Schopenhauer
331. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Nos lettres, cher ami, se sont croisées. Je vous remercie pour vos comptes-rendus, dont la
matière vous est si confortablement fournie par la Salle de lecture royale que je souhaiterais
2

vous voir fréquenter davantage que vous ne semblez le faire, car ainsi je prendrais connaissance
de nombreux propos me concernant et dont je ne peux rien savoir dans cette ABDÈRE. J’ai
commandé les deux numéros du journal écrit par et pour des professeurs de philosophie , ainsi 3

que le traité de Helmholtz , dont le père était (probablement) un bon ami à moi , et nous verrons.
4 5
Dans leur petite boutique , ces messieurs feraient bien de ménager un peu leurs propos sur moi,
6

puisque je viens de signer avec Suchsland et que la 2 édition de la Volonté dans la nature,
e

améliorée et augmentée, paraîtra en septembre, avec une préface qui réjouira les professeurs de
philosophie. Je reçois aussi des honoraires corrects, comme un grand garçon — 1 carolin par
feuille ! L’« orthographiste maison » est censé l’imprimer, SI c’est bien l’orthographe qu’il se
7

fixe pour but ; ce à propos de quoi je m’entretiendrais DIRECTEMENT avec lui : dans le cas
contraire, ce sera non ! Cela dépend de moi.
Le Dr. Lindner m’a envoyé 2 numéros très intéressants du journal musical Echo, que vous
connaissez sans doute. Le Kossak esthétique y fait usage de mes expressions contre R. Wagner,
8

de façon très pertinente et à bon droit. Bravo !


La lettre d’hommages ci-jointe de Weigelt VAUT VRAIMENT LA PEINE D’ÊTRE LUE, elle était
accompagnée d’un exemplaire de ses conférences et de 4 petits tomes de conférences germano-
catholiques où il montre beaucoup de talent. J’espère avoir rencontré en lui un évangéliste actif
et fanatique comme il se doit, voire plus que cela, car tel saint Paul à Athènes, c’est de viva voce
qu’il propage mes doctrines auprès des païens. Vous savez que depuis longtemps je prends
plaisir à ces Thessaloniciens. Je lui ai répondu avec beaucoup de bienveillance en joignant une
lettre de Becker (dont j’ai cependant coupé le nom et Mayence), dans laquelle il fait une critique
fondamentale des conférences de Weigelt, tout en témoignant d’une compréhension tellement
profonde de ma philosophie, avec en plus une connaissance spécifique de tous les passages, que
je ne puis que l’admirer. Weigelt aura du respect en voyant quel genre de personnes se trouve
rassemblé sous mon drapeau. J’ai offert le vieil exemplaire à Becker : il est censé le stimuler
9

pour une recension, mais il hésite et vacille toujours. Ah, comme il est difficile de régir une telle
école de philosophes avec ses apôtres ! Et ils finiront peut-être même par se disputer entre eux !
Il me semble que vous avez été un peu trop sévère avec le vieux : il ne faut pas oublier ses
10

mérites durant tant d’années, et avec des personnes âgées, il faut savoir garder patience, comme
avec des enfants.
Je n’ai rien de nouveau à rapporter, je vous prie de me renvoyer à l’occasion les deux lettres
d’hommages et je vous salue, vieil apôtre en chef, de tout cœur.
11

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 22 mai 1854.
332. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Très cher ami !

J’ai non seulement envoyé, mais aussi offert à Weigelt la lettre de Becker, et je ne la
connais pas par cœur, aussi peu que tout ce que j’ai écrit à Weigelt à ce propos. Je me rappelle
que Becker lui reproche d’avoir mal compris et d’avoir gâché ma plaisanterie avec le corbeau , p.2

120 ; et Becker illustre alors la plaisanterie avec un couplet de Heine : sur ce point, j’ai
également remis Weigelt à sa place, d’autant plus qu’il semble ainsi que je jalouse les salaires
des professeurs, dont je n’ai pas besoin, et je lui ai recommandé de toujours reproduire mes MOTS
en entier et sans abréviations. Becker a joliment réfuté ses objections p. 153. sq., en lui
reprochant, entre autres, de dire que j’INCITE les hommes à l’ascèse, à la négation de la volonté de
vie, etc., alors qu’en fait, et Becker a raison de le dire, je n’ INCITE personne à faire quoi que ce
soit, mais je ne fais que refléter le monde, je montre ce que chaque chose est et sous quels
rapports, en laissant à chacun la liberté de ses actes.
Quand Weigelt corrige mon résultat final, Becker le persifle avec
Avoir vécu joyeusement et être mort paisiblement
C’est avoir gâché le jeu du diable .
3

J’ai fait savoir à Weigelt que, suite à ses devanciers et à sa philosophie antérieure, l’ascèse
lui était encore trop étrangère, et qu’il devait lire des écrits ascétiques, en premier lieu Theologia
deutsch, 1851. Il vient d’un courant germano-catholique, perfide et fondamentalement hostile au
prétendu christianisme : le jeune hégélianisme, Feuerbach, etc., etc. Aussi est-ce un débutant
dans ma philosophie ; il mérite donc qu’on soit PARFAITEMENT INDULGENT à son égard. De plus, il
affirme dans sa lettre qu’il aimerait éliminer certaines choses qui se trouvent dans son livre et en
changer beaucoup d’autres.
Quant à l’ascèse, c’est à juste titre que Becker renvoie Weigelt au passage décisif et
important du DEUXIÈME tome de mon ouvrage principal, p. 603 ET 604, qui commence p. 603
avec « Ces vertus morales », etc., jusqu’à « La justice », etc. : toute cette 1 page ½ concerne
4 re

notre affaire. Jadis, lors d’une controverse , je vous ai déjà dit que dans mes lettres, je refuse de
5

ruminer de façon superficielle et fragmentaire tout ce que j’ai dit dans mes écrits avec la plus
grande réflexion et concentration possibles. Vous trouverez dans mes écrits tout ce que j’ai à
dire.
J’ai lu la jolie recension des Parerga par Fichte : comme elle est misérable, stupide et basse
6

! Eh bien, ces messieurs verront en automne quelles améliorations de mes procédés ils
7

provoquent par ce genre d’instructions.


Dans le dernier numéro du Centralblatt, habituellement hostile, je constate qu’on
recommande aux admirateurs de ma philosophie le livre de Graul sur les écrits tamouliques :
sensu aequo. Cela signifie que de façon générale, on commence tout de même à prendre
connaissance de moi.
J’étais persuadé que le Dr. Oelsner était le baron Oelsner, celui qui était en prison à
8

Constantinople. Peut-être vaut-il mieux être mort que là-bas. Est-il vraiment mort ? Ou est-ce un
canard* ? Dommage, c’était un jeune apôtre pour la France, où règne encore une grande
obscurité.
Je travaille avec ardeur à la Volonté dans la nature — et je vous souhaite de tout cœur santé
et bien-être.
Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.
le 31 mai 1854.

333. CONTRAT
POUR LA DEUXIÈME ÉDITION
DE LA VOLONTÉ DANS LA NATURE 1

Contrat d’édition

Entre Monsieur le Dr. Arthur Schopenhauer et la librairie Joh. Christ. Hermann a été
convenu et arrêté le contrat d’édition ci-après qu’ils sont tenus de respecter strictement :
§1

Monsieur le Dr. A. Schopenhauer cède à la librairie Joh. Christ. Hermann le droit de


publication pour une deuxième édition de son ouvrage amélioré et augmenté par ses soins, De la
volonté dans la nature.
§2

La librairie Joh. Christ. Hermann rémunère Monsieur l’auteur avec un Louis d’or par feuille
de la nouvelle édition, mais seulement à la fin de la foire des libraires de Leipzig le troisième
dimanche après Pâques 1855.
§3

Par ailleurs, la librairie s’engage à ne choisir l’imprimeur du livre qu’avec l’accord de


Monsieur l’auteur.
§4

Elle s’engage également à veiller à ce que l’orthographe et la ponctuation suivent


exactement le manuscrit de Monsieur l’auteur et que l’impression s’effectue à l’identique de
l’ouvrage De la quadruple racine. La librairie s’engage explicitement pour la dernière correction
à envoyer franco de port chaque feuille accompagnée du manuscrit à Monsieur l’auteur.
§5

Le tirage est fixé à 1 000 exemplaires. Monsieur l’auteur reçoit 10 exemplaires gratuits sur
un papier de première qualité.
§6

Monsieur le Dr. Arthur Schopenhauer s’engage explicitement à ne pas faire publier de


troisième édition avant épuisement de la deuxième, sous quelque forme que ce soit ; dans le cas
contraire, Monsieur l’auteur devra verser à la librairie d’édition des indemnités s’élevant à deux
cent gulden, et par ailleurs les honoraires déjà versés devront être restitués.
§7

La librairie Joh. Christ. Hermann renonce à tous droits exigibles concernant la troisième
édition.
§8

La librairie Hermann se charge de satisfaire toute demande que pourrait formuler l’actuel
propriétaire des exemplaires restants, Monsieur Schulz à Leipzig.
Ce contrat d’édition a été rédigé en deux exemplaires et signé et scellé par les deux parties
contractantes.

Francfort s. M. [signé]
le 16 juin. 1854. Arthur Schopenhauer
[signé]
librairie Joh. Christ. Hermann
334. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Si je ne savais, par expérience, combien vous êtes parfois en retard sur la littérature la plus
récente, je tiendrais pour certain que vous vous trouvez déjà dans un état d’indignation terrible à
cause de l’article « Pour caractériser Schopenhauer » de Rosenkranz, dans la Deutsche
Wochenschrift, cahier 22 . Si ce n’est pas le cas, DÉPÊCHEZ-VOUS de le lire et de vous mettre dans
2

l’état évoqué plus haut. Quelle misérable crapule , ce Rosenkranz !


3

Cela ne me portera pas préjudice, ce n’est là que de l’huile jetée sur le feu, il me présente au
public (comme s’il était mon champion) sous les airs d’« un empereur allemand élu à Francfort !
» (empereur de la philosophie) . Je ne puis croire que quelqu’un, même sans me connaître par
4

ailleurs, soit assez niais pour ne pas voir que l’auteur de cette caractérisation est un… débordant
de jalousie et de fureur, qui s’efforce de noircir un homme doté de qualités rares, en ramassant ce
qu’il peut saisir, surtout des topoi moraux qui se prêtent particulièrement bien aux dénigrements.
Mais par-dessus le marché, il est tellement stupide, et fait l’éloge de tant de choses positives chez
moi (ce qu’il fait pour sauver l’honneur de son goût), que tout le monde verra que ce qu’il dit de
négatif n’est pas tenable. Ma dignité d’empereur ne me permet pas de répondre à un tel…. Il s’en
prend, avec une pruderie moralisante, à ma théorie très juste du droit de mentir (dans certains
cas) , partageant avec Kant cette indignation cruelle et maniérée face à tout mensonge, en
5

l’utilisant comme bouclier et en jouant au vertueux. Mais ce faisant, IL MENT LUI-MÊME de façon
grossière ; par ex. p. 674, j’aurais dit : « Schelling est un gribouilleur d’absurdités » (jamais !
c’est son maître et professeur que j’ai appelé ainsi à juste titre) ; p. 675, on me reproche ma «
prolixité de vieillard et mon laxisme » : or qui d’autre a déjà écrit de façon plus concise que
moi ? Comparez avec ce qu’il me fait dire de Jésus-Christ , p. 677. Comparez ce que j’ai dit, et le
6

passage dans l’Évangile même, avec sa citation qui passe sous silence le « en secret ». Selon lui,
le misérable pamphlet dans les Hallische Jahrbücher fait AUTORITÉ contre moi et présente une «
7
critique profondément piquante » : il s’agit du mauvais ouvrage truffé de grossières FAUTES
littéraires, de je ne sais quel garçon juif anonyme de cette ville qui ne sait pas le latin — et p.
676, Rosenkranz me reproche DE NE PAS AVOIR RÉPONDU à ce genre de choses, ni à la recension
anonyme de Herbart ! Si seulement Rosenkranz voulait bien nous dire pourquoi l’article de la
8

Westminster Review doit avoir été « ÉCRIT EN ALLEMAGNE », puisque ni vous ni moi ne savons
9

qui en est l’auteur ; p. 678, j’aurais « remplacé la décision par un acte volontaire subjectif » —10

c’est un grossier mensonge ; p. 679, « il faut nous demander SI TOUT UN CHACUN AGIRAIT DE LA
SORTE » !! Donc agir comme tout le monde, comme la foule foncièrement mauvaise ! oi pkeirsoi
11

amϑqxpoi jajoi , voilà la maxime sélective de Bias, et c’est vrai, comme tout le monde sait ;
12

ibid., « il n’a pas pu échapper (à Arthur Schopenhauer) à quel point la tendance à la cruauté est
ancrée en l’homme ». Oh ! C’est pour cette raison que j’ai élevé la COMPASSION en principe,
comme contraire de la cruauté. « Concept du bien et du mal — ou liberté » — et ils seraient
identiques ?! ; p. 682, en bas, « mauvaise copie » — comme si c’était MOI qui parlait ainsi ; p.
13 14

681, en haut : je n’aurais « RETENU » de la philosophie kantienne que la nature secondaire de


l’intellect , alors que Kant n’en savait rien, ni personne d’autre ; p. 674, « racine du principe de
15

raison » ! Eh bien, vous trouverez vous-mêmes les autres pépites.


16

J’ai également lu la jolie recension de mes Parerga par Fichte . Comme c’est bas et
17

mauvais ! Ces messieurs arrivent maintenant avec leurs seringues à lavements, afin d’éteindre
l’incendie dont ils sont les incendiaires, et celui-ci n’en flamboie que d’autant plus ardemment.
Dans le Central-Blatt, qui d’habitude nous est hostile, un écrivaillon sanskritiste a
récemment donné la recension de Tamulica, un livre de sanskrit de Graul , en ajoutant qu’il
18

serait également intéressant « pour les admirateurs de la philosophie schopenhauérienne ». Bravo


!
Saluez Lindner de ma part : ce qu’il m’a écrit a trouvé confirmation . De cette garnison de
19

Magdebourg, dont il m’avait assuré l’enthousiasme, est venu me voir l’autre jour un certain
lieutenant v. S……, un apôtre qui me porte autant dans son cœur que vous ou Doss, et qui, à
chaque occasion, cite un passage de mes écrits ; il ne lit rien d’autre depuis 3 ans. Environ 20
officiers de sa garnison témoigneraient de la même ferveur, et ils se seraient consultés en février
pour décider si pour mon anniversaire ils devaient m’envoyer une lettre de vœux commune, mais
finalement, cela ne s’est pas fait. Voyez-ça* ! J’avais laissé entendre que je prenais mes repas à
l’Hôtel d’Angleterre : 2 jours après (son dernier jour ici), je le trouve installé à côté de ma place,
avec un autre officier, très aimable, de sa garnison. Ils ont montré beaucoup de gaudium en ma
20

compagnie : je suis donc resté jusqu’à 3 heures ¾ ; en me réjouissant de pouvoir enfin apprécier
mon café et mon somme, je me suis hâté vers ma maison, mais malheur ! déjà dans le port je me
fais aborder par un professeur de philosophie en chair et en os, qui m’avait déjà attendu chez moi
pendant 1 heure ½, car il était venu exprès de Hombourg, où il fait une cure balnéaire, pour me
contempler : il m’a reconnu grâce aux daguerréotypes, malgré mon chapeau. Il m’a donc
accompagné. C’était le professeur Weissenborn de Marbourg , le même qui, en tant que docent,
21 22
avait détourné les auditeurs d’Erdmann . Par ailleurs, il n’est pas très intéressant, mais il a fait
23

mon éloge de façon enthousiaste, en m’assurant qu’à présent, toutes les remarques, écrites ou
non, regorgeaient de ma philosophie. C’est charmant* !
Dorguth a écrit une chose de 4 feuilles 12 sur le vaccin , et je crois qu’il a raison. Le fils de
o 24

Kilzer a trouvé l’aspect extérieur de Dorguth très important et imposant, comme il l’écrit à son
père.
Je travaille avec ardeur à la Volonté dans la nature, le contrat a été conclu.
Et sur ce, en vous souhaitant santé et bénédiction

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 22 juin 1854.
335. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je vous remercie, cher ami, pour vos renseignements. Cet épouvantable non-sens de
l’Athenaeum français m’amènera peut-être un défenseur en France. Taillandier , en tant
2 3

qu’authentique Français, est tout à fait aimable et obligeant. Je vous renvoie ci-joint sa lettre.
Aujourd’hui, je veux principalement vous révéler qui est l’auteur du vieux pamphlet dans les
Hallische Jahrbücher . Déjà à l’époque, le Dr. Emden avait été terriblement irrité par cela et
4

s’était efforcé d’identifier l’auteur, mais en vain. Il y a quelques années, il m’a dit que quelques
docteurs juifs de son entourage savaient qui c’était, mais qu’ils ne pouvaient tout simplement pas
le dire. Mais maintenant qu’il est mort, ils le lui ont dit : il s’agit de Carové, qui entretenait alors
des relations amicales avec moi, et qui, de façon tout à fait naturelle, m’avait également parlé de
cette recension. Il est vrai qu’il m’a toujours sournoisement JALOUSÉ : il y a 10 ans, nous avons eu
une dispute et je m’en suis débarrassé ; quoiqu’il ait tenté après coup de renouer avec moi, avec
une insistance éhontée. C’était un homme tout à fait vil et il l’a bien souvent montré. Toute cette
clique de lettrés m’en a toujours voulu, par jalousie. J’ai toujours évité de les fréquenter.
Les officiers de Magdebourg ne connaissaient pas Dorguth.
5

Ci-joint une lettre d’hommages de la tribu d’Israël , que je vous prie de me renvoyer à
6

l’occasion. Même si ces choses hébraïques devaient être justes, cela ne concerne aucunement
l’affaire. Je pense ne pas lui répondre. Des rescrits impériaux ne sont pas si faciles à obtenir.
Mais c’est toujours un signe de l’extension de mon influence ; comme si maintenant, l’époque
était devenue mûre pour cela.
En vous recommandant aux dieux

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 29 juin 1854.
336. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Je vous prie de bien vouloir me permettre la formulation d’une petite requête. La librairie
Hermann de cette ville a accepté un contrat pour une 2 édition augmentée de mon traité De la
e

volonté dans la nature. Le contrat stipule que l’imprimeur ne pourra être choisi sans mon accord.
La librairie souhaite faire l’impression chez vous : je suis également très satisfait de ce choix, du
moment que nous éclaircissons un certain point, qui constitue précisément l’objet de ma requête.
Je sais de source sûre que vous avez introduit dans vos bureaux une sorte d’« orthographe
maison », qu’on applique à toute typographie. Je n’évoque ici la chose que dans la mesure où
elle peut me concerner. En vérité, il me semble peu probable que vous deviez également
appliquer cette orthographe à des livres qui ne sont pas publiés par vos éditions. Mais pour moi,
la chose est trop importante pour me contenter de conjectures. C’est pourquoi je vous adresse
une demande : voulez-vous bien me promettre, lors de l’impression de l’ouvrage évoqué, de
suivre avec exactitude MON orthographe et MA ponctuation, et de veiller également à ce que
d’éventuelles fautes typographiques, que j’aurais corrigées dans ma dernière révision, soient
consciencieusement arrangées par le typographe ? Je vous prie de me confirmer clairement et de
façon explicite cette promesse dans votre aimable réponse, et l’affaire sera conclue. Si, au
contraire, vous ne deviez pas consentir à me faire cette promesse, alors le traité ne pourra pas
être imprimé chez vous, ni aucun de mes autres écrits, tant que vous vous obstinerez dans votre «
orthographe maison ». J’espère que cela ne sera pas le cas.
Si à cette occasion vous vouliez bien me dire où en est la vente de mon ouvrage principal
édité par vos soins et si l’on peut s’attendre à une 3 édition, alors vous obligeriez
e

particulièrement

Francfort s. M. votre
le 9 juillet tout dévoué
1854. Arthur Schopenhauer
337. À GEORG RÖMER 1

Aujourd’hui je pars seul à Aschaffenbourg : si vous avez l’intention de m’accompagner,


ayez l’amabilité de venir à 2 heures ½ à l’Hôtel d’Angleterre.

[8 août 1854] A. Schopenhauer.


338. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Très cher Monsieur et ami !

Pam ersi amhqxpoy rtluoqa , disait déjà Hérodote, et il faut traduire par : « L’homme est
2

malchance de part en part. » Il a donc fallu que vous veniez juste hier, alors que j’empruntais le
chemin de fer pour aller voir la maison pompéienne à Aschaffenbourg ! Après avoir espéré tant
3

de fois qu’un jour vous viendriez me rendre visite. Les 2 journaux ci-joints contiennent chacun
4

un article contre moi, que je vous prie de lire et de me renvoyer si possible d’ici 4 ou 5 jours. Il
m’importe que vous en preniez connaissance. Car je travaille en ce moment à une préface, pour
la Volonté dans la nature, qui est très polémique, dirigée non pas contre ces 2 pécheurs, mais
contre les professeurs de philosophie en masse*. Et il sera PEUT-ÊTRE nécessaire de vous
soumettre cette préface pour un examen juridique ; c’est la raison pour laquelle je vous prie de
m’indiquer si vous vous trouverez à Mayence pendant tout ce mois : pour que, eventualiter, elle
ne reste pas inutilement là-bas. L’exemplaire révisé de la Volonté dans la nature, avec de
nombreux ajouts, se trouve déjà à Leipzig : on hâte l’impression, la préface doit être remise avec
l’avant-dernière feuille de correction. Hartknoch à Leipzig me prie instamment de faire une 2 éd.
5 e

de mon traité De la vision et des couleurs, il a l’intention de me payer des honoraires, l’ancienne
édition de 1816 a été SUBITEMENT ÉPUISÉE, après avoir traîné pendant si longtemps ! Encore un
autre travail ! Ma célébrité se répand comme un incendie : les signes se multiplient.
Je ne pense pas venir à Mayence cette année : jours déjà brefs. Espère donc que vous
viendrez rendre visite encore une fois

Francfort à votre ami dévoué


le 9 août 1854 Arthur Schopenhauer.
P. S. Je joins encore un petit débours pour Berlin.

339. CONTRAT
POUR LA DEUXIÈME ÉDITION DE
DE LA VISION ET DES COULEURS 1

Contrat d’édition entre Monsieur le Dr. Arthur Schopenhauer, Francfort s. M., l’auteur,
d’une part, et le libraire Johann Friedrich Hartknoch, Leipzig, d’autre part.
Monsieur le Dr. Schopenhauer charge Monsieur le libraire Hartknoch de la publication de
la deuxième édition de son traité
De la vision et des couleurs.

Selon l’accord, l’éditeur imprime 1 050 exemplaires et après réalisation complète du livre
paie à l’auteur trois ducats d’honoraires par feuille d’impression et lui cède en plus 10
exemplaires gratuits.
L’éditeur s’engage tout particulièrement à veiller à ce que l’on procède exactement selon les
prescriptions de l’auteur concernant l’orthographe et la ponctuation, et à cet effet charge l’auteur
de s’occuper de la révision qui doit être envoyée franco de port avec le manuscrit et l’ancienne
impression corrigée.
Selon le souhait de l’auteur, De la vision et des couleurs sera réalisé, concernant la
typographie, le format et la présentation, conformément à l’écrit de l’auteur de De la volonté
dans la nature qui se trouve actuellement sous presse.
Si une troisième édition de l’ouvrage devait s’avérer nécessaire, l’éditeur n’a pas le droit
inconditionnel de demander celle-ci à l’auteur, et il faudra au préalable convenir d’un accord
commun.
Les deux parties sont entièrement d’accord avec les points précédents et ont signé ce contrat
de leur main propre.

Leipzig et Francfort s. M. [signé]


le 23 août Johann Friedrich Hartknoch
[signé]
Arthur Schopenhauer
340. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Très cher Monsieur et ami,

Votre critique des épanchements de Rosenkranz est très bonne et juste : elle a clarifié mon
2

propre sentiment et m’a fait grand plaisir. Ce qu’il appelle (puisque vous me le demandez) une
critique profonde et piquante signée spiritus asper, est un pamphlet infâme, plein de mensonges
et de falsa, dans les Hallische Jahrbücher de 1841 ou 1842, sous la forme d’une recension de ma
Volonté dans la nature et de mon Éthique. Je ne le possède pas. C’est seulement maintenant,
après la mort de l’auteur, que le Dr. Emden a réussi à l’identifier, après s’être jadis donné tant de
peine à cet effet : il s’agit de l’ennuyeux et prolixe écrivain Carové, qui entretenait alors avec
moi des relations amicales et qui m’en avait parlé de façon tout à fait naturelle. Cette canaille
était simplement habitée par la jalousie.
Conformément à votre aimable autorisation, je vous envoie la préface , en vous priant de
3

bien vouloir l’examiner avec attention et avec un regard de juriste, afin de savoir si je dois
redouter de quelconques poursuites judiciaires, publiques ou privées. Je crois bien entendu que
ce ne sera pas le cas, car j’ai pris mes précautions, mais je pourrais me tromper. Je prendrais
aussi volontiers note de vos autres remarques. Sur la page d’à côté, vous pouvez écrire au
CRAYON des commentaires que j’effacerai avant l’envoi. L’impression de La Volonté dans la
nature se trouve énormément accélérée, ils m’envoient 4 feuilles par semaine pour la correction.
C’est pourquoi je vous prie de procéder à votre censure dès que l’occasion s’en présente et de me
la renvoyer sans tarder. Hartknoch me presse de faire une nouvelle édition de mon traité De la
vision et des couleurs, qui a été subitement épuisé — un petit écrit de 1816, sur un objet qui
n’intéresse pas le public ! Il me paye volontiers 3 ducats par feuille et fait preuve de diligence et
d’ardeur. Suchsland (librairie Hermann) m’avait prié avec insistance de le lui confier. Les gens
ont le diable au corps. Ils m’ont envoyé ce que j’avais inscrit en 1813 sur une fenêtre dans
l’auberge de Rudolstadt, au deuxième étage.
Qui currens totam diem pervenit ad vesperam, satis est.
Petrarca .
4

Je me réjouirais beaucoup que vous reveniez me voir un jour ici, maintenant je serai
toujours présent, et je vous salue de tout cœur !

Francfort Arthur Schopenhauer


le 27 août 1854.
341. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Vieil ami !

J’ai enfin trouvé une occasion pour vous écrire, car avec l’empressement de l’éditeur, la
Volonté dans la nature a sollicité toutes mes heures matinales : l’impression est achevée, à part
la préface dont j’attends la correction pour demain ; ils m’ont livré 4 grandes feuilles par semaine
et j’étais chargé de la dernière correction ; l’ensemble respecte entièrement mon orthographe («
Spaass » et « STROHM »), car j’ai écrit à l’« orthographiste maison » un petit billet sur l’«
orthographe maison ». À cela s’ajoutait encore un deuxième travail, également très urgent,
2

comme vous le verrez dans la lettre d’hommage ci-jointe, aimable et du meilleur genre : je m’y
3

suis déjà mis, le contrat a été conclu. Je l’ai laissé choisir entre 750 exemplaires à 2 ducats la
feuille et 1 050 à 3 ducats : il s’est décidé sans hésiter pour la dernière solution — figurez-vous,
il s’agit d’une petite brochure de 5 feuilles, parue il y a 40 ans, sur un objet qui n’intéresse même
pas le public. À plusieurs reprises, Suchsland m’a prié de la lui confier de toute urgence. Je vois
que même chez les libraires, mon nom commence à peser son poids. Suchsland rit dans sa barbe
parce qu’il a eu la superbe Volonté dans la nature pour un misérable carolin par feuille. Je dois
encore apprendre à exiger des honoraires : je suis habitué à tout céder gratuitement. Mais
attendez, coquins ! Les gens ont le diable au corps : Suchsland m’a montré un billet, écrit de
main inconnue : « Arth. Schopenhauer majorem anni 1813 partem in hoc conclave degit.
Laudaturque domus, longos quae prospicit agros . » Je lui ai tout de suite dit : j’ai écrit cela en
4
1813 sur une fenêtre de l’auberge Au Chevalier à Rudolstadt, dans une chambre au deuxième
étage. » Voilà ; et c’est là qu’ils l’ont déniché et l’ont copié pour l’envoyer ici — comme une
relique sacrée. Monsieur Wiesike , grand propriétaire foncier dans le Brandebourg, est venu de
5

Soden, où il a fait une cure balnéaire, et m’a rendu visite à Francfort, 2 fois, parce qu’il ne m’a
pas trouvé la première : un homme très raisonnable. Également le Dr. Asher de Leipzig, avec un
grand manuscrit que j’étais censé lire — serviteur obéissant ! Mais il voulait absolument quelque
6

chose d’écrit, je lui ai donc fait porter un billet de 2 lignes à l’hôtel.


Je vous remercie beaucoup pour votre article sur Schelling . Tout ce que vous dites est vrai ;
7

mais vous n’êtes pas tout à fait juste avec lui, dans la mesure où vous passez sous silence les
bonnes choses qui lui font honneur. Malgré toutes ses bouffonneries et celles, encore pires, de
ses adeptes, il a quand même amélioré et fait progresser de façon essentielle la conception de la
nature ; et j’ai par conséquent loué diverses choses chez lui. Je ne comprends pas pourquoi, dans
votre article sur Schelling, vous citez toujours HERBART entre Kant et moi, en le mettant en
parallèle avec moi, alors que récemment vous avez écrit et reconnu que j’ai raison d’appeler son
fatras un tissu d’absurdités. Vous ne devriez pas apporter de l’eau au moulin des adeptes de
Herbart, cette bande d’obstinés. C’est un esprit tordu et sec qui a mis son entendement à l’envers.
Becker était là hier, très en colère à cause de Rosenkranz et de ses mensonges.
Quoi, vous ne savez donc pas que dans les derniers Heidelberger Jahrbücher, Reichlin-
Meldegg a donné une recension de vos Questions esthétiques et de vos Lettres sur moi ?! Et
comment ! C’est un ignorant. Peu importe. Mais ce faisant, il a également rendu compte de ma
philosophie ; il cite entre GUILLEMETS de nombreux passages, qu’il m’attribue, et que je n’ai
JAMAIS écrits, des expressions que je n’ai JAMAIS utilisées, avec un sic ! Eh bien :
Le petit peuple ne remarque jamais le diable,
Même s’il les tenait par le cou !
8

Vous verrez bientôt. Je viens de recevoir la Propédeutique de la philosophie de Noack, cet


horrible fabricant de livres. Dans la majeure partie de son livre, il expose une fois de plus ma
doctrine de la volonté dans la nature, de la « VOLONTÉ DE VIE », dans tous les domaines, dans les
phénomènes chimiques, physiques, etc., il cite également ce que Herschel (en s’inspirant de mes
recherches) a dit sur la pesanteur ; surtout § 54 et suivants, mais aussi partout ailleurs, dans tout
9

le livre, il cite ma doctrine SANS JAMAIS ME NOMMER. Mais si ! AU DÉBUT, où il expose l’histoire de
la philosophie moderne, p. 112, je suis nommé UNE SEULE FOIS, et en tout dernier, comme
PRÉCURSEUR de Reiff !! et d’un certain Monsieur Plank, qui seraient les vrais fondateurs de la
nouvelle philosophie………… ? Le reste du livre est tout aussi intéressant : par ex. dans
l’univers, seule la Terre est habitable, le reste n’est pour elle qu’un décor de théâtre, et « la
théorie des couleurs de GOETHE et de HEGEL » (!!!) et d’autres choses encore. Il a dépassé les
limites : j’aimerais que vous vous chargiez de son exécution.
Dès réception de mes exemplaires de la Volonté dans la nature, je vous en ferai parvenir un,
ainsi qu’un autre pour Lindner. Je vous demande seulement une chose, qui est de ne pas
feuilleter la PRÉFACE et de ne pas regarder d’abord la fin, mais de vous installer et de lire d’un
bout à l’autre, ordine et ratione et numero, dans une seule séance, la porte fermée. Ensuite vous
m’écrirez en toute sincérité ce que vous en pensez. Le Centralblatt et le Repertorium semblent
vouloir occulter vos Lettres. Voilà l’œuvre des adeptes de Herbart. Nous disons maintenant : eiy
som pokelom jai sgm lavgm ! 10

En vous souhaitant de tout cœur bonheur et santé

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer


le 11 sept. 1854.

P. S. Je viens de corriger et de ratifier le discours impérial du trône (sous la forme d’une


11

préface). Sa Majesté n’est pas très clémente, car on a voulu la mener par le bout du nez.
342. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Dr. Lindner !

Veuillez recevoir mes remerciements chaleureux pour votre article vraiment excellent du 3
septembre : comme cela m’a fait plaisir ! Je trouve ma consolation dans votre endurance. Je
2

vous envoie prochainement la nouvelle Volonté dans la nature et je demeure pour toujours

Francfort votre
le 12 septembre 1854. sincèrement dévoué
Arthur Schopenhauer
343. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je regrette de tout cœur, mon cher ami, votre fort accès de fièvre. Espérons que vous vous
êtes vraiment rétabli ! Une fois, mon vieil ami le baron Lowtzow , a été victime d’accès qui se
2

renouvelaient toujours, pendant 6 mois, et aucune quina ni quinine n’ont pu aider. C’est alors
qu’il l’a fait conjurer par un sellier : c’est parti et n’est plus jamais revenu. Vous pouvez lui
demander des précisions.
Lindner m’a envoyé il y a peu les trois numéros de Literatur des Auslandes , le programme
3

scolaire et ses propres articles de journaux . Mais vous n’évoquez pas ce que j’espérais
4 5

précisément que vous m’appreniez : à savoir qui est l’auteur de ce bon petit article, dans le
Literarisches Unterhaltungsblatt, « Schopenhauer et les hégéliens » ? C’est un nouveau petit
évangéliste, sans doute encore jeune. J’aimerais savoir en particulier OÙ il a déjà parlé des
calomnies faites à mon encontre, comme il l’affirme. N’ai pas encore eu le temps de lire le
programme. Dans le Magazin für Literatur des Auslandes se trouve ce pieux Pajazzo , qui ne
6

connaît rien de moi sauf précisément l’article sur moi, très plaisant. Vos Lettres sur ma
philosophie m’ont beaucoup servi, mais la pointe de ce lotus, c’est que désormais des gens qui
n’ont jamais eu un livre de moi entre les mains critiquent ma philosophie de façon savante en
s’appuyant uniquement sur ces Lettres ; ce qui, bien sûr, me DÉPITE. Comme l’ont fait le Magazin
des Auslandes et ce misérable Reichlin-Meldegg. Ce dernier cite même, en les attaquant comme
si elles étaient de MOI, les phrases d’un certain Weber que vous citez p. 137. 138. Ne faut-il alors
pas dire à propos de tout ce scandaleux commérage :……………… ?
Je joins 2 exemplaires de la Volonté dans la nature, l’un est pour vous, quant à l’autre je
vous prie de le remettre TOUT DE SUITE au Doctori indefatigabili Lindnero, avec mes
remerciements chaleureux pour tout ce qu’il m’a envoyé et pour ce qu’il en a écrit dans son
journal. À vous deux !
Que chaque honnête homme
Trouve de tels évangélistes !
Ses ennemis par conséquent
Disparaîtront stratégiquement ! 7

(Il faut le chanter.)

Vous avez raison ! Ma mission requiert non seulement le talent intérieur, la liberté des
conditions extérieures et le loisir, mais aussi un âge avancé, comme Mathusalem, et de la
jeunesse, comme Radetzky . 8

Le commandant de Spandau me fait plaisir ; mon influence auprès des militaires est une
chose tout à fait curieuse et étrange : à Magdebourg, Neisse, Neu-Ruppin et Spandau ! Jusqu’à
9

maintenant, les officiers avaient l’habitude de s’occuper de tout autre chose que de philosophie.
La théorie des couleurs me donne beaucoup à faire, ne serai pas prêt avant la fin du mois.
En vous souhaitant de tout cœur une pleine et durable santé, comme c’est le cas pour

Francf. s. M., votre ami


le 5 oct. 1854. Arthur Schopenhauer.
344. À MARIA DORGUTH 1

Très honorée Mademoiselle,

La nouvelle du décès de Monsieur votre père m’a désolé de tout cœur. Il m’a encore écrit il
y a à peine quelques jours. J’ai perdu en lui un ami, que je ne connaissais et fréquentais que sur
les chemins de l’esprit, mais qui 19 années durant a fait preuve d’une participation des plus vives
et fut le premier défenseur déterminé et persévérant de ma philosophie, avec ténacité et
constance. Son souvenir me sera toujours précieux et sacré. Il est consolant pour moi
d’apprendre que sa fin a été facile, quasiment imperceptible, et qu’il avait tout de même atteint
l’âge très rare de 77 ans. Ce qui me console également, c’est qu’il a encore vu la deuxième
édition de l’écrit qui, il y a 19 ans, occasionna notre rencontre, et qu’il l’a lu et a pu s’en réjouir.
2

En me recommandant à votre aimable souvenir, je demeure un ami de la maison et


Francfort s. M. votre
le 14 oct. serviteur dévoué
1854. Arthur Schopenhauer
345. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Je vous remercie sincèrement pour la probité avec laquelle vous avez rempli votre promesse
au sujet de l’impression de la Volonté dans la nature : tout a été réalisé entièrement comme je le
souhaitais. J’ai seulement dû attendre pendant presque 3 semaines l’envoi de la dernière épreuve,
raison pour laquelle j’ai laissé passer une petite, mais fatale erreur typographique dans ma
préface, qu’autrement j’aurais pu corriger. C’est là l’unique coquille du livre.
Suivant mes conseils, l’entreprise Hartknoch fait à présent imprimer chez vous la 2 édition
e

de mon ouvrage DE LA VISION ET DES COULEURS. Je me FIE ENTIÈREMENT au fait que vous donnerez
exactement les mêmes instructions à votre imprimerie, concernant l’orthographe et la
ponctuation, et je vous prie également de veiller à l’envoi ponctuel des feuilles de correction,
avec le manuscrit et l’ancienne impression, et des épreuves, si possible bientôt.
Avec mes respects les plus sincères

Francfort s. M. votre
le 4 nov. 1854. tout dévoué
Arthur Schopenhauer

346. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami !

J’ai enfin expédié l’exemplaire amélioré de la théorie des couleurs et je n’ai plus qu’à
2

rédiger la préface ; je peux donc enfin vous écrire. Avant tout, je regrette que vous ayez toujours
de la fièvre ; malheureusement, je ne puis la conjurer :
Le diable en fit certes l’enseignement
Mais le diable ne peut le faire lui-même .
3

À Berlin, il ne saurait manquer de gens capables de le faire : demandez simplement parmi


les femmes, jeunes ou vieilles. Elles savent toujours ce genre de choses. Dans le cas de
Lowtzow , tout à fait concluant, un sellier s’en est chargé, à contrecœur et seulement à titre
4

gratuit. Ces gens-là pensent que la rémunération serait comme une avance du diable. Ai vu
récemment des exemples MERVEILLEUX de la force magique de la volonté, avec l’Italien
Regazzoni , 3 fois en public et 2 fois en privé. Ai aussi vu des choses chez un psychographe, qui
5

ne laissent le choix qu’entre une imposture abominable et un miracle, mais beaucoup d’éléments
penchaient contre l’imposture — 3 enfants, une fille âgée de 18 ans, l’air abruti, et la fille de
Kilzer , âgée de 14 ans, avec le visage le plus sincère, étaient les agentia, et les réponses étaient
6

tantôt astucieuses, tantôt très grossières.


J’avais déjà vu le Journal philosophique avant votre lettre. Votre article est très bon et
7

parfaitement vrai. Le matérialisme et le spiritualisme présupposent le réalisme, mais ce dernier


est d’abord assassiné par l’idéalisme. Ce n’est que de prime abord que la philosophie d’Ulrici 8

semble appliquer le principe de non-contradiction, et comme il décèle de nombreuses


contradictions, chez Kant et chez moi, tout un chacun comprendra que cela tient au fait qu’il n’a
pas réussi à saisir la chose. Ses bavardages sont un fatras pitoyable. Ce que j’ai aimé le plus,
c’est que vous m’appeliez le kantien le plus profond, alors que les professeurs seraient des ANTI-
KANTIENS : c’est cela ! Et tout ce journal (également à la fin, les œillades avec Leibniz ) fournit
9

une PREUVE, comme sur COMMANDE, de ma préface . La même chose, mais en plus bref, pour la
10

recension du livre de Weigelt, dans le Repertorium. Si ces messieurs parlent de moi avec mépris
et sarcasme, alors ils s’anéantissent eux-mêmes, car il est à présent trop tard pour cela : on me
LIT. Dans le premier chapitre de la théorie des couleurs, vous trouverez un coup de fouet sanglant
pour ces anti-kantiens. Je m’en sers pour mettre fin aux menées des philosophes de métier. Et en
même temps, dans le même numéro du Repertorium, toutes les autres recensions philosophiques
montrent de façon exemplaire « comment ces messieurs se rendent mutuellement service en
faisant des courbettes ». Parmi toutes les choses que ces crapules entreprennent contre moi,
11

chacune à sa manière, on voit que la tâche principale est d’empêcher le public de LIRE mes écrits,
car si on me lit, elles sont perdues. Je crois que ma montée en flèche les désespère réellement.
Je joins la dernière lettre de l’honorable vieillard, écrite 3 jours avant sa mort, ainsi que celle
de sa fille. Vous pouvez y voir que jusqu’à sa mort, il a travaillé à la propagande de mes écrits.
Qu’un doctorant en philosophie à Göttingen ne me connaisse pas est une chose épouvantable, et
12

c’est là l’œuvre des gens du métier à Göttingen. Le livre de Schlötel a été tout de suite recensé
13

dans les Göttingische Gelehrte Anzeigen et dans le Centralblatt. Dans ce dernier, on a


récemment recensé Noack, en disant au moins qu’il me devait des choses.
Je lisais hier dans le dernier Journal des Débats, donc celui du 3 ou 4 nov., une recension
digne d’intérêt, rédigée par Alloury, d’une Histoire du cartésianisme par Bouillier , 2 vol., où
14

l’on démontre, avec les expressions les plus tranchantes, la domination en France d’une
conjuration générale provoquée par les curés, contre TOUTE la philosophie.
J’aurais volontiers aimé que vous m’appreniez si, dans ma préface, vous avez repéré des
signes quelconques de vieillesse, de sénilité, ou des choses de ce genre.
Depuis 8 jours j’ai un rhumatisme au pied qui empêche mes promenades, ce qui m’indigne
beaucoup, même si je m’en suis moi-même rendu coupable, par inattention. Si au moins vous,
vous étiez entièrement rétabli ! C’est ce que souhaite de tout cœur

Francf. s. M., votre ami


le 6 nov. 1854. Arthur Schopenhauer.
347. À JOHANN FRIEDRICH HARTKNOCH 1

Monsieur,

Veuillez recevoir jointe à cette lettre la préface promise. J’aurais souhaité qu’elle soit
imprimée de la même façon que la Volonté dans la nature, c’est-à-dire avec la même
typographie que le texte, avec seulement un peu plus d’espace entre les lignes. Hier, j’ai renvoyé
la 3 feuille de correction et je me recommande à vous,
e

Francfort tout dévoué


le 18 nov. Arthur Schopenhauer
1854.
348. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Très cher ami.

Ce qui me réjouit surtout dans votre lettre, c’est que vous êtes débarrassé de votre fièvre : je
n’étais pas sans inquiétude à ce sujet. Retenez ce que dit Aristote o bioy em sg jimgrei ersi et 2

marchez le plus possible chaque jour, loin et rapidement, comme si je vous accompagnais.
Personne ne peut garder la santé sans mouvement. J’ai soigné mon rhumatisme avec cette
panacée très appréciée en ce moment, l’eau-de-vie mêlée de sel, ce que je vous recommande
pour cette maladie et 20 autres, selon les instructions de William Lee, Le Médecin de soi , traduit
3

de l’anglais, 4 éd. 1850, 38 p. Très pratique !


e

Je suis entièrement d’accord avec vous concernant Hinrichs . En passant : tous ces livres
4

comme Vie dans la nature, Esprit dans la nature, Esprit de l’homme dans la nature — ont
dérobé mon titre, ce qui est toujours le signe CERTAIN d’un manque d’originalité.
De la vision et des couleurs doit paraître la semaine prochaine : j’enverrai tout de suite un
exemplaire à vous et à Lindner. Je viens de recevoir Histoire de l’opéra de Lindner : je vous prie
5

de l’en remercier en passant.


Il n’y a pas urgence avec la bigoterie sur commande : elle encourage l’incroyance. Ici, il y a
6

environ 15 jours, dans la Frankfurter katholische Kirchenzeitung, éditée par Beda Weber , on a 7

publié un long discours de capucin contre moi, qui me portera aussi peu préjudice que celui
prononcé contre Wallenstein : c’est tout à fait grossier.
J’ai été vraiment irrité par ce que vous dites de Regazzoni, et j’ai dû me remémorer la
patience que l’on doit à un vieil ami confirmé et très méritant comme vous. Mais, mon cher
champion, vous me prenez peut-être pour un vieux fou qui ne sait pas ce qu’il voit ? Autrement,
comment pourriez-vous, sans le moindre doute, ni hésitation, ni réserve, m’accuser d’une erreur,
et en vous référant à l’autorité de quoi ? d’un article anonyme dans ce pitoyable Grenzbote ?! Je 8

dois quand même vous éclairer un peu. En même temps, vous pouviez lire cet article dans la
Deutsche Allgemeine Zeitung, et probablement dans dix autres journaux. Car il s’agit du coup
désespéré d’une bande de 14 médicastres de cette ville qui se battent pour leur honneur et leur
vie (pour leur pitance). Tout de suite après la deuxième séance chez Regazzoni, ces misérables
ont en effet remis à la Didaskalia un manifeste avec leurs signatures, par simple méchanceté,
jalousie professionnelle, bêtise et ignorance, affirmant que « tout cela est une imposture et
Regazzoni un charlatan. » (Emden en connaît un qui n’était même pas présent, et un autre qui
regrette d’avoir signé .) Le jour suivant, j’ai assisté au conseil de guerre qui se tenait chez
9

Regazzoni : je n’ai pas pu profaner ma plume pour des disputes locales, contrairement à ce que
l’on m’avait demandé. Toutes les personnes capables de discernement étaient indignées, mais ici,
chaque médecin tremble de peur devant la clique de la communauté médicale. La partie plus
distinguée du public a finalement compris que des médecins qui confondent un ÉTAT
CATALEPTIQUE ÉVIDENT, une sorte de TÉTANOS, presque une MORT APPARENTE, avec une comédie,
sont incapables de livrer le moindre diagnostic ou la moindre sémiotique, et qu’ils doivent le
rester. La crédibilité des médecins et la pitance de ces messieurs se trouvaient donc remises en
jeu. Car dans les journaux locaux s’était déclarée une guerre des plumes très intense. Les 14 ont
alors eu recours au tintamarre de la surenchère et ont envoyé des articles calomnieux à tous les
journaux : voilà votre Évangile ! Magna est vis veritatis et praevalebit . L’authenticité et
10

l’honnêteté de Regazzoni finiront bien par se manifester quelque part : et ensuite tout un chacun
fera comme moi, qui ai acheté la Didaskalia dans le but d’avoir les noms et pour qu’en cas
d’accident, on n’aille pas chercher l’un de ces 14 médecins, ni pour moi, ni pour ma bonne, ni
pour mon chien, ni pour mon chat. Je me réjouis d’avoir inscrit mon témoignage dans l’album de
Regazzoni, clairement et en français.
Pomtow m’a envoyé son programme , par voie de librairie, c’est pourquoi il a mis 2 mois à
11

arriver. Erdmann, dans son discours pour l’anniversaire du roi, me mentionne rapidement, mais
12

de façon honorable.
Portez-vous bien, et la prochaine fois faites confiance de façon plus implicite à

Francfort s. M., votre ami


le 30 nov. 1854. Arthur Schopenhauer.

349. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Monsieur le Dr. Lindner,

Je vous remercie beaucoup pour votre livre qui me semble répondre à tout ce que, dans
2

cette curieuse branche de l’histoire de l’art, on peut demander, et qui, en tant que source de
références, jouira certainement d’une valeur et d’une existence durables ; vous aurez donc trouvé
en cela un bon moyen de faire perdurer votre nom. Votre livre ne manquera pas de public, avec
l’intérêt général dont jouissent la musique et l’histoire en tous genres. C’est déjà le cas de mon
ami le docteur Emden, qui en est tout à fait ravi et veut même exécuter la partition avec ses
camarades. C’est un grand mélomane. J’y ai remarqué 2 choses : 1°) parmi les pasteurs
hambourgeois, un certain ANTON REISER : sous ce nom, le mythologue génial MORITZ a publié son
3

intéressante autobiographie détaillée : comment l’expliquer ? 2) Vous appelez KEISER le 4

compositeur d’opéra le plus talentueux avant Mozart : mais DITTERSDORF vient aussi avant
5

Mozart, et ses opéras sont vivants et plaisent encore ; alors que Keiser est tombé dans l’oubli :
comment l’expliquer ?
Vous aurez reçu sous enveloppe fermée mon livre sur les couleurs. Celui qui en sera irrité,
c’est Humboldt, en tant que newtonien obstiné. Can’t help it, Sir — very sorry indeed . Par 6

conséquent, tous les flagorneurs humboldtiens s’y opposeront en chœur. Dans cette Abdère, on
ne trouve pas d’autre journal littéraire anglais que l’ennuyeuse Edinburgh’ Review et l’insipide
Athenaeum qui jette de la poudre aux yeux. Je pense souvent que bien des choses pourraient
encore se dire sur moi en Angleterre : je ferais volontiers venir les numéros, si je les connaissais.
Mais je ne puis tirer mes cartouches à l’aveuglette, à tort et à travers. Dans le dernier numéro de
la Westminster Review, on trouve à nouveau une contemporary literature avec Philosophy et
Theology en tête ; et la dernière British Quarterly Review commence avec un article intitulé
7

Philosophy of Kant : qui sait ? Vous, mon Dr. indefatigabilis, vous avez l’occasion de peep dans
8

cela et d’y mettre votre nez : mais peut-être le loisir vous en manque. It’s only a hint , au cas où
9

vous voudriez bien être prêt à faire un petit sacrifice pour moi. En passant : il y a un certain
temps, des écrits polémiques sur l’identité du shabbat et du dimanche ont circulé en Angleterre
(comme je l’ai vu dans le Times) : je crois que le coup d’envoi en a été peut-être donné par les
Parerga, tome 2, p. 299 — comme une de ces novel & startling suggestions évoquées par mon
10 11

Westminster reviewer.
Avec mes meilleurs vœux pour votre bien-être

Francfort, le 30 déc. 1854. votre ami


Arthur Schopenhauer
350. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami !

Je regrette votre maladie des yeux, mais je me console quand vous écrivez que des serpents 2

défilent à toute vitesse, car ce mouvement rapide et flottant, dès qu’on bouge l’œil, est
caractéristique de la mouche volante*, un mal qui en a déjà angoissé plus d’un, mais qui est sans
danger ; en revanche, une tache sombre et fixe est inquiétante, car elle se trouve sur la rétine —
la mouche volante n’est que l’obstruction d’une cellule dans les humoribus, la plupart du temps
dans le humor vitreo. Si elle n’apparaît pas, vous devriez consulter Jüngken.
Ce qui me préoccupe, c’est que j’ai vu dans des annonces que le dernier numéro de la
Westminster Review, dans sa contemporary lit., contient un article Theology and Philosophy, et
la British Quarterly Review, numéro de janvier, un article « on the philosophy of Kant », tout au
début : si vous vouliez bien y jeter un coup d’œil, dans la Salle de lecture royale , pour voir s’il y
3

a quelque chose sur moi !


Depuis des années, Kilzer se donne beaucoup de mal pour obtenir la première édition de
mon ouvrage principal, que Brockhaus ne peut plus lui procurer ; par conséquent, c’est son fils
qui cherche, car le fanatisme de Kilzer est si fort qu’il veut posséder la moindre ligne que j’ai
écrite, donc aussi les passages éliminés. Il m’a sérieusement demandé de veiller, par une fidei-
commissum, à ce qu’on ne puisse JAMAIS CHANGER LA MOINDRE DE MES SYLLABES. Il a organisé des
recherches pour connaître le propriétaire de ma maison natale : un certain Dr. med. Abegg ;
comme jadis Dorguth a trouvé que j’étais né un vendredi. Grâce à ce genre de personnes, je
prends connaissance de mes personalia.
Ci-inclus 2 curieuses lettres d’hommages . Le Hongrois, avec toute une coterie de beaux
4

esprits qui ont été bannis (d’Allemagne), me demande sérieusement de venir À ZURICH EN
DÉCEMBRE, pour satisfaire sa curiosité ! J’ai répondu de façon courtoise, aimable et brève que je
ne pouvais m’engager dans une controverse écrite et que je ne voyageais plus du tout. Ensuite est
arrivé un livre de Richard Wagner , imprimé hors commerce et seulement destiné aux amis, sur
5

du papier épais superbe et joliment relié : il s’intitule L’Anneau des Nibelungen. C’est une suite
de 4 opéras qu’il a l’intention de composer un jour, et qui sont censés être une authentique œuvre
d’art de l’avenir : semble être très fantasque : n’ai lu que le prélude : verrai la suite ! Pas de lettre
qui l’accompagnait, seulement la dédicace : « Avec mon admiration et mes remerciements. »
Si vous voulez vous faire rapidement une idée de la philosophie du Vedanta, donc de la
dogmatique brahmanique, alors lisez les ÉCRITS TAMOULIQUES de GRAUL , que le Centralblatt a
6

même recommandés aux admirateurs de ma philosophie. Je viens de le lire à l’instant et il m’a


procuré une grande joie et m’a véritablement INSTRUIT. Cela chasse le foetor judaicus , et 7

comment ! Oum !
Je vous souhaite de tout cœur une bonne nouvelle année, véritablement heureuse et surtout
saine !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 30 déc. 1854.
351. À ADAM VON DOSS 1

Mon cher Monsieur von Doss,

Votre lettre m’a fort réjoui : je n’étais pas en effet sans inquiétude au sujet de votre vie, car
2

depuis longtemps je n’avais rien entendu de vous, et je savais quel hôte tenait alors demeure à
Munich. Ensuite, je me réjouis d’apprendre que vous êtes toujours aussi heureux en mariage,
après si longtemps : certainement un cas rare, un gros lot dans la loterie de la vie. Je vous félicite
pour votre paternité , j’espère cependant que je n’aurai pas à répéter de sitôt, et de façon générale
3

pas bien souvent, ce genre de congratulations.


Je dois encore vous remercier pour votre aimable invitation. Mais je suis un champignon qui
s’est enraciné : je ne voyage qu’en cas de nécessité. En déc., j’ai reçu une invitation similaire
pour Zurich : il y a là toute une coterie de beaux esprits bannis, c’est-à-dire qui ne peuvent mettre
le pied sur le sol allemand, et ils ne peuvent donc pas venir ici pour me voir, ils m’ont donc
invité : Richard Wagner, Herweg, un Hongrois exalté par ma philosophie, comme porte-parole,
et d’autres encore. Voilà qui me conviendrait ! à Zurich en déc. !
Votre lettre contient de nombreuses choses, à propos desquelles il y aurait beaucoup à dire.
Mais ma plume est trop paresseuse pour cela. Je ne vais donc choisir que quelques points.
Vous faites donc également confiance à la misérable calomnie publiée dans ce pitoyable
Grenzbote . Je n’ai pas gardé le moindre doute concernant l’authenticité de ce que Regazzoni a
4

accompli, et tous ceux capables de discernement non plus : je lui ai volontiers écrit mon
témoignage dans son album. Mais 14 médicastres de cette ville, souvent jeunes, pour la plupart
juifs, ont commis la bêtise — soit par ignorance, par jalousie ou par méchanceté — de déclarer
dans la Didaskalia, juste après la première séance, que c’était une imposture ; ce contre quoi
d’autres voix se sont élevées ; de sorte qu’une guerre des plumes acharnée s’est déclarée dans les
journaux locaux. Manifestement, c’est toute la crédibilité médicale de ces messieurs qui était en
jeu, car celui qui est incapable de distinguer une comédie d’un état cataleptique avec anesthésie
généralisée, celui-là est incapable d’établir un diagnostic, une sémiotique — donc incapable de
pratiquer. C’est pourquoi il a fallu faire du tintamarre et calomnier ! Le même article du
Grenzbote a été remis à l’Allgemeine Deutsche Zeitung et à d’autres journaux : ils se battent pro
aris & focis . Mais la vérité apparaîtra au grand jour : alors vae victis ! La vérité perce*. Je sais
5 6

que l’UN de ces messieurs n’était même pas présent et qu’un autre regrette d’avoir signé.
Je n’ai plus d’exemplaire que je pourrais envoyer à Neumann , mais cela me ferait très
7

plaisir s’il suivait l’affaire de près et en profondeur. Peut-être pourriez-vous lui parler encore une
fois.
Le mariage des brahmanes, durant quelques années, est une inconséquence, uniquement
instaurée à cause du système des castes, car autrement il n’y aurait pas de brahmanes. Avec
l’abolition du système des castes, le Bouddha a également introduit un rigoureux célibat pour
tous les prêtres, et seul le prêtre est un bouddhiste religieusement parfait.
Comme vous vous intéressez aux publications me concernant, je veux bien vous citer les
principales de celles, nombreuses, dont j’ai eu connaissance l’année passée : les expectorations
de Fichte dans plusieurs numéros du Journal für Philosophie vous sont connues. « Pour
caractériser Schopenhauer par Rosenkranz », dans la Deutsche Wochenschrift de Gödike, 1854,
cahier 22, hargneux, méchant et plein de mensonges. « Visite chez Schopenhauer » dans les8

Blätter am Herd de Gutzkow, en oct. 1854. TRÈS BONS articles de Lindner dans la Vossische
Zeitung, 3 sept., 15 oct., 29 sept., 31 août ; de Frauenstädt : Berliner Feuerspritze, 13 févr. 1854,
Berliner Musik-Zeitung, Echo, du 7 & 14 mai, très bon, sur mon esthétique de la musique.
Programme du Lycée de Joachimsthal du 29 sept., entièrement sur ma philosophie ; de Pomtow,
43 p. 4 , &ca, &ca., Magazin für Literatur des Auslandes , 5 sept. ; une prédication de capucin
o 9

contre moi, dans la Frankfurter katholische Kirchenzeitung, de Beda Weber , début déc. ; jolie
10

annonce de Kilzer dans la Didaskalia, 24 déc., un article dans l’Europa, n 104, 1854. Et en plus
11 o

de cela les lettres, poèmes et visites ne manquent pas. Eh bien, je vois que je commence à
exercer une certaine influence.
L’École a subi une perte douloureuse : l’évangéliste en chef Dorguth est décédé, à l’âge de
77 ans, pour cause de choléra : il a reçu 2 jours avant la Volonté dans la nature, l’a lu et s’en est
réjoui, comme me le rapporte sa fille. La dernière lettre qu’il m’a adressée, 6 jours avant sa mort,
relate ses activités de propagande auprès d’un privat-docent de Göttingen : donc fidèle jusqu’à la
tombe.
Vos tourments professionnels me touchent de près, bien qu’ils soient utiles pour vous ancrer
dans le pessimisme. Avec vos capacités, je pense également que vous disposez toujours de
bonnes possibilités de promotion dans vos fonctions.
Comme livre instructif, je vous recommande les Écrits tamouliques de Graul , 1854 : même
12

le Centralblatt, qui m’est habituellement hostile, l’a recommandé, dans une recension, aux
adeptes de ma philosophie.
Je vous recommande de même la nouvelle et la seule AUTHENTIQUE édition de la Deutsche
Theologie, Stuttgart, 1851, et avec une traduction en nouvel allemand en 1854. Cela fortifie et
élève.
Que le ciel continue de vous envoyer santé et bonheur familial !

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 10 janv.
1855.

352. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je vous remercie beaucoup, cher ami, pour votre article dans la Vossische , qui m’a vraiment
2

fait plaisir. Je ne sais pas ce qu’on pourrait dire de mieux et de plus adéquat sur la chose, du
moins dans ce lieu et dans cet espace limité. PURKINJE, dont il a été question 20 fois plus que son
affaire ne le mérite, n’a rien à dire concernant les couleurs. Il a frotté et asticoté le globe de son
œil jusqu’à voir sur sa rétine toutes sortes de figures, qu’il a ensuite recopiées sur le papier : il est
vrai que le public a une grande réceptivité pour tous les faits et expérimentations, mais aucune
pour la compréhension et l’explicitation. Goethe aimait de préférence louer ce qui est
insignifiant.
Je vous remercie également pour la note dans le Grenzbote (presque la moitié des
3

publications m’échappe), que j’ai consultée : la recension parle plus longtemps de l’épigraphe
que du livre. Kosak avait déjà publié le même passage, c’est-à-dire la première moitié, au mois
de février de l’année dernière, dans la Feuerspritze, avec de grands éloges. Il semble donc qu’il
soit particulièrement impressionnant.
Ne perdez pas de vue les reviews. Ici, nos journaux sont anémiques. Pomtow a été recensé
dans le journal local, qui s’appelle Centralblatt : surtout regardez-le, pour l’extrême arrogance et
la malignité du critique. J’ai regardé la Psychologie de Fortlage . Dans sa préface, il est d’accord
4

avec moi sur des choses que je n’ai jamais dites, et il me fait ensuite une leçon sur la mémoire :
de façon générale, il me relègue dans le reste du cortège. Les broutilles psychologiques, voilà sa
spécialité et son plaisir.
Lisez donc dans le Litteraturblatt de Menzel les « Considérations pour le jour de l’an » de
ce cagot : il y parle triomphalement de la déchéance totale de la philosophie, qui n’aurait plus
rien à offrir, et assure que tout fait retour vers l’Église !! Il ne sait encore rien de moi : c’est là
une hypocrisie perfide de ce Tartuffe, et il mériterait, un jour, qu’on lui mette le nez dedans
jusqu’à le faire saigner. Il pense pouvoir réussir avec ce système usé de l’occultation.
Lindner a RI parce que le Hongrois considère ma métaphysique de la sexualité comme
5

originale au plus haut point ?! Est-il possédé par le diable ? Elle fait partie des choses les plus
6

originales que j’ai jamais écrites, et qu’il me dise où et quand sur cette Terre l’on a déjà proposé
et démontré cette pensée. C’est un diamant, surtout mis en rapport avec les 3 chapitres
précédents.
Ci-inclus 4 lettres d’hommages dont vous lirez autant que votre patience le permet. Von
7

Bruchhausen est un lieutenant d’artillerie prussien réformé en 1848 qui m’a rendu visite il y a 2
8

ou 3 ans , sans jamais avoir lu la moindre ligne de moi. En décembre dernier il m’a envoyé son
9

livre insipide Doctrine de la trinité, où je suis cité en passant, et peu après cette épître. Il veut
s’attacher à la queue de mon Pégase :
Que je le prenne avec moi,
Dans la belle et grande éternité,
C’est là qu’il n’aimerait que trop être.

Asmus . 10

À Zurich, il semble vraiment que le diable s’est déchaîné à cause de moi. Fort bien* ! Les
épigrammes de Kloppenheim sont plutôt correctes, je les ai reçues telles quelles sans lettre. En
11

somme, on voit que l’influence augmente, et qu’on produit une profonde impression. Voilà
l’humour de la chose.
Je me réjouis que Jüngken soigne vos yeux : portez la cantharide avec patience et faites
savoir bientôt que la mouche s’est envolée à

Francfort s. M., votre ami


le 2 févr. 1855. Arthur Schopenhauer.
353. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami !

Concernant les prétendus propos de Lindner , il en va comme vous le supposez dans votre
2

lettre : j’ai lu QUE alors que vous avez écrit CAR. Que je ne doive pas avoir honte de cette erreur
est attesté par Tassoni , le poète de la Sechia rapita, qui, dans ses Pensieri diversi, Venise, 1636,
3

4 , livre 6, a écrit en tête du chapitre 5 : perchè molti uomini di grande intelletto sogliano
o

abbagliasi, ed errare nel leggere, o nello scrivere (pourquoi beaucoup d’hommes avec un grand
intellect ont l’habitude de se tromper, faisant erreur en lisant ou en écrivant). Et il commence :
che l’errare nello leggere, o nello scrivere, aggiungendo, o tralasciando, o cambiando le lettere,
sia indizio di buono intelletto, non è mia sola opinione, etc. (que l’erreur faite en lisant, ou en
écrivant, par des omissions, ajouts, ou confusion de lettres est le signe d’un excellent intellect, je
ne suis pas le seul à le dire, etc.) Cela fait donc partie des défauts de mes vertus*.
Je ne suis pas fâché contre Cotta . Tous ces journaux s’adressent aux gens cultivés, c’est-à-
4

dire à ceux qui n’ont rien appris et ne veulent rien apprendre. D’autre part, les journaux savants
sont aux mains des guildes et des cliques. Dommage que la Jenaische Literaturzeitung n’existe
plus.
Récemment, un certain Monsieur Oehmer m’a apporté un tiré à part, réalisé par ses soins,
5

d’un article de l’Encyclopédie des sciences médicales, lui-même traduit du Dictionnaire de


médecine : il est intitulé « Le magnétisme animal » et contient l’essentiel sur ce sujet, des choses
connues. Il commence ainsi sa préface : « Ce petit écrit doit sa publication aux attaques
haineuses lancées par un certain camp, aussi bien contre le magnétiseur Regazzoni qui exerce
dans cette ville, que directement contre le magnétisme animal » ; ensuite, il se revendique de
Regazzoni pour un cas précis. La vérité apparaîtra au grand jour, même si cela prendra du temps,
mais les calomniateurs devront FAIRE PÉNITENCE pour cela, toute leur vie, jusqu’à la fin. Ici, le
nombre d’amis de la vérité indignés est considérable. Cela ne se passera pas ainsi : nous sommes
ulcérés. Attendez ! Oehmer est l’agent d’une association d’émigration et en même temps
magnétiseur. Sa brochure compte 70 p., format 8 . o

Je me porte bien, comme un poisson dans l’eau ; j’aimerais qu’il en soit de même pour
vous, et je vous salue de tout cœur.

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 8 févr. 1855.
354. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher fidèle !

Je n’ai pas encore pu me procurer les invectives du professeur Hoffmann , mais je m’en
2

réjouis déjà d’avance, aussi méchantes qu’elles puissent être, car je ne redoute qu’une seule
chose — le mutisme, comme l’enfant redoute le feu.
Dans l’Europa se trouve une critique, écrite par vous, des conférences du Dr. Spiess, et elle
ne me plaît pas : vous avez notamment opposé l’idéalisme au matérialisme, alors que vous savez
aussi bien que moi, et vous l’avez même démontré dans le Philosophisches Journal, que le
réalisme s’oppose à l’idéalisme, et le spiritualisme au matérialisme, la première opposition étant
vraie, la seconde fausse. Alors pourquoi cela ? Je préférerais entendre que vous avez écrit cette
chose entre la veille et le sommeil, plutôt que d’y voir une concession faite à l’ignorance et à la
grossièreté. Il ne faut jamais procéder ainsi ! Car lorsque l’on veut avoir de l’effet, il ne faut
jamais vaciller, toujours parler la même langue et ne pas céder d’un iota ; sinon, on perd toute
crédibilité. D’ailleurs, il vous suffit de regarder dans les Parerga, II, § 74. Vous aviez là
également une belle occasion de renvoyer à ma philosophie, en tant qu’elle est la seule qui mène
hors du labyrinthe du matérialisme et du spiritualisme, dans lequel se sont à présent perdus les
empiristes. Il est vrai que vous avez l’intention de le faire dans votre évocation de la controverse
entre Carl Vogt et Rud. Wagner (l’un est un démocrate rouge, l’autre un cagot et une vieille
3

femme). Je me console donc avec cela et je vous absous de votre péché. Mais surtout pas de
vacillements !
Le lieutenant Schultz est une très bonne tête, et même vivace, je me réjouis de son
4

alignement et j’ai tout lu avec plaisir. Cela serait une bonne chose si vous pouviez faire imprimer
la satire : mais où ? Je ne sais pas. Il s’est tout de même trompé une fois, à savoir feuille V, p. 2,
où il dit : « La vitesse est la mesure de la force. » Minime gentium ! Il faut plutôt dire que la
5

vitesse multipliée par la masse donne la « GRANDEUR DU MOUVEMENT » qui est la mesure de la
force, comme je l’ai démontré dans mon ouvrage principal tome II, p. 54-56 . Celui-là fera
6

encore du bon travail. Il en veut à Rosenkranz, à juste titre. Mais ce dernier a témoigné de la plus
grande ignorance dans sa Psychologie , le même ouvrage qui a occasionné les attaques d’Exner,
7

où il dit (du moins dans la première édition, je n’ai pas vu la 2 ) que les astronomes affirment que
e

Sirius se trouve à 3 MILLIONS de lieues de nous ! Alors qu’il est connu qu’une ligne de 40 millions
de lieues est un POINT INDIVISIBLE par rapport à la distance de Sirius, parce qu’il n’a pas de
parallaxe. C’est ce que vous devriez démontrer à Schultz, pour l’instruire. L’ânerie des hégéliens
doit être mise à nu : Hinrichs ne sait pas le latin. Altenstein a donné le grade de professeur au
moindre ignorant qui faisait foi d’hégélianisme.
Pour mon anniversaire, il ne s’est rien passé, à part une visite du fidèle Kilzer, venu pour me
féliciter, et la lettre ci-jointe de l’apôtre Jean , qui mériterait que vous la lisiez. Sa réponse à
8

l’accusation de Rosenkranz , à travers Marthe et Marie , est particulièrement heureuse et


9 10
constitue une trouvaille merveilleuse ; lisez surtout le passage concerné dans Luc ; comme
pendant antithétique, j’aimerais poser à côté Méphistophélès :
Voilà les petits sages
De mon entourage :
Écoute comment pour le plaisir et l’action
Ils donnent des conseils de blanc-bec . 11

Ce reproche de Rosenkranz a déjà été formulé à plusieurs reprises et ne manquera pas de


revenir, car ma philosophie heurte l’esprit du temps. Pour l’affronter, rien de plus frappant et
d’efficace que ces deux passages de la Bible et du Faust.
Il est tout de même curieux que ce soit précisément chez les officiers que ma philosophie
trouve tant d’écho : à Magdebourg , Neisse, Neuruppin, Spandau et Königsberg. Mais ce
12

seulement en Prusse. Je me console en pensant que pour un individu qui s’exprime par
l’imprimé, l’écrit ou personnellement, il y en a 100 que j’ai également influencés, mais qui ne se
mettent pas en avant. Dans le Deutsches Museum se trouve également un profond soupir
concernant l’épigraphe du roman . La chose commence à me plaire. Vous avez raison, « un
13

conflit entre physique et métaphysique s’annonce » : il pourrait très bien se transformer in


gloriam meam . Car ici, c’est manifestement la métaphysique qui a raison ; encore faut-il que ce
14

soit la bonne.
Je me réjouis que vos yeux guérissent : surtout ne manquez pas de précaution ; pour une
chose pareille, c’est une chance d’être à Berlin, pour les médecins.
Santé et tranquillité de l’esprit, les deux biens suprêmes de ce monde, c’est ce que vous
souhaite

Francfort s. M., votre ami


le 14 mars 1855. Arthur Schopenhauer.
355. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami !

Je me réjouis de voir que vous remettez à l’eau un petit livre , que vous m’y accordez
2

beaucoup d’attention, et également que Brockhaus vous paye passablement. Vous avez choisi un
thème pour lequel vous pouviez tirer grand avantage de ma philosophie, contre l’actuel
matérialisme réaliste. J’espère bien que vous l’avez fait, même si je suis quelque peu inquiet
lorsque vous doutez de ma future satisfaction. Personne d’autre ne souhaite autant que moi le
succès de vos écrits.
Ici, Dieu merci, le diable semble peu à peu se déchaîner : je perçois de nombreux signes. Par
ex., on a déjà fait de moi un portrait peint à l’huile : c’est un excellent peintre, dont le tableau en
grandeur nature, Vénus et Cupidon, a été pris à l’Exposition de Paris, qui a déjà sévèrement
refusé tant de choses. C’est un Français, mais il s’appelle Lunteschütz ! Déjà cet hiver, il s’est
3
assis à côté de moi à la table d’hôte* (sans doute intentionnellement), et il est revenu très souvent
; ainsi, il m’a souvent vu parler avec vivacité, car comme c’est un bon gaillard, j’ai commencé à
lui faire confiance et à me laisser aller : c’est pourquoi il connaît exactement ma vraie
physionomie. Il ne connaît ma gloria que par les conversations en ville ; il me peint à ses frais,
bien qu’il soit très cher : cet hiver, je lui ai demandé combien il prenait pour un portrait, environ
20 Louis d’or ? Plus que cela*, m’a-t-il répondu. Ça sera quelque chose de rare : j’ai déjà posé 2
fois, environ 2 heures, le matin : il faut maintenant que cela sèche pendant quelques jours.
D’abord on l’exposera ici, à la Galerie, ensuite il ira à l’Exposition à Berlin. Dieu ! Comme les
professeurs de philosophie vont s’en repaître ! Et ensuite mes vieilles connaissances et mes
nouveaux amis de Berlin. Il dit qu’une association de jeunes peintres, contaminés par un étudiant
de Heidelberg, organise le soir des conférences et des débats autour de ma philosophie, et que de
leur côté, certaines dames s’en occupent également beaucoup. Ergo (avec les nombreux
officiers), ma philosophie gagnera un large public, et pas seulement dans les écoles, les grandes
comme les petites : elle pénètre le peuple, parce que c’est sérieux.
Je n’ai toujours pas vu le disciple de Baader, c’est-à-dire son ouvrage . Cet idiot s’imagine
4

que ce qu’il dit contre moi doit nécessairement avoir du poids et de l’effet. Tout le monde verra
que c’est un nigaud, et en plus de cela, il a la bêtise de me citer littéralement, alors que chaque
passage cité m’apporte de nouveaux lecteurs. En outre, il peut dire avec plus de raison que
Perse : quis leget haec ? vel duo, vel nemo . Car personne ne lira ces abominables absurdités :
5

qu’il jure et peste tant qu’il veut dans son grenier, personne ne l’entendra. Mais je vous remercie
de m’en avoir parlé, car à présent je sais quand même vaguement de quoi il s’agit.
Dans le Rapport annuel de l’association de physique de Francfort, un certain Dr. Oppelt a 6

raconté des stupidités sur ma théorie des couleurs — elle ne serait même pas une théorie (celle
de Goethe non plus), mais une métaphore très subtile. Avec cela, il me fait des éloges et donne
un résumé, court et inexact, de « l’intellectualité de toute intuition ». C’est qu’il est professeur de
physique au lycée, il enseigne donc depuis des années le CREDO NEWTONIEN, et il fait en plus
partie des 14 calomniateurs de Regazzoni. Vouloir nier que ma théorie des couleurs est bien une
théorie, voilà qui est incroyablement absurde : elle l’est au sens le plus strict du mot théorie.
Ce Barthélemy-Saint-Hilaire , qui a péché face à l’Accompli victorieux, est celui-là même
7

que j’ai tancé dans ma préface de la Volonté dans la nature, p. XI , ce cagot avec le pourboire
8

dans la main. La cagoterie vénale et outrée aura les mêmes conséquences en France qu’en
Allemagne, où tout le monde trouve son gaudium chez C. Vogt, et ce seulement parce qu’il met
en vente un matérialisme grossier.
Un certain Monsieur Candidus a commis une petite philosophie de la religion qui se trouve
9

déjà recensée dans le Centralblatt et, mirabile dictu , en couverture de la Revue des Deux
10

Mondes : dans les deux recensions, je flaire une influence au moins indirecte de ma doctrine ;
surtout regardez-les. Continuez surtout à me faire part de tout ce qui se rapporte à moi : cela me
fait toujours grand plaisir.
Donnez bientôt de vos nouvelles à

Francfort s. M., votre ami


le 2 mai 1855. Arthur Schopenhauer.
356. À DAVID ASHER 1

Très honoré Monsieur le Docteur !

Veuillez recevoir mes chaleureux remerciements pour votre « Missive ouverte », si 2

réfléchie et favorable à mon égard, et qui est davantage un éloge qu’une attaque. Mais n’attendez
pas de moi que je m’engage dans la controverse, car je ne le fais jamais, je laisse à mon système
la tâche de se justifier lui-même et d’affronter le monde comme il peut ; si nécessaire, les
disciples viendront en aide. À cela s’ajoute que, de façon générale, j’ai une grande répulsion à
écrire des lettres. Je voudrais cependant attirer votre attention sur un faux pas que vous avez
commis p. 12, dans la note : le passage évoqué n’est pas d’un scolastique, mais de Cicéron.
Je me réjouirais beaucoup si vous meniez à terme l’écrit plus détaillé que vous avez
annoncé ; car toute discussion de mon affaire m’est bienvenue, si elle est menée honnêtement.

Francfort s. M. Avec ma plus haute


le 16 juin considération
1855. Votre serviteur dévoué
Arthur Schopenhauer.
357. À ERNST OTTO LINDNER 1

Mes chaleureux remerciements, cher Monsieur le Dr. Lindner, pour votre article vraiment
excellent sur Asher . Ce dernier m’a fait fort plaisir, du premier au dernier mot. Mais ce qui me
2

réjouit surtout, c’est que vous rendiez honneur au pessimisme et à l’ascèse, comme le mérite la
vérité — contre l’infâme optimisme purement juif, dont la chute sera d’autant plus éclatante que
la majorité qui le soutient est innombrable.
Je dois par ailleurs vous remercier pour l’envoi du programme scolaire de Breslau dont je
3

n’aurais jamais rien su sans vous, mon Dr. indefatigabilis, et qui me fait bien plaisir, davantage
encore que celui de Pomtow, car le peu écrit par ce Dr. Körber est très juste et pertinent .
4

Que vous puissiez prospérer et fleurir, c’est ce que vous souhaite de tout cœur
votre ami

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 27 juin 1855.
358. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami !

Je vous remercie pour votre livre , que j’ai lu avec attention. Ce que vous citez de mes écrits
2

est bien choisi et pertinent : j’aime en particulier que vous parliez de la métaphysique de l’amour
sexuel, qui jusque-là a été trop peu prise en compte, même par vous, alors qu’elle est susceptible
d’intéresser les gens. Dans l’ensemble, votre livre est assez bon, très actuel et capable de
proposer au grand public un point de vue juste sur ces choses : le plan est également bien fait et
bien appliqué. Comme passages particulièrement réussis, je relève p. 8, 173, « car jusqu’à
maintenant », et 185 . J’aurais bien des choses à objecter concernant certains points précis. Par
3 4

ex. p. 31 : « Le sublime mathématique est ce qui ne peut être connu que par les mathématiques. »
Dieu nous en garde ! Il agit sur l’intuition par sa simple grandeur, contrairement au sublime
dynamique. C’est plus grave encore que d’avoir laissé échapper, p. 70, l’expression « nature
physique ». Il est faux, p. 38, de rapprocher les fantômes dans Hamlet et Macbeth, des
5

bouffonneries de magicien dans le Songe de la nuit de SAINT JEAN (la traduction par Songe d’une
nuit d’été est une GROSSIÈRE INCARTADE) et dans La Tempête. Shakespeare croyait aux fantômes,
comme tout le monde, exception faite du XVIII siècle et de ses disciples. Je n’ai été réellement
e

irrité que par le passage p. 19, début de paragraphe ; là où vous affirmez exactement le contraire
6

de ce que j’ai dit et démontré dans la Volonté dans la nature, p. 77 . Lorsque, par une longue
7

réflexion, on a déterminé et spécifié avec précision les concepts les plus importants, il est
désespérant de les voir jetés pêle-mêle si cavalièrement* et de voir qu’on entonne à nouveau la
ritournelle des vieux philosophrastes de la nature, et ce de la part de disciples ! Croyez-vous
qu’on puisse détacher un morceau de ma philosophie en laissant le reste ? Elle est bien plutôt
comme une voûte dont on ne peut enlever la moindre pierre sans mettre en danger l’ensemble. Si
vous aviez raison, la volonté serait un accident de la vie : c’est faux ! La vie est un accident de la
volonté qui ne se produit qu’à un degré élevé d’objectivation. À cela s’ajoute que p. 22, vous
citez explicitement cette page 77 (de la Volonté dans la nature) là où elle n’a rien à faire, car
c’est MA page 22 de la Volonté dans la nature qui aurait pu être citée, ou ENCORE MIEUX les
passages auxquels je me réfère dans ma théorie des couleurs, p. 19 , 2 éd. Par ailleurs, p. 22,
8 e

votre expression CAUSES MÉCANIQUES est fausse, car les causes physiques et chimiques en font
9

aussi bien partie. L’à peu près* ne convient pas à des écrits philosophiques.
J’ai à présent déversé ma bile et c’est bon.
Vous verrez dans la lettre ci-jointe tout le tumulte occasionné par moi, et le vif intérêt des
professeurs pour tout ce qui ME concerne, et comment ils procèdent ! Je crois qu’ils pensent TOUS
à moi, toute la journée, et qu’ils rôdent comme l’abbé de St. Gall — « ô mon bon Hans Bendix,
devant mes yeux je vois tantôt des taches jaunes, tantôt des taches vertes », etc. — et la nuit,
10

j’apparais dans leurs rêves, en loup-garou.


J’ai lu Hoffmann (dont l’oncle, une sorte de lutin professeur de piano, m’a déjà parlé de lui
il y a 16 ans) , tome 5, 30 pages, et note p. 117 et tome 7, 27 pages , avec la note p. 406. Il peste
11 12

de toutes ses forces, « négateur effronté de Dieu, âne », etc., mais sa bêtise est telle qu’il cite
13

bon nombre de mes passages : et à partir de ces derniers, chacun, même s’il ne me connaît pas,
verra que je suis infiniment supérieur à cette crapule . Mais il a la perfidie de faire suivre mes
14

passages de propos prononcés par un interlocuteur dans le dialogue sur la religion , comme si
15

c’était là simpliciter MON opinion, alors que tout de suite après, l’autre interlocuteur affirme le
contraire. Ce genre de canaille a toujours été l’accompagnement obligatoire de tout mérite, et
cela ne changera pas.
Quel élégant et grâcieux coup de pied au cul* LINDNER a donné à ce Rosenkranz — qui en 16

mériterait encore davantage, pour ses autres calomnies ! Les professeurs s’en tiennent à la
maxime de Don Basilio dans le Barbier : « Calomnier, calomnier ! C’est l’unique moyen . » 17

Comme von Raumer dans son discours d’ouverture , « Sur la double recension de la Critique de
18

la raison pure » ; c’est pourquoi je vous prie de consacrer 3 secondes à ce torchon, vous verrez
ainsi comment, à partir de ma lettre hautement méritante sur KANT , on veut maintenant
19

m’accuser de crime, après 18 ans, et quels gauchissements et exagérations on fait subir à mon
texte — et ce dans un Sénat académique ! Et il a recours ensuite au pur MENSONGE DIRECT, en
affirmant p. 12 que parmi les motifs de Kant, j’aurais évoqué sa « peur de passer pour un idiot
paradoxal », je l’aurais décrit comme « cérébralement réticent à l’apparence du paradoxe », alors
que dans ma lettre, on ne trouve pas LA MOINDRE SYLLABE NI LA MOINDRE TRACE de ces
suggestions et que le mot « paradoxal » n’apparaît même pas ; c’est ainsi que ce…… ment au
Sénat académique et à son public. Ensuite il élabore une brillante réfutation, dirigée contre des
arguments CHRONOLOGIQUES dont je ne me suis même pas servi, et ce uniquement parce qu’en
passant, j’ai évoqué la mort de Frédéric II. Et son cousin, cette fripouille anonyme, répète cela
20

dans le Centralblatt en sonnant les trompettes. Calumniare audacter, semper aliquid haeret . Ces 21

agissements sont infâmes. Comparez cela avec le GRAND ÉLOGE qui porte précisément sur cette
fructueuse lettre, dans le bel article sur les PARERGA, Jahreszeiten, décembre 1851 ; comme ce
simple journal de mode parle dignement de moi, contrairement aux tracasseries et aux
mensonges de ces discours d’ouverture académiques — ou plutôt « discours de fermeture » !
Du reste, il était NÉCESSAIRE que dans cette lettre je mette à nu les faiblesses et les erreurs de
Kant et je ne pouvais pas le ménager, il était nécessaire que j’établisse la Critique de la raison
pure dans sa seule forme utile et authentique, et que je discrédite l’autre édition, voilà de quoi il
s’agissait, et c’est cela qui est important pour les gens, si infiniment important ! Et non pas de
présenter Kant comme un chevalier sans peur et sans reproche* . 22

Il semble que vous ne connaissiez pas le programme du Lycée de Breslau, avec le curieux
discours du Dr. Körber, qui m’a fort réjoui, davantage que celui de Pomtow, même si le passage
qui me concerne est très bref : ce qu’il dit est pertinent. C’est drôle de voir que ce bon monsieur
a dû revêtir le manteau de l’orthodoxie, car ce dernier est si grand pour lui qu’on dirait qu’il va
tomber à chaque instant : et à la fin il voudrait même m’y faire entrer en contrebande ! Lindner
me l’a envoyé. Mais je deviens bien mélancolique quand je pense que ces choses ne me
parviennent que par la voie du hasard, et que je songe à tout ce dont je n’ai pas connaissance.
J’ai enfin lu quelque chose de Moleschott , à savoir le chapitre « La volonté », 33 pages,
23

dans la Circulation de la vie, 2 éd., 1855. Si je n’avais pas su que l’auteur en était le célèbre M.
e

Moleschott, je ne l’aurais pas même attribué à un étudiant, mais à un garçon coiffeur qui aurait
assisté à des cours d’anatomie et de physiologie. Ce fatras est si cru, ignorant, rudimentaire,
maladroit et généralement embrouillé. Je me réjouis à présent d’avoir renvoyé ces gaillards dans
la chambre des valets. Et d’après ce que m’assure le Dr. Mayer de Mayence, Brockhaus lui
donnerait 1 000 Louis d’or pour les quelque 30 feuilles de sa nouvelle physiologie ! Il verra !
24

Même la partie physiologique du chapitre est superficielle et triviale. Avec cela, c’est grossier et
immoral ; en outre, le chiffon rouge de la République des brigands pend à la poche arrière de
ce…… On a bien fait de retirer le jus legendi à ce gaillard : c’était indispensable. De la même
école provient un nouveau livre du Dr. Büchner , docent à Tübingen, sur Force et matière —
25

tout à fait dans le même esprit. J’espère assurément qu’on retirera aussi le jus legendi à ce gars-
là. Ces crapules empoisonnent à la fois la tête et le cœur, ils sont ignorants comme des rustres,
26

bêtes et mauvais.
Bizonfy était ici, il s’est caché pendant un jour, sous un faux nom, dans une voiture bien
fermée, pour me rendre visite, après avoir hésité. Un beau jeune homme, très grand ; il semble
vraiment avoir des connaissances, dans les langues orientales ; il dit qu’il veut enseigner ma
philosophie à Zurich : ce n’est peut-être que du vent. En prenant congé de moi — il m’a baisé la
main ! J’en ai crié d’effroi.
Un Américain, Young de son nom, était également ici, futur docent à l’Université d’Oxford
27

près de Boston , et m’a transmis les salutations d’Erdmann. Young est un yankee intelligent et
28

bien élevé, j’ai parlé anglais avec lui pendant 2 heures ½ et j’ai dédicacé en anglais son album : il
s’étonne de voir à quel point je suis anglais.
Le portrait n’est pas encore achevé, même si j’ai déjà posé au moins 12 fois, à chaque fois
29

2 heures, car après 3 ou 4 séances, il doit toujours sécher pendant 15 jours. Je vais à nouveau me
rendre dans la maison de l’auteur de la Théologie allemande, là même où il était assis, dans la
chambre du parterre aux murs de fondation épais et anciens qui sans doute sont ceux de l’ancien
édifice.
Je me réjouis de l’amélioration de vos yeux : c’est une priorité.

Francfort s. M., Salutations chaleureuses


le 29 juin 1855. Arthur Schopenhauer.
359. PROCURATION
POUR HERMANN VON ALMONDE 1

Procuration spéciale.

Après que la veuve Sibylla Mertens-Schaaffhausen de Bonn m’a indiqué que vous aviez
vendu à Monsieur Daniel Friedrichsen les 3/9 de votre part de terrain à Ohra près de Dantzig,
appartenant jadis à ma famille, et que vous vous êtes déterminé à accepter, à mon bénéfice et
avantage, une clause contractuelle spéciale concernant le contrat d’achat et de vente de cette part
de terrain, s’énonçant comme suit :
« Si Madame la vendeuse meurt avant le Dr. ph. Arthur Schopenhauer, domicilié à
Francfort s. M., alors Monsieur Dan. Friedrichsen, à partir du jour de décès de Madame la
vendeuse, verse à Monsieur Schopenhauer une rente viagère annuelle de cent cinquante thalers
pr. cour., jusqu’à sa mort, et cette rente viagère est également considérée comme faisant partie du
prix d’achat. Madame la vendeuse fera en sorte que M. Arth. Schopenhauer accepte ce contrat »,
et [après également que vous avez accepté de me contacter pour conférer à cette stipulation
contractuelle me concernant spécifiquement, par la déclaration de mon acceptation de cette
dernière, la qualité légale d’une obligation contractuelle et exigible liant les deux parties, et par
la présente, j’ai donc donné suite à cette demande qui m’a été faite, et en acceptant parfaitement
tout le contenu de la clause à mon avantage, déterminée plus haut, je donne procuration à
Monsieur Hermann von Almonde à Dantzig afin qu’il explique en mon nom, à propos du contrat
d’achat conclu entre Madame Mertens-Schaaffhausen et Monsieur Daniel Friedrichsen, que
j’accepte en pratique et dans toutes ses parties et obligations la clause contractuelle stipulée à
mon avantage par les deux parties contractantes, et que j’adhère à cette dernière, et que je
considère par là que j’ai acquis le droit contractuel d’exiger, le cas échéant, le respect ponctuel et
l’exécution de ces engagements pris à mon encontre, et de faire valoir, contre les parties
contractantes, leurs héritiers et leurs successeurs particuliers, la possession en question.
Par ailleurs, Monsieur mon mandataire reçoit procuration pour veiller à ce qu’on englobe,
dans le contrat d’achat en question, aussi bien ma présente procuration que sa déclaration
d’acceptation et d’adhésion en mon nom correspondant exactement à cette dernière, et qu’on
réalise pour moi, afin d’attester mon adhésion, un tiré à part notarié du contrat complet.
En foi de ce qui précède la signature de ma propre main.

Ainsi établi Arthur Schopenhauer.


à Francfort s. M. Dr. phil. c. jure leg.
le 5 juillet 1855. in Univ. Berol.
360. À JULES LUNTESCHÜTZ * 1

Monsieur Longtemps-sèche !

Jeudi je ferai couper mes cheveux. — Pour que ça ne vous étonne pas.

[été 1855] A. S.
361. À JULES LUNTESCHÜTZ * 1

Monsieur Lunteschütz,

J’ai besoin de mes daguerréotypes, et je vous prie de vouloir bien les remettre à ma
servante.

[été 1855] A. S.
362. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Vieil ami !

J’avais déjà lu votre article dans le n 27 de l’Europa , et j’estime que vous auriez pu parler
o 2

de moi d’un ton un peu plus élevé, au lieu de me mettre plus ou moins en parallèle avec
Helmholtz. Dire que « lui et moi, nous nous tenons sur le même sol », c’est comme dire que le
Mont blanc et une taupinière se tiennent sur le même sol. Il y a un an, il a rédigé un article
insipide sur la théorie des couleurs de Goethe. Il écrit sur la vision sans me connaître, ou sans
vouloir me connaître : vous auriez donc dû le ratatiner, et comme il faut. De façon générale, vous
ne devriez jamais oublier que votre mérite principal en philosophie et en littérature, qui durera, et
perpétuera peut-être même votre nom, c’est que vous êtes le premier à avoir introduit ma
philosophie, avec beaucoup d’insistance et avec une rare persévérance — ce que Dorguth a tenté
en vain avant vous. Vous avez par là rendu service non seulement à moi, mais également à toute
cette génération. Vous devriez retenir cela et ne jamais sortir de votre rôle, celui d’un fidèle
évangéliste. La tolérance n’est pas une vertu d’apôtre et elle ne doit pas l’être.
J’ai fouiné dans le tome 2 de l’Histoire de la philosophie moderne de Kuno Fischer, qui
s’arrête AVANT Kant, mais il y est quand même (obiter ) un peu (extra ordinem) question de moi,
3

p. 466 et 395. Incurablement corrompu par l’hégélianisme, il CONSTRUIT l’histoire de la


philosophie d’après ses poncifs aprioriques, et en tant que pessimiste, je suis nécessairement
opposé à LEIBNIZ l’optimiste : on en déduit que Leibniz a vécu à une époque RICHE EN ESPOIRS, et
moi à une époque DÉSESPÉRÉE et malheureuse. Ergo, si j’avais vécu en 1700, j’aurais été un
Leibniz parfait et optimiste, et lui aurait été moi, s’il vivait maintenant ! L’hégélianisme rend
complètement fou. En outre, mon pessimisme s’est développé entre 1814 et 1818 (où il a pris sa
forme définitive) ; ce qui correspond à l’époque la plus RICHE EN ESPOIRS, après la LIBÉRATION DE
L’ALLEMAGNE. Ce blanc-bec ne le sait pas ! D’ailleurs il parle de moi élogieusement, mais on
4
voit très bien que c’est seulement parce qu’il n’ose pas parler de moi en mal, comme il aimerait
le faire ; p. 395, ma VOLONTÉ se trouve identifiée avec la « raison pratique » de Kant, alors que
cette dernière en est exactement l’OPPOSÉ, à savoir ce qui doit refréner et délimiter la volonté, de
plus il s’agit d’une simple combinaison conceptuelle de la « raison » (à ce propos mon Éthique).
Cela ne fait rien, mais vive l’à peu près* ! C’est la méthode du poncif qui l’exige :
Si avec du bon bois tu as charpenté une croix solide
Un corps vivant s’y attachera bien en cas de besoin.

G.5

Je vois que je suis rapidement évoqué, deux fois, dans la Philosophie du christianisme de
Ch. Weisse , un livre épais et pesant. Lui non plus ne dit pas de mal de moi, mais seulement
6

parce qu’il n’ose pas le faire : à l’arrière-plan gronde une sourde colère.
Évitez surtout toute tolérance molle. Si je m’étais modestement subordonné au bienveillant
jugement de ces messieurs, vous me traiteriez autrement. Mais vous tremblez et vous êtes laxiste.
Alors que vous aimeriez volontiers décharger votre colère sur moi, en me réprimandant, elle
vous reste en travers de la gorge, car vous sentez que ce serait compromettre votre avenir : c’est
pourquoi vous êtes « trompeur et incurablement mauvais . » Ils lisent beaucoup plus mes livres
7

qu’ils veulent bien le montrer : c’est ce que je vois lorsqu’ils citent des passages que j’ai déjà
cités moi-même, sans me nommer, alors qu’ils les tiennent de moi seul. Ce Weisse évoqué plus
haut cite par ex. le passage de Hobbes sur le nunc stans , etc., et ils procèdent tous ainsi.
8

Dans ma dernière lettre j’écrivais que je m’attendais à ce que le Dr. Büchner soit suspendu
pour son Force et matière. À ma haute satisfaction, je vois dans la Postzeitung d’hier que c’est
en cours. Ce n’est que justice, car non seulement ce fatras est hautement immoral, mais encore
faux, absurde et stupide, et la racine de tout cela, c’est l’ignorance, fille de la paresse, de la
fumerie de cigares et de la politique. Un homme pareil n’a rien appris, à part un peu de seringuo-
clystérologie ; il n’a pas fait de philosophie, ni d’humanités : et c’est avec cela qu’il a le toupet et
la présomption de s’approcher de la nature des choses et du monde. De même Moleschott. Ce
n’est que justice : ils sont punis pour leur ignorance.
Le portrait n’a pas encore bougé : il veut absolument faire la dernière retouche lorsqu’il sera
SOUS CADRE ; il a attendu ce dernier pendant une semaine et l’a ensuite trouvé mauvais, cela lui
coûte 30 fl., il faut donc en faire fabriquer un autre. Après-demain, il part en voyage pendant 10
ou 12 jours, à Dresde et à Berlin, ce n’est donc qu’après son retour qu’il le terminera : il
demande encore 4 séances. Voilà de quoi enrager et désespérer !
Que vous soyez satisfait de votre situation me réjouit de tout cœur et que le ciel (Tien) fasse
qu’il en soit toujours ainsi !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 15 juillet 1855.
363. À CARL GRIMM 1

Très honoré Monsieur le curé !

Déjà cet hiver vous m’avez fait fort plaisir avec vos épigrammes très flatteuses et je vous en
2

remercie. Votre chère lettre témoigne à présent d’une approche rigoureuse et profonde de ma
3

philosophie ; ce qui me procure une satisfaction toute particulière. Je conçois très bien qu’en tant
que prêtre, vous ne puissiez pas approuver absolument ma doctrine, même si l’esprit éthique de
cette dernière est identique avec l’esprit du christianisme authentique.
Vos épigrammes sont très bonnes et mériteraient bien le publici juris dans un journal, en
tant que suppléments à celles de Schiller qui sont du même genre. Mes « Fragments de l’histoire
de la philosophie » seront sans doute augmentés dans une 2 édition, mais ils resteront toujours
e

des fragments.
Que mes écrits puissent continuer à bénéficier de votre intérêt et à vous rappeler avec
bienveillance le souvenir de

Francfort votre
le 23 juillet 1855. serviteur dévoué
Arthur Schopenhauer.
364. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami !

Cette fois-ci, la justification que contient votre lettre est fondée et je vous crois entièrement.
2

Je vois bien que non seulement les professeurs, mais aussi tous leurs cousins et parrains se sont
ligués contre moi, et ce pour 3 raisons. 1) Ils voudraient se débarrasser de la honte d’avoir
profondément ignoré ma philosophie pendant 35 ans, en démontrant et en martelant qu’elle ne
mérite vraiment aucune considération. 2) Cette philosophie ne doit pas être enseignée sur une
chaire : ergo elle ne doit pas concerner non plus le public. 3) La médiocrité d’esprit de ces
messieurs s’oppose à elle, « dans un sentiment qui creuse leur néant » et la jalousie ronge leur
3

foie. D’où leurs innombrables querelles : le Repertorium et le Centralblatt ne recensent rien qui
parle en ma faveur et acceptent n’importe quoi du moment que cela me contredit ; dans leur
infamie, ils vont même jusqu’à refuser au noble Dorguth la place qu’il mérite dans leurs
nécrologies, en l’occultant, car autrement ils devraient me nommer. Mais tous ces jolis
agissements ne les aideront en rien ; la propagation de ma doctrine est déjà trop avancée. Un
proverbe abyssinien dit : « Quand le Nil sera arrivé au Caire, aucun Dembea (fleuve affluant) ne
pourra l’arrêter. » Ils verront, ces……
L’intérêt du public, qui se développe lentement, mais en allant toujours grandissant, ainsi
que l’enthousiasme illimité de quelques-uns, qui se font à présent déjà nombreux, en sont les
garants.
Je vous remercie de tout cœur pour toutes les communications littéraires dans votre lettre.
Les invectives mordantes de Wirth se sont réfutées elles-mêmes, mais pour les professeurs &
4

Co, toutes les raisons sont bonnes, du moment qu’elles sont dirigées contre moi. Eh bien, que ces
messieurs s’amusent bien dans leur sombre petite boutique ; ils apprendront à temps ce qui se
passe au dehors, où le tumulte s’amplifie et atteindra d’ici quelques années, nisi fallor , une rare
5

intensité.
J’avais déjà lu l’article dans la Revue des Deux Mondes , et je crois que la pensée de ce
6

Reynaud est très proche de la mienne, sauf qu’il parle de la nature sans KANT et sans philosophie
transcendantale : il fait appel à la misère factuelle du monde, à l’innéité du caractère moral, il dit
que nous avons dû exister avant la naissance, et il témoigne d’une manière de penser
brahmanique et bouddhiste. Très sage !
Son critique est un cagot en bonne et due forme, il utilise des arguments de chez le Père
Malebranche et de façon générale de chez Dieu et encore Dieu et toujours Dieu*. Là où le vieux
Juif fait son apparition, il gâche évidemment tout : qu’on lui ferme la porte au nez. La lumière
d’Orient commence aussi à agir en France. Que Dieu* soit sur ses gardes. Bientôt le monde
refusera d’être un mauvais ouvrage.
Mon portrait est terminé et vendu. Wiesike est venu au bon moment et l’a acheté à même le
7

chevalet, pour 250 fl. Le plus inouï, c’est qu’il m’a sérieusement dit , ainsi qu’au peintre, qu’il
8

voulait construire une maison spécialement pour l’y suspendre ! Ce serait la première chapelle
érigée en mon honneur. Recitativo : « Oui, oui ! Sarastro règne ici . » Et en l’an 2100 ?
9

Ci-joint des lettres d’hommages et des distiques du curé Grimm — remittenda !


10 11

Un certain Voigtel , juge d’arrondissement à Magdebourg, m’a rendu visite, à peine 28 ans,
12

devenu prosélyte grâce à Dorguth, plein de ferveur pour le Seigneur et son Évangile.
Portez-vous bien.

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 17 août 1855.
365. À CARL GRIMM 1

Très honoré Monsieur le curé !

C’est avec plaisir que je verrais imprimés vos distiques , mais avant que vous les envoyiez à
2

la librairie, j’aimerais vous soumettre ce qui suit.


Les pages volantes se perdent et se dispersent dans la littérature et ne pénètrent pas
facilement le public, car le bénéfice réalisé par le marchand d’assortiments est tellement BAS
qu’il ne prendra pas la peine d’envoyer à vue ne serait-ce qu’un billet ou une note à Leipzig.
C’est pourquoi il serait beaucoup plus judicieux d’incorporer les vers à l’un des nombreux
journaux : le plus adéquat me semble être celui du Deutsches Museum de Prutz : je vous
conseille de tenter votre chance auprès de tous, après votre voyage, avant que vous ne
l’abandonniez à un fleuve comme Moïse dans le berceau. Mais dans ce dernier cas, vous
pourriez plus ou moins écarter les obstacles évoqués plus haut en utilisant une impression
particulièrement splendide, grande, sur du beau papier, avec seulement 3 épigrammes par page,
format in 12 , pour augmenter le prix. Comme vous ne demandez pas d’honoraires, vous êtes en
o

droit d’exiger cela.


Je dois également vous faire remarquer que votre manuscrit est bien trop illisible, du moins
pour des typographes ignorants. Il est donc indispensable que vous vous occupiez de la
correction, sinon vous vous arracherez les cheveux à cause des coquilles.
À l’occasion, j’aimerais voir, quidquid sit , ce que vous avez écrit sur moi dans le journal de
3

l’école de Nassau , concernant les plantes et les animaux.


4

En vous remerciant de tout cœur pour vos envois précédents et vos aimables lettres

Francfort votre
le 21 août serviteur dévoué
1855 Arthur Schopenhauer
366. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je vous remercie beaucoup, cher ami, pour vos nouvelles communications littéraires : sans
cela, je n’aurais rien su de la recension hambourgeoise , comme cela se passe sans doute avec de
2

nombreuses choses, bonnes ou mauvaises, que je ne connaîtrai jamais.


Vous aurez déjà lu la diatribe de Michelet dirigée contre moi , dans le Journal
3

philosophique : de la vérité, du mensonge, des absurdités jetés pêle-mêle, baignant dans une
sauce d’ignorance, de bêtise, de perfidie dévote. Cela ne m’inquiète pas le moins du monde : cela
ne pourra porter préjudice à aucun homme un tant soit peu raisonnable ; c’est qu’il s’agit
seulement du « roquet de notre écurie ». Ces messieurs ont au moins délié leur langue. J’ai
4

gâché 1 heure ½ avec le tome 2 de la Psychologie de FORTLAGE : c’est le verbiage le plus


5

pitoyable du monde et…… Mettre de côté Kant et tous les esprits pensants, afin de servir ses
misérables fariboles, est révoltant. Il croît qu’on peut être un…… impunément : c’est encore à
voir. Brockhaus fera une bonne affaire avec cela. Quel être humain peut lire ces écrivailleries ?
Dans la préface, regardez surtout « LE PASSAGE CLASSIQUE DU GRAND GÉNIE » — Beneke !
À propos ! Dans l’article cité plus haut, p. 44, Michelet fournit une nouvelle preuve de son
ignorance et de son incapacité, car évoquant la question de Kant « comment des propositions
synthétiques a priori sont-elles possibles ? », il poursuit : « la réponse AFFIRMATIVE à cette
question » — diable, qu’est-ce que cela veut dire ? Mais déjà il y a environ 12 ans, il a dit dans
un journal hégélien que depuis que Kant a soulevé cette question, tous les philosophes «
CHERCHENT des jugements synthétiques a priori ». Cet homme, qui SE NOURRIT grâce à la
philosophie, n’a pas la moindre compréhension du sens de cette question, à savoir que Kant
demande : comment se fait-il qu’AVANT TOUTE EXPÉRIENCE, nous puissions juger en toute
certitude du temps, de l’espace, de la causalité ? Qu’est-ce qu’il y a à « affirmer » là-dedans ? Il
mériterait d’être traité comme un…… : car il croit que cela signifie : « Y a-t-il des jugements
synthétiques a priori ? » Donc…… Je vous le dis, il y va de sa nourriture, de la nourriture pour
lui et son engeance ! car c’est là l’ABC de la philosophie. Et un pareil…… me juge. J’ai été trop
clément avec ces professeurs de philosophie.
Ci-inclus une liasse de lettres du curé épigrammatique et enthousiaste. Vous devez les lire
selon la date, justo ordine . La lettre de la demoiselle et son poème sont plutôt flatteurs : le
6 7

poème est VRAIMENT BON. C’est quand même beaucoup de la part d’une petite bonne femme.
Tout cela quam primum REMITTENDUM ! 8

J’ai reçu beaucoup de visites, le juge régional Voigtel de Magdebourg , à peine 28 ans,
9 10

prosélyte de Dorguth. Hebler de Berne, qui m’avait envoyé son livre sur Shylock, également
jeune. Le peintre et professeur Bähr de Dresde : celui-là m’a beaucoup plu, gentil et intelligent ;
11

il connaît avec précision tous mes écrits et il en est tout plein ; il dit qu’à Dresde, on s’y intéresse
beaucoup, et que les femmes surtout en raffolent. Von Hornstein, jeune compositeur , élève de R.
12

Wagner qui étudie mes écrits avec beaucoup de ferveur, comme l’affirme Hornstein. Ce dernier
est encore ici, il témoigne d’une crainte respectueuse exagérée, par ex. il s’est levé de table pour
aller chercher dehors mon serveur favori que je venais de réclamer. Tous ces gens sont très
versés dans la lecture de mes œuvres. Le professeur Warnkönig de Tübingen, juriste, s’est
13

présenté à ma table, je le connais par son jus naturae : il s’est présenté comme étant l’ami de
Fichte qui serait très bien disposé à mon égard — credat Judaeus Apella ! C’est vraiment un
14

homme bon, aimable et intelligent : j’ai dîné plusieurs fois avec lui. Il me dit beaucoup de choses
flatteuses sur l’aspect de ma personne, qui semble être imposante ; récemment, un vieil Anglais,
qui ne me connaissait pas, m’a dit la même chose.
L’auteur de la recension du livre de Weigelt dans les Grenzboten lui reproche d’exposer les
autres systèmes à partir d’un point de vue subjectif, influencé par un système déterminé, mais il
ne dit pas de quel système il s’agit, parce qu’il ne veut pas me nommer. Et je ne devrais pas
appeler ces gaillards-là des chiens crapuleux ?
Depuis 15 jours, mon portrait est en exposition ; on est venu en masse pour le voir, tout le
monde l’admire et le trouve très ressemblant : il n’y a que Emden, Kilzer et moi qui ne soyons
pas d’accord. Quoi, un portrait ?! Sicelides musae, paulo majora canamus ! Ledit prof. Bähr
15

m’a fait savoir que von Launitz , le Phidias de cette ville, désire réaliser mon buste : il a insisté
16

pour que j’aille visiter un jour l’atelier de Launitz ; à la fin, j’ai dit « oui, oui », mais je tiens à
mon étiquette : c’est Launitz qui doit venir vers moi. Une fois qu’il m’aura suffisamment
attendu, il finira par dire, comme le proverbe : quand la montagne ne vient pas trouver le
prophète, c’est le prophète qui va vers la montagne.
Vous voyez, le Nil est arrivé au Caire.
Avec mes souhaits cordiaux pour votre santé
Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.
le 7 sept. 1855.
367. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami.

Voilà que vous avez encore tiré un boulet de canon de premier calibre , pour la théorie des
2

couleurs ! Bravo et merci beaucoup ! Dans l’ensemble, j’en suis très satisfait : vous avez exposé
l’essentiel de façon adéquate et dans l’ordre approprié. Mais je suis chagriné par deux péchés
d’omission : 1) vous n’avez pas correctement exposé la production du blanc, selon les lois
physiologiques et non pas physiques. Voilà le point sur le i, la preuve par le calcul. L’évoquer en
passant ne suffit pas. 2) Le lien véritable de ma théorie des couleurs avec celle de Goethe, et la
demonstratio a priori de cette dernière, selon la p. 70. Eh bien, il faut s’estimer content, ubi
plurima nitent , a dit Horace.
3

Dans son Literaturblatt, MENZEL recense le livre de Weigelt ; parmi les 7 philosophes du
titre , il a imprimé mon nom en MAJUSCULES et parle seulement de moi, sans même me rabaisser,
4

comme je m’y attendais de la part de ce cagot.


La morale de vieille femme de Schliephake a été recensée très élogieusement et en détail
5

dans les Göttinger Gelehrten Anzeigen et dans les Heidelberger Jahrbücher : rappelez-vous que
ces deux revues n’ont jamais daigné accorder leur attention à aucun de mes livres, et demandez-
vous si ce ne sont pas là des………
Il y a de cela 8 jours, le professeur Weisse de Leipzig s’est annoncé chez moi : ma vieille
6

était au courant et m’a d’abord apporté ses cartes de visite (elle joue maintenant le rôle de
l’intendante dans le Menuet du bœuf de Haydn) et je ne l’ai pas laissé entrer. Après la parution de
l’Histoire de la philosophie kantienne de Rosenkranz, il avait blâmé ce dernier dans la Hallische
Literaturzeitung, en lui reprochant de m’avoir évoqué moi aussi, et Rosenkranz y fait encore
allusion dans sa Caractéristique ; ensuite, dans son dernier livre, il a parlé de moi avec une
7

fureur acharnée — et maintenant il s’amène pour satisfaire sa curiosité ou même pour lier amitié
avec moi : quos ego ! 8

Je joins encore une lettre du pasteur Grimm . Remittendum ! Il m’a envoyé toutes ses
9 10

épigrammes, soigneusement rassemblées et recopiées dans un joli cahier, en m’indiquant


qu’aucun journal ni aucun éditeur n’en voulait.
Vous êtes à nouveau atteint de choléra ! Que les dieux vous protègent. Repérez les SIGNES
PRÉCURSEURS, prenez SUR-LE-CHAMP du bicarbonate, une cuillère à thé dans un verre d’eau, à
plusieurs reprises : recommandé dans le Times par un officier du BENGALE comme étant
infaillible.
Que le ciel vous protège !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 23 sept. 1855.
368. À JOHANN KARL BÄHR 1

Très honoré Monsieur le Professeur,

Veuillez recevoir mes chaleureux remerciements pour l’envoi de votre ouvrage


archéologique . Si cela pouvait vous être utile pour une éventuelle deuxième édition, je ne
2

voudrais pas laisser dans l’ombre que p. 6, début de paragraphe, vous n’avez pas pris en compte
l’Angleterre, qui était entièrement romanisée. La remarque avec laquelle commence le chap. 7
est très bonne et juste.
Si vous deviez rencontrer mon ami de jeunesse, Monsieur von Quandt, alors je vous prierais
de bien le saluer de ma part, et de lui faire savoir que son fils s’est présenté à mon domicile alors
que je n’étais malheureusement pas chez moi.
Je vous prie de garder un souvenir bienveillant de

Francfort s. M. votre
le 28 sept. serviteur dévoué
1855. Arthur Schopenhauer.
369. À CARL FERDINAND WIESIKE 1

Très honoré Monsieur Wiesike,

Afin de vous rassurer provisoirement, j’ai l’honneur de vous faire savoir ce qui suit.
Après votre départ, Lunteschütz a encore entièrement retouché le portrait et l’a
considérablement amélioré. C’est pourquoi à l’exposition, le portrait a fait l’objet de
l’approbation unanime de toute la ville pendant 3 semaines. L. s’est alors rendu à Paris et de là
dans une station balnéaire. Peu de temps après son départ, le portrait a été déposé dans une
chambre fermée — où un Berlinois (on ne sait pas qui) est venu l’admirer. L. est censé revenir
demain, et je l’exhorterai alors à respecter sans tarder les engagements qu’il a pris auprès de
vous. Il avait le projet d’en faire une copie : c’est à ce moment que les médecins lui ont imposé
la station balnéaire. Un lithographe s’était proposé, mais L. a refusé de lui en donner
l’autorisation, avec mon assentiment. Nous préférons une belle gravure sur cuivre — c’est plus
honorable.
En comptant sur votre intérêt ultérieur je demeure avec ma plus haute considération

Francfort s. M. votre
le 3 oct .
2
serviteur dévoué
1855. Arthur Schopenhauer.
370. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami.

Je vous remercie beaucoup pour vos communications ! Je n’ai pas encore pu me procurer ce
Schultz-Schultzenstein : il ne va sans doute pas tarder. Tout me va du moment que l’on parle de
2

moi : je ne redoute pas ce genre d’objections, elles m’apportent des lecteurs.


Cette fois-ci, je suis TRÈS SATISFAIT de Fortlage, pour la recension que vous avez citée : 3

voilà le ton juste. Mais il est amusant qu’il se plaigne de l’absence du vieux Juif dans mon
édifice doctrinal , comme s’il l’avait cherché en vain dans tous les coins. Tout le reste, il l’a
4

trouvé : si seulement Lui était également là, alors les professeurs de philosophie, pense-t-il,
auraient de nouveau et pendant quelques siècles — de quoi nourrir leurs porcs.
Dans le supplément littéraire de la Postzeitung locale du 13 octobre se trouve une annonce
de vos Lettres , qui les recommande et qui fait un éloge enthousiaste de ma doctrine. Surtout
5

lisez-le ! Le même jour, il y a eu un article élogieux sur moi, portant surtout sur la controverse
Wagner-Vogt, dans un journal tout récent, Frankfurter Museum, Süddeutsche Wochenschrift , 6

publié par Otto Müller, qui me l’a d’ailleurs envoyé. Cela vous amusera : mon caniche y est
également mentionné. C’est ainsi que le chœur qui chante mes louanges devient de plus en plus
universel. Le Nil est arrivé au Caire.
Je joins deux lettres (remittenda), une de Wiesike et une autre de mon homme d’affaires à
7

Dantzig, un agent de traites tout à fait illiteratus : il y a bien longtemps, je lui avais demandé, au
8

cas où quelque chose devait paraître sur moi dans les journaux de ma ville natale et qu’il en
prenait connaissance, de bien vouloir me l’envoyer : c’est à cela que se réfère le post-scriptum.
Qu’un avocat rende hommage à ma philosophie, ce n’est pas très significatif : mais l’humour de
la chose, c’est que partout où l’on tend l’oreille, on entend s’élever ce genre de voix. La fin de la
lettre de Wiesike est remarquable précisément parce qu’il loue, comme l’avocat de Dantzig, le
fait que ma philosophie touche aussi les illettrés. Et pourtant je n’ai jamais écrit que pour les
lettrés. Mais ce que Weigelt prophétisait il y a bien longtemps se réalise, à savoir que mes livres
9

seraient bientôt dans les mains de tous les gens instruits, et qu’ensuite ma doctrine pénétrerait le
peuple. Ce sont là de grandes choses ! Et nous y prenons part. L’embarras des professeurs de
philosophie s’accroît sans cesse. Ils verront, ces très chers.
Lunteschütz a commencé à reprendre mon portrait : hier, j’ai posé ¼ d’heure pour le dessin
10

: c’est qu’il veut réussir la copie mieux que l’original : je dois poser encore une fois, mais
pendant 2 heures, pour la finition. Il sera terminé cette semaine et sera exposé ici pendant
quelque temps, puis à Berlin. Eh ! sapristi ! Comme les Berlinois vont être étonnés !
Ce que vous dites du livre de Drossbach me porte à croire qu’il enseigne la doctrine des
monades de Leibniz — de la vieille camelote donc.
11

Le Centralblatt fait un compte-rendu de l’Esquisse d’une philosophie pour l’enseignement


au Lycée, d’un certain professeur Haake de Nordhausen , mais de façon telle que je vois
12
clairement que cet homme enseigne ma philosophie ; bien entendu, le journal ne prononce pas
mon nom — comme les dévots ne prononcent pas celui du diable. Le dernier Repertorium donne
un compte-rendu maigrelet de votre nouveau livre , bien entendu sans me mentionner. Ces……,
13

avec leur système usé qui consiste à fermer leur gueule, feront bientôt l’objet de moqueries.
Je dois à présent traverser le pont pour aller voir Lunteschütz, dans la maison de maître de
l’auteur de la Théologie allemande, afin de poser pendant deux heures dans ces salles sacrées.
Portez-vous bien et soyez de bonne humeur !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 16 oct. 1855.
À Paris, Lunteschütz a conclu un accord provisoire avec un libraire pour traduire mes
Parerga ; il m’a également présenté son collaborateur . 14

371. À CARL GRIMM 1

Très honoré Monsieur le curé !

Veuillez recevoir mes remerciements pour votre intérêt, vos communications et votre livre
épigrammatique que je regrette de ne pas voir imprimé. Je crois que l’endroit le plus approprié
pour cela serait la Deutsche Monatsschrift de Prutz , mais au préalable, il faudrait corriger les
2

épigrammes, d’un point de vue métrique. Le Konversationsblatt du 13 de ce mois contenait un


article sur moi, et Suchsland prétend que vous en êtes l’auteur, mais j’ai tout de suite remarqué
qu’il n’en était pas ainsi. Le même jour, le nouveau journal hebdomadaire Frankfurter Museum a
également publié un article sur moi.
J’ai joint un autre programme scolaire à celui que vous m’avez demandé : je ne puis vous
3 4

en envoyer un 3 du Lycée de Nordhausen , 1852, traitant de géométrie selon la méthode que j’ai
e 5

indiquée dans ma Quadruple Racine et illustré par de nombreux schémas, car il fait partie d’un
recueil. J’ai confié le paquet à la librairie Hermann et je vous prie de bien vouloir me le renvoyer
après en avoir fait usage.
En vous souhaitant de tout cœur bien-être et bonne humeur

Francfort, votre
le 22 oct. serviteur dévoué
1855. Arthur Schopenhauer.
372. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Veuillez recevoir mes remerciements, cher ami, pour vos notes et vos rectifications. La
recension de votre livre dans le Centralblatt m’a fait très plaisir. Or vous n’avez pas encore saisi
2

l’humour de la chose. Le lascar abandonne son système de mutisme et d’occultation parce qu’il
ne sert plus à rien et ne fait que le couvrir de ridicule. C’est pourquoi il a recours à la déclaration
de guerre explicite, en affirmant qu’il est « un adversaire résolu de ma philosophie » ; mais à
quoi bon une déclaration de guerre anonyme ? Qui déclare la guerre ? À cela s’ajoute qu’il donne
l’impression d’être entêté et timoré à la fois, on dirait presque qu’il va fondre en larmes ;
espérons que nous aurons bientôt le délicieux plaisir de le voir effectivement sombrer dans cet
état. Il n’est pas vrai non plus que votre livre est un écrit partisan, ni même qu’il suit l’esprit de
ma philosophie : la fureur le fait délirer.
Reichlin-Meldegg, dans sa recension du livre de Fortlage dans les Heidelberger Jahrbücher,
présente ce dernier comme un adepte de ma philosophie. Or j’ai cherché en vain mon nom dans
ce livre, mais j’ai parfaitement vu qu’il remplace ma « volonté » par la « pulsion », un mot
impropre et imagé, arraché au monde objectif ; c’est ainsi qu’il voudrait s’approprier, sous
pseudonyme, ma pensée fondamentale ; le résultat, c’est qu’il a fait un bien mauvais livre, ce qui
servira d’avertissement à ceux qui voudraient forger des systèmes de leur propre initiative, et qui
ne savent ni ne soupçonnent ce que cela exige.
La dernière nouveauté se trouve dans le Journal des Débats du 1 nov., un TRÈS LONG
er

compte-rendu de Bartholmèss, Histoire critique des doctrines religieuses de la philosophie


moderne : on y dit que les Français connaissent peut-être Fichte, Schelling et Hegel, mais non
3

pas Bauder (sic), Herbart et Schossenhauer (sic), ce qui serait quand même dommage ; c’est
pourquoi on en fait une présentation. J’ai peu de chances de pouvoir consulter le livre ici, mais
vous pourrez le trouver dans quelque temps dans la Salle de lecture royale et j’espère que vous
me ferez le plaisir de m’en parler.
Ce que vous dites de la traduction de Lunteschütz est tout à fait juste, mais nous n’avons pas
le choix, et d’autre part les Français qui parlent TRÈS BIEN L’ALLEMAND, comme c’est son cas, sont
très rares, et c’est un bon gaillard intelligent ; quand il aura vendu le deuxième portrait, il aura
gagné 500 fl. avec mon corps, pour ensuite exploiter mon âme. Je le laisse faire : la dernière
révision me met à l’abri des coquilles grossières. Il a reçu une lettre de l’autre traducteur qui se
4

trouve actuellement en Silésie et, d’après cette lettre, il s’est déjà sérieusement mis au travail ; ils
comptent tous les deux avoir terminé au printemps. Mais il ne faut jamais oublier que les
Français seront toujours français, c’est-à-dire paresseux, frivoles, hâbleurs : on ne peut donc être
sûr de rien.
J’ai feuilleté un tome des cours philosophiques donnés par Trendelenburg à l’Académie de
5

Berlin pendant 16-20 ans. Il a même fait cours sur la sagesse de Herbart , et sait parler de tout,
6

sauf de moi. Il est vrai que j’aurais pu rester inconnu et ignoré pour ces messieurs, même 10 ans
après ma mort. Ce sont les savants NON universitaires, vous en premier puis Dorguth, Lindner,
Weigelt, celui de la Westminster, etc., qui m’ont exposé au grand jour. Ces spécialistes sont les
bourreaux de Gaspard Hauser. Mais si je regarde en arrière, et si je considère tous les hommages
imprimés, épistolaires ou ceux communiqués de vive voix, ainsi que tout cet enthousiasme et ce
fanatisme, alors je me dis : « le Nil est arrivé au Caire ! » et je fais un pied de nez à toutes ces
crapules !
Comme cela vous amuse, je joins les deux lettres du curé Grimm (remittenda) et je vous
salue bien cordialement !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 3 nov. 1855.
373. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je me hâte, cher ami, de répondre à votre lettre, afin de vous épargner l’effort de rédiger un
rapport sur le livre de Bartholmèss , ce qui serait inutile ; car je l’ai vu et j’ai lu les 26 pages me
2

concernant . Bartholmèss est membre de l’Académie de Berlin et correspondant de l’Institut ; il


3

fait vraisemblablement partie de la Colonie. Tous ces membres de la corporation, ces professeurs
et ces académiciens, me considèrent avec ressentiment, exactement comme leurs semblables
l’ont toujours fait à l’égard des gens de mon espèce. Celui-ci fait de même, mais comme il est
entêté et timoré, il n’ose pas vraiment dire du mal de moi, tout en faisant ce qu’il peut pour
m’abaisser. On a donc déjà écrit des choses plus malveillantes sur moi, mais rarement aussi
STUPIDES. Il n’a pas lu mon œuvre, il y a seulement jeté un œil de temps à autre, et c’est ainsi
qu’il polémique contre tout ce qu’il cite, à partir de la sphère étroite de ses opinions, tel un
misérable FRELUQUET. Il parle aussi beaucoup du Dieu de Schopenhauer* : j’aimerais bien savoir
qui c’est. De plus, il s’efforce, comme toute cette canaille, de faire intervenir ma personne, d’une
part dans le but d’être piquant, d’autre part parce que la perspective morale laisse espérer plus
d’homogénéité avec les fils de la Terre. Il y parle de mes inconduites personnelles à Rome et à
Naples , c’est-à-dire en 1818-1819, quand il se trouvait sans doute encore au berceau ! Et d’où
4

prétend-il savoir cela ? C’est inventé de toutes pièces.


Si à présent je vous réprimande, ne pensez pas pour autant que j’en oublie vos grands
services rendus à ma philosophie et à moi-même : JAMAIS je ne le pourrais ; mais je dis ce qu’il
faut. Vous avez donc cité le passage « ces messieurs du creuset et de la cornue », etc. 5

L’omission de la « cornue » m’a tout de suite sauté aux yeux, mais j’ai en outre été irrité au
6

moins à 4 reprises lorsque j’ai vu que d’autres citaient également cette phrase, en s’inspirant À
CHAQUE FOIS DE VOUS. Ami ! Falsifiez donc des ducats et des Louis d’or, mais jamais mes phrases
(comme on aime le faire de nos jours). J’écris comme j’écris MOI et non pas comme un autre :
chaque mot a son poids et sa nécessité, même si vous ne le sentez pas ni ne le reconnaissez.
Lorsque vous me citez, j’exige donc que vous n’omettiez JAMAIS LA MOINDRE SYLLABE : c’est mon
bon droit ; si l’on est honnête, cela va même de soi. J’ai à présent déchargé ma colère ;
maintenant mon cœur est pur et ma poitrine libre. Venons-en ad rem infamem, deinde ludicram . 7

Le public allemand est un peuple de merde , car après la brochure de Vogt , le livre de
8 9

Büchner , indigne à tout point de vue, a lui aussi bénéficié d’une troisième édition en l’espace de
10

6 mois. Dans la préface de ce dernier, p. XXVI, il s’en prend à moi, à cause du passage avec le «
creuset » évoqué plus haut. Il déclare ensuite que je suis un ignorant, parce que « selon le récit de
TÉMOINS OCULAIRES (!) », j’aurais fait preuve d’un enthousiasme fanatique pour Reggazzoni. À
présent, cette calomnie de 14 médicastres ignorants et malveillants représente donc une AUTORITÉ
à laquelle il est préférable de ne pas résister, sous peine de passer pour un ignorant. Il faudrait lui
mettre le nez dans la règle d’or de Lessing, d’après laquelle on peut dire ce qu’on veut d’un
livre ; mais dès qu’on se réfère à quelque chose qui ne se laisse pas prouver À PARTIR du livre, on
n’est plus un critique, mais un PASQUIN.
Maintenant ad rem ludicram. Dans la Volonté dans la nature, 2 édition, p. 54 , je dis : «
e 11

Voilà le sens de la grande doctrine de Kant », etc. ; p. 101 , notre cher Büchner inscrit CE
12

PASSAGE, de « c’est l’entendement » à « l’auteur », en exergue d’un chapitre, en écrivant « KANT


» en dessous ; il le répète encore à la page suivante, en insérant « selon Kant ». Eh bien, il
faudrait lui demander où Kant aurait précisément dit cela ? Kant n’a jamais dit cela, mais c’est
moi qui affirme que c’est là la signification de sa doctrine : c’est ce que je déduis seulement de
cette dernière. Ce garçon-coiffeur n’a jamais lu Kant, il ne sait pas non plus ce que signifie le
13

passage qu’il cite, il ignore tout de cela : d’abord il me lance des invectives dans sa préface, en
s’appuyant sur l’autorité des ragots qui circulent en ville, ensuite il me dérobe un passage en
commettant le falsum de l’attribuer à Kant ! C’est vraiment complètement INSENSÉ ! Voyez
ensuite comment cet abruti parle de la finalité de l’organisme animal, p. 104, après avoir lu et
pillé mon chapitre immortel « Anatomie comparée » !
J’ai oublié de vous faire remarquer que vous avez tort lorsque vous affirmez qu’une
philosophie comme la mienne, qui part de l’expérience, devrait subir des modifications avec le
progrès des sciences de la nature. Elle serait alors une physique ! Et non pas une métaphysique.
Jamais de la vie ma philosophie ne pourra subir des modifications, quand bien même l’on
décomposerait l’oxygène ou l’on découvrirait l’unicorne. Elle part de l’expérience, mais au sens
le plus large ; elle flotte au-dessus de tout détail ou micrologie.

Francfort s. M., Salutations cordiales


le 24 nov. 1855 Arthur Schopenhauer.
374. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je n’aurais assurément jamais pu penser, cher ami, que l’on ait imprimé autre chose que ce
que vous avez écrit : il ne faut donc pas dire errare humanum est, mais necessarium est . 2

Maintenant c’est à vous de tempêter contre le……… : faites-lui comprendre que, lorsqu’un
passage de moi se retrouve par hasard dans son journal de bonne femme, c’est comme si un
prince se retrouvait au milieu d’une société très vulgaire : il ne faut donc pas lui couper en plus
sa robe. Ce n’est pas l’imprimerie : on aime y imprimer le plus possible.
J’ai lu la cochonnerie de Michelet : cette crapule ne mérite même pas qu’on en parle.
3

Un officier prussien, qui revient juste du Wurtemberg, a assisté dans cette région à la lecture
de l’article de Bartholmèss sur moi, chez le frère de ce dernier ; il les connaît tous les deux : il
m’a raconté que Bartholmèss, professeur à Strasbourg, avait une quarantaine d’années ; et c’est
lui qui prétend savoir comment je me suis comporté à Rome et à Naples en 1818-1819 !
Le Dr. Gwinner m’a communiqué 2 articles très intéressants sur moi. 1) Dans
l’Encyclopédie de Gruber et Ersch, sub voce SENTIMENT, tome 56, 1853, article rédigé par
SCHEIDLER d’Iéna , qui parle de moi avec la plus grande estime et qui m’appelle entre autres « le
4

plus perspicace des perspicaces » : je trouve que cet homme sait s’exprimer de façon pertinente.
Cela se trouve p. 12, 17 sq. et p. 412. Vous y êtes également cité. 2) Le tome 8 et 9 des œuvres
de Baader , où Hoffmann, dans la préface et dans le texte, vocifère contre moi, al solito ; mais il
5

avoue tout de même que je suis « un grand philosophe ». Cela se trouve tome 8, p. XIX, XXII, 27,
33, 88, 89, 103, 264, 297, 327, 332 et tome 9, p. XXII et 82 par BAADER lui-même, plutôt
favorable. Sur ce baadianisme, on trouve une longue tirade ridicule et vaniteuse dans le
Konversationsblatt du 15 décembre (scilicet pour que tout le monde l’entende vociférer contre
6

moi, ce qui, loin de me porter préjudice, ne pourra que m’être avantageux, car c’est à gorge
déployée qu’il loue CE QUI EST MAUVAIS, à savoir les gribouillages TOUT À FAIT DÉGOÛTANTS de ce
F. Baader bigot et borné).
J’ai reçu une lettre de Zurich, d’un certain K. Ritter , disant que « dans un cercle, qu’il
7

fréquente, on lit mes écrits avec un tel enthousiasme » qu’on voudrait… posséder mon portrait,
sous forme de daguerréotype, dessin, peinture ou autre, et que l’artiste est censé le leur envoyer
en se faisant rembourser les frais par la poste. Ils ont vraiment choisi une belle époque de
l’année, avec des journées courtes et sombres, où le froid et la neige rendent tout plus difficile.
Mais je veux bien m’y prêter, dès que les journées se feront plus longues et plus claires. Vous
voyez, la croissance de la gloire suit les lois de l’incendie, c’est-à-dire qu’elle ne se propage pas
selon des proportions arithmétiques, mais géométriques, voire cubiques — et le Nil est arrivé au
Caire. Les professeurs auront alors beau marcher sur la tête : frustra !8

Mon aspect physique n’a pas changé depuis 1847 ; moi, Emden, Kilzer, Gwinner et ma
bonne, nous sommes tous d’accord pour dire que le portrait de Lunteschütz n’atteint pas à une
ressemblance AUTHENTIQUE, mais qu’elle a plutôt un faux air* ; c’est pourquoi le grand public et
tous les autres le trouvent très ressemblant.
Sur ce je vous souhaite de tout cœur une très heureuse et agréable nouvelle année !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 23 déc. 1855.
375. À DAVID ASHER 1

Honoré Monsieur le Dr. Asher !

L’intérêt dont vous m’avez témoigné à plusieurs reprises me permet de prendre la liberté de
m’adresser à vous pour un renseignement qui m’intéresse au plus haut point. En janvier en effet,
plusieurs journaux ont été avertis d’une question mise au concours par la Faculté philosophique
de Leipzig, qui consistait à livrer « une présentation et critique de la philosophie
schopenhauérienne ». J’espérais trouver de plus amples détails sur cette affaire dans le
2

Repertorium de Leipzig, mais en vain : le Dr. Frauenstädt non plus ne sait pas davantage que ce
que dit précisément cette annonce. Pour vous, cher Monsieur le docteur, qui êtes sur place, il ne
saurait être difficile d’en apprendre davantage et d’ensuite m’en faire part, ce qui me rendrait
grandement service. La question doit bien se trouver quelque part in extenso et également en
latin, peut-être même imprimée, dans ce dernier cas je vous prierais de me l’envoyer non
affranchie ; ou au moins se trouve-t-elle sur le tableau noir, et vous auriez alors sans doute
3

l’amabilité de recopier ces quelques lignes pour moi. Peut-être en avez-vous même entendu
parler dans quelque conversation, touchant l’humour véritable de cette affaire. Je ne pense pas
que cela se fasse selon une intention bienveillante ; car les herbartiens de cette Faculté me
détestent. Ce ne serait pas bien grave, cela me réjouirait quand même.
En attendant avec espoir votre obligeance, je demeure avec le plus profond respect

Francfort s. M., votre serviteur dévoué


le 6 janv. 1856. Arthur Schopenhauer.

376. À KARL RITTER 1

Très cher Monsieur Ritter,

Afin de répondre à votre souhait, j’ai fait tirer mon portrait sous forme d’une photographie
2

sans retouche* par le photographe Schäfer. Demain, ce dernier vous l’expédiera et se fera
rembourser par la poste le montant fixé à 8 Gulden rhénans.
Ici, le peintre Lunteschütz a peint mon portrait à l’huile, l’été dernier, et il l’a vendu à même
le chevalet, pour 25 Frédérics d’or, à un certain M. Wieseke, propriétaire foncier dans le
Brandebourg. Il travaille actuellement à une copie améliorée de ce portrait qu’il compte vendre
pour 20 Frédérics d’or.
En remerciant chaleureusement vous et vos amis de l’intérêt dont vous m’avez fait part

Francfort s. M. votre
le 17 janv. 1856. serviteur dévoué
Arthur Schopenhauer.
377. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur et ami,

Cela m’a fait fort plaisir de recevoir à nouveau un signe de vie de votre part, après avoir
commencé à en remarquer l’absence non sans inquiétude.
Vous accordez trop d’importance à Helmholtz, qui est une crapule — qu’il y en ait
beaucoup de son espèce n’arrange rien à la chose. En 1853 parurent, soudainement, plusieurs
réfutations de la théorie des couleurs de Goethe, qu’on croyait réfutée depuis longtemps, avec un
sourire rassuré à l’appui. Pourquoi donc maintenant ? Cela ne fut pas dit. Afin d’éviter qu’on ne
vérifie l’endroit où se trouvaient les altera pars. C’est que dans leur LÂCHETÉ, ces FRIPOUILLES
avaient l’intention de me réfuter sans me nommer. Car ces parutions étaient en fait dues à mes
Parerga de 1851, les crapules craignant que leurs CRIMES LITTÉRAIRES commis contre Goethe
puissent être dévoilés — comme cela doit se faire et se fera en effet. Parmi ces parutions se
trouvait aussi un article de Helmholtz dans la Monatsschrift (qui depuis a crevé), et que j’ai lu —
2

mauvaise défense d’une mauvaise affaire. La théorie des couleurs de Dove est à ranger dans le
3

même dossier. Ces lascars doivent défendre le mensonge newtonien tant que HUMBOLDT est en
vie, ce dernier, comme successeur d’Arago, ne jurant que par Newton.
Je possède un petit écrit de Helmholtz, Sur l’action réciproque , alors qu’il n’en est question
4

nulle part, il y expose seulement des trivialités concernant la mécanique. Je ne connais pas son
livre Sur la vision. Mais d’après vos extraits, il est CLAIR et certain qu’il m’a copié. Pareille
crapule n’a jamais lu Kant, préfère attribuer à ce dernier, par fourberie et jalousie, CE QU’IL A
APPRIS CHEZ MOI, et il ne me nomme pas. Chez Kant, comme vous savez, le monde extérieur se
promène à travers les sens pour arriver tout prêt dans la tête. Ce Helmholtz, comme toute cette
racaille, a pour seule intention de se METTRE EN VALEUR d’une manière ou d’une autre, per fas et
nefas, et par conséquent d’empêcher les autres qu’ils ne soient remarqués, en les dépouillant. Son
titre s’inspire même partiellement du mien. Vous ne vous rendez pas compte à quel point ces
gens-là manquent d’ESPRIT et de conscience morale. À présent, beaucoup me copient de la même
façon : c’est ce qu’on me rapporte. Büchner va particulièrement loin, lorsque dans la 3 édition de
e

son livre, INDIGNE à tout point de vue, il met en exergue de l’un de ses chapitres un passage de la
Volonté dans la nature, en écrivant en dessous : « Kant » ; alors que dans la préface, il débite des
ragots qui circulent en ville sur moi.
Ces derniers temps, on a écrit beaucoup de choses sur moi, dans des journaux et des livres.
Je n’en connais peut-être que la moitié. Récemment, quelqu’un m’a apporté l’Encyclopédie
d’Ersch et Gruber , 1853, où, à l’article « Sentiment », un certain Scheidler d’Iéna parle de moi
5

avec la plus grande estime : ce que j’apprécie tout particulièrement, c’est qu’il m’appelle « le
plus perspicace des perspicaces ». Un chapitre misérable des philosophèmes religieux* de
Bartholmèss contient des ragots concernant mes prétendues mondanités à Rome et à Naples en
1818 — alors qu’il était encore au berceau ! Dirigées contre moi, des expectorations colériques
d’Hofmann, éditeur des œuvres de Baader, dans les préfaces des tomes 6-12, et dans les notes.
Ces cochonneries ont également fait l’objet d’un tiré à part. Ici, un certain prédicateur nommé
Kalb a prêché contre moi devant l’Association Gustav-Adolph — ce qui me fait bien plaisir.
6

Bref, des centaines de farces. Jalousie, malice ; mais il n’y a qu’à lire comment ils ont traité
Pope, Voltaire et TOUS les autres ! Tout cela est un effet nécessaire.
Mon portrait à l’huile, peint cet été par Lunteschütz, a été acheté pour 25 Frédérics d’or, à
même le chevalet, par un certain M. Wiesike, propriétaire foncier dans la marche de
Brandebourg, qui affirme qu’il compte construire une maison tout spécialement pour le portrait !
À Berlin, on en fait à présent une belle lithographie . Lunteschütz travaille actuellement à une
7

copie de ce même portrait qu’il vendra pour 20 Frédérics d’or. Aujourd’hui, une photographie de
ma personne a été expédiée à Zurich, à des gens que je ne connais pas.
La question mise au concours à Leipzig reste une énigme pour moi : les professeurs de
Leipzig me sont hostiles. Le plus ancien d’entre eux, Ch. Weiss, a voulu me rendre visite cet été
et il a été refusé. Les 2 autres, Hartenstein et Drobisch, herbartiens, ne cessent de me lancer des
invectives dans le Repertorium. La question mise au concours est peut-être une mine avec
laquelle ils veulent m’exploser — ou est-ce un canard ? J’espère en apprendre davantage dans le
prochain Repertorium — peut-être que Frauenstädt écrira quelque chose à ce sujet dans sa
prochaine lettre. À l’instant, quelqu’un qui revient de Bohême me raconte qu’il y a lu cette même
annonce dans un journal écrit en LANGUE BOHÉMIENNE. Il est rare que ce genre de choses soit
publié dans des journaux politiques.
In summa, et malgré quelques ennuis, je constate avec plaisir que ma philosophie gagne de
plus en plus de terrain, et ce selon une proportion géométrique du temps. Des lettres, des visites,
très nombreuses l’été dernier, en témoignent fortement. L’étouffement et l’occultation, c’est
fini : ceux qui s’y essaient encore et qui me pillent de surcroît font de bien mauvais calculs : on
ne manquera pas de voir ce qu’ils sont. Je joins le billet doux* d’une demoiselle , mais je vous
8

prie de me le renvoyer sous 8 jours : il n’a pas encore été publié. Je vous envoie sous enveloppe
fermée la lettre souhaitée d’Asher : c’est celui-là même qui avait écrit il y a longtemps cette très
9

indiscrète « Visite chez A. S. ». J’espère bien vous voir ici un jour et je demeure

Francfort votre ami dévoué


le 20 janv. 1856. Arthur Schopenhauer.
378. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Votre long silence, cher ami, m’inquiète tant que je commence à penser que vous pourriez
être malade ; comme c’est le cas de beaucoup de gens en hiver. J’espère qu’il n’en est rien et je
poursuis in philosophicis.
La Faculté de Philosophie de Leipzig est censée avoir mis au concours une question, «
présentation et critique des principes de la philosophie schopenhauérienne ». C’était écrit dans le
Frankfurter Journal du 5 janv., et quelques jours plus tard dans la Postzeitung, ainsi que dans la
Kölnische Zeitung. Un Autrichien qui revenait de Bohême l’a également lu en langue
bohémienne, dans un journal local ! Habituellement ces questions mises au concours ne figurent
jamais dans les journaux politiques. Ce n’est tout de même pas un canard ? Ce serait dommage.
Une telle question mise au concours doit bien être imprimée quelque part in extenso ; peut-être
même sur un billet pour les étudiants. Délivrez-moi du tourment de ma curiosité. Je comprends
d’autant moins cette affaire que les professeurs de Leizpig sont mes ennemis : le plus ancien,
Chr. Weisse, alors qu’il voulait me rendre visite cet été, a été refusé. Hartenstein et Drobisch,
herbartiens, désespérés parce que ma philosophie ôte tout espoir à ce système d’absurdités, me
lancent des invectives dès qu’ils le peuvent, dans le Repertorium. Ce qui me semble donc être le
plus plausible, c’est qu’il s’agit d’une mine destinée à me faire exploser. Apportez-moi donc de
la lumière, lumière, lumière !
J’ai regardé deux récents ouvrages sur l’Histoire de la littérature allemande, par Gottschall 2

et Julian Schmidt . Le premier parle assez bien de moi, sur 6 pages, j’en suis plutôt satisfait.
3

Julian parle comme un âne et avec malice : il affirme que j’aurais traité Schelling et Hegel de
menteurs et d’imposteurs ; vous savez que c’est un MENSONGE. Hier, je lisais dans le journal
qu’un avocat avait demandé une peine de 2 ans de maison de travail pour Julian. Très
intéressant : je vois qu’il est agréable avec tout le monde.
Je vous envoie les lettres de deux juges régionaux . Grâce à la lettre de Becker, vous verrez
4

que Helmholtz me recopie, sans me nommer, et qu’il attribue à Kant ce qui m’appartient. La
pauvreté d’esprit, la jalousie et l’absence de conscience morale de ces……… sont immenses.
Voigtel affirme que j’aurais décrit la conscience de quelqu’un qui se noie : je n’en sais rien,
5 6

il a dû lire cela ailleurs ; le besoin d’un registre détaillé de mes œuvres se fait pressant partout.
Le conseiller secret du gouvernement Crüger , un Prussien, m’a fait la sacro-sainte promesse
7

de m’offrir, après sa prochaine mutation, un exemplaire de la Critique de la raison pratique avec


LES ANNOTATIONS DE KANT LUI-MÊME , certifié comme il se doit ; ce en échange de quoi je lui ai
donné mon ouvrage principal, la Quadruple Racine et la Vision et les couleurs.
Rassurez et donnez bientôt satisfaction à

Francfort s. M., votre ami


le 31 janv. 1856. Arthur Schopenhauer.

379. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Il faut prendre l’initiative ! Au lieu d’attendre que de Leipzig les alouettes nous tombent
toutes cuites dans la gueule, j’ai envoyé un courrier à notre nouveau petit apôtre et je vous
2

transmets ci-joint sa réponse, qui vous intéressera ; elle fournit une belle attestation aussi bien de
son orthodoxie que de sa ferveur apostolique. Le programme qui s’y trouve évoqué s’intitule
Rector commilitonibus certamina eruditionis indicit, et ne contient pas davantage que ce qu’il y
avait déjà dans les journaux, sauf un ajout qui dit qu’on peut répondre à cette question soit en
latin, soit en allemand ; et avec cela les autres questions mises au concours et le résultat
concernant le concours précédent. Le cahier entier fait 27 pages 4 contenant surtout des lettres
o

en grec, attribuées à M. Brutus, sur des affaires de guerre, joliment imprimées, mais
inintéressantes pour moi.
Récemment, Marggraff a écrit une annonce pour le livre de généanomie de Levin
Schücking , qui n’est qu’une compilation de faits, et il n’évoque même pas mon beau et
3

fondamental chapitre qui s’y rapporte ; alors qu’il m’a lu. Ces gens-là ne se souviennent que de
ce qu’ils ont lu la veille : ils ne lisent qu’en vue d’écrire, et leurs intestins sont bien courts . Pour
4

l’instant, je laisse encore passer de pareilles omissions dont j’ai déjà repéré un trop grand
nombre, mais l’époque viendra où celui qui ne sait pas ce que j’ai dit sur un quelconque objet
passera manifestement pour un ignorant. Sur mon chapitre en question, Michelet, dans son
discours publié sur moi , a prétendu que mes pensées n’étaient pas originales, que Buffon aurait
5

dit la même chose, comme on pourrait s’en convaincre dans l’Histoire des Travaux de Buffon,
par Flourens*. Dans l’espoir de trouver des preuves pour ma doctrine, j’ai commandé le livre,
mais je n’ai trouvé rien d’autre qu’une note, page 288, qui cite Hérault de Séchelles, Voyage à
Montbar : « Buffon avait ce principe qu’en général les enfants tenaient de leur mère les qualités
intellectuelles et morales (!), et lorsqu’il l’avait développé dans la CONVERSATION, il en faisait
l’application à lui-même, en faisant un éloge pompeux de sa mère, qui avait en effet beaucoup
d’esprit* ! » Vous voyez donc à quoi ont recours ces gens, dans le seul but de me blesser d’une
manière ou d’une autre.
Je me réjouis de savoir que vous êtes bien-portant et je vous prie surtout de le rester.

Francfort s. M., Votre


le 10 févr. 1856. Arthur Schopenhauer.

P. S. J’aimerais que vous trouviez un éditeur pour votre critique du naturalisme , et que vous
6

y intégriez ma position, surtout en tenant compte, je vous prie, de Parerga, II, § 74. De nos jours,
il est insupportable de voir comment ces porcs s’adonnent au naturalisme spontané, sans rien
connaître de la philosophie transcendantale de Kant.
380. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Monsieur le Dr. Lindner,

Votre annonce de la mort du Baron m’a fortement ébranlé. C’était l’ami le plus fidèle et le
2

plus sincère, le meilleur que j’ai jamais eu, et de façon générale, c’était un homme très bon. Il
m’a certes causé de grands malheurs, mais il était bien intentionné, lorsqu’en 1826 il m’a
persuadé d’investir mon capital dans une affaire qui devait se révéler néfaste, ce qui m’a privé
3

d’une partie importante de mes revenus et me fait encore souffrir aujourd’hui même, avec des
accès périodiques d’agacement et de dépit — alors que le mal est maintenant devenu chronique.
D’après vos récits le concernant, je pensais qu’il se trouvait en bonne situation, du moins qu’il
n’était pas dans le besoin. D’autre part, il n’est pas étonnant qu’il se soit retrouvé dans la misère.
Son défaut fondamental était une paresse excessive. Sans être vraiment fortuné, il n’a jamais
exercé un quelconque métier, alors qu’il avait fait des études de droit et qu’il possédait beaucoup
de connaissances et d’entendement. La propriété à Schöneberg lui avait été léguée par sa tante de
Schwerin, avec certes une hypothèque très importante ; mais au lieu de l’exploiter, il l’a vendue
très en deçà de sa valeur et il a dépensé l’argent.
Bientôt, il fut couvert de dettes tout en continuant, malgré mes avertissements, à vivre de
façon insouciante et désordonnée. Il avait beaucoup de bonnes fortunes*, aimait boire et mentait
souvent. Comme je l’ai dit, nous ne devons pas nous étonner s’il a connu une fin misérable. Mais
je compatis avec lui, et je ne l’oublierai jamais.
Je vous remercie pour les autres nouvelles : j’envoie aujourd’hui à Frauenstädt une lettre du
Dr. Asher ; il vous fera donc part de cette dernière, et d’ailleurs, de façon générale, j’aime qu’il
vous communique mes lettres.
Je me réjouis d’avance du nouvel opus que vous m’annoncez. Votre contribution sera sans
4

doute très bonne, car, réflexion faite, on peut dire que de tout ce qui a déjà été écrit sur moi, vos
quelques articles dans votre journal sont ce qu’il y a de mieux ; je le dis en toute sincérité. Je
regrette que ce journal absorbe vos forces et votre temps : or, primum vivere deinde philosophari
— & with an English lady to boot. L’opus évoqué plus haut me semble être une sorte d’olla
podrida, by several hands. J’ai pensé que le poème de Gayette pouvait éventuellement y trouver
une place, car ce n’est pas volontiers que je vois le public en être privé : la conception tragique
de mon destin, telle qu’elle s’y trouve exprimée, me plaît assez et le poème est vraiment très bon.
Le 1 août, elle m’a écrit qu’elle voulait le donner aux Herdblätter, ou à l’Europa, ou à la
er

Kölnische, ou à un journal de Berlin (lequel ?). Frauenstädt suppose que personne n’a voulu
l’accueillir. Certes, les jaloux et les ennemis sont partout. Au cas où vous voudriez lui faire une
proposition, son adresse est : Jeanne Marie von Gayette à Hirschberg. Mais ce n’est pas là
quelque chose que j’exige de vous ; agissez comme bon vous semble.
En vous souhaitant de tout cœur bonheur et santé
Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.
le 11 févr. 1856.
381. À ADAM VON DOSS 1

Je vous remercie chaleureusement, cher Monsieur von Doss, pour votre beau poème ! Ici, 2

on m’assure que ce dernier a fait l’objet d’une admiration unanime, et c’est vrai qu’il est
vraiment très bon. Il produira certainement son effet et il contribuera à la propagation de ma
philosophie, car le journal a un tirage important. L’encre d’imprimerie a donc eu raison de votre
virginité, alors que jadis vous étiez fermement résolu à l’éviter. Avec le temps, vous en ferez
encore plus, car vous avez saisi ma doctrine avec plus de rigueur que n’importe qui d’autre ! En
août, mademoiselle Jeanne Marie von Gayette, de Silésie, m’a également envoyé un très bon
poème qui entonne un chant tragique sur mon destin, avec une sympathie toute féminine : elle
voulait le donner à un journal quelconque (Europa, Herdblätter, journaux de Cologne ou de
Berlin) ; mais il n’a pas encore été publié : Frauenstädt pense qu’on refuse sans doute de
l’accueillir.
Votre bonheur familial me réjouit de tout cœur, surtout parce que je sais que cela est très
rare. Espérons à présent que cela va durer : mais que le ciel (Tien) vous garde d’avoir de
nombreux enfants.
Ce que j’admire, c’est que malgré vos occupations professionnelles et votre famille, vous
étudiez le bouddhisme avec tant de sérieux, en maîtrisant de surcroît la langue anglaise. Vous
avez tout à fait raison de faire l’éloge du 1 tome des Écrits tamouliques de Graul : sa lecture
er

répétée m’a procuré du plaisir, et m’a instruit ; mais vous n’auriez pas dû consacrer autant de
temps à son voyage ; bien que je ne le connaisse pas encore. Samuel Turner décrit les effets
3 4

pratiques du bouddhisme et la vie monastique dans son Voyage à la cour du Lama Tesheo,
traduction allemande, 1801. Ce sont des Anglais et des fonctionnaires civils, ils ne mentent pas,
en tant qu’attachés de légation ils ont toujours habité dans les monastères et ont tout vu de près :
audience auprès du Lama Tesheo, un enfant âgé de 2 ans, merveilleux. Vous avez très justement
souligné l’essentiel chez Spence Hardy : l’upadana est la « volonté de vie », le karma est la
5

volonté individuelle, sans l’intellect, c’est ce qui apparaît comme caractère empirique ; dans le
tome 9, p. 256 des Asiatic Researches, il est écrit : « The origin of KARMA is inconceivable. » Et
de façon générale, la concordance avec ma doctrine est merveilleuse ; d’autant plus qu’en 1814-
1818, lorsque je rédigeais le 1 tome, je ne savais encore rien de tout cela , et n’en pouvais rien
er 6

savoir. Je vous recommande tout particulièrement : Dhammapadam palice edidit Faussböll , 7

Copenhague, 1855, mais dont on ne peut que lire 36 pages, la version latine du texte ; le reste est
un commentaire en pali, avec quelques passages correspondants en anglais, le prix s’élève à 6 f.
Cela provient du Gandchour : l’éditeur pense que dans ces sutras pourraient bien être conservées
quelques paroles véridiques du Bouddha : c’est excellent. Je ne sais plus où j’ai lu l’histoire du
comédien : elle ne se trouve pas dans le Tchouang Lun , alors qu’elle le devrait en tant que
8
Jateka. Vous accordez trop d’importance au petit livre dirigé contre Buchanan : si vous voulez
9

absolument le lire, je veux bien vous l’envoyer pour quelque temps, mais il fait partie d’un
recueil volumineux, les frais de port seraient donc importants. Ce n’est qu’un vieil écrit
polémique. Étudiez plutôt sérieusement l’Oupnekhat, qui est la base fondamentale et archaïque
de la sagesse et de la vérité : à ce sujet, voir la Bhagavad Gita de Schlegel, en latin.
10

De la lettre de Neumann s’est levé un épouvantable foetor Judaicus , ce qui m’a mis dans
11 12

une véritable rage, que j’ai dû calmer en écrivant des gloses marginales, et c’est décorée de ces
dernières que je vous renvoie la lettre. Il n’y a rien à faire avec cet homme. Pour obtenir des
explications plus précises concernant le passage si important pour ma philosophie, que j’ai cité
dans la Volonté dans la nature, 2 éd., p. 126 , il faudrait examiner le mot et signe Tien dans le
e 13

Morrison’s Chinese Dictionary, où il est hautement probable de tomber sur ce passage et d’en
apprendre davantage. La bibliothèque locale ne possède pas ce Dictionary, mais celle de Munich
devrait l’avoir. Vu le peu de loisir dont vous bénéficiez, je ne vais pas vous demander de
procéder à de telles recherches, mais si un jour, lors des vacances du tribunal et s’il fait mauvais
temps, ce qui ne saurait manquer à Munich, un noble impetus sinologicus devait s’emparer de
vous et vous pousser à sacrifier une ou 2 heures — alors vous m’obligeriez beaucoup en me
faisant part de vos trouvailles.
Vous surestimez le programme de Pontow : dans le même genre, je préfère le discours du D r

Körber, tenu le jour de l’anniversaire du Roi, en oct. 1854, repris dans le programme du Lycée
Elisabeth à Breslau, 28 mars 1855 : ce lycée DOIT l’avoir. À mon sujet, seulement ½ page 4 , o

mais assez bonne, à la fin d’une présentation de la philosophie postkantienne. Vous ne semblez
pas avoir remarqué que le Faculté de Philososophie de Leipzig a mis au concours la question «
Présentation et critique des principes de la philosophie schopenhauérienne » — c’était annoncé
en janv. dans tous les journaux de l’Allemagne du Nord. Je ne prends peut-être connaissance que
de la moitié de tout ce que l’on écrit sur moi, et je vais vous dire ce dont je me souviens : dans
l’Encyclopédie d’Ersch et Gruber, 1853, l’article « SENTIMENT » du prof. Scheidler d’Iéna, parle
de moi avec beaucoup d’estime, vaut la peine d’être lu ; également dans l’article « Fichte » (nisi
fallor) du même tome, sur mon idéalisme. Bartholmèss, Histoire critique des doctrines
religieuses de la philosophie moderne*, 2 tomes, 1855, tente de me rabaisser, très détaillé, me
cite, et prétend connaître mon comportement social en 1818 à Rome et à Naples !
Gottschall, Histoire de la littérature allemande du XVIII siècle, 1855, 6 pages sur moi dont je
e

suis satisfait. Mais Julian Schmidt, dans son livre qui porte le même titre et qui est paru en même
temps, tente de me rabaisser. Le prof. Hoffmann à Erlangen parle de moi avec une foncière
malveillance, dans les préfaces et les notes de son édition des œuvres de Baader. Recension dans
les Heidelberger Jahrbücher de Reichlin-Meldegg, portant sur la Psychologie de Fortlage, qu’il
range parmi mes disciples, non sans raison : F. veut s’approprier ma doctrine en remplaçant «
volonté » par « pulsion ». Deux courts articles dans le Frankfurter Museum et le
Konversationsblatt, tous deux en janv., bienveillants. Ici, un certain Kalb, prédicateur, s’en est
pris à mes doctrines dans un prêche devant l’Association Gustav-Adolph, sans me nommer, mais
en me visant : n’a pas été imprimé.
L’été dernier Lunteschütz, un peintre français, a peint mon portrait à l’huile, il l’a vendu à
même le chevalet — pour 250 f — à M. Wiesike, propriétaire foncier dans le Brandebourg ; il a
été exposé ici et à Berlin, où l’on en fait à présent une belle lithographie : Lunteschütz travaille
actuellement à une copie du portrait, qu’il vendra pour 200 f. Wiesike a affirmé qu’il voulait
construire un édifice spécialement pour le portrait (ma première chapelle). En janv., j’ai dû
envoyer ma photographie à des inconnus à Zurich, c’est eux qui payent. Assez, le diable
commence à se déchaîner.
Cette année, Frauenstädt publiera un livre contre le matérialisme, en suivant entièrement
mes principes. Lindner en écrit un avec d’autres, destiné à propager ma philosophie dans des
cercles plus larges.
Büchner, dans la préface de la 3 éd. de son réputé mais indigne Force et matière, a
e

l’impertinence de colporter des ragots concernant mon adhésion PERSONNELLE à Regazzoni.


Ensuite, en exergue d’un chapitre, il donne un passage de la Volonté dans la nature, et écrit en
dessous : « Kant » !
Aujourd’hui, un nouveau magnétiseur français fait ses débuts : espérons qu’il soit
14

authentique, et l’infâme calomnie de ces barbouilleurs ignorants sera alors démasquée : ils seront
punis pour toute la vie, et perdront toute crédibilité.
Je vous remercie pour le discours de Ringeis : c’est un honneur que d’être blâmé par lui.
15

Que le ciel préserve longtemps votre bonheur familial, c’est ce que vous souhaite

Francfort s. M. votre ami


le 27 févr. 1856 Arthur Schopenhauer.
382. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je vous remercie de tout cœur, vieil apôtre, pour votre lettre de vœux. Pour répondre à votre
aimable question, je dirais que je sens très peu le plomb de Saturne , je me promène toujours tel
2

un lévrier, je suis en excellente santé, je fais presque quotidiennement mes exercices de flûte,
l’été je nage dans le Main, la dernière fois c’était le 19 sept., je n’ai pas d’infirmités, et mes yeux
sont encore comme du temps où j’étais étudiant. Mes oreilles seulement me font un peu souffrir,
un mal héréditaire qui m’importunait déjà dans ma jeunesse et de tout temps. Il y a 33 ans, suite
à une maladie, je suis devenu presque entièrement sourd de l’oreille droite, mais l’oreille gauche
est restée intacte ; or maintenant, depuis environ 4 ans, cette dernière, peu à peu, baisse
également. Cela ne gêne pas la conversation, du moment que les gens se trouvent à ma gauche et
à proximité, et que leur voix n’est pas particulièrement basse, mais au théâtre, cela m’irrite
beaucoup, même si je suis assis tout devant dans le parquet : je ne vais plus voir que des
comédies, où l’on parle à voix haute ; bientôt je devrais me limiter à l’opéra. Quel dommage !
Je me réjouis beaucoup que Brockhaus prenne votre opus . Dans votre livre, vous aurez sans
3

doute mis en relief : 1) que ce matérialisme est presque une conséquence nécessaire de
l’important essor des sciences de la nature qui, en écartant tout le reste, ont cru décrire le tout de
ce qui existe ; ce qui a encore permis le développement du matérialisme, qui a déjà existé tant de
fois et a toujours été explosé de nouveau. Je renvoie pour cela à mon ouvrage principal tome II,
p. 173 sq .4

2) Que le matérialisme ne peut pas être vaincu par le spiritualisme, car ce dernier prend
appui sur la même présupposition erronée, à savoir le réalisme ; mais seulement par l’ IDÉALISME,
transcendantal surtout : celui qui ne connaît pas ou ne veut pas connaître ce dernier est à
renvoyer dans la chambre des domestiques. Ne soyez pas trop populaire ; la chose ne le
supporterait pas. Il n’est pas nécessaire que je vous cite les passages où j’ai démontré tout cela.
3) Un des arguments principaux des matérialistes est le cerveau dont l’intellect n’est SANS
CONTESTE qu’une fonction : et en cela, le spiritualisme est perdant. Mais vous savez que
l’intellect n’est qu’une fonction au service de la volonté, un simple accident, et que le noyau
métaphysique unique de l’homme est la VOLONTÉ, qui se présente dans le cerveau comme le
corps tout entier, et que ce qui se manifeste dans la conscience de soi comme étant l’intellect, se
présente comme cerveau d’un point de vue objectif, c’est-à-dire du point de vue de la conscience
des autres choses, etc. Sapienti sat. Dans tous mes ouvrages, vous trouverez pour cela tout un
arsenal. Il y a quelque temps, je lisais une critique de tout ce matérialisme (je pense que c’était
dans le journal catholique de Görres ), dans laquelle on appelait le livre de Büchner la «
5

quintessence de toute cette cochonnerie ». À propos* de ce…… : nous avons ici un magnétiseur
français, Brunet de Balan ; hier soir, je me trouvais chez lui : il est excellent, dans l’ensemble il
fait la même chose que Regazzoni, seulement de manière plus simple et moins théâtrale, et
l’authenticité de la chose était si évidente qu’il aurait fallu être complètement borné pour en
douter. Cela sauve également l’honneur de Regazzoni : la vérité perce, et la crédibilité des 14
barbouilleurs ignorants et calomniateurs se trouve ainsi sérieusement remise en cause ; « qu’ils
en souffrent jusqu’à leur mort ». J’ai également participé à la séance, au grand amusement du
public, avec un jeune paysan de la région, âgé de 14 ans, avec lequel je fus mis en rapport* et
qui reproduisait chacun de mes mouvements (dans un profond sommeil, debout et en marchant),
il répétait exactement tout ce que je disais à voix haute, en 5 langues : alors que je m’asseyais, il
m’a empoigné de façon vigoureuse et m’a brutalement poussé de la chaise, pour venir s’y asseoir
LUI-MÊME. Une fois réveillé, il ne savait pas la moindre syllabe. Mais jusque-là, il s’était
comporté COMME MON OMBRE, impossible de s’en débarrasser. Il était complètement ENSORCELÉ !
Jubilation du public !
Dans un article récent du Frankfurter Museum contre les matérialistes, on affirme que je les
ai déjà expédiés avec force. Il y a quelques jours, le même journal a publié 3 épigrammes de
Grimm , la première était intitulée « Goethe, Schopenhauer et Newton ». Je vous ai envoyé, sous
6
enveloppe fermée, le Konversationsblatt avec le poème en l’honneur de mon anniversaire, pour
que vous puissiez constater combien on me célèbre.
Vivez heureux et portez-vous bien !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 1 mars 1856
er

383. À L. SACHSE & COMP . 1

[Son nom propre ayant été écrit avec pp dans la signature d’une lithographie, Schopenhauer
exprime son] plus grand dépit de voir défiguré mon nom, et ce d’une manière qui lui confère une
signification laide et commune ] […]
2

[Il exige la correction de son nom :] j’insiste sur cet aspect, car je n’ai pas à accepter la
défiguration de mon nom […]
[Il demande également que l’on écrive son prénom en entier :] car ainsi on dirait que je
m’appelle Adolph ou Albert, voire Adam ! […]

[12 mars 1856]


384. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

De ces 2 lithographies qui suivent, cher ami, je vous en offre une, l’autre est pour le Dr.
2

Lindner, en vous priant de bien vouloir la lui remettre. Le négociant d’art ne m’en a donné que
trois, dont je garde la restante avant la lettre*. Le portrait est superbement réussi, Lunteschütz en
est également très satisfait. Mais vous allez être irrité, comme moi, par le pp dans mon nom ! Le
prénom devrait également être écrit en entier. Hier, j’ai tout de suite écrit à la galerie d’art pour
l’en avertir, avec insistance. Il est décisif de savoir si on a déjà procédé à l’impression : dans ce
cas, il n’y aurait plus rien à faire. Lindner l’évoquera sans doute dans son journal, et si l’on ne
peut rien changer, il devra y entonner une jérémiade au sujet du pp. Mon nom est HOLLANDAIS,
nous sommes originaires de Hollande : en allemand, il n’y a jamais de consonne isolée entre
3

deux voyelles — sauf si l’une des deux est une diphtongue.


Je suis extrêmement satisfait de votre recension de Weigelt : elle est très bonne. Au début,
4

vous avez décrit la situation de manière sincère et audacieuse, en respectant à la fois le fortiter in
re et le suaviter in modo . Vous voyez, on peut alors tout dire : il faut seulement éviter les
5

expressions fortes et tapageuses. J’aime surtout ce que vous dites de Kant : cela témoigne d’une
étude authentique et sérieuse de sa philosophie, ce qu’on ne fera jamais assez. Vous auriez dû
blâmer un peu Weigelt au sujet de sa présentation de la philosophie de Kant, qui est précisément
ce qu’il y a de plus mauvais dans son livre.
Le magnétiseur Brunet, dont je parlais la dernière fois, fait vraiment très bien son métier :
j’ai encore assisté à une séance privée dans sa chambre. Mais les habitants de cet Abdère ont été
fortement influencés par la calomnie des 14 médecins contre Regazzoni, au point que la
TROISIÈME séance de Brunet a attiré si peu de public qu’elle a dû être annulée et qu’il a dû rendre
l’argent. Déjà en novembre 1854, un professeur de langues de cette ville, un certain Dubourg , 6

avait publié une belle brochure de 31 pages, bien écrite, « A. Regazzoni à Frankfort », et dans
laquelle il vengeait entièrement Regazzoni, avec la plus grande résolution, en traitant les 14
comme ils le méritent. On y trouve tous les détails sur la Kabbale et la vérité.
J’espérais que Brunet pourrait guérir mon oreille gauche grâce au magnétisme, je me suis
laissé magnétiser 5 fois ½ heure, mais en vain : je ne sentais rien. Provectior aetas !
7

Francfort s. M., Adieu, vieil ami,


le 13 mars 1856. bonne chance !
Arthur Schopenhauer.
385. À CARL GRIMM 1

Très honoré Monsieur le curé !

Je vous remercie de tout cœur pour votre beau poème en l’honneur de mon anniversaire et
encore davantage pour votre article si élogieux dans le Frankf. Museum . Je me réjouis de voir
2

que vous y avez pris pied : récemment, on y avait droit à une petite dose de vos épigrammes,
choisies avec discernement ; celle portant sur le roman suicidaire est également ma préférée, car
elle touche avec pertinence au tragi-comique.
Je ne saurais cependant répondre à votre souhait concernant une autobiographie, ou mon
tourisme en Italie : le public tend trop facilement à passer de la chose à la personne, et je tiens à
3

préserver cette dernière.


L’été dernier, Lunteschütz a peint mon portrait à l’huile : un propriétaire foncier dans le
Brandebourg le lui a tout de suite acheté à même le chevalet, pour 250 f. C’est à cela que se
réfère la curieuse nouvelle dans le Frankfurter Museum selon laquelle il va m’édifier une
chapelle : il a dit qu’il voulait construire une maison spécialement pour le portrait — une sorte de
pavillon dans un jardin, je suppose. Il a été exposé ici et à Berlin, et une TRÈS BELLE lithographie
de ce dernier vient tout juste d’être imprimée à Berlin.
On m’en a donné 3 exemplaires et j’en ai gardé un ; les 2 autres ont été envoyés aux 2
évangélistes en chef à Berlin.
Comme vous êtes maintenant passé du statut de simple apôtre à celui d’évangéliste, je vous
en enverrais volontiers un, si j’en possédais plus.
Meilleurs vœux de santé et de joie

[17 mars 1856] votre


Arthur Schopenhauer.
P. S. Je vous avais envoyé le Konversationsblatt pour que vous le gardiez. L’auteur du
poème s’appelle von Doss, de Munich, un apôtre très ancien, surnommé (dans mon École)
l’apôtre Jean.
386. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je suis tourmenté, cher ami, par la curiosité de voir ce journal Monatspost , c’est pourquoi je
2

vous prie de m’en envoyer un exemplaire non relié, sous enveloppe fermée. J’aimerais voir ce
qu’il a imprimé, et comment, ainsi que l’aspect extérieur. Je crains fort qu’il n’ait mutilé la chose
par des omissions, car c’est un tout et chaque chose y est intimement reliée, aucun mot n’y est de
trop : mais cela remplit 20 pages t. 8 ! Il les aura difficilement publiées dans un seul numéro ; les
o

répartir successivement sur plusieurs numéros est néfaste, dans la mesure où il ne sort qu’un
numéro par semaine. Bref, envoyez-le moi, presto ! Qu’il l’ait publié me convient : la justesse de
mes considérations se trouve fortement appuyée par l’assassinat de Hinkeldey ; le public est à
3

présent disposé à recevoir ma vérité. Cela servira également d’échantillon pour faire connaître
ma manière et mon art au grand public.
En guise de réponse à mon blâme concernant la défiguration de mon nom, le marchand d’art
Sachse et Comp. m’a adressé une lettre moqueuse et impertinente, mais il m’a quand même
promis de procéder au changement, sans me dire combien d’exemplaires étaient déjà imprimés.
Grâce à la lettre ci-jointe du jeune Américain Young, nous savons enfin qui était le
reviewer : faites-en part au Dr. Lindner.
4

Ce qu’a livré Littré dans la Revue des Deux Mondes est un verbiage superficiel et
5

pitoyable ; de surcroît, c’est d’une ignorance crasse. Schleiden est un insipide freluquet ; c’est ce
6

que j’ai appris en lisant sa Vie de la plante . Et ça écrit sans cesse, et ça prêche sans rien
7

apprendre, en prenant du plaisir et en faisant l’important.


Il faut être bienveillant avec les gens : oui, mais seulement s’ils le méritent !
Je n’ai pas de nouvelles de la traduction des Parerga, alors que Lunteschütz prétend que son
collaborateur Monton les traduit en voyageant !
Si je regarde en arrière, je constate que ce sont uniquement des personnes QUI NE SONT PAS
DES PROFESSEURS qui ont fait connaître ma philosophie au public et qui sont responsables de ma
gloire, alors que pendant 35 ans, les professeurs ont mis ma lumière sous le boisseau, en me
passant malicieusement sous silence ; maintenant ils m’injurient de toutes leurs forces : ainsi
Fichte, Michelet, Rosenkranz, Hoffmann, Raumer à Erlangen, Ulrici, Bartholmèss, etc., etc.
C’est VOUS qui avez fait le plus pour moi : et maintenant vogue la galère* !

Francfort s. M. Ergo pax vobiscum ! 8

le 21 mars 1856. Arthur Schopenhauer.


387. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami.

Ce que vous dites sur la glorification irresponsable de Baader est tout à fait juste. Vous en
avez découvert la raison véritable. Dans son discours infâme, Ringseis l’appelle le plus grand
philosophe des Allemands. Avec Hegel, c’est le barbouilleur le plus dégoûtant. Son verbiage
borné ne saurait tromper qui que ce soit.
Pour répondre à votre question : le jeune paysan n’était aucunement dirigé par ma volonté,
2

mais il était comme enchaîné à moi par le frottement préalable de nos mains respectives. Il
répétait même immédiatement ce que je disais en privé au magnétiseur, comme « cela suffit
maintenant », etc., ce qui nous dérangeait : c’était comme s’il se moquait de moi.
Jam de re nova magnaque : arrigite aures ! Il y a 3 jours, Ritter de Zurich m’a rendu visite,
3 4

celui-là même qui en janvier avait fait réaliser ma photographie. Un jeune homme à l’aspect
extérieur avenant, poète dramaturge en herbe, il est venu de Dresde, où il s’était entretenu avec
Bähr : il appartient aussi à ma communauté zurichoise ; tous ces apôtres se connaissent entre
eux. Or il m’a déclaré qu’à l’Université de Zurich on envisageait d’instituer une chaire pour MA
philosophie , et exclusivement pour MA philosophie, et que l’on songeait surtout à vous pour
5

l’occuper, raison pour laquelle il souhaitait recueillir mon avis. Bien entendu, j’ai dit que
personne ne convenait mieux que vous. Toute cette affaire est menée par le conseiller du
gouvernement Sulzer, qui est plein de ferveur. Mais ne pensez pas à un conseiller
6

gouvernemental prussien, là-bas il s’agit bien plutôt d’un homme qui participe au gouvernement
du canton. Certes, cela reste pour l’instant un simple plan, projet, dessein et cela peut donc
facilement tomber à l’eau. Cependant, même le plus grand chêne a d’abord été un gland que
n’importe quel cochon aurait pu avaler : et le fanatisme qui anime tous mes disciples véritables
représente également un levier important. Zurich est un lieu de rassemblement pour tous les
professeurs hétérodoxes, Moleschott, etc. Vous avez à présent tout le temps pour réfléchir à cette
affaire. Zurich ne compte que 200 étudiants. La rémunération ne sera sans doute pas très élevée,
mais c’est tout de même un poste solide et honorable, et à cela s’ajoute la perspective d’un séjour
agréable, Suisse, lac, Alpes à proximité, Athènes suisse, ma communauté, de nombreux savants,
artistes, une autre vie que celle à Berlin, ville horrible, pauvre et infâme. Cela me ferait grand
honneur. Mais c’est à vous de décider ce qui vous convient le mieux. Nous devons attendre. Ce
Ritter m’a également baisé la main en partant — une cérémonie à laquelle je ne puis m’habituer :
cela fait sans doute partie de ma dignité d’empereur .
7

Que le ciel fortifie vos yeux ! C’est ce que souhaite de tout cœur

Francfort s. M., votre


le 28 mars 1856. Arthur Schopenhauer.
388. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Ce que vous dites du projet zurichois est entièrement juste. Mais il me semble que les
Zurichois tiennent pour important d’ouvrir un espace de liberté pour les travaux ignorés ou
détestés en Allemagne, et qu’ils ont fait de cela leur métier — in majorem Turici gloriam . Ritter
2 3

n’a pas davantage précisé qui l’envoyait : il va de soi que c’est au nom du parti qui a élaboré
l’affaire et qui, au conseil, se trouve représenté par R. R. Sulzer. Bref :
Aucun effort ne nous aidera à avancer :
Si ce sont des roses, elles finiront par fleurir .4

La recension du livre de Weigelt dans le Centralblatt est un tel agrégat de bêtise,


d’ignorance et de vilenie que ce n’est certainement pas à moi, mais bien plutôt à cette crapule
anonyme, qu’elle portera préjudice.
Je viens de recevoir de Lindner, que je vous prie de bien vouloir remercier de ma part, un
journal avec un article très correct sur la théorie des couleurs d’Opitz (que je ne connaissais pas
5

du tout) et j’en suis rempli de gaudium . La vérité perce ! Dove , Helmholtz, Brückner à Vienne ,
6 7 8

etc., vont comprendre ce que la défense obstinée du faux leur apporte — partout, on dira bientôt :
Quand le vice se rend, la vertu se met à table . 9

J’ai l’air largement aussi vieux que sur la lithographie : diable*, je suis dans ma 69 année,
e

le signe du cancer.
Suite à ma commande, le conseiller secret Krüger, qui se trouve à Paris, m’a envoyé un
Bouddha en bronze et couvert de laque noire, haut de 1 pied, avec le socle. Sans lettre. Il est
ENTIÈREMENT AUTHENTIQUE et représenté de façon tout à fait orthodoxe : je suppose qu’il provient
de la grande fonderie du T IBET ; mais il est déjà ancien. Il bénéficiera d’une console dans un coin
de mon salon ; les visiteurs, qui de toute façon entrent déjà le plus souvent avec un effroi sacré et
une trouille considérable, vont alors tout de suite comprendre où ils se trouvent : dans des «
espaces sacrés ». Viendra peut-être Monsieur le pasteur Kalb de Sachsenhausen, lui qui de sa
10 11

chaire crachotait qu’« à présent on introduisait même le bouddhisme en terre chrétienne ».

Francfort s. M., Bonheur et santé !


le 7 avril 1856. Arthur Schopenhauer.
389. À CARL GRIMM 1

Honoré Monsieur le curé !

Je vous remercie chaleureusement pour votre beau poème , si flatteur à mon égard, et
2

également pour votre lettre d’avril, dont il faut dire la même chose.
Concernant votre question : je ne connais certes pas la traduction de Rixner , mais je 3

n’apprécie pas particulièrement ce dernier, ni les traductions allemandes des traductions latines
des traductions persanes du texte sanskrit. Ohé ! Aussi, la diction latine, malgré la grammaire
persane, est merveilleuse, INIMITABLE : grâce à la fidélité dévouée et littérale du sultan DARA
SUKOH et d’Anquetil : je ne doute pas que bientôt, avec un peu d’application et de patience, vous
pourrez en entreprendre la lecture. L’Oupnek’hat a paru à Strasbourg en 1804, il coûtait d’abord
4

16 Rth., ensuite 9 Rth. On devrait pouvoir le trouver moins cher chez des antiquaires : ce sont 2
gros volumes, avec de très grands caractères d’impression sur du papier épais. Que la
bibliothèque de Wiesbaden ne les possède pas est une GRANDE HONTE.
Cette semaine, on me peint de nouveau à l’huile, un certain peintre Hammel , pour le 5

conseiller secret du gouvernement Krüger , de Prusse. Si les gens le paient, il faut bien que je
6

m’asseye pour poser : cela fait partie de ma mission. Par ailleurs, ledit Monsieur m’a déniché à
Paris une statuette du Bouddha, AUTHENTIQUEMENT asiatique, très ancienne, en bronze, provenant
vraisemblablement de la grande fonderie du TIBET, haute de 1 pied : dépouillée de son ancestral
revêtement noir, elle brille comme de l’or, sur une console dans ma chambre : cela faisait
longtemps que je couvais ce désir. Elle montre tous les signes canoniques : elle repose ici —
pour le culte domestique.
En vous souhaitant paix et joie et surtout une bonne santé

Francfort Arthur Schopenhauer.


le 11 mai
1856.
390. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je n’ai toujours pas eu de vos nouvelles, cher ami, exception faite d’un article de la
Monatszeitung, que vous m’avez envoyé et dont je vous remercie : cela m’a fait plaisir. Mais je
dois quand même vous écrire pour que vous sachiez ce qui se passe au Quartier Général.
Mademoiselle von Gayette m’a rendu visite , mais seulement pendant un quart d’heure,
2

pressée par les circonstances. Elle voyage avec un certain Dr. Georgens, avec lequel elle publie
un journal pédagogique, Le Travailleur sur le champ de l’éducation et dont elle m’a remis toute
une pile ; je suis cité dans l’un des numéros, mais elle m’y fait dire le contraire de ce que j’ai dit.
Ritter , de Zurich, m’a envoyé deux brochures architectoniques de Semper , mais contenant
3 4

seulement quelques lignes : il s’agit de sculpture chromatique et d’architecture.


Dans le Museum de Prutz, on a récemment annoncé votre dernier livre , avec de grands
5

éloges.
Le Bouddha a été libéré de son revêtement noir, il est en bronze de qualité, brillant comme
de l’or, et repose sur une belle console dans un coin : chacun comprendra ainsi immédiatement
qui est le maître dans ces « espaces sacrés ». C’est une pièce très rare, probablement du TIBET. Le
conseiller secret Krüger, qui l’a dénichée pour moi à Paris, veut maintenant que le peintre
Hammel me PEIGNE de nouveau, à l’huile, taille semi-réelle, comme pendant au portrait de
Justinus Kerner, du même peintre, qui se trouve accroché chez moi depuis déjà 3 semaines. Les
séances assises doivent commencer cette semaine : je ne puis m’y soustraire, à cause de cet
obligeant Krüger et de la postérité qui se trouve dans les culottes de ses pères.
Je joins un poème et 3 lettres (remittenda) venant de l’Orient, de l’Occident et de l’Empire
6

du milieu. La lettre de la femme , qui n’est pas signée, est d’une grande importance, en tant que
7

SYMPTÔME. Car quand je pense aux effets profonds et à l’enthousiasme que ma philosophie a
suscités chez les illettrés, les hommes d’affaires et même chez les femmes, et combien de choses
du même genre qui nous échappent, alors je commence à avoir, au sujet du rôle que ma
philosophie jouera en 1900, des pensées que je ne voudrais pas écrire, pas même à vous : vous
compléterez par vous-même.
Je souhaite avant tout que le ciel fortifie vos yeux !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 13 mai 1856.
391. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je vous remercie beaucoup, à tout égard, pour votre livre , mon cher ami. Il m’a grandement
2

satisfait et a même surpassé mon attente. Je vois avec plaisir que votre compréhension, votre
concision et votre connaissance vont toujours croissant ! La disposition de l’ensemble est
excellente ; d’abord, justice est rendue au matérialisme ; ensuite il est battu en brèche par le
monde comme représentation d’une part, le monde comme volonté d’autre part. Ma philosophie
se manifeste ainsi sous une lumière fort avantageuse, comme l’unique salut au-dessus de l’abîme
du matérialisme. De façon générale, je constate que ce dernier est profitable pour mon affaire,
car il réveille les hommes et stimule leur besoin métaphysique. Je ne saurais vous cacher non
plus que j’ai vu avec délectation comment vous traitez le vieux Juif sans vous embarrasser, en
l’écartant tout de suite, pour qu’Il ne s’imagine surtout pas que tout cela s’accomplit en Son
honneur.
Pour répondre à votre souhait, je voudrais à présent entrer dans les détails, mais seulement à
condition que vous ne vous ameniez pas ensuite avec des contre-arguments : je sais
suffisamment que
Qui veut garder raison et n’a qu’une langue,
Oh, il la tiendra certainement .
3

Vous n’aurez qu’à rejeter ce qui ne vous semble pas fondé.


Ad p. 37. À ma grande irritation, j’ai trouvé une des mes phrases souillée par le mot infâme
« Sommernachtstraum [songe d’une nuit d’été] » — et ce après vous avoir expliqué en détail que
4

ce mot ne doit son existence qu’à l’ignorance crasse des traducteurs allemands.
p. 46, 47. Bravissimo ! Mais dans l’ensemble, vous avez traité ce lascar stupide et
impertinent, qui n’est que l’écho de ses prédécesseurs, de façon beaucoup trop clémente.
Visiblement, vous voulez écrire sine studio et ira . Mais regardez donc comment ce………, p.
5

124, chez vous, oppose la FAUNE et le MONDE ANIMAL, alors que ce sont des synonymes.
p. 55, dans la note : « ne refuse pas » — une tournure fort malséante : il faudrait dire : « s’il
avait été suffisamment honnête » — ce………, pauvre en idées, m’a volé. Et de façon générale,
cet homme ne vaut rien et son petit écrit sur l’action réciproque ne contient rien sur l’action
6

réciproque en tant que telle, seulement un fatras usé tiré de la mécanique. Le passage de lui, que
vous citez in extenso p. 150, n’est qu’un galimatias.
p. 56, ce que vous dites après le tiret est superficiel et même faux : la loi de causalité ne
nous donne pas accès à la chose en soi ; comme je l’ai montré dans la Quadruple Racine, p. 76-
78, et alibi .
7

p. 64, « éternité des corps » — ici et en de nombreux endroits, par ex. p. 78, lois des corps a
priori, vous vous êtes habitué aux expressions fausses de ces matérialistes. Ces lascars sont
tellement ignorants qu’ils identifient corps et matière. Mais un corps est déjà la connexion de la
matière et de la forme, par ex. les 60 corps élémentaires de la chimie : or leur pérennité est
hautement problématique. Jusqu’en 1808, les métaux alcalins et terreux étaient des corps
simples. C’est alors que Davy les a décomposés : les autres pourraient connaître le même destin.
8

Seule la MATIÈRE est indestructible, car elle est SANS FORME, donc nous ne faisons que la PENSER,
sans pouvoir l’intuitionner. Elle seule est la substance, dont le quantum ne peut être augmenté ni
diminué. Cf. mon ouvrage principal, II, ch. 24 !
p. 67 en haut et alibi. p. 178 en bas vous confondez (que les dieux s’en émeuvent !) cause et
force ! Ô ami, lisez mon ouvrage principal, tome I, § 26. et la Quadruple Racine, p. 44, 45 . 9

p. 68, ce n’est pas la force, mais la matière qui est la causalité pensée objectivement ! eheu !
p. 73, ma phrase (APRÈS l’alinéa) appauvrie et défigurée.
p. 114, dans la parenthèse — une fausse concession : nous ne voulons ni ne pouvons nous
passer du mot ; il doit demeurer et être utilisé chaque jour. Pas de concession à la bêtise !
p. 146 au milieu : ANIMAL ET SPIRITUEL SONT LA MÊME CHOSE , les functiones animales (par
opposition à celles naturales et vitales) sont l’activité du cerveau et de ce qui s’y rattache, donc
ce que les spiritualistes appellent ESPRIT.
p. 175, en haut : « jamais quelqu’un n’a compris » — ô ! Descartes, Malebranche, Leibniz !!
Ibid. en bas : « idées SUPRASENSIBLES » : ce ne sont pas les formes a priori de l’intellect
qu’on appelle ainsi, mais Dieu, l’âme, etc.
p. 181, 183 : « âme (Seele), âme, âme » — c’est un mot de bigot et de vieille femme, qu’il
ne faudrait pas employer, une absurdité, une fiction des spiritualistes. Comme je déteste ce mot,
j’écris systématiquement « âmer (trübselig) ».
Voilà donc pour les points principaux : j’ai sauté ceux de moindre importance. Surtout,
prenez ces explicitations en considération.
Jamais je n’aurais cru que vous écririez tout un livre contre ce BÜCHNER sans même blâmer
le fait que, dans sa préface, il me parodie lourdement et bêtement, en rapportant ensuite des
ragots qui circulent sur moi en ville, en véritable PASQUIN. À cela s’ajoute qu’il prend un passage
CHEZ MOI pour le mettre en exergue d’un chapitre, en écrivant en-dessous le nom de Kant, en
véritable FALSARIUS. Ferveur apostolique peu brûlante. Et vous traitez honorifice un tel………, en
le ménageant. Hactenus de Evangelio ; jam ad epistolas ! 10

Je vous remercie beaucoup pour les informations littéraires que vous m’avez
successivement communiquées. Je comprends de quoi il en retourne avec Nature et révélation . 11

Erdmann me défend contre ce HOFFMANN : tiens donc ! 12

J’ai vu le tome I de Schelling : les vapeurs de l’ennui m’ont voilé les yeux, et j’ai refermé
13

le livre. « Ce que l’ESTRE est… » — comme le sous-officier lors des cours du soir de morale : «
Non seulement le soldat doit ESTRE (Seyn) obéissant ; il doit aussi ÊTRE (Sein) obéissant. »
Je possédais déjà le livre de FICHTE . Il procède ainsi que vous le décrivez dans votre livre,
14

c’est-à-dire qu’il dessine d’abord ma caricature, et me réfute ensuite grâce à cette figure en criant
victoire. Il dit, à peu près, que je vous aurais forcé à ne pas m’ignorer ; maintenant vous parleriez
de moi en de mauvais termes, en guise de récompense. EXACTEMENT COMME FORTLAGE, il tente de
s’approprier ma doctrine principale, en remplaçant volonté par PULSION — et il voudrait s’enfuir
furtivement avec son butin, afin de s’approprier la plus importante des vérités, une vérité
qu’avant moi aucun autre philosophe n’a porté à la connaissance, que ce soit à l’époque antique,
médiévale ou moderne, à savoir QUE L’ÉLÉMENT PRIMAIRE, LE NOYAU DE NOTRE ÊTRE, EST LA
VOLONTÉ, ET QUE L’INTELLECT EST SECONDAIRE ET ACCIDENTEL : tous, tous, tous, per saecula
saeculorum, ont enseigné le contraire : la diamoia, so cmxrsijom, epirsglomijom , le penser*, est
15

la propriété originaire de leur prétendue « âme », la volonté n’est que sa conclusio ex praemissis.
C’est donc cela que les gaillards veulent dérober, en s’imaginant pouvoir dissimuler le vol par le
mot PULSION. Comme c’est STUPIDE ! Il s’agit ici de la connaissance de la CHOSE EN SOI, qui ne
pourra jamais être puisée dans le PHÉNOMÈNE, la représentation, la conscience des choses ; or
c’est précisément de là que provient le concept de PULSION, ÊTRE POUSSÉ comme un troupeau,
indiquant toujours une vis a tergo , seulement présente pour le spectateur extérieur. La VOLONTÉ
16

se manifeste uniquement dans la conscience de soi et en constitue le seul contenu. Lisez pour
cela la Volonté dans la nature, p. 83-87 . Voilà pourquoi Fichte affirme que son affaire n’a rien à
17

voir avec LA MIENNE : qui s’excuse s’accuse*. Je préfère encore que l’on me vole franchement,
comme Noack — au lieu d’un chapardage aussi vil.
Concernant les APPARITIONS DE FANTÔMES , je ne puis vous en dire plus, pour l’amour du ciel
18

(Tien), que ce que contient ce traité, en particulier de la page 279 à la fin : vous devez vous en
contenter. Bien entendu, c’est le contraire de ce que Fichte voudrait en faire, pour apporter de
l’eau à son moulin. J’ai toujours traité la chose comme un PROBLÈME et je l’ai laissée telle. En
passant : la façon dont cette crapule affecte de se comporter en GRAND SEIGNEUR par rapport à
19

moi n’est-elle pas scandaleuse ? Quel vermisseau.


Je dois encore vous raconter une belle cochonnerie* qui s’est déroulée près de chez vous.
Un orientaliste, A. Weber , qui fait partie des messieurs auxquels j’ai recommandé de se faire
20
engager par la Comédie des singes , a donné le 1 mars une conférence sur le bouddhisme, à la
21 er

Société des lectures scientifiques, d’une ignorance pitoyable, pleine d’erreurs et avec quelques
mensonges. Cette dernière est reproduite dans le journal DAS AUSLAND (à NE PAS CONFONDRE avec
le Magazin für Literatur des Auslandes), n 13, 14. Il m’évoque comme un héros du bouddhisme
os

et comme « un philosophe à l’esprit peut-être brillant, mais assurément tordu ».


Mon Bouddha va être galvanisé à l’or, et il brillera, dans toute sa splendeur, sur la console
dans le coin. Les Birmans, selon le Times, viennent de dorer toute une pagode : je ne voudrais
pas être en reste. Il y a encore un autre Bouddha ici, appartenant à un riche Anglais. J’y suis allé
en pèlerinage, pour y réciter mon sutra. Il est à taille humaine, mais contrairement au mien, il
n’est pas en bronze, mais en papier mâché*, c’est donc un moulage, probablement de Chine,
entièrement doré, et ressemblant au mien par TOUS ses aspects, au cheveu près. Je préfère le mien
: il est authentique, tibétain ! L’autre se distingue du mien SEULEMENT par son nez plat et les
proportions plus fines de ses membres — chinois ! Le mien est maigre, avec de longs bras :
sinon tout craché*. Tous deux ont cette célèbre et orthodoxe douceur du sourire autour de la
bouche, exactement ! Posture, vêtements, coiffure, lotus : tout pareil ! Monsieur le pasteur KALB !
Regardez donc par ici ! Hum, mani, padma, oum !
Mon deuxième portrait a largement progressé : il sera bon, tout autre que le premier, pas
22

aussi idéal, plus individuel.


À l’Université de Zurich, ma philosophie serait tout à fait apte à servir de contrepoids
idéaliste à tout ce matérialisme. Patience ! toutes les affaires sont longues* dit Voltaire.
Becker m’a envoyé son fils et son neveu et le professeur Bähr de Dresde m’a également
23 24

envoyé son fils. C’est pour que ces jeunes gens puissent se vanter de m’avoir vu et de m’avoir
parlé en chair et en os, lorsqu’ils seront vieux. Le jeune Bähr , étudiant, est venu de Leipzig et
25

m’a raconté que le prof. Weisse organisait chaque semaine une conversation philosophique : les
étudiants ont alors mené la dispute autour de ma philosophie, et c’est cela qui a débouché sur la
question mise au concours.

Francfort s. M., Bonheur et santé


le 6 juin 1856. Arthur Schopenhauer.
392. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Je vous remercie de tout cœur, cher ami, pour vos nouvelles communications littéraires,
grâce auxquelles je prends connaissance des anathèmes prononcés contre moi, car on en apprend
si peu dans cette Abdère. Les professeurs de philosophie, dans leur sombre arrière-boutique , 2

n’ont qu’à rouspéter comme ça leur chante : personne ne les entendra. Maintenant qu’il ne peut
plus être question de m’ignorer, ces messieurs bien proprets veulent me descendre AVEC LEUR
PLUME, tous en chœur. Oh, les insensés ! C’est comme attiser un feu, il ne fait que brûler
davantage. Ils s’imaginent qu’ils ont une certaine autorité : les……… ! Leur seule force consiste
à fermer leur gueule, à passer sous silence, à ignorer. Une fois chassés de cette position, ils sont
PERDUS : ces ânes vont se faire TOURMENTER par le ciel et la terre (Goethe ). J’ai vu comment cette
3

crapule anonyme du Centralblatt a récemment affirmé que les invectives de Hoffmann étaient «
4

PROFONDES ». J’ai vu que dans l’Evangelische Kirchenzeitung, n 36-44 de Hengstenberg se


os 5

trouvait un article sur les rapports entre philosophie contemporaine et théologie. Serait-il
possible que cet article s’en prenne également à moi ? Cela me serait fort agréable. Allez donc
vérifier. Ici, ils ne l’ont pas non plus.
Dans la correspondance de Fichte et Schelling , tout être raisonnable verra qu’ils étaient bien
6

tels que je les avais décrits. Comme ces lascars entrent dans une fureur aveugle lorsque Kant
désavoue Fichte ! Comme ils pestent contre lui ! C’est que leur philosopher n’était qu’un jeu
avec des concepts abstraits.
Le livre de Schwarz est censé décrire la totale banqueroute de la théologie. Regardez donc
7

cette lettre de Paris dans le dernier ou l’avant-dernier Museum de Prutz : on y critique la religion
naturelle d’un Français, tout en se gaussant ouvertement du théisme des Français et en faisant
allusion, comme en passant, au panthéisme et à l’« ATHÉISME ». Cela m’a fort réjoui. Les actions
du vieux Juif sont en baisse.
J’ai relu votre livre et je dois ajouter ce qui suit. 1) p. XIII : concession erronée ! Le
8

matérialisme est essentiellement amoral, c’est-à-dire qu’il n’offre pas le moindre fondement pour
une morale ; sauf pour une morale égoïste, visant la réciprocité.
2) Encore concernant la p. 55, où je n’avais blâmé que le « refuse ». Mais paulo graviora
canamus ! Vous y dites que j’aurais apporté des « corrections » à la preuve kantienne de
9

l’apriorité de la loi de causalité. Ce n’est pas vrai ! C’est dès 1813, dans la Quadruple Racine,
dans le long § ad hoc, c’est-à-dire dans le § 23 de la 2 édition, que j’ai RÉFUTÉ de façon radicale
e

la preuve kantienne, pour ensuite en proposer une nouvelle, à savoir la mienne, la seule qui soit
juste et possible, différant totalement de l’autre, et ce en de nombreux endroits que vous
connaissez, dans ledit traité, § 21, également dans De la vision et des couleurs, etc. Et vous
parlez modestement de CORRECTIONS ! Sans VOULOIR me connaître, Helmholtz a pris chez moi
cette preuve et l’attribue à Kant, qui n’en connaissait rien (Quadruple Racine, p. 74) — parce
qu’il me jalouse, moi qui suis vivant ; alors qu’il m’a lu MOI et non pas Kant. C’est une
crapule……… dont vous ne devriez pas parler avec tant d’éloges et qu’il ne faudrait pas nommer
à côté de moi, comme si j’étais « un homme parmi d’autres ». Chi non ha sdegno, non ha
igegno ! C’est ce que je vous chantais en 1847 .
10 11

3) p. 84 dans la 2 note, votre citation est incorrecte : c’était dans l’ÉTHIQUE, p. 30-34 ;
e 12

Quadruple Racine, p. 46 , et De la vision et des couleurs, p. 18 .


13 14

4) p. 152, vous dites : « Nier l’unité originelle de l’âme. » Justement, je l’ai niée, je l’ai
décomposée, comme Lavoisier l’eau : à ce sujet, Volonté dans la nature, p. 19 . De toute façon,
15 16

il en va de même avec la psychologie rationnelle qu’avec la théologie rationnelle. Envoyez donc


l’ÂME chez le vieux Juif, pour qu’elle lui tienne compagnie, et faites en sorte qu’elle cesse de
nous hanter.
Dans la lettre ci-jointe de Grimm , vous pouvez voir qu’il est en passe de devenir un
17

évangéliste complet. J’aime surtout quand il dit : « Schopenhauer n’a jamais écrit une ligne qui
ne soit importante. »
Le deuxième portrait n’est pas réussi, une sorte de caricature, je l’ai dit au peintre, et
18

maintenant il semble qu’il ne veuille pas le terminer. Par contre des officiers autrichiens, qui me
voient à table CHAQUE JOUR, ont trouvé que le deuxième portrait de Lunteschütz était très
ressemblant.
Dans le Frankfurter Museum, il y avait encore quelques distiques philosophiques de
Grimm , dont 3 qui m’étaient destinés : il a eu l’idée de se demander pourquoi ils ne mettaient
19

pas ma tête à prix, ainsi que la réponse en hexamètres.

Francfort s. M., Vale et nos amare perge ! 20

le 28 juin 1856. Arthur Schopenhauer.


393. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami !

Je vous remercie de nouveau pour vos communications littéraires et pour vos efforts
consacrés à la lecture du galimatias du Dr. Karsch (er l. m. i. A. ).
2 3

Vous aurez sans doute lu le livre de Cornill ainsi que sa recension de votre dernier livre
4

dans le cahier de juin des Heidelberger Jahrbücher. Il n’est ni hostile ni malicieux à mon
encontre, il me fait au contraire souvent de grands éloges, et j’apprécie son livre parce qu’il
contribue à attirer l’attention sur moi. Mais il est quelque peu rudimentaire et ignorant, sans
aucune connaissance de la philosophie transcendantale, sans aucune étude de Kant, il occupe la
position du réalisme commun et plat d’un charbonnier (ce qu’il trahit tout à fait NAÏVEMENT dans
sa recension ; « nos PENSÉES portent sur le monde des objets, qui certes sont en nous, mais le
monde des objets est quand même là, au-dehors, sans notre intervention » — sic fere) ; de
pareils………. enseignent la philosophie à Heidelberg ! C’est donc à partir d’un point de vue de
charbonnier qu’il me juge, avec une arrogance et un air de supériorité qu’on ne trouve que de nos
jours. Ma philosophie prolonge celle de Kant, mais cette dernière lui est COMPLÈTEMENT
ÉTRANGÈRE. Par conséquent, il lance des termes techniques philosophiques qu’il ne comprend
pas, et des termes faits maison que personne ne comprend (idéalisme transcendant, etc.), pas
même lui. C’est un…… qui ne sait rien, qui n’a rien appris, qui ne comprend rien ni ne VEUT rien
comprendre : cela ne l’intéresse pas, il veut seulement bavarder, pour se donner des airs et faire
un livre. Il est comme quelqu’un qui se mêlerait brutalement à une conversation sans savoir de
quoi il retourne, en prétextant seulement quelques phrases qu’il aurait attrapées au vol. C’est le
fils d’un marchand de vin de cette ville , et il a commencé à étudier la philosophie en même
5
temps qu’il a commencé à l’enseigner ; ce qu’il avoue lui-même, comme me l’a rapporté le jeune
Dr. Kilzer , étudiant à Heidelberg. p. VIII. on peut lire « EXPÉRIENCE EMPIRIQUE » ! Les 30
6

premières pages sont encore supportables : je suis même assez satisfait avec les p. 12-15 ; mais le
sujet qu’il y traite est la seule chose qu’il ait comprise ; p. 19 ligne 12 à partir du bas, le « sans
lui » doit se comprendre de manière très ironique. À partir de là, tout empire et tombe dans le
verbiage le plus confus : il confond l’opposition du réalisme et de l’idéalisme avec celle du
réalisme scholastique et du nominalisme. Il jette tout pêle-mêle, rapproche les choses les plus
hétérogènes et veut prouver qu’il y a partout chez moi, non pas des erreurs, mais des
CONTRADICTIONS. Un tour de main stupide et mauvais dont ces crapules se servent souvent. Il ne
7

faut pas supposer de contradictions chez un auteur tant que l’on n’a pas prouvé l’existence de
deux doctrines complètement inconciliables et que l’on n’a pas épuisé toutes les possibilités pour
les réunir. Mais selon lui, je me serais contredit à chaque page ; je devrais donc être un homme
qui ne sait pas de quoi il parle, car c’est CELA une contradiction. Par ex. p. 30, il parle de ma
dianoiologie, le processus de connaissance, et il cite une phrase du livre 3, de la métaphysique du
Beau, de la conception platonicienne des Idées. Il en va ainsi pendant toute sa chasse aux
contradictions, chez moi, le philosophe le plus cohérent et le plus conséquent. Tout son
galimatias anesthésiant est tellement confus et absurde que personne ne saurait le lire en entier,
mais les professeurs de l’arrière-boutique et le Centralblatt y verront une réfutation
8

fondamentale de toute ma philosophie. Dans ce genre de livre, j’ai coutume de me consoler avec
les passages cités de mes œuvres, mais ici, elles sont citées non seulement avec des erreurs
concernant les œuvres et les chiffres, mais aussi bien souvent rendues absurdes par les fautes
typographiques les plus abominables ; par ex. p. 57, on trouve « gnoséologique » au lieu de «
nature sans connaissance », sans aucun substantif ; p. 60 au lieu de « génie » — chimie ; p. 75 au
lieu de « mécanique » — matière ; p. 31 continuellement, au lieu d’« objectité » — objectivité ;
p. 15 au lieu d’« entendement » — comité. Au lieu d’étudier Kant, cet homme a lu les
gribouillages complets de tous les professeurs de philosophie : voilà ses études de philosophie, et
c’est à partir de là qu’il me surplombe.
J’ai feuilleté le discours de Moleschott : un galimatias précieux et affecté, censé masquer sa
9

GROSSIÈRETÉ, et ses prétendues nouvelles idées sentent en vérité le réchauffé. Étudiez donc les
Premiers Principes métaphysiques de la science de la nature de Kant, et faites ensuite
comprendre à ces garçons-coiffeurs qui bavardent de Force et matière, à ces fabricants de pilules
et clystérologues, que LES CORPS SONT DES ESPACES REMPLIS DE FORCE . Vous pourrez vous faire une
réputation, si vous vous y prenez adroitement. Ces ignorants font preuve d’outrecuidance
lorsqu’ils abordent les principes ultimes des choses sans avoir fait d’études de métaphysique. Il
faut leur mettre le nez dans leur propre IGNORANCE jusqu’à le faire saigner.
Le deuxième portrait sera quand même achevé, parce que le commanditaire le trouve
10

excellent.
La semaine dernière j’ai été à Mayence, rendu visite à Becker, vu sa femme, qui est en passe
d’accéder au statut d’apôtre.
Hier, le professeur Bähr était de nouveau ici, pénétré d’un fanatisme louable : il voulait
échanger sa tabatière russe en argent contre ma vieille tabatière usée en cuir, en guise de
souvenir, ce que j’ai refusé. Il m’a parlé d’un certain Monsieur de Wilde, un ancien employé
prussien qui était un fanatique déchaîné de ma cause, jusqu’à l’âge de 85 ans, âge auquel il est
mort avec mon nom sur les lèvres ; il m’a également parlé de son fils (celui de Bähr) qui a décrit
sa rencontre avec moi dans une lettre enthousiaste .
11

Le Bouddha, doré à neuf, brille sur sa console et vous bénit.

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 11 juillet 1856.
394. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Docteur,

Veuillez recevoir mes chaleureux remerciements pour l’envoi de la revue , et encore2

davantage pour votre article publié dans cette dernière, qui m’a fait fort plaisir ; surtout parce
qu’il s’agit précisément de cette partie de ma doctrine qui n’a encore presque jamais fait l’objet
d’une discussion jusqu’à maintenant, alors qu’elle m’importe beaucoup ; à part chez Noack , 3

autant que je sache, il y a environ 3 ans, dans un traité de métaphysique (j’ai oublié le titre), sur
une demi-page, mais c’était tellement concis que tout y était — un petit chef-d’œuvre. Dans
l’ensemble, vous avez fait tout ce qu’il était possible de faire dans un espace aussi restreint :
quelques pages supplémentaires n’auraient pas nui à la chose. J’aurais souhaité en particulier que
vous indiquiez avec précision ce que j’entends par IDÉES, à savoir uniquement celles de Platon,
les formes éternelles des êtres naturels changeants ; ce qui vous aurait évité (p. 191 en bas) de
parler d’IDÉE au singulier , ce qui tend à désorienter les gens et à les conduire tout de suite vers
4

leurs nébuleuses fariboles.


Je crois que je ne vous ai pas encore remercié pour l’envoi du programme de la question
mise au concours , même s’il n’éclaire pas davantage la question. J’ai reçu la visite d’un étudiant
5

de Leipzig qui m’a raconté que la mise au concours de cette question était le résultat d’une
6

conversation philosophique organisée par le prof. Weiss, où les étudiants débattaient de ma


philosophie.
En vous remerciant encore de vos efforts pour propager ma doctrine je demeure

Francfort s. M. votre
le 20 juillet serviteur dévoué
1856. Arthur Schopenhauer.
P. S. J’ai oublié d’ajouter plus haut que je suis très satisfait de ce que vous avez écrit en
guise d’introduction à ma philosophie, notamment votre description de la grande différence de
fond entre moi et tous les autres philosophes (p. 191) . Il est vraiment étonnant que pendant des
7

millénaires, on ait pu être dans l’erreur concernant la situation fondamentale de notre être, si
déterminante pour tant d’autres choses, alors que toute personne dénuée de préjugés, et
n’importe qui capable de jugement, ne peut pas ne pas comprendre qu’il s’agit en vérité du
contraire de ce qu’on a toujours cru.
395. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Vieil ami.

Je vous remercie beaucoup pour vos efforts destinés à tirer la quintessence du pâté de
Karsch . Je constate que ce dernier est un curé tout à fait infâme qui ne craint pas de sortir les
2

mensonges les plus éhontés, alors que quiconque est familier de mes œuvres les démasquera tout
de suite ; et il assaisonne tout cela de ses plaisanteries plates de curé catholique. Son clabaudage
ne saurait me nuire en aucune façon ; il m’est au contraire utile, d’une part en excitant la
curiosité, d’autre part en provoquant l’opposition, au moins dans les esprits et peut-être même
dans les écrits, car tout le monde n’est pas aussi clément que vous.
Weiss doit vraiment être persuadé que le public est complètement stupide, car il ne se rend
pas compte que chacun remarquera aussitôt que c’est la jalousie et la haine pour ce qui est bon
qui sont à l’origine de ses propos . C’est donc également profitable.
3

Cornill, dans son genre, est bien meilleur : nombreux sont les passages où il trahit son
admiration pour moi, mais il veut, lui aussi, contribuer à la tâche générale, en rabaissant la
grandeur avec sa force de pygmée. Il ne comprend pas le moins du monde l’idéalisme, car
comme toute cette jeune génération, il ne sort pas de l’école de Kant, mais de la baraque de
charlatan de Hegel : voyez par ex. comment, p. 61 et 62, il cherche encore, en dehors de la tête,
un monde MATÉRIEL qui correspondrait au monde comme représentation, ne comprenant pas que
c’est justement ce monde matériel qui est notre représentation. Ces gens sont grossiers et
ignorants : c’est le fruit de l’hégélianisme. Loin de me porter préjudice, cela me vient en aide :
tout le monde se rendra compte que Cornill n’a pas compris son auteur, et que c’est pour cette
raison qu’il n’arrive pas à expliquer tant de choses.
Tous ces lascars ne pourront pas me descendre avec leur plume, ils ne font que travailler à
ma gloire. À ma connaissance, le nombre de personnes authentiquement enthousiastes est déjà
suffisamment important pour me donner la certitude qu’un jour ma philosophie jouera un rôle
dans le monde, bien plus qu’aucune autre, ancienne ou moderne, ne l’a jamais fait. La raison en
est la force de la vérité et l’importance du thème.
Dans la revue Die Natur vous trouverez « Trois lettres d’un matérialiste » : dans la dernière,
4

on polémique contre vous, en vérité contre mon idéalisme, et ce sans me nommer. Verbiage plat
qui découle de la totale ignorance et grossièreté de ces barbouilleurs, tourneurs de pilules et
clystérologues. À propos* de ce genre de personnes : les 14 médecins n’échapperont pas à
Némesis. Regazzoni, à présent chevalier Regazzoni (légion d’honneur* ?), s’épanouit à Paris ;
Dubourg, qui s’y trouvait en septembre, me l’a rapporté : car cela m’intéresse beaucoup. Et
maintenant, la Postzeitung locale du 22 juillet rapporte d’un ton moqueur, DANS LE 1 er

SUPPLÉMENT, que tous les journaux parisiens racontent avec enthousiasme comment, dans un état
somnambulique, il a fait chanter de façon merveilleuse la chanteuse Mlle Lucie, qui avait perdu
sa voix depuis bien longtemps. Dubourg va sélectionner les journaux parisiens qui parlent de la
question. La vérité perce* : les 14 n’échapperont pas à la punition.
Dans la Philosophie de l’Histoire de Helfferich , je suis mentionné 2 fois. Wiesike et le Dr.
5

Nordwall m’ont rendu visite : ce dernier était ici pendant 2 jours et 2 fois chez moi, à chaque fois
2 heures.

Francfort s. M., Avec mes meilleurs vœux


le 30 juillet 1856. Arthur Schopenhauer.
396. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Cher ami !

Une fois de plus, je vous remercie de tout cœur pour les intéressantes nouvelles que vous
m’avez communiquées. Ici, je ne tomberai sans doute pas sur le livre de Solly , j’espère donc que
2

vous m’en parlerez encore — surtout si je n’y suis pas ignoré. Ceux qui m’ignorent commencent
à verser dans la mauvaise spéculation : on est loin d’être au niveau*. La jalousie devra donc
emprunter d’autres voies : or, ces dernières commencent toutes à être douteuses.
J’ai jeté un œil à Cudworth lorsque j’étais plus jeune : un foetor Judaicus tellement
3 4

épouvantable m’est monté au nez que je ne recommencerai plus.


Ici, on ne tient plus le Journal des Savants depuis 1848. Flourens aurait dû fermer sa gueule
5

et ne pas parler de choses qu’il ne comprend pas. C’est un bon physiologue, capable de faire
avancer sa science avec ses expérimentations. Mais s’empresse de faire la leçon à Bichat, avec
son « il ne s’aperçoit pas », exactement comme ce Cornill me fait la leçon avec « s’il avait pensé
à ». Il ne s’aperçoit pas* qu’il est un……… Un homme comme Flourens ne me connaît bien sûr
pas : la faute en incombe-t-elle à mon insignifiance ou à son ignorance ? Alors que moi, je LE
connais, j’ai lu et même je possède tous ses écrits les plus importants. Mais apprendre l’allemand
! Alors que moi, je parle 7 langues, et bien. Et c’est lui qui voudrait faire la leçon à… Bichat ! Il
confond les MOTIFS avec les PASSIONS suscitées par les motifs ; il ne comprend pas même l’abc
des choses. Vos commentaires sont très justes ; mais c’est à peine le minimum de ce que je
dirais.
Et Cornill, avec ses contradictions et son dualisme ! Sa tête est incapable de saisir mes
grandes pensées dans leur unité, c’est pourquoi il tourne autour du pot, détache un morceau par-
ci, un morceau par-là, les ajointe, et comme ils ne s’assemblent pas, il crie : « Contradiction ! »
Cela est assurément plus facile que d’aborder un grand système profondément réfléchi, de suivre
l’auteur dans toutes ses démarches et de présenter ensuite ses objections ; comme Ænesidemus
l’a fait avec Kant. Mais en empruntant ce chemin, le courage et la force viennent à manquer à ce
petit monsieur et ses jambes commencent à vaciller ; il préfère alors s’allonger sur la route et
écrire : « Contradiction ! » De même Taillandier : « Ici commencent les contradictions * ! » Il
6

n’y a que ces têtes de veau pour croire qu’un esprit de mon espèce pourrait ne pas respecter le
plus simple des principes logiques, le principe de non-contradiction, ou qu’il pourrait élaborer un
système pendant toute sa vie sans même avoir de ce qu’il enseigne un concept distinct et réfléchi
et une image claire devant les yeux, ce qui élimine toute possibilité de contradiction. Et ils
pensent que j’ai besoin des lascars dans leur genre, aussi éphémères que des mouches sur un mur
; des lascars que n’importe quel Jeannot fabrique infailliblement lorsqu’il s’allonge auprès de sa
Jeanneton. Leur nom est legio ; nous marchons seuls à travers les siècles.
DUALISME ! 1) où est-ce que vous êtes allé chercher qu’un dualisme est toujours faux ? Et 2)
lorsque je dis : la lune a deux faces, nous voyons l’une, jamais l’autre : est-ce là un dualisme ?
Aussi peu que phénomène et chose en soi, volonté et représentation.
Vous aurez sans doute déjà lu les 4 pages ½ de Taillandier sur moi, dans la dernière Revue
7

des Deux Mondes, premier article. Bavardage français, abordant le plus possible ma personne : et
où est-ce qu’il serait allé chercher que je suis « tout étonné du bruit que font ses écrits dans le
monde* » ? Je le suis si peu qu’Emden a raconté à Nordwall comment je lui avais prédit ma
gloire future il y a 20 ans — au grand étonnement de Nordwall.
Büchner est comme ces chiens qui tantôt grondent contre nous, tantôt remuent la queue : les
8

deux attitudes nous sont profitables. J’aime beaucoup quand il dit dans son texte que « Liebig a
dû devenir un disciple de ma philosophie » ; cela me plairait bien : Liebig semble en effet avoir
9

flairé quelque chose.


L’Allgemeine Deutsche Zeitung, ensuite le Frankfurter Journal du 7 août, rapportent que
dans son discours, Ehrenberg a mentionné ma plaisanterie sur la queue de Münchausen , mais
10 11

pour l’éclairer véritablement, il aurait dû en parler davantage ; peut-être la tient-il de votre


dernier livre, où p. 70-73 vous avez TRÈS BIEN rassemblé les passages concernés. Il semble que
ceux qui fuient le matérialisme atterrissent chez moi. D’ailleurs, ce dernier est UN FERMENT qui
sera très bénéfique pour ma philosophie ; comme la bigoterie d’autre part. Bravo ! Tous les
chiens sont lâchés sur le besoin métaphysique. Tant mieux !
Le Dr. Bahnsen du duché de Schleswig était ici, il est maintenant à Altona, professeur
12 13

d’école. Plein d’enthousiasme ; il y a 3 mois il m’a vu en rêve, et la vision s’est révélée être
exacte. Nordwall a acheté deux photographies de ma personne ; j’ai donné l’autorisation à
l’artiste : il en a déjà beaucoup vendu.
Kuno Fischer, dans la PRÉFACE de son livre sur Bacon , dit que s’orienter en philosophie ne
14

signifie aujourd’hui rien d’autre que d’étudier à fond la philosophie de Kant : recte. Mais Kant
serait-il autant réhabilité SANS MOI ? Eh non, mon vieux, sûrement pas. Les trois sophistes sont
par terre, et le fils de Schelling a eu la bêtise de publier la correspondance entre son père et
Fichte , montrant clairement que ces lascars étaient bien comme je l’ai dit. Et Hegel finira bientôt
15

dans la voirie.
Le portrait de Hammel est une caricature, je le lui ai dit avec force ; il est désespéré et n’ose
pas l’exposer. Lunteschütz me presse de poser encore 4 fois pour lui, le nouveau portrait serait
ainsi terminé, mais j’estime qu’il fait trop chaud pour traverser le pont.

Francfort s. M., Eqqxro !


le 14 août 1856. Arthur Schopenhauer.
397. À JULES LUNTESCHÜTZ * 1

Cher ami,

Le propriétaire de l’hôtel d’Angleterre vient de me faire savoir que Rossini, le grand


2

Rossini est descendu chez lui et qu’il dînera ce soir à la table d’hôte de cinq heures. De suite j’ai
retenu deux places pour vous et pour moi, et comme l’hôtelier me le propose, nous serons placés
tout à côté du grand homme . Je compte certainement que vous viendrez et je vous prie d’être
3

exact à l’heure.

[fin août 1856] À vous


A. S.
398. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Votre long silence, mon cher ami, commence à m’alarmer. J’espère que vous n’êtes pas
malade, ou peut-être êtes-vous atteint de la manie de voyager qui sévit un peu partout et allez
bientôt apparaître ici même. Si ce n’est pas le cas, faites-moi signe ! Madame Lindner m’a rendu
visite, une femme très gentille, jeune et jolie. Lindner ne devrait pas avoir de mal à s’entendre
2

avec elle. Mais nous autres, nous sommes les vrais coelibes — quasi coelites, dicas . Von 3

Hornstein est également revenu me voir, il y a deux mois il se trouvait à Zurich, où Herwegh
4

étudie le bouddhisme, auquel je l’ai introduit.


Vous savez sans doute déjà qu’on vous a violemment attaqué, dans la revue théologique et
politique de Görres , cahier 4. Consolez-vous : moi aussi je m’y suis fait rosser avec virulence.
5

On ne pouvait s’attendre à autre chose de la part de ces curés catholiques : ce sont les alliés les
plus intimes du Dr. Karsch, et peut-être même est-ce lui en personne, car juste avant, on y
recommande chaudement Nature et révélation. Mais dans des lettres, j’ai déjà blâmé votre
volonté de brûler à blanc ces matérialistes dans le domaine de la morale, sans prendre en compte
ce que j’ai dit dans la Quadruple Racine, p. 116 et alibi : un pareil lascar aurait alors beau jeu
6

dans ce cas.
Les pasteurs protestants s’y prennent mieux : au début du mois, ils ont organisé un grand
congrès au Sandhof, sur la critique du matérialisme, sous la présidence de Kalb. Le discours de
Kalb a été imprimé dans le Volksblatt local : contrairement à mon attente, il use de bons procédés
envers moi, citant contre le matérialisme quelques passages de la première édition de mon
ouvrage principal, dont celui sur Münchhausen , et il remarque que j’ai écrit cela il y a déjà 40
7

ans. Il n’a donc pas encore vu le Bouddha assis dans son coin : Madame Lindner l’a vu et pourra
témoigner de son effet édifiant.
J’ai reçu le discours d’Ehrenberg, mais je n’y ai pas trouvé le passage sur moi et
Münchhausen. En a t-il parlé dans son discours en l’omettant par la suite ? Hoc dicas . Ou s’agit-
8

il d’un canard ?
Hier, j’ai lu votre critique du Leibniz de Kuno Fischer et je suis assez satisfait de ce que
9

vous dites sur moi, et dans l’ensemble aussi.


Dans le Museum de Prutz, Rosenkranz recense longuement l’Histoire de la théologie par
Schwarz , en insinuant de façon sournoise et mensongère que ma philosophie serait liée au
10

matérialisme ; alors qu’elle le réfute bien plutôt. Son intention est de me calomnier par tous les
moyens.
Dubourg, qui possède une force magnétique hors du commun, a magnétisé mon chien au
moins 8 fois, dans le but de guérir sa patte de devant, qui est boiteuse et que je soigne depuis 9
mois : sed frustra . Suis désespéré.
11

Francfort s. M., Certiorem me reddas,


le 17 sept. 1856. te valere !
12

Arthur Schopenhauer.

P. S. Si vous le pouvez, lisez donc dans le supplément du Journal de Francfort du 14 sept.


ce qu’on y dit de l’article de Taillandier dans la Revue des Deux Mondes et de ses connexions
littéraires allemandes. Bartholmèss est décédé .
13

399. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Vieil ami et apôtre fidèle !

Je vous remercie cordialement pour les nouvelles que vous m’avez rapportées, surtout celle
concernant HENGSTENBERG . Ce serait dommage si les curés ne rouspétaient pas contre nous. Ce
2

qui d’ailleurs m’amuse déjà depuis un certain temps, c’est cette effronterie couplée à la ruse qui
consiste à mettre l’expression « VÉRITÉ OBJECTIVE » à la place de « dogmes de l’Église » — alors
que ces derniers sont précisément ce qu’il y a de plus subjectif, à savoir des articles de foi. Je ne
crois pas que quelqu’un accordera une quelconque importance au bavardage de ces curés, sauf
eux-mêmes précisément, quelques vieilles femmes et quelques tartuffes bien rémunérés. Mais
vous devez quand même lire le journal de Görres . 3
Alors que tous les recenseurs corrompus parlent avec respect de la correspondance entre
Fichte et Schelling, MENZEL, dans son Literaturblatt d’il y a environ 2 mois, a montré en toute
4

probité comment la crapulerie et la charlatanerie de ces lascars y étaient manifestes. Il a


également analysé l’anthropologie de Fichte en l’exposant dans toute son absurdité. De façon
générale, le journal contient beaucoup de choses bonnes, intelligentes et bien écrites. Il faut
seulement accepter les accès répétés de MONOMANIE, RELIGIEUSE s’entend. On commence alors à
se demander si ce n’est pas finalement du tartuffianisme, mais c’est tout à fait extravagant, de
quoi rire. Il est vrai que les journaux littéraires sont devenus très mauvais.
La citation dans le calendrier de Gubitz n’est pas à négliger : je la verrai ici, dès la sortie.
5

« Écris pour qu’on t’écrive », dit la Bible. Et sur ce je vous souhaite de la clarté pour vos
yeux et pour votre esprit et je demeure

Francfort s. M., le vieux


le 8 oct. 1856. Arthur Schopenhauer.
400. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mille fois merci, vieil ami, pour vos nouveaux rapports et vos copies. Vous voyez très bien
comment toute cette racaille s’efforce de me descendre à coups de plume ; or ils s’y prennent
tellement mal que cela ne saurait me nuire ; ces messieurs oublient que le public n’est plus du
tout un public qui ne m’a pas lu et qui, par conséquent, croit à leurs mensonges ; par ailleurs, ces
crapules s’imaginent pouvoir s’appuyer sur quelque AUTORITÉ qui conférerait un poids à leurs
propos : aucunement ! Weisse veut faire de moi un schellingien , il croit que grâce à quelque
2

combinaison futée, assis à mon bureau, la plume dans la gueule, j’aurais fabriqué ma philosophie
à partir du spinozisme réchauffé de Schelling, grâce à une extraction chimique pour ainsi dire !
Autant essayer d’obtenir de l’or à partir de fumier. On va se moquer de lui. Et mon « manque de
bonté » ! Celui-ci consiste surtout dans le fait que j’ai refusé sa visite . J’ai lu tout cela dans la
3

Protestantische Kirchenzeitung, ici même. Et encore ce Fricke : d’abord, il s’adresse à moi


4

comme à un païen et un non-chrétien (ceci incitera plutôt certains à me lire) ; ensuite il conteste
mon originalité, me déclare hégélien ou Dieu sait quoi ; il cite une fois de plus le passage de
Schelling ; mais j’ai pris mes précautions dans Parerga, I, p. 124 . Ensuite il me fait quelques
5 6

éloges — pour ne pas prostituer son jugement et son goût. Et le public ne remarquerait pas qu’à
travers ces hommes parle en fait la jalousie et la haine du Bien et l’angoisse quant à leur
philosophie de tisserand ? Voltaire a raison de dire que « ces gens-là servent à répandre votre
renommée* ».
Le galimatias de la Westminster Review m’a vraiment irrité ; c’est une composition
7

incomparable de mensonges et d’absurdités. Je ne pense pas qu’Oxenford en soit l’auteur ;


autrement, il aurait dû oublier tout ce qu’il a dit lui-même à mon sujet, ou alors il était un peu
éméché cette fois-ci.
Si je ne me trompe pas complètement, c’est Bona Meyer qui a publié, il y a quelques
8

années, un livre sur la zoologie d’Aristote où il me cite à plusieurs reprises, en m’utilisant


comme une autorité zoologique et en discutant également mes propos. Vous l’appelez un « jeune
homme intelligent » — c’est bien possible, mais je vous préviens que c’est un gaillard superficiel
; en témoigne le passage que vous avez recopié : la conclusion de ce passage c’est que
9

moralement, c’est l’acte physique qui compte, peu importe à partir de quels motifs il s’effectue
(ce faisant, il se cache derrière ce mot mal choisi et équivoque* qu’est AIMER) : or chez lui, il en
va ainsi : Titus a faim ; je lui viens en aide : cela revient alors au même que je le fasse par pitié et
générosité ou en me référant au noble principe (très prisé chez les jeunes hommes intelligents) du
« une main lave l’autre » : si seulement Titus peut se remplir la panse, c’est la seule chose qui
importe, voilà le côté RÉEL de l’affaire. Voyez-vous, c’est cela le réalisme bas et infâme, celui-là
même que j’évoque dans Parerga, II, § 109. Vous devriez avoir honte de vous faire louer par un
pareil lascar, et ce parce que vous avez parlé de concert avec lui, en excusant la morale des
matérialistes . La morale des matérialistes français est un tissu de sophismes grossiers. Helvétius
10

excelle dans les choses intellectuelles — De l’esprit ; il est mauvais dans les choses morales —
De l’homme. Ma philosophie est profonde, mais elle est aussi altière : ne l’oubliez pas. À présent
vous passez pour mon disciple primordial, mon évangéliste principal, et gloire vous en reviendra,
mais cessez donc de vaciller comme un feu follet !
Qu’il marche donc droit, au nom du diable,
Ou je lui souffle sa vie vacillante .
11

Je veux que vous me fassiez honneur, et non le contraire : que je n’en arrive pas au point où
je dois dire ce que Voltaire attribue à Spinoza : « J’ai de plats écoliers et de mauvais critiques*.
» Abandonnez donc le diable, c’est-à-dire la morale matérialiste, et même toute tolérance à
l’égard de cette dernière, et restez-en à ce lapsus. Il est déjà suffisamment insensé qu’on
m’oppose à vous, en première page du journal de Görres : voilà où vous en êtes arrivé. « Bien
12

rugi, lion ! » Passons. Mais d’abord je vous conseille sérieusement de relire mon écrit couronné
13

sur le fondement de la morale, ainsi que le livre 4 (du Monde comme volonté et représentation),
en guise de medicina mentis absolument nécessaire . 14

Continuons donc. Dans le calendrier de Gubitz se trouve seulement un petit passage de moi,
et de plus celui-ci est totalement défiguré, non seulement en ce qui concerne les mots, mais aussi
le sens. La liberté avec laquelle, de nos jours, on utilise les citations, est tout à fait incroyable.
L’original de ce passage se trouve dans mon ouvrage principal, II, p. 178, 179.
Dans le Narrenwelt de Gutzkow , on trouve son vieil article du Küchenheerd , sur les
15 16

Parerga. Il s’en est apparemment inspiré pour l’ensemble de ses trois volumes ; le public doit
donc se contenter d’un plat réchauffé : et il a 5 000 abonnés ! Et Julian Schmidt, une 3 édition
e 17

après 9 mois, et les Lettres de Humboldt à son amie , 6 éditions : voilà ce qu’est le public
18

allemand ! Les Literarische Unterhaltungsblätter sont de plus en plus mauvais : Zeising sur
Lazarus — la racaille étale son galimatias sans même connaître ce que j’ai écrit sur l’humour,
19
l’honneur et la gloire. Les louanges de ce qui est mauvais ne manqueront pas de revenir vers le
louangeur : soyez-en sûr.
J’ai oublié de vous dire que dans votre dernier livre, vous auriez dû citer ce que j’ai dit à la
fin de la préface de mon De la vision et des couleurs.
La lettre ci-jointe d’un ouvrier a une certaine importance : elle confirme la prophétie de
20

Weigelt, à savoir que ma philosophie pénétrera le peuple ; même si cet homme est une exception.
Je lui ai répondu avec bienveillance en lui donnant les renseignements souhaités, et je lui ai
surtout conseillé la nouvelle édition de THEOLOGIA DEUTSCH, que je vous conseille également de
lire, soit dit en passant et pour la deuxième fois, car vous ne l’avez pas encore lue à n’en point
douter : vous préférez les produits de ce Bona Meyer. Mais cela serait une bonne cure en
complément de la medicina mentis mentionnée plus haut.
Dans les Heidelberger Jahrbücher, septembre, Cornill a recensé quelques matérialistes, en
livrant un galimatias confus et ennuyeux au possible. Ce personnage est tout à fait ignorant : il
parle continuellement d’idéalisme quand il veut dire spiritualisme — comme la plupart le font à
présent. J’aimerais beaucoup que vous profitiez de telle ou telle polémique pour dire à tous ces
ignorants, de façon claire et nette, CE QUE SONT L’IDÉALISME ET LE SPIRITUALISME , à savoir deux
choses tout à fait différentes qui, DIRECTEMENT, n’ont rien en commun. Faites-le ! C’est une
parole qui arrivera au moment opportun.
Le peintre le plus célèbre de la ville est actuellement Göbel , grâce à l’exposition au début
21

de cette année du portrait d’une vieille paysanne qui lit dans un livre de cantiques, et qui bouge
ses lèvres, comme on peut le voir nettement. Cela a provoqué beaucoup de bruit et d’excitation
journalistique. Il y a 3 semaines, il m’a proposé de faire mon portrait, ce que j’ai accepté bien
volontiers. Mais en ce moment il est souffrant, atteint de scrofule. Je vais avoir droit à un vrai
portrait !
Et sur ce, nous prions le ciel, Tien, de bien vouloir vous prendre sous sa protection toute-
puissante.

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 31 oct. 1856.
401. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Docteur Asher,

Veuillez recevoir mes remerciements chaleureux pour m’avoir fait part de la nouvelle , que 2

je ne connaissais pas encore. La chose me réjouit, même si je sais que dans l’ensemble, un
candidatus theologiae ne saurait être d’accord avec ma philosophie. Je souhaite et j’espère que
ces travaux seront imprimés.
Vous avez encore été en Angleterre ! Ah ! Quand on est jeune ! Avant toute chose, je
voudrais vous assurer après coup que malgré le nombre considérable d’écrits portant sur ma
philosophie, personne n’a encore exposé son mérite fondamental de manière aussi claire et
déterminée que vous, dans votre article sur ma musique, p. 190, 191 . Ce ne sont pas là des
3

flatteries, mais l’aride vérité qui m’a parue tout à fait évidente en vous relisant. Je crains
seulement que la diffusion du journal ne soit un peu limitée.
Je vois avec plaisir que vous avez écrit un article sur la question de la priorité . J’ai écrit ce
4

que j’en pensais dans les Parerga, tome I, p. 124, 125 et j’espère que vous en avez tenu compte . 5

Si ce n’est pas le cas, il est peut-être encore temps de le faire. C’est précisément maintenant,
alors qu’on s’efforce partout de me descendre à coups de plume, qu’on a encore tenté de
m’opposer cette priorité schellingienne, malgré le fait que dans son Histoire de la littérature
allemande, Hillebrand ait déjà souligné l’injustice de ce reproche. Et tout récemment, un certain
6

théologien Fricke , dans les Blätter für literarische Unterhaltung, a essayé de me dénigrer par
7

tous les moyens imaginables, en mettant sur le marché, une fois de plus, ce passage schellingien
censé être à l’origine de toute mon inspiration. De même Weisse qui, dans ce même journal , 8

dans la recension de la nouvelle édition des œuvres de Schelling, m’a déjà reproché ma clarté, se
réfère à moi dans la Protestantische Kirchenzeitung , n 38, en disant beaucoup de mal de moi et
9 o

en me faisant même passer pour schellingien. Or, la source de son ressentiment, c’est qu’en
automne, il y a deux ans, il m’avait rendu visite et que j’avais refusé de le recevoir. Lgmim aeide
Hea ! C’est sans doute aussi la raison pour laquelle il me reproche mon « manque de bonté ».
10

Le livre de Cornill n’est aucunement malveillant : il dit même du bien de moi. Mais ce cher
monsieur n’a rien appris et il ne comprend donc pas grand-chose. Il n’a pas du tout assimilé la
philosophie kantienne, il parle par conséquent comme un réaliste innocent et naïf, et lorsqu’il
rencontre chez moi des problèmes qu’il ne peut ni saisir ni recomposer, ce qui ne manque pas de
se produire, il croit déceler des contradictions, en s’appuyant sur des passages arrachés par-ci
par-là. Reprocher des contradictions à un auteur, c’est laisser entendre qu’il est un sot qui ne sait
pas de quoi il parle. C’est pourquoi il ne faudrait jamais prétendre et affirmer qu’il y a
contradiction avant d’avoir épuisé toute possibilité d’explicitation des choses. Mon extrême
rigueur a toujours fait l’objet d’éloges. Lorsqu’il aura appris ce qu’il faut, les contradictions
disparaîtront toutes seules.
Concernant votre trouvaille hébraïque , je voudrais vous en fournir un parallèle. En 1855,
11

j’ai lu dans le Times les propos suivants de Max Müller (soit dans son introduction au Rig-Veda
12

dont il a publié le texte, avec des notes, en 1854, soit dans son small essay, comme dit le Times,
On the Veda & the Zend-Avesta) : « Brahm means originally force, will, wish, & the propulsive
power of creation . »
13

Le libraire Frisch, le successeur d’Artaria, s’est donné une peine incroyable pour me trouver
ce small essay, mais il n’en existe pas de tiré à part, on le trouve seulement dans le Hippolytus
anglais de Bunsen — auquel je n’ai pas accès. Vous aurez de meilleures chances de le trouver
14

là-bas que moi dans mon Abdère. Make the best of it . Cela fait également penser à l’italien
15

bramare, « désirer fortement ».


Francfort s. M., Avec mes meilleures
le 12 nov. 1856. salutations
votre serviteur dévoué
Arthur Schopenhauer.
402. À EDUARD CRÜGER 1

Très cher Monsieur le conseiller secret !

Enfin vous avez tenu parole ! Même si c’est presque 15 mois après votre promesse. Je vous
avoue que, surtout ces derniers temps, je ne savais parfois pas quoi en penser. Mais à présent je
comprends qu’il vous était forcément difficile de vous séparer d’un tel trésor. Car c’est un
véritable joyau. J’ai tout déchiffré. Les pensées et le style sont éminemment kantiens, et le
manuscrit est autographe, et non une copie. Veuillez donc recevoir mes remerciements les plus
obligeants pour cette relique sacrée qui a certes trouvé chez moi une place digne. Je la ferai
joliment relier, et ces prochains jours je descellerai également mon testament pour vous la
2

léguer. Mais ne croyez pas qu’elle vous reviendra très rapidement, même si en février j’entre
dans ma 70 année : vous avez laissé entendre quelque chose concernant mon voyage à venir
e

dans le monde des esprits, mais je suis loin d’être préparé à partir, les esprits devront attendre.
Vous vous rappelez sans doute le célèbre portrait de Göbel : une vieille paysanne qui lit
dans un livre de cantiques et qui de toute évidence bouge ses lèvres. Ce maître m’a proposé de
réaliser mon portrait à ses frais : ce que j’ai aussitôt accepté. Il voulait tout de suite s’y mettre,
mais tout à coup il a eu beaucoup à faire, et les commandes sont prioritaires. Mais quel portrait
ce sera !
Je me réjouis d’apprendre que vous êtes autant à l’aise dans votre deuxième mariage que
dans votre premier : il y a des personnes qui doivent absolument être mariées, et d’autres, comme
moi, qui n’ont aucune vocation à cela. Eh bien, praxis est multiplex.
Merseburg doit être à présent un petit coin tout à fait respectable, et les fonctionnaires y
sultanisent encore mieux que dans la résidence.
Je vous prie de bien vouloir me recommander à Madame votre épouse et de lui dire qu’elle
ne doit pas croire tout ce que vous lui racontez à mon sujet.
Le Bouddha vous salue depuis sa console et vous donne sa bénédiction ; car vous l’avez
sauvé d’un emprisonnement de plus de 100 ans, livré aux mains des incroyants, en l’amenant là
où l’attendaient la vénération et le dorage.
En vous remerciant encore de tout cœur pour ces deux pièces primordiales et splendides, je
demeure avec mon plus haut respect

Francfort votre
le 29 nov. serviteur dévoué
1856. Arthur Schopenhauer.
403. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher,

Je vous remercie cordialement pour vos nouveaux envois, qui m’intéressent beaucoup, et je
recevrai toujours avec plaisir d’autres choses semblables (vous ne devez rien affranchir). Je suis
très satisfait de votre article dans les Litt. Blätter , mais je ne saurais éviter de vous faire quelques
2

petites remarques.
1) J’aurais souhaité que vous indiquiez que tout ce que Schelling a dit depuis 1818, dans des
conférences ou ailleurs, se trouve DERRIÈRE moi, c’est-à-dire est arrivé APRÈS moi ; car mon
ouvrage principal, première édition, a paru en nov. 1818, sous l’année 1819. Seul son traité sur la
liberté, 1809, vient AVANT moi.
2) Chez Weiss, vous n’avez précisément pas blâmé ce que je vous avais fait remarquer, à
savoir qu’il désapprouve et se moque franchement de la clarté de mon mode d’exposition : il
pense que cela demande peu d’efforts pour être compris, et que cette popularité serait à l’origine
de mon succès. C’est là qu’il tombe dans cette inconvenance que raille l’Espagnol Iriarte, dans
la 42 de ses excellentes Fábulas literarias , uniques en leur genre, exprimant ainsi la morale de
e 3

l’histoire :
Si ; que hai quien tiene la hinchazon por mérito,
Y el hablar liso y llano por démerito.

(« Oui, il y a des gens qui tiennent l’enflure pour un mérite, et le discours simple et lisse
pour une faute. »)
Weiss a écrit sa critique dans une note de bas de page que vous n’avez peut-être pas vue. Si
vous deviez encore trouver l’occasion de le rosser un peu en le saupoudrant du poivre espagnol
sus-mentionné, cela me réjouirait beaucoup.
Le destinataire de l’accessit est vraisemblablement le fils de ce professeur (à l’Académie
des beaux-arts de Dresde) qui est un très fervent disciple de ma philosophie, et m’a déjà rendu
visite 2 fois en été. L’été dernier son fils, étudiant à Leipzig puis à Heidelberg, est également
venu et m’a dit qu’il voulait répondre à la question mise au concours. Or il est stud. juris (si je ne
m’abuse), alors que sur le programme est écrit stud. phil. Le jeune homme est malheureusement
très mal bâti, mais cela le rend d’autant plus reconnaissable, pour lui poser la question. C’est SA
réponse que je voudrais voir imprimée ; car elle est certainement comme le contre-poison de
celle de Seidl, dont je devine le contenu en apprenant que Weiss se charge de la faire éditer . 4

J’espère voir bientôt votre 2 morceau de musique dans les Anregungen, à condition que
e

vous n’ayez pas exigé d’honoraires d’un journal qui vacille encore sur des jambes d’enfant.
Loin de condamner vos fiançailles, à supposer que votre situation corresponde à ce projet, je
trouve cela plutôt convenable et vous souhaite du bonheur pour cela et après
Francfort s. M. votre sincèrement dévoué
le 15 déc. Artur Schopenhauer.
1856.
404. À JULIUS BAHNSEN 1

Très cher Monsieur le D Bahnsen,


r

Je me réjouis de votre intérêt persistant pour ma philosophie et de votre activité apostolique


pour la répandre. Cependant, je vous prierais d’abandonner votre projet de faire des copies de la
correspondance en question , car ce n’est pas volontiers que je verrais une démultiplication de
2

cette dernière ; parce qu’une copie engendre une nouvelle copie qui finalement tombe entre les
mains de quelqu’un qui la vend à un éditeur et la fait imprimer, ce que je ne veux pas, car il
s’agit de lettres jetées sur le papier sans préméditation ni soin. D’ailleurs, vous ne perdez
assurément pas grand-chose : ces lettres ne contiennent pas de nouvelles pensées, que je ne
gaspille pas dans des correspondances privées ; il s’agit d’une controverse minutieuse portant sur
des points précis, avec Monsieur Becker, qui prenait un certain plaisir à développer longuement
les choses.
J’espère fermement que votre demande auprès du ministère sera couronnée de succès ; car
3

je ne puis croire qu’on s’en tienne à une barbarie aussi brutale. C’est avec cet espoir que je
demeure avec mes salutations les meilleures

Francfort s. M. votre
le 22 déc. dévoué
1856. Arthur Schopenhauer.

405. À CARL G. BÄHR 1

Très cher Monsieur Bähr !

Veuillez recevoir mes chaleureux remerciements pour la rédaction et l’envoi de votre écrit . 2

J’ai lu ce dernier à 2 reprises, avec la plus grande attention, et non seulement il a largement
surpassé toutes mes attentes, mais il a également suscité en moi étonnement et admiration. Cette
maturité de l’esprit, de la réflexion, du jugement, cette assurance dans la rédaction et la profonde
compréhension aussi bien de la philosophie kantienne que de la mienne, sont phénoménales, en
considérant votre âge (je pense 22 ans). Personne n’attribuera cet ouvrage à un jeune homme,
mais plutôt à un homme très mûr d’au moins 40 ans. Vous avez en vous plus de philosophie
kantienne que 6 professeurs réunis. Vous n’avez donc pas mentionné l’origine de cet écrit (peut-
être d’après le conseil de l’éditeur), afin que votre jeunesse ne provoque pas de préjugés
défavorables. Recte.
Ce qui me réjouit tout particulièrement, c’est que vous avez compris ma philosophie en lien
étroit avec la philosophie kantienne, comme un tout : voilà qui est juste. Contrairement à tous les
autres qui ont écrit sur ma philosophie (excepté Weigelt, en partie), vous n’avez pas utilisé mes
mots pour rendre mes pensées, mais vous parlez une tout autre langue que moi, et vous présentez
la doctrine d’une manière et dans un ordre tout différents ; car vous avez précisément assimilé
ma philosophie en la digérant comme il faut, ce qui vous permet de la reproduire librement.
Voilà pourquoi c’est ce qu’il y a de plus profond et fondamental parmi tout ce qu’on a jamais pu
en dire. Votre exposé est abstrait, aride et difficile, intelligible pour celui qui connaît l’affaire,
mais difficilement compréhensible pour le novice. Il trouvera particulièrement obscur votre
déduction de la chose en soi, qui ne m’a pas éclairé non plus et qui d’ailleurs me semble être
incorrecte. Vous identifiez PERCEPTION et SENSATION : cela va à l’encontre de l’usage courant qui,
sur ce point, est très pertinent ; car nous percevons seulement des OBJETS, c’est-à-dire que nous
en avons une connaissance RÉELLE : la perception est donc identique à l’INTUITION. Mais le seul
pont qui puisse nous mener de la sensation à quelque chose qui nous est extérieur est la loi de
causalité, et celle-ci est d’origine CÉRÉBRALE, comme la sensation est d’origine SENSUELLE. La
porte est donc fermée et le pont relevé : ce n’est que par une trahison de l’intérieur que la
forteresse peut être conquise, ut dixi. Je ne saurais donc accepter votre résumé* p. 98. Mais je me
réjouis de lire à nouveau des discussions détaillées sur la chose en soi, comme dans les années
90. C’est que j’ai remis la chose sur ses rails. À Iéna, Kuno Fischer relit également la
philosophie kantienne. Dans le paragraphe p. 93-94, vous avez fait une remarque profondément
réfléchie . Le parallèle, que vous démontrez p. 145, entre la démarche de Kant et la mienne est
3 4

très pertinent et très perspicace ; p. 125 & 128, remarque très juste et perspicace sur le « substrat 5

». De façon générale, j’ai souligné beaucoup de passages que j’ai lus avec surprise et avec une
grande approbation : il serait trop long de tous les discuter. J’aimerais à présent citer des choses
que je n’approuve pas tout à fait, mais je n’ai absolument pas trouvé de points à blâmer
sévèrement. Ce que p. 20 vous décrivez comme « présence immédiate » de la représentation
diffère au moins de ce que j’entends par là dans la Quadruple Racine, § 19, p. 118, « c’est ainsi
qu’on regrette l’absence » — est un reproche très injuste : je suis le premier à avoir souligné et
décrit avec concision la différence entre représentation abstraite et intuitive. À cela s’ajoute que
les concepts, en tant que matière des jugements, précèdent ces derniers. J’oppose à votre
argumentation contre moi , p. 122-125, le Monde comme volonté et représentation, tome 2, p.
6

273 , et ensuite Parerga, tome 2, § 64 & p. 233, 234 .


7 8

Votre livre, qui est la première discussion fondamentale de ma doctrine, pourrait très bien
contribuer à la propagation de cette dernière, si seulement il était moins difficile à comprendre.
En tout cas il est encourageant de constater qu’il y a encore des têtes de votre trempe, qui de
surcroît me comprennent entièrement. Je suis avide de voir le livre de Seydel : mais je parie qu’il
sera infiniment inférieur au vôtre, et que sa victoire s’explique à partir de ce que j’ai dit dans le 2
e

tome de mon ouvrage principal chap. 19, à la fin du § 7.


Si je considère de surcroît que vous êtes juriste, et que vous avez donc étudié la philosophie
de façon annexe, mon admiration devant ce que vous avez accompli grandit encore.
Je vous remercie de vous être enquis de mon accident dans une lettre à Lunteschütz ;
9

l’affaire s’est bien passée : je n’ai dû garder la chambre que pendant 3 jours et me promener 3
semaines avec le pansement sur le front.
La copie de mon portrait par Lunteschütz se trouve encadrée depuis 6 mois, dans l’atelier, et
il n’attend plus que quelques traits de pinceau. Pigritia ! Cette semaine, Göbel, un peintre
10

fameux de cette ville, tout à fait excellent, commence mon portrait, dont j’attends beaucoup et je
pose volontiers pour lui.
Macte virtute tua ! Avec gratitude et amitié
11

Francfort s. M. votre
le 1 mars
er
Arthur Schopenhauer.
1857
406. À JULIUS BAHNSEN 1

Mes remerciements chaleureux, mon cher Monsieur le Docteur Bahnsen, pour votre très
bon article sur mes considérations mathématiques , et je lui souhaite une très grande diffusion.
2

Mais je regrette une chose, et vous allez en faire de même, c’est que vous ayez ignoré les
Contributions à un développement systématique de la géométrie à partir de l’intuition par C. R.
Kosack, professeur de mathématique et de physique au Lycée de NORDHAUSEN. Elles se
trouvent dans le programme de ce lycée pour l’examen officiel du 6 avril 1852, elles remplissent
30 grandes pages 4 accompagnées d’un tableau avec 22 figures qui servent toutes à démontrer
o

des théorèmes géométriques, à partir de l’intuition, selon ma méthode. Cet homme s’appuie
entièrement sur moi, en suivant sérieusement ma méthode, pour mon plus grand plaisir. Comme
tous les lycées allemands s’envoient leurs programmes, comme les y oblige une convention,
celui-ci doit également se trouver à Hambourg et à Altona, et j’espère que vous essayerez de
l’obtenir. Cela pourrait donner matière à un article supplémentaire dans le journal d’école de
Holstein : car il s’agit de quelque chose de très réussi, selon un genre et une manière encore peu
utilisés.
Tous mes remerciements pour vos marques de sympathie à l’occasion de mon anniversaire,
et pour toutes les choses exaltantes que vous m’avez dites à cette occasion ; ainsi que pour vos
notes. La question sur ma philosophie mise au concours à Leipzig a été résolue, le prix a été
attribué à un certain Monsieur Seydel, lui permettant en même temps d’obtenir le grade de
docteur, car son écrit est dirigé CONTRE moi : il sera publié prochainement. Mais c’est le
studiosus C. G. Bähr qui a obtenu l’accessit : son écrit La Philosophie schopenhauérienne dans
ses traits fondamentaux vient de paraître et il est tellement excellent que je n’arrive pas à
comprendre comment un jeune homme peut en être l’auteur : c’est ce qu’il y a de plus profond et
de fondamental parmi tout ce qui a jamais été dit sur moi. Dans la Revue française, on a traduit
le chapitre sur le magnétisme animal et la magie de la Volonté dans la nature : mon affaire
3

avance à présent.
J’espère que vous aurez reçu un avis favorable du ministère, car je suis persuadé qu’on avait
seulement l’intention de vous intimider fortement afin de vous empêcher de récidiver. Avec le
souhait cordial qu’il en soit bien ainsi,

Francfort s. M. votre
le 2 mars sincèrement dévoué
1857. Arthur Schopenhauer.
407. À FREDERIK WILLEM
VAN EEDEN 1

Très honoré Monsieur van Eeden,

Votre cher courrier m’a fort réjoui, d’abord en raison de votre vif intérêt pour ma
philosophie, d’autant plus qu’il vient de l’étranger, et ensuite parce que je suis d’origine
hollandaise, ce dont témoigne déjà mon nom, car en allemand, il ne peut pas y avoir de P isolé
entre deux voyelles. Mon grand-père est né en Hollande, mais il est venu très tôt à Dantzig , où il
2

a épousé la fille de Monsieur Soermans , résident hollandais dans cette ville qui était alors encore
3

libre : je possède toujours le buste en ivoire, finement travaillé, de ce Soermans. Mon père,
Heinrich Floris, parlait encore très bien le hollandais ; moi pas du tout. À ma connaissance,
personne ne porte ce nom en Allemagne , mais on doit encore en trouver en Hollande ; ce que
4

l’on devrait pouvoir vérifier dans des livrets d’adresses. J’ai été moi-même en Hollande en 1803,
en mai, avec mes parents, lors d’un grand voyage. D’Amsterdam nous avons également rejoint
Haarlem , ce dont je me souviens parfaitement : dans une auberge, mon père fit l’éloge du
5

Baarsje met een Watersoutje : nous vîmes ensuite la mer de Haarlem, la belle maison de
campagne blanche de M. Hope , et dans la région une petite forêt, où chantaient les rossignols,
6

suite à quoi notre accompagnateur amsteldamois, M. Schluiter, ne manqua pas de nous faire
remarquer à quel point les Allemands avaient tort d’appeler les grenouilles des rossignols
hollandais. Et aussi les hyacinthes en fleur chez les jardiniers. À Gorcum, mon père m’amena
dans une vieille église gothique pour me montrer des portraits de mes ancêtres, c’est-à-dire de
7

plusieurs Soermans , qui y furent prédicateurs, accrochés aux piliers, avec des barbiches. Ma
8

mère, devenue plus tard une romancière célèbre, a décrit ce voyage, en 3 volumes. C’est une
bonne chose que par votre intermédiaire, je puisse me faire connaître en Hollande, ce pays où ont
vécu mes prédécesseurs, Descartes et Spinoza. Avec moi, la lignée s’éteint : par coïncidence,
votre lettre a été écrite à mon 69 anniversaire, le 22 févr.
e

Venons-en maintenant à votre question. On peut se procurer mon portrait partout, avec
facilité […] Demain, un peintre célèbre de cette ville, Göbel, va commencer mon portrait à
l’huile, à ses frais. J’attends de lui quelque chose d’extraordinaire. Or, c’est un grand réaliste, et
il rend la nature avec une fidélité impitoyable, mais il fait dans le VRAI, tout comme les vieux
maîtres hollandais. Il pense ensuite en faire une gravure lui-même. Mon éditeur d’ici, Suchsland,
a l’intention de sélectionner le graveur sur cuivre le plus habile de MUNICH, pour faire réaliser
mon portrait en 8 , comme pendant exact à une célèbre gravure sur cuivre de Kant par Barth qui a
o

été ajoutée à l’édition de Rosenkranz des œuvres de Kant : le choix du modèle n’a pas encore été
fixé.
Il semble que vous ne connaissiez pas encore mes Parerga, le plus populaire de mes écrits.
En me recommandant à votre aimable souvenir

Francfort s. M. votre
le 4 mars serviteur dévoué
1857. Arthur Schopenhauer.
408. À DAVID ASHER 1

Mes chaleureux remerciements, mon cher Monsieur le Dr. Asher, pour votre beau et
glorieux poème ! Il m’a été remis par le même jeune homme qui m’a apporté votre carte de
2

vœux le jour de mon anniversaire. Il m’a également lu votre lettre. Que le Dr. Sattler n’ait pas
3

voulu imprimer le poème, parce qu’il serait « trop polémique », prouve que c’est un philistin : le
poème ne fait de polémique directe avec personne, il déplore seulement l’injustice faite à mon
encontre, en s’en tenant entièrement à des généralités. Si tout le monde était aussi pénible, nous
n’aurions pas d’Aristophane, ni de Perse, ni de Rabener, ni de Xenien de Goethe, etc. C’est un
philistin fondamental : put him down as such . J’ai reçu (en février) un autre poème pour mon
4 5

anniversaire, assez bon, d’une main inconnue, avec un magnifique bouquet de fleurs, et d’autres
signes de sympathie, proches ou lointains, par ex. un article sur mes doctrines géométriques par
le Dr. Bahnsen, imprimé exprès le 21 février dans le journal d’école de Holstein, Schleswig et
Lauenbourg ; une lettre de Haarlem en Hollande, qui demande mon portrait, ne connaissant pas
celui existant. Actuellement, deux peintres me peignent en même temps, pendant la même
séance, Lunteschütz, qui achève son 2 portrait, et Göbel, le plus célèbre et le meilleur peintre de
e

cette ville. Tout cela sera ensuite gravé. On estime qu’il est temps, parce que je suis dans ma 70 e

année. Mais il y a encore du chemin : je regorge de force et de santé.


Je me réjouis de voir que vous avez mis votre 2 article dans les Anregungen, je regrette
e 6

seulement qu’il soit court. Le livre de Bähr, par-delà toutes les attentes, est bon, excellent ;
incompréhensible qu’un homme si jeune en soit l’auteur. Il a fondamentalement compris et
assimilé Kant et moi. Je suis avide de voir le livre de Seydel : il hésite ; peut-être craint-il qu’à
cause de l’ouvrage de Bähr, le jugement du public ne soit différent de celui de la Faculté, pour
laquelle il était suffisant qu’il soit dirigé CONTRE MOI :
Allons ! Monsieur le Docteur Nouveau,
Sortez votre plumeau ! 7
Dans tous les cas, il sera inférieur à celui de Bähr.

Francfort s. M. Salutations cordiales !


le 16 mars Arthur Schopenhauer.
1857.

409. À ADAM VON DOSS 1

Mon cher et fidèle Monsieur von Doss !

Veuillez recevoir mes remerciements pour vos vœux retardés par le destin, et encore
davantage pour vos recherches sinologiques qui me sont très utiles, et dont je considère le
2

sacrifice de temps comme un cadeau, venant de quelqu’un qui en a peu. Le passage que vous
avez trouvé provient certainement de la même source que ma citation et je pense le citer à coup
sûr s’il y a une 3 éd. de la Volonté dans la nature. Mais je crois qu’en copiant, vous avec
e

commis une faute importante. Car vous écrivez : « Heaven makes the mind of mankind its
minds : in MUST ancient discussions respecting heaven, its mind, or will, was DIVINED from, &c . » a

À n’en point douter, most se trouve à la place de must : cela ne fait rien ; mais très probablement
faut-il lire DERIVED à la place de divined, ce qui est important, car cela correspond au deductible
dans le passage que je cite. Je sais de ma propre expérience combien il est facile de se tromper en
lisant, par distraction et hâte. Par conséquent, vous me rendriez un grand service si vous pouviez
vérifier ce mot. Les bibliothécaires, s’ils sont dignes de ce nom, s’empresseront de vous ressortir
le volume avec ardeur, si vous dites que c’est pour moi que vous menez ces recherches : car
l’époque est terminée où l’on pouvait encore demander quis ille ? Pour preuve, le recteur von
3

Lasaulx n’a pas manqué de me faire parvenir son discours inaugural , dans un exemplaire de luxe
4

avec dorures, alors que je ne le connaissais pas personnellement. Si (en passant) vous avez
l’occasion de lui parler, je vous prie de bien vouloir l’en remercier de ma part.
Ce Barthélemy-Saint-Hilaire est un obscurantiste vénal et abject que j’avais déjà décrit
5

comme tel dans la préface de la Volonté dans la nature, p. XI. Je viens tout juste de recevoir Du
Nirvana indien, par Obry , 1856, et je vois que cet écrit est dirigé contre lui, mais de façon
6

beaucoup trop pacifique, conformément à cette regrettable politesse française. D’ailleurs j’y ai
juste jeté un œil, je dois encore le regarder de plus près. Pour l’instant, je n’ai lu que le livre I du
Kural qui contient beaucoup de bonnes choses, avec l’expression la plus nette du dogme
7

fondamental de toutes les religions de l’Inde. C’est par hasard qu’un peu de puanteur juive s’y
est immiscée. Le livre II semble être beaucoup moins important, et le III même fade et
répugnant. Je dois encore regarder tout cela de plus près.
Vous êtes plutôt au courant* quant à ce qui s’écrit sur ma philosophie. Le livre de Bähr est
l’accessit de la question mise au concours à Leipzig et il est tellement excellent, avec une
profonde connaissance de la philosophie kantienne et de la mienne, écrit avec tant de maturité et
de fermeté, qu’on n’arrive pas à comprendre comment un étudiant de 22 ans a pu le rédiger, et de
surcroît un stud. juris. Mais c’est bien le cas : le jeune homme m’a rendu visite l’été dernier ;
malheureusement, il est très mal bâti. Son père, professeur à l’Acad. des beaux-arts à Dresde,
m’a déjà rendu visite à 2 reprises, l’été. Tous les deux regorgent du plus grand enthousiasme
pour ma philosophie. L’écrit couronné du Dr. Seydel est contre moi (c’est ce qui l’a aidé) et je
l’attends chaque jour : il est publié. Pour mon anniversaire, le Dr. Asher a envoyé un beau et
glorieux poème au Konversationsblatt : mais comme il y déplore l’injustice qui m’a été faite,
quoique en des termes tout à fait généraux, le Dr. Sattler l’a refusé, parce qu’il serait trop «
polémique » : c’est donc un philistin fondamental.
Vos plaintes concernant l’absence de tout loisir me touche : c’est triste. À suivre mon
penchant*, je préférerais le poste au tribunal régional, si la différence de salaire n’est pas trop
importante. Je crois que vous avez une opinion trop défavorable de la province. Votre femme
préfère sans doute être à Munich : hinc illae lacrimae . Par ailleurs, je me réjouis que vous soyez
8

si heureux avec elle : c’est un cas rare et vous devez considérer cela comme un dédommagement
du destin pour ce qui vous manque. Suchsland, mon éditeur, revient d’Iéna où il a écouté Kuno
Fischer, qui donnait des lectures sur la philosophie kantienne, en faisant mon éloge dans les
termes les plus frappants. Il a 200 auditeurs et même le souverain du Land était là.
Sur une console, dans un coin de ma chambre, est assis un AUTHENTIQUE Bouddha tibétain,
ancien d’au moins 100 ans, en bronze, récemment redoré par mes soins, haut de 1 pied. Il vous
donne sa bénédiction qui accompagne mes vœux sincères pour votre bien-être.

Francfort, le 19 mars Arthur Schopenhauer.


1857.
410. À CHRISTIAN KARL
JOSIAS BUNSEN 1

Voilà une belle initiative, mon cher et vieil ami, que de vous tourner à nouveau vers les
amis de votre jeunesse, maintenant que vous avez rejeté la splendeur et la magnificence du
monde et que vous vous êtes débarrassé de son poids et de son fardeau. Il est tout à fait naturel
qu’au V acte de la vie, on désire revoir ceux qui sont apparus au premier ; mais cela ne peut se
e

faire qu’avec très peu de personnes : vous voyez bien la strages causée par la mort ; et moi
2

encore mieux. Tenez donc parole et venez ici, même si ce n’est malheureusement que pour
quelques heures. Je suis un champignon qui s’est enraciné, par phobie du voyage — alors que le
monde est possédé par la manie de voyager. Votre fils m’apprend que même Astor a l’intention
3

de venir dans cet Orient relatif. Tous les trois, nous allons donc nous asseoir ensemble et boire
un verre au old lang syne ; les 3 étudiants de Göttingen, qui sont devenus des gaillards
4

considérables, dans les genres* les plus hétérogènes : vous avec votre distinction ; lui avec sa
richesse de Crésus ; moi avec ma sapientia. Notre relation me fait d’ailleurs un peu penser à
l’Homme du monde et le poète de Klinger.
Or à cause de mes 70 ans, vous pensez sans doute que je suis un vieillard usé, réduit aux
romans et aux fables. Que le ciel m’en préserve ! Je suis toujours un étalon du savoir et je
poursuis sans cesse ce que j’ai commencé à Göttingen. Il est vrai que je lis seulement ce dont
j’espère pouvoir extraire quelque chose pour ma ruche, donc peu de nouveautés et peu en
allemand. Par conséquent, ce n’est que partim, passim, raptim, furtim que j’ai lu vos ouvrages, à
5

savoir l’Hippolyte allemand , où j’ai constaté avec plaisir que vous vous souveniez de votre
6

séjour à Weimar en 1811 et des paroles que Goethe y a prononcées ; un peu aussi les Signes du
temps , les paradoxes historiques sur Winfried le Saxon. Je me réjouis de voir que vous êtes
7

quand même d’accord avec moi sur certains points, comme vous l’évoquez vous-même, car des
différences, il y en aura certes suffisamment : même si, à mon grand amusement, vous avez
donné un coup sur la tête de ces tartuffes ; vous n’en êtes pas moins un homme de Dieu ; quant à
8

moi, mon cas est bien mauvais : là, dans le coin de ma chambre, sur la console, est assise la
chose, joliment redorée — l’idole —, arrivée du Tibet, hélas ! Eh bien, comme vous êtes
diplomate et moi philosophe, nous réussirons à nous fréquenter en douceur. Finalement vous
rendriez même service à mon paganisme si, quand vous passerez me voir, vous ameniez le
volume de votre Hippolyte anglais, dans lequel se trouve, à ce qu’on m’a dit, un traité de Max
Müller sur le Veda, dans lequel il dérive « volonté, désir », etc., du mot brahma. Je vous
9

renverrai ensuite le volume.


Je parie que vous êtes plus heureux dans votre retraite* que jamais, beaucoup plus que
parmi les Dukes & bishops, & a brilliant entertainment of Chevalier Bunsen , comme je l’ai
10

souvent lu dans le Times. Sur ce, en espérant vous revoir très bientôt 11

Francfort votre
le 28 mars ami inchangé
1857 Arthur Schopenhauer.
411. À JULIUS BAHNSEN 1

Veuillez recevoir, cher Monsieur le Dr. Bahnsen, mes nouveaux remerciements pour la
poursuite de vos efforts visant à affermir la vérité. Votre article est très bon et pertinent, et je ne
2

trouve rien à y redire. Il laisse deviner beaucoup d’étude aussi bien de la philosophie de Kant que
de la mienne. J’ai surtout été satisfait par 2 points. D’abord que vous ayez évoqué Hamilton : 3

j’aurais aimé que vous possédiez son traité ; car il y montre comment beaucoup de
mathématiciens cités par Kühl ont en vérité parlé de façon méprisante des mathématiques
4

comme activité de l’esprit, par ex. Descartes, Pascal, et d’autres. Ensuite, que vous ayez mis le
doigt sur le point faible de Kühl : dommage que vous n’ayez pas cité l’importante phrase de Kant
: « La matière est ce qui se meut dans l’espace », dans les Premiers Principes métaphysiques de
la science de la nature .
5
Je ne connais pas de revue de pédagogie et de philosophie . Il y a suffisamment de revues
6

pédagogiques, par ex. la Zeitschrift für das Gymnasialwesen du Dr. Mützell à Berlin ; et la
7

Pädagogische Monatsschrift éd. par Löw, recteur à Magdebourg. Ces derniers pourraient peut-
8

être vous accueillir : il me semble que l’objection principale qu’on pourrait vous opposer, c’est
que cela a déjà été imprimé.
L’écrit du Dr. Seydel, qui a reçu le prix à Leipzig, n’a pas encore été publié : son mérite
principal aura été son hostilité envers moi ; Bähr a obtenu l’accessit. Le jugement du public sera
peut-être différent de celui de la Faculté. Cela prend du temps : peut-être les professeurs y sont-
ils pour quelque chose ; et trop de cuisiniers gâtent la sauce. Le souffle de la critique ne saurait
éteindre la flamme de la célébrité ; il ne fait que l’attiser.
Je me réjouis de tout cœur de l’annulation de la menace de Copenhague , tout comme je
9

l’avais prévu. Le remplaçant est certes un bien mauvais numéro : mais soyez content d’y avoir
échappé de justesse, and make the best of it.
Avec mes meilleurs vœux pour votre prospérité et votre bien-être

Francfort s. M. votre
le 2 avril dévoué
1857. Arthur Schopenhauer.
412. À ADAM VON DOSS 1

Cher Monsieur von Doss,

Je vous remercie beaucoup pour vos corrections in sinicis . Ni la maladie ni l’ennui ne me


2

poussent à voyager : vous me trouverez donc tout le temps ici, et aussi à l’Hôtel d’Angleterre,
tout in statu quo. Je me réjouirais de tout cœur de vous revoir , d’ici là et même dans 100 ans et
3

plus,

Francfort Portez-vous bien !


le 10 juin Arthur Schopenhauer.
1857.
413. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur le juge régional !

Le traité de votre fils , que je vous renvoie ci-joint, est très bon dans l’ensemble et mérite
2

assurément d’être publié. Il y a certes quelques points que je ne saurais accepter, en particulier
son « principe GÉNÉRAL de l’être », qui n’est ni chair ni poisson et qui nous rejette dans la mer
nébuleuse des généralités. Tout calcul est un compte abrégé, et tout chiffre s’enracine
uniquement dans le temps : voir le Monde comme volonté et représentation, tome 2, p. 37 . Avant
3

d’affirmer de façon aussi décidée la valeur intellectuelle des mathématiques, il devrait lire le
beau traité de W. Hamilton, que j’ai cité ibidem p. 131 . J’aurais également aimé qu’on lui
4

recommande (lui qui investit les AXIOMATA avec le terme vague et polysémique PRINCIPES
FONDAMENTAUX) la p. 122 du même ouvrage.
Je ne sais si la Schulzeitung de Holstein acceptera le traité. Il n’a qu’à essayer. Il paraît à
KIEL, rédacteur A. P. Sönsken. Le Dr. Bahnsen pourrait PEUT-ÊTRE servir de médiateur : mais il l’a
quelque peu blâmé et en général il est son rival dans cette affaire. Si cela n’aboutit pas, il faudrait
qu’il tente de l’insérer dans une revue mathématique, ou pédagogique, qui sont fort nombreuses :
on en trouve l’énumération dans le Centralblatt littéraire de l’endroit concerné. Les journaux
d’école ont le désavantage de ne sortir que très peu de leur province.
Le livre de Seydel est un ouvrage misérable et bâclé. C’est un composé de passages
5

arrachés aux endroits les plus éloignés de mes écrits, puis gauchis, défigurés, tronqués, afin de
montrer que mes ouvrages regorgent de contradictions. Relever des contradictions est la manière
la plus basse et la plus infâme de réfuter un auteur : c’est toujours possible, car dans 99 cas sur
100 cela fait illusion, puisqu’on procède de façon malhonnête. Mais les contradictions prouvent
TROP : non seulement qu’il a tort ; mais qu’il manque à la PREMIÈRE loi de la pensée, et qu’il est
donc un idiot qui ne sait pas de quoi il parle. Mais ce Seydel avait parfaitement compris sa tâche,
à savoir que ce n’était ni la vérité, ni la clarté qui importaient à la Faculté, mais uniquement le
fait de dire du mal de moi et de m’abaisser, per fas et nefas , en me frappant ou en me
6

poignardant : c’est pour cela qu’il a reçu une médaille, et un diplôme de docteur par-dessus le
marché*, et Bähr, avec son beau travail profondément réfléchi et tout à fait inconcevable pour
ses 22 ans, a été recalé. Voilà comment la Faculté gère l’argent qu’on lui a confié, sans
cependant prendre en compte le respice finem : le public de mes œuvres et de ses ennemis n’est
7

pas vulgaire au point de se laisser duper par cette affaire : le vent va tourner, contre eux et pour
ma gloire. Ce Seydel est tellement stupide qu’il va même jusqu’à faire l’éloge de mes paraboles,
en leur prêtant un sens tout à fait erroné. Vous ne possédez pas le livre ; arrêtons donc là.
Le produit optico-mathématique que vous avez joint au journal scolaire au lieu de l’envoyer
8

simpliciter sous enveloppe fermée, constitue pour moi, comme vous le dites à juste titre, un
FARDEAU ; je le trouve hautement encombrant. Il avait complètement déchiré votre enveloppe, et
votre lettre pendait au-dehors : c’est avec horreur que je pense à cette chose immonde qu’il
faudra emballer, sceller, etc. : je la laisse donc reposer jusqu’au jour où j’aurais l’occasion de
m’occuper de ce CALCUL basé sur cette hypothèse fausse, grossière et stupide des vibrations de
l’éther.
En vous saluant de tout cœur

Francfort Arthur Schopenhauer.


le 10 juin 1857.
414. À FRIEDRICH GRÄVELL 1

Très honoré Monsieur le docteur Grävell,

Veuillez recevoir mes remerciements les plus sincères pour l’exemplaire de votre écrit que
vous m’avez envoyé. Ce dernier m’a agréablement surpris, car le titre annonce déjà une prise de
parti pour Goethe.
Votre honorée visite me fera grand plaisir ; même si je n’entends pas disputer avec vous de
2

ma philosophie. Comme les étrangers sont habituellement limités dans leur temps, je ne manque
pas de vous indiquer que les horaires que j’ai fixés pour d’éventuelles visites sont de 10 à 12
heures, et également l’après-midi à 4 heures, et dans ce cas-là il est exigé que l’on ne se présente
ni trop AVANT, ni trop APRÈS 4 heures.
En demeurant avec ma plus haute considération

Francfort s. M. votre
le 28 juin serviteur dévoué
1857. Arthur Schopenhauer.

P. S. Je suis loin de voir d’un mauvais œil le fait que vous ayez cité in extenso de longs
passages de mes œuvres, je m’en réjouis bien plutôt ; car je suis persuadé que des passages cités
avec exactitude et précision ne pourront que m’amener de nouveaux lecteurs.
415. À DAVID ASHER 1

Mes chaleureux remerciements, mon cher Monsieur le Dr. Asher, pour vos nombreux et
intéressants renseignements. Pour vous consoler de votre broken down matrimonial alliance , je 2

vous recommande la lecture du chapitre a literary wife , dans D’Israeli’s Curiosities of literature,
3

vol. 2 : cela devrait en fait s’intituler On literary men’s wives .


4

Écrire un roman anglais était une entreprise bien audacieuse, car les Anglais excellent
précisément en la matière — et en plus un roman philosophico-autobiographique ! Vos plaintes à
ce sujet me rappellent ce passage du Faust :
Qui voudrait donc lire de nos jours un ouvrage
D’un contenu modérément sage ! 5

Et le suivant me rassure quant à vos épouvantables prophéties :


Et comme je broie du noir,
Le monde décline aussi .6

Le livre de Seydel est misérable au-delà de toute attente : dénicher des contradictions est la
7

procédure la plus vulgaire, utilisée par tous les crétins pour critiquer un livre et un système : ils
8

feuillettent seulement en avant et en arrière jusqu’à trouver des phrases qui, arrachées à leur
contexte, sont incompatibles. Mais cette méthode prouve TROP, à savoir que non seulement j’ai
tort, mais encore que je suis un imbécile qui ne sait pas de quoi il parle, puisqu’à chaque pas je
manque à la première loi de la pensée. Cornill s’est également engagé sur ce sentier battu où l’on
rencontre toujours de nombreuses crapules . Qui veut renverser un système philosophique doit le
9

saisir dans son intégralité, en le pénétrant profondément pour démontrer que ses pensées
fondamentales sont fausses. Mais Seydel a très bien compris sa tâche : il s’agissait uniquement
de me descendre, peu importe comment, fas & nefas . C’est justement pour cela qu’il a été
10

récompensé d’une médaille d’or et d’un diplôme, et la Faculté s’est prostituée en couronnant ce
11

gribouillage et en ignorant l’excellent livre de Bähr. Le public (qui sur ce point est déjà plus
évolué) en jugera autrement que la Faculté et remarquera l’usage qu’on fait de l’or destiné à
encourager les jeunes talents. Toute cette histoire ne fait qu’encourager encore davantage la
propagation de ma gloire. Seydel a fait preuve d’une bêtise toute particulière sur 2 points : 1) il
12

exhibe d’emblée son intention malveillante et son projet de m’abaisser ; qui lui fera alors
confiance ? 2) il fait l’éloge de l’une de mes paraboles, qu’il ne comprend même pas et qu’il
13

interprète maladroitement — comme théodicée ! Toute personne douée de bon sens la


comprendra et verra à qui il a affaire !
La nouvelle de Dantzig m’a beaucoup réjoui. Dans le Centralblatt du 11 juillet , j’ai
14 15

retrouvé presque à l’identique, mais avec plus de détails, ce que vous dites au sujet de Gabirol ; 16

de sorte que je suis porté à croire que vous êtes l’auteur de la recension. Or elle est signée B. B .,17

et autant que je sache, vous n’écrivez pas pour ce journal. Il y a en tout cas un lien avec vous.
J’aimerais voir le livre pour mesurer la portée de son accord avec moi. Mais je ne veux pas
encore le commander ; nous en entendrons sans doute encore parler : peut-être sera-t-il acheté
par la bibliothèque de cette ville. À vrai dire, tout ce qui est islamique ou hébraïque m’est
antipathique.
Je ne saurais écrire ma biographie, ni accepter qu’on le fasse : la petite esquisse rédigée
18 19

pour Erdmann, sur commande, également reproduite par Frauenstädt, et 2 autres semblables dans
le Konversations-Lexikon de Meyer à Hildburghausen et dans le Real-Lexikon de Pierer ,
20 21

suffisent amplement. Je ne voudrais pas abandonner ma vie privée à la curiosité froide et


malveillante du public.
Avec mes vœux les plus chaleureux pour le succès de la cure balnéaire

Francfort s. M., votre


le 15 juillet 1857. Arthur Schopenhauer.
416. À EDUARD CRÜGER 1

Très cher Monsieur le conseiller secret !

Votre orthodoxie et votre piété bouddhistes, derrière lesquelles vous cachez très habilement
vos envies de tabac, me semblent aussi peu crédibles que celles, chrétiennes, des évangélistes
protestants qui en ce moment même à Berlin prêchent, chantent et prient. Les plaisantins !
2

Entre-temps, je vous adresse mes félicitations pour la naissance de votre petite fille, tout en
y ajoutant mes condoléances parce que ce n’est pas un petit garçon. Eh bien, vous pouvez encore
vous rattraper ; mais il faut persévérer.
Ad Nicotianam ! L’expéditeur à Strasbourg s’appelle Hummel & Comp. Mais la
manufacture impériale* ne vend jamais moins de 10 kilogrammes, ce qui équivaut à 23 livres de
Francfort. Dans les débits de tabac*, qui vendent aussi au kilo, il est déjà faussé.
Je pourrais vous céder tout au plus 3 à 4 kilogrammes de ma réserve actuelle. Mais
seulement à condition de n’avoir rien d’autre à faire que de les remettre ici même à une personne
de votre choix, contre le versement du montant. Les 10 kilogrammes, tous frais compris, m’ont
coûté 40 fl. — cela fait donc 4 fl. par kilogr. qui est constitué par 5 paquets de 6 hexogrammes,
tous intacts dans une enveloppe* avec le cachet de la manufacture*.
En me recommandant à Madame votre épouse et en vous souhaitant santé et joie

Francfort s. M. votre
le 17 sept. 1857 serviteur dévoué
Arthur Schopenhauer.

P. S. Votre souvenir fleurit constamment en moi, évoqué chaque jour par les 2 pièces
magnifiques dont je vous suis redevable.
3

417. À G. W. KÖRBER 1

Très honoré Monsieur le docteur,

Vous ne m’êtes pas aussi inconnu que vous le pensez : votre discours de mars 1855, dans
lequel vous évoquez ma philosophie avec de grands éloges, m’a été envoyé par le Dr. Lindner de
Berlin. Votre lettre m’a cordialement réjoui : que pourrais-je en effet souhaiter davantage, sinon
qu’un homme, qui a reconnu la vérité de ma doctrine, lui prête une viva vox pour la
recommander suffisamment tôt à la nouvelle génération. Toutefois, vous n’êtes pas entièrement
isolé en cela : cet été, le prof. Knoodt à Bonn a donné 3 fois par semaine un cours, de
2

philosophia Schopenhaueriana publice, et le public était composé pour la majeure partie


d’étudiants catholiques en théologie (Knoodt est également catholique) : cela m’a été rapporté
par Neubürger , un étudiant très intelligent qui suivait lui-même ces cours. Il y a 2 ans, un certain
3

M. Ritter de Zurich est venu me dire qu’on projetait d’instituer là-bas une chaire spéciale pour
ma philosophie, en me demandant si Frauenstädt était bien la personne la plus apte pour s’en
charger. Mais cela ne semble pas pouvoir se réaliser, et le conseiller gouvernemental Sulzer, qui
s’en occupait au Conseil, est récemment décédé . Peut-être donne-t-on encore d’autres cours sur
4

ma philosophie dans d’autres universités : je n’en apprends que très peu, et le plus souvent par
hasard — dans cette ville marchande et dans ma solitude. La soif de vérité semble à présent plus
forte que jamais : ni la religion, ni l’hégélianisme, ni le matérialisme ne semblent donner
satisfaction ; par conséquent, je ne dirais certes pas que c’est ma philosophie, mais la découverte
de ma philosophie qui s’est produite au moment opportun. Vous continuez donc à œuvrer pour la
vérité : elle ne vous fera pas déshonneur.
Quant à l’élucidation de certains points qui vous semblent douteux, je ne pourrais y
procéder que si l’affaire pouvait se régler très rapidement, car je ne saurais m’engager par
courrier dans des explications philosophiques détaillées. Ce genre de choses dévore beaucoup de
temps ; or je suis dans ma 70 année : le temps presse plus que jamais, et dans le peu d’années
e

que j’ai encore devant moi, j’aimerais rassembler une dernière fois ce que j’ai encore à ajouter.
Aussi, je ne pense pas pouvoir vous donner d’élucidations que vous ne pourriez pas trouver dans
mes écrits, à condition de les lire tous avec attention, comme je l’ai exigé dans le tome 2 de mon
ouvrage principal, p. 462 . Cette exigence n’est pas exagérée ; car en rassemblant tout, mes
5

œuvres complètes ne font que 5 volumes moyens 8 . Mais j’ai dû aborder beaucoup de choses
o

dans les endroits les plus divers, souvent là où l’on ne s’y attend pas ; la cohérence l’exigeait, et
aussi le fait que mes écrits sont séparés par de longs intervalles de temps. Plus vous y plongerez
par l’étude, plus vous découvrirez la concordance complète et naturelle de toutes les parties :
c’est là la marque de la vérité.
Je vous prie de bien vouloir saluer Monsieur le Dr. Fechner et de le remercier de ma part
6

pour son cadeau. Je n’ai pas encore pu me consacrer à ces livres.


Je vous salue donc comme un nouvel apôtre de ma doctrine, et je vous souhaite de tout cœur
bien-être, joie et bonheur !

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


le 3 oct. 1857.
418. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le docteur !

Même si c’est volontiers que je vous aurais rendu service, je ne saurais m’estimer prêt à lire
et à juger un long manuscrit , ce qui est une corvée*, car je suis dans ma 70 année, c’est-à-dire à
2 e

l’âge où l’on est même dispensé de toutes corvées par la loi. Les choses imprimées et même le
courrier que j’ai devant moi dépassent déjà largement mes capacités — et maintenant encore
quelque chose d’écrit ! Le manuscrit reste donc à votre disposition. Concernant les ennuis
éditoriaux, consolez-vous avec moi qui ai proposé GRATUITEMENT à trois éditeurs le manuscrit
des PARERGA, et qui ai été refusé ; suite à quoi Frauenstädt l’a remis à Hain, et gratuitement.
En me fiant à votre article dans les Blätter für lit. Unt ., j’ai fait venir et j’ai lu le Gabirol :
3

c’est un livre horriblement ennuyeux — ce qui tient principalement au fait que l’on ne sait jamais
très bien de quoi il parle vraiment, car il poursuit toujours ses propres entia rationis . Mais il est
4

vrai qu’il peut être considéré comme mon prédécesseur, car il enseigne que partout la volonté
est, agit et fait tout ; avec cela, il arrive aussi au bout de son savoir, car il ne l’enseigne qu’ in
abstracto en le répétant 1 000 fois. Il est à ma personne ce qu’est au soleil un ver luisant dans
une nuit voilée d’épais brouillards. Néanmoins, il a quand même eu une intuition juste, même p.
7 : l’existence du monde objectif n’est que dans la connaissance du sujet ; seulement, il reste
dans la torpeur et le dénuement. C’est bien entendu à mettre au compte de son époque et de sa
situation : et ensuite, les deux traductions le rendent plus faible.
5

Jamais je n’aurais l’idée de lire les mythologies de Schelling. Seyerlen ?? Articles ? qu’est-
6

ce que c’est* ?
Ma philosophie se propage : le prof. Knoodt à Bonn et le Dr. Körber à Breslau lui ont
spécialement consacré quelques cours, en été. J’ai eu beaucoup de visites cet été, dont 2 Russes
de Moscou et de Pétersbourg , 2 Suédois dont un d’Uppsala , un émissaire royal et un comte de
7 8

l’empire , 2 dames , et bien d’autres. Je peux juger de la propagation de ma philosophie


9 10

davantage à partir des lettres et des visites qu’à partir des choses imprimées, dont je vois sans
doute à peine la moitié.
Dans l’avant-dernier Centralblatt , la dernière mine d’une longue série posée par la colère
11

du prof. Weiss quant à mon refus de sa visite a sauté : boum ! maintenant je suis mort.
Ces bons maîtres de Leipzig ne savent pas que leur galimatias leur fait du tort : « the
engineer blown up by his own petard », Shakespeare . Récemment, j’ai encore refusé la visite
12

d’un écrivaillon et j’espère maintenant qu’il va poser des mines à la Weiss : la détonation
m’arrange bien, les dégâts retombent sur eux. Donc courage* ! messieurs les écrivaillons.
Comme vous êtes thoroughly anglicisé, vous seriez très qualifié pour traduire mes ouvrages
13

; car vous avez prouvé votre profonde compréhension de ces derniers dans l’introduction de
votre article des Anregungen. Je pense que vous ferez davantage recette avec cela qu’avec votre
roman . Comme exemple et modèle, je vous conseillerais les quelques pages qu’Oxenford a
14

traduites dans la Westminster Review, avril 1853, de sorte que j’étais quite amazed : non 15

seulement le sens, mais aussi le style, mes manières et gestes, très étonnant : comme dans un
miroir ! J’accepterais même volontiers de revoir votre traduction avant l’envoi, to prevent all
possibility of a mistake, & to see that all be right . Car je comprends l’anglais comme je
16

comprends l’allemand : en règle générale, chaque Anglais, dès le premier quart d’heure, croit
que je suis un compatriote. Think of it . 17
Je regrette que l’eau de Karlsbad n’ait pas produit son effet, et même si je ne connais pas
votre maladie, je souhaite de tout cœur votre rétablissement et une bonne santé durable,

Francfort, sincerely yours


le 22 oct. 1857. Arthur Schopenhauer.

P. S. Il y a un an a été publié : Modern German Philosophy, reprinted from the Manchester


papers, 1856, Manchester. Frisch à Mannheim, Weigel et Asher à Berlin ont affirmé qu’il était
18

ÉPUISÉ. Mais Artaria prétend qu’il est seulement épuisé à London. J’ai maintenant lancé des
recherches à Manchester. Peut-être en savez-vous quelque chose. J’espère qu’on y parle de moi :
en tout cas cela témoigne de l’intérêt existant en Angleterre pour la philosophie allemande.
419. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur et ami !

J’aimerais seulement savoir si vous êtes en vie et bien-portant, car vous avez été confronté
chez vous à un excellent exemple de la constitution de ce meilleur des mondes possibles*. Ce
n’est que maintenant que j’ai appris que le malheur est arrivé dans votre région, même si je ne
2

me souviens plus du nom de votre rue.


Donc : si vales bene est, ego valeo .
3

Francfort, Arthur Schopenhauer.


21 nov. 1857.

P. S. Avez-vous des nouvelles du pasteur Grimm ?


420. À FRIEDRICH GRÄVELL 1

Cher Monsieur le docteur,

Au cas où cela vous aurait échappé, j’attire votre attention sur une recension extrêmement
courroucée et mensongère de votre livre, dans la revue Die Natur éditée par Otto Uhle, vers la
fin novembre. Ce qui y est remarquable, c’est que les newtoniens menacés et apeurés tentent à
présent de se retirer secrètement du champ de bataille. Uhle prétend en effet que l’affaire serait
réglée depuis longtemps et qu’à présent elle serait dépassée, que tous les physiciens auraient
abandonné la théorie des couleurs newtonienne, à cause de la doctrine de la vibration de l’éther.
C’est là un mensonge effronté : tous les manuels de physique de l’Europe entière enseignent
encore et toujours la théorie des couleurs newtonienne ; je parie qu’il n’y a pas une seule
exception. Humboldt (qui suit toujours A RAGO) parle de la couleur en newtonien orthodoxe et
imperturbable, dans le tome 3 du Kosmos, p. 86, 93, 108, 129, 169, 170, 300 surtout p. 496 et
539 dans la nota.
Le livre de Dove est une apologie de Newton. Lewes, dans son livre sur Goethe, se moque
2

de la théorie des couleurs de ce dernier et glorifie Newton, etc. Ces opticiens cherchent, per fas
et nefas , à unifier cette fable des ondes d’éther, fausse, tout à fait improuvable, grossière et
3

primitive, avec la théorie des couleurs newtonienne : aussi, elle enseigne seulement la façon
d’agir véritable des lumières homogènes, qui continuent ainsi de fleurir.
Cela ne peut donc pas continuer ainsi, il faut barrer la sortie à ces messieurs, avec un « ne
bougez pas ! ». J’aimerais beaucoup que vous ou vos amis y participiez ; pour qu’ils ne
s’échappent pas par la porte de derrière.
Par contre, dans les notices de Froriep, t. 3, se trouve un long compte-rendu de votre livre,
consistant en une approbation courte mais résolue et avec de longues citations de vos paroles.
Cela s’étend sur 2 numéros.
Salutations amicales

Francfort s. M. votre serviteur dévoué


le 26 nov. Arthur Schopenhauer
1857
421. À DAVID ASHER 1

Très cher Monsieur le docteur,

Comme vous ne recevrez la présente lettre que l’année prochaine, je me contente de vous
donner un conseil bien intentionné. Chaque jour, QUEL QUE SOIT le temps, promenez-vous 2
heures, RAPIDEMENT, donc seul ; vous serez ainsi très vite débarrassé de vos obstructions. Et
continuez quoi qu’il arrive. Ne me parlez pas de perte de temps : la santé avant tout* ! J’ai quand
même récemment reçu Morell, On Modern German Philosophy, mais je ne l’ai pas encore lu, j’ai
seulement vu qu’il ne me connaissait pas.
En souhaitant sincèrement votre rétablissement

Francfort, le 3 déc. 1857. votre


Arthur Schopenhauer.
422. À DANIEL FRIEDRICHSEN 1

Monsieur,

Conformément à la demande que vous m’avez faite, veuillez recevoir ci-joint l’acte de
décès de Madame Mertens, sous forme d’une copie légale de l’original qui se trouve à Bonn : la
copie est entièrement certifiée conforme, de sorte qu’elle pourra se substituer à l’original à
n’importe quel effet. Cela a suffisamment coûté d’efforts et d’écritures administratives à moi-
même et à d’autres, avant de pouvoir enfin l’obtenir par une intervention spéciale. Elle coûte 20
sgr, auxquels s’ajoutent 5 sgr de frais de port : en les additionnant à mes 28 Rth 5 sgr de rente
viagère du 22 oct au 31 déc, cela fait 29 Rth que je vous prie de me faire parvenir ; pour que je
sois enfin un peu dédommagé de mes efforts et de mes tracasseries. L’acte de décès lui-même a
été établi EN LATIN, par le curé de l’église St-Bernard (parocco), abbate Mossi ; ensuite suivent
les diverses attestations, EN ITALIEN ; d’abord celle du greffier (preposto) du livret d’église, F.
Campagnori, qui a reçu 40 bajocchi (½ piastre) pour cela ; ensuite suit celle du notaire, etc., et
enfin Monsignore Berardi (prélat) et ensuite les autorités allemandes. Madame Mertens habitait
donc via delle 4 fontane, dans la paroisse de S. Bernardo, elle était enregistrée dans cette église,
mais elle a été enterrée dans le campo santo teutonico de S. Peter : elle était catholique : elle a
reçu les derniers sacrements et aussi la bénédiction du pape ; comme on peut le voir dans l’acte
de décès.
Un article détaillé sur la vie et la mort de cette dame à Rome se trouve dans l’ EUROPA, n 1 o

de cette année, où on parle également de ma sœur et d’un tas d’autres choses encore. Article plus
court dans le Magazin für Literatur des Auslandes du 14 nov., également dans l’Allgemeine
Zeitung du 18 nov., dans la Köllner Zeitung 2 fois, du 1 & 4 nov, et dans la Deutsche
Monatsschrift du 5 nov. Elle avait la réputation d’être une riche archéologue, etc.
Je vous remercie de m’avoir appris la nouvelle de la mort de la vieille Tietz , que j’ignorais.
2

Je vous prie de bien vouloir m’indiquer les autres cas de décès éventuels dans cette famille ; et
aussi ce qui pourrait être dit ou même imprimé à Dantzig sur moi ou ma philosophie. Il ne sera
pas nécessaire d’affranchir. Demain, on va me photographier pour la Leipziger Illustrierte
Zeitung : vous pourrez alors voir comment je me porte.
Avec mes meilleurs vœux

Francfort s. M. votre
le 5 févr. serviteur dévoué
1858. Arthur Schopenhauer.
423. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher,

Remerciements cordiaux pour vos vœux et pour la célébration anticipée de mon


anniversaire , avec un verre rempli : c’était le toast, et pour que a testimonial ne fasse pas défaut,
2

Monsieur Wiesike du Plauenhof, le propriétaire du portrait à l’huile, m’a envoyé et offert une
coupe en argent haute de 2 pieds, avec mon nom et une inscription sublime . 8 lettres d’apôtres
3 4

sont arrivées, également de HAARLEM et de VIENNE : grand Méridien !


Votre article sur Gabirol m’a fait plaisir et dans l’ensemble il est bon ; même si j’ai
5

quelques objections à faire sur des points précis. Cet assemblage de phrases courtes n’est pas très
adapté : on peut en faire n’importe quoi. Vous auriez dû élucider le sens des propos de Gabirol
de la manière la plus radicale possible et le rendre dans son ensemble et en ses traits généraux, en
montrant ensuite qu’il est en accord avec moi, et dans quelle mesure. Maintenant la chose
principale : il y a environ 3 semaines, Mylius , l’un de nos photographes, est venu avec une lettre
6

de l’Illustrierte , en me priant de poser pour lui, suite à une commande. Je l’ai fait. Il a promis de
7

m’envoyer le portrait pour que je le voie, dès qu’il serait prêt : il n’a pas tenu sa promesse. Mais
Lunteschütz l’a vu et a trouvé qu’il n’était pas ressemblant et très mauvais. J’ai entendu qu’en
général, ce Mylius ne faisait pas de portraits, mais seulement des natures mortes. Le fait d’être
montré en caricature* au grand public me dépite. Les premiers photographes et les plus réputés
de cette ville sont Seib et Schäfer . Si vous pouviez faire en sorte que l’Illustrierte me fasse
8 9

photographier à nouveau par l’un des deux photographes, alors je poserais volontiers une
nouvelle fois. Faites-leur comprendre poliment que dans un cas pareil, ils ne doivent pas se
montrer pingres ou mesquins.
Un certain Monsieur Zingerle voyage comme commis voyageur littéraire* pour la nouvelle
10

Revue germanique ; il a entre autres la mission de commander une présentation lumineuse de ma


philosophie. Le mathématicien Cantor à Heidelberg l’a renvoyé à Lunteschütz, et ce dernier,
11

après avoir obtenu mon approbation, VOUS a proposé. Suite à quoi Zingerle a continué son
voyage vers l’intérieur du pays et nous fera part de la décision à son retour. Cette revue* paye
200 frs. d’honoraires par feuille ! Elle accepte que l’article soit EN ALLEMAND et dans ce cas elle
le fera traduire. J’ai dit que vous pourriez peut-être même l’écrire en français, de sorte qu’à Paris,
il faudrait seulement lui donner un coup de lime et de langue. Mais ensuite, cher Monsieur le
docteur, de l’argent doré, de la marchandise en or ! Surtout n’épargnez ni efforts ni études ! En
vérité, il faudrait qu’il y ait au moins 2 articles ; car 25 ou 30 pages, cela fait bien peu. Vous
devriez surtout reprendre et étendre votre belle introduction à la musique dans les Anregungen :
on ne peut commettre de plagiat contre soi-même.
Si vous pouviez m’envoyer sous enveloppe fermée ces feuilles de la Montagspost ?! There
12

is a good fellow ! dirais-je.


13

Bonne chance ! pour l’association éducative et le rétablissement fondamental de votre


14

santé, c’est ce que vous souhaite de tout cœur

Francfort s. M. most sincerely yours


le 25 févr. 1858. Arthur Schopenhauer.

P. S. Si vous ne pouvez pas m’envoyer la Monatspost, j’aimerais en connaître le numéro.

424. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Très cher Monsieur et ami,

Tous mes remerciements pour vos vœux et le présage des Psaumes. Que l’A. T. dise 70-80
ans dans 2 passages, cela m’importerait peu ; mais Hérodote dit la même chose , également dans
2 3

2 passages : voilà qui est plus significatif. Mais il y a 2 passages des saints UPANISHADS qui disent
: de 100 ans est la vie de l’homme ; et M. Flourens, De la longévité, calcule également ainsi.
C’est une consolation.
Pour mon anniversaire, 7 lettres de congratulations sont arrivées, toutes fort aimables : mais
Wiesike du Plauenhof dans le Brandebourg, le propriétaire de mon portrait à l’huile, m’a envoyé
une énorme coupe d’argent, haute de 1 pied ½, une sorte de calice de communion, joliment
travaillée à Berlin, avec mon nom et mon jour de naissance, et de l’autre côté :
La vérité seule résiste :
Elle seule persiste :
Elle est le diamant indestructible .
4

J’ai dû l’accepter. Mais quel apôtre ! Que sont les autres PAR RAPPORT À CELUI-LÀ ?
Je vous envoie la lettre de von Doss, parce qu’il l’a demandé, et je joins celle de Haarlem
qui est bien naïve et gentille : il y a un an, son auteur avait demandé s’il n’existait pas un portrait
de moi ; sur quoi je lui ai tout de suite raconté que j’avais aussi été à Haarlem, en 1803, et ce que
j’y avais vu : c’est à cela qu’il fait allusion.
Le Dr. Bahnsen écrit que le traité mathématique de votre fils a été publié dans la Hollst.
5

Schulzeitung ; ce que je n’aurais pas cru ; puisque vous disiez, etc.


Je vous remercie pour les nouvelles concernant Placidus : j’avais déjà fait son deuil et
6

j’avais placé son souvenir à côté de celui du noble Dorguth. J’espère qu’il est rétabli, mais je n’ai
rien entendu à ce sujet.
La Leipz. Illustrierte m’a fait photographier : je n’ai pas vu l’épreuve, après la séance : il
paraît qu’elle est horrible.
Ce que vous citez de W. von Humboldt me réjouit : jadis, j’ai lu un passage de lui où il
7

présentait la finalité et l’essence de l’État exactement comme moi.


Je vous prie de me renvoyer ces deux lettres après quelques jours et je demeure avec un
sincère dévouement

Francfort votre
1 mars 1858.
er
Arthur Schopenhauer
425. À CARL G. BÄHR 1

Cher Monsieur Bähr,

Remerciements cordiaux pour vos marques de sympathie à l’occasion de mon 70 e

anniversaire. Ce jour là, précisément, 7 lettres de vœux sont arrivées, dont une de Hollande ;
Monsieur Wiesike du Plauenhof, le propriétaire de mon portrait à l’huile, a même envoyé une
grande coupe commémorative, une pièce magnifique, avec mon nom et des vers altiers louant la
vérité et sa force.
Cela me réjouira de tout cœur de vous voir ici à Pâques et nous pourrons discuter de bien
2

des choses. Si vous descendez à l’Hôtel d’Angleterre, vous serez également mon compagnon de
table à midi et le soir.
Si vous en avez l’occasion, lisez donc, dans le dernier cahier du Philosophisches Journal,
un article d’une stupidité incroyable rédigé par celui qui vous a été préféré, Seydel.
3

Salutations pour Monsieur votre père, et mes meilleurs vœux pour votre santé et votre bien-
être !

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 5 mars 1858.
426. À KARL DEBROIS VAN BRUYCK 1

Très honoré Monsieur,

Je vous remercie de l’intérêt dont vous m’avez témoigné, et je vous renvoie ci-joint le
manuscrit que vous m’aviez adressé, mais sans pouvoir me flatter de l’avoir lu. Dans ma 70 e

année, je sens plus que jamais la valeur du temps : mettre de côté pendant plusieurs jours des
études diverses et intéressantes qui m’occupent, afin de lire le manuscrit d’une biographie d’un
monsieur que je ne connais pas, cela dépasse mes capacités. Lire un manuscrit, c’est comme
avancer sur un chemin cahoteux ; pour des imprimés, c’est le chemin de fer.
Avec la plus haute considération je demeure

Francfort s. M. votre
le 5 mars serviteur dévoué
1858. Arthur Schopenhauer.

427. À ADAM VON DOSS 1

Cher Monsieur von Doss,

On ne se gêne pas avec ses amis ; c’est pourquoi vous êtes le dernier que je remercie pour sa
lettre de vœux. Car j’en ai reçu 10 : la dernière le 7 mars, de l’envoyé de Hanovre à Berlin, le
2

comte Knyphausen, qui l’avait seulement appris le 6 mars dans un journal. Car c’était dans
beaucoup de journaux, et seulement le 2 mars dans la Vossische Zeitung de Berlin, de la façon la
plus exacte. Mais c’est M. Wiesike du Plauenhof, le propriétaire de mon portrait à l’huile, qui
m’a envoyé une énorme coupe en argent, presque haute de 2 pieds, avec une maxime qui, selon
la Vossische, proviendrait des Parerga : je ne sais où elle se trouve. Des lettres bien étranges me
sont arrivées, dont une du marchand de fleurs de Haarlem, myn Heer van Eeden. J’ai
communiqué la vôtre à Becker. Sa studette a été mise en pièces par l’explosion et tous les
tableaux du mur ont été balayés, excepté mon daguerréotype qui est resté intact, accroché tout
seul au mur, à la Vierge Marie, dans ces cas-là.
Je me réjouis de votre avancement , et du supplément en temps et en argent. Mais gardez-
3

vous de raccourcir le temps de votre sommeil pour lire : c’est une grande sottise ! Le sommeil est
la source de toute santé et de toute force, également de celle de l’esprit. Je continue à dormir 7,
souvent 8 heures, parfois 9. Voilà pourquoi je me ris de mes 70 ans, y compris de votre passage
des Psaumes.
Le Bouddhisme de Köppen est un manuel très bon et complet en la matière, il témoigne
4

d’un grand zèle et de beaucoup d’érudition. Il connaît tout, même l’Archimandrite Palladii , que
5

moi-même je connais seulement à partir du manuscrit de votre épouse. Ses sarcasmes stupides
sont un reste de poison vénérien de l’hégélianisme qui n’est assurément jamais tout à fait
extirpable : ils ont l’avantage de persuader le lecteur qu’il décrit le bouddhisme sans prédilection
et sans amour, et que, malgré cela, le bouddhisme se présente dans sa splendeur.
J’ai lu récemment les Lettres de l’abbé Rancé , parues en 1846 à Paris : c’est vrai qu’elles
6

contiennent beaucoup de choses inintéressantes, mais il y a également quelques passages qui font
comprendre l’essence intime de l’ascèse rigoureuse. Je lis à présent MAÎTRE ECKHART, éd. par
Pfeiffer, 1857 . Très intéressant et une bonne confirmation de ma philosophie. Mais je préfère
7

quand même la Theologia Deutsch.


J’ai commandé chez Frisch à Mannheim les operette morali de Leopardi et les pensieri , et 8

nous allons voir. Dommage que l’indication de l’année et du lieu d’impression n’y figure pas.
Car je ne veux pas les opera omnia. Ce serait assurément une bonne chose si vous écriviez un
petit article à ce sujet dans les Litterarische Unterhaltungsblätter, comme Asher avec Gabirol.
Cela vous ferait gagner une place parmi les évangélistes ! Un certain M. Morin , de la Revue de
9

Paris, qui voyage pour connaître la littérature allemande*, m’a récemment rendu visite. Un
certain M. Zingerle, qui voyage pour la Revue germanique, prête à payer 200 francs la feuille, a
demandé, auprès de Lunteschütz, qui pourrait faire la meilleure présentation de ma philosophie :
ce dernier a donné le nom d’Asher, avec mon accord : mais ce n’est pas encore décidé. Zingerle a
poursuivi son voyage vers l’intérieur de l’Allemagne, comme officier de réclame littéraire.
La Leipziger Illustrierte m’a fait photographier, par quelqu’un qui ne prend que des édifices
et des statues : je n’ai pas vu l’épreuve, mais Lunteschütz l’a trouvée HORRIBLE : j’ai écrit à Asher
pour qu’il le dise aux illustrateurs, et s’ils veulent bien prendre les meilleurs photographes, je
suis prêt à poser une nouvelle fois. Ces crapules m’écrivent que je devrais me faire
10

photographier pour eux, à mes frais ; je n’ai pas donné de réponse : comme ils en attendent une,
l’affaire s’est enlisée. La réponse adéquate serait celle que le bon roi Max a donnée à ces
11

messieurs qui lui ont montré la cascade dans le Jardin anglais. Vous savez que Frauenstädt, sur
le conseil d’Asher, doit fournir une description de ce lion. Bello ! En vous souhaitant de tout
cœur santé et bonheur
Francfort s. M. votre
le 14 mars Arthur Schopenhauer.
1858.
428. À JOHANN KARL BECKER 1

Très cher Monsieur Becker,

Je vous remercie pour l’envoi de vos articles de la Schulzeitung . Dans l’ensemble, vos
2

articles sont assez bons ; même s’il y aurait à faire quelques objections, concernant des points
précis : cela dépasserait une communication épistolaire. Mais il y a une chose que je me dois de
blâmer : il est clair et manifeste que votre 3 forme du principe fondamental de l’être est
e

inadmissible , car la GRANDEUR EN GÉNÉRAL ne relève en rien de l’intuition ; c’est un abstractum,


3

un concept — le reste s’ensuit.


Je dois vous avouer qu’à mes yeux, il est impardonnable de ne pas avoir lu le beau et réputé
article de HAMILTON , mais ce qui est encore pire, c’est votre justification : « Parce qu’aucun livre
4

ne saurait perturber ma conviction fondée sur l’expérience et l’examen le plus soigneux. C’est
précisément cette conviction qui me laisse fortement SUPPOSER que J’AI ENTIÈREMENT RÉFUTÉ
Hamilton par mon article. » Au lieu du « est enim verum &c » qui fait suite, j’ajouterais :
a

unusquisque abundat sensu suo . 5

Votre chère lettre m’apporte des nouvelles intéressantes mais point réjouissantes : on
6

m’utilise sans me nommer, on donne de mauvaises présentations de ma théorie des couleurs,


avec en plus des critiques insipides, et d’autres choses encore.
À Berlin, à la Société polytechnique, un certain Dr. Wolff a donné récemment 2 conférences
7

sur « La théorie des couleurs de Goethe et ses disciples », et ce contre nous : en revanche,
GRÄVELL s’est présenté avec une conférence favorable à notre cause (il est l’auteur de Goethe a
8

raison contre Newton) : d’après la Nationalzeitung du 27 mars, le public était entièrement


d’accord avec lui. Les conférences de la Société seront ensuite imprimées : j’attends qu’on me
les envoie ; comme en octobre dernier, où l’on m’avait envoyé une conférence dans laquelle un
certain M. Scheeffer mettait en valeur ma théorie de l’intuition sensible dans l’entendement,
9

contre la théorie sensualiste du physiologue Müller . 10

Publier un article sur la concordance de ma théorie des couleurs avec la théorie des
ondulations me paraît souhaitable, dans la mesure où il sera question de ma théorie, mais je ne
crois pas à cette concordance ; car le vrai ne tisse pas facilement un lien avec le faux, et si c’est
le cas, c’est seulement de façon apparente. Mais le vrai rejoint facilement le vrai : comme c’est le
cas de la théorie des couleurs de Goethe et de ma théorie, qui la fonde tout à fait rigoureusement
et presque a priori.
Avec considération et dévouement

Francfort Arthur Schopenhauer.


le 10 avril
1858.
429. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher,

De toute évidence, vous ne me rendez pas justice en vous plaignant que je vous aurais laissé
sans réponse, car votre dernière lettre du 3 mars ne contient rien qui ressemble à une question et
qui exige une réponse ; autrement, je vous aurais sans doute écrit. Mais je vois bien : ce sont les
illustrateurs qui se dissimulent derrière vous, avec un embarras bien mérité. Voilà de quoi il
retourne : après avoir appris par le récit de Lunteschütz que la photographie faite par Mylius
2 3

montrait une grimace dissemblable et horrible, je vous ai demandé de dire à ces messieurs que je
préférais poser une nouvelle fois, à condition de m’envoyer un photographe habile. Que c’est
bien cela que vous leur avez rapporté, et rien de plus, se trouve entièrement et sûrement attesté
par votre réponse à ma question : « J’ai eu un nouvel entretien avec Weber ; je ne sais pas s’il
sera couronné de succès : il a au moins noté les noms des photographes. » Vous avez donc fait ce
qui vous semblait juste, et rien de plus. Mais qu’ont fait les illustrateurs ? Possédés par le diable
de la cupidité, ils ont eu recours à la ruse stupide qui consiste à mimer un malentendu, et ils
m’ont écrit : « D’après l’aimable communication de M. le Dr. Asher, ayez la bonté de nous
PROCURER un meilleur portrait photographique. » Sous couvert de cet abject mot à la mode, «
PROCURER », ils entendent que c’est moi qui devrais faire réaliser un portrait avec MON ARGENT,
grâce auquel ils gagneront LEUR ARGENT. Bien entendu, je n’ai daigné donner aucune réponse à
ces crapules sordides, mais je leur ai laissé le soin de chercher eux-mêmes celle qui convient
4

dans le Götz von Berlichingen.


Je ne tiens aucunement à figurer dans ce journal de philistins, entre des directeurs de
chemins de fer et d’autres gens de la même espèce. J’ai posé pour Mylius parce qu’il est venu
5

m’en faire la demande, et que je ne voulais pas entraver les affaires de cet homme. Pour m’en
remercier, il a délibérément rompu avec sa promesse ferme et facile à exécuter, à savoir de
m’envoyer d’abord le portrait pour que je le regarde. Qu’il ne revienne pas. J’étais ensuite
horrifié par l’idée d’être montré au monde en grimaçant. D’où ma proposition. Évitez surtout que
ces gaillards ne m’écrivent à nouveau, je ne veux plus avoir affaire à eux.
J’ai feuilleté pendant quelques heures le livre de Haym , ce n’est pas sans plaisir que j’ai lu
6

des choses sur la bassesse morale de Hegel et le gribouillage de Schelling. Mais je n’ai pas
rencontré le passage me concernant : je vais essayer de l’obtenir une nouvelle fois du libraire ;
7

dommage que vous n’indiquiez pas la page. Malheureusement, la moitié de ce qu’on écrit sur
moi m’échappe. Cartons, etc., un gros livre d’un curé catholique de cette ville, Beda Weber,
8

vient de paraître ; sur 10 pages il me traîne dans la boue, cela ne fait rien : aboiement obligé de la
prêtraille contre les philosophes ; et cette crapule présente ENTRE GUILLEMETS des passages QUE JE
9
N’AI JAMAIS ÉCRITS. Mon CHIEN est également évoqué. Mais cette canaille a crevé (entendons le
10

curé) avant la parution du livre. Bello !


11

Il y aurait un article sur moi dans les Prager Blätter für Literatur und Kunst, n 8, 24 févr.,
12 o

selon les Litt. Unterh. Blätter. J’ai commandé le livre. Je n’ai plus rien entendu de Zingerle . 13

Cela peut encore se faire.

Francfort, 13 avril 1858. Je vous salue


cordialement !
Arthur Schopenhauer.

P. S. Encore une chose ! Le plus souvent, vous joignez vos lettres à des courriers
commerciaux, pour économiser les frais de port. Mais je vous prie de ne pas hésiter à jeter vos
lettres non affranchies dans la boîte. Pour de telles missives apostoliques, je suis prêt à payer 10
fois les frais de port, et celui qui fait des rapports sur ma philosophie participe à mon affaire : je
me dois donc de vous payer les frais de port. Ergo nous sommes d’accord !
430. À FRIEDRICH GRÄVELL 1

Très cher Monsieur le Dr. Grävell,

Mes remerciements les plus obligés pour votre envoi de ces pièces intéressantes ! Cela me
2

réjouit fort qu’un débat public ait commencé autour de la théorie des couleurs ; quelle qu’en soit
la qualité. Car beaucoup de ceux qui méprisent l’autorité de la théorie des couleurs de Goethe en
seront interloqués et quelques-uns se saisiront de l’œuvre de Goethe pour prendre connaissance
de la chose ; surtout maintenant, alors que la gloire de Goethe est plus considérable que jamais ;
comme en témoignent les commentaires infinis sur Goethe.
L’article dans la Vossische Zeitung est très bon et m’a fait plaisir : l’auteur en est
probablement le Dr. Lindner ; quoique ce dernier signe toujours avec un L. et m’envoie les
articles qui me concernent.
Je n’ai malheureusement pas accès à la Heidelberger Zeitschrift für Physik , car on ne la
3

trouve pas ici. Mais je vais encore essayer de la consulter.


Cela me réjouirait de vous voir lors de votre passage et de traiter du reste de vive voix. D’ici
là, je demeure

Francfort s. M. avec ma haute


le 19 avril considération
1858. votre
serviteur dévoué
Arthur Schopenhauer.
431. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher,

Tous mes remerciements pour vos multiples rapports ! Conformément à votre souhait, je
vous envoie aujourd’hui, sous enveloppe fermée, la refonte française de mes Problèmes
fondamentaux de l’éthique . Weill a dû réduire ces derniers à 1/10 de leur volume : il faut en tenir
2 3

compte ; il en a donné le noyau avec justesse, mais dans l’ensemble c’est mal traduit ; comme en
témoignent mes gloses marginales. Mais ce qui est impardonnable, c’est qu’il ait rajouté des
considérations ex propria penna , avec plein de fatras judaïsant, à mon agacement. Le dialogue
4

dans le prologue n’est pas vrai. Je vous prie de me le RENVOYER après 8 JOURS.
5

La Wiener Zeitung du 8 mai contient un article très intéressant sur ma philosophie : il faut
6

que vous le lisiez ; chez vous, la rédaction de l’Allgemeine doit l’avoir. Cela remplit 8 grandes
7

colonnes in folio, avec des choses tantôt bonnes, tantôt mauvaises, tantôt vraies et tantôt
fondamentalement fausses : c’est franchement fou. C’est le journal d’État officiel de l’Autriche.
Je l’ai commandé. Si nécessaire, je pourrais vous l’envoyer. On y dit qu’à Berlin, «
l’enthousiasme pour ma philosophie est ÉPIDÉMIQUE ». Je croyais que c’était une hyperbole, mais
j’ai alors reçu un DRAME publié à Berlin, 206 p. 8 , Les Conquérants du ciel , dans une prose
o 8

poétique, en iambes avec un traitement dramatique tout à fait sérieux de ma philosophie : une
farce incomparable ; en couverture la gravure de la Madonne de la Sixtine et en dessous mon
poème à sa gloire . La chose est anonyme et sans préface. Vous devez la voir. Peut-être en ferez-
9

vous une annonce. Vous m’aviez écrit que la Montags-Zeitung du 21 déc., n 51 , contenait mon
o 10

chapitre sur les femmes : je l’ai commandée, et il n’y a rien sur moi. Je vous prie de regarder
avec plus d’attention la prochaine fois. Une catastrophe, constituée par le triomphe de la théorie
des couleurs de Goethe et de la mienne, se prépare lentement. Vous savez sans doute qu’on a
débattu de la chose à la Société polytechnique de Berlin, conférence du Dr. Wolff pro Newton, du
Dr. Grävell contre ce dernier et pour Goethe, celle-ci a été imprimée : Caractéristiques de la
théorie des couleurs newtonienne. Récemment, Grävell est venu ici et il reviendra. Ensuite
quelqu’un d’ici, un certain Dr. Clemens, a publié dans Archiv für phys. Heilkunde un long 11

article, « Sur le daltonisme », dans lequel il adhère entièrement à MA théorie et à Goethe. La


goetholâtrie est en effet à son point culminant. On va réviser le dossier et ensuite vae victis ! 12

Von Lasaulx, recteur de l’Université de Munich, vient de m’envoyer un exemplaire de luxe


de son ouvrage commémoratif sur La Force prophétique de l’âme : j’ai constaté que j’étais cité
13

2 fois, ainsi qu’un passage des Parerga. Récemment, un docteur de Vienne m’a rendu visite, et
14

ensuite un prédicateur protestant de Moscou . Vous voyez, l’épidémie se propage.


15

Il y a 2 mois, Mylius m’a envoyé, dans une lettre d’excuses très courtoise, un exemplaire de
16

sa photographie : elle n’est pas aussi mauvaise que dans la description de Lunteschütz ; la partie
supérieure, surtout le front, est très bonne, les yeux le sont plutôt aussi, mais le nez et la bouche
sont entièrement défigurés. J’espère que le graveur sur bois corrigera cela, et je me console avec
la publication à venir et la description de ce lion.
Cornill a publié un nouveau livre , avec un long article sur moi, comme anti-critique d’une
17

recension de son premier livre qui se trouvait dans le Frankfurter Museum, févr. 1857.
Lunteschütz a terminé mon 2 portrait à l’huile : il est beaucoup mieux que le premier ;
e

j’espère qu’il trouvera un acheteur quelque part. J’ai conseillé de l’envoyer à Vienne, où on dit
que le diable est particulièrement déchaîné.
Je regrette que votre maladie vous oblige de nouveau à vous rendre à Karlsbad, et je vous
souhaite de tout cœur la faveur du succès !

Francfort s. M. votre
le 24 juin 1858 Arthur Schopenhauer.

432. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le docteur,

Je me hâte de vous répondre afin de vous prier à temps de bien vouloir refuser l’annonce de
l’écrit de Seydel . Votre lettre me montre que vous êtes rempli de respect, de circonspection, de
2

considérations complaisantes et sans doute aussi de tergiversations et d’arrière-pensées, et que


vous seriez même prêt à faire des révérences à ce genre de personnage. Mais dans ce cas, il faut
un homme qui dit avec Voltaire : « Point de politique en littérature : dire la vérité, &
s’immoler*. » Comme je vois, ce n’est pas votre cas.
Un homme qui, dès sa JEUNESSE, et pour obtenir un pourboire de la Faculté, est capable de
se mettre à couvrir de boue l’édifice somptueux de ma philosophie, construit pour des siècles,
mérite qu’on le mette à nu, en découvrant ses intentions basses, ses gauchissements, ses
mensonges, ses falsa, et son effronterie insolente, non seulement envers moi mais également
envers Kant . Ce faisant, il faudrait recenser en même temps le livre vraiment excellent de Bähr,
3

ce qui prostituerait le jugement de la Faculté de façon méritée — vous joueriez le rôle de la mère
qui montre les 2 tableaux à Hamlet . La Faculté se trompe en croyant que ces petits tours
4

passeront inaperçus : ma philosophie se propage irrésistiblement, et l’on sortira et révisera encore


plus d’une fois certains dossiers. Tant qu’ils pouvaient se contenter d’un silence sournois et d’un
mutisme lâche, ces messieurs avaient la force* de leur côté, mais maintenant qu’il s’agit de lutter
contre moi, leur faiblesse et leurs intentions infâmes seront mises au jour. Lâcher des étudiants
contre moi ! les élever en juge ! Voilà de beaux procédés. Ils travaillent POUR moi, non pas
CONTRE moi — par bêtise . Un certain prof. Zimmermann de Prague a encore écrit une
5 6

volumineuse Histoire de l’esthétique dans laquelle, pendant 20 pages, il abaisse de toutes ses
forces ma métaphysique du Beau. Tout cela agit POUR moi. Donc, cher Monsieur le Dr.,
abandonnez la recension de Seydel à quelqu’un d’autre : peut-être trouvera-t-on quelqu’un qui
saura me défendre.
Votre conjecture, selon laquelle l’auteur de l’article dans la Wiener Zeitung serait ce
Seydel , est non seulement fausse, mais aussi très malvenue : comme s’il allait parler de moi de
7

façon aussi élogieuse et énumérer les livres qui m’ont de façon ignoble passé sous silence ! Il les
a repérés et notés depuis 20 ans. Et de plus, c’est trop bien écrit. Un Dr. jur. viennois , qui m’a
8

récemment rendu visite, pense que l’auteur de l’article est le Dr. Barrach de Vienne. Un étranger,
qui était récemment chez moi, m’a dit que la rédaction de la Revue germanique l’avait chargé de
faire une présentation de ma métaphysique de la musique ; je lui ai recommandé de s’inspirer de
votre article : il le connaissait déjà. Il ne sait rien de Zingerle : il nie que les honoraires soient
9

élevés, prétend le contraire et fait son article gratuitement. La même personne m’a raconté que
dans le fameux livre de Proudhon, De la justice dans l’Église , etc., la familiarité avec ma
10

philosophie était évidente. Je vais voir de quoi il retourne. Peut-être en ferez-vous de même. Le
Dr. Grävell était de nouveau ici : je lui ai montré l’article du Dr. Clemens dans l’Archiv für phys.
Pathologie, où ce dernier s’engage pour la théorie des couleurs de Goethe et pour la mienne,
contre Newton.
Ce qui m’afflige, c’est que la moitié de ce qu’on écrit sur moi m’échappe : c’est pourquoi je
vous prie de toujours me communiquer ce que vous trouvez.
Je souhaite que votre cure balnéaire devienne une cure radicale, et je vous salue
cordialement

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer.


le 2 juillet 1858.
Je frissonne d’avance en pensant à la grimace qui sera publiée dans l’Illustrierte. Il s’agit en
fait de la Montags-Post : la date et le numéro sont donc faux !
11

433. À JOHANN KARL BECKER 1

Très cher Monsieur Becker,

Je vous remercie pour vos intéressants rapports et surtout pour celui sur la lettre du Dr.
Bahnsen : c’est assez touchant de voir à quel point il perdure dans sa ferveur pour ma
2

philosophie, alors qu’il se trouve apparemment dans une situation difficile. Cela me réjouirait
qu’une revue littéraire soit créée spécialement pour ma philosophie, même si je ne voudrais pas y
participer moi-même : dans sa dernière lettre, le Dr. Asher déplore également l’absence d’une
telle revue. Il sera en tout cas difficile d’exciter l’intérêt du public sur une longue durée : pour
cela, beaucoup de bonnes têtes devraient agir de concert. En attendant, je reçois des signes sûrs
de la propagation accélérée de ma philosophie, venant même de Vienne et de Prague . Cela 3

pourrait encourager l’affaire. Si vous écrivez à Bahnsen, je vous prie de le saluer de ma part et de
le remercier pour ses vœux : je n’écris que quand c’est nécessaire.
Je ne peux malheureusement pas contredire votre jugement sur l’écrit du Dr. Grävell : mais
malgré cela, il est d’un effet salutaire, en contribuant à l’accélération de la crise qui se prépare, à
savoir le triomphe de la théorie des couleurs de Goethe et de la mienne et du dies irae ! Le 4

public lève la tête ; on va réviser le dossier : la goetholâtrie est à son point culminant. À Berlin, à
la Société polytechnique, un certain Dr. Wolf a donné 2 conférences pour Newton contre G. : sur
5

ce, le Dr. Grävell en a donné une pour Goethe : il l’a aussitôt fait imprimer ; elle n’est pas
meilleure que son livre. Mais beaucoup de revues et de journaux en ont parlé. Le public était
pour Grävell. L’été dernier et cet été, il m’a rendu visite 2 fois.
Ici même, le Dr. Clemens a rédigé tout récemment un traité sur Le Daltonisme dans
6

l’Archiv für physiologische Pathologie : il commence son traité avec un credo pour ma théorie
des couleurs, à laquelle il adhère de la façon la plus résolue, tout comme à la théorie des couleurs
de Goethe, et il abjure Newton et ses œuvres. Le traité est intéressant, avec une nouvelle
découverte de l’achromatopsie TEMPORAIRE. Vous pourrez sans doute obtenir la revue à
Darmstadt ; si vous en faites l’effort. Je ne possède pas l’écrit de Hamilton : la traduction de
1836 doit remplir tout au plus 3 feuilles, et on doit pouvoir facilement se la procurer en librairie.
Je joins la lettre de Bahnsen et je demeure avec mes souhaits les plus cordiaux

Francfort votre
le 7 juillet Arthur Schopenhauer.
1858.

P. S. Dans cette Société polytechnique évoquée plus haut, un certain M. Scheeffer a donné
l’année dernière une conférence pour défendre ma théorie de l’ INTUITION EMPIRIQUE, contre la
théorie physiologique du physiologue Müller (qui vient de mourir) et il m’en avait envoyé
7

l’imprimé.
434. À FRIEDRICH GRÄVELL 1

Honoré Monsieur le Docteur,

Je vous avais donné les commentaires sur Seebeck à titre privé, pour vous encourager et
vous fortifier le cœur ; or ils n’étaient aucunement destinés à la publication, et je dois résolument
vous refuser mon accord ; pour 2 raisons : 1° parce que tout un chacun aurait la liberté de nier la
vérité d’une telle déclaration, et qu’il serait impossible de la prouver ; 2° parce que je trouve tout
à fait indigne de mener la lutte in physicis par l’intermédiaire d’autorités : seuls des raisons et des
faits sont valables en la matière. Veuillez bien regarder ce que j’ai dit à ce sujet dans Parerga, t.
2, § 266. Je vous répète plutôt mon conseil d’étudier la partie didactique de la théorie des
couleurs jusqu’à l’avoir assimilée in succum & sanguinem et d’avoir une connaissance INTUITIVE
2

de la théorie des couleurs de G. : vous serez alors armé pour n’importe quel combat ; surtout si
vous voulez bien prendre en compte le § 13 de ma théorie des couleurs.
Francfort s. M. Avec respect
14 juillet et dévouement
1858. Arthur Schopenhauer.

435. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Vous m’avez fait parvenir une nouvelle réjouissante que j’attendais depuis déjà si
longtemps que mon impression a été tout le contraire d’une surprise.
Les transformations que doit subir la 3 édition consistent en de petites améliorations et
e

d’importants ajouts : rien ne sera enlevé ; autant que je peux en juger maintenant. Il m’est
impossible de dire combien de place occuperont les ajouts, même si je les ai écrits peu à peu
depuis 1844 et qu’ils sont déjà tous couchés sur le papier : 1° parce qu’ils se trouvent d’une part
dans mon exemplaire personnel, d’autre part répartis dans divers carnets de réflexion ; 2° parce
que je ne sais pas quelle quantité passera l’examen ultime et extrêmement rigoureux ; 3° parce
qu’en les réélaborant pour l’impression, ils deviennent tantôt plus courts, tantôt plus longs ; et
enfin l’écrit devra être adapté à l’impression. Après le survol que je viens de faire, je peux
seulement indiquer que très probablement, l’ensemble des ajouts ne remplira en aucun cas moins
de 2 feuilles, et pas plus de 8. La grande majorité des ajouts sont pour le tome 2 : le premier ne
sera augmenté que d’environ une feuille ; je pourrai donc le remettre après 6 semaines, mais
j’aurai besoin de 5 à 6 mois pour le 2 tome ; si ce n’est plus. La lenteur de mon travail provient
e

du fait que depuis 25 ans, j’ai la maxime indestructible de ne jamais écrire directement pour
l’impression que pendant les 2 premières heures de la matinée, car ce n’est que là que la tête
exploite toutes ses possibilités. Le reste du temps est utile pour la recherche et la lecture des
passages cités, &ca.
Je souhaite vivement que vous gardiez le même format et le même type d’impression ; pour
que le livre ne devienne pas plus cher et pour que le lecteur puisse facilement évaluer la quantité
ajoutée à la nouvelle édition. Mes vrais fanatiques l’achèteront dès qu’ils verront 50 pages de
plus.
Je n’exige pas plus de 3 Frédérics d’or d’honoraires par feuille (l’ancienne et la nouvelle
édition), ce qui vous permet d’imprimer 2 250 exemplaires ; si vous voulez en imprimer plus, les
honoraires sont à augmenter dans la même proportion : par ex. pour 3 000 exemplaires jusqu’à 4
Frédérics d’or. Ces exigences sont très équitables, si vous considérez qu’il s’agit de grandes
feuilles imprimées de façon économique, et dont chacune contient autant que 2 feuilles du petit
format dans lequel vous avez imprimé les livres de Frauenstädt : et à plus forte raison, comme
vous avez eu la 2 édition gratuitement, vous souhaitez certainement que l’auteur jouisse quelque
e

peu de son travail. C’est le travail de toute ma longue vie.


J’érige en condition indispensable qu’on m’envoie chaque feuille pour la dernière
correction, même si rien n’y a été changé, et qu’on respecte minutieusement mon orthographe et
ma ponctuation. Mais à présent, je voudrais encore vous dire quelque chose. Mes Parerga, que
vous n’avez pas voulu prendre gratuitement, sont chez Hayn à Berlin : il les a eus gratuitement et
n’a eu droit qu’à 750 exemplaires, alors qu’il en souhaitait 1 200. De tous mes écrits, c’est celui
qui a été le plus vendu, étant le plus populaire — il doit donc presque être épuisé. Je pense qu’il
serait temps de faire une édition complète de mes ouvrages, d’autant plus qu’ils sont tous reliés
entre eux de la façon la plus intime, et que j’ai expliqué depuis longtemps que pour me
comprendre correctement, il fallait avoir lu chacune de mes lignes. Nous aurions donc dans
Œuvres complètes d’A. S., en 5 volumes, avec l’exergue Non multa :
vol. 1 & 2. Monde comme volonté et repr.
vol. 3 & 4. Parerga.
vol. 5. — Quadruple Racine, 2 éd., 1847.
e

(VI et 151 pages) chez libr. Herrmann


— De la volonté dans la nature, D o

(XXI & 130 pages), 2 éd., 1854.


e

— Problèmes fondamentaux de l’éthique, 1841. D o

(XXXX & 280 pages)


— Vision et couleurs, 2 éd, 1854. Hartknoch.
e

VIII & 86 pages.


Il faudrait encore ajouter à mes œuvres complètes un INDEX DES NOTIONS, ce qui est
HAUTEMENT NÉCESSAIRE. Pour accomplir cette tâche, je recommande Frauenstädt.
Les Parerga auront beaucoup plus d’ajouts que mon ouvrage principal ; parce qu’on peut
précisément tout y mettre. Les petits écrits du vol. 5 reçoivent également des ajouts ; mais ils ne
seront pas considérables.
Les conditions financières seraient comme celles indiquées plus haut. Avant tout se pose la
question de savoir si vous êtes en droit de faire une telle édition générale, sans nuire aux droits
des autres éditeurs. Hayn a formellement renoncé à la 2 éd. et Hermann également. Vous avez le
e

temps d’y réfléchir ; puisque, en attendant, nous pouvons conclure le contrat pour mon ouvrage
principal, et l’élargir par la suite. Mais si M. Hayn se propose pour la 2 éd., il faudra que je lui
e

réponde.
Sur ce je demeure avec ma haute considération

Francfort s. M. votre
le 8 août serviteur dévoué
1858. Arthur Schopenhauer.
Verte !
P. S. En tout cas je vous prie de m’envoyer au plus tôt un exemplaire brut que je ferai
aplanir et intercaler avec du papier, pour me mettre au travail. Car même au cas où nous ne
serions pas d’accord, vous m’offririez sans doute, après épuisement de l’édition, un 11 e

exemplaire d’auteur.
436. À DAVID ASHER 1

Très cher Monsieur le Dr. Asher,

Je vous ai longuement exposé mon avis sur la recension de Seydel qui vous a été confiée, et
je n’ai rien d’autre à ajouter ; je n’ai pas envie de faire des conjectures et de la casuistique à ce
sujet ; je remets l’affaire aux dieux. Nous avons pu constater votre héroïsme courageux avec le
coup que vous avez asséné, après de longues menaces, à HAYM , à savoir un petit et doux soufflet
2

administré par une patte de velours*, ressemblant davantage à des excuses qu’à des reproches.
Knock the rascal down ! n’est pas votre affaire.
3

Vous aurez vu, dans les Lit. Blätt., la recension du livre de Fortlage par Frauenstädt, qui
parle très correctement de mon affaire. Dans les Häusliche Heerd-Blätter, n 43, se trouve la
o

recension d’une conférence de Rupp à Königsberg dans laquelle ce dernier polémique contre
4

moi et veut attribuer mes doctrines les plus caractéristiques à Kant, qui n’y a jamais songé. Le
recenseur le remet à sa place ; mais de manière beaucoup trop pacifique.
Porro , dans la Protestantische Kirchenzeitung du 3 juillet, se trouve un curieux passage sur
5

moi signé Weiss ; il concerne le même thème que celui à l’occasion duquel (comme je crois vous
l’avoir signalé) un plagiaire, dans la Hamburger Reform, a tout simplement copié les pages de
Parerga, II, p. 310, 11 pour se les approprier. Ce thème semble donc occuper les esprits : il
6

s’agit du point faible de la morale chrétienne.


Porro LE DUEL, avec des preuves tirées des écrits d’adversaires modernes du duel par L.
Müller , 1858 (7 ½ sgr.) qui a copié presque la moitié de mon chapitre sur ce sujet ; mais en me
7

nommant et en faisant des éloges.


Un officier de Berlin m’a envoyé un manuscrit de 28 pages sur le beau et le sublime comme
8

je l’entends. Il m’a assimilé in succum & sanguinem au point de parler comme un alter ego.
9

Cela me réjouit trop.


Si seulement je pouvais connaître la moitié de ce qu’on écrit sur moi !
Ayez l’amabilité de me signaler ce que vous aurez repéré.
Le Livre des chrétiens, ou le N. T. considéré d’après les RÉSULTATS DE L’ÉCOLE DE TÜBINGEN , 10

par R. Clemens, 1852, 163 p., contient les RÉSULTATS de cette célèbre critique de la Bible, de
façon brève et juste (autant que je puisse en juger). Susciterait beaucoup d’intérêt en
ANGLETERRE, je crois, et se vendrait bien. Je vous recommande de le traduire.
Votre colère contre les illustrateurs m’amuse.
11

Vous avez bien fait de fréquenter les Anglais à Carlsbad : j’ai toujours fait de même en
Italie. Les Anglais sont la meilleure et la plus sûre des fréquentations.
Que les bons effets de la cure puissent se manifester !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer.


le 31 août 1858.
437. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Je vous ai écrit le 8 août et vous ai communiqué en détail le renseignement souhaité, mais à


mon étonnement, je suis toujours sans réponse. Si vous n’acceptez pas mes propositions, ni ne
les refusez, il va de soi que je ne m’estime pas non plus y être assujetti pour la suite. Mais ce qui
m’étonne encore davantage, c’est que vous ne m’ayez pas envoyé l’exemplaire que je vous avais
prié de me faire parvenir immédiatement, parce que je voulais commencer à travailler pour la 3 e

éd. Si vous deviez avoir l’intention de ne pas m’envoyer cet exemplaire avant d’avoir conclu le
contrat de la 3 éd, je vous prierais au moins de me le faire savoir, afin que je puisse commander
e

chez vous un exemplaire, contre mon argent . J’ai l’honneur d’être


2

Francfort s. M. votre
le 1 sept.
er
dévoué serviteur
1858. Arthur Schopenhauer.
438. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Votre honorée lettre du 18 de ce mois exige une réponse réfléchie et détaillée, afin que vous
obteniez dans cette affaire toutes les data et que vous puissiez ainsi prendre une décision.
Je vous fais donc d’abord savoir que M. Suchsland (librairie Hermann) m’a proposé, il y a
un an, d’éditer mes œuvres complètes. J’ai immédiatement répondu que cela ne saurait
s’accorder avec les droits des autres éditeurs. Ce à quoi il a répliqué avec la détermination et
l’assurance les plus grandes : « Très bien ! Une édition complète, qui doit être TOUT À FAIT
INTÉGRALE, ne peut être faite par les éditeurs des ouvrages séparés. » Je ne pouvais le croire et je
lui ai finalement dit : « Que diriez-vous si Brockhaus publiait à présent mes œuvres complètes ?
» Réponse : « Je devrais le laisser faire. » Je ne le croyais toujours pas entièrement, et toute cette
édition ne me semblait alors pas appropriée : j’ai donc refusé. Mais lorsque je vous en ai fait la
proposition, j’espérais secrètement que vous diriez la même chose que Suchsland, et nos
problèmes auraient été écartés. Mais vous n’avez rien dit de tel ; j’en conclus qu’il n’en est donc
rien ; puisque vous le sauriez certainement.
Je n’ai réservé les droits d’une édition complète à aucun de mes éditeurs. À présent je
voudrais vous citer ce qui, dans tous les contrats, est pertinent pour notre affaire :
1) Librairie HERMANN :
a) ÉTHIQUE. 1840/41. 500 exemplaires. L’auteur s’engage à ne pas faire publier de 2 éd. e

avant l’épuisement de la première ; dans le cas contraire, il devra payer 200 f. de


dédommagement à la librairie H. Les droits de propriété de la 2 éd. reviennent à l’auteur. La
e

librairie renonce à tous droits exigibles concernant cette dernière.


b) QUADRUPLE RACINE. 750 exemplaires. 2 éd., 1847. L’auteur s’engage à ne pas faire publier
e

de 3 éd. avant l’épuisement de la 2 ; dans le cas contraire, il devra payer des dédommagements
e e

de 200 f. Les droits de propriété de la 3 éd. reviennent à l’auteur. La librairie renonce à tous
e

droits exigibles concernant cette dernière.


c) VOLONTÉ DANS LA NATURE. 2 éd., 1854. 1 000 exemplaires. L’auteur s’engage explicitement
e

à ne pas faire publier de 3 éd avant épuisement de la 2 , sous quelque forme que ce soit ; dans le
e e

cas contraire, il devra payer des indemnités de 200 f. et par ailleurs les honoraires déjà versés
devront être restitués (!!) La librairie renonce à tous droits exigibles concernant la 3 éd.
e

2) A. W. Hayn : Parerga. 1850/51. 750 exemplaires. « Si une 2 édition s’avérait nécessaire,


e

le droit de propriété revient à l’auteur qui sera libre de trouver un accord avec l’éditeur. » Je n’ai
pas le contrat avec Hartknoch sous la main, mais il existe. Il est à peu près formulé comme celui
conclu avec Hayn.
Récemment, Suchsland m’a dit qu’il avait assez envie de mettre au pilon le reste de
l’Éthique afin de publier une 2 éd. « L’hiver dernier il a écrit à Hayn qu’il souhaitait connaître le
e

nombre d’exemplaires des Parerga (qui éveillent de façon tout à fait maladive son appétit)
encore disponibles, et si H. voulait bien les lui céder. » Il m’a montré la réponse : H. refuse de les
lui céder, et ne répond même pas à la question concernant le nombre d’ex.
À présent vous souhaitez que je négocie avec tous ces éditeurs pour ensuite leur acheter les
restes. Comme vous souhaitez aussi baisser en proportion les honoraires de 225 à 100, je ferais
une excellente affaire ! comme je vous ai donné gratuitement la 2 éd, je pourrais me permettre
e

de perdre un peu pour cette dernière. Mais n’ayez crainte : je suis un homme qui comprend la
plaisanterie. Le seul fait de négocier avec les éditeurs respectifs est une corvée* à laquelle je ne
me prêterai pas. C’est là une affaire de libraires, et ces messieurs sauront beaucoup mieux que
moi comment s’arranger entre eux. De plus, vous êtes le matador : ces gens vous rendront des
comptes et tâcheront de se montrer le plus aimable possible. Mais avant de m’employer à cette
corvée*, je préfère encore laisser les choses à leur cours naturel, et attendre que chaque éditeur
demande une nouvelle édition. Je n’y perdrais pas en honoraires : au contraire, j’ai l’intention
d’exiger un Fréd. d’or en plus, pour les Parerga seuls.
En ce qui concerne les honoraires, j’ai formulé des exigences tellement modestes que je suis
décidé à ne pas m’en écarter. Si vous voulez imprimer moins que ce que j’ai autorisé, vous êtes
libre de le faire, mais cela ne change pas les honoraires. Vous changerez sans doute encore
d’avis. En 1850, j’étais TELLEMENT INCONNU que 3 librairies n’ont pas voulu de mes Parerga,
même gratuitement : malgré cela, Hayn demanda alors à en faire imprimer 1 200 exemplaires. Et
maintenant que je suis célèbre, vous ne voulez tirer mon ouvrage principal qu’à 1 000
exemplaires ! pour éviter avant tout de risquer quelques feuilles de papier en plus. Vous voulez
d’abord voir « si cela prend ». Mais mes ouvrages ont pris, et avec fracas. Toute l’Europe les
connaît. Des visiteurs viennent me voir de Moscou et d’Uppsala. Et cela va encore croître : ma
gloire se propagera encore pendant de très nombreuses années, et ce selon les lois d’un incendie.
Mes ouvrages connaîtront encore beaucoup de rééditions. On ne saurait en douter.
Au cas où, dans les conditions évoquées, vous auriez toujours l’intention d’entreprendre
l’édition complète, je dois encore remarquer 2 choses. Premièrement, j’exige dans une clause du
contrat que vous vous chargiez de toutes les exigences que les anciens éditeurs pourraient
m’adresser à ce sujet. Deuxièmement, j’ai décidé un changement dans l’ordre des volumes, à
savoir que le volume des écrits mineurs constituera le 3 volume, parce qu’il contient tant de
e

parties intégrables à ma philosophie, alors que les Parerga ne sont dans ce cas que pour ⅓, avec
⅔ de petits traités autonomes, et enfin allotria, et tout à la fin les poèmes. C’est pourquoi ces 2
volumes doivent être les derniers.
Je vous remercie pour l’envoi de l’exemplaire ; depuis je me suis mis au travail avec zèle,
mais cela n’avance que lentement, car je considère cette édition comme étant de dernière main et
je procède donc avec très grand soin.
Je demeure avec ma plus haute considération

Francfort s. M. votre
le 22 sept. serviteur dévoué
1858. Arthur Schopenhauer.
439. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur et ami,

C’est avec un vif regret que j’ai pris connaissance de votre maladie oculaire et du terrible
danger de l’aveuglement. Dès à présent, soyez extrêmement prudent, ménagez vos yeux par tous
les moyens et cherchez à les fortifier ; par ex. en les ouvrant et fermant sous l’eau, si vous
supportez encore quelque chose de tel. Je pratique cela depuis 40 ans.
J’ai lu attentivement le passage que vous citez ; cependant je ne crois pas que Kant voulait
parler de son prédécesseur, car si ce dernier avait formulé l’idéalité de l’espace, on n’aurait pas
pu le mécomprendre de cette façon, comme le dit K. L’objet, la source première de la grande
doctrine, est très important et digne d’être exploré. Une académie allemande devrait en faire une
2

question et la mettre au concours.


Novi in Africa : j’aurais beaucoup de choses à raconter et de curieux documents à montrer,
3

mais cela attendra jusqu’à votre prochaine visite. Or, res magna gravisque : je travaille à la 3
4 e

édition de mon ouvrage principal, depuis 4 semaines ; Brockhaus me l’a en effet demandé. Mais
je ne suis pas encore d’accord avec lui sur les conditions : il voudrait sans doute aussi éditer mes
opera omnia, mais les droits des autres éditeurs nous font obstacle.
Hornstein est venu ici. Je me réjouirai beaucoup de vous voir ici, comme je l’espère, cet
hiver. Si cela peut se faire, je vous prie de noter le titre du livre de Helmholtz dont vous m’avez
jadis rapporté l’acte de plagiat. Cela n’est pas urgent — c’est seulement dans l’éventualité de
l’édition complète ; il y aurait là l’occasion de lui passer un savon.
En souhaitant cordialement que vous vous rétablissiez entièrement et durablement

Francfort votre ami dévoué


le 1 oct. 1858.
er
Arthur Schopenhauer
440. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Monsieur le Dr. Lindner,

Recevez mes remerciements tardifs pour l’envoi et la rédaction de votre livre . Je n’ai pas
2

voulu vous écrire avant de l’avoir lu entièrement, n’ai pas pu m’y mettre tout de suite et n’ai
qu’une petite heure le soir pour des lectures légères. Votre roman est très bon : la construction
réfléchie et ingénieuse, bien exécutée, personnages consistants, grande variété des situations et
des hommes, et partout beaucoup de connaissance du monde et des hommes, également quelques
réflexions pertinentes. Votre image en miniature de la révolution est excellente. Je ne puis
trouver dans le livre, comme vous l’annonciez, une incarnation de ma philosophie ; quoique cela
en a tout l’air vers la fin. Mais une chose pareille serait certes difficile à accomplir. Mais c’est
avec joie que j’ai vu que ma philosophie était souvent évoquée, et avec éloge. Comme vous
engendrerez sans doute d’autres enfants légitimes de ce genre, je ne voudrais pas vous priver
d’une critique bien intentionnée, à savoir que votre dialogue sérieux est parfois trop rigide et
forcé, pas assez naturel et léger. Pour cela, prenez pour modèle W. Scott.
Je travaille durement à ma 3 édition, cela avance lentement. Je n’ai encore rien conclu avec
e

Brockhaus, parce que nous ne savons pas si ce sera seulement pour mon ouvrage principal ou
pour une édition complète. Il penche pour la dernière : je lui ai soumis les accords des autres
éditeurs et j’espère qu’il s’en occupe. J’ai encore besoin d’une ½ année pour la révision et
l’augmentation de l’ouvrage principal et je pense
Fais ce qu’il faut dans tes affaires
Le reste se fera tout seul .
3

Dans le Débats du 8 oct., une recension par Frank fait preuve d’une terreur pieuse à mon
4

encontre. Je vois par là qu’ils savent qui je suis. Tenez parole, doctor indefatigabilis, et faites-
moi part de ce que vous apercevez. Mon lamento, c’est que je n’en connais pas même la moitié.
Dans les Lit. Unterhalt.-Blätter, on publiera prochainement une recension du livre de Seydel,
auctore Bähr .
5

Hélas, aujourd’hui mon meilleur et vieil ami le Dr. Emden est décédé ! Cette perte
irréparable me cause un deuil profond. Cela fait partie des souffrances de la vieillesse : on perd
ses amis. Je dois me consoler avec la nouvelle génération d’amis plus jeunes, parmi lesquels je
vous compte tout particulièrement. Saluez votre aimable épouse et vivez en bonne santé,
joyeusement et longtemps !

Francfort s. M., Arthur Schopenhauer


le 3 nov. 1858
441. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher,

Je vous remercie pour l’envoi de votre petit écrit qui est vraiment assez bien réussi. Vous
2

avez cité un très bon passage de Bacon que je connais bien : c’est bien souvent qu’au cours de
recherches ennuyeuses, j’ai soupiré « oui, writing makes an exact man ». 3

En regroupant les prétendus nouveaux classiques et les classiques, p. 13, vous avez accordé
100 fois trop d’honneurs aux premiers (sauf quelques-uns) ; et quant à votre éloge de Julian
Schmidt — que les dieux vous pardonnent. Savez-vous au moins comment cette crapule parle
4 5

de moi, dans son Histoire de la littérature ?


Je me réjouis de savoir que c’est BÄHR qui est l’auteur de la recension tant discutée : il est à
la hauteur. J’espérais la trouver tout de suite dans les Blätter, mais elle n’y est toujours pas.
Dans le Journal des Débats, du 8 oct., à la fin d’une longue recension par Frank, de
l’Institut*, on jette en passant un anathème chrétien sur moi ; cela m’est très agréable ; si
seulement ils me connaissent et me nomment ! c’est tout ce qu’il faut*.
La dernière nouveauté, c’est un roman en 2 tomes, Tempête et boussole, anonyme, mais
l’auteur en est le Dr. Lindner, qui me l’a annoncé comme étant un exemple et une incarnation de
ma philosophie : je ne trouve pas que ce soit vraiment le cas, même s’il y est souvent question de
ma philosophie et que des passages en sont cités. Sinon c’est un joli roman. Vous pourriez faire
un petit article dans les Lit. Blätter sur le traitement esthétique de ma philosophie, donc sur ce
roman et sur les Conquérants du ciel, en évoquant, en passant, Sansara . 6

Il existe en Angleterre un grand parti anti-ecclésiastique, qui bénéficierait grandement d’une


traduction du Livre des chrétiens . Là-bas, la géologie a discrédité l’A. T., et ce livre pourrait
7

éclairer le Nouveau Testament.


« To marry or not, is the question » : — Question ?!! I’ll give you a sound maxim of my OWN
MAKING, though it’s in English :
Matrimony = war & want.
Single blessedness = peace & plenty.

Stick to that. This, bye the bye, is an alliteration ; the Germans call it a staff-rime. But
what’s that to us ?
But if you can get a girl with at least 30 000 Rth. — you may . 8
Frankford o. M., Affectionately yours
Nov. 4. 1858. Arthur Schopenhauer.

442. À ALBERT MÖSER 1

Mon jeune ami,

Votre intérêt pour ma philosophie et votre assimilation de cette dernière me réjouissent de


tout cœur, d’autant plus que vous avez d’abord étudié la philosophie de Kant. Car cette dernière
est le fondement de la mienne, qui ne peut pas être comprise en profondeur sans elle ; d’autre
part, on apprend à mieux comprendre Kant par moi. Nous sommes complémentaires l’un de
l’autre, et c’est pourquoi nous sommes tellement hétérogènes. Persévérez dans vos études : ainsi
vous avancerez de plus en plus loin dans la profondeur et vous trouverez toujours davantage ; de
plus, repetitio est mater studiorum, et ce qu’on laisse reposer s’efface peu à peu.
Que la nature vous accorde une santé durable et le destin un chemin de vie paisible, c’est ce
que vous souhaite de tout cœur

Francfort s. M. votre
le 25 nov. Arthur Schopenhauer
1858.
443. À DANIEL FRIEDRICHSEN 1

Monsieur,

Je vous annonce, selon votre souhait, que je vous prie de bien vouloir me transmettre ma
rente viagère de 150 Rthlr ici, après la nouvelle année.
Il paraît que la succession de Madame Mertens ne se présente pas très bien : elle a trop
investi dans les œuvres d’art et les antiquités ; qui certes sont maintenant ce qu’il y a de mieux
dans son fonds.
Mon portrait dans l’Illustrierte Zeitung , qui avait éveillé votre curiosité, n’a paru que ce
2

mois-ci, et c’est une grimace effroyable qui a bien peu de ressemblance avec moi : un gros nez,
car la machine était trop près, les yeux tout à fait défigurés, une gueule épouvantable, etc.
La rente viagère est le dernier fil qui me relie encore à ma ville natale. Si, à l’occasion, vous
pouviez me communiquer n’importe quoi à ce sujet qui pourrait être susceptible de m’intéresser,
vous obligeriez beaucoup

Francfort s. M. votre
le 27 déc. serviteur dévoué
1858. Arthur Schopenhauer
444. À DAVID ASHER 1

Dear Doctor !

You write english astoundingly well , faith you do, and I am glad of it, for your sake, as it is
2

your trade, and for my sake, because I see in you the future rare and unparalleled translator of
my works, it’s for that you have come into the world. Believe me, it’s so. But don’t now you think
that I shall go on writing in English. No such thing : you may though, if you choose : no
objection. But with me it would only be an affectation, moreover a task, and a bore to boot . 3

Je vous dois donc une réponse à deux lettres. D’abord je vous remercie d’avoir attiré mon
attention sur le passage dans les Stimmen der Zeit , mais je suis un peu déçu que vous pensiez
4

qu’il contient quelque chose de vrai.


Cela provient seulement du fait qu’il s’agit d’un gauchissement de la vérité, qui s’énonce
comme suit : « Parmi les philosophies, seules ont gagné en propagation celles qui se détournent
de la haute spéculation ou qui conduisent plus ou moins à la foi, à savoir la philosophie de
Herbart et celle de Schopenhauer. »
Ce qu’il entend en effet par « haute spéculation », c’est le verbiage sur l’Absolu, qui est en
vérité Jéhova, le Dieu des Juifs déguisé, et quant à la substance simple et immatérielle appelée
Mlle Âme, les professeurs de philosophie peuvent lui fournir cela en masse. Moi, fidèle aux
principes kantiens, je ne parle pas de ce dont ni moi, ni les autres ne peuvent savoir quelque
chose. Et quant au « qui conduisent plus ou moins à la foi », je me demande bien quels
pourraient être mes articles de foi ? Peut-être le fait que le néant, qui est ce qui reste en dernière
instance, n’est pas absolu, mais relatif ?
Même si cela n’est que du bavardage, je n’ai pas voulu vous laisser dans l’erreur à ce sujet.
Si vous pouvez obtenir pour moi un exemplaire de l’Illustrierte et me l’envoyer (sous
5

enveloppe fermée), cela me fera plaisir ; je l’ai seulement vu et lu au Casino. La grimace est
ignoble et me ressemble très peu.
Le gros nez est l’effet de la machine qui était trop près, les yeux louchent, la gueule est
infâme. C’est la conséquence de l’avarice de ces larrons, lesquels feraient bien de publier un bon
portrait en supplément. La chose doit avoir 6 000 abonnés = 30 000 badauds. Je suis très satisfait
de la biographie de Frauenstädt .
6

Je possède les Anregungen avec l’article de Büchner . On pouvait prévoir la manière dont un
7

tel garçon-coiffeur ignorant et plat allait juger ma philosophie. Animé par la jalousie, il veut me
rabaisser, mais malgré lui, sa plume laisse parfois échapper de l’admiration. Quel beau fatras !
par ex. p. 4, « ceux qui auraient la plus grande compétence pour parler de la volonté seraient…
les physiologues » ! scilicet ceux qui approchent l’homme du dehors et qui ne savent pas ce qui
se passe dedans ! Pour parler de l’effet des clystères, ils sont sans doute compétents. Pour contrer
mon idéalisme transcendantal, il fait appel à ma fable sur Iris et le soleil ! De surcroît il y est
8

question d’un soleil qui parle et qui est vu et entendu par Iris. Quel cochon ! En plus le larron
ment : où ai-je dit que ma philosophie allait régner plus de 60 ou 100 ans — ou même parlé de
son effet futur ? Nulle part, il l’invente p. 3. D’ailleurs tout cela ne me nuit pas. Le public n’est
pas stupide à ce point : c’est plutôt Voltaire qui a raison : ces gens servent à répandre votre
renommée*. Mais il menace de donner une suite dans les prochains numéros. Vous feriez donc
bien de donner votre article sur les trois romans à un autre journal. Europa est of very low
9

standing . Je pense que les Literarische Blätter le prendraient. Sinon cela vieillit.
10

J’ai lu le fatras de Sengler , je ne sais pas ce que cela signifie.


11

Je ne puis rien dire sur votre projet d’élucider le Faust à partir de ma philosophie, car cela
dépend entièrement de la manière. On peut éclairer toute chose à la lumière de ma philosophie, et
l’on verra toujours plus clair. Cela dépend de votre conception : vous devez savoir si vous avez
pensé quelque chose de clair, de vrai et de nouveau.
La tante Voss, du 28 nov., supplément, donne une recension de Tempête et boussole. La
même revue, du 12 décembre au 1 janvier, donne des traductions de mon parent spirituel
er

Leopardi (que je lis avec délice* dans le texte original, depuis deux mois), en m’évoquant avec
12

hommage au début et surtout à la fin. La Wiener Zeitung aussi m’a encore évoqué plusieurs fois.
Lindner va m’envoyer tout cela.
Une nouvelle année de bonheur, de satisfaction et avant tout de santé, c’est ce que vous
souhaite

Francfort s. M., de tout cœur


le 3 janv. 1859. Arthur Schopenhauer.
445. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Monsieur le Dr. Lindner,

Mes remerciements chaleureux pour vos divers envois qui m’ont tous fait très plaisir,
2

surtout le dernier, et d’autant plus qu’à la fin de la traduction, on parle de moi de manière
tellement élogieuse. Leopardi m’occupait depuis déjà 2 mois et j’ai lu ses traités en prose (ce
n’est que maintenant que j’aborde la poésie) avec le plus grand diletto. J’ai alors pensé : « Si
quelqu’un voulait bien traduire cet auteur ! » Et tout de suite arrive le doctor indefatigabilis pour
exaucer ce vœu à peine prononcé.
Je ne sais pas si vous avez fait vous-même la traduction. Dans l’ensemble, elle est juste et
bonne, mais les fautes ne manquent pas pour autant. Je n’ai comparé que peu de choses, mais je
voudrais quand même, pour aiguiser votre attention, vous signaler quelques fautes ; comparez ce
que vous avez écrit avec ce qui suit. Donc IL GALLO : « IL MISERO NON È PRIMA DESTO (au lieu de
destato, RÉVEILLÉ), donc : « Le malheureux est À PEINE RÉVEILLÉ qu’il retombe dans sa misère. »
Tout de suite après : a conciliare il sonno concorse o letizia o speranza veut dire : « ATTEINDRE
le sommeil avec le concours de la joie ou de l’espoir. »
Pare che l’essere delle cose…. NON POTENDO MORIRE QUEL CHE NON ERA, PERCIÒ… est
complètement faussé, la première moitié de la période est tirée vers la précédente et la 2 a été
e

omise. Cela veut dire : « Comme ce qui n’existe pas ne peut pas mourir, il s’ensuit POUR CETTE
RAISON (perciò, c.-à-d. dans le but de mourir) que les choses qui existent proviennent du néant. »
MALAMBRUNO : une erreur HEUREUSE, c’est-à-dire un cas sur 1 000. « Fa’ conto » : une expression
très courante, signifie « tu peux compter dessus, tu peux t’y fier » — traduit fautivement par «
prends garde à » — qui cependant produit un effet comique et meilleur ; du reste : « che vi sia
de’ diavoli », etc., signifie « qu’il y a des diables honorables comme il y a des hommes ». Et
ammazare ne signifie pas « battre à mort », mais assassiner, tuer quocunque modo.
Ceci provient des comparaisons PEU NOMBREUSES que j’ai faites. Comme c’est l’ensemble de
la traduction qui doit paraître, il serait bon de la faire revoir par quelqu’un qui a été parfaitement
3

italianisé en Italie. Je n’en ai pas le loisir, car le travail pour la 3 édition accapare tout mon
e

temps. Je n’ai pas encore avancé avec Brockhaus : il se tait depuis 3 mois. Mais il faudra qu’il
vienne à moi. Il ne peut faire autrement.
Dans le tout nouveau cahier de janvier des Anregungen se trouve le premier article d’une
critique de ma philosophie par… Büchner. Il parle comme on pouvait l’attendre de la part d’un
tel garçon-coiffeur ignorant et plat ; avec cela, il ment, par ex. « 60-100 ans », je n’ai jamais dit
une chose pareille.
Je vois à l’instant dans la Postzeitung que votre roman a été interdit, mais que Flottwell l’a
4

bien remis en circulation. Quelle farce superbe ! Ainsi, il va rencontrer la faveur* du public ;
comme les femmes qui préfèrent les hommes balafrés.
En vous souhaitant, à vous et à votre aimable épouse, une nouvelle année joyeuse et avant
tout saine

Francfort s. M., most sincerely yours


le 7 janv. 1859. Arthur Schopenhauer
446. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher !

Vous m’auriez rendu un bien mauvais service si vous aviez réussi à persuader Brendel de ne
pas publier la suite de l’article de Büchner. Je préfère largement que l’on écrive contre moi plutôt
que l’on n’écrive pas du tout. Toute attaque qui ne renverse pas son homme le renforce.
Si vous me dédiez votre écrit sur le Faust, cela me fera plaisir ; en revanche, je n’écris pas
de préfaces pour d’autres livres : jamais. Si vous ne demandez pas d’honoraires, vous trouverez
2

facilement un éditeur. 4 feuilles pour une brochure, c’est peu. Les libraires d’assortiments y
gagnent trop peu pour en encourager la promotion. 4 feuilles pour un article de journal, c’est
trop. Vous devriez le raccourcir de la moitié : une telle condensation est avantageuse pour la
plupart des écrits — surtout quand l’auteur pense aux honoraires.
Si par Vierteljahrschrift de Cotta, vous entendez la Deutsche Vierteljahrschrift, alors cela
me semble inadéquat. Le plus approprié serait sans doute le Deutsches Museum de Prutz.
Je suis très occupé, car depuis 4 mois je travaille à la 3 édition de mon ouvrage principal,
e

qui à présent est épuisé. Mais je n’ai pas encore trouvé d’accord avec Brockhaus pour les
conditions. Il aurait dû s’annoncer plus tôt. Mon ouvrage sera absent des librairies pendant
presque un an.

Francfort s. M., most affectionately yours


le 11 janv. 1859. Arthur Schopenhauer.

P. S. Mes remerciements pour l’envoi de l’Illustrierte.


447. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Vous avez laissé ma lettre du 21 sept. sans réponse. Entre-temps, mon ouvrage est épuisé et
on ne peut plus l’acheter en librairie, et cela sera encore le cas pendant au moins 8 mois — des
conditions qui ne peuvent qu’être un grand obstacle à la propagation de plus en plus intense de
ma philosophie. Je dois vivement regretter que vous n’ayez pas fait appel à moi plus tôt ; la 3 e

édition pourrait être déjà imprimée et prête.


J’ai avancé dans mon travail. Depuis plusieurs semaines, le tome 2 est achevé et à
disposition : j’estime que les ajouts prendront 1 feuille ½. Le tome 2 contient beaucoup plus
d’ajouts : j’entame en ce moment la 15 feuille pour ce dernier. J’aurais des difficultés à le
e

terminer avant fin avril : cela pourrait bien aller au-delà. En tout cas l’impression du tome 1
occupera le temps d’ici là. Je ne veux plus perdre de temps ; c’est pourquoi je vous prie de me
dire définitivement si vous prenez la 3 éd. aux conditions que je vous ai proposées et si vous
e

voulez commencer l’impression du tome 1 sans tarder. Je ne céderai pas sur ces conditions ; car
elles sont très équitables, même si l’on excepte le fait que vous avez eu gratuitement la 2 éd.e

d’un ouvrage aussi important et volumineux, et que vous l’avez entièrement écoulé. Si malgré
cela vous ne deviez pas le vouloir, je vous prierais de me le dire, afin que je puisse le proposer à
quelqu’un d’autre sans plus perdre de temps.
Après mon exposition de la situation, vous aurez sans doute abandonné le projet d’une
édition complète. Je n’y tiens pas non plus, car je pense finalement qu’il est plus favorable à la
propagation de mes œuvres que chacun puisse les acheter peu à peu, plutôt que de devoir les
acheter d’un coup. Si vous en avez quand même l’intention et si vous y réussissez, il restera
toujours suffisamment de temps avant la fin de l’impression de cette 3 éd. : il ne manquerait
e

alors plus qu’une page de titre générale.


En attendant pour bientôt votre réponse favorable je demeure avec ma haute considération

Francfort s. M. votre
le 18 janv. serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer
448. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Vous avez donc accepté mes conditions, et je me réjouis que nous ayons trouvé un accord.
Même si c’est de tout cœur que je voudrais me montrer serviable à votre égard, je ne puis tout de
même pas accepter que vous imprimiez 1 250 exemplaires maintenant et qu’après la vente de ces
derniers, vous réalisiez une 4 éd. inchangée de 1 000 exemplaires. Cela reviendrait à vous
e

donner gratuitement la 4 éd., comme la 2 . Toute cette situation provient du fait que je vous ai
e e
accordé trop d’exemplaires, afin de me montrer généreux : je pensais à 3 × 750 = 2 250. Je vois
que vous vous contenterez de moins d’exemplaires, mais vous êtes libre de le faire : imprimez-en
tant que vous voudrez, jusqu’à 2 250. 3 Frédérics d’or sont des honoraires honnêtes, mais
certainement pas importants, voire démesurés, ce qui vous aurait autorisé à manifester d’autres
exigences. Les MAUVAIS écrivains demandent des honoraires bien différents ! Par ex. l’Illustrirte
Monatsschrift de Westermann en rémunère certains avec 60 Rth par feuille. Je suis modeste, car
je n’ai pas la chance d’être un mauvais écrivain.
Que vous ne payiez les honoraires qu’à la parution de l’ouvrage me convient ; mais si une
édition complète devait se faire, il faudra payer après la parution du 2 , du 3 et du 5 volume de
e e e

cette édition. Ce qui est curieux, c’est que Suchsland persiste dans son affirmation, mais sous la
condition que les ouvrages de l’édition complète ne soient pas mis en vente séparément. Je crois
que vous feriez bien de consulter à ce sujet le livre de Wächter sur les droits éditoriaux , 1857. 2

Car errare humanum est ; vous ne pourriez qu’être content de vous être trompé.
Je vous enverrai le tome 1 tout de suite après la signature du contrat. J’ai deux objections
quant à l’intention de faire paraître ce dernier avant l’achèvement du tome 2. 1° Cela va à
l’encontre de vos intérêts, parce qu’il faut lire les deux tomes EN MÊME TEMPS et que chaque
chapitre du tome 2 renvoie à un § du tome 1, et celui-ci renvoie à celui-là : veuillez bien vérifier
ce que j’ai dit à ce sujet dans la préface à la 2 éd., p. XXI, XXII. Et de façon générale, le tome 2 est
e

beaucoup plus BRILLANT : le premier n’a pas réussi à percer tout seul, mais seulement quand est
venu le 2 . 2° Je dois quand même faire une préface pour la 3 éd. ; or on ne la fait toujours qu’à
e e

la fin. Les 2 premières préfaces doivent assurément être réimprimées : celle de la 3 sera brève,
e

tel que je puis en juger jusqu’à présent. En tout cas il faut lui garder de la place lors de
l’impression. Je souhaiterais inclure dans le contrat l’obligation de respecter de la façon la plus
rigoureuse mon ORTHOGRAPHE et ma PONCTUATION, et l’obligation de m’envoyer pour la 3 e

correction chaque feuille, même si rien n’a été changé, ainsi que le manuscrit correspondant.
Cela me tient à cœur plus que tout. Par ailleurs, j’aimerais que dans vos annonces, vous
n’ajoutiez ni glorifications ni commentaires. Je me réserve le droit de décider des arrangements
pour la 4 éd. Comment pourrait-on se fixer dès maintenant ! Il va de soi que c’est à vous que je
e

la proposerai d’abord. Que j’assiste encore à cette dernière est incertain, mais non pas
improbable, car j’ai la constitution nécessaire pour atteindre un âge élevé. Je demande dix
exemplaires gratuits sur vélin, tous les 10.
Je souhaite vivement que vous gardiez le format et la typographie précédents : on pourra
alors voir l’importance de l’augmentation. Comme le tirage sera important, vous pourrez
demander un prix bas ; ce qui profite à l’écoulement. Cette impression est très bonne tout en
étant économique.
Dans le contrat, vous ne devez pas fixer une date à laquelle il faudrait que j’aie livré le tome
2 : je fais tout ce que je peux pour le faire avancer, mais je ne voudrais pas me précipiter . 3
J’attends donc l’envoi du contrat en 2 exemplaires dont je vous renverrai un exemplaire
signé, et je demeure avec ma haute considération

Francfort s. M. votre
le 27 janv. serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer
449. À F. A BROCKHAUS 1

Monsieur,

Je vous prie de bien vouloir croire que parmi les 7 langues que je pratique, il n’y a en
aucune qui me soit aussi difficile à employer que la langue du refus. Mais cette fois-ci, il le faut :
je ne puis admettre que vous fassiez deux éditions d’une seule ; sous quelque appellation que ce
soit. Je vous ai vendu UNE édition, C’EST-À-DIRE : UNE composition, avec l’autorisation de
l’imprimer 2 250 fois. Je constate que j’ai poussé trop loin ce chiffre ; mais je ne le retire
aucunement ; d’autre part, je ne veux pas que vous le preniez comme base pour établir de
nouvelles concessions. Concernant votre argument, il est tout à fait clair que les intérêts
d’environ 85 000 feuilles de papier d’impression machine sont incomparablement moins
importants que les frais de composition d’environ 85 feuilles. J’ai donc barré la clause qui s’y
rapporte dans le contrat. Lorsqu’en 1854, Suchsland avait imprimé 1 000 exemplaires de la
Volonté dans la nature, il regrettait vivement de ne pas en avoir demandé 2 000. Vous en avez
250 de plus.
De même, je ne puis démordre de l’exigence d’être préservé de vos éloges et commentaires.
En cela je fais appel à Monsieur votre père (que le ciel veuille bien le ramener en bonne santé au
2

plus vite !) qui s’est montré beaucoup plus libéral que vous sur ce point. Car dans le contrat de la
2 éd. j’avais oublié ce point, mais je l’ai averti immédiatement après : il l’a accepté sans tarder et
e

il a très loyalement tenu parole : aucune de vos annonces de la 2 éd. ne contient de


e

commentaires. Vous pouvez vérifier. Mais à l’époque, mon ouvrage était peu connu : maintenant
qu’il est célèbre dans le monde entier, vous voulez le recommander à un public vénérable pour
qu’il ait l’amabilité de le prendre en compte. Je trouve que c’est une humiliation pour mon
ouvrage que de le mettre sur le même niveau que tous ces livres qui paraissent année après année
— pour ne vivre que peu de temps ; alors que le mien porte en lui une force vitale si différente.
En vérité c’est pour vous-même, c’est-à-dire pour la vente, que les éloges seraient NUISIBLES ;
mis à part le fait que je ne comprends pas comment les éditeurs peuvent dépenser des frais
d’annonce aussi élevés pour des éloges ; car au fond, chacun sent bien ce qu’exprime le proverbe
arabe : « Ne crois pas ce que le marchand dit de sa marchandise. » Moi, je dis : good wine needs
no bush , et je ne veux pas d’autre réclame pour mon ouvrage que son mérite propre ainsi que sa
3

gloire qui grandit chaque jour.


Je joins l’esquisse du contrat : dès qu’il sera signé, le premier tome vous sera expédié. Je
travaille avec grand zèle pour le 2 ; car il m’importe à moi aussi que l’ouvrage soit de nouveau
e

en librairie. Quelqu’un de Hambourg m’a demandé À MOI si je ne pouvais pas lui remettre un
4

exemplaire. Or je n’en ai pas.


En attendant la conclusion de notre affaire je demeure avec ma haute considération

Francfort s. M. votre
le 5 févr. serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer.
450. À HEINRICH GUSTAV BRECHT 1

Honoré Monsieur le juge,

Votre intérêt pour ma philosophie et même pour ma personne me réjouit beaucoup. Je dois
regretter d’autant plus que vous ayez pu croire que je ressemblais à l’épouvantable caricature
dans l’Illustrierte Zeitung. Elle a été faite d’après une mauvaise photographie, mais les copies du
graveur sur bois sont 10 fois pires. Le gros nez est dû uniquement à la machine, qui était trop
près ; les yeux louchent, la bouche est tordue : il reste à peine une ressemblance éloignée […].
J’ai été souvent photographié, pour toutes sortes d’inconnus, mais toujours de façon
insatisfaisante. Lunteschütz m’a dit que Schäfer, le photographe de cette ville, a maintenant
atteint le sommet de cet art grâce à un nouvel appareil et qu’il a réalisé de très beaux portraits. Si
vous voulez l’en charger, je voudrais bien poser pour lui : cela se passe très rapidement ; les
peintres à l’huile demandent un plus grand sacrifice de mon temps, et en ce moment je suis très
accaparé par la révision et l’augmentation de mon ouvrage principal pour la 3 édition.
e

En comptant sur la persistance de votre sympathie

Francfort s. M. Votre
le 8 févr. 1859. serviteur dévoué
Arthur Schopenhauer

451. CONTRAT
AVEC F. A. BROCKHAUS 1

Entre l’auteur Monsieur le Dr. Arthur Schopenhauer à Francfort s. M. d’une part et le


libraire-éditeur F. A. Brockhaus à Leipzig d’autre part, a été conclu le contrat ci-après, sur la
base d’un échange épistolaire.
§1

Monsieur le Dr. Schopenhauer accorde à la librairie Brockhaus les droits d’édition pour la
troisième édition, augmentée de quelques feuilles, de l’écrit déjà paru aux mêmes éditions : Le
Monde comme volonté et représentation.
§2

La librairie Brockhaus imprimera cette troisième édition selon la même disposition


typographique que celle de la deuxième édition, et l’imprimera donc en deux tomes qui ne
paraîtront toutefois pas séparément, mais ensemble.
§3

La librairie Brockhaus s’engage à commencer l’impression quelques jours après la réception


du manuscrit complet du premier tome et pendant ce temps Monsieur le Dr. Schopenhauer se
chargera de préparer le deuxième tome pour l’impression.
§4

La librairie Brockhaus est tenue de respecter de la façon la plus rigoureuse l’orthographe et


la ponctuation de Monsieur l’auteur et de remettre à ce dernier avant l’impression définitive
chaque feuille de composition avec le manuscrit correspondant pour une dernière révision dont
l’auteur se chargera, toutefois sans être rémunéré. Les frais de port suscités par l’envoi et le
renvoi de ces feuilles de révision incombent à la maison d’édition.
§5

La librairie Brockhaus est autorisée à imprimer jusqu’à 2 250 exemplaires de la troisième


édition du Monde comme volonté et représentation d’A. Schopenhauer.
§6

Les honoraires ont été fixés à trois Frédérics d’or par feuille d’impression selon les
dispositions d’impression désignées au § 2, et la librairie Brockhaus doit les payer à Monsieur le
Dr. Schopenhauer lors de la parution de l’ouvrage.
§7

La librairie Brockhaus doit également fournir à Monsieur l’auteur dix exemplaires gratuits
de l’ouvrage sur papier vélin.
§8

La maison d’édition s’engage à ne pas ajouter de commentaires à ses annonces.


§9

Après épuisement de cette troisième édition, le droit éditorial de l’ouvrage revient à


Monsieur le Dr. Schopenhauer, et les parties contractantes, ou leurs successeurs légaux, doivent
débattre d’un nouvel accord pour la quatrième édition.
En accord avec les stipulations ci-devant, les deux parties contractantes ont signé et scellé
de main propre le contrat fait en deux exemplaires identiques.

Leipzig et Francfort s. M. F. A. Brockhaus.


8 février 1859. Arthur Schopenhauer.
452. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Veuillez recevoir ci-joint le contrat complété et le premier tome retravaillé. À présent je n’ai
plus qu’une chose à vous demander : donnez-moi un typographe assez intelligent ! Je sais
d’expérience que vous en avez d’excellents, mais ils ne sont sans doute pas tous identiques. Si
vous aviez l’intention de faire une annonce provisoire pour signaler que la 3 éd. est sous presse,
e

conformément à de nombreuses demandes, je n’ai rien à y opposer : cela serait un coup de


trompette adéquat.
J’espère recevoir bientôt la première feuille d’impression : je la renverrai sous enveloppe
fermée.
Je me réjouis de notre accord enfin conclu et je demeure avec ma haute considération

Francfort s/M., 11 févr. votre


1859. serviteur dévoué
Arthur Schopenhauer
(Ci-joint un paquet
dans une toile cirée noire, avec
l’inscription F. A. B.
contenant le manuscrit
valeur 20 Rth. Pr. C .)
t

453. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher ami,

Envoyez, envoyez le dialogue pour apaiser le feu de ma curiosité : ici, il n’y a aucune
2

chance de le trouver, dans cette Abdère.


J’ai trouvé un accord avec Brockhaus : après de longues discussions, il a accepté toutes mes
conditions. Le premier tome est déjà à Leipzig, il sera bientôt imprimé ; je travaille avec grand
zèle pour le deuxième ; je suis assailli par les peintres et les photographes. Aujourd’hui, Göbel
achève son excellent portrait à l’huile : je dois tout de suite le rejoindre dans ma bibliothèque, où
il travaille. La Revue germanique a donné la traduction d’une partie du chapitre sur la littérature
3

et le style dans les Parerga. J’aurais beaucoup de choses à vous raconter, mais le temps presse.
Merci beaucoup et salutations chaleureuses !
Francfort, Arthur Schopenhauer
14 févr. 1859.
454. À ERNST OTTO LINDNER 1

Mille fois merci, cher Monsieur le Dr. Lindner, pour le grand plaisir que vous venez de me
faire et auquel je n’aurais sans doute pas accédé sans vous. Hélas, je n’apprends même pas la
moitié !
C’est un pas important, qui m’ouvre la porte de l’Italie. Je l’ai lu 2 fois avec attention et je
m’étonne de voir combien cet Italien s’est approprié ma philosophie et combien il l’a comprise :
il ne résume pas mes écrits, comme les professeurs allemands, en particulier Erdmann, sans les
avoir vraiment compris et avec le numéro de page. Au contraire, il les a assimilés in succum &
sanguinem et il a tout à portée de main, dès qu’il en a besoin. Aussi, il est persuadé de la vérité
2 3

et il regorge d’enthousiasme ; mais il croit que pour amuser le public, il doit de temps à autre
afficher a sarcastic sneer ; p. 405-406 il me fait de grands éloges et ne rend pas justice à
4

Leopardi, que je lis souvent avec admiration. Je laisse passer les invectives contre moi, vers la
fin : car elles veulent dire que la giovane Italia, pas plus que notre racaille de 1848, n’a trouvé en
moi son homme. Peut-être l’auteur est-il un sbandito , à Zurich. Ces fréquentes forbici m’étaient
5 6

restées énigmatiques, jusqu’à ce que je me sois rappelé qu’il y a 3 ans, un décret de la police 7

hautement louable a coupé les barbes à Turin. Je vais faire venir ce cahier de Turin : cela me
procure vraiment trop de gaudium . La Revue germanique, janv., a donné une traduction partielle
8

d’un chap. des Parerga.


Avec Brockhaus, j’ai conclu un accord, seulement pour mon ouvrage principal : il voudrait
bien l’édition complète, mais il y a les autres éditeurs ! Il veut essayer de trouver un accord avec
eux. On ne peut toujours pas imprimer un titre général.
Le portrait de Göbel est terminé : je l’attends pour cet après-midi, car il veut l’envoyer : je
9

ne l’ai pas encore vu achevé ; Göbel a certainement tout rendu avec exactitude, sauf l’esprit et
l’expression : c’est un ens realissimum. Il en fera lui-même une gravure sur cuivre . Brecht, un
10

certain juge du tribunal de Berlin, qui jusque-là m’était inconnu, m’a prié de me faire
photographier pour lui : je devais lui citer le meilleur photographe de cette ville ; je lui ai cité
Schäfer : il m’a alors écrit que ce dernier allait se manifester auprès de moi. Mais il ne l’a pas
fait. Je crains que ce Schäfer, qui a maintenant une machine et une méthode nouvelles censées
dépasser tout ce qui précède, ne lui ait envoyé une mauvaise photographie réalisée il y a 4 ans , 11

dont j’ai autorisé la reproduction et la vente ; même chose avec une photographie envoyée
récemment à Pétersbourg, pour Böking , spécialiste du sanskrit academicum.
12

Hier, mon 71 anniversaire : 8 lettres de vœux , 1 sonnet , un bouquet tout frais de Berlin, il
e 13 14

est devant moi dans l’eau, il est venu par express, avec 3 broderies de perles ; ensuite 2 livres ,
15 16

dont un d’Asher qui m’est dédié : 10 jours après la première annonce, 400 COMMANDES ont été
faites ! C’est seulement parce que mon nom est écrit dessus — ils croient que c’est mon idée, ou
que j’en suis l’auteur.
Je vous renvoie donc ci-joint le cahier Rivista. En me recommandant pour d’autres doux
soutiens à l’avenir

Francfort s. M., votre


le 23 févr. dévoué et reconnaissant
1859 Arthur Schopenhauer

P. S. Le fait que de surcroît vous AFFRANCHISSIEZ ces communications hautement estimables


est nefas et je proteste, en regrettant que cela soit indispensable pour les enveloppes fermées.

455. À CARL G. BÄHR 1

Remerciements chaleureux, cher Monsieur Bähr, pour vos marques de sympathie à


l’occasion de mon anniversaire, et également pour votre lettre écrite de façon si raisonnable et
claire. 8 lettres de vœux, un sonnet et 4 livres sont arrivés ce jour-là et également un bouquet très
2

frais de BERLIN, toujours florissant aujourd’hui !


Le premier tome de la 3 éd. est déjà à Leipzig et j’attends d’une heure à l’autre la première
e

feuille de correction. Brockhaus me donne 3 Frédérics d’or par feuille, il peut alors imprimer 2
250 exemplaires. Je travaille toujours pour le 2 tome qui aura environ 5-6 feuilles
e

supplémentaires. Cela se propage vraiment : il y a un chapitre des Parerga dans la Germanique . 3

Mais ce qui m’a fait le plus grand plaisir, c’est la Rivista contemporanea qui paraît à TURIN et qui
ouvre son numéro de décembre sur un dialogue fort de 40 pages « Schopenhauer e Leopardi »,
où ma philosophie est exposée de façon très juste : l’auteur, De Sanctis, l’a entièrement
assimilée, il est convaincu et enthousiaste. Ainsi l’Italie s’ouvre aussi à moi. Lindner a donné des
traductions de Leopardi dans son journal, la Vossische, du 12 déc. au 1 janv.er

Le fait que vous traduisiez le traité sur la liberté de la volonté est tout à fait merveilleux :
4

c’est précisément de cela que les Français ont besoin ; de plus, ce sera le premier ouvrage
entièrement traduit, même si c’est le plus court. Vous aurez sans doute fait en sorte que ce soit
fidèle. Comme d’habitude, Lunteschütz s’est montré nonchalant*, mais il vous aura sans doute
envoyé son morceau de traduction : il n’a pas voulu me le montrer. Il dit que c’est seulement une
version rudimentaire. Il prétend travailler à deux portraits de moi : le premier, presque achevé,
5

repose depuis 2 ans, l’autre, fait à partir de son imagination, est prometteur, il n’est même pas
terminé à moitié. Mais Göbel, notre meilleur portraitiste, très talentueux, vient d’achever mon
portrait, certainement très ressemblant et sans flatteries ; mais je ne vois aucune trace d’esprit et
de vraie expression : c’est un vieux dragon. Göbel est un RÉALISTE superlatif. C’est exposé à
l’Association des Arts : il demande 30 Louis d’or et il veut en faire lui-même une gravure sur
cuivre. Ce n’est pas « l’idéal de l’individu », mais l’individu.
Que votre recension de Seydel ne soit pas encore parue est certainement la faute du prof.
Weiss et de la Faculté . En cela, Brockhaus se fait lui-même de l’ombre. Le livre d’Asher a
6

bénéficié d’une vente extraordinaire avant même sa parution, comme il me l’écrit : cela n’est
vraiment possible que parce que mon nom est dans le titre ; les gens croient que j’en suis l’auteur
d’une façon ou d’une autre.
Meilleures salutations à Monsieur votre père.
Vale & nos amare perge ! 7

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


le 26 févr.
1859.
456. À CARL SCHÜTZ 1

Très honoré Monsieur le Docteur,

Veuillez recevoir mes remerciements les plus cordiaux pour vos marques de sympathie à
l’occasion de mon anniversaire, et pour l’envoi de votre ouvrage qui m’intéresse beaucoup, car
2

je vais attentivement comparer votre traduction plus précise avec celle, poétique, de notre
excellent Horace Wilson ; dès que j’aurais le temps de m’y mettre. Depuis 6 mois, je suis très
3

occupé par la révision et l’augmentation de mon ouvrage principal qui est épuisé depuis 3 mois,
et qui paraîtra dans sa 3 édition à la fin de l’été. La propagation de ma philosophie va bon train.
e

Non seulement les Français ont déjà traduit pas mal de choses dans leurs revues ; mais aussi la
Rivista contemporanea, qui paraît à Turin, contient dans son numéro de décembre un dialogue
long de 40 pages, « Schopenhauer e Leopardi », qui est une présentation tout à fait juste de ma
doctrine.
La nouvelle de votre aveuglement incurable m’a vraiment ébranlé ; ô Sansara, Sansara !
Vous avez la consolation de votre famille ; j’en serais privé dans un cas semblable. Voilà
pourquoi c’est pour moi une chance d’être entièrement bien-portant et vigoureux, en particulier
mes yeux qui sont encore comme quand j’avais 22 ans, un peu myopes pour ce qui est éloigné,
infaillibles pour ce qui est proche.
Notre meilleur peintre, Göbel, vient d’achever mon portrait et l’a exposé : il veut en faire
une gravure sur cuivre. Ils me peignent pour spéculer, pour la vente ; ils en ont déjà réalisé 5.
Je vous souhaite de tout cœur l’allégement de votre infirmité par les plaisirs de l’esprit et
l’aide des vôtres et je demeure

Francfort s. M. votre
le 27 févr. sincèrement dévoué
1859. Arthur Schopenhauer
457. À ADAM VON DOSS 1

Cher Monsieur von Doss,

Inutile de vous dire combien votre fidèle attachement et votre sympathie me font du bien.
J’ai également lu avec une grande satisfaction votre dernière lettre. C’est grâce à vos éloges
persistants que j’ai commandé Leopardi, et que je l’ai enfin reçu en automne dernier, dans la 4 e

éd. de 1856, avec le cadavre de Leopardi en frontispice. Je l’ai lu à plusieurs reprises avec le
2

plus grand plaisir, mais je préfère de loin sa prose à ses vers : seuls quelques poèmes ont reçu ma
pleine approbation, les recantazione et quelques autres. Lindner, à qui je n’avais RIEN écrit à ce
sujet, a traduit plusieurs dialogues dans sa Vossische Zeitung, du 30 nov. au 1 janv ., et dans la
er 3

préface et la postface, il a établi des parallèles avec moi : très bon. Alors qu’il ne sait pas
parfaitement l’italien, il annonce une traduction de l’ensemble. Maintenant, quelque chose qui va
vous réjouir ! La Rivista Italiana, de dicembre 1858, a Torino, 1859, s’ouvre sur un dialogue
long de 40 pages : « Schopenhauer e Leopardi », par De Sanctis, donnant une présentation très
juste de ma doctrine que cet Italien connaît à fond ; il l’a assimilée in succum et sanguinem et il 4

reconnaît la vérité de cette dernière avec enthousiasme. Il n’a pas fait un résumé bâclé de mes
écrits, comme les professeurs allemands, en particulier Erdmann ; non, il les a tous à portée de
main, et il prend ce dont il a besoin. À Munich, vous pourrez le dénicher. On ne voit pas que
Leopardi a été pauvre, ni à partir de ses écrits, ni à partir de sa biographie. Nous ne voyons que le
château paternel avec la bibliothèque.
Je suis très occupé : depuis 6 mois je travaille à la 3 éd. augmentée de mon ouvrage
e

principal (qui est entièrement épuisé). D’une heure à l’autre j’attends la première feuille de
correction du premier tome : j’en suis au 2 qui recevra la plupart des ajouts. Brockhaus paie 3
e

Frédérics d’or par feuille en gémissant. Il paraîtra à la fin de l’été : les deux parties en même
temps. La Revue germanique a traduit 1 chap. des Parerga ; plutôt bien, mais seulement des
extraits. Par 2 fois, la Revue française a donné de mauvaises traductions d’Alexandre Weil. Vous
verrez le livre d’Asher qui m’est dédié : c’est manqué ; mais il donne un curieux passage de
Staël dont je n’avais pas le souvenir ! On pourrait même croire que je m’en suis inspiré ! Mais
5

des systèmes comme le mien ne jaillissent pas d’une idée étrangère ; en outre, je renvoie à
Parerga, I, p. 125 .
6

Celui qui a blâmé comme un défaut la clarté de mon exposition est le prof. Weiss dans une
note de sa recension des écrits de Schelling, dans les Blätter für literarische Unterhaltung , il y a
7

environ 2 ans.
Göbel, notre meilleur peintre, vient d’achever mon portrait à l’huile ; il est exposé : il veut
en faire lui-même une gravure sur cuivre. Lunteschütz est en train de travailler à 2 portraits de
moi.
Ouvrages qui se rapportent à ma philosophie : Les Conquérants du ciel, drame, 206 grandes
pages. Tempête et boussole (c’est signé Lindner). Tous deux sont remplis de moi. Sansara , 8

seulement le titre et la préface.


Je vous prie de dire au Dr. Wille que je le remercie pour son intérêt et que je me réjouirais
9

de le voir ici.
Huit lettres, un sonnet et 4 livres sont arrivés le 22, je dois lire tout cela et y répondre : hier,
quelqu’un d’ici est encore venu avec 2 tragédies ! Et avec cela, mon travail. Je dois donc
10

conclure, et je le fais avec mes souhaits les plus chaleureux pour votre santé et votre bonheur.

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


le 1 mars
er

1859.
458. À JULIUS BAHNSEN 1

Cher Monsieur le Dr. Bahnsen,

Je vous remercie pour l’intérêt persistant que vous portez à ma philosophie et pour l’aimable
rappel de mon anniversaire. Je me réjouis de savoir que vous occupez une fonction : vous y 2

excellerez, vous serez muté et votre situation s’améliorera. Font également partie des ouvrages
sur ma philosophie Les Conquérants du ciel, un drame de 206 p., anonyme et très curieux.
L’intérêt pour ma philosophie va croissant. La Rivista contemporanea publiée à Turin, déc.
1858, contient une assez bonne présentation de ma philosophie, sur 40 p. Revue germanique de
janv., un chap. des Parerga, et ainsi tout va de mieux en mieux. Je travaille à la 3 éd. de mon
e

ouvrage principal, entièrement épuisé depuis déc., Brockhaus veut accélérer l’affaire. Je suis très
occupé mais je vous salue de tout cœur.

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


le 2 mars
1859.

459. À GEORG KAYSER 1

CHEZ VOUS, aucun chien étranger ne reçoit à manger. Ce qui se passe hors de chez vous ne
vous regarde bien entendu pas.

A. S.
460. À GEORG KAYSER 1

Monsieur Kayser,

J’ai reçu et j’accepte le préavis pour le 30 juin de cette année concernant mon appartement.
Francfort, Arthur Schopenhauer
le 2 mars
1859.
461. À F. A. BROCKHAUS 1

Cher Monsieur,

Vous aurez sans doute déjà reçu la première feuille de correction que j’ai déposée hier soir à
la poste, sous enveloppe fermée. Je suis très satisfait de l’attention des typographes : je n’ai
trouvé que peu de choses à corriger, et peu importantes.
Le fait que vous ayez ajouté une ligne à la page comporte un important désavantage : les
acheteurs ne pourront pas se rendre compte par le nombre de pages de l’augmentation
considérable de cette 3 édition ; ce qui aurait porté à l’achat mes adeptes les plus sérieux et les
e

plus fervents, malgré le fait qu’ils possèdent la 2 . Au contraire, tout le monde va dire que les
e

ajouts sont peu importants. Car personne ne remarquera cette seule ligne. C’est pour cette raison
que je vous ai explicitement conseillé de garder exactement la même disposition typographique
que pour l’ancienne édition. Puisque nous n’en sommes qu’à la première feuille, ne pourrait-on
pas changer la chose ? De telles économies de papier ne devraient pas prévaloir pour un ouvrage
comme celui-ci. Vous indiquez que les lignes sont un petit peu plus courtes ; elles le sont, mais
elles ne contiennent pas une syllabe de plus que les anciennes : par conséquent la phrase est plus
étroite ; ce qui ne fait pas bel effet.
Par ailleurs, cette seule ligne différera l’ensemble de 2 feuilles. Comme notre accord prévoit
la même disposition typographique, vous devrez me payer des honoraires pour 2 feuilles de plus
qu’il n’y en a réellement.
J’espère cependant que compte tenu de ces raisons bien fondées, vous éliminerez
héroïquement le papier étroit. Cela est peut-être encore faisable même après l’impression de la
première feuille. Je demeure avec ma haute considération

Francfort votre
le 7 mars serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer

P. S. AVANT MÊME LA PARUTION du nouveau livre d’Asher, plus de 400 commandes de tous
les coins de l’Allemagne ont été envoyées en l’espace de 10 jours, suite à une simple ANNONCE
dans la Börsenzeitung ; ce qui est apparemment dû à la présence de mon nom dans le titre ; les
gens croient que j’en suis l’auteur.
462. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher,

Recevez mes remerciements tardifs, mais cordiaux pour la rédaction, la dédicace et l’envoi
de votre livre . Il va de soi que cela m’a fait grand plaisir, car il est fait in majorem mei gloriam,
2

propice à attirer l’attention sur ma philosophie. Mais c’est une autre question de savoir quelle
valeur il aura pour le public, et si ce dernier comprendra ainsi mieux le Faust. Vous n’avez pas
posé une idée fondamentale en la développant méthodiquement ; vous avez mis en parallèle
certains passages du Faust avec certains de mes passages. D’une façon ou d’une autre, il y a
toujours une analogie entre les deux, mais à des degrés différents, et parfois cela va chercher
loin. Ce sont surtout les lecteurs qui ne connaissent pas encore ma philosophie qui ne sauront pas
quoi en faire. Ce qu’il y a de mieux, c’est l’explication de la scène finale, ce sur quoi j’avais déjà
attiré l’attention. Ce qui m’a le plus intéressé, c’est le passage de Staël que je ne connaissais pas
3

du tout, alors que j’ai lu le livre en 1814. Il est extraordinaire ! et le fait que vous me l’ayez
indiqué me réjouit, car c’est une confirmation de ma doctrine fondamentale. Dire que je l’aurais
plagié serait ridicule, car des systèmes comme le mien ne peuvent pas provenir d’une idée
étrangère, et par ailleurs vaut ce que j’ai dit dans Parerga, I, p. 125 . Ce qui m’a été très
4

désagréable, c’est que mes passages sont remplis de coquilles, parfois graves, et cela va jusqu’à
la pure absurdité, p. 58, en raison de 3 grosses coquilles . Les passages de Goethe comportent
5

également des coquilles . Il semble que lors de la correction, vous n’ayez accordé vos soins qu’à
6

votre propre texte. Je pense que certaines de vos explicitations du Faust sont inexactes,
notamment p. 57, « mariage » ! Eh bien, c’est d’abord la confirmation brillante du habent sua
fata libelli , vue la commande inouïe de 400 exemplaires après la première annonce. Cela ne
7

saurait avoir d’autre raison que le fait que mon nom se trouve dans le titre, et les gens, dans leur
empressement, croient que j’en suis l’auteur. Nous verrons comment cela va se développer par la
suite.
Ce qui récemment m’a fort réjoui, c’est le numéro de décembre, qui ne paraît que fin
janvier, de la Rivista contemporanea publiée à TURIN. Elle s’ouvre sur un dialogue long de 40
pages, intitulé « Schopenhauer e Leopardi ». De ce dernier, il n’est question qu’allusivement, et
l’ensemble est une présentation de ma philosophie, témoignant d’une connaissance très précise et
juste de cette dernière, et pleine d’enthousiasme pour sa vérité : l’auteur l’a assimilée in succum
& sanguinem , il ne fait pas de résumé de mes écrits, comme les professeurs de philosophie
8

allemands, en particulier Erdmann, mais il tient tout à portée de main, là où il en a besoin. Le Dr.
Lindner (qui avait déjà mis en relation avec moi des dialogues de Leopardi dans sa Vossische
Zeitg. du 30 nov. au 1 jan.) m’avait envoyé la Rivista, maintenant je l’ai commandée. Le Dr.
er

Wille, de ma communauté zurichoise, m’a récemment rendu visite, il connaît l’auteur De


Sanctis, qui est un Napolitain exilé qui professe au Lycée de Zurich. J’apprends à l’instant que le
libraire Beer a reçu de BATAVIE une commande spécifique et complète de tous mes écrits . Enfin
9 10

en Asie !
Je suis très occupé par les ajouts du 2 tome et les feuilles de correction du premier ; ensuite,
e

à mon anniversaire, 8 lettres, 1 sonnet, 4 livres, un bouquet frais de Berlin ; il faut répondre à
tout cela : un monsieur d’ici est venu et m’a encore apporté 2 tragédies. Ensuite la pose pour les
peintres et photographes. Le portrait de ma personne par GÖBEL est en exposition, il fait
beaucoup parler de lui en raison de sa ressemblance et de sa belle technique. Après cela, vous
excuserez le retard de la réponse

Francfort s. M., de votre


le 9 mars 1859. fidèlement dévoué
Arthur Schopenhauer.
463. À L’ÉDITEUR
DU DEUTSCHES STAMMBUCH 1

Aut credere, aut philosophari, aut degere pecudum ritu, ventri obedientum — utique mori . 2

Francofurti ad moenum, Arthur Schopenhauer.


mensis martii,
die 26. 1859
464. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. et apôtre actif !

Votre lamento du 10 mars est touchant, mais on ne peut rien faire contre. Je veux seulement
2

vous dire que je ne crois pas que le passage de Staël provienne d’une manière ou d’une autre de
Schelling : si c’était le cas, on me l’aurait déjà reproché depuis longtemps, quand il y a quelques
années on poursuivait ce genre d’intentions et qu’on ne trouvait rien d’autre que ce qu’a dit
Schelling : « Le vouloir, c’est l’être originaire » ; la situation était telle que même le professeur
de philosophie Hillebrandt de Giessen m’a défendu , dans son Histoire de la littérature
3

allemande.
Je vous remercie pour l’envoi du programme qui a trouvé toute mon approbation : il n’y a
4

peut-être aucun Allemand qui écrive l’anglais aussi parfaitement que vous. Il contient également
beaucoup de choses intéressantes et instructives. Mon passage est choisi de manière adéquate, et
brillamment traduit. J’aimerais que cela encourage et vous et un éditeur à traduire entièrement
les Parerga. En février, la Revue germanique en a traduit un chapitre en français . J’espère que la
5

traduction française du traité sur la liberté de la volonté paraîtra bientôt.


Je vous ai sans doute déjà parlé du dialogue « Schopenhauer e Leopardi » dans la Rivista
contemporanea di Torino.
Je suis tellement occupé à ma 3 édition que je ne peux rien ajouter d’autre que mes vœux
e

les plus sincères pour l’amélioration de votre santé !

Francfort, Arthur Schopenhauer.


le 15 avril 1859.
465. À CARL G. BÄHR 1

Cher Monsieur Bähr,

Mes remerciements chaleureux pour l’envoi des Literarische Blätter . J’ai lu votre recension
2

3 fois, avec grand plaisir : elle est excellente, et on peut tout de même dire que le cher monsieur
s’en est tiré à bon compte. Mais vous n’auriez pas dû faire porter vos reproches sur « la rétine
reçoit l’impression à l’envers », car même si ce ne sont pas mes mots, cela est cependant exact :
Quadruple Racine, p. 58 . Souvent mes mots sont bien autrement falsifiés ! Par ex. en ce moment
3

par Büchner, dans son article sur moi qui s’étend sur 4 numéros des Anregungen, et qui est un tel
4

manuel d’ignorance, d’absurdité et de malhonnêteté que cette espèce de garçon-coiffeur en


devient effrayant. Mais le plus beau passage se trouve dans le cahier de mars, p. 92 : « les
5

nombreux degrés intermédiaires entre l’ HOMME et l’ANIMAL prouvés par les sciences empiriques
» !! Si quelqu’un voulait bien le prier publiquement d’indiquer ne serait-ce qu’un seul de ces
degrés ! en demandant si peut-être il veut parler des centaures et du sphinx. C’est là vraiment une
pièce pour un cabinet de curiosités, sur laquelle il faudrait attirer l’attention du public.
Où en est donc la traduction de mon traité sur la liberté ? Lunteschütz prétend qu’il y
travaille toujours, mais je ne le crois pas vraiment.
J’ai été très bien photographié par Schäffer , pour un jeune juge de Berlin ; de façon
6

irresponsable, Schäffer a envoyé cet exemplaire, que j’avais décoré avec un autographe, dans une
exposition à PARIS — et le jeune juge n’en a toujours pas. Le portrait à l’huile de Göbel est
certainement ressemblant et très bon, mais sans aucune idéalité : il en fera une gravure sur
cuivre. Hänsel de Berlin a commencé un dessin qu’il compte terminer en août, lorsqu’il sera de
7

retour. Lunteschütz a presque terminé un nouveau portrait, entièrement réalisé par réminiscence.
Je vous ai sans doute déjà écrit que dans la Rivista contemporanea de Turin se trouve un
dialogue long de 40 pages « Schopenhauer e Leopardi » par De Sanctis : très bon.
Seulement 10 feuilles de mon ouvrage principal ont été imprimées : cela peut durer jusqu’en
1860.
Salutations à Monsieur votre père, et meilleurs vœux pour votre bien-être !

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


le 1 mai 1859.
er
466. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Recevez ci-joint le tome 2, avec des ajouts considérables, d’un point de vue qualitatif
comme quantitatif. Afin de me tranquilliser, je vous prie d’en accuser réception.
Les deux préfaces du tome 1 pourraient être imprimées immédiatement, mais il faudrait
laisser de la place pour la 3 préface ; or j’aimerais envoyer cette dernière tout à la fin, car d’ici
e

l’achèvement de l’impression, je pourrais encore avoir une idée ou remarquer quelque chose ;
pour autant que je peux en juger maintenant, elle sera très brève, environ 1 page ½. Je serais
curieux de savoir si vous imprimez les 2 250 exemplaires, ou moins ? Avant que nous finissions
le tome 1, j’aimerais avoir relu toutes les épreuves de ce dernier, ce que je n’ai commencé à faire
que maintenant, par manque de temps, car malgré tous les soins, une coquille ou une autre aurait
pu m’échapper. Il manque le tableau qui accompagne la 4 épreuve, je dois encore y corriger
e

plusieurs choses (car vos typographes n’ont pas la moindre notion de latin, comme ils le
devraient) ; c’est pourquoi j’aimerais bien l’avoir et je vous prie de me l’envoyer. Le typographe
a une telle crainte du latin que là où dans ma citation j’ai par ex. écrit lib. V. cap. 2, il met 5 e

livre, deuxième chapitre ; je ne sais pas pourquoi, mais l’autre fois j’avais écrit « ed. Bip. » après
une citation — il a mis « édition de Bip. » !!! Comme j’ai reçu l’épreuve 24 in duplo, j’en joins
un exemplaire à cet envoi et je demeure avec ma haute considération

Francfort s. M. votre
le 30 juin serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer
ci-joint un paquet,
dans une toile cirée sign. F. A. B.
cont. des manuscrits
valeur 20 Rth. Pr. C t

467. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Je suis contraint de vous envoyer cette feuille de correction sous couvert, car j’y ai tellement
écrit qu’elle ne peut être envoyée sous enveloppe fermée. Je profite de l’occasion pour vous prier
de faire un lavage de cerveau au typographe de CETTE feuille 36, et de lui inculquer de respecter
EXACTEMENT mon écriture et de ne pas modifier le moindre petit titre de sa propre initiative. Je
donne aux noms propres leur flexion allemande, pour indiquer leur casus, bien à l’opposé du
jargon misérable et défigurant à la mode chez les barbouilleurs de notre époque. J’écris donc
KantEN, LockEN à l’accusatif et LeibnizENS au génitif ; le typographe se plaît à corriger cela, omet
donc la flexion et écrit même LEIBNIZ’ AU GÉNITIF — avec cette APOSTROPHE tout à fait non
allemande, ce qui à mes yeux est rigoureusement ignoble. Vous connaissez notre accord
concernant l’orthographe, et vous allez donc m’aider.
Si je veux une note en bas de la page, je fais toujours un *), ensuite en bas de la feuille une
ligne, sous celle-ci de nouveau *) et la note. Or p. 569 à la fin du §, j’avais écrit comme titre :

Note.

Il fallait donc composer cette dernière en tant que texte. Mais il a fait un *) à un endroit DE
SON CHOIX et il a mis la note en petits caractères en bas de la feuille. Cela doit maintenant rester
ainsi, mais cela m’a beaucoup irrité. Je crois que c’est un nouveau typographe : le précédent ne
s’est pas permis de pareilles choses.
Je fais donc appel à vous : faites-leur une belle peur ; ils ne doivent pas se permettre la
moindre modification, par ex. ne pas utiliser non plus des lettres allemandes lorsque j’utilise des
lettres latines. Car maintenant arrive le 2 TOME, une affaire délicate ! Tout devra être exactement
e

comme chez moi, au cheveu près.


Par ailleurs l’impression est belle et également correcte, tout à fait bravo ! Vous aurez reçu
le 2 tome.
e

Je demeure avec ma haute considération

Francfort votre
le 4 juillet serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer

468. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher,

Cela me réjouit que vous soyez revenu sain et sauf de votre voyage maritime et terrestre, et
j’ai lu avec intérêt vos communications concernant les conditions éditoriales à Londres. Vous
avez quand même atteint quelque chose, et d’autres choses sont in spe . Mais je suis grievously
2

disappointed par le fait que vous n’ayez pas pu voir le n 2 du Bentley Magazine. À Londres, où
3 o

vous fréquentiez des libraires et des lettrés, il n’était sans doute pas si difficile d’attraper le
cahier pour au moins 5 minutes . Après réception de votre première lettre, je voulais encore
4

explicitement vous prier de le faire, mais c’était déjà le jour de votre départ ; car malgré ma
demande de ne pas envoyer vos lettres par la poste et de ne pas les affranchir, c’est bien ainsi que
vous avez procédé (now mind it, once for all, when I receive some interesting communication, I
care a damn for the postage ; & now no more about it ). Mais je me consolais en pensant que
5

vous regarderiez de votre propre initiative. Et maintenant c’est À MOI que vous vous adressez
pour savoir ce qu’il y a dedans ! The Devil do I know . Essayez de vous rattraper et d’apprendre
6

d’une manière ou d’une autre, à Leipzig ou à Lunnun , si le gaillard me prend au sérieux ou s’il
7
chante la vieille rengaine des 3 sophistes, voire de ses imbéciles contemporains. Même
l’Economist ne donne pas sa review de ce cahier. Je suis curieux à ce sujet, comme l’hôtelier
dans les Mitschuldigen.
Carrière (l. c.) a peut-être pris parti pour moi , mais de façon beaucoup trop tiède, face à de
8

telles âneries. Il craint ses collègues.


Avec l’impression, nous en sommes déjà à la moitié du tome 2 et j’espère que nous aurons
terminé fin octobre. Il y a environ 120 pages d’ajouts, d’après mes estimations actuelles (c’est-à-
dire according to my estimate ). 9

Avec mes remerciements, je vous renvoie ci-joint la lettre de Quandt , qui m’intéresse en
10

tant que dernier signe de vie. Mais vous ne m’avez même pas indiqué le titre du traité auquel il
se réfère !
En souhaitant de tout cœur que votre santé ait été rétablie grâce aux bains maritimes

Francfort, sincerely yours


le 10 sept. Arthur Schopenhauer.
1859
469. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

J’espère que vous êtes rentré sain et sauf de votre voyage . J’ai eu un plaisir sincère à faire
2

personnellement votre connaissance : c’est tout différent lorsque l’on sait à qui l’on écrit ; et
surtout quand il s’agit d’une personne agréable.
Vous recevrez ci-joint la préface : elle trouvera sans difficulté une place sur les 2 pages
blanches de la dernière feuille des préfaces. Mais je dois vous prier de remplir sur cette dernière
feuille L’ENDROIT LAISSÉ LIBRE POUR LE NUMÉRO DE PAGE, dès que vous saurez le nombre total de
pages de cette 3 éd., somme de laquelle il faudra alors soustraire 1 239, qui est le nombre de
e

pages de la 2 éd., et ajouter le reste. Vous pourriez également indiquer ce nombre dans vos
e

annonces, afin que les possesseurs de la 2 éd. se rendent compte de ce qui est donné en plus.
e

Grande stimulation pour mes fanatiques !


Concernant les honoraires, je vous laisse le choix de me payer en véritables Frédérics d’or
(bien entendu pas de « pièces aveugles sans bords », comme B ÜRGER désigne les Louis d’or des
éditeurs ) ou sous forme de traite, selon le cours en vigueur ICI.
3

Je vous prie de m’envoyer par train postal 5 exemplaires sur les 10 qui me reviennent, DÈS
4

QUE l’impression sera achevée, car je voudrais tout de suite en faire relier un avec grand luxe,
afin de l’envoyer à un monsieur qui m’a honoré d’une colossale coupe en argent pour mon 70 e

anniversaire . Vous avez ici l’occasion de montrer que vous êtes un éditeur généreux, en
5

m’envoyant à cette fin un des exemplaires de luxe spéciaux que vous faites certainement tirer
pour les grands mécènes ou autres demi-dieux ; pour que je puisse me faire honneur. Je vous prie
d’envoyer les 5 exemplaires restants au nom de l’auteur :
1 au Dr. David Asher à Leipzig
1 " " Frauenstädt à Berlin
1 " " Otto Lindner, corédacteur de la tante Voss à Berlin
1 au Dr. Julius Bahnsen, enseignant au Lycée d’Anclam
1 " M. C. G. Bähr, au domicile du prof. Bähr à Dresde
Je vous prie de dire aux libraires d’assortiments concernés qu’ils doivent immédiatement
envoyer ces exemplaires au domicile des messieurs concernés et ne pas attendre qu’on vienne
soi-disant les chercher — je connais des exemples terribles dans ce genre*.
Je joins également l’index des fautes typographiques du premier tome. Elles sont peu
importantes et peu nombreuses : la dernière est seulement FICTIVE , afin de mettre en évidence le
6

passage concerné. Si vous deviez cependant considérer qu’une faute typographique aussi
importante déshonore votre imprimerie, alors elle doit être éliminée ; quoique j’en aurai porté la
responsabilité, en tant que dernier correcteur.
Compte tenu de l’importance de cette édition et de la certitude absolue qu’elle sera plus ou
moins rapidement vendue en totalité (car mes ouvrages connaîtront encore beaucoup de
rééditions), je crois qu’il serait avantageux pour vous de la laisser au prix de la 2 éd. ; cela fera
e

beaucoup avancer la vente.


La sculptrice Ney (la petite-nièce du maréchal) est venue de Berlin pour faire mon buste, et
7

elle s’y est mise depuis 8 jours déjà. Je suis pris dans un cruel dilemme entre la sculpture et la
correction, car vos feuilles d’impression s’acharnent sur moi. Le peintre Göbel fait une gravure
sur CUIVRE de mon beau portrait à l’huile, c’est presque terminé. Le monde veut savoir à quoi
ressemble vraiment

Francfort votre
le 10 oct. serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer
470. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

J’ai l’honneur de vous répondre que jusqu’à la feuille 28, je n’ai pas trouvé de coquilles
importantes : je continue ma lecture et je vous avertirai si j’en trouve.
Mais dans la 3 préface, j’ai trouvé une coquille qui m’irrite au plus haut point. Les
e

circonstances ont fait que je vous ai laissé indiquer le nombre de pages que cette édition a en
plus, et je n’ai pas eu l’idée de douter que je pourrais le faire en toute tranquillité. Or je constate
maintenant qu’il est écrit : 177 PAGES, alors qu’il est clair et simple qu’il n’y a que 134 p., à savoir
juste 100 dans le 2 tome et 34 dans le premier ; si vous voulez inclure la 3 préface (ce qui ne
e e

serait pas tout à fait adéquat), il y aurait 136 p. J’exige donc que vous réimprimiez la feuille ;
puisque la composition est sans doute encore disponible, vous n’y perdrez que le papier, et cela
ne vous portera pas [Veuillez continuer la lecture 2 PAGES plus loin : j’ai plié à l’envers]
préjudice, même au cas où la composition ne serait plus disponible, car vous seul êtes à l’origine
de la faute : et regardez comme c’est laid ! Si vous ne réimprimez pas, alors l’indication de la
faute comme faute typographique, à la fin, n’est qu’une demi-mesure ; car qui ira voir ? Dans le
pire des cas, à savoir si même cela n’était pas fait, il faudrait que j’indique la faute à plusieurs
reprises dans des revues, et je le ferai. Car pour moi, c’est une QUESTION D’HONNEUR. Dans la
préface, c’est moi qui parle, non pas vous : et pour rien au monde je ne voudrais me présenter au
public avec un mensonge dans la bouche, et encore moins avec un mensonge qui semble vouloir
pousser les possesseurs de la 2 éd. à l’achat de la 3 . Je vous demande donc de réparer votre faute
e e

et de me le faire savoir bientôt pour me tranquilliser. Je remarque encore que la fin du premier
tome n’a pas été envoyée, comme vous l’indiquiez pourtant dans votre lettre ; et aussi que le
nombre évoqué plus haut manque sur la feuille de CORRECTION de la préface.
Je demeure

Francfort votre serviteur dévoué


le 30 oct. Arthur Schopenhauer
1859.

471. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Votre intention de faire réimprimer la feuille en question me soulage beaucoup, car j’y
2

accorde assurément une importance considérable. Chez moi, tout doit être sincère, sans
mensonge, et la moindre malhonnêteté apparente doit être écartée. Je vous prie de m’envoyer la
feuille réimprimée, pour que je puisse m’en repaître et me tranquilliser.
Mais votre explication concernant les préfaces m’est complètement incompréhensible. Car
les deux préfaces se trouvent aussi bien dans la 2 édition que dans la 3 : votre addition ne peut
e e

donc influer sur la différence du nombre de pages dont il est question ; ici comme là, il y a XXX
pages à ajouter qui agissent comme un poids identique qu’on ajoute aux deux plateaux d’une
balance. Mais comme nous sommes d’accord sur le résultat, nous n’avons pas besoin de nous
disputer au sujet des prémisses. Veuillez donc ajouter la 3 préface et indiquer 136 pages : ça va*.
e

Dans ma lecture des épreuves, je suis arrivé à la feuille 37 sans trouver quoi que ce soit
d’important. Je poursuis ma lecture, et tant que je n’aurai pas la dernière feuille, je vous
signalerai si je trouve quelque chose. Je vous prie surtout de m’envoyer la totalité des épreuves,
car je voudrais en faire un exemplaire : je suis un peu juste avec mes 10 ex.
Mon buste est achevé, il est très beau et tout le monde trouve qu’il est très ressemblant. La
situation est très mauvaise pour les sculpteurs : ils peuvent reproduire leur buste, aussi bien
qu’un graveur sur cuivre, mais contrairement à ce dernier, ils n’ont pas d’éditeur pour l’annonce.
Ils se retrouvent seuls. Je prie donc Monsieur le Dr. E. Brockhaus de faire écrire un petit article3

à ce propos dans les Literarische Blätter, dès qu’on pourra voir le buste à Leipzig. Le buste fait
croître ma célébrité et par là les ventes du livre ; donc — une main lave l’autre.
En demeurant avec haute considération

Francfort votre serviteur dévoué


le 3 nov. Arthur Schopenhauer
1859.
472. À F. A. BROCKHAUS 1

Au cas où il serait encore temps, je vous signale qu’après avoir lu 42 feuilles, j’ai enfin
trouvé UNE coquille notable :
p. 629. l. 5, d. b. au lieu de Deos lire Deus.
À cela pourrait ensuite s’ajouter :
p. 398, l. 5, d. h., au lieu de er l. es
" 521, " 4, d. b. " Etanand l. et Anand.
J’ai seulement reçu jusqu’à la feuille 43 incl.

4 nov. [1859] Arthur Schopenhauer


473. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher !

Je vous aurais écrit depuis longtemps si on ne m’avait pas tiraillé de tous les côtés.
Brockhaus était tellement pressé que je devais corriger presque une feuille par jour, ce qui m’a
demandé 3 à 4 heures, car je ne corrige pas comme vous ; et ensuite lire soigneusement les
épreuves ! À cela s’ajoutait d’autre part le fait que la sculptrice Ney (petite-nièce du maréchal)
est venue de Berlin pour faire mon buste ; il a tout juste été terminé et exposé : tout le monde le
trouve infiniment ressemblant et de surcroît bien travaillé. La situation est très mauvaise pour les
sculpteurs : ils peuvent reproduire 1 000 fois leur œuvre, comme un graveur sur cuivre, mais
contrairement à ce dernier, ils n’ont pas d’éditeur qui l’annonce ; ils doivent investir leur espoir
dans les journalistes. C’est pourquoi j’ai prié le Dr. Brockhaus de faire un article à ce propos
dans les Literarische Blätter, dès qu’on pourra voir le buste à Leipzig. Je vous prie de faire de
même pour aider l’artiste, car vous êtes en contact avec bien des journaux (Morgenblatt !).
Do — there’s a good fellow .2

Remerciements pour votre petit livre , mais comme, mis à part quelques notes, il ne contient
3

pas plus que l’édition du programme qui bénéficie d’une impression plus grande et plus belle, et
comme vous avez peu d’exemplaires, je me permettrai de vous renvoyer prochainement celui-ci,
puisqu’il vous est nécessaire et qu’il m’est superflu.
Je vous remercie beaucoup et sincèrement pour vos billets littéraires ! surtout pour la
Novellen-Zeitung et la Konstitutionelle, car sans vous, je n’en aurais rien su et j’aurais dû
commander ces deux journaux. L’auteur du billet dans la Novellen-Zeitung est un avocat de
Dresde que le baron Eberstein m’a présenté, mais dont j’ai oublié le nom ; j’ai spontanément
4

discuté avec ces messieurs au dîner, sans me douter que tout ce que je disais allait être publié
dans un journal : quelle épouvantable indiscrétion ! Ce qu’il me fait dire est vrai dans
l’ensemble, mais les histoires sont pour certaines tout à fait DÉFORMÉES, par ex. celle sur les
valets de chambre, sur Kant, et celle sur les photographes dans laquelle il a fondu 3 histoires
différentes. La Madame dans la Novellen-Zeitung est de toute évidence fâchée que je n’ai pas
5

voulu converser avec elle, en prétextant mon oreille paresseuse, car cela aurait dû donner un
article, pour payer la note d’hôtel ! Mais il n’y avait rien à faire.
Avec la Bentley Review, il n’en est donc rien . Les Anglais comme les Français s’habillent
6

toujours avec les lambeaux laissés par les Allemands — je veux dire les 3 sophistes : cela va
bientôt changer. Selon l’Economist, la National Review est à présent l’authentique revue
philosophique.
Le livre de Quandt ne m’a pas été envoyé, peut-être est-ce la faute des libraires ; je l’ai vu
7

en librairie et je l’ai feuilleté : mon bon et vieil ami s’y est engagé dans des choses qui sont au-
dessus de sa sphère.
Dans le tome 2 de son Idée de la logique , Rosenkranz dit du mal de moi et me réfute, c’est
8

un vrai plaisir. Dans le tome 2 sur Schelling , Noack nous apprend que j’ai tout volé à Fichte et à
9

Schelling. Carrière ne lâche que quelques mots sur moi , en passant. Ils espèrent m’avoir porté
10

jusqu’à ma tombe : ils vont être étonnés !


Le petit peuple ne remarque jamais le diable.
Même s’il les tenait par le cou .11

La gravure sur cuivre de Göbel, faite d’après son portrait, est pratiquement finie, elle sortira
bientôt.
Vous ne pouvez pas me rendre de service plus grand que de me faire part de tout ce qu’on
écrit sur moi, pour autant que vous le remarquez. Car je n’en apprends certainement que la
moitié. Ici, c’est Abdère.
L’impression de la 3 édition est terminée : j’ai chargé Brockhaus de vous envoyer un
e

exemplaire que je vous prie d’accepter en signe de reconnaissance pour vos mérites in
philosophiam meam. La note dans le t. 2, p. 39 vous fera rire. Sur ce, je vous souhaite une bonne
12

santé, une bonne ouverture et de nombreux refus de mariage.

Francfort Arthur Schopenhauer


10 nov. 1859.
474. À HEINRICH GUSTAV BRECHT 1

Très honoré Monsieur le juge


et consul designatus,

Si ma philosophie a effectivement coopéré à votre promotion, cela me réjouit beaucoup. Je


vous prie de remercier Monsieur Schellwien de ma part pour son livre , mais je ne puis m’y
2

mettre dans l’immédiat, car depuis plus d’une année, l’élaboration de la 3 édition de mon
e

ouvrage principal m’a tant occupé que des lectures importantes et intéressantes ont dû être
ajournées et je vais à présent les aborder, puisque l’impression vient d’être achevée.
Votre photographie a été réalisée au printemps dernier par Schäfer, et je l’ai dotée de
l’adage quidquid fit necessario fit et de ma signature ; afin que Schäfer vous l’expédie : 2 mois
3

plus tard, j’ai appris par le peintre Lunteschütz (qui était présent lors de la séance, pour me mettre
dans la même position que dans son 3 portrait à l’huile) que Schäfer avait envoyé la
e

photographie dédicacée à une exposition à PARIS, ce qui est d’autant plus scandaleux que je lui
avais donné la permission de reproduire cette photographie selon son bon plaisir (au moyen de
l’image en NÉGATIF) et de la vendre. Il a même eu l’impudence de me faire apporter plusieurs
exemplaires de cette photographie en me priant aimablement « d’y écrire quelque chose » : bien
entendu j’ai répondu à cet individu comme il le méritait. Si la photographie vous importe, vous
n’avez qu’à charger quelqu’un de cette ville de la commander auprès de lui et de la payer,
ensuite de me l’apporter en vue d’une inscription et enfin de vous l’envoyer. Elle est très réussie.
Mais je ne veux plus rien avoir à faire avec cet individu.
Vous pouvez même lire les détails de l’affaire dans la PRESSE, dans la Konstitutionelle
Zeitung (Dresde) du 1 octobre. Car en septembre, à l’Hôtel d’Angleterre, le baron Eberstein m’a
er

présenté un avocat de Dresde dont j’ai oublié le nom, il commençait par M.


À la table du dîner, j’ai donc parlé en toute spontanéité avec ces messieurs, comme on le fait
autour d’un verre. Mais il se trouve que l’avocat a commis l’indiscrétion inouïe de publier tout ce
que j’ai dit dans le journal, en déformant beaucoup de choses. Dans l’ensemble, l’histoire de
votre photographie est exacte ; excepté le fait qu’il attribue, à tort, l’adage à un ALBUM : c’est
qu’il a confondu et fondu ensemble 3 histoires différentes […]
4

Je demeure avec mes meilleurs vœux

Francfort s. M. votre
le 11 nov. serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer
475. À ERNST OTTO LINDNER 1

Cher Monsieur le Dr. Lindner,

Cela fait longtemps que je n’ai pas eu de vos nouvelles, mais j’espère que vous et Madame
votre épouse êtes bien-portants et continuez à servir les Muses.
La 3 édition de mon ouvrage principal paraîtra cette semaine et Brockhaus est chargé de
e

vous envoyer un exemplaire sans tarder, que je vous prie d’accepter comme un signe de ma
reconnaissance pour vos mérites concernant ma philosophie. Il doit également en envoyer un au
Dr. Frauenstädt, ce que je vous prie de lui dire à l’occasion.
Peut-être connaissez-vous la sculptrice Ney ; si ce n’est pas le cas, vous manquez quelque
chose : je n’aurais pas cru qu’il existe une fille aussi aimable. Début octobre, cette dernière est
donc venue de Berlin pour faire mon buste, et elle l’a réalisé de façon si ressemblante et belle
que tout le monde ici l’admire, et l’un de nos sculpteurs a dit qu’aucun des sculpteurs vivant dans
cette ville n’aurait pu le faire aussi bien. Il est encore exposé à la galerie d’art, précisément au
Noyau. Il sera ensuite envoyé à Berlin où il sera reproduit, alors que Ney s’est à présent rendue à
Hanovre pour ne rentrer à Berlin que vers Noël, où elle s’assurera, par une formalité, le droit
exclusif de reproduction de ce buste. Or la situation est très mauvaise pour les sculpteurs, car
leurs œuvres peuvent être aussi bien reproduites qu’une gravure sur cuivre, mais contrairement à
cette dernière, elles n’ont pas d’éditeur pour l’annoncer. L’unique espoir, ce sont les journaux et
les revues qui peuvent donner de la voix. C’est pourquoi je vous demande de m’aider, Doctor
indefatigabilis, dès que le buste sera exposé à Berlin, d’abord en soufflant à la tante Voss une
parole sage, vraie et détaillée portant sur le sujet, et ensuite en motivant d’autres journalistes
locaux ou étrangers à faire de même. Car si la chose se répand bien dans toute la grande
Allemagne, alors une centaine de bustes pourraient être vendus. Car ma renommée* grandit
beaucoup. Par ex. il a suffi que je raconte UNE SEULE FOIS, chez moi, vis-à-vis* d’une seule
personne, une blague médiocre, pour qu’elle aille ensuite à Vienne, puis à Berlin d’où elle est
revenue par l’intermédiaire de Ney. Dans la Konstitutionelle Zeitung du 1 octobre, vous aurez
er

sans doute déjà remarqué l’épouvantable indiscrétion d’un homme qui a publié tout ce que j’ai
dit à la table du dîner de l’Hôtel d’Angleterre. Le baron Eberstein me l’avait présenté comme un
avocat de Dresde. J’ai dit ce qui me passait par la tête : dans l’ensemble, son rapport est exact,
mais il a déformé des anecdotes isolées et surtout il en a fondu 3 en une seule, concernant des
photographies, des albums, etc., tout était confus. Cela dit, il montre qu’il a 10 fois plus de
mémoire que de discrétion.
Un contre-exemple est fourni dans la Novellen-Zeitung du 14 sept. par Madame Bölte, avec
laquelle je n’ai PAS parlé : elle n’y a pas trouvé son compte, surtout concernant la note d’hôtel
qu’elle voulait payer grâce au beau compte-rendu des conversations pleines d’esprit que nous
étions censés mener (en s’asseyant pendant 8 jours à côté de moi) ; mais je suis resté muet
comme une carpe. Elle a alors soulagé son dépit* dans la Novellen-Zeitung citée plus haut.
Les professeurs de philosophie disent du mal de moi tant qu’ils peuvent : Noack (sur
Schelling, t. II) dit que j’ai tout volé chez Fichte et Schelling. Rosenkranz (Idée de la Logique)
me réfute superbement. Carrière m’évoque comme une personne accessoire et insignifiante, etc.
Regardez dans ma 3 édition, t. 2, p. 39 et ailleurs, vous allez rire. Je n’apprends pas même la
e

moitié de ce qu’on imprime sur moi — voilà mon calvaire, d’autant plus si vous
n’approvisionnez plus

Francfort, votre vieil ami


le 21 nov. 1859. Arthur Schopenhauer

[Note marginale]
La gravure sur cuivre de Göbel, faite d’après son portrait à l’huile, est achevée mis à part
quelques traits. J’y ai l’air d’une vieille grenouille.
476. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Je vous remercie pour l’envoi des 5 exemplaires : ils sont très beaux et j’en suis tout à fait
satisfait. Mais à mon grand regret je vois que vous avez entièrement ignoré la liste des coquilles
du 2 tome que je vous avais envoyée et que vous n’avez pas utilisée ; prenant seulement en
e

compte la coquille, remarquée après coup, de Deos. Il y avait 5 ou 6 coquilles qui certes n’étaient
pas très importantes, mais elles méritaient cependant d’être corrigées. Vous avez ignoré et perdu
cette petite liste, ou vous l’avez même écartée, parce qu’il n’y avait plus de place à la fin. Et
combien de temps cela m’a coûté pour dénicher ces coquilles ! Maintenant il est trop tard et on
ne peut plus rien faire.
Votre facturation de 2 618 f. — est exacte ; mais je dois encore y ajouter 3 f. pour les frais
de port, à savoir

au départ : 88 feuilles 1 + 1 f. 28 +
à l’arrivée : quittance dans livre 2 + 1. 32 "
3 f.

Même si c’est volontiers que je vous rendrais service, je ne puis cependant consentir à
attendre mes honoraires pendant encore ½ année. Si vous y réfléchissez, vous trouverez vous-
même que ce n’est pas honnête. Pensez au fait que j’ai travaillé pour cette édition pendant 14
mois, jour après jour, et que je comptais sur cet argent. Mais pour faire preuve de bonne volonté,
je serai satisfait si vous m’envoyez maintenant une traite de 2 621 f. tirée sur cette ville, qui
arrivera à échéance au plus tard le 10 janvier et sera immédiatement acceptée, car j’aurais alors à
m’acquitter d’un paiement, pour lequel cette somme est destinée : c’est donc le maximum que je
peux faire. Pour autant que je sache, les véritables comptes des libraires se font vers le Nouvel
An ; c’est pourquoi j’espère que vous serez favorable à cette concession.
Je vous remercie beaucoup pour le petit article dans votre Deutsche Allgemeine et j’espère
2

que vous donnerez des signes similaires dans les Literarische Blätter, le Deutsches Museum et
d’autres journaux qui sortent de votre presse. Ney est maintenant à Hanovre où elle fait une
sculpture en marbre du roi (il ne faut surtout PAS évoquer cela publiquement !) et elle ne
reviendra à BERLIN que vers Noël ; mais entre-temps, mon buste sera reproduit par son mouleur ;
elle doit d’abord s’acquitter d’une formalité juridique grâce à laquelle elle s’en assurera la
propriété artistique, selon la loi fédérale, sinon on le copiera. D’éventuelles commandes peuvent
être faites à tout moment, chez Mademoiselle Ney au Lagerhaus à Berlin.
Je vous prie de me dire si les livres ÉTRANGERS, qui sont indiqués dans votre Repertorium
(dont je suis un abonné) avec le prix, doivent être livrés À CE PRIX-LÀ par chaque libraire
allemand.
Je vous souhaite donc « bonne chance ! ».

Francfort s. M. votre
le 30 nov. serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer
477. À JULIUS FRAUENSTÄDT 1

Mon vieil ami.

Votre intérêt persistant pour ma philosophie me réjouit de tout cœur : j’en ai en partie
remarqué les témoignages dans les journaux ; vous n’évoquez pas le meilleur, à savoir la
biographie dans l’Illustrierte Zeitung, dont je suis très satisfait.
Mais l’obscurcissement croissant de vos yeux est regrettable : si seulement Jüngken pouvait
vous aider ! Mon oreille gauche s’affaiblit aussi de plus en plus. Pour le reste, je suis en parfaite
santé.
Il n’est pas possible de vous indiquer les ajouts de ma nouvelle édition, parce qu’ils sont
presque tous courts et sont insérés un peu partout : dans le deuxième tome ils font 100 pages,
dans le premier 36. Vous les repérerez plus facilement si vous comparez le nombre de pages de
chaque chapitre avec celui de la 2 édition ; pour le premier tome, le nombre de pages des livres.
e

Quant aux ajouts plus longs, je peux seulement vous indiquer les suivants : t. 2, p. 39, 300, 641,
710.
Les professeurs s’efforcent de dire du mal de moi : Rosenkranz dans le 2 tome de sa
e

Logique de Hegel ; Noack dans le tome 2 de son Schelling , où il affirme que j’aurais tout volé à
2 3

Fichte et Schelling. Il a également écrit un article moqueur sur moi dans son obscur journal : je
4

ne voudrais pas gâcher mon argent en le commandant. Dans son Esthétique, Carrière m’évoque 5

en passant comme quelqu’un d’insignifiant.


Le petit peuple ne remarque jamais le diable,
et même s’il les tenait par le cou .6

Ils vont bien voir !


Ney est la fille LA PLUS AIMABLE que je connaisse. Elle est maintenant à Hanovre, elle
reviendra à Berlin vers Noël. J’ai entendu que le buste était actuellement exposé à Berlin : dès
que la propriété artistique en sera juridiquement assurée, le buste sera reproduit grâce à des
moulages ; on va m’en offrir un. Vous pouvez connaître le prix dans son atelier au Lagerhaus.
L’hiver dernier Göbel, notre MEILLEUR peintre, a achevé mon portrait à l’huile et il en a lui-même
fait une gravure sur CUIVRE ; elle est presque terminée et sera éditée à Berlin. L’original est bien
entendu encore chez lui, il ira également à Berlin, Vienne, etc.
Je n’apprends sans doute pas même la moitié de ce qu’on écrit sur moi : c’est Asher qui m’a
indiqué l’article dans la Konstitutionnelle, et celui dans la Novellen-Zeitung du 14 septembre,
sinon je ne l’aurais jamais su. Le dernier article est une description satirique de ma personne par
Madame Bölte, parce que je n’ai pas voulu converser avec elle, à table, pendant 8 jours : elle
comptait payer sa note d’hôtel grâce au compte-rendu de ces conversations.
Si vous pensez à quelque chose dont vous croyez que je pourrais l’ignorer, vous obligeriez
beaucoup en me l’indiquant

Francfort s. M. votre ami


le 6 déc. 1859. Arthur Schopenhauer.
478. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Je vous remercie pour la traite de 2 621 f. que vous m’avez transmise, à l’usage de
Bethmann, qui a été acceptée. Notre affaire actuelle est donc close. Je travaille déjà avec bonne
humeur à la 4 édition, et j’ai déjà écrit un petit ajout dans mon exemplaire interfolié. J’espère
e

réellement être en mesure de la voir, car je crois que la vente sera plus rapide et ma vie plus
longue que vous ne le pensez peut-être.
Avec ma haute considération je demeure

Francfort, votre
le 12 déc. serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer
479. À MARIE KRETZSCHMER 1

Honorée Madame la conseillère supérieure


du gouvernement,

Vos propos au sujet du vif intérêt que Monsieur votre époux porte à ma philosophie m’ont
vraiment réjoui ; que pourrais-je donc souhaiter davantage qu’un témoignage immédiat et sincère
du fait que j’agis sur les esprits pensants ? car je n’ai jamais visé autre chose que cela.
Comme vous vous intéressez aux représentations de ma personne, j’attire votre attention sur
le fait qu’en octobre, la sculptrice Ney (la petite-nièce du maréchal) est venue ici pour exécuter
mon buste, et qu’elle l’a réalisé avec la plus grande perfection ; tout le monde dit qu’il est très
ressemblant. À Berlin, on va maintenant reproduire ce buste grâce à des moulages et peut-être
peut-on déjà l’acquérir dans l’atelier de Mademoiselle Élisabeth Ney, au Lagerhaus. L’hiver
dernier Göbel, le meilleur peintre de cette ville, a peint mon portrait à l’huile qui est très
ressemblant, mais sans aucune idéalité, et maintenant il en a fait lui-même une gravure sur cuivre
: elle est achevée, mis à part quelques traits, et elle sera prochainement publiée.
En me recommandant à votre souvenir, je demeure avec ma haute considération

Francfort s. M. votre
le 16 déc. serviteur dévoué
1859. Arthur Schopenhauer
480. À CARL G. BÄHR 1

Cher Monsieur Bähr,

Votre lettre m’a fait grand plaisir, comme à chaque fois : parmi ceux qui m’écrivent, vous
2

êtes résolument celui dont les lettres me touchent le plus intimement, grâce à votre grande
capacité de compréhension, votre clarté et votre authentique sincérité. C’est pourquoi la moindre
occasion me suffit pour vous écrire. Cette fois-ci, il s’agit du billet de Dresde dans la Revue
germanique, rédigé par Maillard . Il dit qu’il a commencé puis abandonné une traduction de mon
3

chapitre sur l’amour sexuel. Mais sans les 3 chapitres précédents, ce chapitre n’est pas
intelligible. Pour offrir un échantillon ALLÉCHANT aux FRANÇAIS, j’ai alors pensé que rien ne
serait plus approprié que de bien traduire, et avec soin, les chapitres 41-44 : ils forment (comme
je le dis au début du chap. 44) un ensemble subordonné et ils donneraient une petite brochure. Je
vous laisse réfléchir à tout cela. L’article de Dollfus est mauvais : au lieu de donner une
4

présentation claire de ma doctrine, il nous la sert de façon fragmentaire, il ne me laisse jamais


terminer mes phrases, mais s’immisce toujours avec sa polémique bornée.
Mes remerciements pour vos notes, surtout pour celle des Findlinge de Hofmann v. F . La 5

lettre manuscrite que Goethe m’avait adressée, et qui s’y trouve reproduite, m’avait été enlevée
de façon très malhonnête en 1821, à Berlin ; depuis, je n’en avais plus entendu parler : à présent
on l’a conservée grâce à l’impression et on l’a communiquée au public ; ce qui ne serait pas
arrivé dans d’autres circonstances : il s’agit donc d’une compensation.
La personne très indiscrète qui a communiqué mes propos de table dans la Konstitutionelle
Zeitung est un avocat de Dresde dont le nom commence par M. : j’ai oublié la suite ; ce dernier
m’avait été présenté par le baron Eberstein qui est à la fois un vieil apôtre et un jeune homme.
J’espère que mon passage dirigé contre saint Clément, t. 2, p. 710-713 ne vous aura pas
6

échappé ; j’y tiens beaucoup : de même celui contre Flourens, p. 300-304 . Encore un autre p.
7

283-285 . J’ai cité PLUSIEURS passages de saint Augustin qui de façon surprenante concordent
8

avec moi.
En octobre, la sculptrice Ney (petite-nièce du maréchal) est venue de Berlin pour exécuter
mon buste, ce qu’elle a réussi avec tant d’excellence qu’un de nos sculpteurs a dit que personne
ici n’aurait pu le faire aussi bien. Il a été exposé ici pendant 14 jours et en général on l’a trouvé
TRÈS RESSEMBLANT. Ney s’est ensuite rendue à Hanovre, elle a l’intention d’être de retour à Berlin
vers Noël, où elle s’assurera légalement les droits de propriété artistique, pour ensuite procéder à
la reproduction et à la vente grâce aux moulages. Mais depuis, je n’ai rien entendu ni vu : elle
voulait m’en envoyer un exemplaire. Cela intéressera Monsieur votre père, qui désirait mon
buste depuis toujours. Quelqu’un m’a dit que vous aviez l’intention d’aller à Paris pour y suivre
une formation.
Si vous tombez sur quelque chose qui aurait pu m’échapper, vous me feriez plaisir en me le
communiquant. Je n’apprends que peu de choses, et seulement grâce aux indications des autres ;
ce que je regrette.
Sur ce je vous salue de tout cœur !

Francfort, Arthur Schopenhauer


le 12 janv.
1860.
481. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Cher Monsieur et ami,

Voilà bien longtemps que je n’ai rien vu ni entendu de vous, je me console donc en espérant
que vous vous portez bien. Aujourd’hui, je vous écris seulement pour vous prier de ne surtout
pas vous dessaisir de notre vieille correspondance philosophique, pour la donner à copier ou pour
d’autres raisons. Un petit hasard circonstanciel , le fait que j’en ai moi-même évoqué l’existence,
2

et aussi ma célébrité actuelle me recommandent cette précaution superflue qui autrement irait de
soi. Je commence aussi à sentir le poids encombrant de la célébrité : mes propos de table publiés
dans un journal, on décrit ma personne, on la caricature, des potins en tous genres, etc., etc. La
jalousie est à l’œuvre, partout !
Ma 3 éd. a paru : je n’ai malheureusement plus d’exemplaire pour vous, les 8 que je pouvais
e

distribuer ont été immédiatement absorbés par les évangélistes et d’autres personnes qu’il fallait
3

remercier.
En octobre, la sculptrice Ney est venue de Berlin pour exécuter mon BUSTE, ce qu’elle à
réussi à faire avec une grande beauté. Il doit être reproduit à Berlin grâce à des moulages, pour la
vente. Mais depuis 2 mois je n’ai pas eu de nouvelles, ni reçu mon exemplaire.
Dans l’espoir de vous revoir bientôt, mes meilleurs souhaits et mes salutations cordiales !

Francfort Arthur Schopenhauer


le 18 janv. 1860.
482. À CLEMENS RAINER 1

Très honoré Monsieur !

Le fait que vous vous soyez tourné vers le théâtre après avoir effectué, selon le rite*, les
études et les examens, est un bon signe, car cela montre une tendance résolue et un talent
véritable ; à supposer que votre constitution physique soit appropriée, car le corps et l’organe de
la parole sont à l’acteur ce qu’est l’instrument au virtuose.
Je vais tenter de répondre aussi bien que possible à votre question quelque peu indéterminée
; même si je doute que cela donnera des résultats pratiques. Aussi peu que vous, je ne saurais
décider si, d’après la conception de Goethe, le « et en tant que diable, je dois CRÉER », c’est-à-
dire agir, peut être attribué à un certain hellénisme, voire à l’optimisme qui considère que tout
finit au mieux, ou alors s’il a effectivement pensé le diable comme auteur du mal et de la
souffrance, contribuant indirectement à la négation de la volonté et par là à la rédemption. Vous
trouverez un passage qui éclaire cette dernière perspective dans la 3 édition de mon ouvrage
e

principal qui vient de paraître : t. 2, p. 660-661 . Comme il ne faut jamais négliger le point de vue
2

génétique, nous devons garder à l’œil qu’à l’origine le diable est Ahriman — ce sur quoi j’ai dit
certaines choses dans le tome 2 des Parerga, p. 314 . Il faut également rappeler que le « Prologue
3

au ciel » a pour modèle le chap. 1 de Job. Vous avez très bien repéré le passage dans mon
ouvrage principal, dans le livre IV, t. 1, § 68, où je décris le diable comme personnification de la
tentation de l’affirmation de la volonté. Du point de vue de ma philosophie, on pourrait
l’expliquer comme étant la personnification de l’affirmation concentrée de la volonté. C’est ce
qui explique que l’affaire principale du diable soit la luxure en tout genre et que la plupart du
temps, il prononce des obscénités : j’ai parlé de ce dernier point dans la nouvelle édition évoquée
plus haut, t. 2, p. 651. C’est précisément dans ce sens-là qu’il est présenté dans les excellents
Paralipomènes au Faust, qui se trouvent dans le tome 17 des Manuscrits posthumes de Goethe
(ou le t. 57 des œuvres complètes) et qui proviennent sans doute d’une époque ancienne, c’est-à-
dire de sa jeunesse. Si elles vous ont échappé, vous devez vraiment les lire ; mais Satan et
Méphistophélès s’y présentent comme 2 personnes différentes. Vous dites que vous considérez
M. comme l’incarnation de l’égoïsme : ce n’est pas assez, cela ne suffit pas pour faire un diable ;
il faut aussi « la 2 potence antimorale », la méchanceté positive pour laquelle la souffrance des
e

autres est une fin en soi et que j’ai par conséquent appelée la potence diabolique authentique, au
§ 14, « Mobiles antimoraux », dans le traité sur Le Fondement de la morale, dans Les Deux
Problèmes fondamentaux de l’éthique, un livre que je vous conseille, car le côté éthique de ma
philosophie vous est le plus proche. Je ne sais pas si vous connaissez le livre A. Schopenhauer,
interprète du Faust par le Dr. Asher, 1859. Je ne saurais vraiment vous le conseiller, car il a peu
de mérites, mais on y trouve une mise en parallèle d’un tas de passages du Faust avec mes
œuvres, même si parfois c’est un peu forcé, et sans pertinence.
Voilà tout ce qui m’est venu à l’esprit concernant votre personne et votre question. Vous
voyez ma bonne volonté. Il y a 2 ans, j’ai vu ici l’acteur Haase , désormais célèbre, qui jouait
4

Méphistophélès et j’étais très satisfait : il était complètement pénétré de scélératesse et un certain


air de réprobation* ne le quittait jamais. Il m’a particulièrement touché au début, se retrouvant
en lettré voyageur.
Je vous souhaite de tout cœur une bonne santé et de brillants succès.

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


le 29 janv. 1860.
483. À F. A. BROCKHAUS

Monsieur,

Je crois de mon devoir de vous indiquer que M. Suchsland est venu il y a quelques jours
pour me proposer une 2 éd. de mes PROBLÈMES FONDAMENTAUX DE L’ÉTHIQUE, car il ne lui en reste
e

plus que très peu d’exemplaires. Mais j’ai d’abord gagné du temps en lui demandant de remplir
une autre obligation avant que nous ne continuions les négociations.
Le temps est à présent venu de prendre une décision concernant l’édition complète de mes
œuvres. M. Edward Br. m’a dit que vous y songiez sérieusement. D’une part je ne veux pas que
mon Éthique soit absente des librairies ; d’autre part je crains que si Suchsland la réédite,
l’édition complète ne devienne impossible ; à moins qu’il ne veuille bien STIPULER que je peux la
faire quand même ; et même dans ce cas, cela ne vous arrangerait pas.
Hayn n’a toujours pas fait signe : j’ai l’impression que son édition des Parerga est comme
la cruche d’huile de la veuve dans l’Évangile . Il y a des miracles qui se produisent
1

naturellement.
Dans ces conditions, je vous prie de me faire connaître en toute sincérité votre intention
profonde , et je demeure avec ma haute considération
2

Francfort, votre
le 6 févr. serviteur dévoué
1860. Arthur Schopenhauer
484. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Si je vous comprends bien, vous avez l’intention d’imprimer séparément mes écrits dès
qu’ils redeviendront libres de droit, et de les rassembler ensuite dans une édition complète. Je
souhaite assurément une édition complète, pour diverses raisons, d’autant plus que mes derniers
scrupules à ce sujet ont été levés par M. le Dr. Edw. Br. qui m’a assuré que vous vendriez
également les écrits SÉPARÉMENT. Même si le projet évoqué plus haut comprend des
inconvénients, je dois cependant l’accepter, car l’écoulement des éditions restantes pourrait en
effet être difficile et coûteux.
L’édition complète serait constituée de 5 volumes : les 2 PREMIERS (cela restera ainsi)
existent déjà ; les 2 derniers seraient les Parerga, qui devraient très bientôt être épuisés, même si
le diable devait s’en mêler. La difficulté réside dans le 3 volume, qui doit contenir les 4 écrits
e

mineurs, dont l’ÉTHIQUE devrait occuper environ les 2/5. Si nous commençons avec cette dernière
et que les 3 autres suivent peu à peu, le volume doit quand même avoir un NOMBRE DE PAGES
CONTINU, et le 2 écrit doit par conséquent commencer après la dernière page de l’Éthique — est-
e

ce un inconvénient !? Les écrits mineurs ne peuvent tout de même pas errer séparément entre
l’ouvrage principal et les Parerga, comme des planétoïdes entre Jupiter et Mars ! Je vous prie de
me faire part de votre projet à ce propos. Les conditions éditoriales seraient les mêmes que celles
de l’ouvrage principal. Il faudra que nous convenions d’un contrat particulier. L’Éthique aura des
ajouts, mais ils ne seront pas TRÈS importants.
Mais il y a encore une difficulté particulière et curieuse qui fait obstacle, même si elle est
seulement FORMELLE. Car dans mon contrat de l’Éthique, avec Suchsland, il est dit au § 2 : « LA
PREMIÈRE ÉDITION de l’ouvrage est la propriété exclusive de la librairie H., et le Dr. Sch. promet
de ne pas faire publier de deuxième édition avant épuisement de la première : dans le cas
contraire, l’auteur devra verser une indemnisation de 200 f. — à la librairie H. »
J’ai à l’époque laissé tel quel ce paragraphe, sans réfléchir. Mais : 1° c’est injuste, car
l’équité voudrait que je ne lui achète que les exemplaires restants ; 2° c’est insidieux, car d’une
certaine façon, il me tient grâce à cela : il lui suffit seulement à présent de garder quelques
exemplaires pour lui et de venir ensuite se présenter avec ses exigences. Il prendra mal le fait que
la 2 éd. vous revienne, nous devons donc nous attendre à cette chicane. La question est donc la
e

suivante : comment prendre des mesures préventives sûres ? Vous saurez vous y prendre au
mieux. Je pense qu’il faudrait rassembler plusieurs billets de commande qui reviennent avec la
mention « épuisé », afin de les utiliser comme bouclier. Suchsland abandonne son magasin
d’assortiments et garde la maison d’édition.
J’attends donc de vous une solution à ces scrupules et doutes et je demeure avec ma haute
considération
Francfort, votre serviteur dévoué
le 10 févr. Arthur Schopenhauer
1860.
485. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Dans votre chère lettre , vous établissez l’ordre de mes ouvrages pour le projet de l’édition
2

complète de la même façon que je l’avais indiqué au départ ; ce faisant, vous oubliez que, dans
une lettre consécutive, je vous avais écrit qu’après réflexion, je trouvais que les 4 écrits mineurs
devaient constituer le volume III, et les Parerga les volumes IV & V. À présent vous me
proposez vous-même cet ordre, nous sommes donc d’accord : cet ordre est nécessaire car les
écrits mineurs (excepté la théorie des couleurs) sont des parties intégrantes de ma philosophie et
ils se rattachent donc à l’ouvrage principal ; ce qui n’est pas le cas pour les Parerga, qui traitent
de omnibus rebus & quibusdam aliis , sauf quelques chapitres dans le t. 2 que j’ai rangés sous
3

Paralipomena. Ces 2 tomes peuvent également être publiés séparément.


Or maintenant vous me soumettez à nouveau une exigence que j’avais déjà refusée de la
façon la plus résolue il y a longtemps, à savoir que je dois trouver un arrangement avec les
anciens éditeurs, négocier, prendre le risque de payer 200 f. à Suchsland (qu’il ne manquera pas
de me demander), etc. Je me vois donc dans l’obligation de vous dire pour la 2 fois que je ne
e

ferai rien de tout cela, mais que je laisserai plutôt les choses à leur cours naturel. C’est là l’affaire
des ÉDITEURS, et ils trouveront beaucoup plus facilement un accord entre eux. Vous dites que je
crains qu’il n’y ait des difficultés à cause des PARERGA : je ne vois pas lesquelles (veuillez vérifier
certains extraits de tous mes contrats que je vous ai envoyés il y a 1 an ½) : on pourrait chicaner
un peu ; il faut y réfléchir.
Nous devons d’abord nous occuper de l’ÉTHIQUE. Il vous sera facile de racheter le peu
d’exemplaires restants à S., explicitement en tant que « RESTE », pour qu’il ne puisse pas
m’embêter. Ces derniers seront donc vendus avant que nous ayons terminé la 2 édition. Mais e

peut-être n’y en a-t-il tout simplement plus : il ne ME le dirait JAMAIS, pour me tenir en respect
avec son § des 200 f. Car il est obsédé par la 2 éd. C’est pourquoi je ne lui dis rien de nos
e

affaires et le fais attendre avec une autre exigence qui doit être d’abord satisfaite. Au cas où nous
trouvons un accord, vous devrez quand même mettre à ma disposition un exemplaire de travail
(je n’ai rien d’autre que mon exemplaire personnel interfolié) ; vous pourriez donc essayer d’en
commander un, et s’il n’en a pas, vous en commanderez auprès d’autres libraires : car concernant
l’Éthique, il me faut simplement une preuve du fait qu’il a vendu tous les exemplaires ; nous en
aurons alors terminé. Ou voulez-vous risquer les 200 f. —, dans le contrat ? Puisque vous
considérez que ce n’est pas un grand problème.
En attendant votre décision favorable concernant tout cela, je demeure avec ma haute
considération

Francfort votre
le 18 févr., serviteur dévoué
1860 Arthur Schopenhauer

P. S. Il ne me semble pas particulièrement stratégique d’adjoindre des éloges à vos annonces


des Lettres de Frauenstädt (mis à part les articles en contrebande généralement réprouvés) : ces
galopins paresseux se jettent sur les Lettres pour avoir tout en une fois : ils veulent tout avaler
comme une pilule.
486. À CARL G. BÄHR 1

Cher Monsieur Bähr,

Remerciements cordiaux pour vos vœux et votre lettre qui, comme toujours, laisse loin
derrière celles de mes autres correspondants. Dommage que vous soyez juriste et que vous
deviez le rester, mais le fait que vous visiez « l’indépendance » me réjouit, car elle est préférable
à la richesse : rvokg jakkirsom jsglasxm a dit Socrate. Vous ne manquerez pas de produire un
2

jour quelque chose de respectable et de digne. Si seulement votre santé reste bonne : la plupart
des gens souffrent d’un mal chronique ou qui revient sans cesse ; je le constate chaque jour. Mais
ce n’est pas mon cas.
Je me réjouis du fait que vous ayez tout de suite suivi mon conseil concernant Maillard . 3

Dirigez-le pour qu’il ne restitue pas seulement le sens, mais aussi le style, mes allures* : comme
l’a réussi À MERVEILLE Oxenford dans la Westminster Review de 1853. Comme titre je
proposerais Petit Échantillon de la philosophie de A. Sch.* Mais il faudrait que, dans la préface,
vous exposiez brièvement les traits fondamentaux de ma philosophie, surtout la doctrine
principale qui dit que l’essence authentique de l’homme est seulement la volonté, et que la
connaissance et l’intellect sont secondaires, adventitium.
Je suis étonné de vous entendre dire que cette fois-ci, ma lettre est arrivée sans avoir été
ouverte : ils ne vont tout de même pas ouvrir les lettres à la poste ?! que diable* !
L’unique recension de ma 3 éd. que je connaisse se trouve dans le Münchner Zeitungs-
e

ABENDBLATT du 10 janv . : de la polémique hautement insipide ; à la fin, les anecdotes


4

concernant ma personne sont amusantes : je suis assis « entouré par toute une meute de chiens 5

» ; il s’agit des 16 gravures sur cuivre de chiens dans ma chambre, que la tradition a peu à peu
ranimées — instructif pour l’histoire. Ce qui me plaît, c’est qu’il se plaint de façon répétée du
fait que je devienne célèbre et qu’on me divinise de surcroît . Bravo. Faites donc imprimer «
6

quelque chose de provoquant et de beau » : cela me fera sans aucun doute très plaisir. J’ai reçu
des lettres curieuses, mais réjouissantes, d’une conseillère supérieure du gouvernement à
Marienwerder et d’un acteur à Oldenburg (qui est cependant juriste diplômé).
Cette année paraîtra la 2 éd. de mon Éthique : il ne me reste plus qu’à résoudre quelques
e

difficultés éditoriales. Elle est épuisée.


En vous souhaitant bonheur et santé, avec mes salutations cordiales

Francfort, Arthur Schopenhauer


le 25 févr.
1860.
487. À ADAM VON DOSS 1

Remerciements cordiaux, mon cher Monsieur von Doss, pour vos marques de sympathie
réitérées à l’occasion de mon anniversaire, ainsi que pour les comptes-rendus concernant les
fruits de vos lectures, et enfin pour la feuille de la Münchner Abendzeitung. Lindner me l’avait
déjà envoyée de Berlin. Mais vous m’obligerez toujours si vous tombez sur des choses du même
genre et si vous me les envoyez simplement sous enveloppe fermée. C’est que je ne vois même
pas la moitié de ce qu’on imprime sur moi. La meute de chiens évoquée dans cette recension
insipide (dans laquelle seules les plaintes concernant ma popularité croissante me réjouissent) est
en vérité composée par les gravures de chiens sur les murs de ma chambre : un quelconque
visiteur les a remarquées et la tradition les a peu à peu ranimées.
Je vous aurais volontiers envoyé un exemplaire de ma 3 éd., mais ce n’est pas possible : les
e

8 exemplaires que je pouvais donner ont tous été distribués aux grands évangélistes et à quelques
personnes qu’il fallait remercier. Le premier tome a 36 pages d’ajouts et le 2 en a 100. Vous
e

pensez que de nombreuses contradictions vont apparaître dans l’ APPENDICE : cela serait une
remarque à prendre au sérieux si contredire signifiait réfuter : regardez donc la MAXIME grecque
qui s’y trouve.
Je vais peut-être faire venir les Lettres de Leopardi . J’ai lu l’article de Renan dans
2 3

l’AUSLAND : c’est comme vous le dites. Il y a quelque temps, dans la Revue des Deux Mondes, j’ai
lu un papier de lui qui ne m’a pas donné une opinion favorable : il manque de résolution et de
précision, c’est du bavardage versatile. J’ai lu un long extrait du livre de Darwin dans le Times :
4

il en ressort que cela n’a aucune affinité avec ma théorie et que c’est de l’empirisme plat et
insuffisant en la matière : c’est une variation de la théorie de Lamarck.
Les symptômes de ma célébrité se multiplient de façon évidente. Sans parler de lettres et
visites curieuses — dans la Novellen-Zeitung du 14 sept. on trouve une description défavorable
de ma personne à la table d’hôte*, par Madame Bölte, qui est fâchée parce que je n’ai pas voulu
converser avec elle, pendant les 8 jours où elle est restée assise à côté de moi dans ce but, ou bien
plutôt dans le but de payer sa note d’hôtel grâce au compte-rendu qu’elle comptait faire de nos
conversations pleines d’esprit ! Brava ! Dans la Konstitutionelle Zeitung du 1 oct. on trouve en
er
revanche le LONG compte-rendu de tout ce que j’ai spontanément dit à un avocat qu’on m’avait
présenté et au baron Eberstein qui avait amené ce dernier : sans malice*, mais QUELLE
INDISCRÉTION ! et quelle mémoire ! C’est l’œuvre d’un avocat : c’est souvent juste, mais certaines
choses sont déformées.
En octobre, la sculptrice Élisabeth Ney, petite-nièce du maréchal, est venue ici, de Berlin,
pour faire mon buste. Elle est âgée de 24 ans, très jolie et INDESCRIPTIBLEMENT AIMABLE. Elle a
travaillé chaque jour, pendant presque 4 semaines, dans une chambre à part de mon logis actuel
(qui est beaucoup plus grand et beau). Elle se faisait livrer son repas de midi du restaurant au-
dessus de chez moi, et l’après-midi elle venait boire le café avec moi, lorsque je rentrais à la
maison. Quelques fois, elle m’a même accompagné lors de mes promenades au bord du Main, à
travers champs. Nous étions dans une harmonie admirable. Le buste a été exposé pendant 14
jours et tout le monde l’a trouvé TRÈS ressemblant et de très belle facture. Il devait ensuite être
transporté à Berlin pour y être reproduit et vendu : à Noël, Ney voulait être à Berlin ; après un
passage à Hanovre pour faire le buste du roi. Elle a donc fait venir le buste à Hanovre, et depuis
je n’ai pas eu de ses nouvelles ! Mais on l’a vu à Münster où habite son père . Le buste finira bien
5

par réapparaître. La gravure sur cuivre de Göbel paraîtra très bientôt, comme il me l’a dit.
Vous avez été promu , bravo ! en avant ! Mais je regrette beaucoup que vous soyez en
6

mauvaise santé : l’insomnie est un symptôme inquiétant. Faites-moi confiance et MARCHEZ SEUL
D’UN PAS RAPIDE, CHAQUE JOUR PENDANT 2 HEURES : cela vous aidera bien plus que toutes les cures
balnéaires possibles, et c’est gratuit. Sans mes promenades, je ne serais pas en aussi bonne et
solide santé à 72 ans, comme je le suis et le resterai

Francfort votre vieil ami


le 1 mars
er
Arthur Schopenhauer
1860. verte

P. S. La 2 éd. de mon Éthique paraîtra cette année. Il faut encore résoudre certaines
e

difficultés éditoriales.
488. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Je me permets de vous donner le renseignement suivant en complément de ma lettre


précédente.
M. Suchsland m’a récemment rendu visite, pour parler de la 2 éd. de l’Éthique à laquelle il
e

tient beaucoup, comme j’ai pu le constater. Il m’a dit qu’il en avait encore 32 exemplaires.
Lorsque je lui ai parlé du fameux et insidieux paragraphe de son contrat, avec les 200 f —, il m’a
proposé de l’annuler, ce qui a immédiatement été fait, dans le post-scriptum suivant inséré dans
le contrat :
« Le § 2 est modifié, au sens où seuls les exemplaires subsistants de l’ancienne éd. doivent
être vendus au prix net de librairie, dans le cas où l’auteur devait envisager une nouvelle éd. chez
un autre éditeur. »
Le travail pour la 2 éd devrait prendre environ 2 mois, l’impression environ 2 à 3 mois.
e

D’ici là, les 32 exemplaires devraient avoir été vendus : s’il devait en rester, il faudrait que vous
les achetiez, ce à quoi vous obligerait le contrat. Toutes les difficultés seraient alors résolues. Et
en ce qui concerne le § à propos de la 2 éd. des Parerga, dans mon contrat avec Hayn,
e

Suchsland m’a dit qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter avec lui, qu’il me laisserait les pleins
droits pour la 2 éd.
e

L’unique obstacle qui pourrait s’opposer à l’édition de mes œuvres complètes tient dans les
3 petits écrits censés compléter le 3 volume, qui doit avoir un nombre de pages continu : Volonté
e

dans la nature, Quadruple Racine, Vision et couleurs. Voilà le problème !


Il est temps, en tout cas, de prendre une décision, pour que l’Éthique ne soit pas absente des
librairies ; de plus les Parerga, qui demandent beaucoup de travail en raison des ajouts,
pourraient bien me tomber dessus d’un jour à l’autre.
En soumettant tout cela à votre réflexion, je vous prie de bien vouloir me communiquer
votre avis et votre intention, et je demeure avec ma haute considération

Francfort, votre
le 19 mars serviteur dévoué
1860. Arthur Schopenhauer

P. S. Ney a passé tout l’hiver à Hanovre, avec mon buste, et elle a l’intention de le faire
2

mouler et exposer à Berlin. D’où la pause.


489. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Vous êtes donc décidé, et nous nous mettons à l’œuvre. Je tiens tout particulièrement à une
édition générale parce que je veux voir mes 4 petits écrits réunis dans un seul volume. Car tous
mes écrits s’expliquent réciproquement, et c’est pourquoi il faut lire tout ce que j’ai écrit.
Nombreux sont ceux qui trouvent que le rassemblement de mes petits écrits est une tâche trop
longue, et je sais même d’expérience que cela n’a pas abouti pour l’instant à cause de l’ignorance
et de la paresse des libraires. C’est la raison pour laquelle nous allons commencer par l’Éthique,
en tant que première partie du 3 volume, en espérant que vous réussirez à y ajouter les 3 autres.
e

Quant aux conditions, nous sommes d’accord. Il suffira que vous mettiez un appendice au
bas du premier contrat pour dire que les mêmes conditions sont également valables pour
l’Éthique et que vous achetiez les exemplaires de la 1 éd., s’il en reste. Si vous voulez bien
re

m’envoyer votre contrat avec cet ajout, je recopierai ce dernier sur mon exemplaire et je vous le
renverrai signé à la place du vôtre. Je vous prie de ne surtout pas fixer une date à laquelle je
devrai livrer l’exemplaire amélioré, car mon principe fondamental, c’est sat cito, si sat bene , et2

je ne travaille que pendant les 2 premières heures de la matinée. Mais j’espère pouvoir le livrer
dans 2 mois, peut-être même avant : cela peut également durer plus longtemps. Je fais ce que je
peux.
Lors de la dernière visite de M. Suchsland, j’ai révélé à ce dernier que vous aviez un projet
d’édition générale, mais que cela n’était pas encore décidé. Il a alors simplement répondu que si
cela ne pouvait se faire, je n’aurais qu’à lui laisser l’Éthique ; je lui ai répliqué que je ne pouvais
pas en faire la promesse. Il m’a promis qu’après la foire de Pâques, il me paierait 100 f. qu’il
aurait déjà dû me payer selon moi il y a quelques années. Je vous prie par conséquent de ne pas
encore le contacter, car cela pourrait le troubler. Dès qu’il aura payé, je lui dirai que nous avons
conclu que l’Éthique passe entre vos mains, et je vous ferai alors signe.
Les pages de notre édition contiennent beaucoup plus que celles de la première édition de
l’Éthique : je doute que les ajouts suffiront pour les rééquilibrer.
Un excellent juriste et juge a vu mon contrat avec Hayn et, après un examen approprié, il
3

m’a dit que je pouvais disposer librement de la 2 éd. des Parerga. Tout sera donc en ordre dès
e

que vous pourrez vous saisir des 3 petits écrits.


L’exemplaire qui m’a été envoyé sera aplani : on me le rendra demain et je me mettrai alors
immédiatement au travail. Il va de soi que je ferai moi-même la dernière correction et que mon
orthographe et ma ponctuation restent sacrées. En attendant donc le contrat, je demeure avec ma
haute considération

Francfort, votre serviteur dévoué


le 28 mars Arthur Schopenhauer
1860.
490. À DAVID ASHER 1

Très cher Monsieur le Dr. Asher,

Je dois vous remercier encore pour les marques de sympathie dont vous m’avez témoigné à
l’occasion de mon anniversaire : je l’aurais fait plus tôt si je n’avais pas attendu le nouvel écrit 2

dont vous disiez dans votre lettre qu’il allait suivre sous peu. N’ayant pas reçu d’exemplaire de
vous, j’en ai acheté malgré moi. Le libraire m’en a envoyé un pour le regarder, et croyant dans
une sorte de folie que c’était l’exemplaire envoyé par vous, je l’ai tout de suite ouvert et j’ai donc
dû le garder. Mais je ne l’ai pas lu, car je suis tout de suite tombé sur la p. 32 et la note p. 44 où
la religion principale sur cette terre se trouve ignorée quite cooly : le livre m’est donc tout à fait
3 4

antipathique, et je ne le lirai pas.


Par ailleurs, je n’étais pas pressé de répondre à votre lettre, car cette dernière ne contenait
pas de compte-rendu me concernant, alors que bien des fois vous m’en avez fait parvenir, dont
certaines étaient très estimables. C’est précisément cela qui me fait de la peine, à savoir que je
n’apprends pas même la moitié de ce qu’on écrit sur moi. C’est pour cette raison que je vous ai
tant de fois demandé avec insistance de ne pas affranchir vos lettres, pour que vous puissiez me
communiquer les choses de ce genre sans hésiter un instant. Chacun de ces compte-rendus a pour
moi 10 fois plus de valeur que les frais d’affranchissement. Je vous prie donc à l’avenir de penser
à moi.
Dans les Lit. Blätter se trouve une recension très élogieuse de votre livre sur le Faust, mais
5

n’en soyez pas fier pour autant : c’est un puff indirect pour ma 3 édition, dans l’intérêt de
6 e

Monsieur Brockhaus.
Ce que vous dites sur Shakespeare dans votre article est peut-être juste, mais cela témoigne
7

malheureusement de votre souhait persistant de vous marier : eh bien, let a wilfull man have his
way .
8

Je travaille à présent à la 2 édition de mon Éthique qui, j’espère, paraîtra en août.


e

En vous souhaitant une meilleure santé et de la bonne humeur,

Francfort, le 1 avril 1860.


er
votre
Arthur Schopenhauer
491. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher,

Je vous remercie beaucoup pour votre notice qui n’était assurément pas superflue, car je ne
2

savais rien de cette critique. Mais c’est la plus mauvaise qu’on n’ait jamais gribouillée : c’est
vraiment l’âne des ânes ! Ce fatras ne saurait me nuire en aucune façon ; cela aura bien plutôt un
3

effet FAVORABLE : ask Dr. Johnson, he’ll tell you all about it . Cela fait longtemps que je ne
4

considère plus ces voix contemporaines qui, en vérité, devraient s’appeler voix des ânes. Vous
voyez donc à quel point toutes ces notices me sont utiles et j’espère que vous me ferez
généreusement parvenir tout ce que vous trouverez.
L’exemplaire que vous m’aviez destiné m’a été remis la semaine dernière par le secrétaire
du Bürgerverein (club), dans une enveloppe usée. Étant donné que je possède déjà le livre,
comme je l’ai dit, il est raisonnable que je vous renvoie cet exemplaire, car vous pourrez ainsi
réjouir quelqu’un d’autre, mais en raison de l’enveloppe fermée, je dois couper le titre. Merci
pour la bonne volonté. Il doit partir demain.
Si on augmente votre travail, vous pouvez exiger sans scrupule qu’on augmente aussi votre
rémunération. Il ne faut pas se laisser faire ! 5

Esssayer de se faire indépendant ? C’est le moment opportun pour le faire. Mais mihi est
propositum, in taberna mori . 6
Mon buste n’a toujours pas réapparu et il semble qu’il soit toujours en compagnie de Ney, à
Hanovre, où personne ne doit être capable d’en faire un moulage. À la place, elle m’a envoyé
une photographie la représentant à côté de mon buste ; très joli.
Je travaille avec zèle à la 2 édition de l’Éthique et je lis peu, sinon ce qui s’y rapporte :
e

comme la journée est brève !

Francfort, Avec amitié et dévouement


le 15 avril 1860. Arthur Schopenhauer
492. À OTTILIE VON GOETHE 1

Ô Ottilie, nous vieillissons et nous nous rapprochons ! Ici ou là, tout le monde est mort,
surtout de mon côté, moi qui ai 10 ans de plus. Nous vivons de plus en plus dans les souvenirs.
Avec vous, il me reste encore une des très rares personnes qui m’aient connu quand j’étais jeune,
et à cela s’ajoute que vous ne m’avez pas perdu de vue, que vous témoignez maintenant du fait
que dès ma jeunesse, j’ai tendu vers ce que j’ai à présent atteint, et que vous remarquez très
joliment combien cela est estimable et rare au plus haut point. Mais je pense que cela provient du
fait qu’une réflexion raisonnable et une volonté solide n’y suffisent pas ; mais chez les personnes
de mon espèce, il s’agit d’une pulsion instinctive, voire d’un trait démonique qui les guide et les
maintient dans un trajet — sans se soucier du reste. Si de surcroît on sait comment devenir très
vieux, alors on peut avoir certaines belles expériences à la fin.
Vous dites que je devrais réclamer les lettres et les carnets intimes d’Adèle : cela me semble
être une entreprise très compliquée et même pas tout à fait justifiée, puisqu’ils ont appartenu à
Sybille ; de plus je ne saurais pas à qui m’adresser : je ne connais pas les héritiers. Cependant si
vous pouvez les obtenir par l’intermédiaire de Gustav Mertens, je ne considérai pas cela comme
un empiètement sur mes droits ; bien au contraire je vous transfère ces derniers dans toute leur
étendue et je vous donne les pleins pouvoirs pour exiger les manuscrits en mon nom, si vous
pensez que cela peut avoir une certaine valeur. C’est que vous avez un ami là-bas, Gustav M.,
alors que je n’ai personne. À vrai dire, je dois exiger 600 Rth sur l’héritage de Sybille, mais
seulement à la suite d’une cession volontaire dont la preuve est uniquement constituée par vos
lettres ; or j’entends que son fonds n’est pas bien brillant et que les héritiers sont très intéressés ;
je préfère donc éviter les efforts et les complications ; je n’ai pas beaucoup d’espoir.
Concernant le portrait de l’homme aux cheveux bruns, je me souviens qu’en 1809, le
portrait à l’huile d’Oehlenschläger , réalisé par Gerhard von Kügelgen , était accroché chez ma
2 3

mère : elle en a vraisemblablement fait une copie en miniature. C’était un bel homme. Le portrait
d’Oehlenschläger se trouve vraisemblablement en première page de ses Œuvres, et il est peut-
être réalisé d’après celui de Kügelgen. Ce n’est donc qu’à ce portrait-là que vous devez le
comparer.
Vous vous mettez à collectionner les œuvres d’art et les souvenirs antiques : c’est une
chance pour vous, car ce genre de passe-temps est une source de jouissance durable. Et combien
retentit encore et toujours l’écho de l’auld lang syne ! La fille de Heinke , votre amie ! Ulrike,
4 5

une nonne ! Je vous prie de transmettre mes salutations les meilleures à cette dernière ainsi qu’à
6

vos fils qui doivent à présent beaucoup ressembler au grand-père.


7

Concernant les lettres et le journal intime d’Adèle, je crois qu’il n’y a pas lieu de
s’inquiéter. Il n’est sans doute pas à craindre qu’on en fasse un mauvais usage, puisqu’ils ont été
proposés aux libraires depuis longtemps. Le cours du temps nous submerge, il recouvre tout,
l’oubli nous dévore — sauf quelques éminences tout à fait isolées.
Je regrette beaucoup que vous gardiez la chambre de novembre à fin juin, car je sais que
personne ne saurait rester en bonne santé sans mouvement ni air frais. L’hiver, vous pouvez
certainement aller vous promener en fourrure et chaussures de caoutchouc ; or en hiver, il faut
toujours fermer la bouche et respirer par le nez, ce qui est très important. Depuis toujours je me
promène quotidiennement, peu importe le temps qu’il fait, à mon grand avantage. À 72 ans, je
suis toujours en bonne santé et même maintenant encore je me fais remarquer par ma démarche
EXTRÊMEMENT RAPIDE et légère. Je lis sans lunettes, même si la lumière est faible, et chaque jour
je joue de ma flûte. Je pourrais donc devenir très vieux — s’il n’y a pas d’accident. Seule mon
ouïe, qui a toujours été faible, a encore baissé : depuis 3 ans, je n’entends plus rien aux comédies
données au théâtre et je dois me contenter de l’opéra.
Vous savez que je n’ai jamais été très sociable, et à présent je vis plus retiré que jamais.
Quelques amis viennent me rendre visite de temps à autre, pour voir comment je vais, et l’été je
reçois beaucoup de visites d’étrangers de tous pays — visite di curiosità comme disait Michel-
Ange. Cela dit je prends toujours mes repas de midi et du soir à l’Hôtel d’Angleterre, où me
voient ceux qui se contentent de me regarder en badaud, mais certains font également leurs
présentations. Cela amène quelques hôtes supplémentaires à la maison. En octobre dernier, la
sculptrice Ney (la petite-nièce du maréchal) est venue de Berlin pour faire mon buste : le buste
était tellement parfait que tout le monde était d’accord pour le trouver très ressemblant, et l’un de
nos sculpteurs a assuré qu’il n’y avait personne ici qui aurait pu le faire aussi bien. Ney est âgée
de 24 ans, très jolie et indescriptiblement aimable et originale. Le buste était exposé ici pendant
14 jours. Ensuite Ney s’est rendue à Hanovre pour faire le buste du roi et avait l’intention d’être
déjà à Berlin à Noël, pour faire mouler et vendre mon buste. Mais elle est toujours à Hanovre,
avec le buste, d’où elle m’a envoyé une photographie la représentant à côté du buste.
Vous vouliez m’entendre parler de MA personne.
Comme vous voyagez toujours à gauche et à droite, j’espère que votre chemin passera aussi
par Francfort : d’ici là, n’oubliez pas

Francfort votre vieil ami


le 27 avril Arthur Schopenhauer
1860.

493. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Vous ne m’avez toujours pas envoyé notre vieux contrat avec l’ajout concernant l’Éthique,
afin que j’inscrive cet ajout sur mon exemplaire et vous le renvoie. Il serait temps de le faire, car
j’ai avancé mon travail au point de pouvoir vous l’expédier dans 8 jours. Mais auparavant, le
contrat doit être en ordre. Je vous prie d’écrire sur ce dernier que tous les points énoncés pour la
3 éd. sont également valables pour l’Éthique, en ajoutant simplement que vous devez acheter à la
e

librairie Hermann, au prix de libraire, les exemplaires de la première éd. qui subsisteraient à la
parution. Je vous prie de ne surtout pas ajouter d’autres articles, car au cas où je ne les validerais
pas, nous aurions à établir un nouveau contrat.
Mes suppléments pour l’Éthique sont plus importants que je ne le pensais : je crois qu’ils
suffiront AU MOINS pour compenser la différence entre le nouveau format et l’ancien. Si vous
commencez tout de suite, l’Éthique pourra paraître en août. Je me réserve le droit de vous faire
suivre la préface à la 2 éd. vers la fin de l’impression.
e

Je crains que vous n’ayez quand même écrit à M. Suchsland, contrairement à mon souhait,
car il ne m’a pas apporté la somme due, comme il me l’avait promis.
Je demeure avec ma haute considération

Francfort, votre
le 1 juin
er
serviteur dévoué
1860. Arthur Schopenhauer

494. AJOUT AU CONTRAT


DE LA TROISIÈME ÉDITION
DU MONDE COMME VOLONTÉ
ET REPRÉSENTATION 1

À ce jour, la librairie Brockhaus et le Dr. Arthur Schopenhauer ont convenu d’une nouvelle
édition des Problèmes fondamentaux de l’éthique de Schopenhauer et ils ont fait valoir les
mêmes conditions que celles qui sont écrites dans le contrat ci-avant de la troisième édition du
Monde comme volonté et représentation, et qui ont été acceptées par les parties contractantes.
Les exemplaires de l’ancienne édition de l’Éthique, qui subsisteraient encore à la parution
de la nouvelle édition, doivent être achetés à l’ancien libraire-éditeur par la librairie F. A.
Brockhaus à ses propres frais.

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


et Leipzig, le 6 juin 1860.
495. À DAVID ASHER 1

Cher Monsieur le Dr. Asher,

Je vous remercie pour vos communications , parmi lesquelles je connaissais seulement


2

l’article de la tante Voss, qu’on m’avait déjà envoyé. Les autres ne contiennent que des citations,
ils sont donc insignifiants : j’aurais cependant aimé que vous ajoutiez les numéros de page.
Je vous écris pour vous donner un conseil bien intentionné, à savoir que vous ne devriez pas
abandonner votre situation : celui qui en occupe une ne doit pas la laisser filer, en cette époque
3

débordée et pressée — il faut la tenir mordicus. Ce n’est pas parce qu’ils préféreraient avoir un
Anglais qu’ils ont le droit de vous congédier tel un domestique. De plus vous avez montré que
vous écriviez l’anglais aussi bien qu’un Anglais peut le faire. Je ne puis juger de votre
prononciation, puisque je n’ai pas parlé anglais avec vous : sinon j’aurais pu le faire, car en règle
générale, les Anglais me prennent pour un Anglais, au moins pendant le premier ¼ d’heure de la
conversation, souvent pendant plus longtemps encore.
Quant à la contrainte d’enseigner à 7 heures, il y a une solution très facile : avancez votre
montre d’1 heure. Probatum est . Mais vous devez abandonner the sweetest of your morning-
4

studies ! Memento : primum vivere, deinde philosophari .


5 6

Je ne saurais dire si vous pouvez trouver ICI un champ d’action adéquat, car je vis très retiré.
Un nouvel arrivant rencontre partout de grandes difficultés : surtout ici, où les emplois sont
exclusivement réservés aux citoyens de Francfort.
Eh oui ! CHACUN est frappé de temps en temps par de tels arguments ad hominem en faveur
de mon pessimisme — qui s’en tire donc pour le mieux.
Continuez surtout à me signaler ce que vous trouvez et dites-moi également, je l’espère, que
vous avez suivi mon conseil et que vous êtes solidement réinstallé sur la selle, ce qui réjouira

Francfort, le 16 juin 1860. most truly yours


Arthur Schopenhauer.

496. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Vous aurez reçu l’exemplaire retravaillé de l’Éthique qui vous a été expédié le 10 juin avec
une lettre.
J’ai encore repéré quelques petites choses à rattraper, ce qu’il vaut mieux faire avant la
correction. Premièrement : il serait très utile d’imprimer en haut des pages le titre des chapitres
correspondants, ou respectivement les §§, tels qu’ils sont reproduits au début, dans la table des
matières. J’ai pensé que cela pourrait se faire comme suit : sur la page de gauche, dans le premier
écrit mis au concours, partout LIBERTÉ DE LA VOLONTÉ et sur la page de droite le titre du chapitre
correspondant. Ensuite, dans le deuxième écrit mis au concours, à gauche FONDEMENT DE LA
MORALE, à droite le paragraphe correspondant. Cela fait un TRÈS BEL effet, tout en correspondant
aux 2 premiers tomes, c’est-à-dire à la 3 éd. du Monde comme volonté et représentation, où il y a
e

la même disposition.
Deuxièmement : à la p. 203 sont cités quelques vers de Pétrarque et la TRADUCTION est
ajoutée en bas ; dans CETTE DERNIÈRE il faut changer le premier vers ; il faut écrire :
« Il semble qu’on les jalouse plus que d’autres. » Je vous prie instamment de le corriger
TOUT DE SUITE.
La préface pour la première éd. occupe 35 pages ; celle pour la 2 en occupera tout au plus
e

3 : elle est très corsée.


Il va de soi qu’on doit m’envoyer CHAQUE feuille pour la correction, même si par hasard il
ne devait y avoir rien de nouveau, ce qui saurait être difficilement le cas. Je vous les expédierai
alors sur-le-champ.
En souhaitant fortement recevoir la première feuille de correction, je demeure avec ma
haute considération

Francfort, votre
le 22 juin serviteur dévoué
1860. Arthur Schopenhauer
497. À SALOMON FRIEDRICH STIEBEL 1

Très honoré Monsieur le conseiller secret


à la cour,

Depuis 2 mois je souffre de troubles respiratoires et de palpitations en marchant, je vous


prie donc de bien vouloir vous présenter chez moi lorsque vous serez de passage la prochaine
fois. Vous savez que j’habite maintenant dans la Maison Werthheimber n 16, parterre, droite,
o

porte en verre, sonner fort.


Sur ce je demeure

le 26 juin votre
1860. serviteur dévoué
Arthur Schopenhauer
498. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Je ne vous renvoie pas la copie de la première feuille, car cela me semble être superflu.
C’est que tout y est correct, et vous n’avez pas besoin de la table des matières : le titre de chaque
section (dans le 2 traité chaque §) est à mettre en haut de la page ; comme cela a déjà été fait. Il
e

est naturel que je m’en occupe, car je m’y prends con amore. Éthique en bas de la page de garde
est correct.
Je n’ai pas vu M. Suchsland depuis environ 3 mois. Il n’est plus au magasin ; celui-ci se
trouve maintenant au Diesterweg. Je suis très fâché contre lui, car il ne me paye pas ce qu’il me
doit. Il m’avait promis de m’apporter 100 f. après Pâques, et il n’est pas venu. Je ne saurais donc
avoir avec lui qu’une conversation fâcheuse. J’attends que sa dette, déjà plus grande, augmente
jusqu’à 300 f. —. Mais déjà lorsqu’il m’avait demandé avec insistance et pour la 2 fois de faire
e

une nouvelle édition de l’Éthique, je lui avais dit que je ne pouvais rien lui promettre parce que
vous aviez l’intention de faire une édition générale. C’est peut-être pour cette raison qu’il n’est
pas venu avec les 100 f. Il peut apprendre la décision finale aussi bien de vous que de moi : vous
pouvez donc lui écrire. Je vous ai écrit les modifications qu’il a effectuées de plein gré dans son
contrat ; par conséquent, vous n’aurez qu’à lui acheter le reste au prix de librairie : il a dit qu’il y
en avait 32. Je pense qu’il est dans votre intérêt qu’il apprenne votre intervention le plus tard
possible, car d’ici là il vendra bien le reste ; ce qui ne sera peut-être plus le cas lorsqu’il saura
que c’est à votre avantage ; mais d’ici là il bénéficie du prix de magasin.
J’espère qu’aujourd’hui arrivera la 4 feuille de correction, et je demeure avec la plus haute
e

considération

Francfort, votre
le 5 juillet, serviteur dévoué
1860. Arthur Schopenhauer

P. S. Ney est de retour à Berlin et elle fait mouler mon buste ; elle m’en a expédié un que
j’attends d’un instant à l’autre.
499. À JOHANN AUGUST BECKER 1

Très cher Monsieur et ami,

Durant tout l’été j’espérais vous revoir ici, et cette fois-ci avec l’intention égoïste de vous
lire la préface à la 2 éd. de mon Éthique, que je vous envoie maintenant ci-joint. Je vous prie de
e

la soumettre à votre censure de juriste et de me dire ensuite si je risque quelque chose,


concernant les gifles et les chiquenaudes bien méritées que j’y ai données à l’Académie danoise.
J’espère que vous me renverrez la préface après 4-5 jours, car Brockhaus imprime avec
empressement : l’édition paraîtra vraisemblablement vers la fin du mois d’août. Votre jugement
littéraire concernant la préface sera également bienvenu. Mais je me réjouirais tout
particulièrement d’entendre que vos yeux vont mieux, ou du moins que leur état n’a pas empiré.
C’est ce que souhaite de tout cœur
Francfort votre sincèrement dévoué
le 26 juillet 1860. Arthur Schopenhauer
500. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Veuillez recevoir ci-joint les deux préfaces. Vous avez imprimé avec beauté et rapidité ; ce
qui mérite des éloges. Il faut imprimer les préfaces comme celle de la 3 éd., c’est-à-dire avec les
e

mêmes caractères que le texte, en espaçant juste un peu plus les lignes.
Je vous prie de bien vouloir expédier mes 10 exemplaires d’auteur :
au Dr. Frauenstädt à Berlin.
" " Otto Lindner, rédaction de la Vossische Zeitung, à Berlin.
" C. G. Bähr, chez le professeur Bähr à Dresde.
" Dr. D. Asher à Leipzig.
et les 6 autres à moi-même, ici.
Vous aurez l’amabilité de me transmettre les honoraires sous forme de traite, selon le cours
actuel : pour les frais de port à la réception et à l’expédition 1 f. —. Nous verrons si le nombre de
feuilles équivaut à celui de la première éd. Vos feuilles ont terriblement absorbé : beaucoup plus
que je ne le pensais.
Et maintenant bonne chance ! Celui qui souhaite, plus que vous encore, une bonne vente
n’est autre que

Francfort votre serviteur dévoué


le 4 août 1860 Arthur Schopenhauer

P. S. J’ai reçu la 5 épreuve en double : je la joins.


e

501. À DAVID ASHER 1

Très cher Monsieur le Dr. Asher,

J’ai vu avec un profond regret que vous aviez perdu votre poste : comme je ne puis donner
de conseil à ce propos, je ne me suis pas dépêché de répondre. Le comité n’aurait-il pas trouvé
une meilleure solution de lui-même ? Beaucoup de gens se méprennent en se surestimant et en se
considérant comme irremplaçable.
Le diable voyageur qui sévit partout vous a donc également pris par la main pendant
quelque temps. Il ne peut rien contre moi. I like my rest : there’s no place like home . 2

Je vous renvoie ci-joint la lettre de Prutz (there’s something in names — Tr. Sh. ), avec mes 3

sincères remerciements, car elle m’a intéressé : j’aime bien regarder un peu derrière les coulisses.
Ce Prutz est un philistin de première — c’est ce que j’en ai tiré. Ces journalistes ne lisent rien,
mais ils feuillettent tout.
Ce que Prutz dit de moi dans le passage souligné est la même chose que ce que disait W ALD
en 1804 de Kant, dans son parentatio acad. : « Quant au système kantien, le monde
philosophique est partagé en deux partis, l’un constitué par des admirateurs enthousiastes, l’autre
par des adversaires déclarés voire acharnés du même système », Reicke, Kantiana , 1860, p. 22.
4

En Bohême se trouve un monsieur qui, selon ses propres dires, pose chaque jour une
nouvelle couronne sur mon portrait !!
L’ÉTHIQUE est terminée et paraîtra ce mois. Brockhaus est chargé de vous en envoyer un
exemplaire.
Le buste de Ney est enfin arrivé : prochainement, il fera parade dans la GRANDE exposition à
5

Berlin. De même à Vienne, également à Leipzig. Ney s’adresse elle-même à Brockhaus à ce


sujet. Si vous en avez l’occasion, je vous prie de jouer un petit air pour elle, mais en particulier
de me communiquer tout ce que vous trouvez on the subject of

Francfort, your old wellwisher 6

le 18 août 1860. Arthur Schopenhauer.

502. À F. A. BROCKHAUS 1

Monsieur,

Conformément à votre souhait, je vous renvoie ci-joint le titre. La proportion des caractères
est à présent correcte, et on peut en rester là, mais l’ensemble est condensé et étroit. La faute
n’incombe à personne d’autre qu’à ce griffon qui occupe en bas le rôle nécessaire, même s’il
n’est ni bon ni utile et que je vois qu’il a déjà gâché quelques titres. Pour ma part, au nom de
l’homogénéité avec la 3 éd., je voulais l’envoyer en vacances anticipées.
e

Je n’ai pas trouvé de coquilles dans tout le livre : voilà du travail ! Avant l’expédition, je
vais encore relire la dernière feuille ½ — si des visites de l’étranger ne m’en empêchent pas (par
ailleurs j’ai reçu dans les 3 derniers jours 2 messages à rendre orgueilleux un saint).
J’espère que vous fixerez le prix de vente assez bas, surtout pas plus élevé que celui de la
première édition ; cela ne pourra que favoriser la vente.
Comme je vous l’ai déjà demandé, vous ferez parvenir par une voie sûre un exemplaire
chacun au Dr. Frauenstädt, à Otto Lindner, Asher et C. G. Bähr à Dresde, et vous m’enverrez les
6 autres . Un exemplaire doit aller à l’Académie à Trondheim, où j’ai été couronné (comme l’a
2

été tout juste le roi de Suède ). Je pense le faire transmettre par Perthes, Besser & Mauk qui s’en
3

étaient déjà occupés jadis, puisque vous n’avez sans doute pas de contact direct avec Trondheim.
Par ailleurs, rien ne vous empêche de livrer un exemplaire gratuit en plus dans ce but officiel. En
tout cas je vous prie de compléter les épreuves, pour un ami modeste à moi . En revanche, si je
4

voulais envoyer des exemplaires à tous mes ENNEMIS, l’éd. serait bientôt épuisée.
Le buste est arrivé, il sera exposé à Berlin et à Vienne. Ney a l’intention de s’adresser
directement à vous, et je vous prie donc de bien vouloir consacrer quelques coups de trompette à
la chose. Si seulement vous voyiez Ney, vous vous sacrifieriez pour elle : elle est incomparable !
J’ai négligé une petite chose : au-dessus de l’ ANCIENNE préface on doit écrire « PRÉFACE À LA
PREMIÈRE ÉDITION » ; ce que je n’ai pas ajouté ; j’espère que vous l’aurez fait de votre propre
initiative : sinon, ce n’est pas non plus un malheur.
Et sur ce je me recommande à vous avec ma haute considération

Francfort votre
le 20 août serviteur dévoué
1860. Arthur Schopenhauer

P. S. lecture terminée : pas trouvé de fautes.


503. À SIKIČ ET SCHRAMEK 1

Le fait qu’à votre jeune âge, vous vous occupiez si sérieusement de mes doctrines, dans une
situation très étrangère à toute philosophie, et de surcroît dans une lointaine province
autrichienne, m’a étonné et fortement réjoui, et m’a donné de plus une opinion favorable de
vous. C’est pourquoi je ne manque pas de vous répondre.
Votre problème se laisse facilement réduire à une conclusion qui est formellement juste et
dont les prémisses sont vraies, alors que la conclusion constitue un énoncé visiblement faux.
Cela provient du fait qu’il se produit une amphibologie des concepts, la volonté étant d’abord
comprise comme phénomène individuel, pour être saisie ensuite en sa qualité de chose en soi. Or
sous ce dernier rapport, l’objet devient transcendant, c’est-à-dire qu’il dépasse toutes les
possibilités de notre compréhension, car au-delà de l’expérience possible, les formes de notre
intellect, de l’espace, du temps, de la causalité ne s’appliquent plus. Mais votre argumentation
conserve ces formes, en appliquant les prédicats tout et partie, unité et nombre, cause et effet à la
volonté comme chose en soi. Vous la saisissez par ex. par l’intermédiaire de notre forme de
l’intuition qu’est l’espace, et vous parlez de lui de façon quantitative en disant : « Comme la
volonté est présente TOUT ENTIÈRE dans chaque individu, la suppression de la volonté dans
l’individu implique la suppression du monde dans sa totalité. » Mais si vous concevez ainsi la
chose de façon purement quantitative, vous auriez dû, en conséquence, commencer plus haut et
dire : « Jamais la volonté totale et indivisible ne peut se trouver TOUT ENTIÈRE dans chacun des
innombrables individus. » Votre argumentation vise en fait également la CAUSALITÉ que la
volonté supprimée exerce sur le monde phénoménal. Elle considère de même le TEMPS en disant :
« APRÈS que s’est produit une négation de la volonté, etc. » Toute cette amphibologie provient du
fait que votre argumentation s’est installée à la limite de ce qui est accessible à notre
connaissance et de ce qui lui est inaccessible, le transcendant, et qu’ainsi elle jette les concepts
d’un côté à l’autre de cette limite.
Pour ma part, je me suis toujours gardé de toute transcendance et je n’ai jamais parlé que de
ce qui se laisse vérifier dans l’expérience : c’est ainsi que j’ai montré la volonté dans son
affirmation, avec le phénomène, ce monde, qui en dépend en tant que conséquence ; ensuite le
phénomène éthique de sa négation ; mais ici, je ne puis tirer que des conséquences négatives, qui
donc sont pour nous : néant. Maintenant, la question de savoir si les individus qui affirment la
volonté, et l’individu qui à titre exceptionnel la nie, se présentent dans le temps l’un AVANT ou
APRÈS l’autre, ne fait aucune différence, aussi peu que le fait qu’ils doivent se montrer dans
l’espace l’un À CÔTÉ de l’autre. Tout cela ne se produit que dans le phénomène et en vertu de ses
formes. Quant à la volonté individuelle comprise dans la négation, j’en ai énoncé la conséquence
négative dans le tome 1, p. 452, 3 éd., 2 éd. p. 432 , et j’ai touché par là l’extrême limite que
e e 2

notre capacité de comprendre puisse atteindre.


Tout ce qui a été dit ici vous éclairera plus encore à mesure que vous avancerez dans votre
connaissance de la Critique de la raison pure. Concernant la limite infranchissable de toute notre
connaissance métaphysique, je vous recommande de lire attentivement les 3 premières pages du
dernier chapitre du tome 2 de mon ouvrage principal. Pour éclairer votre problème, il faut
également prendre en compte tome 2, p. 698, 3 éd., 2 éd. p. 607 , « L’individualité », etc.
e e 3

Cela vous intéressera peut-être de savoir que la 2 édition augmentée de mon Éthique paraît
e

ces jours-ci chez Brockhaus, et aussi que mon buste, réalisé par la sculptrice Ney de Berlin
(petite-nièce du maréchal), et jugé très ressemblant par tout le monde, à l’unisson, a maintenant
été reproduit grâce à des moulages ; il sera également visible à l’exposition à Vienne.
Je vous souhaite de tout cœur chance et bonheur pour votre carrière militaire, et que l’esprit
philosophique puisse vous accompagner durant toute votre vie.

Francfort s. M. Arthur Schopenhauer


le 1 sept.
er

1860.
APPENDICES
Abréviations et bibliographie
I. SCHOPENHAUER

Q = Über die vierfache Wurzel des Satzes vom zureichenden Grunde. Eine philosophische Abhandlung, Hof-, Buch- und
Kunsthandlung, Rudolstadt, 1813. Über die vierfache Wurzel des Satzes vom zureichenden Grunde. Eine philosophische
Abhandlung. Zweite, sehr verbesserte und beträchtlich vermehrte Auflage, J. C. Hermann’sche Buchhandlung, F. E. Suchsland,
Frankfurt/Main, 1847.
De la quadruple racine du principe de raison suffisante. Dissertation philosophique suivie d’une esquisse d’une histoire de
la doctrine de l’Idéal et du Réel [extrait de Parerga I], trad. J.-A. Cantacuzène, Paris, Germer Baillière, 1882.
De la quadruple racine du principe de raison suffisante, trad. J. Gibelin, Paris, Vrin, 1941, 41983.
De la quadruple racine du principe de raison suffisante. Édition complète (1813-1847), trad. et notes F.-X. Chenet,
introduction et commentaires F.-X. Chenet et M. Piclin, Paris, Vrin, 1991.
C = Über das Sehn und die Farben, eine Abhandlung, J. F. Hartknoch, Leipzig, 1816, 21854 ; trad. latine par l’auteur sous
le titre Commentatio undecima exponens Theoriam Colorum Physiologicam eandemque primariam, in Scriptores ophtalmologici
minores, vol. tertium, edidit J. Radius, Voss, Leipzig, 1830.
Textes sur la vue et les couleurs, trad. M. Élie, Paris, Vrin, 1986.
M I, II = Die Welt als Wille und Vorstellung : vier Bücher nebst einem Anhange, der die Kritik der Kantischen Philosophie
enthält, Leipzig, Brockhaus, 1818 [daté 1819] ; Die Welt als Wille und Vorstellung. Zweite, durchgängig verbesserte und sehr
vermehrte Auflage. Erster Band. Vier Bücher nebst einem Anhange, der die Kritik der Kantischen Philosophie enthält. Zweiter
Band, welcher die Ergänzungen zu den vier Büchern des ersten Bandes enthält, Leipzig, Brockhaus, 1844 ; Die Welt als Wille
und Vorstellung. Dritte, verbesserte und beträchtlich vermehrte Auflage. Erster Band. Vier Bücher nebst einem Anhange, der die
Kritik der Kantischen Philosophie enthält. Zweiter Band, welcher die Ergänzungen zu den vier Büchern des ersten Bandes
enthält, Brockhaus, Leipzig, 1859.
Le Monde comme volonté et comme représentation, trad. J.-A. Cantacuzène, vol. I, II, Leipzig, F. A. Brockhaus (Paris,
Didier ; Bucarest, Sotchek, 1886).
Le Monde comme volonté et comme représentation, trad. A. Burdeau, vol. I-III, Paris, Alcan, 1888-1890 (8 e éd. Paris, PUF,
1943) ; trad. A. Burdeau revue et corrigée par R. Roos, Paris, PUF, 1966 (141996), coll. Quadrige, 2004.
Le Monde comme volonté et représentation, édition génétique annotée, trad. C. Sommer, V. Stanek, M. Dautrey, t. I et II,
Gallimard, coll. Folio essais, 2009.
N = Über den Willen in der Natur. Eine Erörterung der Bestätigungen, welche die Philosophie des Verfassers, seit ihrem
Auftreten, durch die empirischen Wissenschaften erhalten hat, Frankfurt/Main, S. Schmerber, 1836. Über den Willen in der
Natur. Zweite verbesserte und vermehrte Auflage, J. C. Hermann’sche Buchhandlung, F. E. Suchsland, Frankfurt/Main, 1854.
De la volonté dans la nature, trad. et notes E. Sans, Paris, PUF, 1969 (rééd. Paris, PUF, coll. Quadrige, 1986, 2e éd. 1996).

E = Die beiden Grundprobleme der Ethik, behandelt in zwei akademischen Preisschriften. I. Ueber die Freiheit des
menschlichen Willens, gekrönt von der Königl. Norwegischen Societät der Wissenschaften, zu Drontheim, am 26. Januar 1839.
II. Ueber die Grundlage der Moral [Ueber das Fundament der Moral], nicht gekrönt von der Königl. Dänischen Societät der
Wissenschaften, zu Kopenhagen, den 30. Januar 1840, J. C. Hermann’sche Buchhandlung, F. E. Suchsland, Frankfurt/Main,
1841 ; Die beiden Grundprobleme der Ethik : Preisschrift über die Freiheit des menschlichen Willens/Preisschrift über die
Grundlage der Moral, zweite, verbesserte und vermehrte Auflage, F. A. Brockhaus, Leipzig, 1860. Le premier mémoire a été
d’abord publié dans les Annales de la Société royale des Sciences de Norvège sous le titre Kan Menneskets frie Villie bevises af
dets Selvbevidsthed ? En med det Kongelige Norske Videnskabers-Sellskabs større Guldmedaille belønnet Priis-Afhandling (Det
kgl. Norske Vidskselsk Skr. i det 19de Aarh. 3. B. 2. H).
Essai sur le libre arbitre [premier mémoire], trad. et introduction S. Reinach, Paris, Germer Baillière, 1877 (anonyme) ;
Alcan, 31888 ; Alcan, 131925 ; rééd. avec une présentation de G. Samana, Plan de la Tour, Éd. d’aujourd’hui, coll. Les
Introuvables, 1977 ; rééd. avec une préface de D. Raymond, Paris, Rivages, 1992 ; La Base fondamentale de la morale
[adaptation/résumé du second mémoire], trad. A. Weill, in Revue française, t. XI, no 104, 10 décembre 1857, p. 527-558 ; Le
Fondement de la morale, trad. A. Burdeau, Paris, Germer Baillière, 1879 ; Alcan, 21888 ; Alcan, 111925 ; rééd. avec une
introduction d’A. Roger, Paris, Aubier-Montaigne, 1978 ; rééd. LGF, Le Livre de Poche, 1991 ; Le Fondement de la morale, trad.
M.-R. Bastian, Paris, Flammarion, 1932 ou 1937.
Les Deux Problèmes fondamentaux de l’éthique. La liberté de la volonté. Le fondement de la morale , édition génétique et
traduction C. Sommer, Paris, Gallimard, coll. Folio essais, 2009.
P I, II = Parerga und Paralipomena. Kleine philosophische Schriften, Band I, II, Berlin, A. W. Hayn, 1851.
Du style et des écrivains [Parerga II, chap. XXIII], trad. anonyme (notice introductive signée « C. D. »), in Revue
germanique, janvier 1859 ; Esquisse d’une histoire de la doctrine de l’Idéal et du Réel [Parerga I], in De la quadruple racine du
principe de raison suffisante, trad. J.-A. Cantacuzène, Paris, Germer Baillière, 1882 ; Le Destin de l’individu et Essai sur les
apparitions des esprits et ce qui s’y rattache [Parerga I], in Mémoires sur les sciences occultes. Magnétisme animal et magie, le
destin de l’individu, essai sur les apparitions des esprits et ce qui s’y rattache, trad. et préface G. Platon, Paris, P. Leymarie, 1912
; Parerga et Paralipomena. Aphorismes sur la sagesse dans la vie, trad. J.-A. Cantacuzène, Paris, Germer Baillière, 1880 ; Alcan,
5
1892 ; PUF, 141943 ; PUF, 151969, revue et corrigée par R. Roos, rééd. PUF, coll. Quadrige, 1983 ; Spéculation transcendante sur
l’intentionnalité apparente dans le destin de l’individu [Parerga I] et De l’éthique [Parerga II, chap. VIII], in Le Sens du destin,
trad. M.-J. Pernin, Paris, Vrin, 1988 ; Parerga et Paralipomena [traduction incomplète], trad. A. Dietrich, 8 vol., Paris, Alcan :
Écrivains et style (1905), Sur la religion (1906), Philosophie et philosophes (1907 [rééd. Rivages, 1994 ; rééd. sous le titre « Ils
corrompent nos têtes » (sic), Strasbourg, Circé, 1991]), Éthique, droit et politique (1909 [rééd. sous le titre Éthique et politique
avec une introduction d’A. Kremer-Marietti, Paris, LGF, Le Livre de Poche, 1996]), Métaphysique et esthétique (1909),
Philosophie et science de la nature (1911), Essai sur les apparitions et opuscules divers (1912 [rééd. avec Magnétisme animal et
magie, trad. G. Platon, sous le titre Essai sur les fantômes, avec une préface de D. Raymond, Paris, Critérion, 1992]), Fragments
sur l’histoire de la philosophie (1912) ; La Philosophie universitaire (1912) [Au-delà de la philosophie universitaire, trad. A.
Dietrich, révisée par Y. Constantinidès, Paris, Mille et une nuits, 2006] ; Parerga II, chap. X-XIV, trad. J. Bourdeau et A. Dietrich,
in Le Néant de l’existence, Nantes, Le Passeur, 1991 ; repris in Du néant de la vie, Mille et une nuits, 2005 ; Sur la théorie des
couleurs [Parerga II, chap. VII], in Textes sur la vue et les couleurs, trad. M. Élie, Paris, Vrin, 1986 ; Les Femmes [Parerga II,
chap. XXVII], in Pensées [maximes] et fragments, trad. J. Bourdeau, Paris, Germer Baillière, 1880 ; Paris, Alcan, 271922 ; rééd.
Genève, Slatkine Reprints, 1979 ; rééd sous le titre Douleurs du monde, Paris, Rivages, 1991, rééd. sous le titre Essai sur les
femmes, avec une préface de D. Raymond, Arles, Actes Sud, 1987 ; Sur la religion [Parerga II, chap. XV], trad., présentation et
notes E. Osier, Paris, Garnier-Flammarion, 1996.
Parerga et Paralipomena. Petits écrits philosophiques, trad. du français par J.-P. Jackson, Paris, Coda, 2006.
Reisetagebücher 1803/1804 = Arthur Schopenhauer, Reisetagebücher aus den Jahren 1803-1804, édité par Charlotte von
Gwinner, Leipzig, 1923.
Journal de voyage, trad. D. Raymond, Paris, Mercure de France, 1989.
HN I-V = Arthur Schopenhauer, Der handschriftliche Nachlass, éd. Arthur Hübscher, t. I-V, Frankfurt/M., W. Kramer,
1966-1975, reprint Munich, DTV, 1985.
D (avec chiffre romain) = Arthur Schopenhauers sämtliche Werke, éd. Paul Deussen, dont D XIV = Der Briefwechsel
Arthur Schopenhauers, premier tome (1799-1849), édité par Carl Gebhardt, Munich, 1929 ; deuxième tome (1849-1860), édité
par Arthur Hübscher, Munich 1933 ; troisième tome édité par Arthur Hübscher, Munich 1942.
Éditions complètes

Arthur Schopenhauers sämtliche Werke, éd. J. Frauenstädt, t. I-VI, Leipzig, Brockhaus, 1873-1874, 21877.
Arthur Schopenhauers sämtliche Werke, éd. E. Grisebach, t. I-VI, Leipzig, Reclam, 1891, 31921-1924.
Arthur Schopenhauers sämtliche Werke, éd. P. Deussen, t. I-VI ; IX-XI (Vorlesungen in Bd. IX et X, éd. Mockrauer) ;
XIII-XVI, Munich, Piper, 1911-1942 ; version électronique Schopenhauer im Kontext, K. Worm, Berlin, InfoSoftWare, 2001,
2008.
Arthur Schopenhauer. Sämtliche Werke. Nach der ersten, von J. Frauenstädt besorgten Gesamtausgabe, neu bearbeitet
und hrsg. von A. Hübscher, t. I-VII, Leipzig ou Wiesbaden, Brockhaus, 1937-1941, 1946-1950, 1972 ; texte repris dans Arthur
Schopenhauer. Werke, t. I-X, Diogenes, Zurich, 1977, 21978 (éd. poche).
Arthur Schopenhauer. Sämtliche Werke. Textkritisch bearbeitet und herausgegeben von W. v. Löhneysen, t. I-V, Stuttgart
— Frankfurt/M., Cotta / Insel, 1960-1965, Frankfurt/M., Suhrkamp, 1986.
Arthur Schopenhauers Werke in fünf Bänden. Nach den Ausgaben letzter Hand herausgegeben von L. Lütkehaus , t. I-V,
Zurich, Haffmans, 1988, 1991 (éd. poche) ; Frankfurt/M., Zweitausendeins, 2006.
II. AUTRES

Asher = Dr. David Asher, Arthur Schopenhauer. Neues von ihm und über ihn, Berlin, 1871.
Bähr = Gespräche und Briefwechsel mit Arthur Schopenhauer. Aus dem Nachlass von Karl Bähr, éd. par Ludwig
Schemann, Leipzig, 1894.
Becker = Briefwechsel zwischen Arthur Schopenhauer und Johann August Becker, éd. par J. K. Becker, Leipzig, 1883.
Bildnisse = Arthur Hübscher, Schopenhauer-Bildnisse. Eine Ikonographie, Frankfurt/M., 1968.
Fr. A. Brockhaus = Friedrich Arnold Brockhaus. Sein Leben und Wirken nach Briefen und anderen Aufzeichnungen,
geschildert von seinem Enkel Heinrich Eduard Brockhaus, t. 2, Leipzig, 1876.
Firma Brockhaus = Die Firma F. A. Brockhaus 1805-1905, Leipzig, 1905.
Düntzer = Heinrich Düntzer, Abhandlungen zu Goethe’s Leben und Werken, Leipzig, 1883, t. 1 (p. 115-211 : relations de
Goethe avec Johanna Schopenhauer et ses enfants).
Gebhardt = Schopenhauer und Brockhaus. Zur Zeitgeschichte der ‘Welt als Wille und Vorstellung’. Ein Briefwechsel, éd.
par Carl Gebhardt, Leipzig, 1926.
Geiger, Goethe-Jahrbuch IX = Briefe Arthur Schopenhauers [à Goethe], éd. par Ludwig Geiger, Goethe-Jahrbuch t. IX,
Frankfurt/M., 1888.
Gespräche = Arthur Schopenhauer : Gespräche, nouvelle édition fortement augmentée, éd. par Arthur Hübscher, Stuttgart-
Bad Cannstatt, 1971 (compilation de 130 entretiens). On peut trouver la traduction de quelques entretiens dans A. Bossert,
Schopenhauer et ses disciples d’après ses conversations et sa correspondance, Paris, Hachette, 1920 ; cette traduction a fait
l’objet d’une réimpression partielle, sans appareil critique, intitulée Entretiens, édition établie et présentée par D. Raymond,
Paris, Critérion, 1992.
Goethes Briefe = Goethes Werke, édition de Weimar, section IV : Goethes Briefe, t. 24 (1901), t. 26 (1902), t. 27 (1903) et
t. 29 (1904).
Grisebach, Edita und Inedita = Edita und Inedita Schopenhaueriana, éd. par Eduard Grisebach, Leipzig, 1888.
Grisebach, Werke = Arthur Schopenhauer’s sämtliche Werke in sechs Bänden, éd. par Eduard Grisebach, Leipzig, 1891 ; 2e
éd. améliorée, Leipzig (1892-1896).
Grisebach, Nachlass = Arthur Schopenhauer’s handschriftlicher Nachlass, 4 tomes, éd. par Eduard Grisebach, Leipzig,
1895-1901.
Grisebach, Briefe = Schopenhauer’s Briefe an Becker, von Doss, Lindner und Asher ; sowie andre bisher nicht
gesammelte Briefe aus den Jahren 1813-1860, éd. par Eduard Grisebach, Leipzig, 1895 ; 2e éd. améliorée, Leipzig, 1904 ; 3e éd.
améliorée, Leipzig, 1908.
Grisebach, Schopenhauer = Eduard Grisebach, Schopenhauer. Geschichte seines Lebens, Berlin, 1897.
Grisebach, Neue Beiträge = Eduard Grisebach, Schopenhauer. Neue Beiträge zur Geschichte seines Lebens, Berlin, 1905.
Gruber 1913 = Der Briefwechsel zwischen Arthur Schopenhauer und Otto Lindner, éd. par Robert Gruber, Vienne, 1913.
Gruber, Jahrb. no 3 (1914) = Robert Gruber, Schopenhauers Briefwechsel mit Dorguth, Jahrbuch der Schopenhauer-
Gesellschaft no 3 (1914), p. 116-120.
Gwinner, 2e édition = Wilhelm Gwinner, Schopenhauer’s Leben, 2e éd. transformée et augmentée, Leipzig, 1878.
Hassbargen 1928 = Dreizehn bisher unbekannte Briefe Schopenhauers, éd. par Hermann Hassbargen, Jahrbuch der
Schopenhauer-Gesellschaft no 15 (1928), p. 211-239.
Hassbargen 1931 = Alte Briefe — neue Dokumente, éd. par Hermann Hassbargen, Jahrbuch der Schopenhauer-
Gesellschaft no 18 (1931), p. 322-348.
Houben = H. H. Houben, Damals in Weimar. Erinnerungen und Briefe von und an Johanna Schopenhauer, Leipzig, 1924,
2e éd. augmentée, Berlin, 1930.
Houben 1913 = « Neue Schopenhauer-Briefe. Mitgeteilt von H. H. Houben », in Der Panther, première année, Leipzig,
1913, p. 472-485 et 510-518.
Houben 1929 = H. H. Houben : « Neue Mitteilungen über Adele und Arthur Schopenhauer », Jahrbuch der Schopenhauer-
Gesellschaft no 16 (1929), p. 79-182.
Hübscher, Süddeutsche Monatshefte, avril 1930 = Arthur Hübscher, « Der Briefwechsel Arthur Schopenhauers »,
Süddeutsche Monatshefte, avril 1930, « Unbekanntes von Arthur Schopenhauer », p. 457-467.
Hübscher, Süddeutsche Monatshefte, sept. 1931 = Arthur Hübscher, « Unbekanntes von Arthur Schopenhauer »,
Süddeutsche Monatshefte, septembre 1931, p. 875-894.
Hübscher, Jahrb. no 21 (1934) = Der Briefwechsel J. A. Becker — A. v. Doss, éd. par Arthur Hübscher, Jahrbuch der
Schopenhauer-Gesellschaft no 21 (1934), p. 152-192.
Hübscher, Jahrb. no 52 (1971) ; Jahrb. no 54 (1973) ; Jahrb. no 56 (1975) ; Jahrb. no 57 (1976) = Arthur Hübscher, «
Unbekannte Briefe von Johanna Schopenhauer an ihren Sohn », I-IV.
Hübscher, « Adele an Arthur Schopenhauer. Unbekannte Briefe I », Jahrb. no 58 (1977), p. 133-186.
Jahrb. (suivi d’un numéro et de l’année) = Jahrbuch der Schopenhauer-Gesellschaft, à partir du tome n o 22 :
Schopenhauer-Jahrbuch, édité par la Schopenhauer-Gesellschaft, Frankfurt/M.
Lindner/Frauenstädt = Arthur Schopenhauer. Von ihm. Ueber ihn. Ein Wort der Vertheidigung von Ernst Otto Lindner
und Memorabilien, Briefe und Nachlassstücke von Julius Frauenstädt, Berlin, 1863.
Reicke (1889) = « Drei Briefe Schopenhauers an Karl Rosenkranz betreffend die Gesamtausgabe von Kants Werken.
Mitgetheilt von Rudolf Reicke », in Altpreussische Monatsschrift, t. 26, 1889, p. 310-331.
Schemann = Schopenhauer-Briefe. Sammlung meist ungedruckter oder schwer zugänglicher Briefe von, an und über
Schopenhauer. Mit Anmerkungen und biographischen Analekten, éd. par Ludwig Schemann, Leipzig, 1893.
Vogel von Frommannshausen = Hermann Vogel von Frommannshausen, « Arthur Schopenhauer und C. F. E. Frommann.
Mit sechs unbekannten Briefen Schopenhauers. Von Hermann Vogel von Frommannshausen », in Süddeutsche Monatshefte,
avril 1935, p. 449-457.
Notes
Sigles
M = manuscrit (lettre originale)
C = ébauche ou copie
IM1 = première impression d’après M
IC1 = première impression d’après C
Fr. = fragment
Lettre 231
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 146-147.
2. Brockhaus refusa également cette proposition, qui d’après lui était vouée à l’échec (lettre du 11 juillet 1850, D XV, no
371).
Lettre 232
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 148-149.
2. Friedrich Emil Suchsland, propriétaire de la librairie J. C. Hermann à Francfort, éditeur de la première édition des Deux
Problèmes fondamentaux de l’éthique (1841), de la deuxième édition de la Quadruple Racine du principe de raison suffisante
(1847) et plus tard de la deuxième édition de la Volonté dans la nature. Après les guerres de 1864 et 1866, il sera obligé de
liquider son entreprise.
3. Référence au recueil du philosophe populaire Johann Jakob Engel, Der Philosoph für die Welt, 1775-1780.
4. Brockhaus déclina également cette offre dans sa lettre du 5 septembre 1850 (D XV, no 373).
Lettre 233
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Grisebach, Edita und Inedita, p. 198-201.
Cette offre n’eut pas plus de succès que celle adressée à Brockhaus.
Lettre 234
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 496-499.
2. Cf. note pour la lettre no 224.
3. Mais en vain.
4. La critique du livre d’Ørsted, Ueber den Geist in der Natur (« Sur l’Esprit dans la nature »), trad. all. L. Kannegiesser
(1850), a paru dans l’Allgemeine Monatsschrift für Litteratur, publiée par le Dr. L. Ross et le Dr. G. Schwetschke, 1850. Hans
Christian Ørsted (14 août 1777 - 9 mars 1851), à l’origine de la découverte de l’électromagnétisme, disciple de Schelling et
défenseur de la théorie de l’unité des forces naturelles. Ørsted, en tant que secrétaire de la Société danoise des Sciences, a eu une
certaine influence sur le concours de Copenhague. Professeur (1806), professeur en titre (1817) à l’Université de Copenhague (cf.
Jahrb. no 22 [1935], p. 283-284).
5. Ces visites ont eu lieu au mois de mai 1850. Cf. Gespräche, p. 151-155.
6. Ignaz Perner (1796-1867), avocat jusqu’en 1832, a fondé les premières associations contre la torture des animaux : 1839
à Dresde et à Nuremberg, 1841 à Berlin, Francfort et Hambourg, 1842 à Munich. Perner remercia Schopenhauer pour son cadeau
le 9 juin 1850 (Archives Schopenhauer). Il raconta en détail ses projets et pria Schopenhauer de participer à la propagation des
rapports annuels de l’association munichoise. Schopenhauer semble avoir satisfait à cette demande. Dans le rapport annuel de
1850 et 1851 (p. 27), parmi les nombreuses personnalités qui s’étaient engagées pour la propagation de ces écrits, apparaissait
également « le célèbre écrivain Dr. Arthur Schopenhauer à Francfort, auteur de l’ouvrage Les Deux Problèmes fondamentaux de
l’éthique ». Schopenhauer n’a pas répondu à la lettre de Perner. C’est seulement en avril 1852, lorsque Adam von Doss fut chargé
par Perner de demander si Schopenhauer avait bien reçu l’envoi (D XV, p. 113), qu’il ajouta à sa lettre de réponse du 10 mai
1852 quelques mots sur le prince von Altenburg, « notre digne président » : on peut donc en conclure (sans pouvoir le vérifier,
car toutes les listes des membres de cette période ont disparu) que Schopenhauer était membre de l’association à Francfort.
7. Marianne Godeffroy (1806-1871), fille du sénateur hambourgeois Martin Jenisch, marié depuis 1823 avec le résident
ministériel hanséatique Charles (Karl) Godeffroy (décédé le 27 août 1848). Cf. Kurt Schmack, J. C. Godeffroy und Sohn,
Hambourg, 1938, p. 118 sq. En 1842, Godeffroy avait acquis le domaine Lemkulen, dans la région de Plön, domaine qui était le
but du voyage effectué par Frauenstädt à titre d’enseignant privé des fils de Godeffroy (il occupa ce poste de 1848-1851, cf. note
8 de la lettre no 215).
8. La main loin du tableau ! (référence à Pline, Nat. hist., XXXV, 36, 10, où Apelle reproche au peintre Protogène,
excessivement méticuleux, qu’il ne sait pas manum de tabula tollere, c’est-à-dire considérer une œuvre comme achevée).
9. Heinrich Moritz Chalybäus (1796-1862), professeur de théologie à Kiel, auteur de Historische Entwicklung der
speculativen Philosophie von Kant bis Hegel (« Évolution historique de la philosophie spéculative de Kant à Hegel »), Dresde,
1837, 5e éd., 1860, et de System der spekulativen Ethik (« System de l’éthique spéculative »), 2 tomes, Leipzig, 1850.
10. Lola Montès (1820-1861), danseuse, amante de Louis Ier de Bavière.
11. Théophraste (372-287 av. J.-C.), disciple et propagateur de la philosophie aristotélicienne, et Métrodore (vers 330 av.
J.-C.), promulgateur de la philosophie épicurienne.
12. La deuxième édition du Monde et celle de la Quadruple Racine.
13. Frauenstädt raconte que, lors de son séjour (hiver 1846-1847), il se promena régulièrement avec Schopenhauer, dans
l’après-midi : « nous sortions rapidement de la ville, et nous marchions entre 1 heure ½ et 2 heures, peu importe le temps qu’il
faisait, une fois même avec un vent très violent et des tourbillons de neige » (Gespräche, p. 94 ; cf. également la brève allusion à
ces promenades dans les Entretiens, p. 103-104).
Lettre 235
1. IM1 Lindner / Frauenstädt.
2. Et méritant au plus haut point de nous et de notre philosophie.
3. C’est en vain que Frauenstädt avait proposé d’éditer les Parerga à plusieurs librairies berlinoises qui avaient une
imprimerie. Il avait finalement réussi à convaincre la librairie A. W. Hayn. Sur Adolf Wilhelm Hayn (1801-1866) et ses éditions,
cf. Theodor Fontane, Christian Friedrich Scherenberg und das literarische Berlin von 1840 bis 1860, Hanser, III, tome 1, p. 621,
676 sq., 690 sq.
4. Certainement et plus que certainement.
5. Cf. le contrat (lettre no 237).
6. Frauenstädt projetait une critique de la philosophie de Herbart et avait prié Schopenhauer de lui faire part de son
jugement sur Herbart.
7. Moritz Wilhelm Drobisch (16 août 1802 - 30 septembre 1896), professeur de mathématiques, en 1842 également
professeur de philosophie à l’Université de Leipzig, connu pour ses recherches mathématico-physiques, en particulier dans
l’acoustique, avec Hartenstein (cf. note 3 de la lettre n o 194) premier représentant de l’école de Herbart. Auteur de Neue
Darstellung der Logik (« Nouvelle présentation de la logique »), 1836, 5 e éd. 1887, et Empirische Psychologie (« Psychologie
empirique »), 1842, 2e éd. 1898.
8. La première erreur.
9. In-folio, p. 220 sq. (HN III, 297 et HN V, no [236]).
10. Schopenhauer reprend ici librement les remarques notées dans son cahier manuscrit Foliant, p. 220-221 (HN III, p.
297) et dans son exemplaire de Herbart, Hauptpuncte der Metaphysik (HN V, [236], p. 68).
11. Avec des moyens licites et illicites.
12. M, II, chap. 26.
13. Bernhard von Langenbeck (8 novembre 1810 - 29 septembre 1887), chirurgien et opérateur génial, professeur à Berlin
(1847-1882). Frauenstädt l’avait consulté pour ses douleurs oculaires. Langenbeck n’était pas le fils, mais le neveu de Conrad
Johann Martin Langenbeck (1776-1851), anatomiste et chirurgien à l’Université de Göttingen, qui curieusement n’est pas cité
dans le curriculum vitae de Schopenhauer, alors que ce dernier le présente explicitement comme son professeur (cf. également la
lettre du 12 octobre 1852, lettre no 284).
Lettre 236
1. IM1 Lindner / Frauenstädt.
2. Frauenstädt avait écrit à Schopenhauer qu’il ne s’était pas senti obligé, dans sa recension de Geist in der Natur d’Ørsted,
d’exposer explicitement la doctrine schopenhauérienne de l’intellect, puisqu’il s’était donné pour tâche négative de réfuter les
erreurs d’Ørsted.
3. Assez et plus qu’assez.
4. Les Göttingische Gelehrten Anzeigen (cf. également lettre no 237).
5. August Wilhelm Bohtz (1799-1880), théoricien de l’art, en contact avec Tieck à Dresde (1826-1828), privat-docent à
Göttingen (1828), professeur (1837), professeur en titre (1842). Ses cours portaient sur la littérature allemande, l’esthétique, la
philosophie de la religion et l’éthique.
6. Hermann Rudolf Lotze (21 mai 1817 - 1 er juillet 1881), médecin généraliste à Zittau puis chargé de cours en médecine et
philosophie à Leipzig, professeur de philosophie à Göttingen (1844) et à Berlin (1880). Auteur de Mikrokosmos. Ideen zur
Naturgeschichte und Geschichte der Menschheit (« Microcosme. Idées sur l’histoire naturelle et l’histoire de l’humanité »), tome
1-3, 1856-1864 ; Geschichte der Ästhetik in Deutschland (« Histoire de l’esthétique en Allemagne »), 1868 ; System der
Philosophie : I. Logik. II. Metaphysik, 1874 et 1879. Cf. E. V. Hartmann, Lotzes Philosophie, 1888 ; R. Falckenberg, Lotze,
1901 ; Max Wentscher, Fechner und Lotze, 1925 ; H. Johannsen, Hermann Lotze, 1927 ; H. J. Krupp, Die Gestalt des Menschen
bei Lotze (« La figure de l’homme chez Lotze »), 1971.
7. Theodor Waitz (1821-1864), philosophe et anthropologue, professeur à Marbourg à partir de 1848. En partant de
Herbart, il considérait la psychologie comme fondatrice de la philosophie. Auteur d’Anthropologie der Naturvölker («
Anthropologie des peuples naturels »), tome 1-6, 1859-1871. L’« important ouvrage » est le Lehrbuch der Psychologie als
Naturwissenschaft (« Manuel de la psychologie comme science naturelle »), Braunschweig, 1849.
8. Atma (même nom que son prédécesseur blanc), Butz pour les profanes, né en 1849, survécut à son maître qui légua une
petite somme pour son entretien.
Lettre 237
1. IM1 D XVI, p. 167-168.
Lettre 238
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 504-507.
2. « Zur Psychologie », in Blätter für literarische Unterhaltung, 1850, no 242.
3. Ph. C. Hartmann, Der Geist des Menschen in seinen Verhältnissen zum physischen Leben, oder Grundzüge zu einer
Physiologie des Denkens (« L’esprit de l’homme dans ses rapports à la vie physique, ou éléments fondamentaux pour une
physiologie de la pensée »), Vienne, 1820. Frauenstädt avait loué ce livre en y voyant la tentative d’un traitement scientifique de
la psychologie. Schopenhauer était tellement irrité par ces éloges qu’il négligea les objections de Frauenstädt formulées à
l’encontre du livre de Hartmann et de la prétendue opposition entre les facultés supérieures et inférieures de la connaissance, les
facultés supérieures étant libres, déliées de toute organisation tandis que les facultés inférieures seraient conditionnées
physiquement.
4. Pierre Jean Georges Cabanis (1757-1808), continuateur de la doctrine sensualiste de Condillac, auteur des Rapports du
physique et du moral de l’homme, 1802, dont Schopenhauer possédait la 2e édition, Paris, 1805 (HN V, no [802]).
5. C’est également le traitement scientifique de la psychologie qui avait séduit Frauenstädt dans le Lehrbuch der
Psychologie als Wissenschaft (« Manuel de la psychologie comme science ») et Grundlegung der Psychologie (« Fondement de
la psychologie »).
6. Le premier congrès allemand de philosophie, organisé par I. H. Fichte, se déroula du 23 au 25 septembre 1847 à Gotha.
Fichte prononça le discours d’ouverture. Intervenants : Reinhold, Fortlage, Ulrici, Wirth, etc.
7. En se référant au livre de G. Moore, Die Macht der Seele über den Körper. In Beziehung auf Gesundheit und Sittlichkeit
dargestellt (« Le pouvoir de l’âme sur le corps. Présenté par rapport à la santé et la moralité »), traduit de l’anglais par E.
Susemihl d’après la 4e édition de l’original, Leipzig, 1850, Frauenstädt avait écrit que la domination de l’âme sur le corps était en
réalité celle de la volonté sur l’âme, tout en identifiant l’âme à l’intellect de Schopenhauer : « Si nous considérons tous ces faits et
bien d’autres encore du même genre, il est rigoureusement faux d’y puiser des exemples pour le pouvoir de l’âme sur le corps.
Cette expression mène trop facilement à la croyance que l’âme serait une entité libre dans le corps fonctionnant à sa guise, sans
être liée à une activité régulière et nécessaire ; c’est là une folie que nous avons déjà réfutée lorsque nous avons discuté le livre
d’Hartmann. En y regardant de plus près, on ne trouve rien d’autre ici que le fait que la volonté de l’homme, sollicitée par un
intérêt prédominant, est capable d’investir toutes les forces de l’âme au point que les sens, l’affect et la conscience sont
exclusivement pris par l’objet de cet intérêt, et pour les objets restants qui ne sont pas impliqués dans cette relation, voire pour les
états du corps même, tous les sens sont comme morts. »
8. Référence au discours critique du président prononcé deux fois par an, pendant l’assemblée des cours de justice.
Lettre 239
1. IM1 Houben, 1929, p. 154-155.
2. Il sera plus amplement question de ce projet dans la prochaine lettre. Schopenhauer ne voulait pas se faire envoyer les
affermages annuels, ce que Sibylle Mertens lui avait proposé dans une lettre, car il refusait de dépendre de la bonne volonté de
cette dernière, et plus encore de celle de ses héritiers, et exigeait donc (par lettre ou par un accord verbal) un engagement en
bonne et due forme. Il attendait également que ses droits fussent fixés, au cas où sa partenaire devait mourir avant lui. Comme
Sibylle donna son accord, on chargea Emden d’élaborer un contrat.
3. Une situation anticonstitutionnelle dans l’électorat de Hesse faisait planer le danger d’une guerre austro-prussienne. Le
conflit fut désamorcé le 29 novembre 1850 par ce qu’on a appelé la reculade d’Olmütz, au détriment de la Prusse.
Lettre 240
1. IM1 Houben, 1929, p. 155-156.
Schopenhauer avait profité d’une visite de Becker en novembre 1850 pour lui soumettre la question du projet de contrat.
Avec les vérifications et compléments qu’Emden avait apportés à la proposition de Becker, Schopenhauer put développer le
projet détaillé dans la présente lettre. Sibylle ne donna son accord que début janvier 1851 lors d’une rencontre à Francfort, après
quoi le contrat fut rédigé. Le 17 janvier 1851, Becker reçut un tiré à part pour procéder à la dernière vérification (lettre no 244) ; le
18 janvier, Becker le renvoya avec ses remarques, et le 21 janvier le projet définitif fut envoyé à Sibylle (lettre no 245).
2. Après la mort de Ludwig Mertens (1842), le fils aîné Gustav et les gendres (le sous-préfet Hasslacher à Aix-la-Chapelle,
le négociant Rudolf Esser et le Dr. Friedrich Heimsoeth) avaient exigé que Sibylle Mertens leur verse au moins une partie de
l’héritage, qui comprenait surtout trois maisons et une grande collection. De vaines tentatives pour trouver un arrangement
débouchèrent sur un procès qui finira seulement en mars 1852, par un compromis.
Lettre 241
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 507-508.
2. Schopenhauer se réfère à une lettre de novembre 1850 où Frauenstädt se défendait contre les reproches que
Schopenhauer lui avait adressés le 23 octobre 1850 (lettre no 238).
3. Cf. note 3 de la lettre no 239.
4. « Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit » (Jean, 19, 22).
5. Lettre de Becker du 28 novembre 1850 (D XV, no 382) où il fait référence au livre de I. H. Fichte, Die philosophischen
Lehren von Recht, Staat und Sitte (« Les doctrines philosophiques du droit, de l’État et des mœurs »), Leipzig, 1850, et affirme
que l’ouvrage mériterait d’être discuté et critiqué par Frauenstädt.
Lettre 242
1. M dernièrement villa Wahnfried, Bayreuth (en 1862, Becker avait offert cette lettre à Wagner). L’original n’a pas pu être
retrouvé. IM1 Schemann, p. 330.
2. Cf. note 5 de la lettre no 241.
3. Lettre du 21 novembre 1850 (lettre no 240).
Lettre 243
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 508-509.
2. Le dernier livre de I. H. Fichte (cf. lettre no 241) avait incité Frauenstädt à affirmer qu’après une période d’ignorance et
d’occultation de la philosophie de Schopenhauer, une deuxième période avait à présent commencé, où les professeurs de
philosophie prenaient en compte sa pensée, mais seulement en la traitant de haut comme étant un point de vue dépassé. La
troisième période donnerait lieu à un renversement, où l’on considérerait la philosophie des professeurs comme dépassée du point
de vue de Schopenhauer.
3. Le livre de I. H. Fichte contenait un chapitre sur Schopenhauer, où il était question des avantages de son « mode
d’exposition » qui porte « la marque d’une individualité forte et toujours ferme ».
4. Selon Dorguth, Schopenhauer a élaboré la physiologie de l’intellect de façon « si magistrale, avec une clarté si
pénétrante », in Schopenhauer in seiner Wahrheit (« Schopenhauer dans sa vérité »), Magdebourg, 1845, p. 13.
5. Hermann Friedrich Wilhelm Hinrichs (1794-1861), auteur d’un ouvrage préfacé par Hegel, Die Religion im inneren
Verhältnisse zur Wissenschaft (« La religion dans son rapport intime à la science »), Heidelberg, 1822, professeur à Breslau
(1822), depuis 1825 à Halle.
6. Karl baron von Stein zum Altenstein (7 octobre 1770 - 14 mai 1840), ministre prussien de la Culture (1817-1838).
7. Schopenhauer avait envoyé à Hayn le manuscrit des Parerga et Paralipomena le 22 octobre 1850. Alors que les travaux
typographiques étaient censés commencer dès réception du manuscrit, Schopenhauer n’avait toujours pas reçu la moindre
épreuve.
Lettre 244
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 60-61.
2. Cf. les notes 2 des lettres no 239 et 240.
3. « Gare à nous, avec fugacité, Posthumus, Posthumus, les années s’écoulent » (Horace, Carm. II, 14, 1-2).
Lettre 245
1. IM1 Houben, 1929, p. 157-159.
2. Dr. jur. Johannes August Speltz, avocat, Am Salzhaus 4 (livre d’adresses de Francfort 1851). Speltz était marié avec une
cousine de Sibylle Mertens.
3. Les détails ne sont pas connus. On peut supposer que c’est la vente des parts de terrain à Ohra, voulue aussi bien par
Schopenhauer que par Sibylle Mertens, et la relève concernant les obligations emphytéotiques, qui ont mené à ces procès.
4. L’expropriation de certains terrains en vue du nouveau tracé d’un terrain ferroviaire. Il semble que Sibylle Mertens l’ait
su avant Schopenhauer ; elle l’a sans doute mis au courant lors de leur rencontre en janvier (cf. la lettre de Schopenhauer du 28
février 1851, lettre no 248 : « vos objections concernant la procuration d’expropriation de Friedrichsen, objections que vous
m’aviez annoncées de vive voix »).
Lettre 246
1. IM1 Houben, 1929, p. 159-162.
On peut supposer que Sibylle Mertens a d’abord soumis ce projet de contrat, rédigé par Emden, aux conseils de son avocat.
Dans sa lettre du 28 février 1851 (lettre no 248), Schopenhauer se réfère encore à cette affaire, mais dans la suite de la
correspondance elle ne sera plus évoquée. Il semble que le contrat n’ait pas abouti. C’est bien Sibylle Mertens, et non pas le
gérant principal Friedrichsen, qui continua de payer les affermages à Schopenhauer. Lorsque, le 2 juillet 1855, Sibylle vendit sa
part de terrain, elle fit en sorte de garantir au philosophe les 150 thalers (cf. la procuration de Schopenhauer pour Almonde du 5
juillet 1855, lettre no 359).
Lettre 247
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 509-510.
L’impression des Parerga ayant subi un nouveau retard, malgré les insistances de Frauenstädt auprès de Hayn, et
Schopenhauer n’ayant toujours pas reçu d’épreuves le 30 janvier 1851, ce dernier adressa une « lettre pleine de défiance » à
Frauenstädt. Frauenstädt ne publie que le post-scriptum. La première épreuve arriva peu après cette lettre.
2. C’est-à-dire chez l’éditeur.
Lettre 248
1. IM1 Houben, 1929, p. 162-163.
2. Le projet de contrat (lettre no 246) auquel la présente lettre se réfère pour la dernière fois dans la correspondance entre
Schopenhauer et Sibylle Mertens.
3. Cf. note 4 de la lettre no 245.
4. Schopenhauer rédigera la « procuration spéciale » pour Friedrichsen le 11 mars 1851 (cf. lettre no 249).
5. Cf. note 2 de la lettre no 240.
6. La chapelle de sainte Élisabeth, patronne des seigneurs allemands, érigée en 1320, rénovée en 1601, abattue en 1800.
Louis Ier le Pieux (778-840), fils de Charlemagne, fut en guerre avec ses fils Lothaire et Pépin et Louis en 830. En 833, il fut
destitué et obligé de se repentir, mais accéda de nouveau au trône en 838. Schopenhauer semble condenser plusieurs versions : 1)
en 852, Louis le Pieux se réconcilie avec son fils Lothaire à Francfort-sur-le-Main, selon les Annales de Saint-Bertin à Mayence ;
2) en 873, Louis l’Allemand convie ses fils tumultueux Louis et Charles devant un rassemblement à Francfort-sur-le-Main ; 3) à
Noël 941, l’empereur Otton Ier se réconcilie avec son fils Henri à Francfort-sur-le-Main. Cette scène a été peinte par le célèbre
Eduard Steinle. Le lieu de la réconciliation fut la chapelle des Sauveurs, construite avant la cathédrale.
Lettre 249
1. M dernièrement Reichsarchiv Dantzig (dossier des hypothèques). IM1 Hassbargen, 1931, p. 345.
Lettre 250
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 510-511.
2. Frauenstädt s’occupa de la première correction des Parerga.
3. Schopenhauer avait alors montré et lu à Frauenstädt la préface de l’ouvrage de Rintei Tanefiko, Sechs Wandschirme in
Gestalten der vergänglichen Welt. Ein japanischer Roman im Originaltexte sammt den Facsimiles von 57 japanischen
Holzschnitten (« Six paravents dans les formes du monde éphémère. Un roman japonais dans le texte original avec les fac-similés
de 57 gravures sur bois japonaises »), traduit et édité par le Dr. August Pfizmaier, Vienne, 1847. Plus tard, après la parution de
l’ouvrage de Frauenstädt Ueber das wahre Verhältniss der Vernunft zur Offenbarung (« Sur le vrai rapport entre la raison et la
révélation »), Darmstadt, 1848, Schopenhauer prétendit lors de la dernière visite de Frauenstädt à Francfort en décembre 1847,
que ce dernier avait cherché à imiter la préface du roman japonais. Cf. Gespräche, p. 136.
4. Plat espagnol (pot-pourri).
5. Frauenstädt souffrait d’une maladie des paupières.
Lettre 251
1. M Bibliothèque universitaire Halle (Saale). IM1 Centralblatt für Bibliothekswesen, 9e année, 1892, p. 420-422.
Johann Eduard Erdmann (13 juin 1805 - 12 juin 1892), sympathisant de la droite hégélienne, professeur de philosophie à
Halle depuis 1836, déjà cité par Schopenhauer dans le traité couronné Sur la liberté de la volonté (E, IV) en 1838. Il demanda à
Schopenhauer, le 31 mars 1851 (D XIV, no 394), quelques notes biographiques pour son livre Entwicklung der deutschen
Speculation seit Kant (« Évolution de la spéculation allemande depuis Kant ») formant le troisième tome de son Versuch einer
wissenschaftlichen Darstellung der Geschichte der neuren Philosophie (« Tentative d’une présentation scientifique de l’histoire
de la philosophie moderne »). La première partie de ce tome avait paru en 1848, la deuxième partie devait suivre en 1853. Les
renseignements donnés par Schopenhauer ont été utilisés par Erdmann dans la deuxième partie, Leipzig, 1853, p. 381 sq.
2. Friedrich Majer (27 avril 1772 - 15 mai 1818), d’abord historien et juriste ; voué aux études mythologiques dans l’esprit
de Herder, il compila tout ce qu’il pouvait trouver sur l’Inde ancienne. À Weimar, il fit partie des amis intimes de Herder et fut
souvent invité chez Johanna Schopenhauer, fréquentant de près Goethe ; à partir de 1804 conseiller et éducateur du prince héritier
von Reuss-Schleiz, impliqué dans la vie politique en tant que conseiller de légation (1813-1815). Auteur de Briefe über das Ideal
der Geschichte (« Lettres sur l’idéal de l’Histoire »), 1796 ; Zur Kulturgeschichte der Völker (« De l’Histoire culturelle des
peuples »), tome 1 et 2, 1798 ; Allgemeines mythologisches Lexikon (« Dictionnaire général de la mythologie »), 1803-1804 ;
Mythologisches Taschenbuch (« Manuel de mythologie »), 1811-1813 ; Brahma oder die Religion der Indier als Brahmanismus
(« Brahma ou la religion des Indiens comme brahamanisme »), 1818. Dans ses écrits, il se montre comme un élève fidèle de
Herder, ce dernier ayant donc influencé indirectement Schopenhauer. Cette lettre est d’ailleurs l’unique endroit où Schopenhauer
se considère explicitement comme l’élève de Majer. Cf. Rudolf F. Merkel, « Schopenhauers Indien-Lehrer », Jahrb. no 32 (1945-
1948), p. 158-181.
Lettre 252
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 511-513.
2. La lettre du professeur Erdmann du 31 mars 1851 (cf. lettre no 251).
3. I. H. Fichte et J. E. Erdmann.
4. Cf. W. A. Mozart, Don Giovanni, II, scène XI.
5. Schopenhauer se réfère à son traité Sur la philosophie universitaire (dans P, I) où Herbart apparaît comme une « tête de
mule », « qui a mis son entendement à l’envers ». Du temps de cette lettre, onze feuilles de l’ouvrage étaient donc déjà
imprimées.
6. Frauenstädt avait critiqué le titre grec Parerga et avait proposé à Schopenhauer de choisir un titre allemand plus
significatif que le titre « œuvres annexes ».
7. P, II, chap. V, § 68.
8. Frauenstädt avait écrit à Schopenhauer qu’il comptait composer une comédie sur les philosophes qui font les médiateurs
entre le Dieu immanent et le Dieu transcendant, philosophes que Schopenhauer compare au tisserand Bottom dans le Songe d’une
nuit d’été (P, I, « Sur la philosophie universitaire »).
9. Die Winde oder ganz absolute Konstruktion der neuern Weltgeschichte durch Oberons Horn, gedichtet von Absolutus
von Hegelingen (« Les vents ou construction totalement absolue de l’histoire moderne du monde par le cor d’Oberon, mis en
poème par Absolutus von Hegelingen »). L’auteur était l’historien d’art et philosophe Otto Friedrich Gruppe (1804-1876).
10. Karl Rosenkranz n’a écrit qu’une seule comédie, Das Centrum der Speculation, Königsberg, 1840.
11. Frauenstädt avait écrit à Schopenhauer qu’il avait rapidement compulsé l’ouvrage de I. H. Fichte System der Ethik, 1.
kritischer Theil : Die philosophischen Lehren von Recht, Staat und Sitte, 2. darstellender Theil, 1. Abtheilung : Die allgemeinen
ethischen Grundbegriffe (« Système de l’éthique, 1. partie critique : Les doctrines philosophiques du droit, de l’État et des mœurs
[cf. note 5 de la lettre no 241], 2. partie de présentation, première section : Les concepts fondamentaux et généraux de l’éthique
»), Leipzig, 1850, mais qu’il n’avait pas voulu acheter l’ouvrage trop onéreux et qu’il devait donc attendre qu’on le lui prête.
12. Schopenhauer fait allusion à la salle des revues de la Bibliothèque royale. Il souhaitait que Frauenstädt la fréquente
régulièrement pour lui faire part des nouvelles parutions qui le citaient, car il n’y avait pas d’institution semblable à Francfort.
Frauenstädt a effectivement obtenu bon nombre d’informations dans cette salle des revues.
13. Frauenstädt avait sollicité le jugement de Schopenhauer pour ses deux articles « Ueber das Verhältniss der
theoretischen zur praktischen Philosophie » in Allgemeine Monatsschrift für Literatur, éd. par L. Ross et G. Schwetschke,
novembre et décembre 1850 ; comme ce jugement s’était fait attendre, Frauenstädt lui avait écrit que le léger différend qu’ils
avaient eu (cf. note 3 de la lettre no 238) ne devait pas le priver pour autant des commentaires instructifs de Schopenhauer.
14. Recension du livre de H. F. Link, « Die Philosophie der gesunden Vernunft », Berlin, 1850, dans les Blätter für
literarische Unterhaltung, 1851, no 52. Frauenstädt y avait sollicité la distinction entre l’entendement et la raison selon
Schopenhauer.
15. P, II, chap. XXI, § 250.
16. Le manuscrit des Parerga était fort pénible à lire à cause des surcharges nombreuses et des ajouts qui contenaient à
leur tour d’autres ajouts.
Lettre 253
1. IM1 Zeitschrift für vergleichende Literatur, éd. par le Dr. Samuel Brassai et le Dr. Hugo von Meltzl à Clausenburg, vol.
IV (1878), no 33, p. 70-71.
Le Konversations-Lexikon utilisa cette biographie dans un autre article.
Lettre 254
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 513-515.
2. Lorsque, en corrigeant le manuscrit du premier tome des Parerga, Frauenstädt arriva à la « Spéculation transcendante
sur l’intentionnalité apparente dans le destin de l’individu », il crut bon de contester l’affirmation d’une direction planifiée du
destin de l’individu : d’après lui, ramener à un destin planifié la situation favorable qu’un criminel rencontre lors de son action a
quelque chose de diabolique. Dans la première édition, ce traité remplissait les p. 191-212. Au moment où Frauenstädt rédigea sa
dernière lettre du 17 avril 1851, au moins douze ou treize feuilles de l’ouvrage étaient donc déjà imprimées (cf. note 5 de la lettre
no 252).
3. Frauenstädt, en se référant à la « providence spéciale », avait fait part à Schopenhauer d’un passage de la recension de
Goethe, Der deutsche Gilblas.
4. Grâce à nos efforts.
5. Dans les Briefe über Alexander von Humboldts « Kosmos », première partie, de Bernhard Cotta, Schopenhauer est cité
en exergue de la première lettre qui traite de l’appréciation de la nature : « Plus un homme est bas d’un point de vue intellectuel,
moins il trouve l’existence énigmatique : il lui semble que le quomodo et le quod des choses vont de soi » (M, II, chap. 17).
6. Un catalogue berlinois d’autographes daté de 1894 proposa (selon Grisebach, Briefe, 476) une feuille détachée d’un
cahier de desiderata du « hall de lecture » de Francfort, portant la demande d’un membre de supprimer les Münchner Gelehrten
Anzeigen. En dessous et en réponse on pouvait lire : « Contra : je les lis régulièrement. Dr. Schopenhauer. »
7. Jakob Philipp Fallmerayer (10 décembre 1790 - 26 avril 1861), historien, voyageur et écrivain, séjours en Orient (1831-
1848), professeur d’histoire à Munich (1848), membre du Rassemblement national de Francfort et du Parlement croupion de
Stuttgart, destitué de ses fonctions en 1849. Il avait « publiquement rossé » Ringseis dans les Blätter für literarische
Unterhaltung.
8. Johann Nepomuk Ringseis (16 mai 1785 - 22 mai 1880), appartenant au cercle de Görres, médecin d’hôpital à Munich
(1817), conseiller supérieur de médecine et réformateur pour les affaires médicales (1825). Deux de ses écrits se trouvaient dans
la bibliothèque de Schopenhauer : Ueber den revolutionären Geist auf den deutschen Universitäten (« Sur l’esprit révolutionnaire
dans les universités allemandes »), Munich, 1834 (HN V, no [726]) et Ueber die Nothwendigkeit der Autorität in den höchsten
Gebieten der Wissenschaft (« Sur la nécessité de l’autorité dans les domaines les plus élevés de la science »), Munich, 1855 (HN
V, no [727]), avec des notes marginales mordantes.
9. Ludwig Wilhelm Wichmann (1784-1859), sculpteur à Berlin, élève de Schadow, a fondé un atelier indépendant avec son
frère en 1821.
10. Johann Gottfried Schadow (1764-1850), sculpteur.
11. Christian Daniel Rauch (1777-1857), élève de Schadow, depuis 1811 à Berlin, influence importante sur l’École de
sculpture de Berlin.
12. C. Friedrich Hagemann (1773-1806), sculpteur à Berlin, élève et assistant de Schadow, a sculpté le buste de Kant en
1802.
Lettre 255
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 515-520.
2. Le long silence de Schopenhauer avait incité Frauenstädt à croire qu’il s’était attiré le courroux de son maître vénéré par
quelque remarque déplacée.
3. La même chose, mais autrement.
4. On peut dire le bien deux ou trois fois. Attribué à Empédocle ; cf. Platon, Philèbe, 59e.
5. Le professeur Harms à Kiel, co-éditeur de la Monatsschrift de Schwetschke, avait renvoyé l’article de Frauenstädt, « Zur
Widerlegung des Theismus », sous prétexte qu’il était trop polémique, et avait accepté à la place l’article du professeur Liebner, «
Ueber die Sünde ». Karl Theodor Albert Liebner, 3 mars 1806 - 24 juin 1871, professeur de théologie à Göttingen (1839).
6. Avec douceur pour la manière, avec force pour la chose (cf. lettre no 213).
7. Friedrich Harms (24 octobre 1819 - 5 avril 1880), professeur à Kiel (1848), à Berlin (1867), défenseur d’une philosophie
de l’Absolu basée sur les sciences empiriques.
8. Klaus Harms (25 mai 1778 - 1er février 1855), théologien protestant, prédicateur célèbre à Kiel (1816-1849).
9. Cf. Hölty, Lebenspflichten (Musenalmanach de Voss, 1778, p. 78).
10. Schopenhauer fait allusion à la revue Deutsches Museum, Zeitschrift für Literatur, Kunst und öffentliches Leben,
fondée en 1851 par Robert Prutz. Dans la lettre à Grimm du 21 août 1855 (lettre no 365), Schopenhauer recommande à ce dernier
le « Deutsches Museum de Prutz », dans la lettre du 22 octobre 1855 (lettre no 371) ; il l’appelle « Deutsche Monatsschrift de
Prutz ».
11. Carrière ?
12. Ch. dans IM1.
13. Die Gegenwart (F. A. Brockhaus, Leipzig) avait publié un article de Rudolf von Gottschall, « Ueber die deutsche
Philosophie seit Hegels Tod », dans lequel Frauenstädt avait prélevé le passage qui se référait à Schopenhauer.
14. Il s’agit de la recension des Problèmes fondamentaux de l’éthique, in Hallische Jahrbücher, juillet 1841, signée
spiritus asper. L’auteur n’était pas Gottschall, mais Friedrich Wilhelm Carové ; cf. lettre à Frauenstädt du 29 juin 1854 ( lettre no
335) et lettre à Becker du 27 août 1854 (lettre no 340) ; cf. également lettre no 180 et Gespräche, p. 73, 75.
15. Deutschlands Denker seit Kant. Die Lehren und Geistesthaten der bedeutendsten Denker in neuerer Zeit. In
gemeinfasslicher Darstellung für Lehrer, Lernende und gebildete Leser (« Les penseurs d’Allemagne depuis Kant. Les doctrines
et les actes de l’esprit des plus importants penseurs modernes. Dans une présentation accessible aux enseignants, élèves et
lecteurs cultivés »), Dessau, 1851. Le passage en question : « Arthur Schopenhauer, auquel se rattachent Voigtländer et
Frauenstädt comme promulgateurs de sa doctrine, et Reiff et Plank comme fondateurs d’un nouveau réalisme idéal à partir du
principe de volonté » ; 2) Buch der Weltweisheit oder die Lehren der bedeutendsten Philosophen aller Zeiten (« Livre de la
sagesse du monde ou les doctrines des philosophes les plus importants de tous les temps »), partie I et II, p. 348 sq. : « D’autre
part, il a été tenté d’ériger en principe de la philosophie non pas la conscience mais la volonté. […] Le penseur qui s’y est essayé
le premier et qui a signalé par là la tâche de la philosophie à venir est Arthur Schopenhauer. »
16. Le Dr. Gustav Oelsner-Monmerqué (décédé en 1854) ; cf. Gespräche, p. 162 sq.
17. Pierre Laromiguière (1756-1847), à Paris de 1811 à 1813 ; ses Leçons de philosophie (1815-1818) ont dominé
l’enseignement philosophique en France jusqu’en 1858.
[du Chèvrier] Le nom est sans doute faux.
18. Victor Cousin (28 novembre 1792 - 12 janvier 1867), fondateur de l’éclectisme spiritualiste, médiateur entre l’école
écossaise anti-métaphysique et l’école allemande, introducteur de Hegel en France. Ouvrage principal : Du Vrai, du Beau et du
Bien, 1837, 23e éd. 1881.
19. Frauenstädt avait écrit à Schopenhauer que le monument à Frédéric II incluait également Kant et Lessing.
20. Schopenhauer fait erreur. Dans un décret du 25 décembre 1775, le roi rend hommage à Kant en des termes élogieux ;
cf. Zöllner, Ueber die Natur der Kometen (« Sur la nature des comètes »), Leipzig, 1872, p. 445.
21. Le Dr. Johann Carl Passavant (1790-1857), médecin à la Maison de vieillesse de Francfort de 1818 jusqu’à sa mort, a
donné des conférences sur le magnétisme vital à l’Institut de Senckenberg ; il a contribué à faire revivre la Société de physique à
Francfort. Schopenhauer possédait ses Untersuchungen über den Lebensmagnetismus und das Hellsehen (« Enquêtes sur le
magnétisme vital et la clairvoyance »), 2e éd., Francfort, 1837 (HN V, no [1044]). D’après les explications de Moritz Werner
(Frankfurter Zeitung, 30 août 1929, no 644), il est peu probable que Passavant ait effectivement entendu cette anecdote sur
Lessing, qui n’est rapportée nulle part ailleurs. Mais il a peut-être puisé dans des documents de la famille Lessing, car il était
marié avec Juliane Marianne Lessing, une arrière-petite-fille de l’oncle et parrain de Lessing, Christian Gottlob Lessing.
22. Cf. Mozart, Don Giovanni.
Lettre 256
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 520-523.
2. Pour le buste de Kant réalisé par l’atelier Rauch, Schopenhauer était censé payer les frais d’emballage et de transport, en
plus des 5 thalers.
3. Tout de suite.
4. À leur manière.
5. Dans son livre Eine Untersuchung über die Natur des menschlichen Wissens mit Berücksichtigung des Verhältnisses der
Philosophie zur Empirie (« Investigation sur la nature du savoir humain en tenant compte du rapport entre la philosophie et
l’empirie »), Berlin, 1845, J. A. Chr. Voigtländer critique l’ouvrage principal de Schopenhauer. Il reproche à Schopenhauer
d’avoir affirmé qu’on pouvait tout abstraire de l’espace et du temps, sauf ces derniers. D’après lui, Schopenhauer suppose donc
que le temps et l’espace existent sans matière, ce qui voudrait dire qu’on admet un pur changement sans un quelque chose qui
change, et un pur repos sans un quelque chose qui repose : « Or, Schopenhauer philosophe de façon superficielle. » Quant au
contenu, la philosophie de Schopenhauer serait du panthéisme, quant à la forme, du « satanisme ». En 1849, Voigtländer était co-
éditeur du journal ecclésiastique Freie allgemeine Kirchenzeitung, Organ für die demokratische Entwicklung des religiös-
kirchlichen Gedankens und Lebens in Deutschland. Ses articles dans ce journal ne font jamais mention de Schopenhauer.
Frauenstädt communiqua ces renseignements à Schopenhauer, qui les connaissait déjà. Schopenhauer y reviendra dans la
prochaine lettre.
6. Jacob Friedrich Reiff (23 décembre 1810 - 5 juillet 1879), privat-docent (1840), professeur de philosophie à l’Université
de Tübingen (1844).
7. Carl Christian Planck (17 janvier 1819 - 7 juin 1880), théologien protestant et philosophe social, privat-docent à
Tübingen (1848-1854), puis enseignant à Ulm, Blaubeuren et Maulbronn.
8. Le plus tôt possible.
9. Les auteurs des deux histoires populaires de la philosophie, Deutschlands Denker seit Kant et Buch der Weltweisheit.
10. v. Br. dans IM1.
W. von Bruchhausen (né en 1809), fermier jusqu’à l’âge de 23 ans, ensuite artilleur pendant seize ans ; auteur de Die
periodisch wiederkehrenden Eiszeiten und Sinnfluthen (« Le retour périodique des époques glaciaires et des déluges »), 1845 ;
Die Gleichungen der Flugbahn rotierender Geschosse (« Les équations de la trajectoire de projectiles rotatifs »), 1847 ; Die
Dreieinheit, ein leicht begreifliches, überall gültiges Naturgesetz ; der Schlüssel zur Einsicht in die Natur der Dinge. Auch etwas
Geschichtliches, dessen innere Quelle und allgemeier Verlauf (« L’unité ternaire, un principe de la nature universellement
valable et facilement compréhensible ; la clé pour la compréhension de la nature des choses. Également un peu d’histoire, sa
source intérieure et son cours général »), Zurich, 1854. C’est ce livre « insipide », mentionné sous le titre de Panmonothéisme
dans la lettre de Schopenhauer, que Bruchhausen envoya à Schopenhauer le 24 novembre 1854 ( HN V, no [795]). Cf. Gespräche,
p. 164.
11. Je vais vous… (Neptune s’adressant aux vents qui s’étaient levés contre sa volonté, Virgile, Aeneis I, 135).
Lettre 257
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 523-528.
2. Frauenstädt avait convoité l’un des quatre daguerréotypes accrochés dans la chambre de Schopenhauer : les portraits du
22 août 1845 (Bildnisse, no [60] et no [61]) et du 16 mai 1846 (no [62] et [63]).
3. Le portrait no [62] (Bildnisse), sans doute donné lors de la visite de Sibylle Mertens-Schaaffhausen début janvier 1851.
4. Le portrait no [63] (Bildnisse).
5. Johann Jacob Seib, lithographe, chalcographe et photographe, Hochstr. 16 (livre d’adresses 1852-1857).
6. Les deux photographies de juillet et août 1850 (Bildnisse, no [80] et [81]).
7. Indigné.
8. Karl Alexander von Reichlin-Meldegg (1801-1877), professeur de théologie à Heidelberg. Concernant ses recensions
dans les Heidelberger-Jahrbücher, nov.-déc. 1850, no 57, cf. la lettre à Frauenstädt du 21 août 1852 (lettre no 280) et la préface de
la deuxième édition de N, p. 48.
9. Joseph Priestley (13 mars 1733 - 6 février 1804), théologien anglais, philosophe, physicien et chimiste, co-fondateur de
la psychologie associative, auteur de l’ouvrage Disquisitions relating to Matter and Spirit, 1777, 2e éd., 1782 (HN V no [425]),
que Schopenhauer cite quelquefois.
10. P, II, chap. X, § 139.
11. À propos du dialogue entre Philalèthe et Trasymache (P, II, chap. X, § 141), Frauenstädt avait écrit à Schopenhauer : «
Votre Philalèthe parle avec grand mépris de l’individualité, déclare qu’elle est un néant et ramène la volonté de vie individuelle
qui crie “Moi, je veux exister” à une illusion de l’individu. Mais d’un autre côté, vous dites dans le chapitre “De l’éthique” § 116
que l’individualité ne repose pas seulement sur le principium individuationis et qu’elle n’est donc pas de part en part un simple
phénomène ; mais qu’elle prend racine dans la chose en soi, dans la volonté particulière, car son caractère même serait individuel.
D’où la contradiction suivante : l’individu est phénomène et en tant que tel il est fini, et d’autre part il n’est pas simplement
phénoménal, mais chose en soi et donc éternel. » Frauenstädt avait demandé à Schopenhauer la solution de cette contradiction.
12. M, I, § 54.
13. M, II, chap. 41.
14. M, II, chap. 50.
15. Dans P, I, « Aphorismes sur la sagesse dans la vie », II, Schopenhauer avait expliqué que l’abrutissement de l’esprit
était la source du vide intérieur, ce dernier étant la source véritable de l’ennui. À cela, Frauenstädt avait objecté qu’au contraire,
l’esprit abruti était moins exposé à l’ennui que l’esprit alerte, comme l’enseignerait l’expérience. Frauenstädt s’était appuyé sur
Marcus Herz et son Versuch über den Schwindel (« Essai sur le vertige ») qui affirmait que les hommes abrutis et incultes
n’étaient pas autant enclins à l’ennui que l’homme cultivé. L’ennui, poursuivait Frauenstädt, présupposerait le besoin de
stimulation de l’esprit, besoin qui ferait défaut chez l’esprit abruti. Par conséquent, les jeux et les bavardages insipides
l’amuseraient, alors qu’ils ennuieraient l’esprit subtil.
16. Jean-Pierre Blanchard, aéronaute français (1753-1809), fut le premier à traverser la Manche en ballon en 1785 et à
expérimenter à Londres un parachute qu’il avait lui-même inventé.
17. Article publié en trois parties : « Ueber Theismus und Atheismus vom theoretischen und praktischen Standpunkt,
veranlasst durch L. Feuerbach’s Vorlesungen über das Wesen der Religion », in Blätter für literarische Unterhaltung, 1851, nos
121, 126, 132.
Ludwig Feuerbach (1804-1872), fils du célèbre criminaliste Paul Johann Anselm von Feuerbach, jeune hégélien, fondateur
du naturalisme matérialiste et de l’anthropologisme, forte influence sur Marx. Schopenhauer s’exprime sur L’Essence du
christianisme dans les Gespräche, p. 208, 218. Schopenhauer possédait l’Anti-Hobbes et la Critique du droit naturel de
Feuerbach (HN V, no [179] et [180]).
18. Avec douceur pour la manière (cf. lettre no 213).
19. « Stimmen über Arthur Schopenhauer » ; cf. note 2 de la lettre no 224.
20. Cf. lettre du 9 décembre 1849 (lettre no 224).
Lettre 258
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 528.
Avec cette lettre, Schopenhauer envoya le daguerréotype qu’il avait promis à Frauenstädt (Bildnisse, no [63]).
Lettre 259
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 529-530.
2. Les exemplaires gratuits des Parerga.
3. Frauenstädt avait demandé à Schopenhauer s’il connaissait le Dr. Clemens de Francfort, auteur de l’article « Goethe als
Naturforscher » dans le Morgenblatt de Cotta, dans lequel il abordait également la théorie des couleurs. Il s’agit du Dr. Aloys
Clemens (1793-1869), fils du Dr. Joh. Bapt. Goldschmidt, médecin de la communauté catholique de Francfort (1817-1832),
médecin généraliste, Langestr. 32 (livre d’adresses 1849-1855), auteur de nombreux écrits : Anthropologische Fragmente («
Fragments anthropologiques »), Francfort-sur-le-Main, 1820 ; Der Tempel der Natur. Frei nach Erasmus Darwin (« Le temple de
la nature. Librement inspiré d’Érasme Darwin »), Francfort-sur-le-Main, 1827 ; Über die Natur und Heilung der sporadischen
und epidemischen Cholera (« Sur la nature et la guérison du choléra sporadique et épidémique »), 2 e éd. Francfort-sur-le-Main,
1836 ; Goethe als Naturforscher (« Goethe comme naturaliste »), Francfort-sur-le-Main, 1841 ; Goethes Aristokratismus («
L’aristocratisme de Goethe »), Francfort-sur-le-Main, 1851 ; Schiller im Verhältnis zu Goethe und zur Gegenwart (« Le rapport
de Schiller à Goethe et à l’époque actuelle »), Francfort-sur-le-Main, 1857.
4. Il s’agit du bulletin littéraire du journal du matin de Cotta (Morgenblatt für gebildete Stände, plus tard Morgenblatt für
gebildete Leser), rédigé par Wolfgang Menzel (jusqu’en 1848), nouvelle parution à Stuttgart depuis 1852.
Lettre 260
1. IM1 Houben, 1929, p. 164.
Cette lettre introduit dans l’affaire d’héritage d’Ohra deux nouveaux points de litige, jusque-là non évoqués dans la
correspondance ; il en sera plus amplement question dans la lettre suivante. Fin septembre 1851, Sibylle Mertens était retournée à
Bonn où elle avait été entièrement occupée par les installations dans sa maison et par le procès.
Lettre 261
1. IM1 Houben, 1929, p. 164-166.
2. Il s’agit du rachat du bail dont la validité avait été obtenue en 1843 par le tenancier Gabriel Dietrich (cf. lettre n o 191).
Après le décès de Dietrich, les droits étaient passés à sa veuve.
3. Procuration pour l’épouse de Friedrichsen, l’autorisant à percevoir sa part de l’argent obtenu par la vente des parcelles à
la Société des Chemins de fer de l’Est ; cf. lettre du 3 février 1852 (lettre no 266) et la procuration en question (lettre no 267).
Lettre 262
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 62.
2. Exemplaires des Parerga et Paralipomena.
Lettre 263
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 530-533.
2. Alors que Schopenhauer l’avait sommé de ne pas laisser échapper la place de bibliothécaire à Corvey, Frauenstädt lui
avait écrit que son « démon » lui déconseillait d’aller à Corvey. cf. lettre no 215 et no 224.
3. Heureuse solitude, seul bonheur.
4. Et ceci t’arrivera aussi, que tu enseignes à ton tour, vieillard balbutiant, à lire et à écrire dans les écoles de la périphérie.
Cf. Horace, Epist. I, 20, 17-18.
5. J’ai dit et j’ai sauvé mon âme.
6. P, I, « Aphorismes sur la sagesse dans la vie », V, A, 3).
7. Cela me dépite.
8. Frauenstädt avait fait savoir qu’il avait envoyé une recension des Parerga aux Blätter für literarische Unterhaltung.
9. Frauenstädt s’était interrogé sur l’allusion à une solution « hypothétique et mythique » dans la dernière phrase du § 173
(P, II, chap. XIV).
10. M, I, § 27 et § 65.
11. Erzählungen aus den 550 früheren Geburten des Buddha (« Récits des 550 naissances antérieures du Bouddha »).
12. Dsanglun, oder der Weise und der Thor (« Dsanglun, ou le sage et le fou »), traduction du tibétain accompagnée du
texte original, par I. J. Schmidt, tomes 1 et 2, Saint-Pétersbourg, 1843 (HN V, no [1184]).
13. Ernst Otto Timotheus Lindner (28 novembre 1820 - 7 août 1867). Obtient le titre de docteur à Breslau, après des études
de philosophie et de musique. Après l’abolition du venia legendi en 1846, il fut rédacteur pour la politique extérieure de la
Vossische Zeitung, puis directeur exclusif de 1836 jusqu’à sa mort. Auteur d’écrits sur l’histoire de la musique, entre autres sur
Bach ; Meyerbeers ‘Prophet’ als Kunstwerk beurteilt (« Le Prophète de Meyerbeer jugé comme œuvre d’art »), 1850 ; Die
Geschichte der ersten stehenden deutschen Oper (« L’histoire du premier opéra allemand »), tome 1 et 2, 1855 (HN V, no
[1234]). Promulgateur enthousiaste de la philosophie de Schopenhauer.
14. La troisième partie de l’article « Ueber Theismus und Atheismus… », Blätter für literarische Unterhaltung, 1851, no
132 (cf. note 17 de la lettre no 257).
15. Schopenhauer croyait trouver dans l’article de Frauenstädt des échos de sa discussion sur la religion dans le deuxième
tome des Parerga, que Frauenstädt avait pu lire lors de ses corrections.
16. Charlotte Buff (1753-1828), l’amante de Goethe à Wetzlar, la Lotte de son Werther.
17. Karl Philipp Fischer (1807-1885), professeur de philosophie à Erlangen, influencé par Baader ; auteur de Wissenschaft
der Metaphysik (« Science de la métaphysique »), 1834 ; Grundzüge des Systems der Philosophie (« Traits fondamentaux du
système de la philosophie »), 1848-1849.
18. Pour se moquer, Schopenhauer écrit (imitant la prononciation souabe de Hegel) « Uedäh » au lieu de « Idee ».
19. Jakob Sengler, Die Idee Gottes : 1. Historisch-kritischer Teil ; 2. Theil, 1. Abt. : Die speculative Theologie, 2. Abt. :
Die speculative Kosmologie (« L’idée de Dieu : 1. Partie historico-critique, Heidelberg, 1845 ; 2 e partie, 1re section : La théologie
spéculative, 2e section : La cosmologie spéculative »), Heidelberg, 1847.
20. c……. dans IM1.
21. Il s’agit de la « Spéculation transcendante sur l’intentionnalité apparente dans le destin de l’individu », dans le premier
tome des Parerga.
22. Karoline Jagemann (1777-1848), amante de Carl August, plus tard Madame von Heygendorf. Schopenhauer lui destina
son unique poème d’amour, écrit en hiver 1809 (HN I, p. 6 sq.). Cf. Caroline Jagemann, Erinnerungen (« Souvenirs »), éd. par
Edmund von Bamberg, Berlin, 1926 ; Gespräche, p. 17, 65, 90, 131.
23. Allusion à la parabole dans P, II, chap. XXXI, § 396. La première rédaction se trouve dans le cahier manuscrit
Pandectae, p. 34 (HN IV 1, p. 122).
Lettre 264
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 101 (sans la dernière phrase), IM2 Gruber, p. 11-12.
2. Que nul n’entre ici qui n’ait étudié Kant. Allusion à l’inscription de l’Académie de Platon, citée dans M, II, chap. 13 : «
Que nul n’entre ici qui n’ait étudié la géométrie. »
Lettre 265
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 533.
2. No 51, 17 décembre, repris par Grisebach, Neue Beiträge, p. 46-49.
Lettre 266
1. IM1 Houben, 1929, p. 166-167.
2. Lettre no 267.
3. Le procès d’héritage se termina en mars 1852 par un compromis.
Lettre 267
1. IM1 Hassbargen, 1931, p. 345-346.
Lettre 268
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Gruber, Jahrb. no 3 (1914), p. 118.
Réponse (fragmentaire) à une lettre de Dorguth qui annonçait ses Vermischte Bemerkungen (« Remarques mêlées ») ; cf.
lettre no 269. Dorguth y faisait mention de Göschel et de Rey de Moranda, cités p. 4 et p. 20 de son ouvrage.
2. Karl Friedrich Göschel (1784-1862), conseiller supérieur de justice au ministère de Berlin (1837), membre du Collège
supérieur de la censure (1839), auteur de Hegel und seine Zeit (« Hegel et son temps »), 1832 ; Beiträge zur speculativen
Philosophie von Gott, dem Menschen und dem Gottmenschen (« Contributions à la philosophie spéculative de Dieu, de l’homme
et de l’homme-Dieu »), 1838.
3. A. J. Rey de Moranda, auteur de Kritische Beleuchtung des v. Humboldtschen Kosmos nebst Darstellung eines neuen
Weltsystems, (« Éclaircissements critiques du “Kosmos” de Humboldt avec la présentation d’un nouveau système du monde »),
1847.
Lettre 269
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 533-536.
2. Recension des Parerga dans les Blätter für literarische Unterhaltung, mars 1852, no 9 (cf. note 8 de la lettre no 263).
3. c……. dans IM1.
4. Cf. P, II, chap. XX, § 242.
5. Frauenstädt avait cité ce passage des Parerga (P, I, « Aphorismes sur la sagesse dans la vie », IV), en disant qu’il était
caractéristique des réflexions de Schopenhauer sur le duel.
6. Recension des Parerga dans le Literarisches Centralblatt für Deutschland, no 2, 10 janvier 1850 (auteur anonyme).
7. Brockhaus, en tant qu’éditeur des Blätter für literarische Unterhaltung, avait été mis en accusation à cause des articles
de Frauenstädt « manquant de respect à l’égard de la religion du pays ». On avait également porté plainte contre Frauenstädt à
Berlin ; mais la partie publique renonça, n’ayant pas trouvé de motifs de condamnation dans les articles. Cependant, Frauenstädt
fut convié à témoigner contre Brockhaus.
8. Avec douceur pour la manière (cf. lettre no 213).
9. Il s’agit des Vermischte Bemerkungen über die Philosophie Schopenhauers. Ein Brief an den Meister (« Remarques
mêlées sur la philosophie de Schopenhauer. Une lettre adressée au maître »), Magdebourg, 1852 (HN V, nos [141 et 142]).
10. Georg Römer (28 juin 1813 - 22 décembre 1869), négociant (recensé dans le livre des adresses de Francfort jusqu’en
1857), commissaire de l’établissement thermal à Bad Hombourg, auteur de quelques comédies. Cf. Gespräche, p. 68-72.
11. Leandro Fernández de Moratin (1760-1828), dramaturge espagnol, commentateur de Molière.
Lettre 270
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Gruber, Jahrb. no 3 (1914), p. 118.
2. …pfiere dans IM1.
Lettre 271
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 64-65.
À l’origine de cette lettre se trouvait une « longue épître apostolique » d’Adam von Doss qui contenait la demande de lui
communiquer la correspondance de Schopenhauer avec Becker.
2. Les Vermischte Bemerkungen (« Remarques mêlées ») ; cf. lettre no 269.
3. August Boeckh.
4. Alexander von Humboldt (pour l’anecdote, cf. également lettre no 277).
Le 25 avril 1852, Becker rendit visite à Schopenhauer à Francfort et discuta l’affaire avec lui, pour repartir finalement avec
ses lettres et l’« épître » de Doss, prêtées par Schopenhauer.
5. Applaudissez ! (dernier mot de l’acteur dans les comédies de Plaute et Térence ; cf. Cicéron, De senect., 19 ; Horace,
Ars poet., 135 ; Suétone, Aug., 99, 1).
Lettre 272
1. IM1 Houben, 1929, p. 167.
2. À la fin du mois d’avril 1852, Sibylle Mertens-Schaaffhausen séjourna effectivement quelques jours à Francfort, mais
ses lettres n’évoquent aucune rencontre avec Schopenhauer.
Lettre 273
1. IM1 Schemann, p. 335-336.
Carl Rudolf Kosack (1823-1869), professeur de mathématiques et de physique au Lycée de Nordhausen. Il avait envoyé à
Schopenhauer ses Beiträge zu einer systematischen Entwickelung der Geometrie aus der Anschauung (« Contributions à un
développement systématique de la géométrie à partir de l’intuition »), programme du Lycée de Nordhausen, 1852 ( HN V, no
[966]). Sur Kosack, qui ne poursuivra pas ses études géométriques, cf. Jahrb. no 45 (1964), p. 160 sq.
Lettre 274
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 70-71.
2. Becker avait élaboré un nouveau schéma pour représenter le théorème de Pythagore.
3. Le traité de C. R. Kosack (cf. lettre no 273).
4. Becker accéda à cette demande : lorsque le 9 mai 1852 il envoya les lettres à von Doss, il cita littéralement les passages
concernés à partir de l’ébauche de sa lettre à Schopenhauer du 2 mai 1852, en les ajoutant à l’épître de von Doss. Cf. A.
Hübscher, Jahrb. no 21 (1934), p. 160-162.
5. M, II, chap. 19.
6. Dorguth, Becker, Frauenstädt et von Doss.
7. Dorguth et Frauenstädt.
8. Dans sa lettre du 2 mai 1852 (D XIV, no 423), Becker s’était référé à un passage de la Diatribe du Docteur Akakia de
Voltaire sur l’idéalité de l’espace : « Le candidat se trompe, quand il dit que l’étendue n’est qu’une perception de notre âme. S’il
fait jamais de bonnes études, il verra que l’étendue n’est pas comme le son et les couleurs, qui n’existent que dans nos sensations,
comme le sait tout écolier. » Becker remarqua par ailleurs que « dans la note on renvoie à la p. 15 des Lettres du natif de Saint-
Malo de Maupertuis, publiées en 1752. Par ailleurs, Maupertuis est persiflé parce qu’à la p. 147, il affirme que les perceptions du
passé, du présent et de l’avenir ne diffèrent que par le degré de l’activité de l’âme. Cela semble également faire signe vers une
doctrine pré-kantienne de l’idéalité du temps. Il vaudrait peut-être la peine de suivre cela de plus près. » Sur la question de
l’influence de Maupertuis sur Kant, soulevée ici pour la première fois par Becker, cf. Gustav Friedrich Wagner, « Zur
Entstehungsgeschichte der Kritik der reinen Vernunft », in Gründungsbuch der Neuen Deutschen Schopenhauer-Gesellschaft,
Innsbruck, 1921, p. 7-40 ; une version plus courte, intitulée « Kant und Maupertuis », se trouvait déjà dans le Jahrb. no 1 (1912).
Cf. également note 8 de la lettre no 316.
Lettre 275
1. M prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 baron Karl du Prel, Deutsche Zeitung, 19 décembre 1872, no 349.
2. Le 25 avril 1852 (cf. note 2 de la lettre no 272).
3. Proverbe allemand que Goethe aimait citer à ses proches ; par exemple sur une feuille datée « Weimar, le 9 oct. 1811 »
(collection Kippenberger) sous la forme : « Dieu fournit les noix / mais il ne les ouvre pas. »
4. L’article, rédigé par August Gabriel Kilzer, a été repris dans le Jahrb. no 21 (1934), p. 193-194. Dans sa lettre à
Frauenstädt du 10 juin (lettre no 276), Schopenhauer dit ne pas connaître le nom de l’auteur, dans sa lettre à von Doss du 22 juillet
(lettre no 278), Schopenhauer peut enfin citer l’article en question avec le nom de l’auteur.
5. P, II, chap. XV, § 177.
Lettre 276
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 537-540.
2. La recension des Parerga dans les Blätter für literarische Unterhaltung, 1852, no 9, mentionnée dans la lettre no 269.
3. La convocation de Frauenstädt pour comparaître comme témoin dans l’affaire de l’inculpation de Brockhaus à Leipzig
(cf. lettre no 269).
4. Il s’agit de la « longue épître apostolique » (cf. lettre no 271).
5. August Gabriel Kilzer (17 avril 1798 - 30 décembre 1864), domicilié à Francfort-sur-le-Main, Grüneburgweg 45,
employé de la banque J. et D. de Neufville, autodidacte. Cf. A. Hübscher, « Ein unbekannter Bericht über Schopenhauers
Krankheit und Tod », avec des extraits inédits de la correspondance entre Adam von Doss et August Kilzer, in Süddeutsche
Monatshefte, septembre 1931, p. 890-892 ; Gespräche, p. 139-142 ; Karl Jahn, August Gabriel Kilzer und Arthur Schopenhauer,
Jahrb. no 21 (1934), p. 193-200.
6. La deuxième édition de la Quadruple Racine parut seulement en décembre 1847 (Schopenhauer l’envoya à Frauenstädt
le 16 décembre et à Becker le 19 décembre). La rencontre doit donc plutôt avoir eu lieu en 1848.
7. Michael Wilhelm Kilzer (1831-1915), plus tard conseiller de justice et notaire à Francfort-sur-le-Main. Le 3 avril 1854,
Schopenhauer a laissé l’inscription suivante dans son album : « Facile somnum capies & secure dormies, si recumbens
recogitaveris, te in postetate fati esse immutabilis. »
8. Cf. l’entretien de Schopenhauer avec David Asher (Gespräche, p. 26).
9. c……., dans IM1.
10. Cf. Goethe-Schiller, Xenien, éd. de Weimar, V, 1, 232 : « Pauvre diable empirique, tu ne connais pas même ta bêtise /
Car c’est en toi que tu es si bête a priori. »
11. Dr. J. Kormann, un étudiant hongrois de Berlin. Frauenstädt avait conversé avec lui sur Schopenhauer, dans la librairie
Hirschwald à Berlin.
12. Ces deux photographies ont été réalisées le lendemain (cf. Bildnisse, nos [82] et [83]). Le daguerréotype n o [65] a été fait
le même jour, mais il n’était pas destiné à Kormann.
13. c……., dans IM1.
Lettre 277
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 541-546.
2. Vous êtes embarrassé. Cf. Cicéron, De offic., III, 33, 117 et Ad quintum fratrem, II, 8.
3. Fortlage avait reproché à Schopenhauer « le concept, quasi impossible à introduire en philosophie, d’un anéantissement
de la substance de la volonté », dans sa Genetische Geschichte der Philosophie seit Kant (« Histoire génétique de la philosophie
depuis Kant »), Leipzig, 1852, p. 408. Dans sa dernière lettre, Frauenstädt avait alors demandé à Schopenhauer de lui indiquer les
passages du Monde comme volonté et représentation susceptibles de répondre à cette attaque, lui-même ayant pensé au § 71 du
tome I où le concept du néant est défini comme étant « essentiellement relatif » et au tome II, p. 201 de la deuxième édition (M,
II, chap. 18), où Schopenhauer se demande : « Qu’est donc en soi cette volonté qui se représente dans et par le monde ? »
4. M, II, chap. 19.
5. M, II, chap. 50.
6. M, II, chap. 50, 4).
7. P, II, chap. XIV, § 161.
8. M, II, chap. 14.
9. Frauenstädt avait écrit à Schopenhauer : « Le fichtéisme de Fortlage m’a incité à reprendre vos réfutations de Fichte
dans le Monde comme volonté et représentation I, p. 36 sq. [M, I, § 7]. Mais en tombant à nouveau sur la p. 38 [M, I, § 7], où
vous dites contre Fichte que le principe de raison présuppose déjà l’objet, mais qu’il ne l’implique pas d’abord, en étant valable
avant et en dehors de l’objet, j’ai commencé à mettre en doute le fait que dans la Quadruple Racine, vous fassiez dépendre la
constitution de l’intuition de l’objet de l’application du principe de raison suffisante, et que vous déduisiez donc l’objet du sujet ;
par ex. p. 73 de la Quadruple Racine (2e éd.) [Q, § 21]. Comment pouvez-vous donc affirmer contre Fichte que le sujet
présuppose déjà l’objet ? Je ne puis lever mes doutes autrement que de la façon suivante : le sujet ne présuppose de l’objet que ce
qui fait partie de la chose en soi insondable, tout en créant d’abord lui-même la représentation de l’objet, c’est-à-dire ce par quoi
la chose en soi se phénoménalise. En voyant par ex. un arbre, le sujet présuppose déjà la chose en soi de l’arbre ; en revanche, la
représentation de l’arbre présuppose à l’inverse l’opération du sujet, le passage de l’effet dans l’œil à sa cause. »
10. M, II, chap. 1 ; M, I, § 7.
11. M, I, § 6 ; M, II, chap. 2.
12. P, I, « Fragments de l’histoire de la philosophie », § 13 ; P, I, « Sur la philosophie universitaire ».
13. c……., dans IM1.
14. P, I, « Sur la philosophie universitaire ».
15. Soldats d’élite de la légion romaine.
Il s’agit de l’article « Antipoden, oder der neueste Kampf um die letzten Grundsätze der Religion und Sittlichkeit », signé
71. L’article recense deux écrits : Die Triarier David Friedrich Strauss, Ludwig Feuerbach et Arnold Ruge, par un épigone,
Kassel, 1852, et Die Wissenschaftlichkeit der modernen speculativen Theologie (« La scientificité de la théologie spéculative
moderne »), par C. A. Thilo, Leipzig, 1851. La fin « mystérieuse » est la suivante : « Un nouveau combattant […] entre sur le
champ de la philosophie, armé de nouveaux principes et d’une nouvelle méthode qui va à l’encontre de toute la spéculation
prétendument moderne qui s’est élaborée jusqu’à maintenant ; son apparition force le côté droit et gauche, qui jusqu’à présent se
disputaient le droit et l’existence, à se rassembler d’un seul côté et leur attribue la même et unique valeur qu’ils doivent
maintenant défendre ensemble, ou perdre, contre le nouveau principe. Cette situation rend historiquement certain le fait que
l’évolution des “triaires” rejoint la vérité de la philosophie hégélienne ; mais il faut alors se demander, en dernier lieu, si cette
philosophie contient bien la vérité et le savoir. »
16. Les choses illicites.
17. Frauenstädt avait jugé préférable de ne pas diffuser un traité portant sur la critique de la théologie spéculative
commencée par Kant et achevée par Schopenhauer. Il redoutait d’une part la confiscation de ce texte, comme cela s’était produit
avec ses articles sur Feuerbach, et d’autre part, il ne voulait pas causer d’ennuis à l’éditeur ni à lui-même.
18. Frauenstädt avait fait savoir qu’il travaillait actuellement sur des « questions esthétiques » qui mettraient
particulièrement en avant la métaphysique du beau de Schopenhauer. Le livre parut chez les frères Katz, à Dessau, 1853.
19. Cf. la lettre de remerciement de Schopenhauer du 28 janvier 1849 (lettre no 217).
20. cf. lettre no 269.
21. Frauenstädt, stimulé par le programme de Kosack, avait élaboré quelques théorèmes géométriques à partir de
l’intuition, qui lui semblaient encore plus clairs que ceux de Kosack.
22. Frauenstädt s’était plaint du style confus de Dorguth.
23. Le 18 avril 1852.
24. August Boeckh (cf. lettre à Becker du 20 avril 1852, no 271).
25. Le passage se trouve dans Anselm Ritter von Feuerbach’s Leben und Wirken, aus seinen ungedruckten Briefen und
Tagebüchern, Vorträgen und Denkschriften, publié par son fils Ludwig Feuerbach, Leipzig, 1852, sous la rubrique «
Connaissances à Karlsbad et Franzbrunn en juillet 1815 » : « la conseillère à la cour Schopenhauer, une veuve fortunée. Fait de
l’érudition une profession. Écrivain. Bavarde beaucoup et bien, de façon compréhensible ; sans cœur ni âme. Suffisante, avide de
reconnaissance et se flatte toujours elle-même. Que Dieu nous garde des femmes dont l’esprit est entraîné à trop d’entendement.
Le lieu de la belle culture féminine se trouve uniquement dans le cœur de la femme. L’ingénue, sa fille : “j’ai le plus grand talent
pour la peinture florale.” Je suis complètement disgracié. »
26. Cf. lettre à Goethe du 23 juin 1815 (lettre no 42).
27. 1828 dans IM1.
28. Sibylle Mertens-Schaaffhausen.
29. Frauenstädt accrocha le daguerréotype entre les deux reliefs de Thorwaldsen, Tag und Nacht (« Jour et nuit »).
30. Goethe, Faust, I, v. 1087.
31. Frauenstädt avait soumis aux Blätter für literarische Unterhaltung une critique véhémente des Vorlesungen über den
Staat (« Conférences sur l’État ») d’Erdmann, qui avaient déjà été blâmées dans plusieurs journaux (cf. note 4 de la lettre no 310).
32. v. D. dans IM1.
33. B. dans IM1.
34. Lindner avait rendu visite à Schopenhauer au début du mois de juillet 1852 (cf. lettre à von Doss du 22 juillet 1852,
lettre no 278) en emportant avec lui l’« épître apostolique » de von Doss et les lettres de Becker s’y rapportant. Sur la visite de
Lindner, cf. Gespräche, p. 166 sq.
Lettre 278
1. M Prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 baron Karl du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 19 décembre, no 349 (avec de
nombreuses imprécisions).
2. Gwinner, 2e éd., p. 549 sq. : « Sur les murs, çà et là, étaient accrochés des portraits de Kant, Shakespeare, Descartes,
Claudius, des portraits de famille, et enfin des portraits de chiens de Woollett et Ridinger. »
3. M, II, chap. 17.
4. Eon, ère cosmique (sk.).
5. Dans une lettre du mois d’avril 1852 (D XV, p. 109).
6. P, II, chap. X, § 139.
7. M, II, chap. 22.
8. Le 28 février 1850, Adam von Doss s’était fiancé à Partenkirchen avec Anna Wepfer (1834-1913), fille du général
forestier Josef Wepfer (1778-1863) ; il en avait fait part à Schopenhauer lors de ses visites au mois de mai 1850. Le mariage ne
sera célébré que le 22 novembre 1853.
9. Cf. note 34 de la lettre no 277.
10. Lettre du 1er juillet 1852 (D XV, no 431).
11. Les quatre apôtres (Dorguth, Becker, Frauenstädt, von Doss) mentionnés par Schopenhauer dans sa lettre à Becker du 5
mai 1852 (no 274) ont donc été rejoints par trois autres (Lindner, Kilzer et Kormann).
12. Cf. note 4 de la lettre no 275.
Lettre 279
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 547-552.
2. Ces nouvelles objections portaient sur la « liberté intelligible ». Frauenstädt écrit qu’il peut très bien se représenter une
volonté qui soit libre dans le vouloir, mais non une volonté libre du vouloir. Car selon Frauenstädt, même dans son extra-
temporalité intelligible, la volonté doit répondre à une certaine constitution qui détermine son essence et ses qualités. Si dans son
extra-temporalité, la volonté est déjà volonté de vie, comment pourrait-elle jamais s’affranchir de son essence ? Aucune chose ne
peut s’affranchir de son essence, mais seulement des propriétés inessentielles qui lui sont adhérentes. Par conséquent, selon
Frauenstädt, la liberté intelligible n’aide en rien à l’affranchissement de la volonté de vie. Comme le dit Schopenhauer dans la
lettre : aut-aut ! Ou bien la volonté de vie est la chose en soi et on ne peut donc jamais s’affranchir de la volonté de vie ; ou bien
on peut s’en affranchir, et la volonté de vie ne peut donc pas être la chose en soi. Frauenstädt : « Pour contourner ces difficultés,
vous auriez mieux fait, comme Kant, de laisser la chose en soi dans l’indéterminé, en tant que X, au lieu de la déterminer comme
volonté de vie. »
3. Frauenstädt a tenté de réaliser ce projet dans son Schopenhauer-Lexikon en deux tomes, Leipzig, 1871, mais il n’en
résulta qu’un dictionnaire des concepts qui ne pouvait suffire aux exigences initiales. La rédaction d’un registre systématique a
été d’abord entreprise par W. L. Hertslet, Schopenhauer-Register, Leipzig, 1890, puis, avec une précision bien supérieure, par
Gustav Friedrich Wagner, Encyklopädisches Register zu Schopenhauer’s Werken, Karlsruhe, 1909 ; nouvelle édition par Arthur
Hübscher, Stuttgart-Bad Cannstatt, 1960, 2e éd. 1980.
4. Ce que l’on fait suit de ce que l’on est.
5. Quelque chose.
6. Vérités éternelles.
7. Ou-ou.
8. Quoi ! comment ! combien !
9. M, II, chap. 44.
Frauenstädt s’était référé au passage où Schopenhauer affirme que pour ce qui reste après la négation de la volonté de vie,
à savoir la véritable chose en soi, les concepts et même toutes données font défaut (M, II, § 44).
10. Ou Néphélococcygie (Aristophane, Les Oiseaux, v. 821) ; le mot allemand Wolkenkukuksheim est une invention de
Schopenhauer ; cf. HN I, p. 150 et M, I, § 53.
11. M, II, chap. 17.
12. « À Munich, le chien Mentor, qui a récemment sauvé la vie d’une personne se noyant dans l’Isar, et qui a été l’objet
d’un portrait par le célèbre peintre animalier Adam, reproduit ensuite par procédé lithographique, vient de succomber au maintien
sévère de la législation canine et a été tué. Son maître (le comédien Quin) a proposé en vain 100 fl. ; de plus, il s’est vu infliger
une amende de 5 fl. parce que Mentor avait été retrouvé sans laisse » (Didaskalia, 29 juillet 1852). Ce rapport devait ensuite se
révéler faux ; cf. lettre à Frauenstädt du 12 octobre 1852 (no 284).
13. Adolf Leonard Nordwall (16 mars 1824 - 31 janvier 1892), docent d’éthique à Uppsala (1852), lecteur de philosophie à
Strängnäs (1853), secrétaire d’expédition et chef de bureau au ministère de la Culture à Stockholm (1858-1865), fondateur de la
première véritable association pour la protection des animaux en Suède (1870 à Strängnäs). Cf. Rudolf Borch, « Schopenhauers
erster schwedischer Anhänger », Jahrb. no 14 (1927), p. 264-265 ; Erich Furregg, Jahrb. no 28 (1941), p. 259-261 ; Gespräche, p.
276 sq. À l’instigation de Frauenstädt, Nordwall s’était mis à étudier l’œuvre de Schopenhauer. Il rendit ensuite visite à
Frauenstädt à Berlin, et lui parla avec grand enthousiasme de Schopenhauer.
14. Paul von Krüdener (1784-1858), fils de l’écrivain piétiste Barbara Juliane von Krüdener (1764-1824). Cf. Gespräche,
p. 166.
15. Cf. Goethe, éd. de Weimar, II, 230.
16. Nordwall avait l’intention de rendre visite à Schopenhauer l’été suivant (1853), il s’inquiétait seulement de savoir si ce
dernier serait alors toujours en vie. La rencontre n’aura finalement lieu que fin juillet 1856.
17. Suite aux remarques de Schopenhauer sur Humboldt dans la lettre précédente (n o 277), Frauenstädt avait proposé
d’envoyer à ce dernier, en tant que membre de l’Académie, un exemplaire des Parerga afin d’attirer son attention sur la feuille
annexée au chapitre sur la théorie des couleurs (P, II, chap. VII), en montrant que l’Académie devait tâcher d’entreprendre une
analyse critique fondamentale et détaillée de la théorie des couleurs de Goethe. Pour justifier son idée, Frauenstädt souligna la
grande influence exercée par Humboldt.
18. Si je puis dire.
19. Cf. note 8 de la lettre no 152.
20. Kuno Fischer (23 juillet 1824 — 5 juillet 1907), professeur à Iéna (1856), à Heidelberg (1872), historien de la
philosophie moderne, adepte de Hegel puis de l’empirisme. Ouvrage principal : Geschichte der neueren Philosophie, 10 tomes
(1852-1877), dont le premier tome parut en 1852 : Descartes’ Leben, Werke und Lehre (« La vie, l’œuvre et la doctrine de
Descartes »).
Lettre 280
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 553-558.
2. Frauenstädt n’était pas satisfait des réponses que Schopenhauer avait apportées à ses objections dans la lettre précédente.
Il insista à nouveau sur l’erreur qui consistait, selon lui, à déterminer la chose en soi comme volonté, car, d’après Schopenhauer,
la volonté peut être supprimée et détruite, alors que le concept de la chose en soi impliquerait, comme caractéristique essentielle,
l’indestructibilité : « puisque par chose en soi, nous comprenons ce qui reste après la suppression de tout ce qui n’est que relatif,
éphémère, phénoménal » (Frauenstädt). C’est la raison pour laquelle Schopenhauer reproche à Frauenstädt d’avoir répété le aut-
aut de sa dernière lettre.
3. cf. lettre no 279.
4. Ou-ou.
5. Qui a créé le ciel et la terre / Au commencement, amen, amen !
6. (Dieu contempla) tout (ce qu’il avait fait), (et il vit que cela) était très bon ; cf. Gn 1, 31.
7. M, I, appendice, Critique de la philosophie kantienne.
8. P, I, « Esquisse de histoire de l’idéal et du réel ».
9. cf. lettre no 279.
10. Frauenstädt avait envoyé à Schopenhauer toutes ses objections formulées il y a cinq ans et rassemblées sous le titre «
Anti-Schopenhauer ».
11. Frauenstädt avait signalé à Schopenhauer un article de Friedrich Harms, « Problem der Philosophie », paru dans le
cahier d’août 1852 de la Monatschrift de Schwetschke.
12. Il s’agit de la recension par Reichlin-Meldegg du livre de J. W. Haddock, parue dans les Heidelberger Jahrbücher :
Somnambulismus und Psycheismus oder die Erscheinungen und Gesetze des Lebens-Magnetismus oder Mesmerismus. Nach
eignen Beobachtungen und Versuchen (« Somnambulisme et psychéisme ou les apparitions et les lois du magnétisme vital ou
mesmérisme. D’après des observations et des expérimentations personnelles »), présenté par C. L. Merkel d’après la 2 e éd. du
texte original anglais, Leipzig, 1852.
13. Cf. note 8 de la lettre no 257.
14. Malgré le refus de Schopenhauer, Frauenstädt était revenu à Humboldt : il insista sur le fait que Humboldt était
président de la commission pour l’ordre du mérite (classe civile), institué pour récompenser les services extraordinaires effectués
dans les arts et les sciences, et qu’il avait entendu dire qu’une place était justement vacante. Frauenstädt voulait qu’on l’attribue à
Schopenhauer, et ajouta que si cela dépendait de lui, Schopenhauer en aurait déjà bénéficié. À ce propos, Frauenstädt se référa
aux Parerga (P, I, « Aphorismes sur la sagesse dans la vie », IV), où on pouvait lire que Schopenhauer ne méprisait nullement les
ordres
15. Guillaume (1797-1888), deuxième fils de Frédéric-Guillaume III, prince de Prusse en 1840, réprima l’insurrection de
Bade et de la Pfalz (1849), empereur allemand (1871).
Lettre 281
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 559-560.
2. Retour à la raison.
3. Vouloir, ne pas vouloir.
4. « Car les trajets du jour et de la nuit sont proches » (Homère, Odyssée, 10, 86).
5. Il s’agit des sept daguerréotypes du 17 août 1852 (Portraits, nos [66]-[72]). C’est de cette série que provient donc le
portrait offert à Becker (no [67]) ; Schopenhauer a offert les autres à Dorguth (n o [68]), Lindner (no [69]) et plus tard à Élisabeth
Ney (no [70] et [71]). Le premier portrait de la série (n o [66]) est resté en possession de Schopenhauer (aujourd’hui Archives
Schopenhauer), le propriétaire du dernier (no [72]) n’a pu être déterminé.
6. Recension du programme de Kosack sous le titre « Eine beachtenswerthe Erscheinung in der Mathematik », Blätter für
literarische Unterhaltung, no 35 (28 août 1852). Frauenstädt avait probablement envoyé à Schopenhauer un tiré à part de son
article avant la parution.
Lettre 282
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 560-563.
2. Cf. note 6 de la lettre no 281.
3. Il s’agit de l’« Anti-Schopenhauer » de Frauenstädt ; cf. note 10 de la lettre no 280.
4. Sous la main.
5. Vouloir, ne pas vouloir.
6. Rudolph Wagner (1805-1864), physiologue et anthropologue, professeur à Erlangen (1833), à Göttingen (1840), célèbre
pour son intervention dans la controverse autour du matérialisme ; cf. la conférence Menschenschöpfung und Seelensubstanz («
Création humaine et substance de l’âme ») attaquée par Carl Vogt lors de la 31 e réunion allemande des médecins et des
chercheurs en sciences de la nature, 18 septembre 1854, Göttingen ; directeur du Handwörterbuch der Physiologie (« Lexique de
physiologie »).
7. E, III, § 19.
8. Frauenstädt avait indiqué à Schopenhauer le célèbre article de Weber, publié dans le troisième tome du Handwörterbuch
der Physiologie de Rudolph Wagner : Der Tastsinn und das Gemeingefühl (« Le sens du toucher et le sentiment commun »),
point de départ de la psycho-physique moderne. Dans cet article, Ernst Heinrich Weber (1795-1878) essayait de prouver que
l’homme distingue les sensations non pas selon la différence absolue des stimuli, mais selon leur différence relative : les stimuli
du monde extérieur ne sont donc pas perçus dans leur valeur absolue, mais ils sont évalués par l’entendement par liaison et
comparaison. Frauenstädt croyait y déceler une confirmation de la doctrine de Schopenhauer selon laquelle l’entendement « doit
d’abord produire le monde objectif ; ce dernier, loin d’être préexistant, ne peut simplement accéder à la tête par les sens et
l’ouverture des organes », avec référence à Q, § 21.
9. En chair et en sang. Cf. Cicéron, Ad Atticum, IV, 18, 2.
10. Microcosme et macrocosme.
11. Friedrich von Raumer (1781-1873), historien, professeur à Breslau et Berlin (1811), connu par son Geschichte der
Hohenstaufen (« Histoire des Hohenstaufen »), 6 tomes, 1823-1825 ; fondateur et éditeur du Historisches Taschenbuch («
Manuel d’histoire »), 1830-1869. Il a dû rencontrer Schopenhauer alors qu’il était député du Parlement allemand à Francfort, en
1848 ou 1849 (Raumer arriva à Francfort en mai 1848 et y séjourna jusqu’en mai 1849, avec une interruption d’août à décembre
1848).
12. Il s’agit sans doute du neveu de Noack, mentionné dans la lettre du 30 mars 1853 (no 293).
13. Mt 18, 20.
14. Dorguth.
15. L’un des sept daguerréotypes du 17 août 1852 (Bildnisse, no [68]).
Lettre 283
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Schemann, p. 545-546.
2. Il s’agit probablement de Shelley, Essays, Londres, 1840 (HN V, [1725]). Les autres titres ne figurent pas dans la
bibliothèque de Schopenhauer.
Lettre 284
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 563-568.
2. Frauenstädt s’était plaint d’une forte rage de dents.
3. C’est prouvé.
4. Frauenstädt avait écrit que la rédaction des Blätter für literarische Unterhaltung l’avait chargé de discuter le livre
Kreislauf des Lebens (« Circulation de la vie ») de Moleschott, et qu’à cette occasion il avait l’intention de traiter le point
controversé de la force vitale.
5. Johannes Evangelista Purkinje (1787-1869), professeur de physiologie (1834), cofondateur de la psycho-physique.
6. V……., dans IM1.
7. Marie François Xavier Bichat (11 novembre 1771 - 22 juillet 1802), astronome et physiologue, auteur des Recherches
physiologiques sur la vie et la mort, 1800, 3e éd. 1805 (HN V [774]). La « convergence » réside dans l’opposition faite par Bichat
entre la vie organique et la vie animale, laquelle correspondrait à l’opposition schopenhauérienne entre la volonté et l’intellect
(cf. M, II, chap. 20).
8. Cf. note 4 de la lettre no 238.
9. François Magendie (1783-1855), professeur au Collège de France (à partir de 1830), cofondateur de la physiologie
moderne basée sur l’expérience et l’observation.
10. Marie Jean Pierre Flourens (13 avril 1794 - 5 décembre 1867), physiologue. Sa découverte du grand et du petit cerveau
amena Schopenhauer, en 1822, à reprendre ses études de physiologie. Mais lorsque Flourens critiqua Bichat dans son ouvrage De
la vie et de l’intelligence, Schopenhauer prit position pour Bichat (cf. M, II, chap. 20).
11. Charles Bell (1778-1842), médecin écossais, neurologue, professeur à Édimbourg.
12. Marshall Hall (1790-1857), médecin anglais et neurologue.
13. Cf. note 8 de la lettre no 254.
14. c……, dans IM1.
15. M, II, chap. 26.
16. Cf. note 17 de la lettre no 257.
17. Celui qui a crée le ciel et la terre.
18. Le très saint office de l’Inquisition.
19. cf. lettre no 282.
20. Cf. Goethe, Faust I, v. 2678-2679.
Lettre 285
1. IM1 Houben, 1929, p. 170 sq.
2. Il s’agit de la lettre de Friedrichsen adressée à Schopenhauer, contenant le formulaire pour la procuration du bail
emphytéotique de Dietrich (cf. lettre no 296).
3. Dans cet état des choses.
Lettre 286
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Gruber, Jahrb. no 3 (1914), p. 118-120 (imprécis). La
signature coupée par la fille de Dorguth a été retrouvée plus tard, d’abord dans D XV.
2. Joie.
3. Cf. lettre à Frauenstädt du 10 juin 1852, no 276. Schopenhauer n’a donc pas répondu tout de suite à la lettre de Dorguth.
4. D’une famille honorable.
Lettre 287
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 568-572.
2. La Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik de Fichte, tome 21, 2, Schopenhauer und Herbart, eine
Antithese, par J. E. Erdmann (p. 209-226) et l’annexe par I. H. Fichte (p. 226-241).
3. c…… !, dans IM1.
4. Grande est la force de la vérité et elle vaincra ; cf. 3 Esdr 4, 41. Schopenhauer a placé cette sentence en exergue de son
Éthique.
5. ……., dans IM1 (cf. HN V, no [182]).
6. Cf. Goethe, éd. de Weimar, II, 208.
7. Dans son hebdomadaire Unterhaltungen am häuslichen Heerd, I, no 5, p. 80 (novembre 1852), Karl Gutzkow avait
publié un petit article, « Ein Selbstdenker », où il s’était référé aux Parerga comme à une « mine de pensées stimulantes », ainsi
qu’il le dira plus tard : cf. Karl Gutzkow, Rückblicke auf mein Leben (« Regards rétrospectifs sur ma vie »). L’article a été ensuite
repris dans un recueil de Gutzkow, Die kleine Narrenwelt (« Le petit monde des fous »), tome 3 (1857), sous le titre « Arthur
Schopenhauer ». Réimpression chez H. H. Houben, « Der Fall Gutzkow / Schopenhauer », Süddeutsche Monatshefte, avril 1930,
p. 468-469.
8. Probablement le 24 octobre 1852 (cf. Gespräche, p. 131).
9. L……, dans IM1.
Lettre 288
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 572-574.
2. Il s’agit de l’article rédigé en réponse au Kreislauf des Lebens de Moleschott : « Streit der chemisch-physikalischen und
der teleologischen Schule », Blätter für literarische Unterhaltung, 1853, no 2 ; repris dans les Briefe über die Schopenhauersche
Philosophie, Leipzig, 1854, p. 178 sq.
3. Démocrite ressuscité.
4. Gerardus Johannes Mulder (27 décembre 1802 - 18 avril 1880), chimiste hollandais, professeur de chimie à Utrecht
(1840-1868), auteur de Versuch einer allgemeinen physiologischen Chemie (« Essai pour établir une chimie physiologique
générale »), trad. all. 1844-1851.
5. Jöns Jakob comte de Berzelius (29 août 1779 - 7 août 1848), professeur de chimie à Stockholm (1815), a découvert de
nombreux éléments nouveaux, a démontré la loi des proportions chimiques, a déterminé le poids atomique de nombreux
éléments.
6. P, II, chap. VI, § 91.
7. Moriz Carrière (5 mars 1817 - 19 janvier 1895), enseignant de philosophie à Giessen, professeur en 1849, à Munich à
partir de 1853, disciple de l’école hégélienne, auteur d’une Ästhetik, 2 tomes, 1859 ; la source de ses « sornettes » n’a pu être
établie.
Lettre 289
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 574-580.
2. Julius Frauenstädt, Ästhetische Fragen (« Questions esthétiques »), Dessau, 1853.
3. Schopenhauer détourne les paroles du feu follet dans Faust I, v. 3860-3861 : « Par crainte respectueuse, j’espère réussir /
à forcer ma nature légère. »
4. L’article III traite des « genres de plaisir et leur différence spécifique » et commence comme suit : « Tout plaisir
provient de la satisfaction d’un besoin intérieur, et ne présuppose donc pas seulement un objet qui plaît, mais également un désir,
un besoin, un appetitus qui s’y plaît. Car un simple objet, sans sujet qui désire, est aussi peu apte à susciter du plaisir qu’un
simple sujet, qui ne pourrait éprouver du plaisir sans être affecté par un objet. Pour distinguer les différents genres de plaisir
selon leur essence, nous devons donc considérer les différents genres de désir qui en sont le fondement. » Frauenstädt distingue
ensuite entre deux genres de désir fondamentalement différents : un désir particulier et un désir universel, et cherche à démontrer
que le plaisir de l’agréable et de l’utile est fondé par le premier genre, le plaisir du Vrai, du Bien et du Beau par le second.
5. La p. 50 traite des degrés ascendants de la beauté dans les Idées ou les espèces : la manifestation parfaite du type humain
fait preuve d’une plus grande beauté que la manifestation parfaite du type animal ; de façon analogue, Frauenstädt considère
alors, à l’intérieur de l’espèce humaine, que la manifestation d’une femme parfaite est plus belle que celle d’un homme parfait.
6. Quoi ! comment ! combien !
7. Sexe faible.
8. Voici le passage en question : « La manifestation parfaite d’une Idée laide ne peut prétendre à la beauté. Certes,
Schopenhauer, en vue de justifier sa thèse selon laquelle chaque chose naturelle est belle, et donc également chaque animal,
affirme que si cela ne nous convainc pas pour certains animaux, c’est que nous ne sommes pas capables de les considérer de
façon purement objective et donc de saisir leur Idée, et que nous en sommes empêchés par une quelconque et inévitable
association de pensée, la plupart du temps à la suite d’une ressemblance qui s’impose à nous, par ex. celle du singe et de
l’homme. Nous ne pouvons donc pas saisir l’Idée de cet animal, mais seulement y voir la caricature d’un homme, et c’est ainsi
qu’en regardant un crapaud, nous sommes affectés par sa ressemblance avec les excréments et la boue ( Parerga, II, § 212).
Cependant, il admet lui-même que cette explication est insuffisante. » Frauenstädt appuie cette dernière affirmation sur les propos
de Schopenhauer qui suivent le passage précédent : « Cependant cela ne suffit quand même pas à expliquer la répulsion illimitée,
voire la terreur et l’horreur qui s’emparent de certaines personnes à la vue de ces animaux, comme pour d’autres quand ils
aperçoivent une araignée : cela semble bien plutôt s’enraciner dans un rapport profond autrement plus métaphysique et
énigmatique. »
9. L’article IX, « Le héros tragique et le destin tragique », défendait les conceptions de la tragédie d’Aristote et de Lessing
en fondant ces dernières sur la conception esthétique fondamentale de Schopenhauer d’un « pur sujet de la connaissance ».
10. Je connais ce qu’il y a de meilleur et je le loue, (mais) je m’attache au pire. Cf. Ovide, Métamorphoses, VII, 20.
11. Schiller, Shakespeares Schatten, dernier vers.
12. Cette page sera insérée avec quelques modifications dans la troisième édition de l’ouvrage principal de Schopenhauer
(M, I, § 51).
13. Sur le rapport entre Schopenhauer et Solger, cf. Eduard von Hartmann, Die deutsche Ästhetik seit Kant, tome 1, p. 53.
14. La salle de lecture de la Bibliothèque royale à Berlin ; cf. lettre no 252.
15. cf. lettre no 287.
16. Carl von Prantl (1820-1888), professeur à Munich. Ouvrage principal : Geschichte der Logik im Abendlande («
Histoire de la logique en Occident »), 4 tomes, 1855-1870.
17. Les lettres de Dorguth étaient aussi confuses que ses écrits.
Lettre 290
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 450-451.
2. Ludwig Noack (1819-1885), théologien et philosophe, auteur de Geschichte der Philosophie in gedrängter Übersicht («
Précis de l’histoire de la philosophie »), Weimar, 1853, qui contenait en une page « l’exposition complète » du système de
Schopenhauer (cf. également lettres nos 293, 294 et 305). Concernant le livre ici évoqué, Die Theologie als Religionsphilosophie
in ihrem wissenschaftlichen Organismus dargestellt (« La théologie comme philosophie de la religion exposée dans son
organisation scientifique »), Lübeck, 1853, on trouve un jugement semblable dans les manuscrits posthumes de Schopenhauer,
Senilia, p. 17 (HN IV, p. 2, 7) ; sur la Propädeutik der Philosophie, Einleitung in die Philosophie und Encyclopädie der
philosophischen Wissenschaften (« Propédeutique de la philosophie, introduction à la philosophie et encyclopédie des sciences
philosophiques »), Weimar, 1854, cf. lettre no 341.
Lettre 291
1. IM1 Schemann, p. 546.
Lettre 292
1. IM1 Gruber, 1913, p. 13-14 (imprécis).
2. Il s’agit probablement du quatrième daguerréotype de la série d’août 1852 (Bildnisse, no [69]).
3. Le testament de Schopenhauer du 26 juin 1852 indique sous « VII » le legs de six daguerréotypes avec l’inscription F. S.
B. (Frankfurter Stadtbibliothek) ; cf. Bildnisse, nos [59], [60], [61], [65], [66] et [73], auxquels s’ajouta plus tard le portrait no [74].
4. La recension de Lindner des Ästhetische Fragen de Frauenstädt, dans la Vossische Zeitung.
5. Il s’agit de deux annonces curieuses, d’un style allégorique et anecdotique, rédigées par Lowtzow dans la Vossische
Zeitung, et que Lindner avait ajoutées à sa lettre du 16 mars 1853.
6. Élan philosophique.
Lettre 293
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 582-584.
2. Il s’agit probablement de l’étudiant de Giessen déjà évoqué dans la lettre no 282.
3. Cf. note 2 de la lettre no 290.
4. Allusion à Goethe : « Ces mots n’ont pas tous poussé en Saxe, / Ni sur mon propre fumier ; / Mais ce que l’étranger
apporte comme graines, / Je l’ai cultivé et bien engraissé au pays » (Gedichte, Sprichwörtlich).
5. Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik de Fichte, tome 21, cahier 2 ; cf. note 2 de la lettre no 287.
6. I. H. Fichte, « Daumer und Feuerbach », in Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik, tome 22, p. 159-180 ;
le passage en question est le suivant : « Après quelques odyssées spéculatives qui l’ont amené chez Hegel, Frauenstädt a échoué
depuis quelques années auprès de la philosophie de Schopenhauer. Va-t-il changer à nouveau de camp, s’installer chez Feuerbach
? Nous ne le pensons pas, aussi curieux que puisse paraître l’agglutinement de deux choses aussi hétérogènes que le système
conséquent de Schopenhauer et l’agrégat de pensées de Feuerbach. Car quels que soient les reproches qu’on puisse adresser à la
doctrine de Schopenhauer, celle-ci est le fruit d’une profonde et véritable spéculation, si l’on en juge d’un point de vue éthique,
même si elle est sombre et hypocondriaque, tout en produisant un effet très énergique et spirituel qu’on ne peut lui refuser un
certain respect […] Mais en même temps, sa philosophie est le résultat d’une manière de penser déviante, et la simplicité et la
monotonie intérieure de son principe ne permettent pas d’espace de jeu pour d’autres développements, ni pour une activité
autonome, de sorte que pour être le disciple de Schopenhauer, il faudrait devenir entièrement son alter ego. »
7. Que Dieu m’en préserve.
8. Wolfgang Menzel (1798-1873), historien de la littérature, éditeur du Literaturblatt, supplément au Morgenblatt de Cotta
(1825-1848) et ensuite d’un Literaturblatt indépendant (1852-1869).
9. Dans ses lettres à Frauenstädt, Dorguth avait critiqué l’idéalisme de Schopenhauer. Dans l’une de ses lettres, que
Frauenstädt avait communiquée à Schopenhauer, il écrit : « Schopenhauer se verrait forcé de nier son propre corps (et il me
semble qu’il doit même le construire au moins une fois avec son appareil subjectif constitué par le temps, l’espace et la causalité),
qui pourtant lui rend sensible le monde extérieur de façon très directe, sans devoir mettre en marche un quelconque appareil,
lorsque par ex. il trébuche et effectue une chute violente. »
10. Les Ästhetische Fragen (« Questions esthétiques ») de Frauenstädt.
Lettre 294
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 102-104 (imprécis).
2. Il s’agit sans doute des vers suivants de Goethe : « Le monde n’est pas fait de bouillie ni de purée, / Ne vous comportez
donc pas en habitants de Cocagne : / Il vous faudra avaler de gros morceaux, / Pour vous étouffer ou pour les digérer. » Ces vers
sont donnés en exergue d’une annonce de Lowtzow, « In’s Schlaraffenland (2) », in Vossische Zeitung, 12 avril 1853, deuxième
supplément, p. 3. Avant le jour de parution, Lindner a probablement reçu la feuille de correction et l’a ajoutée à sa lettre à
Schopenhauer du 11 avril, dans laquelle il lui donnait des nouvelles de Lowtzow.
3. Cette maxime est placée en exergue de l’annonce de Lowtzow, « In’s Schlaraffenland », in Vossische Zeitung, 9 avril
1853, deuxième supplément, p. 2 sq. : A bon entendore paucas palavras. Cela permet de fixer l’année de la rencontre entre
Lowtzow et Schopenhauer vers 1825, époque à laquelle Schopenhauer commença à apprendre l’espagnol.
4. cf. lettre no 293.
5. C’est la première fois que Schopenhauer évoque ce phénomène. Dans le sillage du mouvement spiritiste en Amérique
qui avait commencé dès 1848, l’engouement pour le phénomène des tables tournantes toucha également l’Europe ; en 1851
paraissait à Paris la revue La Table parlante. Schopenhauer était friand de ce genre de phénomènes et assista également à des
séances spiritistes.
6. P, I, « Essai sur les fantômes et ce qui s’y rattache », in fine.
Lettre 295
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 104-106 (imprécis, avec des omissions).
2. L’article de Lindner sur les tables tournantes, « Eine Lösung », in Vossische Zeitung, 23 avril 1853, où il écrit : « Celui
qui, par ces lignes, se verra encouragé non pas à lire Schopenhauer pour les tables tournantes, mais à l’étudier plus généralement
pour ses doctrines fondamentales, en tirera le plus grand profit. »
3. Des gymnotes électriques et des raies.
4. « Iconoclasm in German Philosophy », in Westminster Review, New Series III, 1853, réimpression avec la traduction de
Lindner : Jahrb. no 12 (1923-25), p. 116-165. Schopenhauer apprendra plus tard que l’auteur était John Oxenford.
5. Domenico Artaria, librairie d’art à Mannheim.
Lettre 296
1. H Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 D XV, no 461. C Archives Schopenhauer. IC1 Houben, 1929,
p. 172-173 (imprécis, avec de nombreuses fautes de lecture).
2. En octobre 1852, Sibylle Mertens s’était rendue en Italie, en passant par Weimar, séjournant à Rome dans la villa
Caserta de début décembre à juin 1853. Ce voyage interrompit la correspondance avec Schopenhauer. Une de ses lettres écrite le
23 avril 1853 n’avait pas atteint Schopenhauer.
3. Plus précisément le 10 septembre 1852. La lettre n’est pas conservée ; cf. à ce sujet la lettre de rappel de Schopenhauer
du 15 octobre 1852 (lettre no 285).
Lettre 297
1. IM1 Gruber, 1913, 27-29 (imprécis).
2. Cette supposition est fausse ; l’auteur était John Oxenford (cf. lettre no 295).
3. Le 30 avril 1853, Lindner avait écrit à Schopenhauer : « Dans la Königsb. Hart. Zeitung, le célèbre Kossak,
feuilletoniste redouté, évoque parfois mon article [“Eine Lösung”] en parlant d’une “citation du défunt Schopenhauer” ! » Ernst
Ludwig Kossak (4 août 1814 - 3 janvier 1880), théoricien de la musique et critique, collaborateur de la Neue Berliner
Musikzeitung, fondateur et rédacteur du Berliner Musik-Zeitung Echo, éditeur de la Zeitungshalle depuis 1847 (par la suite
Berliner Feuerspritze, puis Berliner Monatspost) ; après la disparition de ce journal, il reprend son activité de feuilletoniste et de
critique. Dans le Berliner Musik-Zeitung Echo du 7 mai 1854, il avait publié un article, « Gedankenspäne zur neueren
musikalischen Literatur », où il attaquait Wagner avec des expressions schopenhauériennes. Cf. Constantin Grossmann, Die
Kossaksche Rezension, Jahrb. no 10 (1921), p. 68-78.
4. Goethe, « Der Zauberlehrling », Balladen.
5. Carl Ernst John (décédé le 27 janvier 1856), camarade d’école de Schopenhauer (à Gotha), camarade d’études de Rücker
(à Iéna), secrétaire de Goethe (1819-1829), est devenu célèbre à Berlin comme conseiller secret à la Cour royale de Prusse,
censeur et rédacteur de la Preussische Staatszeitung. Il doit sans doute sa mauvaise réputation de « boucher de la pensée » à
Varnhagen, qui dans son journal intime, en date du 21 et 22 janvier 1837, rapportait les pires atrocités à son sujet et au sujet de la
censure qu’il incarnait. L’été 1850, il rendit visite à Schopenhauer qui, à cette occasion, le chargea de faire les démarches
nécessaires pour établir un testament en faveur des soldats prussiens tombés en 1848 et 1849. Dans un courrier du 5 mai 1853 (D
XIV, no 460), il envoya à Schopenhauer l’article de Lindner sur les tables tournantes, en supposant que l’auteur était Otto
Friedrich Gruppe.
Lettre 298
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 108 (avec des omissions).
Lettre 299
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 108-110.
2. Bildnisse, no [75], sans doute du 4 juin 1853.
3. Vingt-cinq tirés à part de sa traduction de l’article de la Westminster Review, parue dans huit numéros consécutifs de la
Vossische Zeitung, sous le titre Deutsche Philosophie im Auslande (« La philosophie allemande à l’étranger »).
4. C. Albertine Lindner, auteur de la traduction.
5. Heinrich Ritter.
6. Le titre exact est Versuch zur Verständigung über die neueste deutsche Philosophie seit Kant, in Allgemeine
Monatsschrift für Wissenschaft und Literatur, 1853.
7. Les notes marginales et les corrections stylistiques de l’exemplaire renvoyé à Lindner sont reproduites dans D XVI, p.
413-424. Lindner a pris en compte ces modifications lors de la réimpression de l’article en annexe des Briefe über die
Schopenhauersche Philosophie (« Lettres sur la philosophie schopenhauérienne ») de Frauenstädt, Leipzig, 1854, repris dans le
Jahrb. no 12 (1923-1925), p. 135-165.
8. Cet épilogue se trouve dans la réimpression de la traduction, Jahrb. no 12 (1923-1925), p. 164-165.
9. Kilzer et son fils (cf. lettre no 300), un destinataire inconnu (cf. lettre no 301), probablement Emden, J. A. Becker (cf.
lettre no 302), Dorguth (cf. lettre no 303) et von Doss (cf. lettre de remerciement, D XV, no 474). Après cette distribution, il restait
toujours la moitié des vingt-cinq exemplaires.
10. Lindner avait signalé à Schopenhauer la parution d’un nouveau livre sur l’optique de Heinrich Wilhelm Dove,
Darstellung der Farbenlehre und optische Studien (« Présentation de la théorie des couleurs et études optiques »), Berlin, 1853.
Cf. la référence ultérieure de Schopenhauer à ce livre dans C, § 10.
11. Hermann Ludwig Helmholtz (1821-1894), le célèbre physicien et physiologue.
Lettre 300
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. Daté d’après la note de Kilzer. IM1 D XV, p. 424. Accompagnant l’envoi du tiré à
part de Deutsche Philosophie im Auslande.
Lettre 301
1. M Archives Schopenhauer (collectin Gruber), brûlé. IM1 D XV, no 466. Accompagnant l’envoi du tiré à part de
Deutsche Philosophie im Auslande.
Lettre 302
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 77-78 (imprécis).
2. Bon gré, mal gré.
Lettre 303
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 111-112.
2. Il s’agit de la recension des Parerga, in Westminster and foreign quarterly Review, 1er avril 1852, p. 677-680.
3. Que diable peut bien signifier ce non-sens ?
Lettre 304
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 112-114 (incomplet). IM2 Gruber : Briefwechsel Schopenhauer-Lindner (complet, mais
imprécis).
2. Docteur angélique, très subtil, irréfragable, très résolu.
3. L’article ne sera finalement pas ajouté à la traduction d’« Iconoclasm… »
4. George Henry Lewes, auteur de The Life and Works of Goethe, Londres, 1855.
5. Un parmi d’autres.
6. Bon gré, mal gré.
7. D’août 1831 (départ de Schopenhauer pour Berlin) jusqu’à l’envoi des bagages restants par Lowtzow (le 26 juillet
1832).
8. Le souhait est père de la pensée. Cf. Shakespeare, Henri IV, 4, 4.
9. Goethe, Gesellige Lieder, « Rechenschaft » : « … Et je sentis en moi le bonhomme. Je me souvins de mon devoir. Et je
frappai au long Jeannot / Tout de suite la balafre dans la face. »
10. On se demande.
11. Plaisanteries dangereuses.
12. Derrière la croix est le diable.
Lettre 305
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 81.
2. Avec des notes variées.
Lettre 306
1. M Prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 baron Karl du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 29 décembre 1872, no 358.
2. Photographie du mois de juillet 1850 (Bildnisse, no [80]).
3. Dans sa lettre de remerciements relative à l’envoi de l’article de la Westminster Review, Doss avait comparé les
professeurs d’université avec les fils de Jacob qui, pensant avoir écarté leur frère Joseph, furent surpris par son retour glorieux
(lettre du 25 juillet 1853, D XV, no 474).
4. Celui qui n’a pas de mépris n’a pas d’esprit.
5. « Tischrücken in höchster Potenz », article publié dans le Magazin für Literatur des Auslandes, 4 août 1853, no 93,
portant sur des expériences menées en Russie.
6. Michael Faraday (22 septembre 1791 - 25 août 1867), fondateur de la théorie moderne de l’électricité, et Alexander von
Humboldt tentèrent de ramener le phénomène des tables tournantes à des causes mécaniques.
7. L’article d’Erdmann et l’annexe d’I. H. Fichte (cf. note 2 de la lettre no 287).
8. Cf. la critique de Schopenhauer dans la lettre no 293.
9. En réalité le no 5 (cf. note 7 de la lettre no 287).
10. Lettre du 8 août 1853 (cf. lettre no 307).
Lettre 307
1. IM1 A. Hübscher, Jahrb. no 44 (1963), p. 23 sq.
Le Dr. Battel n’apparaît ni dans le Livre d’adresses de Hambourg, ni dans le Livre des citoyens (Archives nationales) ; il
semble donc qu’il était seulement de passage à Hambourg. Son exemplaire de la Volonté dans la nature (1836), qui a été trouvé
dans la collection Gruber, aujourd’hui détruite, portait le nom du propriétaire et la date d’acquisition : Paul Battel 1853. L’on ne
connaît aucune publication du Dr. Battel : il ne semble pas avoir réalisé son projet de devenir « évangéliste ».
Lettre 308
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 585-586.
2. Il s’agit de l’article dans la Westminster Review.
3. Recension parue dans les Blätter für literarische Unterhaltung, 1853, 28 (9 juillet), p. 660-663.
4. c……. dans IM1.
5. Heinrich Ritter, Versuch zur Verständigung über die neueste deutsche Philosophie seit Kant (« Essai pour faire
comprendre la philosophie allemande la plus récente depuis Kant »), in Allgemeine Monatsschrift für Wissenschaft und Literatur,
Braunschweig, 1853 ; cf. note 6 de la lettre no 299.
6. g….. dans IM1.
7. Conrad Schwenk (1793-1864), depuis 1823 à Francfort, depuis 1825 au lycée, pro-recteur en 1829, co-recteur en 1839.
Le livre d’adresses des années 1850 indique : Joh. Conrad Schwenck, co-recteur, Mainzer Chaussee 219. Cf. Emil Neubürger,
Aus der alten Reichsstadt Frankfurt (« De la vieille ville impériale Francfort »), Francfort-sur-le-Main, 1889, p. 113 sq.
8. Professeur Dr. phil. Georg Julius Ludwig Conrad Rödiger (1798-1866), habita en 1853 au 9 de la Taunusstrasse, décédé
le 14 janvier 1866 dans la Mainzer Landstr. 41, alors qu’il était pro-recteur de lycée à la retraite.
9. cf. lettre no 306.
10. Il s’agit de la recension par Frauenstädt des Kleine Schriften in Beziehung auf die Einheitslehre als Grundwissenschaft
(« Petits écrits relatifs à la doctrine de l’unité en tant que science fondamentale ») de F. L. Fülleborn, cahier 1, Marienwerder,
1853, in Blätter für literarische Unterhaltung, 1853, no 31 (30 juillet), p. 739-740.
Lettre 309
1. M Prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 Baron Karl du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 29 décembre 1872, no 358. La
lettre est la réponse à un rapport détaillé de von Doss sur les expériences réussies avec les tables tournantes, dans le cercle de sa
famille et de ses amis.
2. Expérience cruciale.
3. « C’est pourquoi vivez en courageux / et opposez une poitrine courageuse aux coups du destin » (Horace, Serm., II, 2,
135-136).
4. Henry Spicer, Sight and Sounds, Londres, 1853 (HN V no [1068]). Schopenhauer ne possédait pas la traduction de
Rechenberg (HN V no [1050]).
5. Données.
6. Sur le Dr. Kriegskotte, cf. lettre no 311 et Gespräche, p. 178.
7. Ne meurs pas, beau cheval, parce que la nourriture doit croître.
8. K. L. E. Kossak dans la Königsberger Hartungschen Zeitung et un critique dans un article sur les Ästhetische Fragen de
Frauenstädt dans le Repertorium de Leipzig ; cf. également la lettre no 297.
Lettre 310
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 587-588.
2. Julius Frauenstädt, Briefe über die Schopenhauer’sche Philosophie (« Lettres sur la philosophie schopenhauérienne »),
Brockhaus, Leipzig, 1854.
3. Carl Leonard Reinhold, Briefe über die kantische Philosophie (« Lettres sur la philosophie kantienne »), tomes 1 et 2,
Leipzig, 1790. Déjà auparavant Schopenhauer avait comparé le rapport Reinhold / Kant à son rapport avec Frauenstädt (cf.
Gespräche, p. 116).
4. Cette recension se trouve dans les Blätter für litterarische Unterhaltung, no 35. L’auteur était bien Frauenstädt (cf. lettre
no 277).
5. Cajus, pseudonyme de F. H. Th. Allihn, Antibarbarus logicus, deuxième édition revue et fortement augmentée, Halle,
1853.
Lettre 311
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 588-590.
2. Les Lettres sur la philosophie schopenhauérienne.
3. Frauenstädt reçut 2 Louis d’or par feuille d’impression, pour un tirage de 1 000 exemplaires (1 Louis d’or à la parution,
1 Louis d’or après la vente de 750 exemplaires).
4. Recension des Vorlesungen über den Staat (« Leçons sur l’État ») d’Erdmann ; cf. note 4 de la lettre no 310.
5. Shakespeare, Hamlet, I, 5.
6. Jules de Sennevoy, baron Dupotet (1796-1881), magnétiseur parisien, auteur de plusieurs écrits sur le magnétisme
animal dont Cours de magnétisme, Paris, 1831, et Traité complet de magnétisme animal, Paris, 1856. Cf. les commentaires de
Schopenhauer relatifs aux expériences de Dupotet dans N, « Magnétisme animal et magie » et P, I, « Essai sur les fantômes ».
7. Sous le titre Ueber Erscheinungen des Magnetismus, le Konversationsblatt de la Frankfurter Postzeitung avait publié,
dans six numéros consécutifs (7, 8, 9, 10, 12 et 13 septembre 1853), des extraits d’un ouvrage d’E. Merck, Reiseerinnerungen
aus London und Paris (« Souvenirs de voyage de Londres et Paris »), Hambourg, 1852, qui concernaient les expériences du
baron Dupotet.
8. Carl Scholl, Erster Blick in die Wunderwelt des Magnetismus. Mittheilungen aus Paris (« Premier regards jetés dans le
monde miraculeux du magnétisme. Communications de Paris »), Hambourg, 1853. Cf. également N, « Magnétisme animal et
magie ».
9. Dr. K………. dans IM1.
10. ……….. dans IM1.
Lettre 312
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 590-593.
2. Frauenstädt avait envoyé à Schopenhauer un tiré à part de ses Lettres sur la philosophie schopenhauérienne qui
précédaient l’article de la Westminster Review ; repris dans le Jahrb. no 12 (1923-1925), p. 135-165.
3. « Noch etwas über das Tischrücken », in Magazin für Literatur des Auslandes, 29 septembre 1853, n o 117, sur les
expériences du comte Agénor de Gasparin.
4. « Si je m’étais tu, je serais resté philosophe » (Boèce, Consol. philos., II, 7).
5. Nous, pas pour nous.
6. Frauenstädt avait écrit à Schopenhauer que ceux qui désiraient connaître son apparence (par exemple le Dr. Kriegskotte
évoqué dans la lettre no 311) trouveraient satisfaction dans la Leipziger Illustrierte Zeitung, qui avait publié un portrait de lui
accompagné d’une courte biographie. En outre, Frauenstädt avait conseillé à Schopenhauer d’ajouter un portrait à la nouvelle
édition de son ouvrage principal.
7. Dieu nous garde !
8. Ce poème d’Abraham Gotthelf Kästner se trouve dans Erste Sammlung (« Premier recueil »), Francfort et Leipzig, 1800,
p. 57, sous le titre « Auf einer Schreibtafel. In der Hand meines Bildes » ; Abraham Gotthelf Kästner’s gesammelte poetische und
prosaische Werke, première partie, Berlin, 1841, p. 50. Schopenhauer a prélevé l’épigramme dans le recueil Triumph des
deutschen Witzes (« Triomphe du mot d’esprit allemand »), éd. par C. F. T. Voigt, Leipzig, 1800 (HN V, no [1578]), p. 7, sous le
titre « Auf mein Bild » ; Schopenhauer a également cité ces vers dans les entretiens avec Carl Hebler (cf. Gespräche, p. 204).
9. Abraham Gotthelf Kästner (cf. note précédente).
10. « Soit dit en passant ! pourquoi gaspiller tout un cabinet de figures héroïques constitué de tant d’économistes,
philologues, juristes pour en faire l’antichambre ou la page de garde de l’Encyclopédie de Krünitz, la Bibliothèque générale
allemande, etc. ? Les physionomistes et les peintres ne veulent guère se frotter à ces visages appliqués mais si communs, puisque
l’on trouve gratuitement ce genre de marchandise physionomique sur tous les marchés hebdomadaires », Jean Paul, Des
Luftschiffers Giannozzo Seebuch (« Le carnet de bord de l’aéronaute Giannozzo Seebuch »), 12 e voyage, in Jean Paul’s
sämmtliche Werke, Berlin, 1841, tome 17, p. 195 ; Gesamtausgabe der Preussischen Akademie, I, tome 8, p. 485.
11. En marge de ce passage (« Ainsi, l’étendue de la rose fait partie des formes de l’intuition (de l’espace) ; sa figuration
spécifique, sous n’importe quelle catégorie pensable, même sous celle de l’identité — en fait toute son existence en tant qu’objet
spécifique —, appartient à l’entendement ; mais il y a encore quelque chose qui diffère de tout cela, qui se présente par la
sensation pure, l’odeur spécifique et la couleur de la rose, et c’est la manifestation du grand Inconnu »), Lindner, traducteur de
l’article de la Westminster Review (et non pas Frauenstädt, comme le pensait Schopenhauer) avait noté ce qui suit : « Donc la
couleur, l’odeur de la rose ? Et si cette personne, pour rester dans le même registre, porte des lunettes vertes ou est enrhumée ? Il
est vraiment curieux que l’auteur ait pu donner une explication si foncièrement fausse. » Cf. également lettre no 314.
12. P, II, chap. VI, § 74 et 102 b.
13. « Avancez avec précaution, par tous les dieux, le serpent se cache sous l’herbe » (cf. Virgile, Egl., III, 93).
14. Frauenstädt avait écrit que le choléra sévissait dans sa rue.
15. Suite aux mauvaises expériences avec les articles sur Feuerbach, Brockhaus avait demandé à Frauenstädt d’être
prudent dans sa polémique contre le théisme dans ses Lettres sur la philosophie schopenhauérienne.
16. Dans un journal illustré, on avait annoncé le projet d’un monument de Kant à Königsberg ; l’article relatait également
une anecdote : un soldat de garde à Königsberg avait jadis décidé de tirer sur le premier passant qui se présenterait à lui. Ce
premier passant était Kant. Mais la posture et les yeux bleus de Kant l’avaient tellement impressionné qu’il le laissa passer et
qu’il tira sur le suivant. Frauenstädt avait cherché en vain cette anecdote dans la biographie de Kant (Schubert) ; il s’adressa alors
à Schopenhauer.
17. Johann Eduard Erdmann, Versuch einer wissenschaftlichen Darstellung der Geschichte der neueren Philosophie («
Essai d’une présentation scientifique de l’histoire de la philosophie moderne »), 1834-1853, III e section (tome 5 et 6) : Die
Entwicklung der deutschen Speculation seit Kant (« L’évolution de la spéculation allemande depuis Kant »).
Lettre 313
1. M Archives Schopenhauer, brûlé. IM1 Becker, p. 84-86.
La dernière lettre de Schopenhauer à Sibylle Mertens, en date du 7 mai 1853 (lettre no 296), était restée sans réponse.
Sibylle Mertens se trouvait alors une fois de plus en chemin vers le nord, et à son retour elle était préoccupée par ses propres
soucis au point de reléguer au second plan l’affaire des biens de Dantzig. Elle oublia également de verser à Schopenhauer sa part
de l’affermage. Afin d’éviter à l’avenir une telle négligence, Schopenhauer avait demandé à son ami Becker, à l’occasion d’une
visite début septembre 1853, comment la proposition spontanée de Sibylle Mertens pouvait être transformée en une obligation
légale. Becker envoya son rapport le 9 octobre 1853 (D XIV, no 483).
2. Peudonyme de Matthias Claudius (15 août 1740 - 21 janvier 1815) adopté pour ses articles dans le Wandsbecker Boten
et plus tard pour ses œuvres.
3. Georg Andreas Gabler était décédé le 19 septembre 1853 à Teplitz. Dans une lettre à Schopenhauer du 21 octobre 1853
(D XIV, no 485), Lindner avait exprimé son refus d’accueillir dans la Vossische Zeitung une nécrologie rédigée par un membre de
la Faculté de philosophie.
Lettre 314
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 594-597.
2. P, I, « Fragments de l’histoire de la philosophie », § 13.
3. E, III.
4. M, II, chap. 28.
5. Une brève biographie précédait la présentation d’Erdmann (cf. lettre no 251), biographie reprise par Frauenstädt au début
de ses Lettres sur la philosophie schopenhauérienne.
6. Frauenstädt s’était défendu du reproche d’avoir fait des citations inexactes (lettre no 313) en répondant qu’il avait rendu
les passages tirés des œuvres de Schopenhauer en suivant exactement son orthographe et sa ponctuation, mais que les bureaux de
Brockhaus avaient appliqué leur orthographe et leur ponctuation. Brockhaus s’était alors excusé en parlant de l’instauration par
ses bureaux d’une « orthographe maison », dont il ne pouvait dévier sans conséquences fâcheuses.
7. Pas au-delà.
8. « Cordonnier, ne t’éloigne pas de tes sandales » ; cf. Pline, Nat. hist., XXXV.
9. Dans une lettre de von Doss adressée à Schopenhauer (D XIV, no 479).
Lettre 315
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 89-90.
2. Zacharias Werner (18 novembre 1768 - 17 janvier 1823) avait déménagé le 10 janvier 1808 d’Iéna à Weimar. Le 23
décembre 1807, Schopenhauer était venu de Gotha à Weimar, dans la maison de sa mère, où il avait eu l’occasion de le
rencontrer plusieurs fois.
3. La première de la tragédie Wanda, Königin der Sarmaten (« Wanda, Reine des Sarmates ») eut lieu le 30 janvier 1808,
le jour de l’anniversaire de la duchesse (grande-duchesse en 1815) Louise Augusta. Il y eut dix représentations de la pièce à
Weimar.
4. Martin Luther oder die Weihe der Kraft (« Martin Luther ou la consécration de la force »), pièce dramatique de Werner,
1807.
Lettre 316
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 597-603.
2. Cette lettre répond à l’envoi d’un exemplaire des Lettres sur la philosophie schopenhauérienne. Schopenhauer n’avait lu
que les épreuves de l’article de la Westminster Review, qui précédait ces Lettres (cf. lettre no 312).
3. Frauenstädt, Ästhetische Fragen (« Questions esthétiques »), Dessau, 1853.
4. Le destinataire fictif des Lettres.
5. Pourvu d’un commentaire critique et suivi.
Frauenstädt avait fait parvenir un deuxième exemplaire des Lettres à Schopenhauer, en lui demandant de le renvoyer avec
ses commentaires dans la marge, ce qu’il fit quelques jours après avoir expédié sa lettre. L’exemplaire, finalement entré en
possession d’Otto Weiss et de ses héritiers, a été prêté aux Archives Schopenhauer et les commentaires ont pu ainsi être recopiés
dans un autre exemplaire.
6. « Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit » (Pilate, Jean 19, 22).
7. Et nous nous réjouîmes de notre découverte.
8. Dans la quatorzième des Lettres sur la philosophie schopenhauérienne, Frauenstädt s’était employé, à partir des Lettres
de Maupertuis, à démontrer que ce dernier avait traité de l’idéalité de l’espace bien avant Kant. Il avait cité (p. 140) un passage de
l’Akakia de Voltaire, indice également mentionné dans une lettre de Becker adressée à Schopenhauer (2 mai 1852). À cette
époque, Schopenhauer avait cherché ces Lettres en vain à la bibliothèque de Francfort (cf. sa réponse à Becker du 5 mai 1852,
lettre no 274), pour ensuite faire part de cette affaire à Frauenstädt (dans une lettre qui n’est pas conservée). Pour le
développement ultérieur de l’affaire, cf. lettre no 320.
9. M, II, chap. 4.
10. Allusion à Juges, 14, 18 : « Si vous n’aviez pas labouré avec ma génisse, vous n’auriez pas deviné mon énigme. »
11. Lettre du 19 novembre 1853 (D XVI, no 489 a).
12. Voici le passage en question : « Le Dr. Schopenhauer est une tête importante que j’ai moi-même incité, parce qu’il
séjournait ici pendant un certain temps, à se saisir de ma théorie des couleurs, dans le but d’avoir lors de nos rencontres une
quelconque raison et un objet quasi réel dont nous pourrions nous entretenir, car je ne puis pérégriner dans le monde intellectuel
sans une médiation de ce genre, à moins de le faire sur des voies poétiques, où de toute manière cela va de soi. Or, comme vous
en jugez très justement, ce jeune homme est devenu mon adversaire, de mon point de vue. Je sais moi aussi jouer de la formule
adéquate pour un accord intermédiaire de ce différend ; mais ces choses-là sont toujours très difficiles à développer » (lettre de
Goethe à Schulz, 19 juillet 1816, in Briefwechsel zwischen Goethe und Staatsrat Schulz, éd. H. Düntzer, Leipzig, 1853, p. 149).
13. Cf. note précédente.
14. C’est-à-dire sur la feuille de l’album reprise à la fin du chapitre « Sur la théorie des couleurs » (P, II, chap. VII).
15. Schopenhauer détourne un vers de Hölty : « Et ne t’écarte pas d’un doigt de la voie de Dieu » (Der alte Landsmann an
seinen Sohn, in Voss, Musenalmanach, 1779, p. 117).
16. P, II, chap. VI.
17. I. H. Fichte, System der Ethik. 2. Darstellender Teil. 2. Abth. : Die Lehre von der rechtssittlichen und religiösen
Gemeinschaft oder Gesellschaftswissenschaft (« Système de l’éthique. 2. Développement. 2 e section : La doctrine de la
communauté du droit moral et de la religion ou science de la société »), Leipzig, 1853. Pour le tome 1, cf. note 11 de la lettre no
252.
18. Kuno Fischer, Geschichte der neueren Philosophie, tome 1 : Descartes’ Leben, Werke und Lehre (« La vie, l’œuvre et
la doctrine de Descartes »), 1852 (5e éd. 1912) ; cf. note 20 de la lettre no 279.
19. Kuno Fischer, Geschichte der neueren Philosophie, tome 2 : Spinozas Leben, Werke und Lehre (« La vie, l’œuvre et la
doctrine de Spinoza »), 1853 (6e éd. 1935).
20. Schopenhauer fait allusion à l’annulation du venia legendi de Kuno Fischer.
21. Si je ne m’abuse.
22. C’est seulement après l’envoi des exemplaires gratuits que les Lettres sur la philosophie schopenhauérienne ont été
diffusées en librairie.
Lettre 317
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 603-604.
2. Frauenstädt avait expédié à Schopenhauer un exemplaire de ses Lettres en le priant de le remettre, pour un compte-
rendu, à la rédaction de l’un des journaux littéraires de Francfort qu’il jugerait adéquat.
3. L’Académie des Sciences de Rouen avait mis au concours une question portant sur les conséquences désavantageuses
du compérage pour la littérature.
4. Schopenhauer se réfère à un livre de Ritter (Versuch zur Verständigung über die neueste deutsche Philosophie seit
Kant) recensé par Fortlage dans l’Allgemeine Monatsschrift für Wissenschaft und Literatur, 1853.
Lettre 318
1. IM1 Schemann, p. 337.
Carl Schütz (1805-après 1893), professeur de lycée à Bielefeld, auteur de recueils de littérature anglaise, française et
espagnole, traducteur du sanskrit. Il a joint deux traductions à sa lettre (cf. lettre de Schopenhauer à Frauenstädt, 4 mars 1854,
lettre no 319) : Bhatti — Kâvya, Bielefeld, 1837 (HN V, no [1094]) et Magha’s Tod des Çiçupala, Bielefeld, 1843 (HN V, no
[1145]).
2. Französisches Lesebuch, Bielefeld, 1848 (HN V, no [1253] et Englisches Lesebuch, Bielefeld, 1847 (HN V, no [1254]).
Concernant la lettre de Schulz, cf. également les lettres no 319 et no 321.
Lettre 319
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 604-606.
2. Lettre du 20 février 1854 (D XV, no 493).
3. B…….. dans IM1.
4. Œuvres complètes. Cf. note 2 de la lettre no 318.
5. Georg Christian Weigelt (1816-1885), né à Altona, prédicateur de la communauté germano-catholique à Hambourg de
1847 jusqu’en 1853 (dissolution de la communauté). Durant cette période, il a publié de nombreux sermons germano-catholiques
dont certains ont également été envoyés à Schopenhauer (cf. HN V, no [582], [583]). Son œuvre majeure : Zur Geschichte der
neueren Philosophie. Populäre Vorträge (« Sur l’histoire de la philosophie moderne. Conférences populaires »), 1 re partie : Imm.
Kant. Joh. Gottlieb Fichte. Friedr. Heinr. Jacobi. Arthur Schopenhauer ; 2e partie : F. W. J. Schelling. G. W. F. Hegel. L.
Feuerbach, Hambourg, 1854 et 1855. Dans la correspondance ultérieure de Schopenhauer, il en sera encore question à plusieurs
reprises. Cf. HN V, no [581]. En 1856, Weigelt s’établit à Föhr, devient propriétaire de Wyk, station balnéaire de la mer du Nord,
et meurt en novembre 1885. Cf. Schemann, p. 478 sq.
6. Recension des Lettres sur la philosophie schopenhauérienne dans Grenzboten, 1854, no 9.
7. C……. dans IM1.
8. Cf. Goethe, éd. Weimar, II, 208 ; cf. également lettre no 287.
9. Johann Philipp Wagner (1799-1879), membre de la présidence de l’Association de physique de Francfort, connu pour
ses recherches sur l’électromagnétisme.
10. Ferdinand Silas, Instruction explicative et pratique des tables tournantes, 3e éd., Paris, 1853 (HN V [1065]).
Lettre 320
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 91-92.
2. cf. lettre no 317.
3. Allusion à Juges, 14, 18 ; cf. lettre no 316.
4. Dans la lettre de Becker du 2 mai 1852 (D XV, no 423) ; sur cette affaire, cf. la note 8 de la lettre no 316.
5. Robert Hooke (18 juillet 1635 - 3 mars 1703), physicien et philosophe anglais, a découvert la loi de l’extension élastique
(loi de Hooke), a étudié les phénomènes d’interférence et de diffraction et fut le premier à formuler l’idée d’une nature
ondulatoire de la lumière et de la gravitation.
6. Cf. Schiller, Wallensteins Lager, v. 447.
7. Une lettre (brève) du 21 février 1854 et une lettre (détaillée) du 23 février 1854 (D XV, no 494).
8. Il ne faut désespérer de rien !
9. Frauenstädt avait envoyé à Schopenhauer deux articles de K. L. Ernst Kossak parus dans le journal berlinois du lundi, la
Feuerspritze, 13 février 1854.
10. Cf. note 6 de la lettre no 319.
Lettre 321
1. M Prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 baron Carl du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 29 décembre 1872, no 358.
2. Cf. note 9 de la lettre no 320.
3. Par la suite, Schopenhauer comptera pourtant ce général prussien parmi ses adeptes. Dans ses remarques sur les
garnisons enthousiasmées par sa philosophie, il mentionne toujours la garnison de Ruppin (cf. lettres no 343 et no 354).
4. Vindication of the Hindoos from the aspersions of the Reverend Claudius Buchanan, Londres, 1808 (HN V, [1207]).
5. Cf. note 6 de la lettre no 319.
Lettre 322
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 606-609.
2. L’auteur de cette citation est Karl Ludwig Ernst Kossak dans la Königsberger Hartungschen Zeitung, 1853, se référant à
un article de Lindner (cf. lettre de Lindner à Schopenhauer, 30 avril 1853, D XV, no 459).
3. C. R. Kosack, de Nordhausen.
4. Le compte-rendu de Fortlage des Lettres sur la philosophie schopenhauérienne de Frauenstädt, dans les Blätter für
literarische Unterhaltung, 1854, no 12. Commentaires plus modérés de cette recension dans une lettre de Becker, 11 août 1854 (D
XV, no 524) et de von Doss, 30 décembre 1854 (D IV, no 542).
5. Cf. Faust I, v. 1873.
6. Voici le passage concerné dans la recension de Fortlage : « Avec son principe de la “négation de la volonté de vie”,
Schopenhauer s’oppose à la bassesse de l’eudémonisme avec autant de force et de rudesse que J. G. Fichte, avec son “activité
pour l’activité” morale, le fit en son temps, de même que du côté de la raison, il faut toujours s’opposer au Mal radical. Que
Schopenhauer, par un étrange aveuglement, ne voie pas que sa doctrine éthique vise la même chose que ce que vise Fichte avec
l’activité absolue dans le but de la pure activité, voilà qui est une conséquence de ses erreurs psychologiques évoquées plus haut.
»
7. Fortlage : « Schopenhauer se plaint de “l’occultation” de ses mérites, qui jadis aurait été à l’ordre du jour. Cela n’est
malheureusement pas une plainte infondée. L’auteur de cet article possède à ce sujet le document d’une recension de 1836 écrite
par lui-même, portant sur De la volonté dans la nature de Schopenhauer (Francfort, 1836), et qui fut occultée par une certaine
rédaction. »
8. À la fin de sa recension, après avoir cité quelques vers de Herder sur la divinité dépassant toute pensée et toute image,
Fortlage affirme : « Il y eut jadis en Allemagne une belle époque où ces choses étaient considérées de façon générale comme ce
qu’elles étaient vraiment, à savoir une tonalité authentique venant d’une âme touchée par le pressentiment de l’Éternel — et où
cette belle parole de Schiller pouvait encore être généralement comprise : “Quelle est ma religion ? Aucune de celles / Que tu
nommes. Et pourquoi aucune ? Par religion.” Cette époque n’est plus. De nos jours, comme auparavant, l’on questionne
seulement la conformité de la monture religieuse. L’homme pragmatique et honnête, prévoit-on, ne sera jamais assez sot pour
manifester quelque gêne, si on le lui demande explicitement. »
9. Il s’agit de Kossak.
10. Allusion à la guerre de Crimée : le 27 mars 1854, un jour après l’expédition de la lettre de Schopenhauer, l’Angleterre,
la France et la Turquie déclarèrent la guerre à la Russie.
11. Fortlage avait remis en cause l’affirmation de la Westminster Review selon laquelle le Monde comme volonté et
représentation ne fut, à sa parution, remarqué que par Herbart, en se référant à la recension de Beneke dans la Jenaische
allgemeine Literatur-Zeitung et en ajoutant : « Il est quand même intéressant de voir qu’au début, personne n’a daigné prendre
note de ce gros-bec, à part deux autres gros-becs. » Cf. la réimpression de tous ces documents dans le Jahrb. no 6 (1917), p. 118-
158, et les lettres no 66 et 70.
12. « Que le Juif Apella le croie » (Horace, Serm., I, 5, 100).
13. « Malheur aux vaincus ! » (Tite-Live, V, 48).
Lettre 323
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 98-99.
2. La lettre est la réponse à un courrier de Becker du 24 mars 1854 (D XV, no 500) qui contient une critique détaillée des
Lettres de Frauenstädt.
3. P. 270-274 des Lettres. Commentaire de Becker :
« Dans le passage cité plus haut, Le Dr. F. parle d’un double sens que le mot “phénomène” [Erscheinung] est censé
recouvrir dans diverses parties de votre doctrine, mais que je n’ai aucunement rencontré jusqu’à présent, et je n’ai toujours pas
compris ce qu’il voulait dire au juste.
1) Dans la théorie de la connaissance, “phénomène”, dit-il, a le même sens que “représentation” : il jouerait un rôle tout à
fait différent dans l’esthétique, où il serait “l’expression réelle (?) de l’Idée éternelle” — comme si chez vous l’Idée n’était pas
également représentation, et rien d’autre que représentation, se décomposant en sujet de l’intuition affranchi de la volonté et en
objet hors espace et temps, tout comme la représentation de la chose singulière se décompose en sujet et objet, sauf que celui-ci
sert encore la volonté et que celui-là ne s’est pas encore débarrassé de toutes les relations conditionnées par l’espace et le temps.
2) Selon la partie esthétique de votre doctrine, c’est, pense-t-il, “à la contemplation esthétique — à l’œil clair du monde”
— que se révélerait l’essence intime et éternelle du monde, alors que selon d’autres parties, le phénomène serait censé recouvrir
ou cacher la chose en soi — comme si ce qui se révèle à la contemplation esthétique était pour vous autre chose que “le monde
comme représentation”, qui certes en ne cachant pas le monde comme volonté ne le révèle pas non plus à partir de lui-même,
mais nous laisse dans l’ignorance, tant que nous ne retournons pas à la conscience de soi, dans laquelle ce monde de la
représentation nous est encore donné de différentes manières dans un tout autre toto genere.
3) Dans votre philosophie de la nature, dit-il, la figure animale serait comprise comme l’expression de la volonté qui s’y
manifeste, et on pourrait par conséquent connaître la chose en soi à partir du phénomène — le corps serait un miroir objectif de
la volonté (?) — comme si, selon votre doctrine, la connaissance de la chose en soi était tout simplement possible à partir de la
figure animale (de son Idée platonicienne), malgré le fait que vous n’ayez pas expliqué tout de suite, dit-il, que le corps est d’une
part représentation, d’autre part chose en soi (volonté) !
4) Le corps, dit-il, serait tantôt un miroir objectif, tantôt une simple représentation — donc un phénomène cérébral
purement subjectif ; pour vous, le phénomène serait donc tantôt simplement idéal, tantôt il aurait également un côté réel ; mais
selon lui, cela ne serait pas véritablement contradictoire — comme si vous n’étiez pas non seulement un idéaliste transcendantal,
mais également un idéaliste empirique, comme si vous contestiez quelque part que tout ce qui existe dans l’espace en tant que
phénomène ne peut pas également exister en soi, ce pour quoi un sujet connaissant n’est pas nécessaire — et comme si cela
n’était pas une véritable contradiction que d’accorder malgré tout un côté réel à un phénomène conditionné par un sujet,
phénomène à travers lequel se révélerait l’essence même — une contradiction qui n’est certainement pas à mettre à votre compte,
lorsque vous démontrez que Kant a manqué l’unique occasion de comprendre le processus extérieur comme immédiatement lié
au processus intérieur, et lorsqu’en saisissant cette occasion, vous décrivez le corps comme révélation de la volonté. »
4. Cf. Rm 3, 23.
5. Surtout pas !
6. Recension du livre de G. Weigelt, Zur Geschichte der neueren Philosophie (« Sur l’histoire de la philosophie moderne
»), in Grenzboten, 1854, no 13 (cf. également lettre no 325).
7. Dans la guerre de Crimée (cf. note 10 de la lettre no 322), la Prusse et l’Autriche avaient gardé la neutralité.
8. Mertens-Schaaffhausen.
Lettre 324
1. IM1 Houben, 1929, p. 177-178.
Malgré ses promesses, Sibylle Mertens n’avait pas envoyé l’affermage des deux dernières années. Le Dr. Emden proposa
alors d’encaisser le montant par des traites. Comme Schopenhauer ne pouvait pas savoir que l’affermage de l’année passée n’était
pas encore arrivé à Bonn, il suivit le conseil de son ami et en fit part à Sibylle Mertens dans cette lettre. Dans sa réponse du 18
avril 1854, elle répondit, irritée, qu’elle avait honoré la traite (D XV, no 505).
2. Il s’agit sans doute de Jacob Rauscher, commerçant et agent de traite (domicile : Am Salzhaus 3).
3. Lettre du 23 avril 1853, mentionnée dans celle du 23 février 1854 (D XV, no 494).
Lettre 325
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 610-612.
2. Deux lettres de Dorguth adressées à Frauenstädt.
3. Das Licht der wahrhaften kosmischen dem Irrlichte der Hegelschen Dialektik gegenüber. Ein Schreiben an den Herrn
Dr. Arthur Schopenhauer (« La lumière de la dialectique véritablement cosmique contre le feu follet de la dialectique hégélienne.
Une lettre à Monsieur le Dr. Arthur Schopenhauer »), Magdebourg, 1854 (HN V, no [147]).
4. Cet article n’a pas été retrouvé ; cf. lettre no 334.
5. Lettre du 24 mars 1854 ; cf. note 2 de la lettre no 323.
6. Il s’agit de la recension « Die Philosophie des Willens », in Europa. Chronik der gebildeten Welt, éd. par Fr. G. Kühne,
Leipzig, 1854, no 26, et de la recension du livre de Weigelt, in Grenzboten, 1854, no 13 (cf. lettre no 323).
7. La recension des Lettres de Frauenstädt, in Grenzboten, no 9 (cf. note 6 de la lettre no 319).
8. Wilhelm von Gwinner (17 octobre 1825 - 27 janvier 1917), à partir de 1845 études de philosophie et de droit à Tübingen
où il s’initie à la philosophie de Schleiermacher. En 1847, il fait la connaissance de Schopenhauer, sans véritablement se
rapprocher de lui ; à partir de 1851, c’est plutôt la philosophie de Baader qui influence sa pensée. Il débute sa carrière juridique
comme avocat, puis devient secrétaire du tribunal d’appel et conseiller du tribunal de la ville en 1866. Ce n’est qu’à partir de
1857 que sa fréquentation de Schopenhauer devient plus intime, et lorsque Emden, l’ami et le conseiller juridique de
Schopenhauer, meurt en 1858, Gwinner est désigné comme exécuteur testamentaire par le codicille du testament schopenhauérien
du 4 février 1859. Le 26 septembre 1860, il se charge de l’oraison funèbre de Schopenhauer et fin 1861 il publie un ouvrage
biographique, Arthur Schopenhauer aus persönlichem Umgang dargestellt (« Arthur Schopenhauer présenté à partir de
fréquentations personnelles ») qui est réédité en 1878 et 1910. Gwinner s’est également fait connaître comme auteur d’un roman,
Diana und Endymion, 1860 et l’ouvrage Goethes Faustidee nach der ursprünglichen Konzeption aufgedeckt und nachgewiesen
(« L’idée goethéenne du Faust mise à jour et démontrée selon la conception originaire »), 1892. Cf. Alfons Bilharz, « Ein
Gedenkblatt », Jahrb. no 7 (1918), p. 3-5 ; Carl Gebhardt, « Wilhelm von Gwinner », Jahrb. no 8 (1919), p. 208-227 ; Gespräche,
p. 380-397.
9. Le 1er mars 1854, Friedrich Eduard Beneke s’était noyé dans un canal près de Berlin.
10. Beneke portait des lunettes dorées.
11. Beneke utilise ce terme dans sa Psychologie.
12. P, I, « Fragments de l’histoire de la philosophie », § 1, in fine.
Lettre 326
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. La date de la lettre (écrite à l’encre) a été ajoutée au crayon bleu.
2. Cf. note 1 de la lettre no 324.
3. Une gravure sur cuivre, « Le jugement » (cf. lettre de Schopenhauer à Becker, 13 mai 1854, lettre no 328).
Lettre 327
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 612-615.
2. À la p. 270 des Lettres de Frauenstädt (cf. note 7 de la lettre no 325).
3. Le 17 avril 1854 ; à l’occasion de cette visite, Schopenhauer remit à Becker le livre de Weigelt (cf. lettre de
Schopenhauer à Becker, 13 mai 1854).
4. Cf. note 3 de la lettre no 325.
5. Les Blätter für literarische Unterhaltung.
6. Friedrich Julius Stahl, Die Philosophie des Rechts nach geschichtlicher Ansicht (« La philosophie du droit selon l’aspect
historique »), 2 tomes, 1830-1837 ; 5e éd. 1878.
7. Cf. Goethe, Faust I, v. 2182-2183.
8. L’expéditeur de cette lettre, qui n’a pas été conservée, était Carl Hebler (1821-1898). Hebler était néokantien, privat-
docent depuis 1848, nommé professeur « extraordinaire » en 1863, professeur « ordinaire » en 1872 à l’Université de Berne.
Auteur de Shakespeares Kaufmann von Venedig, 1854 (HN V, no [1723]), Lessing-Studien, 1862, Aufsätze über Shakespeare,
1865. Cf. Gespräche, p. 202-213.
9. E…… dans IM1.
10. Schopenhauer a gardé, malgré tout, un souvenir positif de la visite d’Erdmann (cf. Gespräche, p. 178 sq. et 249).
11. C’est ainsi qu’il le raconte, et peut-être ment-il.
12. Il s’agit du récit de la démonstration avec le verre de vin, p. 153 des Lettres de Frauenstädt.
13. H…. dans IM1.
14. Un inconnu.
15. C’est-à-dire dans les Blätter für literarische Unterhaltung ; cf. lettre no 254 du 30 août 1851.
Lettre 328
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 100.
2. L’ouvrage de Dorguth (cf. note 3 de la lettre no 325).
3. Lettre de Georg Weigelt, 8 mai 1854 (extraits dans D XV, no 508).
4. Schopenhauer avait souligné certains passages du livre, dont il voulait se servir (cf. lettre no 329).
Lettre 329
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 104-105.
2. Lettre du 14 mai 1854 contenant des remarques critiques sur le livre de Weigelt. En guise de cadeau, Schopenhauer avait
envoyé sa lettre et celle de Becker à l’auteur à Hambourg, où elles seront détruites dans un incendie. L’impression de la lettre de
Becker d’après l’ébauche se trouve dans D XV, no 510 ; dans la lettre à Frauenstädt du 31 mai 1854, Schopenhauer indique de
mémoire le contenu de la lettre.
3. Cf. note 3 de la lettre no 328.
4. Lettre du 16 mai 1854 (D XV, no 511).
5. Berliner Musik-Zeitung Echo, publié par l’Association de musiciens théoriques et pratiques, 4 e année, nos 18 et 19
(dimanche 7 mai et dimanche 14 mai 1854), avec un article du Dr. E. Kossak, « Gedankenspäne zur neueren musikalischen
Literatur », repris dans le Jahrb. no 10 (1921), p. 71-78 ; cf. également note 3 de la lettre no 297.
6. La Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik publiée par I. H. Fichte. Il s’agit du tome 23, cahiers 1 et 2
(c’est Frauenstädt qui l’avait signalé à Schopenhauer ; cf. lettre à Frauenstädt du 22 mai 1854, lettre no 331). Le cahier 1 contient
à la fin un « aperçu de la littérature philosophique » par I. H. Fichte et un compte-rendu des Parerga, p. 166-169 (cf. lettre no 332)
; le cahier 2 contient un compte-rendu (anonyme) de l’édition Hartenstein de la Critique de la raison pure (1853), p. 312-318, qui
défend, avec Hartenstein et contre Schopenhauer, la deuxième édition de l’ouvrage.
Lettre 330
1. IM1 Gruber 1913, p. 49-50. Lettre de remerciement pour l’envoi des deux numéros de l’Echo (16 mai 1854).
2. En réalité, c’est Frauenstädt qui lui avait envoyé (avant le 8 mars 1854) la Feuerspritze du 13 février 1854 : cf. lettre à
Becker (lettre no 320) et lettre à von Doss (lettre no 321).
3. « La goutte creuse la pierre, non par la force, mais par une chute répétée » ; cf. Ovide, Ex ponto, IV, 10, 5 ; Gariopontus,
Passionarius, Basil. 1531.
4. Moriz Leberecht, baron von Eberstein (1827-1888) ; cf. lettre n o 218. Il n’était pas médecin, mais Dr. phil., comme le
précisera Lindner le 29 mai 1854 ; il ne semble pas avoir mené à terme le projet d’une physiologie du cerveau fondée sur la
philosophie de Schopenhauer.
5. Louis Ferdinand, baron von Eberstein (1826-1893), officier prussien et ingénieur royal.
6. La garnison de Magdebourg : cf. les lettres à Frauenstädt (nos 334 et 335).
7. Schopenhauer semble donc avoir reçu le jour même le courrier de Becker du 22 mai, qui contenait également la lettre de
Weigelt, et avoir rédigé tout de suite après cette lettre à Lindner et la lettre à Frauenstädt (lettre no 331) à laquelle il joint la lettre
de Weigelt.
8. Geschichte der ersten stehenden deutschen Oper (« Histoire du premier opéra allemand »), Berlin, 1855 (HN V, [1234]).
Lettre 331
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 615-617.
2. Cf. lettres nos 252 et 289.
3. Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik, tome 23, cahiers 1 et 2 ; cf. lettre à Becker du 20 mai 1854 ( lettre
no 329).
4. Hermann Helmholtz, Die Wechselwirkung der Naturkräfte und die darauf bezüglichen neuesten Ermittlungen der
Physik. Ein populär-wissenschaftlicher Vortrag, gehalten am 7. Febr. 1854 (« L’action réciproque des forces de la nature et les
derniers résultats en physique s’y rapportant. Une conférence scientifico-populaire, prononcée le 7 févr. 1854 »), Königsberg,
1854 ; cf. les commentaires de Schopenhauer dans la lettre à Becker du 20 janvier 1856, lettre no 377).
5. Cette supposition se trouve confirmée par le père, Ferdinand Helmholtz (1792-1859), professeur au Lycée de Potsdam.
Le 27 septembre 1856, il écrit à son fils : « [Ce que Frauenstädt, dans son écrit Le Matérialisme, présente comme plagiat et] cite,
provient en partie de Kant, en partie des conférences de Fichte sur le rapport de la logique et de la philosophie, auxquelles, je me
rappelle, Schopenhauer a assisté en même temps que moi » (in Leo Koenigsberger, Hermann von Helmholtz, tome 1,
Braunschweig, 1902, p. 277 sq.). Il ne peut s’agir que du semestre d’hiver 1811-1812, durant lequel Schopenhauer assista aux
cours de Fichte sur l’étude de la philosophie, les faits de la conscience et la théorie des sciences (HN II, p. 16-29 et 29-216).
Lorsque, en 1813-1814, Helmholtz fut appelé aux armes (il dut prêter serment immédiatement après la proclamation royale du 30
mars 1813, et fut nommé second lieutenant après la bataille de Dresde le 8 septembre), Schopenhauer lui procura l’uniforme
(selon Gwinner, 2e éd., p. 130) et lui remit une pièce de Sophocle ; les deux amis ont donc dû se voir à Rudolstadt ou à Weimar.
6. La Zeitschrift für Philosophie de Fichte.
7. Brockhaus (cf. lettre no 314).
8. Le Kossak « esthétique », à ne pas confondre avec le Kosack « mathématique » de Nordhausen.
9. Le livre de G. Weigelt.
10. Frauenstädt avait directement écrit à Dorguth que ses écrits étaient insipides et sans effet à cause de son style confus.
11. Les lettres de Hebler et de Weigelt.
Lettre 332
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 617-619.
2. Contrairement à ce qu’écrit Weigelt, Schopenhauer ne dit pas que « le bon Dieu » donne à manger aux professeurs de
philosophie, mais qu’il les nourrit. Becker avait écrit à Schopenhauer à ce propos : « Par ex. le contexte dans lequel il cite, p. 120,
le passage des Parerga, I, p. 107 enlève tout le sel à votre proverbe. Où serait la plaisanterie si vous remarquiez simplement que
le bon Dieu (en tant que restaurateur) donne à manger aux professeurs de philosophie comme aux corbeaux, alors que chez vous
le tertium comparationis est tout autre, quand vous dites qu’il les nourrit, à savoir dans le même sens où “la bêche nourrit le
jardinier / la jambe boiteuse le mendiant ; / les ducats le banquier, / le chagrin d’amour Heine : / il chante sous la lampe nocturne /
la détresse qui l’a touché, / pour ensuite chez Campe / la faire publier in-octavo. » Ces vers, modifiés par Becker, sont tirés d’une
parodie épigrammatique de Friedrich Wilhelm Neumann (1784-1834), in Der Gesellschafter. Blätter für Geist und Herz, 136, 25
août 1828.
3. Vieille maxime estudiantine.
4. M, II, chap. 48.
5. Dans la lettre du 21 août 1852 (lettre no 280).
6. La recension de I. H. Fichte parue dans la Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik, tome 23, cahier 1, p.
166-169 (cf. lettre 329). Fichte y parle de la figure grossière, semi-comique, de Schopenhauer ; il considère Schopenhauer, « ce
mélange d’une rare profondeur d’esprit et d’une faculté de juger mesquine et pleine de préjugés, depuis toujours comme un
problème psychologique et pathologique », et affirme que ses jugements seraient marqués par une « irritabilité maladive ».
7. Allusion à la préface pour la seconde édition de De la volonté dans la nature.
8. Le Dr. Gustav Oelsner-Monmerqué (cf. lettre no 255) était décédé le 29 avril 1854 à Montpellier.
Lettre 333
1. M fonds Frauenstädt. IM1 D XVI, p. 179-180.
Lettre 334
1. M fonds Frauenstädt. IM1 D XVI, p. 179-180.
2. Deutsche Wochenschrift, publiée par Karl Gödeke, Hanovre, 1854, cahier 22, p. 673-684 (HN V, no [460]).
3. ……. dans IM1.
4. Rosenkranz écrit en effet : « En politique, nous les Allemands sommes le peuple des petits États multiples. Et c’est ainsi
qu’en philosophie, nous sommes également le peuple de la polyarchie et de l’anarchie des systèmes. Mais tout comme en
politique, où dans le passé le besoin d’unité entraînait le sacre d’un empereur romain, et plus récemment, au moins la
composition d’une diète fédérale, nous voyons également qu’en philosophie, de temps à autre, les disciples d’un philosophe le
sacrent empereur de l’Allemagne spéculative, ou qu’une coalition de philosophes aux affinités électives, comme maintenant
Fichte, Weisse et Ulrici, se présentent comme notre diète fédérale philosophique. Mais depuis la mort de Kant, nous sommes
tellement accoutumés à ce spectacle que ce dernier n’existe pratiquement plus pour le grand public, mais qu’en règle générale, il
ne fait plus que s’accomplir comme un mystère scolaire et universitaire. Le dernier sacre en date d’un empereur de la philosophie
allemande revêt un intérêt tout particulier pour la Prusse, car même si cet homme vit déjà depuis longtemps dans la République
de Francfort, où furent jadis couronnés les empereurs allemands, il est tout de même né en Prusse, à Dantzig. Il s’agit d’ Arthur
Schopenhauer, le fils de la glorieuse et célèbre Johanna Schopenhauer. »
5. Rosenkranz critique « le droit au mensonge nécessaire » de Schopenhauer : « Cette théorie ne permettrait-elle pas
facilement à chaque égoïste de s’inventer un quelconque droit de défense comme mobile de tout mensonge ? » (p. 678). Cf. à ce
propos Lindner / Frauenstädt, p. 219, note.
6. Rosenkranz écrit : « Dans certains passages de ses écrits qui ne sont pas peu nombreux, il prend plaisir, avec sa théorie
du droit de mentir, à nous éclairer sur une expérience que nous pourrions faire chaque jour, à savoir que des personnes très
sincères, nobles et cultivées n’hésiteraient pas, dans des milliers d’occasions, à mentir avec le plus grand calme et en toute
conscience, et que cela ne les priverait pas pour autant du respect des autres. Il cite même le Christ comme étant un tel menteur,
d’après Jean VII, 8 où Jésus dit d’abord à ses disciples qu’il ne viendra pas à la fête à Jérusalem, alors que finalement il y vient
quand même. »
7. La recension des Deux Problèmes fondamentaux de l’éthique, signée Spiritus asper (alias Carové), in Hallische
Jahrbücher, cahier de juillet 1841 ; cf. lettre no 255.
8. La recension du Monde comme volonté et représentation, signée E. G. Z. (alias Herbart), in Hermes, Brockhaus,
Leipzig, 1820, no 3, p. 131-149 ; repris dans le Jahrb. no 6 (1917), p. 89-117.
9. Rosenkranz avait parlé de l’article de la Westminster Review (qui précédait les Lettres de Frauenstädt) comme ayant «
probablement été écrit en Allemagne » (p. 675) ; cf. également l’entretien de Schopenhauer avec Asher, août 1854 ( Gespräche, p.
184).
10. Rosenkranz reproche à Schopenhauer d’avoir, dans la question du mensonge nécessaire, « remplacé la décision par un
acte volontaire subjectif », alors que dans Les Deux Problèmes fondamentaux de l’éthique (E, § 17), Schopenhauer définit
exactement les cas dans lesquels s’applique le droit au mensonge nécessaire.
11. Contre le principe moral de Schopenhauer (la compassion), Herbart mobilise les ressources de l’impératif catégorique
kantien : « Il nous faut agir de sorte que nous puissions souhaiter que le genre et la manière de notre comportement, dans un cas
donné, soient élevés en loi universelle, et il faut nous demander si tout un chacun agirait de la sorte s’il était à notre place. »
12. La plupart des hommes sont mauvais (cf. lettre no 85).
13. Rosenkranz écrit : « La compassion peut alors être le mobile de l’action, mais jamais le principe de la morale, car elle
ne contient aucun concept du bien et du mal ou de la liberté. Lorsque nous avons la sensibilité et la courtoisie de nous l’appliquer
également à nous-mêmes, la compassion peut nous conduire au “laisser-faire”, au “laisser-aller” le plus dangereux, où toute
moralité s’estompe au profit d’une stagnation sentimentale. Mais à un homme aussi réfléchi et observateur que Schopenhauer, il
n’a pas pu échapper à quel point la tendance à la cruauté est ancrée en l’humanité, et c’est pourquoi, avec son prétendu principe
moral, il s’est empêtré dans de nombreuses contradictions » (p. 679).
14. Rosenkranz fait dire à Schopenhauer : « La justice et la philanthropie universelle ne font que préparer le pas vers cet
acte de l’absolue négation de soi tel que la religion indienne et bouddhiste l’ont toujours enseigné, tout comme, au fond, le
christianisme, même si ce dernier n’est qu’une mauvaise copie, falsifiée de nombreuses fois, de cette sagesse immémoriale
d’Orient. »
15. Remettant en cause « l’achèvement » de la philosophie kantienne par Schopenhauer, Rosenkranz écrit : « Au contraire,
son achèvement est en même temps une destruction totale de la philosophie kantienne, de laquelle il ne retient que la différence
entre l’essence et le phénomène, entre l’absoluité de la volonté comme chose en soi primitive et l’intellect comme fonction
simplement secondaire, liée au substrat de la matière. »
16. Au lieu d’écrire « quadruple racine du principe de raison suffisante », Rosenkranz écrit « quadruple racine du principe
de raison ».
17. Cf. note 6 de la lettre no 332.
18. Karl Graul, Tamulische Schriften (HN V, no [1119]).
19. Cf. lettre à Lindner du 22 mai 1854 (lettre 330), concernant von Eberstein et son frère.
20. Joie.
21. ……….. dans IM1. Georg Fr. Ludwig W. Weissenborn (1816-1874), études de théologie à Halle, Berlin, Rostock,
obtient le titre de docteur en philosophie à Halle (1841) où il sera nommé professeur, professeur à Marbourg en 1853. Auteur de
Vorlesungen über Schleiermachers Dialektik und Dogmatik (partie I, II, 1847-1849) ; Logik und Metaphysik (1850) ;
Pantheismus und Theismus (1859). Il semble que Schopenhauer ait donné une description détaillée de cette visite dans une lettre
(non conservée) à Dorguth. Th. Volbehr en présente des extraits modifiés dans son article « Der Selbstmord des Skorpions. Eine
Schopenhauer-Anekdote ». Cf. Gespräche, p. 179-181.
22. …….. dans IM1.
23. E…… dans IM1.
24. Cf. note 4 de la lettre no 325.
Lettre 335
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 624-625.
2. Il s’agit d’un compte-rendu anonyme des Lettres de Frauenstädt, dans L’Athenaeum français, Paris, 3 juin 1854, no 22, p.
505 ; repris dans le Jahrb. no 19 (1932), p. 252-254. Après avoir présenté Schopenhauer comme « l’ennemi de la raison »,
l’auteur écrit : « Ce système est d’ailleurs la négation du principe de toute philosophie ; car il aboutit à prêcher l’anéantissement
de la raison, et comme la fin dernière de toute spéculation un ascétisme pareil à celui des fakirs de l’Orient. Après cela, on n’aura
pas de peine à croire que M. Schopenhauer méprise du haut de sa grandeur Fichte, Hegel et Schelling, et les regarde comme de
misérables charlatans indignes de fixer un moment l’attention de tout homme qui pense. Mais il est difficile de comprendre à quel
titre il se donne comme le continuateur de Kant, le philosophe qui peut-être a placé le plus haut les droits et l’empire de la raison.
»
3. Saint-René Taillandier (1817-1879), écrivain et historien de la littérature, auteur d’une Histoire de la jeune Allemagne
(1848). Dans l’objectif de faire publier une recension dans la Revue des Deux Mondes, Frauenstädt lui avait envoyé un
exemplaire de ses Lettres, et Taillandier lui avait répondu par une lettre courtoise.
4. Cf. note 14 de la lettre no 255 et la note 7 de la lettre no 334.
5. cf. lettre no 334.
6. L’auteur de cette lettre était David Asher. Sur sa première visite chez Schopenhauer (au mois d’août 1854), Asher écrit :
« Après lui avoir dit mon nom, qu’il connaissait d’une lettre que je lui avais envoyée quelque temps auparavant, il devint soudain
amical. » Schopenhauer évoque cette visite dans la lettre n o 341. Le Dr. David Asher (1818-1890), professeur d’anglais à l’École
de commerce et écrivain philosophique à Leipzig, publia l’année suivante un Offenes Sendschreiben an den hochgelehrten Herrn
Dr. Arthur Schopenhauer (« Missive ouverte au très érudit Monsieur le Dr. Arthur Schopenhauer »), Leipzig, 1855 (HN V, [33]).
Cf. David Asher, Arthur Schopenhauer. Neues von ihm und über ihn (« Arthur Schopenhauer. Du nouveau de lui et sur lui »),
Berlin, 1876 ; Gespräche, p. 182-184.
Lettre 336
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 150-151.
Le 18 juillet 1854, Brockhaus accepta d’imprimer l’ouvrage selon l’orthographe de Schopenhauer.
Lettre 337
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. La date a été établie d’après la lettre de Schopenhauer à Becker du
9 août 1854 (lettre no 338) : « Il a donc fallu que vous veniez juste hier, alors que j’empruntais le chemin de fer pour aller voir la
maison pompéienne à Aschaffenbourg ! » Le billet a donc été écrit le 8 août.
Lettre 338
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 108-109.
2. « L’homme est voué tout entier au hasard » (Hérodote, I, 32).
3. Cette maison a été construite par Louis I er , à l’ouest d’Aschaffenbourg, sur le versant d’une montagne près du Main
(1842-1845), inspirée du modèle de la maison de Castor et Pollux trouvée à Pompéi.
4. Deutsche Wochenschrift, 1854, cahier 22, avec la recension « Pour caractériser Schopenhauer » de K. Rosenkranz, et
Zeitschrift für Philosophie, tome 23, cahier 1, avec la recension des Parerga par Fichte.
5. La demande de Hartknoch a été formulée dans une lettre du 25 juillet 1854 (M Archives Schopenhauer).
Lettre 339
1. M, fonds Frauenstädt, dérobé. IM1 D XVI, no 57.
Lettre 340
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 114-115.
2. Becker avait répondu à l’envoi des deux journaux, le 14 août 1854, par une critique détaillée de l’article de Rosenkranz
(D XV, no 524).
3. Becker renvoya cette préface le 29 août, en écrivant qu’il ne pensait pas que Schopenhauer aurait à craindre quoi que ce
soit.
4. « Si quelqu’un a couru toute la journée et qu’il arrive au soir, cela suffit » (cf. Pétrarque, De vera sapienta, dial. I, B, éd.
Venet. 1516).
Lettre 341
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 626-629.
2. Brockhaus (cf. lettre no 336).
3. Il s’agit de la demande de la librairie Hartknoch pour publier une deuxième édition de De la vision et des couleurs ; cf.
lettre no 338 et le contrat (lettre no 339).
4. « Arth. Schop. a passé la majeure partie de l’année 1813 dans cette chambre ; et que soit louée la maison qui donne sur
de vastes champs » (inspiré en partie par Horace, Epist., I, 10).
5. Carl Ferdinand Wiesike (1798-1880), depuis les années 1820 emphytéote d’une prairie qu’il avait défrichée, près de
Plaue, dans la marche brandebourgeoise, et dont la propriété lui revint en 1848. À partir d’environ 1853, il voua sa vie à trois
tâches : la réalisation d’un parc, l’homéopathie et la philosophie de Schopenhauer dont il prit connaissance grâce à E. O. Lindner.
Cf. Briefe des Freiherrn Carl von Gersdorff an Friedrich Nietzsche, partie I (1934), p. 83, 86 sq., 96 sq. ; Theodor Fontane, Fünf
Schlösser, in Wanderungen durch die Mark Brandenburg (« Promenades dans la marche brandebourgeoise »), Sämtliche Werke,
Hanser ; nécrologie de Fontane, 15 octobre 1888 ; Hübscher, « Melusine », in Denker gegen den Strom, Bonn, 1973, annexe II.
6. Peut-être le manuscrit de son Offenes Sendschreiben…, Leipzig, 1855.
7. « Zur Erinnerung an Schelling », in Vossische Zeitung, 31 août 1854 (Schelling était décédé le 21 août 1854 à Ragaz).
8. Cf. Goethe, Faust I, v. 2182-2183.
9. Cf. De la volonté dans la nature, « Astronomie physique ».
10. (Jetons-nous) dans la lutte et la bataille !
11. Il s’agit de la préface à la deuxième édition de De la volonté dans la nature, ainsi nommée par Schopenhauer par
allusion à la formule de Rosenkranz, « l’empereur de la philosophie allemande » (cf. lettre no 334).
Lettre 342
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 114.
2. Vossische Zeitung, 3 septembre 1854 (à l’occasion de la mort de Schelling).
Lettre 343
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 629-631.
2. L…… dans IM1.
3. Il s’agit du Magazin für Literatur des Auslandes de Joseph Lehmann, Berlin, 1854, nos 106-108 (5, 7 et 9 septembre),
avec un article sur les Lettres de Frauenstädt et le livre de Weigelt : « Arthur Schopenhauer, ein in England gerühmter deutscher
Philosoph der Gegenwart », signé : Dr. Hr.
4. Ueber die Immanenz des Willens in den Dingen und in der Seele. Ein Versuch die Frage : Wie ist das Erkennen
möglich ? nach Arthur Schopenhauers Principien zu lösen (« Sur l’immanence de la volonté dans les choses et dans l’âme. Essai
pour résoudre la question : comment la connaissance est-elle possible ? d’après les principes d’Arthur Schopenhauer »), par le
Dr. Pomtow, programme du Lycée de Joachimsthal à Berlin, 29 septembre 1854 (HN V, [423]). Becker critique avec virulence ce
programme, qu’il avait emporté lors d’une visite à Francfort, dans une lettre du 12 avril 1855 (D XIV, no 551).
5. Les articles de Lindner dans la Vossische Zeitung (3 septembre, 29 septembre et 15 octobre).
6. L’auteur des notes de l’article dans les nos 106-108.
7. Cf. La Flûte enchantée, I, 23 : « Si seulement chaque homme courageux pouvait trouver ces sonnettes, / ses ennemis
disparaîtraient sans difficultés. »
8. Le comte Josef Radetzky von Radetz (1766-1858), chef des armées autrichiennes, vainqueur des Italiens (campagne de
six jours), ensuite gouverneur général de l’Empire royal de Lombardie et Vénétie jusqu’en 1857.
9. Mis à part le commandant de Spandau, ici cité pour la première fois, cette liste comprend les officiers de Magdebourg,
évoqués dans une lettre à Lindner (cf. lettre no 330 et note), et le général prussien de Ruppin, évoqué dans la lettre n o 321.
L’évocation de Neisse fait sans doute écho à un passage de la lettre de Frauenstädt ; il n’en sera plus question par la suite.
Lettre 344
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Hübscher, « Ein unveröffentlicher Brief Schopenhauers », Montagsblatt, supplément
scientifique de la Magdeburger Zeitung, 75e année, no 17 (24 avril 1933).
2. De la volonté dans la nature, 2e édition, 1854.
Lettre 345
1. M Archives Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 152-153.
Lettre 346
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 631-633.
2. Le modèle pour l’impression de la 2e édition de De la vision et des couleurs.
3. Cf. Goethe, Faust I, v. 2376-2377.
4. L…… dans IM1.
5. Antonio Regazzoni, magnétiseur de Bergame, a organisé des séances à Francfort en octobre et décembre 1854 (cf. lettre
no 348), auteur du Nouveau Manuel du magnétiseur praticien. Précédé d’une introduction par un magnétiseur spiritualiste, Paris,
1859.
6. K….. dans IM1.
7. Julius Frauenstädt, « Ueber den letzten Unterschied der philosophischen Systeme : Mit Rücksicht auf Adolf
Trendelenburgs Schrift : Spinozas Grundgedanken und dessen Erfolg’ », in Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik,
tome 25, 1854, p. 77-94. Adolf Friedrich Trendelenburg (30 novembre 1802 - 24 janvier 1872), professeur à l’Université de
Berlin depuis 1833, élève de Schleiermacher, critique de Hegel et de Herbart.
8. Hermann Ulrici (23 mars 1806 - 11 janvier 1884), adversaire théiste de la philosophie de Hegel, coéditeur (avec I. H.
Fichte et J. U. Wirth) de la Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik. Auteur de Das Grundprinzip der Philosophie («
Le principe fondamental de la philosophie »), 1845-1846 ; Glauben und Wissen (« Foi et savoir »), 1858 ; Gott und die Natur («
Dieu et la nature »), 1861 ; Gott und der Mensch (« Dieu et l’homme »), 1866. Ulrici avait écrit une postface pour l’article de
Frauenstädt : « Einige Bemerkungen über den Gegensatz von Idealismus und Realismus und Schopenhauer’s Auffassung
desselben. Eine Entgegnung auf die vorstehende Abhandlung », in Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik, tome 25,
1854, p. 94-114.
9. Il s’agit d’une recension rédigée par Erdmann et portant sur deux publications d’A. Foucher de Careil (Réfutation inédite
de Spinoza par Leibniz, Paris, 1854 et Lettres et opuscules inédits de Leibniz, Paris, 1854), in Zeitschrift für Philosophie und
philosophische Kritik, tome 25, 1854, p. 311-320.
10. Préface à De la volonté dans la nature, 2e édition.
11. c……. dans IM1.
12. cf. lettre no 351 : « activités de propagande auprès d’un privat-docent de Göttingen ». Il ne s’agit d’aucun des quatre
privat-docents entrés à la Faculté de Philosophie entre 1848 et 1853 ; parmi les quatre nouveaux de l’année 1854, un seul est à
retenir : Christoph Heinrich Friedrich Bialloblotzky (1799-1869), auparavant théologien et missionnaire.
13. Il s’agit sans doute de Wilhelm Schlötel, Die Logik, édition remaniée, Göttingen, 1854.
14. Francisque Bouillier, Histoire de la philosophie cartésienne, vol. I et II, Paris, 1854 (3e éd. 1868).
Lettre 347
1. M Martin Hürlimann, Zurich. IM1 Hübscher, Jahrb. no 40 (1959), p. 30 sq.
Lettre 348
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 633-636.
2. « La vie est mouvement » ; Schopenhauer attribue cette phrase à Aristote ; cf. De anima, I, 2, 403b25.
3. William Lee, Der Selbstarzt bei äusseren Verletzungen und Entzündungen aller Art. Oder : Das Geheimniss, durch
Franzbranntwein und Salz alle Verwundungen, Lähmungen, offene Wunden etc. ohne Hülfe des Arztes zu heilen (« Le médecin
de soi pour des blessures extérieures et des irritations en tous genres. Ou : Le secret pour guérir, avec de l’eau-de-vie et du sel,
toutes les blessures, paralysies, blessures ouvertes etc. sans le secours d’un médecin »), traduit de l’anglais, 4 e éd., Quedlinbourg,
1849 (HN V, no [898]).
4. Frauenstädt avait signalé à Schopenhauer le livre de H. Fr. W. Hinrichs, Das Leben in der Natur. Bildungs- und
Entwicklungsstufen desselben in Pflanze, Thier und Mensch (« La vie dans la nature. Ses degrés de formation et d’évolution dans
la plante, l’animal et l’homme »), Halle, 1854 ; Frauenstädt avait écrit qu’il s’agissait d’un curieux avorton de l’hégélianisme,
citant la p. 82 où l’intériorité de la nature se trouvait déniée et identifiée avec son extériorité. À la p. 37 de cet ouvrage, Hinrichs
polémique contre Schopenhauer.
5. cf. lettre no 330 ; Lindner avait envoyé l’ouvrage le 11 novembre 1854.
6. En réponse à la « bigoterie » en France évoquée par Schopenhauer dans la lettre n o 346, Frauenstädt avait parlé d’un
phénomène semblable en Prusse, en se référant nommément au livre de Stahl, Umkehr der Wissenschaft (« Conversion de la
science ») et à celui de Raumer, Schulregulative (« Règles scolaires »).
7. Plus exactement le Frankfurter katholisches Kirchenblatt, dans lequel se trouvait un article du curé de Francfort, Beda
Weber (1798-1858), Wissenschaftliche Strömungen in Frankfurt am Main (« Courants scientifiques à Francfort-sur-le-Main »).
Cet article polémiquait contre Carl Vogt et contre Schopenhauer dont le livre De la volonté dans la nature, selon Weber, aboutit
au constat suivant : « Il n’y a pas de Dieu personnel, ni de liberté personnelle, ni de pérennité personnelle après la mort de
l’individu. »
8. À propos de Regazzoni (lettre no 346), Frauenstädt avait répondu à Schopenhauer qu’il n’y croyait pas du tout, se
référant à un article paru dans les Grenzboten, 13e année, no 46, p. 941 sq., intitulé « Ein moderner Wunderthäter ». Dans cet
article, le Dr. Schiff et le Dr. Friedleben, tous deux médecins à Francfort, font le compte-rendu d’observations scientifiques
effectuées au domicile de Regazzoni, et ayant abouti à un diagnostic négatif. Pour d’autres précisions sur le cas Regazzoni, cf.
Moritz Werner : « Schopenhauer und Stoltze », in Frankfurter Zeitung, 16 mai 1913, 134 ; William von Schröder « Der
Frankfurter Skandal um den Magnetiseur Regazzoni », in Frankfurter Allgemeine Zeitung, 31 décembre 1957.
9. Le Dr. phil. Johann Joseph Oppel (1815-1894), professeur de mathématiques et de physique au Lycée de Francfort
depuis 1848 ; cf. également lettre no 355.
10. Grande est la force de la vérité et elle l’emportera (cf. lettre no 287).
11. Cf. note 4 de la lettre no 343.
12. Johann Eduard Erdmann, Preussen und die Philosophie. Akademische Rede, gehalten zum Geburtsfest Sr. Maj. des
Königs (« La Prusse et la philosophie. Discours académique tenu à l’occasion de l’anniversaire de Sa Majesté le Roi »), Halle,
1854.
Lettre 349
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 114-115.
2. cf. lettre no 348.
3. Karl Philipp Moritz (15 septembre 1757 - 26 juin 1793), auteur du roman autobiographique Anton Reiser (tome 1-4,
1785-1790).
4. Reinhard Keiser (1674-1739), compositeur principal de l’opéra de Hambourg, a composé 116 opéras pour cette
institution, ainsi que de nombreuses messes, sérénades, etc. C’est dans l’ouvrage de Lindner que Keiser fut mentionné pour la
première fois.
5. Karl Ditters von Dittersdorf (2 novembre 1739 - 24 octobre 1799), compositeur, a jeté les bases pour l’opéra comique
allemand, auteur de 44 opéras, concertiste de chambre, adepte de Haydn.
6. Je n’y peux rien, Monsieur — très désolé, en effet.
7. British Quartely Review, janvier 1855 (cf. lettre no 350).
8. Jeter un œil.
9. Ce n’est qu’une allusion.
10. P, II, chap. IX, § 131.
11. Suggestions originales et renversantes.
Lettre 350
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 636-637.
2. Frauenstädt avait parlé de la forme serpentine de ses « mouches volantes ».
3. cf. lettre no 252.
4. 1) Une lettre du Dr. Franz Bizonfy (1828-1912), réfugié en Suisse après le combat d’indépendance hongrois de 1848,
contenant une invitation pour Zurich (D XV, no 537). Bizonfy avait été introduit à la philosophie de Schopenhauer par son ami
Georg Herwegh. Ce n’est qu’en 1867, après plusieurs autres années d’exil à Hambourg et à Londres, qu’il put retourner en
Hongrie, où il dirigea une « École libre » qui défendait la philosophie schopenhauérienne. Cf. lettre de Schopenhauer à Doss
(lettre no 351) et Gespräche, 2., p. 194-195). 2) Une lettre de l’étudiant berlinois K. de Roth, 12 décembre 1854 (D XV, no 538),
contenant soit la demande de lui remettre Le Monde comme volonté et représentation, soit les remerciements pour la réponse
positive à sa demande du 20 décembre 1854 (D XV, no 539).
5. Il s’agit de l’impression hors commerce de L’Anneau des Nibelungen (HN V, no [1583]). Schopenhauer n’a pas répondu
à l’envoi ; le livre est pourvu de commentaires critiques.
6. Cf. note 18 de la lettre no 334.
7. « Puanteur juive » [sic].
Lettre 351
1. IM1 Carl Baron du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 31 décembre 1872, no 360.
2. Il s’agit d’une longue lettre de remerciement pour l’envoi de la 2 e édition de De la volonté dans la nature, le 30
décembre 1854 (D XV, no 542).
3. Naissance le 24 octobre de la fille de von Doss, Christine (1854-1930), qui épousera plus tard l’entrepreneur Mayer de
Mannheim. Domicile fixe à Partenkirchen, où elle fut au centre des mondanités (Paul Heyse, C. F. Meyer, Franz Lenbach, Klara
Ziegler, etc.), tout en perpétuant une certaine tradition schopenhauérienne. Cf. Hans Taub, « Christine Mayer-Doss », Jahrb. no
18 (1931), p. 375-376.
4. Dans sa ferveur pour Regazzoni, Schopenhauer n’avait pas bien lu le passage de la lettre de Doss qui faisait référence
aux Grenzboten : « dans certains domaines, ces “messagers” [Grenzboten = messagers frontaliers] n’apportent pas les
renseignements les plus fiables. »
5. « Pour la maison et le foyer » (Cicéron, De natura deor., II, 40, 94).
6. Malheur aux vaincus ! (cf. lettre no 322).
7. Von Doss avait demandé à Schopenhauer s’il voulait bien envoyer au professeur de sinologie Carl Friedrich Neumann
un exemplaire de la 2e édition de De la volonté dans la nature, dans lequel se trouvait la critique d’un ouvrage de Neumann (cf.
N, « Sinologie », in fine).
8. David Asher, « Ein Besuch bei Arthur Schopenhauer », in Unterhaltungen am häuslichen Heed, 1854, III, 2, p. 27-30.
9. cf. lettre no 343.
10. cf. lettre no 348.
11. Recension de la 2e édition de De la volonté dans la nature, in Didaskalia, no 307, 24, décembre 1854, repris dans le
Jahrb. 21 (1934), p. 195.
12. Cf. note 18 de la lettre no 334.
Lettre 352
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 638-640.
2. Il s’agit d’un bref compte-rendu de la 2 e édition de De la vision et des couleurs, publié dans la Vossische Zeitung. Un
certain Dr. Bernard avait alors reproché à Frauenstädt de ne pas avoir mentionné Purkinje, objet d’éloges de la part de Goethe.
3. Frauenstädt avait lu dans les Grenzboten que Johannes Scheer avait mis en exergue de son roman Nemesis un passage
des Parerga : « Si l’on se représente, dans la mesure du possible, la somme de détresse, de douleur et de souffrance en tout genre
que le soleil éclaire dans sa course, alors on admettra qu’il aurait été préférable que ce dernier ne provoque pas le phénomène de
la vie, aussi peu sur la Terre que sur la Lune, laissant la surface de l’une aussi bien que de l’autre dans un état cristallin » (P, II,
chap. XI, § 156).
4. Karl Fortlage, System der Psychologie als empirische Wissenschaft aus der Beobachtung des inneren Sinnes (« Système
de la psychologie comme science empirique à partir de l’observation du sens intime »), 2 parties, Leipzig, 1855. Schopenhauer ne
se réfère ici qu’à la première partie. Avec la deuxième partie, qu’il lira pendant l’été 1855, il dira avoir « gâché 1 heure ½ » (cf.
lettre no 366).
5. L…… dans IM1.
6. Schopenhauer a mal compris le passage suivant de la lettre de Frauenstädt : « Lindner a ri de ce que le Hongrois [le Dr.
Kormann] a dit sur votre métaphysique de l’amour sexuel, car il pense que votre métaphysique de l’amour sexuel est originale au
plus haut point. »
7. Il s’agit de la lettre de von Bruchhausen, 24 novembre 1854 (D XV, no 535) et de la lettre de Grimm, 1er janvier 1855 (D
XV, no 543), et peut-être de la deuxième lettre de Bizonfy, 29 janvier 1855 (M Archives Schopenhauer) et de la deuxième lettre
de K. de Roth, 20 décembre 1854 (D XV, no 539).
8. v. B………. dans IM1.
9. En octobre 1851 ; cf. Gespräche, p. 164 sq.
10. Cf. Matthias Claudius, Die Nachahmer, Sämtliche Werke, partie I, p. 161.
11. Quatre épigrammes manuscrites en hommage à Schopenhauer. L’auteur était Carl W. Grimm (né en 1799), curé à
Kloppenheim près de Wiesbaden ; après s’être formé à la pensée de Schleiermacher, il s’intéresse aux œuvres de Schopenhauer à
partir de 1854. Il fera suivre d’autres épigrammes, éditées ou non, en partie sous le pseudonyme de Placidus. Plus tard, Grimm
deviendra partiellement fou et finira à l’asile. Pour sa biographie, cf. Carl Rasch dans les Grenzboten, 49e année, 1890, III, p. 498-
509.
Lettre 353
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 640-641.
2. L…… dans IM1.
3. Alessandro Tassoni (1565-1635), poète à la cour de François Ier d’Este, auteur de la première comédie épique moderne,
La secchia rapita, 1622 (HN V, no [1816]), et Dieci libri di pensieri diversi, Venise, 1636 (HN V, [1815]).
4. Cotta (Morgenblatt) avait refusé un article de Frauenstädt sur la théorie des couleurs de Schopenhauer. L’article paraîtra
plus tard dans les Blätter für literarische Unterhaltung, 1855, no 37.
5. Wilhelm Theodor Oehmer, propriétaire de l’entreprise Th. Oehmer, Brückenquai, au coin de la Fahrgasse (Livre
d’adresses 1855).
Lettre 354
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 641-644.
2. Franz Hoffmann (1804-1881), professeur à Wurzbourg, disciple de Franz von Baader, éditeur de ses œuvres complètes
en 16 tomes, Leipzig, 1850-1860. Les « invectives » se trouvent dans le tome 2 (1851), p. 298, 301 ; le tome 3 (1852), p. 366,
428 sq. ; le tome 6 (1854), p. 102 ; le tome 9 (1855), p. 82.
3. Le zoologue genevois Carl Vogt (1817-1895) avait fait sensation avec son livre Köhlerglaube und Wissenschaft (« Foi
du charbonnier et science »), Giessen, 1855, 4e éd. 1855 (!) où il attaquait la conférence de Rudolph Wagner, Menschenschöpfung
und Seelensubstanz (« Création de l’homme et substance de l’âme »), prononcée à Göttingen en 1854.
4. Sch…. dans IM1. Le lieutenant Schultz, mathématicien intégré au corps d’ingénieurs à Königsberg, avait envoyé à son
ami Frauenstädt une critique acerbe des doctrines mathématiques de Rosenkranz, et Frauenstädt avait ensuite transmis le
manuscrit à Schopenhauer.
5. Pas le moins du monde !
6. M, II, chap. 4.
7. Karl Rosenkranz, Psychologie, oder die Wissenschaft vom subjektiven Geist. 2. sehr verbesserte Auflage. Nebst
Widerlegung der von Herrn Dr. Exner gegebenen vermeintlichen Widerlegungen der Hegelschen Psychologie (« Psychologie, ou
la Science de l’esprit subjectif. 2 e édition très améliorée. Avec une réfutation des prétendues réfutations de la psychologie
hégélienne données par le Dr. Exner »), Königsberg, 1843.
8. Lettre d’Adam von Doss, 20 février 1858 (D XV, no 549).
9. Rosenkranz écrit, à la fin de son article « Pour caractériser Schopenhauer », Deutsche Wochenschrift de Karl Gödeke,
cahier 22, p. 684 : « Tenons-nous-en, plutôt qu’à cette philosophie de la mort, à la philosophie de la vie de Kant, en souhaitant
qu’au lieu de l’optimisme désormais si courant chez nous les Allemands, et à partir de la croyance en une victoire infaillible du
Bien véritable, surgisse aussi le désir de l’action et une franche ouverture pour de grands actes. Une philosophie comme celle de
Schopenhauer, avec ses sons de flûte plaintifs, nous pousserait dans un sommeil définitif, dans la région mortelle de la passivité
indienne, alors que nous avons besoin que le son de trompette de l’impératif catégorique provoque en nous l’enthousiasme pour
nous battre contre les misères et les peines de la vie. » La réponse de Doss : « Il n’y a rien de mieux à faire que de renvoyer les
esprits critiques à ce que disait le Christ sur l’affairée Marthe et la contemplative Marie ! »
10. Cf. Luc 10, 41-42.
11. D’après Faust I, v. 1627-1630.
12. Neisse, Neuruppin, Spandau et Königsberg] Cf. également l’énumération dans la lettre no 343.
13. Cf. note 3 de la lettre no 352.
14. À ma gloire.
Lettre 355
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 645-647.
2. Julius Frauenstädt, Die Naturwissenschaft in ihrem Einfluss auf Poesie, Religion, Moral und Philosophie (« La science
de la nature et son influence sur la poésie, la religion, la morale et la philosophie »), Leipzig, 1855 (HN V, no [200]).
3. Jules (alias Isaac) Lunteschütz (1822-1893), élève de Philipp Veit à Francfort (1837-1838), a fréquenté l’École royale
des beaux-arts de Paris (1838-1845), retour à Francfort en 1845, portraitiste et écrivain (un article sur Philipp Veit pour le
Journal de Francfort et une traduction française des écrits de Passavant sur Raphaël). Depuis l’hiver 1854-1855, il partage avec
Schopenhauer la table d’hôte de l’Hôtel d’Angleterre. Sur ses portraits de Schopenhauer, cf. également Gespräche, p. 100 sq.
4. Franz Hoffmann et son édition des œuvres de Baader.
5. « Qui lira cela ? Deux personnes, ou personne » (Perse, Sat. I, 2).
6. Dr. phil Johann Joseph Oppel ; cf. lettre no 348.
7. Frauenstädt avait relevé un article sur le bouddhisme par Barthélemy-Saint-Hilaire (dans le Compte rendu de l’Académie
des Sciences morales et politiques) où le bouddhisme était qualifié de « foi hideuse ».
8. N, préface.
9. Karl August Candidus (1817-1872), curé à Saarunion et à Nancy, à partir de 1858 prêtre réformé à Odessa. Sa « petite
philosophie de la religion » : Einleitende Grundlegungen zu einem Neubau der Religionsphilosophie (« Fondements introductifs
pour une reconstruction de la philosophie de la religion »), Leipzig, 1855. Comme il l’affirme dans une lettre envoyée de « Nancy
le 2e jour de Noël 56 », il a étudié les Critiques de Kant alors qu’il était vicaire et a trouvé par lui-même l’équation de la chose en
soi et de la volonté, sans connaître Schopenhauer.
10. Incroyable à dire.
Lettre 356
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Deutsches Museum (éd. par Robert Prutz), 1865, no 34, p. 275.
2. cf. lettre no 335 et note.
Lettre 357
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 116.
2. Recension de la « Missive ouverte », Vossische Zeitung, 1855, no 142.
3. La conférence de G. W. Körber évoquant l’influence de la philosophie postkantienne sur les traits religieux du temps
présent, prononcée le 14 octobre 1854 au Lycée Sainte-Élisabeth à Breslau, reprise dans le Programme du lycée, 28 mars 1853.
Le Dr. G. W. Körber (1817-1885), professeur à l’Université et au Lycée Sainte-Élisabeth, a intitulé son cours du semestre d’été
1857 De philosophia Schopenhaueriana ejusque vi in scientiam naturalem, et a répété ce cours huit fois jusqu’à sa mort.
4. Körber n’aborde Schopenhauer qu’à la fin de sa conférence : « Déjà commencent à luire des aurores meilleures,
promises par une philosophie de l’avenir qui non seulement ne s’approprie pas les vérités fondamentales de la religion pour
abolir par ce biais leur essence et leur être, mais encore ne les écarte ni ne les nie d’emblée — une philosophie qui pourtant n’est
ni une philosophie théologisante, ni une théologie philosophante (ce que nous avons déjà en masse), mais une philosophie pure et
authentique qui, en s’appuyant sur le sol kantien, avance seulement à l’intérieur de ce qui peut être connu, une philosophie qui
tient à sa position cosmologique, et qui abandonne bien volontiers aux mains du culte l’ornement et la consolation qui nous sont
donnés dans la métaphysique. On peut espérer qu’après la modification de certains points de vue, l’école qui semble se former
depuis peu à la philosophie d’Arthur Schopenhauer, dédaigné pendant quarante ans, aura acquis le mérite d’avoir sauvé le
concept de Dieu propre au christianisme authentique et de l’avoir délivré des fers d’une sagesse du monde qui jusque-là l’avait
décomposé ou nié de multiples façons. » Cf. également le commentaire que fait Schopenhauer de ce passage dans la lettre à
Frauenstädt du 29 juin 1855 (lettre no 358).
Lettre 358
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 647-653.
2. Cf. note 2 de la lettre no 355.
3. « Le dualisme entre l’esprit et la matière, compris comme deux substances fondamentalement différentes, qui
aujourd’hui encore hante les têtes de nombreux philosophes et se trouve au fondement de leurs systèmes métaphysiques, repose
sur une distinction conceptuelle et non sur des faits découverts par la science de la nature, car la nature, du moins jusqu’à
maintenant, ne nous a pas encore proposé de chose simplement étendue et privée d’un principe immatériel. Car toute matière est
animée par un être spirituel, par une force invisible seulement reconnaissable dans ses effets : elle ne nous a pas proposé non plus
une chose simplement pensante privée de toute étendue, car ce qui pense en nous, le cerveau, apparaît étendu. »
4. Frauenstädt y démontre que l’organisme n’est pas la cause explicative ultime des fonctions, mais que c’est la finalité des
fonctions qui explique l’organisme.
5. À lire de plus près les explications de Frauenstädt portant sur les divers usages du merveilleux (p. 38 de l’ouvrage), son
rapprochement ne tendait pas à une identification.
6. « Si l’on trace la distinction entre une nature inorganique morte et une nature organique vivante, cela ne repose que sur
une conception trop étroite de la vie, car par là l’on fait d’un genre particulier de la vie, le genre vivant, l’essence de toute vie. Là
où, dans un sens large, la vie signifie quelque chose comme : agir à partir de soi, exprimer des forces intérieures propres, toute la
nature est vivante, aussi bien l’inorganique que l’organique. »
7. N, « Astronomie physique ».
8. C, § 1, in fine.
9. À la p. 22 de son ouvrage, Frauenstädt avait réparti les causes motrices en causes mécaniques, stimuli et motifs.
10. Cf. Gottfried August Bürger : Der Kaiser und der Abt, in Sämmtliche Schriften, éd. par K. Reinhard, Göttingen, 1796,
tome 2, p. 70 sq.
11. Il s’agit sans doute de Johann Dietrich Hoffmann, professeur de musique, Stiftstrasse 14 (livre d’adresses 1853) et
Saalgasse 26 (livre d’adresses de Francfort, 1855, 1857), c’est-à-dire près de l’ancien domicile de Schopenhauer (1833-1836),
Saalgasse 23. « Il y a 16 ans » : c’est-à-dire en 1839.
12. Franz von Baader, Sämtliche Werke, Leipzig, tome VII, 1854, éd. par Franz Hoffmann. Quelques extraits de la préface
concernant Schopenhauer : « Le second penseur qui croit avoir l’avenir pour lui est Arthur Schopenhauer. Récemment, ce
philosophe a découvert que le public l’a découvert, enfin découvert, alors que son ouvrage principal, Le Monde comme volonté et
représentation, a paru il y a déjà 45 ans [!] » (p. XVI sq.). « Si le système de Schopenhauer était vraiment un système d’une portée
considérable, alors il aurait dû occuper le devant de la scène immédiatement après sa parution, surtout parce que sa charpente
compendieuse et, à supposer que sa position contradictoire en soi le permette, son mode d’exposition attrayant et clair, n’ont
jamais présenté de difficultés importantes pour l’entendement » (p. XVIII). « Ce n’est qu’après trois ou quatre décennies — dans
les cris plaintifs inouïs et incessants que Schopenhauer, avec une endurance admirable, a proféré contre l’occultation
intentionnelle et l’étouffement bien connu de ses mérites géniaux voire surhumains — qu’il a enfin réussi à persuader quelques
jeunes chercheurs, la plupart du temps de l’école hégélienne, de cultiver la plante du schopenhauérianisme, pour lutter contre les
aveuglements incroyables de la philosophie actuelle et pour glorifier cette doctrine comme donnant la mesure encore jamais
atteinte de la sagesse humaine » (p. XIX). Et pourtant, Hoffmann présente Schopenhauer comme « un homme pourvu d’un talent
génial, d’une vaste érudition, excellant dans l’art de l’exposition attrayante et de bon goût » et ses mots contiennent « une
multitude d’idées des plus stimulantes, de remarques subtiles et d’affirmations dont il n’est pas rare qu’elles soient entièrement
vraies » (p. XX).
13. Hoffmann démentira formellement avoir utilisé ces expressions (dans Ueber die Baader’sche und Schopenhauer’sche
Philosophie, Athenaum, tome 2, 1863, p. 401).
14. c…… dans IM1.
15. P, II, chap. XV.
16. Dans un article de la Vossische Zeitung, Lindner avait appelé une « contribution à l’esthétique du laid » le soupçon de
Rosenkranz portant sur le pays d’origine de l’article de la Westminster Review (cf. lettre no 334), par allusion à l’ouvrage de
Rosenkranz Ästhetik des Hässlichen (« Esthétique du laid »), Königsberg, 1853.
17. Rossini, Le Barbier de Séville.
18. Rudolf von Raumer, Die doppelte Recension des Textes von Kant’s Kritik der reinen Vernunft. Einige philologische
Bemerkungen (« La double recension du texte de la Critique de la raison pure de Kant. Quelques remarques philologiques »),
discours d’ouverture tenu au sénat académique de l’Université royale Friedrich-Alexander d’Erlangen, Erlangen, 1854 ( HN V, no
[437]). Raumer était professeur de philologie et de littérature allemandes à l’Université d’Erlangen.
19. Il s’agit de la lettre à Rosenkranz et Schubert du 24 août 1837 (lettre n o 157), partiellement publiée dans la préface de
Rosenkranz à la Critique de la raison pure (édition complète de Rosenkranz et Schubert, II, p. X sq.).
20. f……… dans IM1.
21. « Calomniez audacieusement, il en restera toujours quelque chose » ; cf. Joh. Olorinus Variscus, Ethnogr. Mundi,
1608, règle 9 ; Francis Bacon, De dignit. et augment. scient., 1605, l. VIII, chap. 2, 34.
22. Référence au chevalier Bayard.
23. Jacob Moleschott (1822-1893), privat-docent à Heidelberg (1847), ensuite professeur de physiologie à Zurich, Turin et
Rome. Auteur de Der Kreislauf des Lebens (« La circulation de la vie »), 1852, 2e éd. 1855.
24. En 1853, Moleschott avait proposé à F. A. Brockhaus l’édition du manuscrit Das Wesen des Menschen (« L’essence de
l’homme ») en deux tomes, 120 à 150 feuilles d’impression, et avait demandé 100 florins rhénans par feuille ; mais ces
négociations n’avaient pas abouti. C’est peut-être ce que le Dr. A. Mayer a raconté à Schopenhauer lors de sa visite le 15 juin
1853 (cf. Gespräche, p. 159).
25. Ludwig Büchner (1824-1899), médecin à Darmstadt, principal représentant du matérialisme physiologique avec Carl
Vogt et Jacob Moleschott. Auteur de Kraft und Stoff (« Force et matière »), 1855, 21e éd. 1904, et Natur und Geist (« Nature et
esprit »), 1857.
26. c……. dans IM1.
27. Quelques précisions sur la personne d’Edward Young se trouvent dans une lettre d’Alexander von Humboldt au baron
von Bunsen, du 3 juin 1855 : « Le départ précipité de Monsieur Edward Young — un Américain du Nord doté d’un talent
original et (ce qui est le plus merveilleux !) qui s’est exclusivement occupé pendant 3 ans, à Göttingen et Halle, de philosophie
allemande et de bibliographie historique — m’oblige, mon très honoré ami, à simplement vous donner en quelques lignes un
signe de vie, c’est-à-dire d’amour et de profond respect. […] Je suis persuadé qu’il me sera aisé de vous demander de recevoir
amicalement Monsieur Young. À Halle, il a traduit en anglais l’Histoire de la philosophie allemande depuis Kant du professeur
Erdmann, la traduction sera publiée en même temps à Londres et à New York » (Briefe von Alexander von Humboldt an
Christian C. Josias von Bunsen, Leipzig, 1869). Cf. également Gespräche, p. 195 sq. Après sa visite, Young resta en contact
épistolaire avec Schopenhauer. En mai 1856, il lui communiqua le nom de l’auteur de l’article dans la Westminster Review : John
Oxenford ; cf. lettre à Julius Frauenstädt du 21 mars 1856 (lettre no 386).
28. Schopenhauer voulait sans doute écrire « Cambridge » et non « Oxford ».
29. Le premier portrait peint par Lunteschütz ; cf. Bildnisse, no [6].
Lettre 359
1. IM1 D XVI, p. 181 sq.
Après le dernier incident, Sibylle Mertens craignait d’autres ennuis avec Schopenhauer. En vendant ses parts de terrain
d’Ohra à l’emphytéote Friedrichsen, elle tenta de s’affranchir de cette relation. Dans une lettre du 9 janvier 1855 ( D XV, no 544)
elle fit part de son intention à Schopenhauer, dans une autre lettre du 27 juin 1855 ( D XV, no 555), elle fit savoir que les
négociations avaient abouti et demanda à Schopenhauer de donner son accord pour une clause le concernant. Sibylle reçut de
Friedrichsen 2 000 thalers pr. c., Friedrichsen s’engagea en outre à lui verser une rente viagère à vie de 180 thalers. La clause
était censée assurer à Schopenhauer sa rente viagère de 150 thalers après la mort de Sibylle. Schopenhauer donna son accord dans
la présente procuration pour Hermann von Almonde. Il suivit par ailleurs le projet de Sibylle en vendant également en 1856 ses
deux neuvièmes du terrain à Friedrichsen, en échange d’une rente viagère de 150 thalers.
Lettre 360
1. M Archives Schopenhauer. Inédit.
Lettre 361
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Georg Hübscher, catalogue de la librairie n o 22, Heinrich
Hugendubel, Munich, 1905, p. 83, sans titre ni signature.
Lunteschütz avait probablement emprunté les daguerréotypes pour finir le portrait.
Lettre 362
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 653-656.
2. La recension par Frauenstädt d’un ouvrage de Helmholtz, Über das Sehen des Menschen (« Sur la vision de l’homme »),
conférence prononcée le 27 février 1855 devant le monument de Kant à Königsberg, Leipzig, 1855, dans Europa, no 27 (cf. lettre
no 377). À la fin de son compte-rendu de la conférence de Helmholtz, Frauenstädt écrit : « Les explications par Helmholtz du
processus psychologique de la vision viennent non seulement confirmer l’idéalisme de Kant, mais aussi celui de Schopenhauer.
Schopenhauer, le continuateur de la doctrine kantienne, a également démontré tout récemment, dans la 2 e édition de son ouvrage
De la vision et des couleurs (Leipzig, chez Hartknoch, 1854), comment la constitution subjective de l’organe de vision et le
jugement de l’entendement immédiatement lié aux sensations prenaient part à la conception du monde extérieur. Ainsi, lui et
Helmholtz se tiennent sur le même sol ».
3. En passant.
4. b…….. dans IM1.
5. Goethe, Venetianische Epigramme, no 79.
6. Christian Hermann Weisse, Philosophische Dogmatik oder Philosophie des Christentums, tome 1, Leipzig, 1855.
Christian Hermann Weisse (1801-1866), professeur à l’Université de Leipzig, d’abord hégélien, ensuite défenseur de la position
théiste de la philosophie positive de Schelling et adversaire de l’idéalisme panthéiste de Hegel. En septembre 1855, Weisse tenta
de faire connaissance avec Schopenhauer, mais Schopenhauer ne le laissa pas entrer chez lui (cf. lettre no 367). En 1856, il mit au
concours une question sur la philosophie schopenhauérienne ; Seydel, adversaire de Schopenhauer, remporta le prix.
7. Cf. Jér 17, 9 : « Plus que toute chose, le cœur de l’homme est trompeur, et incurablement mauvais. »
8. (Scholasti docuerunt,) quod aeternitatis non sit temporis sine fine aut principio successio, sed Nunc stans … (Hobbes,
Leviathan, c. 46 ; opera latina, Londres, 1841, vol. III, p. 500, 29).
Lettre 363
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Carl Rasch, Grenzboten, 49e année, 1890, III, 503.
2. Quatre épigrammes envoyées le 1er janvier 1855 (D XV, no 543).
3. Lettre du 17 juillet 1855 (D XV, no 559) qui dans les mois suivants fut suivie par d’autres lettres et épigrammes.
Lettre 364
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 656-658.
2. Pour répliquer au reproche de trop grande « tolérance » formulé par Schopenhauer dans sa dernière lettre, Frauenstädt
avait écrit qu’aucune rédaction n’accepterait ses recensions s’il « ratatinait » les professeurs comme le souhaitait Schopenhauer,
et que c’était précisément grâce à son approche plus mesurée qu’il avait réussi à faire publier ses articles sur la philosophie
schopenhauérienne, rendant ainsi à cette dernière les services tant appréciés par Schopenhauer.
3. Cf. Schiller, Don Carlos, II, 1.
4. Johann Ulrich Wirth (1810-1879), curé et co-éditeur de la Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik, avait
rédigé dans cette même revue un compte-rendu des nouvelles parutions philosophiques (tome 24, cahier 2, p. 281-321) en
critiquant Schopenhauer : « L’établissement de la volonté en principe de la philosophie, telle qu’elle se trouve accomplie, selon le
modèle précurseur de Schopenhauer, dans les écrits de Reiff et de Noack, s’explique finalement par le besoin de penser l’essence
fondamentale comme quelque chose d’auto-affectif, de pour-soi, de monadique » (p. 286) ; « Il est clair que la volonté ne peut
être comprise que comme forme de l’auto-position de l’Un, et ce dernier comme sa substance ; et que donc la volonté n’est
nullement un pour-soi, n’est pas une substance ; que bien plutôt la volonté ne peut être que l’activité d’un sujet qui veut. Poser la
volonté en tant que telle comme principe absolu du monde correspond tout à fait à la même hypostase (abstraite, idéaliste) que
celle qui prédominait dans la philosophie hégélienne, dans la mesure où cette hypostase déterminait la pensée, le concept, etc.,
comme un pour-soi et comme le principe absolu du réel » (p. 307) ; « À quel point Schopenhauer, l’auteur du principe évoqué
(qui par ailleurs trouve ses fondements idéalistes dans le système de J. G. Fichte) n’en a pas donné la démonstration exigée, cela
ne peut être discuté ici. Noack ne l’a pas donnée non plus » (p. 308).
5. Si je ne m’abuse.
6. Article portant sur l’ouvrage Ciel et Terre (1854) de Jean Reynaud (1806-1863), disciple de Saint-Simon.
7. La première peinture à l’huile de Lunteschütz (cf. lettres nos 355, 358 et 362).
8. Ici, comme dans des lettres ultérieures adressées à Becker (lettre no 377) et von Doss (no 381), Schopenhauer semble
avoir mal compris les propos de Wiesike. Le tableau était tout simplement accroché dans la chambre de lecture de Wiesike (cf.
Lindner, in Lindner / Frauenstädt, p. 99).
9. Mozart, La Flûte enchantée, I, 19.
10. G…. dans IM1.
11. À renvoyer !
12. V…… dans IM1. Max Voigtel (né en 1827), juge d’arrondissement à Bourg près de Magdebourg, adressera encore
deux autres lettres à Schopenhauer, le 16 janvier 1856 (IM1 Hübscher, Jahrb. no 24 (1937), p. 113-117) et le 10 février 1857 (IM1
Hübscher, Jahrb. no 24 (1937), p. 117-119), mais sans recevoir de réponse. Cf. Gespräche, p. 201 sq.
Lettre 365
1. IM1 Carl Rasch, Grenzboten, 49e année, 1890, III, p. 503-504.
2. Le 19 août 1855, Grimm avait envoyé à Schopenhauer un cahier avec une collection de ses épigrammes qu’il avait
l’intention de publier en tant que « feuilles volantes ». Cf. lettre à Frauenstädt du 23 septembre 1855 (lettre no 367).
3. Quoi que cela puisse être.
4. Selon Grimm (lettre du 24 juillet 1855), il s’agit d’un article sur la différence entre l’animal et la plante, paru dans un
journal scolaire de Wiesbaden.
Lettre 366
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 658-661.
2. Recension des Lettres sur la philosophie schopenhauérienne de Frauenstädt, Hamburger literarische und kritische
Blätter, 1855, no 48, dans laquelle Schopenhauer se trouve couvert d’éloges.
3. Karl Ludwig Michelet, « Arthur Schopenhauer », in Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik, tome 27,
cahier 1, p. 34-59, et cahier 2, p. 227-249. Cf. les critiques de Schopenhauer dans son cahier manuscrit Senilia, p. 66 (critiques
reprises par Frauenstädt dans l’édition posthume de De la volonté dans la nature : N, préface).
4. Goethe, éd. de Weimar, II, 208 (cf. également lettre nos 287 et 319).
5. Cf. note 4 de la lettre no 352.
6. Dans le bon ordre.
7. Jeanne Marie von Gayette (1817-1895), auteur de poèmes, de nouvelles et d’ouvrages pédagogiques. Elle épousera plus
tard le Dr. Georgens, fondateur d’un Institut pour enfants handicapés près de Vienne, qui écrira à Schopenhauer une lettre postée
à « Hirschberg en Silénie, 13 août 55 » (IM1 Hübscher, Jahrb. no 24 [1934], p. 107-109), précédée d’un poème en hommage à
Schopenhauer et intitulé « L’étranger dans sa patrie ». Après de nombreuses et vaines tentatives pour le publier, le poème paraîtra
finalement dans le Stuttgarter Morgenblatt. Comme l’écrira plus tard Jeanne Marie von Gayette (in Unterhaltungen am
häuslichen Herd, tome 5, 1860, p. 924 sq.), ce petit hommage « a profondément touché le grand homme. Il a écrit qu’il a fondu
en larmes. “Il m’est arrivé la même chose qu’à Ulysse lorsque le roi des Phéaciens lui raconta l’histoire de sa vie” ». La citation
tirée de la lettre (perdue) de Schopenhauer n’est sans doute pas exacte ; cf. M, II, chap. 47 : « À la fin du huitième chant de
l’Odyssée, Ulysse, encore sous couvert, fond en larmes lorsqu’il entend chez le roi des Phéaciens le chanteur Démodocos chanter
l’histoire de sa vie et de ses actions héroïques. » Sur Jeanne Marie von Gayette, cf. « Eine poetische Huldigung an Schopenhauer
», in Frankfurter Zeitung, édition du soir, 22 septembre 1910 ; H. H. Houben, « Der Fall Gutzkow / Schopenhauer », in
Süddeutsche Monatshefte, avril 1930, p. 479 sq. ; Gespräche, p. 204 et 270 sq.
8. À renvoyer au plus vite !
9. V…… dans IM1.
10. M……… dans IM1.
11. Johann Karl Bähr (1801-1869), peintre et professeur à l’Académie de Dresde. Cf. l’article de son fils C. G. Bähr dans
le Jahrbuch der Deutschen Dante-Gesellschaft (Leipzig, 1871), III, p. 996 sq., article repris dans Gespräche und Briefwechsel
mit Arthur Schopenhauer. Aus dem Nachlass von Karl Bähr (« Entretiens et correspondance avec Arthur Schopenhauer. Extraits
du fonds Karl Bähr »), Leipzig, 1894, p. 86 sq. ; Gespräche, 81, p. 213 sq.
12. Robert von Hornstein (1833-1890), professeur de piano, pianiste, compositeur, professeur à l’École royale de musique
à Munich, a vécu en Allemagne du Sud (Stuttgart, Munich) et en Suisse, auteur prolifique (opéra, théâtre, lieder) qui n’a pas
gagné la faveur du public de son vivant. Cf. Robert von Hornstein, Memoiren, éd. par Ferdinand von Hornstein, Munich, 1908.
13. Leopold August Warnkönig (1794-1866), professeur de droit naturel et de droit romain à Liège (1817), à Louvain
(1827), à Gand (1830), à Fribourg-en-Brisgau (1836), professeur de droit ecclésiastique à Tübingen (1844-1856). Auteur de
Französische Staats- und Rechtsgeschichte (« Histoire de l’État et du droit français »), 3 tomes, 1846-1848, Histoire des
Carolingiens, en collaboration avec Girard, 2 tomes, 1864. Cf. Gespräche, p. 228.
14. cf. lettre no 322.
15. « Laissez-nous chanter quelque chose d’un peu plus haut, muses de Sicile » (Virgile, Egl. IV, 1).
16. Eduard Schmidt von der Launitz (1797-1869), a réalisé le monument de Gutenberg à Francfort. Il ne sculptera
finalement pas le buste de Schopenhauer ; cf. également Gespräche, p. 204, 213 sq., 257.
Lettre 367
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 661-663.
2. L’article de Frauenstädt sur la deuxième édition de De la vision et des couleurs, in Blätter für literarische Unterhaltung,
1855, no 37.
3. « Là où la plupart des choses sont brillantes » (Horace, Ars poet., 351-352).
4. Kant, Fichte, Jacobi, Schopenhauer, Schelling, Hegel et Feuerbach.
5. F. W. Th. Schliephake, Die Grundlagen des sittlichen Lebens. Ein Beitrag zur Vermittlung der Gegensätze in der Ethik
(« Les fondements de la vie éthique. Une contribution pour résoudre les contradictions en éthique »), Wiesbaden, 1855.
6. Cf. note 5 de la lettre no 362 et Gespräche, p. 215 sq.
7. Dans son « Pour caractériser Schopenhauer » (Deutsche Wochenschrift, 1854, cahier 22, p. 675), Rosenkranz parle du
respect avec lequel Fichte (le fils), Erdmann et Fortlage auraient traité Schopenhauer dans leurs ouvrages sur l’histoire de la
philosophie allemande, « alors qu’en 1840, l’exposé que j’avais donné de la philosophie de Schopenhauer, dans mon Histoire de
la philosophie kantienne, m’avait été reproché comme un crime qui aurait résulté de mon excessive humanité bien connue,
comme l’a explicitement fait Moriz Carrière dans les Hallische Jahrbücher ».
8. Allusion à Virgile, Aeneis, I, 135 (cf. lettre no 256).
9. G…. dans IM1.
10. À renvoyer !
Lettre 368
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Bähr, p. 8-9.
2. Johann Karl Bähr, Die Gräber der Liven, Dresde, 1850 (HN V, [1213]).
Lettre 369
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Schemann, p. 346.
2. Le 3 sept. dans M, IM1. La date « 3 sept. » est une faute d’écriture de Schopenhauer. La lettre répond à une lettre de
sommation du 29 septembre 1855 (D XV, no 575) dans laquelle Wiesike demande à connaître l’endroit où se trouve le portrait.
Un autre argument en faveur de la date du 3 octobre se trouve dans une lettre à Frauenstädt du 7 septembre 1855 (lettre no 366) où
Schopenhauer écrit : « Depuis 15 jours, mon portrait est en exposition », alors qu’il affirme dans la lettre à Wiesike qu’il s’y était
trouvé « pendant 3 semaines ».
Lettre 370
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 663-665.
2. Carl Heinrich Schultz-Schultzenstein, Neues System der Psychologie (« Nouveau système de psychologie »), également
sous le titre Die Bildung des menschlichen Geistes durch Kultur der Verjüngung seines Lebens in Hinsicht auf Erziehung zur
Humanität und Civilisation (« La formation de l’esprit humain par la culture et le rajeunissement de sa vie en vue de l’éduquer
pour l’humanité et pour la civilisation »), Berlin, 1855. C’est à la p. 55 sq. que Schultz-Schultzenstein attaque « la doctrine de la
volonté du monde » de Schopenhauer.
3. Recension, dans les Blätter für litterarische Unterhaltung, du dernier ouvrage de Frauenstädt (Die
Naturwissenschaft…).
4. Selon Fortlage, l’absence de l’idée de Dieu dans la philosophie de Schopenhauer.
5. L’annonce en question : « Lettres sur la philosophie schopenhauérienne de Frauenstädt. / Il existe des systèmes
philosophiques à l’apparition soudaine, qui, après un bref séjour à l’horizon, éclatent ensuite comme un météore sans laisser de
traces. À notre époque, la philosophie de Hegel fut un pareil météore philosophique. Du “grand” Hegel et de son charabia
philosophique qui a répandu sa gloire dans le monde, il n’est resté rien d’autre qu’une poignée de poussière. […] Depuis 1818
déjà, la philosophie de Schopenhauer occupe le ciel de la recherche philosophique sans qu’on daigne la considérer à la mesure de
ses mérites. Les brouillards des philosophies précédentes ont empêché de la voir. Maintenant que les brouillards se sont dissipés,
elle scintille dans le ciel, pareille au soleil, et jamais ne déclinera. Elle vient confirmer le dicton : la vérité vous rendra libre.
Jusqu’à maintenant, personne n’a encore pu la réfuter. Toutes les tentatives, lancées par-ci par-là par quelque main faiblarde,
n’ont fait que ricocher comme sur un roc. Celui qui connaît la philosophie de Schopenhauer comprendra cela aisément. Que veut
Schopenhauer ? Qu’est-ce qui confère cette puissance irrésistible à sa philosophie ? C’est le simple fait que cette philosophie,
puisant à la source de l’expérience, s’accorde avec l’expérience, que ses affirmations se trouvent confirmées par presque toutes
les sciences empiriques. C’est cela, ainsi que la rare sincérité de son auteur, qui la rend si irrésistible […]. Les lecteurs trouveront
une exposition très réussie de la philosophie schopenhauérienne dans les Lettres sur la philosophie schopenhauérienne du
professeur Frauenstädt […]. Le style de Schopenhauer est antique, classique, à l’exact opposé de la diction hégélienne », in
Frankfurter Konversationsblatt, supplément littéraire de la Postzeitung, 13 octobre 1855, no 255. Le texte est signé « [delta] ».
6. Frankfurter Museum, 1re année (1855), no 2 (13 octobre).
7. Il s’agit de la lettre du 29 septembre (D XV, no 575).
8. Daniel Friedrichsen.
9. Dans sa lettre d’hommages du 8 mai 1854 (D XV, no 508). Schopenhauer ne cite pas littéralement les propos de Weigelt.
10. Bildnisse, no [8].
11. Max Drossbach, Das Wesen der Naturdinge und die Naturgesetze der individuellen Unsterblichkeit (« L’essence des
choses de la nature et les lois naturelles de l’immortalité individuelle »), Olmütz, 1855. Schopenhauer ne s’y est pas trompé : un
ouvrage antérieur s’intitulait en effet Die individuelle Unsterblichkeit vom monadistischen metaphysischen Standpunkte aus
betrachtet (« L’immortalité individuelle considérée du point de vue monadique et métaphysique »), Olmütz, 1853.
12. August Haake, Proben eines Lehrbuches für den philosophischen Unterricht in Gymnasien mit einem Vorworte über
Zweck und Methode dieses Unterrichts (« Esquisse d’un manuel pour l’enseignement philosophique dans les lycées avec une
préface sur le but et la méthode de cet enseignement »), Nordhausen, 1855.
13. Die Naturwissenschaft… (cf. notes des lettres no 355 et 358).
14. Monton. Sur cette traduction avortée des Parerga, cf. les lettres à Frauenstädt du 3 novembre 1855 (lettre no 372) et du
21 mars 1856 (lettre no 386), ainsi que l’entretien avec Carl G. Bähr du 12 avril 1856 (Gespräche, p. 238).
Lettre 371
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Carl Rasch : Grenzboten, 49e année, 1890, III, p. 504.
2. Schopenhauer confond avec le Deutsches Museum, cf. note 10 de la lettre no 255.
3. Rédigé par G. W. Körber ; cf. note 3 de la lettre no 357.
4. Rédigé par Pomtow ; cf. note 4 de la lettre no 343.
5. Rédigé par C. R. Kosack ; cf. lettre no 273.
Lettre 372
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 665-667.
2. Die Naturwissenschaft… ; cf. note 2 de la lettre no 355.
3. Christian Bartholmèss, Histoire critique des doctrines religieuses de la philosophie moderne, vol. I, II, Paris, 1855 (cf.
note 2 de la lettre no 373). Les passages sur Schopenhauer : vol. II, p. 441-457 (réimpression Jahrb. no 19 [1932], p. 254-265).
4. Monton (cf. note 14 de la lettre no 370).
5. Adolf Trendelenburg, Historische Beiträge zur Philosophie, tome 2, Berlin, 1855.
6. Également publié en tiré à part : Ueber Herbart’s Metaphysik und eine neue Auffassung derselben (« Sur la
métaphysique de Herbart et une nouvelle conception de cette dernière »), extrait des Rapports mensuels de l’Académie royale des
Sciences de Berlin, 1854.
Lettre 373
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 667-670.
2. Christian Jean Guillaume Bartholmèss (1815-1856), philosophe français, auteur de Vie de Giordano Bruno (1847),
Huet et son scepticisme (1849), Histoire critique… (1855), Histoire de l’Académie de Prusse depuis Leibniz jusqu’à Schelling.
3. Il n’y en avait que seize (cf. note 3 de la lettre no 372).
4. « En voyageant, en méditant au milieu des trésors d’art et des beautés naturelles dont brillent Dresde, Rome et Naples,
en évitant partout les hommes avec hauteur, les femmes avec mépris, et cela tandis qu’il faisait consister le lien et le bonheur
social dans une mutuelle et universelle commisération, il combinait un système propre » (Histoire critique…, tome II, p. 443 ;
Jahrb. no 19 [1932], p. 256).
5. N, préface.
6. D’après Frauenstädt, la faute incombait au compositeur ou au rédacteur de l’article.
7. Abordons une chose indigne, ensuite une chose divertissante.
8. peuple de m…. dans IM1.
9. Köhlerglaube und Wissenschaft ; cf. note 3 de la lettre no 354.
10. Kraft und Stoff ; cf. note 25 de la lettre no 358.
11. N, Anatomie comparée.
12. Kraft und Stoff, troisième édition.
13. g………….. dans IM1.
Lettre 374
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 670-672.
2. Cf. Sénèque, Controv., 4, 3.
3. Cf. note 3 de la lettre no 366.
4. Dans l’article « Sentiment » (in Ersch et Gruber, Allgemeine Encyclopädie, première section, partie 56, 1853), Karl
Hermann Scheidler affirme que Schopenhauer enseigne que « le concept désigné par le mot “sentiment” n’a qu’un contenu
entièrement négatif, à savoir : que ce qui se présente à la conscience n’est pas le concept, n’est pas la connaissance abstraite de la
raison ». Plus loin : « L’éclaircissement de cette détermination conceptuelle […] doit s’effectuer dès maintenant, en partie parce
que son auteur — sans aucun doute l’un des penseurs les plus érudits, lettrés et plurivalents dans le domaine de l’intelligence, que
l’on peut assurément appeler “le plus perspicace des perspicaces” et qui de toute évidence s’en targue comme étant une
caractéristique toute singulière — a précisément prouvé comment la vue procédant de la simple perspicacité ou de
“l’entendement des entendeurs” est, dans la plupart des cas, nulle ou fausse » [en note :] « Comme le Dr. Frauenstädt et d’autres
font une ardente propagande des doctrines de Schopenhauer, qu’ils considèrent comme la seule philosophie vraie enfin
découverte, mais que les résultats de cette philosophie conduisent à une vision douteuse du monde et de la vie (d’un point de vue
théorique vers un athéisme déclaré, d’un point de vue pratique vers le fatalisme et le quiétisme oriental), il ne saurait être
entièrement déplacé de rappeler que, déjà avant cela, Herbart (Écrits philosophiques, III, p. 504 sq., et Introduction à la
philosophie), Fr. E. Beneke et d’autres, et tout récemment encore I. H. Fichte (Les Doctrines du droit, de l’État et de l’éthique,
1850, I, p. 349 sq.) ont montré d’importantes erreurs dans ce système. »
5. Leipzig-Bethmann, 1854 ; les tomes 7-10, éd. par Franz Hoffmann, contiennent tous les écrits sur la philosophie de la
religion.
6. Frankfurter Conversationsblatt (supplément littéraire de la Postzeitung), 1855, no 299, p. 1194-1195.
7. K. R….. dans IM1. Karl Ritter (1830-1891), fils de Julie Ritter (mécène de Richard Wagner) musicien et poète, depuis
1841 à Dresde, 1854-1857 en Suisse, en relation avec Wagner. La lettre date du 17 décembre 1855 ( D XV, no 585). La
photographie envoyée est celle du 16 janvier 1856 (Bildnisse, no [85]). Cf. lettre du 17 janvier 1856 (no 376) et lettre à Becker, 20
janvier 1856 (no 377).
8. En vain !
Lettre 375
1. IM1 Deutsches Museum, 1856, no 34, p. 275-276.
2. La question mise au concours pour l’année 1856 par la deuxième section de la Faculté de philosophie de l’Université de
Leipzig demandait une « Présentation et critique des principes de la philosophie schopenhauérienne ». Cf. A. Hübscher, «
Schicksale einer Preisaufgabe. Aus dem unveröffentlichten Briefwechsel von Johann Karl und Carl Georg Bähr », Jahrb. no 39
(1958), p. 119-171.
3. Asher, qui avait déjà envoyé une notice à Lindner le 27 décembre 1855 pour que ce dernier l’insère dans la Vossische
Zeitung, accédera à la demande de Schopenhauer ; cf. note 5 de la lettre no 394.
Lettre 376
1. IM1 D XVI, no 588a.
2. Cf. note 7 de la lettre no 374.
Lettre 377
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Gwinner, 2e éd., p. 571 ; IM2 Becker, p. 126-128 (impressions imprécises, avec
de nombreuses omissions). La première impression fiable : D XV, no 589.
Il s’agit de la réponse à une longue lettre de Becker du 10 janvier 1856 (D XV, no 588) où ce dernier donnait une analyse
précise de l’influence de Schopenhauer sur l’écrit de Helmholtz, Ueber das Sehen des Menschen (« Sur la vision de l’homme »).
2. Hermann von Helmholtz, Ueber Goethes naturwissenschaftliche Arbeiten (« Sur les travaux de science de la nature de
Goethe »), in Allgemeine Monatsschrift für Wissenschaft und Literatur, mai 1853, p. 383 sq.
3. cf. lettre no 299.
4. Hermann von Helmholtz, Ueber die Wechselwirkung der Naturkräfte und die darauf bezüglichen Ermittlungen der
Physik (« Sur l’action réciproque des forces de la nature et les recherches en physique s’y rapportant »), Königsberg, 1854 (HN V
[861]).
5. Il s’agissait de Wilhelm Gwinner qui avait fait parvenir à Schopenhauer l’Encyclopédie en question ainsi que les tomes
8 et 9 des œuvres de Baader (avec un billet en date du 17 décembre 1855 : D XV, no 584).
6. Philipp Leonhard Kalb (1812-1885), curé municipal protestant-luthérien, à partir de 1852 à Sachsenhausen, Schulstr. 11
(livre d’adresses de Francfort). Nécrologie : Frankfurter Intelligenz-Blatt no 4, 6 janvier 1885.
7. Cette lithographie de L. Wildt parut chez Sachse & Co. à Berlin ; cf. Bildnisse, no [7].
8. Lettre de Jeanne Marie von Gayette du 13 août 1855 (cf. note 7 de la lettre no 366).
9. La « missive ouverte » ; cf. note 6 de la lettre no 335.
Lettre 378
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 672-674.
2. Rudolf Gottschall, Die deutsche Nationalliteratur in der ersten Hälfte des 19. Jahrhunderts. Literarhistorisch une
kritisch dargestellt (« La littérature nationale allemande dans la première moitié du XIXe siècle. Présentation du point de vue de
l’histoire littéraire et critique »), 2 tomes, Breslau, 1855 (tome 2, p. 68-74 ; 4e éd. 1875, p. 210-219).
3. Julian Schmidt, Geschichte der deutschen Literatur im 19. Jahrhundert (« Histoire de la littérature allemande au XIXe
siècle »), 3e éd., Leipzig, 1856 (p. 374-376).
4. Lettre de Johann August Becker, 10 janvier 1856 (D XV, no 588) et lettre de Max Voigtel, 16 janvier 1856 (IM1
Hübscher, Jahrb. no 24 [1937], p. 113-117).
5. V…… dans IM1.
6. Dans M, II, chap. 41 : « Et aussi tous ceux qui ont perdu conscience par noyade, ou par vapeur de charbon, ou par
pendaison, nous disent que c’est arrivé sans douleur. »
7. Eduard Crüger, conseiller secret gouvernemental, membre prussien de la section des finances subordonnée à la Diète
fédérale d’octobre 1851 à juillet 1856, compagnon de table de Schopenhauer à la table d’hôtes de l’Hôtel d’Angleterre vers le
milieu des années 1850, à Merseburg depuis juillet 1856. Pour la remise de la Critique de la raison pratique (1788) de Kant, cf.
lettre no 402. Au printemps 1856, Crüger ramena de Paris une statuette du Bouddha pour Schopenhauer ; cf. lettre no 388. Pour le
récit personnel de Crüger, cf. Gespräche, p. 196-199.
Lettre 379
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 674-675.
2. Il s’agit de David Asher.
3. Levin Schücking, Geneanomische Briefe (« Lettres généanomiques »), Francfort-sur-le-Main, 1855.
4. Allusion à Schiller : « Ce qu’ils ont appris aujourd’hui, ils veulent déjà l’enseigner demain, / ah ! comme ces messieurs
ont les intestins courts ! », in Xenien, Musenalmanach 1797, p. 281, sous le titre « Écrivailleurs pressés » ; repris par Goethe : «
Ce qu’ils ont appris hier, ils veulent déjà l’enseigner aujourd’hui », in Gedichte aus dem Nachlass, Xenien, p. 33.
5. cf. lettre no 366.
6. Cette critique paraîtra sous le titre Der Materialismus. Seine Wahrheit und sein Irrtum. Eine Erwiderung auf Dr. Louis
Büchner’s ‘Kraft und Stoff’ (« Le matérialisme. Sa vérité et son erreur. Une réplique à Force et matière du Dr. Louis Büchner »),
Leipzig, 1856 (HN V, no [199]).
Lettre 380
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 116-117 (incomplet).
2. Le 8 février 1856, Lindner avait fait part à Schopenhauer du décès de Heinrich von Lowtzow, survenu dans des
conditions difficiles le 13 septembre 1855.
3. Cet investissement consistait dans l’achat de titres de créance mexicains ; cf. lettre n o 152.
4. Sturm und Compass (Tempête et boussole), un roman écrit par l’épouse de Lindner, cf. lettre no 440.
Lettre 381
1. M Prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 Baron Karl du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 3 janvier 1873, no 363.
2. « À Arthur Schopenhauer pour son 68e anniversaire ». August Kilzer publia le poème dans le Frankfurter
Konversationsblatt, no X, 22 février 1856. Le poème fut également placé en introduction à la lettre de vœux de von Doss, du 19
février 1856 (D XV, no 596). Schopenhauer loua ce poème (cf. Gespräche, p. 141) et envoya des copies à Wiesike (sa lettre de
remerciement du 27 février 1856, D XV, no 599), à Frauenstädt (lettre no 382) et à Grimm (lettre no 385).
3. K. Graul, Reise nach Ostindien über Palästina und Egypten von Juli 1849 bis April 1853 (« Voyage en Inde orientale
par la Palestine et l’Égypte, de juillet 1849 à avril 1853 »), 5 parties, Leipzig, 1854-1856.
4. « Les capitaines de Samuel Turner au service de la Compagnie de l’Inde orientale, mission diplomatique à la Cour du
Lama Tesheo, en passant par le Bhoutan et une partie du Tibet », trad. de l’anglais, Hambourg, 1801 (HN V, [1202]).
5. Spence Hardy, Eastern Monachism, Londres, 1850 (HN V, no [1122]).
6. L’introduction de Majer couvrait surtout l’époque ancienne du Veda, le brahmanisme.
7. Dhammapadam. Ex tribus codd. Hauniensis palice edidit, latine vertit, exerptis ex commentario Palico notisque
illustravit von Faussböll, Hauniae, 1855 (HN V, no [1114]).
8. cf. lettre no 263.
9. Vindication of the Hindoos from the aspersions of the Reverend Claudius Buchanan, with a refutation of his arguments,
by a Bengal officer, Londres, 1808 (HN V, no [1207]).
10. Bhagavad Gita. Textum recensuit annotationes et interpretationem Latinam adjecit Aug. Guil. a Schlegel, Bonn, 1823
(HN V, [1092]).
11. Von Doss avait soumis à Schopenhauer une lettre avec des notices sinologiques par le prof. Carl Friedrich Neumann,
datée du 25 janvier 1856 (IM1 D XVI, p. 472 sq.).
12. Puanteur juive [sic].
13. N, « Sinologie ».
14. Brunet de Balan (cf. lettre no 382).
15. J. N. von Ringseis, Ueber die Nothwendigkeit der Autorität in den höchsten Gebieten der Wissenschaft (« Sur la
nécessité de l’autorité dans les plus hauts domaines de la science »), discours tenu le 11 décembre 1856 devant les étudiants de
l’Université Ludwig-Maximilians de Munich (HN V, no [727]).
Lettre 382
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 676-678.
2. Cf. P, I, chap. VI, in fine.
3. Der Materialismus… ; cf. note 6 de la lettre no 379.
4. M, II, chap. 17.
5. Historisch-politische Blätter für das katholische Deutschland (fondé en 1838 par G. Görres, K. E. Jarcke et G. Phillips,
a cessé de paraître en 1922).
6. G…. dans IM1. « Goethe, Schopenhauer und Newton », « Selbstmordspectakel » et « Die Philosophie, Ihr Werth », in
Frankfurter Museum, no 8 (23 février 1856).
Lettre 383
1. Ces trois extraits, qui reflètent le mécontentement de Schopenhauer au sujet de la défiguration de son nom dans une
signature de la lithographie de Wildt, proviennent de la lettre de réponse de L. Sachse & Comp., en date du 14 mars 1856 (M
Archives Schopenhauer). IM1 Jahrb. no 40 (1959), p. 31.
2. En allemand, « Schoppen » signifie « chop(in)e » (N.d.T.).
Lettre 384
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 678-679.
2. cf. lettre no 377.
3. Schopenhauer fait erreur : seule la grand-mère paternelle de Schopenhauer, Anna Renata Soermans (1726-1804), était
originaire de Hollande, bien que née à Dantzig.
4. In Blätter für literarische Unterhaltung, 1856, no 9.
5. Avec force pour la chose, avec douceur pour la manière (cf. lettre no 213).
6. L. A. Victor Dubourg, professeur de français, Brönnerstr. 9 (livre d’adresses de Francfort 1858-1860), professeur à
l’École des jeunes filles anglaises à Francfort jusqu’en 1864, plus tard à Paris. Dubourg avait signé une déclaration dans le
Intelligenzblatt dirigée contre les docteurs Schiff et Friedleben (novembre 1854). Auteur de « Ant. Regazzoni à Francfort sur
Mein. Le mesmérisme encore une fois méconnu et outragé par les savants officiels et vengé par l’opinion publique », Francfort,
novembre 1854 (HN V, no [993]).
7. Âge avancé !
Lettre 385
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. Non daté. Cachet de la poste : 17 mars 1856. IM1 Carl Rasch :
Grenzboten, 49e année, 1890, p. 504-505.
2. « Arthur Schopenhauer », par C. Placidus, in Frankfurter Museum 2e année, no 11 (15 mars 1856), p. 85 sq.
3. Schopenhauer se réfère au passage suivant de l’article de Grimm : « Il a séjourné de longues années en Italie, il connaît
ce pays classique. Qu’il prenne donc plaisir à nous parler de ce pays qui fut l’objet de la nostalgie d’innombrables personnes. »
Lettre 386
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 680-681.
2. Le journal d’Ernst Kossak (auparavant : Die Feuerspritze) avait publié des extraits du « Code d’honneur du chevalier »
de Schopenhauer.
3. Karl Ludwig Friedrich von Hinckeldey (1803-1856), directeur général de la police de Berlin, fut impliqué en 1855 dans
une rixe d’honneur avec von Rochow, membre de la Chambre haute, au sujet de la suppression du Club des jockeys, et mourut
dans un duel au pistolet le 10 mars 1856.
4. Edward Young, dans une lettre datée « Halle a. S. 13 march 1856 » (Archives Schopenhauer), avait indiqué le nom de
l’auteur du fameux article de la Westminster Review. Il s’agissait de John Oxenford (1812-1877), auteur d’environ quatre-vingts
comédies et de textes destinés à des mélodrames, des opéras et des opérettes, critique de théâtre au Times depuis 1850, traducteur
de Goethe, Calderón, Boiardo, Molière. Cf. Rudolf Borch, « Schopenhauer in England », in Jahrb. no 24 (1937), p. 162.
5. Émile Littré, « Des tables parlantes, des esprits frappeurs et autres manifestations de ce temps-ci », in Revue des Deux
Mondes, 1856, p. 847-872.
6. Frauenstädt avait écrit à Schopenhauer que le professeur de botanique Mattias Jacob Schleiden avait tenu une
conférence sur la magie à l’Académie Sing à Berlin.
7. M. J. Schleiden, Die Pflanze und ihr Leben. Populäre Vorträge (« La plante et sa vie. Conférences populaires »),
Leipzig, 1848 (HN V, [939]), 4e éd. 1855.
8. Donc paix avec vous !
Lettre 387
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 681-683.
2. cf. lettre no 382.
3. Maintenant une chose nouvelle et importante : ouvrez les oreilles ! Cf. Térence, Andr., 933.
4. R….. dans IM1.
5. Dans le cercle autour de Wagner, une rumeur s’était répandue, selon laquelle l’Université de Zurich avait le projet
d’instituer une chaire consacrée exclusivement à l’enseignement de la philosophie de Schopenhauer, et que Frauenstädt y serait
sans doute nommé. Cette rumeur concernait en fait l’institution d’un deuxième poste de professeur titulaire de philosophie
spéculative. Après l’éviction de Michelet, qui avait postulé en vain, l’on confia finalement le poste à Andreas Kym, qui était
professeur non titulaire depuis 1851. Kym (1822-1900) enseigna à l’Université de Zurich de 1849 à 1900.
6. Johann Jacob Sulzer (1821-1897), premier secrétaire d’État du canton de Zurich depuis 1847, occupa un poste important
au sein du Parti démocratique du canton de Zurich, ami de Wagner depuis 1849.
7. Allusion à l’expression de Rosenkranz, « l’empereur de la philosophie allemande » (cf. lettre no 334).
Lettre 388
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 683-684.
2. À la plus grande gloire de Zurich.
3. R….. dans IM1.
4. Cf. Goethe, Epigrammatisch, « Kommt Zeit, kommt Rat », éd. de Weimar, II, 294.
5. Les références exactes n’ont pu être établies.
6. Joie.
7. cf. lettre no 299.
8. Il s’agit d’Ernst Brücke, auteur de l’article « Ueber die Farben, welche trübe Medien im auffallenden und durchfallenden
Lichte zeigen », rapport de session de l’Académie impériale des Sciences de Vienne, 1852, section mathématiques et sciences de
la nature, tome 9.
9. Schiller, Shakespeares Schatten, dernier vers ; cf. également lettre no 289.
10. Allusion à Mozart, La Flûte enchantée, II, 13.
11. cf. lettre no 377.
Lettre 389
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Carl Rasch : Grenzboten, 49e année, 1890, III, p. 505.
2. « À propos de son portrait », un poème qui accompagnait la lettre de Grimm du 8 avril 1856 (D XV, no 606).
3. Versuch einer neuen Darstellung der uralten indischen All-Eins Lehre, oder der berühmten Sammlung sxm Oupnek’hat-
xm. 1. Stück. Oupnek’hat Tschehandouk genannt (« Essai d’une nouvelle présentation de la doctrine très ancienne et indienne de
l’Un-Tout, ou du célèbre recueil sxm Oupnek’hat- xm. 1re partie. L’Oupnek’hat Tchehandouk »), traduit en allemand d’après le
texte latin établi par Anquetil-Duperron, avec des notes de Thaddäus Anselm Rixner, Nuremberg, 1808.
4. L’Oupnek’hat est une traduction latine faite par A. H. Anquetil-Duperron à partir d’une traduction persane de cinquante
Upanishads effectuée à Delhi, achevée en 1657 par des pandits de Bénarès pour le prince moghol Dara Sukoh : Oupnek’hat.
Theologia et philosophia Indiae, tomes I et II, Strasbourg - Paris, 1804 ; HN V, no [1157].
5. Il s’agit de Julius Hamel (1834-1907). Les témoignages épistolaires concernant le portrait et les entretiens de
Schopenhauer avec Hamel se trouvent dans Bildnisse, [38].
6. Krämer dans M, IM1.
Lettre 390
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 684-685.
2. À propos de cette visite (début mai 1856), cf. Gespräche, p. 270-271.
3. R….. dans IM1.
4. G. Semper, Vorläufige Bemerkungen über bemalte Architectur und Plastik bei den Alten (« Remarques préliminaires sur
l’architecture peinte et la sculpture chez les Anciens »), Altona, 1834 (HN V, no [529]) et Die vier Elemente der Baukunst (« Les
quatre éléments de l’architecture »), Braunschweig, 1851 (HN V, no [529a]).
5. Die Naturwissenschaft… ; cf. note 2 de la lettre no 355.
6. Le poème « À propos de son portrait », par G. Grimm.
7. Cette lettre n’a pas été conservée.
Lettre 391
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 685-691.
2. Der Materialismus… (cf. lettre no 379).
3. Cf. Goethe, Faust I, v. 3069-3070.
4. cf. lettre no 358.
5. Sans passion ni colère ; cf. Tacite, Annal., I, 1.
6. cf. lettre no 377.
7. Q, § 21.
8. Sir Humphry Davy (1778-1829), chimiste anglais, découvrit (en 1807) les métaux alcalins natrium et calium, et en 1808
les métaux terro-alcalins calcium, barium, strontium et magnésium.
9. Q, § 20.
10. En voilà assez sur l’Évangile ; venons-en maintenant aux lettres.
11. Schopenhauer se réfère au résumé que Frauenstädt avait fait d’un article d’Anton Karsch, « Schopenhauer und das
Ding an sich », publié dans la revue Natur und Offenbarung, Münster, 1855, tome 1, cahier 2, 90-98 (concernant la suite de cet
article dans les cahiers 4 et 5, cf. lettres nos 393 et 395).
12. Référence à un article d’E. Erdmann, « Franz von Baaders sämtliche Werke und das darin entwickelte System », in
Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik, tome 28, cahier 1, 1-36. À la p. 29, on peut lire : « Les attaques contre
Schopenhauer (dans les introductions du tome 7 et du tome 8) ne visent pas l’homme, mais uniquement la doctrine, et ce de façon
très virulente. Dans sa célèbre recension, Herbart aurait donc dit tout ce qu’il y avait à dire, et par là il aurait également entonné le
chant du cygne de ce système qui ne serait qu’une variation spinoziste qui prêterait à sourire, telle une tentative d’écolier, et ce de
la part d’un homme relativement insignifiant qui abaisserait Kant tout en surestimant son idéalisme, qui serait prisonnier
d’évidentes contradictions sans jamais être réellement profond, etc. Il est alors incompréhensible que malgré tout cela il ait pu
appeler Schopenhauer un esprit doté d’un talent arrivé à maturité, et même, dans l’introduction du tome 9, un philosophe
(relativement) important. »
13. Schelling, Sämmtliche Werke, 2e section, tome 1, Einleitung in die Philosophie der Mythologie (« Introduction à la
philosophie de la mythologie »), Stuttgart, 1856. Schelling y appelle Dieu « ce que l’étant est » (das, was das Seyende ist). Pour
la critique de Schopenhauer, cf. sa glose en marge de l’ouvrage de Victor Cousin, Über französische und deutsche Philosophie,
trad., Stuttgart - Tübingen, 1834 (HN V, [122]), où Schelling dit dans la préface, p. XVIII : « Je ne veux pas l’étant nu ; je veux
l’étant, qui Est ou existe » ; Schopenhauer en marge : « Caporal prussien : non seulement le soldat doit estre obéissant, mais il
doit aussi être obéissant. »
14. I. H. Fichte, Anthropologie. Die Lehre von der menschlichen Seele. Neubegründet auf naturwissenschaftlichem Wege
für Naturforscher, Seelenärzte und wissenschaftlich Gebildete überhaupt (« Anthropologie. La doctrine de l’âme humaine.
Nouvellement fondée par la voie des sciences de la nature pour les chercheurs de la nature, médecins de l’âme et ceux formés à la
science en général »), Leipzig, 1856. Schopenhauer est évoqué aux § 179 et 251.
15. La pensée, la connaissance, la science.
16. Force cachée.
17. N, « Astronomie physique ».
18. Dans son Anthropologie, Fichte avait affirmé que la croyance à des apparitions de fantômes était en contradiction avec
la doctrine de la destruction de l’individu par la mort ; Frauenstädt était curieux de savoir ce que Schopenhauer en pensait.
19. c…… dans IM1.
20. Albrecht Weber (1825-1901), indologue, professeur à Berlin à partir de 1856, auteur d’Indische Skizzen (« Esquisses
indiennes »), Berlin, 1857 ; Vorlesungen über indische Literaturgeschichte (« Conférences sur l’histoire de la littérature indienne
»), 1876-1878.
21. Cf. P, II, chap. VIII, § 115, in fine.
22. Le deuxième portrait peint par Lunteschütz (Bildnisse, no [8]).
23. Johann Karl Becker (1833-1887), enseignant dans plusieurs écoles suisses puis badoises, ensuite professeur au Lycée
de Bruchsal. Auteur d’Abhandlungen aus dem Gränzgebiet der Mathematik und Philosophie (« Traités sur le domaine limitrophe
de la mathématique et de la philosophie »), Berlin, 1876 ; Die Elemente der Geometrie auf neuer Grundlage streng deductiv
dargestellt (« Nouveaux fondements de la géométrie élémentaire présentée de manière rigoureusement déductive »), partie 1,
Berlin, 1877 ; éditeur de Briefwechsel zwischen Arthur Schopenhauer und Johann August Becker (« Correspondance entre Arthur
Schopenhauer et Johann August Becker »), Leipzig, 1883.
24. Adolf Merkel (11 janvier 1836 - 30 mars 1896), enseignant de droit pénal, professeur à Strasbourg à partir de 1874,
défenseur d’une « troisième école » se plaçant entre l’école classique du droit pénal (Binding, Birkmeyer) et l’école moderne
(von Liszt), auteur de Lehrbuch des deutschen Strafrechts (« Manuel du droit pénal allemand »), 1889.
25. Carl Georg Bähr (1834-1893), fils de Johann Karl Bähr, études de droit à Leipzig et Heidelberg, avocat et notaire royal
de Saxe depuis 1865. Sur la contribution de Bähr à la question mise au concours, cf. Gespräche, p. 237.
Lettre 392
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 691-694.
2. La Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik de Fichte, d’où émanaient de nombreuses attaques contre
Schopenhauer.
3. Goethe, Triumph der Empfindsamkeit, acte V, in fine ; cf. également lettre no 224.
4. ……. dans IM1.
5. L’Evangelische Kirchenzeitung d’E. W. Hengstenberg, tome 58, 1856, n os 38 et 39 (10 et 14 mai), contient un article sur
la position de la philosophie face à la foi chrétienne (« Die Stellung der Philosophie zum christlichen Glauben »), mais
Schopenhauer n’y est pas évoqué.
6. Correspondance éditée par I. H. Fichte et K. Fr. A. Schelling, Stuttgart, 1856.
7. Carl Schwarz, Zur Geschichte der neuesten Theologie (« Sur l’histoire de la théologie moderne »), 1re et 2e éditions chez
Brockhaus, Leipzig, 1856.
8. Der Materialismus… ; cf. note 6 de la lettre no 379.
9. Chantons quelque chose d’un peu plus grave ; cf. Virgile, Egl., IV, 1 ; lettre no 366.
10. Celui qui n’a pas de mépris n’a pas d’esprit, proverbe italien ; cf. également lettre no 306.
11. Cf. Gespräche, p. 96.
12. E, III.
13. Q, § 20.
14. C, § 1.
15. Antoine Lavoisier, fondateur de la chimie moderne, a montré en 1783 que l’eau était composée d’hydrogène et
d’oxygène selon un rapport de volume 2 : 1.
16. N, « Physiologie et pathologie ».
17. G…. dans IM1. Une lettre en date du 15 juin 1856 où Grimm écrivait qu’il travaillait actuellement à une série
d’articles, intitulée « Pour s’orienter dans le domaine de la philosophie schopenhauérienne ».
18. Le portrait peint par Hamel.
19. Le Frankfurter Museum, 2e année, no 23 (7 juin 1856), avait publié les distiques suivants : « Theologie und Philosophie
» ; « Certamen Heidelbergense » ; « Plato » ; « Kant » ; « L. B. » ; « Die Prioritätsfrage » ; « Strassenraub » ; « Frage » ; «
Antwort » ; « Die Heimath ». Les distiques intitulés « Frage » et « Antwort » sont la mise en vers d’une question et d’une réponse
écrites dans une lettre à Schopenhauer en date du 8 avril : « Pourquoi donc la Faculté de philosophie de Leipzig, puisqu’elle
sentait le danger, a-t-elle seulement mis à prix une critique de votre philosophie, et non pas votre tête ? Parce que la Faculté est
composée d’esprits intelligents qui savent que même avec tous les trésors de la terre, l’on ne pourrait se payer votre tête. »
20. Portez-vous bien et continuez de nous aimer !
Lettre 393
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 694-697.
2. La suite de l’article de Karsch dans Nature und Offenbarung.
3. Sans doute abréviation de « er leckt mich im Arsch », qui signifie à peu près : lambe mihi culum (N.d.T.).
4. Adolph Cornill, Arthur Schopenhauer als Uebergangsformation von einer idealistischen in eine realistische
Weltanschauung (« Arthur Schopenhauer comme formation passagère entre une vision du monde idéaliste et réaliste »),
Heidelberg, 1856 (HN V, no [121]).
5. Philipp Jacob Cornill, Kl. Sandgasse 2 (livre d’adresses, 1853).
6. Dr. K….. dans IM1.
7. c……. dans IM1.
8. cf. lettre no 392.
9. J. Moleschott, Licht und Leben (« Lumière et vie »), discours inaugural pour la chaire d’étude de la nature de l’homme à
l’Univ. de Zurich, Francfort-sur-le-Main, 1856.
10. Le portrait peint par Hamel.
11. Lettre de C. G. Bähr à Johann Karl Bähr, 12-13 avril 1856 (reproduite dans Gespräche, p. 233-239).
Lettre 394
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Deutsches Museum (éd. Robert Prutz), 1865, n o 34, p. 276-
277.
2. Il s’agissait de la revue Anregungen für Kunst, Leben und Wissenschaft, éd. Franz Brendel, tome 1, cahier 4 (avril 1856),
avec un article de David Asher, « Arthur Schopenhauer’s Ansicht über die Musik » (p. 188 sq.). Un deuxième article d’Asher
devait suivre en novembre 1860. Les deux articles ainsi qu’une « note de la rédaction » sont reproduits en annexe de l’ouvrage
d’Asher Arthur Schopenhauer. Neues von ihm und über ihn (« Arthur Schopenhauer. Du nouveau de lui et sur lui »), Berlin,
1871, p. 43-64.
3. Ludwig Noack, Geschichte der Philosophie in gedrängter Uebersicht (« L’histoire de la philosophie dans une vue
d’ensemble condensée »), Weimar, 1853 (cf. lettres nos 290 et 293).
4. Asher avait écrit : « L’art […] part de l’Idée ; elle, si éternelle, habitant les choses et flottant devant la volonté sans
conscience pendant l’objectivation, elle est la vraie et l’unique source de toute œuvre d’art authentique. »
5. cf. lettre no 375.
6. C. G. Bähr ; cf. lettre no 391 et Gespräche, p. 237.
7. Asher : « Depuis Descartes et son cogito, ergo sum, l’on était trop tombé dans l’obsession de tout chercher dans
l’intellect, même Kant n’a pas pu y échapper entièrement […]. Schopenhauer, en écrivant son ouvrage immortel Le Monde
comme volonté et représentation, a renversé l’ordre des choses, en accordant un primat à la volonté et en conférant une place
secondaire à l’intellect, dissipant ainsi le mauvais sort qui charmait les esprits. Tous les philosophes, dit Schopenhauer, se sont
trompés en supposant que l’intellect était le prius : selon lui, c’est plutôt la volonté, cette essence vraie et indestructible de
l’homme, mais qui en soi est sans conscience. C’est elle, la volonté, qui est première, l’intellect est second. La volonté est
métaphysique, l’intellect est physique, c’est-à-dire produit par le cerveau. »
Lettre 395
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 697-699.
2. L’article évoqué dans la lettre no 393 ; Frauenstädt en avait recopié quelques passages pour Schopenhauer.
3. Allusion à la recension de l’édition des œuvres de Schelling par Weisse, in Blätter für literarische Unterhaltung, 1856,
10 et 17 juillet, nos 28, 29.
4. Il s’agit de la revue Die Natur. Zeitung zur Verbreitung naturwissenschaftlicher Kenntniss und Naturanschauung für
Leser aller Stände, éd. par Otto Ule et Karl Müller, Halle, 5e année, 1856, p. 28-30.
5. Adolph Helfferich, Der Organismus der Wissenschaft und die Philosophie der Geschichte (« L’organisme de la science
et la philosophie de l’histoire »), Leipzig, 1856.
Lettre 396
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 699-703.
2. Thomas Solly, The Will, Divine and Human, Cambridge et Londres, 1856. L’ouvrage porte en exergue la maxime de
Cudworth : « The Will is the last thing in the soul, and the ultimate resolution of all others. »
3. Ralph Cudworth (1617-1688), philosophe de la nature et de la morale, adversaire de Hobbes, fondateur, avec Henry
More, de l’école de Cambridge.
4. Puanteur juive [sic].
5. Frauenstädt avait fait mention d’un article paru dans le Journal des Savants en mai 1856, où Flourens polémiquait contre
Bichat. Sur l’évolution de cette polémique dans l’ouvrage de Flourens De la vie et de l’intelligence, cf. M, II, chap. 20.
6. Saint-René Taillandier, « L’Allemagne littéraire », in Revue des Deux Mondes, 1er août 1856, p. 476 : « C’est ici que les
contradictions et les extravagances vont commencer. »
7. Saint-René Taillandier, « L’Allemagne littéraire », in Revue des Deux Mondes, 1er août 1856, p. 474-478, repris in
Jahrb. no 19 (1932), p. 265-271.
8. Dans une note de la préface à la 4 e éd. de Kraft und Stoff, Francfort-sur-le-Main, 1856, Büchner avait loué l’esprit et la
perspicacité de Schopenhauer.
9. Justus von Liebig (12 mai 1803 - 18 avril 1873), le célèbre chimiste. À propos de Liebig et de Schopenhauer, cf. les
allusions de Wilhelm Jordans, in Gespräche, p. 287-288.
10. Christian Gottfried Ehrenberg, recteur de l’Université royale Friedrich-Wilhelm de Berlin, discours pour commémorer
la fondation de l’Université de Berlin, 3 août 1856, Berlin, 1856 (HN V, no [1215]).
11. Cf. M, I, § 7.
12. B…… dans IM1. Julius Friedrich August Bahnsen (30 mars 1830 - 6 décembre 1881), études de philosophie à Kiel
depuis 1847, a dû s’exiler en 1849 suite à sa participation au combat de libération du duché de Schleswig-Holstein, promotion en
1853 à Tübingen, professeur de lycée à Anklam en 1858, professeur à l’École supérieure de Lauenburg en Poméranie. S’inspirant
de Schopenhauer, Bahnsen fut l’un des fondateurs de la caractérologie moderne, auteur des Beiträge zur Charakterologie («
Contributions à la caractérologie »), 2 tomes, 1867. Cf. Anselm Ruest, « Julius Bahnsen. Zur Scheidung des
Schopenhauerschüler und des Selbstdenkers », in Jahrb. no 19 (1932), p. 165-204 ; Heinz-Joachim Heydorn, Julius Bahnsen,
Göttingen et Francfort-sur-le-Main, 1952. Bahnsen s’était annoncé auprès de Schopenhauer par un billet en date du 8 août 1856
(D XV, no 622) et lui avait rendu visite le même jour.
13. S…….. dans IM1.
14. Kuno Fischer, Franz Baco von Verulam. Die Realphilosophie und ihr Zeitalter (« Francis Bacon. La philosophie réelle
et son époque »), Leipzig, 1856.
15. cf. lettre no 392.
Lettre 397
1. IM1 Schemann, p. 480 (d’après une copie de Lunteschütz). Selon une notice du Frankfurter Museum, 2e année, no 36 (6
septembre 1856), Rossini séjourna quelques jours à Francfort, après une cure à Kissing (cf. Gespräche, p. 220 sq.), et partit le 2
septembre, d’où la date probable du billet
2. Joseph Eugen Gouvernon ; cf. lettre no 205.
3. D’après le témoignage de Schemann, la rencontre ne se déroula pas comme prévu : « Rossini, accompagné par son
épouse et par un autre monsieur, se soucia peu de ses voisins qui, par ailleurs, semblaient l’avoir tout particulièrement effrayé
parce qu’ils s’entretenaient en allemand. De son côté, Schopenhauer était trop fier pour s’imposer à cet hôte célèbre ; de sorte
qu’aucune conversation n’eut lieu entre les deux, et Schopenhauer quitta l’Hôtel, riche d’une déception supplémentaire. »
Lettre 398
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 703-705.
2. L…… dans IM1.
3. Les célibataires, pour ainsi dire les gens célestes ; cf. Quintilien, Institutiones oratoriae, I, 9.
4. H…….. dans IM1.
5. La revue Historisch-politische Blätter de G. P. Phillips et G. Görres, tome 38, cahier 4, avait publié un article (« Der
Kampf gegen den physiologischen Materialismus ») qui évoquait l’écrit de Frauenstädt sur le matérialisme.
6. Q, § 34.
7. cf. lettre no 396.
8. Dites-le-moi.
9. Dans les Blätter für literarische Unterhaltung.
10. cf. lettre no 392.
11. Mais en vain.
12. Fais-moi savoir que tu te portes bien.
13. Bartholmèss mourut le 31 août 1856 à Nuremberg.
Lettre 399
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 705-706.
2. Dans le cadre d’une « mise en perspective critique » de la polémique autour du matérialisme (n os 60-66), l’Evangelische
Kirchen-Zeitung d’E. W. Hengstenberg évoqua certains écrits de Frauenstädt, dont Die Naturwissenschaft… (no 64, 9 août) et Der
Materialismus… (no 65, 13 août). Dans le no 64, Frauenstädt est appelé « l’avocat du spinozisme schopenhauérien » : « Mais
pourquoi jouer avec les mots, puisque l’avantage remarquable de la philosophie de Schopenhauer, c’est qu’elle est honnête et
reconnaît ouvertement son athéisme résolu ? ». Même perspective dans la Protestantische Kirchen-Zeitung, no 35 et 38 (cf. lettre
no 401).
3. Allusion à l’article publié dans les Historisch-politische Blätter de G. P. Phillips et G. Görres, tome 38, cahier 4 (cf.
lettre no 398).
4. Recte : Blätter für literarische Unterhaltung.
5. Une citation de Schopenhauer ornait le Calendrier populaire allemand de 1857, éd. par F. W. Gubitz.
Lettre 400
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 517-520.
2. Christian Hermann Weisse, « Kampf des Glaubens gegen den Materialismus », in Protestantische Kirchen-Zeitung, no
38, 1856.
3. cf. lettre no 367.
4. Gustav Adolf Fricke (né en 1822), théologien protestant (privat-docent en 1846, professeur non titulaire à Leipzig
(1849), à Kiel (1851), professeur titulaire à Leipzig (1867). Schopenhauer se réfère à un article publié dans les Blätter für
literarische Unterhaltung.
5. « Vouloir est l’être originaire » (Wollen ist Urseyn), in Abhandlung über die menschliche Freiheit (« Traité sur la liberté
humaine »), 1809, in Schellings Sämtliche Werke, éd. par K. F. A. Schelling, Stuttgart et Augsbourg, 1856-1861, première
section, tome 7, p. 350.
6. P, I, « Fragments de l’histoire de la philosophie », § 14.
7. Recension de l’écrit d’A. Cornill, in Westminster Review, no XX, octobre 1856, p. 531.
8. Jürgen Bona Meyer, Aristoteles Thierkunde. Ein Beitrag zur Geschichte der Zoologie, Physiologie und alten
Philosophie (« Le traité des animaux d’Aristote. Contribution à l’histoire de la zoologie, physiologie et philosophie antique »),
Berlin, 1855. Jürgen Bona Meyer (1829-1897), professeur de philosophie à Bonn depuis 1868.
9. Passage extrait de Voltaire und Rousseau in ihrer socialen Bedeutung (« Voltaire et Rousseau dans leur signification
sociale »), Berlin, 1856, p. 47, où Jürgen Bona Meyer compare le combat voltairien contre l’optimisme avec celui mené par
Schopenhauer.
10. Frauenstädt s’était référé à un passage d’un article de Jürgen Bona Meyer portant sur la morale sensualiste (in
Zeitschrift für Philosophie und philosophische Kritik, tome 29, cahier 1, p. 165), afin de prouver qu’il n’était pas le seul à
défendre l’idée (critiquée par Schopenhauer dans la lettre n o 392) du caractère inoffensif du matérialisme pour la morale (in Der
Materialismus…, p. VI-XIII). Le passage cité par Frauenstädt est le suivant : « Que je crois aimer mon prochain pour qu’il m’aime
en retour ou parce que ma nature le veut ainsi, cela fait une différence pour le jugement, mais aucune différence dans les faits.
L’essentiel, c’est que je l’aime. En jugeant la morale sensualiste, on oublie bien trop souvent cette égalité factuelle. Cet oubli ne
peut que provoquer l’exaspération des parties en conflit. Ce qui en rajoute encore d’avantage, c’est la limitation ridicule dont en
tout temps on a accablé la morale de l’intérêt, comme si le but de cette dernière était le plaisir dans un sens bassement charnel.
C’est une bonne chose que Frauenstädt soit entré en guerre contre ce raisonnement qui semble être de nouveau au goût du jour ;
commettre une injustice n’apportera jamais la victoire aux adversaires de la morale utilitariste. »
11. Méphistophèles parlant au feu follet, Faust I, v. 3864-3865.
12. C’est-à-dire les Historisch-politische Blätter de G. P. Phillips et G. Görres, tome 38, cahier 4, dans l’article « Der
Kampf gegen den physiologischen Materialismus » (cf. lettre no 398).
13. Démétrius dans Shakespeare, Le Songe d’une nuit d’été, V, 1.
14. Frauenstädt répondit à cette lettre que Schopenhauer aurait pu éviter ses « rugissements » si seulement il avait prêté
attention au sens véritable de ses affirmations et de celles de Meyer, au lieu d’y déceler précipitamment un sens qu’elles n’avaient
aucunement : « Je lui avais également montré qu’il affirmait la même chose que moi et Jürgen Bona Meyer, en expliquant lui
aussi, dans Le Monde comme volonté et représentation, I, § 66, que les actions vertueuses étaient indépendantes des dogmes
abstraits et des philosophèmes, donc indépendantes de l’interprétation que la raison en donne. Des actions de valeur morale
pourraient donc co-exister avec une interprétation matérialiste de ces dernières qui les déduirait des mouvements de la matière.
Mais en défendant le matérialisme et en étant d’accord avec Bona Meyer, je n’ai affirmé rien d’autre que précisément cela. » Par
ailleurs, Frauenstädt reprochait à Schopenhauer sa virulence, qui l’empêcherait de lire correctement ce qui était écrit. Suite à cette
lettre, Schopenhauer interrompit la correspondance avec Frauenstädt. Ce n’est que lorsque Frauenstädt le remercia de l’envoi
d’un exemplaire gratuit de la troisième édition du Monde que Schopenhauer adressa une dernière lettre à « l’évangéliste en chef
», le 6 décembre 1859 (lettre no 477).
15. Karl Gutzkow, Die kleine Narrenwelt (« Le petit monde des fous »), partie 1-3, Francfort-sur-le-Main, 1856-1857.
16. L’article sur « Schopenhauer penseur indépendant » publié dans les Unterhaltungen am häuslichen Heerd, I, no 5.
17. Julian Schmidt, Geschichte der deutschen Literatur im 19. Jahrhundert (« Histoire de la littérature allemande au XIXe
siècle »), 3e éd. revue, tome 1-3, Leipzig, 1856 (sur Schopenhauer : p. 374-376).
18. Wilhelm von Humboldt, Briefe an eine Freundin (« Lettres à une amie »), 6e éd., partie 1 et 2, Leipzig, 1856.
19. Adolf Zeising (1810-1876), théoricien de l’art de l’école hégélienne et auteur de Neue Lehre von den Proportionen des
menschlichen Körpers (« Nouveau traité sur les proportions du corps humain »), avait fortement loué, dans les Blätter für
literarische Unterhaltung, l’ouvrage de M. Lazarus, Das Leben der Seele in Monographien über seine Erscheinungen und
Gesetze (« La vie de l’âme dans des monographies sur ses apparitions et ses lois »), tome 1, Berlin, 1856. Ce premier tome
contient son traité sur « L’honneur et la gloire » et sur « L’humour comme phénomène psychologique ».
20. Lettre du charron Heinrich Jürgens (1823-1860) de Hameln, en date du 12 octobre 1856 (M Archives Schopenhauer.
IM1 Hübscher, Jahrb. no 24 [1937], p. 120-123). La réponse de Schopenhauer (19 octobre 1856) n’a malheureusement pas été
conservée. Sur Jürgens, cf. Hans Henning, « Schopenhauers Hamelner Verehrer », in Deister und Weserzeitung, 19 août 1936, no
193, et Hübscher, Jahrb. no 24 (1937), p. 120.
21. Angilbert Göbel (1821-1882), cf. Bildnisse, no [45].
Lettre 401
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, 34, p. 277-279.
2. Asher avait fait savoir à Schopenhauer que le candidatus theologiae Georg Carl Rudolph Seydel (1835-1892) avait reçu
le prix pour son travail sur Schopenhauer, et qu’un accessit avait été accordé à un autre étudiant, dont il ne connaissait pas encore
le nom (il s’agissait de Carl G. Bähr). En examinant le vote de la Faculté de Leipzig, retrouvé par Max Brahn en 1911, l’on peut
constater que le jury (Weisse et Drobisch) avait contenu son hostilité envers Schopenhauer en s’efforçant d’être objectif. Si le
jeune Bähr n’a finalement pas reçu de prix, c’est plutôt en raison de considérations formelles émanant du ministère. En 1867,
Rudolf Seydel sera nommé professeur de philosophie à Leipzig.
3. Cf. note 2 de la lettre no 394.
4. L’article « Nochmals Schelling und Schopenhauer » fut publié dans les Blätter für literarische Unterhaltung, no 50,
1856 et salué par une lettre élogieuse de J. G. von Quandt en date du 26 décembre 1856 (Asher, p. 38-40).
5. Asher en avait déjà tenu compte dans sa « Missive », p. 8.
6. Joseph Hillebrand, Die deutsche Nationalliteratur im 18. und 19. Jahrhundert (« La littérature nationale allemande au
XVIIIe et XIXe siècle »), 2e éd. 1850, tome 3, p. 385.
7. cf. lettre no 400.
8. Blätter für literarische Unterhaltung, 1856, no 28 et 29 (10 et 17 juillet).
9. C. H. Weisse, « Kampf des Glaubens gegen den Materialismus », in Protestantische Kirchen-Zeitung, no 38, 1856.
10. « Chante le courroux, ô déesse ! » (Homère, Iliade, début).
11. Asher avait écrit que c’est un rapprochement étymologique fait par Schelling qui avait éveillé son intérêt pour
Schopenhauer, à savoir que le mot hébraïque pour « père » a pour racine « vouloir » : « Les racines des langues sémitiques sont
formées par des verbes, et par des verbes bisyllabiques, ayant trois radicaux […]. Étant donné cette structure de la langue, on ne
peut s’empêcher de ramener le mot qui, dans la langue hébraïque, signifie père, à un verbe qui signifie désirer, exiger, c’est-à-
dire à un verbe qui implique la notion de besoin, de privation, cette notion apparaissant également dans l’adjectif qui est déduit de
ce verbe » (Schellings Sämtliche Werke, deuxième section, tome 1, Einleitung in die Philosophie der Mythologie, Stuttgart et
Augsbourg, 1856, p. 51 ; Introduction à la philosophie de la mythologie, tome 1, trad. fr. S. Jankélévitch, Aubier, Paris, 1945).
12. Max Müller, On the Veda and the Zend-Avesta, repris dans les Essays, trad. all. Leipzig, 1869, I, p. 67 (cf. HN IV, p.
217 sq.). À ce propos, cf. également la lettre de Schopenhauer à Bunsen, en date du 28 mars 1857 ( lettre no 410) et H. von
Glasenapp, « Das Gottesproblem bei Schopenhauer und in den metaphysischen Systemen der Inder », in Jahrb. no 28 (1941), p.
178 sq.
13. « Originairement, Brahm signifie force, volonté, désir, & la puissance propulsive de création. »
14. Cf. note 1 de la lettre no 410.
15. Faites pour le mieux.
Lettre 402
1. IM1 Schemann, p. 364-365.
Il s’agit de la lettre de remerciement pour l’envoi (promis par Crüger en 1855) de l’exemplaire personnel de Kant de la
Critique de la raison pratique (cf. lettre no 378).
2. Sans doute à l’occasion de la troisième ébauche du codicille.
Lettre 403
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 34, p. 280-281.
2. Cf. note 4 de la lettre no 401.
3. Tomás de Iriarte, Fábulas literarias, Barcelone, 1796 (HN V, no [1847]).
4. Le 30 novembre 1856, R. Seydel, répondant à une demande d’Asher, lui fit savoir qu’il devait remettre son manuscrit au
prof. Weisse « qui a l’intention de trouver un éditeur pour moi à Leipzig ». Asher envoya cette lettre de Seydel à Schopenhauer
(M Archives Schopenhauer).
Lettre 404
1. IM1 Schemann, p. 347-348.
Cette lettre répond à une lettre de Bahnsen en date du 11 décembre 1856 (D XV, no 631).
2. Il s’agit de la correspondance entre Schopenhauer et J. A. Becker.
3. Les autorités danoises avaient condamné Bahnsen à quatre ans de « collaboration militaire », pour inscription tardive au
service militaire.
Lettre 405
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Gwinner, 2e éd., p. 586-589 (imprécis). IM2 Mockrauer, Jahrb. no 18 (1931), p. 153-
155.
2. C. G. Bähr, Die Schopenhauer’sche Philosophie in ihren Grundzügen dargestellt und kritisch beleuchtet (« La
philosophie schopenhauérienne présentée en ses traits fondamentaux et éclairée de façon critique »), Dresde, 1857, réimprimé
avec quelques modifications et ajouts (à partir de l’exemplaire personnel de l’auteur) dans le Jahrb. no 18 (1931), p. 1-178. La
réimpression donne également les biffures réprobatrices et les soulignements approbateurs que Bähr avait recopiés de
l’exemplaire de Schopenhauer. Comme Bähr n’avait pas recopié l’appréciation finale de Schopenhauer, ce texte manque
également dans la version imprimée par Mockrauer. Après la lecture des écrits de Bähr et de Seydel, Schopenhauer avait écrit
dans son exemplaire du texte de Bähr : « Le jugement de la Faculté de Leipzig, qui n’a pas attribué le prix au beau livre de Bähr,
mais au misérable travail de R. Seydel, veut dire : “ce n’est ni la vérité, ni la clarté qui nous importent, mais le fait que quelqu’un,
per fas et nefas, quelle que soit la manière, rabaisse et discrédite ce Schopenhauer : c’est pour cette raison que nous avons
décerné le prix — avec l’argent que l’on nous a confié.” Ils auraient dû garder à l’œil le respice finem. Ce n’est pas ainsi qu’on
réussit à tromper son public. Le vent va tourner et soufflera contre eux » (HN V, no [47] ; cf. aussi la lettre no 413).
3. « mais de là [sc. du fait que par “sensation”, et même par l’expression “modification de l’esprit (Gemüth)”, Kant
comprenne tout ce qui est immédiatement présent à la conscience et donne lieu à l’expérience], s’ensuit une situation
désagréable, à savoir que l’on se demande pourquoi il faudrait comprendre quelque chose comme ce qui détermine des choses
extérieures à nous, plutôt que comme une détermination empirique de notre propre existence dans le temps. La matière de toute
expérience n’est d’abord que l’objet du sens interne, donc une détermination de la conscience de soi. Dès lors, si l’entendement
sépare partiellement cette conscience de soi de notre Soi empirique, il doit bien y être poussé par quelque besoin, provenant de
l’intériorisation immédiate de la différence entre la perception sensible et les mouvements internes qui proviennent de nous-
mêmes et qui sont les modifications véritables de l’esprit (Gemüth). »
4. « Qui ne remarquerait pas dans le procédé de ces investigations éthiques la grande ressemblance avec la manière dont
Kant articule son problème de la théorie de la connaissance ? Il a dit : les propositions synthétiques a priori sont réelles, mais
comment sont-elles possibles ? De la même manière, Schopenhauer part des deux faits de la compassion et de la responsabilité, et
explique leur possibilité à partir du principe de l’idéalisme critique. »
5. « Car la philosophie transcendantale a entièrement négligé la question de savoir quel était le substrat de l’action
connaissante, qui laisserait subsister cette action comme un donné ultime, le réel : peut-être est-ce une intelligence en soi, ou une
matière, voire une volonté ? » (p. 125) ; « Le jugement “je pense” ou “je connais” comme fondement ultime d’une théorie de la
connaissance, suppose déjà un substrat, le “je”, dans la pensée comme activité ; ce “je” ne pouvait qu’être laissé de côté dans
l’auto-examen de la conscience, puisque l’on ne considérait toujours qu’une manifestation déterminée du “je”, à savoir la
connaissance » (p. 128).
6. L’argumentation de Bähr concerne l’application de la proposition berkeleyenne « pas d’objet sans sujet », avec laquelle
Schopenhauer « a effectué un pas tout à fait douteux au-delà du principe idéaliste de Kant », en affirmant que « la spontanéité de
l’action connaissante, ainsi que la forme pure de l’être-connu, du pur être-objet pour un sujet, relève déjà du phénomène », ce qui
ne veut pas dire que Bähr s’en prend à « la doctrine schopenhauérienne très importante fondée sur une conception de la nature
incomparablement profonde et géniale », selon laquelle « l’intellect provient de la volonté, n’étant à l’origine que le médium de
la causalité pour des êtres connaissants et étant destiné par la nature à servir les poussées d’une volonté individuelle ».
7. M, II, chap. 22.
8. P, II, chap. X, § 139.
9. Dans le Frankfurter Museum, 3e année, no 5 (31 janvier 1857), on pouvait lire : « Lors d’une chute, le philosophe
Schopenhauer, habitant de cette ville, s’est blessé au front de façon non négligeable, mais il sera sans doute très rapidement
rétabli (comme nous le précisons pour répondre aux demandes). » Selon Hornstein, Schopenhauer se serait blessé en glissant sur
du verglas (cf. Gespräche, p. 217) ; selon Gwinner (3e éd., p. 390), la chute aurait été provoquée par un évanouissement, alors que
Schopenhauer était à table. La première version semble la plus probable. Schopenhauer fut soigné par le Dr. Carl von
Mettenheimer ; cf. W. Rauschenberger, « Schopenhauer in ärztlicher Behandlung », Jahrb. no 26 (1939), p. 330-332. Lunteschütz
répondit à la demande de Bähr par un billet en date du 27 février 1927, rédigé en français : « M. le Dr. Schopenhauer est
complètement remis de sa chute, il est tout à fait guéri déjà depuis une quinzaine. Lorsque je l’ai été voir dimanche dernier, jour
de sa naissance, il m’a beaucoup parlé de votre ouvrage sur sa philosophie » (D XVI, p. 492 sq.).
10. Paresse !
11. Bravo pour ton courage !
Lettre 406
1. IM1 Schemann, p. 351-353.
2. Il s’agit du premier article de Bahnsen (envoyé le 20 février à Schopenhauer) : « Arthur Schopenhauers Urtheil über den
Bildungswerth der Mathematik », in Schulzeitung für Herzogthümer Schleswig, Holstein und Lauenburg, éd. A. P. Sönksen, Kiel,
21 février 1857, no 21.
3. Cette traduction, dont l’auteur était Alexandre Weill, s’intitulait « Philosophie de la magie » ( Revue française, décembre
1856, t. VII, p. 348 sq.). Préface reproduite dans le Jahrb. no 19 (1932), p. 271-272. Pour les remarques critiques de
Schopenhauer sur cette traduction, cf. Gespräche, p. 83.
Lettre 407
1. IM1 Schemann, p. 381-382.
Frederik Willem van Eeden (1829-1901), marchand de fleurs et écrivain botaniste à Haarlem, plus tard secrétaire général
de la Société néerlandaise pour la promotion de l’industrie et directeur et fondateur du Musée colonial et du Musée des arts
industriels à Haarlem. Dans un courrier daté du 22 février 1857 (M Archives Schopenhauer ; Gwinner l’avait classé par erreur
dans les lettres de vœux pour le 70 e anniversaire), il écrit que l’œuvre de Schopenhauer est pour lui « comme une bible que
j’ouvre avec le plus beau succès à chaque moment de désespoir ou d’ennui ».
2. Schopenhauer se trompe : son grand-père, Andreas Schopenhauer, est né le 11 juin 1720 à Stutthof près de Dantzig.
3. Anna Renata Soermans (28 octobre 1726 - 9 avril 1804), fille du commerçant Hendrik Soermans (2 juin 1700 - 13 août
1775), résident ministériel des Pays-Bas dans la Ville Libre de Dantzig.
4. À ce sujet, cf. R. Borch, « Zu Schopenhauers Brief an van Eeden », Jahrb. no 26 (1939), p. 389.
5. L’excursion à Haarlem eut lieu le 14 mai 1803. Cf. Journal de voyage, sous la date « samedi 14 mai ».
6. Cette maison abritera les deux musées fondés par van Eeden.
7. En réalité, la famille ne visita cette église qu’à son retour d’Angleterre, le 17 novembre 1803. Cf. Journal de voyage,
sous la date « jeudi 17 novembre ».
8. Le Journal de voyage indique : « La vieille église gothique, dans laquelle mon arrière-arrière-grand-père du côté de ma
mère a été prédicateur. » L’arrière-arrière-grand-père maternel de Schopenhauer s’appelait Johann Soermans (20 juillet 1670 - 1 er
mars 1754) ; il fut prédicateur à Giessen Oudkerk et à Peursum et vécut à Gorkum après sa mise à la retraite. Son père, Martinus
Soermans (17 novembre 1638 - 1705) fut pasteur à Goudriaan et vécut à Haarlem et à Leiden après sa retraite.
Lettre 408
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 34, p. 281-282.
2. Asher avait dédié un poème à l’anniversaire de Schopenhauer. Comme le Frankfurter Konversationsblatt avait refusé de
le publier, Asher en avait envoyé une copie à Schopenhauer.
3. Dr. Eduard Sattler (1818-1857), depuis 1848 collaborateur, ensuite rédacteur en chef du Frankfurter Konversationsblatt
(il décéda le 27 mars).
4. Écrasez-le comme tel.
5. L’auteur de ce poème était Gottfried Carlot Beck (1821-1901), mégissier, député de la ville (1875), conseiller de la ville
de Francfort (1877). Peu après, Schopenhauer apprendra son nom par Lunteschütz et l’invitera chez lui (cf. Gespräche, p. 295-
303). Schopenhauer entretiendra par la suite des rapports amicaux réguliers avec Beck, lui offrant même une partie du manuscrit
des Compléments pour la 3e édition de son maître-ouvrage.
6. cf. lettre no 403.
7. Cf. Goethe, Faust I, v. 3704, 3706.
Lettre 409
1. M Prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 Baron Karl du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 8 janvier 1873, no 367.
2. Le 26 février 1857, Doss avait copié (avec des erreurs) et envoyé l’article « t’hëen » / « tian » (ciel) du Chinese
Dictionary de R. Morrisson, vol. I, Macao, 1815, p. 576 : « Heaven makes the mind of mankind its mind ; in must [recte : most]
ancient discussions respecting heaven, its mind or will was divined [recte : derived] from what was the will of mankind ». Cf.
l’utilisation de cette lettre dans N, « Sinologie », note.
3. Qui est-ce ?
4. Ernst von Lasaulx, Ueber die theologische Grundlage aller philosophischen Systeme (« Sur le fondement théologique de
tous les systèmes philosophiques »), discours inaugural du rectorat de l’Université Ludwig-Maximilians tenu le 29 novembre
1856, Munich, 1856 (HN V, no [678]).
5. Jules Barthélemy-Saint-Hilaire, Du bouddhisme, Paris, 1855. Schopenhauer ne semble pas avoir lu ce livre.
6. Jean-Baptiste François Obry, Du Nirvana indien, ou de l’affranchissement de l’âme après la mort selon les brahmanes
et les bouddhistes, Amiens, 1856 (HN V, no [1155]). Schopenhauer cite cet « excellent livre » dans M, II, chap. 41.
7. Der Kural des Tiruvalluver. Ein gnomisches Gedicht über die drei Strebeziele des Menschen, traduction et notes par
Karl Graul, Bibliotheca Tamulica t. III, Leipzig, 1856 (HN V, no [1201]). Doss avait déjà indiqué à Schopenhauer l’existence de
cet ouvrage, le 19 février 1856.
8. D’où ces larmes ; cf. Térence, Andria, I, 1, 99).
Lettre 410
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 D XV, no 646.
Christian Carl Josias Bunsen (25 août 1791 - 28 novembre 1860), ami de Schopenhauer du temps de ses études à Göttingen
(immatriculation 16 octobre 1809), a accompagné Schopenhauer lors d’un voyage à Weimar (Pâques 1811) où il a séjourné chez
Johanna Schopenhauer et rencontré Goethe. Déménagement de Niebuhr à Rome (1816), représentant du commerce prussien
auprès du Vatican (1823), résident ministériel (1827-1838), envoyé diplomatique à Berne (1839-1841) et à Baden (1841-1844).
La lettre répond à un courrier de Bunsen (26 mars 1857, D XV, no 645) s’enquérant du bien-être de Schopenhauer et remis
par son fils Theodor (né en 1832) lors d’une visite à Francfort.
2. Carnage.
3. William Backhouse Astor (1792-1875), étudiant avec Schopenhauer à Göttingen (immatriculation 25 août 1810), fils de
Johann Jakob Astor (1763-1848) qui avait fait fortune dans le commerce de fourrures et la spéculation foncière.
4. Bon vieux temps.
5. Partiellement, pêle-mêle, rapidement, furtivement.
6. Christian Carl Josias Bunsen, Hippolytus und seine Zeit. Anfänge und Aussichten des Christentums und der Menschheit
(« Hippolyte et son temps. Débuts et perspectives du christianisme et de l’humanité »), tomes 1 et 2, Leipzig, 1852 et 1853.
7. Christian Carl Josias Bunsen, Die Zeichen der Zeit. Briefe an Freunde über die Gewissensfreiheit und das Recht der
christlichen Gemeinde (« Les signes du temps. Lettres à des amis sur la liberté de la conscience morale et la communauté
chrétienne »), tomes 1 et 2, Leipzig, 1856.
8. Dans Die Zeichen der Zeit.
9. Cf. note 12 de la lettre no 401.
10. Les ducs & évêques, & une brillante conversation du Chevalier Bunsen.
11. La visite de Bunsen n’aura lieu qu’en octobre 1857 (cf. Gespräche, p. 84, 131, 317, 408), le dernier contact épistolaire
se fera au tournant de 1857-1858. Schopenhauer avait félicité son ami de jeunesse pour son anoblissement, ce dernier répondant
alors dans une lettre du 13 janvier 1858 : « J’ai subi l’anoblissement, tout comme ma naissance, mais je m’en suis toujours
préservé en suivant mes principes fixés depuis longtemps, si c’était dans le but de pardonner quelque chose à mon rang, la
bourgeoisie cultivée, ou de me faire couvrir de ridicule » (in Baron C. C. J. von Bunsen… geschildert von seiner Witwe, éd.
allemande par Nippold, III, 508).
Lettre 411
1. IM1 Schemann, p. 353-354.
2. « Noch einige Erläuterungen zu Arthur Schopenhauer’s Urtheil über den Bildungswerth der Mathematik », I, II, in
Schulzeitung für die Herzogenthümer Schleswig, Holstein und Lauenburg, Kiel, 21 mars 1857, no 25, et 28 mars 1857, no 26.
3. William Hamilton (1788-1856) avait écrit une recension du livre de Whewell (Thoughts on the study of Mathematics as
a part of a liberal education, 1835) dans l’Edinburgh Review, vol. 62, janvier 1836, p. 409-455 ; traduction allemande Ueber den
Werth und Unwerth der Mathematik, Kassel, 1836 (cf. M, II, chap. 13).
4. Dans le no 22 de la Schulzeitung, l’ingénieur Kühl avait attaqué le premier article de Bahnsen.
5. Chapitre I, définition 1.
6. Dans sa lettre du 28 mars, Bahnsen avait demandé à Schopenhauer s’il existait une telle revue, susceptible d’éveiller
l’intérêt d’« un public un peu plus large » pour ses travaux.
7. Zeitschrift für das Gymnasialwesen, éd. par W. J. C. Mützell, Berlin, 7e année, 1853.
8. Pädagogische Monatsschrift, éd. par F. Löw, 4e à 6e année, 1850-1852.
9. Les autorités avaient suspendu l’imposition de quatre ans de service (cf. lettre no 404).
Lettre 412
1. M Prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 Baron Karl du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 8 janvier 1873, no 367.
2. A. von Doss avait répondu aux questions formulées le 19 mars (lettre no 409) par Schopenhauer, confirmant qu’il fallait
lire « derived » au lieu de « divined », et « most » au lieu de « must ».
3. D’après sa lettre du 20 février 1858 (D XV, 606), A. von Doss séjourna à Francfort pendant trois jours, en juillet 1857
(cf. Gespräche, p. 155-157).
Lettre 413
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 135-136 (imprécis).
2. Le 7 juin 1857, Becker avait envoyé à Schopenhauer le manuscrit d’un traité de son fils, en lui demandant ce qu’il en
pensait ; le traité paraîtra plus tard dans la Schulzeitung (cf. lettre no 424).
3. M, II, chap. 4.
4. M, II, chap. 13.
5. Schopenhauers philosophisches System dargestellt und beurtheilt von Rudolf Seydel. Gekrönte Preisschrift (« Le
système de Schopenhauer présenté et jugé par Rudolf Seydel. Écrit couronné »), Leipzig, 1857 (HN V, [535]). L’écrit fut publié
début juin 1857 (cf. lettre no 401). Becker l’avait déjà fortement critiqué dans une lettre à Schopenhauer en date du 7 juin 1857 (D
XV, 572), en s’offusquant, entre autres choses, de « l’abus odieux » des guillemets.
6. Par des moyens licites et illicites.
7. Pense à la fin.
8. Il s’agit d’un traité sur les phénomènes de diffraction par le prof. Schwerd (Speyer) que Becker avait joint aux autres
journaux d’école, le 17 avril 1857 (D XV, no 650) ; la « chose immonde » était imprimée en grand in-octavo et donc assez
volumineuse.
Lettre 414
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 D XV, no 657.
Friedrich Grävell (1813-1878) était médecin à Berlin et connu comme écrivain médical. Le 18 juin 1857 (D XV, no 655), il
avait envoyé à Schopenhauer son écrit Goethe im Recht gegen Newton (« Goethe a raison contre Newton »), Berlin, 1857 (HN V,
no [855]).
2. Comme prévu, la visite eut lieu le 2 ou le 3 juillet 1857 (cf. Gespräche, p. 309).
Lettre 415
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 34, p. 282-283 (incomplet).
2. Alliance matrimoniale brisée.
3. Une épouse écrivain.
4. Sur les femmes d’écrivains.
5. Faust I, v. 4088-4089.
6. Faust I, v. 4094-4095.
7. cf. lettre no 413.
8. c…… dans IM1.
9. c……. dans IM1.
10. Par des moyens licites et illicites.
11. p……… dans IM1.
12. b….. dans IM1.
13. Sur ce point, Schopenhauer ne rend pas justice à l’auteur. Seydel écrit que Schopenhauer a « illustré la vérité, à savoir
que le mal existe pour le bien, par une belle parabole [de l’oasis et du désert, P, II, § 390] » et qu’il esquisse en de nombreux
passages une théodicée, notamment dans P, II, § 152, 171, 173, 181. L’interprétation de la parabole est certes fausse, car
Schopenhauer voulait souligner la solitude du génie parmi les esprits qui lui sont subordonnés ; toutefois, pour Seydel, ce n’est
précisément pas cette parabole qui amorçait une théodicée, mais les paragraphes cités plus haut.
14. Asher avait fait savoir à Schopenhauer que le Dr. Stein de Dantzig lui avait rendu visite et raconté qu’un membre de
l’association littéraire de cette ville avait donné une conférence sur son système. Un protocole de cette conférence, donnée le 12
décembre 1856, a été conservé (D XVI, p. 498 sq.) ; ce protocole se termine par les mots suivants : « À la fin, il a été souligné
que ce système philosophique était particulièrement recommandable par rapport à beaucoup d’autres systèmes, parce qu’une
certaine unité, qui semble être douteuse pour tant d’autres philosophes, s’introduit ainsi dans l’activité de l’esprit humain. »
15. Literarisches Centralblatt für Deutschland, 1857, no 28.
16. Asher avait écrit qu’il voyait un prédécesseur de Schopenhauer en la personne de Salomon ibn Gabirol, et que
l’orientaliste Salomon Munk (1803-1867) venait de publier quelques extraits du Fons vitae dans ses Mélanges de philosophie
juive et arabe, Paris, 1857.
17. L’auteur de la recension était l’ami et le professeur d’Asher, le Dr. Bernhard Beer, qui lui avait également procuré les
Mélanges de philosophie juive et arabe. Beer lui avait dit qu’il rendrait compte de ce livre dans le Literarisches Centralblatt et
dans la Zeitschrift für die Wissenschaft des Judentums de Frankel. Senior Sachs, dans sa revue Kerem Chemed, tenta également
de déceler des concordances entre la philosophie de Gabirol et la doctrine de la volonté de Schopenhauer.
18. Asher avait demandé à Schopenhauer s’il avait déjà autorisé quelqu’un à rédiger sa biographie.
19. cf. lettre no 251.
20. cf. lettre no 253.
21. Il s’agit d’une très brève biographie, réduite aux dates essentielles, dans les suppléments à l’Universal-Lexikon de
Pierer, tome 3, Altenburg, 1854, p. 385 ; dans le dictionnaire même (tome 14, 3 e éd., 1852), seule Johanna Schopenhauer est
évoquée (p. 290).
Lettre 416
1. IM1 Schemann, p. 367.
Il s’agit de la réponse à une lettre de Crüger du 13 septembre 1857 (D XV, no 660) qui annonçait à Schopenhauer la
naissance d’une petite fille et lui demandait d’envoyer un peu de tabac à priser.
2. Allusion à la réunion de l’Alliance protestante à Berlin, commencée le 9 septembre 1857, d’une durée de huit jours.
Pour consolider la position de l’Église protestante face à l’Église catholique, des protestants de tous les pays s’étaient réunis,
méthodistes anglais, figures sectaires, idéalistes et enthousiastes en tous genres ; ainsi qu’un certain nombre d’Allemands très
orthodoxes, à côté de protestants rationalistes et libéraux, avec à leur tête Daniel Schenkel, pionnier de l’Association des
protestants. Bunsen, l’ami de jeunesse de Schopenhauer, y participa également. Rapports dans l’Evangelische Kirchen-Zeitung,
1857, tome 61, no 80/81 (7 et 17 octobre 1857) et dans la Protestantische Kirchen-Zeitung, 1857.
3. L’exemplaire personnel de Kant de la Critique de la raison pratique (cf. note 7 de la lettre no 378) et la statue du
Bouddha que Crüger avait achetée à Paris pour Schopenhauer (cf. lettre no 388).
Lettre 417
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Schemann, p. 384-386.
Il s’agit de la réponse à une lettre de Körber du 26 septembre 1857.
2. Peter Knoodt (1811-1889), théologien catholique et philosophe, professeur à Bonn (1845), suspendu en 1871, vicaire
catholique général (1878-1889).
3. Ludwig Ferdinand Neubürger (1836-1895), enseignant, écrivain indépendant, dramaturge et critique de théâtre à
Francfort-sur-le-Main, auteur de Erinnerungen an Schopenhauer dans Gesammelte Werke, Dresde et Leipzig, 1898, tome 2, p.
62-69. Cf. Hübscher, Jahrb. no 26 (1939), p. 306-310 et Gespräche, p. 310-314.
4. Schopenhauer se trompe : Sulzer est décédé en 1897.
5. M, II, chap. 40.
6. Körber avait joint à sa lettre deux ouvrages d’un jeune collègue, Hermann Adolph Fechner, Jakob Böhme. Sein Leben
und seine Schriften (« Jakob Böhme. Sa vie et ses écrits »), Görlitz, 1857 (HN V, no [170]) et Ueber den Gerechtigkeitsbegriff des
Aristoteles (« Sur le concept de justice chez Aristote »), Leipzig, 1855 (HN V, no [171]).
Lettre 418
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 34, p. 284-286.
2. Asher avait demandé à Schopenhauer de revoir son écrit Ueber den religiösen Glauben (« Sur la foi religieuse ») avant
la publication.
3. Blätter für literarische Unterhaltung, 1857, no 33 (cf. lettre no 423).
4. Objets de pensée.
5. La traduction française de Munk a été faite d’après la traduction en hébreu de Shem Tov Falaquera. Le texte original est
en arabe.
6. Asher avait demandé si Schopenhauer avait lu Philosophie der Mythologie de Schelling et les articles de Seyerlen sur le
système de Gabirol parus dans les Theologische Jahrbücher de Bauer et Zelter, 1856, cahier 4.
7. Le visiteur russe de Moscou est peut-être le prédicateur protestant Carl Sederholm que Schopenhauer évoque dans la
lettre no 431.
8. Dans son recueil de traductions Om lidandet i världen, 1927, p. 27, C. V. E. Carly suppose que le visiteur suédois
d’Uppsala est Carl Palmstedt (1785-1870). Ce qui ne saurait être le cas, puisqu’en 1857 Palmstedt vivait à Göteborg, en tant que
président retraité de l’Institut technique Chalmer. Erich Furreg, dans « Schopenhauer und Schweden », Jahrb. no 28 (1941), p.
272-275, pense que le visiteur d’Uppsala est Elof Widmark (1828-1882) qui se trouvait à Uppsala depuis 1857, en tant
qu’enseignant de philosophie théorique, et qui, dans son écrit Om grund och följd, Uppsala, 1859, analyse en détail le principe de
raison selon Schopenhauer. Il est possible que le deuxième visiteur suédois évoqué par Schopenhauer ait été Carl Palmstedt.
9. Carl Wilhelm comte d’Innhausen et Knyphausen (1784-1860), émissaire extraordinaire du roi de Hanovre et ministre
plénipotentiaire à la Cour royale de Prusse. La visite eut lieu le 20 juin 1857, une deuxième visite suivit le 7 juillet 1857. L’année
suivante, le comte Knyphausen fit suivre à ces visites une lettre de vœux pour le 70 e anniversaire de Schopenhauer (D XV, no
684). Cf. Hübscher, Jahrb. no 51 (1970), p. 197 sq.
10. En dernière page du carnet manuscrit Senilia, Schopenhauer avait noté les noms des visiteurs de l’été 1857, parmi
lesquels se trouvaient aussi la comtesse Königsmarck et la comtesse Stolberg, née Lichtenau, à Staulberg. Le château du comte
Königsmarck était situé en face du domicile de Carl Ferdinand Wiesike, de l’autre côté de la Havel. Cf. Hübscher, « Melusine »,
dans Denker gegen den Strom, appendice II, p. 292.
11. Le Literarisches Centralblatt, 1857, no 41 contenait une critique favorable du livre de Seydel.
12. L’artificier a sauté avec son pétard ; cf. Hamlet, III, 4, 206 : « the engineer hoist with his own petard. »
13. Parfaitement.
14. Asher avait fait savoir à Schopenhauer qu’il avait écrit un roman en anglais.
15. Tout à fait étonné.
16. Afin d’empêcher toute possibilité d’erreur, & pour voir si tout est bien.
17. Pensez-y.
18. Librairie fondée en 1830 par Adolf Asher (1800-1853).
Lettre 419
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 139.
2. Il s’agit de l’explosion, survenue à Mayence le 18 novembre 1857, qui avait dévasté plusieurs pièces de sa maison,
comme Becker l’écrira à Schopenhauer dès le 22 novembre 1857 (D XV, no 667). Becker lui-même et sa famille, ainsi que le
portrait de Schopenhauer accroché au mur, n’ont pas subi de dégâts.
3. Si tu es bien-portant, c’est bien, moi je suis bien-portant.
Lettre 420
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 D XV, no 668.
2. cf. lettre no 299.
3. Par des moyens licites et illicites.
Lettre 421
1. IM1 Grisebach, Briefe, p. 421.
Lettre 422
1. C Archives Schopenhauer. IC1 Hübscher, Jahrb. no 34 (1951-1952), p. 62 sq.
Sibylle Mertens décéda le 22 octobre 1857. L’un de ses gendres, le professeur Friedrich Heimsoeth, transmit l’acte de
décès officiel (D XV, no 665) à Schopenhauer qui l’envoya à Friedrichsen accompagné de cette lettre, afin de régler ses affaires
d’affermage.
2. Anna Caroline Tietz (1782-1856), veuve de Carl Gottfried Tietz, cousin de Schopenhauer, avait été incluse avec ses
trois enfants dans le testament de Schopenhauer ; elle était décédée le 18 octobre 1856.
Lettre 423
1. M Shinjiro Sakanoue, Nishiku Osaka. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 34, p. 286-287.
2. Asher avait écrit à Schopenhauer qu’il avait porté un toast à son anniversaire lors de la réunion de l’Association des
écrivains de Leipzig.
3. cf. lettre no 424. Wiesike envoya la coupe, accompagnée d’une lettre de vœux, le 22 février 1858 (D XV, no 678). Après
la mort de Schopenhauer, il put récupérer la coupe qu’il légua plus tard au Germanisches Museum à Nuremberg.
4. Lettre de van Eeden (Haarlem), 19 février 1858 (D XV, no 673), von Doss, 20 février 1858 (D XV, no 674), Carl Bähr,
21 février 1858 (D XV, no 675), Bahnsen, 21 février 1858 (D XV, no 676), Becker, 21 février 1858 (D XV, no 677), Wiesike, 22
février 1858 (D XV, no 678) ; également une lettre d’Asher, qui n’a pas été conservée et dont la présente est la réponse, et une
lettre d’hommages de Debrois van Bruyck envoyée de Vienne le 13 février 1858 (cf. lettre no 426), mais qui ne s’insère pas dans
cette liste au même titre que les autres et qui ne sera d’ailleurs pas prise en compte dans les lettres que Schopenhauer adressera
par la suite à Becker et à Bähr.
5. « Salomon ibn Gabirol in seinem Verhältniss zu Arthur Schopenhauer », in Blätter für literarische Unterhaltung, 1857,
no 52 (repris dans Asher, p. 65-70).
6. M. dans IM1. Carl Friedrich Mylius (1827-1916) reçut une formation de photographe à Francfort en 1850 et exerça
ensuite à Nuremberg. Il revint à Francfort de 1855 à 1891.
7. Asher avait décidé la rédaction de Leipziger Illustrierte Zeitung à publier un portrait et une biographie de Schopenhauer
à l’occasion de son 70e anniversaire. Le portrait (Bildnisse, no [86]) servit ensuite de modèle pour la réalisation d’une gravure sur
bois (Bildnisse, no [87]) qui ne fut publié que le 4 décembre, après de nombreux retards.
8. Jacob Seib, Francfort-sur-le-Main, Hochstr. 16, auteur de deux daguerréotypes de Schopenhauer réalisés le 18 mai 1855
(Bildnisse, nos [76] et [77]).
9. Johannes Schäfer (né en 1822), peintre et photographe qui apparaît dans les livres d’adresses de Francfort de 1849 à
1893, sous diverses adresses (cf. Bildnisse, p. 146). Il réalisa des photographies de Schopenhauer en 1855, 1856, 1856 et 1859
(Bildnisse, nos [84], [85] et [88]-[90]).
10. Z. dans IM1. Recte : Eugène Seinguerlet (la Revue germanique, t. 7, 1859, p. 237 rectifia une note parue dans la Neue
Preussische Zeitung, affirmant que Seinguerlet était du Wurtemberg et s’appellait Zingerle) : cette note précisait qu’il était
français, habitait à Heidelberg depuis huit ans, et n’a pas changé l’orthographe de son nom. Les travaux de Seinguerlet traitent
surtout de questions politiques et économiques.
11. C. dans IM1. Moritz Cantor (1829-1920), célèbre historien des mathématiques.
12. Ernst Kossak publia dans la Montagspost de larges extraits des Parerga.
13. Voilà un brave gars !
14. Asher avait écrit à Schopenhauer qu’il avait réussi à créer une association éducative pour former les jeunes
commerçants de Leipzig.
Lettre 424
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 144-145.
2. Psaumes, 90, 10 : « Les jours de nos années s’élèvent à soixante-dix ans / Et, pour les plus robustes, à quatre-vingts. »
3. Hérodote, Hist., I, 32 ; III, 22.
4. Cf. P, II, chap. XV, § 174.
5. Il s’agit d’une version complétée et remaniée de l’article envoyé à Schopenhauer le 7 juin 1857 (cf. lettre no 413) : «
Ueber den Bildungswerth der Mathematik. Ein etwas verspäteter Einwand gegen das von Hrn Dr. Bahnsen vor 8 Monaten in d.
Bl. veröffentliche Urtheil Schopenhauers über diesen Gegenstand », in Schulzeitung für die Herzogenthümer Schleswig, Holstein
und Lauenburg, A. P. Sönksen, Kiel, 19 et 26 décembre 1857, no 12/13. Becker écrit : « Il faudra bien admettre que les
mathématiques méritent une place parmi les sciences du lycée, puisqu’elles favorisent la clarté des représentations et des
concepts et qu’elles aiguisent la réflexion. Oui, même si les mathématiques ne traitent que des formes phénoménales, je leur
attribue, précisément pour cette raison, une valeur essentielle pour la compréhension de leur essence, leur Idée ; car c’est
justement par la forme que s’exprime l’Idée. » À la fin, Becker se réfère également à Schopenhauer, tout comme son adversaire
(P, II, chap. XXI). Dans un deuxième article que Schopenhauer n’a pas pu voir, Becker poursuivra ses réflexions : « Ueber die
Begründung und systematische Entwicklung der geometrischen Wahrheiten » in Schulzeitung, 2 et 9 janvier 1858, no 14/15.
6. Dans sa lettre du 21 février 1858 (D XV, no 677), Becker avait écrit à Schopenhauer que le curé Grimm avait été malade
de la poitrine pendant une certaine période, mais qu’à présent il était convalescent.
7. Dans sa lettre du 21 février 1858, Becker avait cité ce qui suit : « Ici-bas, tout ce qui se rapporte généralement aux autres
et à des instituts aménagés de façon artificielle ne bénéficie vraiment à l’homme que dans la mesure où cela pénètre l’individu.
Toute élévation par la culture, toute amélioration des choses et des institutions sur terre, tous les perfectionnements des États et
du monde entier, perdurent seulement dans l’Idée, dans la mesure où tout cela ne s’exprime pas dans l’homme singulier, et c’est
pourquoi dans tout, même dans les plus grands événements du monde, je ne prélève que l’individu, sa capacité de penser, de
sentir et d’agir. La généralité a pour seul effet qu’elle agit en même temps sur un si grand nombre ou qu’elle est suscitée par
l’action d’un grand nombre — et la grandeur de l’événement a pour seul effet qu’elle met en mouvement des forces
extraordinaires et inhabituelles ou qu’elle s’en trouve agie » (Wilhelm von Humboldt, Briefe an eine Freundin, section I, lettre
60).
Lettre 425
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Grisebach, Edita und Inedita, p. 209.
2. Bähr séjourna à Francfort du 1er au 21 mai et il eut souvent l’occasion de rencontrer Schopenhauer. Cf. Gespräche, p.
240-269 (Entretiens, p. 119-126).
3. La recension par Seydel du livre d’A. Rosmini-Serbati, Il rinuovamento della filosofia in Italia, in Zeitschrift für
Philosophie und philosophische Kritik, t. 33, p. 263-274.
Lettre 426
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Schemann, p. 386-387.
Karl Debrois van Bruyck (1828-1902), compositeur et écrivain, connaissant Hebbel, en contact épistolier avec Hamerling
et Heyse, décéda après une vie tourmentée à Waidhofen. Il avait joint à sa lettre d’hommages du 13 février le manuscrit d’une
description de sa vie.
Lettre 427
1. M Prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 Baron Karl du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 14 janvier 1873, no 373
(imprécis).
2. Aux huit lettres citées dans la lettre n o 423 était venue s’ajouter, outre la dernière lettre du comte de Knyphausen du 7
mars (D XV, no 684), un court billet de Caroline Medon du 3 mars 1858 (IM1 Charlotte von Wedel, Jahrb. no 30 [1943], p. 207
sq.).
3. En septembre 1857, Doss avait été promu assistant juridique au tribunal de son arrondissement.
4. Carl Friedrich Köppen, Die Religion des Buddha und ihre Entstehung (« La religion du Bouddha et sa genèse »), t. 1,
Berlin, 1857 (HN V, no [1139]). Le deuxième tome parut en 1859.
5. Il s’agit d’une description de la vie du Bouddha Shakyamuni par Palladii Kafarov, archimandrite de la mission
spirituelle à Pékin, in Archiv für wissenschaftliche Kunde von Russland, t. XV, fasc. 1, Berlin, 1856 (cf. la note de Schopenhauer
dans N, « Sinologie »).
6. Lettres de Armand-Jean Le Bouthillier de Rancé abbé et réformateur de la trappe, recueillies et publiées par B. Gonod,
Paris, 1846 (HN V, [723]).
7. Deutsche Mystiker des 14. Jahrhunderts (« Mystiques allemands du XIVe siècle »), éd. par Franz Pfeiffer, t. 2 : Meister
Eckhart, Leipzig, 1857 (HN V, no [656]).
8. En mai 1850 déjà, lors de sa visite à Francfort, Becker avait attiré l’attention de Schopenhauer sur Giacomo Leopardi ;
plus récemment, il avait recommandé dans sa lettre les operette morali et les pensieri dans l’édition complète : Opere. Edizione
accresciuta, ordinata e correta secondo l’ultimo intendimento dell’autore, da Antonio Ranieri, vol. I et II, Florence, 1856 (HN V,
no [1780]). Cf. Francesco De Sanctis, Studio su Giacomo Leopardi, Naples, 1885 ; Karl Vossler, Leopardi, 1922, 2e éd., 1930 ;
sur Schopenhauer et Leopardi : Francesco De Sanctis, « Schopenhauer e Leopardi », in Rivista contemporanea, 1858 (repris avec
une traduction en allemand dans Jahrb. no 14 [1927], p. 129-215) ; Benedetto Croce, De Sanctis e Schopenhauer, 1902 (in Saggio
sullo Hegel, seguito da altri scritti, Bari, 1927) ; Giuseppe De Lorenzo, Leopardi e Schopenhauer, Naples, 1923 ; Hans Zint, «
Giacomo Leopardi als Philosoph », in Jahrb. no 28 (1941), p. 196-243.
9. Frédéric Morin (1823-1874), chargé de cours dans diverses universités françaises, mis à la retraite après le coup d’État
de 1852, défenseur d’une philosophie religieuse qui tente la synthèse d’idées chrétiennes et démocratiques. Son voyage en
Allemagne de 1858 était destiné à une prise de contact avec les principaux représentants de la littérature et de la philosophie
allemandes. Il a raconté sa rencontre avec Schopenhauer dans « Une visite à Schopenhauer », Revue de Paris, Sec. période, tome
VII, 24e livraison, 1864. Cf. Gespräche, p. 323-339.
10. c……. dans IM1.
11. Le roi Maximilien II de Bavière aurait comparé la cascade avec la nécessité humaine de faire ses besoins.
Lettre 428
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Schemann, p. 392-393.
2. Le 1er avril 1858 (D XV, no 687), Becker avait envoyé ses deux articles de la Schulzeitung (que Schopenhauer
connaissait déjà) ; cf. lettre no 424.
3. Aux deux formes du principe de raison de l’être démontrées par Schopenhauer (principe de l’être selon la juxtaposition
et principe de l’être selon la succession), Becker voulait en ajouter une troisième, le principe de l’être selon la grandeur : «
Comme d’un côté tout ce qui est étendu dans l’espace est soumis aux lois de l’espace, de sorte qu’ici, selon une forme déterminée
du principe de raison, comme principe de l’être dans l’espace, un rapport spatial est le principe et la conséquence d’un autre,
comme d’autre part et de façon similaire ce qui apparaît dans le temps, selon la forme que prend ici le principe de raison, se
conditionne réciproquement, il y a également certains liens entre les choses, qui concernent uniquement leur rapport de grandeur
et qui apparaissent comme principe ou conséquence d’un autre simple rapport de grandeur. Par ex. la proposition “a est b fois
plus grand que c” exprime un simple rapport de grandeur. […] Mais ce rapport peut être le principe ou la conséquence d’un autre
rapport, par ex. de celui-ci : “b est c fois plus petit que a” ou “c est b fois plus petit que a” ».
4. cf. lettre no 411.
5. Chacun abonde en jugement propre.
6. Becker avait écrit que les physiciens commençaient à prendre en compte la théorie des couleurs de Schopenhauer,
quoique de façon encore superficielle. Il avait cité Edmund Külp, Lehrbuch der Experimental-Physik (« Manuel de physique
expérimentale »), 2e tome, 1re moitié, Darmstadt, 1857 et un exposé plus ancien de W. Eisenlohr, Lehrbuch der Physik zum
Gebrauch bei Vorlesungen und beim Unterrichte (« Manuel de physique à destination des conférences et des cours »), 4 e éd.,
Mannheim, 1844 ; Becker renvoya également à Gustav Theodor Fechner, J. A. F. Plateau et Michel Eugène Chevreul, ainsi qu’à
l’hypothèse de l’éther chez A. J. Fresnel.
7. Références exactes introuvables.
8. La conférence de Grävell portant sur la théorie des couleurs de Newton eut lieu le 25 mars 1858 à la Société
polytechnique de Berlin.
9. Références exactes introuvables.
10. Johannes Müller (14 juillet 1801 - 28 avril 1858), spécialiste d’anatomie comparée et de physiologie.
Lettre 429
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 34, p. 288-289.
2. L — dans IM1.
3. M. dans IM1.
4. ……. dans IM1.
5. Peut-être une allusion au baron Wilhelm von Engerth, l’inventeur de la locomotive de montagne System Engerth, dont le
portrait circulait à cette époque dans les journaux. Cf. Jahrb. no 55 (1974), p. 102 sq.
6. Rudolf Haym, Hegel und seine Zeit. Vorlesungen über Entstehung und Entwicklung, Wesen und Werth der Hegel’schen
Philosophie (« Hegel et son temps. Conférences sur la genèse et le développement, l’essence et la valeur de la philosophie
hégélienne »), Berlin, 1857.
7. Le passage est le suivant : « Ce n’est que maintenant que beaucoup entendent parler de la philosophie
schopenhauérienne […] les apôtres de ces systèmes [l’auteur avait également cité Baader et Krause] réussiront-ils à se faire
entendre dans d’autres sphères de la nation ? Y a-t-il une chance quelconque pour que l’un de ces systèmes atteigne la domination
exclusive sur la culture et le mode de pensée de l’époque ? La vérité c’est que — la preuve en est précisément cette montée, cette
poussée et pénétration de la dii minorum gentium — la vérité donc, c’est que l’empire de la philosophie se trouve dans un état
d’anarchie totale, dans un état de dissolution et de délabrement » (R. Haym, Hegel und seine Zeit, introduction, p. 4).
8. Beda Weber, Cartons aus dem deutschen Kirchenleben (« Cartons de la vie ecclésiastique allemande »), Mayence, 1858
(reprise de l’article de Weber paru dans le Frankfurter katholisches Kirchenblatt du 4 novembre 1854 ; cf. lettre no 348). Les
attaques contre Schopenhauer se trouvent p. 303-310. Weber écrit : « Schopenhauer n’est pas un hérétique, il n’attaque aucun
dogme de la foi chrétienne ; en tant que non-croyant, il a dépassé ces dogmes depuis bien longtemps, ils sont derrière lui. Si,
oubliant cela, il se targue d’être en accord avec le christianisme archaïque, alors ce dernier devrait être une Église pour crétins ;
nous ne saurions accepter cela. S’il est vraiment l’homme de l’avenir, comme il l’espère et le prophétise en toute modestie, s’il
doit réussir à donner le coup de grâce à toutes les religions, s’il peut imposer dans un monde dénué d’esprit la pauvreté spirituelle
la plus amère de sa théorie de la volonté comme seule vérité valable ; si tous les hommes raisonnables qui ne pensent pas comme
lui sont vraiment des “salauds, chasseurs de nourriture, hypocrites”, comme il l’affirme avec un reniement de soi véritable et très
moral : pour tout cela nous devons nous en remettre à la postérité, en suivant son exemple et sa résignation philosophique. »
9. c...... dans IM1.
10. c...... dans IM1.
11. Absent dans IM1.
12. Il s’agit d’une esquisse biographique signée J. qui se rattache à un article sur le livre de Bähr, in Prager Blätter für
Literatur und Kunst, no 8, 24 février 1858.
13. Z. dans IM1.
Lettre 430
1. M collection Kippenberg. IM1 Schemann, p. 397.
2. F. Grävell, « Charakteristik der Newton’schen Farbentheorie », conférence donnée à la Société polytechnique de Berlin,
25 mars 1858, Berlin, 1858 (HN V, no [856]) et un article de la Vossische Zeitung.
3. Éd. par Kekulé et Eisenlohr, 1858, cahier 2.
Lettre 431
1. M Bibliothèque nationale Preuss. Kulturbesitz, Berlin. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 35, p. 319-320.
2. Il s’agit de la traduction partielle donnée par Alexandre Weill, sous le titre « Base fondamentale de la morale », in Revue
française, 10 décembre 1857, t. IX, p. 257 sq. (réimpression de la préface dans le Jahrb. no 19 (1932), p. 272-274, et quelques
extraits dans Gespräche, p. 319 sq.).
3. Alexandre (Abraham) Weill (1811-1899), auteur prolifique d’écrits politiques, religieux, historiques et littéraires (cf. A.
Baillot, Jahrb. no 19 [1932], p. 277 sq.).
4. De sa propre plume.
5. Cf. Gespräche, p. 319 sq.
6. L’auteur de l’article est recensé dans le Biographisches Lexikon de Wurzbach (1888) : il s’agit de Tobias Wildauer
chevalier de Waldhausen.
7. La rédaction de la Deutsche Allgemeine Zeitung.
8. Le titre exact est Die Himmelstürmer oder die St. Georgsbrüder (« Les conquérants du ciel ou les frères Saint-Georges
»), Berlin, 1858. L’auteur (Schopenhauer l’avait noté sur la couverture intérieure des Senilia) était Ada von Treskow (1839-1918)
qui aura plus tard une activité très prolifique (sous le pseudonyme de Günther von Freiburg) dans le domaine du roman, de la
nouvelle, de la poésie épique et lyrique et du drame. Cf. Rudolf Bovensiepen, « Die Himmelstürmer, ein Schopenhauerdrama »,
in Jahrb. no 26 (1939), p. 390-406 (avec une description détaillée du contenu).
9. Dans P, II, « Quelques vers » (in fine).
10. Recte : Montags-Post. Cf. lettre 432 et les indications antérieures dans les lettres no 386 et 423.
11. Il s’agit du Francfortois Theodor Clemens, Farbenblindheit während der Schwangerschaft, nebst einigen zeitgemässen
Erörterungen über Farbenblindheit und deren Ursache im Allgemeinen. Eine physikalisch-physiologische Skizze (« Le
daltonisme pendant la grossesse, avec quelques discussions actuelles sur le daltonisme et sa cause en général. Une esquisse
physico-physiologique »), in Archiv für physiologische Heilkunde, éd. par C. A. Wunderlich, nouvelle série, t. 2, 1858, p. 41 sq.
12. Malheur aux vaincus ! (cf. lettre no 322).
13. Ernst von Lasaulx, Die prophetische Kraft der menschlichen Seele in Dichtern und Denkern (« La force prophétique de
l’âme chez les poètes et les penseurs »), Munich, 1858 (HN V, no [679]).
14. Johann Nepomuk Bachmayr (1819-1864), fonctionnaire municipal (1842-1844), écrivain indépendant, employé au
barreau pendant treize ans ; il finira par se suicider. Cf. Gespräche, p. 339 sq.
15. Dr. Carl Sederholm (1789-1867), prédicateur de la colonie allemande à Iekaterinoslav, plus tard dans d’autres villes du
sud de la Russie, enfin à Moscou. C’est une note des Senilia (HN IV 2, 30) qui a permis d’identifier Sederholm. cf. lettre no 418.
Cf. aussi Erich Fureg, « Schopenhauer und Schweden », in Jahrb. no 28 (1941), p. 270-272.
16. M. dans IM1.
17. Adolph Cornill, Materialismus und Idealismus in ihren gegenwärtigen Entwickelungskrisen beleuchtet (« Le
matérialisme et l’idéalisme éclairés par les actuelles crises de leur développement »), Heidelberg, 1858.
Lettre 432
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 35, p. 320-322.
2. La rédaction des Blätter für literarische Unterhaltung avait envoyé l’écrit à Asher afin qu’il en rédige un compte-rendu.
Asher avait alors écrit à Schopenhauer qu’il hésitait à se charger de cette tâche et qu’il ne s’estimait ni autorisé ni enclin à
s’exprimer sur ce livre dans le même ton que Schopenhauer, à cela s’ajoutant le fait que le livre serait bien écrit et élaboré.
3. « en découvrant ses intentions… également envers Kant » : absent dans IM1.
4. Shakespeare, Hamlet, II, 4, 54.
5. b...... dans IM1.
6. Robert Zimmermann, Aesthetik. 1. historisch-kritischer Theil : Geschichte der Aesthetik als philosophische Wissenschaft
(« Esthétique. 1. partie historico-critique : histoire de l’esthétique comme science philosophique »), Vienne, 1858.
7. Cette fausse conjecture d’Asher reposait notamment sur le fait que l’auteur de cet article, comme Seydel, tendait à
souligner davantage le côté littéraire que le côté philosophique de Schopenhauer. cf. lettre no 431.
8. Johann Nepomuk Bachmayr ; cf. lettre no 431.
9. Z. dans IM1.
10. Pierre-Joseph Proudhon, De la justice dans la Révolution et dans l’Église, 3 tomes, Paris, 1858.
11. cf. lettre no 431.
Lettre 433
1. IM1 Schemann, p. 395-396.
2. Dans une lettre à Johann Karl Becker du 20 mai 1858, Julius Bahnsen avait élaboré le projet d’une revue entièrement
consacrée à la philosophie de Schopenhauer. Le 30 juin, Becker avait envoyé cette lettre à Schopenhauer.
3. Allusion aux articles parus dans les Prager Blätter für Literatur und Kunst, 24 février 1858, et dans la Wiener Zeitung, 8
mai 1858.
4. Jour de colère (cf. lettre no 224).
5. cf. lettre no 428.
6. cf. lettre no 431.
7. Johannes Müller décéda le 28 avril 1858 à Berlin.
Lettre 434
1. M Archives d’État Hambourg. IM1 Hübscher, « Ein unbekannter Brief Schopenhauers », in Dantziger Neueste
Nachrichten, 20 mars 1933, no 67 (et Deutsche Allgemeine Zeitung, 26 mars 1933).
Le 11 juillet 1858, Grävell avait demandé à Schopenhauer s’il pouvait utiliser ses commentaires sur Seebeck, entendus lors
de sa visite à Francfort, ainsi que son désaveu de la théorie des couleurs de Goethe (cf. Gespräche, p. 309 sq.).
2. En chair et en sang (cf. lettre no 282).
Lettre 435
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. Facs. A. Hübscher, Arthur Schopenhauer. Ein Lebensbild, 2e sect., Wiesbaden,
1949, avant la p. 49. IM1 Gebhardt, p. 161-164 (en entier pour la première fois).
Lettre 436
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 35, p. 322-324.
2. Dans l’article « Lewes und Schopenhauer über den Charakter » paru dans les Blätter für literarische Unterhaltung, no
32, Asher avait écrit : « Il se pourrait que M. le Dr. Haym soit fâché que j’appelle un grand philosophe quelqu’un qu’il ne compte
que parmi les diis minorum gentium. »
3. Mettez le fripon à terre.
4. Julius Rupp, Von der Freiheit. Ein Zeugniss für das Evangelium, vom Standpunkte des Protestantischen
Dissidententhums (« De la liberté. Un témoignage pour les Évangiles, du point de vue de la dissidence protestante »), conférences
prononcées devant la Communauté des dissidents à Königsberg, 2 parties, Königsberg, 1856.
5. En outre.
6. P, II, chap. XV, § 179.
7. Le titre exact de l’ouvrage de Ludwig Müller est Das Duell im Lichte christlich-germanischer Bildung, eine Schmach
des 19. Jahrhunderts. Ein Beitrag zur Sittengeschichte unserer Zeit mit Belegen aus den Schriften älterer und neuerer Gegner
des Zweikampfs (« Le duel à la lumière de la culture germano-chrétienne, une infamie du XIXe siècle. Une contribution à l’histoire
des mœurs de notre époque avec des preuves tirées des écrits d’adversaires anciens et modernes du duel »), Breslau, 1858.
8. Il s’agit du premier lieutenant Schultz, membre du corps d’ingénieurs royal de Prusse, officier de direction et enseignant
à l’école unifiée de l’artillerie et des ingénieurs, qui était déjà entré en contact avec Schopenhauer en 1855 par l’intermédiaire de
Frauenstädt (cf. lettre no 354). Le 8 août 1858, Schultz avait envoyé à Schopenhauer son manuscrit sur le beau et le sublime,
accompagné d’une lettre (M Archives Schopenhauer, IM1 Hübscher, Jahrb. no 24 [1937], p. 129-131).
9. En chair et en sang (cf. lettre no 282).
10. Le titre exact de l’ouvrage de Richard Clemens est Das Buch der Christen. Oder das Neue Testament, nach den
Resultaten der neuesten wissenschaftlich-kritischen Forschungen, insbesondere der Tübinger Theologischen Schule, betrachtet.
Für gebildete Leser aller Stände (« Le livre des chrétiens. Ou le Nouveau Testament considéré d’après les résultats des
recherches scientifico-critiques les plus récentes, en particulier celles de l’École théologique de Tübingen. Pour des lecteurs
cultivés de tous les métiers »), Bernburg, 1852.
11. Le Dr. Heinze, qui était alors rédacteur de l’Illustrierte Zeitung, avait failli à sa promesse de publier le portrait de
Schopenhauer le jour de son anniversaire ; la publication fut repoussée de semaine en semaine.
Lettre 437
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 164-165.
2. Le 18 septembre 1858, Brockhaus répondit qu’il donnerait son accord pour une édition complète, à condition que cette
dernière ne s’oppose pas aux droits des autres éditeurs de Schopenhauer.
Lettre 438
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 169-173.
Lettre 439
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 154-155.
Dans sa lettre à Becker du 8 mars 1854 (lettre no 320) Schopenhauer avait laissé entendre que Kant aurait emprunté à
Maupertuis ou à un autre la pensée fondamentale de l’idéalité de l’espace. Le 1 er septembre 1858, Becker avait cité un passage
des Premiers Principes métaphysiques de la science de la nature (1re éd. 1785, p. 50) où Kant reconduit la doctrine de l’idéalité
de l’espace à un prédécesseur dont le nom n’est pas précisé : « Un grand homme qui, peut-être plus qu’aucun autre, contribue à
conserver la réputation des mathématiques en Allemagne, a plusieurs fois refusé les présomptions métaphysiques de renverser les
principes géométriques de la divisibilité infinie de l’espace, en rappelant que l’espace ne correspond qu’au phénomène des
choses extérieures ; mais il n’a pas été compris. » Becker demandait donc de qui il pouvait bien s’agir. Maupertuis était décédé
en 1759 et Euler en 1783. Gwinner (2e éd., p. 560) et Grisebach (Briefe, p. 462) pensaient que la remarque de Kant faisait allusion
à Leibniz ; or Kant aurait difficilement pu parler de Leibniz au présent. G. F. Wagner est alors revenu à l’hypothèse selon laquelle
il s’agit de Maupertuis (Jahrb. no 1 [1912], p. 62-86). Selon cette hypothèse, Kant a dû rédiger ce passage des Premiers Principes
métaphysiques lorsque Maupertuis vivait encore, c’est-à-dire avant 1759. La réponse de Schopenhauer laisse la question ouverte.
2. Schopenhauer reprendra cette proposition dans la troisième édition de son ouvrage principal (M, II, chap. IV).
3. Du nouveau en Afrique. Allusion à la question posée par Becker dans sa dernière lettre : « nil novi in Africa ? » (recte :
« quid novi ex Africa », Aristote, Hist. an., VIII, 28).
4. Chose importante et grave.
Lettre 440
1. IM1 Grisebach, Briefe p. 402-403 (imprécis).
2. Le 25 septembre 1858, Lindner avait envoyé à Schopenhauer le roman en deux tomes Sturm und Compass (Tempête et
boussole), Berlin, 1859. L’auteur du livre, publié anonymement, était en fait la femme de Lindner, l’apport de Lindner lui-même
s’étant limité, exception faite du passage philosophique dans la 4e partie, à la rédaction stylistique.
3. Cf. Goethe, « Sprichwörtlich », no 16.
4. Article paru dans le Journal des Débats, 8 octobre.
5. Schopenhauer l’avait appris d’Asher, cf. lettre no 441. La recension « Zur Kritik der Schopenhauerschen Philosophie »
parut dans les Blätter für literarische Unterhaltung, no 17, 21 avril 1859.
Lettre 441
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 35, p. 324-325.
2. David Asher, Über die Kunst zu lesen, oder Was und Wie soll man lesen. Ein Vortrag. Zugleich als Beitrag zur
Hodegetik (« Sur l’art de lire, ou ce qu’il faut lire et comment. Une conférence. Également une contribution à la méthodologie »),
Leipzig, 1858.
3. Écrire rend son homme précis.
4. Asher avait recommandé d’étudier soigneusement l’histoire de la littérature, en citant J. Schmidt à côté de Schlegel et
Gervinus ; le manuel d’histoire de la littérature de Schmidt lui paraissait assez complet sur l’époque moderne. Pour le passage
auquel se réfère Schopenhauer, cf. lettre no 378.
5. c...... dans IM1.
6. Alfred Meissner, Die Sansara, tome 1-4, Leipzig, 1858.
7. cf. lettre no 436.
8. « “Se marier ou non, voilà la question”. Question ?!! Je vais vous donner une solide maxime forgée par moi-même,
même si elle est en anglais : “mariage = guerre & manque. / Célibat = paix & plénitude.” Souvenez-vous-en. Ceci, en passant, est
une allitération ; les Allemands l’appellent un Stabreim. Mais en quoi cela nous concerne-t-il ? / Mais si vous pouvez avoir une
fille avec au moins 30 000 Rth — faites-le ».
Lettre 442
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Schemann, p. 398.
Albert Möser (1835-1900), études à Göttingen (1857-1861), enseignant à Dresde, Bielefeld, Berlin, poète lyrique et
traducteur, ami de Hamerling. Le 18 novembre 1858 il avait adressé une lettre d’hommages à Schopenhauer (D XV, no 712).
Lettre 443
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Frankfurter Zeitung, octobre 1904.
De la main de l’expéditeur, la note marginale suivante : « le 10 jan. 1859 remis la rente viagère de Rth. 150 en billets de
banque contre le billet postal ci-joint. D. Friedrichsen ». M.
2. Le supplément de la Leipziger Illustrierte Zeitung du 4 décembre 1858, n o 805 contenait la biographie de Schopenhauer
(par Frauenstädt) et le portrait tant attendu de Mylius.
Lettre 444
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 35, p. 325-328.
2. Asher avait écrit sa dernière lettre à Schopenhauer en anglais.
3. « Vous écrivez l’anglais étonnamment bien, vraiment, et cela me réjouit, dans votre intérêt, puisque c’est votre affaire, et
dans mon intérêt, parce que je vois en vous le futur traducteur rare et incomparable de mes œuvres, c’est pour cela que vous êtes
venu au monde. Croyez-moi, c’est ainsi. Mais n’en croyez pas pour autant que j’aille continuer à écrire en anglais. Aucunement :
vous pouvez le faire, si tel est votre choix. Mais dans mon cas, cela serait seulement de l’affectation, voire du travail et enfin une
corvée. »
4. Le passage cité par Schopenhauer se trouvait dans un article intitulé « Ueber die neuere deutsche Philosophie » et publié
dans les Stimmen der Zeit (éd. par Kolatschek, Gotha, 1858, no 1).
5. cf. lettre no 443.
6. La rédaction avait proposé à Asher d’écrire la biographie, ce dernier avait décliné et proposé Frauenstädt, le présentant
comme un ami plus ancien de Schopenhauer.
7. Article de Ludwig Büchner intitulé « Aus und über Schopenhauer » et publié dans les Anregungen für Kunst, Leben und
Wissenschaft, éd. par Brendel, 1859, no 1-3), repris dans Büchner, Aus Natur und Wissenschaft (« De la nature et de la science »),
Leipzig, 1869, p. 94-143.
8. Dans P, II, § 389.
9. Schopenhauer avait proposé à Asher de faire un article sur les trois romans Die Himmelstürmer, Sturm und Compass et
Sansara, ce qu’Asher ne fera pas.
10. D’un très bas niveau.
11. Asher avait écrit que Sengler avait consacré quelques pages (p. 12 de l’introduction et p. 94-143) à Schopenhauer dans
sa Erkenntnislehre (« Théorie de la connaissance »), tome 1, Heidelberg, 1858.
12. Il s’agit de quatre articles de Lindner, « G. Leopardi. Leopardis Operette morali », « Ähnlichkeit seiner
Weltanschauung mit der Schopenhauers », « Als Proben : Gespräch zwischen einem Kalenderverkäufer und einem
Vorübergehenden », parus dans la Vossische Zeitung, 12 décembre, 1858, no 291 ; « G. Leopardi II : Als Dokument für Leopardis
Weltanschauung : Gespräch zwischen Malambruno und Farfarello und Gesang des Wilden Hahns », ibid., 19 décembre 1858, no
297 ; « G. Leopardi III : Leopardis Auffassung von der geringfügigen Stellung des Menschen im Weltall », « Als Beleg :
Kopernikus. Gespräch, drei Szenen », ibid., 25 décembre 1858, no 302 ; G. Leopardi IV : Kopernikus, 4. Scene, Nachwort :
Leopardi und Schopenhauer », ibid., 1er janvier 1859, no 1.
Lettre 445
1. IM1 Grisebach, Briefe, p. 403-404.
2. Il s’agit des articles de Lindner sur Leopardi parus dans la Vossische Zeitung, cf. lettre no 444.
3. Le projet d’une traduction intégrale de Leopardi n’aboutira pas.
4. Eduard Heinrich von Flottwell (1786-1865), ministre prussien de l’Intérieur (1858-1859).
Lettre 446
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 35, p. 328-329.
2. Asher avait demandé s’il pouvait dédier son livre sur Faust à Schopenhauer, et si ce dernier voulait écrire une préface.
Lettre 447
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 173-175.
Le 21 janvier 1859, Brockhaus répondit que l’édition complète ne pourrait se faire qu’après des négociations avec les
autres éditeurs. Concernant la 3e édition de l’ouvrage principal, Brockhaus proposait de payer, conformément au souhait de
Schopenhauer, 3 F d’or par feuille d’impression, avec un tirage à 2 250 exemplaires. Brockhaus écrivit qu’il aurait certes préféré
un tirage de 1 500 exemplaires et des honoraires de 2 F d’or par feuille ; si Schopenhauer devait en rester aux 2 250 exemplaires,
il demanderait alors l’autorisation de n’imprimer qu’après la vente des premiers 1 125 ou 1 150 exemplaires les 1 125 ou 1 000
exemplaires restants, et ce éventuellement en 4e édition.
Lettre 448
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 179-181.
2. Oskar Wächter, Das Verlagsrecht mit Einschluss der Lehren von dem Verlagsvertrag und Nachdruck nach den
geltenden deutschen und internationalen Rechten mit besonderer Berücksichtigung auf die Gesetzgebung von Österreich,
Preussen, Bayern und Sachsen systematisch dargestellt (« Le droit éditorial, incluant les doctrines du contrat d’édition et de la
réimpression selon les droits allemands et internationaux en vigueur, avec une prise en considération particulière des législations
de l’Autriche, Prusse, Bavière et Saxe, présenté de façon systématique »), Stuttgart, 1858.
3. Suite à cette lettre, Brockhaus restreindra sa demande initiale en exigeant uniquement l’autorisation d’imprimer la 3 e
édition en deux parties sans considérer la 2 e partie comme une 4e édition ; il signifia également son intention d’annoncer
l’ouvrage.
Lettre 449
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 184-186.
2. Heinrich Brockhaus (1804-1874), propriétaire de la maison d’édition avec son frère Friedrich depuis 1830, atteint de
péricardite depuis janvier 1857, allant de cure en cure durant un an et demi. Pendant ce temps il fut remplacé par son fils Eduard
Brockhaus.
3. À bon vin point d’enseigne.
4. Il s’agissait du journaliste C. Claudius. Sa lettre du 24 janvier 1859, encore inédite, est en possession des Archives
Schopenhauer.
Lettre 450
1. IM1 Schemann, p. 400. Selon Schemann, le […] à la fin du premier paragraphe contient un « exposé sur les portraits de
Lunteschütz et de Göbel et leurs reproductions ».
Le 4 février 1859, Heinrich Gustav Brecht avait adressé à Schopenhauer une lettre d’hommages, en lui demandant de lui
envoyer un portrait. Schopenhauer lui envoya effectivement un portrait : cf. Bildnisse, no [88]. Brecht, avocat au tribunal depuis
1858, fut maire de Quedlinburg de 1859 à 1895. Cf. Mitteldeutsche Lebensbilder, t. 1, Magdebourg, 1926, p. 308-322.
Lettre 451
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 186-189.
Le 9 février, Brockhaus envoya deux exemplaires de ce contrat à Schopenhauer.
Lettre 452
1. M longtemps perdu, acquis en 1859 lors d’une vente aux enchères de F. A. Brockhaus. C (copie) Archives éditoriales
Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 189-190.
Lettre 453
1. IM1 Grisebach, Briefe, p. 405.
2. Le 12 février 1859, Lindner avait renvoyé Schopenhauer au dialogue de Francesco De Sanctis, « Schopenhauer e
Leopardi », Rivista contemporanea, 1858, p. 369-408, repris avec une traduction allemande dans le Jahrb. no 14 (1927), p. 129-
215 ; cf. également la préface du Jahrb. no 14, le Jahrb. no 15 (1928), p. 330 sq., et Susanne Zint, « Schopenhauer und De Sanctis
», Jahrb. no 17 (1930), p. 319 sq. Francesco De Sanctis (1818-1883), secrétaire général de l’enseignement public à Naples (1848),
arrêté en 1850 et incarcéré pendant trois ans, ensuite exilé à Malte, plus tard à Turin, professeur d’esthétique et de littérature
italienne au Polytechnikum de Zurich (1856), en contact avec le cercle d’émigrants autour de Herwegh et Wagner. Suite à la lettre
de Schopenhauer, Lindner envoya le cahier à Francfort.
3. « Du style et des écrivains », Revue germanique, 1859, janvier, t. V, p. 75 sq.
Lettre 454
1. IM1 Gruber, 1913, p. 71-72 (imprécis).
2. En chair et en sang (cf. lettre no 282).
3. Schopenhauer se trompe : malgré leur accord en quelques points précis, De Sanctis est un adversaire de la doctrine de
Schopenhauer et il entend se servir de la forme dialogique et de ses sarcasmes pour mener la doctrine ad absurdum. La
démonstration du contraire proposée par Riedinger, Jahrb. no 15 (1928), p. 330-332, n’est guère convaincante.
4. Un ricanement sarcastique.
5. Réfugié politique. Cette hypothèse de Schopenhauer sera confirmée plus tard par le Dr. Wille ; cf. lettre à Asher, 9 mars
1859 (lettre no 462).
6. Tracasseries.
7. Ce n’est pas la police piémontaise, mais la police napolitaine qui avait interdit le port de la barbe comme signe distinctif
du libéralisme ; cf. Raffaele De Cesare, La fine di un Regno, 1900, vol. I, p. 22, 25, 29.
8. Joie.
9. Bildnisse, no [45].
10. Bildnisse, no [46].
11. Bildnisse, no [84].
12. Otto von Böhtlingk (1815-1904), indologue, professeur à Iéna (1868) et à Leipzig (1885), auteur d’un dictionnaire du
sanskrit (Sanskrit-Wörterbuch), 7 tomes, Pétersbourg, 1853-1875. Schopenhaur a probablement confondu le nom avec celui de
Böcking (cf. lettre no 208).
13. Seules les références de sept lettres ont pu être confirmées : Brecht (D XV, no 728), Schütz (D XV, no 732), von Doss
(D XV, no 733), Dr. Wille (joint à la lettre de von Doss), Bahnsen (D XV, no 734), Bähr (D XV, no 735) et Caroline Medon (20
février 1859, Jahrb. no 30 [1943], p. 211 sq.).
14. Rédigé par Albert Möser (D XV, no 736).
15. Ces cadeaux accompagnaient la lettre de Caroline Medon.
16. 1. Der Wolkenbote (« Le nuage messager ») de Kālidāsa, traduit et commenté par C. Schütz, Bielefeld, 1859 (HN V, no
[1136]) et 2. David Asher, Arthur Schopenhauer als Interpret des Göthe’schen Faust. Ein Erläuterungsversuch des ersten Theils
dieser Tragödie (« Arthur Schopenhauer comme interprète du Faust goethéen. Une tentative d’explicitation de la première partie
de cette tragédie »), Leipzig, 1859 (HN V, no [32]).
Lettre 455
1. M Archives Schopenhauer. Facs. Jahrb. no 12 (1923-25), après la p. 298. IM1 Grisebach, Edita et Inedita, p. 212-213.
2. Dans sa lettre à Lindner du 23 février (lettre no 454), Schopenhauer avait seulement évoqué « 2 livres ». Les deux autres
(dont les références manquent) ont donc dû arriver dans la soirée du 22 février.
3. cf. lettre no 453.
4. Traduction française de l’écrit couronné Sur la liberté de la volonté humaine commencée par Carl Bähr, en collaboration
avec le professeur A. Maillard (alias Auguste Fevre), enseignant à l’Institut des cadets de Leipzig. Schopenhauer avait pris
connaissance de ce projet lors d’une visite de Maillard en 1859 et l’avait approuvé. Comme Maillard montrait peu
d’enthousiasme à l’exécution, Bähr s’était tourné vers Lunteschütz. Lunteschütz devait se charger des p. 27 à 49 (section III) de
la première édition. Après le désistement de Lunteschütz, Bähr et Maillard s’occupèrent tous deux de la traduction qui, fin juin,
était « en grande partie prête pour l’impression », Maillard ayant déjà envoyé la première partie à la Revue germanique (lettre de
Bähr du 30 juin 1859) ; mais le 28 novembre 1859, la traduction n’était toujours pas prête (d’après les propos de Bähr) et le 21
février 1860, Bähr signala à Schopenhauer qu’ils attendaient le retour du manuscrit. Plus tard, un libraire parisien égarera le
manuscrit.
5. Bildnisse, nos [9] et [10].
6. Par l’entremise de Weisse, en 1858, la Faculté de Philosophie de Leipzig avait décerné après coup à C. G. Bähr le titre
de docteur inter absentes pour son écrit sur Schopenhauer. Schopenhauer ne le savait pas ; autrement il se serait peut-être montré
plus clément.
7. Porte-toi bien et continue de nous aimer !
Lettre 456
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Schemann, p. 339-340.
2. Cf. note 16 de la lettre no 454.
3. Horace Hayman Wilson (1786-1860), sanskritiste, au service de la Compagnie de l’Inde de l’Est à Calcutta à partir de
1808, plus tard à Bénarès, professeur à Oxford à partir de 1832. Sa traduction anglaise versifiée du Meghadūta (« Le nuage
messager ») de Kālidāsa, d’abord parue à Calcutta en 1813, fut reprise dans l’édition de Schütz (cf. note 16 de la lettre no 454).
Lettre 457
1. M Prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 baron Karl du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 21 janvier 1873, no 380.
2. Cf. l’ajout sur Leopardi dans la 3e édition de l’ouvrage principal, M, II, chap. 46.
3. Schopenhauer se trompe : la série sur Leopardi débuta le 12 décembre. Il répétera cette erreur dans sa lettre à Asher en
date du 9 mars 1859 (lettre no 462) ; cf. en revanche les indications exactes dans les lettres no 444 et no 455. Le 28 novembre, le
supplément de la Vossische Zeitung avait publié une recension de Sturm und Compass, d’où peut-être la confusion.
4. En chair et en sang (cf. lettre no 282).
5. Dans une note de son écrit Arthur Schopenhauer als Interpret des Göthe’schen Faust (cf. note 16 de la lettre no 454), p.
11, Asher cite le passage suivant de Madame de Staël : « L’homme parvient par la chimie, comme par le raisonnement, au plus
haut degré de l’analyse, mais la vie lui échappe par la chimie, comme le sentiment par la raison. […] Quoi qu’il en soit, la
volonté qui est la vie, la vie qui est aussi la volonté, renferment tout le secret de l’univers et de nous-mêmes, et ce secret-là,
comme on ne peut ni le nier, ni l’expliquer, il faut y arriver nécessairement par une espèce de divination » ( De l’Allemagne, 2e
éd., Paris, 1814, III, p. 150 sq.).
6. P, I, « Fragments de l’histoire de la philosophie », § 14.
7. Blätter für literarische Unterhaltung, 1856, no 28 et 29 ; cf. lettre no 401.
8. cf. lettre no 441.
9. Dr. Franz (François) Arnold Wille (1811-1896), journaliste suisse et « compagnon principal de Herwegh » chez qui il fit
la connaissance de Richard Wagner, au début des années 1850. Il fut l’époux de la romancière Eliza Wille, et fit sa première
visite à Schopenhauer en 1855. Au printemps 1859, à Munich, il entra en contact avec von Doss par l’intermédiaire duquel il fit
parvenir à Schopenhauer une lettre de vœux pour son 71e anniversaire, d’où, dans la présente lettre, les remerciements que von
Doss avait la charge de transmettre. Cf. également lettre no 454 et Gespräche, p. 199-201.
10. J. B. von Schweitzer, Alcibiades oder Bilder aus Hellas (« Alcibiade ou images de la Grèce »), Francfort-sur-le-Main,
1858 (HN V, no [1570]) et Karl I., Drama, Francfort-sur-le-Main, 1858 (HN V, no [1571]). Johann Baptist Schweitzer (12 juillet
1833 - 28 juillet 1875), après la mort de Lassalle président du Allgemeiner Deutscher Arbeiterverein et éditeur du
Sozialdemokrat, compagnon de table occasionnel de Schopenhauer à l’Hôtel d’Angleterre depuis 1858. Les deux tragédies qui
sont citées ici à côté des quatre autres livres reçus en cadeau le 22 février (cf. aussi la lettre à Bähr du 26 février 1859, lettre n o
455) sont également citées séparément dans la lettre à Asher du 9 mars (lettre no 462).
Lettre 458
1. IM1 Schemann, p. 358.
2. Bahnsen avait obtenu un poste au Lycée d’Anclam.
Lettre 459
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Jahrb. no 18 (1931), p. 358.
Le billet témoigne d’un différend entre Schopenhauer et le maître de maison, ayant apparemment débouché sur la
résiliation du contrat de son appartement Schöne Aussicht 17 (cf. lettre no 460). Georg Kayser (livre d’adresses 1859 : Schöne
Aussicht 18) négocia avec Schopenhauer, en son nom et au nom de ses deux sœurs qui, après la mort de la mère, avaient repris le
contrat de location. Cf. Hübscher, « Schopenhauer als Mieter », Jahrb. no 32 (1945-1948), p. 151-157.
Lettre 460
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 D XV, no 743.
Le 1er juillet 1859, Schopenhauer quitta l’appartement qu’il avait occupé pendant seize ans et emménagea dans la maison
d’à côté (Schöne Aussicht 16).
Lettre 461
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 191-192.
Suite à cette lettre, Brockhaus fit savoir à Schopenhauer qu’il avait fait le nécessaire pour que l’imprimerie respecte
l’ancienne disposition typographique.
Lettre 462
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 35, p. 329-330 ; impression intégrale Grisebach, Briefe, p. 437-439.
2. cf. lettre no 454.
3. cf. lettre no 457.
4. Ibid.
5. On peut lire p. 58 : « Un repentir moral trouve ses seules conditions dans le fait que si l’action, le penchant vers cette
dernière, n’accorde pas d’espace de liberté à l’intellect… », au lieu de : « Un repentir moral trouve ses seules conditions dans le
fait qu’avant l’action, le penchant de l’intellect vers cette dernière ne lui accorde pas d’espace de liberté… » Les autres coquilles
dans les citations de Schopenhauer sont de moindre importance.
6. À la page 19, on peut lire « plus sage » (weiser) au lieu de « plus doux » (weicher).
7. Les livres ont leur propre destin ; cf. Terentianus, De litteris, syllabis et metris, v. 258.
8. En chair et en sang (cf. lettre no 282).
9. Joseph Baer tenait sa librairie à Francfort-sur-le-Main, Rossmarkt, dans laquelle sera vendue aux enchères (1869 et
1871) une grande partie de la bibliothèque de Schopenhauer.
10. C’est l’explorateur Franz Wilhelm Junghun (1809-1864) qui passa cette commande. De 1855 à 1864, il entreprit de
nombreuses expéditions à Java et Sumatra (Schopenhauer l’évoque dans un ajout dans M, II, chap. 28).
Lettre 463
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Deutsches Stammbuch, éd. Adolph Gumprecht, 1860 (facs.).
2. Ou croire, ou philosopher, ou passer sa vie à la manière des bêtes, qui obéissent au ventre — dans tous les cas mourir.
Lettre 464
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 35, p. 330-331.
2. Asher avait vivement regretté que son ouvrage n’ait pas rencontré la pleine approbation de Schopenhauer, et avait
expliqué que les coquilles étaient dues à la hâte avec laquelle s’était déroulée l’impression, commencée en janvier pour être
terminée à l’anniversaire de Schopenhauer (cf. lettre no 462).
3. cf. lettre no 401.
4. Programme de la Leipziger Handelslehranstalt pour Pâques 1859 contenant un traité d’Asher intitulé On the Study of
Modern Languages in General, and of the English Language in Particular.
5. Recte : janvier, cf. lettre no 453.
Lettre 465
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Grisebach, Edita und Inedita, p. 214-216.
2. Recension de l’écrit de Seydel par Bähr intitulée « Zur Kritik der Schopenhauer’schen Philosophie » et publiée dans les
Blätter für literarische Unterhaltung, no 17, 21 avril 1859 (repris dans Bähr, p. 79-86).
3. Q, § 21.
4. Ludwig Büchner, « Aus und über Schopenhauer », in Brendel’s Anregungen, 1859, p. 1-3 (repris avec quelques ajouts
dans Aus Natur und Wissenschaft, Leipzig, 1862, p. 94-143).
5. Citation exacte : « Schopenhauer non plus ne voit pas les nombreux degrés intermédiaires — corporels et spirituels —
entre l’HOMME et l’ANIMAL, prouvés par les sciences empiriques. »
6. Il s’agit de la première photographie réalisée par Schäfer en 1859 (Bildnisse, no [88]).
7. Il s’agit du peintre de fresques historiques Wilhelm Hensel (1794-1861) qui laissa après sa mort plus de mille dessins au
crayon de nombreuses personnalités. Le dessin de Schopenhauer a été perdu (Bildnisse, no [50]).
Lettre 466
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 193-194.
Lettre 467
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 195-196.
Le 4 juillet, Brockhaus écrivit qu’il comptait imprimer 2 250 exemplaires, tout en promettant de réduire l’autorité des
typographes. Le 7 juillet, Brockhaus répéta cette promesse. Le 8 août, il annonça qu’il allait procéder à la distribution de la 3 e
édition, pourvue d’une couverture brochée.
Lettre 468
1. M Bibliothèque nationale Preussischer Kulturbesitz, Berlin. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 35, p. 331-332.
2. En attente.
3. Gravement déçu.
4. Asher objectera que son séjour à Londres était trop bref et chargé.
5. « Maintenant souvenez-vous-en une fois pour toutes, lorsque je reçois des communications intéressantes, je me fiche de
l’affranchissement ; & maintenant n’en parlons plus. »
6. Je n’en sais fichtrement rien.
7. Londres (fam.).
8. Schopenhauer se réfère à une indication d’Asher : « Dans la Philosophische Zeitschrift (t. 35, cahier 1), Carrière prend
donc parti pour vous, contre Zimmermann. » La recension « Aesthetik von Robert Zimmermann » par Moriz Carrière, Zeitschrift
für Philosophie und philosophische Kritik, t. 35, 1859, p. 113-139, contient les propos suivants sur Schopenhauer : « En
s’expliquant avec Schopenhauer, Zimmermann n’a pas réussi, après une critique du point de vue général et de quelques autres
propositions, à relever ce qui pourrait être désigné comme le résultat de l’esthétique. Il croit que Herbart a eu raison de considérer
la philosophie de l’art de Schopenhauer comme étant insignifiante et de ne pas lire toute la troisième partie du Monde comme
volonté et représentation. Mais appeller insignifiant ce qui n’a pas été lu est un peu fort. C’est précisément de cette troisième
partie, grâce au lien entre Kant et Platon et au sens esthétique et au goût cultivé de Schopenhauer, que résulte toute une série de
propositions excellentes sur le Beau et la création artistique, la disposition esthétique et les arts singuliers, propositions qui ont
une valeur propre tout à fait indépendante du principe fondamental de Schopenhauer. »
9. D’après mon estimation.
10. Il s’agit de l’ébauche d’une lettre accompagnant le traité de Quandt, Wissen und Seyn. Eine realistische Abhandlung
zur Ausgleichung des Spiritualismus und Materialismus (« Savoir et être. Un traité réaliste sur la conciliation du spiritualisme et
du matérialisme »), Dresde, 1859, que le fils de Quandt avait envoyé à Asher le 8 août 1859, après la mort du père (19 juin
1859) ; repris dans Asher, p. 40-41.
Lettre 469
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 201-203.
2. Eduard Brockhaus (1829-1914), dans la maison depuis 1850, remplaça son père Heinrich Brockhaus pendant ses
voyages (cf. lettre no 449). Il avait mené les négociations avec Schopenhauer sur la 3 e édition du Monde comme volonté et
réprésentation et avait profité de son séjour à Francfort (le 15 août 1859) pour faire personnellement connaissance avec
Schopenhauer. Pour le récit de son séjour, écrit en 1901, cf. Gespräche, p. 342-344.
3. Expression qui se trouve dans le poème An Göckingk, v. 40, in Sämmtliche Schriften, éd. par K. Reinhard, Göttingen,
1796, t. I, p. 231.
4. Excepté celui destiné à Wiesike, trois autres exemplaires ont été dédicacés : ceux d’Élisabeth Ney, de Gwinner et de
Kilzer. Schopenhauer garda lui-même un exemplaire de travail, ainsi qu’un autre constitué par les épreuves.
5. Il s’agit de Carl Ferdinand Wiesike.
6. Allusion à M, II, chap. 22, in fine. La correction de Schopenhauer : « après “mots” il faut donc insérer idem au lieu de
simile ».
7. Élisabeth Ney (26 janvier 1833 - 29 juin 1907), fille du sculpteur de Münster Johann Adam Ney (3 mars 1800 - 21
octobre 1879) s’installa à Berlin en 1854 après une formation de deux ans à l’Académie des Arts de Munich ; élève de Christian
Rauch. Dans les années suivantes, elle réalisa de nombreux bustes de personnalités célèbres dont A. von Humboldt, Jakob
Grimm, Joseph et Amalie Joachim, Varnhagen von Ense, Mitscherlich, Schopenhauer (1859), le roi Georges V de Hanovre
(1859-1860), la reine Victoria, Bismarck, Garibaldi et Louis II. En 1865, elle épousa le Dr. Edmund Montgomery, en 1871 elle
s’installa en Amérique pour la deuxième moitié de sa vie. Cf. Eugen Müller, Elisabeth Ney, Leipzig, 1931 (avec les rectifications
de Hübscher, Süddeutsche Monatshefte, décembre 1931) ; cf. également Gespräche, p. 350-352 ; pour le buste, cf. Bildnisse,
[57].
Lettre 470
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 205-206.
Lettre 471
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 207-209.
2. Brockhaus l’avait promis dans une lettre du 1er novembre 1859.
3. Cf. les demandes similaires adressées à Asher (lettre no 473) et à Lindner (lettre no 475).
Lettre 472
1. Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 209.
Lettre 473
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 36, p. 363-365.
2. Faites-le — soyez un brave gars.
3. Le programme d’Asher (cf. lettre no 464) avait paru en tiré à part chez Trübner à Londres et chez Fleischer à Leipzig,
1859.
4. Le billet avait en fait paru dans la Constitutionelle Zeitung ; l’article Ein Besuch bei Schopenhauer (« Une visite chez
Schopenhauer ») fut publié dans la Constitutionelle Zeitung (Dresde), no 227, 1er octobre 1859, repris dans Jahrb. no 10 (1921) p.
102-119 et avec quelques coupures dans Gespräche, p. 344-350. La signature B. M. ramène au Dr. Bernhard Miller (livre
d’adresses de Dresde, 1859).
5. Amely Bölte (1811-1891), éducatrice en Angleterre, militante pour le droit des femmes, avait publié dans la Novellen-
Zeitung, 3e série, 5e année, Leipzig, 1859, no 37 du 14 septembre 1859 (série complète n o 827), un article intitulé « Aus der
Gegenwart. Von der Reise », où elle évoquait Schopenhauer à la table d’hôte, article repris dans A. Hübscher, « Ein missglücktes
Interview », Jahrb. no 24 (1937), p. 147-150.
6. Asher avait fait part à Schopenhauer du récit suivant d’un ami londonien portant sur l’article dans la Bentley Review (cf.
lettre no 468) : « I read through the article on German philosophy, which is short and not very profound. It makes no mention of
Schopenhauer’s, but principally dwells on Schelling, Fichte and Hegel, and the gist of the whole is, that as all these philosophers
have assumed unity as the ultimate basis of all, and this has not led to a satisfactory result, let somebody out from Dualism » [J’ai
lu l’article sur la philosophie allemande, qui est court, et pas très profond. Il n’évoque pas Schopenhauer mais se fixe
principalement sur Schelling, Fichte et Hegel, et le point essentiel de tout cela, c’est que comme ces philosophes ont admis
l’unité comme la base ultime de toutes choses, et que cela n’a pas abouti à un résultat satisfaisant, on pourra partir du dualisme.]
7. Wissen und Seyn (cf. note 10 de la lettre no 468).
8. Karl Rosenkranz, Wissenschaft der logischen Idee, 2. Theil : Logik und Ideenlehre (« Science de l’Idée logique, 2e partie
: Logique et doctrine des Idées »), Königsberg, 1859. Les passages sur Schopenhauer : p. 326, 413, § 417.
9. Ludwig Noack, Schelling und die Philosophie der Romantik. Ein Beitrag zur Kulturgeschichte des deutschen Geistes («
Schelling et la philosophie du romantisme. Une contribution à l’histoire culturelle de l’esprit allemand »), partie 1 et 2, Berlin,
1859.
10. Moriz Carrière, Aesthetik. Die Idee des Schönen und ihre Verwirklichung durch Natur, Geist und Kunst (« Esthétique.
L’Idée du Beau et sa réalisation par la nature, l’esprit et l’art »), partie 1 et 2, Leipzig, 1859. À la p. 47 sq. (2e éd., tome 1, 1873),
on peut lire : « Schopenhauer a appelé volonté la chose en soi, l’essence et le principe vital de tout phénomène ; il dit que ce qui
vit et s’agite dans la nature végétale et l’organisme animal, après avoir grimpé les échelons des êtres au point d’être
immédiatement éclairé par la lumière de la connaissance, se manifeste en tant que volonté dans la conscience qui vient de se
constituer, et s’y trouve connu plus immédiatement et donc mieux que partout ailleurs ; cette connaissance doit donc fournir la
clé pour la compréhension de tout ce qui est inférieur. Mais je ne saurais être d’accord avec le penseur sur le fait qu’il fait
émerger la conscience de l’inconscient ; les Idées, que lui aussi pose comme échelons de l’objectivation de la volonté éternelle,
sont les intuitions idéales de l’esprit, l’évolution finalisée de la vie est incompréhensible sans une raison originaire, la volonté
comme puissance de création de toutes choses est la volonté voyante de l’amour, et parce que la conscience de soi divine est la
source intime et vitale de ce qui est fini, trouver notre essence signifie accéder à nous-mêmes, également devenir conscient pour
nous-mêmes. La volonté qui ne serait pas son propre maître devrait en vérité être appelée impuissante ; il en va ainsi de la volonté
aveugle ; la volonté maître d’elle-même est celle de l’esprit ; lui seul suffit pour expliquer le monde réel et son histoire et c’est
ainsi que l’esprit peut être pensé comme maître de l’être. L’élévation vers lui, la pénétration en lui, n’est pas par conséquent la
prétendue dispersion bouddhiste dans le Néant, mais la vie béate consciente d’elle-même en Dieu, le remplissement de l’âme par
l’essence et la vérité. »
11. D’après Faust I, v. 2182-2183.
12. Il s’agit de la note sur Rosenkranz, M, II, chap. 4.
Lettre 474
1. IM1 Schemann, p. 402-403. Selon Schemann, le […] à la fin du troisième paragraphe contient l’évocation du buste de
Ney et de la gravure sur cuivre de Göbel.
La présente répond à une lettre du 5 novembre dans laquelle Brecht s’inquiétait de la photographie demandée.
2. Robert Schellwien, Kritik des Materialismus, Berlin, 1858 (HN V, no [490]). Schellwien était avocat, Brecht lui devait
son éléction à la mairie de Quedlinburg.
3. Tout ce qui arrive, arrive nécessairement.
4. Ce n’est que le 18 février 1860 que Brecht put enfin écrire à Schopenhauer que l’affaire fâcheuse avec Schäfer était
réglée et que la photographie était entre ses mains (D XV, no 791).
Lettre 475
1. IM1 Gruber, 1913, p. 73-75.
Lettre 476
1. M Archives éditoriales, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 211-213.
La présente répond à une lettre de Brockhaus du 26 novembre 1859 dans laquelle il signalait l’envoi des exemplaires
gratuits, en demandant également si Schopenhauer serait d’accord pour que les honoraires payables à la parution du livre soient
ajournés jusqu’à la foire de Pâques.
2. Il s’agit d’une petite note vantant le buste de Ney parue dans la Deutsche Allgemeine Zeitung, journal publié par
Brockhaus sous le titre Leipziger Allgemeine Zeitung depuis 1837, et sous le nouveau titre de 1843 à 1879.
Lettre 477
1. IM1 Lindner / Frauenstädt, p. 711-714.
La présente lettre répond à une lettre de Frauenstädt remerciant Schopenhauer pour l’envoi de la 3 e édition.
2. cf. lettre no 473.
3. cf. lettre no 473.
4. Ludwig Noack, « A. Schopenhauer und seine Weltansicht ; eine fixe Idee im pessimistischen Gewande », in Psyche.
Zeitschrift für die Kenntniss des menschlichen Seelen- und Geistesleben, t. 2, Leipzig, 1859, cahier 1, p. 17-44.
5. cf. lettre no 473.
6. Cf. Goethe, Faust I, v. 2182-2183.
Lettre 478
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 214-215.
Lettre 479
1. M Archives Schopenhauer. IM1 D XV, no 780.
Les recherches pour identifier la destinataire (conseillère supérieure du gouvernement à Marienwerder) qui, le 10
décembre, avait exprimé à Schopenhauer sa joie et celle de son époux à l’occasion de la 3 e édition de son ouvrage principal, sont
restées sans succès. Selon elle, la réponse de Schopenhauer l’a touchée comme une « joyeuse surprise de Noël »
Lettre 480
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Grisebach, Edita und Inedita, p. 216-218.
2. Lettre de remerciement pour la 3e édition (28 novembre 1859).
3. Revue germanique, t. VII, Paris, 1859, p. 719 : « Il ne me reste plus qu’à vous annoncer la publication de deux ouvrages
importants. L’un est une réimpression : c’est la troisième édition des œuvres de Schopenhauer, revue, corrigée et augmentée.
Après le bel article que M. Dollfus a consacré à ce philosophe, tous ceux qui peuvent lire l’allemand et qui s’occupent des graves
problèmes de la philosophie voudront jeter un coup d’œil dans ce livre. Qu’ils ouvrent le chapitre qui traite de l’amour ; cela les
intéressera peut-être de comparer la grave dissertation du philosophe de Francfort sur cette délicate matière avec les deux derniers
ouvrages de Michelet, L’Amour et la Femme. Je crois même que la traduction de ce chapitre ne serait pas déplacée dans votre
journal ; je l’avais entreprise, mais mes occupations ne me permettent pas de l’achever ; je la laisse à de moins occupés et de plus
habiles que moi. » Le billet est signé A. M. = A. Maillard.
4. Charles Dollfus, « Arthur Schopenhauer et sa philosophie », in Revue germanique, Paris, 1859, t. VIII, 30 novembre, p.
367 sq.
5. Bähr avait signalé à Schopenhauer que le cahier 2 des Findlinge de Hoffmann von Fallersleben avait publié, sous le n o
54, la lettre de Goethe à Schopenhauer du 7 septembre 1815. Cf. à ce propos la lettre à Rosenkranz du 12 juillet 1838 (lettre n o
161).
6. M, II, chap. 48.
7. M, II, chap. 20.
8. M, II, chap. 20.
Lettre 481
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 156.
2. Grisebach (Edita und Inedita, p. 218) suppose que Schopenhauer fait allusion au souhait de Bahnsen d’obtenir une copie
de la correspondance avec Becker. Mais Schopenhauer avait déjà exprimé son refus le 22 décembre 1856 (lettre no 404).
3. Il y avait en réalité neuf exemplaires, sans compter l’exemplaire personnel de travail. De ces neuf exemplaires,
Schopenhauer en avait donné huit le jour de rédaction de la présente lettre : les cinq envoyés par l’éditeur et un exemplaire
envoyé à Wiesike, Élisabeth Ney et Kilzer. Gwinner reçut le neuvième exemplaire le 31 mai 1860. cf. lettre no 469.
Lettre 482
1. C Archives Schopenhauer. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IC1 Gwinner, 2e éd., p. 602-604. IM1
D XV, no 784.
Clemens Rainer (Kreitmayer), acteur, plus tard juge de première instance à Landsberg, pratiquant au Vieux Théâtre
d’Oldenbourg (1859-1864). Dans une lettre du 24 janvier 1860, il avait prié Schopenhauer de lui expliciter sa conception de la
figure de Méphistophélès, qu’il venait d’interpréter.
2. M, II, chap. 46.
3. P, II, ch. XII, § 156.
4. Friedrich Haase (1825-1911) pratiqua à Francfort de 1856-1858. La représentation du Faust à laquelle se réfère
Schopenhauer a dû avoir lieu dans la première moitié de l’année 1858, car Haase quitta Francfort le 6 août 1858. Pour le récit de
sa rencontre avec Schopenhauer, cf. son livre Was ich erlebte. 1846-1896 (« Ce que j’ai vécu. 1846-1896 »), Berlin, 1897 ; cf.
aussi Gespräche, p. 340.
Lettre 483
1. I, Rois, 17, 8-16 ; Luc, 4, 25-26.
2. Après la réception de cette lettre, Rainer envoya encore à Schopenhauer une lettre de remerciement (7 février 1860). Il
publia plus tard avec August Becker l’ouvrage Die Hoffnungen der deutschen Schauspielkunst gegründet auf die Principien der
Schopenhauerschen Philosophie. Zwei Schauspielerbriefe (« Les espoirs de l’art dramatique allemand basés sur les principes de
la philosophie schopenhauérienne. Deux lettres d’acteurs »), Oldenburg, 1864.
Lettre 484
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 217-219.
Lettre 485
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 222-224.
2. Lettre du 16 février 1860.
3. De toutes choses et de certaines autres (recte : de omni re scibili et quibusdam aliis, réf. aux 900 thèses de Pic de la
Mirandole, 1486 : la thèse XI fait l’éloge des nombres comme moyen ad omnis scibilis investigationem et intellectionem).
Lettre 486
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Grisebach, Edita und Inedita, p. 219-220.
2. Le loisir est la plus belle des possessions ; cf. Diogène Laërce, II, 5, 41.
3. Bähr avait écrit à Schopenhauer que Maillard travaillait à la traduction du chapitre 41 (sur l’immortalité) qui devait se
rattacher à la traduction des trois chapitres suivants.
4. Abendblatt en supplément de la Neue Münchener Zeitung, no 8, mardi 10 janvier 1860, p. 37 sq.
5. Le passage en question : « Il déteste et méprise les hommes, il s’est donc entouré de toute une meute de chiens. »
6. On peut lire par exemple : « La divinisation mise en œuvre par certains disciples aura sans doute également contribué à
attirer davantage l’attention sur cet auteur presque oublié, mais la raison de sa grande popularité est plus profonde. Les résultats
de la philosophie de Schopenhauer concordent avec Feuerbach. »
Lettre 487
1. M Prof. Heinz Haushofer, Munich. IM1 baron Karl du Prel, (Wiener) Deutsche Zeitung, 28 janvier 1879, no 387.
2. Epistolario di Giacomo Leopardi, raccolto e ordinato da Prospero Viano, 2 tomes, Florence, chez Felice le Monnier.
Doss avait recommandé cette édition dans sa lettre de vœux du 19 février 1860, mais Schopenhauer n’a apparemment pas
commandé ces Lettres.
3. Il s’agit d’un article (anonyme) sur Renan, « Ernest Renan über den monotheistischen Instinkt der Semiten », in Das
Ausland, 32e année (1859), no 50, p. 1187-1191.
4. Charles Darwin, On the Origin of Species by Means of Natural Selection, or the Preservation of Favoured Races in the
Struggle of Life, Londres, 1859.
5. Johann Adam Ney.
6. Von Doss avait obtenu un poste de conseiller du tribunal.
Lettre 488
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 224-225.
2. Dans sa lettre de remerciement pour la 3e édition (2 mars 1860), Ney avait annoncé que le moulage du buste se ferait lors
de son séjour à Berlin ; en attendant, elle avait envoyé une photographie la représentant à côté du buste ; cf. la reproduction dans
le Jahrb. no 38 (1957).
Lettre 489
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 227-229.
2. Assez vite, si assez bien (cf. lettre no 217).
3. J. A. Becker.
Lettre 490
1. M Archives Schopenhauer. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 36, p. 365-366.
2. David Asher, Der religiöse Glaube. Eine psychologische Studie. Als Beitrag zur Psychologie und Religionsphilosophie
(« La foi religieuse. Une étude psychologique. Comme contribution à la psychologie et à la philosophie de la religion »), Leipzig,
1860 (HN V, no [31]).
3. Schopenhauer appelle ainsi le bouddhisme. La référence au passage p. 32 n’est pas évidente, mais Schopenhauer semble
faire allusion (comme le suppose également Frauenstädt dans une lettre à Asher) à la critique par Asher de l’apriorité du concept
de causalité.
4. Tout à fait froidement.
5. Blätter für literarische Unterhaltung, 1860, no 12 (auteur de la recension : Hermann Marggraff).
6. Réclame indirecte.
7. David Asher, « An Autobiographical Passage in Shakespeare’s Tempest », in Notes and Queries, Londres, 1859, no 190,
repris dans les Blätter für literarische Unterhaltung. Asher avait tenté de démontrer que l’avertissement de Prospero lancé à
Ferdinand dans la précipitation (IV 1 : « Therefore take heed, as Hymen’s lamp shall light you » ; « Prenez donc garde, si la
lampe de Hymen doit vous éclairer ») renvoyait à une expérience personnelle de Shakespeare.
8. Qu’un homme obstiné prenne son chemin.
Lettre 491
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 36, p. 367.
2. Allusion à l’article du Dr. E. Löwenstein, « Schopenhauer in seinem Verhältniss zur Geschichte der Philosophie und zur
Gegenwart », in Stimmen der Zeit, mars 1860.
3. …. des…. dans IM1.
4. Demandez au Dr. Johnson, il vous en parlera. Allusion à James Boswell, Life of Samuel Johnson, Londres, 1848 (HN V,
no [1654]).
5. Ce troisième paragraphe manque dans IM1.
6. Je suis destiné à mourir dans une taverne (Archipoeta).
Lettre 492
1. M Archives Goethe et Schiller, Weimar. IM1 D XV, no 805.
La présente répond à une lettre du 20 avril 1860 dans laquelle Ottilie von Goethe exprimait sa joie suscitée par la gloire de
Schopenhauer, en louant sa force qui lui aurait permis d’atteindre le but qu’il s’était fixé il y a cinquante ans, en sa présence, à
savoir « devenir le philosophe du XIXe siècle ».
2. Adam Gottlieb Oehlenschläger (1779-1850), poète danois.
3. Franz Gerhard von Kügelgen (1772-1820), peintre, professeur à l’Académie des Arts de Dresde. Goethe évoque ce
portrait dans Biographische Einzelheiten. Zum Jahre 1807. Il était accroché avec trois autres portraits dans la chambre de
Johanna Schopenhauer en 1807 (cf. lettre de Johanna à Arthur Schopenhauer, 12 février 1807).
4. Bon vieux temps.
5. Ferdinand Wilhelm Heinke (1782-1857) lieutenant dans le 8e régiment de cavalerie du Schleswig, en automne 1813 il fut
amoureusement convoité par Adèle et Ottilie, après son retour il devint fonctionnaire prussien. Cf. Houben, p. 206-208.
6. Ulrike von Pogwisch (20 octobre 1804 - 23 septembre 1875), sœur cadette d’Ottilie, morte comme nonne supérieure de
Sankt-Johann en Schleswig.
7. Walther Wolfgang von Goethe (1818-1885) et Wolfgang Maximilian von Goethe (1820-1883).
Lettre 493
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 229-230.
Lettre 494
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 230-231.
Le 6 juin 1860, Brockhaus envoya à Schopenhauer cet ajout au contrat d’édition avec une lettre ; Schopenhauer renvoya
ensuite l’ajout pourvu de sa signature.
Lettre 495
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 36, p. 367-368.
2. Ces communications se rapportaient aux citations de Schopenhauer chez Karl Justi, Die Ästhetischen Elemente in der
Platonischen Philosophie (« Les éléments esthétiques dans la philosophie de Platon »), Marbourg, 1860 (p. 42, 72, 119) ;
Friedrich von Osten-Sacken, Franz von Baader und Louis Claude de Saint-Martin, Leipzig, 1860 ; Bogumil Goltz, Die
Deutschen, 2 tomes, Berlin, 1860 ; enfin, Julius Frauenstädt, Arthur Schopenhauer’s Welt als Wille und Vorstellung in dritter
Auflage (« La troisième édition du Monde comme volonté et représentation d’Arthur Schopenhauer »), in Vossische Zeitung, nos
101 et 106, suppléments du dimanche 29 avril et 6 mai 1860 (10 colonnes in-folio).
3. Asher risquait de perdre son poste à l’Institut du commerce de Leipzig ; il le perdra effectivement, « grâce aux
manœuvres » d’un collègue, selon ses propos.
4. C’est prouvé.
5. Les plus douces de vos études matinales.
6. Souvenez-vous : d’abord vivre, ensuite philosopher (proverbe).
Lettre 496
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 232-233.
Lettre 497
1. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Schemann, p. 406.
Salomon Friedrich Stiebel (1799-1868), chasseur de Lützow, promotion à Göttingen en 1815, ensuite à Francfort, célèbre
médecin et auteur d’écrits se rapportant à la médecine, porte le titre ducal de conseiller secret à la cour depuis 1841, membre de la
Réunion légiférante de 1830 à 1848, médecin de Schopenhauer.
Lettre 498
1. M Archives Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 234-236.
Lettre 499
1. M Archives Schopenhauer, dérobé. IM1 Becker, p. 159.
Becker renvoya le « prologus fortement salé et poivré » dès le 29 juillet, en indiquant qu’il ne croyait pas que
Schopenhauer avait « quelque chose à risquer juridice ».
Lettre 500
1. M jusqu’en 1945 Bibliothèque municipale de Dresde, Fondation Dr. Thieme (facs. Jahrb. no 2 [1913], après la p. 270).
IM1 Gebhardt, p. 236-237.
Lettre 501
1. IM1 Deutsches Museum, 1865, no 36, p. 368-369.
2. J’aime ma tranquillité : il n’y a pas de meilleur lieu que chez soi.
3. Il y a quelque chose avec les noms ; cf. L. Sterne, Tristram Shandy, vol. I, chap. 19.
4. La citation est extraite du discours commémoratif prononcé par Samuel Gottlieb Wald, in Rudolph Reicke, Kantiana.
Beiträge zu Immanuel Kants Leben und Schriften (« Contributions à la vie et aux écrits d’Immanuel Kant »), Königsberg, 1860,
p. 22.
5. Début août, suivi d’une lettre d’excuses de Ney du 11 août 1860 (D XV, no 819) dans laquelle elle annonce également
que la grande exposition aura lieu « dans 15 jours ».
6. Votre vieil ami qui vous veut du bien.
Lettre 502
1. M Archives éditoriales Brockhaus, brûlé. IM1 Gebhardt, p. 237-239.
2. Ces six exemplaires arrivèrent le jour de la mort de Schopenhauer. Gwinner en offrit une partie aux vieux amis de
Schopenhauer (Becker, von Doss).
3. Charles XV, régent depuis 1857, roi de Suède depuis le 8 juillet 1859.
4. August Kilzer.
Lettre 503
1. C Archives Schopenhauer. M Archives Schopenhauer (collection Gruber), brûlé. IM1 Schemann, p. 407-408
(incomplet), IM2 Grisebach, Briefe, p. 456-458 (complet).
Cette dernière lettre de Schopenhauer fut écrite en réponse à une lettre de deux élèves militaires de Weisskirchen (19 août).
Elle traite de questions litigieuses déjà posées à Schopenhauer par Frauenstädt, Becker et von Doss : considérant l’unité et
l’indivisibilité de la volonté, comment est-il possible que l’auto-suppression d’une seule volonté individuelle n’entraîne pas en
même temps la suppression du monde ? Schopenhauer n’a pas trouvé de réponse tranchée, il a même hésité. C dévie tellement de
M et de IM1, même pour certaines questions principielles, qu’il est nécessaire de reproduire entièrement l’ébauche :
« Votre conclusion est formellement juste, les prémisses sont également vraies, et pourtant l’énoncé de la conclusion est
faux. Cela provient du fait qu’il se produit une amphibologie des concepts, la volonté étant d’abord comprise comme phénomène
individuel, pour être saisie ensuite en sa qualité de chose en soi. Or dans cette dernière relation, l’objet devient transcendant,
c’est-à-dire qu’il dépasse toutes les possibilités de notre compréhension ; car au-delà de l’expérience possible, les formes de notre
intellect, de l’espace, du temps, de la causalité ne sont plus applicables. Mais vous conservez ces formes, en appliquant les
prédicats tout et partie, unité et nombre, cause et effet à la volonté comme chose en soi. Vous la saisissez par ex. par
l’intermédiaire de notre forme de l’intuition qu’est l’espace, et vous parlez de lui de façon quantitative en disant : “Comme la
volonté est présente TOUT ENTIÈRE dans chaque individu, la suppression de la volonté dans l’individu implique la suppression du
monde dans sa totalité.” Mais si vous concevez ainsi la chose de façon purement quantitative, vous auriez dû, en conséquence,
commencer plus haut et dire : “Jamais la volonté totale et indivisible ne peut se trouver TOUT ENTIÈRE dans chacun des
innombrables individus.” Car ceci est une impossibilité spatiale. Votre argumentation vise en fait également la causalité que la
volonté supprimée exerce sur le monde phénoménal. Elle considère de même le TEMPS en disant : “APRÈS que s’est produit une
négation de la volonté, il faut, etc.”
Toute cette amphibologie provient du fait que votre question s’est installée sur la limite de ce qui est accessible à notre
connaissance et de ce qui lui est inaccessible, le transcendant, et qu’ainsi elle jette les concepts d’un côté à l’autre de cette limite.
De mon côté, je me suis toujours gardé de toute transcendance et je n’ai jamais parlé que de ce qui se laisse vérifier dans
l’expérience : c’est ainsi que j’ai montré la volonté dans son affirmation, avec le phénomène, ce monde, qui en dépend en tant
que conséquence ; ensuite le phénomène éthique de sa négation ; mais ici, je ne puis tirer que des conséquences négatives, qui
sont donc pour nous — néant.
Maintenant, la question de savoir si les individus qui affirment la volonté, et l’individu qui à titre exceptionnel la nie, se
présentent dans le temps l’un AVANT ou APRÈS l’autre, ne fait aucune différence, aussi peu que le fait qu’ils doivent se montrer
dans l’espace l’un À CÔTÉ de l’autre : tout cela n’arrive que dans le phénomène et grâce à ses formes. Quant à la volonté
individuelle comprise dans la négation, j’en ai énoncé la conséquence négative t. 1 p. 452 et j’ai touché par là l’extrême limite
que notre capacité de comprendre puisse atteindre.
Tout ce qui a été dit ici vous éclairera plus encore à mesure que vous avancerez dans votre connaissance de la Critique de
la raison pure. Concernant la limite infranchissable de toute notre connaissance métaphysique, je vous recommande de lire
attentivement les trois pages du dernier chapitre du tome 2. Pour éclairer votre problème, il faut également prendre en compte t.
2, p. 698 “l’individualité”, etc. On peut également répliquer à votre objection : si le monde disparaît par quelqu’un qui nie la
volonté, alors en vertu de quelqu’un d’autre qui l’affirme, il est reconstruit. La vérité, c’est : le monde est toujours là pour celui
qui le veut, pour celui qui ne le veut, il n’est pas. »
Il est à noter que Schopenhauer n’a pas repris dans M la phrase « Car ceci est une impossibilité spatiale » et surtout les
deux phrases de la fin (« On peut également répliquer… il n’est pas ») qui se trouvent pourtant dans l’ébauche.
Camillo Schramek (décédé en 1890), officier d’artillerie en fin de carrière, travailla jusqu’à la fin de sa vie à un ouvrage
sur l’optique dans lequel il voulait mettre en valeur les théories de la couleur de Goethe et de Schopenhauer. En fin de carrière,
Michael Sikič était ingénieur supérieur de la marine à Vienne.
2. M, I, § 68.
3. M, II, chap. 47.
Index des noms

ABEGG, Hinrich Burghart 767, 776, 807, 813, 864, 890, 947, 991

ADAM, Albrecht N12

ALBERT, Johann Valentin 854

ALLIHN (alias CAJUS), Friedrich Heinrich Theodor 915, 917, 919, N5

ALLOURY, Louis 985

ALMONDE, Hermann von 1012-1013, N1

ALTENBOURG, August Herzog von Sachsen-Gotha, prince d’ 827, N6

ALTENSTEIN, comte Karl von Stein zum 772, 1001, N6

ANQUETIL-DUPERRON, Abraham Hyacinthe 1065, N4

APELLE N8

ARAGO, François 1041, 1129

ARISTOPHANE 1109, N10

ARISTOTE 783, 846, 876, 895, 986, 1093, N2, N3, N9

ARTARIA, Domenico 888, 891, 901, 942, 1098, 1128, N5

ASHER, Adolf 1128

ASHER, David 977, 1005-1006, 1038, 1043, 1048, 1080, 1096, 1100, 1109, 1112, 1120, 1126, 1130, 1132, 1139-1140, 1142-
1143, 1145, 1148, 1150, 1156, 1165, 1168, 1173, 1186, 1188, 1191, 1194-1195, 1197, 1203, 1205, 1209, 1219, 1226,
1239-1240, 1246, 1252, 1254, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N3, N3, N3, N3, N3, N4, N4, N4, N4,
N4, N4, N5, N5, N5, N6, N6, N6, N6, N7, N7, N7, N7, N8, N8, N8, N9, N9, N10, N11, N11, N14, N14, N14, N16, N16,
N17, N18, N18

ASMUS : voir CLAUDIUS, Matthias

ASTOR, William Backhouse 1114, N3

ATMA (caniche de Schopenhauer) 763, 1028, N8

AUGUSTIN D’HIPPONE (saint Augustin) 1222

BAADER, Franz Xaver von 1004, 1032, 1037, 1042, 1053, 1062, N2, N4, N5, N7, N8, N12, N17

BACH, Johann Sebastian N13

BACHMAYR, Johann Nepomuk N8, N14

BACON, Francis 1087, 1165, N21

BAER, Joseph (libraire) 1196, N9

BAHNSEN, Julius 1087, 1101, 1105, 1110, 1115, 1118, 1135, 1150-1151, 1192, 1205, N1, N2, N2, N2, N3, N4, N4, N6, N12, N13
BÄHR, Carl Georg 1074, 1080, 1103, 1107, 1110, 1112, 1116, 1118, 1121, 1136, 1148, 1165, 1187, 1198, 1205, 1221, 1231,
1252, 1254, N2, N2, N2, N3, N4, N4, N5, N6, N6, N6, N9, N11, N11, N12, N13, N14, N25

BÄHR, Johann Karl 1023-1024, 1026, 1062, 1074, 1080, 1205, 1252, N2, N11, N11, N25

BALZAC, Honoré de 939

BARRACH, Dr. 1149

BARTHÉLEMY-SAINT-HILAIRE, Jules 1004, 1112, N5, N7

BARTH (graveur) 1109

BARTHOLMÈSS, Christian-Jean-Guillaume 1032-1033, 1037, 1042, 1052, 1061, 1090, N2, N3, N13

BATTEL, Paul 907-908, N1

BAYARD, Pierre Terrail de Bayard, dit le chevalier N22

BECKER, Johann August 756, 770, 773, 792, 804, 808, 819, 823, 825, 828, 836, 838-839, 854, 899, 905, 921, 927, 933, 939, 946,
949, 951-952, 954, 960-961, 971, 974, 977, 1040, 1045, 1074, 1080, 1101, 1116, 1128, 1135, 1138, 1162, 1223, 1251, N1,
N1, N1, N1, N1, N1, N1, N1, N1, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N3, N3, N3, N3, N3, N4, N4, N4, N4, N4,
N4, N4, N5, N5, N5, N5, N6, N6, N6, N6, N7, N7, N8, N8, N8, N8, N8, N9, N11, N34

BECKER, Johann Karl 1140, 1150, N2, N23

BECK, Gottfried Carlot N5

BEER, Bernhard N17

BEHREND (jardinier) 781, 815

BELL, Charles 860, N11

BENEKE, Friedrich Eduard 830, 945, 950, 1022, N4, N9, N10, N11, N11

BERARDI 1131

BERNARD, Prudence 886

BERZELIUS, Jöns Jakob von 872, N5

BEWER : voir BREWER, Johann Paul

BIALLOBLOTZKY, Christoph Heinrich Friedrich N12

BIAS DE PRIÈNE 966

BICHAT, Marie François Xavier 856, 860-862, 1085, N5, N7, N10

BINDING, Karl N24

BIRKMEYER, Karl von N24

BISMARCK, Otto von N7

BIZONFY, Franz 1011, N4, N7

BLANCHARD, Jean-Pierre 803, N16

BOÈCE (Anicius Manlius Severinus Boethius) N4

BOECKH, Philipp August 820, 856, N3, N24


BÖHTLINGK, Otto von 1186, N12

BOHTZ, August Wilhelm 762, 861, N5

BOIARDO, Matteo Maria N4

BÖKING : voir BÖHTLINGK, Otto von

BÖLTE, Amely 1215, 1219, 1234, N5

BONA MEYER, Jürgen 1092, 1095, N8, N9, N10, N14

BONAPARTE : voir NAPOLÉON Ier

BÖRNE, Ludwig 854, 952

BOSWELL, James N4

BOTTOM (in Le Songe d’une nuit d’été de W. Shakespeare) N8

BOUDDHA 809, 994, 1051, 1064, 1066-1067, 1073, 1080, 1089, 1099, 1113

BOUILLIER, Francisque 985, N14

BRAHN, Max N2

BRECHT, Heinrich Gustav 1179, 1186, 1212, N1, N1, N2, N4, N13

BRENDEL, Franz 1173

BREWSTER (fils) 886

BROCKHAUS, Eduard (petit-fils) 1209, 1226-1227, N2

BROCKHAUS, Friedrich (fils) N2

BROCKHAUS, Friedrich Arnold (libraire) 749-750, 752, 756, 793, 827, 862, 896, 903, 909, 914, 919-920, 923, 925-926, 954, 970,
982, 991, 1002, 1011, 1022, 1055, 1153, 1157, 1159, 1163-1164, 1172, 1174-1175, 1178, 1181-1185, 1187-1188, 1191-
1193, 1200-1201, 1204, 1206, 1208-1211, 1214, 1216, 1219, 1226-1227, 1229, 1235, 1237, 1240, 1245-1246, 1248-1249,
1251, 1253-1254, 1257, N1, N1, N1, N1, N1, N1, N2, N2, N2, N2, N2, N3, N3, N4, N6, N7, N7, N15, N24

BROCKHAUS, Heinrich (fils) 1178, N2

BRUCHHAUSEN, W. von 798, 997, N7, N10

BRÜCKE, Ernst 1064, N8

BRÜCKNER : voir BRÜCKE, Ernst

BRUNET DE BALAN 1056, 1058-1059, N14

BRUTUS, Marcus 1046

BUCHANAN, Claudius 1051

BÜCHNER, Ludwig 1011, 1016, 1035, 1042, 1053, 1056, 1071, 1086, 1169, 1172-1173, 1199, N4, N7, N8, N25

BUFFON, Georges-Louis Leclerc, comte de 1046-1047

BUNSEN, Christian Carl Josias von 1098, 1113, 1115, N1, N2, N6, N7, N10, N11, N27

BUNSEN, Theodor N1

BÜRGER, Gottfried August N10


CABANIS, Pierre Georges 765, 856, 860, N4

CAJUS : voir ALLIHN, Friedrich Heinrich Theodor

CALDERÓN DE LA BARCA, Pedro 876, N4

CAMPAGNORI, F. 1131

CANDIDUS, Karl 1005, N9

CANTOR, Moritz 1134, N11

CARL AUGUST DE SAXE-WEIMAR-EISENACH N22

CARLY, C. V. E. N8

CAROVÉ, Friedrich Wilhelm 969, 974, N7, N14

CARRIÈRE, Moriz 872, 910, 1203, 1211, 1215, 1217, N7, N7, N8, N10, N11

CHALYBÄUS, Heinrich Moritz 756, 793, 798, 910, 934, N9

CHAMFORT, Sébastien-Roch Nicolas de 803

CHARLEMAGNE (empereur d’Occident) N6

CHARLES III LE GROS (fils de Louis II de Germanie) N6

CHARLES XV (roi de Suède) 1254, N3

CHEVREUL, Michel Eugène N6

CHEVRIER, Monsieur du 794

CICÉRON (Marcus Tullius Cicero) 817, 1005, N2, N5, N5, N9

CLAUDIUS (alias ASMUS), Matthias 922, 997, N2, N2, N10

CLAUDIUS, C. (journaliste) N4

CLEMENS, Dr. Aloys 804, N3

CLEMENS, Richard 1157, N10

CLEMENS, Theodor 1146, 1149, 1151, N11

CLÉMENT DE ROME (saint Clément) 1222

COLERIDGE, Samuel Taylor 857

CONDILLAC, Étienne Bonnot de N4

COPERNIC, Nicolas (Mikołaj Kopernik) 790

CORDÉLIA (in Le Roi Lear de W. Shakespeare) 876

CORNILL, Adolph 1077, 1083, 1085, 1095, 1097, 1121, 1147, N4, N7, N17

CORNILL, Philipp Jakob N5

COTTA (éditeur) 998


COTTA, Bernhard 791, N3, N4, N4, N5, N8

COTTA, J. G. 1173

COUSIN, Victor 794, N13, N18

CREUZER, Georg Friedrich 852

CRÜGER, Eduard 1045, 1098, 1123, N1, N3, N7

CUDWORTH, Ralph 1085, N2, N3

DARA SUKOH (prince moghol) N4

DARWIN, Charles 1234, N4

DAVID (roi biblique) 847

DAVY, Humphry 1070, N8

DEBROIS VAN BRUYCK, Karl 1137, N1, N4

DELAAGE, Henri 939

DÉMÉTRIUS (in Le Songe d’une nuit d’été de W. Shakespeare) N13

DÉMOCRITE 872, 935, N3

DÉMOPHÈLE (in Parerga et Paralipomena d’A. Schopenhauer) 802, 810

DE SANCTIS, Francesco 1187, 1190, 1196, 1200, N2, N3

DESCARTES, René 1070, 1108, 1116, N2, N7, N18

DESDÉMONE (in Othello de W. Shakespeare) 876

DIDEROT, Denis 792

DIETERICH (libraire) 751, 756

DIETRICH, Gabriel N2

DIETRICH, Witwe 814, 890, 947

DIOGÈNE LAËRCE N2

D’ISRAELI, Isaac 1120

DITTERSDORF, Karl Ditters von 989, N5

DOLLFUS, Charles 1221, N3, N4

DON BASILIO (in Le Barbier de Séville de G. Rossini) 1009

DON CARLOS (personnage de Schiller) 876

DORGUTH, Friedrich Ludwig Andreas 754, 761, 772, 786, 792, 803-804, 810, 815, 817, 819-820, 825-826, 828, 835, 845-846,
857, 865-866, 879, 898, 902, 918, 968-969, 981, 991, 995, 1015, 1019-1020, 1023, 1033, 1136, N1, N1, N2, N3, N4, N5,
N6, N7, N9, N10, N11, N14, N17, N21, N22

DORGUTH, Maria 981


DOSS, Adam Ludwig von 755, 792, 804, 818-820, 824-825, 828-829, 836-837, 856, 863, 905, 911-912, 914, 916, 937, 941, 947,
967, 992, 1049, 1060, 1111, 1116, 1135, 1138, 1190, 1232, N1, N1, N1, N2, N2, N2, N2, N2, N3, N3, N3, N3, N4, N4,
N4, N4, N4, N5, N6, N6, N6, N7, N7, N8, N8, N8, N9, N9, N9, N9, N11, N11, N13, N34

DOSS, Anna WEPFER, épouse von N8

DOSS, Christine von N3

DOVE, Heinrich Wilhelm 898, 915, 920, 1041, 1064, 1130, N10

DROBISCH, Moritz Wilhelm 759, 1043, N2, N7

DROSSBACH, Max 1029, N11

DUBOURG, L. A. Victor 1058, 1084, 1090, N6

DÜNTZER, Heinrich 933

DUPOTET, Jules de Sennevoy, baron 917, N6, N7

EASTLAKE, Charles Lock 1159

EBERSTEIN, Louis Ferdinand, baron von N5

EBERSTEIN, Moriz Leberecht, baron von 1210, 1213, 1215, 1222, 1234, N4, N19

ECKHART, Eckhart von Hochheim, dit Maître 1139

EEDEN, Frederik Willem van 1107, 1138, N1, N4, N6

EGMONT (personnage de Goethe) 876

EHRENBERG, Christian Gottfried 1087, 1089, N10

EISENLOHR, Wilhelm N6

EMDEN, Martin 767-770, 773-775, 786, 794, 804, 813-814, 828, 882, 888, 890, 921-922, 927, 951, 954, 969, 974, 987, 989, 1024,
1038, 1086, 1165, N1, N1, N2, N8, N9

EMPÉDOCLE 793, 950, N4

ENGEL, Johann Jakob N3

ENGERTH, Wilhelm von N5

ENNEMOSER, Joseph (auteur de L’Esprit de l’homme dans la nature) 755, 886, 936

ÉPICURE 792, 932

ERDMANN, Johann Eduard 783, 790-791, 796, 810, 830, 836, 866, 868, 914, 921, 923-924, 933-934, 953-954, 968, 988, 1011,
1071, 1122, 1185, 1190, 1196, N1, N2, N2, N3, N4, N5, N7, N7, N9, N10, N12, N12, N17, N27, N31

ERSCH, Johann Samuel 1037, 1042, 1052

ESSER, Rudolf N2

EULER, Leonhard 879, N1

EXNER, Franz 1001

FALLMERAYER, Jakob Philipp 791, 860, 954, N7


FARADAY, Michael 907, 911-912, 919, N6

FECHNER, Gustav Theodor N6

FECHNER, Hermann Adolph 1125, N6

FEUERBACH, Anselm Ritter von 835

FEUERBACH, Ludwig 803, 805, 810, 862, 871, 883, 935, 961, N4, N6, N6, N15, N17, N25

FICHTE, Immanuel Hermann von 772-773, 787, 830, 868, 877, 883, 907, 910, 934, 962, 967, 994, 1023, 1061, 1071-1072, N2,
N2, N3, N4, N4, N5, N6, N6, N6, N6, N6, N7, N7, N8, N9, N11, N14, N17, N18

FICHTE, Johann Gottlieb 783, 788, 790, 803, 833, 892, 917, 944, 950, 1032, 1052, 1075, 1087, 1091, 1211, 1215, 1217, N2, N4,
N5, N6, N6

FISCHER, Karl Philipp 810, N17

FISCHER, Kuno 846, 934, 1015, 1087, 1089, 1104, 1113, N14, N18, N19, N20, N20

FLOTTWELL, Eduard Heinrich von 1173, N4

FLOURENS, Marie Jean Pierre 860, 1047, 1085, 1135, 1222, N5, N10

FÖRSTEMANN (libraire) 823

FORTLAGE, Carl 830, 832-833, 853, 878, 903, 934, 936, 943, 945, 996, 1022, 1028, 1031, 1053, 1072, 1156, N3, N4, N4, N4, N6,
N6, N7, N7, N8, N9, N11

FOUCHER DE CAREIL, Louis Alexandre N9

FRAHSMANN (fermier) 781, 815

FRANÇOIS Ier D’ESTE N3

FRANKEL, Zacharias N17

FRANK (journaliste) 1164, 1166

FRANKLIN, Benjamin 878

FRAUENSTÄDT, Julius 754, 757, 761, 764, 770, 772, 779, 782, 786, 790, 792, 796-797, 799, 804, 808, 812, 816, 824, 827, 831,
839-840, 846, 852, 854, 858, 866, 871, 873, 879, 882, 888, 893, 896, 901, 904, 907, 909, 912, 914, 916, 918, 923-924,
928, 935, 937, 939-943, 946-947, 949, 951, 954, 956, 958, 960, 964, 968, 975, 979, 983, 986, 990, 994, 996, 998-999,
1002, 1007, 1013, 1018, 1021, 1024, 1028, 1031, 1033, 1036, 1039, 1043, 1046, 1048-1050, 1053-1054, 1057, 1060,
1062, 1064, 1066, 1068, 1074, 1077, 1082, 1084, 1088, 1090-1091, 1122, 1124, 1126, 1140, 1154-1156, 1169, 1205,
1214, 1217, 1231, 1252, 1254, N1, N1, N1, N1, N1, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2,
N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N2, N3, N3, N3, N3, N3, N3, N3, N3, N3, N3, N3, N3, N3,
N3, N3, N3, N3, N3, N4, N4, N4, N4, N4, N4, N4, N4, N4, N4, N5, N5, N5, N5, N5, N5, N5, N5, N5, N5, N5, N5, N5,
N5, N5, N6, N6, N6, N6, N6, N6, N6, N6, N6, N6, N6, N6, N6, N6, N6, N7, N7, N7, N7, N7, N7, N7, N7, N7, N8, N8,
N8, N8, N8, N8, N8, N8, N8, N9, N9, N9, N9, N9, N9, N9, N9, N10, N10, N10, N10, N10, N11, N11, N11, N11, N11,
N11, N11, N12, N12, N13, N13, N13, N13, N13, N14, N14, N14, N14, N14, N15, N15, N15, N15, N16, N17, N17, N18,
N18, N19, N21, N22, N27, N29, N31

FRÉDÉRIC-GUILLAUME III (roi de Prusse) N15

FRÉDÉRIC II LE GRAND (roi de Prusse) 795, 1009, N19

FRESNEL, Augustin Jean N6

FRICKE, Gustav Adolf 1092, 1097, N4

FRIEDLEBEN, Dr. N8
FRIEDRICHSEN, Daniel 775, 778-779, 781, 805, 807, 813-815, 864, 889, 947, 1012-1013, 1131, 1167, N1, N1, N1, N1, N2, N3,
N4, N4, N8

FRIEDRICHSEN, Laura Ernestine Wilhelmine DÖRING, épouse 815

FRISCH (libraire) 1098, 1128, 1139

FRORIEP, von (professeur) 1130

FÜLLEBORN, F. L. 911, N10

FURREG, Erich N8

GABIROL, Salomon ibn 1122, 1126, 1133, 1139, N6, N16, N17

GABLER, Georg Andreas 923, N3

GARIBALDI, Giuseppe N7

GARIOPONTUS N3

GASPARIN, comte Agénor de 919, N3

GAYETTE, Jeanne Marie von 1049-1050, 1067, N7, N8

GEORGENS, Dr. 1067, N7

GEORGES V (roi de Hanovre) N7

GERVINUS, Georg Gottfried 953, N4

GÖBEL, Angilbert 1095, 1099, 1105, 1108, 1110, 1184-1185, 1188-1189, 1191, 1197, 1199, 1206, 1211, 1216, 1219-1220, 1235,
N1, N21

GODEFFROY, Charles N7

GODEFFROY, Marianne 831, N7

GÖDIKE 994

GOETHE, Johann Wolfgang von 784, 788, 790, 804, 826, 830, 844, 869, 876, 879, 898, 904, 915, 933-934, 938, 978, 996, 1004,
1013, 1016, 1025, 1040-1041, 1056, 1075, 1109, 1114, 1119, 1130, 1141-1142, 1144-1147, 1149, 1151-1152, 1196, 1222,
1224-1225, N1, N1, N1, N2, N2, N2, N3, N3, N3, N3, N3, N3, N4, N4, N4, N5, N5, N5, N6, N6, N7, N7, N8, N8, N9,
N10, N12, N15, N16, N17, N20, N30

GOETHE, Ottilie von 1241, N1, N5, N6

GOETHE, Walther Wolfgang von N7

GOETHE, Wolfgang Maximilian von N7

GOLDSCHMIDT, B. H. 947

GOLTZ, Bogumil N2

GÖRRES, Guido 1056, 1089, 1091, 1094, N3, N5, N5, N8, N12

GÖSCHEL, Karl Friedrich 815, N1, N2

GOTTSCHALL, Rudolf von 1045, 1052, N2, N13, N14

GOUVERNON, Joseph Eugen N2


GRACIÁN, Balthasar 765

GRAUL, Karl 962, 967, 992, 995, 1050, N3, N18

GRÄVELL, Friedrich 1119, 1129, 1141, 1144, 1146, 1149, 1151-1152, N1, N1, N2, N8

GRIMM (dit Placidus), Carl 896, 1017, 1020, 1025, 1030, 1033, 1056, 1059, 1065, 1076-1077, 1129, 1136, N2, N2, N2, N3, N4,
N6, N6, N7, N10, N11, N17

GRIMM, Jakob N7

GRISEBACH, Eduard N1, N1, N2, N6

GRUBER, Johann Gottfried 1037, 1042, 1052

GRUPPE, Otto Friedrich 894, N5, N9

GUBITZ, Friedrich Wilhelm 1091, 1094, N5

GUILLAUME Ier (empereur allemand) 851, N15

GUTZKOW, Karl 869, 907, 917, 994, 1094, N7, N15

GWINNER, Wilhelm 950, 1037-1038, N1, N1, N2, N2, N3, N4, N5, N5, N8, N9

HAAKE, August 1029, N12

HAASE, Friedrich 1226, N4

HADDOCK, Joseph Wilcox N12

HAGEMANN, C. Friedrich 791, N12

HALL, Marshall 860, N12

HAMANN, Johann Georg 819

HAMEL, Julius 1066-1067, 1087, N5, N10, N18

HAMERLING, Robert N1, N1

HAMILTON, William 1115-1116, 1141, 1151, N3

HAMLET (in Hamlet de W. Shakespeare) 1148

HÄNSEL (peintre) : voir HENSEL, Wilhelm

HARDY, Spence 1050, N5

HARMS, Friedrich 793, 850, 934, N11

HARMS, Klaus 793, N5, N7, N8

HARTENSTEIN, Gustav 759, 893, 1043, N6, N7

HARTKNOCH, Johann Friedrich 972-975, 982, 985, 1155, 1160

HARTMANN, Philipp Carl 765, N3, N7

HASSLACHER (sous-préfet) N2

HAUSER, Gaspard 1033


HAYDN, Joseph 1025

HAYM, Rudolf 1143, 1156, N2, N6, N7

HAYN, Adolph Wilhelm 757, 763-764, 772, 798, 870, 896, 954, 1154-1155, 1160-1161, 1227, 1236, 1238, N1, N3, N7

HEBBEL, Friedrich N1

HEBLER, Carl 1023, N8, N11

HEGEL, Georg Wilhelm Friedrich 785, 833, 846-847, 877, 925, 978, 1032, 1045, 1062, 1083, 1087, 1143, N2, N4, N5, N5, N6,
N6, N6, N7, N8, N18, N20

HEIMSOETH, Friedrich N1, N2

HEINE, Heinrich 961, N2

HEINKE, Ferdinand Wilhelm 1243, N5

HEINZE, Dr. N11

HELFFERICH, Adolf 1084, N5

HELMHOLTZ, Ferdinand N5

HELMHOLTZ, Hermann von 898, 959, 1013, 1040-1041, 1045, 1064, 1076, 1163, N1, N2, N2, N4, N4, N5, N11

HELVÉTIUS, Claude-Adrien Schweitzer, dit 877, 893, 913, 1093

HEMPEL, Adolph Friedrich 859

HENGSTENBERG, Ernst Wilhelm 1090, N2, N5

HENRI Ier DE GERMANIE (fils d’Otton Ier) N6

HENSEL, Wilhelm 1199, N7

HÉRAULT DE SÉCHELLES, Marie-Jean 1047

HERBART, Johann Friedrich 756, 760, 762, 765, 772, 786, 866, 868, 893, 915, 919, 943, 966, 977-978, 1032-1033, 1169, N4, N5,
N6, N7, N7, N7, N8, N8, N10, N11, N11, N12

HERDER, Johann Gottfried N2, N8

HERMANN, Joh. Christian (libraire) 756, 823, 857, 881, 963-964, 970, 975, 1031, 1155, 1159, 1228, 1245, N2

HÉRODOTE 971, 1135, N2, N3

HERSCHEL, John Fred. Will. 978

HERTSLET, William Lewis N3

HERWEGH, Georg 993, 1089, N2, N4, N9

HERZ, Marcus N15

HEYSE, Paul Johann Ludwig von N1

HILLEBRAND, Joseph 1097, 1198, N6

HINCKELDEY, Karl Ludwig Friedrich von 1061, N3

HINRICHS, Hermann Friedrich Wilhelm 772, 986, 1001, N4, N5


HIRSCHWALD (libraire) 831

HOBBES, Thomas 1016, N3, N8

HOFFMAN, Johann Dietrich 1008, N11, N12, N13

HOFFMANN, Franz 999, 1037, 1042, 1053, 1061, 1075, N2, N4, N12

HOFFMANN VON FALLERSLEBEN, August Heinrich 1222, N5

HÖLTY, Ludwig N9, N15

HOMÈRE N4, N10

HOOKE, Robert 940, N5

HOPE 1108

HORACE (Quintus Horatius Flaccus) 1025, N3, N3, N3, N4, N4, N5, N12

HORNSTEIN, Robert von 1023, 1089, 1163, N9, N12

HOUBEN, Heinrich Hubert N7

HUMBOLDT, Alexander von 820, 835, 845, 852, 898, 907, 911, 919, 936, 989, 1041, 1094, 1129, 1136, N4, N6, N7, N7, N14,
N17, N18, N27

IRIARTE, Tomás de 1100, N3

JACOBI, Friedrich Heinrich 798, 950, N4

JAGEMANN, Karoline 810, N22

JARCKE, Karl Ernst N5

JEAN (apôtre) 1060, N4, N6

JEAN PAUL, Johann Paul Friedrich Richter, dit 792, 920, N10

JÉSUS-CHRIST 966, N6, N9

JOACHIM, Amalie N7

JOACHIM, Joseph N7

JOHN, Carl Ernst 894, N5

JUDAS 800

JUNGHUN, Franz Wilhelm N10

JÜNGKEN, Johann Christian 856, 991, 998, 1217

JÜRGENS, Heinrich N20

JUSTI, Karl N2

KACHLER, Auguste 886

KALB, Philipp Leonhard 1042, 1053, 1065, 1074, 1089, N6


KANT, Immanuel 760-761, 766, 783, 791, 794-795, 797-799, 801, 811, 826, 833, 838, 842-843, 847, 849-851, 861-862, 868, 892-
893, 895, 910, 916, 921, 924, 930, 932-933, 940, 950, 964, 967, 977, 984, 990, 1009-1010, 1015, 1019, 1022, 1035-1036,
1041-1042, 1045, 1047, 1053, 1058, 1071, 1075-1080, 1083, 1085, 1087, 1104, 1109-1110, 1115-1116, 1148, 1156, 1162,
1167, 1201, 1211, 1253, N1, N1, N2, N2, N2, N2, N2, N3, N3, N3, N3, N4, N4, N4, N5, N6, N7, N7, N8, N8, N8, N9,
N12, N12, N16, N17, N18, N19, N20

KARSCH, Anton 1077, 1082, 1089, N2, N11

KÄSTNER, Abraham Gotthelf N8, N9

KAYSER, Georg 1193, N1

KEISER, Reinhard 989, N4

KERNER, Justinus 1067

KILZER, August Gabriel 856-857, 863, 865, 870, 882, 898, 918, 935, 937, 942, 953, 968, 983, 991, 995, 1001, 1024, 1038, 1078,
N1, N2, N3, N4, N4, N4, N5, N9, N11

KILZER, Michael Wilhelm N7

KLINGER, Friedrich Maximilian 1114

KNOODT, Peter 1124, 1127, N2

KNYPHAUSEN, Carl Wilhelm, comte de 1138, N2, N9

KÖNIGSMARK, comtesse N10

KÖPPEN, Carl Friedrich 1138, N4

KÖRBER, G. W. 1006, 1010, 1052, 1124, 1127, N3, N4, N6

KORMANN, Dr. J. 831, 836, 839, 845, 905, N6, N11, N11, N12

KOSACK, Carl Rudolf 822, 824, 826, 829-830, 835, 854, 1105, N1, N3, N3, N5, N6, N8, N21

KOSSAK, K. L. Ernst 893, 942-943, 957, 959, 996, N2, N2, N3, N5, N8, N8, N9, N9, N12

KRAUSE, Karl Christian Friedrich N7

KRETZSCHMER, Marie 1220

KRIEGSKOTTE, Dr. 913, 917, N6

KRÜDENER, Barbara Juliane von 844, N14

KRÜDENER, Paul von 844, N14

KRÜGER 1064, 1066-1067

KRÜNITZ, Johann Georg N10

KÜGELGEN, Franz Gerhard von 1243, N3

KÜHL (ingénieur) 1116, N4

KYM, Andreas N5

LAMARCK, Jean-Baptiste de 1234

LANGENBECK, Conrad Johann Martin 761, 859, N13


LAROMIGUIÈRE, Pierre 794, N17

LASAULX, Ernst von 1111, 1147, N4, N13

LASSALLE, Ferdinand N10

LAUNITZ, Eduard Schmidt von der 1024

LAVOISIER, Antoine Laurent 1076, N15

LAZARUS, Moritz 1094, N19

LEAR (in Le Roi Lear de W. Shakespeare) 876

LEE, William 986, N3

LEIBNIZ, Gottfried Wilhelm von 861, 925, 984, 1015, 1029, 1070, 1201-1202, N1

LEOPARDI, Giacomo 1139, 1171, 1185, 1187, 1189-1190, 1196, 1198, 1200, 1232, N2, N2, N3, N3, N8

LEPORELLO (in Don Giovanni de W. A. Mozart) 786

LESSIG, Maria Elisabetha 876

LESSING, Christian Gottlob N21

LESSING, Dorothea Salome 795, N19

LESSING, Gotthold Ephraim 795, 1035, N9, N21

LESSING, Juliane Marianne N21

LEWES, George Henry 903, 1130, N4

LIEBIG, Justus 1087, N9

LIEBNER, Karl Theodor Albert 793, N5

LINDNER, Christ. Albertine 1088-1089, N2, N4, N4

LINDNER, Dr. Ernst Otto 809, 811, 836, 839, 870, 881-882, 884, 887, 891, 894-895, 899-900, 902, 905, 907, 909, 923-924, 943-
944, 950, 956-957, 959, 967, 978-980, 986, 989, 994, 997-998, 1006, 1009-1010, 1033, 1047, 1053, 1057-1058, 1061,
1064, 1088, 1124, 1145, 1163, 1166, 1171, 1184, 1187, 1190-1191, 1196, 1205, 1213, 1232, 1252, 1254, N2, N2, N2, N2,
N2, N3, N3, N3, N3, N4, N4, N4, N4, N4, N5, N5, N5, N5, N5, N6, N7, N7, N9, N10, N11, N11, N12, N13, N16, N34

LINK, Heinrich Friedrich 787, N14

LIPPERT (commissaire-priseur) 880

LISZT, Franz von N24

LITTRÉ, Émile 1061, N5

LOCKE, John 1201

LOTHAIRE Ier (fils de Louis Ier le Pieux) N6

LOTTE, Charlotte BUFF, dite 810, N16

LOTZE, Hermann Rudolf 762, 861, N6

LOUIS Ier (roi de Bavière) N3, N10

LOUIS Ier LE PIEUX (empereur d’Occident) N6


LOUIS II (roi de Bavière) N7

LOUIS II DE GERMANIE (fils de Louis Ier le Pieux) N6

LOUIS III LE JEUNE (fils de Louis II de Germanie) N6

LOUIS LE PIEUX (empereur) 779

LÖWENSTEIN, Dr. E. N2

LÖW, F. 1116

LOWTZOW, Heinrich von 870, 881, 904, 979, 983, N2, N2, N3, N5, N7

LUC (évangéliste) 1001

LUCIE (chanteuse) 1084

LUNTESCHÜTZ, Jules 1003, 1013, 1026, 1029-1030, 1032, 1038, 1040, 1042, 1053, 1057, 1059, 1061, 1077, 1087-1088, 1105,
1110, 1133-1134, 1139-1140, 1142, 1147, 1179, 1187, 1191, 1199, 1212, N1, N1, N3, N4, N5, N7, N9, N22, N29

MAGENDIE, François 860, N9

MAILLARD, A. 1221, 1231, N3, N4

MAJER, Friedrich 784, N2, N6

MAKLOT : voir MACKLOT, Karl Friedrich

MALEBRANCHE, Nicolas 1019, 1070

MARGGRAFF, Hermann 1046, N5

MARIE DE BÉTHANIE (personnage biblique) 1001, N9

MARTHE DE BÉTHANIE (personnage biblique) 1001, N9

MARX, Karl N17

MAUPERTUIS, Pierre Louis Moreau de 932, 940, N1, N8, N8

MAXIMILIEN II (roi de Bavière) N11

MAYA (divinité) 809

MAYER, Dr. A. 755, 804, 808, 901-902, 905, 909, 1011, N24

MEDON, Caroline N2, N13, N15

MEISSNER, Alfred N6

MENDELSSOHN, Moses 796

MENGS, Anton Raphael 797

MENTOR (chien) 837, 844, 863, N12

MENZEL, Wolfgang (Menzels Literaturblatt) 805, 883-884, 886, 997, 1025, 1091, N4, N8

MÉPHISTOPHÉLÈS 869, 1001, 1225-1226, N1, N11

MERCK, E. 917, N7
MERKEL, Adolf N24

MERTENS-DEWALD, Wilhelm 775

MERTENS, Gustav 1242, N2

MERTENS, Louis (Ludwig) N2

MERTENS-SCHAAFFHAUSEN, Sibylle 766-767, 773-774, 776-779, 799-800, 805-806, 813, 821, 863, 889, 922, 940, 947, 954, 1012-
1013, 1131, 1167, 1242, N1, N1, N1, N1, N1, N1, N1, N2, N2, N2, N2, N2, N3, N3, N4, N8, N28

MÉTRODORE 757, 792, 932, N11

METTENHEIMER, Dr. Carl von N9

MEYERBEER, Giacomo 811

MEYER, Joseph (Meyers Konversations-Lexikon) 788, 791, 889, 907, 1122

MICHEL-ANGE, Michelangelo Buonarroti, dit 1244

MICHELET, Karl Ludwig 1021-1022, 1037, 1046, 1061, N3, N3, N5

MILLER, Dr. Bernhard N4

MITSCHERLICH, Eilhard N7

MOEVIUS 863-864

MOÏSE (prophète) 845, 1021

MOLESCHOTT, Jacob 872, 1010, 1017, 1063, 1080, N2, N4, N9, N23, N24, N25

MOLIÈRE, Jean-Baptiste POQUELIN, dit N4, N11

MONTAIGNE, Michel de 816

MONTÈS, Lola 756, N10

MONTGOMERY, Dr. Edmund N7

MONTON 1061, N4, N14

MOORE, George N7

MORATIN, Leandro Fernandez de 818, N11

MORE, Henry N3

MORELL, John Daniel 1131

MORIN, Frédéric 1139, N9

MORITZ, Karl Philipp 989, N3

MÖSER, Albert 1167, N1, N14

MOSSI, abbé 1131

MOZART, Wolfgang Amadeus 989, N4, N9, N10, N22

MULDER, Gerardus Johannes 872, N4

MÜLLER, Johannes 1141, 1152, N7, N10


MÜLLER, Ludwig 1157, N7

MÜLLER, Max 1098, 1115, N12

MÜLLER, Otto 1028

MUNK, Salomon N16

MÜTZELL, W. J. C. 1116

MYLIUS, Carl Friedrich 1133, 1142-1143, 1147, N2, N6

NAPOLÉON III (empereur des Français) 931

NEPTUNE (divinité) N11

NEUBÜRGER, Ludwig Ferdinand 1124, N3

NEUMANN, Carl Friedrich 994, 1051, N7, N11

NEUMANN, Friedrich Wilhelm N2

NEWTON, Isaac 940, 1041, 1056, 1130, 1141, 1146, 1149, 1151, N8

NEY, Élisabeth 1206, 1210, 1214-1215, 1217, 1219-1220, 1222, 1224, 1234-1235, 1237, 1241, 1244, 1251, 1253, 1255, 1257,
N1, N2, N2, N3, N4, N5, N5, N7

NEY, Johann Adam N5, N7

NOACK, Ludwig 879, 882-883, 885, 907, 910, 977, 985, 1072, 1080, 1211, 1215, 1217, N2, N3, N4, N4, N9, N12

NORDWALL, Adolf Leonard 1084, 1086-1087, N13, N16

OBRY, Jean-Baptiste-François 1112, N6

OEHLENSCHLÄGER, Adam Gottlieb 1243, N2

OEHMER, Wilhelm Theodor 999, N5

OELSNER-MONMERQUÉ, Gustav 794, 804, 812, 817, 962, N8, N16

OPHÉLIE (in Hamlet de W. Shakespeare) 876

OPITZ 1064

OPPELT, Johann Joseph 1004, N6

ØRSTED, Hans Christian 754-755, 762, 801, 850-851, N2, N4

OSTE-SACKEN, Friedrich von N2

OTTON Ier (empereur du Saint-Empire romain germanique) N6

OVIDE (Publius Ovidius Naso) N3, N10

OXENFORD, John 1092, 1128, 1231, N2, N4, N4, N27

PAJAZZO 980

PALLADII, Palladi Kafarov, archimandrite 1138, N5


PALMSTEDT, Carl N8

PASCAL, Blaise 1116

PASSAVANT, Dr. Johann Carl N21

PASSAVANT, Johann David 795, N3

PAUL DE TARSE (saint Paul) 959

PÉPIN Ier (fils de Louis Ier le Pieux) N6

PERNER, Ignaz 756, 827, N6

PERSE (Aulus Persius Flaccus) 1004, 1109, N5

PERTHES, BESSER & MAUK 1254

PÉTRARQUE (Francesco Petrarca) 975, 1248, N4

PFEIFFER, Franz 1139

PHELPS, Dr. 913

PHIDIAS (sculpteur) 1024

PHILALÈTHE (in Parerga et Paralipomena d’A. Schopenhauer) 802, N11

PHILIPPS, Georg P. N3, N5, N5, N12

PIC DE LA MIRANDOLE, Jean N3

PIERER, Johann Friedrich 1122, N21

PIER ou PIERSCHE : voir PIERER, Johann Friedrich

PIERRE (saint) 876

PLACIDUS : voir GRIMM, Carl

PLANCK, Carl Christian 797, 978, N7, N15

PLATEAU, Joseph A. F. N6

PLATON 783, 846, 874, 895, 1080, N2, N4, N8

PLAUTE (Titus Maccius Plautus) N5

PLINE L’ANCIEN (Caius Plinius Secundus) N8, N8

POGWISCH, Ulrike von 1243, N6

POMTOW, Dr. 988, 994, 996, 1006, 1010, 1052, N4

PONCE PILATE 770, N6

POPE, Alexander 1042

POSA, marquis de (in Don Carlos de F. von Schiller) 876

PRANTL, Carl von 878, N16

PRIESTLEY, Joseph 801, 850, N9


PROTOGÈNE N8

PROUDHON, Pierre Joseph 1149, N2, N10

PRUTZ, Robert 1021, 1030, 1067, 1075, 1089, 1173, 1253, N10

PÜCKLER-MUSKAU, Hermann Ludwig Heinrich Fürst von 836

PURKINJE, Johannes Evangelista 859, 996, N2, N5

QUANDT, Johann Gottlob von 834, 933, 1026, 1204, 1211, N4, N10

QUIN (comédien) N12

QUINTILIEN (Marcus Fabius Quintilianus) N3

RABENER, Gottlieb Wilhelm 1109

RADETSKY, Joseph, comte de 981, N8

RADIUS, Justus 784, 789

RAINER, Clemens 1224, N1, N2

RANCÉ, Armand Jean Le Bouthillier de 1139

RAPHAËL, Raffaelo SANZIO, dit N3

RATIBOR, Herzog von 817

RAUCH, Christian Daniel N2, N7, N11

RAUMER, Friedrich von 856, 1061, N6, N11, N18

RAUMER, Rudolf von 1009, N18

RAUSCHER, Jacob 947, N2

RECHENBERG, Fr. W. 912-914, N4

REDERN, Sigismund Ehrenreich, comte von 833

REGAZZONI, Antonio 983, 987-988, 993, 999, 1004, 1035, 1053, 1056, 1058, 1084, N4, N5, N8

REICHLIN-MELDEGG, Karl Alexander von 800, 850, 977, 980, 1031, 1053, N8, N12

REICKE, Rudolf 1253, N4

REIFF, Jacob Friedrich 797, 910, 978, N15

REINHOLD, Carl Leonhard 755, 914, N3, N6

REISER, Anton 989

RENAN, Ernest 1232, N3

REY DE MORANDA, A. J. 815, N1, N3

REYNAUD, Jean 1019, N6

RINGSEIS, Johann Nepomuk von 791, 861, 954, 1054, 1062, N7, N8, N15
RITTER, Heinrich 895-896, 910, 936, N4, N5

RITTER, Karl 1038, 1040, 1062-1064, 1067, 1124, N7

RIXNER, Thaddeus Anselm 1065


ROCHOW, Hans von N3

RÖDIGER, Georg Julius Ludwig Conrad 911, N8

RÖMER, Georg 818, 971, N10

ROSENKRANZ, Johann Karl Friedrich 756, 787, 910, 964, 966, 974, 977, 994, 1001, 1009, 1025, 1061, 1089, 1109, 1211, 1215,
1217, N2, N4, N4, N4, N5, N6, N7, N7, N8, N9, N9, N10, N10, N11, N12, N13, N14, N15, N16, N16, N19

ROSENTHAL, Friedrich Christian 859

ROSSINI, Gioachino 1088, N1, N3, N17

ROTH, K. de N4, N7

RUPP, Julius 1156, N4

SACHSE, L. 1057, 1061

SACHS, Senior N17

SATTLER, Dr. Eduard 1109, 1112, N3

SCHADOW, Johann Gottfried 791, 797, N9, N10, N11, N12

SCHÄFER, Johannes 1040, 1133, 1179, 1186, 1199, 1212, N4, N6, N9

SCHEEFFER 1141, 1151

SCHEER, Johannes N3

SCHEIDLER, Karl Hermann 1037, 1042, 1052, N4

SCHELLING, Friedrich Wilhelm Joseph von 833, 846, 877, 917, 928, 966, 977, 1032, 1045, 1071, 1087, 1092, 1097, 1100, 1127,
1143, 1191, 1197-1198, 1211, 1215, 1217, N2, N2, N3, N4, N4, N6, N6, N6, N7, N11, N13

SCHELLING, K. Fritz A. 1075, 1087, 1091, N6

SCHELLWIEN, Robert 1212, N2

SCHEMANN, Ludwig N1, N1, N1, N3

SCHENKEL, Daniel N2

SCHIFF, Dr. N8

SCHILLER, Friedrich von 876, 1018, N3, N4, N6, N8, N9, N10, N11

SCHINDLER, Heinrich Bruno 932

SCHLABBERNDORF (général) 787

SCHLEGEL, August Wilhelm von 1051, N4

SCHLEIDEN, Mathias Jacob 1061, N6, N7

SCHLEIERMACHER, Friedrich Ernst Daniel 772, N7, N8, N11

SCHLIEPHAKE, F. W. Th. 1025, N5

SCHLÖTEL, Wilhelm 984, N13


SCHLUITER 1108

SCHMIDT, Julian 1045, 1052, 1094, 1165, N3, N4, N17

SCHNEIDER 835

SCHOLL, Carl 917, N8

SCHOPENHAUER, Adèle (sœur) 766, 769, 776-777, 821, 836, 890, 1132, 1242-1243, N5

SCHOPENHAUER, Andreas (grand-père) N2

SCHOPENHAUER, Heinrich Floris (père) 783, 788, 1108

SCHOPENHAUER, Johanna Henriette TROSIENER, épouse (mère) 783, 788, 928, 1108, N1, N2, N3, N4, N21

SCHRAMEK, Camillo 1255, N1

SCHUBART : voir ENNEMOSER, Joseph

SCHUBERT, Friedrich Wilhelm N16, N19

SCHÜCKING, Levin 1046, N3

SCHULTZ, lieutenant 1000-1001, N4, N8

SCHULTZ-SCHULTZENSTEIN, Carl Heinrich 1028, N2

SCHULZE, Christoph Friedrich Ludwig 933

SCHULZE (dit Énésidème), Gottlob Ernst 783, 788, 1085

SCHULZ (libraire) 964

SCHÜTZ, Carl 936, 942, 1188, N1, N13, N16

SCHWARZ, Carl 1075, 1090, N7

SCHWEITZER, Johann Baptist von N10

SCHWENK, Conrad 910, N7

SCHWERD, prof. N8

SCHWETSCHKE, C. A. 793, N4, N5, N11, N13

SCOTT, Walter 1164

SEDERHOLM, Dr. Carl N7, N15

SEEBECK, Thomas Johann 1152, N1

SEIB, Johann Jacob 1133, N5, N8

SEINGUERLET, Eugène 1133-1134, 1139, 1144, 1149, N10

SEMPER, Gottfried 1067, N4

SÉNÈQUE (Lucius Annaeus Seneca) 932, N2

SENGLER, Jakob 810, 1170, N11, N19

SEYDEL, Georg Carl Rudolf 1101, 1105, 1110, 1112, 1116, 1118-1119, 1121, 1137, 1148-1149, 1156, 1165, 1188, N2, N2, N3,
N5, N6, N7, N11, N13
SEYERLEN, Rudolf 1127, N6

SHAKESPEARE, William 876, 953, 1007, 1127, 1240, N2, N4, N5, N7, N8, N13

SHELLEY, Percy Bysshe 857, N2

SIKIČ, Michael 1255, N1

SILAS, Ferdinand 939, N10

SMITH, William 892

SOCRATE 1231

SOERMANS, Anna Renata 1107, N3, N3

SOERMANS, Hendrik 1107-1108, N3

SOERMANS, Johann N8

SOERMANS, Martinus N8

SOLGER, Karl Wilhelm Ferdinand 877, N13

SOLLY, Thomas 1084, N2

SÖNKSEN, A. P. 1118

SOPHOCLE 876, N5

SPELTZ, Johannes August 774-775, N2

SPIESS, Dr. 1000

SPINOZA, Baruch 783, 930, 934, 1094, 1108

STAËL, Anne-Louise Germaine NECKER, baronne de Staël-Holstein, dite Madame de 1191, 1195, 1197, N5

STAHL, Friedrich Julius 953, N6, N6

STEIN, Dr. N14

STEINLE, Eduard N6

STERNE, Laurence N3

ST-GOAR, J. (librairie) 881

STIEBEL, Salomon Friedrich 1249, N1

STOCKMAR, von 772

STOLBERG, comtesse N10

SUCHSLAND, Friedrich Emil 750, 935, 959, 975-976, 1030, 1109, 1113, 1159-1160, 1176, 1178, 1226-1230, 1236, 1238, 1245,
1250, N2

SUÉTONE (Caius Suetonius Tranquillus) N5

SULZER, Jakob 1063-1064, 1124, N4, N6

TACITE (Publius Cornelius Tacitus) N5


TAILLANDIER, René, dit Saint-René 968, 1086, 1090, N3, N6, N7

TALLEYRAND, Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, dit 800

TANEFIKO, Rintei N3

TASSONI, Alessandro 998, N3

TÉRENCE (Publius Terentius Afer) N3, N5, N8

TERENTIANUS N7

THÉOPHRASTE 757, N11

THORWALDSEN, Bertel N29

TIECK, Ludwig N5

TIETZ, Anna Caroline 1132, N2

TIETZ, Carl Gottfried N2

TITE-LIVE (Titus Livius) N13

TRASYMACHE (in Parerga et Paralipomena d’A. Schopenhauer) 802, N11

TRENDELENBURG, Adolf Friedrich 1033, N5, N7

TRESKOW, Ada von N8

TSANG-LUN 809

TURNER, Samuel 1050

UHLE, Otto 1129

ULRICI, Hermann 984, 1061, N4, N6, N8

ULYSSE (personnage mythologique) N7

VARISCUS, Johannes Olorinus N21

VARNHAGEN VON ENSE, Karl August N7

VEIT, Philipp N3

VICTORIA (reine du Royaume-Uni) N7

VIRGILE (Publius Vergilius Maro) N8, N9, N11, N13, N15

VOGT, Carl 1000, 1004, 1028, 1035, N3, N6, N7, N25

VOIGTEL, Max 1020, 1023, 1045, N4, N12

VOIGTLÄNDER, J. A. Chr. 797, 800-801, N5, N15

VOLKMANN, Alfred Wilhelm 860-861

VOLTAIRE, François Marie Arouet, dit 791, 795, 876, 940, 1042, 1074, 1092, 1094, 1148, 1170, N8, N8

VOSS, tante 881, 904, 1170, 1205, 1214, 1246


WÄCHTER, Oskar 1176, N2

WAGNER, Gustav Friedrich N1, N3

WAGNER, Johann Philipp 939, 942, N9

WAGNER, Richard 957, 959, 991, 993, 1023, N1, N2, N3, N5, N7, N9

WAGNER, Rudolph 855, 860-861, 1000, 1028, N3, N6, N8

WAITZ, Theodor 762, 765-766, N7

WALDHAUSEN, Tobias Wildauer, chevalier de N6

WALD, Samuel Gottlieb 1253

WALLENSTEIN 987

WARNKÖNIG, Leopold August 1023, N13

WEBER, Albrecht 1073, N20

WEBER, Beda 980, 987, 994, 1142-1143, N7, N8

WEBER, Ernst Heinrich 856, N8

WEIGEL (libraire) 1128

WEIGELT, Georg Christian 938, 941-942, 944, 947, 950, 954, 956, 958-961, 984, 1024-1025, 1029, 1033, 1058, 1064, 1095,
1103, N2, N2, N3, N3, N5, N6, N7, N9, N9, N11

WEILL, Alexandre 1145, 1191, N2, N3, N3

WEISSE, Christian Hermann 1016, 1025, 1043, 1074, 1080, 1083, 1092, 1097, 1100-1101, 1127, 1157, 1188, 1191, N2, N3, N4,
N6, N6, N9

WEISSENBORN, Georg Fr. Ludwig W. 968, N21

WEISS, Otto N5

WERNER, Moritz N8, N21

WERNER, Zacharias 928, N2, N4

WESTERMANN 1176

WHEWELL, William N3

WICHMANN, Ludwig Wilhelm 791, N9

WIDMARK, Elof N8

WIESIKE, Carl Ferdinand 976, 1020, 1026, 1028-1029, 1040, 1042, 1053, 1084, 1133, 1135-1136, 1138, N2, N3, N3, N4, N4, N5,
N5, N8, N10

WILDE 1080

WILDT, L. (lithographe) N1, N7

WILLE, Dr. Franz Arnold 1191, 1196, N5, N9, N13


WILLE, Eliza N9

WILSON, Horace Hayman 1189, N3

WIRTH, Johann Ulrich 1019, N4, N6, N8

WOLFF, Dr. 1141, 1146, 1151

YOUNG, Edward 1011, 1061, N4, N27

ZEISING, Adolf 1094, N19

ZÉNON D’ÉLÉE 760

ZIMMERMANN, Robert 1149, N6, N8

ZINGERLE : voir SEINGUERLET, Eugène


© Éditions Gallimard, 2017.

Couverture : Illustration Samuel Avequin


d’après une photo d’Arthur Schopenhauer par J. Schäfer.
Wikimedia Commons.

Éditions Gallimard
5 rue Gaston-Gallimard
75328 Paris
http://www.gallimard.fr
Arthur Schopenhauer
Lettres, II
Traduction de l’allemand par Christian Sommer révisée par Natacha Boulet
Édition établie et annotée par Arthur Hübscher
L’œuvre de Schopenhauer reste en France encore largement méconnue. Disséminée en de
multiples opuscules de philosophie digeste et d’aphorismes divertissants, elle a ainsi vu son unité
malmenée au gré des publications tronquées. La parution d’une traduction inédite du Monde
comme volonté et représentation dans cette même collection (Folio Essais n 522 et 523) a déjà
os

offert l’occasion de reporter l’attention sur l’entreprise proprement philosophique de


Schopenhauer, sur l’intention fondatrice qui unit tous ces développements éparpillés au gré des
découpages éditoriaux.
Les Lettres qui vont de 1803 à quelques semaines avant sa mort en 1860 permettent de mettre en
perspective les écrits de Schopenhauer, l’unité de son œuvre forgée au cours des années, mais
aussi les incompréhensions auxquelles il s’est heurté, les malentendus qu’il a dû dissiper. Au fil
des ans s’observe la diversité des thèmes et des correspondants à proportion de la gloire et de
l’influence ascendante du maître de Nietzsche, particulièrement sur ces disciples qu’il ne craint
pas d’appeler ses « apôtres » et ses « évangélistes ».
Cette édition électronique du livre
Lettres - tome II d’Arthur Schopenhauer
a été réalisée le 27 novembre 2017 par les Éditions Gallimard.
Elle repose sur l’édition papier du même ouvrage
(ISBN : 9782072747564 - Numéro d’édition : 323569).
Code Sodis : N91648 - ISBN : 9782072747588.
Numéro d’édition : 323571.

Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo

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