Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
ÉCOLE POLYTECHNIQUE –
(iii) Un produit scalaire est une forme bilinéaire, symétrique, définie, positive.
Rappel : un produit scalaire surPun R-espace vectoriel de dimension finie, peut toujours
s’écrire sous la forme hx, y i := N
j=1 xj yj , où (x1 , . . . , xN ) sont les coordonnées de x dans une
base adaptée. Quand la base en question est la base canonique sur Rd , on parle de produit
scalaire standard ou canonique.
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 3 / 42
Exemples de produits scalaires réels
Exemples.
1. Sur MN (R), on peut définir le produit scalaire hA, Bi := Trace (AB t ).
∞
X
`2 (N; R) | xn2 |< +∞},
P
2. Sur = {séries x = n∈N xn de carré sommable, i.e. telles que
X n=0
on peut définir le produit scalaire hx, yi`2 := xn yn .
n∈N
3. Pour tout ouvert
Z non vide Ω ⊂ RN , on peut définir sur L2 (Ω; R) le produit scalaire
hf , g iL2 := f (x) g (x) dx.
Ω
Définition
Une application h·, ·i : E × E → C est une forme sesquilinéaire si l’application linéaire partielle
x 7→ hx, y i est linéaire et si l’autre y 7→ hx, y i est anti-linéaire.
(i) Elle est dite symétrique hermitienne si hx, y i = hy , xi pour tous x, y ∈ E . Si tel est le
cas, hx, xi ∈ R pour tout x ∈ E .
(ii) Elle est dite définie positive si
hx, xi > 0 pour tout x ∈ E et si (hx, xi = 0 ⇔ x = 0).
(iii) Un produit (scalaire) hermitien est une forme sesquilinéaire, symétrique hermitienne,
définie, positive.
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 5 / 42
Exemples
Définition
Soit h·, ·i un produit scalaire hermitien sur E . On définit sur E la norme associée à h·, ·i par
p
kxk := hx, xi.
6 kxk2 + 2 kxk ky k + ky k2
6 (kxk + ky k)2 ,
ce qui démontre l’inégalité triangulaire. Les autres axiomes de norme sont faciles à vérifer.
Définition
On appelle espace préhilbertien un C-espace vectoriel muni d’un produit hermitien h·, ·i et de
la norme associée k · k. Un espace préhilbertien peut être muni d’une structure d’espace
métrique pour la distance
d(x, y ) := kx − y k.
Proposition
Soit E un C-espace vectoriel préhilbertien et soient x, y ∈ E . Alors on dispose des énoncés
suivants.
(i) Théorème de Pythagore : < hx, y i = 0 ⇔ kx + y k2 = kxk2 + ky k2 .
(ii) Identité du parallélogramme : kx + y k2 + kx − y k2 = 2 kxk2 + ky k2 .
kx + y k2 − kx − y k2 kx + iy k2 − kx − iy k2
(iii) Formule de polarisation : hx, y i = +i .
4 4
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 9 / 42
Vecteurs orthogonaux et perpendiculaires
Attention : dans un C-espace vectoriel préhilbertien, l’égalité
kx + y k2 = kxk2 + ky k2
Définition
On dit que x et y sont orthogonaux si hx, y i = 0 et on dit que x et y sont perpendiculaires si
< hx, y i = 0.
Remarque : dans le cas des espaces préhilbertiens réels ces deux notions coı̈ncident, mais dans
un C-espace vectoriel préhilbertien, x et ix sont perpendiculaires puisque
Définition
On dit qu’un espace préhilbertien H, muni de la norme k · k associée au produit hermitien
h·, ·i, est un espace de Hilbert si (H, k · k) est un espace vectoriel normé complet.
Exemples.
1. L’espace CN , muni du produit hermitien hx, y i := N
P
j=1 xj ȳj , est un espace de Hilbert.
Plus généralement, tout espace préhilbertien de dimension finie est un espace de Hilbert.
2. Tout sous-espace vectoriel fermé d’un espace de Hilbert est lui-même un espace de
Hilbert (muni de la restriction du produit hermitien).
Attention : dans les espaces vectoriels normés de dimension infinie, il existe des sous-espaces
qui ne sont pas fermés (typiquement : des espaces de suites ou de fonctions à support fini ou
compact, dans des espaces définis par une condition de sommabilité ou d’intégrabilité).
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 11 / 42
Exemples et non-exemples d’espaces de Hilbert
N
X 1/p
Non-exemple : Si N > 2 et p > 1 l’espace CN , muni de la norme kxkp := |xj |p , est
j=1
un espace de Banach ; mais ce n’est pas un espace de Hilbert dès que p 6= 2.
En effet, prenons x = (1, 0, . . . , 0) et y = (0, 1, . . . , 0). Alors kx + y k2p + kx − y k2p = 2 22/p et
2 kxk2p + ky k2p = 4. L’égalité du parallélogramme est donc vérifiée seulement quand p = 2.
Exemple : l’espace `2 (N; C) des suites complexes x := (xn )n>0 telles que
X
|xn |2 < +∞,
n∈N
X
muni du produit hermitien hx, yi`2 := xn yn , est un espace de Hilbert.
n∈N
Remarque : par le cours précédent Cc (Ω; C) est un sous-espace dense dans L2 (Ω; C) ; il n’est
donc pas un sous-espace fermé de L2 (Ω; C) puisqu’il en est distinct.
Exemple : soit Ω un ouvert borné non vide. On note L20 (Ω; C) l’espace des fonctions de
L2 (Ω; C) qui sont de moyenne nulle i.e.
Z
2 2
f ∈ L0 (Ω; C) si f ∈ L (Ω; C) et si f (x) dx = 0.
Ω
Alors, L20 (Ω; C) est un sous-espace fermé de L2 (Ω; C) et en particulier, L20 (Ω; C), muni du
produit hermitien h·, ·iL2 est un espace de Hilbert.
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 13 / 42
Espaces de Hilbert de fonctions de carré sommable, preuve
Preuve. L’inégalité de Cauchy-Schwarz implique :
Z Z 1/2
1/2 2
f (t) dt 6 |Ω| |f (t)| dt = |Ω|1/2 kf kL2 (Ω) .
Ω Ω
En particulier, l’application
Z
L2 (Ω; C) 3 f 7→ f (t) dt ∈ C,
Ω
est bien définie, linéaire et elle est lipschitzienne, donc elle est continue. L’espace L20 (Ω; C) est
donc un fermé au titre d’image réciproque du fermé {0} par une application continue.
Remarque : dans la situation précédente, on peut aussi voir L20 (Ω; C) comme l’orthogonal des
(classes de) fonctions constantes. Si au contraire Ω est de mesure de Lebesgue infinie, les
fonctions constantes ne sont pas de carré intégrable.
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 14 / 42
Isomorphismes d’espaces de Hilbert
Définition
Soient H1 , H2 des espaces de Hilbert et soit L : H1 → H2 une application linéaire. On dit que L
est un isomorphisme d’espaces de Hilbert si les deux propriétés suivantes sont vérifiées :
(i) l’application L est bijective.
(ii) l’application L est une isométrie, i.e. kL(x)kH2 = kxkH1 pour tout x ∈ H1 .
préserve la norme, mais n’est pas un isomorphisme d’espaces de Hilbert (car elle n’est pas
surjective).
Définition
Soit H un espace de Hilbert et h·, ·i le produit hermitien sur H. Si F est un sous-espace
vectoriel de H, on définit l’orthogonal de F par
n o
F ⊥ := x ∈ H : ∀y ∈ F , hx, y i = 0 .
Proposition
Soit F un sous-espace vectoriel de H, alors :
(i) le sous-espace vectoriel F ⊥ est fermé ;
(ii) si G est un sous-espace vectoriel et si G ⊂ F , alors F ⊥ ⊂ G ⊥ ;
(iii) on a : F ⊥ = (F )⊥ .
Preuve. Soit (xn )n>0 une suite de F ⊥ qui converge vers x ∈ H. Alors, pour tout y ∈ F
l’inégalité de Cauchy-Schwarz appliquée à hx − xn , y i implique qu’on a :
donc x ∈ F ⊥ .
Alors
hx, y i = lim hx, yn i = 0.
n→+∞
Donc x ∈ (F )⊥ .
Définition
L’espace vectoriel H 0 := L(H; C) des formes linéaires continues définies sur H est appelé le
dual topologique de H (pour le distinguer de l’espace de toutes les formes linéaires L(H; C)).
L’espace H 0 , muni de la norme définie par kukH 0 := supkxk61 |u(x)|, est un espace de Banach
(conséquence d’un résultat plus général vu dans le cours sur la complétude). On verra :
Proposition
Le dual topologique d’un espace de Hilbert est naturellement un espace de Hilbert.
Remarque : ce qu’il reste à voir est le fait que la norme ci-dessus est associée à un produit
scalaire hermitien ; ce sera une conséquence du théorème de représentation de Riesz.
Le résultat est important car c’est (entre autres) un énoncé d’existence (et d’unicité et
caractérisation métrique).
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 20 / 42
Théorème de la projection sur un convexe fermé
Théorème (projection sur un convexe fermé)
Soit H un espace de Hilbert et C un sous-ensemble convexe fermé de H. Pour tout x ∈ H, il
existe un unique y ∈ C tel que
Si x ∈ C alors y = x ; si x ∈
/ C , alors y est caractérisé par
< hx − y , z − y i 6 0, ∀z ∈ C .
avec a = x − ym et b = x − yn . On trouve
k2x − yn − ym k2 + kyn − ym k2 = 2 (kx − ym k2 + kx − yn k2 ).
Donc
2
yn + ym
kyn − ym k2 = 2 (kx − ym k2 + kx − ym k2 ) − 4 x −
2
2 2 2
6 2(kx − ym k + kx − yn k ) − 4 d(x, C ) .
Ainsi (yn )n>0 est une suite de Cauchy dans H (qui est complet) ; elle converge donc, disons
vers y ∈ H, et comme C est fermé on a y ∈ C .
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 22 / 42
Théorème de la projection sur un convexe fermé, preuve (fin)
Unicité. Si kx − y1 k = kx − y2 k = d(x, C ), on peut écrire
y1 +y2 2
ky1 − y2 k2 = 2 ky1 − xk2 + ky2 − xk2 − 4 x −
2
6 4 d(x, C )2 − 4 d(x, C )2 = 0,
donc y1 = y2 .
De plus :
(i) PF (x) est l’unique élément de F vérifiant cette égalité.
(ii) x − PF (x) est orthogonal à tout vecteur de F .
(iii) PF est 1-lipschitzienne (donc continue), i.e.
< hx − y , z − y i 6 0,
Corollaire
Si F est un sous-espace fermé de H, alors
H = F ⊕ F⊥ et (F ⊥ )⊥ = F .
Lemme
Avec la définition ci-dessus, Λa ∈ H 0 et kΛa kH 0 = kakH .
Preuve. On a |Λa (x)| = |hx, ai| 6 kak kxk (inégalité de Cauchy-Schwarz) donc
kΛa kH 0 := sup |Λa (x)| 6 kak.
kxk61
Remarque : réciproquement en dimension finie, on sait que si u est une forme linéaire sur RN ,
il existe y ∈ RN tel que u(x) = x · y , où · désigne le produit scalaire euclidien.
Le théorème qui suit est une vaste généralisation de la remarque au cas des espaces de Hilbert.
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 27 / 42
Théorème de représentation de Riesz
Théorème (théorème de représentation de Riesz)
Soit H un espace de Hilbert et u ∈ H 0 une forme linéaire continue sur H. Alors, il existe un
unique a ∈ H tel que,
∀x ∈ H, u(x) = Λa (x).
De plus, l’application a 7→ Λa définie de H dans H 0 , est un isomorphisme anti-linéaire
isométrique.
Exemple : toute forme linéaire continue définie sur L2 (R; C) est de la forme
Z
f 7→ f (t) g (t) dt
R
où u = Λa et v = Λb .
u(x) = 1 et u ≡ 0 sur F.
⊥
Preuve. On note G := F ⊥ = F et on décompose : x = PG (x) + x − PG (x) , où
Autrement dit, pour vérifier qu’un sous-espace F est dense de H, il suffit de vérifier que
∀a ∈ H, (hx, ai = 0, ∀x ∈ F ) ⇒ a = 0.
Preuve. Si F est dense, alors F̄ = H et F⊥ = F̄ ⊥
= {0}. Inversement, si F n’est pas dense, il
0
existe u ∈ H , u 6= 0 telle que u(x) = 0 pour tout x ∈ F . Il existe a ∈ H, a 6= 0 tel que u = Λa .
Alors hx, ai = 0 pour tout x ∈ F et a 6= 0. Donc F ⊥ 6= {0}.
Exemple : Soit `c (N; C) l’ensemble des suites de `2 (N; C) qui sont nulles à partir d’un
certain rang. On note en ∈ `c (N; C) la suite dont tous les termes sont nuls sauf le n-ième qui
est égal à 1. Si a = (an )n>0 est orthogonale à tous les élements de `c (N; C), on a
ha, en i`2 = an = 0,
donc a = 0. Conclusion, `c (N; C) est dense dans `2 (N; C).
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 31 / 42
Théorème de Riesz pour les formes sesquilinéaires
Preuve. Soit y ∈ H. La forme linéaire x 7→ Φ(x, y ) est continue, donc par le théorème de
représentation de Riesz il existe un unique ay ∈ H tel que Φ(x, y ) = hx, ay i pour tout x.
Vérifions que l’application A : H → H définie par A(y ) := ay est linéaire et continue.
Par hypothèse
kA(y )k2 = hA(y ), A(y )i = Φ(A(y ), y ) 6 C ky k kA(y )k.
Donc
kA(y )k 6 C ky k,
ce qui montre la continuité de A.
Définition
Soit (en )n>0 une famille dénombrable d’un espace de Hilbert H. On dit que la famille (en )n>0
est une base hilbertienne si :
(i) pour tous n 6= m on a hen , em i = 0, et ken k = 1 pour tout n ∈ N ;
(ii) l’espace vectoriel Vect {en : n ∈ N} des combinaisons linéaires finies des vecteurs en ,
pour n ∈ N, est dense dans H
Attention : une base hilbertienne n’est pas une base algébrique car pour une base algébrique,
tout élément de l’espace est combinaison linéaire finie d’éléments de la base.
Théorème
Soit (en )n>0 une base hilbertienne d’un espace de Hilbert H. Tout x ∈ H s’écrit de manière
unique comme la somme d’une série convergente dans H
X
x= xn en où xn := hx, en i ∈ C.
n>0
n 2 n
X X X
2
On suppose maintenant que |xn | < +∞. Par Pythagore, on a xk ek = |xk |2 .
n>0 k=m k=m
n
X
En particulier, la suite xk ek n>0
est une suite de Cauchy dans H, donc elle converge.
k=0
Lemme
+∞
X
Soit (en )n>0 une famille orthonormale de vecteurs de H et x ∈ H. Alors hx, en i en , est la
n=0
projection orthogonale de x sur F , l’adhérence du sous-espace vectoriel F engendré par les
vecteurs en .
La famille (en )n∈Z où en (t) := e int est une famille orthonormée de L2 (S 1 ; C).
Par Stone-Weierstrass, les combinaisons linéaires des en sont denses dans C(S 1 ; C) pour la
norme de la convergence uniforme, qui lui-même est dense dans L2 (S 1 ; C), pour la
norme k · kL2 .
Définition
On dit qu’un espace de Hilbert H est séparable, s’il existe un sous-ensemble de H qui est à la
fois dénombrable et dense.
Théorème
Tout espace de Hilbert séparable possède une base hilbertienne.
Remarque : si H possède une base hilbertienne (en )n>0 , alors H est séparable.
Preuve. Considérer le Q-espace vectoriel engendré par les en , pour n ∈ N.
Remarque : Tous les espaces considérés dans ce cours sont séparables : `2 (N; C), L2 (R; C),
L2 ([a, b]; C), . . . sont des espaces de Hilbert séparables.
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 41 / 42
Espaces de Hilbert séparables
Corollaire
Tous les espaces de Hilbert séparables de dimension infinie sont isomorphes entre eux.
Preuve. Soit (en )n>0 une base hilbertienne de H. Pour tout x := (xn )n>0 ∈ `2 (N; C), on note
X
L(x) := xn en ∈ H.
n>0
Alors L : `2 (N; C) → H est linéaire et kL(x)k = kxk (Parseval). Donc L est continue et
injective ; elle est surjective par définition d’une base hilbertienne.
Proposition
Un sous-espace fermé d’un espace de Hilbert séparable est séparable.
Preuve. Soit X = {xn : n > 0} un ensemble dénombrable et dense dans H. Puisque PF est
1-lipschitzienne, pour tout y ∈ F , on a : kPF (xn ) − y k = kPF (xn ) − PF (y )k 6 kxn − y k. Ainsi
PF (X ) est dense dans F .
Cours 7 : Espaces de Hilbert Bertrand Rémy 42 / 42