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agriculture durable dans les parcs nationaux

vers une
transition
agroécologique
Vers une transition agroécologique
dans les Parcs nationaux d’Algérie
projet d’appui aux communautés paysannes
des parcs nationaux / 2019
Ont contribué à la rédaction :
acppAchour Mohamed : arboriculteur, maraîcher, producteur au marché paysan de Torba
Arfa Abdelmajid : maraîcher- jardinier, fils de céréaliculteur, trésorier de Torba
Beghoul Adila : biologiste, formatrice et animatrice à Torba
Belaïd Djamel : ingénieur agronome et animateur d’un blog dédié à l’agriculture algérienne
Kethiri Karim : maraîcher-jardinier, responsable des Jardins partagés de Torba
Rahal Karim : vétérinaire, coordinateur des formations et président de Torba

Conception graphique et mise en page : Dahou Abdallah, Arak Communication


Crédit photos : Torba / AREA-ED

L’association TORBA contribue à sensibiliser le consommateur algérien à vivre dans le respect de la


terre, de la nature et de l’environnement. Parmi ses objectifs :
• Promotion de l’agriculture urbaine (depuis 2014, plus de 700 citoyennes et citoyens ont suivi une
session de formation)
• Pratique de la permaculture en jardins partagés (une centaine d’adhérents disposent d’une petite
parcelle de jardin dans 3 sites différents autour d’Alger)
• Consommer sain en participant au maintien de l’activité paysanne (une centaine d’adhérents
bénéficient d’un couffin hebdomadaire de produits agroécologiques, sans compter le lancement
d’un marché paysan ouvert au grand public)

facebook : Collectif Torba


www.agroecologie-algerie.org

«La présente publication a été élaborée avec l’aide de l’Union européenne.


Le contenu de la publication relève de la seule responsabilité de l’Association Torba
et ne peut aucunement être considéré comme reflétant le point de vue de l’Union
européenne.»
3

Sommaire
L’association TORBA contribue à sen- Présentation................................................................................................03
sibiliser le consommateur algérien à Sommaire.....................................................................................................03
vivre dans le respect de la terre, de la Préface..........................................................................................................04
nature et de l’environnement. Parmi
ses objectifs :
• Promotion de l’agriculture urbaine (depuis Partie 1. Introduction à l’agroécologie.............................................................. 05
2014, plus de 700 citoyennes et citoyens Qu’est-ce que le design en permaculture ?............................................06
ont été formés à l’agroécologie)
• Pratique de la permaculture en jardins par- Partie 2. Techniques agroécologiques.................................................................07
tagés (une centaine d’adhérents disposent Sol vivant.....................................................................................................07
d’une petite parcelle de jardin dans trois Gestion de la production agroécologique.............................................08
sites différents autour d’Alger) Semences paysannes..................................................................................10
• Consommer sain en participant au maintien Gestion optimisée de l’eau.......................................................................11
de l’activité paysanne (une centaine d’adhé- La santé des plantes....................................................................................13
rents bénéficient d’un couffin hebdomadaire Notions d’agroforesterie...........................................................................16
de produits agroécologiques, sans compter L’animal rustique, fidèle ami de la ferme..............................................19
le lancement d’un marché paysan ouvert au
grand public).
Dans le présent projet d’Appui aux Commu- Partie 3. Diversification économique dans la ferme.........................................21
nautés paysannes des Parcs nationaux Transformation des produits agricoles..................................................21
(ACPP), Torba a eu à diffuser, à quelque 200 La commercialisation en agroécologie..................................................22
paysannes et paysans, les grands principes Conclusion..................................................................................................25
de l’agroécologie et de la diversification des Références....................................................................................................26
activités (écotourisme, transformation…).
Puis une sélection de 60 agriculteurs/agricul-
trices a bénéficié d’une formation de terrain Cette brochure est parue en juin 2020
dans des fermes locales (avec démonstrations
de techniques sur place). Notre démarche a
consisté à proposer une intensification de la
production agroécologique et un développe-
ment de nouveaux marchés. Des rencontres
d’échanges d’expériences ont été organisées,
notamment par la visite d’une ferme agroéco-
logique au Parc national de Chréa, qui com- facebook : Collectif Torba facebook.com/AREAED/
Torba

area-ed

mercialise ses produits dans le circuit court web : www.agroecologie-algerie.org facebook.com/ACPP2018/


Tafas Ouled fayet.
4

Préface

C
ette publication tombe à un mo- nique; tirés par les bêtes, très maniables
ment où les sociétés humaines se et faciles à réparer. Ces principes, ces sa-
posent des questions cruciales: voirs et savoir-faire, fruits d’expériences
quand surviennent des crises séculaires ont été déployés par ces socié-
imprévues comme la pandémie du co- tés paysannes qui ont su forger le socle
ronavirus actuelle et une rupture des d’une agriculture durable.
approvisionnements, comment assurer Cette brochure est rafraichissante car
la sécurité alimentaire des ménages ou elle remet en perspective ces pratiques
Omar Bessaoud des territoires ? Comment produire une éprouvées ; elle réhabilite, à la lumière
Économiste agricole alimentation saine et durable adaptée de l’agroécologie moderne, des modes
aux besoins des populations ? Com- de gestion des productions agricoles,
ment protéger notre environnement et des prophylaxies et traitements des
Nos ancêtres conserver les habitats naturels, la biodi-
versité et les ressources naturelles dont
plantes, des associations (agroforesterie
et élevage), des modes de valorisation
nous ont légué nous disposons ? Comment employer et de transformation des produits et de
des systèmes plus d’hommes et de femmes dans l’ac- commercialisation (marchés paysans,
agricoles tivité économique afin de pérenniser les
revenus des familles ?
souks…), caractéristiques de la robus-
tesse de ces agricultures de montagnes.
relativement La crise sanitaire que nous traversons Nos ancêtres ont laissé en héritage des
durables, mais nous invite en effet, aujourd’hui plus systèmes agricoles relativement du-
que jamais, à repenser nos approches et rables, mais qui restent fragiles face à la
qui restent représentations des pratiques agricoles, mondialisation des marchés et à la libé-
fragiles et à renouer à la lumière des acquis scien- ralisation des politiques publiques.
tifiques de l’agroécologie, notamment Les règles évoquées ici invitent le pu-
en zones de montagne. Ces espaces blic intéressé par l’activité agricole à re-
stratégiques pour l’Algérie, densément mettre sur l’ouvrage les processus d’ap-
habités, ont été à la fois des lieux de vie, prentissage, d’expérimentation et de
de résistance, d’expression identitaire et vulgarisation et contribuent à repenser
politique. nos liens avec l’environnement, et nos
Intensément exploités dans certaines interactions avec le vivant.
régions, les champs étaient, par le passé, Il est temps de redonner à l’agriculture
cultivés avec des techniques culturales de montagne les moyens de son déve-
perfectionnées ; les montagnards uti- loppement, dans une approche mul-
lisaient avec précaution le sol et l’eaux tisectorielle, valorisant nos ressources
disponibles. Il convient enfin de signaler naturelles mal exploitées, avec l’aide
la simplicité des instruments aratoires : d’une paysannerie et de ménages ruraux
instruments rudimentaires, mais com- maîtrisant leurs terroirs, disposant de
bien adaptés au relief et au niveau tech- précieux savoirs et savoirs-faire.
5

INTRODUCTION À L’AGROÉCOLOGIE

C
L’agroécologie est le carrefour entre Écologie et Agriculture, ’est un modèle alternatif, qui
mais elle ne se résume pas qu’à des pratiques culturales res- prône le développement local,
pectueuses de l’environnement et de la santé humaine. l’intégration de l’homme dans
son environnement et le retour
à la Nature comme source de richesse
durable. Plus concrètement, on parle
d’agroécologie pour toute ferme
paysanne de petite taille qui vise l’au-
tonomie, c’est-à-dire qui minimise
les intrants et qui commercialise
ses produits au niveau local (circuit
court). Ces fermes existent encore
dans nos montagnes, mais force est de
reconnaître qu’elles ont pratiquement
toutes perturbé leur écosystème natu-
rel par l’introduction de techniques
agricoles conventionnelles (monocul-
ture, produits chimiques de synthèse,
semences importées)...
La production agroécologique n’a pas
encore un label pour les produits frais
et en petites quantités, elle n’obéit pas
à un cahier des charges strict comme
l’agriculture biologique certifiée. Le
label pourra concerner à l’avenir plus
les productions transformées, conser-
vées et produites en grandes quantités,
par une coopérative de producteurs
par exemple (fruits secs, huile d’olive,
miel…).
L’approche agroécologique obéit à des
critères simples et ne demandant pas
beaucoup d’investissements, puisqu’il
s’agit de faire comme la Nature.
6
Dix critères peuvent résumer toute vie (herbicides, fongicides, la couverture du sol et les
ferme agroécologique1 : insecticides, pesticides) et sans aménagements.
• Un modèle économique à taille labour profond. • Agroforesterie : replacer l’arbre au
humaine : commencer petit, et • Biodiversité : favorise les cœur de toute agriculture.
progresser jusqu’à une « taille mécanismes de régulation • Animaux d’élevage : font partie de
optimale » qui autorise un naturelle des agrosystèmes par l’écosystème, et sont sources de
revenu convenable au fermier, l’amélioration des conditions revenus complémentaires à la
sans aller jusqu’à bouleverser permettant d’augmenter la ferme (lait, viande, laine, miel,
l’environnement. diversité dans la ferme. fumier…).
• Commercialisation de proximité : • Santé des plantes : repose sur
les circuits courts permettent de la gestion des équilibres des Dans la Partie II seront présentées les
restaurer un lien social entre les populations d’agresseurs, avec des techniques agroécologiques simpli-
consommateurs et les producteurs. mesures préventives plutôt que sur fiées qui ont été abordées lors des
• Valorisation par la transformation leur éradication. sessions de formation / vulgarisation
des produits : peut donner de la • Semences : l’utilisation de semences avec plus de 60 familles paysannes
valeur ajoutée à un produit brut et paysannes reproductibles est le des Parcs nationaux de Tlemcen,
aller vers la labellisation. premier pas vers l’autonomie et la Djurdjura et Babors-Tababort. Ces
souveraineté alimentaire. techniques qui concilient producti-
• Un sol vivant : respecte la vie du vité et gestion durable des ressources
sol, sans engrais chimiques ni • Gestion optimisée de l’eau : par de sont, pour la plupart, connues des
produits qui détruisent cette meilleurs rétention et stockage de paysans de l’ancienne génération,
l’eau de pluie à travers l’humus, mais ont malheureusement tendance
1. https://terre-humanisme.org/association/ à disparaître de nos jours.
agroecologie/

Qu’est-ce que le Design en Permaculture ?


La permaculture est une discipline très semblable à Le design va tenir compte de l’orientation des parcelles
l’agroécologie, dans son approche d’imitation de la na- par rapport au soleil et aux vents dominants, par rapport
ture, et particulièrement la forêt en tant qu’écosystème aux pentes, en faisant que tous ces éléments soient en
autonome. Elle mettrait peut-être plus l’accent sur un synergie. Il doit intéresser la disposition des cultures, les
travail en amont, de réflexion et d’observation, sur com- zones de transition telles que les haies et arbres, en veil-
ment optimiser et aménager la ferme. lant à optimiser, non seulement l’esthétique, mais aussi la
Un bon design en permaculture permet d’aboutir à un fonction, avec le minimum d’intervention et d’intrants.
ensemble de solutions qui enrichissent l’écosystème et Les éléments doivent avoir le maximum d’interactions
le rendent plus résilient, plus productif et plus à même entre eux. Chaque élément assure plusieurs fonctions et
de satisfaire durablement les besoins, et ce, au prix d’un chaque fonction doit être assurée par plusieurs éléments.
moindre effort et d’une moindre dépense d’énergie. Ce Les animateurs Torba initient et accompagnent les por-
travail de design est primordial lors de la conception teurs de projets à cette approche de la permaculture.
d’une ferme, pour quelqu’un qui veut s’installer, mais il
peut être appliqué à une ferme déjà existante.
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Les TECHNIQUES AGROÉCOLOGIQUES

Le sol vivant


L’agroécologie vise à augmenter la
vie du sol, en augmentant son taux
de matière organique, en évitant tout
intrant chimique et en diminuant les
labours. Ces techniques simples per-
mettent aux êtres vivants de se nour-
rir de matière organique, qui pro-
vient des déchets végétaux (feuilles,
racines…) et animaux (insectes, mi-
cro-faune…).

Pour entretenir
la vie du sol
• Éviter le labour profond, qui
retourne le sol et perturbe sa vie,
jusqu’à provoquer à la longue une
diminution son taux de matière
organique.
• Maintenir le sol couvert toute Paillage d’une parcelle de maraîchage en association avec des arbres fruitiers, chez Zineb (Rabat)

l’année. Sur petite surface, • retourner le tas de compost tous


paillage sur 20 cm d’épaisseur. Le compostage à la les 15 jours (au moins 2 ou 3 fois)
Sur de plus grandes surfaces, ferme • humidifier suffisamment (tas ni
on peut laisser pousser l’herbe, trop sec, ni trop humide). Garder
La matière organique est un élément
ou bien semer un engrais vert, à l’abri du soleil et de la pluie.
essentiel à la fertilité et la vie des sols.
qu’on enfouira superficiellement • Assurer un équilibre entre
C’est un fertilisant naturel fabriqué
par un passage de disques. Il est carbone et azote, en recyclant des
à partir de déchets organiques qui
recommandé aussi de décompacter matériaux tels que le fumier, les
sont décomposés par les organismes
le sol avec une sous-soleuse. pailles, herbes, rameaux broyés
vivants. Pour obtenir un compost
• Travailler perpendiculairement BRF2…)
de meilleure qualité (surtout pour
à la pente, en courbe de niveau :
le maraîchage), trois conditions sont
ainsi on élimine l’érosion et on
nécessaires : 2. BRF : Bois Raméal Fragmenté, permet de
apporte l’eau de façon homogène rentabiliser les rameaux coupés lors de la taille
(voir partie Gestion de l’eau). d’arbres fruitiers
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gestion de la Production agroécologique


Une bonne succession des cultures et des associations in- aussi pour le bénéfice que certaines
telligentes peuvent augmenter la fertilité du sol, améliorer sa d’entre elles apportent comme atti-
structure, sa capacité à retenir l’eau. rer les pollinisateurs ou au contraire
repousser certains ravageurs ou para-
sites.
Rotation de cultures
La Rotation de cultures est un prin- • Optimiser l’occupation du sol Les plantes améliorantes
cipe pratiqué depuis très longtemps dans le temps. (ou légumineuses)
en agriculture traditionnelle. Cela – En maraîchage, on utilisera la
Les améliorantes (légumineuses Pois,
permet de : séquence de légumes : Légumes
fèves, haricots..) ont une particula-
• Éviter la fatigue des sols (alterner Graines (légumineuses) – Lé-
rité de fixer l’azote atmosphérique
les cultures plus ou moins gumes Feuilles ; Légumes racines
dans le sol et le rendent disponible
exigeantes) – Légumes Fleurs
aux autres plantes. Elles doivent être
• Optimiser l’utilisation des éléments du – En céréaliculture, on fera des ro-
utilisées en association et en rotation
sol (les mêmes familles de plantes tations graminées - légumineuses
une fois toutes les trois cultures.
ont les mêmes besoins) (blé dur, orge, avoine, triticale... /
En pratique :
• Arrêter la prolifération des maladies lentilles, pois chiches…).
• Dans un potager, il faut associer
et des parasites de la culture en
toujours une légumineuse (Hiver :
cours (les parasites souvent ne À propos de la jachère, et contraire-
fèves et petits pois ; été : haricots)
passent pas d’une famille à une ment aux croyances qui ont la peau
• En grandes cultures : faire une
autre) dure, la succession des cultures et
année sur trois une culture de
• Améliorer la structure du sol l’exploitation intensive des parcelles
mélange légumineuses - céréales
en utilisant des plantes qui ont des augmentent la fertilité et les rende-
(Vesce-avoine par exemple) ou
systèmes racinaires différents ments, au lieu de les réduire.
lentilles, pois chiches, fèves...
Associations de culture
On pratique les associations pour : • Utiliser de manière optimale les
• Favoriser certains bienfaits des éléments nutritifs du sol .
plantes entre elles • Exemple d’associations positives :
• Stimuler la vie biologique du sol Mais - Haricots - Courges.
• Optimiser l’utilisation dans l’espace
(longueur largeur profondeur). Association des plantes
Certaines plantes ont besoin de aromatiques et des fleurs
tuteur que d’autres peuvent offrir;
Il est souvent associé aux planches
les troisièmes demanderont de
de légumes des plantes aromatiques
l’ombre ou une protection contre
ou fleurs d’abord pour un besoin
le vent.
de consommation (aromates), mais
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Plan de rotation
Légumes-feuilles :
Saison 1 Salade,épinards,céleri.

Légumes (solanacées,cucurbitacées...)
Tomate,poivron,aubergine,courges,
courgettes,pomme de terre, fraises.

Légumineuses :
Petits pois,fèves,haricots.

Légumes racines :
Carottes,navets,betteraves.

Saison 2 Saison 3 Saison 4

Navet local (left essaidi) du Parc national de Poivrons d’Aïn Ghoraba (Parc national de Haricots de Oued el Bared (Parc national de
Babor Tababort Tlemcen), très prisés dans l’ouest algérien Babor Tababort)
10

les Semences paysannes


L’utilisation de semences paysannes reproductibles est le
premier pas vers l’autonomie et la souveraineté alimentaire.
Reproduire ses semences est plus économique que les ache-
ter chaque année.

Variétés de semences paysannes

L
es semences locales sont suf- et nécessitent de démarrer avec des
fisamment adaptées au mi- variétés génétiquement complètes
lieu qu’elles ont besoin de (non hybride et non modifiée). A
moins de traitements, d’arro- l’issue de plusieurs cycles de cultures,
sage et de fertilisation par rapport on arrive à une stabilité de phéno-
aux semences importées, surtout si type.
elles sont hybrides. De ce fait il sera S’il est possible, et même recomman-
toujours préférable d’utiliser les se- dé de gérer ses stocks de semence
mences locales pour les variétés en- pour les variétés maraîchères, il sera
démiques (exemple: olives, figues, difficile de le faire pour les arbres
dattes, certains blés du sud algérien), fruitiers et les céréales, qu’il faudra
ou si ce n’est pas disponible utiliser chercher dans des écosystèmes sem-
les variétés acclimatées (c’est le cas blables, en préférant les variétés rus-
des cultures maraîchères). tiques.
Dans tous les cas et pour une ques- L’initiative d’échanger ses semences
tion d’autonomie en semences et de avec celles d’autres agriculteurs
trésorerie, il préférable de se consti- agroécologiques est recommandée,
tuer son stock de graines pour ses pour augmenter les variétés pro-
propres cultures. duites de chacun et améliorer le ren-
Les techniques de production de dement des cultures.
semences maraîchères sont diverses
11

La Gestion optimisée de l’eau


Les montagnes sont qualifiées de châteaux d’eau de la pla- Aménagements
nète. La pluviométrie dans les reliefs de la bande nord de l’Al-
Pour atténuer la dégradation des sols
gérie varie de 500 à 1500 millimètres par an, elle est favorable
lors de fortes averses, un aménage-
au développement de la végétation forestière et à l’arboricul-
ment des sols à l’échelle de parcelle
ture fruitière.
individuelle s’impose. Le but étant
de récupérer le maximum d’eau sur
place et laisser le moins d’eau dévaler
la pente à grande vitesse, provoquant
des pertes de terre (érosion) et des
glissements de terrain.

Confection de rigoles
L’aménagement le plus simple à réa-
liser est la création de rigoles conve-
nablement localisées. La fonction
de ces rigoles est de récupérer toutes
les eaux de pluie qui s’écoulent en
amont. L’eau s’y accumulant pénètre
plus en profondeur, le surplus res-
tant dans la rigole, permettant ainsi
À gauche et ci-dessus : minibarrages dans le Parc de Babor Tababort pour ralentir l’écoulement aux arbres et autres plantes en aval
des eaux. Des plantations d’arbres en amont permettront d’éviter l’érosion de la terre
d’avoir cette ressource à disposition
sur une plus grande durée et des mi-
A - « GESSOURS » (diguette + déversoirs) COUPE nibarrages de pierre ou autres levées
de cailloux, visant à freiner l’écoule-
Zones à sédimentation progressive ment des eaux.
le sommet des collines,
des montagnes doit Forte pluie
La rigole peut également permettre
toujours être boisé. levée de terre
+ cailloux de protéger une zone de culture
d’une éventuelle inondation lors de
Déversoir fortes précipitations, en réorientant
le flux d’eau.

Aménagement de baissières
Filtration grâce à la
rétention de l’eau La baissière, qui est un fossé perpen-
Zone humide
Déversoir renforcé
avec des pierres
diculaire à la pente, va permettre de
remplir les fonctions suivantes :
12
• Captage et stockage de l’eau
• Recharge des nappes phréatiques
• Évacuation du surplus d’eau
et atténuation des effets des
inondations
• Récupération de la terre végétale
• Réduction ou même l’arrêt de
l’érosion des sols
• Création de microclimats.
L’ouvrage en rapport avec la su-
perficie concernée peut être réalisé
manuellement ou avec engin méca-
nique. Une observation et une lec-
ture minutieuses du paysage sont
importantes avant d’entamer les tra- Niveau ou «triangle égyptien »
vaux d’aménagement de baissière.
Le fossé sera tracé selon des courbes
Une baissière alimentée par les eaux de niveau grâce à un outil très facile
hivernales à Bouzguène à confectionner appelé « niveau ou
triangle égyptien ».

Aménagement de demi-lunes

Jeune plant
COUPE
Position en quinconce

Contre-pente

Eau Baissière construite a la main avec les


agriculteurs de Oued el Bared
Vue du Eau
dessus
0,6 m 3à4m
Le diamètre d’ouverture est
sur une ligne horizontale

Eau

Schémas de réalisation des demi-lunes

Les demi-lunes autour des arbres ments fertiles lors des précipitations.
consistent en un aménagement en Il peut être complété par le creuse-
pierres installées en demi-cercle en ment d’un petit bassin en amont de
aval (voir illustration) de manière à l’arbre.
récupérer l’eau des pluies et les élé-
Demi-lune à l’ancienne à Aïn Ghoraba
13

La Santé des plantes


Les agriculteurs des zones de montagne rencontrent de plus Ne pas exterminer
en plus de maladies dans leurs productions agricoles. La les ravageurs
santé des plantes les a donc particulièrement intéressés, ce-
Il n’est donc pas question d’exter-
pendant, nombre de paysans rencontrés étaient dans une lo-
miner, mais d’installer un équilibre
gique de recette : pour telle maladie ou ravageur, administrer
entre ravageurs et prédateurs. En
tel traitement. Or c’est en amont qu’il faut éviter l’apparition
effet, 20% des insectes sont des rava-
des maladies, par la mise en place d’un écosystème équilibré
geurs contre 80% de prédateurs donc
qui aiderait à maintenir la santé des plantes.
des auxiliaires. Si on élimine toute la
population de ravageurs, on affamera
les prédateurs qui migreront ailleurs
et à la prochaine attaque le problème
de lutte sera à nouveau posé.

Chou brocoli ravagé par la piéride


à Haouch el Bogato

Aït Bouaddou. Préparation du purin à base de feuilles de tomates, efficace pour réguler la En cas d’attaque, il conviendra de
population des pucerons, altises, teigne du poireau et piéride du chou. réduire la population des ravageurs
sans pour autant les exterminer afin
de laisser les prédateurs s’installer.
Mieux vaut prévenir que guérir Pour cela, il faudra maintenir leur
habitat en installant des haies, des
Pour maintenir un verger ou un potager en bonne santé, il convient de favo-
amas de bois et de pierres, des talus,
riser l’équilibre de l‘écosystème faune et flore. Cet équilibre met du temps à
bassins ou marécages... et maintenir
s’installer; pour cela il faudra progressivement (1) bannir la monoculture (2)
aussi une partie raisonnable de leur
effectuer des rotations de cultures (3) des associations de plantes, enrichir la
nourriture, qui n’est autre que ces
biodiversité, et (4) choisir des semences locales rustiques, ainsi que des plants
nuisibles qu’on cherche générale-
du terroir qui sont plus adaptés au contexte de la région. (5) apporter aux
ment à éliminer.
plants des soins à base d’extraits végétaux qui peuvent améliorer leur crois-
sance ainsi que leur capacité à se défendre contre maladies et ravageurs.
14
Quelques ravageurs et le moyen de réguler leur population

Chenilles de noctuelles à Djnan Salim Teigne du poireau Œufs de la piéride du chou

• Collier de glu autour des arbres


Limaces Pucerons )‫(المن‬
fruitiers pour empêcher les
• Prêle-ortie en préventif (silice). • Extrait fermenté d’absinthe, lierre fourmis de défendre les pucerons
• Absinthe, rue, fougère ou limaces en préventif. de leurs ennemis naturels.
en extrait fermenté pur. • Infusion d’ortie, menthe avec un • Purin de feuilles de tomates.
• Piège à limaces avec de la bière. peu de savon, suivi de prêle-ortie
une semaine plus tard. Carpocapse
• Purin d’absinthe en préventif,
LES DIVERSES PRÉPARATIONS Bacillus Thuringiensis en curatif.
Préparation Quantités Procédé Observations
• Lâcher les poulets fermiers.
• Carton ondulé autour du tronc
25g de plantes qui sert de niche pour les larves
Chauffer à 80° pour les
sèches ou 250 g de Les infusions ne se et qui sera enlevé et brûlé avec les
Infusions plantes tendres et à 90°
plantes fraîches dans conservent pas
1L d’eau froide
pour les coriaces. fruits atteints.
laisser macérer quelques
mêmes quantités que heures, mettre sur feu doux Conservation 2 à
Mildiou
Décoctions
pour les infusions et laisser bouillir 20mn. 3 jours • Prêle-ortie-consoude en extraits
Filtrer, diluer à 5%. fermentés.
1kg de plantes • Sarriette, serpolet. Petit lait.
Extraits Touiller le mélange tous les
fraîches pour 10L Le petit lait sert à • Mildiou de la pomme de terre :
fermentés jours 10 mn environ jusqu'à
d’eau + 0.1L de petit diminuer les odeurs Sauge, mauve, thym
(Purins) ce que ça ne mousse plus
lait
• Mildiou de la vigne : Infusions de
1kg de plantes prêle, ortie, décoction d’écorces
Macérations fraîches pour 10L Laisser 2 à 3 jours. Filtrer de chêne, de jeunes rameaux et
d’eau
feuilles de saule.
Les préparations citées dans ce document ont déjà été utilisées et ont donné des résultats
satisfaisants
15
Oïdium
• Prêle-ortie en préventif. Petit lait
(ou lait cru) à 10%. Prêle alternée
avec ail.
• Oïdium du pommier : Extrait
fermenté de rumex.

Chenilles de noctuelles
Si les attaques sont récurrentes :
• installer des filets anti insectes
• pulvériser avec du purin
d’absinthe (‫)الشيبة‬.

Teigne du poireau
• Etaler les poireaux 24 heures par
terre sous le soleil, ça durcit la
peau. La teigne aura du mal à y
pondre ses oeufs.
• Semer des carottes en association
• Décoction de prêle, la prêle est
riche en silice qui forme une
couche difficile à franchir par
un ravageur ou un champignon
parasite.
• Purin de feuilles tomates.

Chenilles piéride du chou


• Très voraces, ces chenilles
ne laissent parfois que les
nervures d’une feuille. Réduire
la population des chenilles
manuellement.
• Pulvériser de la décoction d’ail
• Installer des filets anti insectes
juste après la plantation.

Parcelle d’agroforesterie en terrasse chez Zineb (Rabat)


16

notions d’AGROFORESTERIE

Parc national du Djurdjura, commune de Aït Bouaddou. Verger associant les cultures maraîchères à l’arboriculture fruitière

L’agroforesterie est l’association des arbres et des cultures terme agroforesterie. Ce sont des sys-
et/ou d’animaux sur une même parcelle. C’est une pratique tèmes simples en adéquation avec les
très ancienne, toujours répandue dans nos contrées. Il s’agit moyens disponibles et les capacités
du système “pré-verger” où les arbres fruitiers (principale- des agriculteurs.
ment oliviers et figuiers) sont bien espacés et entre lesquels Cependant, les agriculteurs ont beau-
sont cultivés des céréales/fourrages pour les moissons et/ou coup à gagner en adoptant certaines
pâturage des ovins/bovins durant les saisons d’été-automne. règles d’agroforesterie moderne qui
ont pour objectif l’optimisation des

L’
agroforesterie moderne a Réalité du Terrain ressources du milieu :
montré par de l’expérimenta- et Possibilités • La plantation des arbres en
tion (INRA France) qu’une d’amélioration courbes de niveau (comme déjà
parcelle agroforestière de 100 ha vu plus haut) permettra aussi
pouvait produire autant de biomasse Les activités agricoles au sein des de mieux maitriser les eaux de
(bois et produits agricoles) qu’une parcs nationaux du Djurdjura et ruissellement et en même temps
parcelle de 136 ha, où arbres et des Babors alliant les plantations une meilleure irrigation des arbres.
cultures auraient été séparés, soit un d’arbres, les jardins maraichers et • L’arbre a, durant sa croissance,
gain de 36% ; aussi l’agroforesterie dans certains cas l’élevage, sont des besoin d’être taillé et entretenu
est plus rentable, quel que soit le type activités traditionnelles qui exis- selon des règles bien établies, et en
de culture. taient bien avant la création du particulier à lui donner une forme
17
pour qu’il ne gêne pas les cultures • L’introduction de la culture contribuerait à approvisionner
tout autour. de plantes aromatiques et d’autres régions ou entités pour
• Favoriser la plantation d’arbres médicinales, qui permet de le reboisement dont le pays a tant
de variétés rustique et autochtone diversifier les revenus de besoin.
tout en introduisant la diversité l’agriculteur. • La mise en place d’un programme
des espèces et aussi des arbres qui • La création de pépinières de formation adapté aux besoins
donnent une plus grande variété de plants, arbustes et arbres des agriculteurs des parcs
de produits tels que les fruits, le autochtones en coopérative nationaux, ce qui va leur permettre
bois d’œuvre, le fourrage, les fleurs pour les besoins de densification d’adopter les pratiques agricoles
mellifères, la nutrition fourragère en couvert végétal des régions les plus appropriées aux conditions
(acacia, caroube…). montagneuses, afin de perpétuer du terrain.
les variétés de la flore locale ; cela

Parc national du Djurdjura – Parcelle d’agroforesterie avec de jeunes oliviers au premier plan.
18
Apport de l’arbre en milieu agricole
Amélioration de la quantité
et qualité de l’eau
Vent
Véritables filtres, les arbres limitent une
partie du lessivage des nitrates, réduisant
ainsi la pollution des nappes phréatiques.
Confort de Travail De plus, les systèmes racinaires augmen-
Brise vent tent la réserve utile en eau (exploitable par
Diversité de production
la plante) des sols, améliorent l’infiltration
Environnement favorable
aux des ruissellements et limitent l’évaporation
auxiliaires et polinisateurs
des eaux du sol.
Humidité de l’air

Ombrage Amélioration des niveaux de biodiversité


Apport de matière organique et reconstitution d’un écosystème.
La diversité des espèces ligneuses et
Stimulation des mycorhizes Limitation de l’érosion herbacées améliore la vie du sol ou les
Filet de sécurité des l’éléments lessivés
champignons jouent un rôle majeur. Les
infrastructures arborées fournissent habi-
Pompe à nutriments Meilleure rétention et infiltration de l’eau tat et nourriture pour un cortège floristique
et faunistique important (auxiliaires de
Microclimat Optimisation de l’énergie solaire Biodiversité Fertilité cultures – abeilles – et autres pollinisa-
teurs – gibiers – prédateurs des ravageurs,
etc.…) Elles participent à la restauration et
Lutte contre l’érosion, rétention d’eau, brise-vents, pompe à maintien d’un écosystème à l’échelle des
nutriments, épuration des polluants, amélioration l’activité territoires.
biologique des sols, production d’oxygène...
Stockage du carbone pour lutter contre
le changement climatique.
Amélioration de la production en lage, production de Bois Raméal Fragmenté
optimisant les ressources du milieu Le développement et la généralisation des
(BRF), etc.
pratiques de l’agroforesterie contribuent à
L’amélioration de la production résulte
mieux résister aux effets des changements
d’une meilleure utilisation des ressources Restauration de la fertilité du sol
climatiques 99% de la matière solide de
naturelles du milieu : la lumière, l’eau et les Les arbres restituent de la matière orga- l’arbre provient du CO2 atmosphérique :
nutriments sont prélevés plus efficacement nique via les feuilles qui tombent au sol et les arbres sont donc d’excellents puits de
grâce à un étagement des cultures et des la décomposition des racines, en plus des carbone. Un frêne à maturité par exemple
systèmes racinaires de profondeur variée. branches de la taille qui seront broyées piège 3kg de CO2 par an.
(BRF) puis étalées à la surface du sol (40%
Diversification de la production de la biomasse d’un arbre retourne au sol
des parcelles chaque année). Les racines structurent
Les arbres permettent de diversifier les aussi le sol, facilitant son activité biolo-
services et les sources de revenus sur la gique. Ces apports améliorent donc la ferti-
parcelle : production agricole, bois d’œuvre, lité organique du sol.
bois énergie, fruits, litière, fourrage, pail-
19

L’animal rustique, pilier de la ferme


agroécologique
L’élevage tel qu’il est mené en Algérie est souvent hors-sol, • par rapport au consommateur,
l’alimentation est achetée. Or, l’agroécologie privilégie un l’efficacité énergétique n’est
écosystème équilibré avec le moins d’intrants possible. pas favorable aux productions
animales, sachant qu’il faut 9 kcal
pour produire 1 kg de viande (il
vaut mieux sensibiliser le citoyen à
consommer 9 kilos de céréales ou
protéagineux qu’un kg de viande).

Exemple de l’élevage
du poulet fermier

Parc national de Babor Tababort. Élevage caprin de race locale à Oued el Bared

L
es élevages intensifs de type in-
dustriel ne sont pas très recom-
mandés en agroécologie, pour Nous prenons en exemple la volaille
plusieurs raisons : parce que c’est l’élevage le plus éco-
• Indisponibilité de l’alimentation logique en termes d’efficacité énergé-
fourragère, peu développée ou tique et de prix. Un projet d’élevage
en concurrence avec d’autres de poulet fermier n’exige pas de gros
productions d’Algérie. capitaux pour la mise en place et les
• il est reconnu que les animaux retours sur investissement sont as-
sont de grands consommateurs sez rapides (3 à 6 mois pour la phase
d’eau et destructeurs de la nature d’engraissement ou de ponte).
(notamment lors de surpâturage) Un petit élevage de poulet fermier
en milieu semi-aride. est à la portée de toute famille qui
vit à la campagne. Élever 250 poules
20
maladies virales se propagent très
rapidement et peuvent décimer
tous les non-vaccinés (maladie de
Newcastle, Gumboro, etc.).

Aspects à améliorer
• Recommandation 1 : La parcelle
devrait être divisée en deux par
un grillage, dans laquelle une
rotation est effectuée tous les 2
mois. Profiter des déjections sur
Poules élevées en plein air au Parc National de Chréa parcours pour cultiver (fientes =
engrais azoté). Mettre en œuvre
pondeuses est suffisamment rentable à condition de respecter certaines des rotations maraîchères ( 1
pour apporter un bon complément règles : tout d’abord, réfléchir à la saison volaille / 1 saison légume)
de salaire. Dans la ferme agroécolo- place que va occuper l’élevage parmi
gique, associer élevage et verger est les autres productions de la ferme, et • Recommandation 2 : construire une
profitable aux deux productions, commencer toujours petit. cabane mobile à déplacer après
une culture (moins de risque
Cas d’un élevage de poules en plein air sanitaire, plus d’herbe à pâturer)
au Parc national de Chréa et des clôtures mobiles (les
meilleures sont celles électrifiées).
Cet élevage, visité par les paysans des avec un complément en saison
trois Parcs nationaux, a montré des sèche (été) ou froide (hiver). • Recommandation 3 : le bâtiment
points forts et des points faibles, qui • Le parcours est aménagé de façon doit être suffisamment aéré et
ont été passés en revue : à respecter la charge maximale nettoyé de ses fientes tous les mois
• La zone d’élevage est clôturée, (4 m2/ poulet) et une rotation est (renouveler les litières pour que
de manière à limiter les contacts prévue tous les 2 mois. La volaille le sol soit toujours sec et sain).
avec la faune sauvage (risque de explore intégralement le terrain. Zones de ponte équipées de nids
prédation / maladie, etc.). La zone Les oliviers constituent des abris en nombre suffisant (1 nid pour
est proche de l’habitation, de tous les 5 à 10 mètres : ombrage, 5 poules) et situé dans la zone la
manière à optimiser la surveillance protection, nourriture. plus calme et sèche du poulailler...
et l’entretien du poulailler...). • l’Eau est propre (puits) et Les perchoirs (20 cm par poule)
• L’alimentation est à base de disponible, aussi bien dans le sont situés au plus proche des
céréales locales (issues en partie bâtiment que sur les parcours, zones des trappes d’entrée et sortie
de la ferme). L’éleveur compte surtout en été. Par contre, les des volailles et doivent être prévus
cultiver des compléments azotés ustensiles ne sont pas souvent de manière à ce que les volailles
(pois chiches, lentilles, fèverole nettoyés. ne puissent être en contact avec
ou luzerne). L’essentiel de • Le protocole de vaccination les déjections en dessous (zone
l’alimentation se fait sur parcours, est respecté, sachant que les grillagée sous les perchoirs).
21

La Diversification économique à la ferme

Transformation des produits agricoles


La transformation des produits de la ferme est une bonne plus importante, ils peuvent être
manière de répondre aux aléas du marché et est souvent la transportés dans les foires et les évè-
seule réponse au surplus de production non écoulé dans le nements liés au terroir et à la produc-
marché local ou régional. tion artisanale.
Comme produits de la ferme, citons
la caroube de Aït Bouaddou, qui
peut être valorisé par une transfor-
mation en poudre, très connue pour
favoriser le transit intestinal. Il rem-
place le cacao dans les gâteaux.
En se fédérant en petites unités coo-
pératives, les paysans des villages
pourraient produire des quantités
suffisantes à grande échelle et peser
un peu plus dans le marché et les
circuits de consommation. Ces or-
Présentation de produits transformés lors de la foire des paysans des Parcs nationaux ganisations innovantes sont écologi-
,organisée par le projet ACPP à Tlemcen quement viables, gérées dans des en-
treprises sociales et solidaires, dont le

P
ratiquement toutes les familles • produits laitiers (Beurre, fromage, but ultime est de créer et de partager
paysannes rencontrées dans les smen), la richesse localement.
trois Parcs nationaux transfor- • produits de la ruche,
maient leurs productions : • transformation des céréales (pain,
• Conserves d’olives (à l’huile), fric, mermez, couscous, maârek…),
• confiture de tous les fruits • Caroube en poudre
(melons, abricots, pêches, • séchage de la viande
oranges…), • plantes aromatiques
• jus de fruits en bouteille (raisins, • produits de la ruche…
pommes, tomates, betteraves…), • vente de plants (pépinière).
• séchage des fruits (noix, amandes, Ces produits sont écoulés directe-
raisins, prunes…) et légumes ment dans les mêmes circuits courts
(tomates…), que les produits frais ou alors, comme
Séchage traditionnel de Aït
la figue à Aït Bouaddou,
ils ont une durée de conservation pourCaroube de
la consommation Bouaddou
familiale
22

La Commercialisation en agroécologie

La ferme de Ammi Rachid accueille convives et classes vertes

Le commerce de proximité a tou- Vente à la ferme ture et une offre très diversifiée en
jours existé avec les proches, les gens Les produits sont commercialisés di- termes de produits. C’est cependant
de confiance et les consommateurs rectement aux consommateurs qui l’activité la plus rentable.
avertis. C’est le principe du circuit font le déplacement. Cela suppose Rachid Boutebal, par exemple, fer-
court, qui peut être développé. que la ferme soit accessible et dis- mier à Sidi Serhane et premier par-
Un circuit court, c’est la relation la ponible pour cette activité. Elle ne tenaire de Torba dans les TAFAS,
plus courte possible entre un produc- permet cependant pas d’écouler de accueille du public dans sa ferme très
teur (ou un groupe de producteurs) grandes quantités. diversifiée lors d’évènements orga-
et des consommateurs intéressés par nisés par les gestionnaires du Parc
des produits sains, locaux, de saison. Agrotourisme ou Écotourisme National de Chréa. Avec l’associa-
L’initiative d’un circuit court peut Une variante de cette option est d’as- tion Torba, des visites régulières sont
venir des consommateurs, comme socier aux activités à la ferme une ac- organisées pour voir de plus près un
elle peut venir de producteurs. tivité touristique ou de ferme péda- exemple vivant de ferme intégrée
Les différents modes de circuit court gogique, en recevant des visiteurs et dans son milieu, visiter les différentes
que l’on connaît en Algérie sont (du leur vendre des repas pris sur place. cultures, les animaux d’élevages et
plus simple au plus complexe) : Cela suppose toute une infrastruc- font des parcours dans la montagne
où ils explorent la biodiversité du
Parc. Le midi, les visiteurs (ou éco-
touristes) sont conviés au repas où ils
dégustent la cuisine mettant à contri-
bution les produits de la ferme. Ils
peuvent même en acheter en repar-
tant légumes, fruits, galettes, œufs,
poulet fermier, petit lait ou fromage.
Banderole de présentation du marché paysan organisé par Torba à Zéralda (Alger)
23
Marché de proximité (souk) a été initié dans le cadre du projet
ACPP au centre-ville de Tlemcen,
le producteur ou un groupe de pro-
qui a attiré de nombreux consom-
ducteurs peuvent louer une table et y
mateurs de la ville, et qui a fini par
vendre leurs produits frais ou conser-
séduire les autorités locales, qui sou-
vés. Les producteurs de Oued Bared
haitent pérenniser ce genre d’activi-
(Sétif ) ont décidé de s’engager dans
té du cycle court. Les communautés
cette voie.
paysannes de la commune de Aït
Bouaddou, qui ont suivi les sessions
Marché paysan de formation, ont souhaité créer
Ici ce sont les producteurs qui s’or- une association ou coopérative de
ganisent entre eux pour créer un lieu producteurs et instaurer un marché
de vente commun pour diversifier la paysan susceptible de rayonner dans
vente des produits et attirer plus de la région.
consommateurs. Un marché paysan

Tafas (Tadhamoun maâ Fellah Assli)


Ce concept est initié en Algérie par Pour les modalités pratiques, les
l’Association Torba (l’équivalent consommateurs réunissent une cer-
de l’AMAP en France) : ce sont taine somme au départ pour payer
des consommateurs qui prennent les frais d’organisation (balances,
contact avec un (ou plusieurs) pro- cageots, tables…) et pour payer la
ducteur, pour s’entendre avec eux production livrée au fur et à mesure.
pour lui (leur) acheter toute sa pro- Chaque mois, les consommateurs
duction maraichère (et fruitière, dé- payent une avance qui correspond
rivés du lait, œufs, viandes, etc.), qui à la somme livrée pour 4 couffins.
devrait être la plus diversifiée pos- L’approche Tafas a été présentée à des
sible. Les avantages pour le produc- paysans du Parc national de Tlemcen
teur sont qu’il assure un débouché à (Ain Ghoraba) lors d’une rencontre
la totalité de sa production et qu’il organisée avec des consommateurs
la vend quasiment au prix du mar- intéressés, représentés par l’associa-
ché (et non au prix de gros) et avoir tion locale “Forêt-modèle”. L’ad-
une meilleure marge à la vente. Les joint-maire de la commune de Aïn
avantages pour les consommateurs Ghoraba a assisté à cette rencontre,
sont qu’ils s’assurent de l’origine des et a assuré l’assistance de son intérêt
produits (qui sont contrôlés par les pour relancer l’activité agrotouris-
consommateurs regroupés en collec- tique dans sa région.
tif ou association). Les produits sont
frais et cultivés selon un cahier des
Fromage artisanal de Mme Bouzidi Ouardia, présenté lors
de la foire des paysans des Parc nationaux, organisée par
charges précis.
le projet ACPP à Tlemcen
24

Distribution hebdomadaire de couffins à Ouled Fayet (Alger)

Système de garantie participative • Vente aux restaurants et aux


cantines des écoles : Cette option
L’association Torba a mis au point un livrer d’autres produits, qu’ils
reste à étudier.
système de garantie de la provenance proviennent du voisinage ou autre.
• Vente par internet : Application
et la qualité des produits. C’est une • La non-utilisation de pesticides
qui permet au producteur
démarche collective (producteurs, ou engrais chimiques. Les
d’annoncer la quantité de
consommateurs, techniciens…) consommateurs n’ont pas besoin
produits mis à la vente et aux
consistant à visiter et évaluer les pro- de recourir à un laboratoire de
consommateurs de commander
ducteurs de façon inopinée par rap- contrôle. Ils veillent simplement
en temps réel et récupérer la
port à deux critères importants : à vérifier que les productions
marchandise à un endroit précis
• La provenance des produits, qui obéissent aux règles de bonnes
(voir site https://www.cagette.
ne doivent provenir que de(s) la pratiques (fertilisation organique
net). Cette mise en relation
ferme(s) conventionnée(s). Le en quantité, pas de monoculture,
peut être prise en charge par un
producteur déclare avoir semé utilisation de semences locales
jeune porteur de projet, chargé
ou planté une liste de produits adaptées…).
d’organiser tout le circuit.
d’été ou d’hiver et ne saurait
25

Conclusion

Face aux défis qui sont déjà là et qui vont s’accélérer (crises plantes et l’agroforesterie. De même
économique et sanitaire, réchauffement climatique, perte ont été discutés les moyens à mettre
de la biodiversité…), la transition agroécologique s’impose en œuvre pour transformer et valori-
comme une nécessité incontournable pour les populations ser les surplus et les commercialiser
paysannes en zone de montagne. Il s’agit là d’un réflexe de dans des circuits courts.
survie pour notre souveraineté alimentaire, pour la préserva- A l’issue de ces sessions de vulgari-
tion des ressources naturelles et celle d’un biotope unique sation/formation, apparaît claire-
pour les générations à venir. ment un besoin d’accompagnement

L
approfondi et de suivi/conseil, idéa-
es actions de vulgarisation au- ciennes/traditionnelles et parfois lement par des animateurs ruraux,
près des communautés pay- innovantes ont été présentées et comme celles et ceux formés dans le
sannes de trois Parcs natio- discutées avec les paysans, tels que la cadre de ce projet ACPP. Ce suivi est
naux ont permis de mettre en gestion de la fertilité organique du à faire en temps réel sur de petites
évidence tout le potentiel agroé- sol, l’importance des semences pay- surfaces, afin que les paysannes et
cologique que recèlent ces régions sannes, l’aménagement et la récupé- paysans puissent mesurer et compa-
montagneuses. Des techniques an- ration des eaux pluviales, la santé des rer les résultats de leur action, même
si l’on sait que l’agroécologie est une
approche qui donne des résultats sur
le long terme. Des parcours de pro-
fessionnalisation seraient par la suite
intéressants à mettre en place en ma-
raîchage, élevage (poulet fermier,
élevage ovin/caprin, apiculture), ar-
boriculture fruitière (taille, greffage
d’amandiers, pommiers, noyers…) et
gestion économique d’exploitation
(calcul de marge).
Une chose est sûre à l’issue du projet
ACPP, c’est que les paysannes et pay-
sans ont été convaincus que l’agroé-
cologie dans les zones de montagne
est une voie économique d’avenir.
Pause-discussion à l’ombre tutélaire d’un figuier
26

Références
• Agrisud International, 2010. Guide : • Rabhi P., 2012. Le manuel des jardins Webographie
l’agroécologie en pratiques. Ed. Agrisud, agroécologiques : Soigner la terre, mieux
• http://terre-humanisme.org/agroecologie/
188 pages nourrir les hommes. France : Actes Sud/
philosophie
• FUKOAKA Masanobu., la révolution d’un Terre et Humanisme, 192 pages.
• http://www.osez-agroecologie.org/
seul brin de paille, 203 pages • SOS Faim, 2011. L’agroécologie, une
pratiques-agroecologiques?
• Collectif Torba. Torba, une expérience solution ? Défis Sud N° 103, 28 pages.
• http://www.villaverde.fr/conseil-jardinerie-
agroécologique algérienne. Arak Editions, • Perrine et Charles Hervé-
potager-association-culture/
70 pages Gruyer.,Permaculture, Guérir la terre et
• www.agrisud.org
• Mollison B., Holmgren D., 1986. Nourrir les hommes, 365 pages.
• http://www.djamel-belaid.fr/
Permaculture 1 : une agriculture pérenne
• http://les.cahiers-developpement-durable.
pour l’autosuffisance et les exploitations de
be/vivre/03-energie-pistes-et-solutions/
toutes tailles. Paris : Debard, 186 pages.

Formation sur le compostage à Aït Bouaddou (Parc national du Djurdjura)


1ère EDITION DE LA
FOIRE DES PAYSANS 21 - 22
DES PARCS NATIONAUX
3 Parcs nationaux des plus prestigieux seront présents : • Le
sept. 2019
PN du Djurdjura, réserve de la biosphère • Le PN de Tlemcen,
réserve de la biosphère • le PN de Babor -Tababort
Le Grand bassin, Tlemcen

Sous le patronnage de Monsieur le Wali de Tlemcen et avec le concours de la


DGF, du Parc national de Tlemcen et de la commune de Tlemcen

Les aires protégées, levier du développement durable.


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nationaux vous invitent à CULTUREL Grand Bassin, avec les
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saveurs d’une diversité de Tlemcen. nationaux, les communes et les
produits locaux issus d’une membres des associations qui
agriculture traditionnelle et ont tous à coeur la préservation
écologique respectueuse de et la valorisation de la riche
l’environnement. biodiversité de nos terroirs.
projet d’appui aux communautés paysannes
des Parcs nationaux – ACPP

C
e projet est une action financée par la Commis- la biodiversité. Pour atteindre cet objectif, le projet
sion européenne dans le cadre du Programme propose des activités visant, notamment :
d’actions pilote pour le développement rural
• Le maintien et la promotion d’une agriculture tra-
et l’agriculture (PAP-ENPARD, programme
ditionnelle basée sur des pratiques agroécolo-
de coopération entre le gouvernement algérien et
giques ;
l’Union européenne). Il est initié par l’association de
Réflexion d’Échanges et d’Actions pour l’Environne- • Une diversification des activités paysannes à tra-
ment et le Développement (AREA ED) en partenariat vers le tourisme rural chez l’habitant, la valorisa-
avec l’association BEDE et l’association TORBA et tion des produits issus de l’agriculture paysanne
avec la collaboration de la Direction générale des fo- et de l’artisanat, le développement de nouvelles
rêts, l’Institut national de la recherche agronomique activités à impact environnemental nul ;
d’Algérie, le Parc national de Tlemcen, le Parc na- • La participation et l’implication des communautés
tional du Djurdjura et la Conservation des forêts de paysannes dans la gouvernance des Parcs natio-
la wilaya de Sétif ainsi que les communes de Ain naux et la gestion de la conservation ;
Ghoraba (Tlemcen), d’Ait Bouaddou (Tizi Ouzou), de
Babor et d’Oued Bared (Sétif). • L’amélioration des connaissances sur la biodiver-
sité cultivée des Parcs nationaux et sa protection
Le projet a pour but de concilier, dans les Parcs na- et valorisation.
tionaux, les activités humaines et la conservation de

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